:
Bonjour à tous. La séance est ouverte.
M. Benzen remplace et M. Fragiskatos remplace . Bienvenue à tous les deux à cette réunion du comité de l'environnement. Nous avons pour objectif d'effectuer au complet l'étude article par article du projet de loi .
Nous recevons, du ministère de l'Environnement, Laura Farquharson, directrice générale, affaires législatives et réglementaires, Direction générale de la protection de l'environnement, ainsi que Susan Martin, directrice générale, Direction de la politique stratégique.
Je vais lire des remarques que m'a fournies le greffier législatif.
Nous souhaitons la bienvenue à M. Lafleur et à M. Méla, qui vont nous prêter main-forte aujourd'hui.
Je tiens à vous dire que si nous terminons l'étude article par article et qu'il reste du temps, nous allons passer à huis clos pour discuter des travaux futurs du Comité, compte tenu du fait que nous avons reçu de la Chambre une mesure législative à examiner, à savoir le projet de loi .
J'aimerais expliquer aux membres du Comité la façon dont nous allons procéder pour l'étude article par article du projet de loi .
Nous allons examiner toutes les dispositions dans l'ordre dans lequel elles figurent dans le projet de loi. Je vais nommer toutes les dispositions une après l'autre, et chacune fera l'objet d'un débat et d'un vote. Si un amendement a été proposé à la disposition en question, je vais nommer le député qui l'a proposé, qui pourra ensuite expliquer son amendement. Nous pourrons alors débattre de l'amendement. Lorsqu'il n'y aura plus de députés qui souhaitent prendre la parole, nous passerons au vote sur l'amendement.
Les amendements seront examinés dans l'ordre dans lequel ils figurent dans le document que le greffier a transmis à chaque député. Si des amendements sont corrélatifs, nous voterons sur ceux‑ci en même temps.
[Français]
La présidence procédera lentement, de manière à ce que tous puissent bien suivre les délibérations.
[Traduction]
Les amendements portent un numéro, qui se trouve dans le coin supérieur droit, pour indiquer de quels partis ils émanent. Il n'est pas nécessaire qu'il y ait un comotionnaire. Une fois qu'un amendement a été présenté, il faut obtenir le consentement unanime pour le retirer.
Durant le débat sur l'amendement, les députés peuvent présenter des sous-amendements. Ces sous-amendements n'ont pas besoin de l'approbation de la personne qui a proposé l'amendement. Un seul sous-amendement peut être examiné à la fois, et ce sous-amendement ne peut pas être modifié. Lorsqu'un sous-amendement est présenté, nous allons voter sur celui‑ci en premier. Ensuite, un autre sous-amendement peut être présenté, ou bien le Comité peut se pencher sur l'amendement principal et voter sur celui‑ci.
[Français]
Une fois que tous les articles auront été mis aux voix, le Comité tiendra un vote sur le titre et le projet de loi proprement dit.
Le Comité doit également donner un ordre de réimpression du projet de loi pour que la Chambre dispose d'une version à jour lors de l'étape du rapport.
Enfin, le Comité doit demander à la présidence de faire rapport du projet de loi à la Chambre. Ce rapport contient uniquement le texte des amendements adoptés, le cas échéant, et une indication des articles supprimés, s'il y a lieu.
Je crois que c'est assez clair. La plupart d'entre nous ont déjà participé à une étude article par article d'un projet de loi.
[Traduction]
(Article 2)
Le président: Oui?
Vous constaterez que beaucoup de nos amendements proposent à peu près le même mot: « iniquité ».
L'amendement BQ‑1 propose, dans un premier temps, que l'article 3 du projet de loi soit modifié par substitution, à la ligne 13, page 2, de ce qui suit:
évaluer et prévenir les iniquités liées à l'environnement et s'y at-
De plus, l'amendement propose un libellé similaire en remplacement des lignes 5 et 6 de la page 3:
environnementale et à évaluer et prévenir les iniquités liées à l'environnement ainsi qu'à s'y attaquer, lesquelles
Nous n'avons pas choisi le mot « iniquité » pour rien. Nous nous sommes basés d'abord sur des définitions qu'on trouve dans des dictionnaires français. Par exemple, Le Petit Robert définit l'iniquité comme une « injustice extrême, flagrante ». De son côté, le dictionnaire de TV5MONDE la définit comme une « injustice insupportable ». C'est après avoir consulté de telles sources que nous avons conclu que c'était le mot le plus fort que nous puissions utiliser en français pour nos amendements.
Monsieur le président, est-ce que je présente les amendements BQ‑1, BQ‑2 et BQ‑3 ensemble?
:
D'accord. Je vais donc commencer par celui-là.
Je vais vous expliquer un peu pourquoi nous présentons cet amendement.
Au Bloc québécois, nous sommes favorables à la volonté qui est exprimée dans le titre et le préambule du projet de loi quand il est question de justice environnementale. Nous pensons que, si le Parlement doit adopter une nouvelle loi, c'est le concept de justice environnementale qui doit être mis en avant, qui doit en être le sujet principal, le concept central.
Nous sommes en faveur d'une action gouvernementale pour contrer les inégalités subies par toutes les communautés dans leur rapport à l'environnement. Nous voulons que cette action englobe tout le monde. Il existe des problèmes de disparités géographiques dans le niveau de vie et dans l'accès à un environnement de qualité, et c'est préoccupant. Il y a lieu de s'inquiéter du fait que ces disparités ont des conséquences directes sur des citoyens issus de l'immigration, appartenant à des minorités visibles ou à des communautés autochtones, ou défavorisés sur le plan socioéconomique. À la suite de ce que je vous ai dit mardi, j'ajouterais même à la liste d'autres catégories de citoyens qui sont vraiment défavorisés. Par exemple, a-t-on regardé où se situent les sites de détention, que ce soit des prisons ou des hôpitaux psychiatriques? Cela permettrait de comprendre leur exposition aux dangers environnementaux.
C'est ce que nous voulons faire. En Amérique du Nord, c'est un phénomène qu'on observe depuis les années 1980. Nous voulons élargir la portée de la mesure proposée, de façon à englober le plus de gens possible.
Je vais rappeler ce que M. Greg McLean a dit mardi, en abordant ce qu'on pourrait qualifier de cas d'espèce. Cela vient un peu appuyer ce que j'ai dit précédemment. Il a dit qu'il avait grandi dans un monde où la justice, c'était bon, et le racisme, c'était mauvais. Comme il l'a dit, éliminer le racisme et obtenir la justice pour tous est un objectif que nous voulons tous avoir. Je pense que son propos était très clair. Je suis entièrement d'accord avec lui.
Mardi, j'ai parlé de l'arsenic à Rouyn‑Noranda, des poussières rouges à Limoilou et de la pollution causée par les raffineries de l'Est de Montréal, où je demeure. M. McLean, de son côté, soulevait l'expérience des immigrants italiens qui sont morts en raison de leur travail dans les fonderies. Il ne parlait pas juste d'un cas en particulier. C'est ce que nous voulons, aussi: viser plus large.
Au passage, M. McLean évoquait la question de la forme de discrimination reliée à l'emplacement géographique, ou encore à l'isolement de la ruralité. Selon lui, il n'était pas question de racisme, mais il laissait entendre, en quelque sorte, qu'on devait souligner le triste sort des communautés marginalisées, et pas seulement des communautés racisées.
Quand on parle de communautés marginalisées, on parle aussi des communautés défavorisées sur le plan socioéconomique. Cela renvoie à l'exemple que je vous donnais tantôt, concernant les sites de détention.
Pour chaque ligne du projet de loi que je propose d'amender, l'objectif est le même: qu'on offre à toutes et à tous la même protection et que toute la population ait accès à une réelle justice environnementale. Bien que nous, du Bloc québécois, reconnaissions que l'élément que je désignerai dans ce contexte-ci comme la couleur de la peau est assurément un facteur de discrimination et d'iniquité, plusieurs autres facteurs sont sous-jacents au racisme environnemental, au sens où l'entend le projet de loi que nous étudions.
La semaine passée, un déjeuner-conférence a eu lieu ici, sur la Colline du Parlement, auquel a participé Mme Judith Enck, qui est une experte de la pollution plastique et qui a été nommée à l'Environmental Protection Agency par le président Obama au cours de son premier mandat. Dans sa conférence, elle a soulevé la question de l'emplacement de certaines usines chimiques. Elle expliquait que certaines usines chimiques très polluantes avaient ciblé un certain nombre d'États où aller se développer et prendre de l'expansion. Je voulais connaître un peu son avis sur le phénomène dont nous discutons aujourd'hui, à savoir si la précarité économique et la démographie y étaient pour quelque chose. Je lui ai donc posé la question. Or, ni elle ni moi n'avons utilisé le terme « racisme environnemental ». Elle a uniquement utilisé l'expression « justice environnementale ». En effet, il y a quelque chose de plus complet lorsque la référence conceptuelle est la justice environnementale.
Au cours de la précédente législature, nous avons entendu ici Mme Waldron, fondatrice du projet ENRICH, sur l'étude du racisme systémique au Canada. Elle nous a donné son point de vue d'universitaire en abordant l'angle de l'environnement et des discriminations. Selon elle, il y a un manque de pouvoir politique qui permettrait de freiner l'implantation d'industries nuisibles à la santé humaine et à l'environnement. Il y a aussi des facteurs liés à l'éducation et à la précarité économique. C'est un phénomène global. J'ajouterais à cela l'accès à des logements salubres et à de l'eau potable.
Ce sont tous des facteurs qui, à côté de ceux liés au racisme, constituent le terreau qui permet l'absence de justice environnementale pour toutes les communautés marginalisées.
Il y a le caractère socioéconomique, dont j'ai parlé plus d'une fois.
Je m'arrêterai ici. Je vous ai présenté, d'un bloc, pratiquement l'ensemble de nos amendements.
Ce matin, on a mis sous mes yeux un rapport de la Fondation David Suzuki, qui demande au gouvernement de faire des gestes concrets pour une meilleure justice environnementale. Ce rapport, écrit entre autres par Léa Ilardo, fait toujours référence à la notion de justice environnementale. On y décrit tout ce qui se passe à ce chapitre dans l'Est de Montréal, un secteur particulièrement défavorisé. On veut y établir une industrie qui engendrera, selon les prévisions, 300 000 mouvements de conteneurs chaque année, 1 000 passages de camions par jour, à l'entrée et à la sortie, ainsi que la circulation de nombreux trains. Pourquoi établit-on cette industrie dans l'Est de Montréal? C'est parce que c'est un secteur où vivent des personnes défavorisées.
Quand j'ai demandé à Mme Lenore Zann si le projet de loi aurait une incidence pour les gens vivant autour de la Fonderie Horne, elle m'a répondu que non. C'est pourquoi nous proposons d'élargir la portée du projet de loi.
Voilà, j'ai fini.
Je suis désolé, monsieur le président. Nous avons éprouvé des problèmes de connexion sur Zoom toute la matinée à la Chambre des communes.
Le président: Nous vous entendons bien.
M. Greg McLean: Il y a un aspect qui me pose problème. Nous devons nous pencher sur ce que nous entendons par « justice environnementale ».
Je suis reconnaissant à ma collègue de proposer cet amendement, que j'appuie largement.
Mme Pauzé et moi-même avons la même opinion au sujet des fonderies.
J'ai donné comme exemple la dernière fois les immigrants italiens qui sont venus dans la ville de Trail. Je connais bien les petits-enfants qui ont grandi sans leurs grands-pères, qui avaient choisi de travailler dans une fonderie où l'air à l'intérieur était toxique. Cet air était souvent relâché la nuit. Si un chien se promenait la nuit dans les rues de Trail, il mourrait. Lorsque les gens étaient à l'intérieur, l'air toxique était relâché. Cette ville est considérée comme l'un des endroits les plus toxiques en Amérique du Nord.
Un certain nombre d'immigrants, principalement des immigrants italiens, sont venus au Canada et ont obtenu un emploi à Trail. J'imagine que c'est la même chose dans bien d'autres villes au pays situées à l'extérieur des grands centres. Des gens ont décidé de travailler dans ces installations moins qu'adéquates et ils en ont payé le prix.
Comme je l'ai déjà mentionné, les femmes vivaient jusqu'à l'âge de 80 ans à Trail, mais leurs maris mouraient tous dans la quarantaine. C'est malheureux.
Bien que cette mesure législative s'attaque à ce dont nous avons parlé en ce qui concerne les iniquités, j'aimerais aussi parler de la justice environnementale. Je ne crois pas qu'elle est bien définie dans le projet de loi. Je veux comprendre ce dont nous parlons exactement avant que ce terme soit interprété pour nous par une autre entité.
Cette autre entité, bien entendu — le projet de loi que Mme May a présenté le prévoit —, sera déterminée dans un tribunal par un juge, sans lignes directrices à cet égard.
J'aimerais connaître la signification de ce terme et savoir comment assurer une justice environnementale. S'agit‑il d'une justice pour l'environnement et d'une réparation à l'environnement? S'agit‑il de réparer les torts causés aux personnes qui ont souffert parce qu'elles vivent sur un territoire pollué, car les déchets issus de notre développement urbain y ont été envoyés parce que peu de gens y habitent?
Je veux m'assurer que nous n'incluons pas une définition de la justice environnementale qu'une autre entité interprétera pour nous. Si nous pouvons obtenir une compréhension claire de ce qu'est la justice environnementale, ce serait une très bonne chose pour ce projet de loi.
Je vais m'arrêter là et laisser une des représentantes du ministère nous expliquer comment elle entrevoit le processus à moyen terme, seulement deux ans environ avant la mise en œuvre. J'aimerais bien le savoir.
:
Monsieur le président, je remercie ma collègue pour son intervention.
À la lecture du projet de loi, on constate que certaines dispositions ne s'appuient pas uniquement sur le racisme.
Le paragraphe 3(2) se lit comme suit:
Le ministre élabore la stratégie en consultation ou en coopération avec les personnes, collectivités, organismes et organisations intéressés — notamment les autres ministres, les représentants des gouvernements au Canada ainsi que les collectivités autochtones — et s'assure qu'elle est conforme au cadre de reconnaissance et de mise en œuvre des droits des peuples autochtones du gouvernement du Canada.
Nous parlons d'un projet de loi sur le racisme environnemental, que nous n'avons pas défini non plus. Je suis reconnaissant à Mme Pauzé de proposer un amendement pour corriger cette lacune. La consultation ne se limite pas aux communautés raciales, car elle inclut les personnes, les collectivités, les organismes et les organisations intéressés.
J'aimerais obtenir des conseils de la part des traducteurs. Je sais que Mme Pauzé a parlé de la signification du mot « iniquité », qui correspond en français au plus haut niveau de différence, mais ce n'est pas le cas pour ce mot en anglais, qui correspond plutôt à un déséquilibre, si vous voulez. Il ne fait pas nécessairement référence à un grave déséquilibre. C'est plutôt un déséquilibre entre les intrants et les extrants, ou les résultats et les effets. Je ne suis pas certain que le mot anglais doit être plus fort que le mot français qu'a proposé Mme Pauzé. Je ne pense pas que le mot « inequity » soit aussi fort que ce même mot en français.
Pour revenir aux propos de Mme Collins, je dois dire que cette disposition du projet de loi propose une consultation avec toutes sortes de personnes, toute personne qui souhaite faire part de son point de vue en consultation et en coopération avec le ministre. Il ne s'agit pas d'une consultation uniquement avec les communautés raciales. Cette consultation vise tous ceux qui souhaitent faire connaître leur opinion sur le concept de justice environnementale.
Je le répète, je crois vraiment que nous devons cerner et définir ce que nous entendons par « justice environnementale ».
:
Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais souligner, après avoir lu les amendements et écouté certaines des discussions, et pour réitérer le point qu'a fait valoir M. McLean, que même certains de nos témoins la semaine dernière ont fait remarquer que le racisme peut être un facteur, mais il peut y avoir une multitude de facteurs en ce qui concerne les personnes de couleur ou autochtones. Je crois qu'il est utile de s'attaquer au problème en adoptant une perspective plus globale afin d'essayer de réaliser l'objectif du projet de loi. On évite ainsi de se limiter à un aspect en particulier des problèmes auxquels certains Canadiens sont confrontés.
Je conviens également que le terme « justice environnementale » doit être très bien défini. J'entends des électeurs — et je n'exagère pas en disant « quotidiennement » — me dire qu'ils sont furieux en ce qui a trait au plan actuel qui laisse… Même si on parle d'une transition juste, ou quoi que ce soit d'autre, ils se sentent exclus. Des définitions claires s'imposent pour que l’on comprenne bien l'objectif du projet de loi. Nous voulons nous assurer de pouvoir réaliser cet objectif.
Je crois que c'est ce que Mme Pauzé a tenté de faire. Je ne suis pas bilingue, mais je comprends bien les commentaires qu'elle a formulés à propos de la nécessité de trouver une façon de s'assurer de traduire l'essence même du projet de loi.
:
Monsieur le président, je suis ici uniquement à cette fin, à savoir pour clarifier et expliquer l'objectif du projet de loi.
Merci, madame Collins.
L'objectif du projet de loi est de favoriser la justice environnementale et de lutter contre le racisme environnemental. Le but est de s'attaquer au racisme environnemental dans le sens le plus large. Comme je l'ai dit lorsque j'ai comparu devant le Comité le 1er novembre, je ne pense pas que les collectivités aux prises avec un problème de contamination toxique ou environnementale, tel qu'on le décrit dans le projet de loi, ou les collectivités situées à proximité de dangers environnementaux… Le projet de loi n'exclut pas les collectivités qui se trouvent dans une telle situation. Il fait partie, précisément, d'une approche visant à s'attaquer au racisme environnemental et à le nommer. Dans ce contexte, les collectivités qui ne sont pas racisées, mais qui sont économiquement défavorisées, à un point tel qu'elles souffrent aussi de l'absence d'une justice environnementale… Le projet de loi porte sur le racisme environnemental.
Je ne pense pas révéler un secret en disant que, avant que le projet de loi soit présenté, avant la première lecture, j'ai discuté avec mon amie du Bloc québécois, la députée de Repentigny. Nous avons essayé de voir comment faire en sorte que le Bloc soit à l'aise avec le projet de loi.
J'ai présenté l'amendement qu'elle propose aujourd'hui à Lenore Zann, la marraine initiale du projet de loi et ancienne députée de Cumberland-Colchester, à Mme Ingrid Waldron et à quelques-uns des nombreux groupes au pays qui souhaitent l'adoption du projet de loi. L'idée de supprimer le mot « racisme » du projet de loi a largement été jugée inacceptable.
Pour faire suite aux questions de Greg McLean, je dois dire qu'il est assez clair que le projet de loi n'exclura aucune collectivité, peu importe qu'il s'agisse ou non d'une collectivité autochtone ou de personnes de couleur. Les personnes défavorisées, qui sont victimes d'une contamination environnementale dans une mesure qui ne serait pas la même s'ils vivaient au sein d'une communauté mieux nantie et dotée d'un plus grand pouvoir sur les plans économique et politique, pourront bénéficier des programmes de justice environnementale. Comme je l'ai déjà mentionné, l'agence américaine de protection de l'environnement, l'EPA, est un exemple dans le domaine, car elle élabore des programmes solides depuis 1994.
J'espère que ma réponse clarifie les choses pour vous.
Je vous remercie de m'avoir posé la question, madame Collins.
J'ai en main la définition de « justice environnementale » établie par l'EPA, mais je crois qu'elle relève tellement du gros bon sens que les tribunaux ne penseront certes pas que ce projet de loi porte sur des arbres qui vont présenter leur défense devant les tribunaux. C'est notamment ce qu'a laissé entendre M. McLean, à savoir que c'est la nature elle-même qui se voit confier le droit d'obtenir réparation. Il est clair qu'il s'agit d'une mesure législative qui porte sur les communautés humaines qui ne bénéficient pas des mesures de protection que nous jugeons minimales pour les Canadiens. Nous savons que ce sont les communautés de couleur et autochtones qui sont majoritairement victimes de ce problème de façon disproportionnée au Canada, quoique ce ne sont pas exclusivement celles‑là.
:
Monsieur le président, je suis désolé, mais ma collègue, Mme May, m'a mal compris. La justice environnementale, en ce qui a trait à la nature, vise à remettre la nature dans l'état où elle était auparavant, et englobe les fonds dépensés à cette fin, plutôt que de réparer les torts subis par des gens. Les deux vont de pair, et c'est pourquoi j'ai posé ma question, ce n'est pas parce que des arbres traîneraient le gouvernement devant les tribunaux.
J'ai soulevé quelques préoccupations, auxquelles les témoins ici présentes pourraient répondre. Pourrions-nous demander aux témoins de répondre à la question que j'ai soulevée à propos de la traduction du mot français « iniquité », compte tenu de ce qu'a dit Mme Pauzé au sujet de la gravité d'une iniquité et du sens plus fort de ce mot qu'en anglais. À mon avis, le sens de ce mot en anglais est beaucoup moins fort. Ce serait bien.
Pour revenir aux commentaires de Mme May, je dois dire que je ne vois aucun problème à inclure dans le préambule, ou ailleurs dans le projet de loi, la définition de l'EPA du terme « justice environnementale », de sorte que l’on comprenne de quoi il s'agit. Nous pourrions peut-être en faire un article du projet de loi, afin de préciser ce qu'on entend généralement par « justice environnementale » et de mentionner que c'est cette définition qui s'applique dans le projet de loi. Je pense que cela serait instructif pour toute personne qui examinera ultérieurement ce projet de loi, en ce sens qu'elle pourra déterminer ce qu'on entendait au moment de l'adoption de cette mesure législative.
Premièrement, est‑ce que les deux autres témoins peuvent nous parler de la différence entre le terme anglais et le terme français et aborder ensuite la question de la définition? Je crois que ce serait instructif.
:
Monsieur le président, parlons de l'amendement et de la disposition visée. Le paragraphe 3(3) commence comme suit:
La stratégie inclut à la fois :
a) une étude qui comprend :
(i) d'une part, un examen des liens entre la race, le statut socioéconomique et le risque environnemental,
Je préférerais que l'on se limite au risque environnemental et au statut socioéconomique pour les motifs que Mme Pauzé et moi-même avons déjà fait valoir.
On peut lire plus loin à l'alinéa 3(3)b):
des mesures qui visent à faire progresser la justice environnementale et à évaluer et prévenir le racisme environnemental ainsi qu'à s'y attaquer, lesquelles peuvent comprendre
On indique que la stratégie doit inclure des mesures pouvant comprendre « des modifications possibles aux lois, politiques et programmes fédéraux » — c'est‑à‑dire à la totalité des lois et des programmes —, « la participation de groupes locaux dans l'élaboration des politiques en matière d'environnement » — c'est‑à‑dire que tous les groupes communautaires peuvent contribuer à l'élaboration de ces politiques — et, bien sûr, « l'indemnisation des particuliers ou des collectivités » au titre de l'ensemble des torts qui ont pu être causés. Mais qui va déterminer le montant de cette indemnisation? Y a‑t‑il une instance qui va s'en charger ou est‑il possible que ce soient les tribunaux qui doivent en définitive trancher quant à savoir à combien tout cela va se chiffrer? Il faudra bien évidemment créer un poste budgétaire bien garni si l'on veut compenser le traitement inéquitable réservé à de nombreuses communautés de tout le Canada pendant toutes ces années.
Si l'on pouvait apporter des précisions à ce sujet dans le contexte de l'amendement proposé, je pense que cela nous aiderait à y voir plus clair.
:
Certainement. Merci pour la question.
C'est une façon de faire très courante. La notion de consultation auprès des parties intéressées revient dans de nombreuses lois canadiennes. Il suffit de prendre l'exemple d'Environnement et Changement climatique Canada. On offre régulièrement sur le site Web la possibilité de communiquer ses observations. Les gens peuvent contribuer de cette manière, après quoi le ministre présente son rapport.
La seule obligation pour le ministre est de déposer son rapport après l'avoir rédigé en consultation avec ces différents groupes. Il n'y a pas de rencontre à proprement parler. Il ne faut pas penser que le ministre est tenu de prendre le thé avec tous ceux qui lui ont fait part de leurs commentaires.
Il n'y a là rien d'exceptionnel. Je suis persuadée que les gens d'Environnement et Changement climatique Canada pourraient vous le confirmer. Je ne sais pas combien de consultations ce ministère peut tenir. J'arrive moi-même difficilement à suivre le rythme pour répondre à chaque fois. Je dirais que c'est à raison d'une ou deux fois par mois que l'on consulte ainsi le grand public et différents groupes d'intérêt.
C'est l'intention visée, mais je ne crois pas qu'il s'agisse d'un fardeau très lourd.
:
Oui, bien sûr. En fait, je vais prendre mon droit de parole pour discuter à la fois de nos amendements au préambule et de nos amendements au titre. Nous proposons effectivement des amendements au titre, alors nous allons les présenter tout d'un trait.
Encore une fois, nous pensons que les droits ainsi que les politiques qui découleront du projet de loi devraient être universels, que tous devraient en jouir sans égard à leurs différences. Les articles du projet de loi dans la forme où nous venons de les adopter ne nous fournissent pas d'outils légaux puissants pour contrer les iniquités et les discriminations, comme celles qui seraient fondées sur l'origine, sur la langue, sur l'appartenance culturelle ou sur les conditions socioéconomiques.
J'ajoute un petit commentaire à propos de notre amendement sur les transferts d'argent, qui a été rejeté tantôt. Je n'en reviens toujours pas: alors que le projet de loi prévoit « l'indemnisation des particuliers et des collectivités », le Comité refuse les transferts fédéraux au Québec et aux provinces pour les aider à faire le travail qui doit être fait en vertu du projet de loi. Cela m'étonne.
Cela dit, j'ai fini et je n'argumente plus là-dessus.
J'espère que Mme Pauzé voudra bien m'excuser d'interrompre sa belle lancée, mais mon intervention va un peu dans le sens de sa proposition de tout à l'heure.
Je vais vous lire le paragraphe en question dans le préambule:
… que le gouvernement du Canada reconnaît l'importance d'une participation significative de tous les Canadiens, en particulier les collectivités marginalisées, à l'élaboration des politiques environnementales et que la discrimination raciale en matière d'élaboration de politiques environnementales constituerait du racisme environnemental;
Monsieur le président, je ne suis pas du tout certain que cette affirmation soit vraie. Si l'on considère les politiques environnementales mises de l'avant par le gouvernement, on ne peut pas dire qu'il reconnaît vraiment l'importance d'une participation significative de ses partenaires au sein de la Confédération. Il y a deux provinces de l'Ouest canadien qui adoptent des lois pour essayer de limiter l'ingérence du gouvernement fédéral — une ingérence unilatérale tout à fait arbitraire — en matière d'utilisation des terres, ce qui va dans le sens de la motion de Mme Pauzé.
La motion que je vous soumets maintenant viserait la suppression de tout ce paragraphe qui, d'après ce que nous avons pu constater, n'est pas vraiment conforme à la réalité.
:
Merci, monsieur le président.
Si vous voulez, je peux lire la définition qu'a donnée l'une des représentantes d'Environnement Canada, Mme Farquharson, en réponse à la question de M. McLean.
[Traduction]
C'est une définition parfaitement compréhensible qui est couramment utilisée et acceptée. Je vous la répète:
On entend par justice environnementale « le traitement équitable et la participation significative de toutes les personnes, sans égard à la race, à la couleur, à l'origine nationale ou au revenu, en ce qui concerne l'élaboration, la mise en oeuvre et l'application des lois, des règlements et des politiques en matière d'environnement. »
Dans une langue comme dans l'autre, cela n'a rien d'exceptionnel. Je ne proposerais pas de projet de loi… mais je dois remercier Lenore Zann qui a rédigé celui‑ci au départ.
En qualité d'ancienne avocate en droit environnemental, je peux dire à M. McLean qu'il est vraiment difficile de trouver au Canada une loi environnementale qui produit les résultats voulus. Celle‑ci devrait nous permettre d'éviter les écueils.