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Bon après-midi, chers collègues.
Nous entamons aujourd'hui notre étude sur les impacts climatiques et environnementaux reliés au système financier canadien.
À la fin de la réunion, j'aurai besoin d'une période de cinq minutes pour faire une mise à jour au sujet de l'invitation que nous avons lancée aux PDG des compagnies pétrolières. Nous devrions être en mesure de régler cette question assez rapidement si nous avons la collaboration de tout le monde.
Sans plus tarder, j'aimerais souhaiter la bienvenue à nos premiers invités. Nous recevons deux membres du Groupe d'experts sur la finance durable du Canada, soit M. Andrew Chisholm, ainsi que Mme Barbara Zvan, qui agit aussi à titre de présidente-directrice générale pour un autre organisme.
On m'informe qu'ils désirent partager entre eux la période de 10 minutes et que c'est Mme Zvan qui commencera.
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Bonjour, monsieur le président et chers membres du Comité.
Je m'appelle Barb Zvan. Comme on l'a souligné, je suis présidente et cheffe de la direction du University Pension Plan. Je suis aussi membre du Conseil d'action en matière de finance durable et présidente du Groupe d'experts techniques sur la taxonomie. J'ai également siégé au Groupe d'experts sur la finance durable au Canada. Comme représentante du secteur financier, je me trouve devant vous aujourd'hui pour parler du lien important qui existe entre l'économie, la finance durable et l'environnement.
L'économie canadienne ne s'en tire pas aussi bien que nous le voudrions. En mars, la première sous-gouverneure de la Banque du Canada a dit que l'heure a sonné concernant la productivité, nous avertissant que le faible taux de productivité du Canada avait atteint le niveau d'urgence. Dans ce contexte économique, les effets des changements climatiques nous guettent. Les 12 derniers mois ont été les plus chauds jamais enregistrés. L'hiver dernier, les températures dépassaient les normales historiques de 5,2 °C. Et l'année 2023 marquait notre pire saison de feux de forêt.
Les changements économiques se font sentir sur notre PIB, nos exportations et les pertes d'emploi au Canada, et les prévisions mondiales publiées il y a quelques semaines sont encore plus alarmantes. Selon les estimations du budget fédéral de 2022, le Canada doit investir annuellement 115 milliards de dollars supplémentaires pour atteindre ses engagements en matière de carboneutralité. Voilà donc une occasion d'investissement inégalée, qui ne peut être saisie uniquement au moyen de financement public.
La sobriété carbone est un important facteur de concurrence, et le Canada est en bonne posture pour mettre à profit son expertise dans des secteurs comme les minerais critiques, l'énergie propre et le transport vert. Le marché est appelé à se développer, comme le démontre la croissance rapide du marché des obligations vertes et des exportations vertes. Au Canada, les exportations sobres en carbone ont augmenté de 9,4 % entre 2012 et 2023, un résultat qui dépasse le taux de croissance de toutes les autres exportations combinées.
Pour tirer profit des occasions de marché qui appuient les objectifs nets zéro du Canada, nous devons débloquer le potentiel d'investissement du secteur privé et redoubler l'attractivité du Canada à titre de destination favorable aux investissements alignés sur la carboneutralité. Alors, qu'est‑ce qui nous retient? Les raisons sont multiples, mais je vais m'attarder uniquement sur celle qui relève de mon domaine d'expertise, l'investissement.
Lorsqu'ils cherchent à investir à long terme, les investisseurs canadiens et internationaux recherchent le plus de certitude possible en s'appuyant sur de l'information crédible, sur une divulgation proactive respectant les normes mondiales, et sur la confiance que les projets et actifs investis permettront de réduire les émissions carbone, en phase avec les engagements locaux et mondiaux. Les investisseurs sont également en quête de certitude en matière de politiques entourant les priorités du Canada quant à la transition vers la carboneutralité, et cherchent les composantes qui permettront d'accorder une place centrale à la finance durable afin de favoriser l'atteinte de nos objectifs nets zéro.
En 2018, le Groupe d'experts sur la finance durable a examiné différentes façons de développer la finance durable et de l'harmoniser avec les objectifs climatiques et économiques du Canada. Nous avons établi qu'une taxonomie et des normes de divulgation jouent un rôle déterminant dans la démocratisation de la finance durable et favorisent le niveau de confiance du marché. Nos recommandations, publiées en 2019, incluaient la création du Conseil d'action en matière de finance durable, ou CAFD, afin de rallier différents intervenants en vue d'élaborer une taxonomie canadienne.
Le CAFD, au sein duquel l'industrie financière et les autorités de réglementation canadienne sont bien représentées, a publié son rapport final en septembre 2022. Il présente un cadre proprement canadien qui porte sur la taxonomie de la finance verte et de la transition aligné sur nos objectifs et sur une économie à zéro émission nette, et qui est compatible avec les attentes des acteurs internationaux et d'autres taxonomies existantes. Nous avons également proposé un modèle de gouvernance pour jeter les bases d'un tel projet.
Qu'est‑ce qu'une taxonomie? C'est un système de classification qui aide à diriger les capitaux vers des projets considérés comme verts ou, plus particulièrement dans le cas du Canada, vers des projets de transition qui aident les entreprises à réduire leur empreinte carbone de manière significative. La marche à suivre existe déjà. À l'échelle mondiale, plus de 40 taxonomies ont été mises en œuvre ou sont en cours d'élaboration, chacune étant adaptée à un pays ou à une région spécifique en vue de créer un pont entre les marchés de capitaux et leurs trajectoires nettes zéro respectives. La majorité des pays du G7, bon nombre de pays de l'OCDE, diverses économies de ressources naturelles, dont l'Australie, et bien des pays émergents ont établi leur propre taxonomie; le Kenya vient d'ailleurs de publier une version préliminaire.
De concert avec les normes de divulgation d'information sur le climat en cours d'élaboration par l'International Sustainability Standards Board, qui représente plus de 164 entités, une taxonomie contribuerait à stimuler la confiance des investisseurs, à appuyer la croissance du marché de la finance durable au Canada et à rendre le climat d'investissement généralement plus attrayant. Par ailleurs, cette taxonomie permettrait d'attirer du financement dans le secteur des technologies propres au Canada, de permettre des dépenses d'investissement pour les plans nets zéro des sociétés, de favoriser l'essor de notre économie, de générer de bons emplois et de catalyser la productivité.
Nous nous sommes longuement penchés sur la question. Les recommandations du Groupe d'experts et du Conseil d'action en matière de finance durable ont été présentées en 2019 et en 2022 respectivement. Depuis, des dizaines d'autres pays et régions ont pris les devants, notamment en s'appuyant sur nos travaux.
Les entreprises et les investisseurs sont prêts à investir maintenant. Il est grand temps de mettre en place les éléments essentiels qui permettront de faire du Canada un lieu attractif pour les investissements, et ainsi de financer notre transition.
Merci de votre temps et de votre attention. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invité à participer à la séance d'aujourd'hui.
Je m'appelle Andy Chisholm. J'ai été membre du Groupe d'experts avec Mme Zvan et d'autres.
Pendant 30 ans, j'ai travaillé dans le secteur des services de banque d'investissement, à New York et à Londres. Récemment, j'ai occupé diverses fonctions dans le secteur de la finance durable. Notamment, je suis conseiller auprès d'ArcTern Ventures, l'une des plus importantes sociétés de capital-risque du domaine des technologies propres au Canada, et suis moi-même investisseur dans des sociétés fermées en démarrage également actives dans le domaine des technologies propres. De plus, je siège au conseil d'administration de la RBC ainsi qu'aux conseils consultatifs portant sur des initiatives de développement durable, dans deux grandes écoles de commerce.
Mes commentaires ou observations d'aujourd'hui font suite aux travaux initiaux du Groupe d'experts et constituent des réflexions d'ordre général, comme Mme Zvan l'a dit, cinq ans plus tard.
Ma première remarque, c'est le fait que les grands principes énoncés dans notre rapport de 2019 sont toujours valables. Plus précisément, si le Canada souhaite respecter dans les délais prévus ses engagements en matière de réduction des émissions tout en tirant parti des occasions, sur le plan économique, liées à l'innovation nécessaire pour lutter contre les changements climatiques, il est essentiel que le financement se développe de façon harmonisée. En outre, le montant des investissements nécessaires pour adapter les systèmes énergétiques, les matériaux et les procédés industriels ainsi que pour commercialiser les nouvelles technologies est grandement supérieur à ce que peut assumer le secteur public et, idéalement, cet enjeu devrait relever des acteurs du secteur privé.
Il faut donc créer les conditions nécessaires pour que le secteur privé puisse agir, dans le contexte de notre économie de marché. Pour ce faire, il faudrait mettre en place de nouvelles règles, réglementations et normes, certaines dont Mme Zvan vient de parler, ainsi qu'investir dans les infrastructures, soutenir l'innovation et les ajustements commerciaux en temps opportun, et réduire les obstacles à la mise en œuvre.
Ma deuxième observation, c'est le fait qu'environ cinq ans se sont écoulés depuis la publication de notre rapport. Nous en sommes donc presque à la moitié du délai alors fixé qu'est l'année 2030, qui, comme vous le savez, est largement utilisée à l'échelle mondiale comme point de référence pour mesurer les progrès réalisés dans la réduction des émissions.
Bien qu'on ait enregistré sur plusieurs plans des progrès notables au chapitre de la finance durable et que les flux d'investissement aient augmenté considérablement au cours des dernières années, nous n'atteignons toujours pas nos cibles de réduction des émissions. Cela s'explique en partie par le fait que ces mouvements de capitaux sont encore beaucoup moins importants que ce que les analystes estiment nécessaire pour atteindre les objectifs fixés.
Entretemps, d'importantes bases de la réussite en finance durable, décrites dans le rapport de 2019, doivent encore être consolidées dans un contexte canadien. Ces fondements comprennent notamment des modifications des lignes directrices sur la divulgation de l'information des entreprises ainsi qu'une taxonomie, à laquelle Mme Zvan a fait allusion, un aspect de la taxonomie, l'accent sur la transition, étant particulièrement pertinent pour l'économie canadienne, dont les secteurs affichent de fortes émissions de carbone.
Pourquoi ces choses sont-elles si importantes? Les marchés fonctionnent plus efficacement au moyen d'une information meilleure et mieux observable; la cohérence et la clarté facilitent la croissance de l'activité financière; et, face à l'incertitude, de nombreux acteurs optent pour le ralentissement, en attendant que l'information soit plus claire. C'est pourquoi nous devons prendre plus de décisions, plus rapidement, même si celles‑ci ne sont pas idéales au début.
Pour assurer une transition ordonnée vers la décarbonation de l'économie, il faut réaliser des progrès continus et suffisants; sinon l'écart s'élargit, et le temps disponible diminue, ce qui augmente la probabilité d'une transition désordonnée ou d'une sous-évaluation de la réalisation des objectifs et des engagements initiaux. Tant au sein de la société en général que du gouvernement, il est clair que nous n'avons pas un point de vue unique, de sorte qu'un certain degré de pragmatisme sera nécessaire pour prendre des décisions plus rapidement, afin de gagner du terrain et de ne pas perdre plus de temps. En outre, ces décisions devraient être le fruit de la collaboration entre les provinces et les territoires et les partenaires commerciaux comme les États-Unis et l'Europe.
Ma troisième observation, c'est le fait qu'à ce jour, un pourcentage élevé des dépenses en matière de climat a été effectué par des sources gouvernementales. Au fil du temps, la grande majorité des activités de mobilisation de capitaux et d'investissement devront être entreprises par le secteur privé. Le secteur privé, au Canada et ailleurs dans le monde, répond à des signaux auxquels réagit le gouvernement, mais qui ne sont pas identiques à ceux‑ci. Par conséquent, pour mobiliser des financements privés fondés sur le marché, en particulier dans le contexte des projets d'envergure, il est important que la collaboration entre les entreprises, les acteurs de financement du secteur privé et le gouvernement soit aussi efficace et efficiente que possible, pour assurer la réalisation des objectifs du secteur public et du secteur privé.
C'est pourquoi les ministères concernés accroîtraient leur efficacité en adoptant une approche mieux coordonnée en matière de finance durable. De plus, il serait profitable que les personnes impliquées dans ce dossier aient une solide expérience et des relations de premier plan dans le milieu des affaires et les marchés, ce qui leur permettrait de déterminer quand et comment utiliser au mieux les techniques de financement mixte.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais continuer dans la même veine.
Les deux témoins ont dit quelque chose qu'il est très important de considérer: quel est le prix de l'inaction? Le Canada a beaucoup à offrir pour attirer les investissements de partout au monde. Malheureusement, je note que nous accumulons du retard par rapport aux marchés financiers européens, américains et australiens. Nous devons donc avoir le plus tôt possible les instruments pour créer un environnement qui donnera aux investisseurs, comme on l'a dit, la certitude qu'ils peuvent investir dans notre économie.
J'aimerais que vous nous donniez plus d'exemples des conséquences de l'inaction du Canada, mais aussi que vous établissiez une comparaison avec les autres pays. En effet, le Canada n'est pas dans une situation isolée. Nous sommes en concurrence avec les grands marchés financiers.
Que se passe-t-il en Europe? Pourquoi ces pays sont-ils en avance en matière de taxonomie et de divulgation? Que peut faire le Canada pour accélérer les choses et demeurer dans la course?
J'aimerais entendre d'abord la réponse de Mme Zvan et ensuite celle de M. Chisholm.
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Je vais commencer par l'Europe, qui a publié son rapport en 2018. Ces pays possèdent un régime de divulgation et une taxonomie pleinement fonctionnels, plus larges que ceux de l'ISSB, l'International Sustainability Standards Board. Ils ont en fait une double pertinence dans le cadre des normes européennes en matière d'établissement de rapports sur la durabilité. C'est beaucoup plus vaste, et cela s'explique parce qu'ils essaient d'acheminer les fonds vers des projets verts. Ils voulaient vraiment s'assurer que la personne moyenne sait comment l'argent est géré et si cela se fait dans le respect du climat.
Il y a maintenant des fonds qui sont expressément alignés sur cette taxonomie. C'est essentiellement leur état d'esprit. Ils utilisent cette taxonomie pour évaluer les dépenses d'investissement d'une entreprise afin de pouvoir dire que les dépenses d'investissement des sociétés gazières et pétrolières dans leur ensemble sont alignées à 15 %, alors que le reste du secteur dans son ensemble ne l'est qu'à 8 %. Les sociétés pétrolières et gazières qui utilisent ce cadre peuvent démontrer qu'elles sont mieux alignées.
Pour ce qui est du Canada, quelles sont les conséquences de ne pas le faire? Nous manquons de clarté, donc l'argent ne vient pas, et vous employez une taxonomie... L'autre option, c'est que vous employiez une taxonomie d'une autre région. Cela signifie que les seuils ne seront pas pertinents pour le Canada. De plus, le Canada continuera d'être en retard par rapport aux attentes internationales. Lorsque nous comparons les grands émetteurs canadiens aux émetteurs mondiaux, pas une seule entreprise canadienne aujourd'hui ne peut expliquer dans ses divulgations comment son capital est aligné sur le scénario de 1,5 °C, alors que plus de 40 % des grands émetteurs à l'échelle mondiale le peuvent.
Vous devez comprendre que le capital ira là où c'est le plus facile. Il y a une concurrence à cet égard. Le capital total pour le Canada est de 115 milliards de dollars. McKinsey estime que le capital nécessaire à l'échelle mondiale pour assurer la transition en 2030 est de 9 à 12 billions de dollars. L'argent ira là où il est le plus facile de trouver des investissements de bonne qualité, tout en sachant qu'il est aligné sur la transition.
Les autres...
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Oui. Pour ce qui est des autres coûts, les institutions financières élaboreront leur propre taxonomie ou utiliseront une version sur mesure. Cela ne sera jamais aussi détaillé ni fait avec le même niveau de consultation publique. Cela contribuera à semer la confusion. Nous constaterons un manque d'obligations vertes qui sont une source de crédibilité. Les obligations vertes émises avec une taxonomie crédible peuvent permettre d'économiser de un à dix points de base, donc si vous émettez une obligation de 10 milliards de dollars et que vous avez des économies de quatre points de base, cela signifie 4 millions de dollars chaque année pour la vie de cette obligation.
On a également la possibilité de mettre à profit le BSIF. Le BSIF aimerait aligner les capitaux, ce qui permettrait d'aligner les investissements des banques sur la transition climatique. Ceux‑ci finiraient par retourner au PIB, ce qui faciliterait les investissements au Canada.
L'écoblanchiment pose un risque continu à la réputation, car aucun investisseur ne pourra savoir si l'investissement consenti par l'entreprise X est aligné sur la transition du Canada. Vous n'aurez pas non plus la possibilité de participer à des dialogues internationaux. Je peux vous dire que je reçois des invitations de la Banque mondiale et de toutes sortes de groupes pour participer au nom du Canada, mais je ne peux pas le faire.
Enfin, il y a votre capacité de financer la transition au Canada.
C'est un sujet qui n'est pas facile. Vous êtes ici avec nous pour nous aider à mieux comprendre.
L'année dernière, lorsque vous avez témoigné devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes, vous avez dit ceci:
Au Canada, nous avons actuellement 37 institutions financières canadiennes qui traitent avec les 40 plus grands émetteurs dans le but d'avoir un dialogue avec le même message cohérent: « Pensez à votre stratégie à long terme, à votre gouvernance, à vos objectifs. »
Vous avez ensuite ajouté que vous vouliez les aider dans leur transition. Vous avez donc suggéré de les inclure dans le plan de travail pour la taxonomie.
Or, ne pensez-vous pas que c'est le rôle du gouvernement de faire des lois et des règlements, et que les entreprises devront alors s'y ajuster?
Je me rappelle que c'est ce que disait justement M. Lord Deben, qui siège au comité du Royaume‑Uni sur le changement climatique: nous devons faire des lois, et les entreprises les suivront.
Ne vaudrait-il pas mieux faire ça d'abord, plutôt que d'inviter tous les grands émetteurs à faire leurs propres recommandations pour une taxonomie?
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De mon point de vue, je pense qu'il y a deux ou trois choses.
Tout d'abord, il sera très important de s'assurer que les règles de divulgation actuellement en vigueur sont bien définies.
Deuxièmement, il y a la taxonomie dont nous avons parlé. La taxonomie n'est pas une solution miracle, mais elle fait partie du changement des systèmes qui peut être utile.
Un troisième aspect, sur lequel nous n'avons pas passé suffisamment de temps, comme le pays d'ailleurs, concerne les données et le fait de pouvoir disposer de systèmes de données très améliorés pour les mesures et la transmission. Comment nous utilisons les données environnementales avec les données d'affaires en fonction des secteurs peut être important sur le plan stratégique et très bien alimenter...
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Ce n'est pas grave. Je pense que je vais revenir exactement sur ce point.
Vous parliez de gaz. Je pense que de nombreux experts en climatologie, ainsi que des membres de la société civile et des groupes autochtones contesteraient le fait que le gaz naturel est un carburant de transition efficace et affirmeraient que nous devons aller plus loin.
La recommandation mentionne expressément le pétrole. Vous préconisez des oléoducs d'exportation de pétrole, ce qui me paraît choquant de la part d'un Groupe d'experts sur la finance durable. Une chose a attiré mon attention à la fin de cette recommandation: « le secteur prend un engagement clair ».
Étant donné que nous avons vu l'industrie échouer à maintes reprises, faire de l'écoblanchiment, prendre des engagements en matière de changements climatiques, puis revenir sur ceux‑ci tout en réalisant des bénéfices record, comment sommes-nous censés faire confiance aux sociétés pétrolières et gazières et aux institutions financières qui en profitent pour recommander une voie à suivre alors que nous sommes plongés dans une urgence climatique?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Madame et monsieur les témoins, soyez les bienvenus à votre comité de la Chambre des communes.
Madame Zvan, le cœur de votre argument porte sur la taxonomie, soit un système de classification qui aide à diriger les capitaux vers des projets considérés comme verts ou vers d'autres projets qui sont considérés comme moins verts.
Pour vous donner un exemple très concret, je vais vous parler d'une situation que nous vivons actuellement au Québec. Comme on le sait, rien n'est tout blanc ou tout noir; il y a toujours des zones grises. Je vais vous parler du projet Northvolt, soit un projet d'investissement de 7 milliards de dollars pour la filière batterie. Je dois sortir du placard et affirmer mon conflit d'intérêts: je roule dans une voiture entièrement électrique. Cela dit, le projet Northvolt soulève les passions au Québec, même les passions criminelles, malheureusement. En effet, des voyous ont récemment déposé des objets incendiaires sur le site du projet de Northvolt, ce qui a évidemment été dénoncé par tout le monde, à commencer par nous.
Certains disent que ce projet est excellent pour l'environnement, parce que nous en avons besoin pour les voitures électriques. D'autres nous incitent à la prudence puisque l'usine sera située dans un milieu humide, ou affirment que la voiture solo n'est pas nécessairement la meilleure solution sur le plan de l'environnement, ou encore estiment que ce projet n'a pas fait l'objet de consultations dignes de ce nom.
En résumé, d'un côté, certains trouvent que le projet est bon; de l'autre, certains trouvent qu'il ne l'est pas.
Selon vous, madame Zvan, ce projet devrait-il se trouver en haut, au milieu ou au bas de la liste?
Je vais vous parler de ce qui se passe au sud de notre frontière, aux États‑Unis.
Par exemple, le mois dernier, la commission du budget du Sénat américain et la commission de surveillance de la Chambre des représentants aux États‑Unis ont publié un rapport qui, grosso modo, mentionne que les campagnes massives des compagnies pétrolières auprès du public présentent le captage et le stockage de carbone comme une solution viable et disponible contre l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Toutefois, les compagnies reconnaissent de façon interne qu'elles ne prévoient pas déployer la technologie nécessaire pour résoudre la crise du réchauffement climatique. Le rapport constate aussi que le véritable objectif de l'industrie est de prolonger peut-être indéfiniment l'utilisation sans relâche des combustibles fossiles. J'aimerais que vous gardiez ça en tête.
J'aimerais aussi vous dire que, le 1er mai dernier, la Capital Power Corporation, aux États‑Unis, a annoncé qu'elle renonçait à son projet de captage et de stockage de carbone, un projet chiffré à 2,4 milliards de dollars. Quelle justification a-t-elle donnée? Elle disait que ce projet n'était pas économiquement réalisable. Autrement dit, ce projet ne rapporterait pas de bénéfices aux investisseurs. De plus, ce n'est absolument pas bon pour atteindre nos objectifs dans le cadre de l'Accord de Paris.
Alors, pourquoi le secteur financier soutient-il la proposition d'inclure le captage et le stockage de carbone dans la prochaine taxonomie?
Premièrement, il est évident que le processus d'évaluation, d'autorisation et d'homologation sera très long, comme il se doit. Cela dit, nous devrions nous demander s'il existe une façon plus rapide de faire les choses, car le calendrier s'étend sur plus de 10 ans, et c'est difficile.
Par ailleurs, en supposant que nous puissions régler le problème de la sécurité, de l'homologation et du processus d'évaluation approprié, il faut déterminer où ces solutions peuvent fonctionner au mieux et faciliter l'approvisionnement, l'installation et la mise en œuvre de certains de ces projets.
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Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins de leur présence.
Madame Zvan, je vais vous poser mes questions. Je pense que vous avez fait un excellent travail en cédant la parole à votre collègue lorsque c'était nécessaire, alors je vais vous laisser continuer de la même façon.
Tout d'abord, je sais que mes collègues d'en face et tout le monde ici seront d'accord pour dire que je ne suis pas du tout un expert en finances durables. La première fois que j'ai entendu le mot taxonomie dans ce contexte, je pensais qu'on parlait de suspendre au mur de grosses truites et des canards empaillés. J'ai ensuite réalisé qu'il y a une différence entre la taxidermie et la taxonomie. C'était nouveau pour moi.
Je sais maintenant que nous parlons de définitions et de terminologies pour de nouvelles catégories de finances durables qui n'existaient pas il y a 25 ans, et je commence un peu à comprendre. Ce que je sais, c'est que l'herbe pousse là où vous l'arrosez et que les entreprises se développent là où vous investissez. Lorsque vous dirigez un régime de retraite ou toute autre entité financière importante, vous contrôlez beaucoup d'argent et vous avez la possibilité — pour utiliser un contexte agricole — de contrôler la lumière et l'eau ainsi que les endroits où les choses poussent.
Pour ma compréhension personnelle, j'essaie de simplifier cela. Je sais que lorsqu'on prive certains secteurs ou certaines industries de l'argent dont ils dépendent depuis longtemps, on peut ralentir le développement. S'il s'agit d'une industrie qui produit beaucoup d'émissions comme celle de la production du pétrole, de gaz ou de ciment, vous forcez celle‑ci à innover; c'est une technique très efficace.
Ai‑je bien compris?
Je sais que les cinq grandes banques canadiennes contrôlent de nombreux fonds. Elles achètent beaucoup d'actifs pour des fonds mutuels et différents types d'actifs pour d'autres personnes. Elles se sont également toutes engagées à la concrétisation de la carboneutralité d'ici 2050.
J'aimerais avoir la certitude que ces établissements respecteront certains de ces engagements. Il y a eu beaucoup de préoccupations et d'allégations concernant l'écoblanchiment et le fait de convaincre les gens que, s'ils veulent une banque verte, ils peuvent compter sur ces institutions pour investir de façon à priver les organismes d'eau et de soleil lorsque ceux‑ci font plus de mal que de bien, ne sont pas axés sur l'innovation, ne parlent pas de transition ou ne participent pas à la conversation.
Existe‑t‑il de bons éléments de preuve indiquant que certaines de ces banques font un peu plus d'écoblanchiment que d'autres?
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Nous reprenons la séance.
Nous n'avons pas de temps à perdre, car nous avons pris un peu de retard.
Nous accueillons maintenant M. DeMarco, commissaire à l'environnement et au développement durable. Il est accompagné de M. Mathieu Lequain — que nous connaissons bien — et de M. Jean‑François Nadeau.
Nous devons terminer à 17 h 45 au plus tard. J'aurai besoin de cinq à dix minutes, à la fin, pour entendre la rétroaction des membres du Comité au sujet de la visite des dirigeants des compagnies pétrolières.
Sans plus tarder, je vous cède la parole pour dix minutes, monsieur le commissaire.
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Monsieur le président, je suis heureux d’être ici aujourd’hui pour contribuer à l’étude du comité sur les répercussions environnementales et climatiques liées au système financier canadien.
Je tiens à reconnaître que la réunion se déroule sur le territoire ancestral non cédé du peuple algonquin Anishinaabe.
Je suis accompagné aujourd’hui de Mathieu Lequain et de Jean-François Nadeau, qui sont respectivement directeur principal et directeur à notre Bureau.
Mes remarques d’aujourd’hui s’appuient sur trois rapports que nous avons publiés au cours des dernières années sur la question. Il s’agit du rapport intitulé Leçons tirées de la performance du Canada dans le dossier des changements climatiques, datant de 2021; du Document de recherche sur la présentation d’informations financières liées au climat, que nous avons publié en 2022; et du rapport de 2023 intitulé La supervision des risques financiers liés aux changements climatiques — Bureau du surintendant des institutions financières du Canada, aussi connu sous l’acronyme BSIF.
Tout d’abord, notre rapport de 2021 intitulé Leçons tirées de la performance du Canada dans le dossier des changements climatiques a clairement illustré les coûts liés aux événements météorologiques au Canada, qui représentaient de 5 % à 6 % de la croissance annuelle du produit intérieur brut. Ces coûts ont des conséquences réelles pour les propriétaires de maisons et d’entreprises. Par exemple, un prêteur important a récemment annoncé qu’il n’accepterait plus de nouveaux prêts hypothécaires pour les maisons situées dans des zones inondables à haut risque. Les conséquences de telles décisions sur la valeur des logements résidentiels, qui constituent le principal actif de nombreux ménages, pourraient s’avérer désastreuses.
[Français]
Notre rapport sur les leçons tirées révèle également que les décisions financières prises au Canada doivent tenir compte des changements climatiques si l'on veut atténuer les risques liés au climat. Pour ce faire, il est important que les ménages, les entreprises et les gouvernements soient en mesure de comprendre leur exposition à ces risques et d'élaborer des plans de gestion.
La présentation d'informations financières liées au climat est l'une des clés essentielles pour atteindre cet objectif. Dans notre document de recherche sur la présentation d'informations financières liées au climat de 2022, nous examinons l'état d'avancement de diverses initiatives en cours au Canada, qui visent à améliorer la présentation d'informations financières liées au climat.
Nous y mentionnons que, malgré la nature décentralisée des cadres réglementaires régissant la présentation d'informations financières de façon générale, puisque les provinces et les territoires sont responsables de la réglementation des valeurs mobilières au sein de leurs administrations respectives, le Canada doit agir pour remédier au manque de transparence, aux incohérences et au problème relatif à la qualité des informations financières liées au climat.
Enfin, les organismes de réglementation financière doivent veiller à ce que les institutions financières, en tant qu'intendants de l'épargne de la population canadienne, gèrent de manière appropriée les risques financiers liés aux changements climatiques. En préparant notre rapport de 2023 sur la supervision des risques financiers liés aux changements climatiques du Bureau du surintendant des institutions financières, ou BSIF, nous avons examiné si ce dernier avait intégré les risques financiers liés aux changements climatiques à ses systèmes et cadres de gestion des risques pour les institutions financières et les régimes de retraite sous réglementation fédérale.
[Traduction]
Dans le cadre de notre audit, nous avons constaté que le BSIF avait réalisé des progrès importants en vue d’intégrer les risques liés aux changements climatiques à son cadre de surveillance, mais que la pleine mise en œuvre prendrait encore des années. Nous avons également relevé une occasion pour le Bureau du surintendant des institutions financières d’examiner de quelle façon adapter son rôle afin de favoriser l’approche pangouvernementale du Canada à l’égard des changements climatiques et du développement durable.
Depuis la publication de cet audit, nous avons noté certains progrès. Par exemple, le BSIF a créé une page d’information entièrement consacrée aux risques climatiques et a élargi ses contacts avec les parties prenantes en créant le Forum sur le risque climatique. La création de ce forum est conforme à l’une des recommandations de notre audit. Le Bureau du surintendant des institutions financières a également lancé une consultation publique sur la collecte normalisée des données relatives aux émissions et aux expositions liées aux changements climatiques. Enfin, il a déposé sa première stratégie ministérielle de développement durable.
Monsieur le président, je termine ainsi ma déclaration d’ouverture. C’est avec plaisir que nous répondrons maintenant aux questions des membres du Comité.
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie le commissaire d'être à nouveau venu témoigner devant notre comité pour discuter de l'enjeu très important de la finance durable.
J'aimerais revenir à la question qui a été posée au sujet du coût de la reddition de comptes, des communications et des lignes directrices, ainsi que des mesures que les entreprises doivent prendre pour faire preuve de la transparence nécessaire afin que les investisseurs sachent qu'elles ne se livrent pas à l'écoblanchiment et qu'elles font véritablement partie de la transition vers la durabilité.
Selon vous, a‑t‑on raison d'être préoccupé de la possibilité que les exigences en matière de reddition de comptes annulent en quelque sorte les avantages que le Canada tirerait du fait de pouvoir affirmer qu'il est convaincu que ces entreprises ne font pas de l'écoblanchiment et qu'elles respectent les exigences du conseil international?
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Monsieur le commissaire, je vous remercie d'être à nouveau avec nous. Je remercie aussi les membres de votre équipe.
Au cours de la première heure de la réunion avec un premier groupe de témoins, nous avons beaucoup parlé d'écoblanchiment, et nous en avons reparlé dans cette deuxième heure. En janvier 2024, une plainte a été déposée auprès des organismes de réglementation de l'Ontario et du Québec par des experts en finance durable. Cette plainte dénonçait plus de 10 milliards de dollars en prêts accordés à des entreprises de l'industrie des combustions fossiles, en lien avec la durabilité. Malgré leurs engagements, ces entreprises augmentaient activement leur production.
Ce n'est pas la première fois que je vous entends dire qu'il n'y a pas de transparence ni de reddition de compte, qu'on manque de renseignements et qu'on ne peut pas se fier aux données actuelles.
Comment va-t-on s'en sortir s'il y a une brèche dans tout ce qu'on fait et que les entreprises peuvent carrément passer outre à la réglementation, parce qu'il n'y a pas de cadre réglementaire ou législatif contraignant?
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Si nous n'avons pas de données fiables, c'est compliqué. Si c'est l'entreprise qui nous fournit ses propres données, on sait qu'on ne peut surtout pas s'y fier.
La directive européenne sur les rapports de durabilité des entreprises exige que les entreprises fassent état non seulement des risques qu'elles courent du fait du changement climatique, mais aussi des impacts sur des facteurs environnementaux et sociaux. C'est ce que l'Union européenne appelle la double matérialité.
Cela ne pourrait-il pas être bénéfique au Canada aussi pour ce qui est de ses objectifs climatiques et de sa résilience financière?
Je parle d'investissements qui encouragent les activités visant non seulement l'environnement, mais aussi les engagements sociaux. Je pense à la santé, à tout ce qui touche, finalement, les problèmes relatifs à l'environnement et aux changements climatiques.
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Nous en dirons davantage à ce sujet dans notre rapport de l'automne, notre deuxième rapport en vertu de la loi en matière de carboneutralité.
Pour l'instant, à ma connaissance, le gouvernement n'a pas démontré qu'il avait comblé l'écart entre ses propres estimations et les mesures prises, visant une réduction d'environ 30 %. Son objectif est de combler l'écart entre ces chiffres et une diminution de 40 à 45 %. Nous nous demandions aussi si ses calculs, visant environ 35 %, que ce soit 34 ou 36 %, n'étaient pas des estimations beaucoup trop optimistes. Nous n'étions même pas convaincus que 34 ou 36 % étaient financièrement réalisables, surtout compte tenu du fait qu'il y a des plans et des cibles depuis 30 ans et que nous ne les avons jamais atteints.
Comme je l'ai dit la semaine dernière, cela aurait peut-être poussé le gouvernement à fixer un objectif un peu plus élevé que 40 %, puisqu'il sait qu'il a raté chaque cible qu'il s'était fixée dans le passé. Même la dernière cible, qui correspondait à l'époque de la COVID, n'a pas été atteinte, malgré la diminution des émissions associées au ralentissement économique.
Jusqu'ici, je n'ai rien vu qui me laisserait croire que le gouvernement a comblé l'écart avec des mesures qui permettront d'atteindre la cible de 40 à 45 %, selon des estimations raisonnables. Nous en aurons davantage à dire à l'automne, dans notre deuxième rapport en vertu de la loi en matière de carboneutralité.
D'après ce que je comprends, le gouvernement fédéral n'est pas en voie d'atteindre nos cibles pour 2030.
Aussi, dans le rapport, vous dites que le Bureau du surintendant des institutions financières est l'instance clé de surveillance des institutions financières du Canada. Vous mentionnez, dans votre rapport, que le BSIF devrait se demander s'il convient de regarder au‑delà de son approche actuelle et pour trouver des moyens de contribuer à l'atteinte des objectifs liés aux changements climatiques globaux du Canada. Certains gouvernements, comme ceux du Royaume-Uni et de l'Union européenne, ont harmonisé les mandats des instances de surveillance financière avec les objectifs de durabilité.
Pouvez-vous nous dire rapidement quelles sont les conséquences de l'inaction du Canada à cet égard?
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Le Canada a choisi ce qu'on appelle une approche pangouvernementale dans la lutte contre les changements climatiques. Une autre analogie serait « tout le monde sur le pont ». Il revient au Canada, qui a la responsabilité d'atteindre son propre objectif, de décider quelles institutions vont participer à cette approche pangouvernementale pour atteindre l'objectif.
Très récemment, la liste des institutions assujetties à la Loi fédérale sur le développement durable du gouvernement du Canada est passée de seulement une vingtaine à une centaine. Le BSIF fait partie de cette centaine d'institutions, et notre propre bureau l'est également, à présent. Nous avons tous la possibilité de jouer un rôle dans l'atteinte des cibles ou des objectifs pangouvernementaux, comme la cible de réduction de 40 à 45 %, relativement aux changements climatiques.
Dans notre rapport, nous soulignons effectivement que, jusqu'ici, le BSIF a interprété son mandat de manière restrictive et s'est limité à la stabilité du système financier, alors que les autres pays ont confié à leur équivalent du BSIF un rôle plus actif dans les efforts pour atténuer les changements climatiques. C'est une question de politique, et il faudrait que le gouvernement y réponde.
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Je vous ai posé cette question simplement pour montrer que l'on peut faire dire bien des choses à l'écoblanchiment.
C'est pour cela que je m'adresse à l'arbitre le plus neutre qui soit au Canada, c'est-à-dire le commissaire à l'environnement et au développement durable, afin qu'il nous fournisse sa définition.
Personnellement, je considère qu'on fait de l'écoblanchiment lorsqu'on prend l'avion, qu'on voyage beaucoup et qu'après, on achète des crédits. On lave alors sa conscience, on fait de beaux discours, mais la réalité, c'est qu'on pollue. J'aimerais donc connaître votre définition précise de l'écoblanchiment.
Par ailleurs, comment peut-on évaluer ce qui constitue de l'écoblanchiment? Comment savoir si l'investissement qu'on veut faire dans une entreprise est bon et savoir si elle pratique ou non l'écoblanchiment?
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J'ai seulement entendu la dernière partie de la première heure de votre réunion d'aujourd'hui, mais je pense que vous avez entendu des experts parler de taxonomie. C'est une méthode, une approche, qui offre un cadre permettant de définir si quelque chose est vert ou non, et à quel degré.
Ce n’est pas à nous, au Bureau de la vérificatrice générale du Canada, de décider de ce qui est vert ou non. Si une institution comme le Bureau du surintendant des institutions financières décide de le faire, ou si une institution provinciale décide de le faire en vertu de ses pouvoirs, ce sera un avantage pour tout le monde. En effet, nous pourrons alors simplement regarder si c'est dans la colonne 1, ce qui veut dire que c'est vert, ou si c'est dans la colonne 2, ce qui veut dire que ce n'est pas vert.
On a besoin de ça, sinon il est difficile pour le public et pour les investisseurs de décider ce qui est vert ou non.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Messieurs les témoins, je vous souhaite la bienvenue.
Nos témoins de la première heure nous parlaient de l'urgence d'agir en matière de taxonomie et de divulgation financière pour le climat. Je regardais les statistiques et les dernières données, et 250 institutions financières devraient publier bientôt des plans de transition qui sont conformes à l'alliance financière de Glasgow pour la carboneutralité.
De plus, les principales économies du monde ont un an d'avance, parfois deux, sur nous en matière d'exigences pour leurs institutions financières visant à établir un cadre réglementaire garant d'une certitude et favorisant les investissements. Il y a le Royaume‑Uni, les États‑Unis, l'Union européenne, et même l'Australie, qui a quand même une production pétrolière. Il y a aussi le Japon, Hong Kong, Singapour et la Suisse. Le Canada va prendre un retard important dans ces domaines s'il n'agit pas maintenant.
J'essaie de comprendre ce qui nous ralentit. Je sais que nous avons une économie basée sur les ressources naturelles, mais une telle économie n'a pas empêché l'Australie d'évoluer. Au Royaume‑Uni, la société British Petroleum est en train d'investir 65 milliards de dollars dans sa transition. Qu'est-ce qui nous ralentit? Est-ce que ce sont des conservateurs et d'autres voix qui se lèvent pour nous dire qu'il faut rester dans notre ancienne économie et ne pas évoluer?
Si nous n'évoluons pas, des milliards de dollars d'investissements vont nous passer sous le nez. Ceux-ci s'en vont en ce moment en Chine, qui investit dans sa filière batterie, dans les automobiles et les énergies propres, entre autres.
Qu'est-ce qu'on peut faire pour agir vite?
Bienvenue de nouveau à notre comité. Nous vous remercions, messieurs, d'être revenus et de nous faire part de vos réflexions, de vos points de vue et de votre expertise.
J'ai une très brève question au sujet de l'écoblanchiment, parce que cela aussi m'intéresse. Mon ami et collègue, M. Deltell, a parlé des crédits de carbone. J'ai déjà acheté des crédits de carbone. Je n'ai pas l'impression de faire de l'écoblanchiment. Je ne suis pas certain que ce soit nécessairement une forme d'écoblanchiment, au même titre qu'une banque laisse entendre que ses obligations ou ses fonds communs sont tellement plus verts qu'une autre, alors que ce n'est clairement pas le cas.
Pouvez-vous m'expliquer la différence, ou une définition, entre l'écoblanchiment lorsqu'un consommateur décide de demander une compensation carbone et lorsqu'une entreprise tente d'induire les consommateurs en erreur?
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Super! C'est très utile. Merci.
J'ai une autre question au sujet des obligations. La dette du gouvernement est quelque chose qui, je crois, préoccupe beaucoup de Canadiens, et ils ont raison d'être préoccupés. Ils doivent l'être. Ils devraient avoir des questions au sujet de la dette du gouvernement. Je me compte parmi eux. Cependant, je sais aussi que, lorsque le gouvernement crée une dette, il vend des obligations aux gens. Souvent, les gens diront « Oh, les paiements que le gouvernement fait sur sa dette s'envolent au vent », comme si nous envoyions des intérêts vers le soleil ou quelque chose comme ça. La dette ne disparaît pas. Elle trouve son chemin jusque dans le portefeuille des gens, dans les fonds communs.
Je ne sais pas comment fonctionnent réellement les obligations vertes dans ce contexte. J'ai entendu des gens parler des nouvelles obligations vertes du Canada dans le contexte de notre nouvelle obligation de 5 milliards de dollars. J'aimerais connaître votre avis sur la façon dont fonctionne l'obligation verte au sein de l'économie et en quoi plus d'inclusions, ou peut-être plus d'exclusivité, rendraient cette obligation plus efficace.
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Merci. Le temps est écoulé.
J'aimerais remercier le commissaire, encore une fois, d'être venu nous voir. Il nous aide toujours à mieux comprendre les enjeux environnementaux auxquels nous faisons face.
Encore une fois, merci, monsieur le commissaire. Nous avons hâte de vous revoir.
Avant de terminer, chers collègues, j'aimerais vous parler de la réunion que nous allons avoir avec les PDG de sociétés pétrolières. J'ai le plaisir de vous annoncer que nous pouvons recevoir quatre des cinq PDG que nous avons invités à la même date, ce qui est un avantage sur le plan organisationnel. Le seul PDG qui ne peut pas comparaître le 6 juin est le PDG d'Enbridge. C'est pour des raisons d'emploi du temps. Ce n'est pas qu'il ne veut pas comparaître. Il pourrait demander à quelqu'un d'un niveau hiérarchique inférieur de comparaître, ce qui ferait en sorte que nous pourrions recevoir les cinq PDG au cours d'une seule réunion. Sinon, il faudrait qu'Enbridge se présente seul pour une heure, un autre jour, ce qui nous donnerait moins de temps pour d'autres travaux.
Sommes-nous tous d'accord pour recevoir un vice-président ou un autre représentant d'Enbridge avec les quatre PDG des sociétés pétrolières?
Je vais donner la parole à Mme Collins, parce que c'est sa motion.