Je m'appelle Allan Adam et je suis le chef de la Première Nation des Chipewyans d'Athabasca. Comme vous le savez, la saison de hockey bat son plein. La dernière fois que j'ai été aussi enthousiaste, c'est lorsque Wayne Gretzky a ramené la coupe chez nous. Connor McDavid va faire la même chose cette année.
Tout déplacement à Ottawa est significatif pour notre peuple. Nous nous attendons à pouvoir discuter ici avec les élus en vue d'une réflexion sur les moyens à mettre en œuvre pour le mieux-être de tous.
Je sais qu'il ne me reste sans doute qu'environ quatre minutes, mais je compte bien lire la déclaration que j'ai en main. Venir d'aussi loin pour se faire dire que l'on dispose de cinq minutes à peine… Vous allez écouter ce que j'ai à dire en m'accordant plus de cinq minutes, car il s'agit là de considérations très importantes quant au mode de développement de ce pays dans l'intérêt de tous les Canadiens. Si vous n'écoutez pas tout ce que j'ai à vous dire, je vais simplement me lever et quitter la salle en vous laissant le texte de la déclaration, et le tout sera terminé en 10 secondes.
Il me faudra sans doute un peu plus de cinq minutes pour lire mon exposé. Tout ce que je demande, c'est sept minutes de votre temps. Je vais être franc et direct avec vous. J'ai fait tout ce chemin depuis l'Alberta pour m'asseoir avec vous aujourd'hui afin de vous faire comprendre ce que vivent nos gens et de m'assurer que vous prenez notre situation au sérieux.
Bonjour, honorables députés. Merci de nous avoir invités aujourd’hui. Cette question est extrêmement importante et mérite une attention accrue.
J’aimerais pouvoir vous dire que c’est un plaisir pour moi d’être ici, mais ce serait mentir. Pour une raison ou pour une autre, j’ai hérité de la tâche de venir à Ottawa rappeler au gouvernement ses obligations et ses responsabilités.
Vous avez la responsabilité de défendre nos droits découlant des traités et garantis par l'article 35 de la Constitution. Vous avez la responsabilité de fournir les services de base en matière de santé, de soutiens sociaux, d’éducation et d’infrastructures que vos communautés de colonisateurs tiennent pour acquis. Vous avez la responsabilité de réglementer comme il se doit les gigantesques projets industriels qui pourraient menacer la santé et la sécurité des résidents de Fort Chipewyan et d’autres collectivités en aval. Vous avez la responsabilité d’avertir les êtres humains que leur eau peut avoir été contaminée par la fuite d’un bassin de décantation qui avait été déclaré sans danger quand il a été approuvé et autorisé par le Canada. Aidez-moi à comprendre comment il peut être possible que cela ait été approuvé par le Canada.
Vous êtes responsables, peu importe ce que vous pouvez en penser. Il en va de même de l’Alberta, mais cela n'empêche pas les résidus de se répandre dans notre territoire ancestral depuis maintenant 11 mois, sans parler de ce qui s'est passé au cours des 30 dernières années… et de tout ce qui arrive à notre insu.
Pendant 10 mois, cette fuite n’a pas été signalée, en dépit du fait que l’Alberta Energy Regulator, l'AER, l'organisme de réglementation de l'énergie en Alberta, et l’exploitant des sables bitumineux étaient au courant de ce qui se passait. Combien de gens à Ottawa savaient ce qui se passait en Alberta au cours de cette période de 10 mois?
Pendant 10 mois, les gouvernements fédéral et provincial n’ont rien fait. Je peux en témoigner personnellement, car je n'ai reçu aucun appel à ce sujet. Il a fallu qu’une fuite plus catastrophique survienne plus tôt cette année pour que nous apprenions la vérité. Même alors, les gouvernements colonisateurs n’ont rien fait.
C’est seulement quand nous avons alerté les médias nationaux que les gens à Ottawa et Edmonton ont commencé à se préoccuper de la situation. Ce n’est qu’après que nous ayons visité le lieu de la fuite et publié des photos et des vidéos des répercussions sur les plans d’eau fréquentés par des poissons et des animaux que des gens ont mis en doute l’explication officielle fournie par la première ministre de l’Alberta et l’AER.
À entendre la première ministre, il n'y a aucun problème. La faune n'est aucunement touchée. Eh bien, je vous invite à venir manger ce que nous mangeons, à venir boire l'eau que nous buvons, et il est bien possible que votre discours ne soit plus le même par la suite.
Même après deux mois de reportages à la une, nous ne savons toujours pas au juste ce qui s’est produit. À notre connaissance, personne n’a été congédié et aucune mesure disciplinaire ou sanction n’a été imposée, que ce soit par les entreprises ou par les différents gouvernements, y compris celui‑ci. Certains dirigeants de l'Impériale ont bien tenté de présenter leurs excuses, mais l’Alberta traite toute l’affaire depuis le début comme un simple problème de communication. Il s’agit d’une tentative délibérée de minimiser pour des raisons juridiques et politiques une énorme catastrophe industrielle et les obligations financières et politiques qui en résulteront. Il y a en effet des poursuites judiciaires en cours qui visent notamment le gouvernement albertain.
Le Canada ne devrait pas croire qu'il va s'en tirer aussi facilement, car vous êtes également responsables de ce qui s'est produit. Je ne serais pas ici aujourd'hui à Ottawa s'il ne se passait rien en Alberta, mais c'est malheureusement encore le cas. La fuite se poursuit au moment où l'on se parle. Aucune solution n'a été proposée pour régler la situation.
J’en conclus que le Canada est un pays où l’on peut impunément déverser 5,5 millions de litres de boues toxiques dans l’environnement. N'oubliez pas que c'était 5,5 millions de litres en une seule journée. Lorsque j'ai visité le site de l'Impériale, on m'a indiqué que la fuite avait commencé trois jours plus tôt. Vous n'avez qu'à faire le calcul en multipliant par trois. C'est le total auquel on arrive sans que personne n'ait eu de comptes à rendre. Je l'ai vu de mes propres yeux en me rendant sur place. On menace ainsi la santé et le bien-être des collectivités en aval sans subir de conséquences. Le Régime de pensions du Canada et l’Alberta Investment Management Corp continuent d’investir des dizaines de millions de dollars chaque année dans les sables bitumineux.
Les Canadiens s’attendent à ce que cette industrie soit réglementée comme il se doit. Je suis ici pour vous dire qu’elle ne l’est pas. Il n'y a aucune réglementation. Si l’Alberta porte une grande part de responsabilité, le Canada doit également répondre de ce qui se passe. La Loi canadienne sur la protection de l’environnement, la Loi sur les pêches et l’Entente-cadre sur les eaux transfrontalières du bassin du Mackenzie — que vous avez conclue avec vos homologues sans jamais vraiment y donner suite, ce que j'aurais pu vous prédire il y a 20 ans déjà — sont autant d’instruments et de cadres juridiques qui permettraient au gouvernement fédéral de protéger la santé et la sécurité des résidents en aval des sables bitumineux.
Nous pouvons dénoncer un contrôle d’application déficient, un financement insuffisant et l’absence de volonté politique, mais ce sont là des excuses et non des solutions. Or, il nous faut des solutions. Cet incident amène tant les communautés autochtones de l’Alberta en aval que les résidents du Nord à se demander s’il s’agit d’un cas isolé ou d’un problème systémique dans l’ensemble du secteur des sables bitumineux. Lorsque je parle de « problème systémique » je fais référence au racisme systémique dont sont victimes les communautés des Premières Nations vivant en aval. Si tout cela se passait à Calgary, je peux vous garantir que c'est vous, et non moi, qui pousseriez les hauts cris aujourd'hui.
Nous demandons au gouvernement fédéral d’employer tous les moyens juridiques à sa disposition pour se charger de l’enquête et du nettoyage du déversement de Impériale–Exxon à Kearl. Toute confiance dans le gouvernement de l’Alberta est perdue, et ce depuis bien longtemps déjà. On ne peut manifestement pas compter sur lui pour veiller à la réparation de ce désastre.
La situation est désastreuse depuis les années 1960. Quand allez-vous vous décider à mettre de l'ordre dans tout cela? L'Alberta a obtenu 1 milliard de dollars pour décontaminer les sables pétrolifères. Il lui en faudrait 130 milliards. Où le Canada va‑t‑il trouver le reste des fonds requis s'il est impossible pour l'Alberta d'y parvenir? C'est la stricte vérité, et ce n'est pas moi qui l'affirme; ce sont vos pairs qui l'ont écrit.
Nous exhortons également le gouvernement à entreprendre une inspection complète de l’intégrité structurelle des bassins de décantation dans l’ensemble du secteur des sables bitumineux, et pas seulement à Kearl. Si on peut passer une fuite sous silence pendant 10 mois au site Kearl, qu’en est‑il de la situation ailleurs? Ça nous prend une vérification crédible et contrôlable de tous les bassins de décantation pour rétablir un minimum de confiance. Si cela n'est pas chose possible pour vous, voulez-vous bien me dire ce que vous faites ici?
Enfin, le Canada doit veiller à ce que les peuples autochtones aient leur mot à dire dans la manière de réglementer les sables bitumineux et de prendre des décisions sur les résidus. Nous devons définir en priorité la politique sur la gestion à long terme des bassins de décantation.
L’industrie et l’Alberta proposent de traiter les résidus liquides et de les reverser dans la rivière Athabasca. Il n’est pas question pour ma communauté ou quelque autre collectivité en aval d’accepter cette solution. Ce n’est pas notre dégât. Nous ne permettrons pas que les pollueurs rejettent ces résidus dans notre eau potable. Si jamais c'était la solution retenue, est‑ce que le Canada aurait suffisamment de fonds pour déplacer notre communauté et nos gens afin qu'ils se retrouvent en lieu sûr?
Je vais avoir l'obligeance de vous servir une mise en garde quant à ce que l'avenir pourrait vous réserver. C'est un dossier qui pourrait fort bien donner lieu à des poursuites judiciaires, et le Canada va se retrouver au banc des accusés, au même titre que l'industrie des sables bitumineux et le gouvernement de l'Alberta.
Il y a une chose qui m'apparaît totalement injustifiée, monsieur le président. Pourquoi les communautés des Premières Nations doivent-elles se présenter devant un comité pour obtenir un permis afin d'exploiter leurs territoires traditionnels? Pourquoi devons-nous dépenser des millions de dollars pour témoigner de ce que nous vivons afin d'obtenir l'accès à de l'eau potable et de pouvoir consommer en toute sécurité du poisson, de la viande d'orignal et tout le reste?
Pourquoi se fait‑il que pendant que nous dépensons ces millions de dollars, le gouvernement albertain continue d'approuver automatiquement toutes les demandes de permis d'exploitation des sables bitumineux dont il est saisi? Pourquoi ne pourrions-nous pas faire partie nous-mêmes du comité, ce qui nous éviterait d'engager tous ces coûts, pour les entendre parler des torts qu'ils veulent causer à nos communautés?
L'AER, l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta, c'est une véritable farce. Si, tout bien considéré, vous partagez tous cet avis, alors pourquoi dois‑je encore me présenter ici? Voilà maintenant 40 ans que l'on approuve automatiquement tout ce que l'industrie propose. Vous pouvez bien vous mordre les lèvres; vous avez toutes les raisons de le faire, car ce n'est pas une blague, mais la triste réalité.
Il y a encore chez nous des gens qui meurent en raison de conditions sanitaires déficientes dont personne n'a daigné parler pendant 10 ans. Si vous souhaitez que j'en traite de nouveau, je vais le faire volontiers, et nous reprendrons tout ce débat.
À ce titre, je peux vous dire que j'attends des nouvelles de mon beau-père. On va lui communiquer aujourd'hui même ses résultats d'analyse après avoir trouvé la semaine dernière une tumeur cancéreuse dans son foie. Je suis censé être avec mon épouse pour la réconforter quand elle recevra cette nouvelle, mais je suis plutôt ici pour témoigner devant tous les Canadiens des problèmes que vit notre communauté.
Si ces bassins de décantation continuent à fuir, nous n'aurons bientôt plus une espérance de vie de 80 ans. Pour l'ensemble de notre communauté, elle sera sans doute d'environ 60 ans. J'affirme une telle chose parce que des jeunes commencent à être frappés par le cancer, et ce, sans parler de tous les problèmes de santé mentale qui perdurent depuis la fin de la pandémie. Ces problèmes existaient déjà longtemps avant la COVID et nous affecteront encore longtemps après. Si nous n’arrivons pas à régler ces problèmes, la situation va se détériorer. Il ne devrait plus y avoir de nouveaux projets dans notre secteur, car ce sont nos gens qui en paient le prix. Les communautés en aval continuent d'en ressentir les conséquences. Si quelqu'un ici croit que c’est sans danger, je l'inviterais à offrir la source d’approvisionnement en eau de sa collectivité pour le stockage à long terme de résidus.
Ce problème ne se réglera pas tout seul. Le Canada et la population canadienne ont tiré des milliards de dollars de cette ressource. Le Canada a la responsabilité de s’attaquer à la crise globale des résidus et de la remise en état qui se joue dans notre région et qui menace tout le bassin du Mackenzie en aval des sables bitumineux. Pour ce faire, il doit charger un organisme de cogestion mandaté par le gouvernement fédéral et dirigé par les peuples autochtones d’assurer une surveillance efficace et le doter des pouvoirs d’exécution pour corriger le problème.
Nous demandons en fait, monsieur le président, que les communautés des Premières Nations qui vont être touchées par les grands projets industriels deviennent elles-mêmes les instances réglementaires. Nous devrions être assis de l'autre côté de la table, plutôt que de témoigner des torts causés à nos communautés par l'industrie et des raisons pour lesquelles c'est encore le cas aujourd'hui.
Quel est votre mandat? Votre mandat a des répercussions sur les personnes qui vivent en aval, une situation qui ne changera pas de sitôt.
Je vais en rester là pour l'instant, monsieur le président. Merci.
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Merci, monsieur le président.
Merci, chef Adam.
Je m'adresse à vous aujourd'hui au nom de la Première Nation 468 Fort McMurray. Neil Cheecham devait se joindre à vous, mais malheureusement, il ne peut pas être ici aujourd'hui. C'est un honneur pour moi de prendre la parole en son nom et au nom des membres de notre communauté.
Personne ne croyait que nous nous retrouverions ici aujourd'hui. Les manquements aux obligations en matière de divulgation et de déclaration à l'égard du MPO et des communautés autochtones sont particulièrement décevants. Nous attendons toujours l'approbation d'une demande d'examen de documents techniques de l'Impériale. Même des demandes visant l'examen de documents supplémentaires de l'Impériale sur la qualité de l'eau ont été retardées ou reportées, ou les détails qui ont été fournis sont très limités. Il va sans dire que tout cela alimente la méfiance au sein des communautés.
Nous vivons dans une société fondée sur des règles. Je vais répéter cette affirmation: nous vivons dans une société fondée sur des règles. Pourtant, l'incident récent lié à la mine Kearl de l'Impériale montre que les exploitants de sables bitumineux, les organismes de réglementation et les gouvernements continuent à mal se comporter et à accorder plus d'importance aux groupes d'intérêt qu'à la confiance et à la transparence. Par conséquent, nous sommes ici aujourd'hui pour demander expressément que la réglementation et les politiques relatives à l'assainissement, à la protection et à la remise en état de l'environnement soient fondées sur la protection et le maintien des droits ancestraux et issus de traités des Autochtones de la région.
La Première Nation 468 Fort McMurray est une communauté autochtone titulaire de droits issus de traités située à Fort McMurray. En 2021, la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones du Canada a reçu la sanction royale et est entrée en vigueur. Il s'agit d'une loi très importante pour les communautés de la région parce qu'elle leur permet de se prévaloir de leurs droits issus de traités sur ces terres lorsque les exploitants de sables bitumineux cessent leurs activités. Par ailleurs, elle fournit une feuille de route au gouvernement du Canada et aux peuples autochtones pour qu'ils travaillent ensemble à la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies en se fondant sur la réconciliation, la guérison et des relations de coopération durables.
Pour pouvoir exercer nos droits, nous devons absolument avoir la possibilité d'utiliser le vaste réseau de cours d'eau de la région, notamment le bassin versant de la rivière Athabasca. Cela étant dit, les bassins de décantation contenant des eaux contaminées par les procédés et des eaux usées industrielles sont une source croissante de préoccupations. À l'heure actuelle, on estime que ces bassins contiennent 1,7 billion de litres de résidus et qu'ils occupent une superficie de 225 kilomètres carrés. Les risques accrus de fuites ont un effet néfaste sur la faune et la flore, les sources traditionnelles de poissons et l'eau potable. Les bassins de décantation sont difficiles à assainir et les fuites difficiles à éviter; il y a donc des préoccupations grandissantes par rapport aux répercussions sur l'environnement, sur la santé humaine, sur les droits issus de traités et sur la culture.
Comme le chef Adam l'a déjà dit, les communautés autochtones de la région sont touchées par des taux croissants de cancer. Nous tenions tous pour acquis que les bassins suintaient; aujourd'hui, pour la première fois, nous avons la preuve que des eaux se sont écoulées des bassins de décantation.
Tous balaient du revers de la main l'augmentation du risque de cancer: les Autochtones fument, ils boivent et ils ont des habitudes de vie malsaines. Je trouve important de comprendre que d'autres facteurs expliquent peut-être le risque accru de cancer dans les communautés autochtones de la région.
L'incident récent lié à la mine Kearl de l'Impériale et le décret de protection de l'environnement qui s'est ensuivi révèlent de graves lacunes en matière de gestion de la réglementation. À cause de l'absence de surveillance réglementaire et de mesures décisives à l'égard de l'incident, en plus de l'omission de transmettre des renseignements rapidement, la Première Nation 468 Fort McMurray ainsi que toutes les autres communautés de la région ont peut-être été exposées à des risques chroniques et sérieux pour la santé humaine par plusieurs voies, comme les eaux de surface et les eaux souterraines.
Aujourd'hui, on avance des preuves comme quoi c'était l'hiver, il y avait peu de faune et de flore — tout dormait — et le risque de boire l'eau des rivières et des affluents gelés n'était peut-être pas aussi grand qu'il l'aurait été en été. Cependant, il y avait bel et bien un risque, et ce risque perdure.
La manière dont le dossier a été géré mine encore plus notre confiance envers le régime réglementaire de l'Alberta, ainsi que sa capacité de régler les problèmes et de protéger nos droits. Par conséquent, nous demandons aux personnes ici présentes de prendre nos commentaires en considération et de tenir compte d'objectifs et de paramètres importants pour l'industrie et les parties prenantes, soit les communautés aux environs des projets d'exploitation.
Il faut un cadre réglementaire relatif à l'environnement, une évaluation régionale réalisée en vertu de la Loi sur l'évaluation d'impact, et une étude des effets cumulatifs des activités non seulement de l'Impériale, mais aussi de Suncor, de Synoil, de Syncrude et de tous les autres exploitants à l'œuvre dans la région. Le rôle joué par chacune des parties doit être pris en considération. Tout le monde pourrait parler du Plan régional pour le cours inférieur de la rivière Athabasca, mais il n'est pas suffisamment contraignant. Il faut renforcer la surveillance de sorte que les effets cumulatifs de toutes les activités soient pris en compte.
Étant donné les effets néfastes des suintements sur l'environnement, nous sommes également déçus et inquiets par rapport à l'influence exercée par l'industrie sur la réglementation et les politiques liées à la libération des eaux contaminées par les procédés et des eaux usées industrielles contenues dans les bassins de décantation. Je le répète: c'est facile de faire disparaître les eaux, mais les risques auxquels les communautés sont exposées ne disparaissent pas du même coup.
Le plan proposé de modifier la Loi sur les pêches pour permettre la libération des eaux contaminées par les procédés et des eaux usées industrielles provenant des exploitants de sables bitumineux est un pas en arrière. C'est un autre bon exemple qui montre que les communautés autochtones sont toujours ignorées, surtout en l'absence d'une évaluation des effets cumulatifs.
Néanmoins, je tiens à prendre le temps de remercier toutes les personnes ici présentes pour le partenariat qui a été noué relativement à la loi adoptée par le gouvernement fédéral. Cette loi pourrait fournir une feuille de route au gouvernement du Canada et aux peuples autochtones pour qu'ils travaillent ensemble à la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies en se fondant sur la réconciliation, la guérison et des relations de coopération durables.
Par ailleurs, le Groupe de travail Couronne-Autochtones, le GTCA, représente une partie de la solution. Il offre aux communautés autochtones une voie par laquelle trouver des options envisageables pouvant mener au consentement. La structure du GTCA, qui est formé de plusieurs sous-groupes, permet d'avoir des discussions ouvertes et franches dans le but d'obtenir le consentement et de trouver des solutions conformes à la fois au droit constitutionnel canadien et, plus important encore, au droit autochtone. Dans le passé, je crois que l'écart entre le droit autochtone et le droit constitutionnel a été ignoré, ce qui a entraîné des conflits et des différends au sein des communautés. Dorénavant, selon moi, le GTCA pourrait contribuer à combler cet écart.
Aujourd'hui, nous avons une demande à vous faire. Les concepts de remise en état et de l'équivalence du potentiel des terres proviennent généralement des domaines de l'agriculture et de la foresterie. Dans le passé, les communautés autochtones et les gardiens du savoir ont très peu été appelés à participer aux processus en la matière. Nous aimerions commencer à mettre l'accent sur un cadre réglementaire plus actif pour évaluer les niveaux de protection et pour fixer et imposer des normes autochtones quant aux aliments traditionnels, à l'utilisation des terres et aux pratiques culturelles, au besoin, au lieu de suivre par défaut les lignes directrices établies par l'AER. Le gouvernement du Canada se doit d'adopter de la réglementation et des politiques pour soutenir les efforts d'assainissement et de remise en état afin que les communautés autochtones puissent exercer leurs droits ancestraux et issus de traités.
Velma, une des membres de notre communauté, est une personne très sage. Elle appuie la communauté depuis très longtemps. Comme elle le dit: « Ce que nous subissons n'est pas le fruit de nos actions; c'est le fruit des actions des autres. » Le problème ne disparaîtra pas. La mise en place d'un processus de réglementation actif contribuera à l'atteinte de résultats concrets dans la région.
Merci.
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Bonjour à toutes et à tous. Je suis le chef Billy-Joe Tuccaro. Je vous appelle depuis Fort Chipewyan, en Alberta.
À l'instar du chef Adam, je dépasserai, moi aussi, les cinq minutes qui me sont allouées étant donné la gravité de la situation qui se déroule actuellement au sein de ma communauté.
Sur ce, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui. Je suis Billy-Joe Tuccaro, chef de la Première Nation crie Mikisew. Je suis accompagné aujourd'hui de Melody Lepine, directrice des relations gouvernementales et industrielles de la nation. Elle m'aidera à répondre à vos questions.
Tout d'abord, nous aimerions profiter de l'occasion pour exprimer notre frustration et nos sérieuses préoccupations concernant les fuites de substances toxiques des bassins de décantation de la mine de sables bitumineux Kearl, qui appartient à l'Impériale, ainsi que leur mauvaise gestion. Notre frustration et nos préoccupations sont liées au fait que, comme le chef Adam l'a aussi mentionné, notre communauté a été informée des fuites seulement 10 mois plus tard. C'est totalement inacceptable. En ma qualité de chef de la Première Nation crie Mikisew, j'aurais dû recevoir un avis dès que l'incident s'est produit.
Il importe de tenir compte du contexte de la crise. Ce contexte, c'est un manque continu de protection fédérale nécessaire de notre environnement, de nos droits et de notre santé face à un total actuel de 1,4 billion de litres de déchets liquides mis de côté près de nos rivières, de nos marécages, de nos lacs et de nos eaux souterraines et s'écoulant vers notre communauté et jusqu'à l'Arctique. Essayez d'écrire ce nombre: 1 400 000 000 000 litres. C'est beaucoup de zéros.
Permettez-moi de vous fournir quelques renseignements contextuels additionnels. La Première Nation crie Mikisew est la plus grande nation signataire du Traité no 8 de la région des sables bitumineux. De nombreux intérêts fédéraux convergent sur notre territoire traditionnel.
Premièrement, on y trouve le plus grand parc national du Canada, qui est aussi un site du patrimoine mondial de l'UNESCO. Deuxièmement, des eaux transfrontalières importantes y sont situées. Troisièmement, il comporte l'une des principales routes de migration d'oiseaux de l'Amérique du Nord. Quatrièmement, il abrite des espèces emblématiques telles que le caribou et le bison des bois. Cinquièmement, il est composé d'un réseau de lacs, de rivières et de marécages qui soutiennent d'importantes espèces de poissons et leur habitat.
Sixièmement, quelques-uns des plus grands projets industriels au Canada y sont situés. Ces projets produisent des quantités énormes de gaz à effet de serre et toutes sortes de substances toxiques, dont certaines sont réglementées en vertu de la LCPE de 1999 ou devraient l'être. Quand nous, la nation Mikisew, avons signé le Traité no 8 en 1899, nous avons noué un partenariat avec la Couronne. Nous nous sommes engagés à gérer nos terres et nos ressources en partenariat avec le Canada. Pour sa part, la Couronne s'est engagée à ne pas nous empêcher d'exercer nos droits issus de traités et de veiller à ce que nous ayons accès aux terres et aux cours d'eau nécessaires pour maintenir notre mode de vie. Ces droits sont protégés aux termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
Mesdames et messieurs, nous sommes ici aujourd'hui pour vous dire que la Couronne ne respecte pas ses promesses, et que le Parlement et le gouvernement fédéral doivent en faire plus.
Je dois ajouter que l'aîné dont a parlé le chef Adam appartient à ma nation. Aujourd'hui sera une journée forte en émotions pour sa famille et pour la Première Nation crie Mikisew. Depuis que cet incident est survenu en mai dernier — j'ai été élu en octobre, mais j'étais alors membre de la communauté —, j'ai remarqué une hausse du taux de cancer. De plus, beaucoup de personnes dont le cancer était en rémission ont rechuté. On a observé récemment une augmentation de l'incidence du cancer des canaux biliaires, la forme la plus rare de cancer qu'on connaît.
Les soins que les membres de notre communauté reçoivent ne font qu'accélérer leur décès. Je le sais. Je l'ai vu de mes propres yeux quand cette maladie que personne ne sait comment soigner a emporté un de mes meilleurs amis. Voilà ce que vit ma communauté.
Le ruissellement printanier est la période la plus importante pour nous. Quand nous récoltons du poisson, de la viande, de la végétation et des remèdes traditionnels, comment pouvons-nous obtenir l'assurance que nos récoltes nous permettront de maintenir notre mode de vie?
La crise actuelle révèle des échecs sur de nombreux plans, et nous craignons que le projet Kearl ne soit que la pointe de l'iceberg. Sans réforme profonde, nous nous attendons à devoir faire face à des événements encore plus catastrophiques. L'enjeu ne concerne pas seulement le projet Kearl; il concerne toutes les industries qui utilisent des bassins de décantation. Tenez-vous‑le pour dit: nous ne tolérerons pas qu'un tel incident se reproduise. Il n'y aura pas d'autres incidents de la sorte; sinon, comme le chef Adam l'a demandé, le Canada est‑il prêt à déménager la nation Mikisew en lieu sûr?
L'été approche. Des enfants se baigneront dans le lac. La MRWB n'analyse que l'eau des robinets. Qui peut m'assurer que les enfants qui joueront dans l'eau au printemps et en été le feront en toute sécurité? Voilà ce que veut la communauté.
L'une des leçons les plus évidentes à tirer de cette crise, c'est que, comme nous le savions déjà, l'AER est un organisme de réglementation à liberté limitée; ce n'est pas un partenaire de confiance pour la protection des intérêts fédéraux dans notre communauté. Moi qui vis dans une communauté autochtone située en aval des sables bitumineux, je suis bien placé pour affirmer qu'il est épouvantable que l'Alberta en fasse si peu pour maîtriser la croissance et l'expansion progressive des bassins toxiques énormes qui suintent dans notre environnement naturel et nos bassins versants. Notre mode de vie, des écosystèmes d'une importance nationale et le bien-être de la population canadienne s'en trouvent menacés.
Permettez-moi de vous donner quelques exemples des échecs de l'AER à notre égard et à l'égard du Canada en entier. Il semblerait que l'AER était au courant des suintements depuis des années, mais l'organisme de réglementation n'a fourni aucun avis ou aucune donnée ni au gouvernement fédéral ni à nous. De plus, les données de l'AER montrent que les bassins suintaient depuis des années et elles confirment que les suintements débordaient des systèmes de gestion des fuites; pourtant, l'AER n'a rien fait. En outre, l'AER a ignoré des conclusions sans équivoque tirées par la commission d'examen conjoint du projet Kearl. Encore aujourd'hui, nous avons de la difficulté à obtenir suffisamment de données de la part de l'AER sur l'incident lié au projet Kearl, et l'AER permet à l'Impériale de limiter la collecte et l'échange de données.
De son côté, le gouvernement fédéral a mieux réagi. Services aux Autochtones Canada a pris des mesures importantes pour assurer l'accès à l'eau potable et à des services de santé mentale en période de crise. En outre, le s'est entretenu avec nous pour tenter d'établir la voie à suivre en nous traitant comme de véritables partenaires. Toutefois, la crise du projet Kearl montre aussi que le système de réglementation canadien n'est pas non plus irréprochable. La réponse du Canada à la crise a été entravée par le fait que la province n'a pas communiqué de renseignements et qu'elle n'a pas suivi les conclusions sans équivoque de la commission d'examen conjoint du projet Kearl. Pourquoi?
En outre, le Canada a eu de nombreuses occasions de mieux se préparer, mais soit il n'a pas pris les mesures essentielles qui s'imposaient, soit il a tardé à le faire. Permettez-moi de vous donner quelques exemples.
Il y a plus de cinq ans que le Comité du patrimoine mondial de l'ONU a demandé une évaluation des risques posés par les bassins de décantation. Pourquoi?
Cela fait plus de 10 ans que nos communautés ont demandé une étude sur la santé, qui aurait pu amener le gouvernement à prendre des mesures de protection. C'est pourquoi il y a environ un mois, les Mikisew ont envoyé au une lettre dans laquelle ils demandaient que l'on procède à l'étude sur la santé, compte tenu notamment de la situation actuelle et de la récente hausse des taux de cancer observée au sein de la communauté.
Depuis plus de 10 ans, des scientifiques soutenus par le gouvernement fédéral ont relevé des problèmes de suintement des bassins de décantation dans des eaux poissonneuses, mais aucune amélioration n'a été apportée à la réglementation ou aux lois.
Il existe des outils fédéraux, tels que des accords en vertu de la Loi sur les pêches, qui pourraient être utiles sur le plan de la communication d'information, mais ils n'ont pas été mis en œuvre.
En 2019, la commission d'examen conjoint du projet Frontier de la société Teck a demandé au Canada d'entreprendre davantage de travaux de surveillance et de recherche dans la région en raison des menaces qui pesaient sur le site du patrimoine mondial du parc national Wood Buffalo, mais des mesures doivent encore être prises.
Mesdames et messieurs, au moment où vous enquêtez sur les nombreuses lacunes liées à la crise du projet Kearl, il est important que vous n'oubliiez pas le coût humain. La plupart des Mikisew, voire tous les Mikisew, passent une bonne part de leur temps à exercer leurs droits conférés par traité sur le territoire, y compris la partie touchée par la Compagnie Pétrolière Impériale et par les nombreux bassins de résidus rejetés le long de la rivière Athabasca.
Les membres de ma communauté ont peur. Certains ont peur de boire leur eau et nous ne savons même pas combien de temps durera notre approvisionnement en eau potable à Fort Chip. Les gens sont stressés. Ils s'inquiètent pour leur santé. Vous avez probablement entendu parler des cas de cancer rare à Fort Chip. C'est ce qui préoccupe les gens lorsqu'une telle chose se produit.
Notre mode de vie est touché. Nous vivons de ces terres et de ces eaux depuis des générations. À Fort Chip, nous consommons encore beaucoup d'aliments traditionnels. Nous devons pouvoir compter sur nos terres et nos eaux pour pêcher et chasser. Nous avons besoin de cette certitude.
La situation a changé à cet égard et il est important que vous compreniez tous que nous sommes très touchés par ce problème. Nous avons des intérêts à la fois immédiats et à long terme. Le problème alarmant du suintement des bassins de décantation préoccupe sérieusement les Mikisew, car les gouvernements ne déploient pas d'efforts pour protéger leurs droits et leur environnement.
Membres du Comité, nous voulons nous assurer que l'intégrité et la santé de notre environnement et de notre peuple sont protégées, ce qui signifie qu'il faut protéger les eaux poissonneuses des sables bitumineux et nos réseaux hydrographiques. Cela signifie qu'il faut protéger nos sources d'eau potable et mieux réglementer les menaces majeures que représentent les immenses zones de résidus. Cela signifie que l'on doit bien communiquer l'information de façon transparente.
Je suis sûr que bon nombre d'entre vous veulent savoir ce que les Mikisew demandent. Nous demandons simplement qu'on nous procure la certitude que ces bassins de décantation qui fuient seront entièrement nettoyés; qu'aucun contaminant susceptible de poser un risque pour notre santé et nos moyens de subsistance n'atteindra nos aliments traditionnels et notre eau potable; et que nos eaux seront potables et pourront être utilisées sans danger. Nous avons besoin de certitude quant à la santé des membres de notre peuple, à l'aspect et au fonctionnement de nos terres à l'avenir, à notre capacité de préserver notre mode de vie sur les terres et à la protection de nos droits, comme on nous l'a promis en 1899.
Tout cela ne sera possible que si le Canada prend des mesures concrètes pour s'assurer que notre communauté fait partie d'un processus de supervision de la situation urgente actuelle et qu'elle sera consultée sur la manière dont l'exploitation des sables bitumineux se poursuivra dans notre région. Cela ne peut se faire que si l'on commence à rendre des comptes et à faire preuve de transparence à propos de cette situation et de tous les bassins de décantation.
Merci aux membres du Comité.
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Non. J'aimerais ajouter quelque chose à la question sur la santé mentale.
Tout d'abord, le monsieur qui a posé la question a fait référence aux Inuvialuits, aux Dénés et aux Métis de la région. J'ai une correction à apporter à ce sujet, car il ne faut pas oublier qu'il y a la Première Nation crie Mikisew dans cette région, en aval. Je vous remercie.
À titre de chef de la collectivité, je sais que depuis le début de l'année en cours, il y a probablement eu 18 décès dans la collectivité, ce qui représente une crise. Les gens se suicident. Est‑ce lié à la situation concernant l'eau et à ce que les gens pensent qu'il se passe? C'est une question qui doit être abordée le plus rapidement possible.
Je comprends tout à fait ce que veut dire le chef Adam. J'aimerais revenir aux enfants qui se baignent pendant l'été. Comment pouvons-nous leur donner la tranquillité d'esprit et la certitude qu'ils pourront se baigner sans danger? Il ne faut pas oublier que la piscine de la collectivité n'est ouverte que du mercredi au dimanche. Les enfants se baignent dans ces cours d'eau pendant les mois d'hiver, lorsqu'ils ne peuvent pas avoir accès à la piscine. Leurs parents me demandent quelles mesures nous avons prises et comment nous pouvons leur donner la certitude que leurs enfants peuvent se baigner dans ces cours d'eau. Pour parler franchement, à titre de chef de ma Première Nation, je ne peux pas leur donner cette certitude.
C'est la raison pour laquelle je m'adresse au gouvernement fédéral, au gouvernement de l'Alberta et à tous les intervenants concernés. Vous devez vous ressaisir, cesser de tenir ces réunions en vase clos et vous rendre sur place, dans la collectivité. Nous faisons face à une situation où l'on divise pour mieux régner, comme on dit. Ainsi, une semaine, les représentants de l'Impériale comparaissent pour affirmer que c'est l'affaire de la municipalité régionale de Wood Buffalo. Puis des représentants de la municipalité régionale de Wood Buffalo viennent dans la collectivité et nous disent que non, cette affaire concerne l'ARE, c'est‑à‑dire l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta. J'ai rencontré les représentants de l'AER vendredi dernier et je leur ai posé la même question au sujet des enfants de la collectivité qui se baignent dans ces eaux. Que m'ont-ils répondu? Que c'était l'affaire d'Environnement et Changement climatique Canada.
Au bout du compte, vous vous contentez de faire tourner ce petit manège, et les personnes dont la vie est menacée sont les habitants de la collectivité de Fort Chipewyan. Nous sommes des cibles faciles. Personne ne se soucie de nous. C'est la vérité. Le profit l'emporte sur les gens.
Vous savez, nous avons conclu des ententes sur les répercussions et les avantages avec les intervenants de l'industrie. Comme l'a dit le chef Adam, nous sommes toujours le bon partenaire de l'autre côté, et nous pensons toujours que ces intervenants ont nos intérêts supérieurs à l'esprit. Comment pouvons-nous penser ou avoir la certitude qu'ils ont nos intérêts supérieurs à l'esprit lorsque nous ne découvrons quelque chose que 10 mois après les faits?
À titre de parent de deux petites filles dans la collectivité, je trouve que cette situation est très stressante. Ce qu'a dit le chef Adam à propos du moment où il ouvre le robinet est la même chose à laquelle j'ai pensé il y a une semaine, en prenant ma douche. Je me suis demandé si c'était sécuritaire.
Imaginez le stress psychologique démesuré que nous éprouvons chaque fois que nous voulons faire quelque chose. Vous avez le droit de faire ce que vous voulez dans vos collectivités saines, où vous pouvez boire l'eau sans problème. Si cette situation se produisait à Ottawa maintenant, je vous garantis qu'on déclarerait qu'il s'agit d'une crise. Quand accordera‑t‑on la même importance à la vie des Autochtones?
Je pense que vous devez vous pencher sérieusement sur la question et déclarer que le moment est venu, car si cela devait se produire le long de la rivière Athabasca, où l'un des bassins de décantation est situé… Si cela devait se produire, ce serait la fin de la Première Nation Mikisew. Et tout cela parce qu'on aura privilégié les profits au détriment des gens.
Je m'appelle Dan Stuckless. Je suis directeur intérimaire de l'administration de la Nation métisse de Fort McKay. Je suis accompagné de ma collègue, Margaret Luker, qui est directrice intérimaire du centre de développement durable. Nous serons à votre disposition pour répondre à vos questions. À nous deux, nous avons plus de 30 ans d'expérience de travail pour les communautés autochtones et avec le gouvernement et l'industrie sur les questions relatives aux sables bitumineux, aux effets cumulatifs et notamment, aux bassins de décantation et aux résidus.
La Nation métisse de Fort McKay estime que les événements qui se sont produits relèvent de la négligence. Ils auraient pu être évités dès le départ et n'auraient pas dû se produire. À ce jour, personne n'a été tenu responsable de l'incident, et il est inacceptable que les personnes ou les services qui ont permis à cet incident de se produire travaillent encore au dossier ou dans la région.
Lorsque nous avons rencontré la PDG de l'Alberta Energy Regulator, Laurie Pushor, récemment, je lui ai demandé qui avait été congédié. Je n'ai toujours pas de réponse à cette question, et je pense vraiment que c'est parce que les dirigeants de l'AER se sont toujours montrés complaisants avec les exploitants de sables bitumineux et qu'ils entretiennent des relations amicales. Pour être honnête, je n'attends pas grand-chose de la part d'un organisme de réglementation aussi conquis. En fait, la seule chose inappropriée que l'AER a dénoncée, c'est le manque de communication depuis les premiers suintements qui ont été observés dans les inondations des terres au printemps dernier jusqu'à aujourd'hui, où les suintements se poursuivent. Ce n'est qu'au début du mois de février qu'une ordonnance de protection de l'environnement a été publiée.
Toute personne normale voit bien qu'il y a un conflit d'intérêt évident puisque l'Alberta Energy Regulator est à la fois responsable de l'application de la loi et juge pour ces projets et que ce n'est pas correct.
Si vous connaissez un peu l'Alberta Energy Regulator — et vous en avez probablement beaucoup entendu parler jusqu'ici —, vous savez que ce n'est pas avant d'avoir reçu les lettres numéro un, deux et trois que l'AER ouvrira réellement un dossier de non-conformité sur un exploitant. L'AER n'a aucune crédibilité hors de la chambre d'écho de Calgary, elle rejette et minimise activement les effets des sables bitumineux sur les communautés et leurs droits ancestraux et issus de traités.
Il est impératif que le gouvernement fédéral exerce un contrôle sur ces questions qui touchent la population, les droits de la personne et l'accès à l'eau potable et bien sûr, qui ont des effets cumulatifs sur les droits ancestraux et issus de traités.
Nous n'avons pas encore entendu l'Alberta se prononcer sur cette question. Nous entendons maintenant les promesses d'un quatrième premier ministre: après Stelmach, Redford et Notley, c'est au tour de Smith de déclarer qu'il va prendre des mesures concernant les bassins de décantation. Ce n'est que de l'esbroufe, et l'inaction commence à nous lasser.
C'est là que le devoir de consulter devrait s'appliquer. Bien entendu, lorsque des incidents de ce type se produisent — lorsque les circonstances limitent l'exercice des droits —, l'obligation de prendre des mesures devrait s'appliquer. On ne comprend pas toujours bien quand l'obligation de consulter doit s'appliquer, quand il faut prendre des mesures d'atténuation. Quand les violations qui se produisent devraient être évitées, mais qu'il n'est pas possible de les éviter ou de les atténuer, il devrait y avoir des mesures d'indemnisation ou des accommodements, mais ce n'est pas respecté. En Alberta, il n'est encore jamais arrivé qu'on offre des mesures d'indemnisation ou des accommodements pour les droits bafoués, ni même qu'on reconnaisse les effets observés.
Nous voudrions simplement demander aux membres du Comité si cela vous semble justifié.
L'Alberta est absente. Ses mécanismes sont défaillants. Ses systèmes sont conçus pour pointer perpétuellement dans l'autre direction, pour que les plaintes soient réglées tandis que des permis, des approbations et des baux sont accordés à tout vent. Nous avons essentiellement créé un système à deux vitesses au Canada pour l'application de l'article 35, dans lequel les métis sont des citoyens de troisième classe, après les Canadiens et même après les Premières Nations.
Mes propos vous interpelleront si vous connaissez un peu les enjeux. Si vous ne devez retenir qu'une chose de ce que je vous dis aujourd'hui, ce devrait être que nous avons un gros problème. Il ne s'agit pas seulement d'un problème de suintement de l'Impériale. C'est important, et c'est la raison pour laquelle nous nous adressons à vous aujourd'hui, parce qu'il s'agit d'un problème systémique. Il s'agit d'un problème de discrimination raciale et d'inaptitude du gouvernement, dans ses politiques comme dans ses directives et ses règlements, notamment parce qu'ils ne sont pas mis en application.
Cela dure depuis des dizaines d'années. Il y a d'autres bassins de décantation, principalement ceux de Suncor qui suintent dans la rivière, mais c'est maintenant que nous décidons d'agir ou d'en prendre note à cause de l'incident de l'Impériale. Les mesures doivent s'appliquer à l'ensemble de l'industrie.
J'ai entendu ma collègue qui a pris la parole avant moi mentionner le plan régional du cours inférieur de l'Athabasca, qui a été contesté, mais n'a pas été modifié. Le cadre de gestion des résidus ne tenait pas compte des effets sur les droits ancestraux et les droits issus de traités. Je le sais parce que j'ai posé la question directement et qu'on m'a répondu. Les directives, les normes concernant les résidus sont abaissées encore et encore. Pendant ce temps, on établit conjointement des critères et un règlement sur les rejets d'eaux contaminées.
Ce matin, nous avons reçu une lettre du et nous appuyons la création d'un groupe de travail pour continuer le travail sur ces questions.
C'est ici que se termine ma déclaration préliminaire.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'appelle Russell Noseworthy. Je travaille pour la communauté métisse de Fort McMurray. Notre communauté compte environ 800 personnes. Je suis ici aujourd'hui pour les représenter au nom de notre président, M. Hansen.
Les métis de Fort McMurray forment une communauté autochtone fondée sur des droits et basée à Fort McMurray. Nos plus de 800 membres exercent leurs droits protégés par la Constitution dans tout le Nord-Est de l'Alberta et ailleurs. L'utilisation des nombreux cours d'eau de la région, et en particulier de la rivière Athabasca, est cruciale pour l'exercice de ces droits. C'est la plus importante.
Nos membres pratiquent régulièrement la chasse, la pêche et le piégeage dans la région située en aval des mines de sables bitumineux. Nous sommes donc très inquiets des effets cumulatifs de l'exploitation des sables bitumineux sur notre capacité d'exercer nos droits de chasse, de pêche et de piégeage dans la région, qui sont protégés par la Constitution.
L'incident de Kearl nous inquiète beaucoup. L'ordonnance de protection de l'environnement et l'incident lui-même attestent de l'ampleur des problèmes de réglementation en Alberta. Il n'y a pas vraiment de mécanismes pour remédier aux problèmes de communication que nous rencontrons en Alberta lorsque surviennent des incidents comme celui‑ci. Il existe des directives sur papier, mais elles ne sont pas suivies correctement. Par conséquent, nous risquons constamment d'être exposés à des contaminants et à d'autres substances dangereuses susceptibles d'avoir des effets dramatiques sur la santé des personnes qui vivent dans la région et aux alentours. Nous sommes très inquiets.
Récemment, le gouvernement fédéral a entamé un processus de consultation des communautés de la région sur les résidus miniers. C'est un grand problème dans notre région. Il y a des bassins de décantation partout au nord de l'endroit où j'habite, à Fort McMurray. Nous sommes ici aujourd'hui pour le souligner et pour insister sur l'importance du bassin hydrographique de la rivière Athabasca pour les habitants de la région.
Le groupe de travail Couronne-Autochtones a été proposé comme mécanisme de collaboration pour l'élaboration d'un règlement sur les rejets d'eaux contaminées, et la démarche s'assortirait d'une sorte de discussion sur la façon dont ils peuvent se répercuter sur les droits des membres de notre communauté, du peuple autochtone vivant aux abords de la rivière. Cependant, nous sommes extrêmement inquiets. Nous avions demandé à ce groupe de mettre en place un processus visant à déterminer comment nos droits seraient touchés par ce qui se passe et par les modifications proposées à la Loi sur la pêche.
Notre demande n'a pas été approuvée. Nous ne comprenons pas vraiment comment nous serons touchés parce que nous n'avons pas bien analysé la question. Nous n'avons pas de mesure des effets cumulatifs de tout cela sur la région. Nous ne savons pas comment les différents exploitants tiennent compte de la pollution cumulative ni comment elle compromet notre droit de chasser, de pêcher, de piéger et de vivre sainement dans la région. Nous ne le comprenons pas.
Nous avons besoin d'une étude d'impact des effets cumulatifs. Nous devons bien les comprendre. C'est la première chose dont nous avons besoin dans la région. Parallèlement à cette évaluation des effets cumulatifs, nous devons comprendre comment nos droits sont touchés.
Je m'exprime à la première personne. Je m'en excuse.
Je dois ajouter que nous en avons besoin dès maintenant. Nous devons nous atteler à la tâche dès aujourd'hui, dès la fin de cette réunion.
Le gouvernement fédéral — le gouvernement du Canada — doit se mettre au travail dès maintenant. Votre devoir et votre responsabilité envers moi, envers toutes les personnes présentes autour de cette table et envers les communautés autochtones qui vivent dans la région l'exigent. Si vous ne le faites pas, la santé des gens en souffrira.
Mme Goodridge est juste ici. Elle vit dans la région, je connaissais son père. Nous devons travailler ensemble pour bien protéger les habitants de notre région. Dans notre région, nous protégeons le Canada. Les sables bitumineux sont le moteur économique du Canada. Ce n'est plus l'Ontario, c'est l'Alberta.
Nous devons être responsables. Nous sommes sur la scène internationale. Nous devons donner le bon exemple. Si nous ne le faisons pas, nos enfants le sauront. Nous devons protéger notre milieu, pour toutes les générations futures. Nous avons besoin d'une évaluation des effets cumulatifs de tout ce qui s'est passé, et nous avons besoin d'une évaluation des droits en parallèle avec cela.
C'est ici que se termine mon exposé d'aujourd'hui. Je vous remercie de votre attention.
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La Willow Lake Métis Nation représente les droits découlant de l'article 35 d'environ 90 citoyens. Le centre administratif de la nation se trouve à Anzac, en Alberta, juste au sud de Fort McMurray.
La nation est née à l'époque de la traite des fourrures, entre les rivières Athabasca et Clearwater, (à l'intérieur du territoire actuel de l'Alberta, et Lac La Loche, en Saskatchewan. Traditionnellement, Willow Lake avait des liens de parenté et des liens économiques avec Fort Chipewyan et Lake Athabasca au nord, et avec Lac La Biche au sud, des liens qui persistent à ce jour.
Les citoyens de la Willow Lake Métis Nation chassent, pêchent, font du piégeage et cueillent des baies et des plantes médicinales sur le territoire de leurs ancêtres. Ces terres comprennent des lignes de piégeage comme celles du vice-président McKenzie, les mêmes depuis plusieurs générations. Les ressources récoltées sont partagées avec les familles et la communauté, et la plupart des citoyens continuent de consommer des aliments traditionnels et d'employer des remèdes ancestraux.
La Willow Lake Métis Nation, comme d'autres nations dans la région des sables bitumineux, ont subi, et continuent de subir, des répercussions majeures résultant de l'exploitation du pétrole et du gaz, de la foresterie et d'autres développements. La Willow Lake Métis Nation a été avisée de fuites des bassins de décantation au site du lac Kearl de la Compagnie Pétrolière Impériale dans un courriel de l'Alberta Energy Regulator, l'AER, le 7 février 2023. Nous avons ensuite rencontré le personnel de l'AER le 8 mars 2023, pour recevoir une mise à jour.
La Compagnie Pétrolière Impériale nous a également envoyé un courriel le 8 mars 2023, avec un lien vers les mises à jour de la compagnie concernant l'ordonnance de protection de l'environnement. La Willow Lake Métis Nation a répondu par lettre à la Compagnie Pétrolière Impériale le 17 mars 2023. Elle y exposait les inquiétudes de la nation et demandait des renseignements. En date du 13 avril, nous n'avions pas reçu de réponse de la Compagnie Pétrolière Impériale. Elle affirme pourtant sur son site Web qu'elle assure la liaison avec les communautés autochtones.
Les citoyens de la Willow Lake Métis Nation pratiquent des activités de cueillette dans des secteurs en amont et en aval du site Kearl et sont très inquiets des répercussions des fuites sur l'eau et d'autres ressources aquatiques, la végétation et la faune. La Willow Lake Métis Nation continue d'entretenir des liens avec les autres nations de la région, avec lesquelles elle mène des activités de cueillette et partage des aliments et remèdes traditionnels. La certitude quant à l'innocuité des aliments traditionnels cueillis est essentielle à l'utilisation des terres, au partage des ressources de la cueillette et au maintien des droits et de la culture.
Nous devons être tenus au courant des répercussions de ces fuites sur l'environnement ainsi que sur les ressources végétales et animales pour pouvoir continuer d'utiliser les terres. Les fuites et les notifications tardives inquiètent profondément la Willow Lake Métis Nation. La Willow Lake Métis Nation se trouve dans une situation de vulnérabilité, car elle attend la reconnaissance de ses droits en vertu de l'article 35 dans le cadre du processus d'affirmation crédible de l'Alberta. Le gouvernement et l'industrie ne la consultent pas toujours.
Les fuites illustrent le risque que de tels incidents ne soient pas signalés aux nations autochtones, mais ce risque est particulièrement grand pour les nations dont la situation s'apparente à celle de la nation de Willow Lake. Il est clair que la Compagnie Pétrolière Impériale et l'AER avaient la responsabilité partagée de signaler ces incidents beaucoup plus tôt qu'ils ne l'ont fait. Nous savons gré à l'AER d'avoir communiqué avec nous, de nous avoir rencontrés en mars et de continuer de nous tenir au courant, mais cet incident a nui à la confiance que nous inspirent tant l'industrie que l'AER.
La Willow Lake Métis Nation souhaite des solutions véritables qui feront renaître la confiance par la coopération, la cogestion et surtout la remise en état conjointe en vue de rendre les exploitations des sables bitumineux vraiment durables. La Willow Lake Métis Nation souhaite trouver des façons de remédier aux lacunes que ces fuites ont révélées. Les solutions dans l'immédiat comprennent des discussions avec l'Impériale pour garantir la participation de la nation à l'intervention en réponse aux incidents et à la surveillance, de même que de nouvelles discussions avec l'AER pour obtenir l'assurance que Willow Lake recevra des notifications rapides au sujet d'incidents sur son territoire.
Willow Lake recommande en outre une évaluation des répercussions sur la santé humaine pour s'assurer que les ressources traditionnelles touchées par les fuites, que ce soit l'eau, les végétaux ou la faune, ne présentent pas de risque. De façon plus générale, ces incidents ont fait ressortir les effets cumulatifs sur les droits ancestraux dans la région des sables bitumineux. Il faut mieux comprendre ces effets grâce à une évaluation régionale des sables bitumineux, y compris de leurs effets cumulatifs et de leur incidence sur les droits en vertu de l'article 35.
Au nom de la Willow Lake Métis Nation et de ses citoyens, je tiens à vous remercier de nous entendre et de tenir compte de nos préoccupations. Nous sommes sincèrement reconnaissants d'avoir été invités à nous adresser au comité permanent aujourd'hui.
Merci de me donner l'occasion de vous parler de ce sujet aujourd'hui.
L'Impériale a informé la Fort McKay Métis Nation au moyen d'un courriel informel lorsqu'elle a vu pour la première fois de l'eau de couleur rouille sur le site. En ce qui concerne la communication avec l'Impériale — avec laquelle nous avons une entente sur les répercussions et les avantages et entretenons une excellente relation de travail —, nous avons reçu un avis plus formel en même temps que tous les autres, à peu près au moment où l'ordonnance de protection de l'environnement a été émise.
Ce que j'aimerais faire comprendre à propos de l'Impériale, parce qu'on tend à en faire grand cas, c'est qu'il ne s'agit pas d'un problème propre à l'Impériale... en ce qui concerne les deux incidents pour lesquels nous sommes ici aujourd'hui. Le problème des résidus est beaucoup plus étendu, par rapport à l'eau... Le problème de l'eau contaminée par le processus d'exploitation des sables bitumineux est beaucoup plus grave.
Je sais que ce n'est pas la même chose pour nos communautés sœurs, mais je tiens à souligner qu'avec nous, l'Impériale fait preuve d'une grande transparence dans la communication des données, et nous avons la possibilité de nous rendre sur place et de procéder à nos propres contrôles. Quand nous avons tous appris l'existence du suintement, M. Stuckless et moi-même sommes allés sur place pour voir les travaux en cours de nettoyage du déversement en surface, ce qui était la raison pour laquelle l'ordonnance de protection de l'environnement avait été émise. C'est la même chose avec l'AER. En fait, l'ordonnance de protection de l'environnement a été émise avant qu'un avis officiel soit émis, mais officieusement, il y a eu un avis immédiat de la présence d'eau de couleur rouille sur le site. L'intention, d'après nos discussions avec l'Impériale, a toujours été d'y donner suite.
Je tiens également à exprimer ma crainte que les gens considèrent l'Impériale comme la croix à brûler parmi les compagnies qui exploitent les sables bitumineux, en ce qui concerne les enjeux liés aux sables bitumineux. La vérité, comme l'ont fait remarquer mes autres collègues, c'est qu'il s'agit d'un problème vieux de 45 ans et pas seulement d'un problème avec l'Impériale.
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En réponse à la question, j'aimerais faire quelques commentaires pour que vous puissiez comprendre l'ampleur et les répercussions visuelles de cela.
Entre les mines de sables bitumineux approuvées et celles qui font l'objet d'une demande, la rivière Athabasca, au nord de Fort McMurray, sera bordée de part et d'autre sur près de 100 kilomètres. La communauté de Fort McMurray est basée à Fort McMurray, mais il est également important de comprendre qu'en raison de la spécificité historique des Métis, il existe des liens régionaux très étroits. Les personnes qui vivent à Willow Lake, Anzac ou Fort McMurray vont régulièrement rendre visite à leur famille à Fort Chipewyan et Fort McKay. Ils vont également récolter dans ces régions.
M. Stuckless a parlé de la santé mentale et des effets cumulatifs. Il n'y a pas que les effets sur la santé mentale, sachant que l'organisme de réglementation est plus préoccupé par la protection de l'image de l'industrie et de ses investissements que par la protection de la santé et des droits des personnes qui vivent dans cette région. Il y a des conséquences énormes chaque jour, à ne pas savoir ce que l'on ne sait pas. Dans notre communauté, nous avons constaté au fil des ans un recul des pratiques d'utilisation traditionnelle et de l'exercice de ces droits, en partie à cause de la perte de confiance dans la sécurité et la qualité des ressources. Sont-elles saines? L'eau est-elle potable? Autrefois, les gens buvaient régulièrement l'eau des rivières. Aujourd'hui, presque plus personne ne le fait.
La disparition de ces pratiques a tout un éventail d'incidences sur la santé des personnes, la santé mentale, la société et la communauté. L'utilisation de la terre était traditionnellement le moyen de relier les familles entre elles, de permettre aux aînés de passer du temps avec les jeunes et de transmettre des connaissances sur la culture, l'identité et le mode de vie de chacun. La perte de ces pratiques entraîne la perte des connaissances. Les sens de l'identité, du soi, de la raison d'être et du lieu sont tous compromis et affaiblis, ce qui a d'énormes répercussions sur la santé, la société et la communauté. Les gens sont alors poussés vers des services publics sous-financés et trop lourdement sollicités qui, de plus, ne sont pas conçus pour répondre aux besoins des populations autochtones et aux problèmes qui leur sont propres.
Il faut comprendre que ce n'est pas un incident isolé, mais bien un incident qui s'inscrit dans un système beaucoup plus vaste et interconnecté qui porte constamment atteinte aux droits, à la santé et aux intérêts des personnes qui vivent dans cette région, en particulier les populations autochtones.
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Merci, monsieur le président.
L'aspect sur lequel nous nous concentrons le plus est la nécessité d'un accès à l'eau propre. Il y a assez d'avis d'ébullition de l'eau dans les collectivités des Premières Nations dans ce pays. Nous sommes conscients que pour faire les choses correctement, il faudrait d'abord régler les problèmes au lieu de simplement émettre des avis d'ébullition de l'eau. Ne polluons pas cette eau.
Il s'agit d'un bassin hydrographique très important. La rivière Athabasca se jette dans la rivière des Esclaves, puis dans le delta du Mackenzie. Un problème à l'un de ces bassins de retenue risque d'entraîner une série de problèmes de pollution. Nous le savons depuis des années. Nous sommes nombreux à avoir travaillé sur des technologies afin d'évaluer les problèmes associés à ces bassins de décantation, dans le but d'assainir ces sites beaucoup plus rapidement qu'ils ne l'ont été jusqu'à maintenant. De toute évidence, nous n'avons pas fait assez de progrès quant au déploiement des technologies nécessaires pour régler ce problème.
Le risque moral est considérable, comme nous le constatons aujourd'hui lors de cette séance, et nous devons veiller à ce que cela ne se produise pas. Il est question de notre eau. Nous devons veiller à ce qu'elle demeure intacte afin que ceux qui consomment et utilisent cette eau puissent continuer de le faire, comme ils l'ont toujours fait.
Permettez-moi de passer à la situation actuelle. De nombreux témoins ont parlé du problème de la capture réglementaire. L'AER, l'Alberta Energy Regulator, est un organe quasi judiciaire créé par le gouvernement de l'Alberta pour empêcher tout conflit politique entre le gouvernement et l'organisme de réglementation qui réglemente l'industrie. Je crois comprendre, d'après ce que j'ai entendu ici et ce que j'ai constaté dans les données, que ce mécanisme de production de rapports n'est peut-être pas clair tant pour vos organismes que pour le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, qui est également touché par ce problème, évidemment, et qui a une entente avec le gouvernement albertain. En cas d'incident, on s'attend à être informés, ce qui n'a manifestement pas été le cas.
La question est de savoir à quel moment le gouvernement de l'Alberta a été informé. Le ministre albertain de l'Environnement me dit qu'il a pris connaissance de la situation lorsque l'AER a publié son avis public, c'est‑à‑dire le 7 février. Émettre un avis public c'est une chose, mais il aurait été beaucoup plus efficace de mobiliser directement les collectivités touchées. De toute évidence, il y a eu une défaillance du système et un problème de communication. Il y a quelque chose qui a déraillé dans ce processus.
On parle de l'emprise de l'industrie sur la réglementation, mais il s'agit pourtant d'un organisme quasi judiciaire. Le gouvernement de l'Alberta n'a joué aucun rôle dans cette décision. L'affaire, c'est que l'industrie passe directement par un organisme de réglementation qui a son propre processus. De toute évidence, l'information ne se rend pas aux législateurs et aux corps législatifs concernés, y compris le gouvernement de l'Alberta et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
Monsieur Stuckless, permettez-moi d'abord de vous poser une question au sujet de la négligence, puisque vous avez soulevé la question. Lorsque vous parlez de négligence, comment régleriez-vous ce problème, qui semble être une atteinte évidente à la capacité de l'organisme de réglementation d'exercer efficacement son rôle à cet égard?