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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 117 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 mai 2024

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Français]

     J'ouvre maintenant la séance.
    Je vous souhaite la bienvenue à la 117e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique.
    Le Comité se réunit aujourd'hui pour étudier, au cours de la première heure, le Budget principal des dépenses 2024‑2025, et pour reprendre son étude, au cours de la deuxième heure, sur les répercussions de la désinformation et de la mésinformation sur le travail des parlementaires. Enfin, nous passerons à huis clos pour discuter de quelques questions concernant nos travaux.
    Avant de commencer, j'aimerais rappeler à tous les députés et aux autres participants à la réunion présents dans la salle les mesures préventives importantes suivantes.

[Traduction]

Je ne vais pas toutes les mentionner. Je pense que nous les connaissons tous.
    Monsieur Dufresne, si vous n'utilisez pas l'oreillette, veillez à la placer à l'endroit indiqué sur la table. Nous ne voulons certainement pas causer de tort à nos interprètes. Bien entendu, la salle a été adaptée à cet effet.
    Conformément à l'article 81(4) du Règlement, le Comité reprend son examen du Budget principal des dépenses 2024‑2025. Ensuite, nous nous pencherons sur des crédits sous les rubriques Commissariat au lobbying, Bureau du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, Bureau du conseiller sénatorial en éthique et Commissariats à l'information et à la protection de la vie privée du Canada, qui ont été renvoyés au Comité le jeudi 29 février.
    Je vais souhaiter la bienvenue à une personne que le Comité connaît bien, soit M. Philippe Dufresne, commissaire à la protection de la vie privée du Canada, ainsi qu'à M. Richard Roulx, sous-commissaire du Secteur de la gestion intégrée. Ils sont avec nous pour la première partie de notre réunion.
     Monsieur le commissaire, vous disposez d'un maximum de cinq minutes pour présenter un exposé au Comité. Veuillez commencer. Merci.
    Mesdames et messieurs, je suis ravi d'être ici aujourd'hui pour discuter du budget principal des dépenses du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada pour l'exercice 2024‑2025 et pour décrire le travail accompli par le Commissariat en vue de protéger et de promouvoir le droit fondamental à la vie privée des Canadiennes et des Canadiens. Je suis accompagné de Richard Roulx, sous-commissaire du Secteur de la gestion intégrée.
    En janvier, j'ai lancé un plan stratégique comportant trois grandes priorités qui orienteront le travail du Commissariat jusqu'en 2027. Premièrement, protéger et promouvoir le droit à la vie privée de manière à optimiser les efforts déployés en utilisant les renseignements opérationnels pour dégager les tendances qui doivent retenir l'attention, produire des documents d'orientation et des outils de sensibilisation ciblés, tirer parti de partenariats stratégiques et se préparer à la mise en œuvre d'éventuelles nouvelles lois sur la protection des renseignements personnels.
    Deuxièmement, faire valoir la protection de la vie privée à l'heure où se succèdent les changements technologiques et agir en ce sens, en particulier en ce qui a trait à l'intelligence artificielle, soit l'IA, et à l'IA générative, dont la prolifération présente à la fois des avantages et des risques accrus pour la protection de la vie privée.
    Troisièmement, défendre le droit à la vie privée des enfants afin de s'assurer que les besoins qui leur sont propres en la matière sont satisfaits et qu'ils peuvent exercer leurs droits.

[Français]

     Selon moi, ces priorités stratégiques sont celles qui peuvent avoir la plus grande incidence sur la vie des Canadiennes et des Canadiens. Il s'agit aussi des domaines où résident les plus grands risques pour la vie privée si l'on ne s'y attaque pas.
    La protection de la vie privée est l'un des principaux défis de notre époque. Le Commissariat est prêt à relever ce défi en prenant des mesures énergiques pour défendre et promouvoir le droit à la vie privée, appliquer les lois en la matière, favoriser la collaboration et les partenariats, sensibiliser et éduquer la population, puis renforcer les capacités, et ce, en déployant des efforts sans relâche pour déceler les tendances en matière de protection de la vie privée et réagir à celles-ci en temps opportun.
    La Loi sur la protection des renseignements personnels vise le traitement des renseignements personnels par les ministères et les organismes du gouvernement fédéral; quant à elle, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, ou LPRPDE, est la loi fédérale régissant le secteur privé à cet égard au Canada. Les enquêtes effectuées sous le régime de ces lois sont une partie essentielle des travaux du Commissariat en ce qui a trait aux questions qui ont des répercussions importantes sur la vie des Canadiennes et des Canadiens.

[Traduction]

     En février, j'ai publié les conclusions de mon enquête sur Aylo, l'exploitant de Pornhub et d'autres sites Web pornographiques. J'ai conclu que l'entreprise avait enfreint la loi fédérale du Canada en matière de protection des renseignements personnels applicable au secteur privé en publiant des images intimes sur ses sites Web sans en informer directement toutes les personnes y figurant et sans obtenir le consentement de celles‑ci.
     À la publication des conclusions de cette enquête, j'ai réitéré le fait que la communication sans consentement d'images intimes constitue une atteinte grave à la vie privée qui peut causer des préjudices graves aux victimes et que les organisations ont l'obligation, au titre de la loi sur la protection des renseignements personnels, de prévenir ce type d'atteinte et d'y remédier.
    Cette affaire est également pertinente pour les discussions qui auront lieu à propos du projet de loi C‑63 et je serai ravi de faire part aux parlementaires de mes observations sur la Loi sur les préjudices en ligne.

[Français]

     J'ai également hâte de diffuser, au cours des mois à venir, les conclusions de deux enquêtes très médiatisées qui sont étroitement liées à deux de mes priorités stratégiques, soit protéger la vie privée des enfants et aborder les répercussions des nouvelles technologies.
    Lorsque j'ai comparu devant vous l'année dernière pour parler du budget principal des dépenses, je vous ai mentionné le lancement d'enquêtes sur TikTok et sur OpenAI, l'entreprise responsable du robot conversationnel ChatGPT alimenté par l'intelligence artificielle. Ces deux enquêtes sont menées conjointement avec mes homologues du Québec, de la Colombie‑Britannique et de l'Alberta.
(1110)

[Traduction]

     En ce qui concerne l'enquête sur TikTok, les quatre commissariats cherchent à établir si les pratiques de l'entreprise qui en est propriétaire, Bytedance, sont conformes aux lois canadiennes fédérales et provinciales sur la protection des renseignements personnels et, plus précisément, si TikTok a obtenu un consentement valide et éclairé pour la collecte, l'utilisation et la communication de renseignements personnels.
    Compte tenu de l'importance de protéger la vie privée des enfants, l'enquête conjointe porte en particulier sur les pratiques de protection des renseignements personnels de TikTok en ce qui concerne les jeunes utilisateurs.
    L'enquête sur OpenAI et son robot conversationnel ChatGPT vise à établir si l'entreprise respecte les exigences fixées par les lois canadiennes sur la protection de la vie privée en ce qui concerne le consentement, l'ouverture, l'accès, l'exactitude et la responsabilité. Elle vise également à établir si l'organisation recueille, utilise et communique des renseignements personnels à des fins acceptables.

[Français]

     Ces deux enquêtes sont d'une grande priorité, et nous travaillons à les achever en temps opportun.
    Protéger et promouvoir le droit à la vie privée de manière à optimiser les efforts déployés demeure une priorité essentielle à l'accomplissement de mon mandat et à la préparation du Commissariat en vue d'éventuelles modifications aux lois fédérales sur la protection des renseignements personnels.

[Traduction]

    Dans le budget de 2023, le Commissariat a reçu des fonds temporaires pour faire face à des pressions découlant des atteintes à la vie privée et d'un arriéré dans le traitement des plaintes, ainsi que pour préparer la mise en œuvre du projet de loi C‑27. Bien que ces fonds temporaires apportent un soutien nécessaire et immédiat, il est essentiel que le Commissariat dispose de ressources adéquates de façon permanente pour composer avec la complexité croissante du paysage actuel de la protection de la vie privée et les pressions connexes exercées sur les ressources du Commissariat.
    Pour y arriver, nous continuerons de présenter des demandes de financement responsables et nous nous efforcerons également de faire preuve d'agilité et d'efficience en évaluant les programmes et les services et en rationalisant leur mise en œuvre.
    Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions. Merci.
    Merci, monsieur Dufresne.
    Nous allons commencer notre première série de questions, dont les interventions seront de six minutes.
    Allez‑y, monsieur Barrett.
    Monsieur Dufresne, le 7 mars, je vous ai écrit une lettre pour vous demander d'entreprendre une autre enquête sur l'application ArriveCAN du gouvernement. À la lumière des nouveaux éléments d'information relatifs au traitement et à la sécurité des données des Canadiens, pouvez-vous faire le point sur l'enquête que vous menez présentement au sujet d'ArriveCAN?
    À la suite de votre lettre, j'ai annoncé, le 19 mars, que je mènerais une enquête sur les allégations d'atteinte à la vie privée après avoir reçu une plainte contre l'Agence des services frontaliers du Canada concernant la conception de l'application mobile ArriveCAN. L'enquête permettra d'examiner les pratiques contractuelles liées à ArriveCAN, et plus précisément les mesures qui ont été mises en place pour protéger les renseignements personnels lors de la conception de l'application, afin d'évaluer la conformité à la Loi sur la protection des renseignements personnels, qui s'applique aux ministères et aux organismes du gouvernement fédéral.
     L'enquête est en cours en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Je dois protéger la confidentialité des détails de cette enquête tant qu'elle est en cours, mais j'ai hâte de la terminer et de rendre les conclusions publiques à ce moment‑là.
     Je comprends que le commissaire à la protection de la vie privée a l'obligation d'assurer le respect de la vie privée. Je vais vous poser une série de questions et si vous êtes en mesure de faire le point ou de nous fournir des renseignements supplémentaires, je vous en serais reconnaissant.
     Avez-vous une idée de la date à laquelle nous pourrons prendre connaissance de vos conclusions?
    Non.
     Nous travaillons pour terminer l'enquête le plus rapidement possible, mais nous cherchons des réponses et des documents. Nous les examinons et nous essaierons de terminer l'enquête le plus vite possible.
    Avez-vous pu obtenir auprès du gouvernement et des entrepreneurs tous les documents nécessaires que vous avez demandés?
    Je n'ai pas de préoccupations à soulever à cet égard. La loi me confère des pouvoirs qui me permettraient d'obtenir de l'information si nécessaire.
     Êtes-vous en train d'enquêter sur une possible atteinte à l'article 7 de la Loi sur la protection des renseignements personnels? L'article 7 stipule ce qui suit:
À défaut du consentement de l'individu concerné, les renseignements personnels relevant d'une institution fédérale ne peuvent servir à celle‑ci:
a) qu'aux fins auxquelles ils ont été recueillis...
    Nous nous penchons sur les pratiques contractuelles. Nous examinons les mesures qui ont été mises en place pour protéger les renseignements personnels pendant la conception de l'application et nous allons évaluer la conformité aux dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Si nous constatons des problèmes, nous les soulèverons et les signalerons.
    Vous n'êtes pas en mesure de dire exactement quels articles de la loi s'appliquent, comme l'article 8 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, qui stipule ce qui suit:
Les renseignements personnels qui relèvent d'une institution fédérale ne peuvent être communiqués, à défaut du consentement de l'individu qu'ils concernent, que conformément au présent article.
     Il s'agit de l'article 7 ou de l'article 8, mais vous ne pouvez pas préciser lequel.
(1115)
    Lorsque j'ai annoncé la tenue de cette enquête, je n'ai pas précisé de dispositions particulières de la loi. Nous avons dit que nous voulions déterminer si la Loi sur la protection des renseignements personnels avait été respectée. Si nous constatons des problèmes à cet égard, nous les soulèverons.
     Dans son rapport sur ArriveCAN, la vérificatrice générale a clairement indiqué que la tenue des dossiers par le gouvernement laissait tellement à désirer qu'elle n'a pas été en mesure d'attribuer avec exactitude un coût précis à ArriveCAN. Elle a dit qu'elle pensait qu'il s'agissait de 60 millions de dollars. Est‑ce que c'est ce que vous constatez dans le cadre de vos travaux?
     Ce sont des observations que nous ferions dans le rapport final de notre enquête, comme l'a fait la vérificatrice générale dans le cadre de sa propre enquête. Ce n'est donc pas une question sur laquelle je ferais des commentaires à ce stade‑ci. Je le ferais une fois l'enquête terminée.
    J'aimerais savoir si vous avez interrogé des fonctionnaires, des entrepreneurs et des personnes dont l'habilitation de sécurité n'a pas pu être expliquée. Si vous pouvez nous en parler, je vous en serais reconnaissant.
    Pouvez-vous nous expliquer à quoi ressemble un entretien de ce type, quelle que soit la personne interrogée?
    Dans notre processus d'enquête, nous précisons avec les ministères les questions sur lesquelles nous nous penchons. Nous allons leur poser des questions, leur demander des documents et vérifier si leurs pratiques sont conformes aux aspects relatifs à l'utilisation, à la collecte, à la divulgation et aux garanties.
    Au fur et à mesure que les choses avancent, nous pourrons avoir d'autres questions. Nous pourrons faire un suivi à cet égard. Nous préparons un projet de rapport sur nos conclusions. Nous le leur transmettons. Nous leur donnons la possibilité de faire des commentaires. Ce travail sera en cours, mais ce ne sont pas des éléments d'information que je rendrais publics tant que l'enquête n'est pas terminée.
    Les voyageurs devaient obligatoirement utiliser ArriveCAN. Certaines personnes doivent voyager pour leur emploi ou pour accéder à des services médicaux, mais voyager librement fait également partie des droits qu'ont les Canadiens. L'utilisation de l'application était obligatoire, de même que la collecte des données. Ils ont dû communiquer leurs renseignements personnels.
     Quelles seraient les conséquences si vous découvriez que l'ASFC ou le gouvernement a enfreint la loi, la Loi sur la protection des renseignements personnels?
    L'un des éléments de la Loi sur la protection des renseignements personnels que j'aimerais que l'on modifie dans le cadre d'une modernisation future est le fait que je n'ai pas actuellement la capacité de rendre des ordonnances, des ordonnances exécutoires à l'égard d'un ministère. Je ferais des recommandations et je déterminerais s'il y a des lacunes. C'est ce qui figurerait dans mon rapport, si la loi a été enfreinte.
     Merci, monsieur Barrett. Merci, monsieur Dufresne.
    Allez‑y, monsieur Fisher. Vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Merci, messieurs, d'être ici aujourd'hui.
     Vous avez parlé des nouvelles technologies. Pourriez-vous nous indiquer quelles sont, dans le cadre de votre plan stratégique, les nouvelles initiatives et priorités visant à renforcer la protection de la vie privée des Canadiens par rapport aux nouvelles technologies dans un monde qui devient de plus en plus numérique?
    Merci.
     Nous faisons beaucoup de choses. Nous collaborons très étroitement avec nos partenaires provinciaux et territoriaux. C'est l'un des éléments dont je suis très fier. Par exemple, nous avons publié une résolution commune sur l'utilisation responsable de l'intelligence artificielle qui définit nos attentes quant aux pratiques en matière de protection de la vie privée à cet égard. Nous l'avons fait au sujet de la vie privée des enfants, en soulignant notamment que les technologies ne doivent pas être utilisées pour pousser les enfants et les mineurs à prendre des décisions préjudiciables à la vie privée. Nous examinons tous ces aspects en mettant l'accent sur l'intelligence artificielle, mais nous cherchons également à déterminer comment nous pouvons utiliser la technologie au sein du Commissariat afin d'être plus efficaces.
     Nous avons lancé un portail en ligne pour la présentation des évaluations des facteurs relatifs à la vie privée, afin de faciliter les choses. Nous avons mis au point un outil permettant d'évaluer si certaines atteintes à la vie privée entraînent un risque réel de préjudice important. Encore une fois, il ne s'agit pas de remplacer la prise de décision humaine, mais de fournir une assistance à cet égard. Nous ne considérons pas que la protection de la vie privée empêche le recours à la technologie. L'innovation, l'intérêt public et la réussite économique peuvent et doivent aller de pair avec la protection de la vie privée. C'est pourquoi nous maximisons vraiment les choses à cet égard. Bien sûr, il y a toujours des risques lorsqu'on utilise des données pour stimuler l'innovation. C'est pourquoi j'ai dit que nous utilisions les données pour soutenir l'innovation, mais que nous devions utiliser l'innovation pour protéger les renseignements personnels.
(1120)
    Tout d'abord, je suis curieux de savoir comment les Canadiens peuvent en être informés. Que peuvent-ils faire de manière proactive, par eux-mêmes, pour se protéger? Utiliser les outils dont vous parlez est une excellente chose, mais supposons que nous essayons simplement d'aider les Canadiens à protéger leur vie privée de manière proactive.
    Nous publions de nombreux documents d'orientation et des déclarations sur certaines questions. Par exemple, en collaboration avec un certain nombre de collègues de la communauté de la protection de la vie privée dans le monde, nous avons publié une déclaration sur l'extraction de données dans laquelle nous demandons aux entreprises de médias sociaux de prendre des mesures rigoureuses pour protéger les renseignements sur leur plateforme de médias sociaux afin de se protéger contre l'extraction de données, contre les atteintes à la vie privée.
    Dans une partie de ce document, nous donnons également des conseils aux Canadiens, en disant: « Voici ce que vous pouvez faire pour protéger vos propres... Vérifiez les paramètres de confidentialité de vos applications. Assurez-vous de savoir à qui vous donnez la permission lorsque vous partagez des photos de vos enfants, ce qui renvoie à la notion de “sharenting”, soit de surpartage parental. Soyez conscients des conséquences. »
     Il est important de rappeler que ce n'est pas aux individus qu'il devrait incomber de se protéger en premier lieu. Les organisations, les ministères et les lois doivent avoir un rôle à jouer, car c'est l'un des problèmes si nous déléguons trop cette responsabilité aux individus. Ils doivent sentir qu'il existe un système et que les organisations qui disposent des outils nécessaires prennent leur responsabilité au sérieux.
    Je suppose que vous examinez ce que font nos alliés dans leurs commissariats respectifs. Lesquels s'en sortent vraiment bien? Quel genre de choses font-ils? Suivez-vous les bons exemples?
     Nous travaillons très étroitement avec un certain nombre de nos homologues internationaux. J'en nommerai quelques-uns.
    Les autorités de protection des données du G7 se réunissent chaque année. L'année dernière, au Japon, nous avons publié une déclaration commune sur l'intelligence artificielle du point de vue de la protection de la vie privée. Je suis très fier de cette déclaration. Elle a été approuvée dans la déclaration du ministère de l'Industrie et du ministre Champagne sur les codes de conduite volontaires pour l'intelligence artificielle. Il y a cette collaboration, le sentiment que mes collègues et moi comprenons qu'il est nécessaire d'avoir des mesures rigoureuses de protection de la vie privée, mais en même temps d'avoir des économies très fortes et de permettre aux organisations de différents pays de communiquer des données.
    Je mentionnerais l'ICO, soit l'Information Commissioner's Office, du Royaume-Uni. Il a réalisé de l'excellent travail sur le plan de la protection de la vie privée des enfants. Il y a un code pour les enfants, un code adapté à l'âge, qui décrit les mesures que nous pouvons prendre. Je pense que le projet de loi C‑27 met l'accent sur cet aspect. J'ai été heureux de constater qu'un amendement avait été récemment proposé au comité de l'industrie pour souligner l'intérêt supérieur de l'enfant, ce qui correspond à l'un des amendements que j'avais recommandés.
     Je pense que nous constatons que beaucoup de travail est accompli dans ce domaine et qu'il y a une forte prise de conscience. Un autre exemple que je pourrais donner est la création de ce que nous appelons le bac à sable pour la protection de la vie privée. Le bureau d'un commissaire invitera un acteur de l'industrie à venir tester un nouveau processus et mentionnera les risques pour la vie privée avant que cette technologie ne soit déployée, de manière à ce que les risques puissent être atténués. On protège ainsi la vie privée et on évite une plainte en amont.
     Avez-vous l'impression qu'il y a des plateformes de médias sociaux qui respectent mieux que d'autres la vie privée des Canadiens, ou est‑ce qu'elles essaient peut-être de trouver des moyens de nuire?
     Il y a des plaintes, et des litiges sont en cours concernant certaines de ces plateformes de médias sociaux. Il y a donc manifestement des problèmes sur lesquels nous nous penchons.
     Nous avons eu un litige à la suite d'une décision relative à une plainte à propos de Facebook. Nous avons une affaire concernant Google sur des questions relatives au déférencement. Il y a notre enquête sur TikTok.
    Ces plateformes de médias sociaux assistent et participent aux discussions et aux réunions sur la protection de la vie privée qui ont lieu et elles font connaître leur opinion. Elles écoutent les commentaires de la communauté, mais je continuerai à leur répéter les choses par nos outils de promotion et de persuasion, ainsi qu'à l'aide des outils de conformité, si nécessaire.
    Malheureusement, le temps est écoulé, monsieur Fisher.
(1125)

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le commissaire, je vous souhaite de nouveau la bienvenue. J'aime toujours vous entendre.
    Je vais aborder quelques petites questions avant d'entrer dans le vif du sujet. Un citoyen de Trois‑Rivières qui est très préoccupé par les questions de vie privée m'a posé l'autre jour une question à laquelle je n'avais pas de réponse. J'ai donc décidé de lui fournir une réponse une fois que j'aurais entendu votre opinion sur le sujet.
     Ce citoyen m'a parlé des occasions où l'on visite un site Web, du fait qu'on peut y accéder sans accepter certaines conditions, que les données sont personnalisées quand on les accepte, et ainsi de suite.
    Il m'a demandé si le simple fait d'avoir visité un site Web constituait en soi un renseignement personnel.
     La localisation et la visite de sites Web donnent de l'information sur l'intérêt des gens. C'est pour cette raison que nous sommes préoccupés par les témoins de navigation, de localisation et par l'utilisation de cette information pour faire le profil des gens.
    Alors, oui, le refus est un élément qui serait pertinent dans la protection de l'information. Voilà pourquoi la discussion sur les témoins et sur le fait de les accepter est importante, parce que tout cela sert à obtenir de l'information sur nos champs d'intérêt.
     Autrement dit, si une personne refuse les témoins et quitte un site Internet au cours de sa navigation, cette information aura quand même été recueillie.
    En refusant les témoins, on restreint l'utilisation de certaines choses. Certaines utilisations sont inévitables, cependant, il aura aussi une demande du consentement à ce que l'information soit utilisée à des fins de publicité ciblée, par exemple.
    Le fait que ces choix ne sont pas toujours simples à faire est une de mes préoccupations. Le choix le plus simple est de tout accepter tout. Cependant, j'aimerais que le choix de tout refuser soit beaucoup plus simple et accessible. Souvent, il faut atteindre deux ou trois autres niveaux pour y arriver et, là encore, on demande des détails. En revanche, la possibilité de tout accepter sera toujours présente.
    À mon avis, il y a encore du travail à faire à cet égard.
    Quand on commence à décocher les partenaires et qu'il y en a 127, c'est long. D'ailleurs, je suis toujours étonné de voir le nombre de partenaires qui peuvent tirer profit de nos données.
    Alors, pour donner une réponse simple au citoyen qui m'a posé cette question, je lui dirai que l'information aura quand même été recueillie.
    S'il a quitté le site, aucune autre information ne sera recueillie par la suite.
    Cependant, nous sommes justement préoccupés par le fait qu'on ne sait pas toujours ce à quoi on consent. Cela peut aussi nous empêcher d'avoir accès à un service qu'on voudrait pouvoir utiliser autrement.
    Ces éléments font partie de nos réflexions. Par ailleurs, comme les algorithmes sont de plus en plus puissants, l'intelligence artificielle peut déceler plus des choses avec moins d'informations. Il faut donc être vigilant à cet égard.
    Cela met quand même en péril le concept de liberté de choix.
     J'avais justement une question à vous poser au sujet de la vigilance. Plus tôt, mon collègue vous a posé une question sur les plateformes qui respectent la vie privée. Cependant, au-delà des grandes plateformes, quelles sont les plateformes délinquantes? Bien des gens autour de moi utilisent toutes sortes de trucs dont je n'ai jamais entendu parler. Pour quels sites devrions-nous exercer plus de vigilance?
     Récemment, par exemple, nous avons fait une vérification en la matière, mais les résultats n'ont pas encore été rendus publics. Nous avons fait ce qu'on appelle un balayage des données. Il s'agissait de vérifier, de concert avec des partenaires internationaux, plusieurs sites Web de façon aléatoire et de chercher à savoir si, sur ces sites Web, il y a des façons trompeuses de communiquer qui incitent les gens à trop renoncer à la vie privée. Nous avons fait ce travail de façon conjointe avec les autorités en matière de concurrence parce qu'on voit qu'il y a des chevauchements. Quand nous aurons les résultats, nous pourrons dire que nous avons des préoccupations par rapport à certains sites.
    Jusqu'à maintenant, nous avons plutôt commenté des pratiques indésirables et des cas ciblés où nous condamnons une organisation, ce que nous faisons après avoir reçu une plainte. Il y a des plaintes en cours qui sont des sources de préoccupation.
    De mon côté, je veux voir plus de sites où la protection de la vie privée est incluse par défaut. Ce qui me préoccupe, c'est qu'on donne le choix. Il est facile de tout accepter, mais ce ne l'est pas de tout refuser.
     Quand on choisit de continuer sans accepter les témoins, certaines informations sont-elles quand même recueillies?
     Des paramètres peuvent être mis par défaut. Certains consentements sont automatiquement donnés. Parfois, pour continuer, il faut cliquer sur « tout accepter », et c'est un aspect sur lequel on se penche. Mon collègue de la Grande‑Bretagne en a fait un enjeu spécifique.
    Pour ce qui est du consentement à tout accepter, faudrait-il une modification législative? Au contraire, une modification réglementaire suffirait-elle?
     Dans le projet de loi C‑27, par exemple, on insiste sur le fait que le consentement doit être facile à comprendre et plus simple. De plus, on y prévoit des obligations plus proactives pour les organismes de même qu'un rôle accru pour mon bureau concernant la préparation de lignes directrices. On y prévoit aussi la possibilité de promulguer des ordonnances. Alors, c'est pour ça que je pense que ce projet de loi est un pas dans la bonne direction.
(1130)
     Croyez-vous qu'une ordonnance serait respectée? Serait-elle plutôt ignorée, comme c'est le cas des ordonnances de la commissaire à l'information?
     Jusqu'à ce qu'on me prouve le contraire, je vais présumer qu'une organisation va respecter la loi. Sinon, il y a des recours devant les tribunaux, d'où l'importance de pouvoir promulguer des ordonnances.
     Au Canada, certainement, la plupart des organismes ou des compagnies se préoccupent de leur réputation et de leurs clients. Ils veulent faire la bonne chose; ils vont donc se conformer à une recommandation. Nous l'avons constaté, par exemple, dans le dossier Home Depot, où on a fait des recommandations qui ont été suivies et où il y a eu une bonne collaboration.
    Cependant, il est important de pouvoir non seulement faire des ordonnances, mais aussi de donner des amendes financières. Je ne dis pas cela parce que je veux utiliser ces pouvoirs, mais ceux-ci aident à la prise de décision responsable et motivent les décideurs à donner la priorité à la protection de la vie privée. Sans cela, ces décideurs vont peut-être la donner à d'autres domaines où il y a des amendes parce que, dans celui-ci, il n'y en a pas.
     Merci beaucoup.
     Merci, messieurs Dufresne et Villemure.

[Traduction]

     Monsieur Green, vous disposez de six minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai fini par reprendre le contrôle de mon bouton de mise en sourdine, et je m'excuse pour la perturbation auditive de tout à l'heure.
    Monsieur Dufresne, c'est toujours agréable de vous inviter ici. À bien des égards, votre travail guide le nôtre, non seulement au sein du Comité, mais également à titre de parlementaires, de manière plus générale.
    J'aimerais d'abord revenir à votre plan ministériel de 2024‑2025, dans lequel vous présentez des résultats d'enquête sur la protection du droit à la vie privée que je trouve particulièrement préoccupants. Selon les résultats de l'enquête de 2022‑2023, seuls 39 % des répondants estiment que les entreprises respectent leur droit à la vie privée. Il s'agit d'une baisse de 45 % par rapport à une enquête similaire menée en 2020‑2021. Par ailleurs, seuls 58 % des répondants estiment que le gouvernement fédéral respecte leur droit à la vie privée, ce qui représente là aussi une baisse par rapport au chiffre précédent, soit 63 %. Bref, ces deux résultats sont bien en deçà de votre cible de 90 %.
     Comment expliquer des résultats aussi décevants? Et que faire pour inverser cette tendance à la baisse?
     Je trouve moi aussi que ces résultats sont bien décevants. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons placé le développement technologique et la protection des enfants au cœur de nos priorités stratégiques. Les Canadiens ont l'impression que la technologie est de plus en plus intrusive, et qu'ils sont bombardés de demandes d'accès à leurs renseignements personnels. Cette impression est légitime, car, en effet, les technologies s'appuient de plus en plus sur les données et les renseignements personnels pour générer de l'innovation. Voilà pourquoi nous avons mené plusieurs discussions sur le consentement à l'utilisation des sites Web et sur la protection des renseignements personnels. Il est donc important que nos institutions et nos entreprises se dotent de mécanismes de protection des renseignements personnels, et qu'elles proposent à leurs employés et à leurs clients des solutions de recours en cas de violation de leurs droits.
    Nous constatons que les Canadiens souhaitent consolider et renforcer leurs droits en matière de protection des renseignements personnels. C'est pourquoi nous plaidons en faveur d'une législation efficace et modernisée qui accorderait au commissaire certains pouvoirs d'ordonnance. Nous devons également prévoir des conséquences réelles, y compris l'imposition d'amendes, en cas de violation de la vie privée et des renseignements personnels.
    Par ailleurs, nous devons mettre en place des mesures de protection de la vie privée plus proactives, et ce, en amont du processus. J'ai demandé à ce que les évaluations des facteurs relatifs à la vie privée deviennent une obligation légale, tant pour les ministères que pour les organisations du secteur privé.
    Je pense qu'il y a encore beaucoup de travail à faire. Les rapports présentés récemment indiquent que les Canadiens se soucient de leur vie privée, et que nous devons donc aborder sérieusement ce genre d'enjeux. Nos concitoyens n'ont pas à sacrifier leurs renseignements personnels au profit de l'innovation technologique de telle ou telle entreprise.
    Ce sont des points très importants que vous avez soulevés. Le Comité a d'ailleurs fait les frais de ce que je considère être un mépris total du mandat du Conseil du Trésor de nous fournir une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Certains ministères ont carrément refusé de remplir un rapport d'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, et d'autres n'ont fini par obtempérer qu'après avoir été pris en flagrant délit.
    Vous avez également soulevé un enjeu que je juge très important, à savoir la protection de la vie privée de nos jeunes. Bien entendu, je suis sûr que vous conviendrez que la plupart des jeunes d'aujourd'hui ont délaissé les sites Web traditionnels, au profit de différentes plateformes de médias sociaux. Vous avez fait référence, je crois, à une évaluation du réseau TikTok.
     Sans entrer dans les détails ni anticiper la présentation de votre rapport, pourriez-vous résumer la manière dont les plateformes établissent des profils et se servent d'algorithmes pour cibler leurs utilisateurs en fonction de leurs centres d'intérêt, et nous expliquer en quoi cela peut être problématique?
(1135)
     Dans certaines de ces enquêtes, nous nous concentrons principalement sur la question du consentement. Obtenez-vous un consentement valable de la part des Canadiens, et le faites-vous d'une manière appropriée en ce qui concerne l'âge? Nous avons des conseils à ce sujet, car ce qui est approprié pour un adulte ne l'est pas forcément pour un enfant ou un mineur.
    Il existe différents types de circonstances, et le projet de loi C‑27 reconnaît cela en protégeant les renseignements relatifs aux mineurs et en les traitant comme sensible, ce qui constitue une mesure positive supplémentaire pour reconnaître l'intérêt supérieur de l'enfant.
     Sur la base de vos travaux préliminaires, pensez-vous que certaines plateformes sont pires que d'autres? Par exemple, on parle constamment de TikTok, et nous entendons beaucoup d'informations à ce sujet, mais quelle est la comparaison avec, disons, Instagram ou X, anciennement connu sous le nom de Twitter, ou Facebook?
    Ce que nous recherchons en matière d'enquêtes et d'évaluation, c'est si une organisation met en place des mesures proportionnées pour protéger la sensibilité des renseignements des mineurs et des enfants. Est-elle consciente de la probabilité que ses utilisateurs soient mineurs? Nous enquêtons sur TikTok, et nous avons annoncé que nous allions nous concentrer en particulier sur l'utilisation par les enfants, parce que c'est une grande partie de la clientèle de ce site Web.
    Est-ce parce que vous pensez qu'Instagram, Facebook et X ne font pas la même chose, ou qu'ils le font de manière différente? Aidez-moi à comprendre.
     Nous enquêtons actuellement sur TikTok, et c'est donc sur ce site que nous aurons des conclusions à formuler. Avec mes homologues provinciaux et territoriaux, nous avons fait une déclaration générale pour tous les médias sociaux, en matière de protection des droits des enfants. Nous avons mis en garde contre les techniques d'incitation qui encourageraient les enfants à fournir davantage de renseignements personnels qu'ils n'en ont besoin. Nous avons demandé que les renseignements personnels des enfants soient traités différemment et qu'ils aient davantage le droit de supprimer des informations. Je ne ferai pas de commentaire spécifique sur un site Web particulier si nous n'avons pas enquêté sur cette question en particulier, mais de manière générale, nous demandons à toutes ces plateformes d'être attentives à ces éléments.
    Comme je l'ai dit, je pense que le projet de loi C‑27 vise à nous donner des outils plus importants en ce qui concerne cette protection renforcée. J'en ai fait l'une de mes priorités, et nous allons donc poursuivre le travail d'éducation, mais aussi de mise en conformité ciblée, si nécessaire, pour protéger les enfants, quelle que soit la plateforme en cause.
     Je vous remercie, monsieur Green.
    Merci pour votre témoignage, monsieur Dufresne.
     Nous allons à présent entamer notre deuxième série de cinq minutes. Monsieur Kurek, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci, monsieur le commissaire.
    Je suis curieux, monsieur le commissaire, êtes-vous au courant du débat sur la question de privilège qui a eu lieu au Parlement hier soir et ce matin concernant 18 membres d'une association parlementaire ayant fait l'objet d'une tentative de piratage de renseignements personnels?
     Non, je n'ai pas encore été informé à ce sujet, malheureusement.
    La situation évolue très rapidement. Nous avons appris il y a quelques mois seulement, grâce à un rapport non scellé du ministère de la justice compilé par le FBI aux États-Unis, qu'en janvier 2021, un acteur étranger hostile lié à la dictature communiste de Pékin avait tenté d'infiltrer les comptes de messagerie électronique personnels de 18 parlementaires.
    Je sais que vous n'avez pas eu l'occasion d'entrer dans le débat qui a eu lieu au Parlement. J'ai siégé au Comité, et nous n'avons pas été appelés à voter, donc je pense que c'est un bon signe qu'il a été adopté à l'unanimité pour envoyer cela au comité PROC, mais je me demande si vous pouvez partager avec ce comité quelques réflexions sur l'importance de cette question, et pas seulement la protection des renseignements personnels lorsqu'il s'agit pour les députés de pouvoir faire leur travail. C'est évidemment un aspect de la question, mais j'ai également souligné dans mon discours d'hier soir combien il est important de veiller à ce que les Canadiens se sentent protégés et que des réponses appropriées soient apportées lorsqu'il y a des tentatives d'utilisation de renseignements personnels à des fins malveillantes, que ce soit avec des communautés de la diaspora qui peuvent être en désaccord avec un gouvernement avec lequel elles ont un lien ou à d'autres fins. Je me demande si vous pouvez nous faire part de vos commentaires à ce sujet et partager vos réflexions avec le Comité.
(1140)
     En décembre dernier, j'ai publié une déclaration avec le rapporteur spécial des Nations unies sur la vie privée et les droits de l'homme, et j'ai souligné le lien entre la protection de la vie privée et d'autres droits fondamentaux. Cela inclut les droits démocratiques, donc en protégeant la vie privée, qu'il s'agisse de la vie privée des parlementaires, des électeurs ou des citoyens, nous pouvons voir qu'il y a des chevauchements avec d'autres secteurs. C'est pourquoi il est si important de protéger la vie privée pour elle-même, mais aussi parce qu'elle soutient et promeut d'autres droits fondamentaux. C'est une question qui est soulevée dans ce cas. Je serai certainement intéressé de voir où l'on en est à l'adresse... La question du privilège parlementaire est une question qui relève de la Chambre des communes, bien entendu, mais nous serons certainement attentifs et informés à ce sujet.
    Il y a une proposition de modification de la Loi électorale du Canada concernant les obligations des partis politiques en matière de protection de la vie privée, ce qui est un autre exemple d'intersectionnalité. Mon bureau a un rôle à jouer, mais il y a d'autres régulateurs, comme le Bureau du commissaire aux élections fédérales. C'est donc un domaine où je travaille en étroite collaboration avec d'autres organismes de réglementation lorsqu'il y a des zones de chevauchement, et nous suivrons l'évolution de la situation.
    Informer les parlementaires, dans ce cas, et le public...? Il est intéressant de noter qu'au cours du débat d'hier soir, le premier ministre de la Colombie-Britannique, M. Eby, a annoncé... Il se trouve que j'ai vu cette déclaration sur Twitter et que, bien entendu, elle contenait un lien vers un site Web du gouvernement de la Colombie-Britannique.
    L'information des personnes concernées et, d'une manière générale, du public sur ce qui se passe fait-elle partie du processus visant à garantir la protection de la vie privée?
    Si nous parlons d'atteintes à la vie privée dans le secteur privé ou public, l'un des éléments est que l'organisation doit avertir mon bureau et les personnes concernées le plus tôt possible. C'est l'un des mécanismes permettant de fournir ces informations, et il existe ensuite des mécanismes permettant de prendre des mesures de protection, de prévention et de résolution des problèmes.
    Nous traitons des plaintes concernant des violations de la vie privée, par exemple, avec les services de localisation du gouvernement, BGIS. Nous avons lancé une enquête sur la violation de la vie privée chez Affaires mondiales Canada. Les atteintes à la vie privée sont donc un sujet qui nous préoccupe. Elles sont de plus en plus fréquentes et nous avons un rôle important à jouer à cet égard.
     Je vous remercie, monsieur le commissaire.
     J'apprécierais certainement, si vous avez des... Je n'ai pratiquement plus de temps, mais si vous avez d'autres commentaires à transmettre au Comité et, si vous en avez l'occasion, envoyez-les à... Comme le comité PROC sera, je l'espère, saisi de cette question dans un avenir proche, je vous encourage à lui faire part de vos sentiments et de vos réactions.
     Merci, monsieur Kurek.
    Je cède maintenant la parole à M. Bains pour les cinq prochaines minutes.
    Monsieur Bains, vous pouvez y aller, je vous prie.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Bien entendu, je vous remercie, monsieur Dufresne, de vous être joint à nous à nouveau aujourd'hui.
    Je suis curieux d'en savoir un peu plus. Quelle est la taille de l'équipe avec laquelle vous travaillez? De quelles ressources disposez-vous? Cela vous permet-il d'être plus proactif dans l'engagement des priorités stratégiques? Où en êtes-vous avec votre bureau et votre équipe?
    Nous avons environ 215 employés au CPVP et nous avons proposé un financement budgétaire de 34 millions de dollars pour mon bureau dans le budget principal des dépenses pour 2024-25. Nous avons eu une augmentation de 4,5 millions de dollars par rapport à l'année précédente. La moitié de cette somme est imputable aux augmentations liées aux négociations collectives, de sorte qu'il ne s'agit pas vraiment d'une augmentation de notre budget ou de notre capacité à faire notre travail; il s'agit simplement d'un maintien. Nous avons bénéficié d'un financement temporaire, dans le cadre du budget 2023, de 2,4 millions de dollars pour cette année, afin de nous aider à résorber l'arriéré et les atteintes à la vie privée.
    Nous avons besoin d'augmentations de nos budgets sur une base permanente. Ce financement supplémentaire est utile et très important, mais il aura une fin, et les défis ne cesseront pas. Les atteintes à la vie privée se multiplient. Elles se produisent à plus grande échelle. Nous constatons qu'elles sont plus complexes et que la technologie rend les choses plus difficiles.
    Il est nécessaire de disposer d'un financement plus permanent dans ce domaine. En ce qui concerne plus spécifiquement le travail plus proactif et de promotion, nous aurons également besoin de ressources supplémentaires dans ce domaine, en particulier si le projet de loi C‑27 est adopté. Le projet de loi C‑27 donnerait de nouvelles responsabilités à mon bureau du point de vue de l'application, avec des pouvoirs d'ordonnance, mais aussi, ce qui est tout aussi important, davantage de possibilités d'orientation pour aider les organisations et les petites et moyennes entreprises à connaître leurs obligations, pour apporter de la clarté à cette industrie, qui a besoin d'autant de certitude que possible pour faire son travail et pour savoir quelles sont les attentes.
    Le projet de loi C‑27 contient des dispositions très intéressantes qui permettraient l'élaboration de codes de pratique et de programmes de certification. Ce sont des choses que les entreprises du monde entier demandent pour leur donner plus de certitude, et je jouerais un rôle en les approuvant et en apportant plus de certitude juridique.
    Il y a beaucoup de choses que nous pourrions faire. Les ressources limitent ces possibilités. Bien entendu, les ressources publiques doivent être utilisées de manière judicieuse et prudente. Nous examinons la question. Nous avons fait des demandes. Nous allons continuer à le faire de manière prudente sur le plan fiscal.
(1145)
    Il est clair que vos obligations continuent d'évoluer et que votre champ d'action s'élargit. Au fur et à mesure des avancées technologiques, vous devez continuer à vous développer à partir de là, et je comprends cela.
    Pouvez-vous développer l'exemple du bac à sable réglementaire que vous avez fourni, et peut-être même le balayage des données? Quels sont les critères que vous utilisez?
    En ce qui concerne les bacs à sable pour les organisations, nous ne disposons pas actuellement des ressources nécessaires pour les offrir, mais mes homologues internationaux le font, et ils le font avec les entreprises, de sorte qu'ils disent: « Vous pouvez venir ici, et vous pouvez tester cette nouvelle technologie dans un espace sécuritaire au sein duquel l'organisme de réglementation peut fournir des renseignements, et prendre en charge les éventuels risques ». Nous sommes en mesure de fournir des conseils proactifs et d'être consultés, et nous avons des services pour cela, mais pas au point d'offrir des bacs à sable. C'est quelque chose que j'aimerais pouvoir faire. Je pense que ce serait une bonne chose pour les Canadiens et pour l'industrie.
    Nous avons déterminé que nous aurions besoin d'un financement annuel continu, une augmentation d'environ 25 millions de dollars pour le projet de loi C‑27, afin de fournir ces services de manière optimale sur la base de ces nouvelles autorisations.
    En ce qui concerne le balayage auquel vous avez fait référence, avec nos partenaires, nous examinons un certain nombre de sites Web et voyons... Je n'ai pas la formule aléatoire utilisée par l'équipe, mais l'objectif est de dire que nous allons effectuer des contrôles ponctuels et voir... Y a-t-il des tendances et des préoccupations qui se dégagent? Voyons-nous des sites Web qui utilisent ce que nous appelons des pratiques trompeuses ou des schémas sombres, c'est-à-dire des outils de communication qui amènent les gens à prendre de mauvaises décisions et qui les trompent parfois?
    Dans ce document, vous avez parlé de techniques d'incitation. Pouvez-vous nous en donner quelques exemples? Avant de manquer de temps, je suis curieux de savoir si vous pouvez ajouter...Devrions-nous mener une campagne de sensibilisation à travers le Canada pour nous assurer que les gens savent ce qu'il faut éviter et quels sont les types de techniques d'incitation qui existent?
    Monsieur Bains, votre temps est écoulé, mais Monsieur Dufresne, si vous le pouvez, répondez rapidement à cette question, s'il vous plaît.
    Très rapidement, la technique du «  coup de pouce » signifie que vous rendez un choix très facile à faire et un autre très difficile à faire. Lorsque vous rendez un mauvais choix très facile à faire, vous le poussez vers ce mauvais choix.
     Merci, monsieur Bains.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Dufresne, je vais encore profiter de votre présence pour vous poser des questions qui me sont posées par mes concitoyens de Trois‑Rivières.
    L'autre jour, quelqu'un m'a posé la question suivante. Quand une compagnie dit qu'on doit accepter les témoins de connexion strictement nécessaires, qui dit que ces témoins sont strictement nécessaires? Y a-t-il une norme? Est-ce plutôt ce que la compagnie considère comme étant strictement nécessaire?
    C'est le point de vue de la compagnie.
    Dans la Loi, certaines dispositions indiquent que les compagnies ne devraient pas récolter plus d'information que ce qui est leur est nécessaire pour atteindre leur objectif, mais la détermination de ce qui est nécessaire est faite par l'organisation.
    Il pourrait donc y avoir un écart.
    Cela pourrait être contesté. Quelqu'un pourrait se demander si c'était vraiment nécessaire. Dans ce cas, des processus peuvent être déclenchés, y compris à mon bureau, pour examiner la question.
     Dans le domaine des technologies financières, y a-t-il des soucis particuliers à avoir sur le plan de la vie privée?
(1150)
    À quoi faites-vous référence?
    Je pense à toutes les applications tout-en-un pour faire des opérations bancaires.
    Il y a eu des discussions par rapport à cela dans le cadre du budget, récemment. Il va y avoir des propositions législatives visant à favoriser un système bancaire plus ouvert, donc avec plus de partage d'information, à la fois dans l'intérêt des consommateurs, mais aussi pour lutter contre le blanchiment d'argent.
    Dans un cas, ce sera régi par les autorités réglementaires bancaires; dans l'autre, ce sera régi par l'autorité contre le blanchiment d'argent. Dans les deux cas, je m'attends à être consulté en tant que partie prenante.
    Dans le cas de la lutte contre le blanchiment d'argent, on prévoit que, en lien avec les dispositions qui seront proposées, il y aura des règlements pour que j'approuve des codes de bonnes pratiques.
    Je pense que ces propositions pourront certainement favoriser l'innovation et la facilité, pour les gens, de communiquer et d'avoir des services bancaires, tout en protégeant la vie privée en premier lieu. Mon rôle sera de m'assurer que ces innovations ne se feront pas au détriment de la vie privée.
    On peut croire que dans le cadre de cette innovation, qui s'annonce bénéfique, on va quand même pouvoir protéger le droit fondamental à la vie privée.
    Je vais continuer de m'en assurer avec les pouvoirs qui me sont conférés par la loi. Dans le cadre d'un nouveau projet de loi, je donnerai mon avis au comité pertinent et lui dire, le cas échéant, si je crois qu'on doit renforcer le texte. Je vais certainement être très actif pour soulever des préoccupations, comme je l'ai fait dans d'autres domaines, comme ceux de la cybersécurité et de la sécurité nationale.
    Comme je l'ai souvent dit, ce n'est pas un jeu à somme nulle. On ne doit pas dire qu'on ne peut pas avoir d'innovation sans sacrifier la vie privée. Tout cela demande du travail et de la consultation. Par exemple, l'an dernier, avec mes collègues du Bureau de la concurrence et du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, on a créé un forum des autorités de réglementation numérique pour dire que nous voulons travailler ensemble et que nous ne voulons pas qu'il y ait de jeux à somme nulle.
    Nous venons de renouveler ce forum pour une deuxième année. Je vais le présider cette année. Nous allons chercher des résultats concrets.
     Merci.

[Traduction]

     Monsieur Green, il vous reste deux minutes et demie.
    Vous pouvez y aller, je vous prie.
    Merci beaucoup.
    Je vais vous poser deux questions assez rapidement, monsieur Dufresne.
    Vous avez indiqué que 55 % des plaintes reçues par votre bureau sont traitées dans le respect des normes de service, mais ce chiffre reste inférieur à votre objectif de 75 %.
    Pouvez-vous expliquer les mesures que vous prenez pour atteindre l'objectif de 75 %?
    Nous avons obtenu des fonds supplémentaires, ce qui nous a certes aidés.
    Nous sommes en train de réviser nos processus. Nous avons procédé à une évaluation pour voir si nous pouvions trouver des gains d'efficacité. Pouvons-nous rationaliser? Pouvons-nous résoudre les plaintes plus rapidement? Nous examinons vraiment tous ces aspects, et c'est la priorité stratégique numéro un de mon plan stratégique, l'optimisation du CPVP lui-même.
    Le financement du CPVP est-il suffisant?
    Le financement n'est pas suffisant, et il n'est pas permanent.
    Nous avons bénéficié d'un financement temporaire, qui nous a beaucoup aidés. Nous avons besoin d'un financement permanent, parce que les plaintes et les infractions sont permanentes et qu'elles augmentent. C'est une chose que j'espère...
    Le 7 mars 2023, la Commissaire à l'information du Canada a comparu devant le Comité et nous a fait part de ses observations concernant la manière dont vous êtes financés.
    En ce qui concerne le financement, je suis fermement convaincu qu'un modèle qui donne au ministre des Finances et au premier ministre le pouvoir de limiter le financement nécessaire aux agents du Parlement est contraire à notre rôle de contrôle. En tant qu'agents du Parlement, nous rendons compte directement au Parlement et non à un cabinet ou à un ministère particulier. Honnêtement, la manière dont nous sommes financés devrait refléter cette indépendance.
    Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
    Oui, je suis d'accord. Je pense qu'en tant qu'agents du Parlement, nous vous rendons compte; nous ne rendons pas compte au pouvoir exécutif. En fait, nous enquêtons sur les plaintes déposées contre le pouvoir exécutif.
    Dans mon cas, il peut y avoir une différence par rapport à mon mandat dans le secteur privé, car j'ai des mandats à la fois dans le secteur public et dans le secteur privé. La préoccupation est peut-être moindre en ce qui concerne l'enquête sur le secteur privé, mais il y a une apparence de préoccupation en ce qui concerne l'enquête sur le secteur public.
    C'est simple. Avez-vous des recommandations à faire pour que le processus de financement des fonctionnaires du Parlement soit entièrement indépendant du gouvernement?
     Dans le passé, il existait un processus selon lequel les demandes étaient examinées par un comité de parlementaires. Je crois qu'il était présidé par le bureau du président, avec des représentants de tous les partis, avant d'être transmis au Conseil du Trésor. Ce n'était pas totalement indépendant, mais cela permettait certainement une meilleure surveillance.
    Il y a le cas du Directeur parlementaire du budget, et celui d'Élections Canada. L'idée est d'avoir moins d'approbation de la part du Conseil du Trésor et de l'exécutif et plus d'approbation de la part des présidents ou des chambres. Il existe des outils, et je pense que l'élément clé est une plus grande implication du législateur.
(1155)
    Merci, monsieur Green.
    Monsieur Dufresne, nous allons passer à quatre minutes. Je vais céder la parole à M. Brock, puis ce sera au tour de Mme Khalid.
    Nous allons procéder à quelques votes, je dois donc nous laisser un peu de temps pour cela.
    Monsieur Brock, vous avez la parole pour les quatre prochaines minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci, messieurs, pour votre présence.
    Monsieur le commissaire, je vais me consacrer à vous pendant les quatre minutes qui me sont imparties.
    Est-il exact, monsieur, que mon collègue M. Barrett est le seul parlementaire à avoir déposé une plainte particulière et à avoir demandé à votre bureau d'enquêter sur les circonstances à l'origine de l'affaire de l'application ArnaqueCan?
     La plainte actuelle a effectivement été déposée en réponse à la demande de M. Barrett...
    Était-il le seul parlementaire à avoir déposé une plainte?
     Mon équipe peut me corriger si je me trompe, mais j'ai cru comprendre que c'était le cas.
     D'accord.
    Avez-vous reçu des plaintes anonymes d'une autre source concernant le fiasco lié à l'application ArnaqueCan?
    Je n'ai pas cette information et je ne suis pas sûr que ce soit nécessairement une information que je rendrais publique s'il s'agissait d'une situation anonyme. Je ne sais pas comment répondre à cela.
    Je vais être plus précis.
     Avez-vous reçu des plaintes ou des préoccupations de la part de fonctionnaires ou d'employés actuels ou anciens de l'ASFC?
    Là encore, la Loi sur la protection des renseignements personnels m'impose d'importantes obligations de confidentialité.
    J'avais anticipé cette réponse. Je me suis quand même permis de poser la question.
    Je voudrais revenir sur un point que je ne suis pas sûr d'avoir bien compris, à savoir l'incapacité de votre part à prévoir des conséquences significatives en cas de violation de la loi.
     Ai-je bien compris?
     Oui, vous avez bien compris.
    Je n'ai pas actuellement la possibilité d'émettre des ordonnances contraignantes en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
    D'accord. Et qu'en est-il des sanctions pécuniaires?
    C'est la même chose. Il n'y a pas de sanctions pécuniaires.
    D'accord. Cette question se pose depuis que la loi a été modifiée. Est-ce exact?
    C'est exact, et c'est une préoccupation à la fois du côté du secteur privé et du côté du secteur public.
     Vous avez formulé plusieurs recommandations dans ce sens dans votre rôle actuel, et je suis sûr que vos prédécesseurs ont probablement exprimé des préoccupations très similaires aux membres du comité. Littéralement, depuis 2015, le gouvernement de Justin Trudeau n'a manifesté aucune volonté d'apporter des conséquences significatives à ces violations. Est-ce exact?
    Le projet de loi C‑27 a été présenté par le gouvernement actuel. Il me donnerait la possibilité de donner des ordres et d'infliger des amendes. Cela concerne le secteur privé.
     En ce qui concerne le secteur public, il n'y a pas de projet de loi pour le moderniser.
    À l'heure actuelle, le ministère de la Justice a publié un document de consultation dans lequel il recommande un mécanisme de conformité plus important, et je l'encourage certainement à aller de l'avant.
    Bien entendu, et à quel moment cette recommandation a-t-elle été formulée par le ministère de la Justice?
     La recommandation a été faite en 2021. Depuis lors, des consultations ont été menées afin d'obtenir une perspective autochtone sur la question.
    Mon bureau, sous la direction de mon prédécesseur, a bien sûr soutenu ce projet, tout comme moi.
     J'ai une autre petite question concernant l'application ArnaqueCan.
     Il existe de très fortes allégations selon lesquelles un vice-président de l'ASFC du nom de Minh Doan aurait intentionnellement supprimé des courriels pertinents datant de quatre ans. Ces courriels auraient été très utiles à la vérificatrice générale lorsqu'elle a effectué son examen, et ils auraient été utiles à l'enquêteur interne, qui continue d'enquêter sur les actions de plusieurs acteurs.
    Pensez-vous qu'elles vous auraient été utiles si vous y aviez eu accès? Dans l'affirmative, monsieur Dufresne, que pensez-vous de votre rôle à titre de commissaire par rapport à ces allégations?
     Pourrions-nous avoir une réponse très brève, s'il vous plaît?
     Si je devais faire des commentaires à ce sujet, ce serait à la fin d'une enquête si nous avions constaté des inquiétudes, donc ce n'est pas quelque chose que je commenterais à ce stade.
     Madame Khalid, vous disposez de quatre minutes. Allez-y, je vous prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos témoins d'être présents aujourd'hui. J'apprécie toujours beaucoup votre contribution.
    Je voudrais juste revenir sur un point soulevé par mon collègue, M. Green, en ce qui concerne l'équilibre des pouvoirs, et sur quelque chose que vous avez dit également.
    Est-il possible d'établir une séparation complète entre les activités de votre bureau et celles du gouvernement, ainsi que l'interaction entre les deux?
(1200)
     Nous travaillons très étroitement en tant qu'agents du Parlement. Il ne s'agit pas d'une séparation parfaite et complète. Nous sommes proposés par le pouvoir exécutif, mais nous sommes approuvés par la Chambre, donc il y a une certaine forme d'indépendance.
     Toutefois, nous travaillons dans le cadre du service public et nous appliquons un certain nombre de procédures. Nous devons également travailler en étroite collaboration avec le Conseil du Trésor, qui fournit des conseils sur le respect de la loi sur la protection de la vie privée.
     Vous m'avez entendu recommander des pouvoirs de conformité forts, et je crois que c'est nécessaire. Je crois aussi fermement à la collaboration et à la prévention. Je travaille donc en étroite collaboration avec les départements pour les informer sur la protection de la vie privée et les encourager à soulever les problèmes à l'avance afin que nous puissions les prévenir.
    Comment travaillez-vous avec les parties prenantes pour répondre aux besoins changeants des Canadiens en matière de protection de la vie privée?
    Nous menons de nombreuses actions de sensibilisation auprès de tous les secteurs et de la société civile.
    J'ai eu une discussion très intéressante avec des enfants, des jeunes parlementaires. Je suis très intéressée par les défis qu'ils doivent relever, par la manière dont ils perçoivent les questions de protection de la vie privée et par la façon dont ils interagissent avec leurs écoles. Je souhaite que la protection de la vie privée fasse partie d'un programme scolaire obligatoire. Il ne s'agit certainement pas d'une compétence fédérale exclusive, et je travaille avec mes collègues provinciaux sur ce point.
     Je travaille en étroite collaboration avec l'industrie. Je reçois bien sûr des plaintes à leur sujet, mais il est important pour moi de comprendre leurs réalités. Nous voulons des lois et des règles qui soient logiques et qui protègent le droit fondamental des Canadiens à la vie privée, mais qui soient également utiles à l'industrie. Je veux que le Canada soit compétitif et innovant.
    J'ai dit que les trois priorités de ma vision de la vie privée sont que la vie privée est un droit fondamental, mais que c'est la vie privée qui soutient l'innovation et l'intérêt public et qui génère la confiance.
     Il est important que je comprenne ces réalités, et il est important qu'ils comprennent mes préoccupations. C'est un dialogue très utile, dans lequel ils me présentent les défis auxquels ils sont confrontés sur le terrain, et je leur fais part des inquiétudes exprimées par beaucoup de Canadiens qui estiment que leur vie privée n'est pas suffisamment protégée.
     Ce dialogue se poursuit et, si les problèmes ne sont pas résolus, il existe des moyens de faire respecter nos lois. Même par le biais de la conformité, je pense que dans certains cas, nous pouvons constater qu'il y a une violation, mais nous faisons une recommandation, et l'organisation l'apprend. Ils en parlent leurs homologues, puis mettent en œuvre des pratiques exemplaires.
     Je sais qu'il y a eu des conversations sur les idées numériques pour essayer de contourner un grand nombre des problèmes dont vous avez parlé. Quel est votre point de vue à ce sujet? Pensez-vous que cela soit nécessaire, et comment cela fonctionne-t-il avec nos lois sur la protection de la vie privée?
     C'est un exemple de collaboration étroite avec mes homologues provinciaux et territoriaux en tant que commissaire à la protection de la vie privée. En octobre, pas ce mois-ci, mais l'année précédente, nous avons publié une déclaration commune sur l'identification numérique du point de vue de la protection de la vie privée. Nous avons indiqué qu'il s'agissait d'un moyen de faciliter l'interaction entre la population canadienne et le gouvernement, entre autres, mais qu'il fallait le faire en protégeant la vie privée.
    Nous avons donné un certain nombre de conseils à ce sujet. L'anonymat doit être préservé, et il ne doit pas s'agir d'un dépôt central. Il y a eu un certain nombre de commentaires. Nous avons expliqué que c'est quelque chose qui pourrait certainement être utile, et nous avons fourni des conseils clairs sur la manière de le faire concrètement.
     Une carte d'identité numérique entre les mains d'une entreprise privée présenterait-elle des risques importants pour la population canadienne?
     Tous les aspects de l'obtention d'une identification numérique ou d'informations biométriques sur quiconque, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, sont un domaine auquel les gens doivent être attentifs. Nous avons actuellement des projets de lignes directrices sur l'utilisation des informations biométriques, l'un pour le secteur privé et l'autre pour le secteur public. Nous avons reçu de bonnes réactions de la part de l'industrie et des Canadiens à ce sujet. Nous nous efforçons de les finaliser.
    Il est certain que tout type d'innovation, numérique ou autre, apporte beaucoup d'avantages, ou peut en apporter. Nous devons veiller à ce que cela ne se fasse pas au détriment de la vie privée, et il existe des moyens d'y parvenir.
     Je vous remercie, madame Khalid.
    Merci, monsieur Dufresne. Je vous remercie d'être ici au nom du comité aujourd'hui. Je vous remercie pour le travail important que vous accomplissez au nom des Canadiens.
    Monsieur Roulx, je vous remercie d'être présent pour apporter votre soutien.
    Chers collègues, nous allons maintenant passer au Budget principal des dépenses.
    Je vais demander au Comité si nous avons le consentement unanime pour mettre aux voix le Budget principal des dépenses 2024-25 renvoyé au Comité.
    Ai-je votre consentement pour procéder à ce vote?
    Des voix: D'accord.
     D'accord. Merci, messieurs Green et Villemure.
    Le crédit 1 sous la rubrique Bureau du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, crédit 1 sous la rubrique Bureau du conseiller sénatorial en éthique, crédit 1 sous la rubrique Commissariat au lobbying, crédits 1 et 5 sous la rubrique Commissariats à l'information et à la protection de la vie privée au Canada sont-ils adoptés?
COMMISSARIAT AU LOBBYING
Crédit 1 – Dépenses du Programme..........5 391 678 $
    (Le crédit 1 est adopté avec dissidence.)
COMMISSARIAT AUX CONFLITS D'INTÉRÊTS ET À L'ÉTHIQUE
Crédit 1 – Dépenses du Programme..........7 708 333 $
    (Le crédit 1 est adopté avec dissidence.)
BUREAU DU CONSEILLER SÉNATORIAL EN ÉTHIQUE
Crédit 1 – Dépenses du Programme..........1 451 267 $
    (Le crédit 1 est adopté avec dissidence.)
COMMISSARIATS À L'INFORMATION ET À LA PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE DU CANADA
Crédit 1 – Dépenses du Programme—Commissariat à l’information du Canada..........15 344 268 $
Crédit 5 – Dépenses du Programme—Commissariat à la protection de la vie privée du Canada..........30 553 547 $
    (Les crédits 1 et 5 sont adoptés avec dissidence.)
    Le président: Dois-je faire rapport du Budget principal des dépenses 2024-2025 à la Chambre?
    Des voix: D'accord.
    M. Michael Barrett: Avec dissidence.
    Le président: Merci.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance quelques instants pour accueillir le groupe de témoins suivant.
    Je vous remercie encore une fois, monsieur Dufresne.
    La séance est suspendue.
(1200)

(1230)
    Nous reprenons la séance.
    Malheureusement, des problèmes techniques sont survenus avec les écouteurs, et les invités prévus pour la deuxième heure ne sont plus disponibles pour venir témoigner aujourd'hui. Je demanderai à la greffière de voir si nous pouvons les réinviter à un autre moment.
    Il est regrettable que nous nous trouvions dans cette situation. C'est la nature des réunions hybrides, malheureusement.
     Vous pouvez y aller, monsieur Barrett.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Pouvez-vous confirmer que les témoins ont tous reçu les bons casques d'écoute? Il est tout simplement important de noter que nous approuvons les budgets de ces études. Nous engageons des frais pour l'envoi des casques et pour l'achat des casques en tant que tels. Bien que la situation soit regrettable et que nous remercions les témoins d'avoir accepté les invitations à comparaître, nous avons des normes à respecter. Il s'agit d'un lieu de travail, et nous devons assurer la santé et la sécurité de chaque personne présente sur ce lieu de travail. Cela requiert l'utilisation d'équipement approprié. Je suis sûr que nous avons toujours envoyé des casques d'écoute auparavant. Mais la vie est ainsi faite, et j'en suis conscient. Ce désagrément est regrettable.
    Je veux simplement confirmer que l'erreur n'a pas été commise par le Comité ou la Chambre.
    Je laisse à la greffière le soin de répondre à cette question, monsieur Barrett. Si j'ai bien compris, les casques d'écoute ont été correctement envoyés. Dans certaines circonstances, que je n'évoquerai pas pour le bien des témoins, les casques n'ont pas été mis à leur disposition.
    Madame la greffière, souhaitez-vous aborder cette question?
    Oui. Tout à fait. Je vous remercie de votre question. C'est une bonne question.
    Pour répondre à M. Barrett, je précise que des casques d'écoute ont effectivement été envoyés aux deux témoins qui devaient comparaître le 2 mai, en temps voulu pour cette comparution. Ces deux personnes sont très occupées et voyagent dans le monde entier. Ils se trouvaient quelque part au Canada à l'époque, mais ils sont actuellement en train de parcourir le monde. Ils ont été informés qu'ils devaient utiliser le bon casque d'écoute pour pouvoir comparaître devant le Comité.
    L'un des témoins a précisé qu'il a reçu le casque d'écoute, mais qu'il l'a laissé quelque part en cours de route, en raison du décalage horaire et du passage d'une ville à l'autre.
    Quant à M. Giguère, il se trouvait aux États-Unis. Un casque d'écoute lui a été envoyé. Nous avons constaté hier que le casque était toujours dans l'installation aux États-Unis, alors nous avons fait un suivi à cet égard. Il s'est procuré un des casques d'écoute approuvés, dont le coût d'achat pourra être remboursé. Les tests ont tous été effectués. Néanmoins, comme cela arrive parfois pour une raison que nous ne comprenons pas, le son ne semble pas fonctionner.
    L'un des témoins a oublié le casque d'écoute quelque part, mais il a été envoyé, et les témoins ont été informés de cette nécessité.
    J'ai compris. Merci.
    Je vous remercie, monsieur Barrett.
    La situation est regrettable. Il est évident que de nombreuses ressources sont consacrées au bon fonctionnement de ces réunions, mais voilà où nous en sommes.
     Madame Khalid, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Étant donné que l'avis de motion a été présenté en bonne et due forme, je propose ce qui suit:
Que, compte tenu des commentaires du chef de l'opposition la semaine dernière dans lesquels il a laissé entendre qu'il utiliserait la clause dérogatoire s'il en avait l'occasion, et des déclarations antérieures selon lesquelles le Parti conservateur du Canada exigerait une carte d'identité numérique pour accéder au contenu d'Internet, que le comité fasse rapport à la Chambre que le comité:
a) reconnaît l'importance de la Charte canadienne des droits et libertés pour protéger les droits de tous les Canadiens, y compris le droit à la vie privée; et
b) s'oppose à l'utilisation par le parlement fédéral de la clause dérogatoire dans tous les cas.
    Monsieur le président, je vérifie auprès de vous que tout est en ordre avant de parler de la motion.
(1235)
    Madame Khalid, j'ai réfléchi à cette motion au cours des deux derniers jours. Je vais la déclarer irrecevable pour plusieurs raisons, dont la moindre n'est pas qu'elle fait allusion à quelques reprises à la clause dérogatoire de la Charte canadienne des droits et libertés, laquelle relève de la compétence du comité de la justice, je crois.
     Ma deuxième raison est liée à ce que je considère comme une affirmation hypothétique relative à la carte d'identité numérique du chef du Parti conservateur.
    Je déclare la motion irrecevable, madame Khalid, parce qu'elle dépasse la portée et le mandat du Comité.
    Monsieur le président, je voudrais contester votre décision, parce que j'ai vu le Comité étudier de nombreuses motions formulées de manière beaucoup plus vague.
    Il s'agit d'une question importante qui concerne la vie privée et les droits énumérés dans notre charte. J'estime que notre comité a l'obligation de se pencher sur cette question.
     Mme Khalid aimerait contester la décision de la présidence.
    Je vais demander à la greffière qu'elle mette la question suivante aux voix: la décision de la présidence est-elle maintenue?
    Veuillez procéder au vote, madame la greffière.
    (La décision de la présidence est annulée par 7 voix contre 3. [Voir le Procès-verbal])
    La décision de la présidence n'est pas maintenue. Les votes contre la décision l'ont emporté.
    La motion est proposée.
    J'aimerais parler de la motion.
    Vous avez la parole, madame Khalid. Ensuite, nous donnerons la parole à M. Kurek.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous suis vraiment reconnaissante de l'occasion que vous me donnez de m'exprimer à ce sujet. J'ai été très inquiète au cours des deux dernières semaines. Je ne suis pas née dans ce pays, mais j'ai grandi ici. Je suis venue ici, et j'ai pris conscience de l'importance de notre Charte des droits et libertés parce que mes voisins d'en face ne ressemblent pas à mes voisins d'à côté. Nous ne pratiquons pas la même religion, nous portons des coquilles différentes, et nous avons des idéologies différentes, et pourtant nous vivons dans l'un des pays les plus pacifiques du monde. Lorsque j'entends des discours au sujet des conséquences de la Charte des droits et libertés et de ce à quoi ressemblera notre Constitution à l'avenir, cela me rend vraiment très inquiète.
     Dans le contexte de l'incidence des médias sociaux — de l'incidence des cartes d'identité numériques, par exemple, et du fait de les proposer —, je trouve ce que disent les partis politiques et le chef de l'opposition vraiment alarmant. Je pense qu'il est important que notre comité obtienne un engagement de la part du Parlement en ce qui concerne la manière dont nous allons avancer pour garantir le maintien de notre Charte des droits et libertés et de notre Constitution, et pour que nous continuions à nous y conformer.
    Je vais maintenant citer des articles qui affirment, en citant le chef de l'opposition, qu'il adoptera des lois criminelles par n'importe quel moyen. Il déclare ce qui suit: « Nous les rendrons constitutionnelles, en utilisant tous les outils que la Constitution autorise... Je pense que vous savez exactement ce que je veux dire ».
    Compte tenu du fait que cette personne faisait partie d'une équipe qui a essayé de faire adopter la Loi sur la tolérance zéro face aux pratiques culturelles barbares et la création d'une ligne téléphonique pour dénoncer des gens comme moi — ma mère porte un hijab, par exemple — et compte tenu de la diversité de nos voisins, je m'inquiète vraiment de savoir d'où viennent ces idées.
    Monsieur le président, je m'inquiète également lorsque nous parlons du droit des femmes au libre choix et que nous observons les manœuvres actuelles des conservateurs à la Chambre, qui se demandent si une femme peut choisir ce qu'elle fait de son corps et si nous allons criminaliser ces décisions, en utilisant tous les outils nécessaires pour contrôler ce qu'est le corps d'une femme. Les conséquences de ces paroles me semblent très graves et, vous savez, le chef de l'opposition continue d'affirmer que même si ses propositions ne répondent pas aux normes constitutionnelles, il les « rendra constitutionnelles, en utilisant tous les outils possibles ».
    Monsieur le président, cette situation est extrêmement alarmante. Si l'on ajoute à cela les préoccupations relatives à la protection de la vie privée dans nos médias sociaux, le cadre dont nous disposons en ce moment et le fait que nous sommes déjà en train d'éprouver les limites de la protection des droits des Canadiens dans notre pays — y compris le droit à la vie privée et les droits des minorités, qu'il s'agisse de membres de la communauté LGBT, de membres de différents groupes religieux ou du droit des femmes au libre choix —, la situation est vraiment inquiétante. Je pense qu'il incombe à notre comité d'adopter cette motion et de la faire adopter à la Chambre.
    Au sein du comité de l'éthique, nous avons étudié la collecte de données, etc., et je parle plus particulièrement du droit à la vie privée et de l'identification numérique pour la collecte d'informations auprès des Canadiens.
     Le chef de l'opposition propose maintenant de laisser les données confidentielles des Canadiens entre les mains d'une société comme Pornhub et, là encore, il s'agit d'une pente glissante quant à la mesure dans laquelle cela va se produire. Comment conservons-nous et protégeons-nous ces données? Ces données devraient-elles se trouver là? Lorsque nous parlons du droit à la vie privée, nous devons vraiment nous assurer que ce droit est préservé au sein de l'industrie et de notre gouvernement et que les droits des Canadiens sont protégés. Nous avons vu ce qui s'est passé dans le cas du site Web d'Ashley Madison, en raison d'un piratage, par exemple. Nous avons vu des députés détenant une cote de sécurité de niveau très secret faire l'objet d'un chantage en raison de leur utilisation d'Internet et des photos qu'ils ont fait circuler.
    Monsieur le président, je mentionne de nouveau l'importance de veiller à ce que le gouvernement fédéral ait la capacité de garantir le maintien et la protection de notre Constitution. Cette capacité importe pour tous les parlementaires.
    Monsieur le président, lorsque quelqu'un vous dit quelque chose, vous le croyez, et on nous a effectivement dit que notre Constitution comportait une solution de rechange pour le chef de l'opposition. Nous devons nous assurer que la façon dont les parlementaires agissent nous permet de protéger les droits des Canadiens et notre Constitution. J'espère que nous pourrons adopter cette motion très rapidement.
    Je vous remercie de votre attention.
(1240)
    Je vous remercie, madame Khalid.
    Sur la liste des intervenants, il y a MM. Kurek, Barrett, Brock et Housefather.
    Vous avez la parole, monsieur Kurek.
     Merci, monsieur le président.
    Il est très intéressant d'entendre les libéraux parler. J'aimerais aborder deux points. Premièrement, il s'agit d'une attaque sournoise contre un projet de loi qui a été adopté par la Chambre des communes il y a seulement quelques mois à l'aide d'une pluralité de voix, à savoir le projet de loi S-210.
    Ce qui est intéressant, c'est que le projet de loi a bénéficié d'un certain appui de la part de tous les partis, mais en fait, ce que Mme Khalid et sa motion semblent faire, c'est défendre les entreprises en qui elle a déclaré ne pas avoir confiance. Elle veut les autoriser à distribuer du matériel pornographique violent à des mineurs. Monsieur le président, cette idée est stupéfiante, choquante et, pour être franc, absolument dégoûtante.
    Je me suis beaucoup intéressé au projet de loi S-210 en raison des effets néfastes que l'exposition d'un jeune à des contenus violents et explicites peut avoir sur sa santé mentale et sa capacité à nouer des relations productives. Le fait que le Parti libéral obéisse aux ordres d'une société comme MindGeek, qui exploite des sites Web comme Pornhub qui, de façon délibérée... Le commissaire à la protection de la vie privée a indiqué plus tôt aujourd'hui qu'il venait d'achever une étude sur certains des problèmes de protection de la vie privée qui sont liés à cela. Il est stupéfiant que les libéraux s'opposent à cette mesure, qui a obtenu l'appui de tous les sénateurs.
    Monsieur le président, vous m'avez certainement entendu parler longuement de certaines des frustrations que j'éprouve à l'égard de l'autre endroit, comme nous l'appelons, mais lorsque le projet de loi S-210 a été adopté à l'unanimité par le Sénat, je crois que plus de 40 options différentes ont été présentées pour permettre à un site hébergeant du contenu explicite de vérifier l'âge d'une personne. Cependant, les libéraux ne se soucient pas des faits. Ils veulent faire de la politique et laisser entendre que le problème est lié à une question d'identité numérique.
    Monsieur le président, je vous le dis, leur but est de diviser les parlementaires pour mieux régner. Ils obéissent aux ordres de certaines des pires entreprises de l'histoire, comme l'ont révélé le bon travail des parlementaires canadiens ainsi qu'un article du New York Times qui décrivait la situation. Il est absolument incroyable que ces députés libéraux soutiennent cela.
    Je pourrais certainement en dire beaucoup plus à ce sujet, mais il est évident que soit ils n'ont pas lu le projet de loi S-210, soit ils ne se sont pas suffisamment souciés de faire des recherches sur ce qui est proposé et sur la manière dont ces mesures peuvent réellement protéger les jeunes, soit ils essaient intentionnellement de diviser les parlementaires pour détourner leur attention d'un programme, et je ne prétendrai même pas savoir ce que cela suppose, car cela dépasse certainement ce qui est acceptable.
     Monsieur le président, si vous le permettez, je voudrais parler brièvement de certaines des affirmations relatives à la Charte. Une fois de plus, je pense qu'il ne s'agit que d'une tentative de diviser les Canadiens pour créer une diversion. Ce que le chef de l'opposition a dit très clairement, c'est que lorsqu'il est question des criminels les plus odieux de notre histoire, comme le tireur de la mosquée de Québec, les réformes de la justice qu'il propose garantiraient que la seule façon dont des criminels odieux comme celui-là pourraient quitter la prison serait dans un cercueil.
    Je sais que mon collègue de Leeds-Grenville-Thousand Islands et Rideau Lakes a dit quelque chose de semblable à la Chambre des communes, mais, monsieur le président, les libéraux ne semblent pas s'en préoccuper. Ils se préoccupent davantage d'essayer, qui sait, de se faire du capital politique à bon marché ou quelque chose du genre, de diviser les parlementaires afin de détourner l'attention, plutôt que d'avoir des discussions sérieuses au sujet de la réforme de la justice. En ce qui concerne la clause dérogatoire, c'est comme si les libéraux oubliaient que l'article 33 fait partie de la Charte des droits et libertés. Sont-ils en train de tromper les Canadiens en les induisant en erreur à ce sujet? Cela nous ramène aux éléments de base du système démocratique de type Westminster, à savoir que le Parlement est l'autorité législative suprême du pays. J'ose espérer que leurs intentions ne sont pas malveillantes, mais cela mène certainement... et je laisserai les Canadiens juger de leurs intentions.
(1245)
    En ce qui concerne les réformes du système de justice pénale envisagées et suggérées par le chef de l'opposition, elles sont très claires, et la liberté, monsieur le président, est une arme à double tranchant, pour ceux avec qui vous êtes d'accord et ceux avec qui vous êtes en désaccord. Les membres du Parti libéral laissent entendre qu'ils défendent la Charte alors qu'ils font littéralement — et il ne s'agit pas d'une utilisation figurée du mot « littéralement » — partie du seul gouvernement de l'histoire du Canada à avoir suspendu délibérément les droits des Canadiens garantis par la Charte... C'est ce qu'ils ont fait, et il a été établi qu'ils l'avaient fait illégalement.
     Monsieur le président, il est incroyable qu'ils utilisent ce genre de tactiques, qu'ils manipulent les gens, qu'ils fassent... je ne sais même pas s'il y a des termes parlementaires assez forts pour décrire ce que font les libéraux dans ce dossier.
    S'ils veulent discuter de l'utilisation de la clause dérogatoire, je suis heureux de le faire, monsieur le président, parce qu'il est évident que les criminels les plus odieux de l'histoire du Canada méritent d'être derrière les barreaux. Je mets les membres du Parti libéral au défi d'aller dire aux électeurs que ces personnes devraient déambuler librement dans les rues du Canada. Je les mets au défi de s'adresser à nouveau aux électeurs lorsqu'il s'agit de la question dont j'ai parlé en premier, lorsqu'il s'agit de soutenir que certains des pires acteurs du monde des affaires, dont certains ont même délocalisé leurs activités hors du Canada, devraient en quelque sorte avoir un laissez-passer pour distribuer du contenu explicite à des mineurs, même s'ils connaissent les effets dévastateurs que cela a sur la santé mentale de nos jeunes, monsieur le président. Nous voyons les pires exemples de ce à quoi tant de gens pensent lorsqu'ils évoquent les hommes politiques.
    Monsieur le président, je pourrais certainement en dire beaucoup plus à ce sujet, qu'il s'agisse de la constitutionnalité de ce dont nous avons parlé, de l'hypocrisie des membres du Parti libéral ou du fait qu'il est stupéfiant qu'ils essaient de diviser les parlementaires pour détourner ainsi l'attention et se faire du capital politique à bon marché — c'est peut-être parce qu'ils sont désespérés, étant donné que ce sont en fait les Canadiens qui font des choix pendant les élections et qu'aucun parlementaire ne devrait jamais tenir ces choix pour acquis.
    Monsieur le président, si vous le permettez, je proposerai un amendement parce que, selon moi, il y a un argument valable à faire valoir. C'est une occasion à saisir. Éliminons le côté politique de ce que les libéraux essaient de faire croire aux Canadiens, et passons à un stade où nous pourrons avoir une véritable discussion à propos de ce que signifie réellement la protection des droits et libertés des Canadiens.
    Je propose donc de supprimer la première partie de la phrase, c'est-à-dire jusqu'aux mots « le comité », de conserver le paragraphe a), mais de supprimer le paragraphe b).
    Monsieur le président, nous veillerons à ce que la greffière reçoive une copie de ce document dans un instant.
(1250)
    Faites-moi plaisir, monsieur Kurek, et répétez, s'il vous plaît, ce que vous avez dit à propos votre amendement, si vous le voulez bien.
     Supprimez la première partie du premier paragraphe, et ne conservez que ce qui suit: « Que... le comité fasse rapport à la Chambre que le comité: ». Ensuite, conservez le paragraphe a), mais supprimez le paragraphe b).
    Alors, si j'ai bien compris, la motion dirait ce qui suit: « que le comité reconnaît l'importance de la Charte canadienne des droits et libertés pour protéger les droits de tous les Canadiens, y compris le droit à la vie privée. »
    Est-ce ce que vous proposez?
    Oui, sauf que la motion commencerait comme suit: « Que le comité fasse rapport à la Chambre que le comité: ». Ce passage serait suivi du paragraphe a), comme vous l'avez décrit.
    Nous sommes saisis de l'amendement.
    Est-il recevable?
    Oui, je déclare qu'il est recevable.
    Veuillez prendre la parole pour faire votre rappel au Règlement.
    Monsieur le président, l'ensemble de cette résolution concerne la clause dérogatoire. Cet amendement supprime toute mention de la clause dérogatoire. Il va donc à l'encontre du principe de la motion originale. Par conséquent, l'amendement ne devrait pas être recevable, et si le président le juge recevable, je conteste sa décision.
     D'accord. Veuillez attendre un instant.
(1255)

(1255)
    Le président: Monsieur Housefather, après avoir examiné l'amendement, je le déclare recevable.
    J'accepterai votre contestation, si c'est ce que vous voulez.
    Merci, monsieur le président.
    Madame la greffière, ma décision concernant l'amendement est contestée.
    Veuillez mettre la question suivante aux voix: la décision de la présidence est-elle maintenue?
    (La décision de la présidence est annulée par 6 voix contre 4.)
    Le président: Je vais poursuivre le débat sur la motion.
    Monsieur Kurek, je vois que vous avez levé la main. Je vais revenir vers vous plus tard. J'inscrirai votre nom sur la liste.
    Le prochain intervenant est M. Barrett. Veuillez prendre la parole, monsieur Barrett.
    Merci, monsieur le président.
    En ce qui concerne les commentaires du chef de l'opposition concernant l'utilisation de l'article 33, c'est-à-dire la clause dérogatoire, il est important de noter que l'article 33 en question est l'article 33 de la Charte. Il est bien sûr légal, et il fait bien sûr partie de la Charte pour une raison. Une fois que la clause a été invoquée, les lois en question sont, bien entendu, constitutionnelles.
    Lorsque nous parlons de la justification de l'utilisation de la clause dérogatoire... Écoutez, comme l'a souligné mon collègue, M. Kurek, lorsqu'une personne comme le tireur de la mosquée de Québec a pris d'assaut un lieu de culte et assassiné de sang-froid six fidèles innocents à un endroit où ils devaient se sentir en sécurité — nous devons nous sentir en sécurité lorsque nous fréquentons nos lieux de culte —, la violation de ce caractère sacré ne peut être surestimée. Pour avoir odieusement méprisé la vie des victimes de ce terrible événement, ce tireur — je ne prononcerai pas son nom, car il ne mérite pas la notoriété qu'il recherchait — mérite de passer le restant de ces jours dans une prison à sécurité maximale. Ce que nous avons constaté, c'est que ce n'est pas la réalité que cette personne devra vivre.
    Quelles sont les autres options? Cette personne sera transférée dans une prison à sécurité moyenne, puis elle finira par faire l'objet d'une décision de sous-classement et par être incarcérée dans une prison à sécurité minimale, et, finalement, elle vivra dans une maison en rangée avec d'autres délinquants, sur une rue sans murs ni barbelés.
(1300)
     J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Une prison à sécurité minimale n'est pas une maison en rangée au sein d'une collectivité. Nous pouvons au moins nous en tenir aux faits en ce moment.
    Vous débattez de la question, madame Damoff.
    La parole est à vous, monsieur Barrett.
    Monsieur le président, voici ce que je dirais à Mme Damoff. Je vous invite à visiter l'établissement Pittsburgh, situé juste à côté de ma circonscription, où les détenus de niveau de sécurité minimale vivent dans des maisons en rangée. Ils ont accès à une cuisine commune. Il n'y a qu'une seule serrure sur la poignée de la porte, et les fenêtres ne sont pas dotées de systèmes d'alarme. Les détenus portent des jeans et des t-shirts le week-end et se rendent, de leur propre chef, au lac pour pêcher. Il n'y a pas de clôture pour les empêcher de partir, et ils sont beaucoup plus nombreux que les gardiens.
    Savez-vous comment je le sais? J'étais là il y a deux semaines, je suis entré dans l'établissement. Il n'y avait pas de clôture, et rien n'empêchait les détenus de s'échapper. Les personnes qui s'y trouvent ont fait l'objet de plusieurs décisions de déclassement. Il ne s'agit pas de délinquants de niveau de sécurité minimale. Il n'y a tout simplement pas de place pour eux dans les prisons.
    Des personnes qui devraient purger leur peine dans des conditions plus restrictives vivent dans une maison en rangée. Elles étaient en train de décongeler des côtelettes de porc sur le comptoir quand je suis entré. J'ai ouvert le réfrigérateur, et il était plein à craquer de fruits et de légumes frais. L'un des habitants de la maison était assis devant la télévision et m'a souhaité la bienvenue. Ses compatriotes ne travaillaient pas ce jour-là. Ils étaient assis sur la marche et profitaient simplement du soleil qui baignait leur visage.
    C'est ce à quoi nous pouvons nous attendre lorsqu'il n'y a pas de cadre en place. La personne dont j'ai parlé précédemment, qui a perpétré un crime odieux, ne devrait quitter un établissement à sécurité maximale que dans un cercueil en pin.
    C'est de cela qu'il s'agit lorsque nous parlons de l'utilisation de la clause dérogatoire.
    Le chef de l'opposition a été explicite à ce sujet. Si cela a échappé à quelqu'un, je répète maintenant ses paroles. C'est exactement le type d'utilisation de la justice pénale qui est nécessaire.
    Nous savons que, parmi des évadés d'établissements à sécurité minimale, il y a des détenus de niveau de sécurité maximale qui ont fait l'objet de décisions de déclassement, ce qui leur a permis d'être transférés dans des établissements à sécurité moyenne, puis dans des établissements à sécurité minimale. Ces détenus ont tout simplement quitté le site pour commettre des délits encore plus odieux et faire davantage de victimes parmi les habitants des collectivités environnantes.
    Ce n'est pas ce à quoi nous nous attendons.
    Nous avons demandé à l'ancien secrétaire parlementaire du ministre de la Sécurité publique, qui occupe aujourd'hui un autre poste de secrétaire parlementaire, d'invoquer le Règlement à ce sujet.
    Il est de notoriété publique que les détenus d'établissements à sécurité minimale sont en mesure de s'évader. Au cours des deux dernières semaines, j'ai vérifié, de mes propres yeux, les conditions de vie de ces détenus. J'ai été étonné de constater que j'habitais aussi près d'eux. Je sais que des personnes qui travaillent dans cet établissement vivent dans ma collectivité. Je n'avais aucune idée des conditions qui règnent dans nos établissements à sécurité minimale. Cela n'a rien à voir avec les conditions déplorables que j'ai observées dans nos établissements à sécurité moyenne, nos installations pour l'administration des examens ou nos établissements à sécurité maximale.
    Le fait est que ce que les Canadiens pensent qu'il va se passer lorsque la justice sera rendue n'est pas nécessairement la réalité. Nous l'avons constaté. Je dispose maintenant d'une liste d'exemples d'évasions qui ont abouti à la perpétration d'autres crimes contre des personnes au sein de leurs collectivités. Voilà pourquoi il est très important d'agir.
(1305)
    Nous devons nous rappeler que nos droits en tant que Canadiens méritent d'être protégés et respectés. Lorsque ce type de déséquilibre commence à prendre forme, lorsque les droits des accusés, des condamnés et des coupables deviennent plus importants que ceux des victimes et des Canadiens innocents en général, cela me pose problème.
    On crie sur tous les toits qu'il s'agit d'intentions cachées, mais elles ne sont pas cachées. Le chef de l'opposition s'est tenu devant une salle remplie de policiers et il a déclaré qu'il fallait réformer certaines lois en matière de justice pénale. Lorsqu'on lui a demandé plus de détails, il a dit qu'il faudrait rétablir le type de réforme du système de justice pénale qui avait été proposé plus tôt et qui prévoyait des peines consécutives pour les individus qui commettent des crimes odieux.
    L'article 33 a déjà été utilisé auparavant, et je ne me prononcerai pas sur l'acceptabilité ou la pertinence de son utilisation, mais je parlerai de mes sentiments face à cette proposition. Je pense que c'est le niveau le plus élevé de transparence. C'est le summum de la transparence que de voir le chef de l'opposition, dans le contexte d'un Parlement minoritaire, dire aux Canadiens qu'il est prêt à tenir des élections aujourd'hui, et que s'il est élu, nous cesserons de faire valoir les soi-disant « droits » des personnes comme l'individu que j'ai mentionné précédemment, qui a perpétré un crime odieux… Il doit demeurer dans un établissement à sécurité maximale. Il ne devrait pas en sortir et il ne devrait pas pouvoir profiter des privilèges qu'offre l'incarcération dans un établissement à sécurité moyenne. Je suis tout à fait d'accord avec cela. La proposition du chef de l'opposition me convient tout à fait.
    Cette question deviendra de plus en plus importante et il est éminemment raisonnable que nous nous prononcions sur ce que nous ferions dans ce cas. Le Comité devrait‑il faire une déclaration dans laquelle il reconnaît l'importance de la Charte, y compris l'article 33, c'est‑à‑dire la disposition de dérogation, pour protéger les droits de tous les Canadiens, y compris leur droit à la vie privée? Je pense que nous pourrions faire cela. C'est raisonnable. Je pense que c'est juste.
    Ce que je n'ai pas entendu, après neuf ans de gouvernement néo-démocrate-libéral, c'est qu'ils cherchent à abroger l'article 33. Si la disposition de dérogation suscite un grand malaise, il suffit de l'abroger. Vous êtes au pouvoir. Vous avez la majorité. Remplissez le Sénat de personnes nommées par les libéraux et supprimez cet article. Il n'y a eu aucune discussion à ce sujet et aucune contestation. Cela dépend si les provinces veulent ou non contester son utilisation.
    C'est très important lorsque nous réfléchissons au type de pays dans lequel nous voulons vivre. Je n'ai aucun problème à affirmer que je veux vivre dans un pays où les individus qui commettent les délits les plus odieux restent dans des établissements à sécurité maximale pendant toute leur vie naturelle. Ce qu'il y a de bien dans une démocratie, c'est que les gens qui n'aiment pas cela ont la possibilité de s'exprimer. Voilà ce qu'il y a de beau dans notre démocratie.
(1310)
    M. Kurek a très bien décrit les contorsions auxquelles il faut se livrer pour affirmer que tous ceux qui ont voté pour le projet de loi visant à protéger les mineurs de la pornographie cherchent en quelque sorte à promouvoir le recours à une carte d'identité numérique, c'est‑à‑dire une carte d'identité numérique unique. Je ne pense pas que c'est raisonnable, mais je ne pense pas que l'intention était d'être raisonnable. C'était censé susciter l'outrage, mais je ne suis pas outré. Je suis heureux d'en parler. La carte d'identité numérique dont le commissaire à la protection de la vie privée a parlé, lorsqu'il a comparu plus tôt devant le Comité, concernait une identification numérique unique pour avoir accès aux services gouvernementaux. Il est donc important de souligner, pour mes collègues du Bloc et du Nouveau Parti démocratique qui se penchent sur cette motion, que le Parti conservateur du Canada n'a fait aucune déclaration visant à exiger une carte d'identité numérique pour avoir accès à du contenu sur Internet. Il n'y a rien de plus faux. On parle souvent, au sein du Comité, de l'importance de formuler des propositions sérieuses et de s'assurer qu'elles respectent la logique et l'éthique, mais bien entendu, cela n'a jamais été dit. Ce que nous avons dit, c'est que les mineurs ne devraient pas être victimes d'entreprises qui exploitent des sites comme Pornhub, qui est une véritable scène de crime.
    Au sein du Comité, nous avons parlé d'intimidation, c'est‑à‑dire de l'intimidation en ligne et des répercussions des médias sociaux sur les jeunes. Les jeunes dans les écoles ont souvent vu de la pornographie vengeresse ou des images sexuelles non consensuelles d'eux-mêmes ont été publiées en ligne et se sont retrouvées sur ces sites, par exemple Pornhub. Le fait de déclarer que nous voulons protéger les enfants de ces endroits sinistres et très dangereux sur Internet est… Nous avons fait preuve de transparence au sujet de ce que nous voulons faire, et il est malhonnête de dire que nos intentions sont malveillantes et que nous cherchons à atteindre un autre objectif comme une carte d'identité numérique.
    Encore une fois, je pense que l'intention était de susciter l'outrage à l'aide de faussetés. Je n'ai aucun problème… Et c'est la raison pour laquelle j'ai voté pour l'idée d'exiger une vérification de l'âge pour avoir accès à du matériel pornographique en ligne, car c'est nécessaire pour protéger les enfants. Je ne vois pas où est la controverse. Aucune proposition n'a été formulée. Je pense que M. Kurek a parlé des options qui ont fait l'objet de discussions dans le cadre de l'étude du projet de loi, mais personne n'a dit, de façon sérieuse ou crédible, que les sites en question, comme Pornhub, se verraient confier les renseignements personnels des gens. Comme je l'ai déjà dit, c'est une vraie scène de crime, et ce qui est autorisé sur ce site est criminel.
    Je pense qu'il est raisonnable et important de protéger les enfants. Cela ne fait pas seulement partie de mon travail à titre de parlementaire, mais cela fait également partie de mon travail à titre de membre de la société. Je crois aussi que cela fait partie de mon travail à titre de membre de la société de protéger les gens contre ces types de monstres odieux qui semblent s'arranger pour aboutir dans un établissement à sécurité minimale et qui vont ensuite commettre des crimes capitaux, les pires types de crimes, comme des meurtres, après leur sortie de prison. Nous ne parlons pas d'il y a 50 ans. Nous parlons des dernières années.
(1315)
    Il s'agit de savoir dans quel genre d'endroit nous voulons vivre. Voulons-nous vivre dans un endroit où les enfants sont exposés à la diffusion de matériel non consensuel à des fins d'exploitation sexuelle qui victimise certains de leurs pairs et qui est monétisé par des monstres comme ceux qui dirigent Pornhub?
    Pouvons-nous prendre une mesure telle que l'obligation d'utiliser un système de vérification de l'âge pour limiter les risques auxquels les enfants sont exposés? Je pense que c'est important.
    Lorsqu'on tente d'en faire quelque chose d'autre, car on croit peut-être que nous ne voudrions pas aborder le sujet… En réalité, j'ai hâte d'en parler. Je pense que nous devrions parler davantage de ce qui arrive aux enfants, de notre rôle à cet égard et de la question de savoir si nous voulons être complices, car le fait de ne pas agir quand des solutions sont possibles signifie que nous sommes complices.
    Comme je l'ai déjà dit, suis‑je pour l'idée de faire une déclaration à la Chambre selon laquelle le Comité reconnaît l'importance de la Charte canadienne des droits et libertés, y compris la disposition de dérogation, ou de toutes les parties de la Charte pour protéger les droits de tous les Canadiens, y compris le droit à la vie privée? Oui, certainement.
    Je pense que je proposerais un amendement en ce sens, monsieur le président. Je ne le ferai pas immédiatement, car j'aimerais y travailler, mais je pense que c'est la voie que j'emprunterais.
    En ce qui concerne l'utilisation de la disposition de dérogation, ou peut-être pour ajouter le contexte de l'utilisation proposée de la disposition de dérogation, afin de s'assurer que le type de monstre dont j'ai parlé plus tôt — encore une fois, je reste vague pour ne pas glorifier l'individu ou le crime. Je ne veux pas continuer à le nommer, car c'est vraiment un crime horrible. Les individus qui commettent ces types de crimes doivent être enfermés pour la durée de leur vie naturelle.
    Si nous voulons ajouter le contexte des commentaires du chef de l'opposition, c'est un amendement que j'envisagerais de proposer, et cela m'intéresserait si des collègues souhaitaient appuyer ses propos. S'ils souhaitent citer une déclaration, ils peuvent me citer. J'ai fait des déclarations à la Chambre et à l'extérieur de la Chambre en ce qui concerne précisément l'utilisation de la disposition de dérogation proposée par le chef de l'opposition, et il y a aussi le contexte du recours à la vérification de l'âge pour protéger les enfants de la pornographie et de la diffusion de matériel non consensuel ou à des fins d'exploitation sexuelle. Je pense qu'il serait utile de fournir le contexte de ces deux exemples.
    En outre…
    Monsieur Barrett, vous conserverez la parole, mais je vais suspendre la séance pendant cinq minutes, car je dois m'entretenir avec la greffière.
    Je vais donc suspendre la séance pendant cinq minutes et je vous redonnerai ensuite la parole, si vous le voulez bien.
    Je vais travailler sur mon amendement.
    Je vous remercie.
(1315)

(1330)
    La séance reprend.
    Au moment de suspendre la séance, M. Barrett avait la parole.
    Vous avez toujours la parole, monsieur Barrett. Veuillez poursuivre votre intervention.
     Je propose de lever la séance.
    Vous proposez de lever la séance.
    D'accord. Y a‑t‑il consensus pour lever la séance?
    Des députés: Non.
    Le président: D'accord. Je vais donc mettre la question aux voix.
    Madame la greffière, si vous le voulez bien…
    (La motion est rejetée par 6 voix contre 4.)
    Le président: La motion est rejetée.
    Monsieur Barrett, voulez-vous toujours…?
    Oui, monsieur le président. Je pensais seulement, puisque c'était la fin du temps prévu à l'horaire… Il est 13 h 30. J'ai entendu des gens dire qu'ils avaient des engagements ailleurs.
    Écoutez, puisque je dois préparer un amendement, je veux seulement résumer mes commentaires.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je pensais que nous avions suspendu la séance pour permettre à M. Barrett de rédiger son amendement. C'est ce qui a été dit avant la suspension.
    Non, nous avons suspendu la séance parce que je devais m'entretenir avec la greffière, et c'est ce que j'ai fait. Lorsque j'ai repris la séance, j'ai donné la parole à M. Barrett. M. Barrett a toujours la parole.
    Allez‑y, monsieur Barrett.
    Je voudrais simplement résumer mes commentaires, monsieur le président.
    J'invoque le Règlement.
    Je pose seulement la question suivante par curiosité, et je ne veux pas offenser M. Barrett. Lorsqu'une motion d'ajournement est présentée, ne s'agit‑il pas de la dernière… Cela ne signifie‑t‑il pas que le député en question a cédé son temps de parole à la liste des intervenants et que l'intervenant suivant a maintenant la parole?
     Sur le plan de la procédure, comment est‑il possible de proposer cette motion tout en conservant la parole?
    C'est une très bonne question, monsieur Green.
    Des députés: Oh, oh!
    J'en ai plein d'autres, monsieur.
    D'accord. Vous savez, monsieur Green, pour être honnête, je ne suis pas sûr de la réponse à votre question, et je vais donc consulter la greffière à ce sujet. Cependant, entretemps, M. Barrett a cédé la parole. Il a renoncé à son temps de parole et je vais donc donner la parole à M. Brock. Je reviendrai avec quelques indications à ce sujet.
    Je vous remercie, monsieur Green.
    Vous avez la parole, monsieur Brock.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je comprends si vous souhaitez vérifier le temps. Je sais que nous avons des ressources jusqu'à 14 heures. J'ai probablement au moins deux heures de commentaires et de documents à partager.
    Tout d'abord, je tiens à partager le commentaire initial de mon collègue, M. Kurek, au sujet de sa déception lorsqu'il a entendu le commentaire de Mme Khalid sur la perception de sa motion et la mesure dans laquelle elle était choquée et troublée. L'hypocrisie de cette députée — et, très franchement, de l'ensemble des libéraux — sur ces deux questions est tout simplement stupéfiante. Les efforts qu'ils déploient pour tenter de modifier l'opinion publique à l'égard du Parti libéral du Canada et de son chef, Justin Trudeau, montrent réellement à quel niveau ils sont tombés, et les tentatives qu'ils déploient pour susciter la crainte chez les Canadiens constituent à peu près l'essentiel du programme du Parti libéral du Canada depuis que Justin Trudeau est devenu le chef du parti. Depuis 2013, il ne s'agit littéralement que de propos alarmistes.
    Même avant 2013, on peut dire qu'en remontant aux élections de 2004 et de 2006, avec les premiers ministres Martin et Chrétien, les libéraux n'ont pas hésité à dépeindre n'importe quel dirigeant du Parti conservateur du Canada comme un croque-mitaine et à laisser entendre que les Canadiens devraient craindre l'existence d'intentions cachées et que les conservateurs disent une chose et font le contraire, ce qui est en réalité le programme de Justin Trudeau, et ce, depuis qu'il a formé le gouvernement en 2015.
    C'est d'autant plus vrai aujourd'hui, car — soyons honnêtes — ils ont perdu plus de 20 points dans les sondages. Ils sont en baisse depuis plus d'un an…
(1335)
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Puisque l'on parle de pertinence, j'encourage le député à revenir à la question dont nous sommes saisis.
    C'est ce qu'il fera.
    Vous avez la parole, monsieur Brock.
    La pertinence est très subjective.
    Comme je l'ai fait savoir au Comité, mon intervention durera au moins deux heures, et j'aborderai donc les points pertinents concernant la motion de Mme Khalid en temps voulu.
    C'est malheureux, monsieur le président.
    Monsieur Brock a la parole.
    J'ai compris. Je m'excuse.
    Veuillez poursuivre votre intervention, monsieur Brock.
    Je n'accepterai plus aucune interruption. Nous avons parlé à maintes reprises du fait que la pertinence est subjective. M. Brock en viendra à ses arguments et les présentera de manière appropriée. Je ne veux plus d'interruptions à moins qu'elles ne soient liées au Règlement et que vous puissiez citer les articles concernés.
    Monsieur Brock, vous avez la parole.
    Avant d'être interrompu, monsieur le président, j'ai parlé de l'appui dont jouit le Parti libéral du Canada au sein de l'électorat canadien. Un certain nombre de sondages ont été menés littéralement depuis le jour où notre chef a été élu. Il y a une volonté constante d'affaiblir et d'éliminer le soutien à l'égard des libéraux. De toute évidence, cela doit être extrêmement décevant pour de nombreux membres de longue date du Parti libéral du Canada.
    Il n'est pas surprenant qu'un certain nombre de ministres aient décidé de ne pas se représenter aux prochaines élections. Un certain nombre de députés ont aussi décidé de ne pas se représenter. Il y a une phrase que je ne vais pas utiliser, mais il est clair qu'eux aussi regardent les sondages, et ils savent que l'opinion publique est en train de changer.
    Ce changement tient à un certain nombre de raisons, monsieur le président. Il y a toujours eu une date de péremption pour les partis politiques. C'est vrai pour le Parti libéral; et c'est vrai pour le Parti conservateur. Les gens en ont assez de se faire promettre certaines choses avant les élections, simplement dans le but d'obtenir leur vote, puis d'être profondément déçus lorsque le premier ministre du moment ne tient pas les promesses en question.
    C'est exactement ce qui se passe avec Justin Trudeau. Je suis sûr que lui-même, la vice-première ministre, Chrystia Freeland, et tout le ministère des Finances, voire tous les députés libéraux, pensaient que le budget du printemps allait enfin mettre un terme à une certaine négativité à l'égard de leurs politiques économiques et rendre le pays plus équitable pour bon nombre de générations en ne visant pas strictement la classe moyenne. Maintenant, c'est l'équité pour plusieurs générations. Cependant, que voit‑on dans le budget? Nous voyons les mêmes promesses usées que Justin Trudeau a faites aux Canadiens en 2015 et qui n'ont absolument pas été tenues, en particulier, à mon avis, dans le domaine de la sécurité publique. J'en parlerai en temps et lieu.
    Cela témoigne de la raison pour laquelle ce parti et ses députés cherchent si désespérément à attirer l'attention des gens sur autre chose que leur bilan. Le budget n'a pas emballé la population. On aurait pu croire que le premier ministre allait déclencher des élections il y a deux ou trois semaines, vu sa tournée pancanadienne avec tous ses ministres pour faire de belles annonces et montrer ce à quoi les gens peuvent s'attendre du budget.
    Cependant, les choses n'ont pas bougé, parce que les Canadiens sont intelligents. Ils se sont finalement rendu compte que le premier ministre, qui, pensaient-ils, allait gouverner si différemment... Rappelons-nous les paroles célèbres qu'il a prononcées en 2015 pour dire qu'il ferait de la politique autrement, que son gouvernement serait reconnu comme étant le plus transparent et le plus responsable que le pays ait jamais connu.
    Cependant, il faut tenir compte de tout ce qui s'est passé, notamment leur refus de fournir des documents à divers comités et le fait qu'ils ont demandé à leurs députés de faire de l'obstruction lorsqu'il est question d'exposer des actes de corruption et des comportements contraires à l'éthique. La liste est longue. Je pourrais passer des heures à creuser le sujet, ne serait‑ce qu'en examinant les scandales qui ont éclaboussé Justin Trudeau et des membres de son cabinet ainsi que des députés d'arrière-ban, et ce, depuis 2015. Les Canadiens sont des gens intelligents, monsieur le président, et ils se souviennent de ces choses.
    Par conséquent, tous les efforts que les membres libéraux du Comité déploient en ce moment pour essayer d'effrayer les Canadiens et de semer la peur vont échouer, à mon avis.
(1340)
    Prenons, par exemple, toute la question de la crainte à l'égard de la disposition de dérogation. La disposition de dérogation — ô surprise — a été instaurée par le père de Justin, Pierre Elliott Trudeau, il y a bien plus de 40 ans. Cette disposition de dérogation n'a pas été modifiée depuis plus de 40 ans. Elle existe depuis très longtemps. Même si aucun gouvernement fédéral n'y a recouru, cela ne veut pas nécessairement dire — en fait, je dirais que cela ne veut absolument pas dire — qu'il ne conviendrait pas de l'utiliser dans l'avenir.
    Nous savons que certains premiers ministres provinciaux y ont eu recours. Quelle a été la réaction de Justin Trudeau? Eh bien, je suppose qu'il a eu une légère réaction. Il a tenu de beaux discours, mais il n'a rien fait lorsque Doug Ford, le premier ministre de l'Ontario, et le premier ministre du Québec en ont parlé.
    Cette disposition est en vigueur dans notre pays. J'invite tous les députés libéraux qui ne sont pas avocats à prendre le temps de lire l'article 33 de la Charte, ce qui leur prendra probablement moins de deux minutes. Lorsqu'on l'applique, et je ne fais que paraphraser, ce n'est pas de façon permanente. Un examen est prévu au bout de cinq ans.
    Lorsque nous examinons les commentaires formulés récemment par notre chef, nous constatons qu'ils n'ont pas changé ou qu'ils n'ont pas été modifiés un tant soit peu depuis la première fois où il a parlé de l'utilisation de la disposition de dérogation. Mme Khalid s'efforce d'ouvrir les vannes au sujet d'un éventuel recours abusif à la disposition de dérogation, afin de faire peur aux Canadiens, pour qu'ils craignent le recours à cette disposition, car elle risque maintenant d'être appliquée aux droits génésiques. C'est une vraie farce. C'est insultant. Elle sait très bien, comme tous les députés libéraux, quelle est la position du Parti conservateur du Canada sur cette question. Il n'y a donc pas lieu d'en discuter davantage.
    Cela n'empêchera pas les libéraux de continuer, cependant. Cela ne les arrêtera pas. Ils continueront de faire peur aux Canadiens en leur faisant croire que le premier ministre Pierre Poilievre — oui, je suis tout à fait convaincu qu'il sera le prochain grand premier ministre du Canada — utilisera cette disposition, le cas échéant, pour atteindre son objectif déclaré. Cet objectif est de rectifier bien des choses qui se passent dans notre système de justice et qui sont vraiment troublantes, non seulement aux yeux des députés, mais aussi de l'ensemble des Canadiens.
    Je veux prendre un peu de temps pour parler de l'affaire Bissonnette, car elle constitue vraiment la genèse de notre discussion sur la disposition de dérogation. Je veux lire un article de presse. Il est daté du 8 février 2019. Il contient certaines des paroles importantes du juge québécois qui a prononcé la peine avant que le gouvernement ne décide d'interjeter appel.
    Le titre se lit comme suit: « Le tireur de la mosquée de Québec condamné à au moins 40 ans de prison », et on peut lire ceci dans l'article:
Le juge a qualifié l'attaque d'Alexandre Bissonnette de « tragédie sans nom » qui « a entraîné une déchirure de notre tissu social ».
(1345)
Alexandre Bissonnette, qui a admis avoir tué six hommes dans une mosquée de Québec il y a deux ans, pourra présenter une demande de libération conditionnelle à l'âge de 67 ans, comme en a décidé un juge vendredi.
Bissonnette, âgé de 29 ans, purgera une peine d'emprisonnement à perpétuité pour avoir abattu ces hommes au Centre culturel islamique de Québec le 29 janvier 2017. Il est derrière les barreaux depuis la fusillade.
Il sera autorisé à comparaître devant la Commission des libérations conditionnelles du Canada après avoir purgé sa peine de 40 ans d'emprisonnement. C'est ce qu'a déclaré le juge François Huot de la Cour supérieure dans sa décision. Les survivants et les familles se sont dits « déçus », « consternés » et « anéantis » par cette décision.
    Je vais revenir aux paroles suivantes, monsieur le président:
Le juge Huot a qualifié l'attaque de Bissonnette de « tragédie sans nom » qui « a entraîné une déchirure de notre tissu social ».
Lors de l'audience de détermination de la peine qui a duré près de six heures, le juge a lu des parties de sa décision de 246 pages...
    Je suis certain que les membres du Comité ne voudraient pas que je commence à lire les 246 pages, mais je serai heureux de le faire, au besoin.
... dans une salle d'audience bondée, décrivant les actes commis par Bissonnette comme étant « prémédités, gratuits et abjects. »
« Ses crimes étaient motivés par le racisme et une haine viscérale envers les immigrants musulmans », a déclaré le juge Huot.
Bissonnette n'a montré aucune émotion lorsque le juge a lu sa décision et il a rapidement été escorté hors de la salle d'audience.
Après une journée éprouvante, des survivants, dont Saïd El‑Amari, étaient visiblement bouleversés par la décision. Il a refoulé des larmes de colère lorsqu'il s'est exprimé à l'extérieur de la salle d'audience à Québec.
« Aujourd'hui, c'est une triste journée. Nous condamnons 17 orphelins à 40 ans de souffrance, au terme desquels ils devront revenir pour maintenir cet assassin derrière les barreaux. Cette souffrance commence aujourd'hui et durera 40 ans; je suis sidéré. »
Aymen Derbali, qui a été atteint par sept balles et qui est maintenant paraplégique, a dit qu'il avait failli s'évanouir lorsqu'il a entendu la décision finale du juge.
« J'aurais aimé que justice soit rendue aujourd'hui », a déclaré M. Derbali.
Megda et Amir Belkacemi, qui ont perdu leur père dans l'attaque, ont offert leur soutien aux familles des victimes de Bruce McArthur, qui a également été condamné aujourd'hui relativement à huit chefs d'accusation de meurtre au premier degré. Il pourra demander une libération conditionnelle dans 25 ans.
Plus tôt dans la journée, la juge Huot a passé en revue la fusillade minute par minute.
    Il est important que je lise ce passage, car je vais comparer la décision du juge Huot à celle de la Cour suprême du Canada, qui a jugé que la peine imposée par le juge est cruelle et inusitée.
Armé d'un fusil de calibre .223 et d'un pistolet Glock de 9 mm, Bissonnette transportait 108 balles lorsqu'il est entré dans le centre culturel islamique. Il a tiré dans la salle de prière bondée alors que les prières du dimanche se terminaient.
    Dans l'article, le journaliste énumère les noms de ceux qui sont morts et précise que cinq autres personnes ont été grièvement blessées.
Bissonnette a plaidé coupable en mars 2018 à six chefs d'accusation de meurtre au premier degré, à cinq chefs d'accusation de tentative de meurtre des hommes qu'il a blessés et à un sixième chef d'accusation de tentative de meurtre des 35 personnes présentes ce soir‑là, dont quatre enfants.
(1350)
La Couronne et les avocats de Bissonnette ont dit qu'ils devaient examiner la longue décision relative à la détermination de la peine et qu'ils ne feraient pas de commentaires.
Le meurtre au premier degré est automatiquement passible d'une peine d'emprisonnement à perpétuité, mais le juge a dû décider combien de temps Bissonnette devrait attendre avant de pouvoir demander une libération conditionnelle.
    Nous savons tous ceci:
En 2011, le gouvernement conservateur de Stephen Harper a adopté l'article 745.51 du Code criminel, qui permet à un juge d'imposer des périodes d'inadmissibilité à la libération conditionnelle consécutives plutôt que concurrentes en cas de meurtres multiples.
    Je tiens à dire aux Canadiens qui nous regardent — et je suis vraiment heureux que nous soyons en séance publique et non à huis clos, car les Canadiens méritent d'entendre cela —, que le mot « consécutives » signifie qu'il aurait été possible que Bissonnette purge 25 ans pour le meurtre prémédité intentionnel de chaque membre de cette mosquée. C'est donc dire 25 ans fois 7. Il serait mort en prison. Il serait sorti de prison dans un cercueil.
    S'il s'agit de périodes concurrentes, c'est le contraire. Essentiellement, ce que la Cour suprême du Canada a fait, c'est accorder une autorisation légale aux tueurs en série. Elle leur a fait savoir que, peu importe le nombre de victimes, peu importe la façon dont ils tuent ces victimes et peu importe leurs antécédents, ils ont l'autorisation, dans notre pays, de tuer des civils innocents et qu'ils purgeront une peine maximale de 25 ans avant d'être admissibles à une libération conditionnelle. Dans leur grande sagesse, les neuf juges — qui ne siègent pas très loin d'ici, à la Cour suprême du Canada — ont déterminé qu'une peine d'emprisonnement à perpétuité qui constitue véritablement une peine à perpétuité...
    Voici les mots qui étaient inscrits dans le Code criminel du Canada depuis des décennies: « une peine d'emprisonnement à perpétuité », mais nos savants juges de la Cour suprême du Canada ont conclu qu'une peine de 40 ans, monsieur le président — pas 25 ans fois 7, ce qui totaliserait 175 ans —, était cruelle et inusitée, parce qu'elle privait ce monstre coupable de plusieurs meurtres de la possibilité de victimiser à nouveau chaque membre de la famille proche et de la famille élargie des sept personnes qu'il a tuées. En tant que membre du Barreau de l'Ontario, je trouve cela absolument et profondément décevant.
    J'ai dû réfléchir à l'arrêt Bissonnette, monsieur le président, lorsque j'étais membre du comité de la justice et que nous étudiions les droits des victimes. C'est une pure coïncidence que la Cour suprême du Canada ait rendu sa décision dans l'affaire Bissonnette à ce moment‑là.
    Nous avons invité deux victimes au cours d'une des séances consacrées à cette étude. J'aimerais avoir le compte rendu de la réunion sous les yeux, afin de pouvoir vous faire part des paroles extrêmement profondes de ces victimes. Elles ont comparu devant le comité de la justice une semaine ou deux après la publication de cette décision.
    Je me souviens d'un cas en particulier — et je ne sais pas si des membres du Comité s'en souviennent — dans lequel l'accusé, qui a été reconnu coupable de meurtre, était un homme du nom de Dellen Millard. Lui-même et un autre coaccusé, également condamné pour meurtre, ont décidé de répondre à une annonce qu'un homme avait publiée. C'était un jeune père qui s'était récemment marié, qui avait une jeune famille et qui vivait dans une région rurale juste à l'extérieur de la ville de Hamilton, en Ontario. Millard a répondu à une annonce concernant la vente de la camionnette de la victime.
(1355)
    Cette histoire peut servir d'avertissement à l'intention de tous les Canadiens. Je suis certain que les gens prennent les précautions nécessaires à la suite de ce qui s'est passé dans ce cas‑là.
    Les deux tueurs sont arrivés à la résidence de la victime. À ce moment‑là, l'homme tenait son bébé dans ses bras, un bébé qui n'a pas eu l'occasion de vraiment connaître son père. Je pense qu'elle avait moins d'un an à l'époque. Ils sont arrivés, et ce qu'ils ont fait aurait dû être un signal d'alarme, en rétrospective. On ne sait pas s'ils sont arrivés dans un véhicule ou si quelqu'un les a déposés à la résidence de la victime, mais ils ont parcouru l'allée à pied, une allée assez longue. Ils ont dit qu'ils étaient intéressés par l'annonce concernant la vente du camion.
(1400)
    Monsieur Brock, je déteste faire cela, mais je vais devoir vous interrompre.
    Cela me déçoit beaucoup, monsieur le président. C'est une bonne histoire que je voulais vous raconter.
    Je suis désolé, mais nous ne pouvons pas continuer.
    La séance est levée.
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