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PACP Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des comptes publics


NUMÉRO 113 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 22 octobre 2018

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Nous tenons la 113e séance du Comité permanent des comptes publics en ce lundi 22 octobre 2018.
    Cet après-midi, nous nous penchons sur le Rapport 3, L'administration de la justice dans les Forces armées canadiennes, des rapports du printemps 2018 du vérificateur général du Canada.
    Je vous rappelle que notre séance d'aujourd'hui est télévisée; je vous demanderais donc de bien vouloir régler votre téléphone cellulaire ou tout autre appareil de communication en mode silencieux ou vibratoire, ou à tout autre réglage causant le moins d'interruptions possible.
    Nous avons l'honneur de recevoir aujourd'hui M. Jerome Berthelette, vérificateur général adjoint, M. Andrew Hayes, avocat général principal, et Mme Chantal Thibaudeau, directrice, du Bureau du vérificateur général; ainsi que Mme Jody Thomas, sous-ministre, et Geneviève Bernatchez, juge-avocate générale pour les Forces armées canadiennes, du ministère de la Défense nationale.
    Nous allons vous laisser la parole, monsieur Berthelette, pour que vous fassiez un exposé au nom du Bureau du vérificateur général.
    Je vous remercie, monsieur le président, de m'offrir l'occasion de traiter de notre rapport du printemps 2018 sur l'administration de la justice dans les Forces armées canadiennes.
    Je suis accompagné aujourd'hui de M. Andrew Hayes, qui est le principal responsable de l'audit et qui est maintenant notre avocat général principal. Chantal Thibaudeau, directrice de l'audit, m'accompagne également.
    Le système de justice militaire canadien fonctionne en parallèle avec le système civil de justice. Le but du système de justice militaire est le maintien de la discipline, de l'efficience et du moral au sein des Forces armées canadiennes. Comme le système civil, le système militaire doit être juste et respecter la primauté du droit.

[Français]

     Dans le système de justice militaire, les accusations peuvent être jugées par procès sommaire ou en cour martiale. Les circonstances de chaque cause, y compris la nature des accusations et le grade de l'accusé, détermineront le type de procès. Dans certains cas, l'accusé peut choisir le type de procès.
    Un procès sommaire vise à rendre justice de façon rapide et équitable en cas d'infraction mineure. Un commandant ou un autre officier autorisé préside ce type de procès. Une cour martiale est un tribunal officiel présidé par un juge militaire. Une cour martiale suit en grande partie les mêmes règles que celles des procédures criminelles appliquées dans les tribunaux civils.
    L'audit visait à déterminer si les Forces armées canadiennes avaient administré le système de justice militaire avec efficience, notamment si elles traitaient les causes de justice militaire en temps opportun.
    Nous avons conclu que les Forces armées canadiennes n'avaient pas administré le système de justice militaire avec efficience.

[Traduction]

    Nous avons constaté qu'il y avait des retards tout au long des étapes du processus de justice militaire, et que les Forces armées canadiennes n'avaient pas établi les normes de temps pour certaines étapes, ce qui a favorisé les retards. Ainsi, nous avons constaté qu'il avait fallu beaucoup de temps pour déposer les accusations. Concernant les cours martiales, il a fallu beaucoup de temps pour renvoyer les causes aux procureurs, décider de porter la cause devant la cour et fixer la date de l'audience.
    La Cour suprême du Canada a établi le principe voulant que la plupart des procès doivent se tenir dans un délai de 18 mois après le dépôt des accusations. Pour les 20 causes jugées devant une cour martiale que nous avons examinées, nous avons constaté que la durée moyenne de traitement avait été de 17,7 mois après le dépôt des accusations. Pour neuf de ces causes, la durée de traitement a dépassé 18 mois.
    Pendant l'exercice 2016-2017, une cour martiale a abandonné des accusations en raison de retards, et les retards figuraient parmi les motifs invoqués par des procureurs militaires pour avoir abandonné neuf autres causes. La population canadienne s'attend à ce que les forces armées soient disciplinées et que les comportements inacceptables soient jugés rapidement. La Cour suprême du Canada a aussi souligné l'importance d'administrer la justice promptement.
    Nous avons également remarqué que les changements fréquents d'affectation des avocats militaires dans divers secteurs de services juridiques ont empêché les procureurs et les avocats de la défense d'acquérir l'expertise et l'expérience nécessaires pour bien s'acquitter de leurs fonctions.
    De plus, nous avons constaté que le Cabinet du juge-avocat général n'avait pas surveillé efficacement le système de justice militaire. Les examens périodiques requis du système n'avaient pas été faits, et les systèmes et les méthodes de gestion de cas étaient inadéquats. Certaines unités militaires tenaient leurs propres systèmes de suivi des cas, lesquels ne saisissaient pas toute l'information nécessaire. D'autres unités n'avaient aucun mécanisme ou processus pour assurer le suivi et la surveillance de leurs cas de justice militaire.
(1535)

[Français]

     Nous avons constaté que les procureurs avaient rarement documenté les motifs de leurs décisions de porter une cause en cour martiale. Une telle décision nécessite un niveau élevé de discrétion professionnelle, et de mauvaises décisions peuvent miner la confiance accordée au système de justice militaire.
    Sans information sur les motifs pour lesquels les procureurs décident de porter une cause en cour martiale, le directeur des poursuites militaires ne peut surveiller et démontrer comment les procureurs ont appliqué les principes juridiques et ont exercé leur discrétion professionnelle dans chaque cause.
    Nous avons aussi constaté que le Service canadien des poursuites militaires n'avait par établi de processus clairs et bien définis pour appliquer sa politique en matière de poursuite. La délégation des pouvoirs des fonctions en matière de poursuite n'était pas toujours documentée, et la procédure d'attribution des causes et des pouvoirs décisionnels n'étaient pas claire.
    La Défense nationale a accepté nos recommandations. Le ministère a établi un plan d'action qui contient les étapes et un échéancier de mesures visant à donner suite à nos recommandations. Nous avons noté que, selon le plan d'action, certaines mesures et étapes établies par la Défense nationale devraient déjà avoir été achevées.
    Monsieur le président, je termine ainsi ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du Comité.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Berthelette.
    Nous entendrons maintenant le ministère de la Défense nationale.
    Madame la sous-ministre, vous avez la parole.
    Bonjour, monsieur le président et distingués membres du Comité. Je suis heureuse de témoigner devant vous aujourd'hui aux côtés de la commodore Geneviève Bernatchez, juge-avocate générale. Elle n'aime pas que je le souligne, mais la commodore Bernatchez est la première femme à occuper les fonctions de juge-avocate générale au Canada, poste auquel elle a été nommée en juin 2018.
    Avant de commencer, je tiens à remercier M. Ferguson, M. Berthelette et leur équipe pour le travail acharné et leurs conseils sur l'administration de la justice dans les Forces armées canadiennes.

[Français]

    Je suis également reconnaissante de l'intérêt du Comité et de sa contribution à l'amélioration de la justice militaire.
    Le système de justice militaire est un élément important de l'application des normes élevées auxquelles se conforment les Forces armées canadiennes.

[Traduction]

    Un système de justice militaire efficace contribue au maintien de la discipline, de l'efficacité et du moral au sein des Forces armées canadiennes. Cela signifie que ces dernières sont plus à même de défendre le Canada et la population canadienne, au pays ou à l'étranger, en temps de paix ou de conflit.
    Le rapport du vérificateur général a cerné les aspects de l'administration militaire que nous devons perfectionner, et nous nous engageons à les améliorer. Nous reconnaissons que certaines des observations du vérificateur général cadrent avec des recommandations antérieures figurant dans d'autres rapports qui n'ont pas été pleinement mises en oeuvre. Nous prenons dès aujourd'hui les mesures qui s'imposent.

[Français]

     La commodore Bernatchez met actuellement en oeuvre un plan d'action afin de s'assurer que chacune des recommandations du vérificateur général est appliquée et que des changements significatifs en découlent.

[Traduction]

    Cela permettra aux Forces armées canadiennes de renforcer leur système de justice militaire et de veiller à ce que le juge-avocat général exerce une surveillance adéquate de ce système. Aujourd'hui, je me concentrerai sur les améliorations apportées à ces aspects et les façons dont nous continuons de les perfectionner. Je serai brève afin de laisser plus de temps pour les discussions.

[Français]

     Le vérificateur général s'est dit préoccupé par le fait que certains de nos procureurs et avocats de la défense aient changé de poste trop rapidement.
    La commodore Bernatchez a agi rapidement pour régler ce problème en prolongeant les affectations actuelles jusqu'à la durée recommandée de cinq ans.
    Dorénavant, ce sera la durée minimale pour ces postes.

[Traduction]

    Nous convenons également que le Cabinet du juge-avocat général n'a pas toujours eu l'information nécessaire pour assurer une surveillance adéquate du système de justice militaire. Nous remercions le vérificateur général d'avoir porté attention à ce point important. Depuis 2017, nous travaillons à un système électronique de gestion et de suivi des cas, à savoir le Système d'administration de la justice et de gestion de l'information, ou SAJGI. Ce système suivra les dossiers relatifs à la justice militaire, dès le tout premier rapport signalant une infraction alléguée, pendant l'enquête et la mise en accusation, jusqu'à ce qu'une décision soit rendue à la suite d'un procès et que l'examen connexe soit réalisé au cours des procès sommaires et des procès devant la cour martiale.
    Le SAJGI sera utilisé par les principaux intervenants du système de justice militaire, des enquêteurs aux personnes qui déposent des accusations en passant par les officiers présidents, les autorités de révision et de renvoi, et les conseillers juridiques, sans oublier les procureurs et les avocats de la défense. Ils mettront à jour le SAJGI à chaque étape du processus, de sorte que le suivi des dossiers pourra être effectué en temps réel. Le SAJGI est presque achevé. Nous entamerons ensuite les essais pilotes connexes au début de 2019. Nous sommes sûrs que le système renforcera la capacité du juge-avocat général de surveiller le système de justice militaire et son administration.
(1540)

[Français]

     Nous sommes aussi sur le point de finir d'examiner les exigences en matière de temps pour chaque étape du système de justice militaire. Nous le ferons au début de l'année prochaine.
    De plus, nous établirons de nouvelles normes claires, conformément à la recommandation du vérificateur général. Ces normes respecteront les règles d'équité et les exigences juridiques.

[Traduction]

    Par ailleurs, elles seront intégrées au SAJGI afin que les principaux intervenants du système de justice militaire soient poussés à faire continuellement avancer les dossiers. Si une personne n'est pas en mesure de satisfaire aux normes de temps, le système lui demandera de préciser les raisons du retard. La personne nous indiquera alors ce qui a causé le retard, et nous pourrons trouver une façon de remédier au problème.
    Ces normes favoriseront aussi la divulgation des renseignements en temps opportun aux personnes accusées d'une infraction. Ces mêmes normes de temps seront intégrées au système de gestion du rendement que nous élaborons. Nous saurons donc lorsque nos normes ne sont pas respectées. Nous connaîtrons en outre les raisons pour lesquelles elles ne l'ont pas été. Ces renseignements nous permettront d'assurer l'amélioration continue du système de justice militaire.

[Français]

    En effet, notre travail ne prendra pas fin dès que nous aurons traité les recommandations de M. Ferguson.
     Nous continuerons de bâtir sur l'excellent travail accompli par son équipe et par lui-même au moyen d'examens officiels périodiques du système de justice militaire.

[Traduction]

    Nous donnerons suite aux renseignements découlant de ces examens. Les changements que nous apportons à notre façon de gérer nos effectifs, nos communications et nos dossiers de cas renforceront le système de justice militaire. De plus, nous assurerons une surveillance appropriée et pourrons répondre aux besoins des Forces armées canadiennes.
    C'est avec grand plaisir que nous discuterons de la question en détail avec vous cet après-midi et que nous répondrons à vos questions. Merci.
    Merci beaucoup, madame Thomas.
    Nous entamerons maintenant le premier tour de questions.
    Madame Mendès, vous disposez de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie de comparaître.
    Pardonnez-moi, je suis en train d'essayer d'organiser mes notes. J'en ai pris quelques-unes au cours de vos témoignages.
    Monsieur Berthelette, vous avez constaté que les procureurs avaient rarement documenté les motifs de leurs décisions de porter une cause en cour martiale. Pourquoi agiraient-ils de la sorte? Il me semble que dans le système juridique, peu importe celui dont il s'agit, le fait de ne pas documenter son dossier constitue presque immédiatement un motif de rejet. Quelles justifications vous ont-ils fournies à cet égard?
    Je demanderai à M. Hayes de répondre à la question.
    Nous voulions voir la documentation que les procureurs préparaient pour justifier leurs décisions afin de pouvoir évaluer les délais relatifs à ces décisions. Si vous voulez savoir pourquoi ils n'ont pas documenté leurs cas, la juge-avocate générale pourrait peut-être vous répondre.
    Je peux toutefois souligner que l'exercice du pouvoir discrétionnaire par les procureurs constitue une facette importante de leur travail. Aux fins de supervision et de surveillance, il importe que le juge-avocat général — et je suppose que dans ce contexte, je parle en fait du directeur des poursuites militaires — comprenne comment les décisions ont été prises, pour quels motifs, et quand elles l'ont été pour pouvoir savoir quelles améliorations peuvent être apportées.
    Précisément. Je comprends ce point. Oui, la commodore Bernatchez voudrait peut-être répondre.
(1545)
    Il y a un léger problème avec le son du micro de M. Hayes, de sorte qu'il est presque impossible pour les interprètes de l'entendre.
    Monsieur Hayes, je propose que d'ici à ce que le problème soit réglé, vous empruntiez le micro de Mme Thibaudeau ou de M. Berthelette. Je pense que tout le reste fonctionne bien.
    Poursuivez, madame Mendès. Cette intervention n'a pas empiété sur votre temps.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

    Commodore Bernatchez, vous pourrez probablement me répondre.
    Comment les procureurs ont-ils pu justifier le manque de traces de prises de décision? Il me semble un peu étrange, dans le milieu juridique, qu'on ne garde pas de traces de décisions qui, ultimement, auront des répercussions sur la vie d'un individu.
    Quelle raison a donc été donnée pour ne pas garder de traces de ces prises de décision?
     Tout d'abord, je veux indiquer que les commentaires qui ont été faits par l'équipe de vérification et dans le rapport du vérificateur général pointent en direction d'une lacune sur le plan de la documentation de ces prises de décision.
    Je veux assurer au Comité que l'équipe du procureur des poursuites pénales militaires prenait ses décisions et les justifiait de façon régulière. Comme je vous le disais, c'est une de leurs obligations.
    Le problème qui a été porté à l'attention du directeur des poursuites militaires, et qui est tout à fait fondé, est que ce n'était pas fait de façon documentée, stricte et systématique dans chacun des cas.
    Le directeur des poursuites militaires a immédiatement réagi à ce commentaire, à cette observation. Il a émis des directives, l'été dernier, pour s'assurer que, chaque fois qu'une prise de décision est faite par l'un des procureurs au dossier, elle est enregistrée par le procureur affecté au dossier.
    Je veux aussi porter à l'attention du Comité le fait que le directeur des poursuites militaires a également fait une révision complète de toute la suite des politiques qui s'adressent à ses procureurs pour s'assurer qu'il y avait une réponse immédiate aux commentaires et aux observations qui avaient été faites par le vérificateur général.
    J'ai ici, en anglais, la révision entière des politiques. J'essaie de la traduire en parlant.
    Allez-y. Vous pouvez le lire en anglais.

[Traduction]

    Le directeur des poursuites militaires a mis à jour l'ensemble des politiques en ce qui concerne le changement des mécanismes de nomination des procureurs afin de clarifier les limites du pouvoir des procureurs dans un dossier et d'indiquer devant quelles instances les accusations pourraient être déposées. Il a en outre examiné toutes les politiques qui précisent le délai de divulgation de l'information à l'accusé, un point soulevé avec raison dans les rapports du vérificateur général.
    Il a aussi instauré une politique afin d'améliorer la communication entre ses procureurs et les enquêteurs à toutes les étapes du dossier, ainsi que des politiques concernant les délais précis pour la date de tenue de la cour martiale, un problème également relevé dans le rapport du vérificateur général.
    Ainsi, il a non seulement corrigé ce qui a été

[Français]

soulevé par le vérificateur général, mais il est allé plus loin en faisant une vérification complète de ses politiques pour s'assurer qu'elles étaient mises à jour et à niveau.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Si vous le voulez bien, madame la sous-ministre, je vous référerais au paragraphe 3.73, à la page 17 du rapport du vérificateur général, lequel porte sur la supervision de l'administration elle-même, où on souligne l'insuffisance des examens effectués par le Cabinet du juge-avocat général.
    Nous avons une nouvelle juge-avocate générale en la personne de la commodore Bernatchez, que je félicite. Quelle incidence concrète l'absence ou l'insuffisance des examens ont-elles eue sur l'administration de la justice pour le personnel qui doit composer avec le système? S'agit-il d'un problème de ressources humaines? La juge-avocate générale manquait-elle de personnel? Quel est le problème?
    Je vais certainement demander à la juge-avocate générale d'intervenir. Je crois que la question était que nous pouvons toujours utiliser plus de gens. Il ne fait absolument aucun doute, et je pense que la commodore Bernatchez elle-même le dirait, qu'elle aimerait avoir plus de gens, mais l'essentiel du problème était le non-respect de la politique, l'absence d'examen de ces politiques et l'absence de suivi périodique garantissant la documentation convenable des causes.
    En conséquence, dans un cas au moins, nous n'avons pas engagé de poursuite en raison des retards, puis il y a eu des problèmes avec neuf autres causes. Cela ne semble pas beaucoup, mais compte tenu du nombre de poursuites au cours d'une année à l'intérieur des Forces armées canadiennes, les effets sont bien réels. Si quelqu'un subit un déni de justice en raison d'un problème procédural, c'est problématique pour les Forces armées canadiennes tant sur le plan du maintien de la discipline militaire générale que sur le plan de la réputation.
    Plutôt que simplement chercher à avoir plus de gens, la juge-avocate générale a réalisé un examen complet des politiques et mis en œuvre un nouveau système de suivi — essentiellement, le système de suivi des cas. Elle rend des comptes au chef d'état-major de la Défense, à moi ou au ministre, en fonction de la situation. Maintenant, nous pouvons intervenir, des questions peuvent être posées, les échéanciers peuvent être évalués et nous pouvons nous assurer que le système est convenablement administré.
(1550)
     Merci beaucoup, madame Thomas. Nous avons dépassé le temps d'une minute.
    C'est maintenant à M. Nuttall.
    Vous avez sept minutes.
    Merci à l'équipe du Bureau du vérificateur général.
    Habituellement, je commence par poser des questions aux gens du Bureau du vérificateur général, mais je vais plutôt m'adresser directement à la sous-ministre.
    Ce que je trouve frustrant de la réponse au rapport, c'est qu'il a beaucoup de verbes au futur, et j'espère qu'on a la volonté de vraiment faire ces choses, car cela n'a pas été le cas dans le passé. Comme vous l'avez dit, ce sont des éléments que les vérifications antérieures ont constamment soulignés.
    Ce qui me rend perplexe, c'est que... Je vais commencer par ceci. Quel est l'échéancier cible pour une cause particulière? Je comprends que les causes peuvent varier beaucoup en complexité, du plus simple ou plus complexe, mais j'aimerais un exemple d'échéancier cible. Avez-vous des cibles pour diverses infractions?
    La juge-avocate générale vous répondra de façon plus détaillée, mais la réponse à cela, c'est oui, tout à fait.
    Je vais répondre à votre question à propos des verbes au futur — de ce que nous disons que nous ferons. La plupart sinon tous les éléments du plan d'action sont en cours. Nous utilisons le futur, car ils n'ont pas encore été réalisés. Nous sommes ravis de présenter des rapports au Comité, et c'est ce que nous faisons, quand des éléments du plan d'action de la direction sont complétés. Bon nombre de ces choses se sont amorcées avant la fin de la vérification, car la commodore Bernatchez avait constaté qu'il fallait apporter des changements. Nous avons accepté toutes les recommandations parce que nous sommes d'accord.
    En ce qui concerne les choses que nous avions acceptées, mais qui n'avaient pas été faites antérieurement, nous avons au ministère un nouveau mode de surveillance. Nous recourons à l'analyse des données pour faire le suivi comme nous ne l'avons jamais fait dans le passé. Le ministère reconnaît que nous n'avons pas toujours fait le suivi de vérifications antérieures et réalisé les choses que nous avions dit que nous ferions.
    Avant que nous poursuivions, je dirai que c'est bien beau, mais faire le suivi du temps qu'il faut pour le processus est assez élémentaire.
    Nous en convenons.
    C'est le système de justice des Forces armées canadiennes...
    Oui.
    ... du meilleur pays au monde.
    Oui. Nous sommes d'accord.
    Comment...?
    Je ne peux pas parler pour les personnes qui ont occupé mon poste avant moi, et je sais que cela dérange des gens.
    Je comprends cela, et je respecte tout à fait cela. Il y a bien des choses dont je ne peux parler, parce qu'elles viennent de gouvernements antérieurs, et ainsi de suite, et même de gouvernements de mon propre parti.
    Au bout du compte, vous n'êtes pas là pour vous représenter vous-même. Vous représentez le ministère. Quand je regarde cela, c'est... Nous suivons des choses si simples dans notre quotidien, mais nous ne pouvons pas faire le suivi de quelque chose d'aussi important que quand la Cour suprême détermine un échéancier et déclare que c'est l'échéancier à respecter pour que la justice puisse suivre son cours comme il se doit. On ne peut pas faire le suivi, au ministère, du temps qu'il faut pour faire cela globalement — il aura fallu que le Bureau du vérificateur général le fasse —, et on ne peut pas faire le suivi de chaque étape du processus afin de cerner nos lacunes, préciser ce que nous devons améliorer et souligner les cibles que nous avons déjà atteintes. Nous sommes en 2018 et nous disons que nous allons mettre en place de nouveaux systèmes; nous avons un formidable système que nous allons mettre en place.
    Je ne crois pas que c'est un nouveau système qu'il faut, pour ce dont vous parlez. Je pense que c'est en fait la discipline qu'il faut imposer aux membres du personnel, à leurs supérieurs et à leurs subordonnés. Il faut les tenir responsables. Que nous parlions de resserrer la discipline dans le système de justice des Forces armées canadiennes dépasse l'entendement.
    Il devrait s'agir de l'étalon de référence.
(1555)
    Oui. Rien de ce que vous avez dit n'est faux. Ce n'est pas que nous en sommes incapables. C'est que nous ne l'avons pas fait. Il n'y a pas, au sein de l'organisation du juge-avocat général, une méthode systématique qui uniformise tout ce qui se fait. Quand les gens font les choses manuellement, il y a des oublis et la reddition de comptes ne se fait pas uniformément.
    D'après moi, il ne faut pas présumer que nous n'avons pas été capables de le faire. C'est que cela ne s'est pas fait de façon uniforme. La raison pour laquelle nous mettons en place un système, c'est que nous sommes en 2018 et que nous croyons que cela doit se faire au moyen d'un système de gestion des affaires. Nous devrions pouvoir faire le suivi des données, et nous devrions avoir divers points de données qui ne se font pas manuellement, mais qui misent plutôt sur une méthode sophistiquée, de sorte que nous puissions comprendre où se trouvent les goulots d'étranglement du système et ce que nous devons améliorer. En ce moment, la juge-avocate générale ne peut déceler les faiblesses systémiques qu'en devinant. Nous avons besoin de données à cette fin.
    Vous modifiez la technique de traitement des données. Vous ne changez pas... Rien ne dit ici que nous devons changer la formation du personnel — et non le personnel — pour veiller à ce que le personnel le fasse vraiment. Vous parlez des systèmes plutôt que des échecs et des choses que les gens doivent mieux faire. C'est bien beau de dire: « Il y a une belle chose très grosse et brillante qui va tout changer. » Cela ne va arriver que si les données saisies sont bonnes.
    En effet. La production des rapports obligera les gens à entrer l'information dans le système. Si nous constatons que des membres du personnel ne font pas ce qu'ils sont censés faire, la juge-avocate générale devra évidemment s'occuper de ces personnes.
    Ces gens n'ont peut-être jamais eu la formation nécessaire à cette fin. Cela n'a peut-être pas été exigé dans le passé. On dirait qu'il n'y avait pas de cibles concernant la formation des gens pour l'entrée des données. C'est si simple que n'importe où, dans les plus petites entreprises au Canada, ce genre de choses seraient en place.
    Nous sommes tout à fait d'accord, et c'est la raison pour laquelle nous changeons le processus.
    D'accord. Je vais terminer sur ceci. C'est cela que je voulais approfondir.
    On lit dans le rapport:
Nous avons constaté des retards tout au long des étapes du processus de justice militaire. Nous avons aussi constaté que les Forces armées canadiennes n’avaient pas établi de normes de temps pour certaines étapes du processus. À notre avis, il a [...] fallu trop de temps pour décider si des accusations devaient être portées et pour renvoyer les accusations aux procureurs. Les procureurs n’ont pas respecté leurs normes de temps relativement aux décisions de porter ou non les causes devant une cour martiale. Lorsqu’ils ont décidé d’aller en cour martiale, il a fallu trop de temps pour déterminer la date de tenue de la cour martiale.

    Dans ce paragraphe, il y a beaucoup de travail qui peut être fait très facilement pour répondre aux exigences — tant ce qui est demandé dans le rapport que ce que vous vous engagez à faire dans cette réponse.
    Merci, monsieur Nuttall. Nous aurons l'occasion de revenir à vous plus tard.
    D'ici là, c'est maintenant au tour de M. Christopherson.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d'être là, en particulier à la sous-ministre et à la commodore.
    Pendant quelques mois, j'ai été le porte-parole de mon parti en matière de défense. L'une des choses que j'ai retenues de cela, c'est que je comprends mieux toute l'importance que revêt l'esprit de corps dans les Forces armées. C'est tellement crucial.
    Je dois admettre que la lecture de cela m'a davantage attristé que mis en colère. J'ai été attristé de constater que nous, vous et le ministère avons laissé tomber nos forces à un tel point dans un domaine qui est si essentiel aux valeurs canadiennes, soit un système de justice équitable. En général, quand vous entrez dans les forces, vous confiez votre vie au ministère, et il y a l'obligation... Il est démoralisant de penser qu'une partie importante de notre ministère de la Défense ait pu si mal fonctionner, avec autant d'incompétence.
    D'après moi, il y a deux éléments à cela. L'un est que la sous-ministre est responsable de la mise en oeuvre générale des politiques. C'est un échec. C'est à vous que cela incombe, madame la sous-ministre, et c'est la raison pour laquelle vous êtes ici. Cela fait partie du processus de reddition de comptes. C'est indépendant. Vous et votre ministre êtes responsables de cela.
    Maintenant, si j'approfondie cela et que je me montre un peu plus juste, je dirais que je comprends que vous, le ministre et le chef d'état-major comptiez sur le juge-avocat général pour vous donner des conseils juridiques et gérer le système juridique au sein du ministère, ce qui fait que j'attribue une grande part des responsabilités plus pointues au juge-avocat général. Je me mets à la place du ministre; c'est sur lui que vous comptez pour obtenir des conseils d'expert, et c'est sur lui que vous comptez pour veiller au respect des droits fondamentaux au Canada.
    Pour moi, commodore, c'est vous qui êtes sur la sellette. Je ne veux pas faire abstraction de la responsabilité de la sous-ministre, mais je veux parler de la vérification.
    L'objectif de la vérification était de déterminer si les Forces armées canadiennes administraient le système de justice militaire efficacement. Sous le titre « Conclusion », on peut lire; « Nous avons conclu que les Forces armées canadiennes n'avaient pas administré le système de justice militaire de manière efficiente. » Madame la sous-ministre, de façon générale, c'est à vous que cela incombe.
    Cependant, quand je vais à la page 14, sous le titre « Surveillance de l'administration du système de justice militaire », et que je lis rapidement le point 3.62, « Contexte », j'apprends — et c'est dans le rapport du VG — que: « Le Juge-avocat général est chargé de s'assurer que le système de justice militaire fonctionne de manière efficace et efficiente, dans le respect de la primauté du droit. »
    Après « Surveillance de l'administration du système de justice militaire », il y a un sous-titre qui dit: « Le Cabinet du Juge-avocat général n'a pas exercé une surveillance efficace du système de justice militaire ». Le premier point, « Message général », dit: « Dans l'ensemble, nous avons constaté que le Cabinet du Juge-avocat général n'avait pas exercé une surveillance efficace du système de justice miliaire. »
    Ce processus est une question de responsabilité.
     Commodore, veuillez expliquer l'échec complet de votre cabinet et du ministère pour ce qui est de veiller à ce que notre système militaire possède un système de justice convenable. Veuillez nous expliquer comment nous nous sommes retrouvés dans cette situation.
(1600)
    J'aimerais premièrement vous confirmer mon engagement personnel complet à veiller à la mise en oeuvre du plan d'action de la gestion qui est décrit — qui a été communiqué au Comité. C'est crucial pour moi, en tant que juge-avocate générale.
    La deuxième chose que je tiens à souligner au Comité, c'est que je suis responsable de la surveillance du système de justice militaire. C'est tout à fait vrai. C'est ma responsabilité. C'est mon devoir. Cela m'incombe et je le reconnais. Il est tout à fait vrai qu'un système de justice militaire doit continuer de répondre aux besoins de nos Forces armées canadiennes — ils sont tout à fait en droit de s'attendre à ce que ce système soit équitable, juste et opportun.
    Doit continuer? Il faudrait qu'il commence par le faire.
    Pour demeurer légitime, ce système doit être transparent, et c'est ce que nous faisons aujourd'hui. C'est ce que nous faisons chaque fois que nous faisons l'objet d'examens externes. C'est ce que nous faisons chaque fois que la Cour suprême du Canada examine des aspects de notre système de justice militaire. Il faut qu'il demeure responsable. C'est ce que nous faisons aujourd'hui.
    Commodore, je suis désolé de vous interrompre, mais notre temps est limité. Je ne veux pas être impoli, mais je suis désolé: l'obligation de rendre compte est là, et je vous ai demandé d'assumer cette responsabilité. Je ne vous ai pas demandé ce que vous allez faire à l'avenir. C'est autre chose. C'est un comité de reddition de comptes. Nous regardons dans le rétroviseur pour voir ce qui a été fait.
    Ce ministère est un véritable gâchis. Vous êtes responsable, et je n'ai pas encore entendu d'explication.
    Je crois que pour mettre les choses en contexte, nous devons nuancer ce que le Bureau du vérificateur général a dit. Ce qu'il a dit, c'est qu'il n'y a pas eu de « surveillance efficace ». Il n'a jamais dit qu'il n'y avait pas de surveillance. Nous sommes totalement d'accord, comme la sous-ministre l'a dit. Il y a eu beaucoup de difficultés avec la surveillance, au cours des dernières années, et c'est ce que nous essayons de corriger.
    C'est un système de justice militaire qui couvre l'ensemble du territoire canadien et qui est même administré à l'étranger. Comme le vérificateur général l'a mentionné dans ses observations du début, c'est un système qui est administré par les tribunaux et les tribunaux militaires, soit les cours martiales, mais aussi par des unités à l'échelle du Canada.
    Ce que le vérificateur général a conclu est tout à fait juste, et c'est qu'en ce moment, les unités prennent note de la façon dont les choses se font sur des bouts de papier ou des tableaux Excel. Ces données sont ensuite transmises à mon cabinet pour que nous puissions garder l'oeil sur des choses comme le nombre de procès sommaires, les accusations, les résultats... Il y a donc une mesure du rendement. Il y a de la surveillance et du contrôle, mais ce n'est pas suffisant en 2018, et nous le reconnaissons.
    Avec le système d'administration de la justice et de gestion de l'information que nous mettrons en place et que nous élaborons en ce moment — nous en sommes à l'étape 2 du développement, et nous testons chaque étape au fil du processus —, nous pourrons, moi et tout autre intervenant ayant un rôle à jouer dans la prise de décisions du système de justice militaire, voir en temps réel les progrès d'une cause et savoir si les échéanciers définis et inclus dans le système automatisé ont été respectés. Sinon, pourquoi n'est-ce pas le cas? Ils seront tenus d'entrer dans le système les raisons de cela.
    Alors...
(1605)
    Nous avons dépassé le temps d'une minute, alors nous pourrions revenir à cela plus tard.
    C'est maintenant au tour de M. Massé.

[Français]

     Monsieur Massé, vous disposez de sept minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Mesdames Thomas et Bernatchez, dans la foulée des questions de mon collègue M. Christopherson, pouvez-vous m'expliquer qu'est-ce qui a empêché la mise en oeuvre d'un système de gestion de cas, de gestion de l'information?
    Étant donné que la plupart des ministères et des bureaux d'avocats ont, depuis plusieurs années, mis en oeuvre des systèmes pour les aider à gérer, à bien administrer leurs dossiers, qu'est-ce qui fait en sorte qu'encore aujourd'hui, ce système n'ait pas été mis en oeuvre? Qu'est-ce qui explique la lenteur du ministère à mettre en oeuvre un système comme celui-là?

[Traduction]

    Je vous remercie de votre question. Je vais amorcer une réponse, et la commodore pourra intervenir.
    Ce n'était pas une priorité au sein du ministère. D'autres systèmes étaient prioritaires — les systèmes opérationnels pour les forces en situation de combat, les systèmes pour la force aérienne, l'armée, la marine, à l'appui de leurs opérations. Ce système est maintenant devenu prioritaire, dans le sillage du rapport du vérificateur général — cela ne fait absolument aucun doute — et en conséquence du leadership de la commodore Bernatchez.
    Nous mettons un système en place, entre autres, parce que, oui, cela a trop tardé et qu'il faut que le suivi se fasse électroniquement, au moyen d'un processus de gestion des affaires, mais aussi parce que nous ne voulons plus que les priorités, la mesure, la gestion du Cabinet du juge-avocat général soient individuelles et en fonction des personnalités des gens. Notre juge-avocate générale actuelle veut de façon très générale veiller à une bonne surveillance de ses opérations. Ce ne sera pas nécessairement le cas du prochain juge-avocat général, et ce n'est pas acceptable. Je comprends tout à fait cela, et il m'incombe de veiller à la bonne administration du ministère, mais nous voulons soustraire le processus aux différentes personnalités des gens et veiller à ce que nous fassions une bonne gestion des données.
    Ce n'était pas prioritaire avant, mais ce l'est maintenant.

[Français]

     Je comprends très bien que des activités militaires importantes doivent être menées. Dans un bureau aussi important que le vôtre, l'aspect financier était-il un enjeu? Si vous aviez eu les fonds nécessaires à la mise en place d'un tel système, auriez-vous pu y accorder la priorité avant?
    Je vous remercie.
    Je vais mettre les choses en perspective et donner des explications à l'intention du Comité.
    Dans le système de justice militaire, il y a tous les acteurs indépendants qu'on retrouve dans un système de justice. Je parle d'enquêteurs, de procureurs, d'avocats de la défense, de juges et de tribunaux supérieurs qui font la révision judiciaire des causes. C'est une juridiction criminelle complète qui doit être contenue dans un organisme qui se soutient lui-même.
    Je vais revenir à la question que vous avez posée initialement. Vous m'avez demandé pourquoi nous n'avions pas mis en place un système de gestion de cas de l'envergure du SAJGI avant maintenant...
(1610)
    Pardonnez-moi de vous interrompre.
    Vous parlez de l'envergure du SAJGI. Pour que M. et Mme Tout-le-Monde comprenne, pouvez-vous nous dire combien de personnes, grosso modo, utiliseront ce système?
    Je ne saurais vous le dire exactement.
    Parle-t-on de 100 000, de 10 000 personnes?
    Il s'agit de chaque personne qui a un rôle à jouer. Quand une plainte est déposée à propos d'un cas donné, la personne responsable de la plainte doit faire une entrée dans le système de gestion, jusqu'à la résolution complète du cas.
    Ce sont les mêmes intervenants que ceux dont j'ai parlé tout à l'heure. Il est difficile de les chiffrer. Ce qu'on sait...
    D'accord, mais vous devez avoir...

[Traduction]

    [Inaudible]

[Français]

    Pardonnez-moi, monsieur le président. Nous nous emportons souvent quand nous posons nos questions.

[Traduction]

    Je vais vous donner du temps supplémentaire. Merci.

[Français]

    Monsieur président, je vais m'adresser à Mme Bernatchez par votre entremise.
    Vous avez élaboré un plan de match en vue de mettre en oeuvre ce système. Dans votre plan d'action, vous visez l'année financière 2018-2019, en collaboration avec le sous-ministre adjoint. Il y aura une mise à l'essai au début de janvier, puis le système sera lancé en septembre 2019.
    Pour pouvoir établir un plan d'action concret, vous savez sans doute combien de personnes utiliseront ce système. Sinon, il serait un peu difficile d'établir un plan d'action alors qu'on ne sait pas combien de personnes utiliseront ce système tous les jours.
    Je vous remercie, et je suis désolée pour les problèmes de procédure. J'en prends bonne note.
    Présentement, nous ne sommes pas en mesure de les chiffrer exactement, parce que cela va varier. Ce que nous savons, par contre, c'est le nombre de dossiers qui seront généralement traités par ce système. Il s'agit d'environ 2 000 dossiers par an, du dépôt de la plainte jusqu'au traitement complet du dossier.
    Il faut aussi savoir que ce système de gestion de dossiers nécessitera une autorisation d'accès spécifique pour chaque intervenant, afin que l'information soit protégée. Tout le monde n'aura pas accès à toute l'information, sinon, le système ne serait pas étanche et solide.
    Je vais encore passer par vous, monsieur le président.
    De façon générale, quels fonds ont été alloués à la mise en place de ce système, de son acquisition à sa mise en oeuvre complète? Je demande simplement un ordre de grandeur des fonds qui seront investis dans ce projet.
    Le budget actuel pour l'élaboration et la mise en place de ce système est d'environ 450 000 $. Bien sûr, il y aura des frais liés à la formation du personnel. On ne peut pas lancer un tel système sans donner la formation nécessaire au personnel concerné. Il faudra aussi entretenir le système de façon régulière. Nous avons prévu une somme de 79 000 $ à 80 000 $ pour l'entretien du système sur une base annuelle.
    Comme tout programme informatisé, il faudra bien, à un moment donné, faire une mise à niveau. Des fonds ont aussi été prévus pour cela.
    D'accord.

[Traduction]

    Très rapidement, s'il vous plaît...

[Français]

    Ma dernière question portait sur la gestion des ressources humaines, mais comme cela prendrait probablement plus de temps que ce qui m'est alloué, je vais laisser tomber.
    Merci.

[Traduction]

    Merci. Nous allons revenir à vous.
    Nous allons maintenant entendre M. Kelly.
    Nous sommes maintenant à la deuxième série de questions.
    Commodore Bernatchez, la réponse à ce rapport est en grande partie fondée sur la mise en oeuvre du SAJGI, et pourtant, pour revenir au point que M. Nuttall a soulevé, le système assure à peine le suivi de l'information. La façon d'améliorer un système passe par la qualité des renseignements et les mesures prises à la lumière de ces renseignements.
    Le rapport fait état qu'il faut en moyenne une semaine et demie pour terminer une enquête pour les infractions punissables par procédure sommaire, ceux qui sont gérés dans l'unité, et qu'il faut habituellement en moyenne cinq semaines pour que les commandants portent une accusation. Comment expliquez-vous qu'il ne faut qu'une semaine et demie pour enquêter sur une infraction punissable par procédure sommaire mais qu'il faut cinq semaines pour prendre une décision sur l'accusation? Comment le simple fait d'adopter un système de données, un système de gestion des cas, changera cette situation s'il y a ce délai systémique entre l'enquête et l'accusation?
(1615)
    Pour répondre à l'observation selon laquelle il faut s'assurer que les gens font ce qu'ils sont censés faire, il s'agit essentiellement d'exercer une surveillance adéquate sur ce que les gens font.
    En ce qui concerne les enquêtes disciplinaires des unités qui sont actuellement menées, il est très difficile de prédire, tout comme dans le système civil, le temps qu'il faudra pour mener une enquête. Pour ce qui est de la durée moyenne de cinq semaines, je ne pense pas que nous pouvons utiliser le temps qu'il a fallu pour enquêter comme étant la seule norme.
    Ce qui est certain cependant, c'est qu'en passant en revue les délais — ce que nous faisons actuellement avec tous les intervenants de la justice militaire dont le Grand prévôt des Forces canadiennes, y compris des représentants de la chaîne de commandement —, en établissant des normes de temps et en veillant à ce qu'ils fassent partie de notre système de gestion électronique et de notre système de surveillance, nous pourrons découvrir où se trouvent les goulots d'étranglement. Si quelqu'un ne respecte pas les délais, il devrait expliquer pourquoi, et en tant que surintendant, je devrai être en mesure d'avoir accès immédiatement à ces résultats pour cibler les vulnérabilités, les défis et les raisons qui expliquent ces délais. Est-ce un problème de formation, par exemple, en ce qui concerne les enquêtes disciplinaires des unités? Nos enquêteurs des unités ont-ils besoin de plus de formation pour pouvoir faire leur travail plus efficacement? Est-ce un problème de ressources octroyées aux unités qui sont déployées dans le cadre d'opérations et qui n'ont pas la flexibilité d'allouer suffisamment de ressources pour la tenue d'enquêtes?
    C'est le genre d'éléments qui seront gérés par le système de gestion de l'information de l'administration de la justice.
    Je ne suis pas avocat, alors pardonnez-moi, mais j'ai l'impression que si dans une semaine et demie, vous avez les conclusions d'une enquête, je n'arrive pas à comprendre pourquoi il faut trois fois et demie le temps pour recueillir l'information afin de déterminer si une accusation sera portée ou non.
    Je comprends tout à fait votre question. Il faut se demander pourquoi il faut autant de temps pour mener une enquête. Ce n'est pas un problème propre au système de justice militaire.
    Non, je ne demande pas pourquoi. Je parle de la différence entre décider quoi faire une fois que l'enquête est terminée.
    Pardonnez-moi.
    En ce qui concerne le temps moyen, les unités ont terminé l'enquête dans un délai moyen d'une semaine et demie, mais il a fallu aux commandants cinq semaines additionnelles pour porter des accusations. Je doute que le simple fait d'adopter un système logiciel changera les comportements qui causent ce délai.
    Si vous me permettez de répondre, vous soulevez certainement le point que nous n'avons pas évoqué.
    De toute évidence, pour nous, le système contribuera à nous fournir des renseignements, mais si le comportement humain sous-jacent ne change pas, que nous n'accordons pas la priorité aux enquêtes, que nous ne formons pas les commandants différemment et que nous ne nous assurons pas qu'ils accordent l'attention qui s'impose à ce type de travail et à leurs responsabilités dans le système disciplinaire, alors rien ne changera outre le fait que le JAG aura de meilleurs renseignements sur ce qui ne va pas.
    Par conséquent, il faut adopter une approche systémique et investir dans les commandants et tous les intervenants qui jouent un rôle dans ce système pour nous assurer qu'ils comprennent leurs responsabilités. Cette vérification est certainement un premier pas en ce sens. Le JAG a un rôle à jouer, le chef d'état-major de la défense a un rôle à jouer, le ministère a un rôle à jouer et les commandants ont un rôle à jouer. Nous devons absolument changer les comportements humains dans le cadre de ce processus.
    Je pense que le problème que nous avons du mal à comprendre est en partie que le vérificateur général a déclaré dans son rapport que d'autres examens seront effectués. J'imagine que des représentants du ministère ont comparu ici et ont dit essentiellement la même chose.
    Ce que nous devons essayer de faire, c'est de véhiculer au ministère que nous ne pouvons plus seulement continuer de produire un rapport du vérificateur général et vous convoquer à nouveau. Je suis certain que d'excellentes déclarations et promesses sont faites, mais il reste que le rapport fait état que rien n'a été accompli. C'est la raison pour laquelle nous avons des plans d'action et que nous assurons un suivi. Si les délais ne sont pas respectés, nous vous convoquerons à nouveau ici et les discussions seront loin d'être aussi calmes.
    Nous allons maintenant entendre Mme Yip.
(1620)
    Merci de votre présence ici.
    En ce qui concerne encore une fois les délais, pourquoi le Cabinet du juge-avocat général entreprendra-t-il ses premiers examens officiels du système de justice militaire en septembre 2019? Pourquoi ne le fait-il pas plus tôt?
    Je pense que nous allons commencer la mise à l'essai du système en 2019.
    Nous allons mettre en oeuvre le système en 2019.
    D'accord.
    Votre priorité absolue est-elle la mise en oeuvre de tout ce système?
    Si vous le permettez, et je vais demander à la commodore d'intervenir, nous prenons un certain nombre de mesures en parallèle. Nous passons en revue le processus, en mettant en oeuvre le système et en prolongeant le déploiement des agents qui travaillent pour la commodore Bernatchez au JAG. Elle passe également en revue la formation et toutes les politiques et les procédures qui ont trait à la justice militaire. Un certain nombre d'entre elles, comme elle l'a mentionné au début de sa déclaration, ont déjà été mises en oeuvre.
    Un éventail d'activités sont menées. Nous soulignons le système, car sans données, nous ne pouvons pas assurer le type de surveillance et de gestion des données qui font défaut d'après le vérificateur général sans ces millions de feuilles de calcul Excel, dont nous aimerions nous départir. Le système sera complètement mis en oeuvre en septembre 2019. Nous commencerons à le mettre à l'essai en janvier 2019, de même qu'un certain nombre d'autres activités pour changer les comportements et veiller à ce que la formation appropriée soit en place et que les procureurs et les avocats puissent remplir leurs fonctions comme on leur demande.
    Pouvez-vous m'en dire plus sur la table ronde de la justice militaire et du déroulement de la première réunion?
    La table ronde de la justice militaire se concentre sur la nécessité d'établir de meilleures communications entre les intervenants du secteur de la justice militaire. Elle regroupe des représentants de la Cour d'appel de la cour martiale, les cours martiales, le Grand prévôt des Forces canadiennes, le directeur des poursuites militaires, le directeur des services d'avocat de la défense de la division de la justice militaire et moi.
    C'est une table ronde qui réunit ces intervenants pour discuter de questions d'intérêt commun et examiner des solutions éventuelles. Les questions d'intérêt commun sont les délais. C'est une préoccupation tant pour nous que pour le système civil de justice pénale. Nous sommes bien conscients de l'indépendance de ces intervenants dans nos démarches.
    La première réunion a été tenue en juin 2018. La prochaine réunion aura lieu en janvier. Nous élaborons des ordres du jour et établissons des points de discussion pour aborder les questions les plus urgentes. Les conversations jusqu'à présent sont très conviviales. Nous sommes très heureux de nous réunir à nouveau pour tenir ces discussions et pouvoir trouver des solutions ensemble à l'avenir, dans un esprit de collaboration.
    Quelle était la question la plus urgente?
    Le premier point à l'ordre du jour était de rétablir les liens et les relations entre nous, car nous nous sommes rendu compte, à l'instar du vérificateur général, qu'il y avait une absence de communication fluide entre ces intervenants. La toute première réunion avait pour but de mieux comprendre les attentes de chacun et les mesures que nous pourrions prendre à mesure que nous progressons.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Nuttall, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup des renseignements que vous fournissez en réponse aux questions de mes collègues.
    Madame Bernatchez, avant que je m'écarte un peu du sujet, nous nous apprêtions à examiner quelques-unes des cibles liées à différents types d'infractions, les infractions complexes et simples. Pourriez-vous nous fournir ces renseignements techniques?
(1625)
    Je suis désolée. Pourriez-vous répéter la question?
    Pourriez-vous fournir les renseignements techniques concernant les cibles pour les délais pour les infractions punissables par procédure sommaire et les autres infractions?
    C'est un peu trop tôt pour répondre à cette question en ce moment, car nous sommes au milieu de consultations avec les divers intervenants, mais ces cibles seront définies. Nous établirons les délais requis.
    Pour revenir à ma question initiale — et je ne l'ai pas posée —, des cibles étaient-elles en place?
    Certaines cibles ont été établies. Ce n'est pas un système complètement dépourvu d'échéanciers et de normes relatives aux délais. Nous avions des échéanciers en place pour certaines choses, comme en fait mention le rapport du vérificateur général, mais nous prévoyons établir et appliquer ces délais à toutes les étapes d'une affaire traitée dans le système de justice militaire. Si les intervenants ne sont pas capables de respecter ces délais, nous devons en connaître la raison.
    Je sais que de multiples bureaux examinent chaque cas. Quand une affaire commence à faire l'objet d'une enquête et passe des mains du commandant à celles du procureur, il doit y avoir une norme quelconque qui établit la durée du processus. Nous savons que la Cour suprême établit que justice doit être faite dans un délai de 18 mois. Si c'est 18 mois, y a-t-il un objectif ou une cible qui sont déjà établis ou en place pour le système de justice militaire pour régler des infractions, parfois punissables par déclaration sommaire, ou des cas simples et d'autres plus complexes?
    Madame Bernatchez.
    La rapidité de traitement est un élément central du système de justice militaire.

[Français]

    C'est le nerf de la guerre.

[Traduction]

    C'est un système qui doit répondre aux exigences des Forces armées canadiennes rapidement et qui doit être transférable. Pour que ce système fasse ce qu'il doit faire, il doit absolument respecter les délais.
    En 2016, la Cour suprême du Canada, dans l'affaire Jordan, a fixé des délais. Pour nos cours martiales, il a été déterminé que la norme de 18 mois s'applique au système de justice militaire. Tout comme le système de justice civile...
    Je suis désolé, mais si vous me le permettez, d'après ce que je peux lire, ce n'est essentiellement pas plus de 18 mois. Ce n'était pas une cible. Le délai ne devrait pas dépasser plus de 18 mois. Si mon employeur me disait, « Je ne veux pas que cela prenne plus d'une semaine », je vais me fixer une cible de trois jours pour qu'à la cinquième journée, à la fin de la semaine, il obtienne ce qu'il m'a demandé de faire.
    Qu'avez-vous fait pour respecter cette cible?
    Tout comme le système de justice criminelle civile, le système de justice militaire examine très attentivement les délais en raison de la décision dans l'affaire Jordan. Cela ne veut pas dire que ce n'est pas une préoccupation ou un sujet de conversation qui n'ont pas été abordés avant...
    C'est il y a de cela deux ans, alors quelle est la limite?
    Tout ce que j'essaie de comprendre est ceci. Le premier jour, nous savons que la durée ne peut pas, ou ne devrait pas, dépasser 18 mois, à l'exception de quelques circonstances très difficiles qui se présentent dans 1 cas sur 100. Pour les autres 99 cas, quelles cibles établissez-vous? Quelles sont les cibles établies dans le système de justice militaire qu'il faut respecter?
    Je trouve cela très difficile, monsieur le président. J'ai posé la question de trois ou quatre façons différentes et c'est peut-être que je ne la pose pas correctement. Je comprends cela, ou je n'utilise peut-être pas les bons termes, mais...
(1630)
    Madame Bernatchez — et nous avons un peu dépassé le temps —, nous allons seulement entendre votre réponse.
    Il y a des délais qui sont établis, par exemple, par le Grand prévôt des Forces canadiennes. Combien de temps une enquête policière devrait-elle durer? Comme le rapport du vérificateur général en fait état, il a parfois fallu plus de temps que prévu et nous ne savions souvent pas pourquoi. Il y a des délais pour fournir des conseils juridiques aux unités et aux procureurs lorsque des accusations sont envisagées. Là encore, comme en fait mention le rapport du vérificateur général, les raisons du non-respect des délais n'étaient pas toujours documentées. C'est ce qu'il faut régler. Nous devons définir des délais. Nous devons pouvoir demander des comptes aux personnes, aux intervenants, quant au respect des délais et savoir pourquoi ils ne sont pas en mesure de les respecter.
    Merci. Nous avons dépassé le temps prévu. Nous allons revenir à vous plus tard si vous le voulez.
    Monsieur Falcon Ouellette.

[Français]

     Je vous remercie d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. C'est très plaisant et c'est extrêmement important. Je tiens à vous remercier tous.
    [Le député s'exprime en cri.]

[Traduction]

    J'aimerais seulement poser quelques petites questions.
    J'ai un point de vue un peu différent de celui de la majorité de mes collègues, je pense. J'ai été dans les forces armées pendant environ 22 ans. Je m'occupais de la discipline dans de nombreuses unités, dans la marine, en tant que maître régulateur, ou dans la 5e brigade, comme sergent d'armes. J'étais celui qui menait les enquêtes et aidait à porter des accusations contre les membres du personnel qui avaient commis des infractions au Code de discipline militaire.
    J'aimerais seulement confirmer avec la commodore Bernatchez si c'est dans un délai de trois ans après qu'une infraction a été commise que vous devez porter une accusation. Si quelqu'un commet une infraction, disposez-vous de trois ans à partir de cette date? Si une personne commet l'infraction aujourd'hui, par exemple, le délai est-il de trois ans? Est-ce vrai ou le délai est-il illimité?
    Un délai de prescription est établi pour différentes infractions. Dans les cas de procès sommaires, le délai de prescription actuellement prévoit que l'affaire doit être traitée dans un délai d'un an après les infractions alléguées. C'est le critère qui est appliqué.
    L'accusation doit être portée dans un délai d'un an.
    C'est exact.
    Les gens parlent souvent de rapidité. Une période de cinq semaines est en fait très courte pour une unité militaire qui est en service et dont le rythme de travail est effréné. Cinq semaines pour qu'une personne comme moi mène une enquête, c'est très court, car nous sommes souvent en déploiement et avons de nombreuses autres priorités. Si nous disposons d'un an, nous ne voulons pas nous rendre jusqu'à la fin de l'année, mais nous avons ce délai.
    Je m'inquiète au sujet de l'éducation dans le système de justice. Qui est responsable de l'éducation des militaires du rang, ceux qui portent les accusations et qui font tout le travail, le travail sur le terrain? Qui est responsable de ce système d'éducation?
    Monsieur le président, j'aimerais apporter une correction. En effet, j'ai parlé d'une année, mais j'avais oublié que les règlements prévus dans le projet de loi C-15 étaient entrés en vigueur le 1er septembre 2018. Ce délai de prescription a donc été réduit à six mois — six mois pour porter des accusations après la perpétration présumée d'une infraction.
    La responsabilité de la formation juridique sur le système de justice militaire me revient. J'établis les normes. Je précise le contenu de la formation juridique. Par exemple, les cours des officiers présidents sont élaborés sous ma responsabilité. Manifestement, je n'ai pas les ressources nécessaires pour veiller à ce qu'ils soient donnés de façon appropriée, et je compte donc énormément sur le soutien de l'académie de la défense pour veiller à ce qu'il y ait une instruction à distance et du soutien pour la formation, et plus précisément, que cette formation soit décentralisée et offerte dans les unités. La chaîne de commandement joue également un rôle très important à cet égard.
(1635)
    C'est ce que je reproche au rapport du vérificateur général. En fait, je crois que vous n'avez examiné aucun élément concrètement lié au système de formation dans les Forces armées canadiennes. Par exemple, dans l'école Osside pour le personnel non officier, les sous-officiers supérieurs et les sous-officiers qui mènent des audiences disciplinaires et portent des accusations et qui doivent donc lire le Code de discipline militaire pour formuler les accusations, manifestement en collaboration avec les procureurs. Je ne crois pas que vous ayez examiné cela.
    L'une de choses qui me dérangent, c'est qu'il y a un tableau — c'est-à-dire la pièce 3.2 — intitulé « Principaux rôles et responsabilités au sein de la justice militaire », et dans ce tableau, il y a une catégorie pour les commandants d'unités militaires, mais pas de catégorie pour le personnel non officier. Encore une fois, vous revenez à l'ancien système militaire où on tient compte des officiers, mais où tous les autres sont négligés.
    À mon avis, vous pourriez manifestement déléguer certains de ces pouvoirs, mais ils sont souvent délégués à des gens comme moi qui doivent effectuer ce travail.
    Lorsque j'étais dans les Forces armées canadiennes, j'ai conclu qu'il y avait un manque de formation. On nous donnait de très brefs aperçus de certains de ces enjeux et de ce qui devait être fait. En raison de ce manque de formation... Par exemple, étant donné que le cours de leadership avancé ou le cours de leadership intermédiaire est tellement court — deux ou trois semaines —, nous n'avons pas suffisamment de temps pour bien comprendre le système de justice militaire. Nous étudions les accusations dont nous sommes saisis et parfois, il est très difficile pour le personnel non officier et les sous-officiers de traiter rapidement les accusations.
    Puisque les Forces canadiennes sont manifestement censées favoriser le travail d'équipe et la collaboration entre les militaires, j'aimerais que le Bureau du vérificateur général réexamine son rapport et ses travaux, car je crois qu'il manque un élément important dans son rapport. Je peux lire et vérifier ce que vous avez examiné, et même si le rapport est très bien et intéressant, je crois que vous n'avez pas cerné l'élément essentiel et les responsables.
    Je dois dire que j'ai aussi été...
    Souhaitez-vous donner à M. Hayes l'occasion de répondre à cela?
    Je comprends qu'il est...
    J'aimerais cependant lui poser une question — car mon temps est limité.... Je dois dire que je suis très impressionné...
    En fait, vous avez dépassé votre temps d'une minute, et c'est la raison pour laquelle j'ai dit que je voulais lui donner un peu de temps.
    Très brièvement, j'ai été très impressionné par la table ronde de la justice militaire, mais encore une fois, je crois que vous avez négligé d'inclure les sous-officiers dans cet enjeu. Je crois que vous avez négligé d'inclure les unités qui doivent porter les accusations, par exemple, les unités opérationnelles et pas seulement les unités qui ont un grand nombre d'employés administratifs, mais les unités qui participent au combat et qui se battent sur le terrain et sur les navires, ainsi que les maîtres régulateurs et les sous-officiers supérieurs, les chefs et les adjudants-maîtres — tous ces employés qui font tout ce travail. Ils sont tellement importants pour le système de justice. Si nous les laissons de côté, le système de justice ne fonctionnera jamais à son plein potentiel.
    Merci, monsieur Ouellette.
    Je vais donner la parole à M. Hayes pour qu'il réponde à certaines des préoccupations liées à l'étude.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Manifestement, comme l'honorable membre l'a mentionné, la formation est importante. Évidemment, la réussite du système de justice militaire repose sur les gens qui doivent le mettre en oeuvre.
    Notre audit s'est concentré sur les personnes responsables, et des pouvoirs sont donc évidemment délégués, mais au bout du compte, les commandants des unités militaires sont responsables. Manifestement, comme la commodore l'a mentionné, la formation sera un élément important de l'amélioration du système de justice militaire.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Christopherson.
    Monsieur Christopherson.
    Je soupçonne que j'éprouve une partie de la frustration que semble éprouver M. Nuttall.
    Une partie du processus consiste à reconnaître que nous nous sommes trompés et que nous allons ajuster le tir, en plus d'expliquer comment nous allons le faire, mais la reddition de comptes ne se termine pas là. Je n'ai pas entendu beaucoup parler de reddition de comptes. C'est un mauvais rapport. Il n'y a pas grand-chose de positif là-dedans, madame la sous-ministre. Je ne peux penser à rien de positif. Il y a peut-être quelque chose, mais cela ne paraît certainement pas. Tout est négatif.
    Voici donc ma première question. Des membres du personnel de supervision ou de la haute direction ont-ils été personnellement tenus responsables de ce cafouillage?
(1640)
    Je vous remercie d'avoir posé votre question, monsieur Christopherson.
    La réponse est non. Il y a une nouvelle juge-avocate générale et elle a un nouvel effectif. Elle a commencé à occuper son poste en juin 2018, et elle a dirigé les efforts en vue de modifier le processus avant la publication du rapport du vérificateur général, mais de concert avec le rapport. Je ne crois pas qu'elle ait rejeté aucune des recommandations qui ont été formulées, et elle a collaboré avec le vérificateur général.
    Désolée, elle est arrivée en juin 2017.
    C'est correct. J'ai entendu votre réponse, merci.
    Le problème était-il avec le commodore précédent, c'est-à-dire le juge-avocat général précédent?
    Je crois qu'il y a eu une série de problèmes.
    Le juge-avocat général précédent a pris sa retraite sans mettre en oeuvre une surveillance et une supervision, comme on l'exige. Le ministère n'a pas vérifié s'il y avait une surveillance et une supervision, comme on l'exige.
    Je sais que nous ne pouvons pas aller aussi loin en public, mais cela me pousse à me demander si le départ à la retraite faisait partie de la solution, s'il s'agissait d'une échappatoire ou d'une invitation à partir...
    Si vous me dites que c'était à cause du juge-avocat général précédent, il aurait été bien d'entendre cela plus tôt, au lieu de devoir attendre à la fin de la réunion pour obtenir une minuscule parcelle de reddition de comptes.
    Madame la sous-ministre, en 2008 et en 2009, on a fait appel au groupe conseil Bronson. Ce groupe a mené deux examens. Il me semble qu'on les a mis de côté, et même à deux reprises. Pourquoi?
    Si nous voulons parler de reddition de comptes, le ministère de la Défense nationale et d'autres ministères ont l'habitude de ne pas mettre pleinement en oeuvre... ou de dire que le ministère — ou le juge-avocat général ou quelqu'un d'autre — a accepté les recommandations précédentes sans rien faire à leur égard.
    Nous avons exprimé très clairement que nous sommes d'accord et que nous mettons en oeuvre toutes les recommandations. La juge-avocate générale...
    Je comprends cela.
    Cela laisse également croire que chaque système de surveillance principal en oeuvre n'a pas fonctionné.
    Il n'a pas fonctionné comme prévu. C'est ce qu'on a conclu, et nous sommes d'accord.
    Nous suivrons ce dossier, comme vous le savez.
    J'aimerais parler des affaires qui ont été abandonnées en raison des délais. Cela revient à ce que disait M. Nuttall, je crois, en ce qui concerne les nouvelles normes... C'est à la page 4:
Au cours de l'exercice 2016-2017, une cour martiale a abandonné les accusations dans une cause pour motif de retard et le retard était un motif invoqué par des procureurs militaires pour abandonner neuf autres causes.
    Même s'il y a de nouvelles normes et un nouveau processus de suivi, il devait y avoir quelque chose en oeuvre à l'époque. Nous parlons d'avocats qui, pour la plupart, se soucient du système de justice. Comment ont-ils pu laisser cela se produire? Comment cette situation a-t-elle pu se poursuivre? Elle durerait toujours si le vérificateur général n'était pas intervenu. Comment est-ce possible? Allez-vous encore répondre que c'est parce que « notre juge-avocat général n'était pas très bon »?
    Monsieur le président, je n'ai pas dit que notre juge-avocat général n'était pas très bon. Je n'aimerais pas que cela soit au compte rendu.
    Nous avons dit que la commodore Bernatchez est arrivée pendant que l'audit était en cours, qu'elle a commencé à mettre en oeuvre des changements et qu'elle a amorcé les changements recommandés par le vérificateur général.
    Madame la sous-ministre, vous pouvez reconnaître que j'ai posé les questions « Comment est-ce possible? » et « Qui est tenu responsable? » et que je n'ai pas vraiment obtenu de réponse.
    Lorsque je pousse un peu et que je dis qu'il y avait réellement un problème avec le juge-avocat général, vous répondez que vous ne voulez rien dire de négatif au sujet du juge-avocat général précédent. D'accord, c'est correct. Il ne mérite peut-être pas cela. Qui le mérite?
    Je suis désolée, monsieur le président. Je ne crois pas que je puisse répondre en nommant une personne. Le système est responsable. Le système doit rendre des comptes, et à titre de sous-ministre, il m'incombe de veiller à ce que nous mettions en oeuvre tout ce que le vérificateur général a recommandé.
    Je ne nommerai personne.
    Je ne m'attends pas à ce que vous le fassiez. Je dois vous le dire, les Canadiens commencent...
    Phénix est un autre exemple. Nous commençons à être un peu fatigués de toutes ces bavures majeures et personne n'est vraiment tenu responsable.
    On me tient responsable dès le départ, à chaque élection et chaque jour que je passe dans ma circonscription. Ici, c'est la bureaucratie qui est tenue responsable.
    Soyez responsables de vous-mêmes.
    Nous sommes responsables de nous-mêmes, c'est-à-dire que nous n'argumentons pas avec le vérificateur général. Nous n'argumentons pas avec vous. Nous reconnaissons que cela n'a pas été fait de façon appropriée et dans six mois, nous pourrons vous montrer des preuves que nous avons pris cela au sérieux et que nous avons apporté des changements. Des changements ont déjà été apportés.
    À mon avis, M. Christopherson, ce n'est pas la même situation que Phénix. C'est un problème que nous devons résoudre au sein du ministère. Nous avons le leadership nécessaire pour y arriver avec la commodore Bernatchez.
(1645)
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, madame Thomas.
    La parole est maintenant à M. Sarai.
    Merci, madame Thomas et madame Bernatchez.
    Je suis le fils d'un officier. Je sais comment fonctionne la formation militaire. J'ai grandi dans un foyer où mon père avait toutes sortes de normes et nous devions les respecter. Je suis aussi avocat, et je sais donc que les retards dans la justice signifient que justice ne sera pas rendue. La présentation de l'information en temps opportun et les mesures de rendement sont des exigences ministérielles fondamentales, que vous vous en acquittiez à l'aide d'un fichier Excel ou d'un ordinateur sophistiqué. Si l'attitude ou la volonté n'est pas là, personne ne mettra en oeuvre ces exigences. Il semble qu'il y a un gros problème d'attitude ou de volonté, car je ne crois pas que la technologie à elle seule soit une raison valable pour les retards. Je suis un peu inquiet à l'idée que si nous mettons en oeuvre une technologie l'an prochain, nous aurons des problèmes et nous blâmerons la technologie pour ces problèmes. Je crois que nous devrions dépasser cela.
    L'armée est habituellement l'une des meilleures organisations dans laquelle les systèmes, les listes de vérification, les échéances, la reddition de comptes et les suivis sont intégrés dans l'esprit des officiers, des soldats ou des juges-avocats généraux. En fait, je souhaiterais que le juge-avocat général représente une norme que d'autres ministères de la justice d'un bout à l'autre du pays reconnaissent et affirment adéquatement respecter. Mais en fait, c'est le contraire. En effet, selon l'Association du Barreau canadien, le système précédent était inadéquat. Ce devrait être le contraire, c'est-à-dire que les ministères de la Justice devraient suivre l'exemple du juge-avocat général, en s'inspirant de la qualité, de la rapidité et de l'efficacité de son travail, justement à cause de la culture liée au fonctionnement de l'environnement militaire.
    Quel est l'échéancier du nouveau système et pouvons-nous veiller à ce qu'il n'y ait aucune lacune, par exemple, en cas de changement de sous-ministre ou de commandant, afin que nous n'ayons pas encore à faire face à ces retards? Il semble y avoir une épidémie, c'est-à-dire que chaque fois que le personnel de la haute direction change, le nouveau personnel ne sait pas ce qu'a fait le personnel précédent. C'est pourtant simple. Par exemple, lorsqu'un enseignant livre son curriculum, son système est dans un cartable et s'il est malade ou s'absente, l'enseignant suppléant peut reprendre au même point et poursuivre l'instruction.
    Comment pouvons-nous veiller à ce que ce nouveau système soit bien géré, afin que nous n'ayons pas ces changements?
    Je vous remercie beaucoup d'avoir posé cette question.
    Je conviens que c'est difficile lorsque les membres de la haute direction changent. On a tendance à passer des priorités d'une personne à celles d'une autre. C'est intégré dans notre gouvernance, c'est-à-dire que le système de gestion de l'information de notre sous-ministre adjoint nous fait rapport des progrès de ce système, et c'est donc indépendant de moi ou de la juge-avocate générale. Ce système suit son propre échéancier. Afin de veiller à ce qu'il ne présente pas les problèmes que nous avons observés dans d'autres systèmes, il est mis en oeuvre par étape et il est mis rigoureusement à l'essai dans des environnements de simulation. Nous menons des essais d'acceptation par les utilisateurs afin de confirmer qu'il fonctionne.
    Le point que vous faites valoir est tout à fait pertinent et il met en évidence tout ce que nous avons dit aujourd'hui. Le système ne règle pas tous les problèmes. Les êtres humains doivent régler les problèmes. Le système offrira à la juge-avocate générale un différent point de vue sur ce qui se passe au sein de notre organisme et nous pensons que cela aidera à améliorer les normes. Le système à lui seul ne peut pas faire cela.
    Ce qui me préoccupe, c'est que j'ai deux filles. Il y a des officières dans la salle et vous êtes toutes deux des femmes militaires à la carrière distinguée. Je ne veux pas entendre une autre histoire dans laquelle une femme qui formule des accusations d'agression ou de harcèlement au sein de l'armée — des situations endémiques — n'obtient pas justice ou que justice n'est pas rendue. Même si elles obtiennent justice, si c'est beaucoup plus tard et qu'elles ont tellement été tourmentées psychologiquement et mentalement en attendant le résultat qu'elles conseillent aux autres femmes de ne pas s'enrôler dans l'armée, car ce sera très troublant...
    Comment pouvons-nous veiller à ce que le message selon lequel cela ne sera pas toléré se transmette du sommet aux plus bas échelons? Si ces personnes constatent qu'il y a des retards dans le traitement de leur cas, comment peuvent-elles les signaler? Habituellement, une victime ne peut pas avoir accès à cela, mais je crois que dans la situation d'une juge-avocate générale, elle devrait être en mesure d'avoir accès à cela, car je ne veux pas que ce problème existe.
    Allez-y, commodore Bernatchez.
    J'aimerais réaffirmer au Comité que les comportements sexuels inappropriés ne sont pas acceptés au sein des Forces armées canadiennes et que notre chef d'état-major de la Défense s'est pleinement engagé à veiller à ce qu'on s'occupe de ces cas. Le système de justice militaire est l'un des importants outils mis à la disposition de la chaîne de commandement pour veiller à éliminer ces comportements dans notre milieu.
    Vous avez absolument raison lorsque vous dites qu'un système informatique ne peut pas, à lui seul, tout résoudre. Lorsque nous parlons de rapidité, lorsque nous parlons de l'efficacité du système, il faut que tous ces éléments soient cohérents. Les solutions que nous envisageons et sur lesquelles nous travaillons actuellement concernent les normes temporelles et l'expérience en matière de litige, comme l'a souligné le vérificateur général, afin de veiller à ce que nos procureurs et nos avocats de la défense aient l'expertise nécessaire à l'avenir. Cela nécessite également de la formation pour tous les intervenants du système de justice militaire.
    Pour revenir à une question ou à un commentaire précédent, le comité disciplinaire consultatif des Forces armées canadiennes, formé de sous-officiers supérieurs, est l'organisme consultatif principal des Forces armées canadiennes à cet égard. On a également souligné qu'il fallait une meilleure communication entre les intervenants, afin de veiller à ce que le système fonctionne bien et profite de la perspective, de l'expertise et des points de vue de tous les principaux intervenants.
    Je ne voudrais surtout pas oublier de mentionner le projet de loi C-77, qui fait actuellement l'objet d'une discussion au Parlement. On s'attend à ce que ce projet de loi réduise de façon importante les retards au sein du système de justice militaire, car il simplifiera les audiences sommaires et les ramènera au statut de simples infractions disciplinaires dont les commandants divisionnaires, les officiers délégués, peuvent s'occuper.
(1650)
    C'est maintenant au tour de M. Bezan.
    Bienvenue au Comité, monsieur Bezan. La parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    J'ai lu le rapport 3 du Bureau du vérificateur général. C'est une condamnation de notre système de justice militaire. Je dois dire que compte tenu de toutes les recommandations et les conclusions, c'est décevant. Il y a ensuite les retards et la décision de la Cour suprême dans l'arrêt Jordan. Pour l'essentiel, justice différée est justice refusée.
    Pourquoi en est-il ainsi? Est-ce lié à un problème de ressources humaines? Est-ce que c'est parce qu'il n'y a pas suffisamment de juges, d'avocats ou d'enquêteurs? Même les enquêtes durent plus de 30 jours.
    Madame Thomas, qu'est-ce qui explique cette situation? Pourquoi notre système de justice militaire n'a-t-il pas les ressources nécessaires?
    J'ai discuté avec la commodore Bernatchez au sujet de ses ressources, et elle croit avoir les ressources nécessaires.
    Je crois qu'un certain nombre d'éléments entrent en jeu. Il n'y a pas de réponse unique. Je ne peux pas vous donner une réponse simple pour expliquer les retards. Parfois, la victime ne veut pas témoigner, ou les gens concernés sont en déploiement. On parle d'un organisme opérationnel dont les membres se déplacent constamment. S'il y a des retards dans les unités, c'est parce que des membres sont déployés dans des opérations. Parfois, c'est lié à des formations. Parfois, cela a à voir avec la disponibilité des juges ou des procureurs. Il existe un certain nombre de facteurs.
    Je crois, et je suis peut-être la seule, que les données aideront la commodore Bernatchez à gérer les choses différemment, parce qu'elle... Elle croit avoir suffisamment de ressources; peut-être que ce n'est pas le cas et que nous constaterons qu'il y a un goulet d'étranglement quelque part au pays, dans un volet du processus ou dans notre façon de procéder dans certaines parties du processus.
    Or, nul doute qu'en raison de ces retards, vous enfreignez vos propres règles et codes de services, comme le code de conduite. Vous essayez de maintenir le bon ordre, la discipline et le moral, mais comment y arrivez-vous si tout le monde traîne en cour?
    Je sais que vous êtes bien au fait de la décision qu'a rendue la Cour d'appel de la cour martiale dans l'affaire Beaudry. Est-ce qu'une partie de cette décision de retirer du système de justice militaire toutes les causes qui seraient considérées comme relevant d'une cour martiale pour les intégrer dans la procédure civile constitue la solution? Des gens recommandent, et certains le font depuis des années, de les retirer du système de justice militaire, mais je crois que cela sape vraiment le code de conduite. Cela mine la philosophie militaire et la chaîne de commandement.
    Je suis ravi que les FAC interjettent appel de la décision devant la Cour suprême et aient demandé une suspension des procédures, mais en même temps, lorsque nous voyons des rapports comme celui-là — et vous avez des détracteurs à l'extérieur du Bureau du vérificateur général —, ne jetez vous pas de l'huile sur le feu?
    Nous convenons que le rapport est inquiétant concernant le système de justice militaire. Il ne s'agit pas de l'intention ou de sa validité. C'est que pour certaines affaires, le processus du système de justice militaire pose problème, ce qui nuit à l'esprit de corps, et c'est pourquoi nous sommes déterminés à régler le problème.
    Puisque l'affaire Beaudry est devant les tribunaux, nous ne pouvons pas en parler, mais nous devons tenir compte du fait — et il s'agit ici de faire une comparaison et non d'essayer de détourner la question — qu'il y a des problèmes de temps similaires, voire plus graves, dans le système de justice civile. La situation ne s'améliorera pas nécessairement si l'on apporte ce changement.
(1655)
    Commodore, vous avez mentionné que le projet de loi C-77 — et vous comparaîtrez à la première séance que le comité de la défense consacrera à son étude demain — permettra de combler une partie des lacunes dans la Loi sur la défense nationale. Je suis ravi du fait que nous allons prendre des mesures concernant les droits des victimes qui correspondent à ce que contient déjà la Charte des droits des victimes, qui a été présentée par le gouvernement conservateur précédent.
    Pouvez-vous nous expliquer en quoi cela simplifiera le processus dans les audiences sommaires et changera la façon dont les choses se déroulent concernant les déclarations de culpabilité par procédure sommaire par rapport au système de la cour martiale?
    Merci, monsieur Bezan.
    Commodore Bernatchez.
    Dans le système actuel, les infractions peuvent être jugées par une cour martiale ou par procédure sommaire. Lorsque des accusations sont portées, souvent, l'accusé peut choisir un des deux. Ensuite, il y a le procès sommaire ou... L'évolution du droit canadien a fait en sorte qu'il y a de nombreuses étapes. Le système de justice militaire doit suivre l'évolution des normes juridiques et des valeurs canadiennes, et c'est de cette façon que le système s'est développé. Avec le temps, toutefois, les commandants se sont retrouvés avec un fardeau et des responsabilités énormes alors que, comme on l'a souligné avec justesse, ils n'ont pas de formation en droit, et cette situation complexe, à elle seule, entraîne des retards dans le processus.
    Le projet de loi C-77 vise à instaurer des audiences sommaires. Pour les cas les plus simples dans les unités, par exemple le cas où quelqu'un se présente en retard au travail, un commandant ou un officier délégué seront en mesure de juger les affaires, sans que le membre ait un choix, car il n'y aura pas de conséquences sur le plan pénal. Ce sera semblable aux audiences disciplinaires qui ont lieu dans la fonction publique ou à la GRC. Des choses mineures resteront au niveau de l'unité. Cela permettra de désengorger la cour martiale. De plus, le nombre d'étapes à suivre diminuera, et les choses se dérouleront donc plus rapidement. C'est de cette façon que les retards seront réduits.
    Merci beaucoup. Vous avez posé de bonnes questions et fourni de bonnes réponses.
     Je crois que nous allons revenir à la question finale, à moins que d'autres personnes souhaitent intervenir après.
    Monsieur Robert-Falcon Ouellette.
    Encore une fois, merci beaucoup, commodore Bernatchez. Je lisais justement votre curriculum vitae. Il est très impressionnant, en passant. Vous avez été membre des réserves navales. Vous avez été officière de combat dans le combat naval et, en 1990, vous êtes allée en Yougoslavie et en Afghanistan. C'est très intéressant.
    J'ai une question qui s'adresse aux représentants du Bureau du vérificateur général. Vous avez effectué cet examen. Allez-vous en faire un autre après avoir laissé le temps au système de justice militaire d'apporter les modifications liées au projet de loi C-77?
    Nous sommes en train d'examiner notre calendrier d'audits à venir. Nos décisions quant à ce qui fera l'objet d'un audit ou d'un suivi se fondent en partie sur les plans d'action et le temps qu'il faut au ministère — celui de la Défense nationale dans ce cas-ci — pour effectuer son travail. Évidemment, les travaux que le Comité accomplit pour obliger les ministères à rendre des comptes nous intéressent. Je ne peux pas dire si nous réexaminerons ce dossier très bientôt, mais c'est un volet important qui a attiré notre attention.
    Comme vous le savez probablement, nous sommes en train de terminer un audit qui est lié à cette question à certains égards, aux comportements sexuels inappropriés. Je suis donc sûr que le Bureau comparaîtra à nouveau devant votre comité lorsqu'il présentera l'audit en question.
     Concernant les affectations du personnel militaire, le vérificateur général propose une période minimale de cinq ans. Il s'agissait habituellement d'une période de deux ou trois ans, d'au plus quatre ans pour le même poste. C'était parce qu'on voulait former des gens dans divers postes, de sorte que s'ils étaient mutés à un poste de commandement, ils connaîtraient tous les emplois, ou une bonne partie des emplois, dont ils pourraient être aux commandes plus tard.
    Dans quelle mesure ce changement aura-t-il une incidence sur le système de justice militaire à long terme?
(1700)
    Commodore Bernatchez.
    Il est admis que pour être un bon avocat plaidant, une personne doit avoir de l'expérience et de l'expertise. Les rapports Bronson de 2008 et 2009 l'ont souligné.
    Nous l'avons reconnu, et j'ai ordonné à mon chef d'état-major que la vaste majorité des avocats plaidants qui font partie du système de justice militaire restent en place pendant une période minimale de cinq ans. Bien entendu, cela sera fait conformément aux souhaits du directeur des poursuites militaires et du directeur du Service d'avocats de la défense également, car il y a des gens qui ne sont pas faits pour être des avocats plaidants, de sorte qu'il faut qu'on ait la possibilité de dire qu'une personne ne convient pas et qu'elle doive être remplacée.
    Cela permettra de développer les compétences, mais vous avez tout à fait raison. Nous devons examiner l'ensemble de cet organisme qu'est le Cabinet du Juge-avocat général et déterminer où nous devons établir un l'équilibre pour qu'il y ait également l'approche généraliste, car le Cabinet du Juge-avocat général est responsable de fournir des conseils juridiques en ce qui concerne tous les domaines du droit militaire et il nous faut en développer les connaissances.
    Ce que j'ai demandé aux Forces armées canadiennes, et nous avons commencé cet automne, c'est de faire une analyse de profession des avocats militaires pour déterminer quels sont les besoins en formation, combien de temps l'affectation des avocats militaires devrait durer, et de quel type d'expérience ils ont besoin, qu'il s'agisse d'avocats plaidants ou de généralistes du Cabinet du Juge-avocat général.
    C'est un long processus. Il faut habituellement cinq ans pour qu'il devienne efficace. Lorsque l'analyse de profession sera terminée, nous serons en mesure de déterminer comment nous pouvons ajuster nos pratiques de gestion du personnel pour pouvoir obtenir les meilleurs résultats pour nos clients.
    J'ai une dernière question.
    Allez-y, monsieur Ouellette.
    Elle porte sur l'idée des procès sommaires. Évidemment, avant le dépôt du projet de loi C-77 au Parlement, une personne se retrouvait avec un dossier. Elle était criminellement responsable. Il s'agissait d'une affaire criminelle. Les choses ont maintenant changé.
    Y aura-t-il un programme d'information? L'un des problèmes liés au système de justice militaire, c'est que les gens avaient très peur d'y avoir recours. Si une personne était en retard, elle était accusée et à un moment donné il fallait qu'elle obtienne un pardon. Bon nombre de gens hésitaient, car il y a 20 ans, on pouvait être accusé et avoir un casier judiciaire pour la vie au moment de quitter les forces, seulement pour 15 minutes de retard.
    La situation est en train de changer. Y aura-t-il un programme d'information sur le terrain pour que les gens sachent que cet outil a changé, qu'ils peuvent y recourir, qu'ils peuvent en fait imposer la discipline? La discipline est importante pour une raison. Si des gens font des erreurs, d'autres peuvent mourir. Si un militaire n'utilise pas bien ses armes, s'il tire avec son arme d'une manière inappropriée, s'il fait des choses qui ne conviennent pas, ses camarades pourraient mourir pendant les opérations, et évidemment, nous ne voulons pas que cela se produise.
    Que faites-vous pour veiller à ce que la structure disciplinaire soit souple sur le terrain, concernant l'information?
    Merci beaucoup, monsieur Ouellette.
    Commodore Bernatchez.
    Vous avez raison de dire que certaines des infractions qui sont jugées sommairement actuellement pourraient mener à quelque chose qui ressemble à un casier judiciaire. Les changements qui seraient apportés par le projet de loi C-77 garantiraient que tout ce qui fait l'objet d'audiences sommaires n'ait pas de conséquences sur le plan pénal ou criminel.
    Il s'agira d'un changement radical. Si nous passons du procès sommaire à l'audience sommaire, tous les acteurs du système de justice militaire auront besoin de recevoir une formation approfondie. C'est une chose que le Cabinet du Juge-avocat général et les Forces armées canadiennes ont faite en 1998 lorsqu'un changement radical a été apporté au système de justice militaire, et nous y sommes très habitués. Ce sera important. Il faudra que ce soit de façon délibérée.
    Comme vous l'avez dit précédemment, il devra s'agir non seulement des officiers des Forces armées canadiennes, mais de tous ceux qui assurent le maintien de la discipline — les sous-officiers supérieurs, les militaires du rang, toutes les personnes qui ont un rôle à jouer, la personne qui reçoit une plainte, celle qui mène l'enquête, celle qui porte les accusations, celle qui tient l'audience sommaire.
(1705)
     Merci.
    J'aimerais poser une question à nos invités. Nous menons une étude et préparons un rapport. Nous déposons un rapport au Parlement concernant l'étude que nous avons entreprise au sujet de l'examen du vérificateur général. Mes analystes ici présents m'ont donné une question en prévision du rapport que nous rédigerons. Cela concerne la réponse fournie du ministère qui figure au paragraphe 3.86, qui a trait à l'indépendance des directeurs des deux services.
    Permettez-moi seulement de lire, aux fins du compte rendu, la recommandation du vérificateur général et votre réponse. Voici ce qu'on dit au paragraphe 3.86:
Le Juge-avocat général devrait évaluer si ses pratiques et processus portent atteinte à l’indépendance du directeur des poursuites militaires et du directeur du Service d’avocats de la défense, et s’il y aurait lieu d’apporter des correctifs ou de prendre des mesures d’atténuation.
    Dans votre réponse, vous acceptez sa recommandation et vous dites ce qui suit:
D’ici janvier 2019, le Cabinet du Juge-avocat général effectuera un examen exhaustif de ses liens avec le directeur des poursuites militaires et le directeur du Service d’avocats de la défense afin de s’assurer que leurs rôles indépendants respectifs au sein du système de justice militaire sont respectés. Cela englobera un examen de toutes leurs directives politiques en vigueur.
     Qu'en est-il de cet examen? Il sera effectué d'ici janvier, soit dans un avenir assez rapproché. Dans quelle mesure les deux directeurs sont-ils indépendants? Que pouvez-vous nous dire sur l'état actuel des choses à ce sujet?
    En réalité, l'indépendance et la perception d'indépendance sont essentielles à un système de justice militaire légitime. Nous prenons la question très au sérieux.
    Le rôle indépendant du directeur des poursuites militaires et du directeur du Service d'avocats de la défense est prévu dans la Loi sur la défense nationale. La relation hiérarchique ou la supervision générale exercée par le juge-avocat général à cet égard est établie par l'entremise du Parlement.
    Dans la pratique, au quotidien, je garde toujours à l'esprit l'indépendance de ces deux joueurs. Dans le cadre de mon orientation politique stratégique pour les trois prochaines années, j'ai prévu l'obligation pour tout le personnel du bureau du juge-avocat général de m'aider dans le cadre de la surintendance du système de justice militaire, dans le respect absolu de l'indépendance de ces joueurs.
    À l'heure actuelle, nous avons aussi réalisé un examen complet de toutes les politiques du juge-avocat général relatives au directeur des poursuites militaires et au directeur du Service d'avocats de la défense. Nous avons tenu des consultations avec ces deux directeurs et n'avons trouvé aucun problème associé à l'indépendance en ce qui a trait à ces politiques. Nous allons continuer de consulter les deux directeurs pour élaborer de meilleures pratiques afin d'assurer non seulement l'indépendance factuelle, mais aussi la perception d'indépendance, qui est très importante.
    L'une des pratiques que j'ai mises en place cette année pour la période de référence est la suivante: pour la toute première fois, j'ai dit au directeur des services d'avocats de la défense et au directeur des poursuites militaires qu'ils étaient responsables de l'évaluation de leur personnel. Je ne jouerai aucun rôle à cet égard. Les directeurs évalueront les membres de leur personnel et les renverront directement au centre en vue de la sélection aux fins d'une promotion.
    Je suis aussi d'accord avec la suggestion du directeur des poursuites militaires voulant qu'il communique directement avec le ministre de la Défense nationale au sujet des questions associées aux poursuites. Alors qu'avant, on aurait pu penser que le juge-avocat général avait un rôle à jouer à cet égard, je vous assure que ce n'est plus le cas.
    Lorsque le directeur des poursuites militaires et moi tenons des discussions, elles visent uniquement l'administration de son bureau et le renouvellement de l'effectif, lorsque cela relève de ses fonctions. La Loi sur la défense nationale me permet d'émettre des directives générales ou précises dans certains cas. Ce n'est jamais arrivé. À titre informatif, mes prédécesseurs, qui se sont toujours acquittés de leurs tâches au meilleur de leurs capacités et de façon tout à fait professionnelle, n'ont jamais émis de telles lignes directrices non plus. Si tel était le cas, elles devraient être rendues publiques. Je pourrais publier des directives générales à l'intention du directeur des services d'avocats de la défense. Cela n'a jamais été fait. Il faudrait qu'elles soient publiées.
    Enfin, ces deux joueurs indépendants n'ont jamais rapporté d'enjeux en matière d'indépendance au juge-avocat général par l'entremise du rapport annuel exigé par la Loi sur la défense nationale. Ils n'ont jamais soulevé de préoccupations à cet égard, que ce soit au sujet de la pratique ou de la perception. Comme il s'agit d'une question essentielle qui est au coeur de la légitimité du système, nous songeons constamment à des façons d'interagir qui permettront d'accroître l'indépendance, non seulement sur le plan factuel, mais aussi sur le plan de la perception.
(1710)
    Merci beaucoup.
    Certains de vos propos ont incité mon ami M. Christopherson à vous poser une autre question. Ce sera la dernière de la journée.
    C'est une question inoffensive.
    Monsieur Berthelette, selon le rapport, le vérificateur général se préoccupait du risque de compromettre l'indépendance. J'aimerais vous entendre à ce sujet. Êtes-vous satisfait de la réponse que vous avez entendue? Est-ce qu'on répond à vos préoccupations?
    Je crois que nous avons soulevé certains enjeux en matière d'indépendance dans notre rapport. La perception d'indépendance était l'une de nos préoccupations. La question du roulement des avocats, qui a déjà été abordée par le juge-avocat général, était l'un des domaines préoccupants. Le mouvement des avocats entre la défense et la poursuite était un domaine qui avait retenu notre attention.
    Au bout du compte, nous appuyons l'engagement du juge-avocat général à l'égard du contrôle de l'indépendance de ces deux représentants, et nous avons hâte de connaître les résultats.
    Nous vous remercions de votre présence.
    En règle générale, je résume une journée comme celle d'aujourd'hui en disant qu'il est possible qu'après la réunion, vous passiez en revue certaines des questions qui ont été posées et certaines des réponses que vous avez données. Si vous avez d'autres renseignements à fournir au Comité, nous vous encourageons à nous les transmettre pour approfondir la question. Alors que nous poursuivons notre étude, nous laissons toujours la porte ouverte afin que vous puissiez transmettre ces renseignements à notre greffière.
    Nous vous remercions d'être venus. La démocratie est une chose extraordinaire et, comme l'ont fait valoir M. Nuttall, M. Christopherson et d'autres, le Canada est un brillant exemple en la matière. Ce sujet en fait partie. Il s'agit du volet sur la transparence et la reddition de comptes, sur la façon dont on utilise les ressources gouvernementales afin que les Canadiens fassent confiance au système.
    Nous prenons le plan d'action que vous nous avez transmis très au sérieux. Nous nous en servons pour préparer les recommandations sur lesquelles nous nous entendons. Nous effectuons un suivi. Nos chercheurs approfondissent la question et déterminent si on a donné suite à nos recommandations ou non. Dans la négative, nous vous invitons à témoigner de nouveau, mais vous ne voudrez probablement pas revenir si tel est le cas.
    Nous vous remercions de nous avertir si l'une ou l'autre de ces échéances changent. Nous aimons savoir si vous êtes en avance ou en retard également. Merci beaucoup.
    Je remercie aussi les membres du Comité pour leurs questions intéressantes. La séance est levée.
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