INAN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires autochtones et du Nord
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 26 septembre 2018
[Énregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte. Je vous souhaite à tous la bienvenue.
C'est une belle journée d'automne à Ottawa. Nous vous remercions d'être venus jusqu'ici pour témoigner devant le Comité. Nous sommes sur le territoire non cédé du peuple algonquin. Le Canada a entamé un processus de vérité et de réconciliation. Le Comité le souligne toujours, tant en ce qui a trait au lieu où nous nous réunissons que de façon générale.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude sur les soins de longue durée dans les réserves. Nous recevons une délégation de trois témoins, qui fera une déclaration préliminaire de 10 minutes. Les députés libéraux et les députés de l'opposition pourront ensuite poser des questions aux témoins.
Lequel d'entre vous veut commencer?
Robin, nous vous souhaitons la bienvenue au Comité.
J'aimerais tout d'abord saluer mes ancêtres à qui appartenait cette terre, les membres de la Nation algonquine Anishinabeg.
Je m'appelle Robin Decontie. Je suis la directrice de Santé et services sociaux de Kitigan Zibi.
Je suis née et j'ai grandi à Kitigan Zibi. J'ai quitté la maison à 10 ans pour aller étudier, puis je suis retournée travailler dans notre centre de santé communautaire. J'y travaille depuis 20 ans et j'y ai occupé divers postes. Je suis maintenant directrice de notre approche combinée en matière de programmes de services de santé et de services sociaux. Nous avons un accord de transfert de services de santé depuis 1989, et nous sommes considérés à titre de collectivité hautement fonctionnelle présentant un faible risque par Services aux Autochtones Canada.
Je suis aussi membre du conseil d'administration de la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador. Je connais donc bien les défis régionaux également.
Ainsi, je vous présente aujourd'hui le point de vue des communautés sur les défis auxquels nous sommes confrontés pour la prestation de soins de longue durée dans les réserves; je vous présente aussi des pistes de solutions pour régler les problèmes. Nous croyons que ce sont les membres de la communauté qui doivent travailler pour leurs pairs. Nous croyons au renforcement de la capacité. Les changements politiques ont une incidence sur les bonnes pratiques communautaires. Je suis donc heureuse d'être ici aujourd'hui pour aborder le sujet important des soins de longue durée dans les réserves. Je vous remercie de m'en donner l'occasion.
Je vais décrire les défis associés aux soins de longue durée dans les réserves et vous présenter quelques solutions à envisager.
Le principal enjeu dans le domaine de la prestation de services, c'est la délégation de l'assurance-maladie aux provinces et les questions de compétence connexes.
Les membres de notre communauté dépendent du régime provincial d'assurance-maladie pour répondre à leurs besoins en matière de soins de longue durée, comme tous les Canadiens. Services aux Autochtones Canada n'est pas une autorité en la matière au Canada. L'organisme délègue ces pouvoirs aux provinces par l'entremise de la Politique de 1979 sur la santé des Indiens. Cette dépendance crée des problèmes lorsque nous tentons de travailler avec le régime d'assurance-maladie provincial. Premièrement, la communication uniforme avec les agents de liaison avec Premières Nations pour faciliter l'accès aux soins de santé provinciaux. Deuxièmement, la supervision de la prestation des services de santé. Troisièmement, la planification de la prestation des services destinés aux personnes atteintes de maladies chroniques et la planification en matière de santé.
En ce qui a trait à la communication uniforme avec les agents de liaison du régime d'assurance-maladie, les régies régionales de la santé du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec n'ont pas de méthode normalisée pour communiquer et réseauter avec les fournisseurs de soins de santé dans les réserves de leur province. Nous dépendons les uns des autres pour offrir des soins de longue durée à ceux qui en ont besoin dans les réserves, de la naissance à la mort. Il faut que les fournisseurs de services dans les réserves puissent mieux communiquer avec les régies régionales de la santé du Québec afin de régler les problèmes d'accès auxquels nous sommes confrontés.
Par exemple, j'ai ici un document intitulé « Portrait of the Situation for English-speaking First Nations: Accessing Health and Social Services in English in the Province of Quebec », de la Coalition des communautés des Premières Nations anglophones du Québec. Le document souligne le besoin de clarifier les rôles et responsabilités des agents de liaison avec les Premières Nations des régies régionales afin de travailler en partenariat avec les fournisseurs de soins de longue durée dans les réserves. C'est un exemple d'études sur les problèmes en matière d'accès.
La solution consiste à obliger les régies régionales du ministère de la Santé à désigner un agent de liaison avec les Premières Nations qui communiquera avec les fournisseurs de soins des réserves pour améliorer l'accès aux services provinciaux dans les réserves, et ce pour l'ensemble des services offerts par l'entremise de Services aux Autochtones Canada. Il faut que le régime d'assurance-maladie du ministère de la Santé et des Services sociaux de la province établisse une solide pratique de liaison normalisée entre les régies régionales de la santé, afin d'améliorer la communication et de travailler en partenariat avec les communautés des Premières Nations pour améliorer l'accès au système de soins de santé.
J'ai le rapport. Je peux vous le transmettre.
En ce qui a trait à la supervision appropriée de la prestation des services de santé, à l'heure actuelle, les ressources intermédiaires de Services aux Autochtones Canada rencontrent des problèmes administratifs. Je parle des foyers pour les personnes semi-autonomes dans les réserves. Ces gens auront bientôt besoin de plus de soins puisqu'ils sont de moins en moins autonomes. Selon une opinion juridique, les foyers situés dans les réserves qui sont financés par Services aux Autochtones Canada et qui n'ont pas d'attestation offrent des soins illégaux qui sont assujettis à de lourdes sanctions provinciales.
J'ai une copie de cette opinion en anglais. Je pourrai aussi vous la transmettre.
Cela signifie que les foyers de groupe dans les réserves du Québec offrent des services qui dépassent les niveaux 1 et 2 de Services aux Autochtones Canada et qu'il y a un besoin grandissant pour ces services au sein des populations vieillissantes. Ainsi, nous contrevenons à la loi provinciale en matière de soins médicaux. Il faut trouver une façon similaire d'évaluer l'autonomie entre les services d'aide à la vie autonome de SAC et le régime provincial d'assurance-maladie. À l'heure actuelle, aucune disposition n'oblige le régime provincial à travailler en collaboration avec les fournisseurs de services dans les réserves pour déterminer les niveaux de soin dont les clients ont besoin.
Nos services communautaires utilisent actuellement un outil d'évaluation provincial, qui attribue une cote d'autonomie de 1 à 15, plutôt que celle de 1 à 5 de SAC. Les critères de soins de SAC entre les niveaux 2 et 3 représentent une zone grise, ce qui oblige les foyers à offrir plus de services qu'ils le devraient pour les clients qui se trouvent dans cette zone. C'est ainsi qu'on se retrouve avec une pratique illégale, où les foyers offrent plus d'aide et de soins qu'ils le devraient, selon la province.
Avec l'offre de services d'aide à long terme dans les foyers de groupe pour les personnes dont le niveau dépasse 1 ou 2 viennent les services infirmiers que l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec restreint dans ce type de foyer. Selon le projet de loi 90 de la loi du Québec sur la santé, les infirmières et infirmiers ne peuvent pas offrir de services dans des résidences intermédiaires qui n'ont pas d'attestation de la province. Nous ne bénéficions donc pas de la supervision requise du régime d'assurance-maladie provincial. Les infirmières et infirmiers peuvent voir leur permis d'exercice révoqué par l'Ordre s'ils pratiquent leur profession dans des foyers de groupe qui ne sont pas attestés par la province.
À l'heure actuelle, le foyer de groupe de Kiweda, financé par l'entremise du programme d'aide à la vie autonome de SAC, n'est pas attesté par la province, mais nous le sommes par Agrément Canada. Néanmoins, il n'y a aucune disposition juridique au Québec qui protège les services infirmiers que nous pourrions avoir à offrir aux clients de ce foyer. C'est toujours une question litigieuse pour notre équipe de soins de santé lorsqu'elle doit décider des soins qu'elle peut offrir légalement aux gens de la réserve.
Notre communauté est le reflet de la situation dans le reste du Canada: la population est vieillissante. De plus en plus de personnes auront besoin de soins à l'avenir, jusqu'à la prochaine génération. Les soins offerts dans les foyers, qui sont souvent réglementés par la province, seront le prochain ensemble de services résidentiels qu'il faudra offrir aux membres de notre communauté qui vivent dans la réserve. Nous devons veiller à ce que le processus d'attestation et d'octroi de permis pour ces foyers soit plus facile entre le régime d'assurance-maladie provincial et les fournisseurs de services dans les réserves, de sorte que les membres de notre communauté puissent offrir des soins de longue durée à leurs pairs.
Nous pourrions peut-être offrir les ressources budgétaires pour permettre aux résidences-services d'obtenir une attestation selon un processus approprié sur le plan culturel, qui soit équivalent à celui de la province. Pour cela, il faudrait offrir le financement nécessaire pour mettre à niveau les foyers afin de répondre aux normes d'attestation provinciales et il faudrait modifier le champ de compétence pour permettre une activité culturelle. Par exemple, il faudrait installer des systèmes de gicleurs appropriés aux fins de la sécurité-incendie, et le permis devrait permettre aux foyers de servir des viandes sauvages aux résidents, ce qui est interdit à l'heure actuelle. La province devrait être tenue d'adopter des approches en matière de renforcement de la capacité afin de permettre aux membres de notre communauté d'offrir des services à leurs pairs dans les foyers attestés également.
De plus, il faudrait prévoir un budget pour permettre aux services de soins à domicile et en milieu communautaire des Premières Nations de prolonger les heures de services au besoin pour aider les membres de la communauté à rester à la maison le plus longtemps possible avant d'entrer dans le système de soins hospitaliers provincial.
En ce qui a trait à la planification de la prestation des services pour les personnes souffrant de maladies chroniques et à la planification de la santé, d'autres conditions, en plus du vieillissement de la population, accentuent le besoin d'offrir des soins de longue durée dans les réserves. D'autres troubles concomitants apparaissent et nécessitent des soins de longue durée. Je pense notamment aux gens qui ont des troubles de santé mentale et des déficiences physiques, de même qu'aux personnes qui souffrent de douleurs chroniques et qui sont aux prises avec des dépendances.
Ces personnes qui ont des troubles de santé mentale en plus de souffrir de problèmes de santé physique ont une capacité décisionnelle très restreinte et dépendent de l'offre de services, parce qu'elles ne peuvent vivre de façon autonome. Avec la crise des opioïdes qui fait rage en Amérique du Nord, nous constatons un besoin de soins de longue durée pour les membres de la communauté qui sont aux prises avec des dépendances. Ces personnes doivent avoir un endroit où aller; sinon, elles mourront trop jeunes.
La présidente: Il vous reste 40 secondes.
Mme Robin Decontie: Quarante secondes?
La présidente: Oui.
Mme Robin Decontie: À titre de solution, il faudrait obliger les agents de liaison avec les Premières Nations à recueillir des données regroupées sur les soins de santé publics et l'assurance-maladie, auxquelles auraient accès les communautés des Premières Nations pour désigner les maladies chroniques présentes dans la communauté, pour améliorer le régime d'assurance-maladie et pour mieux planifier les soins de longue durée.
Voici notre conclusion.
Il faut faire tomber les obstacles entre les partenaires provinciaux de l'assurance-maladie et les Premières Nations qui renforcent leur capacité pour offrir des soins par les membres de la communauté, pour les membres de la communauté. Le gouvernement fédéral octroie des fonds à la province pour les soins offerts aux Premières Nations. Par conséquent, il faudrait une plus grande responsabilisation quant aux soins de santé offerts aux Premières Nations.
Il faut changer les lois des provinces pour accorder une plus grande compétence et un plus grand pouvoir décisionnel aux fournisseurs de services dans les réserves quant au développement des services d'assurance-maladie. La province doit être prête à travailler avec les Premières Nations qui se trouvent dans les réserves et qui relèvent de la compétence fédérale afin de créer et de maintenir un régime d'assurance-maladie dans les communautés qui sont prêtes à offrir des soins de longue durée.
Les temps changent. Les membres de notre communauté sont de plus en plus éduqués en matière de santé. Nous devons songer à la façon d'offrir de meilleurs services à nos aînés, aux gens qui souffrent de maladies chroniques, aux femmes enceintes ou qui ont accouché, de même qu'aux enfants qui présentent des besoins en matière de soins de longue durée.
À l'heure actuelle, la province peut refuser d'offrir des services dans les réserves, parce que nos communautés relèvent de la compétence fédérale. C'est une réalité. Les données démontrent que notre province ne comprend pas que nous n'avons pas compétence en matière d'assurance-maladie dans nos communautés. La province renvoie les membres de notre communauté vers des services offerts dans les réserves parce que nous vivons sur des terres fédérales. Il faut que le régime d'assurance-maladie provincial fonctionne en partenariat — au lieu de se défaire de sa responsabilité — avec les fournisseurs de services dans les réserves afin de créer, de maintenir et d'offrir un régime d'assurance-maladie dans les communautés qui sont prêtes à relever le défi.
Merci.
Merci.
Nous vous avons accordé un peu plus de temps, puisque nous avons une seule délégation. J'espère que les membres du Comité comprendront.
Nous avons un nouveau membre. Le député Robillard s'est joint à nous. Il sera notre premier intervenant.
Non, excusez-moi, madame la présidente. J'ai une question. Est-ce qu'il y avait une seule déclaration préliminaire?
Je croyais qu'il n'y en avait qu'une seule. Oh, j'aurais dû vous interrompre avant, donc. Je suis désolée.
D'accord, vous pouvez vous entendre entre vous. Je ne sais pas. Je suis désolée pour ce malentendu.
Nous allons entendre une deuxième déclaration préliminaire.
Je vais me présenter. Je m'appelle Sharon Rudderham. Je suis la directrice des services de santé de la Première Nation d'Eskasoni.
Eskasoni est la plus importante Première Nation ou communauté micmaque à l'est de Montréal, en Nouvelle-Écosse. Elle compte 4 500 personnes. La moitié des membres de la population — soit environ 2 200 personnes — sont des jeunes. Ils représentent donc un important segment de notre population.
Comme vous le savez, je suis ici aujourd'hui pour parler des besoins en matière de soins de longue durée. Nous savons qu'à cause du système de pensionnats indiens, notre peuple hésite à accéder aux services de soins de santé à long terme offerts à l'extérieur de nos communautés. Les gens préfèrent que les services soient offerts dans les communautés.
Nous travaillons en collaboration avec la province de la Nouvelle-Écosse pour tenter de corriger des politiques que nous jugeons discriminatoires, qui excluent les soins de santé pour les Premières Nations de la Nouvelle-Écosse.
Je tiens aussi à dire — et je ne sais pas si vous êtes au courant de la situation — que lors de son étude de recherche en 2012, le Conseil canadien de la santé a sondé les Autochtones du pays et a conclu qu'ils avaient peur, qu'ils se sentaient impuissants et qu'ils croyaient être victimes de discrimination; qu'ils ne faisaient pas confiance au système de santé publique tel qu'il existe en dehors des communautés des Premières Nations.
J'aimerais vous transmettre quelques données sur nos collectivités de la Nouvelle-Écosse. Ces données proviennent du registre de la clientèle des Premières Nations de la Nouvelle-Écosse. Il s'agit d'un identifiant unique qui permet aux Premières Nations d'extraire des données des sources de données provinciales, par l'entremise d'une entente avec le gouvernement provincial et les communautés des Premières Nations.
Un décès qui survient avant l'âge de 75 ans est considéré comme une mort prématurée. Entre 2004 et 2013, 80 % des décès dans nos communautés des Premières Nations étaient considérés comme étant prématurés, comparativement à un taux de 30 % pour la Nouvelle-Écosse.
Comme vous le savez tous, les taux de diabète sont importants dans nos collectivités; ils sont deux ou trois fois plus élevés que les taux provinciaux.
Je sais que nous n'avons pas beaucoup de temps. J'aimerais vous donner quelques statistiques. Je fais référence à l'importance de la gestion des maladies et aux mesures que nous devons mettre en place dans nos communautés pour aider la population.
Dans nos communautés des Premières Nations, l'âge médian des victimes de crises cardiaques est de 56 ans. En Nouvelle-Écosse, l'âge moyen est de 69 ans. Pour l'insuffisance cardiaque, l'âge moyen est de 67 ans, comparativement à 78 ans pour l'ensemble de la Nouvelle-Écosse.
Vous vous demandez peut-être où je m'en vais avec cela. Je veux vous montrer quels sont les besoins de nos communautés et les différences entre les communautés autochtones et non autochtones. Notre population est jeune, oui, mais nous sommes plus touchés par les maladies chroniques et l'invalidité.
Nous n'avons pas beaucoup de statistiques sur l'Alzheimer et la démence, mais lorsque nous examinons le taux de décès prématurés, si 80 % des gens de notre communauté meurent avant d'avoir atteint l'âge de 75 ans, c'est qu'ils n'obtiennent pas de diagnostic et qu'ils n'atteignent pas ces âges de la même façon que le reste de la population; ils remplissent donc nos établissements de soins de longue durée.
Je m'appelle Steve Parsons. Je suis le directeur général des services organisationnels d'Eskasoni. Mon travail au sein de l'équipe consiste à négocier avec la province au nom de la bande pour un établissement de soins de longue durée.
Il est important pour les membres du Comité de comprendre que nous sommes un modèle pour la Nouvelle-Écosse et que nous pourrions être le modèle du pays. Il n'y a aucun mécanisme ni aucun établissement de soins de longue durée du genre en Nouvelle-Écosse à l'heure actuelle. Pour le chef et le conseil, c'est une priorité, car nos aînés ont besoin de ces soins. Nos aînés résident dans des établissements de soins de longue durée en dehors des réserves, et ils en souffrent. Les membres du Comité doivent comprendre que ces gens veulent revenir dans leur communauté, en raison des différences culturelles et linguistiques auxquelles ils sont confrontés.
Prenons par exemple les soins palliatifs. Dans les communautés des Premières Nations, la mort n'est pas perçue de la même façon que dans les autres communautés. Les soins palliatifs sont très importants. Chez nous, lorsqu'une personne est mourante, elle est entourée de sa famille. Lorsque ces personnes séjournent dans les hôpitaux régionaux, le personnel est dépassé parce qu'il ne peut pas gérer tous ces gens qui viennent à leur chevet. Ces personnes meurent dans des établissements de soins de longue durée alors qu'elles veulent mourir dans leur communauté. Il n'y a aucun mécanisme en place pour cela, et comme les gens ne comprennent pas la langue, ils ont peur. Ainsi, ils ne veulent pas aller dans les résidences non autochtones. Ils ne reçoivent pas le soutien dont ils ont besoin.
À l'heure actuelle, nous négocions avec la Nouvelle-Écosse. La province a reconnu le problème et négocie la construction d'un établissement de 48 lits dans notre communauté... ce n'est pas seulement pour notre communauté. Nous avons créé un modèle destiné à tous les Mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse. La province compte environ 1 500 membres des Premières Nations.
Nous vous avons transmis notre présentation afin que vous la lisiez quand bon vous semblera. Nous créons un modèle qui reflète les besoins de la communauté. Nous avons même pris de l'avance et avons formé 10 préposés aux soins continus dans la communauté, trois ans avant le début des négociations. Pourquoi? Ce sont des occasions d'emploi pour nos jeunes — et nous en avons beaucoup — qui pourront travailler et redonner à leurs pairs, en offrant des services que nous sommes en mesure d'offrir, dans des établissements que nous pouvons bâtir.
Nous savons que les négociations relèvent du provincial, mais le gouvernement fédéral a lui aussi un rôle à jouer pour nous aider avec l'infrastructure immobilière. Ces établissements coûtent cher à construire. Dans vos collectivités, les infrastructures sont bâties. Elles représentent le principal intérêt. On ne peut pas offrir de services sans installations.
Nous avons trois médecins à temps plein dans la communauté. La progression naturelle consiste à passer des soins primaires aux soins de longue durée. Dans bon nombre des communautés des Premières Nations, nous pouvons construire de nouveaux logements. Les aînés vivent dans de grandes familles et ne reçoivent pas les soins dont ils ont besoin. Nous avons 400 membres de notre communauté qui ont besoin de soins à domicile. La progression naturelle pour ces gens est de passer à un établissement de soins de longue durée. À l'heure actuelle en Nouvelle-Écosse — je sais que c'est un enjeu provincial —, nous avons une liste d'attente non seulement pour notre région, mais pour toute la province. Ce sont 3 500 Néo-écossais qui attendent d'avoir une place dans un établissement. Le besoin est évident.
Nous croyons pouvoir être un modèle pour les Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse. Nous pourrions offrir ce service dans la communauté au même titre que nous le faisons pour l'alcool et les drogues. Nous le faisons dans la communauté. C'est une communauté vaste et progressiste. Nous voulons offrir ce service avec l'aide des gouvernements fédéral et provincial; avec notre chef et notre conseil.
Nous sommes prêts à le financer. Le besoin est là. Nous avons évalué les coûts et nous avons un partenaire d'exploitation. Nous savons que nous ne pouvons pas y arriver seuls. Nous avons une entente avec Shannex, le plus important exploitant d'établissements de soins de longue durée du Canada atlantique. L'entreprise est citée dans notre rapport. Elle offre des services à des milliers de personnes au Canada atlantique.
Nous savions que nous ne pouvions pas y arriver seuls. Nous n'avons pas l'expertise ni la capacité pour le faire. Nous visons donc une coentreprise. Nous avons un contrat de gestion d'une durée limitée. Nous voulons offrir ces postes administratifs à nos membres. Nous avons déjà du personnel infirmier et des préposés aux patients. Nous voulons atteindre un autre niveau et offrir des services au-delà de la catégorie « A ». La bande a réalisé une étude de faisabilité qui a coûté 30 000 $. Pourquoi? Nous avions besoin de comprendre les besoins de la province.
Nous avons demandé au gouvernement provincial d'établir un partenariat associé à un tarif journalier pour 48 lits: si ces lits ne sont pas occupés par des membres des Premières Nations, nous sommes prêts à accueillir d'autres personnes qui se trouvent sur la liste d'attente. Les lits vides n'aident pas à payer les tarifs journaliers dont nous avons besoin pour fonctionner. Nous avons fait ainsi pour que l'établissement ne soit pas un fardeau pour la bande et ne soit pas subventionné annuellement par la bande non plus. Il faut qu'il soit indépendant sur le plan opérationnel. C'est pourquoi nous avons établi un partenariat... pour créer ces possibilités, offrir le service et créer des emplois pour les jeunes qui en ont désespérément besoin.
Merci.
Très bien.
Je vais maintenant revenir en arrière et inviter le député Robillard à poser ses questions.
[Français]
Je vais poser mes questions en français.
D'abord, je vous remercie toutes et tous d'être présents au Comité aujourd'hui.
Ma première question s'adresse à Mme Robin Decontie.
Pourriez-vous décrire les besoins particuliers des différents groupes d'âge nécessitant des soins de longue durée dans votre communauté?
[Traduction]
Environ 25 % des membres de notre communauté auront plus de 65 ans au cours des cinq prochaines années. La population vieillissante est en croissance; cette tendance sera peut-être moins forte pour la prochaine génération. On dit que c'est la génération des baby-boomers, l'ensemble d'aînés qui auront besoin de soins de longue durée, mais c'est une question de vieillissement. D'autres personnes et d'autres patients dans notre communauté ont besoin de soins de longue durée pour d'autres problèmes, comme je l'ai dit rapidement dans mon exposé. Ces personnes ont besoin de soins de longue durée pour des maladies chroniques. Nous aimerions aider cette population également et lui offrir des services.
[Français]
Merci.
Ma prochaine question s'adresse à M. Stephen Parsons ou à Mme Sharon Rudderhan.
En 2014, votre communauté a fait savoir au gouvernement provincial sa volonté de construire un établissement de soins de longue durée. Quelles mesures le gouvernement fédéral pourrait-il prendre afin de coordonner davantage son processus de financement avec celui des provinces?
[Traduction]
En ce qui a trait au processus associé aux établissements de soins de longue durée, nous n'avons actuellement d'autre choix que de passer par l'harmonisation avec la province. La province a dû tout approuver, de l'entente de gestion aux niveaux de dotation et aux opérations... tout cela. La province nous dit qu'il n'y a aucun rôle pour...
La province a le pouvoir d'octroyer un permis. Notre objectif est d'obtenir un permis de 20 ans. Pour financer le projet, nous avons besoin de tarifs journaliers fondés sur un modèle de 20 ans. Notre projet est prêt à être construit. Oui, nous passons par le processus d'octroi de permis, d'approbation et ainsi de suite avec tous les ministères du gouvernement, que ce soit le ministère de l'Environnement ou celui de l'Agriculture. Tout cela va suivre son cours. C'est un territoire nouveau pour nous. Aucune Première Nation de la province n'a encore emprunté cette voie. Nous sommes les premiers.
Nous avons communiqué avec les représentants de la ministre et avec notre député local. Puisque le processus décisionnel relève de la province, le rôle du gouvernement fédéral consisterait non seulement à travailler en partenariat avec la province, mais aussi à nous aider à mettre sur pied l'établissement de soins de longue durée. Je ne sais pas comment le Comité ou le ministère fédéral de la Santé pourrait travailler avec la province, mais je sais que nous avons créé un modèle. Le gouvernement fédéral a son rôle à jouer, tout comme le gouvernement provincial. C'est pourquoi nous sommes ici et nous voulons encourager nos députés qui siègent au Comité à parler.
J'aimerais revenir en arrière un instant, pour bien faire comprendre la situation aux membres du Comité. J'ai beaucoup d'amis qui travaillent dans le domaine des soins de longue durée. C'est une honte de ne pas connaître les Premières Nations, de ne pas les comprendre, de ne pas connaître leurs traditions ou leur culture. C'est humiliant pour les familles des Premières Nations d'entendre dire « oh, non, pas encore eux » lorsqu'ils rendent visite à leurs aînés dans les établissements de soins de longue durée. Il faut que vous compreniez cela. Pensez à votre propre famille. C'est inévitable: les personnes qui vieillissent ont besoin de services. C'est à cela que servent les gouvernements. C'est notre devoir collectif. Nous offrons ces services. Imaginez une famille qui vient d'Eskasoni et qui entend le personnel de l'établissement dire cela. C'est inquiétant.
[Français]
[Traduction]
J'aimerais poser quelques questions, rapidement.
À l'heure actuelle, vous songez à un établissement de combien de chambres?
À l'heure actuelle, vous dites que le gros problème, c'est que la province est peut-être prête à octroyer un permis et à financer l'établissement, mais qu'elle cherche un partenaire pour financer les immobilisations. En règle générale, ce n'est pas le rôle du gouvernement fédéral en matière de soins de longue durée. Est-ce que vous recommandez que le gouvernement fédéral songe à réaliser un projet pilote avec deux, trois ou quatre collectivités du pays en vue de financer les immobilisations pour des lits de soins de longue durée?
Dans le cadre de notre travail avec le ministère, nous avons parlé de ce type de modèle. Nous en avons parlé et nous l'avons encouragé... S'il s'agit d'un enjeu national et d'une occasion à l'échelle nationale, alors il faut que quelqu'un se mouille en premier. Nous croyons que nous sommes prêts; nous sommes capables; nous avons l'entente de gestion et au bout du compte, nous allons financer ce projet. Avec un permis de 20 ans, on peut obtenir un prêt de la banque. Nous disons que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer; qu'il doit être notre partenaire et nous aider à combler le manque de financement.
M. Mike Bossio: Parfait.
Stephen, je n'ai pas besoin de m'imaginer la situation. Je suis le seul député des Premières Nations de l'Ontario. Certains membres de ma famille se trouvent dans ces résidences; je connais bien la situation. Je sais que les membres de notre communauté sont victimes de discrimination dans ces établissements. Le personnel ne comprend pas la culture et la formation est déficiente.
J'aimerais commencer avec Mme Decontie.
Vous avez parlé d'une pratique illégale des soins et de poursuites. Je me souviens qu'il y a quelques années, on avait eu des problèmes avec les garderies, parce que le gouvernement provincial avait un règlement très strict sur les certificats de garde des bébés et tout-petits, et les ratios associés à la petite enfance. Je sais que cela n'a pas très bien fonctionné pour les communautés des Premières Nations, parce que certaines collectivités — les plus petites surtout — n'arrivaient pas à répondre aux normes relatives à l'âge. Cela a donné lieu à un conflit et c'était un problème en ce qui a trait aux normes d'octroi des permis.
Est-ce qu'il s'agit d'un enjeu similaire ici? Est-ce qu'il y a des clients des résidences-services qui sont... Pouvez-vous nous expliquer en quoi consistait la poursuite?
J'ai parlé d'une possibilité de poursuite. La province peut surveiller les activités de soins de nos résidences. Si elle constate qu'une infirmière offre des soins infirmiers dans une résidence non attestée... L'enjeu, c'est que les soins infirmiers sont offerts dans un foyer de groupe non attesté, financé par SAC. Nous devons uniquement prodiguer des soins de niveau 1 et de niveau 2. Toutefois, lorsque l'outil d'évaluation montre qu'un patient ou un client a besoin de soins au-delà de ces niveaux, les infirmiers et infirmières doivent faire des visites à la maison, comme ils le font dans le cadre d'autres programmes de soins à domicile. Comme le client habite dans une résidence-services de SAC non attestée, l'infirmière n'a pas le droit de pratiquer en vertu du projet de loi 90, une loi du Québec qui règlemente les obligations des professionnels de la santé dans les réserves.
C'est une question de permis. L'infirmière risque de perdre son permis d'exercer si elle prodigue des soins infirmiers dans des établissements non attestés par la province. Notre résidence est attestée par Agrément Canada. Nous répondons à toutes les normes de sécurité et de qualité. Toutefois, ce n'est pas suffisant pour éluder la menace qui plane sur les infirmiers et infirmières, qui risquent de voir leur permis révoqué par l'Ordre des infirmiers et infirmières du Québec s'ils offrent des soins dans ces résidences. C'est un ordre professionnel.
Avez-vous songé à des solutions possibles? Est-ce que vous discutez avec le gouvernement provincial pour régler ce problème? Je ne vois pas comment le gouvernement fédéral pourrait vous aider à surmonter ce défi. Croyez-vous qu'il a un rôle à jouer à cet égard?
À mon avis, le fédéral a, à long terme, un rôle à jouer qui nécessite des discussions pour déterminer de qui relèvent les soins de santé dans les communautés. Actuellement, dans les collectivités sous compétence fédérale, les soins de santé ne relèvent pas du fédéral. Tout est délégué aux provinces, n'est-ce pas?
Il convient, dans ce monde en pleine mutation, de s'adapter et de trouver des façons d'effectuer un transfert de compétence pour la prestation des soins de santé dans les réserves sous compétence fédérale. Si nous devons accroître nos services et assurer nous-mêmes la prestation des services pour notre population, comment pourrons-nous y parvenir en toute sécurité et en toute légalité sans que plane la menace d'une révocation du permis d'exercice du personnel infirmier, d'un médecin de famille ou d'un praticien qui enfreindrait un règlement quelconque dans ses fonctions?
Ma prochaine question s'adresse à Sharon et à Robin.
Dans le cadre de vos fonctions, vous avez probablement l'occasion de rencontrer vos collègues de partout au pays. Selon vous, y a-t-il des administrations ou des collectivités qui jouent un rôle de chef de file pour certains des enjeux que vous venez de mentionner? Vous avez parlé de votre situation actuelle. Avez-vous eu des discussions en Colombie-Britannique, par exemple, avec la First Nations Health Authority? Auriez-vous des commentaires sur certaines activités qui ont lieu au pays?
Je peux commenter.
Au Québec, la commission de la santé a entrepris un projet de gouvernance avec l'ensemble des centres de santé des Premières Nations de la province afin de déterminer le modèle idéal pour la création d'une autorité de la santé comme celle de la Colombie-Britannique. Ce nouveau développement en matière de gouvernance nous amène aussi à poser la question suivante: en quoi cela cadre-t-il avec le rôle d'une autorité de la santé au Québec?
La situation évolue au Québec. Nous avons en outre consulté d'autres provinces pour trouver des solutions que nous pourrions implanter chez nous. Il y a donc des progrès dans la province.
En outre, en Nouvelle-Écosse, nous avons obtenu l'appui et l'engagement des dirigeants pour la création d'une autorité de la santé pour la communauté micmaque de la Nouvelle-Écosse. Le gouvernement provincial actuel a été informé. Nos dirigeants ont renseigné les autorités provinciales de notre démarche; des préparatifs sont en cours pour la tenue de discussions, je crois.
Selon vous, l'autorité de la santé exercerait-elle dans un premier temps les rôles actuels, notamment en matière de santé publique et de soins à domicile et communautaires, avant d'être appelée à jouer un rôle accru en fonction de l'augmentation de ses capacités? Cela correspond-il à votre vision à long terme?
Oui, en effet. Nous avons... Je n'ai pas apporté la documentation que j'avais à ce sujet.
Les problèmes qu'on observe dans les collectivités des Premières Nations sont souvent liés au manque de données pour étayer nos théories. Dans le cadre de notre projet de couplage des données en Nouvelle-Écosse, les données ont permis d'ouvrir une porte et d'entreprendre des discussions pour que les fonctionnaires aient une idée claire des enjeux que nous soulevions, par exemple, les taux actuels de maladies cardiovasculaires et de toutes les maladies chroniques pour lesquelles la province collecte des statistiques pour la population générale.
Nous comprenons maintenant qu'il est essentiel d'avoir des données si nous voulons documenter les besoins des collectivités Premières Nations. Cet aspect a été au centre de nos préoccupations ces 10 dernières années. Nous avons terminé le couplage des données et nous étudions maintenant la création d'un processus de gouvernance.
Merci.
Merci à tous d'être ici aujourd'hui pour discuter de cet enjeu extrêmement important.
Robin, ma première question s'adresse à vous.
Dans le cadre de cette étude, il a clairement été indiqué que la compétence est un problème récurrent. Vous avez parlé du régime d'assurance-maladie et vous avez indiqué — corrigez-moi si je me trompe — que ce serait une bonne chose d'exiger des provinces une reddition de comptes accrue au gouvernement fédéral quant aux soins de santé offerts dans les réserves. Vous avez mentionné que des gens se voient refuser les services et sont renvoyés chez eux, sans obtenir de services, et que vous n'avez pas les pouvoirs nécessaires. Pourriez-vous en dire plus à ce sujet? Vous avez aussi dit que vous aviez des données pour appuyer ces affirmations. Pourriez-vous parler de cet aspect?
J'ai indiqué qu'il faut accroître la reddition de comptes des provinces au gouvernement fédéral quant aux soins de santé offerts aux Premières Nations. Actuellement, nous ne trouvons aucune donnée sur la prestation des services aux Premières Nations au Québec. Elles ne sont pas facilement accessibles. Il faudrait accroître la reddition de comptes pour que les provinces fournissent ces données, par exemple par la mise en place d'un mécanisme de production de rapports au gouvernement fédéral quant à l'utilisation des fonds destinés à la prestation des services à nos populations.
Je suis désolée; quelle était la deuxième partie de votre question?
Vous avez parlé des gens qui sont renvoyés chez eux. Collectez-vous des données sur les membres de la communauté qui indiquent avoir essayé d'obtenir des services?
Je pourrais envoyer ce rapport à Mike MacPherson; je ne suis pas certaine de la façon de procéder. Il s'agit d'une étude menée dans les communautés des Premières Nations anglophones du Québec. L'étude avait pour objet de cerner les problèmes d'accès et d'acquérir une compréhension de leur expérience, à l'échelle communautaire, de leur renvoi dans les réserves qui ne sont pas autorisées à offrir des soins médicaux. Le rapport contient des données à ce sujet.
Nous poursuivons nos observations dans la communauté de façon continue. Nous communiquons avec les membres de la communauté qui ont voulu accéder aux services offerts dans les CLSC et les établissements de santé provinciaux et qui ont été redirigés vers notre centre de soins de santé, centre qui n'a pas le même mandat ni le même niveau d'autorité pour la prestation de soins de santé.
Merci.
Un des commentaires que nous avons entendus quelques fois concernant ce rapport, c'est que le principe de Jordan doit s'appliquer de façon beaucoup plus large. Autrement, on se bute à la question de la compétence au lieu d'offrir les services aux clients d'abord et déterminer plus tard qui paye la facture.
J'aimerais avoir votre avis à ce sujet. N'importe qui peut répondre.
J'ai une opinion à ce sujet. Le principe de Jordan et le travail considérable qui a été fait pour démontrer l'existence de disparités dans la prestation des services pour les enfants des Premières Nations s'appliquent aussi aux adultes qui sont dans des situations semblables. Je suis certaine qu'il existe des données qui témoignent de l'état des choses dans les administrations qui payent les services à long terme des malades chroniques et qui se trouvent à empêcher le retour des patients adultes dans leur collectivité, puisqu'ils sont pris dans le système de soins de santé provincial.
Je suis de votre avis sur cette question. Il y a certainement moyen de veiller à ce que la question de la compétence ne nuise pas au bien-être des membres de la communauté et à leur retour dans leur collectivité après avoir obtenu des services de santé.
Je suis d'accord avec vous sur la question du principe de Jordan. Prenez par exemple les enfants handicapés; que leur arrivera-t-il lorsqu'ils atteindront l'âge de 18 ans? Si le principe de Jordan fait en sorte que des familles reçoivent une aide considérable découlant de la compétence en matière de prestation de soins, que se passera-t-il lorsque ces enfants atteindront l'âge auquel le principe ne s'appliquera plus? Qui sera responsable?
Je suppose qu'il incombe alors au gouvernement fédéral de collaborer avec les gouvernements provinciaux pour résoudre les questions de compétence, car actuellement, il n'y a pas de bonne solution.
Il a aussi été dit, dans les témoignages au Comité et dans des discussions avec des gens qui sont venus nous voir, que les données posent toujours problème. Vous avez parlé du couplage des données pour les clients des Premières Nations de la Nouvelle-Écosse. Je crois savoir que ce sont des données relatives aux aînés, en fonction de l'âge, qui servent à déceler les tendances et à cerner certains problèmes de santé qui se manifestent beaucoup plus tôt que dans le reste de la population canadienne, comme vous l'avez indiqué.
Pouvez-vous nous expliquer comment vous collectez ces données et arrivez à ces résultats?
Certainement. Comme je l'ai indiqué, nous avons entrepris ce processus il y a plus de 10 ans, parce que nous sommes confrontés aux mêmes enjeux que toutes les autres Premières Nations. Nous n'avons pas de données. Les données que nous recevions de Santé Canada ou d'AINC — veuillez m'excuser, je ne connais pas les nouvelles appellations — étaient liées à la reddition de comptes concernant le financement et l'utilisation des ressources, mais ne permettaient pas nécessairement de documenter les besoins de la communauté, qui peuvent être basés sur des récits.
Dans ma communauté, Eskasoni, nous avons entrepris un projet de recherche propre à notre communauté. Nous avons essayé de faire du couplage de données à l'aide des codes postaux, notamment, pour voir si nous pourrions extraire des données des bases de données existantes et travailler avec les universités, etc. Cela s'est avéré insuffisant. Nous avons donc poursuivi le projet, grâce à un financement provenant du Fonds de transition pour la santé des Autochtones, d'initiatives diverses et de programmes de financement de projet. Cela nous a permis de continuer.
En fin de compte, après de nombreuses années, nous avons conçu un identificateur unique permettant le couplage des données à l'aide du numéro de la carte d'assurance-maladie de la Nouvelle-Écosse et du numéro du registre d'AINC. Tout cela est entièrement contrôlé et géré par les Premières Nations de la Nouvelle-Écosse.
Je remercie nos trois témoins.
Pour commencer, j'aimerais reconnaître encore une fois que nous nous trouvons sur les territoires traditionnels et non cédés du peuple algonquin.
C'est un véritable privilège de vous accueillir parmi nous; meegwetch, madame Decontie. Je vous remercie également de votre important rôle de chef de file dans le secteur de la santé et des services sociaux à Kitigan Zibi. Je sais que vous siégez au conseil d'administration du centre Wanaki — un centre de traitement des toxicomanies et un centre de santé et de services sociaux —; vous avez donc de vastes responsabilités.
Fait étonnant, Pauline Whiteduck a travaillé avec mon père avant ma naissance. Il y a donc là un lien ténu.
Je voulais revenir au commentaire de M. Parsons concernant les besoins en matière d'immobilisations et vous renvoyer la question en vous demandant d'y répondre en fonction du contexte de Kitigan Zibi. Si la collectivité de Kitigan Zibi demandait au gouvernement fédéral d'autoriser les investissements dans les infrastructures pour améliorer les soins de longue durée... est-ce seulement un rêve, ou est-ce concret?
J'ai une idée de la complexité des relations avec le CISSSO, l'autorité régionale de la santé de Kitigan Zibi, et c'est déjà assez complexe pour tout le monde avant même d'inclure le gouvernement fédéral dans l'équation. J'ai presque envie de laisser en plan la question de la compétence et m'attarder plutôt sur un aspect pour lequel le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle plus direct: le financement des infrastructures nécessaires. Quels sont les besoins et les souhaits de la collectivité de Kitigan Zibi en matière d'infrastructures de soins de longue durée?
Nous discutions justement de cette question avant d'arriver ici. Nous disions que nous avons tous le même besoin, c'est-à-dire des investissements accrus dans les établissements de soins de longue durée. Trouver du capital est toujours un problème pour notre communauté. Lorsqu'il faut composer avec une hausse des coûts d'exploitation conjuguée à un manque de places pour les patients ou le manque d'infrastructures pour la prestation des services, cela pose problème, évidemment.
Il est certain que les investissements en infrastructures seraient consacrés à la construction d'unités de soins de longue durée dans notre communauté. On peut sans doute agrandir nos installations existantes, mais il faudrait examiner les aspects juridiques de la prestation des soins. En effet, on pourrait avoir un établissement, mais nous ne devrions pas avoir à prendre des moyens détournés pour offrir à la population des soins que nous ne sommes peut-être pas autorisés à donner. Il faut mettre en place un mécanisme quelconque pour régler ce problème avec les régimes d'assurance-maladie provinciaux.
Je dirais que les deux vont de pair. Il faut investir dans les infrastructures pour construire les établissements pour les gens qui ont besoin de soins de longue durée tout en créant un organisme de réglementation afin d'assurer nous-mêmes la prestation adéquate et sécuritaire des soins, avec une surveillance appropriée et le droit d'en assurer la prestation dans nos propres communautés.
Merci.
Je crois comprendre que l'ancien député provincial à l'Assemblée nationale et le gouvernement provincial actuel ont promis d'investir dans la construction d'un important centre de soins pour les personnes âgées à Maniwaki. Je ne sais pas vraiment comment cela fonctionne avec la collectivité voisine de Kitigan Zibi. Je précise pour ceux qui n'y habitent pas que ces deux collectivités sont situées l'une à côté de l'autre.
J'essaie de comprendre, car je ne discute pas de ces questions avec le ministre de la Santé du Québec.
Je suis heureuse que vous souleviez la question. Je n'en suis pas certaine non plus.
Selon la Régie de l'assurance-maladie, ces installations seront construites à proximité. Nous avons offert notre participation. J'ai dans mon effectif deux infirmières prêtes à siéger au comité de développement. Nous n'avons reçu aucune réponse. Je ne sais pas où en est le projet, ce qui n'est pas sans précédent lorsqu'on travaille avec la province. Nous aimerions travailler en partenariat. Toutefois, collaborer avec la province a toujours été difficile, tant pour l'accès aux soins de santé que pour la participation à un partenariat. C'est très difficile.
Cela pourrait être un domaine de collaboration à l'avenir. J'ai pour habitude de suivre le protocole; je passe d'abord par le chef en conseil, mais je pense que nous devrions lancer une invitation ouverte pour travailler avec la communauté de Kitigan Zibi et entreprendre une discussion à ce sujet avec la province. Ce sera un investissement majeur pour la région. Il serait malheureux que ce projet soit mené sans une collaboration avec les services de santé et services sociaux de Kitigan Zibi.
Avez-vous d'autres importants projets d'infrastructures en soins de santé actuellement? Nous parlons des soins de longue durée en général, mais j'aimerais élargir cela pour vous, si vous voulez en discuter.
Parallèlement aux soins de longue durée, nous devons examiner la possibilité d'accroître les services destinés aux personnes aux prises avec des problèmes de toxicomanie. On parle ici de gens blessés physiquement qui ne retrouveront pas l'état normal dans lequel ils étaient avant de sombrer dans la toxicomanie. Nous sommes préoccupés, en particulier par le sort des jeunes hommes de la communauté qui sont aux prises avec les formes les plus graves de toxicomanie.
Nous aurions aimé pouvoir régler ces problèmes nous-mêmes, d'une façon ou d'une autre. Certes, nous étudions le problème, mais nous devons avoir la capacité d'offrir plus de soins spécialisés et de travailler en partenariat et de façon concertée avec la province.
Nous aimerions accroître l'offre de services au centre de santé et élargir notre mandat de soins pour offrir plus de services comme ceux dispensés par des infirmières praticiennes, avec une supervision adéquate.
Les problèmes que nous avons avec le régime d'assurance-maladie provincial semblent être les principaux obstacles auxquels nous sommes confrontés.
J'espérais avoir la possibilité de communiquer avec notre agent de liaison du Secrétariat aux affaires autochtones pour voir quel type de relation nous pourrions établir avec notre facilitateur provincial pour régler ces questions.
Merci, madame la présidente. Je remercie nos témoins d'être ici aujourd'hui. Je vous en suis très reconnaissant.
Robin, dans votre exposé, vous avez parlé des aliments traditionnels, le gibier, par exemple. Pourriez-vous en dire plus à ce sujet?
Je disais que si nous nous prévalons d'une attestation provinciale en vue d'établir un foyer de groupe pour les personnes semi-autonomes, nous serons alors tenus de nous conformer aux normes provinciales en matière de sécurité, de prestation de services et tout le reste. Nous n'y tenons pas nécessairement si cela signifie qu'il faut renoncer à manger ce que nous voulons, c'est-à-dire les aliments traditionnels de notre communauté. Par exemple, nous aimons manger de la viande d'orignal, mais c'est considéré comme du gibier dans le contexte des foyers qui ont une attestation et qui accueillent des personnes semi-autonomes. Ce genre de viande pourrait présenter un risque d'infection bactérienne et je ne sais quoi encore, selon leurs lignes directrices sur la prévention et le contrôle des infections.
Il faudrait donc une sorte de mécanisme pour que l'attestation des foyers de soins de longue durée situés dans les réserves soit adaptée à la culture, plutôt qu'aux normes provinciales.
Tout à l'heure, vous avez dit que les jeunes hommes de votre communauté sont aux prises avec des dépendances. Nous avons réalisé une étude sur la prévention du suicide dans le Nord. L’un des points importants dont on nous a parlé, c'est à quel point la chasse et le contact avec la terre sont d'un grand secours. Ce serait là, me semble-t-il, un bon mécanisme de rapprochement: on fournirait ainsi de la viande de gibier aux établissements de soins pour personnes âgées, tout en redonnant un sens à la vie des jeunes hommes.
Est-ce une possibilité dans la communauté d'où vous venez?
Oui. Ce serait une possibilité si nous agrandissions nos établissements de soins. En amenant les jeunes hommes à assumer le rôle de soignants pour nos aînés, nous pourrions combler le fossé entre les deux.
D'accord.
Avez-vous une recommandation claire à faire en ce qui concerne la viande sauvage ou peut-être traditionnelle...?
On aime souvent dire: « Je recommanderais ceci. »
Je recommanderais aux agents de liaison du SAA, au sein du ministère de la Santé et des Services sociaux, de commencer à tisser des liens avec leurs régies. Il y a, je crois, 17 régies régionales au Québec. Ces intervenants doivent reconnaître l'importance de réseauter avec nous au moment de déterminer les normes d'attestation. Nous voulons rendre des comptes, obtenir une attestation, instaurer des pratiques de soins sûres et sécuritaires dans notre communauté. Nous voulons tout cela. Nous sommes disposés à travailler avec la province. Cependant, le réseau de communication et de liaison fait défaut.
Sharon et Stephen, vous avez mentionné tout à l'heure que vous aviez conclu avec la province une sorte d'entente axée sur un tarif journalier.
D'accord.
Êtes-vous au courant des initiatives menées à l'échelon fédéral, par l'un des ministères? Lorsque les fonctionnaires sont venus témoigner ici au tout début de notre étude, ils nous ont expliqué brièvement que, souvent, leur tâche ne consiste pas à construire des établissements, mais plutôt à financer les soins quotidiens des personnes qui se trouvent dans un établissement n'importe où au pays.
Avez-vous envisagé une telle option? Selon votre perspective, à quoi ressemble une interaction avec le gouvernement fédéral?
Je souris parce que vous avez parlé de recommandations. J'en aurai quelques-unes à formuler avant de partir aujourd'hui, s'il y a lieu.
Cela étant, le processus vise à négocier le coût des services dispensés à l'établissement, en fonction du nombre de lits. C'est une négociation provinciale.
Dans notre province, les foyers ont une capacité qui varie de 20 à 300 lits. Afin d'établir et d'administrer un établissement, on utilise cette formule — un tarif journalier par lit — pour compenser les coûts de fonctionnement. Cela varie selon le niveau de service.
Qu'en est-il du niveau fédéral? Cela me fait penser à un programme du même genre, sauf qu'en l'occurrence, on commence par le bas, n'est-ce pas? On part de l'individu, puis on remonte jusqu'à l'établissement.
Ces discussions n'ont pas eu lieu à l'échelle fédérale, car, d'après ce que nous nous sommes fait dire au moment de lancer cette initiative il y a quatre ans, les soins de longue durée relèvent de la compétence provinciale, et certains de ces coûts ont été refilés à la province.
Donc, en matière de recommandation, je dirais que oui, absolument.
Je suis d'accord, moi aussi, avec notre collègue. Les normes provinciales et fédérales doivent être modifiées pour répondre aux besoins des peuples autochtones.
Je vais vous donner un exemple. Nous venons de faire construire un tout nouveau centre de santé dans notre collectivité, pour une somme de 7 millions de dollars. Or, le centre a déjà atteint sa pleine capacité. Ce bâtiment...
Je regrette, mais il ne nous reste plus de temps, car la séance au complet tire à sa fin
Je tiens à vous remercier de votre présence et de vos exposés.
Madame la présidente, puis-je faire une dernière observation? Cela remettra simplement les choses en perspective pour les membres.
Lors de notre évaluation, nous avons entendu un message clé. Ce n'est que lorsque vous entendez ces mots que vous pouvez réellement comprendre la situation.
Nos aînés d'aujourd'hui sont des survivants des pensionnats indiens. On nous a signalé que lorsqu'ils sont placés dans ces foyers pour personnes âgées, nous les institutionnalisons à nouveau. Je tiens à le répéter: nous les institutionnalisons à nouveau.
Nous avons là une occasion. J'ai entendu dire aujourd'hui que cela ne sert à rien de créer un programme. Les programmes sont conçus en dehors des sentiers battus. S'il existe un besoin, si une évaluation a été effectuée en bonne et due forme, si elle a d'ailleurs été vérifiée, si les gens sont organisés et préparés à aller de l'avant, alors collectivement, nous devons sortir de ces fameux sentiers battus.
Merci.
Voilà qui met fin aux observations.
Merci, tout le monde, d'être venu témoigner.
Nous allons passer à notre deuxième groupe de témoins.
Merci beaucoup.
Chef Peltier, commençons sans plus tarder. Vous aurez 10 minutes pour nous faire un exposé. Ensuite, ce sera au tour du chef Collins, après quoi nous passerons aux questions.
Vous disposez donc de 10 minutes pour votre déclaration. Vous pouvez commencer dès que vous êtes prêt et, après les deux exposés, les députés poseront des questions.
Bienvenue.
Meegwetch. [Le témoin s'exprime en anishinaabemowin.]
Merci à tous de me donner l'occasion de venir vous parler de quelques-uns des services que nous offrons aux aînés et aux personnes âgées de notre communauté. J'aborderai la question principalement sous deux angles: d'une part, les soins de longue durée et, d'autre part, l'administration d'un foyer de soins de longue durée dans notre communauté.
Je commencerai par là. Je m'appelle Duke Peltier, et je suis le chef élu de ma communauté. J'occupe ce poste depuis maintenant six ans. Je viens d'être réélu et j'en suis à mon quatrième mandat consécutif. Je vous remercie de me permettre de témoigner.
Les services de soins de longue durée offerts actuellement dans notre communauté portent sur des maladies chroniques de longue durée. Ils s'adressent notamment aux personnes âgées fragiles, aux clients ayant des besoins complexes et aux clients en soins palliatifs. Les programmes sont financés par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario depuis 1997 et, au fil du temps, nos services ont mis en évidence la nécessité d'offrir des services à la population vieillissante. Notre personnel infirmier et nos préposés aux services de soutien à la personne commencent peu à peu à travailler le soir ou en fin de semaine pour répondre à la demande de services requis. Les heures de travail dans le cadre d'un programme de transport générique ont également augmenté, en passant à un régime de travail à temps plein, en raison de la demande de la clientèle.
Les soins palliatifs sont également offerts à nos clients qui souhaitent rester chez eux pendant cette période. Même si beaucoup de familles jouent un rôle de premier plan en prenant soin de leurs proches à la maison, des services de soutien sont fournis par l'entremise de notre centre de santé et par le personnel infirmier ou les préposés aux services de soutien à la personne. Nous aurions préféré que les services de soins palliatifs soient offerts par l'intermédiaire de notre foyer de soins de longue durée. Créé en 1972, cet établissement offre des soins de longue durée 24 heures sur 24, 7 jours par semaine.
À l'heure actuelle, le ministère de la Santé et des Soins de longue durée fournit du financement pour aider nos clients à rester chez eux le plus longtemps possible, mais il ne s'agit pas d'un soutien offert 24 heures sur 24, 7 jours par semaine. Le budget dont nous disposons pour servir notre communauté s'établit à un peu plus de 1 million de dollars, ce qui ne permet pas la prestation de services en tout temps.
L'une des difficultés que nous rencontrons dans l'administration de notre foyer de soins de longue durée — je saute peut-être d'un sujet à l'autre, alors je vous prie d'être indulgents — réside dans le processus d'admission. C'est un défi pour notre établissement, surtout du point de vue opérationnel, car le processus d’admission est mené par le conseil d'administration des Centres d'accès aux soins communautaires et par l'entremise des Réseaux locaux d'intégration des services de santé, ou RLISS. Dans ce genre de situations, puisque notre foyer reçoit une avance de fonds — 100 % du financement, selon le nombre de lits que nous sommes autorisés à avoir —, chaque jour d'inoccupation d'un lit finit par réduire notre budget de fonctionnement. Voilà l'un des problèmes qui échappent à notre volonté, et c'est un aspect que nous aimerions examiner, en particulier lorsqu'un membre de notre communauté demande à être placé dans le centre afin de recevoir des services au sein de notre communauté.
En 1972, l’intention était de créer cet établissement pour prendre soin de nos aînés, leur offrir des services dans leur propre langue et leur servir les aliments auxquels ils sont habitués. J'ai bien aimé les observations faites tout à l'heure au sujet des aliments traditionnels. C'est un défi. Nous avons dû les retirer de nos menus, car la réglementation provinciale en vigueur ne nous permet pas de servir nos propres aliments. Les règlements actuels exigent que la majeure partie de l'alimentation offerte dans les foyers soit constituée de produits transformés, ce que beaucoup d'entre vous n'aimeraient pas manger tous les jours. Si on nous apporte, en guise de don, du poisson fraîchement pêché dans le lac, nous n'aurons quand même pas le droit d'en servir.
C'est assurément un défi, et je pense que c'est sans doute l'une des questions à prendre en considération dans toute approche nationale.
La difficulté liée aux services de soins de longue durée offerts par le foyer réside, en partie, dans le soutien en cas de troubles du comportement. L'Ontario nous fournit, chaque mois, certains services de soutien; cependant, nous avons besoin de financement pour offrir une formation sur place aux membres du personnel en raison de l'augmentation du nombre de comportements d'agressivité observés chez les clients de nos foyers.
S'ajoutent à cela les barrières linguistiques auxquelles se heurtent les clients à leur arrivée. Notre personnel n'a pas accès à des interprètes, surtout ceux qui parlent le français ou une langue autochtone autre que celle que nous parlons dans notre communauté. Il faut du financement à cet égard afin que nous puissions fournir un soutien adéquat aux personnes ayant de la difficulté à communiquer. Peut-être que certains de ces services de soutien pourraient être offerts par Skype ou par vidéoconférence, des technologies qui sont aujourd'hui largement répandues.
Par ailleurs, nous éprouvons des difficultés sur le plan du recrutement, surtout en ce qui concerne le poste de directeur des soins, qui gère le foyer de soins de longue durée. Il s'agit d'un poste réglementé qui définit clairement le rôle du directeur des soins au sein de l'établissement et, en particulier, les qualifications nécessaires. Au cours des six dernières années, nous avons sans cesse reçu des avertissements pour cause de non-conformité, principalement à cet égard, car le directeur des soins doit posséder une expérience préalable dans un foyer existant ou dans un centre. Le hic, c’est que bon nombre des gens qui ont de l’expérience à titre de directeurs des soins occupent déjà un poste et s'ils partent, c'est pour prendre leur retraite.
Il n'y a aucune possibilité de formation pour les jeunes infirmiers et infirmières des Premières Nations qui souhaitent acquérir les compétences nécessaires pour devenir des administrateurs en chef et des pourvoyeurs de soins principaux au service des aînés de notre communauté. S'il existe des possibilités de formation pour permettre à des infirmiers et infirmières autochtones qualifiés de devenir des directeurs des soins, j'aimerais bien savoir où elles se trouvent, car c'est le genre de mesures de soutien qui sont nécessaires pour que ces ressources soient disponibles dans notre communauté ou dans toute autre communauté des Premières Nations qui administre un foyer de soins de longue durée.
Il y a d'autres problèmes de recrutement du côté des préposés aux services de soutien à la personne. Ces employés sont en forte demande partout dans la province, et l'accès à cette éducation est limité dans notre région.
Même si nos amis du Nord de l'Ontario affirment que notre communauté se trouve dans le Sud de la province, nos amis du Sud de l'Ontario disent le contraire, alors nous sommes pris entre deux feux. Nous sommes situés sur l’île Manitoulin et nous ne sommes tout simplement pas assez nombreux pour assurer des possibilités de formation sur place pour ces postes.
Ce sont aussi des postes très exigeants. Il faut une catégorie spéciale de gens pour faire ce type de travail, d'autant plus que leur salaire est habituellement très limité.
L'accès à de telles mesures de soutien est nécessaire pour qu'une personne puisse aspirer à ce genre de travail, non seulement dans un foyer de soins de longue durée, mais aussi au sein de la communauté par l'entremise de services de soins de longue durée.
Nous observons certains changements démographiques dans les soins de longue durée. Nos services ne visent plus que nos grands-mères et nos grands-pères. Nous voyons maintenant des jeunes qui nécessitent des soins de longue durée à cause d’un certain nombre de problèmes, qu’il s’agisse de problèmes de comportement ou de santé mentale, notamment l’autisme et les troubles du spectre de l’alcoolisation foetale. C'est maintenant une réalité dans notre communauté. Les membres de la jeune génération sont en train de grandir et ils ont, eux aussi, besoin maintenant de ce type de soins dans la communauté.
Nous nous démenons pour assurer un accès aux services pour nos résidants aux prises avec ces problèmes. Nous ne recevons pas l'appui des équipes médicales lorsque nous envoyons des clients passer des évaluations psychiatriques. Ma communauté compte une population de 3 500 habitants dans la réserve. Lorsque nous examinons certaines des municipalités voisines qui en comptent 400 ou 500, nous constatons qu’elles disposent d’équipes de santé familiale.
Il n'y a aucune équipe de santé familiale dans notre communauté. Au cours des 10 dernières années, nous avons demandé aux fonctionnaires provinciaux et fédéraux de permettre le financement d'une telle équipe au sein de notre communauté, mais c'est l'une des difficultés. Selon nous, bon nombre des mesures de soutien et des services nécessaires pour notre communauté pourraient être allégés grâce à la création d’une équipe de santé familiale.
La plupart des règlements en vigueur dans le Réseau local d'intégration des services de santé du Nord-Est sont de nature très normative et ne permettent pas la tenue de consultations aux termes de la réglementation prévue dans la Loi sur le ministère de la Santé et des Soins de longue durée. Il y a beaucoup de choses... beaucoup d'aspects qui nous....
Je ne suis pas habitué à cela.
Des voix: Oh, oh!
Je viens de loin pour témoigner. Je vais essayer d'accélérer. Je vais aborder d'autres points.
Notre centre est actuellement classé « C ». Il a été construit en 1972. La réglementation provinciale nous oblige à le réaménager et à le rénover avant juin 2025. Autrement, nous risquons de perdre notre permis pour offrir les services dans la communauté. Nous travaillons actuellement à une étude de faisabilité pour accroître le nombre de lits autorisés à une centaine environ. Nous avons déjà fait une demande, qui n'a pas encore été acceptée. Une des choses que...
Oh, on éteint les lumières maintenant.
Des voix: Oh, oh!
Nous avons grandement besoin d'un programme complet sur le diabète, pas seulement dans ma communauté, mais dans beaucoup d'autres également. C'est là où nous voyons les avantages des soins de longue durée qui sont offerts de façon précoce, car nous avons beaucoup de jeunes qui sont touchés par le diabète. Il y a le volet prévention du programme...
Très bien. N'oubliez pas vos autres points. Nous y reviendrons.
Nous passons maintenant au chef Collins.
Merci, madame la présidente. Tout comme le chef Duke, je viens de loin pour faire entendre notre voix ici aujourd'hui.
La présidente: Oui.
Chef Peter Collins: Je suis chef de ma communauté depuis 18 ans. C'est une longue aventure, et c'est le moins qu'on puisse dire.
J'ai fait une pause de deux ans pour me reposer, car vous savez, c'est un travail difficile. Nous sommes dans une situation différente de celle de mon ami Duke, parce que sa communauté dispose d'un centre de soins de longue durée. Nous sommes tout au début du projet, et en discussions depuis un certain temps avec le gouvernement provincial. Le gouvernement est en train de lever le moratoire sur les permis qui est en place depuis un bon moment, alors je pense que nous avons finalement fait des progrès. Dilico est heureux de pouvoir passer à la phase 2 de l'allocation pour les soins de longue durée du ministère de la Santé pour la construction d'un centre de 96 lits. L'ouverture d'un centre de soins de longue durée autochtone aidera Dilico à s'acquitter de son mandat unique qui consiste à offrir des services aux membres de la nation Anishinabeg tout au long de leur vie. Le gouvernement n'est pas sans savoir que le projet de centre s'inscrit dans la droite ligne de plusieurs appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, notamment l'appel à l'action numéro 18:
reconnaître et (...) mettre en application les droits des Autochtones en matière de soins de santé tels qu'ils sont prévus par le droit international et le droit constitutionnel, de même que par les traités;
l'appel à l'action numéro 20:
reconnaître les besoins distincts en matière de santé des Métis, des Inuits et des Autochtones hors réserve, (...) respecter ces besoins et (...) y répondre;
l'appel à l'action numéro 21:
fournir un financement à long terme pour les besoins des centres autochtones, nouveaux et de plus longue date, voués au traitement de problèmes de santé physique, mentale, (...) et spirituelles (...) qui découlent de leur expérience dans les pensionnats;
l'appel à l'action numéro 22:
reconnaître la valeur des pratiques de guérison autochtones;
et l'appel à l'action numéro 23:
voir à l'accroissement du nombre de professionnels autochtones travaillant dans le domaine des soins de santé [et] (...) veiller au maintien en poste des Autochtones qui fournissent des soins de santé dans les collectivités autochtones.
Dilico est un chef de file dans la prestation de soins holistiques intégrés et respectueux de la culture aux enfants, aux familles et aux communautés des Premières Nations qui vivent en milieu urbain ou rural ou dans les régions éloignées. Dilico a déterminé avoir besoin actuellement d'un centre de soins de longue durée pour Autochtones de 96 lits, qui pourra être porté, c'est à espérer, à 128 lits pour répondre à la demande future. Le centre offrira des services dans un environnement respectueux de la culture aux personnes âgées de 55 ans et plus provenant des 13 communautés qui sont en partenariat avec Dilico et la Première Nation de Fort William.
Le centre sera situé sur le territoire et les terres traditionnels de Fort William pour les avantages que cela présente, notamment la disponibilité des terres et leur proximité avec les services de santé complémentaires, dont les services de santé offerts par Dilico, les équipes de santé familiale autochtones, les guérisseurs traditionnels, les services de santé communautaire et à domicile et les services de soutien personnel.
Une des seules choses qui séparent Fort William de la ville de Thunder Bay à l'heure actuelle est la rivière. Je ne parlerai pas d'un pont, mais...
Des voix: Oh, oh!
Chef Peter Collins: Il y aura également des activités récréatives adaptées à la culture dans le cadre d'un partenariat entre la Première Nation de Fort William et le Centre régional des sciences de la santé de Thunder Bay. J'ai eu une discussion dernièrement avec le président-directeur général. Il m'a dit qu'il pourrait remplir nos 96 lits, simplement pour désengorger son organisation.
Il est difficile actuellement de déterminer le nombre d'aînés autochtones en Ontario. Le réseau de la santé est un défi. Tout d'abord, au moment de l'admission dans un centre de soins de longue durée, on ne demande pas aux gens s'ils sont autochtones. Selon la lignesantenord-ouest, il y a huit centres de soins de longue durée et aucun ne fournit de renseignements publics sur le nombre d'Autochtones qui s'y trouvent. De nombreux résidents disent penser que c'est au Hogarth Riverview Manor que se trouve le plus grand nombre d'aînés autochtones. Hogarth administre un centre de soins de longue durée de 544 lits qui offre des soins spécialisés à nos aînés qui souffrent d'Alzheimer et de démence et qui ont besoin de beaucoup de soins médicaux et de soins généraux à long terme. En date du 30 novembre 2017, il y avait 629 centres de soins de longue durée et 78 943 lits autorisés en Ontario. Parmi eux, quatre centres sont situés dans des communautés des Premières Nations.
Vous avez entendu le chef Duke parler du centre de soins de longue durée dans sa communauté. L'autre organisation, les Six Nations, dispose de 50 lits. Oneida en a 64. Les Mohawks d'Akwesasne ont un centre de 100 lits.
La jeune population autochtone est celle qui croît la plus rapidement au Canada. Il en va de même des aînés. En 2006, 4,8 % de la population autochtone étaient âgés de 65 ans et plus. Nous organisons un party de Noël, et on constate chaque année que le nombre d'aînés s'accroît dans la communauté. Nous accueillons plus de 400 personnes à nos soupers de Noël. Notre population d'aînés est en croissance et nous avons besoin d'un centre pour les aider en fin de voyage. Selon Statistique Canada, la population de Métis et d'Inuits âgés de 65 ans et plus pourrait plus que doubler d'ici 2036.
Selon le rapport Les plus vulnérables au Canada: Améliorer les soins de santé pour les personnes âgées des Premières Nations, inuites et métisses, les communautés des Premières Nations font face à la situation en mettant en place des programmes de soins communautaires et à domicile et des services de soutien personnel pour garder les aînés à la maison dans leurs communautés. Nous travaillons aussi à la création, après le démarrage du centre, d'un centre de formation. Ce sera un centre de formation non seulement pour les membres de notre communauté, mais également pour combler les pénuries à Thunder Bay et dans toute la région nord-ouest de l'Ontario. Nous sommes en train de préparer un partenariat avec le Collège de la Confédération pour offrir de la formation sur place aux préposés aux services de soutien à la personne, aux diététiciens et à tous ceux qui travaillent dans un centre de soins de longue durée.
Dilico répond aux besoins de nombreux aînés grâce à son programme de services de soutien personnel et de soins communautaires et à domicile et sait que de nombreux aînés refusent de se rendre dans les villes avoisinantes pour éviter d'être placés dans un centre de soins de longue durée, ou refusent de recevoir des soins médicaux par crainte d'être placés dans un établissement étranger.
Pourquoi voulons-nous créer un centre de soins de longue durée autochtone au sein d'une Première Nation? En juin 2017, le RLISS du Nord-Ouest, les chefs de l'Ontario, les chefs des Premières Nations, les hauts fonctionnaires du ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario, Santé Canada et Affaires autochtones et du Nord ont formé un groupe de travail tripartite sur les soins de longue durée des Premières Nations. J'ai fait partie du groupe de travail. Nous avons fait des progrès, mais ce que nous voulons accomplir — les Mohawks de la baie de Quinte et la Première Nation de Fort William en collaboration avec Dilico — est de faire approuver la phase 1, puis de passer aux deux autres phases. Nous allons préparer la voie pour que d'autres puissent créer des centres de soins de longue durée dans leurs communautés, et nous avons déjà fait beaucoup de travail en ce sens.
Les discussions du groupe de travail ont permis de dégager quatre priorités: améliorer l'accès aux services; améliorer la planification des immobilisations et le financement; renforcer la prise de décisions, et améliorer la collecte de données. La Première Nation de Fort William et Dilico ont fait leur ces priorités et sont résolus à collaborer avec le Canada et l'Ontario pour optimiser les soins de santé offerts aux aînés dans nos communautés.
Les travaux du groupe de travail tripartite nous renseignent également sur la situation démographique des Premières Nations au Canada et en Ontario et sur les besoins en soins de santé de la population, et nous fournit le contexte nécessaire aux discussions sur la disponibilité des services de santé et sur les besoins dans les communautés des Premières Nations. En 2011, l'âge moyen des membres des Premières Nations en Ontario était de 29,4 ans; il était de 29,8 ans à l'extérieur des réserves, et de 27,4 ans dans les réserves.
La population des Premières Nations et des autres groupes autochtones est plus jeune que celle des non-Autochtones, dont l'âge moyen est de 40,2 ans, soit l'âge de Don actuellement.
Des voix: Oh, oh!
Chef Peter Collins: En 2016, 236 685 personnes s'identifiaient comme membres des Premières Nations. Un peu moins des deux tiers — 64 %, ou 151 210 personnes — ont déclaré être des Indiens visés par un traité, des Indiens inscrits, comme on les appelait dans la loi raciste baptisée Loi sur les Indiens. Un peu moins du quart — 23 %, ou 54 000 personnes — ont déclaré habiter dans une réserve.
De manière générale, les Autochtones au Canada ont des taux plus élevés de maladie chronique, comme le diabète, que le reste de la population. La prévalence du diabète est de trois à cinq fois plus élevée chez les Autochtones que dans la population en général.
Chez les enfants ayant un diagnostic de diabète de type 2, 44 % sont d'origine autochtone.
Le diabète a des conséquences à long terme sur la santé; il accroît notamment les risques de maladie cardiovasculaire et rénale et d'amputation. En 2013, le Conseil canadien de la santé a publié un rapport intitulé Les plus vulnérables au Canada: Améliorer les soins de santé pour les personnes âgées des Premières Nations, inuites et métisses, qui portait sur les problèmes communs auxquels font face les personnes âgées autochtones.
Oui, J'ai presque terminé. Je ne vous regarde pas pour pouvoir me rendre jusqu'au bout.
Des députés: Oh, oh!
Chef Peter Collins: Comme Ogimaa Duke l'a mentionné, nous venons de loin pour faire entendre nos voix. Je vais aller à la fin et vous dire pourquoi Fort William est tout désigné pour s'occuper de ce projet de collaboration.
La Première Nation de Fort William et Dilico ont plus de 30 ans d'expérience dans l'élaboration de programmes et de services et dans la gouvernance. Ils ont conçu des services intégrés et complets pour le peuple Anishnabe. Dilico est un organisme qui s'est spécialisé dans la connaissance et la prestation de soins de santé souples. Le projet a une grande portée et valeur et répondra aux besoins d'une population mal servie et souvent vulnérable.
Les aînés autochtones font face à de nombreux problèmes et sont souvent privés de soins de santé physique, de santé mentale et de fin de vie. La création d'un centre de soins de longue durée autochtone permettra de traiter les problèmes de santé physique et mentale, de même que ceux issus de la colonisation et des pensionnats. On y parlera notre langue, y mangera notre nourriture et y suivra nos enseignements. Il nous appartiendra et sera situé sur nos terres.
Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles il est important de bâtir un centre de soins de longue durée dans notre communauté. Comme je l'ai mentionné, il y en a un dans la communauté d'Ogimaa Duke, et nous sommes sur le point d'avoir le nôtre. Nous avons besoin que les gouvernements fédéral et provincial investissent dans l'infrastructure. C'est pour cette raison que nous sommes ici. Nous espérons que nos messages seront entendus clairement...
Très bien, chef. Vous aurez l'occasion d'en dire plus, sans doute, en répondant aux questions du député Rusnak.
Merci messieurs, d'avoir fait le long voyage jusqu'ici. C'est un déplacement auquel je suis très habitué. Je le fais deux fois par semaine.
Je me suis rendu dans chacune de vos communautés: Wikwemikong, une grande communauté sur l'île Manitoulin et, bien sûr, la Première Nation de Fort William qui se trouve et qui est la plus importante dans ma circonscription.
Comme je le disais aux gens d'Eskasoni ici, je suis le seul député des Premières Nations de l'Ontario. Je comprends les difficultés, parce que j'ai des membres de ma famille dans des établissements qui ne sont pas adaptés à leur culture et où ils doivent composer avec des gens qui leur disent: « Bon, encore ces Indiens » ou « Ils viennent profiter de notre système », et où ils sont traités de façon injuste.
On peut remédier à la situation, bien sûr, en bâtissant des centres dans nos communautés qui vont être adaptés à notre culture et bien répondre aux besoins de nos aînés, en particulier — et je pense que c'est M. Parsons qui en a parlé — nos aînés qui ont survécu aux pensionnats.
Que demandez-vous au gouvernement fédéral au sujet de ces centres? Qu'est-ce qui est le plus important? Et ma deuxième question, que demandez-vous au gouvernement provincial? Nous faisons rapport au Parlement, naturellement, mais nous pouvons aussi influencer les assemblées législatives provinciales.
Je vais demander d'abord au chef Ogimaa Duke Peltier de répondre à ces deux questions.
Deux questions sur ce que nous demandons...
Eh bien, je pense que le gouvernement fédéral a sans doute un rôle à jouer en aidant les Premières Nations à créer des lois et des règlements sur les soins de longue durée et en finançant les services adéquatement, car je dois dire que la province n'est pas pressée de nous fournir les services nécessaires dans notre centre et dans les réserves, peu importe la raison. Ce sont des problèmes de compétence...
Toutefois, une personne est une personne, et il faut lui fournir des soins. Je pense que c'est une approche qui est confirmée dans la jurisprudence maintenant, dans les principes de l'arrêt Jordan et dans d'autres décisions sur les droits de la personne: nous sommes des êtres humains au même titre que tout le monde.
Voilà une demande, soit collaborer avec nous, et aussi financer un régime complet de services de prévention. La prévention nous aidera beaucoup à réduire les maladies chroniques précoces. Nous pourrons ainsi nous attaquer aux problèmes de diabète qui touchent 15 % de la population dans ma communauté. C'est beaucoup.
Il faut qu'il y ait un changement fondamental de paradigme dans la prestation des soins de santé et la collaboration avec les Premières Nations.
À l'heure actuelle, qu'il s'agisse du système de santé ou de justice, on réagit quand les problèmes surgissent, au lieu de financer adéquatement la prévention, comme les programmes d'aide à l'enfance, les programmes de sport et d'activités physiques.
Prenons le programme de lutte contre le diabète dans ma communauté. Nous recevons 53 000 $ par année pour offrir des services à une population de 3 500 habitants. Ce n'est évidemment pas suffisant. Ce n'est même pas suffisant pour payer les professionnels de la santé qui nous fournissent des services.
C'est une des demandes auxquelles j'aimerais qu'on réponde.
Je vais répondre plus brièvement.
Des voix: Oh, oh!
Chef Peter Collins: Je préfère aller droit au but.
Ce que je demande, c'est qu'on nous aide à bâtir notre centre. Nous devons financer un projet de 23,3 millions de dollars, et sans l'aide du fédéral et du provincial pour l'infrastructure... Nous demandons au gouvernement fédéral de contribuer au financement de l'infrastructure, de même qu'aux frais de fonctionnement et d'entretien à long terme, soit un financement continu. C'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui.
Je suppose que pour le chef Peltier, un programme d'infrastructure servirait à rénover les installations et peut-être même à les agrandir, et une partie du financement qui en découle serait affectée à la nouvelle construction à Fort William...?
Vous avez brièvement mentionné vos échanges avec le gouvernement provincial dans votre exposé. Nous avons un nouveau gouvernement provincial en Ontario. Comment les discussions ont-elles avancé avec le nouveau gouvernement au pouvoir? Résiste-t-on à vos plans futurs ou tout reste inchangé?
Nous n'avons encore observé aucune réticence de la part de la province. Le dernier message que j'ai reçu de Sharon Lee Smith, la SMA provinciale, était que ce plan se poursuivrait. Le gouvernement essaie de trouver une façon de naviguer dans le système à l'heure actuelle. Dans ses annonces, il continue de parler de places dans les centres de soins de longue durée en Ontario.
Notre projet est en chantier. De notre point de vue, en ce moment, il avance toujours dans la bonne direction. Nous n'avons pas tenu de nouvelle discussion avec le nouveau gouvernement. C'est là où nous en sommes à l'heure actuelle. Nous attendons de discuter avec lui pour mettre les choses en balance, pour déterminer ce qu'elles sont, afin de pouvoir reprendre les négociations.
Le gouvernement étudie toujours le dossier. En gros, vous n'avez pas tenu de discussions, mais côté administratif, je suppose que les bureaucrates attendent toujours que le gouvernement provincial fasse l'examen qu'il doit faire en ce moment.
C'est tout à fait là où nous en sommes. Nous attendons simplement que tout se place. Comme je l'ai dit, le gouvernement s'engage toujours à financer les soins de longue durée, et nous avons espoir de faire partie des bénéficiaires de ce financement. Nous avons passé la première étape du processus d'approbation avant les élections, mais nous verrons où vont les choses maintenant.
Merci, chef Collins et chef Peltier, d'avoir fait le long voyage jusqu'à Ottawa.
Les fonctionnaires de Services aux Autochtones Canada nous ont dit qu'il n'y a que 53 installations de soins de longue durée au Canada. L'Ontario en compte cinq, alors chef Peltier, dites-nous: en faites-vous partie?
Comment cela se passe-t-il? Il n'y en a que cinq en Ontario et que 53 au Canada. Vous semblez faire partie des privilégiés. Nous pourrions probablement quadrupler ce nombre — 53 —, mais il n'y a que cinq centres en Ontario.
Pourriez-vous parler du système d'installations de soins de longue durée? Sur 53, il y en a cinq en Ontario, alors où vous situez-vous?
Nous sommes pris en compte, car je pense que nous avons essentiellement obtenu des droits acquis parce que notre centre a été construit en 1972. C'était un des premiers au Canada à être construit dans une réserve des Premières Nations.
Comme je l'ai mentionné, l'approche à ce moment-là était d'avoir un endroit où les membres de notre propre collectivité pourraient aller s'ils ne bénéficiaient pas de soutien à la maison. Nous voulions qu'il tienne compte de la réalité culturelle, c'est-à-dire que les gens puissent manger leur propre cuisine et s'exprimer dans leur propre langue avec des membres du personnel qui parlent aussi la langue de notre communauté.
En conséquence, de ce point de vue, les choses ont fonctionné comme elles devaient le faire. Ensuite, en 2007, la Loi sur les foyers de soins de longue durée du ministère provincial a instauré une nouvelle réglementation. Notre foyer a alors été jugé non conforme pour un certain nombre de raisons. Une d'entre elles était le régime alimentaire des membres de la communauté. On leur donnait normalement des aliments traditionnels. Nous avions des cuisiniers communautaires qui préparaient très bien les mets traditionnels à la base du régime alimentaire quotidien des résidants.
Une fois que la réglementation est entrée en vigueur, nous n'avons plus eu le droit de le faire même si, en gros, cela nous permettait de réaliser des économies, car nous pouvions utiliser le gibier et le poisson locaux. Nous pouvions en offrir aux résidants. Maintenant, il nous faut tout faire venir d'ailleurs, et il n'y a que des aliments transformés.
Les exigences en matière de formation et de dotation prévues dans la réglementation ont vraiment représenté un défi pour notre foyer. Il nous est difficile de trouver près de chez nous ou dans d'autres collectivités autochtones des personnes possédant les qualifications demandées pour occuper des postes administratifs dans le domaine des soins aux aînés. Il n'y a pas nécessairement de débouchés qui permettraient aux jeunes générations de combler ces écarts. Comme nous existons depuis 1972, nombre de nos employés arrivent maintenant à l'âge de la retraite, mais nous n'arrivons pas à pourvoir leurs postes.
Oui, nous l'avons clairement entendu.
Chef Collins, dans le cadre de notre étude sur les soins de longue durée, je pense que nous accordons beaucoup d'importance aux partenariats. Vous êtes près de Thunder Bay. Ici au gouvernement, nous cherchons toujours à former des partenariats. Vous avez dit que vous aviez 13 collectivités.
Lorsque vous parlez des nombres croissants à Thunder Bay, vous ne faites pas uniquement allusion aux 13 collectivités en partenariat au titre du cadre juridique. Il y a aussi la Nation Nishnawbe Aski, dont nombre des membres se rendent à Thunder Bay pour bénéficier de soins de santé et profiter des programmes et des initiatives de soins de santé. Ils se retrouvent dans des centres de soins de longue durée, et nous continuons à prendre diverses mesures pour nous occuper des membres de nos collectivités et de nos anciens et faire en sorte qu'ils se sentent chez eux dans notre communauté. Voilà pourquoi nous essayons de construire notre centre à Fort William.
Notre relation avec la Ville de Thunder Bay est excellente. Notre partenariat et notre structure avec elle se sont renforcés depuis 2011. Nous avons signé une déclaration d'engagement à collaborer en vue de bâtir notre économie, nos collectivités et le Nord-Ouest de l'Ontario, en fait. Si nous maintenons le cap, ce débouché avec le centre de soins de longue durée qui se trouvera dans notre collectivité créera probablement plus d'une centaine d'emplois durables, ce qui influera à la fois sur notre communauté et sur la Ville de Thunder Bay.
Oui, c'est important.
Depuis février, nous avons souvent entendu dire autour de cette table que la collecte de données représente un problème de taille au Canada.
Comment faire pour rectifier le tir? Devrait-il y avoir un organisme, comme l'APN, qui s'occupe des données? On en revient toujours à la question des données, et nous n'avons pas suffisamment parlé ici d'une solution.
C'est un bon argument. Peut-être qu'il est temps que vous financiez un centre unique de collecte des données que nous surveillerons nous-mêmes et non les gouvernements fédéral ou provincial ou un quelconque autre organisme. Ce sont nos données qui nous servent à présenter des arguments. Nous entendons toujours parler des données lorsqu'il est question des soins de santé et de la crise des opioïdes et tout. Donnez-nous nos données. Nous devons chercher des documents qui montrent l'incidence de ces questions.
Une des propositions qui n'a pas bougé était celle qui portait sur l'institut statistique des Premières Nations qu'une des collectivités de la nation Nishnawbe, la Première Nation de Nipissing, cherchait à fonder, mais le projet n'a toujours pas démarré.
Je savais que c'était une proposition qui se pencherait vraiment sur toutes les données qui existent concernant les Premières Nations et les services qu'elles offrent. Je pense que ce serait un centre d'information approprié, non seulement pour permettre à nos collectivités de présenter des propositions de programmes et de services améliorés, mais aussi pour échanger avec le gouvernement du Canada et le gouvernement de l'Ontario. Ils pourrait collaborer plus efficacement à offrir les soutiens nécessaires.
Vous avez mentionné les besoins spéciaux. Nous ne les avons même pas abordés. Vous avez parlé d'autisme et du syndrome d'alcoolisme foetal. Existe-t-il une solution à ces problèmes?
La présidente: En 10 secondes.
Des députés: Oh, oh!
Je peux vous dire que des programmes existent dans la province; cependant, l'accès à ceux-ci est très limité, car ils arrêtent aux limites des réserves autochtones. Ils ne s'appliquent pas à elles. Il faut que cela change.
J'aimerais peut-être ajouter quelques points.
Vous êtes conscients de la crise des opioïdes qui influe sur l'ensemble de nos collectivités. Peu importe le milieu dont vous venez, vous les voyez tomber et devenir frêles. Ce sont des personnes qui se retrouveront dans des centres de soins de longue durée. Certains d'entre eux se retrouvent en piteux état. J'en vois dans notre collectivité. L'un d'entre eux s'est fait amputer le bras. Ils sont maintenant si frêles que leur place est dans un centre de soins de longue durée, pas dans la rue.
Merci à vous deux d'être venus aujourd'hui.
Je me rappelle que ma grand-mère est allée au pensionnat de l'âge de 4 ans à 16 ans. Lorsqu'elle a été hospitalisée, nous avions un plan pour déterminer qui serait avec elle en tout temps parce que c'était tellement traumatisant pour elle de ce retrouver dans ce milieu. Je vous sais vraiment gré d'avoir eu la présence d'esprit de le mentionner, car c'est aussi une question de justice, pas seulement d'aspects légaux.
J'ai deux questions à vous poser.
Je vais revenir aux données, car cette question me préoccupe vivement. Je pense que nombre de collectivités sont effacées parce que les petites n'ont tout simplement pas la capacité de recueillir les données qu'on leur demande toujours de fournir.
Je me demande si vous pensez que nous devrions le faire à l'échelle nationale pour avoir une représentation de tout le Canada et de ce qui se passe dans les collectivités autochtones et pouvoir dégager différentes collectivités. Si nous faisions quelque chose à ce niveau, qui recevrait les données en réalité? Je suis consciente du fait qu'on ne veuille pas nécessairement les fournir au gouvernement du Canada.
Non. C'est comme la propriété intellectuelle des Premières Nations. Nous devons discuter de toute la question de la collecte des données. Nous étions près du but à un moment donné. Cela n'a pas marché, alors on a changé d'orientation.
Ce seraient nos collectivités qui obtiendraient les données. Elles nous serviraient à parler de soins de santé, de soins de longue durée ou de questions scolaires et des diverses questions que nous traitons constamment. La place de ces données serait entre nos mains et sur notre territoire.
Quoi qu'il en soit, c'est ma façon de voir les choses. Je ne suis pas certain...
Il existe des sources, par exemple, l'Institut de recherche en services de santé. Il a conservé des dossiers qui sont accessibles, du moins pour notre Première Nation. Il les catégorise ainsi. Nous avons des dossiers pour la période allant de 2002 au 31 mars 2015 pour l'ensemble des services que nos membres ont obtenu dans le RLISS du Nord-Est et en Ontario.
Il nous a donné une vaste gamme de statistiques, qui nous ont appris qu'il est 1,9 fois plus probable que nous soyons hospitalisés la première année après un diagnostic de diabète; qu'il est 3,3 fois plus probablement que nous visitions les urgences dans la première année après le diagnostic; qu'il est aussi 1,3 fois moins probable que nous consultions un professionnel de la santé pour une question non urgente pendant la première année après ce diagnostic. À un moment donné, les membres de ma communauté souffrant du diabète étaient 1,9 fois plus à risque d'avoir des problèmes cardiaques ou un accident vasculaire cérébral.
Il s'agit de nombres cruciaux avec lesquels nous devons composer. Celui qui nous frappe vraiment est qu'il est 10,8 fois plus probable que les membres de ma collectivité soient amputés. Je vois maintenant des personnes plus jeunes que moi se faire amputer. Je ne suis pas très âgé, et ils le sont moins que moi, ce qui est préoccupant. J'ai grandi avec certaines de ces personnes. Pourquoi cela se produit-il?
Nous l'avons appris à partir des données qui existent et grâce à la surveillance continue. En fait, en collaboration avec la province, nous avons lancé... En 2016, nous voulions offrir des services de dialyse dans notre collectivité, parce que nous avions 13 personnes qui voyageaient deux heures par jour pour en recevoir. Elles n'avaient pas beaucoup de qualité de vie. Nous militions en faveur de services pour elles au sein de notre collectivité. Nous avions besoin d'un nombre minimal pour qu'on offre ces services chez nous, parce qu'on le faisait ailleurs. Pendant la période de deux ans et demi où nous militions en faveur de ces services, nous avons perdu 8 de ces 13 personnes, parce qu'elles ont simplement abandonné.
Nous avons soulevé la question auprès du Réseau rénal de l’Ontario. Nous avons entamé un processus de dépistage. Nous savons qui fait du diabète précoce et qui est à risque. Nous connaissons le nombre de diabétiques qu'il y a dans la collectivité, parce que nous avons pris soin d'évaluer autant de personnes que possible. Nous savons maintenant qu'environ 60 % de nos membres souffrent de diabète. Voilà notre situation.
Pour pouvoir atténuer les services de soins de longue durée à l'avenir, il nous faut gérer les complications du diabète, car elles s'en viennent.
Oui, vous avez mentionné que nombre de ressources servent à guérir plutôt qu'à prévenir.
Une des choses dont vous avez parlé, chef Peltier, est l'équipe de santé familiale et le fait qu'elle offre des soins en province, mais pas dans les réserves. Pouvez-vous nous dire à quoi cela ressemble et le rôle que le gouvernement fédéral doit jouer selon vous dans l'établissement de pareille équipe?
L'honorable ministre Philpott, qui est aussi médecin, a visité la collectivité en juillet. Elle savait fort bien que notre collectivité devrait bénéficier des services d'une équipe de santé familiale. J'ignore comment on pourra faire en sorte que cela se produise en collaboration avec le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial, mais je crois qu'on pourrait probablement trouver une solution.
La municipalité voisine se trouve à cinq minutes de mon village et elle bénéficie des services d'une équipe complète de santé familiale. Nous faisons appel à une équipe semblable qui se trouve à 45 minutes de chez nous. Ses membres viennent dans notre collectivité pour nous offrir des rendez-vous de 15 minutes trois fois par semaine. Voilà les services que reçoivent les membres de ma collectivité.
La plupart du temps, si les personnes ont des complications et qu'elles souhaitent voir une infirmière ou un médecin, elles se rendent à notre centre de santé pour se faire dire d'aller aux urgences, à l'hôpital, à 45 minutes de là.
Peut-être qu'il serait plus abordable d'administrer un programme de transport médical. Je n'en suis pas certain. J'ignore qui a conçu le système, mais c'est ce qui se produit.
La dernière chose — et il ne me reste que quelques secondes —, c'est qu'il semble que le financement fédéral pour les infrastructures pourrait se révéler très utile pour vous deux en ce qui a trait à vos propres installations.
Ce serait notre principale source de financement en ce moment. C'est la chose que nous recherchons, car comme je l'ai dit, nous allons le financer. Fort William peut se payer un immeuble de 23 millions de dollars, mais lorsque nous prenons soin des gens et que nous devons composer avec nos aînés, le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial doivent allonger du financement pour nous aider à construire cette installation. Il ne suffit pas d'accorder le permis provincial sur-le-champ et de suspendre le moratoire.
Il nous faut aussi les ressources nécessaires pour l'entretenir. Nous savons tous qu'une installation pour les soins de longue durée est une installation d'importance secondaire. Même si nous en finançons une bonne partie, ce sera encore plus difficile de la faire fonctionner. Puis-je faire un emprunt?
Ces dernières années, certains programmes ont été mis sur pied, mais ma communauté et d'autres communautés du pays n'y sont pas admissibles parce que nous sommes des Premières Nations. On nous a aiguillés sur Services aux Autochtones Canada et on nous a forcés à présenter des demandes par l'intermédiaire de ce processus. Les montants disponibles à ce ministère étaient limités et pourtant, des milliards de dollars ont été accordés dans le cadre du Fonds Chantiers Canada, ce fonds auquel nous ne sommes pas admissibles. Les communautés disposant de capitaux propres, comme celle du chef Collins ici présent, se sont vu donner un accès sans réserve à ce programme, bien qu'elles n'y soient pas admissibles. C'est un problème.
C'est effectivement un problème.
Nous allons mettre un terme à la période des questions avec l'intervention du député Robillard.
[Français]
[Traduction]
[Français]
D'abord, je vous remercie d'être ici.
On sait que, partout au Canada, et pas seulement dans vos communautés, le vieillissement de la population nous amène à penser à nos aînés.
Selon vous, quelles mesures le gouvernement fédéral pourrait-il prendre immédiatement pour s'assurer qu'on adopte des pratiques adaptées à la culture dans le domaine des soins de longue durée?
[Traduction]
Si vous envisagez cela du point de vue de Fort William, il y a deux choses. En ce qui concerne notre communauté, nos communautés partenaires et l'ensemble de notre territoire, la façon pour vous de nous aider est encore une question de ressources. Si vous regardez le traité, vous verrez que nous sommes au nombre des premiers signataires. Ce traité parle de partage, sauf que nous voilà ici à presque quémander notre part. Partagez une partie des ressources dont vous disposez à l'échelon fédéral. Ce sont des choses auxquelles nous pensons constamment.
Notre communauté est très dynamique. Nous avons beaucoup de choses en route, mais nous continuons de lutter, et ça, c'est parce que nous sommes une communauté urbaine. Contrairement à Ogimaa Duke, notre communauté a presque complètement perdu sa langue, et c'est l'une des choses que nous devons ressusciter. Nous devons le faire pas seulement pour nos aînés, mais aussi pour faire en sorte que les aînés puissent transmettre leurs connaissances linguistiques à nos jeunes, car nous avons perdu beaucoup d'aînés qui étaient encore en mesure de parler cette langue. Voilà où le travail doit commencer — chez les aînés et à l'échelon fédéral — pour nous aider à reprendre du poil de la bête et assurer que nos gens pourront rester chez eux, là où c'est le plus convenable.
Je veux seulement ajouter que les enveloppes de financement sont très directives et qu'elles suivent une approche imposée d'en haut. Nous n'avons pas la latitude nécessaire pour nous attaquer aux vrais problèmes qui touchent nos communautés. Malgré les budgets offerts, s'il n'y a aucune occasion d'offrir tel ou tel service faute de clients, nous devons restituer l'argent parce que nous n'avons pas le droit de l'utiliser pour autre chose. C'est l'un des problèmes: la flexibilité ou plutôt l'absence de flexibilité dans les méthodes de financement et en ce qui concerne les enveloppes existantes.
[Français]
C'est sûr que, si nous avions plus de temps, je vous parlerais de ce que vous avez dit tout à l'heure sur la formation que vous aimeriez donner à vos jeunes et aux moins jeunes, afin qu'ils occupent des postes importants dans la communauté.
[Traduction]
Si nous avions plus de temps, je pense que nous pourrions en discuter pendant des heures. Vous pourriez nous bombarder de questions pendant des heures et nous pourrions y répondre.
Dans notre communauté, nos jeunes sont notre bien le plus important. Nous constatons qu'ils se tournent peu à peu vers notre culture et notre langue, et qu'ils commencent à se les réapproprier. C'est toute une réussite pour nous, mais la crise des opioïdes nous donne beaucoup de fil à retordre.
Comme je le disais, peu importe son parcours, chaque communauté doit mener ses propres luttes. L'une des choses dont nous sommes fiers, c'est le fait que, encore cette année, notre communauté compte un peu plus de 100 diplômés. Ce sont des avancées formidables pour nous, de véritables pas de géant. Nos jeunes sont ceux qui comptent le plus pour nous. C'est la même chose pour nos aînés — nous devons nous assurer qu'ils auront une fin de vie confortable.
Dans la même veine, nous avons eu beaucoup de diplômés d’études postsecondaires cette année, soit 100, dont 4 au doctorat.
Je crois que la langue constitue elle aussi une tactique de prévention. Étant donné que beaucoup d'entre nous n'ont tout simplement pas d'identité — ils ne savent pas qui ils sont, ils ont de la difficulté sur le plan culturel et ils sont à la recherche de leur culture —, nous avons amorcé un certain travail dans notre communauté afin de rétablir des piliers de soutien pour notre langue.
Je vais en profiter pour faire de la publicité pour le site challengeforchange.ca. Allez y jeter un coup d'oeil. Si vous le pouvez, faites un don. L'idée est de développer un portail en ligne où les grands-mères et les grands-pères qui n'ont plus l'occasion de parler puissent être mis en contact avec les jeunes qui ont le feu sacré et le désir de réapprendre la langue et la culture de notre peuple.
Il me reste une dernière chose.
Pour donner suite à ce que vous avez dit au sujet du fait que le gouvernement fédéral devrait s'investir sur le plan des infrastructures, croyez-vous qu'il serait important pour nous d'inclure dans notre rapport une recommandation invitant le gouvernement fédéral à procéder à un projet pilote pour financer certaines de ces infrastructures? Les Mohawks de la baie de Quinte sont dans la même situation que vous: ils ont le permis, ils ont l'engagement de la province. Devrions-nous mettre sur pied un projet pilote pour financer ces installations?
Que ce soit un projet pilote ou non, le problème que nous avons c'est qu'un plafond de 2 % a été décrété il y a quelques années relativement au financement de nos Premières Nations. Cela a eu un effet très négatif, et pas seulement en ce qui concerne l'exploitation et l'entretien de nos installations. Aucune attention n'a été accordée au renouvellement des installations non plus.
Je crois qu'il y aurait une occasion d'essayer un nouveau type de programmation et de faire preuve de créativité dans notre façon de concevoir les choses, comme un projet pilote, c'est-à-dire quelque chose qui permettrait une certaine part de financement privé assorti de certaines garanties de manière à permettre à ces partenariats d'exister à l'intérieur de la communauté.
Juste pour répondre à cela, comme vous l'avez dit, les Mohawks de la baie de Quinte sont dans la même situation que nous. Nous avons l'approbation de la province pour la première phase. Si vous voulez faire un projet pilote, utilisez-nous les deux. Faites-en un pour le Sud et un pour le Nord. Je ne sais pas à qui j'appartiens, car parfois, on me dit que je suis du Nord-Ouest de l'Ontario, mais lorsqu'il est question de financement, on me dit que je suis du Sud.
C'était une bonne question, Mike, et une belle façon pour vous, chef Collins, de clore la discussion.
Merci beaucoup, madame la présidente.
J'ai un vol à prendre pour Thunder Bay. La journée a été longue.
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