:
Merci beaucoup, madame.
Je m'appelle Theodore John Merasty. Je suis membre de la nation crie de Peter Ballantyne, dans le nord-est de la Saskatchewan. Notre territoire couvre une superficie de 32 000 km2 et compte 8 communautés et plus de 11 000 membres. C'est un vaste territoire inexploité. Il a été un peu exploité, mais pas autant qu'il aurait pu l'être.
Bonjour. Je suis un gestionnaire des terres et je siège au conseil d'administration de l'Association nationale des gestionnaires des terres autochtones, l'ANGTA. De plus, je suis président des Saskatchewan Aboriginal Land Technicians, dont je fais partie depuis un certain nombre d'années.
Mon collègue, Albert Marshall Jr., de l'Est, et moi-même sommes ici aujourd'hui pour discuter, au nom de notre association, du renforcement des capacités communautaires et de la conservation des talents dans la prestation de services essentiels dans les réserves.
Je vais dire quelques mots dans ma langue maternelle.
[Le témoin s'exprime en cri ainsi qu'il suit:]
Ohci, ohci kayahte nistanan inta nipekiskwaten Nipekiskwaten otah, otah ipe ipe kiskeyimakaw Oma mekwats otaskewaw kasihkasocihk ota Awa mina eh pemenacihakaw pemiyawak maskihkiya Ah kawikaskwa ekwa maskoskwa Ah asci ah mina asci ah minokoson how ekwa mina istemaw Awat nipakosemaw manito Awa asci akasewmow niwahkomakantik tawihtamkoyahkaw tapekiskweyahk Tamiyotakoseyahk Ekwa mina instohtamowin tamikoyahkaw Kwayask tapekiskwatokoyakaw, anohc kakisikahk ota nitoteminanak ohci merci.
[Les propos en cri sont traduits ainsi:]
J’ai beaucoup de respect pour ces gens, leur terre et leurs noms. Je leur témoigne aussi mon respect et leur offre nos remèdes en guise d’offrande. J’apporte du foin d’odeur et d’autres herbes. Nous apportons aussi une offrande de tabac. Nous demandons votre aide au Créateur. Je demande aussi à notre peuple de nous dire de parler, d’être bien entendus et d’être bien compris aussi, de nous donner voix et compréhension pour que nos voix soient bien entendues aujourd’hui. Je demande que notre peuple soit entendu aussi. Merci.
[Traduction]
Nous voulons remercier le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de nous avoir invités à prendre la parole aujourd'hui. C'est pour nous une occasion de promouvoir le rehaussement des normes professionnelles en matière de gestion des terres des Premières Nations et d'attirer l'attention sur la nécessité de renforcer les capacités des Premières Nations au pays.
Organisation apolitique et à but non lucratif, l'Association nationale des gestionnaires des terres autochtones a été constituée officiellement en 2000. Cette organisation technique est dirigée par des professionnels de la gestion des terres des Premières Nations de tout le Canada. Notre association se compose de huit associations régionales de gestion des terres représentant 195 collectivités des Premières Nations et inuites: Canada atlantique, Québec et Labrador, Ontario, Manitoba, Saskatchewan, Alberta, Nunavut et Colombie-Britannique.
Nos membres mènent leurs opérations sous différents programmes ou régimes de gestion des terres. Il y a tout d'abord le Programme de gestion de l'environnement et des terres de réserve, qui est un régime de gestion des terres au titre de la Loi sur les Indiens. Il y a ensuite l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des Premières Nations, un régime de gestion des terres en vertu d'une entente d'autonomie gouvernementale sectorielle. Et il y a Autonomie gouvernementale, un régime de plein contrôle de l'administration, des terres et des ressources.
L'Association nationale des gestionnaires des terres autochtones et ses associations régionales de gestion des terres s'emploient à offrir des occasions de perfectionnement professionnel, de réseautage et de soutien technique qui répondent aux besoins actuels, nouveaux et futurs des gestionnaires des terres des Premières Nations dans la gestion efficace de leurs terres.
Au cours de l'exercice 2017-2018, notre association a offert une formation en gestion des terres à 800 participants des Premières Nations et a eu des interactions avec quelque 2 000 autres participants, notamment pour la prestation d'un soutien technique. Pour en savoir davantage sur notre association, visitez angta.ca et cdebim.ca.
Un des fondements de la mission de l'Association est de hausser les normes professionnelles et de promouvoir l'application d'un code d'éthique chez les praticiens de la gestion des terres dans les réserves. En tant qu'organisme national d'attestation des gestionnaires des terres professionnels à l'oeuvre dans les réserves au pays, l'Association a acquis un savoir-faire dans le perfectionnement et la conservation des capacités professionnelles des Premières Nations. Depuis la création de son Programme d'attestation professionnelle en gestion des terres, l'Association a formé 175 gestionnaires des terres agréés au pays. Il n'y en a que deux ou trois en Alberta.
Au regard de la conservation des capacités professionnelles, l'Association a relevé différents problèmes pour les nations autochtones. Sans surprise, l'une des lacunes les plus importantes est le manque de fonds nécessaires pour conserver du personnel qualifié. Souvent, la rémunération que peut verser une nation est nettement inférieure à ce que pourrait toucher une personne hors réserve, à compétence équivalente. Dans le domaine de la gestion des terres, nous avons vu des gestionnaires des terres agréés quitter leur collectivité d'attache pour aller travailler pour une autre Première Nation ou pour le gouvernement ou le secteur industriel. La décision de déménager repose sur diverses considérations et la rémunération est certainement l'une d'elles.
D'autres éléments peuvent faire obstacle à la conservation des capacités, comme des attentes irréalistes quant à la charge de travail ou des descriptions de travail qui couvrent trop de responsabilités disparates. De plus, il y a l'absence de sécurité d'emploi ou d'une source de financement sûre pour les postes à long terme, et la nécessité d'un personnel qualifié plus nombreux — par exemple, plus d'un employé qualifié travaillant à ce titre. La nation crie de Peter Ballantyne est l'une des plus grandes bandes de l'Ouest canadien, et je suis le seul gestionnaire des terres, par exemple. Il y a également la stagnation salariale, le manque d'appui de la direction et la difficulté de suivre une formation à proximité du lieu de résidence, qui peut freiner le développement de carrière, surtout pour les femmes.
[Le témoin s'exprime en cri ainsi qu'il suit:]
Ekosi, tapas, Ninaskomon Albert
[Les propos en cri sont traduits ainsi:]
C'est tout. Je remercie Albert.
[Traduction]
Bonjour à tous. Je m'appelle Albert Marshall Jr. Je suis membre de la Première Nation d'Eskasoni en Nouvelle-Écosse, territoire micmac. Je siège également au conseil d'administration de l'Association nationale des gestionnaires des terres autochtones, et je suis président de l'association pour la gestion des terres autochtones de la région de l'Atlantique.
J'aimerais aussi dire quelques mots en micmac.
[Le témoin s'exprime en micmac ainsi qu'il suit:]
Ketu’ muyu’walkik tete’le’l majuinu’k piluwi kni’skamijinaq maqmiko’muwow alka’kuwenaq Ketu’ pipanimkik kisu’l tel’ piskwa’n aq jijaqmijl piskwan kulaman pilui kniskamijinuwaq kisi iknmuksitisnu’k situwo’kn aq kisi klusultitaq wjit msit kikmaninaq.
[Les propos en micmac sont traduits ainsi:]
J’aimerais honorer et reconnaître le territoire ancestral du peuple algonquin. Nous avons demandé au créateur de venir et d’y mettre son âme pour que nos ancêtres puissent nous témoigner de leur respect et qu’ils puissent parler au nom de notre peuple.
[Traduction]
Je veux honorer et reconnaître les terres ancestrales des peuples algonquins. Nous demandons au Créateur et à l'esprit de nos ancêtres de nous insuffler la sagesse et de parler pour le bien de nos peuples.
La gestion des terres de réserve peut être une entreprise très complexe et exigeante. Travailler dans le cadre juridique de la Loi sur les Indiens ou d'une entente d'autonomie gouvernementale sectorielle — codes fonciers — requiert des connaissances et des compétences spécialisées. En général, le gestionnaire des terres gère les terres, l'environnement et les ressources naturelles. Cette responsabilité peut être très exigeante et accablante pour du personnel qui n'a pas une formation et un soutien suffisants.
Au cours de l'exercice 2017-2018, en partenariat avec Services aux Autochtones Canada, l'Association nationale des gestionnaires des terres autochtones a mené 15 séances de mobilisation nationales au sujet du Programme de gestion de l'environnement et des terres de réserve et de la Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux. Plus de 300 représentants des Premières Nations y ont participé.
Un thème récurrent de toutes les séances a été la nécessité d'un financement pluriannuel stable permettant de verser au personnel de base des salaires équivalant à ceux de la fonction publique canadienne. Les capacités et le perfectionnement professionnels ont aussi été des sujets clés. Les rapports finaux des séances de mobilisation se trouvent sur le site Web de Services aux Autochtones Canada.
Nous vivons une période sans précédent de l'histoire canadienne, où les nations autochtones sont confirmées comme gouvernements de plein droit et où la relation de nation à nation entre la Couronne et les nations autochtones est entretenue activement. Dans ce processus d'établissement de relations, il est impératif que le gouvernement canadien reconnaisse les besoins des Premières Nations dans la recherche d'une plus grande autonomie et les aide dans leur démarche.
Merci encore de votre invitation.
Wela'lioq.
:
Je vais parler de ma communauté. Puisqu'elle se trouve à cinq heures de route au nord de Saskatoon, en Saskatchewan, l'accès à des établissements d'enseignement a été un facteur important lorsque j'ai décidé de la quitter pour poursuivre mes études.
De plus, je viens d'une famille de 11 frères et soeurs qui ont tous dû quitter la réserve pour faire des études, et la plupart ne sont pas retournés dans la communauté parce qu'il n'y a pas assez d'emplois et chaque Première Nation n'a tout simplement pas assez de ressources pour faire en sorte que beaucoup de personnes qui quittent la réserve pour faire des études restent.
Bon nombre d'entre nous voudraient retourner dans leur réserve et servir leur communauté, directement, mais Prince Albert, où je me trouve, est un endroit central, je dois y rester.
De plus, en ce qui concerne le manque de ressources de nombreuses communautés des réserves, la situation de bon nombre d'entre elles s'améliorerait s'il y avait, par exemple, plus de cours universitaires, voire d'écoles de métiers dans nos communautés. Par exemple, Pelican Narrows est une communauté de plus de 3 000 habitants, mais on n'y trouve qu'une école secondaire.
Des programmes sont offerts de temps à autre, mais rien de solide et durable comme un programme de deux ans menant à l'obtention d'un diplôme ou quatre ans d'éducation postsecondaire. Nous devons tous quitter la communauté pour cela.
À toute personne qui pense peut-être qu'il est facile de partir, je lui demanderais si elle déménagerait dans l'une de nos réserves pendant quatre ans pour y étudier. Le choc culturel serait assez différent et dur.
Je crois qu'il est très important que nous élargissions les possibilités d'éducation dans toutes les communautés. Plus une population est instruite, mieux c'est pour tout le monde.
Je veux seulement lancer ceci. Je sais que souvent, l'argent est un facteur en éducation, mais je vous présente la question autrement. Si l'on offre quatre ans d'études universitaires à une personne, le gouvernement du Canada aura en retour un membre productif de la société pendant plus de 40 ans qui paie des impôts, de sorte qu'il s'agit d'un bon investissement non seulement pour les Premières Nations, mais pour l'ensemble du Canada.
Merci.
:
Tout d'abord, je vous remercie.
J'aimerais commencer par saluer moi aussi le peuple algonquin. Je veux également remercier le Comité de me donner l'occasion de participer à son étude sur le renforcement des capacités communautaires et la conservation des talents au chapitre de la prestation de services essentiels dans les réserves.
Je m'appelle Melanie Debassige et je suis membre de la Première Nation de M'Chigeeng. Je suis la directrice exécutive de l'Ontario First Nations Technical Services Corporation, qui existe depuis 25 ans. Je suis la première femme autochtone à avoir été embauchée par l'organisation au cours de ces 25 années. L'organisation en est très fière.
L'Ontario First Nations Technical Services Corporation est heureuse d'avoir l'occasion de participer à l'étude. Elle a été mandatée par l'assemblée des chefs des Premières Nations de l'Ontario en 1992-1993. Il s'agit de la plus grande organisation de services consultatifs techniques de la province. Nous offrons des services consultatifs techniques dans divers secteurs: planification des projets, développement, assurance de la qualité, formation et opérations, protection contre l'incendie, services de soutien d'architecture, inspections de logement et programme de logement. Nos objectifs sous-jacents sont de favoriser une plus grande autonomie des Premières Nations et l'acquisition d'installations et d'infrastructures et le développement. En outre, nous promouvons l'élaboration de pratiques de santé et de sécurité communautaires modernes.
L'Ontario First Nations Technical Services Corporation conçoit pour les Premières Nations une capacité durable d'offrir des services techniques de façon autonome pour les générations à venir. À mesure que nous avançons, notre organisation s'appuie sur ses capacités de mobilisation pour travailler avec les communautés autochtones qu'elle sert et favoriser la réconciliation, qui est orientée par les appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation.
L'organisation travaille avec tout le personnel pour offrir un soutien culturel. L'une des choses dont nous aimons nous enorgueillir, c'est le fait que nous formons une organisation des Premières Nations, mais nous ne pouvons être uniquement une organisation des Premières Nations. Nous devons également intégrer ces pratiques et en apprendre sur nos peuples tout en tirant des leçons de ce que nous avons perdu au cours des 150 dernières années.
L'Ontario First Nations Technical Services Corporation continuera de faire appel aux conseils et au soutien des peuples autochtones pour améliorer ses stratégies d'embauche et de conservation. Nous intégrerons mieux la consultation et l'aide des aînés et nous chercherons à accroître la représentation autochtone dans nos structures de direction et de gouvernance.
L'organisation cherche continuellement des moyens de prendre contact avec les peuples autochtones avec lesquels elle travaille, de recevoir leurs commentaires et de leur communiquer de l'information. Nous sommes déterminés à essayer de nouvelles choses et à travailler étroitement avec nos gens pour innover, nous adapter et adopter des pratiques exemplaires. Idéalement, nous participerons à un effort canadien pour concevoir et présenter ces pratiques exemplaires.
Notre travail lié à la mobilisation des Autochtones est en cours, et il s'agit d'efforts à long terme, mais nous n'y sommes pas encore. Nous continuerons à travailler fort pour favoriser la réconciliation avec les peuples autochtones dans le cadre du mandat de notre organisation en investissant dans des relations significatives et durables avec les gens avec lesquels nous travaillons.
Je vous remercie encore une fois d'avoir donné à l'Ontario First Nations Technical Services Corporation l'occasion de témoigner aujourd'hui.
Meegwetch.
:
Mon domaine de travail est très spécifique. Nous recherchons des personnes qui ont des connaissances techniques très précises. La plupart du temps, nous sommes à la recherche d'ingénieurs ou de personnes qui sont dans le secteur des installations d'eau.
La difficulté que nous rencontrons, c'est qu'il n'y a pas beaucoup de programmes de stages ou de programmes coopératifs qui encourageraient les étudiants autochtones à fréquenter l'école, puis qui les aideraient pendant qu'ils font les heures nécessaires à l'obtention de leur diplôme d'ingénieur. Ils sont nombreux à avoir de jeunes familles à soutenir, mais en même temps, ils veulent avoir une carrière professionnelle. Les personnes qui choisissent ces carrières professionnelles vont retourner dans leur collectivité. Elles vont travailler. Elles vont fournir des services. Elles vont construire des centres de traitement de l'eau, de l'infrastructure — des écoles, des routes. Elles vont assurer la supervision de tous ces projets.
D'après moi, c'est l'un des plus gros enjeux que nous ayons: le manque de soutien continu au cours de ce processus. Nous faisons de notre mieux pour soutenir les programmes destinés aux jeunes avec le financement que nous obtenons de Services autochtones Canada. En même temps, nous devons en enlever un peu ici pour l'utiliser là, et nous n'avons pas beaucoup de latitude.
C'est l'un de nos plus importants défis: amener les gens à choisir les domaines techniques. Devenir ingénieur n'est pas facile. Il faut beaucoup de dévouement, beaucoup de travail, et il faut le soutien de la collectivité pour cela.
À l'OFNTSC, nous offrons des bourses d'études à des étudiants des Premières Nations. Mais où allez-vous avec 2 500 $? On ne va pas très loin avec cela. Dans mon rôle actuel, je trouve que c'est la plus grande difficulté.
Nous savons tous qu'il y a une crise en Ontario concernant l'eau potable. L'OFNTSC est fière de lever des avis d'ébullition de l'eau. Nous avons levé un tel avis pour la Première Nation de Windigo, la semaine passée. Nous faisons ce travail et nous sommes fiers… C'est là-dessus que nous fondons l'organisation — sur la prestation de tels services.
Comme je l'ai dit, nous avons des gens qui prennent leur retraite, et nous n'avons personne pour les remplacer dans ces domaines de travail parce que ce sont des domaines à la pointe de la technologie. Vous devez posséder des compétences très précises pour faire ce travail. Vous ne pouvez pas confier ce travail à n'importe qui, car c'est à la fois scientifique et technique.
:
Eh bien, en partie, c'est que si ma Première Nation utilise ses fonds pour autre chose, tout ce qu'il ne reste, c'est le budget annuel de 2 000 $ qu'octroie Services autochtones du Canada, ce qui est tout juste suffisant pour garder la tête hors de l'eau. Cela ne couvre pas les salaires, les déplacements dans toutes les collectivités, etc.
Oui, en ce qui concerne la sécurité d'emploi, cela tient aussi en grande partie au fait que, tout comme dans la société blanche — dans les conseils scolaires, les conseils municipaux, les gouvernements provinciaux ou au gouvernement fédéral —, les élections et les changements de direction ont tous des conséquences. Or, que se passe-t-il lorsqu'il y a un nouveau gouvernement? Il fait table rase. C'est la même chose dans bon nombre de nos collectivités des Premières Nations: si le titulaire du poste appartient à tel clan et qu'un nouveau clan prend le pouvoir, c'est ce nouveau clan qui décidera de tout pour l'ensemble de la Première Nation, y compris à qui iront les emplois, qui obtiendra tel ou tel poste, etc.
Je ne suis là que parce que cela convient au chef et au conseil actuels. S'ils se mettent à ne plus m'aimer pour une raison quelconque, je pourrais perdre mon poste après les prochaines élections, ce qui signifierait aussi la perte de cette capacité. Services autochtones Canada ne financera le poste que s'il y a un gestionnaire des terres accrédité pour l'occuper. S'il n'y en a pas, on peut dire au revoir à cette capacité.
Je vais vous donner un exemple. Chez nous, dans l'une des Premières Nations — je ne la nommerai pas —, j'avais un ami qui travaillait comme gestionnaire des terres agréé. Un nouveau chef et un nouveau conseil sont arrivés et ils ont eu tôt fait de se débarrasser de lui. Il a donc attendu aux élections suivantes. Lorsque les autres sont revenus au pouvoir, il a récupéré son emploi, sauf qu'entretemps, ils ont perdu plusieurs années de renforcement des capacités, d'améliorations, etc.
Plus il y a de gestionnaires des terres accrédités dans chaque collectivité, mieux c'est, et ce, même s'ils ne travaillent pas nécessairement à ce titre. Du reste, le financement de ces postes demande des ressources. Si l'argent n'est pas là, la fonction sera exercée par un membre du personnel. Certaines collectivités en ont six ou sept, et je les félicite. La plupart d'entre nous se sentent seuls au bureau.
[Le témoin parle en kwakwala.]
[Traduction]
Je suis Jessie Hemphill. Je suis de la nation Gwa'sala-'Nakwaxda'xw, qui est située sur la côte nord de l'île de Vancouver, en Colombie-Britannique. Je viens de Nanaimo, en Colombie-Britannique, qui est en territoire snuneymuxw, et je suis très heureuse d'avoir été invitée. Je tiens également à saluer la députée Blaney, que je peux voir d'un côté de la salle.
Et oui, il est très tôt ici.
Je ne vais pas m'éterniser ce matin et je vais me contenter de quelques observations clés. Je crois que j'ai été invitée à parler du rôle de la planification, notamment de la planification autochtone, dans le renforcement des capacités et la conservation des talents. Le premier point clé que je veux faire valoir, c'est que la planification — en particulier un style de planification appelé planification communautaire globale, que je vais décrire dans un instant — est essentielle au renforcement des capacités, et qu'elle vient en cela s'ajouter au développement économique. Nous considérons souvent que le développement économique est le vecteur clé du renforcement des capacités, mais je dirais que la planification a aussi son rôle à jouer, car si elle est bien faite, elle renforce les capacités à tous les niveaux des collectivités autochtones: la direction, l'administration et la collectivité elle-même.
Je vais vous faire part d'un tout petit peu de mon expérience à ce sujet. Je travaille dans le domaine de la planification autochtone depuis plus d'une décennie, et notamment sur celle qui concerne ma propre communauté, les Gwa'sala-'Nakwaxda'xw Nations. Cela m'a menée à diriger des ateliers de planification et à travailler avec des centaines de collectivités à l'échelle du Canada. J'ai probablement travaillé directement comme mentor en planification auprès d'une vingtaine de Premières Nations d'un peu partout au Canada. Cela s'est fait dans le cadre d'initiatives de planification communautaire lancées par ces collectivités. J'ai aussi animé des ateliers de planification autochtone dans de nombreuses provinces ainsi que les deux ateliers de planification communautaire globale d'envergure nationale qui se sont tenus ces dernières années à Charlottetown et à Winnipeg.
Je suis urbaniste de formation et, l'an dernier, j'ai également reçu le prix des jeunes urbanistes du Canada de l'Institut canadien des urbanistes.
Il n'y a pas encore eu d'étude à grande échelle sur le rôle de la planification dans le renforcement des capacités. Ce que je dis aujourd'hui est empirique et cela concerne des choses que j'ai tirées de mon expérience personnelle. Je tiens toutefois à ce que vous sachiez que c'est une expérience personnelle assez vaste et qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui travaillent dans ce domaine au niveau national.
Comme je l'ai dit au début, la planification communautaire globale est l'un des vecteurs clés du renforcement des capacités et de l'intégrité structurelle sur lesquelles peuvent s'appuyer le développement économique et la formation professionnelle, l'éducation, la santé et toutes ces autres choses. La planification communautaire globale est une forme de planification qui a été nommée et développée par les communautés autochtones de la Colombie-Britannique au milieu des années 2000. C'est une forme de planification à long terme. Habituellement, ces plans s'échelonnent sur une période de 50 à 100 ans — peut-être 25 ans lorsqu'il s'agit de court terme — et ils englobent tout.
On pourrait presque la comparer à la planification communautaire officielle d'une administration locale, mais sa portée est encore plus vaste. En général, les plans communautaires globaux, les PCG, touchent au développement économique, à la gestion des terres et des ressources, à la gouvernance, à la santé, à la culture, aux questions sociales, à l'éducation, aux infrastructures et au logement. Ce type de planification englobe tous ces éléments.
Une autre caractéristique clé des PCG, c'est qu'ils sont élaborés par la collectivité selon un processus qu'elle détermine elle-même. L'intervenant précédent, M. Marshall Jr., je crois, a parlé des problèmes engendrés par le manque de continuité qui accompagne les changements de régime. Or, parce qu'elle est axée sur le long terme et qu'elle est déterminée par la collectivité elle-même, cette forme de planification a vraiment fait des merveilles dans les collectivités pour remédier à ce problème et veiller à ce qu'il y ait une certaine continuité dans la vision et l'action.
Ces plans ne se ressemblent pas nécessairement entre eux. Un autre intervenant précédent, dont le nom m'a échappé, a posé une question sur les pratiques exemplaires et sur le fait que les Premières Nations pourraient gagner en efficacité en s'appuyant sur les réussites des autres nations. La réponse a été que les Premières Nations ont chacune des besoins et des contextes tellement particuliers que nous avons besoin de solutions flexibles. À mon avis, la planification permet ce genre de souplesse, surtout lorsqu'on permet à la collectivité d'en définir les paramètres et les objectifs en fonction de ses propres modalités.
Je pense, comme l'intervenant précédent, que l'établissement d'un équilibre avec le mentorat, les réseaux ou communautés de pratique à l'échelle provinciale et nationale, aide réellement à recueillir des idées au sein de différentes communautés et à créer des réseaux de soutien, et permet également à chaque communauté de planifier le processus à sa façon.
Cela n'est qu'une brève mise en contexte. À titre d'information, il existe un site Web appelé comprehensivecommunityplanning.org, que vous pouvez consulter si vous souhaitez obtenir plus de renseignements sur ce style de planification.
Je pense qu'il s'agit de l'élément clé.
J'aimerais aujourd'hui consacrer la majorité du temps aux questions. Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions, par l'intermédiaire de la présidente.
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Merci beaucoup, madame la présidente, et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je suis Roger Strasser, doyen et chef de la direction de l'École de médecine du Nord de l'Ontario. J'ai le grand plaisir de partager avec vous l'expertise que l'EMNO a acquise dans l'amélioration du recrutement et du maintien en poste des professionnels de la santé dans les communautés rurales, éloignées et autochtones.
Je suis accompagné de la vice-doyenne de l'EMNO, la Dre Catherine Cervin, et de la Dre Sarita Verma, qui assumera mes fonctions après mon départ, le 1er juillet prochain, et qui est donc la doyenne et la chef de la direction désignée.
Je vais lire l'allocution que nous avons préparée, mais j'ai également quelques diapositives à vous montrer. L'allocution et les diapositives ne sont pas complètement synchronisées, alors je vais faire brièvement référence aux diapositives au fur et à mesure.
Depuis sa création, l'EMNO est fièrement allée à contre-courant de la formation traditionnelle des professionnels de la santé. L'École est née d'un mouvement populaire. J'aimerais commencer par vous montrer une diapositive sur la distribution de la population du Nord de l'Ontario. Comme vous le voyez, cette région est vaste sur le plan géographique et très peu peuplée, et compte de nombreuses communautés autochtones — des communautés de Premières Nations et de Métis.
L'EMNO a officiellement ouvert ses portes en 2005. Elle fait fonction de faculté de médecine de l'Université Lakehead à Thunder Bay et de l'Université Laurentienne à Sudbury, qui sont séparées par 1 000 kilomètres. Nous accomplissons un mandat de responsabilisation sociale, qui est un engagement à répondre aux besoins en matière de santé des personnes et des communautés du Nord de l'Ontario, en nous concentrant sur l'amélioration de la santé des personnes qui vivent dans cette région.
En bref, je dirais que l'EMNO est une stratégie du gouvernement de l'Ontario créée pour répondre aux besoins en santé des habitants du Nord de la province, améliorer l'accès à des soins de qualité et contribuer au développement économique de cette région.
Essentiellement, l'École a été créée en fonction des données de recherche fondées sur les trois facteurs les plus nettement associés au choix de pratiquer en milieu rural après l'achèvement des études et de la formation. Le premier facteur est le fait d'avoir grandi dans un milieu rural. Le deuxième est celui d'avoir vécu une expérience clinique et d'apprentissage positive en milieu rural au premier cycle — il s'agit de la formation de base —, soit l'apprentissage au sein de cliniques ou de communautés rurales. Enfin, après l'obtention du diplôme, le troisième facteur est la formation qui prépare les diplômés à pratiquer dans un milieu rural. Il s'agit des données probantes sur lesquelles s'appuient toutes les activités de l'École.
Je vais décrire rapidement les diapositives.
Tout d'abord, l'apprentissage réparti en milieu communautaire est notre modèle distinctif d'éducation médicale et de recherche en santé, et cette diapositive montre de quoi il s'agit, avec plus de 90 lieux dans le Nord de l'Ontario où nos étudiants, résidents et autres apprenants peuvent réaliser une partie de leur apprentissage clinique. Puis, nous avons la participation communautaire, qui est l'élément central, c'est-à-dire les partenariats interdépendants que nous avons établis avec des communautés de tout le Nord de l'Ontario.
Pour ce qui est des communautés autochtones, nous organisons régulièrement ce que nous appelons des rassemblements des partenaires autochtones. Nous en avons organisé cinq. En haut à gauche de la diapositive, vous pouvez voir que « Follow Your Dreams » a été tenu à Wauzhushk Onigum en juin 2003, et qu'en septembre 2018, tout récemment donc, nous sommes retournés dans la même Première Nation pour le cinquième rassemblement, intitulé « Gathering Together for Life and Well-being ».
De même, en bas à gauche de la diapositive, vous pouvez voir une série de rassemblements qui ont été organisés dans le but précis de réaliser des recherches. Le premier est celui qui a eu lieu en 2008, à Thunder Bay, sur les possibilités de partenariat dans le cadre de réunions de recherche, puis, en 2016, un rassemblement de recherche sur la santé des Autochtones, qui a abouti à l'organisation, en 2017, de l'atelier intitulé « Pathways to Well-being », qui visait vraiment à faire participer les jeunes autochtones et à imaginer un futur dans lequel le suicide ne soit pas présent.
À l'EMNO, plusieurs mesures ont été mises en place pour appuyer le recrutement de médecins et leur maintien en poste. Les élèves du secondaire sont encouragés à imaginer leur propre futur, qui pourrait comprendre une carrière dans le domaine de la santé ou des études en médecine. La diapositive suivante montre que chaque année, l'Université Lakehead et l'Université Laurentienne tiennent un camp des carrières d'une semaine dans le domaine de la santé, que nous appelons aujourd'hui « Camp Med ». Nous avons aussi organisé trois camps scientifiques sur la santé intitulés « Walking in Two Worlds » dans des Premières Nations, qui étaient destinés particulièrement aux jeunes des Premières Nations, auxquels ont participé nos propres diplômés en médecine autochtones à titre d'intervenants principaux dans chacune des trois Premières Nations.
Nous travaillons également au Nunavut, et j'en dirai davantage à ce sujet dans un moment. En février de l'an dernier, nous avons organisé un camp des carrières dans le domaine de la santé avec l'appui du gouvernement fédéral, et nous en prévoyons un autre en mai de cette année, qui réunira des élèves du secondaire provenant de communautés de tout le Nunavut, et qui sera semblable aux camps organisés dans le Nord de l'Ontario. Le but est d'établir des liens entre ce qu'ils apprennent au secondaire et les carrières du domaine de la santé.
Voici des photos prises lors du camp des carrières dans le domaine de la santé tenu dans le Nunavut en février de l'an dernier.
Nous avons également un partenariat avec la direction des Premières Nations de Matawa et la Première Nation Eabametoong, si bien que notre programme de résidence en médecine familiale comprend un volet de résidence dans les Premières Nations éloignées. Nous avons également un partenariat actif avec d'autres organismes du Nord de l'Ontario, et avons établi un plan d'action relatif aux effectifs médicaux pour le Nord de l'Ontario.
Nous avons une présence internationale, sur laquelle je vais m'attarder un moment. Avant cela, cette diapositive vous montre certains des résultats obtenus dans l'École. Ici, vous voyez des déclarations faites par nos étudiants. Je pense que celle qui est encadrée, « Il faut le vivre pour le savoir », résume bien la valeur de notre programme.
Pour ce qui est de la diapositive sur les cheminements de carrière choisis par les diplômés de notre programme de médecine, 62 % optent pour la médecine familiale, principalement en milieu rural. Ce pourcentage est presque deux fois plus élevé que pour l'ensemble Canada. Comme vous le voyez, 12 % de nos diplômés sont des médecins autochtones. Lorsque vous regardez le nombre de diplômés du programme de médecine qui ont effectué leur résidence dans le Nord de l'Ontario, vous voyez que 94 % d'entre eux pratiquent dans cette région, dont un tiers dans des communautés de petite taille ou rurales et éloignées.
Sur cette diapositive, vous voyez que le recrutement et le maintien en poste de professionnels des soins de santé dans les communautés rurales, éloignées et autochtones sont un problème constant dans de nombreux endroits dans le monde. L'École a acquis une réputation internationale en raison de sa réussite pour ce qui est d'améliorer la capacité du Nord de l'Ontario à recruter des professionnels de la santé et à les maintenir en poste.
Depuis 2011, nous travaillons en partenariat avec des pays du Nord de l'Europe dans le cadre de projets financés par l'Union européenne. Le plus récent a démarré en 2015. Il s'agit du projet « Recruit and Retain 2: Making it Work », qui applique, dans différentes administrations de la périphérie nordique et de la région de l'Arctique, ce que nous avons appris dans le cadre du premier projet. L'EMNO a été choisie pour y participer en raison de sa réussite, de son expertise et de son expérience en transformation du paysage des soins de santé du Nord de l'Ontario. Comme je l'ai dit, dernièrement, nous travaillons au Nunavut, avec le ministère de la Santé du gouvernement du Nunavut et d'autres intervenants.
En janvier dernier, nous avons organisé un grand forum — forum vidéo tenu dans de nombreux lieux, dans plusieurs pays — au cours duquel nous avons présenté le cadre stratégique pour la stabilité dans les zones rurales et éloignées. C'est ce que vous voyez à l'écran. Je vais maintenant vous en parler beaucoup plus en détail. Il s'agit du résultat d'un partenariat d'une durée de sept ans, dont les partenaires principaux sont aujourd'hui la Suède, l'Écosse, la Norvège, l'Islande, et nous, pour le Canada. L'objectif est de réunir des intervenants qui s'appuient sur des preuves et des expériences vécues pour déterminer ce qui fonctionne, ce qui est efficace pour recruter des personnes et les maintenir en poste dans les secteurs de la santé et les autres secteurs publics dans les communautés rurales et éloignées.
J'aimerais vous décrire brièvement ce cadre. Comme vous le voyez, il comprend trois composantes, qui comptent chacune trois éléments.
Il y a d'abord la planification. Il est très important de commencer par examiner les besoins en santé de la population pour concevoir un modèle de prestation de services qui réponde aux besoins de cette population et qui soit attractif pour les médecins et les autres fournisseurs de soins de santé. Il faut ensuite cibler les endroits où l'on va trouver ces fournisseurs de soins particuliers afin de les recruter. Il s'agit de la planification.
Pour le recrutement, il faut mettre l'accent sur le partage de l'information et la participation active au sein de la communauté, la mobilisation communautaire, le soutien et la reconnaissance du fait que lorsque l'on recrute un médecin ou un autre professionnel de la santé au sein d'une communauté, on amène toute une famille. Cette dernière doit se sentir chez elle et vouloir faire partie de la communauté.
Le maintien en poste est tout aussi important. Il s'agit d'un milieu de travail encourageant, qui offre des possibilités de perfectionnement professionnel continu et assure la formation de la relève. C'est la partie du maintien en poste.
Il s'agit de la dernière diapositive. Au centre de ce cercle, vous trouverez les éléments essentiels à la réussite, qui soulignent le fait que les communautés rurales, éloignées et autochtones sont toutes uniques. Elles ont leur propre point de vue. Les modèles de prestation de services qui fonctionnent le mieux dans ces communautés sont conçus dans ces communautés, pour ces communautés.
Il faut donc une participation communautaire active. Il faut aussi des investissements, du financement et des ressources réels pour que les projets se concrétisent, pour qu'ils fonctionnent. Il faut aussi avoir un cycle d'activités annuel, ne pas se contenter de le faire une fois, mais bien régulièrement, et s'assurer de continuer à en surveiller le déroulement.
En somme, il vous faut déterminer vos objectifs et votre vision, vous concentrer sur votre but et ne pas dévier de votre trajectoire, car les gens qui s'opposent au projet et qui en doutent sont nombreux. J'ai appris à sourire en hochant la tête et à ensuite faire ce que j'avais prévu dès le départ, soit remettre en question les stéréotypes.
Très brièvement, je vous ai parlé de l'École de médecine du Nord de l'Ontario, du succès que nous avons eu pour recruter et assurer le maintien en poste des professionnels de la santé dans le Nord de l'Ontario et favoriser le travail au Nunavut, en collaboration avec des partenaires internationaux...
Bonjour à chacun d'entre vous et aux collègues qui siègent à la même table que nous. J'aimerais noter que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel du peuple algonquin.
Je m'appelle Delbert Wapass. Je suis membre de la Première Nation de Thunderchild, qui est une bande indépendante dans la province de la Saskatchewan. Nous comptons 2 850 membres. Nous avons une école qui offre des cours de la maternelle à la 12e année. Nous ne bénéficions pas de financement des services de deuxième et de troisième niveaux. Nous devons trouver des façons de faire et des partenariats créatifs et novateurs, et chercher nous-mêmes des partenaires avec qui nouer des relations positives.
Le défi du XXe siècle gravite autour des compétences. C'est là où, à titre d'ancien chef de la Première Nation de Thunderchild, d'ancien vice-chef de la Federation of Sovereign Indigenous Nation et d'ancien président du Saskatchewan Indian Institute of Technologies, de la First Nations University of Canada et du Saskatchewan Indigenous Cultural Centre, j'en suis venu à comprendre que tout revient à la communauté. Quand on songe à ce qu'on peut faire dans notre communauté et à la façon de bien le faire, on constate qu'il est impossible de réussir au niveau postsecondaire si on n'a pas réussi aux niveaux élémentaire et secondaire.
Nous avons toujours manqué de capacités, car nous n'avons jamais reçu suffisamment de financement. Si vous comparez ce que nous recevons avec ce que les autres reçoivent en fonction de la liste nominative, du fonctionnement et de l'entretien de l'école, des capacités et autres, nous ne recevons jamais assez de financement, mais nous sommes toujours comparés aux autres. Nous sommes à 13 kilomètres de l'école de Turtleford dans la ville de Turtlefold, et nos membres nous comparent toujours à cette école: « Pourquoi, à Turtleford, on est capable de faire ceci ou cela et pas chez vous? » En conséquence, nous perdons des élèves qui se retrouvent à l'école de Turtleford.
Lorsque nous avons comparé leur financement au nôtre, nous avons dit « D'accord. Nous connaissons le problème. Nous savons ce qui se passe », etc. Comment pouvons-nous revirer la situation et offrir un enseignement de qualité pour commencer à donner une base solide à nos enseignants afin de répondre aux besoins de notre communauté? Pour mettre en place un programme solide, de quoi avons-nous besoin? Comment travailler ensemble à faire en sorte que le programme que nous élaborons est ce en quoi notre communauté a foi pour que les membres commencent à envoyer leurs enfants à l'école de la réserve, l'école Piyesiw Awasis?
À ma gauche se trouve Peter Istvanffy, qui représente la Calgary Academy — une école privée. Nous estimions ne pas vouloir travailler en partenariat avec la division de l'école publique ou celle de l'école catholique à Saskatoon, par exemple, parce qu'elles sont syndiquées. En tant qu'école privée à Thunderchild, nous n'arrivons pas à les faire réagir aux besoins dans nos communautés respectives. Cependant, de par sa nature, la Calgary Academy a été en mesure de travailler avec nous et, en menant des travaux de recherche, de déterminer, entre autres, ce dont nous avons besoin et où nous en avons besoin.
Nous avons suivi un processus exhaustif pour finir par former un partenariat légitime avec la Calgary Academy. Il ne s'agit pas d'une franchise. Nous avons été accusés d'avoir formé un partenariat avec franchise. Non, ce n'est pas le cas. Nous allons vous dire de quoi il s'agit.
À ma droite se trouve George Lafond, qui a joué un rôle essentiel pour nous conseiller et nous aider à construire le système éducatif qui, selon nous, finira par être un modèle dont les autres Premières Nations pourront s'inspirer.
Nous avons beaucoup de dépenses, mais nous voulons utiliser ce financement pour contribuer à façonner le système et veiller à optimiser le plus possible nos ressources. Nous ne recevons pas suffisamment de financement, mais cela ne signifie pas que nous ne pouvons pas répondre aux besoins de notre communauté, du mieux que nous le pouvons, au nom de nos élèves et de notre communauté.
L'éducation: sans elle, vous ne trouverez pas de travail. Nous connaissons les taux de chômage. Nous connaissons le coût du logement. Nous sommes conscients des problèmes de santé chez nous et axons toutes nos ressources sur la prévention.
Sur ce, madame la présidente, j'aimerais céder la parole à Peter, et ensuite à George.
Merci.
J'ai seulement quelques points à mentionner pour mettre les choses en contexte.
La Calgary Academy est une école privée, c'est clair. Nous avons affaire à des enfants aux prises avec des difficultés d'apprentissage. Normalement, dans le système scolaire communautaire, environ 14 % des enfants souffrant de pareilles difficultés terminent leurs études secondaires. Notre fierté est d'avoir un bilan enviable avec un taux d'obtention du diplôme de 100 % et 88 % de jeunes qui poursuivent des études postsecondaires. Notre bilan est donc très positif ici.
Ce qui l'explique, c'est que nous avons deux autres organisations. Il y a Headwater Learning Solutions, qui est le groupe qui travaille, en fait, avec la Première Nation de Thunderchild. Nous avons aussi une fondation appelée la Calgary Academy Education and Research Foundation, qui recueille le financement pour mener nos travaux, si bien que la Première Nation n'a pas à engager de dépenses, même si Services aux Autochtones Canada est un partenaire dans cette initiative. Nous sommes assez ravis de cette façon de faire.
En gros, ce projet a vu le jour parce que nous avons été abordés par un groupe de philanthropes canadiens qui connaissaient le travail que nous avions fait dans les quartiers urbains à risque aux États-Unis, où nous avions obtenu des résultats extraordinaires, et une partie du travail que nous avions fait dans les pays en développement. Ils nous ont demandé si nous avions déjà travaillé avec les Premières Nations. Nous leur avons répondu que non, que personne n'avait jamais vraiment fait appel à nous. Ils ont financé une étude de deux ans, et nous avons passé deux années à enquêter sur l'éducation des Premières Nations au Canada.
Nous avons consacré une partie de ces deux années à passer en revue toute la recherche et ce qu'elle révélait. Une autre partie du processus consistait à aller parler aux intervenants chargés de l'éducation des Premières Nations à la grandeur du Canada. Nous avons commencé sur la côte Ouest, à Victoria, et nous avons traversé jusque dans les Maritimes, sur la côte Est. Grosso modo, nous avons parlé aux chefs, aux directeurs de l'éducation, aux enseignants, aux directeurs, etc. Nous avons essayé d'avoir une bonne idée de ce qu'ils jugeaient être les besoins de la communauté. La dernière étape consistait à faire des visites. J'ai visité plus d'une centaine de communautés des Premières Nations pour savoir ce qu'elles faisaient réellement. C'est là que Delbert, George et moi-même nous sommes croisés.
Une des raisons d'avoir choisi la Première Nation de Thunderchild était qu'elle avait un chef et un conseil engagés inconditionnellement à l'égard de l'excellence dans l'éducation des Premières Nations. Comme j'ai visité l'école à plus d'une reprise, j'ai pu constater que la communauté était tout à fait favorable à l'éducation. Même si on n'obtenait pas les résultats escomptés, il est clair qu'on était enthousiaste à l'égard des études.
L'objectif du projet est assez simple. Il vise à élaborer un exemple de système éducatif qui soit viable dans la communauté des Premières Nations — à Thunderchild, par la Première Nation de Thunderchild — et à avoir la capacité, si elle le souhaitait ou si d'autres communautés autochtones étaient intéressées, de refaire l'expérience à d'autres endroits.
Nous privilégions une approche fondée sur des données probantes et la recherche pour accroître les capacités. Il est clair qu'un des éléments clés est le maintien en poste des enseignants. À la Calgary Academy, nous nous enorgueillissons, après 25 ans, d'avoir gardé 90 % des enseignants qui ont commencé avec nous. Nous avons mis en place des mécanismes pour faire en sorte que l'expérience soit si stimulante et gratifiante pour les enseignants qu'ils ne partent pas.
Je pourrais continuer, mais je dirai simplement qu'après 18 mois, nous avons déjà constaté des résultats impressionnants en ce qui concerne certaines mesures clés.
Les mesures auxquelles nous nous intéressons sont tridimensionnelles. La première est éducative: la lecture, l'écriture et les mathématiques, bien sûr. La deuxième est la capacité de l'enseignant de composer avec les questions sociales, émotionnelles et de santé mentale des élèves et de trouver une façon de renforcer leur capacité de le faire. La troisième est la façon de renforcer la capacité des enseignants de composer avec les aspects culturels de l'éducation.
C'est là où nous en sommes à ce stade.
George, allez-y.
Merci beaucoup, Delbert.
Bonjour, madame la présidente, et bonjour à tous.
Jessie, je vous souhaite la bienvenue à Ottawa. Nous avons beaucoup de neige ici.
Je travaille dans le secteur public depuis environ 40 ans. Après mes études secondaires, je suis allé à l'université pour devenir enseignant au secondaire. J'ai enseigné au Bedford Road Collegiate à Saskatoon. Une de mes dernières affectations a été de travailler avec l'Université de la Saskatchewan. L'équipe de médecine du Nord de l'Ontario est ici, et j'en connais bien les raisons.
J'ai travaillé toute ma vie dans le domaine de l'éducation. Au moment où je cherchais une façon de terminer ma carrière en beauté, Delbert est venu me voir pour me demander de l'aider, car il était chef du dossier de l'éducation dans sa communauté. Nous cherchions des façons d'accroître le rôle de la communauté dans l'éducation primaire, secondaire et postsecondaire. Je me suis dit que c'était une belle occasion de couronner ma carrière avec un projet de ce genre, car j'avais fait partie du groupe de travail national qui s'était déplacé dans tout le Canada pour examiner la situation de l'éducation chez les Premières Nations.
Le projet de loi du gouvernement Harper, qui aurait permis de soustraire l'éducation à la Loi sur les Indiens et d'en donner le contrôle aux communautés autochtones, a été rejeté. Après ce rejet, je me suis dit que l'occasion était belle pour moi de jouer un rôle au sein d'une bande autonome qui s'apprêtait à prendre en main un dossier très spécial et très cher pour tous les membres des Premières Nations, soit l'éducation de nos enfants.
J'ai rencontré Peter et ses collègues et j'ai compris qu'ils souhaitaient un partenariat véritable, un travail d'équipe. Puis l'accord a été signé. C'est bon de voir notre ami Don Rusnak, du territoire du Traité no 3 en Ontario, si je ne m'abuse, qui a signé le partenariat au nom du gouvernement fédéral. Un an et demi s'est écoulé depuis le début, et il reste un an et demi avant la fin.
Ce que nous voulons... Vous le comprendrez en sachant comment sont financées les écoles dans les communautés autochtones. Nous ne voulons pas de financement par personne; nous voulons du financement qui se mesure par la réussite. Nous croyons qu'au cours des prochaines années, nous pourrons vous démontrer — et nous pourrons le faire en répondant à vos questions — qu'en procédant de la bonne façon et en ayant les bonnes ressources dans le réseau scolaire, nous pourrons réussir.
Merci, madame la présidente.