:
Merci, madame la présidente. C'est avec plaisir que je comparais devant le Comité aujourd'hui. Permettez-moi d'abord de reconnaître, tout comme vous, que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin.
[Français]
J'ai le plaisir d'être accompagné aujourd'hui du sous-ministre de Services aux Autochtones Canada. Nous parlerons tous deux de la section 25 du projet de loi .
[Traduction]
Le gouvernement du Canada établit une nouvelle relation avec les peuples autochtones, une relation fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la coopération et le partenariat.
[Français]
L'engagement du Canada à prendre des mesures pour démanteler les structures coloniales du passé est un élément essentiel de cette nouvelle relation. Le 28 août 2017, le premier ministre a annoncé la dissolution d'Affaires autochtones et du Nord Canada et la création de deux nouveaux ministères, soit Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada ainsi que Services aux Autochtones Canada.
[Traduction]
Nous devons commencer à établir une relation véritablement nouvelle avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis. La section 25 du projet de loi , Loi d'exécution du budget de 2019, constitue une étape clé du processus continu de réconciliation. Elle s'appuie sur les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones de 1996:
[...] Après la proclamation, le Parlement du Canada adopterait un cadre législatif complémentaire pour créer les lois et les institutions nécessaires à la mise en œuvre d'une relation renouvelée. Ces nouvelles lois viseraient toutes à doter les Autochtones des pouvoirs et des outils dont ils ont besoin pour structurer eux-mêmes leur avenir politique, social et économique.
Il y a plus de 20 ans, la Commission royale sur les peuples autochtones a plaidé pour la création de ces nouveaux ministères afin d'améliorer la prestation des services destinés aux Autochtones et d'accélérer les progrès vers l'autodétermination. En termes simples, nous arriverons à mieux répondre aux besoins distincts des membres des Premières Nations, des Inuits et des Métis avec deux ministères. En outre, la création de deux ministères est conforme à l'orientation de la Commission de vérité et réconciliation et de l'article 4 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et assure ainsi la promotion de l'autodétermination.
La section 25 édicterait deux lois pour créer Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada et Services aux Autochtones Canada. Ces lois définissent les pouvoirs, les obligations et les fonctions de leurs ministres respectifs et abrogent la Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien afin de dissoudre officiellement Affaires autochtones et du Nord Canada.
[Français]
Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada accélèrera le travail déjà entrepris pour renouveler la relation entre le Canada et les peuples autochtones. Chose tout aussi importante, le ministère continuera de favoriser l'autonomie, la prospérité et le bien-être des résidants et des communautés du Nord. Il continuera de travailler à la création d'institutions de Premières Nations inuites et métisses afin de développer la capacité nécessaire pour soutenir la mise en oeuvre de leur vision de l'autodétermination.
La guide le travail transformationnel prospectif du gouvernement visant à créer une nouvelle relation avec les peuples autochtones. Le a chargé la ministre d'assurer une meilleure coordination pangouvernementale et l'accélération de la conclusion d'ententes sur l'autonomie gouvernementale et l'autodétermination en se fondant sur de nouvelles politiques, lois et pratiques opérationnelles.
[Traduction]
Étant donné que les besoins du Nord et de ses résidants sont particuliers et distincts de ceux du Sud, ce projet de loi fournirait un fondement juridique à la création du poste de ministre des Affaires du Nord. Le ministre des Affaires du Nord guiderait les travaux du gouvernement dans le Nord, notamment en ce qui concerne la nouvelle politique canadienne sur l'Arctique. En collaboration avec la ministre des Relations Couronne-Autochtones, il poursuivra les travaux sur le modèle de leadership partagé dans l'Arctique et appuiera les programmes, les institutions de gouvernance et les initiatives scientifiques dans le Nord.
L'initiative législative proposée constitue une étape importante dans le processus d'élimination des structures coloniales. Elle créerait une nouvelle base législative qui permettra une meilleure collaboration pour aider les peuples autochtones à définir leur vision de l'autodétermination.
[Français]
Je remercie les membres du Comité de leur attention.
:
Merci, madame la présidente.
Je tiens aussi à vous remercier de nous fournir l'occasion de nous adresser au Comité aujourd'hui. Je tiens à reconnaître que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel du peuple algonquin.
[Français]
À la suite des observations de mon collègue le sous-ministre de Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, je voudrais parler des répercussions du projet de loi sur mon ministère comme tel.
[Traduction]
Je serai très bref, mais je vais juste revenir sur quelques éléments.
[Français]
En adoptant la section 25 du projet de loi , qui prévoit la dissolution d'Affaires autochtones et du Nord Canada, le gouvernement fédéral crée deux ministères qui seront mieux équipés pour travailler avec des partenaires autochtones. C'est un tournant important dans la relation entre les peuples autochtones et le Canada.
[Traduction]
Le ministère des Services aux Autochtones a pour mandat de travailler en collaboration avec des partenaires afin d'améliorer l'accès à des services d'excellente qualité pour les Autochtones. Sa vision consiste à soutenir et à habiliter les Autochtones pour leur permettre de fournir indépendamment des services et de s'attaquer aux conditions socioéconomiques dans leurs collectivités, tandis qu'ils progressent sur la voie de l'autodétermination.
Le ministre des Services aux Autochtones poursuit les travaux importants visant à améliorer la qualité des services offerts aux membres des Premières Nations, aux Inuits et aux Métis. Il veille notamment à ce qu'une approche cohérente, d'excellente qualité et fondée sur les distinctions soit appliquée à la prestation de ces services. Une stratégie rigoureuse axée sur les résultats et l'exécution est adoptée, et a pour but d'améliorer les résultats pour les Autochtones. Avec le temps, une des principales mesures de notre réussite sera que les peuples autochtones assurent de plus en plus la prestation, dans leurs collectivités, de programmes et de services adéquats.
Madame la présidente, la transformation consiste à modifier notre façon de travailler, de penser et d'écouter ainsi que notre façon d'établir des partenariats de manière à pouvoir appuyer adéquatement les droits et l'autodétermination des peuples autochtones.
[Français]
Je remercie les membres du Comité de leur attention.
[Traduction]
Nous répondrons maintenant à vos questions.
:
J'avais cru comprendre que l'objectif important à l'époque était de miser sur la relation, de séparer le côté des relations de celui des services. Il était important de nous assurer de mettre vraiment l'accent sur l'établissement d'une nouvelle relation, et l'accent que l'on mettrait sur les services serait distinct.
Il était aussi important d'éliminer la vieille structure coloniale que représentait AINC, que l'on a pendant très longtemps considérée comme la législation qui met essentiellement en œuvre la Loi sur les Indiens de A à Z. C'est ce sur quoi portait la Commission.
Pour nous, cela veut aussi dire, pour être juste, que la relation ne va jamais disparaître. Il est important de continuer d'entretenir une relation avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Pour ce qui est de la prestation, l'objectif est de faire en sorte que nous ayons en place la structure nécessaire pour fournir les meilleurs services. Nous croyons que, à long terme, les services devraient être offerts par les Premières Nations, les Inuits et les Métis.
Si vous regardez les deux ministères, certains aspects de mon ministère sont censés disparaître au fil du temps, tandis que les autres ministères ne disparaîtront pas. Comme je le dis parfois au personnel, notre objectif, c'est d'être une espèce en péril, qui recherche sa propre extinction. Au final, nous tentons de mettre en place, du côté des services, le moyen le plus efficace de fournir ces services.
Nous croyons que les gens eux-mêmes devraient fournir ces services. C'est le même objectif des deux côtés. Pour ce qui est des Relations Couronne-Autochtones, cela débouche sur le programme des droits. Quant à nous, ce pourrait être la structure administrative qui débouche, à un certain moment, sur le programme des droits. Toutefois, des deux côtés, nous essayons essentiellement d'encourager et de promouvoir l'autodétermination.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie les représentants.
J'aimerais dire aux fins du compte rendu que ce texte de loi est dissimulé sous un projet de loi omnibus. Jusqu'ici, le Comité des finances a entendu plus de 100 témoins. Il n'a pas eu l'occasion d'examiner cet aspect particulier ou de convoquer des témoins concernant ce texte de loi. Nous avons demandé au Comité une heure supplémentaire pour convoquer certains témoins qui ne sont pas des représentants ministériels. Je tiens à souligner que le Comité a refusé de prendre une heure de plus pour faire venir quelques organisations qui pourraient être touchées par cette législation, afin d'obtenir leur point de vue sur ce qui se passe et de savoir comment cela se passe.
Je compare cela au projet de loi , qui était un texte de loi indépendant. Quand les représentants se sont présentés à nous, ils nous ont assuré que tout allait bien. J'entends aujourd'hui dire que tout va bien, sans qu'il ne soit possible de recevoir des témoins. Par l'entremise de nos témoins, nous avons appris qu'il y avait des lacunes, que des amendements étaient nécessaires. Nous sommes très mal à l'aise avec le processus et avec le fait que notre Comité n'ait pas eu la capacité de l'examiner à la loupe. Certes, sur le plan philosophique, nous croyons que la séparation des ministères est une bonne initiative. Le fait que nous ne soyons pas en mesure de faire notre travail est, je crois, assez honteux.
Je sais que ce n'est pas votre responsabilité. C'était la décision du gouvernement actuel de faire ce qu'il a dit qu'il n'allait pas faire: enterrer des choses dans une loi omnibus et ne pas permettre au Comité de faire le travail qu'il est censé faire. Lorsque des problèmes seront signalés plus tard, je crois que nous pourrons rappeler qu'on n'a pas prévu un processus approprié.
Je vais commencer par une question rapide. J'espère que vous avez l'information à portée de main.
Si on parle des ETP pour les deux ministères, au chapitre de la santé, avant le changement, et les ETP maintenant... encore une fois, j'aimerais un total combiné; cela devrait être à portée de main, y compris la santé, car nous reconnaissons le transfert.
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J'aimerais dire certaines choses à ce sujet.
Je crois que le point le plus important pour nous, c'est la façon de passer à des services qui seraient fournis par les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Si vous regardez, par exemple, les dernières années et ce que nous avons tenté de faire, ce sont maintenant 85 Premières Nations qui reçoivent des subventions de 10 ans. Cela veut dire que 90 % de la reddition de comptes qui portait surtout sur ce que nous pourrions leur demander, du point de vue des exigences du Conseil du Trésor, sont maintenant éliminés. Cela veut dire qu'ils ont la flexibilité nécessaire pour décider comment investir ces fonds afin d'obtenir les résultats qu'ils recherchent.
C'est un changement majeur, et c'est quelque chose que nous essayons d'accroître. Nous nous penchons maintenant sur les questions comme celle de savoir quelle est la bonne indexation pour ces Premières Nations si nous voulons nous assurer que ces services sont durables.
Prenez ce que nous essayons de faire du côté de la santé. En Colombie-Britannique, l'Autorité sanitaire des Premières Nations nous inspire. Partout au pays, nous discutons avec des membres des Premières Nations dans des lieux où elles aimeraient prendre en main leurs services de santé.
Nous faisons la même chose par rapport à l'éducation et à la création de conseils scolaires. Il s'agit de trouver des moyens qui nous permettent de céder la place. Nous n'imposons pas d'approche. Nous ne leur disons pas l'approche qu'elles devraient suivre. Toutefois, nous disons que nous sommes ouverts à ce type d'affaires, et il y a eu une réponse.
La législation sur les services à l'enfance et à la famille est un élément important pour nous. Nous sommes conscients des sphères de compétence et demandons aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis qui le veulent d'affirmer leur compétence. Je crois que c'est probablement l'aspect le plus important concernant la décolonisation dans notre ministère.
De plus, pour nous, pour ce qui est de la façon de passer des programmes à des services dans la culture du ministère, nous ne cherchons pas à imposer des programmes depuis le centre. Nous ne cherchons pas à juste dire: vous avez demandé quelque chose, mais cela ne concorde pas avec les programmes. Nous essayons d'adopter l'approche opposée, en disant: c'est logique, et comment pouvons-nous nous assurer que ça fonctionne?
C'est une nouvelle approche.
Je m'en vais demain à Toronto pour des réunions de rassemblement avec les chefs de l'Ontario. Nous avons aussi des rassemblements du genre en Ontario.
De plus en plus de réunions du personnel se tiennent entre nos employés et les Premières Nations, les Inuits et les Métis: nous essayons de les intégrer dans notre processus décisionnel. Comme vous le savez, nous travaillons aussi davantage sur l'élaboration conjointe, comme nous l'avons fait pour l'éducation et les services à l'enfance et à la famille. C'est une approche totalement nouvelle pour nous. Nous essayons de changer notre façon d'aborder les questions autochtones pour nous assurer qu'elles reposent sur un partenariat, sans nécessairement essayer d'élaborer des programmes depuis le centre.
Le recrutement est important: il s'agit d'amener un plus grand nombre de membres des Premières Nations, d'Inuits et de Métis dans le ministère. Si vous regardez mes statistiques, il y a probablement de 26 à 28 % de nos employés qui s'autoidentifient comme des membres des Premières Nations, des Inuits ou des Métis. Dans certaines régions, c'est 50 %. Nous nous efforçons de recruter plus de Premières Nations, d'Inuits et de Métis, particulièrement à l'échelon de la direction.
Ce sont les types de mesures que nous essayons de prendre pour nous assurer qu'il y a une décolonisation.
:
Le ministère des Affaires indiennes est en fait une des plus vieilles institutions continues de l'histoire du Canada. Il existe depuis environ 1755 sous diverses formes. Il a changé et évolué à de nombreuses occasions, mais il a presque toujours eu la même fonction essentielle, jusqu'à tout récemment, c'est-à-dire l'intégration et l'assimilation des peuples autochtones dans la société canadienne élargie.
Au fil des ans, le ministère, sous ses nombreuses formes, a toujours joué ce rôle central de « prendre soin des autres », de façon extrêmement paternaliste, depuis la création d'écoles, pour dicter comment les enfants autochtones devraient être éduqués, jusqu'à l'établissement de structures de gouvernance qui sont imposées par l'intermédiaire de la Loi sur les Indiens pour limiter la façon dont les collectivités peuvent se gouverner, afin de conserver ce pouvoir au sein du ministère lui-même.
Cette situation a largement contribué à la création d'une institution, une institution culturelle, à l'intérieur du ministère, où celui-ci croyait toujours avoir raison, et il a donc agi dans ce qu'il croyait être l’intérêt de la collectivité, mais souvent, ce n'était en fait pas la meilleure chose. C'était dans l'intérêt de l'État ou du gouvernement de l'époque.
Au fil du temps, nous nous sommes considérablement éloignés de ces premiers concepts, particulièrement depuis les années 1950 et 1960, où nous avons commencé à nous rendre compte — « nous », en tant que ministère — du fait que la Loi sur les Indiens était beaucoup plus dommageable que protectrice. Au fil du temps, nous avons modifié divers textes de loi et créé de nouvelles structures pour remédier à ce fait, mais comme la commission royale l'a fait remarquer, la structure demeure encore. Nous continuons de fonctionner suivant la même structure que celle établie en 1966, en vertu de la Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
Nous avons l'occasion de briser ces structures pour en créer de nouvelles et établir dans l'avenir de nouvelles relations qui reposent sur l'intention originale et les relations initiales entre les colons et les peuples autochtones au Canada.
:
C'est une excellente question.
Dans la législation concernant RCAANC, par exemple, l'attente selon laquelle nous devons travailler avec les provinces, les territoires et d'autres entités est inscrite dans la loi. Je crois qu'une bonne partie de la responsabilité du ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord supposera d'aider d'autres gouvernements à voir ce qui est dans leur intérêt.
Ce ne sont pas des choses que nous faisons simplement parce qu'elles sont bonnes à faire. Si nous voulons voir des collectivités avancer au Canada, c'est très difficile de le faire sans écoles, sans eau potable et sans logement.
Dans notre fédération, le travail avec les provinces et les territoires représente un aspect essentiel de la réussite de ces choses. Cela constituera une grande partie de notre travail. En toute justice, partout au pays, certaines provinces se demanderont peut-être si elles nous ont devancées, et elles pourraient parfois avoir l'impression de nous faire avancer. Dans d'autres cas, nous devrons travailler d'arrache-pied avec elles pour les amener à participer à des projets qui sont, à notre avis, dans notre intérêt collectif.
Comme l'historien ministériel l'a souligné, au fil du temps, notre réflexion sur ces choses a changé. C'était vrai au gouvernement fédéral, et je crois que ça l'a aussi été dans de nombreux gouvernements provinciaux et territoriaux.
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J'ai été sous-ministre d'Infrastructure Canada, et il n'y avait pas de loi. L'entité relevait d'un autre... On peut toujours se demander s'il devrait y avoir une loi ou non. C'est une bonne question.
Selon moi, dans notre cas, c'était nécessaire d'avoir une loi, parce qu'il y en a déjà une. Il y en a une qui, en fait, reconnaissait AINC comme étant un ministère, alors il fallait remplacer AINC par quelque chose d'autre. La loi nous a permis de le faire. La loi définit aussi davantage les pouvoirs des deux ministres au Parlement, donc devant vous. Un décret, c'est vraiment une action de l'exécutif. Ça reflète davantage une relation entre le premier ministre, l'exécutif et le ministre. Dans la situation qui nous occupe, cela nous a donné des pouvoirs juridiques que nous n'aurions pas eus en vertu d'un décret, surtout, par exemple, en matière de gestion des données et, tout particulièrement en ce qui concerne l'instance responsable de la loi qui est créée. C'est quelque chose qu'on a.
Il y a des antécédents. La Loi sur la gestion des terres des premières nations, l'autre loi qui est liée aux Premières Nations, aux Inuits et aux Métis, a été mentionnée. C'était important de définir, dans une loi, qui était responsable de ces pouvoirs.
Il n'y a pas de science, de mécanismes. C'est plutôt un art, pour être honnête avec vous. Il y a des ministères qui peuvent se contenter d'un décret, mais, dans ce cas-ci, vu l'importance de l'enjeu, aussi... Nous parlons de deux ministères. Si vous regardez de mon côté, et je ne veux pas minimiser d'aucune façon ce que fait l'autre côté, parce que c'est aussi complexe... Si on regarde les gouvernements provinciaux, vous ne trouverez pas de ministère qui s'occupe de la santé, de considérations sociales et économiques... et qui s'occupe aussi d'infrastructures et d'autres choses. C'est en fait un domaine très complexe, et obtenir un fondement législatif est en fait très utile pour nous.
:
Oui. Il est clair qu'il y a eu beaucoup plus d'initiatives et d'activités en conséquence au cours des dernières années. Est-ce que tout ça est lié au fait d'avoir deux ministères ou juste un? Difficile de le savoir, mais le fait d'avoir deux ministres — un ministre qui s'occupe seulement des services, et l'autre, des droits — a été très utile au cours des dernières années. Cela signifie qu'un ministre n'a pas à choisir — parfois, durant la même journée — ce qu'il fera. C'est la même chose pour les sous-ministres et la même chose pour l'organisation. Nous pouvons rouler à plein régime du côté des services.
Vous avez mentionné une longue liste de résultats et d'activités. Du côté du logement, nous visons encore à réparer ou à construire 16 000 résidences en 5 ans, avec nos collègues, bien sûr, de la SCHL. Nous avons construit un grand nombre d'écoles. Nous respectons les échéanciers en ce qui a trait à la fameuse question de l'eau. Plus de 85 % des avis à long terme d'ébullition de l'eau ont été levés.
Vous avez aussi parlé du principe de Jordan. Il y a maintenant plus de 220 000 demandes qui ont obtenu une réponse en vertu du principe de Jordan, ce qui est énorme. Nous avons mentionné les services à l'enfance et à la famille. En un peu plus d'un an, nous avons coélaboré un projet de loi que vous avez maintenant devant les yeux, au sujet de la compétence en matière de services à l'enfance et à la famille.
Nous avions mentionné les subventions précédemment. Il y a plus de 85 collectivités. Nous avons offert des subventions de 10 ans à plus de 100 collectivités des Premières Nations l'année dernière. Je tiens à vous rappeler que les subventions ont fait l'objet de discussions durant le mandat de l'ancien AINC, depuis les années 1980. Il y avait une seule collectivité au pays qui avait en fait une subvention, et nous en sommes maintenant à 85. C'est un changement majeur.
Lorsqu'on regarde tout ça ensemble... du côté de la santé mentale, nous en avons fait beaucoup. Nous avons fait beaucoup de choses dans d'autres domaines, aussi. Nous pouvons vous fournir plus de statistiques, si vous voulez, mais une bonne partie de tout ça figure sur notre site Web.
Pour ce qui est du dernier point, nous avons élaboré, comme vous le savez, une nouvelle formule de financement pour ce qui est de l'éducation. Nous mettons maintenant en place la formule à l'échelle du pays. La formule a été coélaborée avec les Premières Nations.
Des choses importantes se sont produites. Assurément, le fait que nous nous soyons séparés et avons créé deux ministères a aidé. Le fait que nous ayons la question de la santé de notre côté aide aussi. Lorsqu'on s'attaque aux enjeux du logement, comme ceux à Cat Lake, comme vous en avez entendu parler cet hiver, c'est vraiment utile de réunir ensemble la santé, les services sociaux et l'infrastructure. Je crois que, oui, la séparation nous a clairement offert des outils que nous n'avions pas avant.
Pour les collectivités des Premières Nations, cela signifie aussi une capacité future d'intégrer ces services. Par exemple, du côté des subventions, nous avons pu inclure la santé, ce que nous n'aurions pas pu faire à l'époque de l'ancien AINC. Beaucoup de résultats ont vu le jour, et la plupart de ces résultats découlent probablement du fait qu'il y a une séparation entre deux ministères.
:
Je crois que cela a toujours fait partie de l'ADN du ministère. Je crois que ça ne s'est pas fait parce que nous n'avions pas les outils pour y arriver. Depuis les années 1980, au moins, et même dans les années 1970 — les historiens seront peut-être en désaccord avec moi —, il y a toujours eu une tentative de délégation. C'est ainsi qu'on en parlait à l'époque. Le transfert des services, la plupart du temps, se faisait au niveau communautaire. La plupart du temps, ce sont les programmes qui étaient transférés. Et, aussi, la plupart du temps, les ressources n'étaient peut-être pas aux niveaux appropriés. Nous tentons maintenant de déterminer quelle serait la bonne combinaison de ces trois éléments.
C'est la raison pour laquelle, par exemple, du côté des commissions scolaires, nous ne reculons pas. Nous répondons en fait aux demandes. Les Premières Nations, les Inuits et les Métis décident de quelle façon ils veulent procéder. Il s'agit de leurs services, au bout du compte. Il n'y a pas d'approche universelle dans tout ça.
Ce que nous essayons de faire davantage, c'est de cerner des partenaires à l'échelle du pays qui veulent faire les choses différemment et qui veulent s'occuper de leurs services. Nous n'arrivons pas à la table de négociations en empêchant des choses et en ayant une idée de ce qu'il faut faire, parce que, dès qu'on agit de la sorte, on se retrouve avec un programme et il finira par y avoir des exceptions partout au pays, franchement. Nous essayons plutôt d'écouter les gens.
On s'intéresse, par exemple, à l'enseignement postsecondaire. Il y a beaucoup d'intérêt du côté des infrastructures. Vous avez peut-être entendu parler du fait qu'il y a, en fait, des Premières Nations en Colombie-Britannique qui veulent créer une première institution des Premières Nations responsable des infrastructures. Nous les soutenons lorsqu'elles essaient de déterminer ce à quoi ça pourrait ressembler. Nous allons les aider ainsi sans avoir d'idée préconçue du résultat. C'est un peu de cette façon que nous travaillons. Nous nous dirigeons dans cette direction.
Cela ne signifie pas que tous les employés perdront leur travail. Ce n'est pas ainsi que nous voyons les choses. Par exemple, nous continuons de maintenir des liens avec les régies de la santé des Premières Nations. Nous avons des liens réguliers. Il s'agit davantage d'un partenariat. Nous n'assurons tout simplement plus la prestation des services comme nous le faisions avant. Nous avons conclu des accords trilatéraux sur la santé mentale avec eux et avec la province de la Colombie-Britannique l'année dernière. C'est quelque chose que nous continuerons de faire.
La façon dont nous abordons tout ça, c'est vraiment de demander aux partenaires de quelles institutions et capacités ils ont besoin. Quel genre de services veulent-ils offrir? Ce ne devrait pas être des programmes, ce devrait être des services, et il faut s'assurer que les ressources sont au rendez-vous.
Les travaux que nous avons faits relativement à la formule pour l'éducation sont importants. Les travaux que nous faisons au sujet des formules applicables aux subventions sont aussi importants. Si on s'entend sur la formule de financement, ensuite, il s'agit plutôt de savoir comment les gens en assureront une gestion différente.
C'est difficile à expliquer parce qu'il n'y a pas de solution universelle. Il faut essentiellement ouvrir la porte à toutes les approches différentes.
Madame la présidente, je vous remercie. Je suis désolé. J'ai parlé longtemps.
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Merci beaucoup de l'invitation. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de formuler des commentaires ce matin.
Wachay misiway. Jocelyn Formsma nitoscheen.
Je suis de la Première Nation Moose Cree. Je suis actuellement directrice exécutive de l'Association nationale des centres d'amitié.
Depuis une quinzaine d'années, je défends également les droits des enfants autochtones, la mobilisation des jeunes Autochtones et le perfectionnement du leadership. Je participe également à divers aspect de la réforme de la protection de l'enfance.
Je suis membre du conseil d'administration de la National Indian Child Welfare Association depuis 12 ans. J'ai participé à leur travail de défense des droits à l'échelle internationale, ce qui a contribué à l'élaboration du premier règlement d'application de la Indian Child Welfare Act au cours des 36 années qui ont suivi l'adoption de la loi.
Aujourd'hui, je vais vous donner un aperçu de la façon dont les centres d'amitié se sont engagés dans les services à l'enfance et à la famille, de notre point de vue sur le projet de loi et des répercussions qu'il pourrait avoir sur les Autochtones vivant en milieu urbain. Je serais également heureuse de parler des expériences relatives à la Indian Child Welfare Act, si vous me posez des questions à cet égard après cet exposé.
Le travail des centres d'amitié dans le domaine des services à l'enfance et à la famille est largement méconnu et non reconnu. Comme vous le savez, les centres d'amitié offrent une vaste gamme de services, dont bon nombre peuvent être considérés comme des services de prévention, comme le soutien prénatal, le soutien parental, le soutien aux enfants, les programmes qui aident les familles à garder leurs enfants et à en prendre soin et les programmes qui aident les parents à récupérer leurs enfants s'ils ont pris en charge.
Nous avons élaboré un programme de compétences culturelles à l'intention des parents de familles d'accueil, qui offrent des programmes culturels essentiels aux enfants pris en charge. Les parents des familles d'accueil et les parents adoptifs ont souvent recours aux programmes des centres d'amitié pour s'assurer que leurs enfants en famille d'accueil ou adoptés ont accès à la culture et à la communauté.
Les centres d'amitié sont des lieux de visites supervisées, ont parfois été des lieux de prise en charge et ont aussi été appelés à fournir des services d'intervention au nom d'organismes de services à l'enfance et à la famille ou de soutien judiciaire aux enfants, aux adolescents et aux familles autochtones. Les centres d'amitié offrent également des services de suivi pour les jeunes qui quittent la prise en charge.
En ce qui concerne le projet de loi, nous ne voyons pas de considération explicite pour les enfants, les jeunes, les familles et les collectivités autochtones en milieu urbain et rural.
L'ANCA, en tant que secrétariat du Réseau de connaissances des Autochtones en milieu urbain — qui sera bientôt dissout faute de financement —, a facilité des initiatives de recherche communautaire axées sur la situation des enfants autochtones pris en charge et des familles autochtones ayant des démêlés avec le système de protection de l'enfance, examinant la nécessité d'une formation adaptée sur le plan culturel pour les fournisseurs non autochtones de soins aux enfants autochtones pris en charge, le tout dans une perspective urbaine.
À l'heure actuelle, de nombreuses définitions qui figurent dans le projet de loi sont suffisamment larges pour que l'on puisse avancer des arguments en faveur de notre inclusion, mais nous craignons que, en l'absence d'une inclusion explicite, cela laisse également place à l'exclusion passive.
Nous avons rédigé un mémoire qui expose certains de nos points de vue et nous aimerions le soumettre au Comité pour examen. Il présente certains des points de vue qu'il nous semble nécessaire de prendre en considération avant de finaliser la loi.
Après avoir examiné le projet de loi , l'ANCA s'inquiète des réalités sur le terrain de la mise en œuvre de la compétence concernant les enfants autochtones qui vivent en milieu urbain. Bien que l'ANCA appuie et promeut pleinement la compétence des Premières Nations, des Inuits et des Métis, nous savons que, en réalité, les ressources sont souvent inaccessibles ou insuffisantes pour que les gouvernements autochtones puissent fournir toute la gamme des services requis dans les villes ou les villages où résident leurs membres. Les centres d'amitié et d'autres organisations autochtones urbaines qui offrent des services similaires se retrouvent souvent involontairement à travailler avec des enfants, des jeunes et des familles autochtones qui ne bénéficient pas actuellement des services et du soutien de leur gouvernement autochtone respectif.
L'ANCA aimerait que l'on déclare publiquement qu'elle s'intéresse à l'élaboration de tout règlement qui pourrait découler de l'adoption du projet de loi et qu'elle a des perspectives uniques à cet égard. La partie de la loi proposée concernant le règlement fait mention de l'inclusion d'organes directeurs autochtones dans le processus de consultation relatif à l'élaboration de ce règlement. Nous croyons que nos connaissances et celles des centres d'amitié peuvent aider à faire en sorte que les règlements et les politiques tiennent compte des besoins des peuples autochtones qui vivent en milieu urbain.
Nous avons un certain nombre de recommandations au sujet du projet de loi .
L'une concerne l'inclusion des Autochtones en milieu urbain. Les enfants, les jeunes, les familles, les collectivités et les organisations autochtones rurales et urbaines devraient être mentionnés dans le libellé et la mise en œuvre de cette loi. À l'heure actuelle, nous estimons que, de façon générale, le libellé général du projet de loi laisse une place pour l'inclusion des Autochtones vivant en milieu urbain, mais nous craignons également que cette formulation large entraîne une exclusion.
En ce qui concerne la compétence, il faut préciser davantage l'expression et l'étendue de la compétence entre les différents gouvernements des Premières Nations, des Métis et des Inuits, les gouvernement fédéral, provinciaux et territoriaux et les rôles de la société civile et des entités non politiques, mais appartenant à des Autochtones et exploités par eux, comme les centres d'amitié. Ce que nous constatons dans les milieux urbains, c'est que ces compétences se chevauchent souvent, et, à moins qu'il y ait collaboration et coordination sur la façon dont les compétences se chevaucheront dans les milieux urbains, nous craignons que les enfants soient laissés pour compte ou soient un des cas qui ont mené à cette malheureuse situation à l'origine du principe de Jordan.
Des engagements et des mécanismes stables en matière de financement sont nécessaires pour que l'on puisse s'assurer que la mise en œuvre de cette loi sera possible pour les collectivités. De plus, ces dispositions de financement devraient tenir compte du travail qui sera nécessaire à la suite de l'adoption du projet de loi, ce qui comprendra l'éducation, la participation des intervenants et la défense des intérêts, ce qui pourrait également inclure la collecte de données.
La capacité financière devrait être prise en compte, étant donné que les collectivités devront travailler au renforcement des capacités si elles veulent assumer la responsabilité des services et des ressources à l'appui de l'établissement de partenariats et de l'engagement avec les intervenants.
Le projet de loi ne prévoit aucun mandat pour la collecte de données. En tant qu'organisation représentant les centres d'amitié, l'Association nationale des centres d'amitié, l'ANCA, connaît la valeur des données et sait comment elles peuvent éclairer et orienter des programmes et des services efficaces, ce qui donne de meilleurs résultats pour les gens que servent les centres d'amitié. La collecte de données est un outil nécessaire à l'amélioration des services et à la détermination des lacunes à combler. En ne précisant pas un mandat précis pour la collecte de données, le projet de loi pourrait, par inadvertance, favoriser le maintien de la situation actuelle en matière de données, soit l'absence de données nationales détaillées sur le bien-être des enfants et des familles autochtones. C'est quelque chose que nous avons vécu avec la Indian Child Welfare Act. Bien qu'il y avait des dispositions en ce qui concerne la collecte de données, celles-ci n'étaient pas suffisamment financées et appuyées, ce qui a entraîné un manque de données malgré le fait que cela faisait presque 40 ans que la loi existait.
Nous vous remercions encore une fois de nous avoir donné l'occasion de vous faire part de nos commentaires et nos points de vue sur le projet de loi; nous espérons que nos mémoires éclaireront votre travail. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
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Bonjour. Merci de m'avoir invitée.
Kwe, ni'n teluisi Pam Palmater.
Je suis de la nation souveraine micmaque, occupant un territoire micmac non cédé. Je pratique le droit depuis 20 ans, dont 10 ans à Justice Canada et aux Affaires indiennes, où j'ai reçu toute la formation sur le processus législatif, l'interprétation des lois et la rédaction législative. Je suis également titulaire d'un doctorat en droit et je me spécialise sur les lois qui ont une incidence sur les peuples autochtones, alors je m'intéresse tout particulièrement à cette question, qui repose vraiment sur les lois plutôt que sur la politique.
Je suis ici pour m'opposer au projet de loi tel qu'il est actuellement rédigé. Je pense que, en l'absence d'amendements de fonds, il risque d'engendrer le chaos entre les administrations, le chaos sur le plan juridique et le chaos à l'intérieur et à l'extérieur des réserves. De plus, bien entendu, cela ne fera rien pour régler la crise humanitaire.
J'ai plusieurs problèmes fondamentaux à ce sujet. Le premier est le même problème que j'ai avec les projets de loi et , c'est-à-dire qu'il s'agit d'une mesure législative panautochtone. En étant panautochtone, en fait, elle est discriminatoire envers les Premières Nations, parce qu'elle ne met pas l'accent sur les droits, l'histoire, les conditions socioéconomiques ou les intérêts qui leur sont propres. À mon avis, les droits des Premières Nations ne devraient jamais être limités par les différents statuts juridiques, politiques et sociaux des autres groupes.
Par exemple, les Métis ne vivent pas dans les mêmes conditions socioéconomiques difficiles que les Premières Nations. C'est simplement un fait. Nous savons également que, dans le droit canadien, lorsqu'on traite officiellement tout le monde de la même façon, on finit par traiter les plus défavorisés de façon inégale. Ce que nous préconisons, c'est une égalité réelle qui est propre aux Premières Nations, donc une législation propre aux Premières Nations et non une égalité formelle.
L'autre préoccupation, c'est qu'il n'existe pas de reconnaissance ou de statut indépendant qui accorde la priorité aux Premières Nations. Elles sont considérées comme une loi fédérale, qui n'est pas différente d'un règlement pris en vertu de la Loi sur les Indiens. Pour quiconque a déjà travaillé avec les Premières Nations, à Justice Canada ou aux Affaires indiennes, il est presque impossible de faire appliquer la réglementation prise en vertu de la Loi sur les Indiens pas la GRC ou quiconque.
À l'heure actuelle, en vertu de ce projet de loi, au lieu d'être prioritaires, les lois des Premières Nations sont conditionnelles ou assujetties aux dispositions de la Charte; à la Loi canadienne sur les droits de la personne; à l'article 35 de la Loi constitutionnelle, à toutes les causes limitatives devant la Cour suprême du Canada; au partage des pouvoirs prévus au paragraphe 91(24); aux accords de coordination et à toutes les interprétations que les tribunaux ont données à ces accords — qui pourraient se chiffrer à plus de 634 — ainsi qu'au non-respect de ceux-ci; aux définitions préexistantes que les tribunaux provinciaux ont établies pour l'expression « intérêt supérieur de l'enfant », qui, je dois le rappeler à tout le monde ici, est définie par les tribunaux et donne lieu au même degré de racisme et d'abus envers les enfants des Premières Nations que ce qui a déjà été démontré devant les tribunaux; et, bien entendu, aux articles 10 à 15 du projet de loi C-92 lui-même.
Ce sont beaucoup d'éléments qui l'emportent sur les lois des Premières Nations, et c'est un problème. Il faut discuter non seulement de la reconnaissance de la compétence des Premières Nations en soi, mais également des questions relatives à la prépondérance des lois et à la façon dont ces compétences vont fonctionner ensemble.
Mon autre préoccupation, c'est que cela force les Premières Nations à négocier des ententes avec les gouvernements fédéral et provinciaux, alors que ce sont les gouvernements provinciaux qui posent problème. Le gouvernement fédéral est le problème sur le plan du sous-financement discriminatoire et chronique. Le Tribunal canadien des droits de la personne en a déjà parlé. Toutefois, ce sont les provinces qui ont permis que ces violations des droits de la personne se poursuivent malgré les recherches et toutes les preuves. Les derniers intervenants avec lesquels de nombreuses Premières Nations veulent travailler sont les provinces, lesquelles commettent les abus. Le fait de forcer cette coopération vise à renforcer cette horrible crise humanitaire, et je pense que de nombreuses Premières Nations ont déjà témoigné contre cela, à juste titre.
La chose la plus importante, je suppose, c'est que, même si on a affirmé que des fonds allaient être octroyés aux Premières Nations, il n'y a aucune obligation légale de financement. C'est une chose de reconnaître dans une clause « attendu que » qu'il y a des demandes de financement, que, en principe, on va peut-être parler de financement ou qu'on va trouver des moyens d'en parler. Toutefois, il n'y a pas de disposition obligeant le ministre à financer les Premières Nations pour tous les services et à définir quels sont ces services — et cela laisse beaucoup de souplesse.
Il n'y a pas de lignes directrices sur la façon dont ce financement sera accordé, comme la population, les données démographiques, les taux de natalité, les coûts réels et les droits des Premières Nations à cet égard, lesquels sont très différents des droits des Métis et des Inuits. Il n'y a rien qui rend le principe de Jordan obligatoire dans ce projet de loi, et cela devrait, en fait, en faire partie intégrante. Il s'agit certainement d'un élément central du Tribunal canadien des droits de la personne. Il n'y a aucun engagement à s'attaquer aux causes profondes sous-jacentes de la prise en charge des enfants, qui, pour les Premières Nations en particulier, tendent la plupart du temps à être des conditions socioéconomiques. Ce n'est pas suffisant de financer des programmes de suivi ou des programmes parentaux si vous ne vous dites pas également que vous vous engagerez aussi à fournir du logement, de la nourriture, de l'eau, de l'éducation et un accès aux soins de santé, qui sont les raisons pour lesquelles la plupart de ces enfants sont retirés à leur famille au départ.
Un autre problème législatif fondamental est que le ministre conserve tous les pouvoirs que lui confère la loi, y compris le pouvoir de prendre des règlements. Il suffit de consulter les groupes autochtones, et nous savons tous à quel point la consultation fonctionne mal dans la pratique. Nous avons fait l'objet de centaines de poursuites judiciaires parce que le gouvernement fédéral ne comprend toujours pas comment faire des consultations, répondre aux besoins et obtenir le consentement, parce que toutes ces choses vont ensemble. Maintenant, avec la DNUDPA, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, nous parlons de consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Le projet de loi fait le contraire. Il dit essentiellement que nous allons vous parler, mais que nous pouvons prendre tous les règlements, et c'est avec la réglementation qu'on peut faire beaucoup plus de tort et qu'on peut avoir beaucoup plus de contrôle. Ou il peut ne pas y avoir de règlement du tout, parce que nous avons vu des ministres promettre qu'ils allaient simplement passer cette loi et qu'ils régleraient tous les problèmes relatifs à la réglementation, mais aucun règlement n'a été adopté. Nous nous en tenons simplement aux pratiques passées.
Les consultations mondiales panautochtones déforment également ce qui devrait figurer dans le règlement. Ce qui est bon pour les Premières Nations n'a peut-être rien à voir avec les Métis, alors pourquoi les Métis auraient-ils leur mot à dire sur le type de réglementation qui s'appliquera aux Premières Nations et vice versa? Cela fait partie du problème juridique de la consultation panautochtone. En accordant le pouvoir à une entité, c'est-à-dire, dans tous les articles de ce projet de loi, au ministre, vous le retirez essentiellement à une autre. Quel que soit le pouvoir du ministre, c'est quelque chose que les Premières Nations ne l'ont pas, et c'est un vrai problème.
Sachant à quel point la stérilisation forcée est étroitement liée à la prise en charge d'enfants et la façon dont cela est lié, je trouve vraiment troublant que, dans l'ensemble du projet de loi, il n'y a aucune disposition qui interdit expressément le recours à la stérilisation forcée dans toute situation de services à l'enfance et à la famille, particulièrement en ce qui concerne les services de garde d'enfants.
Il y a beaucoup d'autres problèmes concernant le libellé. Il devrait y avoir une discussion au sujet de la compétence à l'extérieur des réserves, sur les questions relatives à la collecte de données, mais selon les amendements que j'ai suggérés, si l'on veut légiférer pour les Premières Nations qui y consentent, il faut qu'il s'agisse d'une loi spécifique aux Premières Nations, qu'il s'agisse de langues ou de services à l'enfance et à la famille. Seules les Premières Nations sont assujetties à la Loi sur les Indiens. Les Premières Nations ont des droits et des lois tout à fait différents, et vous ne pouvez pas tous les mettre ensemble.
Si on légifère, il faut qu'il y ait des dispositions d'exclusion entièrement financées afin que les Premières Nations qui s'occupent déjà des services à l'enfance et à la famille n'aient pas à être visées par cette loi, que leur choix ne se limite pas au statu quo ou qu'elles n'en aient aucun et qu'une solution de rechange totalement financée fasse en sorte que, si elles ne sont pas financées dans le cadre d'un processus, elles le seront dans le cadre de leur propre processus.
Il faut un financement ciblé et engagé pour les Premières Nations, qui soit fondé sur la population, l'inflation, les coûts et les besoins. Le droit inhérent des Premières Nations à l'autodétermination en matière de services à l'enfance et à la famille doit être reconnu de plein droit, sans lien avec l'article 35 ni avec la DNUDPA ni avec quoi que ce soit d'autre. Le droit préexistant inhérent doit être le fondement de toute mesure législative à venir.
J'ajouterais également que, si vous voulez vraiment donner effet à ce projet de loi, il faut abroger l'article 88 de la Loi sur les Indiens afin d'évincer complètement la compétence provinciale sur les Premières Nations dans leur ensemble.
Mes dernières recommandations font expressément référence à la DNUDPA et à toutes les dispositions de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, et je dis que le projet de loi ne devrait pas être adopté tel quel. Il doit au moins faire l'objet d'un examen exhaustif de la part des experts des Premières Nations, y compris des gens comme Cindy Blackstock, qui a de nombreux amendements à apporter, et des organisations comme l'Association nationale des centres d'amitié.
Je vous remercie.
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Bonjour, je m'appelle Josh Ferland. Je suis né à Winnipeg, où je vis encore. Je suis fier d'être ici aujourd'hui pour parler du projet de loi et pour vous faire part de mon expérience et de mes souhaits pour ce projet de loi. Merci de m'avoir invité et de me permettre de faire part de mes réflexions. J'espère que ma voix fera la différence pour les jeunes.
J'ai été placé, quand j'étais enfant. D'après ce que je comprends, c'est la première fois que le gouvernement fédéral s'engage autant dans le dossier de la protection de l'enfance. Je suis en faveur du projet de loi , car je suis Métis, et c'est la première fois que les Métis recevront un appui et un financement du gouvernement fédéral au chapitre de la protection de l'enfance.
Comme j'ai été pris en charge, pendant mon enfance, je crois qu'il est important d'avoir de meilleurs appuis pour les jeunes, à tous les stades de leur développement, ainsi que des appuis qui les aideront à atteindre des objectifs à long terme. J'aurais préféré trouver une famille d'accueil à long terme, beaucoup plus tôt, que d'être dans un foyer de groupe. Les membres de ma famille d'accueil m'ont accueilli et m'ont traité comme l'un des leurs. Ils m'ont enseigné des compétences et des valeurs qui me servent bien dans ma vie d'adulte, à savoir l'importance de travailler dur, d'avoir une bonne éthique de travail, d'être respectueux et prévenant avec tout le monde, de donner en retour. Malgré les raisons pour lesquelles j'ai été placé, je suis reconnaissant envers ma famille d'accueil pour son amour et son acceptation.
J'aimerais parler de certains autres appuis que j'ai eus dans ma vie. Je suis reconnaissant envers la Fédération des Métis du Manitoba, qui finance l'administration métisse des services à l'enfance et à la famille, qui m'a donné accès à une travailleuse spirituelle métisse. La Fédération m'a aidé à faire la transition après ma prise en charge. Je sais d'expérience qu'il n'y a pas beaucoup d'appuis pour les jeunes qui quittent les familles d'accueil. C'est pourquoi il est très important d'avoir du financement pour des programmes comme celui-ci. La travailleuse spirituelle métisse m'a parlé de la formation professionnelle offerte par la Fédération des Métis du Manitoba. Elle m'a aidé à m'inscrire et à me préparer et m'a même conduit au centre de formation, qui se trouve à une heure et demie de Winnipeg. Je continuerai à travailler avec Rhiannon Lynch aussi longtemps que je le pourrai. Ce programme n'offre plus d'appuis aux jeunes après l'âge de 25 ans.
Je pense que ces types de programmes sont essentiels et devraient être une priorité pour ceux qui veulent aider les jeunes adultes. Au cours de ma formation, j'ai obtenu plusieurs certifications qui m'ont ouvert d'excellents débouchés. Je devais encore réfléchir à certaines choses avant que le travail ne devienne une réalité. Mon lieu de travail se trouvait à une heure et demie de la ville et je n'avais aucun moyen de m'y rendre. Je n'ai pas de voiture et aucun autobus ne va jusque-là. Je n'avais pas d'endroit où rester et pas d'argent pour louer un appartement. Il n'y a pas de financement de démarrage disponible pour un jeune comme moi. C'est insensé, quand on pense aux milliers et milliers de dollars qui ont été dépensés pendant mes 12 années de prise en charge. Et ensuite, quand je suis finalement arrivé à trouver un endroit où je pouvais commencer à vivre par mes propres moyens, j'avais seulement besoin de quelques centaines de dollars pour commencer à travailler, mais il n'y avait aucune aide. Il me fallait juste assez pour tenir jusqu'à mon premier chèque de paye. J'étais si près.
Si je vous dis cela, c'est que, parfois, ce ne sont pas les grandes choses qui tuent nos rêves, mais les petites. J'aimerais que vous vous en rappeliez au moment de réfléchir aux conséquences de ce projet de loi.
J'ai été chanceux d'avoir dans ma vie des gens qui avaient la volonté d'en faire plus que ce qu'ils avaient à faire. Ma travailleuse spirituelle métisse a collecté de l'argent pour moi, elle a collecté et donné des cartes-cadeaux. Pat Horsley, de l'organisme métis, qui est ici avec moi aujourd'hui, m'a conduit à mon travail et s'est occupée de mon logement jusqu'à ce que j'aie reçu mon premier chèque de paye. Pat a contacté la FMM et le Metis Community Liaison Department, et ils m'ont donné une carte-cadeau pour que je puisse m'acheter de la nourriture. Même si elle ne reçoit pas de financement provincial pour aider les jeunes qui ne sont plus pris en charge, l'administration métisse des services à l'enfance et à la famille a donné un coup de main pour que je puisse commencer ma vie. Je suis tellement content qu'elle ait trouvé une solution.
J'ai été tellement reconnaissant que ces personnes m'aient donné la priorité, dans système qui semble lourd.
En tant qu'enfants pris en charge, nous avons l'impression d'entendre beaucoup de « non » et que ce qui nous arrive, en grande partie, échappe à notre contrôle.
J'espère que le nouveau projet de loi nous redonnera l'espoir de pouvoir faire les choses différemment, à l'avenir. Il a le potentiel d'avoir davantage de résultats positifs pour les jeunes qui sont actuellement pris en charge.
Merci de m'avoir écouté. Je suis honoré d'avoir eu cette possibilité.
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J'aimerais vraiment parler de plusieurs points que vous avez abordés.
L'APN, le RNM et l'ITK ont déclaré que cela serait corédigé, et ce n'est pas ainsi que Justice Canada rédige des lois. On ne corédige pas les lois. Alors, ils ont changé la formulation, ont admis que ce n'était pas corédigé et que c'était « co-élaboré ».
Rédiger des lois en collaboration avec une organisation, ce n'est pas comme en faire l'élaboration conjointement en respectant les directives des détenteurs de droits des Premières Nations. J'ai entendu les témoignages ici et lors de l'étude préliminaire du Sénat. L'Assemblée des chefs du Manitoba, qui représente 63 Premières Nations, est catégoriquement opposée au projet de loi . Les membres ont tenu des manifestations contre le projet de loi vendredi. Une coalition des Premières Nations du pays organise des journées nationales contre le projet de loi C-92, y compris les Premières Nations des Chefs de l'Ontario et les Premières Nations de l'Alberta. Toute cette information se trouve dans le compte rendu. Il y a une résistance importante à cet égard, et des experts comme Cindy Blackstock, entre autres, ont déclaré que ce projet de loi pose de sérieux problèmes.
Ce n'est pas la manière dont vous l'avez présenté. Vous avez en quelque sorte laissé de côté toutes les personnes qui s'y opposent pour des raisons légitimes, et vous devez garder à l'esprit que ces soi-disant lois des Premières Nations, ayant présumément préséance, sont des lois fédérales. Elles doivent être traitées comme des lois fédérales, non pas comme des lois des Premières Nations en tant que telles, et elles sont assujetties à la Charte et à la Loi canadienne sur les droits de la personne, à l'article 35, portant sur le partage des compétences et les accords de coordination, et aux articles 10 à 15 du projet de loi.
On ne peut pas interpréter une loi en ne lisant qu'un seul article. Il faut la lire en entier et en examiner toutes les dispositions.
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Il y a déjà certaines choses qui se passent et d'autres auxquelles il faut réfléchir. De toute évidence, nous ne voulons pas être perçus comme des personnes qui empêchent un gouvernement d'exercer une compétence légitime. Nous avons l'intention d'expliquer, du mieux que nous le pouvons, comment nous percevons la mise en œuvre de ce projet de loi. Nous l'envisageons de différentes manières.
Bien entendu, nous n'allons pas l'étudier en comparant ceux qui vivent en milieu urbain et... Ce sont les mêmes personnes. Bon nombre d'Autochtones vivent en milieu urbain; bon nombre d'entre eux en partent et y reviennent. Mais il y a également des collectivités importantes, tout particulièrement dans les grandes villes, qui y sont installées depuis trois ou quatre générations. C'est leur collectivité. Les distinctions ne disparaissent pas, car ces gens, lorsqu'ils se retrouvent parmi ces collectivités, reconnaissent déjà leurs différences. Lorsque nous sommes dans un centre urbain, nous ne voulons pas dire à quelle nation nous appartenons, la nation crie, micmaque, mohawk ou peu importe.
À notre avis, vu cette réalité, la mise en œuvre du projet de loi ouvre un espace aux centres d'amitié. Les responsables ont des contacts avec les peuples autochtones, ont parfois établi des partenariats officiels avec des organisations des Premières Nations ou des Métis, en fonction du centre d'amitié ou de la région dans laquelle ils se trouvent, et entretiennent parfois des relations formelles avec les principales sociétés d'aide à l'enfance.
Il est difficile de faire valoir avec force une position quelconque, en ce qui a trait aux chevauchements, à la mise en œuvre et aux compétences, car tout revient à ce qui convient aux enfants, aux familles et à l'ensemble d'une collectivité. À certains endroits, un centre d'amitié fera partie du réseau. Dans certaines collectivités, les centres d'amitié n'occuperont pas autant de place dans le réseau, mais seront plutôt considérés comme un complément. Cela ne répond peut-être pas à votre question, mais j'espère que le point de vue de notre expérience pourra vous éclairer.
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Je tiens à vous remercier tous d'être ici aujourd'hui.
Pendant que nous débattons de ce projet de loi, il faut se poser la question suivante: combien de temps les enfants autochtones de ce pays devront-ils attendre?
J'ai en grande estime le travail de Cindy Blackstock. À mon avis, c'est catastrophique qu'il y ait autant d'ordonnances de non-conformité au pays. Nous devons en assumer la responsabilité en tant que gouvernement fédéral. Tous les membres de la Chambre doivent reconnaître leur responsabilité à cet égard. C'est plutôt inquiétant.
Je crois qu'il est nécessaire d'obtenir du financement dans le cadre de ce projet de loi. À tout le moins, nous devons nous assurer que des ressources sont à la disposition de ces collectivités afin qu'elles puissent effectuer le travail qui est si désespérément nécessaire.
Madame Palmater, vous en avez parlé un peu, et j'aimerais beaucoup vous entendre tous. Ce projet de loi doit-il prévoir du financement?
J'ai entendu bon nombre de témoins dire, et je suis d'accord sur ce point, que ce ne doit pas être un montant fixe, mais que des principes de financement solides doivent être établis. La décision rendue par le Tribunal des droits de la personne nous propose une terminologie qui, à mon avis, serait un bel ajout au projet de loi.
Je pourrais d'abord aborder la question avec vous, Mme Palmater, et ensuite avec Mme Formsma et M. Ferland, si ces derniers souhaitent ajouter quelque chose.
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Bonjour. Merci aux membres du Comité de m'avoir invité à témoigner sur ce dossier très important qui concerne nos enfants, nos familles, nos collectivités et notre nation.
Je m'appelle Jerry Daniels. Je suis le grand chef de la Southern Chiefs' Organization, qui représente 34 Premières Nations du Sud du Manitoba, en particulier le peuple anishinabe et le peuple dakota. En tout, il s'agit de 90 000 personnes.
[Le témoin s'exprime en ojibwé ainsi qu'il suit:]
Ogimaamakwad ndizhinikaaz Binesii ndoodem.
[Les propos du témoin sont traduits ainsi:]
Je m’appelle Leading cloud, et j’appartiens au clan des Thunderbird.
[Traduction]
Chers frères, chères sœurs, je suis heureux d'être ici avec vous et de témoigner à propos d'un projet de loi que vous étudiez minutieusement, des répercussions qu'il pourrait avoir sur la qualité de vie de nos enfants et des possibilités qu'il nous ouvre. Le système dont il est question a eu des conséquences très négatives sur un grand nombre de nos enfants et de nos familles. Il nous a causé énormément de préjudices pendant de nombreuses années. Certaines personnes y voient même le prolongement de l'époque des pensionnats.
Les Premières Nations ont un droit inhérent à l'autodétermination et à l'autonomie gouvernementale. Nous avons des lois, des coutumes et des traités. Les Premières Nations prennent soin de leurs enfants à leur façon. Je peux vous le dire: je fais partie de ceux qui sont passés dans le système des services à l'enfance et à la famille. J'ai été en foyer de groupe quand j'étais jeune, et j'ai eu une jeunesse très difficile. Ma famille déménageait souvent, et je me suis retrouvé dans le système. Cependant, au fil de mes expériences, j'ai pu rencontrer de nombreux aînés, et beaucoup de bonnes personnes, dans le système, m'ont aidé à devenir qui je suis aujourd'hui et à trouver mes valeurs. À dire vrai, c'est grâce au système des services à l'enfance et à la famille que j'ai assisté pour la première fois à une cérémonie de la suerie. C'était au Selkirk Healing Centre, au Manitoba.
Les Premières Nations ont leurs propres moyens de garder leurs familles et leurs collectivités fortes et intactes. Cependant, nos lois, nos institutions et nos systèmes ont été influencés par le système juridique canadien, en particulier la Loi sur les régies de services à l'enfant et à la famille.
Notre objectif est de soutenir des solutions communautaires. Depuis que j'ai été nommé grand chef — cela fait un peu plus de deux ans —, j'ai surtout essayé de trouver des solutions qui fonctionnent au Manitoba. Je me suis intéressé à la Première Nation de Sandy Bay, où le nombre d'enfants en famille d'accueil a diminué grâce aux pratiques concrètes utilisées dans les échanges avec les familles. En travaillant avec les familles et avec la famille élargie, on a pu trouver d'autres moyens de protéger l'intérêt supérieur de l'enfant, sans qu'il soit nécessaire de le retirer de sa famille ou de briser la famille. Voilà l'important, selon moi. Voilà les priorités que nous devons cibler dans le système des services à l'enfance et à la famille.
La Southern Chiefs' Organization dispose d'un agent de liaison avec les services à l'enfance et à la famille. À dire vrai, nous sommes la première régie des services à l'enfant et à la famille du Sud du Manitoba. Nous nommons les membres du conseil d'administration de la régie du Sud, l'organisme de réglementation qui gère l'ensemble des régies du Sud du Manitoba. Nous travaillons en étroite collaboration avec ces dernières depuis quelques années afin de veiller à ce que la réglementation réponde aux besoins des collectivités et soutienne les efforts à déployer sur le terrain.
Il y a énormément d'obstacles à surmonter, mais je ne crois pas qu'ils soient insurmontables. Je crois que nous sommes tout à fait capables de veiller à ce que les familles soient réunies et que l'intérêt supérieur de l'enfant, les valeurs culturelles et les traditions de notre peuple soient protégés afin que les enfants puissent développer leur identité sur un fondement solide.
Il y a une chose que je veux dire en particulier: nous avons vraiment besoin de l'aide du fédéral pour les services à l'enfance et à la famille. Nous avons eu énormément de difficulté à trouver un terrain d'entente avec la province en ce qui concerne les responsabilités traditionnelles. La Southern Chiefs' Organization a donné son appui. Je m'oriente, avec la province... et nous travaillons ensemble, nous nous sommes entendus en principe sur les responsabilités traditionnelles. Je parle des lois et de l'orientation communautaires.
Cela orienterait les priorités et la réglementation, la façon dont nous aidons les enfants ou la façon dont nous réagissons quand l'intérêt de l'enfant est menacé.
C'est notre priorité depuis quelques années. Nous avons constaté que l'orientation a changé. Nous voulions une approche où les responsabilités traditionnelles revenaient essentiellement à la collectivité et à la famille. Cependant, présentement, nous avons une approche de prise en charge personnalisée où ce sont les organismes qui ont la responsabilité. Le projet de loi actuel reflète cette tendance.
Dans le projet de loi, il est question d'égalité réelle et de l'intérêt de l'enfant. Ce sont de bonnes choses, selon moi. Je doute que nous arrivions jamais à une solution parfaite. À mon avis, l'utilité de n'importe quelle loi dépend des gens qui l'appliquent sur le terrain et des gens qui l'interprètent dans les collectivités et dans la région.
Les gens dans les collectivités ont de bonnes intentions. Ils ne sont pas là pour kidnapper nos enfants. Leur rôle est de protéger nos enfants du mieux qu'ils le peuvent. Je le crois sincèrement. Je ne pense pas que le personnel des services à l'enfance et à la famille aient d'autres desseins. Si on leur donne la capacité de financer l'aide aux familles et de veiller à ce qu'il y ait un plan et que les familles aient du soutien, je crois que nous obtiendrons de meilleurs résultats.
Voilà pourquoi je soutiens le projet de loi . Son but est avant tout de donner aux Premières Nations une compétence à cet égard, d'offrir du soutien et de prévenir les interférences dans cette compétence. Comme tous ceux qui sont ici et qui viennent de témoigner devant le comité et comme d'autres témoins qui sont venus précédemment, le financement me préoccupe: il ne sera peut-être pas suffisant du côté de la gouvernance, et il ne sera peut-être pas suffisant du côté de la prestation des services.
J'espère que la disposition touchant l'égalité réelle reflétera cela et que nous aurons suffisamment de financement pour bien faire les choses. Il y a tellement d'enfants au Manitoba... C'est l'origine des services à l'enfance et à la famille. Nous devons avoir la possibilité d'assumer directement la responsabilité des services à l'enfance et à la famille, et il faut que ces services soient financés adéquatement. Nous sommes prêts à le faire. Nous sommes déjà en train de le faire. Nous travaillons avec les administrateurs des services à l'enfance et à la famille. Nous les avons mis en contact avec nos leaders communautaires. Nous faisons aussi participer les femmes et les grands-mères au processus. C'est l'approche que nous avons adoptée, et nous espérons que les gens continueront à travailler pour atteindre ces objectifs et qu'ils accordent la priorité au soutien pour les familles et la collectivité. Si on leur permet de prendre les choses en main, je crois que les services à l'enfance et à la famille et les services de protection de l'enfance seront beaucoup plus efficaces dans la collectivité. Il y aura un soutien beaucoup plus efficace.
Il est grand temps que le gouvernement se retire et nous laisse faire cela. Il y aura des erreurs, les mêmes erreurs que le gouvernement commet depuis une centaine d'années, et il y en aura d'autres. Cependant, nous tirons des leçons et rectifions le tir en conséquence. Nous allons continuer de nous appuyer sur les connaissances que nous retirons de ces situations.
Voilà notre argument. Nous ne croyons pas que le projet de loi sera la panacée pour les services à l'enfance et à la famille. Selon nous, il s'agit plutôt d'une mesure provisoire. Comme pour tout autre projet de loi adopté par le Parlement, la loi devra être modifiée et rectifiée en fonction des expériences sur le terrain.
Voilà ce que je voulais vous dire. J'espère que le projet de loi sera adopté afin que nous puissions continuer d'encourager l'élaboration de lois dans nos collectivités et dans notre région. Nous devrons aussi nous pencher sur la notion d'égalité réelle afin de déterminer ce que cela voudra dire concrètement, dans les ententes globales de négociation, une fois le projet de loi adopté. Les membres de la collectivité devront y participer. Les membres de la collectivité devront avoir une voix. Les organismes régionaux devront aussi y participer.
Encore une fois, ce sera l'entente finale, jusqu'à nouvel ordre. Malgré l'entente, il faudra encore attendre de voir les répercussions sur le terrain. La qualité de vie des gens qui finissent en prison ou dans les rues va s'améliorer, parce qu'il y aura une stratégie communautaire. C'est ce qu'il y a de plus important dans ce projet de loi.
Meegwetch.
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Merci, madame la présidente.
Je veux saluer les sénateurs et les députés ainsi que les membres de l'Assemblée des Premières Nations qui sont avec nous. Je tiens à vous remercier de nous avoir offert vos prières ce matin. Comme vous l'avez fait, madame la présidente, je veux souligner que nous nous trouvons sur le territoire du peuple algonquin.
Je suis le vice-chef Morley Watson, responsable du portefeuille de la santé et du développement social pour la Federation of Sovereign Indigenous Nations.
Le projet de loi vise la conciliation des compétences touchant les enfants autochtones du Canada. Cette conciliation est d'une importance critique et nous l'attendons depuis longtemps. Pour les Premières Nations de la Saskatchewan, il s'agit d'un dossier prioritaire, puisque nous comptons le plus grand nombre d'enfants en familles d'accueil, après le Manitoba et que plus de 80 % de ces enfants sont autochtones. Nous avons enduré — et endurons toujours — l'un des systèmes de protection de l'enfance les plus dysfonctionnels. Le système est corrompu par le racisme et les préjugés défavorables et, en conséquence, il produit des résultats qui vont tout à fait à l'encontre des valeurs et des principes fondamentaux de la protection de l'enfance.
Cela a commencé avec les pensionnats. Puis, il y a eu la rafle des années 1960. Aujourd'hui, on a décidé de nous enlever nos enfants, même s'il existe des solutions plus saines et plus sûres. Au bout du compte, les enfants des Premières Nations sont les victimes. Les provinces n'ont pas réussi à protéger et à soutenir les enfants et les familles des Premières Nations comme elles en avaient la responsabilité. Il est temps pour les provinces de se retirer et de soutenir plutôt ceux qui veulent réellement aider les enfants et les familles des Premières Nations.
Il y a six dispositions dans le projet de loi qui sont très importantes pour nous, et je vais vous expliquer pourquoi.
Premièrement, l'article 18 établit et reconnaît que nous avons le droit inhérent de prendre soin de nos enfants et de préserver l'unité des familles.
Deuxièmement, l'article 14 énonce qu'il faut favoriser les soins préventifs et l'unité familiale.
Troisièmement, dans l'éventualité où un enfant doit être retiré de sa famille, il doit être placé en priorité dans une famille appartenant à l'une de nos collectivités.
Quatrièmement, il faut mettre un terme au système d'alerte des naissances. La prise en charge d'un enfant à l'hôpital est un événement extrêmement traumatisant pour la mère et pour la famille. Cela reflète tout ce qui ne va pas avec le système provincial de protection de l'enfance qui nous est imposé. Il en est question à l'article 14.
Cinquièmement, l'article 9 prévoit que le principe de l'intérêt de l'enfant doit être interprété à la lumière de notre identité, de nos connexions familiales, de notre culture, de nos langues, de notre territoire et de nos valeurs.
Sixièmement, la pauvreté et les problèmes de santé ne sont pas des raisons de retirer un enfant de sa famille et de sa collectivité.
Nous savons que ce projet de loi n'a pas été rédigé en collaboration avec les Premières Nations. Le Canada l'a rédigé seul, mais il a au moins fait parvenir une ébauche à notre fédération à des fins de consultation. Le projet de loi a été élaboré en fonction de notre rétroaction, et notre organisation a rencontré les ministres — l'actuel et l'ancienne — ainsi que les fonctionnaires du ministère à de nombreuses reprises. Nous avons présenté des mémoires et des énoncés de position afin de proposer des modifications qui, selon nous, sont nécessaires. Le Canada n'a pas accepté toutes nos positions de principe, mais nous avons toutefois demandé instamment au Canada d'inclure des dispositions prévoyant un financement prévisible, durable et axé sur les besoins.
En Saskatchewan, les 74 Premières Nations de la Federation of Sovereign Indigenous Nations ont, pendant plus de 50 ans, édifié des institutions coopératives mais distinctes pour servir nos collectivités. Par exemple, il y a la First Nations University of Canada, le Saskatchewan Indian Institute of Technologies et la Saskatchewan Indian Gaming Authority. D'autres organismes ont été mis sur pied et donnent de très bons résultats.
Nous sommes en train de reconstruire de notre nation en soutenant nos jeunes et en leur fournissant l'éducation qui a été refusée à leurs grands-parents. Nous voulons renforcer ce qui est offert aux Premières Nations en matière de protection de l'enfance. Nous avons la capacité attestée de créer des emplois pour notre peuple et nous devons saisir les occasions d'améliorer notre économie. C'est un objectif clé et une priorité pour notre région. En renforçant leurs capacités, les Premières Nations ne seront plus, aux yeux de tous, un fardeau économique comme c'est le cas présentement. Nous allons construire notre propre économie, avec plus de débouchés et d'emplois, grâce à ce projet de loi. Nous allons protéger nos familles du même coup.
Le projet de loi doit mentionner la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones; il en est question dans le préambule du projet de loi . La protection des droits de la personne et la mise en œuvre de la déclaration encadrent les efforts que nous devons tous faire au Canada pour renforcer notre culture, nos langues et nos familles.
Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner à propos de ce projet de loi qui a beaucoup d'importance pour les Premières Nations de la Saskatchewan. Nous savons qu'il s'agit d'un travail difficile et qu'il faudra de nombreuses stratégies ainsi que des efforts concertés pour atteindre notre but. Nous vous implorons de reconnaître l'importance de ce projet de loi et de l'améliorer sans pour autant le retarder. La FSIN et bon nombre de nos conseils tribaux et de nos Premières Nations travaillent présentement à mettre en place leurs compétences et leurs lois sur les enfants et les familles.
Nous ne pouvons plus attendre. Nos enfants méritent mieux que le statu quo. Nous espérons que ce projet de loi favorisera la reconnaissance continue de nos droits inhérents et issus de traités, de nos titres ancestraux et de notre compétence, dans les collaborations à venir. Nous savons que la seule façon de veiller à ce que nos collectivités soient saines et prospères est de veiller à ce que notre peuple puisse élever ses enfants dans le respect de notre histoire, de notre culture, de nos langues, de nos coutumes et de nos lois.
Pour nous, les enfants ne sont pas des sujets ou des marchandises que l'on peut posséder comme s'ils étaient des biens. Ils sont un cadeau du Créateur. Il est de notre responsabilité sacrée de les protéger et de les élever. Il nous revient à nous, à notre peuple, de prendre soin de nos enfants en conformité avec nos lois, peu importe où ils vivent.
Les enfants sont toujours pris en considération dans toutes les décisions. Cela était vrai même à l'époque des traités. Nos aînés voulaient s'assurer que tous nos enfants soient en santé et heureux, tant et aussi longtemps que brillera le soleil, que poussera l'herbe et que couleront les rivières.
Madame la présidente, merci de nous avoir invités.
:
Merci beaucoup, monsieur Vandal. J'ai été très heureux de vous rencontrer pendant le temps des Fêtes.
Je crois que le message principal que nous voulons faire passer, c'est que nous avons toujours été en mesure, en tant que nations, de nous gouverner nous-mêmes. L'histoire l'atteste. Malheureusement, les gouvernements nous ont pris cette responsabilité, même si nous disons que nous avons cette capacité. Nous l'avons toujours eue. Malheureusement, trop souvent, on ne nous a pas laissé prendre les décisions concernant notre peuple et nos collectivités.
Je crois que les temps ont changé. Nous avons toujours été prêts à accepter les responsabilités. Nous avons toujours voulu avoir cette possibilité.
Si on nous donne cette possibilité, monsieur Vandal, nous allons agir, comme nous l'avons toujours fait, dans l'intérêt de notre peuple, et nos enfants sont tout aussi importants. Nous allons toujours agir dans leur intérêt et prendre les meilleures décisions pour eux.
Tout ce dont nous avons besoin, mon ami, c'est qu'on nous donne l'occasion de gouverner et de diriger nos collectivités et notre peuple. Compte tenu de notre histoire et de nos connaissances, je suis certain que, si on nous accordait cela, nous pourrions gouverner notre peuple avec énormément de compétence.
:
Dans le Sud du Manitoba, nous avons fait face à ce défi, en ce qui a trait non seulement aux services à l'enfance et à la famille, mais aussi à de nombreux secteurs différents, dans le cadre des discussions concernant le Traité n
o 1, le Traité n
o 2, la gouvernance des Dakotas, le Traité n
o 5 et les Traités n
os 3 et 4 établis depuis longtemps.
Ce qui unit nombre d'entre nous dans le Sud du Manitoba, c'est que nous sommes tous issus du peuple Anishinabe. Nous avons le peuple Dakota. En réalité, il n'y a que deux nations lorsqu'on y pense, mais nous aimons négocier avec le Canada en fonction des traités, car en réalité, nous devons rappeler au Canada et aux Canadiens que nous n'avons jamais cédé notre compétence. Aucune personne sensée ne ferait cela ou ne céderait son titre de propriété de la terre.
En ce qui a trait à notre relation de gouvernement à gouvernement, nous voulons créer le cadre au moyen d'un traité reconnu à l'échelle internationale. C'est notre manière d'aborder ces choses.
Ce que nous avons fait dans le Sud du Manitoba, et ce que nous ferons selon moi, c'est de reconnaître la inaakonigewin, le droit anishinabe, et plus tard, le droit de la nation Dakota. Ces mesures seront prises à l'échelle de la collectivité. Nous prendrons ces mesures à l'échelle du conseil tribal et à l'échelle du traité. Nos travaux visent à établir des lois à l'échelle de la SCO.
L'élaboration est fondée sur l'harmonisation de toutes ces lois. Ces lois fondamentales viennent de la collectivité; il faut donc procéder collectivité par collectivité. Toutefois, à titre de législateur ou d'organisme de réglementation qui souhaite garantir la protection des enfants autochtones et le soutien des familles, nous devons procéder collectivité par collectivité. Lorsqu'il est possible d'adopter une loi ou de conclure une entente à l'échelon régional, nous devrions le faire, et par la suite, prendre plus de mesures à un échelon supérieur.
C'est la même méthode qu'emploierait le Canada pour essayer d'harmoniser les lois de l'Alberta avec celles du Québec. Les cultures sont très diversifiées, mais il faut trouver un moyen de toutes les soutenir, de respecter les ambitions et les intérêts de tous. C'est ce que nous faisons dans le Sud du Manitoba.
[Le témoin s'exprime en secwepemctsin.]
[Traduction]
Je suis membre de la bande indienne de Neskonlith, mais j'habite avec mon épouse, qui vient de la tribu Secwépemc de Kamloops. Nous avons cinq enfants et un petit-fils. Je travaille pour la Secwépemc Child and Family Services Agency. Mon titre au sein de l'organisme est celui de « travailleur culturel ». Nous sommes des parents-substitus pour l'organisme et, actuellement, deux petites filles font partie de notre famille.
Je suis honoré et reconnaissant de pouvoir, au nom de l'organisme, vous faire part d'une petite partie des réflexions sur le nouveau projet de loi . Toutefois, avant de commencer, je voudrais reconnaître que la procédure en cours a lieu sur le territoire non cédé du peuple algonquin. Je voudrais le remercier de me donner la possibilité de communiquer mes sentiments et mes réflexions en ce qui concerne les enfants et les familles que nous servons.
À la lecture du projet de loi , voici la première question que je me suis posée: quelle est son incidence sur les familles et sur la culture de ces familles dans leur ensemble? Oui, le projet de loi C-92 se concentre sur les enfants qui pourraient être placés chez un membre de la famille élargie ou chez des membres de leur collectivité. Toutefois, ce qui est le plus important, c'est la façon dont il permet aux membres de la famille de rester en contact.
Dans le cas des enfants, la principale chose qu'ils veulent, c'est être avec leurs parents. Compte tenu de ces réflexions et de ces sentiments concernant le fait de renouer les liens, ces mesures doivent aller au-delà des enfants et faire participer leurs parents. Elles devraient leur permettre de grandir ensemble, d'apprendre et de renouer leurs liens. Cet amour existera toujours entre un enfant et ses parents, et ils trouveront leurs racines en se souvenant de qui ils sont.
Il est emballant de constater que, par l'adoption du projet de loi , le gouvernement reconnaît toute l'importance du fait pour les gens d'être ancrés et d'avoir un sentiment d'appartenance et d'identité. Cependant, il y a aussi des moments où il faut se rappeler que ces enfants pourraient se trouver dans une autre nation ou sur un autre territoire et être en train d'apprendre le mode de vie et les traditions de cette nation. Peut-être qu'un élément du passé des parents les a amenés à déménager dans une autre nation, à s'éloigner afin de protéger les enfants qu'ils aiment contre leur propre nation, leur propre réserve, leur propre peuple. Dans l'intérêt des enfants, ils pourraient être placés auprès de parents-substituts de ces nations hôtes, qui les traitent et les aiment comme leurs propres enfants. Ils ont un lien avec la famille, mais, surtout, ils offrent un enseignement à l'enfant dans leur maison avec les mêmes valeurs, le même amour et le même respect que toutes les nations.
Le projet de loi est peut-être aussi fort que le libellé des garanties prévues dans l'ancienne loi, selon laquelle les familles auront la possibilité de rester en contact tout au long de toute interaction avec les services d'aide à l'enfance et d'aide sociale.
Je voudrais vous remercier de m'avoir accordé un bref moment pour prendre la parole. Je voudrais maintenant la céder à ma collègue.
[La témoin s'exprime en wet'suwet'en ainsi qu'il suit:]
Hadih so’endzin? Siy Bernie Charlie sjutnee.
[Les propos de la témoin sont traduits ainsi:]
Bonjour, comment allez-vous? Je m’appelle Bernie Charlie.
[Traduction]
Je me suis présentée à vous dans ma langue, qui est le porteur.
Je m'appelle Bernie Charlie. Je suis une fière matriarche en formation de la nation Carrier. Je suis la benjamine des neuf enfants de ma mère, Dil-za Dza-kiy, Violet Charlie, qui porte ce nom de chef héréditaire qu'elle a acquis par le système de gouvernance traditionnelle de mon peuple, qu'on appelle le bah'lats, aussi communément appelé le potlatch.
Je veux rendre hommage à mon regretté père, Ben Charlie Sr., qui a traversé jusqu'au monde des esprits afin de veiller sur nous avec nos ancêtres.
Dans notre bah'lats, nous avons quatre clans: le Jihl tse yu, c'est-à-dire le clan de la grenouille; le Likh ji bu, le clan de l'ours; le Gilhanten, le clan du caribou; et... Désolée, je n'arrive pas à lire ma propre écriture.
Quoi qu'il en soit, je siège au Likj ji bu, le clan de l'ours de mon peuple, et mon regretté père appartenait au Gilhanten, le clan du caribou. Dans notre bah'lats, les enfants appartiennent de naissance au clan de leur mère. Avant le contact, c'étaient les matriarches, les mères, les grands-mères et la famille élargie qui prenaient les décisions pour le peuple relativement à la gouvernance politique, sociale et économique des collectivités. Les bah'lats sont encore très vivants au sein de notre nation. Ma collectivité d'origine, c'est-à-dire la nation de Lake Babine, est statistiquement la troisième plus grande bande de la Colombie-Britannique.
Je veux reconnaître la terre natale ancestrale non cédée des Tk'emlúps te Secwépemc, où j'ai le privilège de travailler, de vivre et de jouer. J'ai beaucoup de chance d'avoir une famille d'adoption sur ce beau territoire du peuple Secwépemc. J'ai tout un réseau de parents d'adoption et de membres de la famille élargie au sein duquel je trouve du réconfort quand j'ai besoin de soutien dans ma vie.
Je suis la mère de deux beaux enfants et la mère adoptive de plusieurs autres, qui me désignent comme une guide, une mentore et une protectrice pour eux. Je suis également une kyé7e, la grand-mère biologique d'une belle petite fille et la grand-mère de plusieurs autres qui me désignent comme telle dans nos coutumes culturelles.
Comme j'étais la benjamine de la famille, mes frères et sœurs disaient que j'étais gâtée. Toutefois, je me rappelle que les multiples cousins qui ont vécu chez nous pendant une grande partie de ma jeunesse étaient souvent nourris les premiers, recevaient de nouveaux draps et se faisaient souvent acheter de nouveaux vêtements, contrairement aux vêtements recyclés parmi lesquels j'étais la première à pouvoir choisir. À cette époque, je ne rendais pas compte qu'il s'agissait d'enfants adoptifs et qu'ils avaient été confiés à notre famille parce qu'ils avaient été victimes de violence ou de négligence dans leur propre maison, plus loin sur la rue, dans notre réserve.
Mes souvenirs d'enfance comprennent la vie dans une maison de quatre chambres subventionnée par la SCHL et surpeuplée où vivaient plusieurs générations, y compris ma xpé7e âgée, sourde et aveugle, mon grand-père, mes parents, mes frères et sœurs et mes cousins. À un certain moment, 13 personnes vivaient dans notre maison à quatre chambres. Mes parents s'assuraient que nous étions toujours nourris, que nous étions propres et que nous fréquentions l'école catholique locale. Quand mes frères et sœurs aînés ont terminé l'école primaire, ils ont été envoyés au pensionnat catholique, qui était situé à près de 300 kilomètres de chez nous.
Il fallait que je vous raconte cette petite partie de mon histoire et que je vous explique en quoi elle est liée à l'étude préalable du projet de loi .
Mon travail aux premières lignes en tant que travailleuse sociale spécialiste des ressources pour la Secwépemc Child and Family Services Agency m'a procuré une excellente expérience directe pour ce qui est de communiquer une partie de mon apprentissage. J'adopte une approche entièrement axée sur les relations du point de vue d'une travailleuse sociale de niveau C6, ce qui signifie simplement que j'ai le pouvoir et l'obligation de retirer un enfant d'un environnement dangereux.
J'ai pris des notes concernant des éléments qui pourraient être pris en considération, et je les passerai simplement en revue dans l'ordre dans lequel ils figurent dans le document.
En ce qui concerne le principe de l'intérêt de l'enfant, dans le passé, les enfants étaient élevés dans des systèmes familiaux communaux, où toute la famille élargie assumait la responsabilité de prendre soin des enfants: les parents, les tantes et les oncles, les grands-parents et d'autres membres de la communauté.
Actuellement, sous le régime de la loi provinciale, l'accent est principalement mis sur l'enfant lui-même. Il s'agit de la pratique dans le milieu de l'aide sociale à l'enfance. En raison du grand nombre d'enfants autochtones pris en charge, il a été prouvé que ce processus ne fonctionne pas.
Dorénavant, il faudra mettre l'accent sur l'unité familiale: la famille et la famille élargie qui s'occupent des enfants et subviennent à leurs besoins. Ce qui est le mieux pour les familles et pour les communautés sera toujours ce qui est le mieux pour les enfants.
En ce qui concerne l'intérêt de l'enfant autochtone, puis-je proposer que le paragraphe 10(1) soit ainsi libellé: « l'intérêt de la famille est une considération primordiale »?
Les capacités sont un autre thème, c'est-à-dire qu'il faut jeter les bases pour que les enfants soient chez eux et qu'ils y restent, en période de crise, et investir dans le rétablissement de ce qui a été perdu. Ainsi, les communautés reprendront vie et s'occuperont des familles naturellement.
Parmi les autres facteurs en prendre en considération, en ce qui a trait à l'éducation culturelle, linguistique, religieuse et spirituelle et au patrimoine de l'enfant, ou à l'absence de ces éléments, des segments de la population urbaine, surtout en Colombie-Britannique, ont constaté qu'en raison de multiples facteurs tels que...
[Le témoin s'exprime en secwepemctsin.]
[Traduction]
Je reconnais et honore les terres non cédées des peuples du territoire algonquin, où la procédure en cours a lieu.
Je suis de la nation Secwépemc, l'une des plus grandes de l'intérieur de la Colombie-Britannique. Je suis membre du comité de direction de l'Union of British-Columbia Indian Chiefs. Nous travaillons à la mise en œuvre, à l'exercice et à la reconnaissance de notre titre inhérent et de nos droits conférés par les traités. Notre groupe participe avec les gouvernements provincial et fédéral à des travaux et à des efforts de défense des droits visant à faire reconnaître et à affirmer notre compétence inhérente sur nos enfants, depuis de nombreuses décennies.
Il importe que le travail de promotion des politiques et des lois visant nos enfants soit une priorité pour les Premières Nations de la Colombie-Britannique, de même que pour l'Union of British-Columbia Indian Chiefs. Je suis également membre du Conseil des leaders des Premières Nations de la Colombie-Britannique. Nous sommes constitués du Sommet des Premières Nations, de l'Union of British-Columbia Indian Chiefs et de l'Assemblée des Premières Nations de la Colombie-Britannique. Nos trois organisations travaillent en collaboration et réalisent leur mandat politique respectif pour parler d'une voix collective, unifiée et ferme en Colombie-Britannique. Les enfants et les jeunes ont toujours été l'un de ces enjeux.
Tout a commencé en 2002, avec l'accord des Tsawwassen — tout cela figurera dans le mémoire que nous vous avons soumis — ainsi que l'accord de leadership élaboré en 2005. Nous travaillons à l'obtention de ces résultats et de ces changements pour nos enfants. Le projet de loi offre un progrès pratique et significatif qui correspond au travail que nous faisons ici, en Colombie-Britannique.
Ce projet de loi est d'une importance primordiale et arrive à un moment critique. Même si nous avons apporté certaines modifications aux lois de notre province, en ce qui concerne les enfants et les familles, nous constatons que nous sommes encore pris dans un grand nombre des vieux modèles. La seule chose que nous avons pu faire a été d'avoir recours à des organismes mandataires pendant de nombreuses années. En réalité, ces organismes étaient censés être une transition vers la pleine compétence pour nos nations.
Nous sommes coincés dans ce processus. Nous devons poursuivre ce travail jusqu'à l'affirmation et à la reconnaissance de nos droits et titres inhérents, surtout en ce qui concerne nos enfants. Il faut que nous changions, car, partout au Canada, les enfants autochtones sont surreprésentés dans le système. Le premier contact avec les colons et les lois coloniales ont eu une incidence sur nos familles et les ont brisées, par l'intermédiaire des pensionnats. Cela a été documenté dans le cadre de toutes les diverses commissions et audiences qui ont eu lieu au Canada.
Il faut que nous apportions ce changement. Nos familles sont fracturées, et nous devons les ressouder afin que ce changement significatif ait lieu dans la vie des enfants et que nous puissions les ramener chez eux.
Au sein de notre collectivité, nous avons récemment ramené 20 enfants chez eux, mais cela a nécessité beaucoup d'efforts et une lutte importante. Nous avons tenu un événement pour rendre hommage à nos enfants et leur exprimer notre reconnaissance. Notre nation en a également tenu un, il y a environ un mois, à Vancouver, où de nombreuses familles ont été réunies avec leurs enfants. Ce n'est que le commencement du travail. Il faudra en faire beaucoup plus pour ramener nos enfants et vraiment les faire renouer avec leur identité, sur leurs terres, au sein de leurs familles et de leurs communautés. Il faut que nous apportions ce changement significatif pour nos enfants et nos familles.
L'un des objectifs fondamentaux du projet de loi doit être la mise en œuvre de la déclaration des Nations unies. Il s'agit véritablement d'un cadre pour la réconciliation, et son adoption a été recommandée par la Commission de vérité et de réconciliation. Pourtant, les dispositions prévues à l'article 8 du projet de loi ne mentionnent pas cette déclaration comme étant le contexte de la réconciliation en ce qui a trait à l'aide sociale à l'enfance. La seule mention figure dans le préambule, et il n'en est pas question dans l'article 8, lequel est d'une importance cruciale et expose l'objet et les principes de la loi. Cela doit changer.
Je le souligne aussi parce que la déclaration des Nations unies reflète les normes minimales pour la survie et la dignité de nos peuples autochtones. Elle établit les normes minimales en matière de droits de la personne. Il s'agit d'une disposition importante sur laquelle il faudra mettre l'accent dans le cadre de la mise en œuvre du projet de loi , une fois qu'il aura été adopté. L'article 22 est axé sur l'importance du respect des droits des filles et des femmes et du fait de s'assurer qu'elles ne sont pas victimes de discrimination. Voilà pourquoi je vous exhorte à envisager d'apporter un amendement à l'article 8 du projet de loi C-92 par l'ajout d'un alinéa c) ainsi libellé: « de mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones en tant que cadre progressif pour le règlement des problèmes liés aux droits de la personne touchant les enfants, les jeunes et les familles. »
L'une des autres choses que je voulais souligner, c'est qu'il s'agit d'un moment historique et transformationnel pour le Canada et pour les Autochtones de partout au pays. Nous ne pouvons pas les laisser nous glisser entre les doigts. Si nous retournions dans le temps à l'époque où les changements ont été apportés aux lois régissant la politique sur les pensionnats, par exemple, si nous avions apporté cette modification, combien de familles n'auraient pas eu à vivre toute cette expérience des pensionnats? Nous affirmons que, grâce à ce projet de loi sur les enfants et les familles, nous avons l'occasion d'apporter ces changements, de faire cesser la prise en charge de nombreux enfants et de les réunir avec leur communauté et leur famille.
Ce changement significatif doit avoir lieu, car davantage d'enfants sont maintenant pris en charge par ce système d'aide sociale à l'enfance qu'à l'apogée du régime des pensionnats. Ce nombre continue d'augmenter. L'ancienne ministre a mentionné qu'il s'agissait d'une crise humanitaire, et c'est vraiment le cas, alors nous ne pouvons pas rester assis sans rien faire. Nous devons continuer à exercer des pressions afin que soient apportés ces changements à venir. Nous le faisons devant les tribunaux ainsi qu'à d'autres endroits, mais, maintenant, nous avons la possibilité de le faire au moyen d'un projet de loi.
Cela fait maintenant environ quatre ans que la Commission de vérité et de réconciliation a publié son rapport final exhortant le Canada à régler le problème des pensionnats et du système d'aide sociale à l'enfance et à soutenir les langues. Nous sommes sur ce seuil, et nous devons être en mesure de poursuivre ce travail sans que s'écoule une autre année.
Le projet de loi prévoit un moyen par lequel nous pourrons commencer à prendre des mesures à l'égard de certaines de ces demandes. Je pense que la base... les familles, les collectivités et nos systèmes judiciaires sont vraiment importants. Comme je l'ai mentionné, depuis son établissement, cette loi coloniale a rompu ce lien. Elle était conçue pour assimiler notre peuple dans le système, et le résultat a été le retrait de nos enfants et la perturbation de nos systèmes familiaux.
L'autre volet est celui du financement. Le projet de loi doit inclure le financement. Nous ne pouvons pas seulement compter sur les ententes de coordination qui déterminent les ressources nécessaires à cette reconstruction. Compte tenu de l'incidence du colonialisme, il importe que le Canada joigne également le financement à ce processus afin que nous n'ayons pas à dépendre, comme Mme Charlie l'a mentionné plus tôt, du point de vue occidental concernant l'intérêt de l'enfant. Il importe réellement que l'on tienne compte de l'intérêt collectif, pas seulement celui de l'enfant, mais celui des familles également. On a tenté de mettre fin à la transmission de notre culture, de nos cérémonies, de notre langue et de nos lois, mais nous pourrons renverser la vapeur afin d'accroître l'autonomie des enfants, des familles et des collectivités et de leur permettre de guérir et de se reconstruire. Il est vraiment important que nous puissions rétablir nos familles, nos collectivités, nos nations.
La nation Secwépemc effectue une grande part de ce travail dans l'exercice de sa compétence à l'égard de l'enfance et de la famille. On l'appelle Stsmémelt. Nous travaillons avec les Secwépemc Child and Family Services et le Conseil tribal de la Nation Shuswap dans le cadre de cette reconstruction. C'est beaucoup de travail, et il faut que des ressources soient fournies.
Cette approche n'a pas duré, car notre peuple était résilient et y a survécu. Je me tiens devant vous aujourd'hui malgré les dommages que les lois coloniales ont causés. Nous allons continuer à rétablir notre peuple, nos enfants et nos familles. Le Canada a l'obligation de réparer ces torts qui ont eu des conséquences sur un très grand nombre de nos familles et enfants partout au pays. Nous devons vraiment ramener nos enfants chez eux afin qu'ils puissent être élevés au sein de nos collectivités par nos propres gens et savoir qu'ils pourront établir des liens avec leur communauté, leur langue et leurs lois.
Je voulais aborder un autre aspect. Je reconnais et soutiens un grand nombre des nations à qui le projet de loi pose des problèmes, car chaque nation a le droit à l'autodétermination au titre de l'article 3 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Si elles souhaitent promulguer leurs propres lois, elles ont tout simplement besoin de la reconnaissance nécessaire, qu'elle soit conférée par leurs traités ou inhérente; elles ont le libre choix de faire cela par elle-même. Le projet de loi doit trouver un moyen de respecter ce droit, sans quoi, encore une fois, ce sera la voie du colonialisme, et nous ne voulons pas l'emprunter.
Nous voulons être en mesure de respecter les nations qui prennent leurs propres décisions pour elles-mêmes et qui ne dépendent pas des lois du Canada pour le faire. C'est leur choix, si elles ne veulent pas reconnaître le projet de loi. En Colombie-Britannique, nous avons un mandat. Nos chefs ont déjà établi le mandat consistant à travailler à l'aide du projet de loi . Il s'agit d'un texte de loi fédéral. Il prévoit l'affirmation des droits inhérents de nos enfants et ne dépend pas de ces lois coloniales.
Nous allons soumettre notre mémoire. Encore une fois, je vous remercie de nous avoir accordé du temps pour discuter de ces enjeux avec vous. J'ai hâte aux questions que vous pourriez me poser.
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Merci infiniment de vos exposés.
Je dois dire, madame Charlie, que la période que vous avez passée à parler de votre culture et de comment vous avez grandi, etc., nous rappelle vraiment le fait que, ce dont il est question, c'est la perte de la culture d'un peuple et des enfants retirés et envoyés vers des foyers d'accueil non autochtones.
Il y a deux ou trois éléments. La plupart des personnes que nous avons entendues sont favorables au projet de loi, mais elles voulaient discuter de certains aspects. En voici un au sujet duquel je voudrais connaître votre avis: madame Charlie, je pense que vous avez soulevé un élément très important au sujet de l'intérêt collectif, pas seulement l'intérêt de l'enfant, mais celui des familles et de la collectivité, et de toute cette capacité de ramener les nations à leur situation d'autrefois. Comme vous l'avez dit, l'interprétation de ce qu'est l'intérêt de l'enfant du point de vue colonial occidental est très différente.
En Colombie-Britannique, on nous a dit — et de nombreux bureaucrates provinciaux qui souhaitent rester dans l'anonymat me l'ont affirmé — qu'un plus grand nombre d'enfants sont retirés aujourd'hui et depuis 30 ans qu'à l'époque des pensionnats. Ils ont été enlevés à leurs familles et placés dans des foyers d'accueil non autochtones. Selon vous, comment cela se passe-t-il dans le cas des enfants autochtones vivant en milieu urbain? Je pense qu'il s'agit de l'élément clé.
Dans les réserves, il est facile de renouer avec la famille. Toutefois, lorsqu'une personne a été envoyée dans une région urbaine et qu'elle est très loin de sa famille — et, bien souvent, ces personnes fuient la violence au sein de la famille elle-même —, comment envisagez-vous ce retour dans la collectivité, afin que vous puissiez protéger l'enfant, tout en tentant de le réunir avec la famille? Voilà la première question. La deuxième est la suivante: s'il est impossible de le faire, comment envisagez-vous le rôle des centres d'amitié ou des bandes voisines, qui pourraient assumer ce rôle consistant à ramener l'enfant? Considérez-vous qu'il s'agit d'une possibilité? Selon vous, devrait-on financer cette capacité afin d'aider les bandes voisines à ramener les enfants au sein de leur bande, même s'ils ne peuvent pas retourner dans leur bande initiale?
:
Nous avons tenu une cérémonie dans notre nation il y a quelques mois, ici, à Vancouver, au centre Joe Mathias. Nous avons choisi de tenir cet événement à l'extérieur de notre nation, c'est-à-dire dans la ville de Vancouver, parce qu'il y a beaucoup d'enfants et de familles dans les régions urbaines. Un certain nombre de membres de nos 17 collectivités ont participé. Les enfants venaient d'un peu partout. Le centre était rempli de familles et d'enfants. Des membres de chaque collectivité ont pris part à l'exercice des couvertures et ont souhaité la bienvenue à leurs enfants. Certaines collectivités accueillaient beaucoup d'enfants, d'autres quelques-uns seulement.
Il y a encore beaucoup de travail à accomplir. Les familles nous ont demandé de tenir cette cérémonie chaque année afin de reconnaître les enfants qui sont suivis par nos services et ceux que nous tentons encore de ramener à la maison.
Environ un mois plus tard, notre collectivité de Neskonlith a vu revenir 20 enfants, ce qui était un nombre élevé. Gena Edwards, notre intervenante en soutien à la famille, et Fay Ginther, notre conseillère, ont travaillé longtemps pour réunir ces enfants avec la collectivité et leurs familles. C'était un moment vraiment rempli d'émotions pour beaucoup de familles.
Je reconnais que ces enfants et ces familles ont beaucoup à faire encore pour guérir. Nos familles ont aussi demandé que nous poursuivions ce travail.
Nous avons récupéré un bébé qui devait être retiré de sa famille à Toronto, par exemple, et, heureusement, on nous a informés de ce cas. Ce bébé a presque été inscrit dans le système. Nous avons presque dû faire du porte-à-porte dans notre collectivité pour retrouver des membres de sa famille. Nous avons appris que cette situation avait été causée par la rafle des années soixante, moment où son grand-père avait été retiré de la collectivité. Il n'avait pas de lien avec la collectivité, donc personne ne connaissait ce bébé, et cela était dû aux liens qui ont été brisés en raison de la rafle des années soixante. Nous avons réussi à ramener le bébé dans notre collectivité. Il comptait parmi les 20 enfants que nous avons ramenés, et nous travaillons à rétablir des liens avec sa famille. Malheureusement, sa sœur est toujours à Toronto. Elle ne vient pas de notre collectivité, mais sa grand-mère a manifesté son intérêt de la voir placée dans notre collectivité pour qu'elle et son frère ne soient pas séparés.
C'est le genre de récit que chacun de ces enfants et leur famille auraient pu partager; cela témoigne des expériences terribles qu'ils ont vécues et du travail de guérison qu'il faudra accomplir pour qu'ils retrouvent leur famille, leur culture et leur langue.