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Bon après-midi, chers collègues.
Je vous remercie d'être ici un peu plus tôt aujourd'hui. J'ai convoqué la réunion 15 minutes plus tôt que d'habitude, en raison d'un vote censé avoir lieu à la Chambre à 17 h 45. Comme la sonnerie d'appel au vote commencera à retentir vers 17 h 15, je voulais m'assurer d'avoir deux heures à notre disposition pour la réunion. C'est pour ça que je vous ai convoqués un peu plus tôt.
Nous accueillons le premier groupe de témoins. Je ne les nommerai pas tous. Normalement je le fais, par politesse, mais je veux gagner un peu de temps.
Nous allons commencer par le professeur Sébastien Sauvé, qui est ici aujourd'hui à titre personnel.
Professeur Sauvé, la parole est à vous. Vous disposez de cinq minutes.
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Merci beaucoup. Je suis bien heureux d'avoir l'occasion de vous rencontrer.
J'aimerais vous parler des substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées, ou SPFA, qu'on appelle aussi les « polluants éternels ». C'est une famille de plus de 10 000 molécules qui sont synthétisées dans des laboratoires par des chimistes. Alors, si on retrouve des SPFA dans la nature, c'est forcément parce que l'humain est intervenu et les a mises là.
Dans notre quotidien, les SPFA sont un peu partout, comme dans le téflon, les poêles antiadhésives, les vêtements de sport résistants à l'eau, les traitements antitaches, les produits Scotchgard, les mousses anti-incendie, les couverts jetables, etc. Quand du papier ou du carton résiste à l'eau ou aux graisses et que ça a l'air un peu magique, c'est parce qu'il contient des SPFA. Il y en a aussi dans plusieurs cosmétiques. Il y en a donc dans plein de choses, de telle sorte qu'on est un peu incapable de s'en passer. Un défi se pose dans le cas de la fabrication de batteries pour les automobiles électriques, cela dit, et ça constitue peut-être un usage valable. Par contre, pour fabriquer des cosmétiques ou des verres en carton, ou pour emballer des hamburgers, on pourrait certainement s'en passer.
En raison d'une mauvaise réglementation ou d'une quasi-absence de réglementation de l'industrie, l'usage généralisé des SPFA a causé une contamination de l'eau partout au Canada. Pour comprendre un peu le rôle que l'industrie a joué dans cette contamination à grande échelle, je vous inviterais à visionner le film Dark Waters, une espèce de documentaire déguisé en film hollywoodien, ou l'inverse, je vous laisse en juger. Dans ce cas-ci, l'industrie nous a fait croire qu'il y avait deux SPFA qui étaient inoffensifs: l'acide perfluorooctanoïque, ou APFO, et le sulfonate de perfluorooctane, ou SPFO. On a fini par conclure une entente de 13 milliards de dollars américains pour aider au traitement de l'eau potable contaminée par ces deux SPFA uniquement, et ce, juste aux États‑Unis. Il n'y a pas d'équivalent au Canada.
Dans mon laboratoire, nous nous amusons à faire de la recherche. Nous avons recueilli à peu près 500 échantillons d'eau potable, soit de l'eau du robinet, partout au Québec, et il n'y en a que deux dans lesquels nous n'avons pas réussi à déceler de SPFA. On pourrait dire qu'aucun échantillon n'était exempt de SPFA, puisque, si nous améliorions nos méthodes, nous arriverions probablement à en trouver dans ces deux échantillons aussi. Je répète que, à l'état normal, l'eau ne peut pas contenir de SPFA, puisqu'il s'agit uniquement de substances synthétiques.
Grâce à ce projet de recherche, nous avons pu constater qu'il y avait des municipalités où les gens consommaient une eau dans laquelle la concentration de ces substances dépassait les normes acceptables ou les normes qui commencent à être acceptées. Est-il normal que ce soit par l'entremise d'un projet de recherche d'un de mes étudiants, par intérêt scientifique, qu'on ait décelé des problèmes de pollution de l'eau à La Baie, à Val‑d'Or, à Sainte‑Cécile‑de‑Milton? Selon le cas, la source de la contamination peut être une base militaire, un site d'enfouissement, un site industriel ou l'utilisation de mousses contenant des SPFA dans le cadre d'exercices de pompiers qui ont été faits de façon inappropriée.
En ce qui concerne les SPFA dans l'eau potable, Santé Canada a formulé, en février 2023, des recommandations qui me semblaient raisonnables. Elles étaient un peu plus audacieuses que ce qui avait été établi avant, mais elles étaient quand même raisonnables, compte tenu des difficultés et des coûts qui y étaient associés. Toutefois, un an plus tard, ces recommandations n'ont toujours pas été adoptées. Il y a eu des commentaires, mais on est dans l'attente.
Pour s'attaquer aux SPFA et aux contaminants d'intérêt émergent, par exemple les plastiques, ça prend un meilleur contrôle en amont. Quand on ne fait rien, ces substances se retrouvent dans nos rivières, dans nos lacs, dans notre eau potable, dans notre nourriture et dans notre air. Il y en a eu un peu partout.
Ce sont des défis difficiles à affronter. Moi-même, quand j'essaie d'informer les intervenants avec qui je travaille au gouvernement, je deviens mêlé, parce qu'il y a trop de ministères, d'agences et de groupes. Chacun a son territoire, ses prérogatives, ses pouvoirs et son mandat. Il est donc très difficile d'informer les gens ou de faire avancer les choses, d'autant plus que ça implique à la fois des autorités provinciales, fédérales et municipales. Dans tout ça, je déplore le manque de communication qui rend les choses plus difficiles.
Par ailleurs, comme ces substances sont un peu partout, nos eaux usées en contiennent beaucoup. Les stations d'épuration et de traitement des eaux usées retiennent une portion des PFAS dans les biosolides...
[Traduction]
Je suis Cassie Barker, d'Environmental Defence.
Je vous remercie d'avoir inclus les SPFA dans le cadre de votre étude. Comme nous l'avons mentionné, cette catégorie de produits chimiques représente un danger important pour les écosystèmes d'eau douce, les sources d'eau et la santé humaine et environnementale. Ce comité a entendu dire des dirigeants municipaux qu'ils n'ont pas eu les ressources nécessaires pour moderniser leurs installations de traitement de l'eau afin de filtrer les SPFA et qui sont incapables de s'attaquer aux causes de la contamination des sources d'eau dans leurs propres communautés.
Le gouvernement déclare que 98,5 % des Canadiens ont des SPFA dans le sang. La consommation d'eau potable et d'eau douce ainsi que l'exposition aux produits sont des sources importantes d'exposition aux SPFA.
Ces produits chimiques éternels ne se décomposent pas. Ils nous rendent malades, et d'autres pays ont déjà pris des mesures. Des scientifiques, des pompiers, des experts en santé des populations autochtones du Nord, des organisations de santé environnementale et certaines des plus grandes marques de produits au monde font pression en faveur d'une élimination progressive des SPFA par catégorie.
Un sondage récemment mené par Abacus a permis de découvrir que quatre Canadiens sur cinq souhaitent que le gouvernement fédéral prenne des mesures à l'égard des SPFA. Nous demandons au Comité de protéger l'eau douce et de veiller à ce que tous les SPFA soient inclus dans la liste par catégorie du gouvernement en vertu de la LCPE et que les règlements s'alignent sur ceux de l'Union européenne et des États américains afin d'agir rapidement et d'imposer une élimination progressive basée sur les produits.
Ces produits chimiques persistent parce que les SPFA ont un lien fluor-carbone, le lien le plus fort en chimie organique. Pour cette raison, une fois que les SPFA sont formés, ils ne se décomposent pas. Au contraire, ils persistent à jamais et s'accumulent dans l'environnement et dans notre corps. Pendant des années, les « produits chimiques éternels » résistant aux taches et à l'eau ont été utilisés dans l'industrie, la production de pâtes et papiers, les fluides de fracturation, les matières plastiques, la fabrication de matériel électronique, ainsi que dans des centaines de types de produits, comme on l'a mentionné plus tôt. Il y a désormais des centaines de SPFA sur le marché dans plus de 200 catégories de produits. Les scientifiques spécialisés dans les SPFA affirment que tous les SPFA bien étudiés ont des effets néfastes sur la santé humaine et que les risques sanitaires et environnementaux des SPFA, en plus de leur persistance extrême dans l'environnement, requièrent une approche par catégorie.
La définition de l'OCDE des SPFA utilisée dans l'évaluation des risques du gouvernement renforce encore plus la nécessité de réglementer les SPFA en tant que catégorie. Les cancers, les maladies rénales et les effets néfastes sur la reproduction que les SPFA peuvent avoir sur notre santé à des niveaux d'exposition relativement faibles, car ils imitent les acides gras dans notre corps, perturbent les hormones et affaiblissent notre système immunitaire.
Les peuples autochtones du Nord sont particulièrement touchés par la contamination par les SPFA, et leurs dirigeants ont revendiqué que des mesures urgentes soient prises. Les pompiers sont également très exposés en raison des équipements et des mousses de lutte contre les incendies. De nos jours, les pompiers meurent davantage de cancers liés à l'exposition que de la lutte contre les incendies.
Les coûts de nettoyage liés aux SPFA, comme on l'a mentionné, se chiffrent en milliards de dollars et ne devraient pas être assumés par les municipalités qui tentent de dépolluer les sources d'eau. Ce sont les entreprises de produits chimiques qui ont connu et dissimulé la toxicité des SPFA pendant des décennies qui doivent être tenues responsables de ce nettoyage. En fait, comme on l'a mentionné, des municipalités américaines poursuivent les entreprises de produits chimiques pour les coûts de nettoyage de leurs sources d'eau et de leur eau potable, et ces règlements ne font que commencer.
D'autres pays protègent leur eau douce en réglementant et en interdisant les SPFA. Le Canada doit faire de même. Les États-Unis sont en train de mettre en œuvre leur stratégie triennale sur les SPFA et ont établi une norme contraignante pour l'eau potable concernant les SPFA. De nombreux États américains, y compris la Californie, Washington, New York et le Maine, mettent en place des normes pour l'eau potable et des mesures d'élimination progressive fondées sur les produits que l'on retrouve dans les cosmétiques, les textiles et les emballages alimentaires.
L'Union européenne a une feuille de route pour l'élimination progressive des SPFA dans les produits, en commençant rapidement par les types de produits pour lesquels il existe des solutions de rechange plus sécuritaires. Le Danemark a également commencé à prendre des mesures pour éliminer cette catégorie de produits chimiques de ses produits en papier.
Des mesures urgentes s'imposent pour faire face à la menace croissante que représentent les SPFA au Canada. Le gouvernement canadien doit soutenir les municipalités qui ont besoin du leadership du gouvernement fédéral pour interdire les sources de SPFA. Le gouvernement fédéral a récemment proposé un objectif pour l'eau potable municipale, mais tant qu'il n'interdira pas la contamination de nos eaux par les SPFA provenant des produits et des rejets industriels, cet objectif ne fera pas grand-chose pour réduire la contamination de notre eau potable par les SPFA.
Le gouvernement peut et doit en faire plus pour faire avancer les mesures réglementaires sur les substances perfluoroalkylées; pour établir des règles strictes entourant le changement de composition des produits sans avoir recours aux substances perfluoroalkylées et pour les remplacer par des produits plus sûrs; et pour inciter l'industrie à investir dans l'innovation.
Merci.
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Monsieur le président, je suis heureux d'être ici aujourd'hui afin d'apporter ma contribution à l'étude que le Comité a entreprise sur le rôle du gouvernement fédéral dans la protection et la gestion des ressources en eau douce du Canada.
Je tiens à reconnaître que cette réunion se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple anishinabe algonquin.
Je suis accompagné de James McKenzie et de Milan Duvnjak, qui sont tous les deux directeurs principaux à notre bureau.
J'aborderai aujourd'hui trois secteurs dans lesquels nous avons recommandé des améliorations en ce qui a trait à la gestion des eaux douces. Il s'agit du maintien d'une base de connaissances pertinente sur les ressources en eau douce, de l'application des lois et des règlements visant à protéger les ressources en eau douce et du renforcement de la collaboration. Ma déclaration s'appuie sur trois rapports d'audit, soit notre rapport de 2022 sur la protection des espèces aquatiques en péril, notre rapport de 2021 sur les activités scientifiques dans certains bassins hydrographiques et notre rapport de 2019 sur la protection des poissons contre les effluents miniers.
Je commencerai par vous parler du maintien d'une base de connaissances pertinente sur les ressources en eau douce.
Une telle base comprend la réalisation de recherches et l'exercice d'une surveillance à l'égard de la qualité et du volume d'eau ainsi que du statut des espèces d'eau douce. Elle inclut également la recherche et la surveillance à l'égard des risques associés aux plans d'eau, tels que l'excès de nutriments et la prolifération d'algues, ainsi que l'efficacité des mesures de protection des ressources en eau douce.
Dans notre audit sur la protection des espèces aquatiques en péril, nous avons constaté que Pêches et Océans Canada avait entrepris des recherches sur les espèces aquatiques, mais qu'il avait axé ses activités d'acquisition de connaissances sur les espèces ayant une valeur commerciale. Cela a laissé d'importantes lacunes dans sa connaissance des autres espèces et a eu une incidence directe sur leur protection.
L'acquisition de connaissances est essentielle à l'évaluation du statut des espèces et à l'élaboration des stratégies de protection des espèces aquatiques. Plusieurs des espèces du Canada qui ont entièrement disparu se trouvaient dans les eaux douces.
[Traduction]
Cela m'amène à mon deuxième champ d'intérêt: l'application des lois et des règlements protégeant les ressources en eau douce du Canada. La Loi sur les pêches et la Loi sur les espèces en péril constituent le fondement juridique de la protection et de la conservation du poisson, de son habitat et des espèces aquatiques en péril. Cependant, les lois et les règlements ne suffisent pas à eux seuls. Ils doivent être administrés et appliqués de façon équitable, prévisible et uniforme.
Dans notre audit sur la protection des espèces aquatiques en péril, nous avons constaté que Pêches et Océans Canada n'avait pas suffisamment de personnel pour faire respecter les règles. La situation était particulièrement évidente en Ontario et dans la région des Prairies, qui sont responsables de la gestion de la plupart des espèces d'eau douce en péril.
Dans le cadre de notre audit sur la protection des poissons contre les effluents miniers, nous avons constaté qu'Environnement et Changement climatique Canada avait signalé un niveau élevé de conformité aux limites d'effluents par les mines de métaux. Cependant, les rapports du ministère n'étaient pas exhaustifs, car il ne disposait pas de renseignements complets pour environ le tiers des mines. Nous avons aussi relevé que les mines non métalliques comme les mines de potasse, de charbon et de sables bitumineux étaient inspectées moins souvent que les mines métallifères. À notre avis, il est important d'inspecter régulièrement les mines non métalliques, car ces mines ne sont pas autorisées à rejeter des effluents nocifs pour les poissons ou leur habitat.
Enfin, j'aimerais parler de la nécessité de favoriser la collaboration. Dans le cadre de notre audit des activités scientifiques dans certains bassins hydrographiques, nous avons constaté qu'Environnement et Changement climatique Canada et Agriculture et Agroalimentaire Canada allaient dans la bonne direction pour la collaboration dans les activités scientifiques. Cependant, nous avons conclu que leur travail pourrait davantage améliorer la qualité de l'eau s'ils renforçaient la coordination de leurs efforts scientifiques. De plus, les ministères tireraient parti d'une meilleure utilisation des comités mixtes de coordination des activités scientifiques dans les bassins versants — qui existent déjà — et de l'établissement d'un comité directeur national de coordination scientifique pour répondre aux préoccupations relatives à l'eau douce.
En conclusion, le Canada fait toujours face à des problèmes de qualité de l'eau causés par l'excès de nutriments et la pollution industrielle. De plus, il compte une longue liste d'espèces aquatiques en péril qui dépendent d'écosystèmes d'eau douce sains. Le gouvernement fédéral joue un rôle essentiel dans la protection et la gestion des ressources en eau douce du Canada.
Monsieur le président, je termine ainsi ma déclaration liminaire. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du Comité. Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, de nous avoir invités et de nous faire l'honneur de prendre la parole aujourd'hui.
Je m'appelle Paul West-Sells et je suis le président de Western Copper and Gold. Je suis accompagné de notre vice-présidente aux affaires environnementales et communautaires, Mme Shena Shaw.
Notre projet phare de mine d'or et de cuivre Casino — un gisement de cuivre, d'or, de molybdène et d'argent — est situé à environ 300 kilomètres au nord-ouest de Whitehorse, au Yukon. Le projet Casino figure parmi les plus grands projets d'exploitation de cuivre, d'or et de molybdène au Canada et, une fois opérationnel, il sera le plus grand projet d'exploitation de minéraux critiques au Canada sur le plan des revenus annuels.
Rio Tinto est un investisseur stratégique dans le projet depuis 2021 et détient actuellement environ 10 % de l'entreprise. Mitsubishi Materials a acheté une participation de 5 % dans l'entreprise au début de 2023.
On prévoit que le projet Casino produira environ 4,3 milliards de livres de cuivre, 7 millions d'onces d'or, 36 millions d'onces d'argent et 350 millions de livres de molybdène au cours des 27 années de vie de la mine, et qu'il contribuera de façon importante à la transition du Yukon, du Canada et du monde vers une économie verte.
Même si nous disons aujourd'hui que cette mine a une durée de vie de 27 ans, la ressource connue pourrait en fait être exploitée pendant près de 100 ans, ce qui en ferait un projet qui apporterait une prospérité, des emplois et un développement pendant des générations dans le Nord canadien.
L'eau est au cœur des écosystèmes. Elle soutient et maintient des processus écologiques sains pour les poissons, la faune et les humains. Notre priorité est d'être un intendant responsable des eaux que nous partageons grâce à des gains d'efficience et à une conservation futurs.
Pour les sociétés minières canadiennes responsables comme Western, le rôle du gouvernement fédéral dans la protection et la gestion des ressources en eau douce du pays est essentiel, surtout dans le contexte de la rareté croissante de l'eau. C'est pourquoi nous avons conçu un projet en nous servant des pratiques exemplaires de l'industrie.
Nous menons des études de référence sur la géochimie, l'hydrologie, la qualité des eaux de surface et les eaux souterraines depuis près de 15 ans pour minimiser les répercussions sur l'environnement et les écosystèmes pendant la planification et l'exploitation de notre projet. Notre entreprise comprend l'importance de la gestion des bassins hydrographiques, et nous sommes déterminés à apporter une contribution positive dans les régions où nous exerçons nos activités.
L'ouverture et l'exploitation d'une mine au Yukon sont assujetties à des exigences législatives et réglementaires différentes de celles du Sud du Canada. La Loi sur l'évaluation environnementale et socioéconomique au Yukon, ou LEESY, découle des traités modernes conclus entre les gouvernements fédéral, territoriaux et des Premières Nations. L'évaluation est ouverte, responsable et transparente, et s'appuie sur les principes fondamentaux de la cogestion des ressources, comme le prévoient ces traités.
Chez Western Copper and Gold, nous sommes déterminés à nouer des relations solides, respectueuses et mutuellement bénéfiques avec tous les intervenants, en particulier les communautés autochtones, et à veiller à ce que leurs droits, leurs traditions et leurs connaissances soient au premier plan de nos stratégies de gestion hydrique.
Pour des projets comme le nôtre, nous croyons que la certitude réglementaire est tout aussi importante qu'un délai d'approbation rapide. Nous accordons de l'importance aux principes des ententes définitives conclues avec les Premières Nations du Yukon et du processus de la LEESY. Nous voulons insister sur le fait que tout changement législatif ou réglementaire au processus devrait être examiné attentivement, car les changements apportés au processus au Yukon pourraient avoir des répercussions sur les droits issus de traités des Premières Nations et nuire à la confiance à long terme que le processus en est venu à incarner.
Nous sommes ravis de jouer un rôle dans l'infrastructure des minéraux critiques du Canada et de favoriser la prospérité économique tout en étant des gardiens fiables de l'environnement.
Merci de nous avoir donné l'occasion de vous faire part de notre point de vue et de nos commentaires. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais commencer par le commissaire à l'environnement.
Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de quantités excessives de nutriments. Je sais que vous avez une étude à venir en 2024 sur les émissions des engrais, mais vous avez aussi mentionné la coordination entre Environnement et Changement climatique Canada et Agriculture Canada en particulier. Ayant déjà travaillé en agriculture, je me souviens de l'époque où le ministère de l'Environnement se présentait dans des VUS noirs et accédait sans autorisation aux terres pour prélever des échantillons d'eau. Je pense que cette pratique illustrait bien le manque de coordination avec Agriculture et Agroalimentaire Canada et de collaboration avec les intervenants.
Un des facteurs concernant l'eau douce a trait aux produits que les agriculteurs épandent dans leurs champs, en particulier les engrais. Avez-vous examiné cet aspect par rapport à l'eau dans le cadre de votre étude à venir, qui n'a pas encore été publiée, ou vous êtes-vous davantage penché sur les émissions?
Le calcul des émissions provenant, en particulier, de l'azote, est très complexe et ne nous donne qu'une estimation très approximative qui, de surcroît, ne tient toujours pas compte de l'adoption de nos pratiques d'intendance sur les nutriments, par exemple.
Avez-vous réfléchi à la façon dont nous pouvons essayer d'améliorer la méthodologie pour mieux comprendre la quantité d'émissions de N2O ici au Canada et ainsi savoir si cette quantité respecte les exigences du Rapport d'inventaire national? Nous ne sommes pas encore capables de mesurer les niveaux dans les sols ou les champs. Selon vous, serait‑ce possible d'essayer d'améliorer la méthodologie?
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Bien sûr. En tant qu'exploitants d'une mine moderne, nous pouvons notamment placer l'eau et la qualité de l'eau au premier plan de notre conception. Par exemple, l'une des actions que nous avons réalisées pour notre projet, c'est... Notre projet est situé à environ 20 kilomètres du fleuve Yukon, et — pour ceux d'entre vous qui ne sont jamais allés au Yukon — le fleuve Yukon est l'élément vital du Yukon. Il est très important pour les Premières Nations et, à vrai dire, pour tous les Yukonnais.
Nous avons été en mesure de concevoir notre mine de façon à ce que tout le drainage de la mine ne s'écoule pas vers le fleuve Yukon. Nous avons simplement pris une série de petites mesures pour garantir un écoulement en direction inverse du fleuve. De plus, pour l'exploitation de notre mine, nous essayons de réduire au minimum l'utilisation d'eau douce. Nous recyclons autant d'eau que possible dans le processus afin de réduire au minimum notre dépendance à toute nouvelle eau douce.
Enfin, nous essayons vraiment de réduire au minimum les rejets de la mine. À l'heure actuelle, pendant les opérations, il y a un minimum de rejets de la mine, alors pour absolument nous assurer... Bien sûr, tout rejet qui provient de la mine est traité et satisfait aux exigences en matière de rejet.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous nos témoins et experts d'être ici aujourd'hui. Ce groupe de témoins est vraiment remarquable.
Ma question porte sur la rareté de l'eau et les changements climatiques.
Le changement des conditions météorologiques et le réchauffement du climat donnent lieu, comme nous l'avons vu dans le Sud-Ouest de l'Ontario et en Alberta cette année, à des préoccupations liées à la rareté de l'eau. Souvent, à cette période de l'année, les niveaux d'eau sont très élevés dans les Grands Lacs et les affluents qui les alimentent. D'après mes propres observations et celles des intervenants qui observent ces phénomènes, les niveaux d'eau sont très bas.
Le Canada a la chance d'avoir un approvisionnement abondant en eau douce, surtout si on le compare à d'autres pays. Cependant, si on réfléchit aux solutions visant à prévenir la rareté de l'eau et à empêcher la rareté de l'eau à l'échelle mondiale d'avoir des répercussions sur le Canada — étant donné que nous en sommes de grands intendants —, quels facteurs le gouvernement fédéral devrait‑il prendre en considération en ce qui concerne la rareté de l'eau? Il est certain que si les substances perfluoroalkylées sont un facteur pertinent, j'aimerais beaucoup en entendre parler également.
La question s'adresse à tout le monde.
Monsieur Sauvé, je vous écoute.
Le lien entre la rareté de l'eau et les substances perfluoroalkylées n'est pas nécessairement évident, mais il est clair que des niveaux d'eau réduits contiennent une concentration plus élevée. Les substances perfluoroalkylées ne se dégradent pas — à vrai dire, elles se dégradent un peu, mais très lentement. Les problèmes de pollution risquent de s'aggraver parce qu'il y aura moins d'eau. La même quantité de contaminants dans une plus petite quantité d'eau causera des problèmes. Du côté de la contamination, c'est certainement l'un des problèmes.
L'autre problème que j'entrevois est davantage lié aux variations. Il y a des périodes où il y a trop d'eau, ce qui cause des inondations, et donc une propagation de la contamination. Cependant, cela n'empêche pas une pénurie de sévir plus tard, au cours de l'été.
La rareté de l'eau et les faibles niveaux d'eau ne sont pas les seuls problèmes. La multiplication des variations va entraîner beaucoup plus de problèmes.
Pour ce qui est des émissions de gaz à effet de serre, l'un d'entre vous souhaite‑t‑il évoquer les enjeux liés à l'acidification et au pH en ce qui a trait aux polluants d'origine hydrique plus traditionnels?
Je vais vous dire où je veux en venir, car je risque de manquer de temps. La pollution de l'eau par les plastiques a toujours été considérée comme un phénomène visible. Les gens qui se promènent le long d'un cours d'eau ou sur une plage ramassent des déchets plastiques. Les émissions de CO2 sont très différentes. D'autres émissions, comme le méthane, sont invisibles. Nous ne les voyons pas, mais elles ont un effet très négatif sur notre environnement naturel et sur le changement climatique.
Les SPFA présentent le pire de ces deux caractéristiques. Ils sont invisibles, ont une incidence très négative et sont beaucoup plus difficiles à nettoyer. Ils sont peut-être aussi difficiles à nettoyer que le CO2 est difficile à éliminer de l'atmosphère.
Pouvez-vous formuler des commentaires sur ce lien?
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Je ne suis pas un expert en matière de réglementation, mais ce commentaire se voulait une comparaison avec ce qu'on connaît de la toxicologie pour le plomb, l'arsenic et le mercure. Il n'y a à peu près pas de cas répertoriés où, historiquement, on a remonté la valeur de seuil; on l'a toujours diminuée. Il n'est jamais arrivé que, après avoir accumulé plus d'information, on se dise que c'était finalement moins toxique qu'on le pensait. On trouve toujours d'autres effets et d'autres études.
Dans le cas des SPFA, nous avons actuellement des données et nous allons en accumuler de nouvelles, et c'est certain que ces données vont nous démontrer que c'est à des seuils de plus en plus bas que des effets se font ressentir.
En ce moment, les seuils ont été établis, à tout le moins aux États‑Unis, comme le commissaire le mentionnait, en fonction d'une analyse coûts-avantages. On analyse donc le nombre de vies humaines qu'on va sauver ou améliorer, et on attribue une valeur, en millions de dollars, aux coûts engendrés et aux économies réalisées.
Les SPFA sont parmi les molécules les plus difficiles à enlever. Au fur et à mesure que la technologie et les moyens disponibles pour enlever les SPFA vont s'améliorer et coûter un peu moins cher, on va devoir refaire une analyse coûts-avantages et ça va devenir plus payant ou plus valable d'avoir une réglementation plus stricte et de baisser nos seuils.
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Certains éléments sont propres à la réglementation des États‑Unis, mais je vais tenter de simplifier la notion de quotient de danger.
Souvent, on va mesurer les concentrations dans l'environnement et on va les comparer avec les données connues au sujet des seuils où il y a un effet, une toxicité ou un impact sur la santé, entre autres. Si on est en dessous, on a un quotient de danger plus bas; si on est au-dessus, il y a un problème.
Dans le cas des SPFA, le problème est que ces comparaisons nous indiquent que nous sommes tous trop exposés. Dans notre sang, nous avons tous une concentration de SPFA au-dessus des seuils où il commence à y avoir des effets sur le système immunitaire et sur le cholestérol, par exemple, et des risques de cancer.
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Les pompiers eux‑mêmes parlent avec beaucoup d'éloquence de cette question très complexe. Si vous demandez à des pompiers de vous parler des SPFA, ils vous diront non seulement qu'ils sont exposés par l'entremise de leur équipement et des mousses qu'ils utilisent dans le cadre de leur travail, mais aussi qu'ils mènent activement des recherches pour établir les liens entre les types de cancer auxquels ils sont exposés et ces expositions, ce qui est un travail très difficile et très coûteux.
Ils travaillent également sur les cancers chez les enfants, parce que les taux de cancer chez leurs enfants sont également disproportionnés.
Il s'agit d'un problème majeur au Canada et dans le monde entier. C'est un sujet sur lequel les syndicats insistent fortement, non seulement pour défendre leurs travailleurs, mais aussi pour protéger leurs collectivités.
Le Canada peut se féliciter du bon travail qu'il a accompli. Nous avons ici un projet d'évaluation très solide. Il présente des arguments en faveur de la santé et de l'environnement. On adopte ici une approche claire fondée sur les catégories d'agents chimiques, au lieu de passer en revue une à une ces milliers de substances. En optant pour l'approche préventive, comme l'a souligné Mme Pauzé, nous pouvons démontrer non seulement à nous-mêmes, mais aussi au monde entier, que le Canada a été et continue d'être un véritable leader sur la question des substances toxiques.
Désolée de revenir encore sur ce sujet, mais je m'intéresse également de très près aux SPFA.
Ma circonscription, Aurora—Oak Ridges—Richmond Hill, compte un organisme appelé York Region Environmental Alliance, qui a beaucoup travaillé sur cette question. Bien entendu, les pompiers de York et de Richmond Hill en ont également parlé. Je les ai rencontrés et j'en ai discuté avec eux.
Vous venez de dire qu'un grand nombre de mousses extinctrices peuvent servir de solutions de rechange aujourd'hui. Nous avons des produits à notre disposition. Quels sont les utilisations ou les projets essentiels pour lesquels nous devons continuer d'autoriser ces produits chimiques? Quelles sont les utilisations absolument essentielles?
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Merci, monsieur le président.
Je vais revenir sur la question de la gestion fédérale de la pollution. Ça s'inscrit peut-être un peu dans la suite des questions de Mme Taylor Roy et des réponses données.
En 2021, l'Association canadienne du droit de l'environnement avait dit qu'il serait plus intéressant de considérer les SPFA comme une catégorie de substances, plutôt que de traiter les substances une par une.
Depuis, il y a eu quelques modifications à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, l'an passé. Nous avons travaillé là-dessus.
Selon vous, est-ce que la réglementation canadienne visant ces substances est suffisante?
Je vais tout de suite vous poser mon autre question, pour vous laisser tout le temps nécessaire pour répondre.
J'ai écouté un balado où vous avez beaucoup parlé de ce qui se passe aux États‑Unis. Quelle est la situation au Canada, comparativement à d'autres administrations?
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Il y a deux aspects dans le fait de réglementer les SPFA en tant que groupe de substances.
Je pense que l'avantage de procéder ainsi réside dans l'interdiction d'usage, comme ma collègue le disait. C'est pour interdire d'en mettre partout qu'il faut réglementer les SPFA en tant que grand groupe de substances.
Ensuite, sur le plan environnemental, il faut être capable de mesurer les concentrations de SPFA dans l'eau potable. Il faut donc mettre des molécules et cibler quelque chose qui est mesurable.
Dans ce cas-ci, je pense que l'approche de Santé Canada, qui visait une trentaine de SPFA différentes, était la bonne approche. Les États‑Unis, en raison de la loi et de la manière dont ça fonctionne, ont ciblé seulement quatre ou six SPFA précises. Ils n'adoptent donc pas du tout cette approche plus grande, qui correspond à ce que fait l'Union européenne. L'Union européenne considère tout en groupe.
En revanche, les Américains sont beaucoup plus stricts relativement aux quelques SPFA qu'ils sont capables de mesurer. En fait, ce sont les plus stricts au monde. Ils sont pris dans une approche où ils ne peuvent pas englober toutes les SPFA, parce que leur loi ne le leur permet pas. Toutefois, ils sont les plus stricts au monde relativement à ceux qu'ils peuvent mesurer.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Revenons maintenant aux témoins.
Ma question s'adresse à vous, monsieur DeMarco.
On a beaucoup parlé de l'Agence canadienne de l'eau. Pour votre part, vous parlez beaucoup du travail collaboratif plutôt qu'en vase clos, ainsi que de la nécessité de disposer de plus de données et d'être plus efficace.
Comment voyez-vous le rôle de l'Agence canadienne de l'eau quant à ce leadership? Plusieurs témoins nous ont dit qu'il devrait y avoir plus de données et plus de collaboration pour que le travail soit plus efficace, ce qui impliquerait plusieurs ordres de gouvernement et des associations.
Par ailleurs, il a beaucoup été question des agriculteurs, qui ont besoin de données pour bien gérer les déficits hydriques.
Je vous laisse répondre à ça, monsieur DeMarco.
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Comme il s'agit d'un projet de loi, je ne peux pas en dire beaucoup à ce sujet. J'ai lu le projet de loi. Il s'agit plutôt du cadre structurel de l'Agence. On n'indique pas beaucoup de détails ou d'objectifs. C'est vraiment une loi habilitante. Nous verrons ce que l'Agence fera.
Cela dit, on doit miser sur la coordination, sur la collaboration ainsi que sur l'utilisation de tous les pouvoirs du fédéral en matière de pêche et de navigation, sur son pouvoir à l'international ainsi que sur son pouvoir en matière criminelle, notamment en ce qui a trait à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
J'aimerais voir également qu'on met l'accent sur les résultats. C'est quelque chose qui manque, au Canada, dans les projets de loi comme celui-là qui ne présentent qu'un cadre structurel. J'aimerais que des cibles soient établies, que de vrais résultats soient visés pour les eaux douces au Canada.
En tant que Canadien originaire du sud-ouest de l'Ontario, je constate que bon nombre des problèmes qui touchent aujourd'hui le lac Érié sont les mêmes que ceux que nous avons connus dans les années 1970.
Je serais donc très content que l'Agence mette l'accent sur les résultats et utilise tous les pouvoirs du fédéral pour améliorer l'état des eaux douces au Canada.
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Chers collègues, nous allons reprendre la séance.
Je tiens à vous dire que Mme Olsgard a réussi le test de son. Nous pouvons donc commencer.
Par vidéoconférence, nous accueillons Mme Mandy Olsgard, qui est toxicologue principale et évaluatrice des risques. Elle témoigne cet après-midi à titre personnel.
[Traduction]
Madame Olsgard, merci d'être avec nous en ligne. Vous disposez de cinq minutes pour votre déclaration liminaire. Malheureusement, je vais devoir vous arrêter à cinq minutes précises, si vous vous rendez jusque‑là. Il y aura ensuite beaucoup de temps pour les questions. Je suis certain que nos membres auront bien des questions à vous poser.
Nous allons commencer par vous, madame Olsgard, pour cinq minutes. Merci.
En tant que biologiste et toxicologue professionnelle qui a travaillé pour l'Alberta Energy Regulator, ou AER — l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta — et en tant que consultante indépendante chargée d'évaluer les risques pour la santé en Alberta depuis les 17 dernières années, j'ai le privilège de travailler en étroite collaboration avec les communautés métisses et des Premières Nations en amont et en aval de l'exploitation des mines de sables bitumineux.
Je ne suis pas dans une tour d'ivoire. Je suis assise dans des avions qui survolent les sables bitumineux et qui font l'expérience directe des émissions atmosphériques nauséabondes. Je suis aussi assise à l'arrière de motoneiges et dans des bateaux qui sillonnent la portion nord de la forêt boréale et j'écoute les populations autochtones nous faire part de leurs connaissances de la terre et de l'eau et de la façon dont elles ont évolué au fil du temps. Je m'assois dans les cuisines de ces gens et j'écoute leurs préoccupations en matière de santé. Puis, en m'appuyant sur ces connaissances, j'effectue des études de suivi et des études sur les risques sanitaires à l'échelle de la communauté.
Je vais aborder trois questions que j'ai pu dégager dans le cadre de cette recherche et que j'expose dans mon mémoire.
Premièrement, je vais expliquer comment les lignes directrices provinciales et fédérales sur la qualité des eaux de surface ne tiennent pas compte de la toxicité des substances chimiques pour les humains.
Ces recommandations pour la qualité des eaux de surface sont axées sur la protection de la vie aquatique et elles ont été établies à partir de données relatives aux poissons et à d'autres espèces aquatiques. Par conséquent, l'utilisation de ces lignes directrices pour évaluer la qualité des eaux de surface et les risques afférents ne tient pas compte des effets sur la santé humaine ou du potentiel cancérigène des substances chimiques.
Lors de l'élaboration des critères relatifs aux Autochtones, nous avons comparé les lignes directrices publiées pour la qualité des eaux de surface et des eaux potables pour chaque produit chimique contrôlé dans le cadre des programmes relatifs aux eaux de surface dans la région du cours inférieur de l'Athabasca et nous avons constaté que 50 % de toutes les substances chimiques contrôlées dans ces eaux sont plus toxiques pour l'homme que pour les récepteurs aquatiques. Je note ceci, car les représentants de l'Impériale et de l'AER ont affirmé que les rejets du projet Kearl ne présentaient aucun risque pour la santé humaine. Toutefois, les renseignements disponibles sur leurs sites web respectifs indiquent que les lignes directrices relatives à la qualité des eaux de surface ont été utilisées pour évaluer les données concernant les zones humides et les masses d'eau de surface touchées et que, de ce fait, elles n'auraient pas pris en compte la santé humaine.
Deuxièmement, mon examen des rapports soumis par les exploitants de sables bitumineux à l'AER a permis d'identifier une source de contamination qui n'est pas bien documentée. Je parle ici des 40 rejets et plus d'eaux usées industrielles provenant de mines de sables bitumineux qui sont approuvés — il convient cependant de préciser que la Loi sur les pêches ne prévoit pas encore de réglementation fédérale en matière d'effluents pour les mines de sables bitumineux. Les eaux usées industrielles ne sont pas des eaux qui proviennent de bassins de décantation. Il s'agit d'effluents provenant de sources sans contact telles que les tours de refroidissement et les eaux de ruissellement — c'est une distinction importante —, et ces rejets ne font pas partie des discussions en cours sur le traitement et le rejet des eaux de résidus.
Année après année, les exploitants signalent à l'AER que la qualité de ces rejets dans les rivières et les affluents locaux dépasse les recommandations pour la qualité des eaux de surface en ce qui concerne les sels, les métaux et les nutriments, et qu'elle présente parfois une toxicité chronique. Le dernier rapport de surveillance des eaux de surface du gouvernement de l'Alberta — un rapport qui sert de base à l'évaluation des changements dans cette région — indique que les concentrations de lithium, d'uranium et de sulfate sont très différentes de ce qu'elles avaient l'habitude d'être et qu'elles dépassent les seuils de conformité.
Sur la base de cette information, l'AER sait que les eaux usées rejetées par les mines de sables bitumineux dépassent les recommandations provinciales et fédérales en matière de qualité des eaux de surface et que le gouvernement provincial est au fait des conditions changeantes dans le cours inférieur de la rivière Athabasca, en aval de l'exploitation des sables bitumineux. Malgré cela, rien n'indique que l'AER ait mis de l'avant des mesures réglementaires à l'intention des exploitants de sables bitumineux. On ne sait pas exactement si ces rejets sont contraires à la Loi sur les pêches du gouvernement fédéral, étant donné les dépôts de substances nocives qu'ils entraînent dans les eaux de surface de la région du cours inférieur de l'Athabasca.
En troisième lieu, je voudrais parler des risques actuels et futurs que les bassins de décantation font planer sur la santé humaine et l'environnement.
La compréhension de l'étendue des risques pour la santé est limitée, car les exploitants de sables bitumineux contrôlent l'accès à toute l'information concernant les résidus. Grâce à une demande et moyennant certains frais, j'ai pu consulter les rapports soumis à l'AER. L'examen de ces rapports m'a permis de cerner plusieurs problèmes, mais faute de temps, j'insisterai sur deux points.
Premièrement, mon examen des données de surveillance des eaux souterraines du projet Kearl de l'Impériale m'a amenée à conclure en novembre 2022 ce que nous avons tous appris en février 2023: les eaux souterraines contaminées par les résidus de la mine Kearl s'échappaient à l'extérieur de la concession. Il était également évident qu'au moins trois ans avant l'émission du décret de protection de l'environnement, l'Impériale avait signalé la contamination des eaux souterraines et les infiltrations à l'AER, mais tardait à mettre en place le système idoine pour intercepter ces infiltrations. Cependant, les rejets de l'Impériale à Kearl sont le symptôme d'un problème plus vaste de surveillance réglementaire: l'industrie conçoit des bassins sans membrane puis demande qu'on permette aux eaux suintant de ces bassins de résidus d'aller dans les eaux souterraines, ce que l'AER approuve. La contamination des eaux souterraines à proximité des bassins de décantation est un phénomène commun à toutes les mines de sables bitumineux.
L'étendue des impacts hors site peut être vérifiée grâce à l'examen des rapports annuels de surveillance des eaux souterraines...
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le président, membres du Comité, merci beaucoup. C'est avec grand plaisir que je vais vous présenter cet exposé sur les défis que posent la surveillance, l'évaluation et l'établissement de rapports concernant les systèmes d'eau douce au Canada.
Au Canada et dans le monde entier, les ressources en eau de surface et en eau souterraine sont soumises à des menaces environnementales croissantes associées à des facteurs de stress environnementaux causés par l'activité humaine. La quantification, la compréhension et la prévision des changements dans la quantité et la qualité de l'eau ainsi que dans le biote aquatique en réponse à ces multiples facteurs de stress nécessitent un système coordonné, intégré et crédible de surveillance, d'évaluation et d'établissement de rapports. C'est grâce à un tel système que nous sommes en mesure d'établir les mesures à prendre pour assurer la conservation, la protection, la salubrité et la durabilité de nos ressources en eau.
La conception et la mise en œuvre efficaces d'un système intégré nécessitent l'acquisition et la communication en temps opportun de données environnementales pertinentes. En outre, la gestion intégrée des bassins hydrographiques nécessite la capacité de définir des conditions de base appropriées pour évaluer les changements, la capacité de repérer et de suivre les répercussions environnementales, et la capacité d'évaluer et de prédire les effets cumulatifs.
En outre, la reconnaissance et la nécessité d'utiliser de multiples systèmes et modes de connaissance dans la conception des programmes de surveillance, d'évaluation et d'établissement de rapports, ainsi que l'intégration des détenteurs de connaissances autochtones dans la conception et la mise en œuvre de ces programmes, constituent des lacunes importantes et persistantes.
En utilisant le bassin de la rivière Athabasca comme exemple de cas, j'aimerais mettre en évidence certains des problèmes et certaines des solutions possibles associés à la mise en œuvre d'un programme de surveillance intégré et efficace.
Le bassin de la rivière Athabasca et celui, plus vaste, du fleuve Mackenzie sont devenus l'un des systèmes d'eau douce les plus surveillés et les plus étudiés au Canada. Cependant, il existe des lacunes importantes en matière de connaissances et des incertitudes quant à la manière dont le bassin et les écosystèmes en aval se transforment sous l'effet des facteurs de stress environnementaux croissants associés au développement régional et à la croissance de la population.
La croissance économique s'accompagne de préoccupations croissantes de la part des communautés autochtones qui vivent au cœur et en aval de ces développements. Le Comité a déjà entendu d'autres témoignages de chefs de communautés autochtones et d'autres représentants faisant état des préoccupations croissantes des communautés quant à la capacité des cadres réglementaires actuels en matière d'environnement d'assurer la protection de l'environnement dont dépend leur mode de vie.
Où en sommes-nous aujourd'hui?
Les examens menés par le gouvernement et par des experts indépendants au sujet de la surveillance régionale des sables bitumineux dans le bassin de l'Athabasca ont révélé qu'en dépit des engagements de longue date de mettre en œuvre une surveillance intégrée et une évaluation des effets cumulatifs, peu de progrès tangibles ont été faits dans l'avancement de l'évaluation et des politiques réglementaires connexes. Après des décennies et des centaines de millions de dollars consacrés à la surveillance et à la recherche environnementale dans le bassin de l'Athabasca, il reste d'importants problèmes à régler pour assurer la fourniture de données ouvertes, transparentes et accessibles, données qui ne sont d'ailleurs utilisées qu'à une fraction de leur potentiel pour étayer les rapports sur l'état de l'environnement et éclairer la prise de décisions et de mesures pertinentes en matière de gestion de l'environnement.
Il existe actuellement au moins 10 types de programmes distincts de surveillance dans le bassin. Le libre accès aux données collectées dans le cadre de bon nombre de ces programmes reste difficile, voire impossible. En outre, ces données sont soumises à des pratiques distinctes en matière de contrôle de la qualité, y compris des normes analytiques et des formes incohérentes d'enregistrement public. Nous n'avons tout simplement pas besoin d'un autre site Web rassemblant des données fragmentées. Nous devons modifier en profondeur notre façon de concevoir et d'implanter un système efficace de surveillance, d'évaluation et d'établissement de rapports.
Enfin, pour de nombreux programmes de surveillance, il n'existe pas de critères de décision clairement définis ni de dispositif permettant d'augmenter ou de réduire l'amplitude et la fréquence de la surveillance, ce qui est un principe fondamental de la surveillance adaptative.
Avec l'engagement et l'expertise nécessaires, il est possible de développer un cadre adaptatif avec des critères définis pour modifier l'amplitude de la surveillance et les rapports correspondants, garantissant ainsi l'utilisation la plus rentable possible des ressources scientifiques et techniques.
Dans le cadre d'une présentation antérieure à ce comité, Pietroniro et Clark, de l'Université de Calgary, ont défendu la nécessité pour le Canada de se doter d'un nouveau système national intégré de prévisions environnementales fondé sur un cadre informatique interopérable et un système de gestion des données connexes, et ils ont fait des recommandations en ce sens.
Or, des systèmes de surveillance, d'évaluation et d'établissement de rapports bien conçus pourraient fournir les données nécessaires pour soutenir un tel système de prévision pour les eaux douces. La défragmentation des approches actuelles et l'amélioration de l'application des nouvelles technologies automatisées de surveillance et d'établissement de rapports pourraient fournir des renseignements plus normalisés, plus efficients et plus actuels que ceux que nous récoltons présentement, et qui nous permettront de focaliser les efforts futurs sur les domaines prioritaires.
Il est essentiel de nouer de nouveaux partenariats pour développer la prochaine génération de systèmes de suivi et d'évaluation. Les liens avec des programmes tels que le nouveau Centre interdisciplinaire des Nations unies sur l'eau à l'Université de Calgary et d'autres programmes universitaires peuvent servir d'incubateurs et d'accélérateurs pour créer un espace de collaboration nationale et internationale. Nous pourrons ainsi relier les progrès de la recherche aux actions de gestion et de politique, ainsi qu'aux initiatives de surveillance et de prévision en matière d'environnement.
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Merci, monsieur le président et membres du Comité. Bonjour à tous. Je m'appelle Duane Thompson. Je suis un éleveur de la Saskatchewan. J'ai le plaisir de coprésider le Comité de l'environnement de l'Association canadienne des bovins, l'ACB. Je suis accompagné aujourd'hui d'un collègue éleveur, M. Ryan Beierbach, qui est le président de la Table ronde canadienne sur le bœuf durable.
Nous sommes heureux de participer à l'étude du Comité sur l'eau douce. L'ACB représente 60 000 producteurs de viande bovine à travers le Canada. Nous sommes les leaders mondiaux de la production durable de viande bovine de haute qualité, avec l'une des plus faibles empreintes de GES par unité de volume de production au monde, soit environ la moitié de la moyenne à l'échelle mondiale. Tout en contribuant de manière significative à l'économie canadienne, l'industrie de la viande bovine ne représente que 2,45 % de l'empreinte totale du pays en matière de GES. Les producteurs de viande bovine gèrent plus de 44 millions d'acres de prairies, qui constituent un réservoir stable d'environ 1,5 milliard de tonnes de carbone. Ce réservoir comprend 68 % de l'habitat de la faune sauvage sur seulement 33 % de l'ensemble des terres agricoles du Canada.
Comme le Comité l'a déjà entendu, nous prenons au sérieux nos engagements en matière d'intendance environnementale. La gestion de l'eau est un élément clé de l'intendance environnementale en général. Nous avons réalisé d'importants progrès à ce titre, mais nous n'avons pas l'intention de nous reposer sur nos lauriers. L'industrie canadienne du bœuf s'est en effet fixé des objectifs ambitieux à l'horizon 2030 en tenant compte de différents facteurs environnementaux, de la réduction de l'intensité des émissions de GES à la conservation des prairies. Nous réfléchissons également à d'autres types de considérations, y compris l'eau douce. La sécurité de l'eau demeure essentielle au maintien de la production agricole, mais également au bien-être des animaux, à la santé des sols, et à la résilience des infrastructures, tant au sein des exploitations que dans les habitats environnants. Notre engagement porte sur la manière dont les producteurs de viande bovine dépendent de l'eau douce, des infrastructures liées à l'eau douce, et aux répercussions de ces infrastructures sur la production alimentaire et sur nos objectifs environnementaux en matière d'eau douce.
Dans le contexte de la création d'une nouvelle Agence canadienne de l'eau, nous devons veiller à ce que les agriculteurs et les éleveurs demeurent au cœur du débat. Nous devons tenir compte des paysages, du lien entre les cours d'eau douce et la production agricole, et des endroits où différentes infrastructures clés devront être mises en place. Les exploitations bovines et les ranchs opèrent dans d'immenses paysages ouverts et forestiers. Une grande partie des fermes et des ranchs d'élevage bovin, comme les pâturages, les zones riveraines et les forêts, sont des systèmes naturels d'entreposage et de filtration de l'eau. En raison de nos besoins en eau, nous avons établi nos exploitations bovines et nos ranchs en grande partie à proximité de différentes sources d'eau. Dans de nombreux cas, il faut accéder directement à des sources d'eau ou rediriger les courants à des fins de drainage, d'irrigation des cultures et d'abreuvement du bétail. Cette étape est fondamentale pour nous permettre de gérer les autres activités au sein de nos fermes et de nos ranchs. Bien que l'irrigation relève principalement de la compétence des provinces, l'accès à l'irrigation pour les éleveurs de bovins est un facteur important à prendre en compte dans votre étude.
Étant donné le rôle crucial que jouent les agriculteurs et les éleveurs dans la production alimentaire tout en préservant les écosystèmes entourant les exploitations bovines, nous devons veiller à ce que les activités liées à l'agriculture soient prises en compte lors de l'élaboration des politiques et des réglementations du gouvernement fédéral. Nous accordons une attention particulière à la manière dont les politiques du gouvernement en matière d'eau peuvent générer des conséquences imprévues sur les pratiques agricoles, les infrastructures et la production alimentaire.
À ce sujet, je tiens à parler de l’encadrement réglementaire des ouvrages et des plans d’eau de moindre importance. Bien que ces politiques n'occupent pas une place centrale dans votre étude sur l'eau douce, nous sommes préoccupés par rapport aux activités courantes et aux projets de petite envergure des exploitations bovines en matière d'eau douce. Nous demandons aux députés de prendre en compte les impacts potentiels des lois et des règlements en vigueur sur les exploitations agricoles. Les exemptions pour les activités courantes liées à l'agriculture devraient toujours être prises en considération afin d'éviter tout impact néfaste sur l'eau douce et sur la production alimentaire.
En outre, les producteurs de viande bovine sont préoccupés par les étendues d'eau douce privées sur leurs terres et par l'impact que la politique gouvernementale peut avoir sur la production agricole. Par exemple, lorsqu'une exploitation agricole ou un ranch subit un ruissellement important, voire une inondation, en raison d'un lac indépendant situé sur ses terres, le trop-plein d'eau s'écoule vers le bas de la pente. D'importants volumes d'eau peuvent alors se déverser dans certains endroits publics. Les agriculteurs et les éleveurs s'inquiètent beaucoup du fait que, dans une telle situation, des particuliers pourraient revendiquer un droit d'accès aux eaux navigables. Nous devons lever l'ambiguïté à ce sujet afin d'empêcher le mauvais usage de ces cours d'eau par la population.
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Bonjour monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je m'appelle Lance Haymond et je représente la communauté algonquine de Kebaowek. J'aimerais vous parler aujourd'hui des déchets nucléaires qui empoisonnent la rivière des Outaouais en raison du projet d'installation de stockage près de la surface qui sera construit aux Laboratoires nucléaires canadiens à Chalk River, en Ontario.
Le Kichi Sibi, comme nous l'appelons, ou la rivière des Outaouais constitue la patrie et la voie navigable de notre peuple depuis des temps immémoriaux. Pendant des millénaires, la nation algonquine a respecté ce cours d'eau. Aujourd'hui, la Kichi Sibi est une voie navigable qui fournit de l'eau potable à plus de 10 millions de personnes. C'est pourquoi je vais exposer nos préoccupations concernant l'entreposage de déchets radioactifs de courte et moyenne activité prévue à Chalk River. Je vais notamment aborder le risque de fuites radioactives et d'empoisonnement de la rivière des Outaouais par les déchets nucléaires.
Chalk River continue de jouer un rôle important dans le développement de technologies nucléaires à l'échelle internationale. En 1944, Chalk River a été choisi comme l'un des sites du projet Manhattan visant à produire les premiers réacteurs à eau lourde au monde, ainsi que du plutonium destinés à la fabrication de bombes. Deux cent cinquante kilogrammes de plutonium ont été vendus à l'armée américaine pour être utilisés dans la fabrication d'armes nucléaires. Dès 1944, Chalk River a été choisi pour abriter des installations secrètes; évidemment, les communautés algonquines n'ont jamais été consultées.
Il faut comprendre qu'en 1944, mes ancêtres luttaient pour leur survie, alors que des colons européens les forçaient à se replier plus au nord, le long de la rivière des Outaouais. Le résultat est que le site de Chalk River est très fortement contaminé par l'entreposage de nombreux déchets radioactifs: 21 réservoirs de déchets liquides et cinq ou six zones de déchets différents contenant des déchets de moyenne et de haute activité à longue durée de vie. On y trouve également des déchets provenant de deux fuites de réacteur qui ont eu lieu en 1952 et 1958. Je tiens à rappeler que la première opération réussie de fusion nucléaire au monde a eu lieu à Chalk River en 1952.
En 2006, le gouvernement du Canada a lancé le Programme des responsabilités nucléaires héritées, dans le but d'éliminer les déchets radioactifs. En 2015, il a engagé un consortium de sociétés multinationales pour effectuer ce travail. Le consortium a opportunément décidé de construire une décharge de sept étages à un kilomètre de la rivière des Outaouais, qui se jette dans le fleuve Saint-Laurent. Cent quarante municipalités situées le long du bassin versant ont exprimé leur opposition à cette installation d'entreposage permanente des déchets radioactifs. Plus de 3 000 personnes ont récemment signé une pétition à la Chambre des communes demandant au gouvernement de mettre un terme à ce projet.
La Commission canadienne de sûreté nucléaire a approuvé la construction du projet en janvier 2024, malgré la forte opposition de dix des onze communautés algonquines. Les installations se situent sur une hauteur de terrain qui se déverse dans les zones humides, lesquelles se déversent ensuite dans la rivière des Outaouais. C'est ce que nous déplorons. Pourquoi ce site a-t-il été choisi? Nous pensons qu'il s'agit simplement d'une question de commodité, car il est facile d'entreposer ces déchets tout juste à l'extérieur du périmètre des propriétés riveraines.
Selon nous, l'entreposage de ces déchets à cet endroit risque à court terme d'empoisonner notre approvisionnement en eau et de détruire une forêt ancienne où se trouvent notamment des tanières d'ours d'autres espèces en péril. Ce projet s'appuie sur des technologies inadéquates au mauvais endroit. Par ailleurs, il ne s'agit pas d'un projet temporaire. Cette décharge a effectivement vocation à être une installation permanente, 19 des 29 radionucléides répertoriés dans l'inventaire des déchets ayant une demi-vie de plus de 1 000 ans. Il est donc question de déchets radioactifs à longue période. En outre, le traitement sur site de l'eau n'est prévu que pour 30 ans. Ensuite, on devra se croiser les doigts pour que le revêtement synthétique, quel qu'il soit, soit en mesure de maintenir en place les installations usées.
La Première Nation de Kebaowek a été très claire à l'égard du gouvernement fédéral: il faut éviter à tout prix de déverser des déchets là où l'eau est puisée. Le gouvernement n'aurait pas dû donner son aval à la construction d'installations d'élimination définitive de déchets nucléaires sur le territoire sacré des Algonquins. L'article 29 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, la DNUDPA, stipule la chose suivante: « les États prennent des mesures efficaces pour veiller à ce qu’aucune matière dangereuse ne soit stockée ou déchargée sur les terres ou territoires des peuples autochtones sans leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. ». Je sais que ce gouvernement est fier d'avoir adopté la DNUDPA. Le problème, c'est que ses actes ne correspondent pas nécessairement à ses promesses.
Le Kichi Sibi fait partie de la lignée des Algonquins et assure la subsistance de tous les êtres vivants. Empoisonner cette source de vie, c'est empoisonner l'ensemble de l'écosystème et de la biosphère. Nous sommes aujourd'hui confrontés à un défi intergénérationnel à Chalk River. Nous devons réfléchir en ces termes et nous demander si le projet IGDPS est la meilleure solution pour éviter que les déchets nucléaires infectent notre eau potable et l'ensemble de notre chaîne alimentaire par le fait même. La Première Nation de Kebaowek a clairement indiqué que le projet IGDPS n'est pas la meilleure des solutions. Le professeur Gordon Edwards, cofondateur et président du Regroupement pour la surveillance du nucléaire, indique qu'il faut d'abord réfléchir à la manière de neutraliser les déchets, ou du moins limiter les dégâts.
Les Laboratoires nucléaires canadiens et le consortium ne savent pas comment procéder. C'est pourquoi la Première Nation de Kebaowek et d'autres communautés concernées ont déposé un recours judiciaire auprès de la Cour fédérale afin d'annuler la décision prise en matière de licence...
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J'aimerais ajouter quelques éléments à ce sujet.
Dans beaucoup d'autres régions du monde, les ressources sont bon marché et l'on ne se préoccupe donc pas de les gaspiller. Par contraste, les ressources au Canada sont relativement coûteuses, ce qui nous oblige à trouver des moyens efficaces pour rentabiliser leur exploitation. Ainsi, nous investissons beaucoup dans la recherche et le développement pour améliorer notre efficacité. En produisant plus de kilos de bœuf avec la même quantité de ressources, on constate une réduction considérable de notre empreinte carbone.
Nous avons réalisé notre première évaluation de la durabilité de la viande bovine à l'échelle nationale il y a sept ans, et nous venons de conclure une deuxième évaluation de ce type. Nous avons constaté que notre empreinte carbone avait diminué de 15 %. En examinant les raisons derrière cette réduction, nous avons réalisé l'importante de facteurs tels que l'élevage plus rapide des bovins en utilisant la même quantité de fourrage. Dans de nombreux cas, cela s'explique par la génétique, par la qualité du fourrage destiné au bétail, par l'équilibre des rations, et par le soin accordé aux ressources dont nous disposons. C'est grâce à toutes ces mesures que nous avons pu réduire notre empreinte carbone de manière considérable.
En Amérique du Nord, l'utilisation des ressources s'effectue de façon beaucoup plus efficace que dans d'autres grandes régions du monde. Au Canada, nous consacrons beaucoup d'argent et de ressources au secteur de l'élevage bovin, ce qui se traduit par des gains constants en matière d'efficacité et de progrès environnemental.
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À ce que je sache, nous n'avons jamais été contactés par un représentant du gouvernement fédéral. Je siège à la Table ronde canadienne sur le bœuf durable, ce qui nous permet de communiquer nos pratiques en matière de production avec des partenaires ailleurs dans le monde. Notre objectif est de contribuer à l'amélioration de l'ensemble du secteur de l'élevage bovin.
Nous sommes parfaitement capables de calculer nos émissions de GES, mais nous ne mesurons pas la séquestration du carbone effectuée, de sorte que nous ne comprenons que la moitié de l'équation en matière d'empreinte carbone liée à l'élevage bovin. Nous avons fait beaucoup de recherches au Canada pour quantifier les produits injectés dans le sol, afin d'assurer une gestion responsable du carbone stocké. Nous constatons une augmentation de la matière organique, ce qui favorise la fertilité et la biodiversité. Il s'agit donc d'un avantage considérable pour tous les éleveurs.
Néanmoins, tant que les résultats de nos recherches ne seront pas reconnus à l'échelle nationale et internationale, nous n'obtiendrons pas de crédit pour le carbone que nous stockons. Notre industrie s'est attelée à réellement comptabiliser et quantifier notre empreinte carbone afin de dégager un portrait d'ensemble. De cette façon, nous pouvons nous assurer de faire le meilleur travail possible en matière de stockage et de réduction du carbone.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie également les témoins de leur présence.
J'aimerais commencer par interroger le professeur Wrona. L'exposé que vous nous avez donné et la discussion que vous avez entamée au sujet de la surveillance m'ont vivement intéressé. Ce matin, j'ai parlé avec les militants du mouvement relatif aux nappes phréatiques et avec les opérateurs autochtones d'installations d'alimentation en eau qui étaient à Ottawa. Nous avons discuté de la nécessité de transmettre les bons renseignements aux opérateurs pour qu'ils sachent quand ils doivent apporter des changements au système.
Vous avez parlé des données ouvertes, de leur disponibilité et de l'importance de les transmettre au bon endroit et au bon moment. Je m'interroge à propos des éléments, tels que l'acide naphténique ou les substances perfluoroalkylées, qui pourraient figurer dans les données. Ces éléments seraient-ils détectés dans le cadre de la surveillance et inclus dans les données ouvertes dont vous avez parlé?
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Je vous remercie de votre question.
Cela dépend du bassin et du système. C'est à cela que je faisais allusion. Il faut au moins tenter de normaliser les renseignements de base sur la qualité de l'eau dans l'ensemble des bassins hydrographiques et autres qui doivent être communiqués et le moment où ils doivent l'être. Il est certain que, dans la région des sables bitumineux, les acides naphténiques et les contaminants de ce genre sont très importants. Des programmes de surveillance ont été mis en place pour mesurer ces types de produits chimiques. Toutefois, ces programmes ne sont pas omniprésents dans d'autres régions du pays.
Il en va de même pour les effluents d'eaux usées des municipalités et les mélanges complexes qu'ils contiennent. Il n'y a pas nécessairement d'uniformité à cet égard. Nous disposons de quelques paramètres de base, comme la demande biologique en oxygène, la bactérie E. coli et quelques autres éléments qui sont mesurés, y compris l'azote et le phosphore, mais comme cela a été mentionné par bon nombre d'autres personnes, il y a de nombreux autres composés qui ne sont pas nécessairement surveillés partout.
Je pense que l'argument convaincant qu'il faudrait faire valoir, c'est que, contrairement à d'autres cadres mis en oeuvre en Europe et dans d'autres régions, nous devrions élaborer, du point de vue de la gestion des bassins, une certaine normalisation en ce qui concerne nos attentes, ce que nous surveillons et la façon dont nous en rendons compte.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'être des nôtres.
Chef Haymond, merci d'être assis à la table parmi nous.
Je pense que nous en sommes à notre 14e rencontre sur les eaux douces. Or, il y a le projet de dépotoir nucléaire à Chalk River qui menace l'eau potable de millions de citoyens.
Je pense que des gens autour de la table doutent un peu de la mobilisation qu'il y a eu contre ce projet. En fait, 140 municipalités ont manifesté leur opposition au projet, et une seule des 11 nations autochtones concernées y a donné son feu vert.
Vous sentez-vous respectés là-dedans, autant dans le cadre des consultations auxquelles vous avez participé que dans le contexte de réconciliation avec les Premières Nations?
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Je vous remercie de votre question.
Ce que nous avons appris au cours de ce processus, c'est qu'entre Ottawa et le fleuve Saint-Laurent, il y a en fait 140 municipalités, villes et villages le long de la rivière des Outaouais qui sont solidaires de la position adoptée par Kebaowek et qui s'opposent à ce que le projet d'installation de gestion des déchets près de la surface, ou IGDPS, soit la solution pour traiter les déchets nucléaires à Chalk River.
Une partie de notre examen judiciaire — en fait la plus grande partie de notre argument — est liée au fait que nous n'avons pas participé à ce processus dès le début. Il a, en fait, commencé en 2013-2014. Malgré tous nos efforts pour faire savoir aux responsables que nous voulions être consultés, nous avons été continuellement tenus à l'écart du processus. En juin 2022, nous avons comparu devant la Commission canadienne de sûreté nucléaire, et nous avons été en mesure de présenter des preuves et un argument qui démontraient que nous n'avions pas été consultés adéquatement. La commission l'a reconnu, a pris une décision de procédure et nous a accordé environ neuf mois pour contribuer au processus. Cependant, la plupart des décisions avaient déjà été prises.
Il y a certainement eu un problème en matière de consultation et un manque de respect. Je reviens encore une fois sur la question de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Une consultation approfondie est nécessaire lorsque certains droits des peuples autochtones sont directement touchés. Lorsqu'il est question d'un dépotoir de déchets nucléaires, nous parlons des droits de l'ensemble de la nation algonquine, et toute autre nation située le long du bassin hydrographique de la rivière des Outaouais observera très certainement une atteinte à ses droits.
La commission n'a fait preuve d'aucun respect en vue de nous inclure dans le processus de manière appropriée. C'est ainsi que nous nous sommes retrouvés dans une situation où il n'y avait qu'une seule solution et qu'un seul site possible. Là encore, si nous avions pris part aux premières étapes de l'élaboration du projet initial et du processus d'évaluation environnementale, nous aurions très certainement demandé que d'autres sites soient envisagés et que le site choisi, situé à un kilomètre de la rivière des Outaouais, ne soit pas utilisé pour déposer un million de tonnes de déchets nucléaires, lesquels suinteront une fois que les barrières et les revêtements synthétiques se seront désintégrés dans 550 ans.
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Il est essentiel que nous soyons en mesure de démontrer que cette question est de la plus haute importance pour les peuples autochtones. L'appui de l'Assemblée des Premières Nations et de l'Assemblée des Premières Nations du Québec-Labrador n'est qu'un exemple de l'appui qui nous est apporté.
Je tiens également à souligner que nous bénéficions du soutien de groupes de Canadiens non autochtones. Comme je l'ai mentionné précédemment, 140 municipalités soutiennent ce projet et s'en préoccupent.
Nous avons déployé beaucoup d'efforts pour sensibiliser les gens à cette question et la rendre plus visible. L'appui dont nous bénéficions ne provient pas seulement d'organisations autochtones. Il provient également de groupes environnementaux non autochtones et de municipalités. Ce qui importe encore plus, c'est que, grâce à nos efforts, nous avons récemment réussi à sensibiliser le gouvernement du Québec à cette question. Les ministres Lafrenière et Charette ont envoyé une lettre au , pour lui rappeler que le Canada a la responsabilité de protéger l'environnement et de veiller à ce que les Premières Nations comme la mienne bénéficient d'un processus équitable.
Dans cette lettre, ils ont également indiqué qu'ils souhaitaient que le Canada examine de plus près le bien-fondé de notre demande et la prenne réellement en considération. Nous demandons que le Canada arrête ce processus et l'octroi de permis aux IGDPS, afin que nous puissions prendre du recul, examiner la question dans son ensemble et veiller à ce que les délibérations et le choix d'une technologie et d'un moyen de traiter les déchets nucléaires se fassent dans le respect des citoyens.
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Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'être de retour. J'ai aimé le temps que j'ai passé au sein du Comité lorsque je remplaçais ma collègue, Mme Collins.
Je sais que cette étude vous tient à cœur, monsieur le président. Il est bon de constater qu'elle se poursuit.
J'ai assisté aux séances du Comité où vous avez entendu une partie des témoignages concernant le projet Kearl d'exploitation des sables bitumineux ainsi que les déversements et infiltrations dans l'environnement liés à ce projet. Il était extrêmement troublant d'entendre la Première Nation Athabasca de Fort Chipewyan témoigner au sujet des effets dévastateurs qu'ils ont eus en aval sur la santé de ses membres et d'avoir l'impression que les organismes de réglementation chargés de superviser les activités et de protéger l'environnement semblaient avoir été entièrement dans la poche de l'industrie.
Je sais que Mme Olsgard a déjà comparu devant le Comité pour parler des infiltrations provenant des bassins de décantation.
Aujourd'hui, madame Olsgard, vous avez soulevé un nouvel aspect de la question, qui concerne le rejet des effluents des eaux usées de ces projets. Votre témoignage m'a fait penser à Smithers, ma ville natale. Il s'agit d'une petite municipalité d'environ 5 000 habitants située sur la rive de la rivière Bulkley. Elle possède une vieille usine de traitement des eaux usées municipales. Depuis un certain nombre d'années, elle a du mal à se conformer à la réglementation fédérale en matière de rejets des eaux usées. Ils ont reçu à répétition des lettres du gouvernement fédéral qui les avertit qu'ils ne respectent pas les normes établies et qui menace de leur imposer des sanctions s'ils ne construisent pas de meilleures infrastructures et ne traitent pas mieux leurs effluents. Ils attendent toujours une subvention du même gouvernement qui envoie les lettres, mais il s'agit d'un problème distinct.
Dans le cas dont je viens de parler, l'organisme de réglementation fédéral semble agir de manière très préventive à l'égard de très petites collectivités dont les ressources financières sont limitées.
Assiste‑t‑on au même type de réglementation préventive lorsqu'il s'agit de ces grandes sociétés d'exploitation des sables bitumineux qui rejettent tous ces effluents des eaux usées dans les rivières de la région des sables bitumineux?