Bienvenue à la 129e réunion du Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes.
Avant de commencer, je demanderais à tous les participants dans la salle de lire les lignes directrices figurant sur les cartes mises à jour qui se trouvent sur la table. Ces mesures sont en place pour prévenir les incidents acoustiques et pour protéger la santé et la sécurité de tous, notamment nos interprètes.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Tous les témoins ont terminé les tests de connexion requis avant la réunion.
J'aimerais rappeler aux participants les points suivants. Veuillez attendre que je vous donne la parole en vous nommant avant de parler. Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Les membres du Comité doivent lever la main s'ils souhaitent prendre la parole, qu'ils soient dans la salle ou qu'ils participent par l'intermédiaire de Zoom. La greffière et moi-même allons gérer l'ordre des interventions de notre mieux.
Je crois comprendre que M. Bachrach va remplacer Mme Collins.
:
Monsieur le président, je vous remercie, ainsi que tous les membres du Comité, de me recevoir et de travailler au bénéfice des Canadiens.
Je remercie aussi la communauté anishinabe algonquine, avec laquelle j'ai grandi en Haute‑Gatineau et qui continue de partager et de préserver son territoire non cédé pour les générations futures. C'est un modèle à suivre.
[Traduction]
Après 39 ans à EY, j'ai récemment entamé un nouveau chapitre de ma carrière au Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations, le CIRANO.
Le CIRANO offre un forum scientifique neutre qui réunit des scientifiques, des investisseurs, des organismes de normalisation et d'autres parties prenantes à l'échelle mondiale et locale dans la poursuite d'un objectif commun, qui est d'accélérer la construction d'infrastructures de marché locales et mondiales, ainsi que des données et des solutions technologiques nécessaires à un financement durable et une croissance durable.
Notre plan de travail vise à transformer cinq enjeux cruciaux en opportunités pour notre pays.
Premièrement, il faut des fonds publics et privés pour appuyer les transitions. Les entreprises sont à but lucratif et doivent être suffisamment rentables. C'est la même chose pour les investisseurs. Les finances publiques doivent être mises à profit intelligemment pour attirer les capitaux privés nécessaires à une croissance durable.
Deuxièmement, un soutien est nécessaire pour les citoyens touchés par les transitions. Certains emplois changeront et d'autres disparaîtront. Certaines administrations font plus de progrès que d'autres pour obtenir des employeurs la divulgation pertinente requise afin de déterminer les secteurs, les personnes et les collectivités touchés par les transitions climatiques. Nous aurons besoin de renseignements semblables pour les transitions liées à l'IA afin d'élaborer des programmes de soutien pour les personnes et les collectivités touchées.
Troisièmement, les investisseurs mondiaux ont besoin d'une divulgation mondiale cohérente en matière de durabilité. Ils ont uni leurs forces au niveau international avec des organismes internationaux de normalisation, l'OICV et les banques centrales pour obtenir l'information dont ils ont besoin.
Les progrès sont beaucoup plus rapides que prévu. Les investisseurs mondiaux n'attendent pas l'adoption par les pays pour demander aux entreprises de leur portefeuille de réduire leurs émissions de portée 1 et 2 et d'utiliser leur pouvoir d'achat pour s'engager avec les chaînes de valeur en amont à réduire les émissions de portée 3 et à s'aligner sur d'autres exigences en matière d'approvisionnement durable. Lorsque des organisations comme Apple, Microsoft, Walmart, Amazon, la ville de Toronto ou la ville de Vancouver harmonisent leurs pratiques d'approvisionnement pour répondre aux besoins des investisseurs, les entreprises canadiennes doivent s'adapter pour conserver l'accès au marché pour leurs produits.
Quatrièmement, les petites et moyennes entreprises ressentent la pression des acheteurs de leurs produits, qui demandent des niveaux de maturité plus élevés en matière de durabilité. Les PME ont besoin de soutien pour répondre à ces nouveaux besoins d'approvisionnement et de financement durables.
Les institutions financières et la plupart des grands acheteurs dépensent beaucoup d'argent pour construire des plateformes technologiques à l'appui des PME. Certaines associations industrielles mondiales investissent dans des solutions industrielles pour demander les mêmes renseignements dans le même format pour tous les fournisseurs à l'échelle mondiale. L'absence d'efforts coordonnés à cet égard au Canada entraîne un redoublement des coûts et des demandes pour les PME, ce qui nous rend moins concurrentiels. Tout cela pourrait être réduit grâce à des efforts de leadership coordonnés.
Cinquièmement, il y a la lourdeur de la réglementation. La dernière chose dont nous avons besoin, c'est de plus de règlements au Canada. Aux États‑Unis, les investisseurs ont collaboré avec le gouvernement fédéral, les États et les administrations municipales pour demander la même base de divulgation de la durabilité. Par conséquent, les coûts d'exploitation des entreprises américaines sont moins élevés et les approbations de projets sont plus rapides.
Notre travail à CIRANO se fera dans deux domaines. Il fournira des données probantes à l'appui des décisions et des politiques publiques qui accéléreront la rationalisation et l'harmonisation des normes mondiales de durabilité qui peuvent être mises à profit pour les finances publiques et privées, les caractéristiques cohérentes des produits de financement durable, le financement de transition, les projets d'infrastructure et les marchés du carbone. Nous fournirons également des analyses pour déterminer et comparer les pratiques exemplaires, les outils et d'autres accélérateurs de croissance durable afin d'améliorer l'accès aux marchés financiers, de réduire les obstacles au commerce, de réduire les coûts d'observation pour les entreprises et d'accélérer l'approbation des projets.
Je suis fière des voix des dirigeants canadiens des marchés scientifiques et financiers, des organismes de normalisation et des syndicats et des communautés des Premières Nations qui contribuent à façonner les règles du jeu mondiales pour transformer les marchés financiers.
Nous devons aussi parler d'une seule voix pour guider et soutenir la réussite des entreprises et des Canadiens. À CIRANO, nous ferons notre part afin de vous aider à coordonner vos efforts pour réussir.
Un pays comme le Canada, qui possède l'un des meilleurs mix énergétiques au monde, des ressources naturelles et une population instruite et branchée, peut et doit être un chef de file mondial en matière de croissance durable et de financement durable.
[Français]
Cela me fera plaisir de répondre à vos questions.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les députés de m'avoir invité à prendre la parole. C'est un grand honneur pour moi.
Premièrement, je tiens à souligner que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe et que les sables bitumineux du Canada se trouvent sur les territoires visés par le Traité no 8, où vivent les Cris et les Denesulines, et sur le territoire non cédé des Métis de la région du cours inférieur de l'Athabasca.
J'affirme clairement et sans équivoque que les changements climatiques sont la question la plus cruciale et la plus existentielle de notre époque. Cela me rappelle souvent le proverbe autochtone « Nous n'héritons pas de cette terre de nos ancêtres, mais nous l'empruntons aux générations futures ». Il est impératif que les politiques publiques et les priorités privées se concentrent sur la réduction de l'impact des émissions industrielles, tout en comprenant que ces sujets affectent les moyens de subsistance de nombreuses personnes. Il est essentiel de comprendre les effets individuels microéconomiques de ces politiques pour élaborer des politiques publiques qui recueillent l'appui du public, et pour assurer la stabilité à long terme dont les entreprises ont besoin pour faire ces investissements transformationnels.
J'ai eu la chance, au cours de ma carrière, d'occuper différents postes dans le domaine des finances d'entreprise au sein de l'industrie des ressources. C'était d'abord dans les services bancaires d'investissement d'une banque canadienne et d'un important régime de retraite canadien, et c'est maintenant en tant que dirigeant d'un innovateur en technologies propres. Quand j'étais jeune, j'avais souvent de la difficulté avec ma conscience, parce que je faisais partie d'une industrie souvent qualifiée de « sale ». En avançant dans ma carrière, je me suis rendu compte qu'il serait facile de quitter l'industrie, mais que le simple fait d'ignorer le problème, y compris par des actions comme le désinvestissement, ne le réglerait pas. Nous devons plutôt travailler de façon constructive à trouver des solutions.
Plus précisément, l'utilisation des combustibles fossiles est un problème mondial lié à la demande plutôt qu'à l'offre. Je veux dire par là que tant que le monde aura besoin d'énergie, il cherchera des sources d'énergie. Aujourd'hui, plus de 50 % de cette énergie provient des combustibles fossiles, le Canada ne constituant que 6 % de l'approvisionnement mondial en pétrole. Imaginez si, ce soir, toutes les stations-service n'avaient plus de carburant. Tout le pays serait paralysé. Pensez à n'importe quelle catastrophe: les gens se précipitent d'abord vers les stations-service. L'énergie est essentielle à la civilisation humaine. Bien que nous ayons réalisé des gains impressionnants dans le domaine de l'énergie renouvelable, ils ne couvrent collectivement que 17 % des besoins énergétiques dans le monde aujourd'hui.
D'un point de vue canadien, si nous fermons le robinet au Canada et que nous abandonnons ce secteur et ceux qui y travaillent, d'autres sources de combustibles fossiles remplaceront notre production. Cette production de remplacement se déplacera vers d'autres pays qui ont des normes environnementales plus défavorables que le Canada, où les améliorations sont peu probables, surtout en ce qui concerne la décarbonation. Le secteur emploie également plus de 900 000 personnes, ce qui signifie qu'il y a des centaines de milliers de familles, dont bon nombre sont autochtones et de l'Ouest canadien, dont la vie dépend d'un secteur pétrolier et gazier canadien florissant.
En même temps, nous devons reconnaître que ce secteur est la plus importante source d'émissions au Canada aujourd'hui, à plus de 30 %. Cela signifie que nous devons investir dans des solutions aux problèmes de notre industrie énergétique, notamment les émissions de carbone, mais aussi d'autres enjeux clés, comme les bassins de résidus des sables bitumineux. Nous avons la capacité de continuer à fournir l'énergie dont le monde a besoin tout en réduisant son impact le plus possible pendant la transition mondiale. À mon avis, nous sommes dans une transition énergétique qui pourrait s'étendre sur des décennies, et nous devons utiliser la technologie pour améliorer notre industrie énergétique au lieu de simplement l'ignorer à court terme.
Chez CVW CleanTech, nous avons une technologie prête à être déployée pour retraiter les déchets ou les résidus des sables bitumineux afin de récupérer d'autres hydrocarbures ainsi que des minéraux critiques, dont le titane, le zircon et les éléments des terres rares. Ces minéraux critiques sont essentiels à la transition énergétique et à la sécurité nationale, et ils ont une incidence sur des choses comme l'énergie nucléaire, les véhicules électriques, l'énergie renouvelable et l'industrie aérospatiale. En récupérant le pétrole perdu dans le processus d'exploitation des sables bitumineux, nous récupérons également une ressource importante qui, autrement, serait perdue dans les bassins de résidus, évitant ainsi une responsabilité environnementale pour les générations futures.
Les bassins de résidus des sables bitumineux sont également la plus importante source d'émissions fugitives de méthane au Canada et, peut-être, dans le monde. En récupérant ces hydrocarbures, nous éliminons le substrat pour la méthanogenèse subséquente, ce qui réduit les émissions fugitives de méthane de plus de 90 % et les émissions des sables bitumineux de 5 à 10 %, réduisant ainsi les émissions du Canada de 0,5 %.
Notre entreprise a mis au point cette technologie canadienne grâce au soutien des gouvernements de l'Alberta et du gouvernement fédéral, ce qui souligne le rôle important que jouent les gouvernements pour favoriser l'innovation. Nous avons récemment annoncé un partenariat avec quatre communautés autochtones de la région du Traité no 8, et nous sommes reconnaissants à nos partenaires autochtones de nous faire confiance pour aller de l'avant avec cette importante technologie, qui correspond à leurs préoccupations au sujet de la qualité de l'air et de l'eau dans la région.
Cela fait ressortir un autre sujet important, soit le fait que la réconciliation économique avec de nombreuses communautés autochtones, surtout dans l'Ouest canadien, est intimement liée au succès de nos industries primaires. L'absence de mise en œuvre de cette technologie prête à être déployée par l'industrie met en évidence l'écart qui existe entre l'innovation, qui est forte au Canada, et sa commercialisation, pour laquelle notre pays éprouve des difficultés.
En conclusion, je pense que les initiatives de politique publique doivent être conçues pour stimuler l'innovation à l'échelle du secteur visant à réduire les émissions, à la fois par des moyens réglementaires qui incitent l'industrie à déployer des solutions réalisables, et par des mesures incitatives comme les CTI annoncés, qui ne se concentrent pas sur la méthode de réduction du carbone, mais plutôt sur la réduction elle-même.
Je crois fermement qu'investir dans l'ingéniosité humaine et promouvoir l'innovation au Canada nous aidera à trouver les solutions dont nous avons besoin.
Encore une fois, merci. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
:
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant vous. Je vous remercie particulièrement d'avoir entrepris cette importante étude portant sur les impacts climatiques et environnementaux relatifs au système financier canadien.
C'est un sujet aride et complexe, qui est trop souvent laissé aux banquiers et aux analystes financiers. Que vous vous y penchiez malgré tout témoigne de l'importance que vous accordez à cette question cruciale pour le Canada et les Canadiens, aujourd'hui.
[Traduction]
Lorsque j'ai commencé ma carrière juridique en 2007, chez Davies Ward Phillips and Vineberg, l'un des plus importants cabinets d'avocats d'entreprise au Canada, l'économiste britannique sir Nicholas Stern qualifiait les changements climatiques de plus grande faillite du marché que le monde ait jamais connue. Près de 20 ans plus tard, en dépit de toutes les belles paroles et de tout le bruit, nous n'avons toujours pas remédié à cette grande défaillance du marché qu'est le changement climatique. La plupart des grandes institutions financières canadiennes fonctionnent encore comme si la crise climatique n'existait pas et comme si les efforts du gouvernement pour réduire les émissions de carbone ne les concernaient pas.
Pire encore, les banques canadiennes comptent parmi les plus importants investisseurs dans les combustibles fossiles, c'est‑à‑dire qu'elles financent la cause même de la crise climatique, alors que les gouvernements du monde entier se sont réunis à Dubaï l'an dernier et se sont finalement engagés à délaisser les combustibles fossiles. Cela devrait indiquer très clairement que le financement des combustibles fossiles n'est pas un financement durable.
Une grande partie de la conversation sur la façon dont le secteur financier anticipe les changements climatiques met l'accent sur la divulgation des risques importants, principalement les risques que les changements climatiques posent pour leurs activités. Il est inquiétant de constater qu'une étude d'Oxford réalisée plus tôt cette année a révélé que les investisseurs ne tiennent pas compte des risques liés aux poursuites en matière de changements climatiques, alors que les poursuites judiciaires contre les entreprises polluantes et les institutions financières qui les soutiennent s'accumulent à l'échelle mondiale. D'ici à ce que ces poursuites aboutissent à un jugement, ce qui pourrait représenter des billions de dollars en passif, les risques se seront matérialisés et il sera trop tard pour la gestion prudente des risques que les règles actuelles sont censées assurer.
Dans l'ensemble, le cadre axé sur les risques est mal adapté pour faire face à la crise climatique. Comme l'a dit un ancien économiste de la Banque d'Angleterre: « Le simple fait de discuter des risques et d'évaluer les risques ne signifie pas que nous faisons la transition vers la carboneutralité. De nombreuses entreprises peuvent discuter des risques et ne rien faire pour faire avancer la transition. »
Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre plus longtemps que l'industrie financière réalise l'erreur qu'elle commet en sous-estimant le risque climatique et reconnaisse son importance fondamentale pour tous les aspects de la prise de décisions d'affaires.
Selon les Principes pour l'investissement responsable des Nations unies, le Canada est un « pays à faible réglementation selon les normes internationales ». Nous sommes dangereusement en retard par rapport à nos partenaires commerciaux plus tournés vers l'avenir.
J'ai été l'architecte juridique de la Loi sur la finance alignée sur le climat, présentée par la sénatrice indépendante Galvez en 2022. Ce projet de loi a été rédigé sur l'avis de dizaines d'experts nationaux et internationaux. Il s'appuie sur les meilleures données scientifiques disponibles en matière de climat, sur l'expertise financière et sur les pratiques internationales. Le Comité sénatorial des banques en est maintenant saisi.
La LFAC a reçu l'appui de 120 organisations de la société civile et de députés de quatre partis différents. Cinq pétitions ont été déposées à la Chambre des communes à l'appui de ce projet de loi. Le magazine Moral Money du Financial Times a récemment déclaré qu'il s'agissait de l'une des mesures législatives les plus intéressantes qui soient en matière de climat.
Nous avons besoin d'un secteur financier qui appuie — au lieu de contrer, comme c'est le cas aujourd'hui — les objectifs du Canada visant à réduire les émissions liées au réchauffement de la planète. Nous devons imposer une réglementation pour nous sortir d'une situation insoutenable en ce qui concerne la finance. Il est temps d'obliger les instituions financières à agir, et de cesser d'attendre qu'elles s'autoréglementent.
La Loi sur la finance alignée sur le climat introduit les éléments réglementaires dont nous avons besoin.
Premièrement, les institutions financières doivent respecter les engagements internationaux et nationaux du Canada et produire des plans climatiques crédibles et des rapports annuels sur les progrès réalisés.
Deuxièmement, elles doivent également éviter les conflits d'intérêts au sein de leur conseil d'administration et tirer parti de l'expertise en matière de climat tout en traitant le changement climatique comme une nouvelle mission d'intérêt public qui l'emporte sur les autres.
Troisièmement, la LFAC préconise de nouvelles exigences relatives au capital qui tiennent compte des risques climatiques systémiques générés par les activités des institutions financières.
La Loi sur la finance alignée sur le climat est l'élément manquant dont nous avons besoin pour aligner le secteur financier du Canada sur un avenir sans danger pour le climat et pour favoriser un boom de l'investissement propre qui protégera notre économie à l'avenir.
[Français]
J'espère que votre rapport portant sur la présente étude fera la lumière sur cette question importante pour les Canadiens et qu'il proposera des pistes de solution, parmi lesquelles on retrouvera les éléments introduits par le projet de loi sur la finance alignée sur le climat.
J'ai très hâte de répondre à vos questions.
Je vous remercie.
C'est un honneur pour moi de comparaître devant le Comité aujourd'hui. Je comparais depuis les territoires des Haudenosaunee, des Wendat, des Anishinabe et des Mississaugas de Credit, à Toronto.
Je m'appelle Richard Brooks et je suis directeur du financement climatique à Stand.earth, une ONG binationale qui travaille sur la protection du climat. Notre programme de financement de la lutte contre les changements climatiques, appuyé par notre million de membres, vise à transformer les institutions financières qui sont à la traîne, en championnes de la transition énergétique.
Comme vous le savez tous, aucune collectivité n'est épargnée par les incendies dévastateurs, les inondations et les fumées des catastrophes causées par le climat. Lorsqu'un tiers de Jasper est brûlé, que notre centre financier de Toronto est inondé à maintes reprises et que notre pays a accumulé plus de 5 milliards de dollars de dommages liés au climat cette année seulement, c'est un risque pour notre économie.
Pas plus tard qu'aujourd'hui, l'Organisation mondiale de la santé a approuvé l'appel lancé par The Lancet, la plus importante revue médicale du monde, exhortant les institutions financières à se désinvestir des combustibles fossiles « pour sauver des vies ». La directrice de l'OMS, Mme Maria Neira, a déclaré:
Nous voyons des vagues de chaleur, des sécheresses et une insécurité alimentaire sans précédent qui touchent des millions de vies dans le monde. Pourtant, nous continuons d'injecter des billions de dollars dans les combustibles fossiles, qui alimentent ces crises. Il est temps de cesser de financer les dommages et de commencer à investir dans la santé.
Plus tôt ce mois‑ci, l'observatoire climatique de l'Université de Toronto a publié un rapport novateur. Il a étudié les émissions financées par 18 banques, fonds de pension et gestionnaires d'actifs. Ces 18 institutions financières ont financé des émissions qui représentent le double des émissions déclarées au Canada, et 100 fois celles de la ville de Toronto. Leur financement et leur investissement dans des entreprises de combustibles fossiles d'un montant de 1,2 billion de dollars en 2022, a produit 1,4 milliard de tonnes d'émissions de CO2. Si elles étaient un pays, ces 18 institutions financières seraient le cinquième plus grand émetteur au monde.
En juin, le PDG de la Banque Royale du Canada a comparu devant ce même comité. Vous vous souviendrez qu'il ne se rappelait pas quel était son salaire lorsqu'on lui a posé la question à plusieurs reprises. Il a déclaré que 80 % des clients de RBC avaient des plans de transition, mais il a oublié de dire que seulement 2 % de ces clients avaient des plans de transition alignés sur 1,5°C. C'est le chiffre magique.
Dave McKay ne se souvenait pas non plus que la banque avait révélé que les émissions de RBC provenant du financement des sociétés pétrolières et gazières étaient égales aux émissions produites par toutes les voitures et tous les camions légers au Canada chaque année.
Les PDG des autres banques ont mentionné la nécessité d'une transition lente et « ordonnée », mais il n'y a rien d'ordonné dans le fait que les Canadiens fuient les incendies. Il n'y a rien d'ordonné dans le fait que des villes soient évacuées et que des milliers de personnes n'aient plus de toit, et pourtant nos banques continuent de financer la cause du problème — les émissions des combustibles fossiles — et prétendent qu'une élimination progressive serait désordonnée.
Un rapport qu'Urgewald a publié aujourd'hui même, intitulé Global Coal Exit List, révèle qu'au cours de la dernière année, RBC, la TD et BMO ont en fait augmenté le financement des entreprises exposées au charbon. Le Canada est un membre fondateur de l'Alliance: Énergiser au‑delà du charbon. Pourquoi nos banques permettent-elles de nouvelles transactions sur le charbon?
Les nations autochtones et les collectivités privées de leurs droits au Canada subissent de façon disproportionnée les répercussions des changements climatiques. Elles sont également aux premières lignes de nombreux projets pétroliers et gaziers risqués et polluants que les banques financent et facilitent. Il s'agit notamment de projets comme PRGT, Coastal GasLink, Rio Bravo et les gazoducs qui y sont associés.
Il y a quelques semaines, Exxon a émis une nouvelle obligation. Son échéance est en 2074. Cette obligation est utilisée à des fins générales pour faciliter les opérations de forage et d'excavation de la société pendant encore 50 ans, bien après la date de tout plan et engagement de carboneutralité au Canada et au‑delà. Quatre banques ont souscrit cette obligation. La Banque Royale du Canada, qui s'est engagée à atteindre la carboneutralité en 2050, en faisait partie. Il s'agit d'un exemple clair du PDG d'une banque qui vous induit en erreur, vous, le public et les investisseurs en prétendant aider ses clients à faire la transition. C'est une fausse justification pour permettre aux géants des combustibles fossiles de polluer bien au‑delà de 2050. Ce n'est pas ordonné. Ce n'est pas juste. C'est de la cupidité.
Nous ne pouvons pas atteindre nos objectifs climatiques nationaux, respecter nos engagements internationaux et protéger nos collectivités si nos banques ne sont pas de notre côté.
Parmi les banques dont vous avez entendu parler en juin, la TD est maintenant connue comme le principal blanchisseur d'argent pour les cartels de la drogue. La RBC fait l'objet d'une enquête du Bureau de la concurrence pour avoir prétendument induit les consommateurs en erreur au sujet de ses déclarations sur le climat et pour avoir fait de l'écoblanchiment. La Banque CIBC et BMO ont été condamnées à payer des amendes pour tenue de dossiers inappropriée, et la Banque Scotia a été condamnée à payer une amende pour négociation illégale de matières premières.
Nous ne pouvons pas nous fier aux mesures volontaires de nos banques. À ce jour, elles ne se sont pas révélées fiables ou responsables.
Voici les mesures que mon organisation vous propose d'appuyer dans votre rapport et vos recommandations.
Encourager le commissaire du Bureau de la concurrence à utiliser ses pouvoirs accrus pour enquêter sur toutes les banques. Aller de l'avant et appuyer la . Imposer des plans de transition climatique normalisés et crédibles pour toutes les banques. Les banques réalisent des profits records à l'heure actuelle. Imposez-les au moyen d'une taxe sur l'impact des changements climatiques et affectez ces fonds à l'indemnisation des dommages causés par les changements climatiques, dont j'ai parlé plus tôt. Inciter les institutions financières à investir davantage dans les énergies renouvelables et les solutions climatiques.
Je vous exhorte à publier un rapport officiel et à inclure ces recommandations dans vos conclusions.
Merci de votre temps.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous félicite pour le nouveau rôle que vous assumez aujourd'hui.
Je tiens à saluer les dames et les hommes qui sont présents aujourd'hui pour nous livrer leurs témoignages. Je les en remercie infiniment.
Ma question s'adressera à M. Dubey, de CVW CleanTech.
Nous savons tous que les changements climatiques sont réels, que leurs effets sont très forts et qu'il faut s'y adapter. Nous reconnaissons qu'ils sont réels, mais il faut aussi reconnaître que nous ne pouvons pas, du jour au lendemain, changer radicalement notre façon de faire. Il faut procéder par étapes, et c'est ce que l'on appelle la transition énergétique.
Le plus récent rapport déposé par HEC Montréal nous apprend que près de 19 milliards de litres de pétrole ont été consommés dans la province du Québec, l'année dernière, ce qui représente une augmentation de 7 %. Environ la moitié de ce pétrole vient des États‑Unis, surtout du Texas et de la Louisiane, tandis que l'autre moitié vient de l'Alberta. Je tiens à rappeler que ni le Texas ni la Louisiane ne contribuent à la péréquation, alors que le Québec reçoit environ 14 milliards de dollars en péréquation et que cet argent vient principalement des provinces qui développent leur potentiel énergétique.
Monsieur Dubey, dans la mesure où nous sommes dans une transition énergétique, j'aimerais donc vous poser la question suivante.
Si, demain matin, on arrêtait toute la production de pétrole en Alberta, ou si on n'avait pas le financement nécessaire pour continuer le développement de ce qui se passe et de ce qui se fait en Alberta, quel serait l'impact sur la consommation? Celle-ci diminuerait-elle ou, au contraire, la production se ferait ailleurs tout, simplement? Tous les revenus iraient aussi ailleurs et, en fin de compte, ce ne serait pas la planète qui y gagnerait, mais plutôt les autres pays.
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Je vous remercie de votre question.
Essentiellement, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, le marché pétrolier est un marché mondial de l'offre et de la demande. Le Canada ne représente que 6 % de l'approvisionnement mondial en pétrole. Il s'agit clairement d'un problème lié à la demande, où nous devons réduire la demande de combustibles fossiles au fil du temps, et l'offre y répondrait.
Dans une situation, par exemple, où nous aurions décidé que le Canada ne produirait plus de pétrole et de gaz à partir de demain, cet approvisionnement serait tout simplement assuré par un autre pays qui produit aussi du pétrole. De ce point de vue, ce ne serait pas la façon la plus efficace pour nous de poursuivre la décarbonation.
Au lieu de cela — et je suis un partisan convaincu de la décarbonation —, ce que nous devrions faire, c'est investir massivement dans les innovations et les technologies, surtout celles qui sont mises au point au Canada, qui peuvent contribuer à la décarbonation de la production et de l'utilisation du pétrole pendant la transition. Comme beaucoup d'autres dans cette salle, j'espère que la transition se fera le plus rapidement et le plus harmonieusement possible, mais encore une fois, nous devons veiller à ce que la transition se fasse de façon logique.
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Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je souhaite la bienvenue à tous nos témoins d'aujourd'hui, au Comité, pour l'étude de ce sujet extrêmement important.
Mes questions s'adresseront principalement à Mme Hubert.
Madame Hubert, je vous remercie de tout votre excellent travail dans ce domaine vraiment très complexe. Je sais que vous avez été extrêmement active dans ce domaine avec votre travail constant et, j'ose l'ajouter, votre passion également.
Le 9 octobre dernier, le gouvernement a finalement annoncé qu'il mettait en avant la taxonomie. Il faudra tout de même attendre, car cela va prendre 12 mois. Cependant, on met en avant une taxonomie alignée sur la science, ce qui était très important pour atteindre l'objectif de 1,5 degré de réchauffement planétaire. C'est donc encourageant. Je trouve que nous sommes déjà en retard, mais nous allons de l'avant.
Nous mettons aussi en avant la divulgation obligatoire d’informations financières liées au climat et à l’environnement. Ces deux annonces très importantes sont au centre de la finance verte et de transition.
J'aimerais que vous nous parliez justement du rôle de la divulgation et du Conseil des normes internationales d'information sur la durabilité, ou ISSB, et de l'interaction qu'il y aura avec cet organisme. J'aimerais aussi que vous nous parliez du processus de consultation du Conseil canadien des normes d'information sur la durabilité, le CCNID, qui va vraiment participer à cette étape importante de la divulgation obligatoire.
Sur ce, madame Hubert, je vous invite à commenter la situation.
Tout d'abord, je dirai un mot sur la taxonomie qui, selon moi, a été très bien expliquée par Barbara Zvan. Qu'on instaure une taxonomie ou non, l'ensemble des investisseurs va définir ce que sont une obligation durable et une finance durable.
Comme je l'ai mentionné, le Canada a un meilleur portefeuille énergétique que la plupart des pays du monde. En disant comment on aligne nos investissements pour permettre à nos industries d'atteindre la cible et en mettant en place la divulgation pour permettre aux entreprises de le dire — on ne leur demande pas de faire quoi que ce soit, on dit simplement ce qu'elles font pour leur permettre de gagner. On va être déjà meilleur que les autres, grâce à notre portefeuille énergétique. Ne pas le faire serait se priver de l'accès au marché.
Pour ce qui est de l'ISSB, le Conseil des normes internationales d'information sur la durabilité, il s'agit de normes de durabilité pour le secteur privé, et elles sont portées par les banques centrales. La Corée du Nord et la Russie n'y participent pas. Avec les autres pays, nous devons penser notre économie en fonction du 1,5 degré, sinon, nous ferons face à un risque systémique pour les marchés financiers. Le nombre d'incidents climatiques, le nombre d'incendies et le nombre de virus feront tomber le système d'assurance. Quand on n'a plus d'assurance, on ne peut plus obtenir de prêt. On le voit en Floride, alors que l'assurance d'un condo qui coûtait 6 000 $, il y a quatre ans, coûtait 12 000 $, il y a trois ans, puis 25 000 $, l'année dernière, pour atteindre 60 000 $ aujourd'hui. On ne peut plus obtenir d'assurance, alors on ne peut plus contracter de prêt. On commence à constater le même phénomène chez nous aussi.
Il est essentiel d'avoir de la divulgation pour nous permettre d'intégrer le climat à toutes les décisions financières. L'ISSB concerne le secteur privé. Les investisseurs veulent cela, mais ils veulent aussi s'assurer que, dans les plans climatiques, on ne cause pas de dommages à la nature, aux humains ou aux communautés qui seront touchées, parce que cela a aussi des effets néfastes sur le système financier. On demande de la divulgation, mais assurons-nous d'abord d'avoir, comme première norme, de la divulgation sur les autres choses importantes pour lesquelles on peut démontrer la corrélation d'une mesure et le rendement à long terme pour le secteur privé.
Dans le cas du secteur public, c'est une autre organisation qui adopte les normes, soit le Conseil des normes comptables internationales du secteur public, ou CNCISP. Cette organisation a créé le Groupe de référence sur le développement durable dont les membres ont indiqué qu'ils allaient adopter les mêmes normes que le secteur privé, à l'échelle internationale, et qu'ils allaient ajouter des exigences pour le secteur public. Qu'on veuille ces normes ou pas, elles sont là. Les investisseurs derrière le Conseil des normes internationales d'information sur la durabilité ont 55 billions de dollars en gestion d'actifs. Quand ces derniers décident qu'ils veulent quelque chose ou le demandent, qu'on adopte ou non une réglementation ou non, cela ne change pas grand-chose pour nos entreprises. Ce qui est important, c'est de joindre nos forces pour aider nos entreprises à faire des plans alignés sur une taxonomie canadienne et pour contribuer à harmoniser notre économie en vue de 2050, en plus de soutenir entre-temps les travailleurs et les entreprises.
On demandait tout à l'heure quelles étaient les technologies éprouvées. Les États‑Unis ont aligné tous leurs crédits d'impôt sur les technologies rentables et qui fonctionnent. Ils ont donné des crédits d'impôt pour accélérer l'utilisation de ces technologies. Le Texas est un des États qui ont fait le plus de progrès sur la planète. Les États‑Unis sont en train de dépasser l'Europe.
Pour comprendre ce qui est requis, il faut de la concertation fondée sur la science, la finance au service de l'alignement pour...
:
Il y a beaucoup de questions dans cette question.
Je pense effectivement qu'il faut opérer un certain divorce entre l'industrie fossile et l'industrie financière pour éviter des conflits d'intérêts réels ou apparents. Les procès-verbaux des conseils d'administration ne sont pas rendus publics, donc on ne sait pas comment ils gèrent cette question, mais, de l'extérieur, on voit clairement un certain problème.
Sur le plan de la matérialité, il y a des termes qui circulent, comme « double matérialité », « matérialité dynamique » et « matérialité explosive ». Je me suis beaucoup amusée à lire des textes sur la comptabilité. Un comptable, en 1972, a qualifié l'évaluation de la matérialité d'exercice rappelant Alice au pays des merveilles. L'ancienne présidente de l'organisme américain de réglementation des marchés financiers, la U.S. Securities and Exchange Commission, a même dit que les avocats, les comptables et les gens d'affaires se trompaient constamment à propos de la matérialité. C'est pour cette raison que, dans mon allocution d'ouverture, j'ai évoqué le fait que ce n'était pas un standard approprié. En effet, on gère non seulement un risque financier, mais aussi un risque existentiel pour l'entièreté de la vie sur Terre.
Le projet de loi de la sénatrice Galvez ordonne l'action. Il ne s'agit pas simplement de faire de la divulgation, il faut faire partie de la solution. Il ne suffit pas d'en parler ou divulguer les répercussions qu'auront les changements climatiques sur l'entité, mais il faut aussi regarder l'impact de l'entité sur le monde réel, notamment par rapport à ses émissions de gaz à effet de serre, et il faut forcer l'action afin de réduire cet impact et de bouger vers les solutions.
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Il est toujours difficile de prédire comment les choses vont se dérouler. Il y a toujours des conséquences imprévues, comme les opposants aiment toujours le dire.
Je pense que cela réglerait les problèmes fondamentaux que nous avons aujourd'hui. Une étude réalisée par le Centre canadien de politiques alternatives a montré qu'en 2022, les bénéfices records des sociétés ont été responsables de 40 % de l'augmentation des prix. Tous ces bénéfices accrus sont allés à trois secteurs principaux. Deux d'entre eux étaient l'industrie des combustibles fossiles et l'industrie des banques et de l'assurance.
Il pourrait y avoir moins de concentration de la richesse au sommet. J'espère que nous obtiendrons un meilleur financement pour des entreprises comme celle de M. Dubey. Espérons que nous aurons de meilleurs emplois pour les Canadiens. Si nous finançons cela, on prévoit 2,2 millions d'emplois bien rémunérés dans le domaine des énergies renouvelables.
Nous pouvons considérer cela comme la prochaine révolution industrielle. Si nous voulons que la décarbonisation ait lieu d'ici 2050, au plus tard, l'argent doit être là bien avant. Nous devons construire cette infrastructure, et les investissements doivent donc être faits bien avant cela. C'est pourquoi le secteur financier doit agir en premier. Il ne s'agit pas de fermer le robinet demain matin, mais d'investir l'argent dans ce que nous savons avoir un avenir.
Je remercie les témoins de leur présence.
Je vais poser une question plus générale, car nous étudions la finance durable depuis le printemps et nous avons entendu de nombreux témoins experts parler de la nécessité pour le système financier de travailler en faveur des objectifs du gouvernement, plutôt que contre eux.
Dans le cadre de notre étude sur la finance durable, nous avons également entrepris une étude sur les feux de forêt de Jasper, la catastrophe qui s'y est produite. Cette étude a été très politisée, et elle s'est transformée en une question de savoir qui accuser de l'incendie, au lieu d'examiner ce qui peut être fait. Les gens qui veulent poursuivre la politisation ne font que la prolonger, mais il semble y avoir très peu d'intérêt à considérer les changements climatiques comme une cause sous-jacente ou à tenir compte de la façon dont cette étude sur les impacts climatiques reliés au système financier pourrait aider à prévenir des catastrophes de la sorte à l'avenir.
J'aimerais qu'on m'aide à comprendre comment il se fait qu'il y a des gens qui font fi des données scientifiques, qui ne voient pas les changements climatiques comme un problème réel et qui semblent se préoccuper davantage des profits à court terme que de l'avenir de la planète. Comment expliquer cette dissociation, et comment pouvons-nous mieux communiquer et travailler avec des gens qui sont peut-être sceptiques au sujet des changements climatiques et de la nécessité de ces taxonomies ou de vos investissements, par exemple, dans le genre de choses que vous faites?
Pouvez-vous commencer, madame Péloffy?
Je m'éloigne totalement de mes fonctions juridiques et je me mets dans les souliers de quelqu'un qui se soucie des changements climatiques depuis très longtemps.
Pardonnez-moi, mais je suis très fatiguée, car je suis aussi une maman qui songe au sort de son enfant.
Les nouvelles sont difficiles à assimiler et suscitent de la crainte, ce qui peut mener à son tour à de la colère ou au déni. Je l'ai moi-même ressenti. En effet, en cherchant à me renseigner, je suis tombée sur un documentaire qui disait que c'était un mensonge inventé de toutes pièces que l'on essayait de nous vendre. Ça m'a vraiment soulagée, car j'ai pensé que je n'aurais plus à craindre sans cesse la fin de tout ce qui m'est cher. Hélas, ce n'est pas un mensonge.
Je comprends que beaucoup de gens décident de ne pas s'en faire, de nier la réalité et de prendre pour boucs émissaires des gens vulnérables qui ne peuvent pas grand-chose à l'égard des problèmes, au lieu d'exiger des comptes des acteurs tout-puissants qui sont les vrais responsables de ces enjeux dans notre société. Je pense que c'est là que le bât blesse. Ça a quelque chose à voir avec la difficulté de gérer tout cela sur le plan psychologique.
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Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse à M. Brooks.
On sait que toutes les banques, tant à l'international qu'au Canada, font partie de l'alliance bancaire Net Zéro. Cependant, les banques canadiennes font également partie de l'Association des banquiers canadiens et de la Chambre de commerce du Canada, qui sont toutes deux opposées publiquement aux politiques environnementales du Canada sur le plan économique.
On sait aussi que les banques accordent un financement accru aux entreprises de combustibles fossiles.
Selon vous, y aurait-il moyen d'avancer dans un tel cadre avec des gens qui, finalement, croient plus ou moins aux changements climatiques?
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Je vous remercie beaucoup de votre question.
[Traduction]
C'est là qu'intervient la question des mesures volontaires par rapport aux mesures obligatoires. Nous avons beaucoup d'initiatives comme l'Alliance bancaire Net‑Zéro, qui est purement volontaire. Nous avons aussi d'autres organismes qui sont purement volontaires. Il y a beaucoup d'appels à l'action: il s'agit de demander à nos institutions financières d'en faire plus, mais sans les réglementer. Nous avons passé beaucoup de temps à réclamer des mesures volontaires, mais les géants du monde des affaires que vous avez rencontrés en juin, les PDG des grandes banques et des grandes sociétés pétrolières et gazières n'en font rien. Ils n'ont pas pu s'engager à investir autant qu'il le faut dans les solutions climatiques et les énergies renouvelables dont nous avons tous besoin, et ils ont doublé le financement du pétrole et du gaz comme ils le font depuis la signature de l'Accord de Paris sur le climat.
J'ai dit plus tôt que 18 des plus grandes institutions financières dont le siège social se trouve à Toronto — ma ville — ont investi 1 billion de dollars dans les combustibles fossiles en 2022, ce qui a entraîné des émissions de plus d'un milliard de tonnes. C'est pourquoi nous avons besoin de réglementation. L'action volontaire ne suffit tout simplement pas. Ce que je ne comprends pas, c'est comment les PDG de ces institutions peuvent rester impassibles dans les tours du centre-ville de Toronto quand le ciel se teinte d'orange, comme ce fut le cas l'été dernier lorsque nous avons eu des incendies partout au Canada, et regarder par leurs fenêtres en se disant qu'ils vont conclure une autre entente sur le pétrole et le gaz, et renoncer à financer les énergies renouvelables.
La Banque Royale du Canada en est un bon exemple, avec 265 millions de dollars...
J'ai quelques autres questions à vous poser au sujet des sables bitumineux.
Nous avons entendu les PDG des banques et quelques sociétés énergétiques. Je leur ai posé des questions sur l'intensité des émissions au cours des 15 ou 20 dernières années, surtout pour les produits des sables bitumineux. On a vu que les émissions du secteur pétrolier et gazier ont augmenté d'environ 11 ou 12 % depuis 2005. Cela est attribuable à l'intensité des émissions des sables bitumineux, qui se compte par baril de pétrole. Je sais que vous le savez, mais cela représente beaucoup plus d'émissions. Vous avez mentionné que le méthane est un facteur clé des émissions émanant des sables bitumineux.
Pensez-vous que l'industrie et les entreprises qui exercent leurs activités dans la région des sables bitumineux sont susceptibles de réduire elles-mêmes l'intensité de leurs émissions, par pure bonté, en l'absence d'une taxonomie vraiment bien définie, ou est‑ce que la réglementation et la divulgation adéquate suffiront à entraîner cette transition?
Je m'appelle Jasmin Guénette et je suis vice-président aux Affaires nationales à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, ou FCEI.
Je tiens à remercier les membres du Comité de cette aimable invitation. Je vais prononcer mon allocution d'ouverture en français, mais je pourrai répondre aux questions en français et en anglais.
La FCEI représente 97 000 propriétaires d'entreprises venant de tous les secteurs de l'économie, et ce, partout au pays. Nos membres sont des entreprises qui comptent neuf employés ou moins dans une proportion de 70 %, et des entreprises comptant entre 10 et 49 employés dans une proportion de 28 %.
Présentement, l'indice d'optimisme des entrepreneurs canadiens est très bas. C'est le constat qui ressort de notre sondage mensuel intitulé « Le Baromètre des affaires », dans lequel nous évaluons l'indice d'optimisme depuis quelques décennies déjà.
Non seulement cet indice est bas, mais la majorité des entrepreneurs ne recommanderaient pas aux Canadiens de se lancer en affaires en raison des frais d'exploitation très élevés, de l'incertitude économique et du fardeau fiscal.
Lorsqu'on demande à nos membres quels sont les facteurs qui limitent le plus la croissance de leur entreprise, la plupart nous disent que la demande est insuffisante. En d'autres mots, les consommateurs dépensent moins.
Quand on leur demande quelles sont les principales pressions sur les coûts dans leur entreprise, nos membres placent le coût des assurances, le coût des taxes et de la réglementation et les charges salariales dans les trois premières positions.
Il est important de noter que les coûts d'emprunt ont fortement augmenté depuis quelques années. Qui plus est, la proportion des demandes de financement des petites et moyennes entreprises, ou PME, a beaucoup augmenté au fil des ans. En effet, elle est passée de 35 % à 58 % entre 2012 et 2022. De plus, le taux d'approbation de ces demandes se situe à 94 % pour les propriétaires de moyennes entreprises, contre seulement 77 % pour les propriétaires de microentreprises.
Lorsque la Banque du Canada a commencé à hausser son taux directeur pour combattre l'inflation, la part des propriétaires de PME ayant du mal à assumer les coûts d'emprunt a bondi, passant de 21 % en janvier 2022 à 39 % en mai 2023.
Pour assurer le succès de nos entrepreneurs et celui de nos PME, les politiques publiques, comme les politiques environnementales, doivent éviter d'alourdir les fardeaux réglementaire, administratif, fiscal et financier de nos PME. Si on impose des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance aux institutions financières ou aux grandes entreprises, celles-ci pourraient les imposer à leur tour à leurs clients, ce qui risquerait d'entraîner une hausse des coûts pour les PME et rendre le financement moins accessible et plus cher.
Ainsi, nous demandons aux parlementaires de ne pas imposer aux PME de nouvelles dispositions législatives qui auraient pour conséquence d'augmenter leurs coûts et la paperasserie.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Je voudrais commencer par souligner que je vous parle depuis Toronto, territoire traditionnel de nombreuses nations, dont les Mississaugas de Credit, les Anishinabes, les Chippewas, les Haudenosaunees et les Wendats, et qui est aujourd'hui le foyer de nombreux représentants des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
Je vous remercie de m'avoir invitée à m'adresser aux membres du Comité aujourd'hui et de me permettre de contribuer à votre étude sur les impacts environnementaux et climatiques reliés au système financier canadien.
Je suis une associée d'EY, où je dirige notre travail sur la durabilité pour tous les paliers de gouvernement au Canada. J'ai acquis de l'expérience dans le secteur public, notamment à titre de dirigeante principale des finances de la municipalité de Toronto et de sous-ministre adjointe et administratrice en chef dans l'administration provinciale de l'Ontario. Je siège actuellement au Conseil sur la comptabilité dans le secteur public canadien et je travaille avec le Conseil des normes comptables internationales du secteur public, où je participe à l'élaboration des normes de durabilité.
Beaucoup de gens pensent que les normes de durabilité environnementale sont le produit d'un exercice de conformité ou une « bonne chose à avoir », mais c'est, en fait, un outil économique puissant, essentiel à la croissance des entreprises canadiennes et à l'augmentation de notre productivité et de notre compétitivité internationale. Plus de 20 pays représentant 55 % du PIB mondial, dont le Canada, ont annoncé des échéanciers de conformité à ces normes ou s'en servent déjà comme base pour leurs propres cadres de réglementation. Par ailleurs, la directive de l'Union européenne concernant la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises est en train de transformer la façon dont les entreprises évaluent les risques et les opportunités liés aux questions environnementales, sociales et de gouvernance. Cela a des répercussions à la fois sur les entreprises européennes et sur les entreprises ayant des intérêts économiques importants dans la région.
EY collabore avec des établissements financiers partout dans le monde pour circonscrire les occasions d'affaires durables et pour dialoguer systématiquement et en toute transparence avec les marchés financiers et les aider à faire la transition vers l'économie de l'avenir.
Les secteurs privé et public doivent travailler de concert pour veiller à ce que les systèmes de réglementation soient harmonisés, afin que nous puissions tirer pleinement parti de cette possibilité économique. On sait que les marchés n'aiment pas l'incertitude et on observe que les investisseurs engagés sur les marchés financiers ont besoin de plus d'information pour évaluer les risques. On sait avec certitude que des normes financières reconnues et adoptées à l'échelle mondiale permettent de créer un langage uniforme propice à la mondialisation des marchés.
On a besoin de normes de durabilité pour le secteur public et pour le secteur privé pour créer une plateforme semblable qui permette la comparaison des données et de l'information. Ces normes sont un facteur de clarification, aident à éliminer la confusion parmi les intéressés et réduisent l'incertitude.
Au cours de la dernière année, j'ai travaillé avec certains des fonds de pension et gestionnaires d'actifs les plus importants au monde. Ils se sont engagés à investir dans des projets de transition et à privilégier les administrations déterminées à investir dans la transition et à divulguer des renseignements sur la durabilité. Ils veulent aussi avoir l'assurance que ces investissements produiront les résultats escomptés. Des investisseurs et des banques se servent déjà de normes de durabilité pour déterminer l'accès au capital et le coût du capital. C'est une simple question d'offre et de demande. Plus il y a de capitaux disponibles, plus ils sont abordables. Si le bassin disponible est plus restreint, les tarifs sont moins attrayants et les coûts, plus élevés, et cela désavantage les entreprises canadiennes.
À mesure que d'autres pays adoptent des normes de durabilité plus rapidement que le Canada, ils exigent la divulgation d'information sur la transition et sur les risques. Les entreprises canadiennes qui participent à la divulgation d'information seront plus concurrentielles, aussi bien du point de vue de la part du marché que de celui de la croissance. Les entreprises qui n'y participent pas risquent de ne pas pouvoir participer aux chaînes d'approvisionnement. Les entreprises canadiennes qui exportent vers des pays plus avancés dans l'adoption de mesures de divulgation d'information sur la durabilité risquent de voir s'échapper ces occasions d'affaires et de perdre leur part du marché.
En conclusion, l'harmonisation des normes de durabilité des secteurs public et privé est essentielle pour l'économie. Elle permettra d'améliorer la comparabilité, de réduire l'incertitude et d'accroître l'accès au capital à des taux concurrentiels. La divulgation d'information sur la durabilité est essentielle pour l'économie, mais aussi pour l'environnement. Je recommande au Canada d'harmoniser et d'adopter les normes de durabilité du secteur privé et du secteur public.
Merci beaucoup de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui.
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Merci beaucoup de m'avoir invité.
Je m'appelle Adam Scott, et je suis directeur exécutif de Shift, une entreprise sans but lucratif vouée à l'éducation et à la promotion, qui vise à harmoniser le secteur financier du Canada avec la situation climatique. Je me joins à vous depuis Toronto, territoire traditionnel de nombreuses Premières Nations, dont les Mississaugas de Credit, les Anishinabes, les Chippewas, les Haudenosaunees et les Wendats.
Je suis un spécialiste de carrière en matière de climat et j'ai plus de 20 ans d'expérience dans la recherche de solutions à ce problème par le biais d'études, de politiques et de mesures stratégiques. À l'instar de nombreux autres collègues ayant témoigné ici, j'ai rédigé une feuille de route stratégique pour un système financier durable au Canada.
Je vais commencer en disant, comme l'ont fait beaucoup d'autres experts que vous avez entendus, que le Canada ne peut tout simplement pas respecter ses obligations climatiques à défaut d'une nouvelle politique visant à harmoniser notre système financier avec des cibles fondées sur des données scientifiques. La stabilité de notre système financier et la croissance à long terme de notre économie sont très menacées.
Ce n'est pas seulement un argument moral. C'est un argument financier. Comme vous le savez tous, puisque vous êtes des législateurs, beaucoup de décisions déterminantes pour les progrès du Canada en matière climatique ne sont pas prises par des responsables politiques. Elles sont prises à huis clos par des établissements financiers et des sociétés financières dans le cadre de leurs activités quotidiennes. C'est partout où des capitaux sont attribués, où de l'argent est emprunté, où des titres de créance sont délivrés et où des décisions d'investissement financier sont prises que les choses commencent à bouger sur le front climatique au Canada. Combien de décisions financières sont-elles prises chaque jour en fonction d'un plan de lutte contre les changements climatiques crédible et fondé sur des données scientifiques?
Selon le suivi de la carboneutralité de l'Université d'Oxford, environ les deux tiers des plus grandes sociétés canadiennes se sont engagées à atteindre la carboneutralité. Mais ce chiffre est beaucoup moins élevé dans les entreprises au sens large. Malheureusement, même parmi les entreprises et les établissements qui ont pris ces engagements, il est rare qu'on y donne suite au moyen de plans de transition climatique crédibles. Chaque jour, les décisions financières qui sont prises au Canada le sont généralement comme si de rien n'était, de sorte qu'on continue de financer l'échec climatique et de mettre en danger la stabilité de l'ensemble de notre système financier.
Les experts qui ont participé à ces audiences ont notamment souligné que les plus grandes banques du Canada n'ont pas réussi à concrétiser leurs engagements en matière de carboneutralité au moyen de plans crédibles de lutte contre les changements climatiques, surtout compte tenu de la nécessité évidente de ne plus financer le charbon, le gaz et le pétrole et d'attribuer des capitaux suffisants à des solutions climatiques crédibles.
Chez Shift, nous nous intéressons aux plans climatiques des régimes de retraite, qui sont les plus importants propriétaires d'actifs au Canada. Comme investisseurs à long terme, ces régimes sont extrêmement exposés aux risques climatiques et au délaissement d'actifs. On commence à voir des plans volontaires de leadership et de lutte contre les changements climatiques dans certains régimes de retraite — la preuve que des plans climatiques crédibles sont réels et très réalisables —, mais beaucoup trop de régimes de retraite, comme le Régime de pensions du Canada, refusent encore de fixer des objectifs provisoires tout en continuant d'investir dans une expansion des combustibles fossiles qui entrave directement la sécurité climatique.
Nous sommes également troublés par les lacunes évidentes en matière de gouvernance climatique, notamment par la prévalence des nominations réciproques aux conseils d'administration de sociétés de combustibles fossiles et d'établissements financiers, puisque cela induit un risque évident de conflits d'intérêts graves quand on discute de ce sujet. C'est un enjeu que d'autres ont abordé.
J'espère que, à cette étape de votre étude, vous saisissez pleinement les dangers de l'échec climatique pour le Canada et son économie. Cela nuit déjà à notre économie, à l'économie mondiale et à la croissance de notre PIB. C'est un obstacle à la croissance du PIB, lequel, à défaut de mesures, empirera d'année en année. Les établissements financiers canadiens sont fortement exposés au délaissement d'actifs qui peuvent brusquement perdre de la valeur à mesure que la transition énergétique en cours continue de s'accélérer.
Nous avons heureusement les outils nécessaires pour moderniser notre réglementation financière sur le climat. Les premiers éléments sont en cours d'implantation — vous en avez déjà parlé —, et il faut donc mettre en place une taxonomie verte crédible excluant les combustibles fossiles de l'étiquetage écologique ou de transition. L'écoblanchiment est déjà répandu dans les milieux financiers, et on ne peut pas permettre de nouvelles échappatoires.
Les règles de divulgation de l'information sont également essentielles. C'est une bonne chose que soient annoncées les premières mesures visant à modifier la Loi canadienne sur les sociétés par actions afin que les grandes entreprises s'alignent sur les normes redditionnelles internationales en matière de climat.
Cette tendance devra se poursuivre à plein régime. Ces mesures de base ne suffiront pas à harmoniser les flux financiers avec la sécurité climatique.
À l'instar de nombreux autres experts, j'orienterais cette étude vers la nécessité d'adopter les mesures de la , qui, comme on vous l'a dit, est un plan détaillé, ambitieux et concret pour passer de la divulgation à la réglementation directe de l'harmonisation au moyen de diverses mesures.
Je vous rappelle que la situation est sans précédent. La crise climatique continue de s'aggraver, avec des risques financiers complexes et potentiellement cataclysmiques. Notre système de réglementation désuet et fragile ne permet pas, tel quel, au secteur financier du Canada d'être à la hauteur de sa réputation de stabilité et de prudence.
Je conclurai en invitant instamment le Comité à comprendre que les réformes politiques que nous demandons devraient vraiment être considérées comme inévitables, car elles sont nécessaires pour protéger le système financier et atteindre nos objectifs climatiques. La question est de savoir quand nous allons les mettre en place. Cela se fera‑t‑il à temps?
Merci beaucoup.
Rien de tel qu'un petit problème technique pour vous déstabiliser. Je suis désolée, mais je n'ai pas entendu les autres témoins.
Distingués députés, je vous remercie de me permettre de comparaître devant le Comité permanent de l'environnement et du développement durable.
Je suis professeure de droit à l'Université de la Colombie-Britannique et chercheuse principale pour la CCLI, la Canada Climate Law Initiative. C'est un projet de collaboration entre les facultés de droit de l'Université de la Colombie-Britannique et de l'Université York dont l'objet est d'analyser les obligations légales des administrateurs de sociétés et des fiduciaires de régimes de retraite pour gérer les risques et les possibilités liés au climat.
Nous publions des directives sectorielles en étroite collaboration avec des organisations industrielles nationales, par exemple dans l'immobilier, l'exploitation minière, etc. Nous avons 70 experts canadiens en gouvernance climatique, parmi lesquels des PDG, des comptables, des actuaires, des avocats et d'autres personnes donnant bénévolement de leur temps pour faire des présentations à des conseils d'administration sur la gouvernance climatique efficace.
On ne saurait trop insister sur l'importance des travaux du Comité. D'autres témoins vous ont parlé des effets économiques dévastateurs des changements climatiques, dont le fait que, l'an dernier seulement, les phénomènes liés aux changements climatiques ont coûté plus de 3,5 milliards de dollars en dommages assurés dans diverses collectivités du Canada. Il me semble que nous pouvons tous admettre, quelle que soit l'allégeance politique, qu'il faut s'assurer d'avoir les politiques nécessaires pour atténuer les préjudices à venir et garantir la transition vers une économie plus durable.
Je dois d'abord vous dire que le CCLI félicite le Bureau du surintendant des institutions financières pour sa ligne directrice B‑15 sur la gestion des risques climatiques. Celle‑ci énonce les principales exigences en matière de gouvernance applicables à plus de 400 établissements financiers sous réglementation fédérale. Ces lignes directrices, élaborées à la suite de vastes consultations auprès du secteur financier, sont le point de référence sur lequel la politique fédérale pourrait s'appuyer pour instaurer transparence, intégrité et certitude dans le système financier.
Le CCLI est convaincu que trois autres politiques fédérales sont nécessaires pour protéger l'économie canadienne.
La première viserait à modifier la Loi canadienne sur les sociétés par actions ou ses règlements. Depuis que nous avons présenté notre exposé préliminaire, on a, bien sûr, annoncé que le gouvernement allait adopter une loi pour obliger les plus grandes entreprises canadiennes à divulguer leurs plans de lutte contre les changements climatiques.
Ce qui nous importe vraiment est de veiller à ce que les états financiers comprennent un plan de transition pour atteindre les objectifs climatiques du Canada au plus tard en 2050, avec des cibles quinquennales de réduction des émissions et des rapports annuels sur les progrès enregistrés. La divulgation des plans de transition fournira aux investisseurs les renseignements dont ils ont besoin pour financer ce genre de décision à la vitesse et à l'échelle requises — et vous en avez entendu parler aujourd'hui — afin que le Canada reste concurrentiel dans l'économie mondiale.
À titre d'exemple, si on l'appliquait aux 1 102 plus grandes entreprises enregistrant un revenu moyen de 389 millions de dollars par an et des actifs moyens de près de 1,5 billion de dollars, puis, un an plus tard, à plus de 6 000 autres entreprises, on transformerait l'économie canadienne tout en épargnant 98 % de l'ensemble des entreprises. Autrement dit, nous ne proposons pas de faire porter ce fardeau aux petites entreprises ou aux microentreprises, mais aux grandes sociétés, celles qui font vraiment bouger notre économie et qui doivent avoir un plan.
La deuxième mesure politique serait de modifier le Règlement sur les normes de prestation de pension et d'exiger que les administrateurs de régime, en vertu de leurs obligations actuelles, s'appuient sur un énoncé écrit des politiques et procédures de placement, ou EPPP de son petit nom affectueux, pour déterminer comment leurs politiques en matière de résilience climatique s'appliquent au portefeuille d'investissements et de prêts du régime. Ils ont déjà l'obligation fiduciaire d'investir les actifs des fonds de pension de façon prudente et impartiale et d'équilibrer les intérêts intergénérationnels — depuis les gens de mon âge jusqu'à mes petits-enfants à venir — dans le choix des investissements à court et à long terme. Il est cependant très important qu'ils soient tenus de s'y mettre, car ce changement de politique serait très important.
La troisième mesure serait d'exercer des pressions pour qu'on élabore rapidement la taxonomie du financement vert et du financement de transition du Canada. Il faut se rappeler qu'il s'agit d'un système de classification. Ce n'est pas une norme imposée. Ce système permet de circonscrire, comme 40 autres pays l'ont déjà fait, ce qui constituera un financement vert et un financement de transition. On estime que 115 milliards de dollars par an seraient nécessaires à la transition du Canada vers une économie à faibles émissions de carbone, et une taxonomie scientifique permettrait de garantir l'intégrité, la clarté et l'interopérabilité des marchés qui, à l'échelle mondiale, seraient nécessaires pour accélérer le mouvement des capitaux mondiaux vers les entreprises canadiennes.
Les investisseurs sont déjà à la recherche de possibilités d'investissement, et le Canada détient des ressources et une expertise dans les minéraux critiques, les technologies propres et une foule d'autres domaines durables. Toutefois, en l'absence d'une taxonomie commune permettant d'investir dans cette transition, les capitaux iront à d'autres administrations, qui nous ont devancés dans son adoption. Plus de 26 institutions financières canadiennes ont déjà approuvé la feuille de route du Conseil d'action en matière de financement durable. Il faut maintenant mettre en place ce conseil avant la fin de l'année pour qu'il puisse entrer en action.
Sur ce, je vous laisse poursuivre la discussion.
Merci.
Madame Sarra, vous avez parlé des petites entreprises et des microentreprises. Notre représentant de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante est également préoccupé par leurs besoins, tout comme je le suis.
Comment les petites entreprises devraient-elles comprendre cette conversation sur la finance durable et ses répercussions possibles sur leurs activités, sachant que de nombreuses petites entreprises ont peu de souplesse ou de tolérance au risque? Elles essaient juste de faire des affaires dans de petites collectivités à l'échelle du pays.
Cette conversation porte‑t-elle uniquement sur les grands acteurs de l’économie canadienne, ou les petites entreprises devraient-elles aussi s'en préoccuper, ou du moins prendre connaissance de la tendance actuelle?
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Je pense qu’il y a deux aspects à cette réponse. Le CCLI est certainement d’avis qu'il faut que certaines grandes entreprises disposent de paramètres clairs et, en ce sens, les plans d’action sur les changements climatiques sont importants. Comme je l’ai mentionné, 98 % des entreprises canadiennes ne seraient pas touchées par cette mesure.
Quant aux petites entreprises, la taxonomie leur sera très utile si elles effectuent un travail novateur dans le domaine des technologies propres, des nouvelles technologies minières, etc. Cela ne fait aucun doute. Nous avons travaillé avec le secteur minier. À titre d'exemple, nous avons préparé un guide sur l’exploitation minière, puis nous en avons préparé un autre de concert avec plusieurs organisations dans l’industrie, pour les microentreprises dédiées à l’exploration ou à l’exploration avant-projet, pour voir quelles mesures concrètes elles pourraient prendre pour attirer des capitaux et démontrer leur engagement, tout cela sans grandes normes contraignantes.
C’est en partie une question de... Le mot « éducation » n’est pas le bon, mais il s’agit en fait de renforcer les capacités dans la micro-économie en fournissant un appui solide, plutôt que d'imposer des normes du sommet vers le bas. Il y a là d’énormes possibilités.