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[
La témoin s'est exprimée en ktunaxa]
[Traduction]
Bonjour à tous. Merci de m'avoir offert l'occasion de partager avec vous un certain nombre de réflexions sur le projet de loi. J'aimerais commencer par reconnaître le territoire non cédé des Algonquins et les remercier de nous avoir permis de réaliser cet important travail.
Je suis membre de l'exécutif politique du Sommet des Premières Nations, en Colombie-Britannique. Nous représentons les Premières Nations qui ont participé aux négociations de traités avec le Canada et la Colombie-Britannique et qui appuient celles-ci. Je suis également membre du First Nations Leadership Council, qui est un organisme de collaboration politique entre le Sommet des Premières Nations, l'Union of BC Indian Chiefs et le BC Assembly of First Nations.
Le projet de loi dont vous êtes saisis est l'un des plus importants textes de loi pour les membres des Premières Nations depuis une génération.
Pour les 204 communautés et conseils tribaux des Premières Nations de Colombie-Britannique, de même que pour nos nations qui s'emploient activement à mettre en place des lois et des politiques concernant les enfants et les familles au sein de nos systèmes de gouvernement, ce projet de loi s'est fait attendre depuis fort longtemps.
Nous avons collaboré avec le Canada et la Colombie-Britannique pour nous préparer à la mise en oeuvre des compétences des Premières Nations. En 2015, nous avons confirmé que nous entreprendrions une réforme législative, des politiques et des pratiques en vue d'atteindre cet objectif. Si nous savons que la tâche que représente cette réforme est colossale, il s'agit néanmoins de l'une des tâches les plus importantes que nous devrons accomplir.
Le projet de loi doit être interprété dans le contexte du statu quo pour les enfants des Premières Nations. En réalité, près de 5 000 enfants des Premières Nations sont pris en charge en Colombie-Britannique, ce chiffre étant d'environ 40 000 au Canada. Il s'agit là d'un nombre plus considérable d'enfants que ceux qui se sont retrouvés dans les pensionnats indiens, au plus fort de leurs activités.
Nous sommes collectivement confrontés à une crise humanitaire et nationale des droits de la personne. Je rends hommage au travail de l'ex-ministre Jane Philpott, qui a convoqué une réunion nationale d'urgence en janvier 2018 afin de trouver un moyen de résoudre cette crise nationale, en partenariat avec les Premières Nations, et de régler le problème qui afflige les enfants, les familles et les communautés des Premières Nations.
Nous estimons que le projet de loi représente un premier pas significatif et important des instances fédérales à l'égard de la réforme législative nécessaire pour aider les Premières Nations à exercer la compétence qui est la leur en matière de protection de l'enfance. Bien qu'il soit possible de renforcer le projet de loi C-92, celui-ci présente de nombreuses caractéristiques positives.
Les Premières Nations de la Colombie-Britannique souhaitent franchir ce prochain pas, et le projet de loi nous offre le soutien nécessaire dont nous avons besoin pour ce faire ainsi que pour situer comme il se doit le cadre de ce travail pour les étapes de mise en oeuvre. Cela permettra également au Canada de travailler de manière judicieuse avec les Premières Nations, en se fondant sur la reconnaissance et le respect de nos droits en vue de transformer la situation sur le plan de la protection de l'enfance et de rétablir les systèmes et les approches autochtones en matière d'aide aux enfants et aux familles.
Ce projet de loi comporte au moins six aspects principaux qui prendront appui sur le travail que nous avons déjà accompli et permettront de le faire passer au niveau suivant: le premier est celui de la priorité accordée aux approches en matière de prévention, le deuxième est celui des dispositions sur l'égalité réelle, le troisième est celui des dispositions relatives à l'intérêt de l'enfant, le quatrième est celui de la priorité accordée au placement des enfants dans la famille et la communauté, le cinquième fait référence aux principes qui sous-tendent la prestation des services, tandis que le sixième est celui de l'application régulière de la loi. Cependant, il faudra impérativement veiller à ce que ces concepts fonctionnent sur le terrain et que la mise en oeuvre de la loi parvienne à mettre fin à la surreprésentation des enfants des Premières Nations dans les systèmes de protection de l'enfance, et cède le pas à la prévention et à la réunification des familles.
Cela étant dit, j'aimerais maintenant mettre l'accent sur un certain nombre de recommandations clés qui, selon nous, permettraient de renforcer le projet de loi.
Nous recommandons que le projet de loi confie à un défenseur indépendant des droits des enfants ou à un commissaire, au niveau fédéral, le rôle d'appuyer la mise en oeuvre des concepts et des droits du projet de loi C-92 ainsi que de surveiller la mise en oeuvre en plus d'aider les enfants, les jeunes et les familles à s'y retrouver dans les systèmes qui seront touchés par cette loi.
En deuxième lieu, nous reconnaissons qu'est prévue une période d'examen de cinq ans pour évaluer l'efficacité du projet de loi. Nous sommes d'avis que ce délai pourrait être trop long dans le cas du premier de ces examens. En fait, nous croyons que le projet de loi devrait faire l'objet d'un examen après trois ans et que l'on devrait s'assurer que le premier examen spécial couvre les questions soulevées par de nombreuses personnes qui se seront exprimées devant le présent comité ainsi que sous la forme de commentaires publics sur le projet de loi, y compris au chapitre des questions relatives au financement, à la compétence, aux meilleurs résultats pour les enfants et les jeunes, à la réunification des familles, au respect des femmes et des filles et à l'élimination de la discrimination fondée sur le sexe.
Nous aimerions également ajouter une référence à la déclaration des Nations unies dans l'objet. Je vous exhorte à ajouter une référence spécifique à la déclaration des Nations unies dans la section de l'objet du projet de loi , comme ce fut le cas dans le projet de loi en ce qui concerne les langues autochtones, de sorte que la déclaration des Nations unies puisse fixer et assurer le contexte nécessaire pour ce travail, à tous les niveaux. Nous proposons l'adoption d'un amendement visant l'étude d'un alinéa c) qui prévoirait ce qui suit: de mettre en oeuvre la déclaration des Nations unies en tant que cadre progressif pour la résolution des problèmes de droits de la personne touchant les enfants, les jeunes et les familles.
Nous aimerions maintenant aborder la question du financement. Nous estimons que le projet de loi doit également aborder les questions de financement prévu par la loi. Si nous ne sommes pas sûrs du mandat du comité s'agissant de recommander des changements à cet égard, je souligne que le financement représente un aspect d'une importance cruciale pour la réforme de la protection de l'enfance de même que pour appuyer les services à l'enfance et à la famille des Premières Nations.
Par la suite, sur la règle des « liens plus étroits », nous attirons votre attention sur le fait que certaines des dispositions du projet de loi peuvent semer la confusion relativement aux lois et aux pratiques de nos Premières Nations.
Les dispositions sur les liens plus étroits de l'article 24 prévoient que, lorsqu'un conflit entre les règles de deux nations semble poser un problème relativement à celui des deux systèmes de Premières Nations qui s'applique à la décision applicable à un enfant ou à une famille en particulier, le test mis de l'avant dans le projet de loi prévoit que la loi applicable sera celle de la « communauté » qui présente les « liens plus étroits ». Si ce type de règle peut être utile, elle doit néanmoins être qualifiée afin de permettre aux lois des Premières Nations de déterminer également comment les conflits seront gérés. Nos systèmes intertribaux sont parvenus à mettre de l'avant des solutions à cet égard depuis des générations et le caractère inflexible de cette approche pourrait saper certaines de nos lois et pratiques.
Pour cette raison, j'estime qu'il y aurait lieu d'ajouter un paragraphe à l'article 24 qui prévoirait que « les règles en matière de règlement des conflits entre les lois peuvent également céder la place à des accords entre instances dirigeantes autochtones ou aux lois autochtones applicables aux enfants et aux familles ».
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître et de faire part de mes commentaires sur ce projet de loi important et capital, et je vous exhorte à faire preuve de détermination pour parachever cette tâche à titre prioritaire ainsi qu'à mener à bien ce projet de loi. Il se fait attendre depuis longtemps et il représente un besoin impérieux.
Merci.
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Merci, madame la présidente. Bonjour, membres du Comité.
J'aimerais également rendre hommage aux Algonquins et à leurs terres ancestrales.
Comme nous appartenons à la même organisation en Colombie-Britannique, je ne reviendrai pas sur cet aspect. Je tiens cependant à souligner que, lors du dépôt de ce rapport, le premier ministre de la Colombie-Britannique a demandé que, compte tenu du grand nombre d'enfants pris en charge, nous sollicitions des avis sur ce que la province devrait faire. Il s'agit d'un rapport de près de 200 pages qui renferme quelque 86 recommandations. Il examine de manière approfondie les répercussions des lois, des politiques et des normes de pratique.
Je n'ai pas commencé là. J'ai plutôt commencé auprès des communautés, en leur demandant ce qu'elles pensaient et quels étaient leurs sentiments à l'égard des répercussions qu'avaient ces lois, politiques, règlements et normes en matière de pratique provinciaux. Le bilan reflète donc leur point de vue. Il s'agit de l'aspect pratique de ces répercussions sur nos communautés. Le greffier l'a en sa possession, de même qu'un résumé. Un autre document a été remis au greffier avec un énoncé de notre position.
Le projet de loi représente un net progrès en matière de prévention, d'intervention précoce et de services de protection — à l'article 1 — pour les enfants, les jeunes et les familles autochtones dans leurs communautés respectives, tout en reconnaissant et en respectant la diversité des peuples autochtones.
Si le projet de loi évoque les jeunes autochtones, dans ses dispositions d'application, les jeunes ne sont pas inclus. Je pense qu'il y aurait lieu de s'y arrêter. Peut-être s'agit-il d'un oubli.
Le Comité consultatif national est un comité consultatif du . Le rapport provisoire de ce comité a été soumis à l'ex-ministre des Services aux Autochtones, Jane Philpott, de même qu'au chef national de l'APN, Perry Bellegarde. J'ai présidé ce comité. Ce comité a recommandé que le gouvernement fédéral envisage de promulguer une loi fédérale en vue d'intervenir à l'égard des énormes problèmes auxquels sont confrontés les membres des Premières Nations en ce qui concerne les enfants et les familles. La ministre Philpott a conclu que ces défis représentaient des crises humanitaires. Nous nous souvenons tous de ce moment.
Les peuples autochtones qui élaborent leurs propres lois, règlements, politiques et normes de pratique exerceront leurs responsabilités dans un contexte moderne et feront valoir leurs droits inhérents de subvenir aux besoins de leurs enfants et de leurs familles, en plus d'y donner suite. Il s'agirait de leurs lois rédigées par eux et pour eux. La lecture conjointe des articles 18, 2 et 8 jette des bases nécessaires et essentielles à cet égard.
Les principes d'application de l'« égalité réelle » que l'on retrouve au paragraphe 9(3) de même que de la « continuité culturelle » que l'on retrouve au paragraphe 9(2) sont essentiels pour les peuples autochtones. Combinés au soutien important et nécessaire des gouvernements fédéral et provinciaux, ils contribueront à remédier aux ravages profondément enracinés imputables à plus de 150 années d'assimilation délibérée et malencontreuse des lois et des politiques de la Couronne. Le rapport final de la Commission de vérité et réconciliation a parlé de « génocide culturel ».
Le projet de loi et le projet de loi portant sur les langues autochtones fournissent un cadre de fond pour remédier aux piliers des politiques antérieures du gouvernement qui visaient à « tuer l'Indien chez l'enfant » en retirant l'enfant de ses frères et soeurs, de sa famille, de sa communauté, en le séparant des aliments, des terres, des territoires et des ressources, et en donnant une éducation qui visait à christianiser et à « civiliser » l'enfant en déclarant inférieures les philosophies, les enseignements, les langues et la culture autochtones.
Le projet de loi comporte des lacunes et n'est pas exhaustif. Les peuples autochtones seront confrontés à des défis, à des obstacles et à des difficultés tant internes qu'externes pour parvenir à réaliser de façon complète et effective cet aspect important du droit à l'autodétermination. Il faudra du temps pour que soient apportés les changements constructifs et indispensables dont ont besoin les peuples autochtones.
J'aimerais vous soumettre trois recommandations.
L'article 15 devrait être renforcé en assurant le soutien nécessaire et d'autres mesures pour les parents, la famille élargie et la communauté, de sorte qu'aucun enfant ne soit enlevé pour des raisons liées à la pauvreté ou à la situation socio-économique de sa famille.
La recommandation qui porte sur le financement et les crédits est d'une importance cruciale. On ne retrouve qu'une seule référence dans le préambule. Je recommande que la substance sous-jacente de cette reconnaissance soit déplacée du préambule aux dispositions d'application du projet de loi.
Je suis d'accord avec la recommandation qui vise à modifier l'article 8 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
Nous espérons que les trois projets de loi, soit le projet de loi , le projet de loi et le projet de loi , seront adoptés et que la sanction royale sera donnée avant la fin de la présente législature.
Enfin, la , qui contient de nombreux engagements financiers importants envers les Premières Nations, les Inuits et les Métis, doit être adoptée. Nous ne pouvons laisser les engagements du Canada mourir au feuilleton. Nous sommes déjà passés par là.
Je vous remercie.
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Bonjour à tous. Je m'appelle Bobby Narcisse. Je fais partie de la Nation Nishnawbe Aski, NAN, à l'origine de la Première Nation Aroland, dans le cadre des Traités n
os 9 et 5. Nous aussi aimerions reconnaître le territoire des Algonquins. Nous sommes très heureux d'être ici pour présenter un mémoire au comité permanent.
La Nation Nishnawbe Aski profite de cette occasion pour exprimer son point de vue sur le projet de loi , Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis. La NAN appuie l'idée d'une loi fédérale affirmant la compétence des Premières Nations en matière de protection de l'enfance et de la famille, mais s'inquiète néanmoins de certaines faiblesses que comporte la version actuelle du projet de loi C-92.
La Nation Nishnawbe Aski s'est dotée d'un comité des chefs sur les enfants, les jeunes et les familles, et celui-ci a eu l'occasion, au cours des neuf derniers mois, de délibérer à de nombreuses reprises sur la législation fédérale relative aux services à l'enfance et à la famille. Nos membres du comité des chefs connaissent intimement et douloureusement les graves défaillances du paradigme actuel en matière de protection de l'enfance de même que les torts causés par plus d'un siècle d'interférence fédérale et provinciale dans la vie et la gouvernance des communautés et des familles de la Nation Nishnawbe Aski. Fait tout aussi important, les membres du comité des chefs connaissent intimement les forces et la sagesse de nos aînés et de nos ancêtres, au même titre que la richesse culturelle, intellectuelle et spirituelle sur lesquelles tant eux-mêmes que leurs communautés peuvent s'appuyer, et ils en sont reconnaissants.
Le présent mémoire évalue le projet de loi par rapport aux caractéristiques essentielles de la législation telle qu'identifiée par le comité des chefs sur les enfants, les jeunes et les familles, qui furent endossées lors d'une réunion des chefs portant sur le thème de la protection de l'enfance en octobre 2018. La loi fédérale en matière de bien-être des enfants autochtones doit faciliter un changement de paradigme en ce qui concerne les services aux enfants et aux familles. Depuis trop longtemps, ces services n'ont pas été à la hauteur des besoins de nos enfants, de nos jeunes et de nos familles.
Gardant cela à l'esprit, la Nation Nishnawbe Aski préconise une loi fédérale qui, dans un premier temps, affirme la compétence inhérente des Premières Nations en matière de bien-être des enfants et des familles et affirme que cette compétence est exclusive là où elle est revendiquée par une Première Nation, peu importe le lieu de résidence d'un enfant des Premières Nations. Une telle affirmation reconnaît que les Premières Nations sont les mieux placées pour prendre des décisions en ce qui concerne l'intérêt de leurs enfants.
En deuxième lieu, nous préconisons une législation qui garantit un financement adéquat, durable, prévisible et équitable aux Premières Nations pour leur permettre d'exercer leur compétence inhérente dans le domaine du bien-être des enfants et des familles. La loi veille à ce que l'utilisation de termes tels que « codéveloppement » et « collaboration » soit définie et contextualisée comme signifiant « authentique collaboration ». De tels concepts devraient être utilisés pour faciliter l'accomplissement de l'obligation de consulter et d'obtenir un consentement libre, préalable et éclairé, et non de s'y substituer. Ces concepts devraient également assurer une rupture complète dans la manière dont l'« intérêt de l'enfant » a été utilisé par rapport aux enfants, aux jeunes et aux familles des Premières Nations.
En ce qui concerne la compétence, le projet de loi a pour premier objectif d'affirmer les droits et la compétence des peuples autochtones en matière de services à l'enfance et à la famille. Il s'agit là d'un bon point de départ. Cependant, dans sa version actuelle, le projet de loi C-92 affaiblit la compétence des Premières Nations. L'effet combiné de l'absence de reconnaissance du fait que nous pouvons exercer une compétence exclusive sur nos enfants, et du maintien, par le Canada et les provinces et/ou leurs fournisseurs de services et leurs juges, d'un pouvoir prépondérant en invoquant l'intérêt de l'enfant, signifie que le projet de loi C-92 ne reconnaît pas pleinement la compétence inhérente de notre peuple en matière de bien-être des enfants et des familles.
En ce qui concerne le financement, le projet de loi ne contient aucune garantie législative de financement pour nos enfants et nos familles. Ceci est profondément préoccupant. Il ne suffit pas que l'énoncé du préambule reconnaisse la demande actuelle de financement prévisible, stable, fondé sur les besoins et conforme au principe de l'égalité réelle pour les services à l'enfance et à la famille, afin de garantir des résultats positifs à long terme pour les enfants, les familles et les communautés autochtones. Cet appel doit être assorti de garanties prévues par la loi pour un tel financement.
L'affaire de la Société de soutien devant le Tribunal canadien des droits de la personne a mis en lumière les violations des droits de la personne qui se produisent lorsque le financement de nos enfants n'est pas légiféré.
En 2011, la vérificatrice générale du Canada a déterminé que l'absence de fondement législatif à l'appui des programmes offerts dans les réserves et le caractère inapproprié des mécanismes de financement de ces programmes constituaient deux des quatre obstacles structurels qui limitaient gravement la prestation de services publics et nuisaient à l'amélioration des conditions de vie dans les communautés des Premières Nations.
Lorsqu'il a témoigné devant le Comité permanent des comptes publics au sujet du rapport de la vérificatrice générale, en 2012, le sous-ministre d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada de l'époque a expliqué ce qui suit:
Un des aspects vraiment importants du rapport de la vérificatrice générale tient à ce qu'il indique l'existence de quatre... conditions manquantes. C'est la manière de les combiner qui aboutira vraisemblablement à un changement durable. On pourrait choisir l'une ou l'autre de ces conditions, par exemple une législation sans financement, ou un financement sans législation, et ainsi de suite.
Cela pourrait se traduire par quelques résultats, mais ceux-ci seraient probablement, à notre avis, de nature temporaire. Si l'on veut un changement structurel durable, il faut combiner ces outils...
Nous avons besoin d'un changement de paradigme. Nous avons besoin d'un changement durable. La législation doit s'accompagner de garanties législatives en matière de financement. La nouvelle législation sur les services policiers de l'Ontario est un bon modèle de solution législative efficace en matière de financement.
En ce qui concerne la collaboration, depuis août 2018, la nation nishnawbe-aski a fait part de plusieurs de ses préoccupations à SAC au sujet de la législation sur le bien-être des enfants autochtones, y compris au sujet de la collaboration dans la description du processus. Nous voulons nous assurer, compte tenu des préoccupations évoquées jusqu'ici, que le processus de collaboration du Canada...
Cette disposition au sujet de la collaboration est inquiétante. Le Canada a l'obligation constitutionnelle de consulter les Premières Nations lorsqu'il envisage des mesures qui touchent leurs droits en vertu de l'article 35, ce que feraient les règlements prévus dans le projet de loi . Cette obligation figure également dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, qui énonce clairement que le Canada doit obtenir le consentement libre, préalable et éclairé des Premières Nations.
Aussi, la manière dont « l'intérêt de l'enfant » est décrit dans le projet de loi est préoccupante. Dans un énoncé de principe rédigé en septembre 2018 afin d'orienter ses délibérations sur la législation fédérale sur le bien-être des enfants autochtones, le Comité des chefs a déclaré que le gouvernement fédéral a lamentablement échoué face à nos enfants et à nos familles. Au nom de l'« intérêt de l'enfant », le système des pensionnats indiens, tout d'abord, puis le système de protection de l'enfance, ont arraché nos enfants à leurs familles, à leurs communautés... Les conséquences de ces gestes se font toujours sentir, et sont intergénérationnelles. Le Canada et ses provinces n'ont aucune crédibilité pour ce qui est de faire valoir des droits ou de leur capacité à agir dans l'intérêt de nos enfants.
L'idée d'une loi fédérale sur le bien-être des enfants autochtones qui affirmerait les droits et la compétence des peuples autochtones en matière de services à l’enfance et à la famille est encourageante pour la nation nishnawbe-aski. Le projet de loi devrait être renforcé et reconnaître clairement que notre compétence inhérente dans ce domaine est une compétence exclusive, il devrait garantir le financement nécessaire à l'exercice de notre compétence dans ce domaine, éviter l'ambiguïté découlant de l'utilisation des termes « collaborer de façon significative », qui sont mal définis, et éliminer les notions colonialistes, paternalistes et nocives perpétuées par les dispositions sur l'intérêt de l'enfant, afin de garantir une rupture complète avec le passé.
Nous sommes prêts pour un nouveau paradigme dans le domaine des services à l’enfance et à la famille autochtones.
Meegwetch.
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Merci de m'accueillir ici.
Je m'appelle Jeffry Nilles, comme vous le savez, et j'ai vécu en famille d'accueil.
C'était entre la fin des années 1960 et le début des années 1970. Je vais maintenant vous raconter mon histoire.
Je suis originaire de Winnipeg, au Manitoba. Je suis ici pour vous raconter quelques-uns des souvenirs que je garde de ma petite enfance en famille d'accueil et de ma vie par la suite.
Je vais d'abord vous parler de moi. Je suis ojibway. Ma mère vient de Waterhen, au Manitoba, une réserve située à quatre heures de route au nord de Winnipeg. Mon père vient du Luxembourg, en Europe. Quant à moi, je suis père de famille monoparentale. J'ai cinq enfants. Les trois plus jeunes vivent avec moi. J'ai 53 ans, je suis inscrit au collège Neeginan, où je suis un cours de technicien spécialisé en maintenance immobilière. Ma présence ici fait partie de mon cheminement vers la guérison et m'aidera à mieux me connaître en tant qu'Anishinabe.
Je vais commencer par vous dire que je vais parler de mes souvenirs, bons et mauvais. Je n'ai jamais parlé de mon séjour en famille d'accueil avant l'an dernier, lorsque j'ai commencé à participer à un groupe de guérison pour hommes au centre pour Autochtones de Winnipeg. J'ai commencé à m'ouvrir et à parler de mon passé dans le cadre de mon groupe pour hommes, et c'est ce qui m'a conduit ici, à Ottawa.
Je vais commencer par vous raconter mes premiers souvenirs d'enfant, avant d'être placé en famille d'accueil. Je vais commencer par vous parler de mon premier chiot, Skippy. Je me souviens l'avoir reçu de mon mishoomis, mon grand-père, à la campagne. Mes plus anciens souvenirs de mon grand-père concernent l'heure du coucher. Il nous racontait les histoires de Nanabush, à moi et à mes soeurs. Je me rappelle encore qu'il jouait du violon, le soir, que moi et mes cousins essayions de giguer, et que tout le monde riait. Je me rappelle aussi avoir reçu mes premiers points de suture après être tombé de ma bicyclette. Malheureusement, je me rappelle aussi que mes parents buvaient et se disputaient. Un jour, mon enseignante est venue à la maison et nous avons été emmenés. J'ai vu mes soeurs pleurer en demandant leur maman. J'avais six ans, cette année-là.
J'ai passé plus de 45 ans à essayer d'oublier mon séjour en famille d'accueil. Ça me bouleverse encore quand je me rappelle cette période.
Voici quelques-uns de mes souvenirs. Je vais vous les confier. L'un de mes premiers souvenirs est celui d'une dame qui me crie dessus. Je pense qu'elle criait parce que je n'arrêtais pas de pleurer. Je me rappelle que je voulais voir ma maman. On m'a mis en punition dans un coin en me disant de me mettre à genou face au mur. Je me rappelle être resté dans ce coin jusqu'à ce que j'arrête de pleurer. Il y a eu d'autres fois où on m'a envoyé au coin. Je me rappelle qu'une fois, pendant un repas, j'ai eu besoin d'aller aux toilettes, et je l'ai dit dans ma langue. On m'a envoyé au coin, et j'ai commencé à me pisser dessus. Je me rappelle qu'elle m'a agrippé et m'a emmené à la salle de bain, qu'elle m'a déshabillé en criant et en m'appelant « sale Indien ». Je ne savais pas ce qu'était un « Indien ».
Une autre fois, la dame a fait des biscuits aux raisins. Elle les avait laissés refroidir sur la cuisinière. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai pris quelques raisins. Un peu plus tard, la dame s'est mise à crier encore une fois et à demander qui avait pris les raisins. J'ai encore été envoyé en punition dans un coin en me faisant dire que tout ce que les Indiens savent faire, c'est de voler. Je ne savais pas que ce que j'avais fait était mal. Une autre fois, je me promenais à bicyclette et je me suis perdu. Je me rappelle que la police m'a ramené chez la dame, ce soir-là. Je me rappelle qu'elle criait et disait: « Je veux que cet Indien sorte de ma maison. Ramenez-le d'où il vient. » Je me suis rappelé cette phrase plus d'une fois.
Je ne me souviens pas combien de temps j'ai vécu en famille d'accueil. Quand j'ai retrouvé ma famille, mes parents nous ont emmenés en Colombie-Britannique, en 1972. Je le sais parce que j'ai encore les photos de ma classe de deuxième année qui ont été prises à l'école. Ma mère a commencé à nous enseigner à parler ojibway, à moi et à mes deux soeurs les plus jeunes, parce que nous ne nous souvenions d'aucun des mots qu'elle nous disait. Mes soeurs ont très vite réussi à comprendre ce que ma mère disait, mais pas moi. J'avais toujours un prétexte pour ne pas apprendre, et je disais que c'était trop difficile. Je pense que je ne voulais tout simplement pas apprendre.
Nous sommes retournés à Winnipeg en 1974, et c'est là que j'ai à nouveau entendu les mots « sale Indien ». J'étais à l'école. J'avais neuf ans quand un élève plus grand que moi, dans ma classe, a tiré sur ma chaise juste au moment où j'allais m'asseoir. J'ai sauté sur mes pieds et tout le monde a ri. Je me rappelle qu'il disait: « Regardez le sale Indien. » L'instant d'après, je me suis retrouvé à me bagarrer à coups de poing pour la première fois. Je ne sais pas pourquoi j'étais aussi en colère; je sentais juste que tout le monde me dévisageait. Plus tard, ce jour-là, j'ai demandé à ma mère ce que signifiait le mot « Indien ». Elle m'a expliqué que nous étions le premier peuple de ce pays, et m'a dit que je devais être fier de notre identité. Je ne comprenais pas. Je ne me sentais pas fier.
Nous avons déménagé deux autres fois avant que mon père achète une maison sur la rue Alexander, à l'été 1976. Nous sommes allés voir le père de ma mère, dans la réserve. Je me rappelle que mes cousins me taquinaient parce que je ne pouvais pas parler avec eux et que je ne comprenais rien de ce que les gens disaient.
Je n'aimais pas cet endroit; tout ce que je voulais, c'était retourner à la maison au plus vite. La dernière fois que je suis allé dans la réserve de ma mère, c'était pour enterrer son frère, en 1978. Je détestais tout de la réserve: la nourriture, l'eau, les toilettes extérieures. Je détestais la manière dont les gens vivaient. Il y avait des maisons aux vitres cassées. J'avais l'impression que tout le monde buvait tout le temps. Je ne sais pas pourquoi, mais c'est la dernière fois où j'y suis allé.
En 1980, mes parents ont divorcé. Mon frère cadet et moi sommes restés avec mon père et mes soeurs sont parties avec ma mère. L'année suivante, j'ai quitté l'école secondaire et j'ai commencé à travailler. On m'avait dit que si je travaillais dur et que je payais mes factures à temps, la vie serait belle. Lorsque je repense aux 30 dernières années de ma vie, je me rends compte que j'ai tourné le dos à ma famille et à mes proches en plusieurs occasions. Je n'allais ni aux mariages ni aux autres événements qui avaient lieu dans la réserve et auxquels j'étais invité. J'avais semble-t-il toujours une bonne raison de ne pas y aller.
Ça a été encore plus évident quand ma mère est décédée, en 2006. Par égoïsme, j'ai fait enterrer sa dépouille à Winnipeg et non pas dans la réserve, pour ne pas avoir à y aller. C'est comme ça que j'agissais: je pensais toujours à moi. J'ai commencé à vivre des difficultés dans ma propre relation de couple. Après 17 ans de vie commune, nous nous sommes séparés, en 2016, et mon fils est venu vivre avec moi. L'année suivante, ma fille aînée est elle aussi venue vivre avec moi. Elle a obtenu son diplôme cette année-là, avec distinction. Elle a reçu une bourse d'études complète de la Tallman Foundation. Un moment de grande fierté pour son papa.
Je me suis retrouvé avec une hernie, à cause du travail, et j'ai été mis à pied juste avant Noël, en 2017. Je devais être opéré au début de la nouvelle année. Les services à l'enfance et à la famille ont frappé à ma porte juste avant le jour de l'An, pour me demander si je pouvais prendre mes jumelles à la maison. Je n'ai pas hésité, j'ai invité tout le monde à entrer. On m'a dit que leur mère ne pouvait pas s'occuper d'elles. C'était le 8 janvier dernier. J'étais tellement heureux que mes enfants vivent tous avec moi, plutôt qu'avec des étrangers.
On m'a dit que je serais le fournisseur de soins principal de mes jumelles et que les services à l'enfance et à la famille viendraient à la maison aux deux semaines pour voir comment je me débrouillais. Ça n'a pas été facile, le premier mois. Je les emmenais à l'école en utilisant les transports en commun. Il fallait prendre deux autobus pour s'y rendre. Je ne voulais pas qu'elles changent d'école parce que c'était leur dernière année à cet endroit.
Un jour, après avoir déposé mes filles à l'école, j'ai décidé de rentrer à la maison à pied. En marchant, je suis passé près de l'ancienne gare, sur la rue Main. Je me suis rendu compte qu'il y avait là un centre éducatif pour Autochtones. Je suis entré, j'ai vu dans le répertoire qu'il y avait un groupe pour hommes et je me suis présenté aux aînés. Je leur ai un peu parlé de moi et ils m'ont dit qu'il y avait un cercle de partage et un programme parental pour hommes qui se terminait par une retraite et une cérémonie de la suerie.
J'étais curieux et je me suis inscrit, puis je me suis mis à assister aux rencontres des deux groupes. C'était la première fois que j'étais exposé à ma culture. J'étais intrigué par les histoires qui étaient racontées dans les groupes. Ils réunissaient 12 étrangers dont l'âge allait du début de la vingtaine à la fin de la cinquantaine. Au cours des 10 semaines suivantes, j'ai appris les 7 enseignements sur la Terre mère. J'ai aussi appris à faire la cérémonie de la purification par la fumée, à prier et à demander pardon, pour moi et pour d'autres.
Lorsque je retournais à la maison, après les rencontres, je pensais à mon passé, mais surtout, je pensais à ma mère et je me disais qu'elle serait tellement fière de moi. J'ai raconté quelques-unes de mes histoires à mes enfants. Mon fils le plus jeune m'a demandé si je connaissais ma langue. C'était la première fois que je pleurais devant mes enfants, je crois, quand j'ai essayé de leur expliquer pourquoi je ne connaissais pas ma langue et que je leur ai parlé de mon sentiment de culpabilité et de la honte que j'éprouvais à être qui j'étais devenu. Mes enfants m'ont fait tellement plaisir quand ils m'ont dit qu'il n'est jamais trop tard pour apprendre, mais au fond de moi, je savais ce que j'avais fait.
Puis le jour de la suerie est arrivé. J'étais à la fois très excité et nerveux. La suerie a eu lieu à Beausejour, au Manitoba. C'était magnifique. On m'a dit de me déshabiller, de ne garder que mes sous-vêtements et d'apporter une serviette. Je suis entré en avançant à quatre pattes. Assis dans le noir, j'ai vécu une expérience marquante. Je me rappelle l'aîné qui aspergeait les grands-pères avec de l'eau, le grésillement de l'eau qui se transformait en vapeur, le puissant son du tambour, mon coeur qui battait et les chants. J'ai vécu une émotion incroyable.
Nous avons remercié la Terre mère tout en demandant au créateur de guérir nos malades et nos dépendances et en priant pour demander pardon.
Quand est venu mon tour de parler, je ne pouvais penser qu'à ma mère et au fait que j'ai tourné le dos à ma culture. Je me suis senti envahi par la culpabilité. J'ai admis que j'étais en colère, tout le temps. J'avais fait des commentaires racistes visant ma mère, ma famille et ma culture. J'avais honte d'être Indien, et je ne comprenais pas pourquoi. Je voulais savoir qui j'étais.
Les aînés m'ont dit de laisser aller mon passé, de me pardonner et de partager mes histoires sur la guérison. Quand la suerie s'est terminée, je me suis senti fier de comprendre un peu notre culture, nos croyances et nos rires. J'ai ressenti de l'espoir, l'impression d'avoir une deuxième chance d'être un meilleur père pour mes enfants. Je ne suis plus tout le temps aussi sérieux. Je ris, je pleure, mais surtout, j'ai appris à m'aimer à nouveau. Je suis inscrit dans un programme de formation au collège Neeginan. J'ai entrepris de m'instruire et d'instruire mes enfants au sujet de notre culture. J'ai ouvert mes yeux et mon coeur à cette nouvelle façon de vivre. Je fais la cérémonie de la purification par la fumée tous les matins avec mes enfants. La maxime préférée de mes jumelles est: partager, c'est aimer.
Ceci est une partie de mon histoire. Meegwetch. Merci de m'avoir accueilli ici, et merci à tous ceux qui ont fait en sorte que je vienne ici, en particulier le centre pour Autochtones de Winnipeg.
Si vous avez des questions, j'y répondrai avec plaisir. Merci beaucoup.
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Merci beaucoup, madame McLeod, de me donner l'occasion de poser une question.
Je tiens à saluer les collègues qui sont venus aujourd'hui et à vous féliciter pour tout le travail que vous avez accompli à ce sujet. Je remercie le Comité de son excellent travail sur ce projet de loi qui, à mon avis, est probablement le plus important sur lequel le gouvernement travaille, car il fera une différence dans la vie des enfants.
Je suis d'accord avec Mme McLeod pour dire que le projet de loi n'est pas parfait. L'une de mes questions porte particulièrement sur le financement, qui est probablement l'une des critiques les plus sévères. Bobby, je pense que tu as soulevé d'excellents points.
Selon moi, l'idéal serait que ce projet de loi soit financé, premièrement, conformément au principe de Jordan, qui exige que les enfants ne soient pas discriminés en fonction de l'endroit où ils vivent. Je pense qu'il existe des moyens d'obtenir du financement pour assurer le bien-être des enfants en appliquant le principe de Jordan, mais ce n'est pas la méthode idéale. Le deuxième, c'est l'engagement que le gouvernement a pris concernant le Tribunal des droits de la personne, qui l'oblige à payer les coûts réels pour prévenir le retrait des enfants. Ensuite, bien sûr, je pense qu'il y a l'argument très pragmatique du fait qu'en fin de compte, le financement et la prestation du financement prévu par la loi pour les services à l'enfance et à la famille sauveront la société en ce qui concerne les mesures financières et d'autres mesures dans l'avenir. Il ne fait aucun doute que le but ultime serait d'obtenir du financement prévu par la loi.
Je suppose que ma question est la suivante: qu'allons-nous faire au cours des sept prochaines semaines? Quelles sont vos recommandations? Pour ce qui est de l'adoption de ce projet de loi, j'ai proposé un amendement suggérant que l'examen ne devrait pas avoir lieu après cinq ans, mais plutôt après trois ans. J'ai également proposé que l'examen comprenne expressément une analyse visant à déterminer si le financement a été adéquat, ce qui oblige les gouvernements et les organismes à s'assurer que ces services ont été financés adéquatement, et nous permettra, je l'espère, d'ici trois ans, d'obtenir un financement prévu par la loi.
Avez-vous d'autres suggestions plus intéressantes? Je soupçonne que c'est le cas pour ce qui est de la façon dont nous pouvons régler ce problème. Certains ont suggéré que le projet de loi ne devrait pas être adopté s'il n'y a pas de financement. Je pense que le projet de loi devrait être adopté, mais comment pouvons-nous le renforcer afin de nous diriger très bientôt vers un monde où le financement prévu par la loi deviendrait une réalité?
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Je vous remercie beaucoup. Je vous ai donné un document à conserver au dossier. Je tiens à m'excuser auprès du Québec et de tous les francophones de ne pas l'avoir fait traduire à temps. Je m'en excuse sincèrement. J'aurais dû le faire faire, mais une personne de mon bureau n'a pas fait le suivi nécessaire.
Honorable présidente MaryAnn Mihychuk et membres du comité permanent, bonjour. Merci de me donner l'occasion de présenter mon point de vue sur le projet de loi , une loi qui touche les enfants, les jeunes et les familles inuits, métis et des Premières Nations.
Aujourd'hui, je m'adresse à vous en tant que dirigeant de la nation métisse, mais je veux aussi m'adresser à vous en tant que parent et grand-parent. Je veux vous parler en tant que personne qui s'est battue pendant des décennies pour les enfants de ma nation qui ont été arrachés à leurs mères, pères, tantes, oncles, leurs communautés et leur nation. Pendant trop longtemps et malgré tous nos efforts, le statu quo pour nos enfants a été le retrait, le placement en famille d'accueil et l'adoption. Notre nation a été dépeuplée un enfant à la fois, pendant les rafles des années 1960 et à cause des pensionnats, de l'école de jour et de notre système de protection de l'enfance.
L'an dernier, en janvier 2018, j'ai pris la parole lors d'une réunion d'urgence sur les services à l'enfance et à la famille autochtones et j'ai parlé de ce que la ministre Philpott appelait à l'époque une crise humanitaire et une crise des droits de la personne. Cette année, j'ai vu le gouvernement du Manitoba réduire le budget déjà sous-financé de la protection des enfants métis. À l'heure actuelle, au Manitoba, les enfants de la nation métisse valent, selon l'entente de financement, 1,39 $ par jour. C'est le seul montant supplémentaire que nous recevons. C'est moins qu'un café Tim Hortons.
Malgré la réalité actuelle, au moins dans la province, il y a eu des changements positifs. Cela s'est fait grâce à notre propre travail et à notre propre développement. Après la rafle des années soixante, lorsque des milliers de nos enfants ont été enlevés, la Fédération des Métis a élaboré son propre plan en 1982, en organisant toutes sortes d'activités de financement. Nous avons recueilli notre propre argent pour retrouver nos enfants et les ramener à la maison. Nous avons eu la chance d'en trouver près de 100, je crois, mais il y en a plusieurs que nous ne retrouverons probablement jamais. Nous en retrouvons encore aujourd'hui. Nous sommes toujours en contact avec eux et essayons de rétablir les liens avec leur famille. Les histoires que vous entendez...
Je vais mettre cela de côté pour un instant et vous parler en tant que dirigeant. Pour ceux d'entre vous qui n'ont peut-être jamais assisté à l'une de ces réunions, je vous encourage à assister à certaines d'entre elles. En tant que membre du comité, vous avez surtout le pouvoir de faire une différence dans ce pays par l'entremise de lois, d'actions et de votes. Je fais de la politique depuis près de 40 ans maintenant. J'ai remporté sept élections à titre de président et je suis président depuis 22 ans. Il y a 400 000 Métis dans l'Ouest canadien. J'ai présidé de nombreuses réunions au cours de ma carrière, non seulement au Canada, mais à l'échelle internationale. Tout au long de cette période, j'ai vécu la période la plus difficile de ma vie en tant que président pour superviser les discussions concernant les survivants de la rafle des années 1960. Je ne sais pas combien de fois j'ai pleuré sur ce podium, avec eux, en entendant leurs histoires d'abus sexuels et physiques — juste des abus; les animaux étaient mieux traités qu'eux. En fait, la ministre Philpott et moi avons assisté à une réunion et écouté les jeunes parler. C'étaient des survivants des services de protection de l'enfance, et nous avons entendu leurs histoires. La ministre Philpott et moi avons pleuré avec eux et leur avons promis que nous allions nous battre et continuer à nous battre pour que les choses changent, que le changement viendrait un jour, que cela ne se reproduirait plus jamais, et que cela ne pourrait plus se reproduire.
Je suis triste de dire, cependant, que cela se produit encore aujourd'hui à cause de la façon dont le système est conçu actuellement au Manitoba, même si nous avons un système de protection de l'enfance obligatoire. Nous sommes le seul gouvernement de la nation métisse des Prairies à y avoir accès. Nous l'avons obtenu grâce à plusieurs enquêtes, pour lesquelles des gens ont dû mourir, puis les recommandations sont venues de là. Nous en sommes maintenant à l'étape où nous voyons un projet de loi qui nous permettra de nous assurer que les principales dispositions dont on parle et pour lesquelles on se bat seront protégées. Il s'agit de la culture et de l'identité, de veiller à ce que la famille soit la priorité numéro un et à ce que l'enfant reste dans la communauté. Nous aurons la protection du gouvernement fédéral que nous n'avons pas en tant que nation métisse. Nous aurons quelque chose qui nous assurera que nous n'aurons pas, en fait, à craindre que nos enfants soient arrachés ou retirés de leur maison et placés dans des familles d'accueil qui ne font pas partie de notre peuple et qui ne protègent pas notre culture.
En fait, nous en avons perdu un — sans vouloir manquer de respect à la famille philippine — au profit d'un parent d'accueil philippin. La cour estimait que l'enfant était là depuis trop longtemps. Je crois que c'était pendant 18 mois.
L'enfant était assez jeune pour ne pas très bien comprendre qui sont ses parents. Si on l'enlevait à sa famille philippine, cela aurait un effet dévastateur sur lui. Ils l'ont laissé là et nous l'avons perdu. Nous sommes allés en cour et nous avons perdu notre cause. Nous ne pouvons plus permettre que cela se produise. Je suis fier du peuple juif, par exemple, qui ne permettrait jamais que cela se produise. Au Manitoba, il y a l'organisme Jewish Child and Family Services, et je le félicite parce qu'il a la force et les moyens de veiller à ce que cela n'arrive pas aux enfants de sa communauté. Mais pourquoi cela arrive-t-il à la nôtre et pourquoi le permettons-nous? Cela ne peut plus se produire — c'est le nouveau millénaire. Nous ne sommes pas au XIXe siècle ni à la fin du XXe. C'est le temps du changement, et le changement est arrivé.
Ce projet de loi n'est pas parfait. Nous le savons tous. Je vous ai écoutés quand vous avez pris la parole ici. Je vous ai entendu dire encore une fois qu'il faudrait mettre de l'argent de côté. S'il existe quelqu'un que l'argent devrait inquiéter, c'est bien les Métis. Nous n'avons pas de système au Canada en ce moment. Les Premières Nations offrent des services dans les provinces et les territoires où elles travaillent. En fait, deux conseils de bande du Manitoba, la SCO et le MKO, travaillent avec moi. Nous sommes les trois seuls à avoir mandaté des organismes d'aide à l'enfance au Manitoba sous les auspices de la gouvernance. De toute évidence, conseillés par nos dirigeants, nous nous battons avec le gouvernement pour essayer de protéger nos enfants.
Nous venons tout juste de nous réunir, les grands chefs et moi, et nous allons désespérément de l'avant avec notre plan visant à changer l'orientation de la province du Manitoba. Nous sommes livrés à la merci de la province et à la merci des changements qu'apportent les élections. Vous savez tous ce qui se passe pendant les élections, vous autres. Vous êtes tous des politiciens et d'une certaine façon, nous faisons tous de la politique. De nouveaux dirigeants et de nouvelles idéologies entrent en jeu. Dans ma province en ce moment, la réduction et l'élimination du déficit, c'est l'enjeu numéro un. Tout le reste est secondaire. Cela entraîne des compressions, et le système d'aide à l'enfance en a subi aussi. Comme je l'ai dit, nos enfants ne recevront que 1,39 $ par jour pendant les 3 prochaines années.
Comment pouvons-nous changer cela? Au Manitoba, nous partons d'un système qui était fondé sur la prise en charge de l'enfant. Le système était comme ça, et c'est comme ça que vous obteniez un financement. Maintenant, tout le monde parle de prévention, y compris le gouvernement fédéral. Comment changer tout un système qui existait pour s'emparer des enfants, en un système qui fait de la prévention, ce qu'il aurait dû faire il y a des décennies de cela? Maintenant, nous voulons passer à la prévention et c'est l'approche voulue, l'approche directe. Laissez l'enfant dans sa famille, dans sa communauté. C'est l'occasion que nous donnera ce projet de loi. J'ai entendu Cathy parler de certaines choses, et je sais qu'il y a des questions de compétence qui entrent en jeu, mais c'est le bon sens qui devrait l'emporter. Nous avons toujours eu des défis à relever en tant que gouvernements, mais je suis sûr que si nous nous assoyons ensemble, l'esprit ouvert, nous trouverons une solution. Les provinces choisiront cette solution, ou elles la rejetteront.
En ce moment, je sais que les provinces ne veulent pas payer la facture. Elles souhaitent que le gouvernement fédéral paie la facture. Nous devrons trouver une solution de compromis à cet enjeu. Quand il s'agit de ressources, je comprends que le rôle des Métis pose problème, mais nous espérons que si ce projet de loi est accepté, le financement viendra après. Nous le négocierons. Nous ne connaissons pas exactement notre objectif ou notre stratégie, ni ne savons jusqu'où nous irons pour ce qui est de la prévention et des dépenses. Je crois comprendre qu'on a posé une question à mon président lorsqu'il était ici. Ce n'est pas lui qui fournit les services d'aide à l'enfance, parce qu'il est le président national. C'est moi. La question est de savoir comment aviser la communauté, les Métis. Il y a la réserve, et il y a le conseil de bande. Nous aussi disposons de structures politiques, et elles existent depuis 1967. Mon gouvernement est un des plus forts de notre terre ancestrale. Notre système a été conçu pour être le plus démocratique au pays — il assure notre participation. Nous comptons des dirigeants locaux dans tous nos villages et dans nos centres urbains, en plus d'avoir des bureaux dans l'ensemble de la province.
Il est très facile de joindre les Métis, d'aviser les gens. Notre méthode pour amener nos gens à dialoguer et à participer est une des plus simples. On n'a même pas besoin d'en discuter autour de cette table, parce que le système existe depuis un certain temps et qu'il fonctionne bien.
Madame la présidente, je peux vous dire que le gouvernement métis du Manitoba et la nation métisse appuient énergiquement le projet de loi . Nous l'appuierons et avec un peu de chance, nous vous convaincrons... Je vous ai entendu dire que vous l'appuyez tous. C'est ce que vous avez dit. Mais il y a des exceptions, je vous invite à la prudence. Ce projet de loi n'est pas parfait. Il n'est pas panautochtone. J'entends des gens dire qu'il est indépendant et que chaque nation a le droit de choisir. Tout le monde a le droit de l'adopter ou de le rejeter. Nous avons le choix. De notre point de vue, nous l'appuierons parce que nous savons qu'il apportera des changements qui permettront de sauver nos familles, de sauver nos enfants.
Avec un peu de chance, au cours de la prochaine décennie, nous serons tous fiers de voir que nous avons exigé ensemble un énorme changement pour la nation métisse dans ce pays, et ce changement nous permettra effectivement de dire un jour: « Regardez l'argent que nous économisons aujourd'hui et les coûts qui ont diminué. Les familles sont plus fortes parce que nous avons décidé d'appuyer le projet de loi . » Vous obtiendrez cet appui de la nation métisse.
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Les témoignages durent 10 minutes en tout.
Permettez-nous de vous remercier de nous avoir donné l'occasion de vous parler aujourd'hui de notre appui au projet de loi , en ce qu'il concerne les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations.
Je m'appelle Tischa Mason, et je suis la directrice exécutive du Saskatchewan First Nations Family and Community Institute. Je suis accompagnée de Marlene Bugler, directrice exécutive de l'organisme Kanaweyimik Child and Family Services. Elle est également membre du conseil d'administration de l'institut. Nous représentons le territoire du Traité no 6 et les terres ancestrales des Métis ici à Saskatoon, en Saskatchewan.
Voici une brève mise en contexte. L'institut a été créé en 2007 en tant qu'organisme sans but lucratif. Il a été constitué à la demande du directeur exécutif de Services à l'enfance et à la famille des Premières Nations, qui a déterminé le besoin d'obtenir d'un organisme une aide et une formation qui répondent aux besoins des Premières Nations, en plus d'être culturellement adaptées. Notre institut est apolitique.
La mission de l'institut est d'aider à renforcer les capacités des organismes qui offrent des services aux enfants, aux jeunes et aux familles en fonction des valeurs des Premières Nations. Nous y arrivons en menant des travaux de recherche, en élaborant des politiques et des normes de pratique, ainsi que des programmes d'études et en dispensant de la formation. Nous offrons également aux travailleurs des services à l'enfance et à la famille des Premières Nations un soutien sur place portant sur leurs outils d'évaluation des risques, de même que sur la protection des enfants et la prévention.
Nous avons préparé un rapport de recherche sur l'engagement communautaire des Premières Nations pour comprendre les priorités d'une réforme des services d'aide à l'enfance en Saskatchewan. Nous avons produit un document à distribuer qui établit une concordance entre le projet de loi et le rapport de recherche de l'institut, intitulé Voices for Reform. Le projet de loi C-92 compose avec un grand nombre de domaines que les Premières Nations de la Saskatchewan considèrent comme nécessitant une réforme. Toutefois, nous aimerions également déclarer que le libellé doit aborder certains domaines de manière plus poussée et les améliorer.
Il faudrait compléter l'alinéa 16(1)e) proposé pour qu'il se lise comme suit: « tout autre adulte qui s'engage à maintenir le lien qui unit l'enfant à sa culture et à sa communauté ».
De plus, le quatrième attendu à la page 1 exclut les hommes et les garçons.
De même, il est possible de renforcer l'alinéa 9(3)e) proposé au moyen d'une référence au principe de Jordan visant à combler les lacunes dans les services attribuables à des conflits de compétence.
Le projet de loi n'engage pas le gouvernement à financer les services. C'est mentionné dans le dernier attendu à la page 2, mais pas dans celui qui vient avant, qui dit que le gouvernement « s'est engagé [...] à travailler en coopération et en partenariat [...] à mener à bien la réconciliation » et « à dialoguer [...] les peuples autochtones ». Nous espérons que le gouvernement pourra s'engager à financer des organismes en fonction des besoins.
En dernier lieu, nous estimons qu'il faut insister davantage sur le soutien concerté et stratégique aux partenariats afin de mettre sur pied des infrastructures et des systèmes étroitement liés qui auront ou qui ont actuellement une incidence sur l'aide à l'enfance. Les tribunaux de la famille en sont un exemple. Le succès repose sur notre capacité à établir et à entretenir des relations, à travailler ensemble.
J'aimerais céder la parole à Marlene afin qu'elle vous explique cela d'un point de vue technique.
Bonjour.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser au comité permanent alors qu'il étudie le projet de loi . Je vais parler du point de vue d'une technicienne, puisque la Fédération des nations autochtones souveraines exprimera un point de vue politique.
J'ai une maîtrise en administration des affaires, 35 ans d'expérience en services à la personne et 25 ans en protection de l'enfance. J'ai travaillé dans des organismes d'aide à l'enfance des Premières Nations, de même que dans des organismes de services sociaux à l'enfance en Saskatchewan. J'ai vu des enfants pris en charge parce que leurs parents sont toxicomanes. Les parents sont vulnérables aux dépendances, car ils cachent la douleur causée par le traumatisme intergénérationnel. Nous avons appris que les parents ont besoin de programmes de désintoxication adaptés à leur culture pour briser le cycle de la dépendance dans les familles dysfonctionnelles. Kanaweyimik Child and Family Services a stabilisé le nombre d'enfants qui finissent par être pris en charge grâce aux services d'intervention précoce et aux mesures de soutien intensif culturellement adaptés qui sont offerts aux enfants et aux familles.
Nous desservons 5 communautés des Premières Nations et comptons en moyenne de 50 à 60 enfants en n'importe quel moment; 85 % de ces enfants sont soit pupilles de l'État depuis longtemps, soit mis, par une ordonnance de la cour, sous la tutelle d'une personne qui leur porte un intérêt suffisant, ce qui signifie qu'ils sont pris en charge jusqu'à leur 18e anniversaire. Les 15 % qui restent viennent de se faire appréhender, mais nous avons remarqué qu'ils entrent et sortent de foyers d'accueil en très peu de temps. Les enfants autochtones pris en charge sont trop nombreux. De nombreuses circonstances particulières font augmenter ces chiffres. Beaucoup de nos familles autochtones souffrent depuis des décennies de traumatismes non résolus, et cela nuit à leurs compétences parentales. Il est très traumatisant pour un enfant de se faire arracher à son foyer familial. Nous pouvons deviner que ce déplacement aura une incidence sur la vie de l'enfant lorsqu'il deviendra lui-même parent. Ces enfants finissent toujours par retourner dans leur famille lorsqu'ils n'ont plus l'âge d'être pris en charge, indépendamment des antécédents de négligence.
Il est important que nous pensions à des façons de préserver l'unité familiale et que nous travaillions à la réunification opportune grâce à des mesures de soutien culturellement adaptées. Je suis pour le projet de loi puisqu'il permettra aux organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières Nations d'élargir les services culturellement adaptés aux enfants et aux familles vivant hors réserve, mais nous devons faire preuve de prudence en procédant au transfert des responsabilités afin de nous assurer qu'aucun enfant ne tombera entre les différents ordres de gouvernement [Difficultés techniques] entraînent la préparation des organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières Nations de la Saskatchewan.
Nous comptons 16 organismes en Saskatchewan, [Difficultés techniques] 20 à 25 ans d'expérience dans la prestation de services de protection de l'enfance. Seize organismes ont 10 ans d'expérience dans la préparation et la réalisation d'un éventail d'interventions précoces et de mesures de soutien intensif culturellement adaptées à l'intention des enfants et des familles. Deux organismes du Nord de la Saskatchewan ont conclu des ententes avec les Services sociaux de la province afin d'assurer la prestation de services d'aide à tous les enfants hors réserve qui résident dans ces régions. Trois organismes ont conclu des ententes avec les Services sociaux de la province pour offrir une intervention précoce et des mesures de soutien intensif culturellement adaptées aux enfants et aux familles qui sont passés par les services sociaux. Par exemple, Kanaweyimik a conclu des ententes pour gérer les services de visite pour enfants pris en charge par les services sociaux. À North Battleford, en Saskatchewan, les services sociaux envoient toutes les familles qui demandent une visite à Kanaweyimik. L'organisme coordonne et planifie les visites, puis surveille et transporte les enfants à destination et en provenance des lieux de visite. Kanaweyimik offre également deux foyers d'accueil d'urgence aux enfants pris en charge par les services sociaux pour s'assurer de les confier à un foyer des Premières Nations. Nous offrons une intervention précoce et des mesures de soutien intensif culturellement adaptées aux enfants et aux familles qui sont passés par les services sociaux, ce qui permet à bien des enfants de retourner chez eux rapidement.
Mentionnons encore à titre d'exemple que nous avons des ententes avec le ministère de la Justice de la Saskatchewan pour offrir des traitements à toute victime de violence familiale, peu importe sa race, qui doit témoigner devant un tribunal chargé des causes de violence familiale à The Battlefords. Tous nos organismes ont conclu des ententes avec la Saskatchewan visant à trouver et à sélectionner des familles et des aidants naturels pour les enfants autochtones pris en charge par les services sociaux. Nous avons tous des ententes avec la province, encore une fois, pour gérer le dossier des enfants pris en charge, dès qu'ils sont placés dans un foyer évalué et approuvé, situé dans une réserve. Les employés de tous nos organismes ont été formés par les services sociaux pour offrir le programme PRIDE de formation des parents d'accueil aux futurs aidants naturels, alors je crois que la Saskatchewan est en mesure d'effectuer la transition de nos services de prévention à l'extérieur des réserves.
Parmi les points à considérer concernant le projet de loi , on trouve la nécessité de veiller à ce que les capacités des organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières Nations soient maintenues. De plus, nous avons besoin d'une loi qui engage les gouvernements à fournir un financement continu aux organismes en fonction des besoins réels, non seulement dans les réserves, mais aussi à l'extérieur. Ce domaine est tout nouveau pour nous.
Nous avons besoin d'une loi qui aborde la responsabilité, comme la Child and Family Services Act de la Saskatchewan, qui prévoit, à l'article 79, l'immunité tant qu'un fonctionnaire agit de bonne foi. Nous avons besoin d'une loi qui exige l'établissement d'un processus de transfert intergouvernemental, similaire au protocole de transfert interprovincial, pour s'assurer qu'aucun enfant ne tombera entre les différents ordres de gouvernement.
La loi doit s'engager à respecter le principe de Jordan de façon permanente afin de prévenir les lacunes dans les services aux enfants vulnérables.
Nous avons besoin d'une loi qui habilite les organismes à changer radicalement la façon dont la protection de l'enfance est assurée, par exemple en retirant les parents du foyer plutôt que les enfants. La loi provinciale actuelle ne nous y autorise pas, le projet de loi non plus. C'est dans cette direction que s'engage l'organisme Kanaweyimik Child and Family Services. Nous l'avons essayé sur une base volontaire et ça s'est avéré très efficace.
Nos aînés nous ont conseillé de nous concentrer sur les enfants et les jeunes, car ils représentent notre avenir. Nous devons établir un équilibre entre nos techniques modernes et nos valeurs et pratiques traditionnelles pour renforcer nos familles.
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Bonjour, madame la présidente, et merci beaucoup.
[Le témoin s'exprime en lakota.]
[Traduction]
Mes parents, c'est le coeur joyeux que je vous serre la main pour m'avoir donné l'occasion de me présenter ici devant vous. J'ai utilisé ma langue maternelle pour annoncer à mes ancêtres que je suis ici pour parler au nom de nos enfants, de notre peuple et de notre communauté.
Bien que je souhaite ardemment parler de tous les aspects techniques de ce projet de loi, mes savants collègues qui ont témoigné avant moi l'ont déjà fait, tout comme mes parents de la Saskatchewan. Je vais vous parler des réalités, de ce qu'il faut faire et de ce qui fonctionne pour les familles et les enfants de notre peuple.
La terminologie est tellement importante, et dans notre culture comme dans nos coutumes, nous n'avons pas de terme pour désigner « aide à l'enfance ». Nous avons un terme pour désigner nos enfants, wakanyeja, qui signifie nos « êtres sacrés ». Notre vie consiste à envelopper les êtres sacrés comme les cadeaux qu'ils représentent.
L'histoire de l'aide à l'enfance est longue. Les gouvernements successifs ont étudié et examiné la situation de l'aide à l'enfance et, par conséquent, la situation de notre peuple et de nos nations, et ils ont fait des recommandations à cet égard. Nous pouvons énumérer les examens et les recommandations. Toutefois, je suis ici aujourd'hui pour vous expliquer ce que nous nous sommes engagés à faire, en tant que [Le témoin s'exprime en lakota], et comment, pour assurer l'unité et le bien-être de la famille et, ce faisant, le bien-être de la communauté et la prospérité de la nation.
Nous sommes tous conscients des effets qu'ont eus les pensionnats. Notre peuple les a sentis. Ma famille les a sentis. Mes parents les ont sentis. Notre peuple a vécu la rafle des années 1960, où des familles entières ont été décimées à cause notamment des organismes d'aide à l'enfance. Juste avant de partir pour venir ici, j'ai assisté aux funérailles d'une jeune fille qui a grandi pendant la rafle des années 1960. Sa soeur cadette — qui était là — ne savait rien de sa famille. Elle avait les larmes aux yeux quand je me suis adressée à elle comme à un membre de ma famille, quand je lui ai dit à quel point elle compte pour notre famille et à quel point nous sommes importants les uns pour les autres.
Nombre de nos parents, pendant la rafle des années 1960, dans les pensionnats et dans le système d'aide à l'enfance, surtout nos femmes et nos jeunes filles, ont été exploités et tués dans le cadre d'enlèvements et d'assassinats. Le rapport qui sera présenté sous peu vous sera également remis.
Il existe une corrélation directe entre toutes les conséquences des politiques de gouvernements antérieurs — les pensionnats, la rafle des années 1960, l'aide à l'enfance — et les conséquences d'autres politiques gouvernementales qui ont arraché nos enfants à nos communautés et à nos familles. Les femmes et les filles, en particulier, ont été directement touchées. Elles ont souffert, elles ont été portées disparues et/ou assassinées à cause de ce qu'elles ont vécu notamment comme parents dans le cadre de toutes les politiques que j'ai mentionnées.
Notre peuple est unique. Nous formons une société distincte. Notre langue et notre culture ne ressemblent à aucune autre. Nos traditions sont solides. Nos croyances spirituelles sont profondes et nous guident à chaque moment de notre vie. C'est la raison pour laquelle j'ai utilisé ma langue maternelle pour commencer mon témoignage. C'est aussi pour montrer la résurgence de notre connaissance ancestrale — le savoir qui coule dans nos veines, le fait de savoir et de comprendre que nos grands-parents et nos ancêtres veillent sur nous et nous guident, et que leurs enseignements et toutes leurs connaissances circulent dans nos veines. C'est profond, et c'est vivant.
Nous savons très bien que, pour que notre peuple s'épanouisse, nous devons être unis et en santé, dans notre corps comme dans notre âme. Nous devons prendre soin de nous-mêmes et nous devons prendre soin les uns des autres. Nous devons protéger et accompagner nos êtres sacrés, nos wakanyeja sacrés, nos enfants.
C'est ce que nous devons faire, nous qui avons accepté le don et la responsabilité de parents — comme vous ou la plupart d'entre vous —, qui avons vécu et prospéré grâce aux connaissances sacrées de nos ancêtres qui nous ont été transmises par notre langue. Personne ne peut le faire à notre place. Il s'agit d'apporter unité et bien-être à nos familles. Il s'agit de réparer le capteur de rêves brisé de nos familles. Il s'agit de renouer avec la terre, avec notre pays, avec nos foyers. Il s'agit de redonner à nos familles et à nos foyers leur unité, en plaçant nos wakanyeja au centre de tout ce que nous faisons. Il s'agit de remplir notre rôle et nos responsabilités de [Le témoin s'exprime en lakota], et d'atteindre nos buts dans la vie.
D'autres membres de notre peuple ont raconté de façon succincte et avec beaucoup de passion l'histoire de la dévastation infligée à notre peuple, à nos terres et à nos modes de vie. Il n'y a rien de plus odieux que les atrocités infligées à nos membres les plus vulnérables, à nos innocents, à nos enfants sacrés.
Nos enfants sont ceux qui ont souffert au-delà de toute souffrance. Lorsque vous avez arraché à une mère et à un père, ou à une grand-mère ou à un grand-père, leur raison de vivre — leur raison d'être, vous avez causé le plus grand préjudice connu des êtres humains.
C'est dans ce contexte que le projet de loi est perçu. Pouvons-nous nous fier à vous? Nous fier à votre parole? Nous fier à ce que vous fassiez honneur à votre parole, à vos objectifs et au peuple que vous représentez et au nom duquel vous parlez? Voilà où en est la relation entre vous et notre peuple, nos familles et nos enfants.
Des lacunes du projet de loi ont été repérées et signalées. Les collègues qui ont pris la parole ce matin ont parlé des changements nécessaires. Ceux qui ont rédigé ces mots et ceux qui continuent de défendre la suprématie inscrite dans ce document juridique ne doivent pas oublier que nos enfants sont les témoins des résultats. Nos mères et nos pères, nos grands-parents, nos tantes, nos oncles, nos frères et nos soeurs sont des témoins silencieux des résultats. Ils n'ont pas eu l'occasion de vous dire comment ils voient leurs familles réunies à nouveau. Les plus touchés n'ont pas leur mot à dire et n'ont aucune influence sur les décisions vitales que vous vous apprêtez à prendre.
Le document sur lequel vous travaillez est fragile. Il peut être détruit, tout comme des familles ont été détruites par la perte de leurs enfants. Nos enfants sont notre chair et notre sang. Ils sont notre futur. Ils sont notre force vive. Ils sont notre destinée. Ils sont nos ancêtres. Nous seuls, [le témoin s'exprime en lakota], avons la responsabilité de nos enfants.
L'histoire montre que tous nos efforts pour aider nos enfants ont échoué. Nos enfants sont un cadeau et une responsabilité que nous a confié notre créateur. Chaque enfant nous arrive comme un être humain unique, pour nous enseigner, pour nous relier à nos ancêtres et à notre futur, pour nous ouvrir le chemin vers de plus grandes choses à venir, pour porter notre histoire et pour écrire [de nouvelles pages] de notre histoire. Nous honorons notre enfant; nous élevons notre enfant. Nous aimons et nous chérissons, et nous partageons tous les mêmes objectifs et les mêmes desseins.
C'est triste, mais nos enfants sont pris dans une tempête politique. Ils sont au beau milieu de celle-ci. La réalité de l'esprit et du bien-être de l'enfant est délaissée dans la lutte pour savoir qui réussira à gagner la bataille juridique ou politique. Nos enfants sont pris au piège. Personne ne peut parler pour eux, sauf notre collègue et frère qui a pris la parole ce matin en tant qu'adulte.
Un système qui ne comprend pas notre culture, qui ne parle pas notre langue et qui ne comprend pas nos traditions et nos usages ne peut comprendre les besoins de nos enfants. C'est le processus où nous sommes piégés. Nous connaissons la solution. Notre plan et notre intention consistent à faire la transition vers des soutiens au bien-être familial fondés sur notre façon originale de soigner et d'éduquer nos enfants, de nourrir l'esprit individuel et sur notre mode de vie centré sur la famille. Ils s'appuieront sur la compréhension de nos relations de parenté et rétabliront le fondement imbattable de familles enraciné dans notre langue et notre culture et, ainsi, renoueront avec nos connaissances ancestrales qui nous ont soutenues depuis le début des temps: le pouvoir du respect, de la bonté, de la vérité, de l'honnêteté, de l'intégrité, du partage, de l'aide, du don et de l'amour.
Ce que l'on désigne communément des services de prévention — ce que nous connaissons comme l'expression de la bonté, comme le souci d'autrui et l'amour et le soutien de nos systèmes de parenté — signifie de fournir du mentorat, de l'orientation et du soutien pour la guérison des familles. Cela signifie assumer la responsabilité de nos familles par nos enfants, par nos chefs de famille, par notre leadership familial, par nos grands-mères et par nos tantes. Cela signifie s'engager envers la famille et se serrer les coudes entre membres d'une même famille. Cela signifie donner vie à nos lois et règles inhérentes dans notre langue. Dans nos langues, notre système de parenté, nos règles de conduite et notre rôle dans la vie, nous sommes bénis par ce cadeau qu'est notre langue. C'est notre bouée de sauvetage.
J'ai la plus grande foi que nous pouvons accomplir et que nous accomplirons ce que nos enfants et notre peuple nous ont dit de faire, que nos enfants reviendront à la maison, que nos familles seront unies et que notre peuple survivra. Nos jeunes sont engagés, nos proches sont engagés et nos dirigeants — les dirigeants de nos familles — sont engagés. Nous n'avons pas d'autre choix.
J'ai cinq pages, MaryAnn.
Nous le ferons avec honneur et intégrité. Nous avons donné notre parole. Nous aimons nos enfants et nos parents. Personne ne peut le faire, sauf nous. Personne ne comprend notre langue, sauf nous. Personne ne représente nos enfants, sauf nous, notre tiyóspaye.
Dans mon enfance, c'était considéré comme un déshonneur pour notre famille et pour notre famille élargie, notre tiyóspaye, si des enfants étaient appréhendés. Si la voiture bleue du gouvernement venait sur votre terrain, les gens se cachaient, honteux. Les grands-mères n'auraient pas permis cela. Cette voiture bleue est sur notre terrain tous les jours, maintenant, mais elle est conduite par des gens de notre peuple. Cette pratique doit cesser, et nous ne permettrons pas que cela continue. C'est un travail que nous devons faire dans nos foyers et dans nos communautés pour les gens de notre peuple.
Le processus législatif auquel nous participons maintenant ne comprend pas ça, le coeur de notre peuple et l'héritage de nos ancêtres dont nous sommes porteurs. C'est là que résident les réponses.
Nos jeunes renouent avec cela. Nos jeunes filles recherchent isnati, notre [rite de] passage à l'âge adulte. [inaudible ] recherchent eux aussi leur rite de passage à l'âge adulte. Nos jeunes hommes comprendront leur rôle de protecteurs, de cueilleurs et de pourvoyeurs et leurs responsabilités dans la vie. Nos enfants seront honorés et élevés, et nos familles et nos foyers seront entiers. Il le faut.
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J'ai effectivement joué un rôle dès le début. J'ai été président pendant 22 ans. Simplement pour fournir un peu de contexte, pour que les gens sachent qui je suis, je viens du ministère de la Justice. J'ai travaillé pour le ministère de la Justice pendant 10 ans avant de devenir président. J'étais un agent deprobation, puis j'ai été directeur à la division des tribunaux de l'un des ministères. Je me suis occupé de la justice et du système de protection de l'enfance pendant longtemps.
J'ai repris le poste de président en 1996. Lorsque nous avons finalement eu le transfert de responsabilités en 2003, on nous a transféré le mandat du système de protection de l'enfance, mais les politiques générales n'ont pas changé. Comme je l'ai dit plus tôt dans mes commentaires, le système a été conçu pour appréhender les enfants. Il n'a pas été conçu pour maintenir les enfants dans leur famille ou dans leur communauté. Il a été conçu pour les retirer. Votre formule de financement était basée sur ce système: pour aider la famille, il fallait prendre l'enfant. Les gens doivent en être conscients. Vous prenez l'enfant, et la famille n'a aucun moyen — si vous avez entendu Katherine parler de certains problèmes — d'avoir de l'argent pour se défendre, aucun moyen d'avoir le droit de même parler ou de comprendre ce système compliqué. C'était alors aux mains des avocats devant les tribunaux et tout ce que ça comportait.
Oui, Danny, le problème était tout à fait le contraire. Nous avons tenu un dossier de toutes les personnes que nous avons empêché d'appréhender. Ça n'avait aucune valeur pour la Province, ce qui nous semblait absolument ridicule, parce que ça montre qu'il y a eu prévention. Je parle de milliers. Quand on regarde ça de ce point de vue-là, c'était conçu pour appréhender.
Maintenant il y a un changement majeur. Je sais qu'au Manitoba, la législation sur les soins conformes aux traditions, etc., a permis de travailler à la prévention. Mais le problème demeure maintenant... parce que nous sommes complètement sous-financés — les données, les statistiques, et toutes les preuves le montrent — pourtant, on nous dit que nous pouvons travailler à la prévention avec les fonds excédentaires. Comment pouvons-nous avoir des fonds excédentaires quand nous sommes déjà sous-financés? Il n'y a aucune façon que nous changions le côté prévention des choses.
C'est notre espoir pour le projet de loi . L'important dans le projet de loi C-92 est d'aller vers la prévention, de travailler avec la famille, de maintenir la famille chez elle. De s'assurer que les grands-parents, les tantes et les oncles sont tous impliqués. Laissez-nous prendre soin de nos propres enfants. Je ne sais pas combien de fois nous vous l'avons dit, à vous et à la société extérieure. Laissez-nous prendre soin de nos affaires.
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J'espère que vous pouvez dire ça à mon premier ministre. Parce qu'en fin de compte, quand je vais revenir au Manitoba, je vais simplement répéter ça très fort, moi et les grands chefs du Manitoba, que le système est conçu pour que nous ne puissions pas...
Comment peut-on gérer les familles d'accueil avec seulement 3,5 employés?
À propos de nous donner du financement, laissez-moi vous dire ceci, Kevin; c'est une question grave que nous devons tous prendre en compte. J'espère que vous prendrez position là-dessus. Je pense que le Manitoba et une autre province sont les deux seules du pays qui ont repris l'argent des allocations pour enfant. Ils ont repris l'argent de ces allocations pour enfant qui devrait être mis de côté pour les enfants et leur futur.
Mais au Manitoba, le gouvernement le reprend. Il le récupère. Une cause doit aller devant les tribunaux sous peu. Mais devinez ce qu'ils viennent de nous faire, au Manitoba, Kevin, en réponse au 3,5? Ils nous ont escroqués sur le montant total de ces allocations pour enfant qui ont été récupérées auparavant. Au lieu de, disons, hypothétiquement, me donner, je crois que c'était 53 millions de dollars, ils l'ont récupéré, parce qu'ils ont utilisé l'argent des allocations pour enfant avant. Ils ont coupé ces 6 millions de dollars. Maintenant, pour ouvrir mon organisme, ils me forcent à dépenser mon argent des allocations pour enfant pour fonctionner. Ils disent qu'ils ne récupèrent rien. Eh bien, ils me le font dépenser. Ils sont en train de m'escroquer.
En fin de compte, les Premières Nations vivent la même chose. Pour la Southern Chiefs' Organization, c'était 17 millions de dollars, je crois. Quand vous commencez à regarder ces chiffres-là, ça fait peur. Cet argent des allocations pour enfant, c'est pour ces petits-là. Cet argent devrait être placé en fiducie pour eux. Cet argent-là devrait être utilisé pour eux. Beaucoup restent là pendant 10 ans ou plus. Lorsqu'ils s'en iront un jour, au moins ils ont de quoi commencer leur vie. Mais si vous les forcez à payer leur propre système de protection de l'enfance avec l'argent des allocations fédérales pour enfant, c'est une honte.
Voilà pourquoi nous n'avons que 3,5 employés aujourd'hui, Kevin, parce que notre premier ministre coupe radicalement aujourd'hui. Le bien-être des enfants n'est pas une priorité.
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Bien sûr, j'appuierais le principe d'avoir une caution parce que de nos jours, pourrait-on résumer cela à une question de confiance entre chacun en tant que gouvernements? Je crois que vous avez dit « quel que soit le gouvernement en place ». Je crois que c'est primordial.
Je tiens à préciser ceci. Je ne veux pas qu'on apporte des modifications au projet de loi si cela est pour retarder son adoption. Si le projet de loi doit aller de l'avant avec l'accord de toutes les parties, surtout celui du gouvernement en place, et si ce dernier accepte d'inclure la clause, et si cela ne retarde pas l'adoption du projet de loi ou ne le modifie pas, alors je l'appuierais.
Par contre, je serai clair, et Rachel, j'estime que votre question est très importante — à l'heure actuelle, la formule en vigueur au Manitoba, même au sein de l'organisme mandaté, est fondée entièrement sur la volonté du gouvernement.
Dans nos agences, le ratio est de 700:1. Si votre ratio est supérieur à 700:1, une nouvelle agence devrait entrer en jeu. Une de nos agences a un ratio supérieur à 1 200, ce qui dépasse de 500 l'exigence.
Le ratio client-travailleur social est également de 25:1. Nous dépassons ce ratio et nous revenons vers les zones de risque de 30, 35 ou 40:1, et cela est inquiétant. Kevin a soulevé la question indiquant que le chiffre de 3,5 employés pour surveiller toutes ces familles d'accueil dépasse l'entendement.
Au Manitoba, il n'y a aucune disposition dans la loi portant sur le financement. C'est uniquement fondé sur la volonté d'un gouvernement. S'il y a des dispositions dans ce projet de loi, et que cela ne retarde pas l'adoption du projet de loi, je suis tout à fait pour, et je l'appuierais sans réserve.
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Merci, madame la présidente.
[Le témoin s'exprime en ukrainien]
[Traduction]
C'est un peu d'Ukrainski. Je connais vos origines.
[Le témoin s’exprime en cri ainsi qu'il suit:]
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[Les propos du témoin sont traduits ainsi:]
Je suis heureux d'être ici.
[Le témoin s’exprime en cri ainsi qu'il suit:]
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[Les propos du témoin sont traduits ainsi:]
Je vous remercie tous.
[Traduction]
En tant que famille et amis, je vous remercie également de reconnaître l'existence du territoire algonquin.
Ce matin, j'accueille également les pensées bienveillantes, l'esprit et l'intellect de ma collègue, Mary Ellen Turpel-Lafond. Elle est bien connue partout au Canada et elle est une spécialiste du bien-être de l'enfance, entre autres choses.
Le rapport final de la Commission de vérité et réconciliation du Canada a fourni de nombreuses propositions concrètes pour aller de l'avant avec la réconciliation et les droits de la personne des Premières Nations. La CVR a reconnu dans les cinq premiers appels à l'action que la question dont vous êtes saisis aujourd'hui, le bien-être de l'enfance, doit être résolue.
La CVR a expressément souligné le besoin pour la législation fédérale de mettre en oeuvre les changements nécessaires pour mettre fin à la crise de la prise en charge disproportionnée des enfants des Premières Nations. La CVR a également mentionné que le respect des normes minimales en matière de droits de la personne de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones est essentiel à la réconciliation.
Cette approche a influencé les résolutions adoptées par l'Assemblée des Premières Nations, ce qui a mené à notre participation à cette initiative. Le motif est incontestable. Nous avons de nombreuses résolutions émanant de nos chefs à l'assemblée. Personne ne peut remettre en question le mandat ou demander à l'APN pourquoi elle agit de cette façon. Il est impossible d'obtenir l'unanimité chaque fois. Aucun de vos partis ne peut y arriver non plus. Même chose pour l'ensemble des Canadiens, quel que soit l'enjeu, tout comme l'APN. Mais nous avons un mandat et nous avons une orientation quant à notre processus. C'est ce qui explique notre action.
Lorsque des droits sont violés et que la vie d'enfants est en danger, nous affirmons qu'au fil du temps, dans ces systèmes, le respect des droits de la personne les plus fondamentaux des enfants, des familles, des collectivités et des nations constitue le cadre approprié.
Pourquoi le projet de loi est-il important? Il faut comprendre le projet de loi C-92 dans le contexte du statu quo qui prévaut aujourd'hui pour les enfants des Premières Nations. Tout cela peut paraître répétitif — vous avez entendu de nombreux témoins — mais nous continuerons de le dire jusqu'à ce que les gens comprennent. Il y a environ 40 000 enfants dans les services de protection partout au Canada. Certaines provinces sont pires que d'autres.
Il y a deux systèmes: celui des organismes de services à l'enfance et à la famille dans les réserves, mais aussi les systèmes provinciaux, sur lesquels on doit se pencher. C'est ce que cette mesure tente de faire.
Lorsque nous affirmons qu'il y a 40 000 enfants dans les services de protection au Canada, nous savons qu'il y a plus d'enfants en protection qu'il n'y en a eu dans les pensionnats autochtones au plus fort de leurs opérations. C'est une statistique tout à fait ahurissante. On est en présence d'une crise de droits de la personne au Canada. Nous affirmons donc qu'il s'agit d'une crise humanitaire et d'une crise nationale des droits de la personne. Ce n'est pas un problème qui se réglera par l'intervention des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux qui continueront d'imposer leur compétence présumée sur nos enfants tout en ignorant les droits inhérents des peuples des Premières Nations.
Le statu quo a été un échec évident et inadmissible. Il a entraîné de lourdes conséquences pour des générations d'enfants, de familles et de collectivités. Le projet de loi marque un tournant décisif par rapport au statu quo juridique en ce qui a trait à la compétence des Premières Nations. Le projet de loi contient plusieurs dispositions qui affirment les droits autochtones inhérents et les droits conférés par traités des Premières Nations, y compris l'autodétermination et le droit à l'autonomie gouvernementale en ce qui a trait aux enfants et aux familles. De nombreuses Premières Nations sont prêtes à fonctionner selon leurs propres lois et défendent cette approche depuis des décennies.
Je ne cesse de répéter ceci: Occupez le terrain. Vous avez des lois fédérales. Vous avez des lois provinciales et territoriales, mais vous pouvez — et devriez — aussi avoir des lois des Premières Nations dans différents secteurs. Occupez le terrain et revendiquez cette compétence en tant que droit inhérent.
La Première Nation Slapsin et Kukpi7 Christian — il sera ici plus tard aujourd'hui — représentent un exemple type. Kukpi7 Christian et le conseil tribal sont prêts, comme le sont de nombreux autres conseils partout au Canada. Nous sommes bloqués par l'absence de législation appuyant et reconnaissant l'autorité et la compétence entières des Premières Nations en matière de services d'aide à l'enfance et à la famille.
En plus des affirmations en matière de compétence et de pouvoir législatif contenues dans le projet de loi, des principes opérationnels ont été ajoutés afin de s'assurer que les problèmes graves en protection de l'enfance peuvent être réglés immédiatement.
Les principes comme la priorité accordée à la prévention et au placement des enfants sont conçus pour recalibrer le système de protection de l'enfance dès le premier jour suivant la sanction royale. La priorisation de la prévention par rapport à l'appréhension, de même que l'importance de placements culturellement adaptés, sont des améliorations immédiates accessibles aux Premières Nations même avant que les Premières Nations adoptent leurs propres lois.
Le projet de loi fait également progresser la reconnaissance juridique concrète des droits de la personne des peuples des Premières Nations en affirmant les droits collectifs, les droits individuels de chaque enfant et chaque jeune, et les droits de leur famille et de leurs soignants.
Le projet de loi est un pas dans la bonne direction. C'est un pas en avant pour les Premières Nations, et il y a une urgence extrême de compléter le travail et de faire adopter le projet de loi. C'est un travail très important de ce comité. Il faut se retrousser les manches. Vous devez obtenir les votes nécessaires et passer à l'étape du Sénat. C'est une autre avenue à explorer. Le mois de juin arrive à grands pas et il y a un sentiment d'urgence pour les amis et les proches.
Nous sommes conscients qu'une seule loi ne réglera pas tous les problèmes, mais ce projet de loi est un pas en avant.
C'est un pas en avant. Aucun instrument législatif ne suffira à lui seul. En commençant par un cadre national pendant que les innovations régionales et au niveau des nations se poursuivent, cela représente un bon départ. Il y a de la souplesse. Ce projet de loi complétera les accords de gouvernement autonome sans leur porter atteinte.
L'impact du système de protection de l'enfance se fait sentir chaque jour au sein des collectivités des Premières Nations et des familles. Vous entendez constamment — et cela est vrai — qu'il n'y a pas de cadeau plus précieux du Créateur que nos enfants. Ceux-ci méritent de grandir et de se développer au sein de leur famille, en connaissant bien leur culture, leur langue, leurs coutumes et leurs traditions, avec l'amour et le soutien de leur Première Nation.
Nous avons besoin d'un système qui affirme notre identité et nos systèmes familiaux, où nous n'aurons plus besoin d'implorer le soutien et la reconnaissance des gouvernements provinciaux: des gouvernements qui se sont contentés d'appliquer la Loi sur les Indiens et qui nous ont par conséquent imposé des politiques sévères qui ont laissé tomber nos enfants.
Le projet de loi reconnaît et affirme ce en quoi nous croyons fermement et que nous avons toujours eu: le droit d'élever nos enfants et d'en prendre soin selon nos propres pratiques et valeurs et de transmettre notre langue et notre culture aux générations qui suivront.
L'article 18 du projet de loi est essentiel pour nous. Il doit y avoir une approche fondée sur les droits qui affirme nos droits inhérents, y compris l'autonomie gouvernementale pour les services à l'enfance et à la famille. Il est temps que le Canada passe à un système qui aurait dû être mis en place il y a longtemps.
Le projet de loi est un pas en avant important parce qu'il affirme notre compétence et crée un espace pour les lois et les pratiques des Premières Nations en ce qui a trait à nos familles. C'est une législation qui respecte les droits dans le contexte de la Déclaration des Nations unies, qui constitue la norme minimale pour la survie et la dignité des peuples autochtones. Il établit les principes qui empêcheront les enfants d'être retirés inutilement de leur foyer, favorise le maintien des enfants dans leur collectivité et veille à ce que le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant soit compris et appliqué dans la perspective des Premières Nations pour nos enfants et nos familles.
Nous sommes conscients que le projet de loi n'est pas parfait.
J'y vais d'une affirmation de mon cru ici: La perfection dans un projet de loi ou une loi peut être perçue comme un ennemi du bien. La perfection viendra avec le temps parce qu'il y aura des révisions et des amendements, mais il faut commencer quelque part. Alors commençons. Adoptons le projet de loi.
Ce projet de loi peut être renforcé et nous avons des recommandations pour le faire. Il y a quatre domaines.
Le premier est le financement, un élément très important. Le financement devrait être précisé par trois amendements: a) la formulation du financement dans le préambule doit être plus précise pour affirmer que le Canada reconnaît la demande de financement et accepte la demande de financement; b) il est nécessaire d'inclure une disposition sur le financement dans le corps du projet de loi; et c) l'article 20 du projet de loi sur les accords de coordination doit être plus précis en ce qui a trait aux arrangements fiscaux nécessaires pour appuyer les gouvernements des Premières Nations et coordonner les services dans les systèmes sur les réserves et à l'extérieur des réserves. Il faut qu'il y ait une coordination.
Voilà pour un premier élément sur le financement.
Deuxièmement, la référence à la déclaration des Nations unies dans le préambule est importante, mais doit aussi être incluse dans la section « Objet », article 8, indiquant la promotion de la déclaration des Nations unies comme objet clé de la loi. Cette disposition devrait être intégrée de la même façon que dans le projet de loi , concernant les langues autochtones. La déclaration des Nations unies est un cadre de travail et compte beaucoup de dispositions importantes sur les enfants et les familles, comme l'article 8, sur le retrait forcé des enfants d'une culture à une autre.
Troisièmement, les articles sur l'intérêt de l'enfant devraient être modifiés pour indiquer clairement que les instances dirigeantes des Premières Nations qui adoptent des lois prescrivant les facteurs de détermination de l'intérêt des enfants s'ajoutent aux facteurs prévus dans le projet de loi, venant reconnaître et soutenir nos façons de prendre soin des enfants et des familles. C'est important, car pour certains de nos peuples, nous ne retirons pas l'enfant. Nous retirons la personne qui cause du tort à l'enfant et nous gardons la famille intacte. Nous sommes convaincus que c'est dans l'intérêt de l'enfant. Nos lois doivent être affirmées et nos pratiques, soutenues pour préserver l'unité familiale.
Quatrièmement, le principe de Jordan doit être invoqué explicitement relativement à l'égalité réelle des enfants pour que ce précieux outil juridique soit confirmé dans le projet de loi , s'appuyant sur les résolutions du Parlement qui ont adopté le principe de Jordan. Cela pourrait être ajouté au préambule et à tous les articles invoquant l'« égalité réelle », y compris le paragraphe 9(3).
J'affirme que tout cela est primordial pour l'intérêt des enfants et des familles des Premières Nations.
Madame la présidente, ce sont les amendements officiels que je viens de lire. Je veux déposer officiellement ces amendements devant le Comité. Cela vous aidera dans la rédaction du rapport. Ils sont tous ici.
C'est tout.
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Merci beaucoup et bonjour à tous. C'est un honneur pour moi d'être ici. C'est avec grand plaisir que je me joins aux chefs nationaux pour vous parler de cet important projet de loi et pour reconnaître l'importance du travail des membres du Comité. J'ai déjà eu l'occasion de prendre la parole devant le comité permanent du Sénat, et je constate que les deux chambres travaillent avec beaucoup d'attention à ces importantes questions nationales, qui méritent un examen soigneux et approfondi et j'estime qu'elles ont reçu beaucoup d'attention pendant longtemps.
Je tenais aussi à faire remarquer que j'ai eu le grand privilège d'être la conseillère spéciale de plusieurs chefs, notamment les chefs d'un groupe de travail législatif de l'Assemblée des Premières Nations qui se rencontrent depuis la réunion d'urgence nationale sur la protection de l'enfance, qui a eu lieu en janvier 2018. Nous avons travaillé selon une méthodologie de recherche du consensus, c'est-à-dire que les chefs de partout au Canada, leurs conseillers et leurs experts de la protection de l'enfance se sont rencontrés environ 12 fois dans des réunions d'une journée complète pour évaluer les positions que les Premières Nations aimeraient apporter au Canada pour qu'elles soient intégrées dans un projet de loi.
Ce processus a été très positif. Il va sans dire que je l'ai beaucoup apprécié, mais lorsque je dis processus de recherche du consensus, je reconnais qu'on ne peut pas toujours atteindre le consensus complet. Cependant, c'était notre objectif, guidé par l'esprit et l'approche de l'Assemblée des Premières Nations, de rechercher le consensus, de travailler ensemble et de construire ensemble. C'était une période de travail substantielle et ce travail a été communiqué au gouvernement du Canada.
Nous avons rencontré le gouvernement du Canada à plusieurs reprises et je tiens également à souligner le travail important des fonctionnaires sur cette question et sur le projet de loi. Ils sont nombreux, et je ne vais pas tous les nommer, mais au moins trois d'entre eux méritent une attention particulière, je crois, car ils ont travaillé inlassablement: le sous-ministre des Services aux Autochtones, Jean-François Tremblay; la sous-ministre adjointe responsable de ce dossier et de l'éducation, Joanne Wilkinson; et la directrice de ce secteur, Isa Gros-Louis. Ce ne sont que trois parmi tous les fonctionnaires qui ont assisté aux réunions avec les chefs, qui nous ont entendus et qui ont écouté nos positions. De même, j'ai eu l'occasion de travailler avec eux comme experte indépendante. Je tenais à saluer l'effort incroyable et le dur labeur auxquels les fonctionnaires du gouvernement du Canada se sont astreints avec professionnalisme dans ce dossier, leur intérêt et leur détermination, surtout depuis janvier 2018 après la réunion d'urgence nationale, pour que le travail soit fait.
Je veux commencer en abordant certaines questions constitutionnelles qui ont été soulevées devant le Comité. J'ai observé les débats et lu le hansard et je sais que le professeur Dwight Newman a témoigné et soulevé certaines questions constitutionnelles à propos du projet de loi. Je sais également que Peter Hogg, qui est probablement notre plus éminent professeur de droit constitutionnel au Canada, a témoigné tout juste un peu plus tôt cette semaine pour aborder les questions constitutionnelles relatives au projet de loi.
Je tenais à clarifier que, de mon point de vue en tant qu'experte constitutionnelle, professeure de droit, ancienne juge et avocate en exercice qui a témoigné plusieurs fois devant la Cour suprême du Canada et en tant que personne qui exerce de nouveau relativement aux questions constitutionnelles, j'estime qu'il est incontestable que le projet de loi devant vous est valide sur le plan constitutionnel.
Je crois qu'il est important de souligner que le paradigme provincial en place au Canada pour la protection de l'enfance ne se fonde pas vraiment sur une solide compréhension de la division des pouvoirs touchant les peuples autochtones. Je vous invite à consulter, bien entendu, le très important travail également de Sébastien Grammond, aujourd'hui juge, qui était également le doyen de la faculté de droit de l'Université d'Ottawa et qui a beaucoup écrit à propos de la législation sur la protection de l'enfance. Je suis pleinement d'accord avec lui, et comme il est pleinement d'accord avec le professeur Peter Hogg, je vous dirais alors que la prépondérance de l'opinion constitutionnelle au Canada est qu'il entre tout à fait dans les pouvoirs du gouvernement fédéral en vertu du paragraphe 91(24) d'adopter ce projet de loi.
Même au-delà de cette position, le gouvernement fédéral peut adopter une stratégie nationale pour traiter de questions de très grande importance. Vous remarquerez que dans le projet de loi il est indiqué qu'il s'agit d'un projet national où le gouvernement travaille avec les provinces, dans le préambule. Voilà ce qui est indiqué, et suivant une position de coordination des ententes, il cherche à adopter une nouvelle approche à l'échelle nationale.
J'ai lu les dispositions du projet de loi où il est dit que les pouvoirs et la compétence des provinces en matière de protection de l'enfance sont respectés. Le gouvernement fédéral a clairement, sur le plan constitutionnel, le pouvoir d'intervenir. Cependant, idéalement, il faut harmoniser et avoir ce que nous appelons parfois un « double aspect », ou avoir une approche de collaboration en matière de protection de l'enfance.
J'irais un peu plus loin en affirmant que d'après l'expertise et la jurisprudence au Canada, et la reconnaissance et l'affirmation des droits inhérents des peuples autochtones et des Premières Nations, notamment à l'article 35 de notre Loi constitutionnelle de 1982, il est important d'avoir cette loi pour la raison suivante.
Jusqu'à tout récemment, pour une raison ou l'autre, peut-être à cause de l'histoire coloniale de la Loi sur les Indiens et du traitement des peuples autochtones, le gouvernement fédéral a adopté la position qu'il était un simple bailleur de fonds pour la protection de l'enfance et qu'il n'avait aucune obligation envers les gens dans le cadre des systèmes de protection de l'enfance.
Nous savons que dans les deux types de causes, les recours collectifs et causes civiles d'envergure, et les décisions constitutionnelles, que tous les gouvernements ont une obligation fiduciaire envers leurs citoyens, mais particulièrement envers les citoyens des Premières Nations, où l'honneur de la Couronne est en jeu. Le Canada a tout à fait le droit d'adopter des lois de ce genre pour intervenir en qualité de fiduciaire, étant entendu que l'honneur de la Couronne est en jeu.
Il y a eu des échecs catastrophiques et horribles en matière de protection de l'enfance. Elles sont bien connues. J'ai travaillé de façon indépendante pour défendre les droits de l'enfant pendant une dizaine d'années en Colombie-Britannique, avec un personnel réduit. J'avais 17 000 causes de protection de l'enfance, dont la plupart concernaient des enfants autochtones. J'ai catalogué rapport sur rapport des défaillances incroyables qui survenaient en raison de l'absence d'une loi telle que celle avec laquelle nous avons affaire aujourd'hui.
Je tiens à commencer en soulignant pour vous, étant ouverte à répondre à vos questions éventuelles, ou à présenter au Comité tout document dont vous pourriez avoir besoin, que notre paradigme actuel présente des lacunes. En particulier, les provinces détiennent les pouvoirs en matière de protection de l'enfance, car une disposition de l'article 88 de la Loi sur les Indiens leur permettait d'appliquer la législation sur la protection de l'enfance aux gens des Premières Nations sans leur consentement. C'est parce que la Loi sur les Indiens elle-même, entrée en vigueur en 1876, qui était une consolidation de certaines des ordonnances coloniales les plus haineuses. Cet horrible chapitre colonial de notre histoire cherchait à dépouiller les peuples autochtones de leur identité, de leurs terres, de leur culture. Cette Loi sur les Indiens reste dans les livres et c'est l'instrument par lequel la loi provinciale est appliquée.
Le monde du Canada a plutôt changé en 1982, au moment du rapatriement de la Constitution. De 1982 à aujourd'hui, notre Constitution, appelée « arbre vivant », a changé. Nous avons connu 40 décisions majeures de la Cour suprême du Canada sur les droits des peuples autochtones qui ont constamment conclu précisément ce que je présente aujourd'hui, c'est qu'il faut des approches novatrices de collaboration pour remédier à ces échecs persistants des politiques publiques.
On ne peut s'empêcher de conclure qu'en ce qui a trait à la protection de l'enfance, c'est un échec catastrophique total des politiques publiques, et un échec de notre cadre juridique auquel il faut répondre de façon actuelle, de profonds problèmes dont il faut s'occuper.
La position juridique ou de politique que je souhaite exposer au Comité aujourd'hui, c'est que le projet de loi n'est pas seulement constitutionnel. Il est attendu depuis trop longtemps. Il est vital. Il est essentiel. Je crois qu'il résisterait sûrement à une contestation constitutionnelle. Ce qui ne veut pas dire que s'il est adopté, l'application de ce projet de loi dans des causes données et dans des endroits donnés n'aurait pas à être soigneusement évaluée pour en arriver à un équilibre entre les droits individuels, comme ceux des enfants qui peuvent être en danger, et les droits collectifs de leurs familles et de leurs nations et de leurs peuples.
Dans l'application, beaucoup de problèmes devront être résolus. Toute législation, lorsqu'elle est nouvelle, prend du temps à être rodée en pratique. Cela ne se fait pas du jour au lendemain. Cependant, les changements présents dans ce projet de loi sont de très importants changements pour le Canada.
J'ai travaillé directement dans le système de protection de l'enfance dans littéralement des milliers de causes. J'ai procédé à la première adoption selon les coutumes ancestrales en Saskatchewan pour un enfant nehiyaw des Premières Nations. J'ai représenté des chefs à plusieurs reprises devant les tribunaux pour qu'ils puissent au moins le droit de parler pour leurs enfants, un droit qu'on leur a souvent refusé. J'ai eu l'occasion, même maintenant, de témoigner dans des affaires de protection de l'enfance pour des chefs des Premières Nations et d'autres, et je vois les obstacles.
De fait, nous avons une affaire de protection de l'enfance en cours devant un tribunal de Colombie-Britannique, où le juge a lu le projet de loi et dit : « C'est une approche très utile. Je devrais peut-être attendre de décider jusqu'à ce qu'il soit adopté, car cela nous donnerait une nouvelle avenue à l'avenir pour faire des choses que nous ne pourrions pas faire pour soutenir cette famille, le chef et cette grand-mère. Nous pourrions avoir la réunification de la famille. ».
Je veux conclure mon mot d'ouverture en disant qu'il y a des problèmes techniques, bien sûr. Aucun projet de loi, comme l'a dit le chef national, pour sa part, ne répondra à l'incroyable échec en matière de droits de la personne et au désastre en matière de politique que la protection de l'enfance a été, pour les enfants des Premières Nations en particulier. Ce projet de loi créera-t-il de nouveaux outils et de nouvelles occasions pour changer les choses de façon positive? Je le crois. Faudra-t-il le surveiller de près? Oui.
D'importantes ressources sont nécessaires, et de nouvelles ressources sont arrivées dans le système de protection de l'enfance. Je suis convaincue qu'il faut une évaluation soigneuse des résultats pour les enfants. Ces ressources doivent aller aux enfants qui en ont besoin. Dans un changement de politique publique comme celui-ci, tout doit s'orienter sur un cadre de reddition des comptes envers les enfants. Les enfants obtiennent-ils les ressources nécessaires? Nous savons tous que le point de vue des résultats est important.
J'arrête là. Merci encore. Je suis ravie de répondre aux questions et à fournir des références sur les questions que j'ai soulevées dans mon témoignage.
Merci.
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C'est une bonne question, encore une fois, et je sais que nous avons aussi rencontré votre leader de nombreuses fois et que nous avons parlé de ces questions. Je dirais qu'il y a beaucoup de projets de loi importants, mais nous nous sommes toujours concentrés sur , les langues; la protection de l'enfance; et puis , la déclaration de l'ONU.
J'ai dit que je serais un chef national heureux s'ils passent tous d'ici la fin de juin. Je sais que l'enjeu est le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Les gens se demandent si c'est un droit de veto, et de disent: « As-tu entendu Paul Joffe et les autres experts? »
D'après moi, ce n'est pas un droit de veto, mais il faut respecter les droits des Autochtones, les droits inhérents et issus des traités, et faire participer les détenteurs de titres et de droits tôt ou tard dans toute initiative. Avec le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, lorsque les gens... Vous avez mentionné que l'Assemblée des chefs du Manitoba va s'opposer à l'adoption du projet de loi. C'est une région, et c'est un chef régional. Le grand chef Arlen sera ici pour le dire.
Vous connaissez les chiffres au Canada. Il y a 203 chefs en Colombie-Britannique. Il y en a 47 en Alberta. Il y en a 74 en Saskatchewan. Il y en a 66 au Manitoba. Il y en a plus de 134 en Ontario. Il y en a 47 dans la belle province du Québec. Il y en a 13 en Nouvelle-Écosse, 15 au Nouveau-Brunswick, deux à l'Île-du-Prince-Édouard, deux à Terre-Neuve, 14 au Yukon et 28 dans les Territoires du Nord-Ouest.
Pensez-vous qu'il y a unanimité?
Voilà, mais nous avons plus de 400 chefs qui soutiennent ce projet de loi. Nous avons de nombreuses résolutions qui le soutiennent. J'encourage les gens à réfléchir à commencer à régler cela, parce que je vais respectueusement contredire des gens, le statu quo n'est pas acceptable, et ça ne devrait pas être acceptable d'avoir 40 000 enfants en familles d'accueil. C'est à ça que je pense tout le temps.
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Oui, je pense que la question que vous posez est très importante, en ce qui a trait à si c'est suffisant pour s'attaquer au problème et mettre les efforts au bon endroit.
Je serais d'accord avec le chef national et les autres qui se sont exprimés. Je pense que c'est un changement. C'est un gros changement, et je pense qu'il est très important au Canada que nous fassions ce changement, mais je pense aussi que c'est important que nous ne fassions pas un changement tellement important que les provinces et les autres ne travaillent plus ensemble, et qu'on ne puisse plus rassembler les provinces et les Premières Nations.
Il va y avoir des Premières Nations qui ne voudront pas travailler avec la province. J'ai moi-même cette expérience avec certains clients et d'autres dans l'historique de ma propre Première Nation. Parfois, les gens ne veulent pas travailler avec la province, mais en pratique, si tu veux sortir tes enfants du système de protection de l'enfance, tu dois travailler avec la province.
C'est un assez gros changement. Si c'était trop sévère, cela pourrait être trop dirigiste pour les provinces. J'aime l'article 20 sur les accords de coordination. Je reconnais aussi le fait que personne n'est obligé de travailler avec les provinces s'il ne veut pas. Je pense que c'est l'occasion de placer les enfants au coeur. Je partage fortement votre avis sur l'égalité réelle.
J'attirerais vraiment votre attention sur quelque chose qui est tellement puissant dans ce projet de loi, et c'est l'alinéa 9(2)d), qui est à propos des services qui doivent être fournis aux enfants autochtones d'une façon qui ne contribue pas à l'assimilation du peuple, du groupe ou de l'enfant, ou à la destruction de sa culture. Peu importe qui s'occupe de l'enfant, les services doivent respecter et protéger la culture. Cet article par lui-même est tellement utile comme point de vue d'ensemble. Voilà les mesures cruciales.
Est-ce que c'est tout? Je pense que c'est un gros changement, et je pense que nous, sur le terrain, allons travailler avec cela très fortement afin de soutenir les enfants des Premières Nations dans leur identité, leur culture et leur communauté. Je pense que nous devons nous rappeler qu'il y a des chefs et des droits collectifs, mais il y a aussi les droits des enfants. Nous devons aussi rester concentrés sur... Les enfants doivent voir leurs droits reconnus, et ce genre de choses est très important pour les droits des enfants.
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Je vais en parler rapidement.
L'article 3 de la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant dit que l'intérêt de l'enfant est primordial. Il y a aussi un commentaire général sur les enfants autochtones.
Le défi avec l'intérêt de l'enfant au Canada, c'est qu'il a été utilisé comme arme contre les familles autochtones, avec tous ces sentiments affreux à propos des familles autochtones, tout comme les pensionnats ont été utilisés. C'est pour cela que la Commission de vérité et réconciliation a dit, dans les séquelles, de faire ce travail qui nous attend aujourd'hui. L'« intérêt de l'enfant », c'est quelque chose de très difficile, mais il y a de nouveaux concepts, un nouveau, je dirais, de nouvelles lunettes d'interprétation offertes par ce projet de loi, ce qui est très utile.
Il y a un problème, et je suis d'accord avec le témoignage de l'Assemblée des Premières Nations et celui des chefs de la Colombie-Britannique plus tôt. Je pense qu'une petite clarification sur l'intérêt de l'enfant est que lorsqu'il y a des lois autochtones, l'intérêt de l'enfant doit concorder avec elles aussi. Il faut être prudents. Il y a un petit changement, je pense, qu'on pourrait faire, si nécessaire. Si on ne le fait pas, je pense quand même qu'on a rétabli l'intérêt de l'enfant. L'intérêt de l'enfant ne sera plus abordé isolément desa famille, sa communauté, sa nation et sa culture. C'est un énorme progrès. Cela va être la loi sur la protection de l'enfance la plus progressiste dans le G7 pour les enfants d'origine autochtone. C'est un changement plutôt considérable.
Est-ce que ce sera interprété de cette façon progressiste sur le terrain dès le premier jour? Non. Le système de protection de l'enfance est difficile à changer. J'en ai fait partie. Il y a eu des moments où nous avons dû littéralement aller en cour et dire: « Excusez-moi, vous avez oublié que cet enfant est un enfant autochtone et qu'il a une communauté. Nous voulons la qualité pour agir. » Nous devons nous battre parfois.
Il ne changera pas du jour au lendemain. La culture... Cela va prendre beaucoup de travail de la part de beaucoup de gens pour au moins amorcer le changement dans la bonne direction. C'est à ce moment-là que ceux d'entre nous sur le terrain et les jeunes qui prennent le relai vont prendre ces outils, et je pense qu'ils vont travailler avec eux. Ils sont très capables de le faire.
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Absolument, ce n'est pas gravé dans la pierre.
Encore une fois, en tant que personne qui a réellement travaillé dans les tranchées, et à un haut niveau, je vois cela comme un cadre. C'est comme la charpente d'une maison. Il faudra mettre en place un règlement. Je viens juste de discuter d'un règlement en cours d'élaboration en collaboration avec les peuples autochtones. Cela en soi est une innovation. Et une innovation très importante.
Qu'il s'agisse des chefs manitobains ou autres... Vous savez, ils veulent que leur propre loi sur le bien-être des enfants trace la voie pour l'Assemblée des chefs du Manitoba, et c'est très bien. Je pense qu'il est important de reconnaître qu'ils peuvent faire cela. En vertu de cette loi, s’ils veulent adopter leur propre loi, ils peuvent le faire dès le premier jour. Ou ils peuvent prendre leur temps. Ils peuvent travailler avec ce cadre, et des options sont offertes.
C’est la pièce la plus importante, mais une fois qu’ils choisiront une option, ils pourront avoir besoin d'un règlement concernant les normes, la façon dont ils échangeront de l'information et la façon dont les enfants seront protégés lors de leur transfert d’un système provincial, car, parfois, vous devez pouvoir intercepter un enfant en cas d'urgence, peu importe qui vous êtes.
C'est pourquoi la question des services d'urgence est mentionnée dans cette loi. Si l'enfant se trouve au centre-ville de Winnipeg, vous ne pouvez pas dire: « Je suis désolé, nous ne pouvons rien faire, car c'est un enfant de Norway House. Attendons que quelqu'un prenne l'avion et vienne ici. ». Vous devez pratiquement résoudre le problème sur-le-champ. Et comment procéderez-vous, de manière pratique, sur le plan de la politique? Il y a une loi, il y a un règlement et il y a une politique.
Il ne fait aucun doute que nous devrons adopter certains règlements. Aux États-Unis, en vertu de la loi indienne sur le bien-être des enfants, en vigueur depuis près de 40 ans, le Congrès élabore des règlements approfondis qui traitent de questions détaillées; ces règlements sont élaborés au fil du temps et révisés. Cela fait partie du processus. Aujourd'hui, vous avez affaire à l'architecture d'une certaine loi. La manière dont elle sera définie, les détails de sa finition et la manière dont elle se réalisera dépendront du règlement. Cela est important, et je suis d'accord avec ce qui a été dit plus tôt, soit qu'il sera bon de l'examiner dans trois ans. N'attendons peut-être pas cinq ans, car il sera bien de constater comment cela a fonctionné et comment les choses se déroulent. Je pense que cela se déroulera d'une manière qui nous permettra de régler les problèmes, pratiquement comme le font les Canadiens. Paix, ordre et bon gouvernement: nous trouverons des solutions.
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Excellent. Merci beaucoup.
Je suis le grand chef Arlen Dumas de l'Assemblée des chefs du Manitoba. Merci de m'avoir donné l'occasion de parler de cette question très importante.
Comme l'a dit notre modérateur, le Manitoba est le point zéro des inquiétudes au sujet du bien-être des enfants. Cela valide les déclarations des représentants du gouvernement qui ont affirmé qu'il s'agissait d'une crise humanitaire.
Tout d'abord, je tiens à reconnaître le territoire sur lequel nous sommes, avec les membres de nos familles ici présents, et à transmettre les salutations de l'Assemblée des chefs du Manitoba. Je tiens également à saluer le travail accompli par les chefs et les membres du conseil des femmes, qui ont réalisé le gros du travail ces dernières années, à la demande des chefs. Je tiens également à féliciter le Manitoba pour l'excellent travail qu'il a accompli dans le domaine du bien-être des enfants au cours des 40 dernières années afin de trouver des moyens novateurs de collaborer avec nos partenaires. Lorsque vos partenaires sont pleins de bonne volonté, vous pouvez faire des choses formidables.
Cependant, je vous transmets aujourd'hui le message que l'Assemblée des chefs du Manitoba ne peut pas appuyer ce projet de loi tel qu'il est, et que si nous continuons dans cette voie, cela ne fera que créer de nouvelles complications. Cela ouvrira la porte à des conflits. Cela supprimera les 40 dernières années de bon travail et de collaboration que nous avons tenté de réaliser. Essentiellement, le problème est notre province.
L'Assemblée des chefs du Manitoba — notre région — n'a jamais été consultée pour travailler à ce projet de loi. Il y a plus d'un an, nous avons pris l'initiative de préparer le terrain, de nous appuyer sur nos succès passés et de proposer une solution concrète et un plan concret, avec notre propre loi, pour traiter la nature complexe de notre province et de notre histoire. Le ministère a investi dans cette pratique passée — ce travail de qualité — et nous avions commencé un travail de longue haleine, en travaillant avec l'ensemble de la région afin de proposer un concept qui servirait les intérêts de tous, de la meilleure façon qui soit. C'est ce qu'on a appelé la loi sur le retour à la maison de nos enfants, qui a été créée au Manitoba.
Par conséquent, nous avons été très surpris quand le projet de loi nous a été présenté. C'était presque une gifle, car nous avions consacré beaucoup de temps à proposer une solution qui plairait à tous.
J'ai entendu les aspirations des précédents intervenants, mais la réalité, dans nos vies et dans nos collectivités, est que si vous ne définissez pas les choses correctement, vous adopterez un accord intérimaire pour une durée de 40 à 50 ans. Au Manitoba, nous avons pris l’initiative de proposer une solution à partir de laquelle tout le monde pourrait travailler.
Il n'y a pas eu de consultation. Cela entravera nos activités dans nos collectivités et nos nations. Cela entraînera des divisions. Comme je l’ai dit plus tôt, cela créera plus de conflits avec nos partenaires dans notre région. Par conséquent, l'Assemblée des chefs du Manitoba ne pourra pas appuyer le projet de loi .
Une autre partie des problèmes que soulève ce projet de loi, c'est qu’il est de nature panautochtone. Tous ceux avec qui j'ai parlé auparavant sont originaires de diverses régions du pays qui ont établi des accords et des relations uniques avec les collectivités. Cette loi aura une incidence sur ces accords individuels. En fait, il est à craindre que vous abandonniez des travaux très importants réalisés dans d'autres régions, tout simplement parce que vous obligerez la province à jouer un rôle plus important que nécessaire. Cela est très problématique.
Le problème que nous avons au Manitoba, c'est la province. Il est faux de supposer qu'avec le temps, nous aurons une relation de travail merveilleuse avec les entités mêmes qui kidnappent nos enfants. Nous ne pouvons même pas inciter la province du Manitoba à signer une taxe sur le carbone, encore moins à conclure un accord de cette importance avec les collectivités des Premières Nations ou leurs partenaires.
L'Assemblée des chefs du Manitoba est l'appareil politique de notre région. L'assemblée a mandaté d'autres entités pour jouer des rôles particuliers en ce qui concerne la collaboration avec nos partenaires, mais nous représentons la volonté des chefs, et la volonté de ceux-ci est d'assurer notre propre avenir, au moyen de nos propres processus et de nos propres pratiques.
Nous avons établi notre crédibilité au cours des 40 dernières années, et c'est là l'orientation que nous souhaitons prendre. Nous ne pourrons pas appuyer le projet de loi , car il comporte une multitude de problèmes et aggravera également les problèmes actuels, tout comme le fait que cette loi n'offre aucune garantie financière. Il continuera de perpétuer les conflits et les tâtonnements sur le plan des compétences. Par conséquent, l'Assemblée des chefs du Manitoba n'appuiera pas le projet de loi C-92.
Je vous supplie maintenant de repenser cette loi tous ensemble et de rassembler nos esprits de la meilleure façon possible. Si nous ne le faisons pas, je garantis qu'il y aura des conflits parce que nous serons obligés de chasser les provinces hors de nos collectivités. Les instruments avec lesquels nous avons tenté de travailler ces 40 dernières années créeront des conflits dans nos collectivités. Ils vont continuer à kidnapper nos enfants. Ils éloigneront davantage les gens de leurs maisons et de leurs identités, et nous serons tous lésés si nous permettons que ce projet de loi aille de l'avant. Voilà le message que je porte aujourd'hui.
S'il y a des problèmes techniques, je me ferai un plaisir de vous fournir l'expertise technique que vous voulez. Comme je l'ai dit, de nombreuses personnes qualifiées ont présenté notre loi sur le retour de nos enfants à la maison et ont incité nos collectivités à présenter véritablement ce que nous voulons et devons faire au Manitoba. Cette approche panautochtone ne fonctionnera pas.
[Le témoin s'exprime en cri ainsi qu'il suit:]
ᐁᑯᓯ ᑭᓈᓇᐢᑯᒥᑎᓈᐘᐤ
[Les propos du témoin sont traduits ainsi:]
C’est tout, merci à tous.
[Traduction]
Je sais que le temps est précieux.
Merci beaucoup.
:
[
La témoin s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ
ᐅᓪᓛᒃᑯᑦ, ᐊᓕᓴ ᕙᓚᐅᕋᑎ-ᓯᐱᓐᔅ-ᖑᔪᖓ
[Les propos de la témoin sont traduits ainsi:]
Merci.
Bonjour. Je m'appelle Alyssa Flaherty-Spence.
[Traduction]
Je vous remercie de me recevoir ici aujourd'hui. Je suis présidente d'un organisme qui était auparavant connu sous le nom d'Ottawa Inuit Children's Centre et qui est maintenant le Inuuqatigiit Centre for Inuit Children, Youth and Families. Nous avons adopté ce nouveau nom pour refléter notre collectivité.
Merci, membres du Comité et madame la présidente, de nous accueillir ici aujourd'hui. À Inuuqatigiit, nous offrons des services aux enfants, aux jeunes et aux familles inuits d'Ottawa. Notre objectif et notre mandat, en partenariat avec les parents et la collectivité, est de promouvoir le bien-être des enfants, des adolescents et des familles inuits en fournissant un environnement d’apprentissage qui améliore le développement général des enfants au moyen d'un soutien et d'une éducation parentaux, tout en encourageant les Inuits à être fiers leur culture et leur langue inuites.
L'organisme a été créé en 2005 par des parents et des enfants inscrits au programme Bon départ à Ottawa. Aujourd'hui, nous sommes une organisation inuite multiservices qui fournit des services de soutien culturel, éducatif, récréatif et social aux enfants, aux jeunes et aux familles de la collectivité inuite d'Ottawa, qui est en pleine croissance. En offrant un accès équitable aux services et aux réseaux de soutien familial, Inuuqatigiit encourage les enfants, les jeunes et les familles inuits d’Ottawa à devenir des membres forts, en bonne santé et fiers de la communauté, tout en ayant la connaissance de leur lien culturel avec la collectivité inuite locale. Nous accomplissons ce travail grâce à de solides programmes fondés sur la culture, et à des services individualisés destinés aux enfants, aux jeunes et aux familles, en vue d’améliorer leur capacité à mener de bonnes vies. Les principes inuits constituent la base de tous nos programmes et de notre travail de défense des intérêts.
Qui servons-nous? Comme beaucoup d’entre vous le savent peut-être, la population inuite d’Ottawa est importante. Ces gens sont venus ici pour diverses raisons: services médicaux et rendez-vous professionnels et spécialisés, études, travail, temps de détention et besoins des enfants du Nunavut liés au placement en famille d'accueil, à l'adoption et aux foyers de groupe. De manière générale, ce projet de loi aura des conséquences sur notre collectivité inuite, ici à Ottawa et dans le sud du Canada, car nous sommes un fournisseur de services pour les enfants, les jeunes et les familles inuits, et notre objectif est d'aider les personnes nécessitant des services à l'enfance et à la famille.
Quelle sera l'influence de ce projet de loi sur les enfants et les jeunes à Ottawa? Il est question ici des conséquences et des réalités interjuridictionnelles. Comme je l'ai mentionné, beaucoup d'enfants inuits du Nunavut viennent à Ottawa. À l'heure actuelle, un grand nombre d'Inuits à Ottawa ont besoin d'accéder à des services essentiels simplement parce qu'ils ne sont pas fournis par leur territoire d'origine, le Nunavut. Cette question soulève des préoccupations intergouvernementales qui doivent être abordées dans le projet de loi. Un grand nombre d'enfants inuits doivent avoir accès aux services de base ici, à Ottawa, et beaucoup doivent avoir recours aux services à l'enfance et à la famille offerts par l'Ontario.
Le deuxième aspect de cette loi est la désagrégation et la collecte de données, en particulier l'alinéa 28a), comme l'a mentionné l'autre jour Natan Obed, mon collègue de l'Inuit Tapiriit Kanatami. Nous disposons actuellement de données incomplètes sur les enfants et les jeunes inuits pris en charge en Ontario et dans le sud du Canada en général. Cependant, comme nous sommes un organisme permanent sur le terrain axé sur les partenariats communautaires, nous entretenons des relations avec des représentants de la Société de l'aide à l'enfance, par exemple, mais ce n'est pas le cas de tous les organismes, et nous pouvons être considérés comme une exception.
Où sont nos enfants? C’est ce que cette collecte de données devrait nous permettre de savoir. Inuuqatigiit sait que de nombreux Inuits ont accès à des services tels que ceux offerts par la Société de l'aide à l'enfance d'Ottawa, car nous sommes sur le terrain et aidons les familles au quotidien. Cependant, nous avons toujours besoin de cette collecte de données et nous avons des besoins précis en matière de données propres aux Inuits.
Nous avons besoin que les provinces et les territoires disposent de chiffres exacts pour garantir aux enfants inuits des services accessibles, équitables et adaptés à leur culture à l'extérieur de l'Inuit Nunangat.
En ce qui concerne les données propres aux Inuits — comme l’a mentionné mon collègue à ma gauche — nous avons actuellement une approche panautochtone en vertu de l’alinéa 28a). L'organisme Inuuqatigiit a du succès parce que nous fournissons aux enfants et aux familles inuits des programmes et des services adaptés à la culture inuite. Et nous en sommes fiers. Nous avons besoin de données et de rapports actifs et continus sur les Inuits pour comprendre les besoins des enfants, des jeunes et des familles inuits et leur fournir des services équitables, accessibles et adaptés à leur culture.
Je vous recommanderai en particulier les alinéas 9(2)a) à e), qui concerne le lien avec la culture et la continuité. Cette section est essentielle au bien-être des enfants inuits; ces alinéas touchent les services à l’enfance et à la famille. Beaucoup d'enfants que nous desservons ont davantage besoin de cette continuité culturelle, compte tenu de la distance et de l'isolement qui les séparent de leur territoire d'origine dans l'Inuit Nunangat. Le mal du pays et le fait de s'éloigner de leurs collectivités dans l'Inuit Nunangat peuvent avoir des conséquences graves et causer plus de tort que de bien. Les Inuits quittent leur territoire d'origine pour l'Ontario et d'autres provinces, ce qui peut avoir une forte influence sur leurs moyens de subsistance.
Dernier point, mais non le moindre, les lacunes dans le financement qui ne figurent pas dans cette loi. Étant donné que nous sommes des fournisseurs de services aux enfants et aux jeunes, nous effectuons actuellement ce travail sans ressources. Les organismes qui offrent des services aux enfants, aux jeunes et aux familles examinent ce type de loi et se demandent ce que ce type de loi fera de différent de ce que nous faisons actuellement. Inuuqatigiit et les organisations communautaires font ce travail, mais avec peu ou pas de ressources. Ce serait irrespectueux envers les enfants, les jeunes et les familles inuits d'Ottawa et de l'Inuit Nunangat si je ne faisais pas de ce point une priorité et si je ne vous en parlais pas. Je demande que la question des fonds soit intégrée à cette loi. J'espère que vous envisagez cela sérieusement et, le cas échéant, d'une manière distincte et équitable pour les Inuits.
Je vais maintenant passer le micro à ma collègue et directrice générale, Karen Baker-Anderson, qui travaille pour la communauté depuis de très nombreuses années.
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Ce qu'elle veut dire, c'est que je suis vieille.
Chers membres du Comité permanent, c'est un honneur pour moi d'être ici pour vous parler d'un sujet qui me passionne entièrement: les enfants inuits et la protection des enfants.
En tant que directrice exécutive d'Inuuqatigiit, j'ai suivi ces familles qui ont eu affaire avec la protection de l'enfance. J'ai été témoin du regard dans les yeux des enfants lorsqu'ils quittent notre centre et sont mis dans la voiture d'un parfait inconnu, ne sachant pas où ils vont se rendre. J'ai vu les yeux d'une mère qui a perdu son enfant et je sais que la douleur est indescriptible.
Si cette loi peut entraîner des changements positifs pour nos enfants inuits de ce pays, l'Inuuqatigiit la soutient pleinement ainsi que tout le travail connexe. Nous soutenons les points de vue de l'Inuit Tapiriit Kanatami. Nous appuyons le projet de loi dans l'espoir qu'on y reconnaisse, afin que cette loi place les droits des enfants au centre de toutes les décisions de justice, que le changement d'un point de vue systémique doit se produire au même moment et sur le terrain. Nous ne pouvons pas attendre que ce projet de loi soit adopté. Nous savons déjà quels sont les problèmes. Dans le cas contraire, ce projet de loi devenir simplement une tentative de résoudre un problème d’un point de vue politique, mais sans garder un pied dans la réalité des collectivités et des enfants que nous voyons tous les jours.
Comment pouvons-nous admettre, en tant que Canadiens, que 52 % des enfants pris en charge sont Autochtones alors qu'ils ne représentent que 7 % de la population?
Il convient de saluer le lien entre ce projet de loi et les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation. En tant qu'organisme desservant les enfants inuits touchés par les quatre revendications territoriales, nous avons collaboré avec la Société de l'aide à l'enfance d'Ottawa pour établir une relation avec eux afin que les familles restent ensemble. Ce n'est pas parfait, mais nous savons qu'un réel changement est en train de se produire à Ottawa. Des services de protection de l’enfance sont requis dans ce pays.
Les Canadiens doivent comprendre la raison pour laquelle tant d'enfants sont pris en charge. Les Inuits ont vécu des années et des années de traumatismes multiples. Ces traumatismes ont des incidences profondes sur eux, y compris sur leur capacité à élever leurs enfants. Je pense que ce fait est reconnu dans cette loi.
Si le traumatisme est la cause première et que le gouvernement canadien s'approprie les causes de ce traumatisme, pourquoi alors sommes-nous ici pour parler d'une loi? Nous avons besoin de financement. Nous devons nous assurer que le processus de guérison se déroule en ce moment même.
En examinant les dossiers des enfants pris en charge à Ottawa, nous pouvons vous dire que les causes... Je possède des statistiques réelles sur le nombre d'enfants inuits pris en charge et sur les causes de cette situation. Je peux vous dire que cela est fondé sur des traumatismes.
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Tansi. Je m'appelle Natasha Reimer. Je suis une ancienne cliente du système de protection de l'enfance du Manitoba.
Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invitée à prendre la parole devant vous aujourd'hui.
Je prends la parole devant ce comité pour parler de ma propre expérience et de celle de gens de ma collectivité. Je ne parle pas au nom de tous les enfants et jeunes autochtones pris en charge, mais je voulais vous raconter mon histoire et, espérons-le, expliquer comment le système a influencé ma vie et comment nous devrions aller de l'avant.
Je suis l'une des nombreux enfants qui ont grandi en famille d'accueil. Je suis entrée dans le système à l'âge d'un an. J'ai alors été adoptée par une famille blanche. Mon nom a été changé, et je n'ai jamais pu ensuite renouer avec ma famille biologique.
Je n'ai pas grandi en apprenant ma culture et ma langue, et j'ai passé beaucoup de temps à me demander qui j'étais, d'où je venais et si mes vrais parents étaient en vie. Cela n'est pas rare pour les enfants pris en charge. Les enfants pris en charge sont placés dans des foyers mal équipés pour faire face aux traumatismes intergénérationnels des pensionnats que subissent les enfants autochtones.
Pour moi, grandir a été un vrai cauchemar. À l'âge de 14 ans, mon adoption étant devenue un échec, j'ai réintégré le système. À ce moment-là, tout ce que je pouvais me dire c'est « survis, ma fille ».
Les enfants pris en charge par le système sont désavantagés en raison des défis auxquels ils sont confrontés. Lorsque vous êtes en famille d'accueil, l'école secondaire ou les études supérieures ne sont pas des sujets abordés par les travailleurs sociaux ou les parents d'accueil. Parmi les défis auxquels vous êtes confrontés dans le système, il y a les coûts liés aux déménagements. Dans mon cas, il y a eu sept foyers d’accueil différents, allant de la campagne à la ville, et de longues périodes de transition lorsque j’entrais dans une école. Les longues périodes de transition étaient dues au fait de changer de foyer d'accueil en plein milieu d'un semestre.
Cela constitue en soi une rupture dans le développement de la croissance d'un enfant. Les enfants pris en charge ont de très faibles taux... Au Manitoba, 33 % de ces enfants obtiennent leur diplôme d'études secondaires. Ces systèmes doivent tenter de réduire le nombre de transitions que doivent vivre ces enfants.
Je pense que les enfants autochtones sont les enfants les plus vulnérables au Canada. Je suis d'accord avec ce que dit le projet de loi sur la nécessité de rendre les pratiques culturelles et traditionnelles accessibles, mais je pense qu'il est plus important que nous nous assurions que... Mon problème concerne l'alinéa 16e) lorsqu'il est question d'« autre adulte ». Je suis entrée dans cette catégorie d'« autre adulte » et je ne souhaite à personne de grandir sans lien avec sa communauté. Je pense que cette section doit être réexaminée, et si vous voulez que d'autres adultes hors des collectivités autochtones s'occupent d'enfants et de jeunes autochtones pris en charge, vous devez vous assurer qu'ils possèdent la formation, les connaissances et les compétences sur les conséquences laissées par les pensionnats indiens, le traumatisme du colonialisme, les torts causés aux peuples autochtones.
De plus, il est important de reconnaître que le principe de Jordan n'a jamais été cité en référence. Nous devons également examiner ce que nous considérons comme l'intérêt supérieur de l’enfant. Les jeunes ont une voix. Ils savent ce qui est bon pour eux. Ils ont des idées importantes et connaissent leur situation mieux que quiconque.
Le dernier point que je souhaite aborder concerne les soins post-traitement. Au Manitoba, l'âge de la fin de la prise en charge dans le système des foyers d'accueil est 18 ans. J'ai eu la chance de bénéficier d'une prolongation de cette prise en charge jusqu'à 21 ans. Pourtant, rien ne mentionne cette fin de prise en charge ni le soutien offert à ces personnes. Rien ne permet de reconnaître les difficultés que vivent les enfants pris en charge dans leur enfance et leur adolescence ni le fait qu'ils risquent de n'avoir même pas terminé leurs études secondaires à 18 ans.
Nous devons examiner la façon dont nous aiderons ces gens. Ils ne devraient pas simplement survivre, mais être capables de prospérer. Ils devraient pouvoir avoir accès à des études postsecondaires et vivre pleinement leur vie. C’est quelque chose qui me préoccupe quelque peu, à savoir que ce projet de loi n’en parle pas vraiment.
C'est tout ce que j'ai à dire. Merci beaucoup de m'avoir écouté aujourd'hui.
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Merci. Je ferai de mon mieux pour être très rapide.
Je veux juste reconnaître le territoire et les familles que nous desservons au bureau de la défenseure des familles des Premières Nations. J'espère rendre justice à la cause que nous défendons au Manitoba.
À l'heure actuelle, plus de 11 000 enfants sont pris en charge dans le cadre du système de protection de l'enfance du Manitoba. C'est comme si on prenait un stade ou un aréna où tous les sièges seraient remplis d'enfants sans parents. Parmi eux, 9 000 sont des enfants des Premières Nations. Lorsque nous prenons en compte les parents de ces enfants, car ils souffrent également, nous arrivons à au moins 20 000 personnes supplémentaires. Et si nous additionnons les grands-parents, c'est 40 000 personnes de plus. Tous les membres des Premières Nations du Manitoba sont touchés par le système de protection de l'enfance d'une manière ou d'une autre.
Je souhaite partager un message de l'un de nos aînés, William Lathlin. Selon lui, l'acte le plus violent que vous puissiez commettre contre une femme, c'est de lui voler son enfant ou de le lui prendre. Nous le constatons chaque jour au bureau de la défenseure des familles des Premières Nations, qui fait partie de l'Assemblée des chefs du Manitoba et qui s'est engagé à s'attaquer aux atrocités commises dans le cadre des Services à l'enfance et à la famille ces 30 dernières années au Manitoba.
Je tiens à souligner qu'entre 2008 et 2016, 546 enfants des Premières Nations sont décédés dans le système de protection de l'enfance du Manitoba et que ce taux de décès est supérieur à la moyenne des enfants décédés dans le contexte des pensionnats indiens à l'échelle nationale et pour toute leur durée. Nous ne parlons ici que de notre province.
Ce qui se produit ici, à l'heure actuelle, nous n'aimons pas le comparer aux pensionnats indiens, mais à l'époque de ceux-ci, nos enfants passaient les années les plus fondamentales de leur vie avec leurs parents, de la naissance à quatre, cinq ou six ans. À l'heure actuelle, à Winnipeg, le taux de prise en charge des nouveau-nés est le plus élevé à l'échelle nationale. Ce lundi seulement, notre bureau a répondu à des appels concernant quatre nouveau-nés sur le point d'être pris en charge en une journée. C'était cette semaine, et cela se produit tous les jours.
Je crois que nous vivons à une époque où la situation est comparable, voire pire, que celle des pensionnats indiens. Je crois qu’à l’époque des pensionnats indiens, la société en général n’était pas au courant de ce qui se passait pour les enfants, mais aujourd’hui, nous le savons. Bien que nous ne puissions jamais ressentir pleinement les effets intergénérationnels des pensionnats, ils se manifestent dans tous les aspects de notre vie en tant que membres des Premières Nations. La trajectoire de nos enfants pris en charge est sombre. Ils sont associés à des taux élevés de sans-abri, de problèmes de santé mentale, d'incarcération, de suicide, de stress post-traumatique, de toxicomanies, de pauvreté, de faibles niveaux d'instruction, de perte d'identité, et ainsi de suite.
Ce que nous faisons aujourd'hui, en ce moment, touchera des milliers de personnes. Il y a beaucoup en jeu. L'un des aînés avec qui j'avais l'habitude de passer du temps il y a une quinzaine d'années m'avait dit, lorsqu'on préparait des conventions de règlement liées aux pensionnats indiens: « Ils peuvent garder mon argent, mais qu'ils s'assurent que nos enfants ne revivent plus jamais une telle situation ». À ce moment-là, je n'avais pas compris ce qu'il voulait dire, mais je le comprends maintenant.
Nous avons vécu beaucoup de tragédies. J'ai parlé des décès. En 2005, nous avons eu Phoenix Sinclair, qui est mort dans le système de protection de l'enfance. Onze ans plus tard, un rapport a été publié, mais l'Assemblée des chefs du Manitoba a pris des mesures parce qu'elle n'était pas satisfaite du résultat. Elle a alors adopté ses propres mesures, qui ont été à la base de la loi sur le retour à la maison de nos enfants, soit le rapport Bringing Our Children Home.
Lorsque Tina Fontaine a été assassinée en 2014, l'Assemblée des chefs du Manitoba a de nouveau réagi en créant le Bureau de la défenseure des familles des Premières Nations. Il a été ouvert le 1er juin 2015. Cela a attiré l'attention de la . La ministre Bennett a rendu visite à l'Assemblée des chefs du Manitoba et m'a rendu visite à titre de défenseure des familles des Premières Nations. Elle a rencontré les familles avec lesquelles nous avons travaillé et un nouveau-né pour qui nous avons empêché la prise en charge.
Lorsque AINC a été divisé, la ministre s'est engagée à honorer les engagements pris par la ; ensuite, elles se sont engagées à signer un protocole d'entente avec l'Assemblée des chefs du Manitoba en décembre 2017.
:
[
Le témoin s'exprime en secwepemctsín.]
[Traduction]
Bonjour à tous. Mon nom indien est Grande Voix qui dit la Vérité. Je suis le chef du peuple de la nation Splatsin Shuswap.
Je reconnais les ancêtres de ce territoire, leurs descendants actuels et cette très importante question dont nous parlons. Je suis le père de 5 enfants, le grand-père de 28, et l'arrière-grand-père d'un. Je suis un ancien enfant pris en charge de la rafle des années 1960. Ma mère était une survivante des pensionnats.
En prenant la parole aujourd'hui, je rends hommage à mon passé et à mon frère décédé, Adelard, qui s'est enlevé la vie. Nous sommes retournés dans notre communauté en 1977, et ma mère est décédée peu après lui, deux ans plus tard.
J'ai commencé à m'occuper de cette question à 23 ans. J'ai travaillé là-dessus pendant 42 ans en tant que chef et conseiller pour ma communauté pendant 23 ans et en travaillant dans le domaine de la guérison et de la dépendance, aidant notre peuple pendant presque 20 ans. C'est le point de vue que je vais vous présenter, membres du Parlement.
Nous savons tous pourquoi nous sommes ici, en ce qui concerne la façon par laquelle les lois du Canada et le génocide législatif, comme je l'appelle, ont créé notre situation actuelle. Notre réponse à cela est, je crois, importante, parce que quand j'ai été élu chef en 1980, une jeune mère est venue me voir et m'a demandé de l'aide pour ses quatre garçons qui allaient être enlevés par la province. Nous avons posé à nos aînés cette question : « Qu'est-ce que nous faisions avant qu'ils nous imposent cette loi blanche? Comment est-ce que nous nous occupions des nôtres? » Ils nous ont dit que nous avions notre propre tribunal autochtone. Nous avions nos propres prisons. Nous avions nos propres lois. Nous avions nos propres systèmes pour prendre soin de nous.
En sachant cela, nous avons mis en place une législation basée sur la communauté en un peu plus d'un an, travaillant avec une très jeune avocate nommée Louise Mandell. Vous la connaissez peut-être. Elle est assez bien connue en ce qui a trait aux titres et aux droits autochtones partout au pays. Elle a travaillé avec nous pendant toute une année pour concevoir ce processus et mettre cette loi en place.
Depuis 1980, nous fonctionnons sous notre propre compétence et nos propres lois, qui sont fondées sur notre droit inhérent. La relation que nous avons eue avec le gouvernement provincial a été intéressante, parce qu'ils, comme vous le savez, revendiquent une prétendue compétence sur nos enfants, mais ils n'ont pas compétence.
Nous avons dû monter une campagne politique nommée la « caravane des enfants indiens » en 1980, puis le vice-premier ministre et la ministre des Enfants et de la Famille, Grace McCarthy, sont parvenus à une entente avec notre communauté pour reconnaître notre compétence et nous remettre les enfants. Nous avons planifié conjointement pour chaque enfant et nous avons demandé des ressources au gouvernement fédéral. Depuis 1980, c'est ce que nous avons fait.
Il est vraiment important de comprendre que le fondement de notre compétence n'est pas lié au lieu de résidence. Ce n'est pas juste sur la réserve; c'est partout. Peu importe où il se trouve, si un de nos enfants a besoin de protection, on y va. Nous sommes allés aux États-Unis, à Dallas, au Texas et en Géorgie. Nous sommes allés partout au Canada. Nous sommes allés dans toutes les villes de la Colombie-Britannique, à Vancouver et dans les grandes villes. Il faut que vous compreniez bien.
Le projet de loi qui a été proposé ouvre la porte à cet espace de compétence inhérente. Nous avons fait cela et nous avons une certaine expérience dans ce domaine. Vous avez entendu beaucoup de présentations au sujet des différents aspects de ce qui se passe. Nous avons fait cela pendant 40 ans, et je pense que c'est important que les gens comprennent cela. Il a fallu lutter, parce que le gouvernement provincial a commencé à essayer de faire respecter le fait qu'ils avaient compétence pour les enfants qui ne se trouvaient pas dans nos communautés.
Nous avons déposé un bref, une contestation constitutionnelle, en 2015, qui contestait la revendication du gouvernement provincial quant à ce pouvoir. Nous avons commencé à négocier avec la Colombie-Britannique et obtenu une ordonnance de suspension, et nous avons établi un protocole d'entente avec la Colombie-Britannique pour dire que nous allions discuter du problème de compétence, établir un processus juridictionnel, un processus opérationnel, et nous pencher sur une transition pour passer de là où les choses en étaient jusqu'à là où elles devaient aller. Nous avons fait cela en tant que communauté, mais nous avons aussi établi cela en tant que nation Shuswap.
Vous avez une soumission écrite qui explique qui nous sommes en tant que nation. Il existe 32 collectivités, 17 bandes au sens de la Loi sur les Indiens, une population d'environ 15 000 et un territoire de 180 000 kilomètres carrés. Nous dépassons 168 pays sur le plan de la masse terrestre.
Je pense que vous devez vraiment comprendre que, dans le contexte du projet de loi , il y a des questions fondamentales précises qui doivent être abordées.
D'abord, il y a la question de la modification du financement pour passer vers une relation financière, parce que nous croyons vraiment qu'il s'agit d'un processus nation à nation avec le Canada. Vous avez entendu d'autres chefs parler de cela. Arrêtez d'appeler cela du financement et passez à une relation financière et, dans ce cadre, sortez cela du préambule de la loi pour le mettre directement dans le corps du texte de loi. C'est une solution facile. Je crois que c'est possible.
Dans le préambule, nous parlons aussi de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Je crois qu'il faut que ça sorte du préambule pour aller dans le corps du texte de loi.
La question du principe de Jordan est citée dans le l'alinéa 9(3)e). Nous trouvons que c'est très intéressant, simplement parce que sous notre compétence, pendant environ 40 ans, nous avons eu des situations où des enfants sont physiquement handicapés et leurs parents ne peuvent pas s'occuper d'eux. Dans le système, ils auraient simplement été perdus, ou ils seraient décédés, bien honnêtement.
Pour ce qui est de ce que nous avons été capables de faire avec les enfants que nous prenons en charge, nous avons une jeune fille qui a maintenant 25 ans et qui est en vie parce que nous sommes intervenus et avons pris soin d'elle pendant toute sa vie. Je pense que c'est vraiment une partie importante. C'est ce qu'avoir compétence signifie, avoir les ressources et prendre ces décisions pour cet enfant.
Je crois que ce qui est vraiment important dans le principe de Jordan, c'est la manière par laquelle il est abordé. Il doit être traité en fonction de la façon dont la compétence part de la communauté vers le haut, pas dans la communauté, mais à partir de la communauté vers le processus. Je crois que c'est important.
Ce genre de choses sont importantes pour ce qui est du processus.
Modifiez le paragraphe 10(1) sur les « intérêts supérieurs ». Cette disposition doit inclure la famille, les communautés et la continuité culturelle comme considérations premières dans l'application de ce projet de loi. Cela est vraiment important. Je crois que la question de l'intérêt supérieur doit être définie par la communauté et par la nation, pas par le Canada ou la Colombie-Britannique.
Concernant l'alinéa 13b) et l'inclusion à la définition du « fournisseur de soin » ayant « qualité de partie », nous sommes absolument en désaccord avec cela. Les fournisseurs de soins ne deviennent fournisseurs de soins que parce qu'ils ont une entente contractuelle pour s'occuper de l'enfant. Ils ne devraient pas avoir de capacité juridique dans ces processus et dans ces décisions entourant nos enfants.
Pour la question des « liens plus étroits », il faut que cela soit modifié pour que ce soit de nation à nation — nation autochtone à nation autochtone travaillant l'une avec l'autre pour avoir une idée vraiment claire de l'appartenance de cet enfant, pour que, peu importe que ce soit avec les Secwepemc, les Sq'ewlets, ou les Tsilhqot'in — n'importe qui — nous avons nous-mêmes cette capacité. Nous avons des traités historiques avec les nations autour de nous, autour de ce que nous appelons kwséltkten, notre parenté. Je crois que c'est vraiment important.
Le dernier commentaire sur la loi c'est vraiment que la période de cinq ans est trop longue. Nous devrions y aller avec un examen annuel, parce que je pense que nous avons vraiment besoin d'amener ces choses sur le terrain tout de suite. Lorsque je parle de ces questions, mon expérience c'est que dans un processus fondé sur la communauté, vous pouvez régler les problèmes.
C'était un gros problème que nous avons eu avec Grace McCarthy. Elle continuait à me demander, en tant que chef, en 1980, « Pouvez-vous vous occuper de vos enfants? ». Ce que je lui ai dit, c'est : « Regardez, quand vous faites une erreur dans votre système, vous ne pouvez pas la corriger. Ça prend beaucoup de temps pour la corriger. » C'est ce qui se passe ici aujourd'hui. Voilà, 40 ans plus tard, et le système est encore le même. Il n'a pas été corrigé.
Nous pouvons changer les règles et les règlements et nous ajuster au système en place sur le terrain. Pour le Canada et la Colombie-Britannique, dans vos lois, vous ne pouvez pas, et je crois que c'est le problème avec le système. Je vous apprécie tous, chacun d'entre vous. Vous êtes des législateurs. Vous faites les lois pour le Canada. Nos lois viennent de notre histoire orale et de notre interaction avec la terre. Nous avons vécu sur la terre pendant 10 000 ans, alors ça nous informe dans nos actions. Dans notre histoire orale, nous avons beaucoup d'histoires qui parlent des enfants. En deux mots, ce qu'ils disent dans ces histoires, c'est que la personne qui paie le prix ultime est habituellement l'enfant. Ce sont des histoires orales qui remontent à très longtemps. Nous devons porter attention à cela.
Avec cette loi qui va de l'avant, vous aurez une occasion de changer la vie de milliers d'enfants. Je parle ici en tant qu'ancien enfant pris en charge, en tant que père et en tant que grand-père. Je parle au nom de ma mère et de mon frère. Comme la mort de mon frère en 1977, il y a eu des milliers de morts dans le système depuis. Comme ma mère, il y a un grand nombre de mères qui n'ont aucune voix dans le système. On vous a parlé d'elles aujourd'hui. Ils enlèvent les enfants aux mères directement dans les hôpitaux. C'est ridicule. Il faut que ça s'arrête.
Le Canada va-t-il devenir adulte? Sérieusement, nous devons avoir cette loi afin qu'elle puisse créer un espace pour la reconnaissance de nos lois et de nos compétences. En d'autres mots, il s'agit du droit à l'autodétermination. Les communautés peuvent décider si elles acceptent ou si elles refusent. La décision leur revient. C'est ce qui est essentiel dans cette législation.
On me fait signe.
Des voix: Oh, oh!
Chef Wayne Christian: Merci de m'avoir écouté. Une présentation écrite a été soumise.
:
Merci, madame la présidente, et merci à la ministre.
[Le témoin s'exprime en secwepemctsin.]
[Traduction ]
Je suis également une Secwepemc. Je suis mère de quatre enfants et avocate plaidante. Environ 60 à 80 % de ma pratique se fait dans le domaine de la protection de l'enfance autochtone pour des agences, nations, collectivités, grands-parents et parents autochtones, et parfois pour d'autres agences.
Mes premiers et très courts commentaires sont que, bien sûr, j'appuie et suis sensible aux commentaires de notre Kukpi7 national, Wayne Christian, et je suis entièrement d'accord avec chacun d'entre eux. Je soulignerais au Comité, et je ne vous apprends probablement rien, que le projet de loi n'accorde rien aux peuples autochtones. Il sert uniquement à limiter et contraindre les systèmes et gouvernements provinciaux et fédéraux. Nos compétences, pour autant qu'elles existent... nos lois sont inhérentes, et, comme les chefs et les autres techniciens qui ont témoigné devant vous l'ont souligné, ne sont pas assujetties à une surveillance provinciale ou fédérale. Elles permettent à toutes les nations et collectivités autochtones du Canada d'exercer leurs compétences en tout temps — sous réserve des actes de répression et du manque de ressources et de la négation de ces compétences, ou des tentatives de négation de ces compétences, par les organismes de la Couronne et les gouvernements provinciaux et fédéraux.
Cela dit, en ce qui a trait à ce projet de loi, bien que des améliorations soient encore possibles, comme on peut le voir dans la soumission du Kukpi7 Christian et des autres, il vient un moment où, comme l'ont expliqué les autres témoins, la situation sur le terrain est tellement critique que la législation doit se réaliser en temps opportun pour un certain nombre de raisons dont le Comité est bien conscient. Bien que la possibilité d'exercer ses compétences ait toujours été ouverte à chaque nation ou collectivité, les ressources et la liberté de le faire n'étaient simplement pas là pour être capable de le faire. Les compétences ont toujours été affirmées, de façon continue, depuis des temps immémoriaux, mais personne en dehors des collectivités Spallumcheen et du Kukpi7 Christian n'a été capable d'exercer ces compétences avec succès et de façon exclusive.
Je n'ai qu'un seul autre commentaire concernant les commentaires du Kukpi7 Christian, et il concerne les fournisseurs de soins. Je veux seulement préciser que lorsque les kohkom, ou kikia7as — les grand-mères — sont les fournisseurs de soins, elles peuvent aussi, en vertu de nombreux systèmes de droit autochtone, avoir capacité juridique, donc on ne devrait pas leur empêcher automatiquement d'avoir capacité en vertu du projet de loi. C'est la seule nuance que j'apporterais à mon appui sans réserve aux commentaires du Kukpi7 Christian.
Merci. Kukwstsétsemc.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Chers collègues, collègues présentateurs, mon nom est Lisa MacLeod. Je suis la ministre responsable des enfants et de la jeunesse, des services sociaux et communautaires, de la condition féminine, de l'immigration et des réfugiés... et de la réduction de la pauvreté dans la province de l'Ontario.
Il y a deux semaines, j'ai eu le privilège de me joindre à mes collègues fédéraux, provinciaux et territoriaux à Saskatoon pour discuter d'une multitude de questions parmi lesquelles figuraient la protection des enfants autochtones et le projet de loi . Je peux assurer le Comité du fait que l'Ontario prend au sérieux la question de la protection des enfants autochtones, ce qui explique que nous ayons accordé notre soutien à 12, et bientôt à 14, sociétés d'aide à l'enfance dirigées par des Autochtones axées sur les responsabilités traditionnelles. Nous comptons sur 38 services d'aide sociale à l'enfance non autochtones. Je me réjouis du fait que tant Amber que Theresa soient parmi nous aujourd'hui.
Nous reconnaissons que les enfants autochtones sont surreprésentés sur le plan de la prise en charge et nous nous sommes engagés à offrir de meilleurs résultats à ces enfants, leurs familles et leurs communautés. Comme je l'ai dit à Saskatoon, l'Ontario fait preuve d'un optimisme prudent au sujet du projet de loi et du désir de mieux soutenir les enfants et les jeunes autochtones pris en charge.
Ceci étant dit, à l'instar de mes collègues des provinces et des territoires, j'ai un certain nombre de préoccupations dont j'aimerais vous faire part, pour vous exposer notre point de vue. Après avoir consulté les dirigeants autochtones de l'Ontario, nous estimons qu'il y a un certain nombre de conséquences pour l'Ontario, tout particulièrement en ce qui concerne les définitions, les normes et les exigences, la prépondérance, l'affirmation de l'autonomie gouvernementale, la compétence et, bien évidemment, le financement.
Permettez-moi de passer en revue certaines des répercussions pour la province de l'Ontario.
Notre analyse préliminaire a identifié un certain nombre d'impacts potentiels dans les domaines suivants.
L'un d'entre eux tient aux définitions. Dans les cas où les définitions que l'on retrouve dans le projet de loi diffèrent de celles de la Loi sur les services à l'enfance, à la jeunesse et à la famille (LSEJF), ou ne cadrent pas avec celles-ci, pourraient se poser des conséquences pour l'interprétation de la LSEJF. À titre d'exemple, il se peut que les rôles envisagés pour les instances dirigeantes autochtones dans le projet de loi C-92 ne cadrent pas avec ceux qui sont mis de l'avant pour les bandes et les communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis en vertu de la LSEJF.
Se pose ensuite la question des normes et des exigences. Le fait, à titre d'exemple, que les exigences relatives au droit de faire des représentations et de partager des informations du projet de loi soient différentes de celles qui sont mises de l'avant dans la LSEJF, ou ne cadrent pas avec celles-ci, pourrait avoir des répercussions sur la façon dont les sociétés d'aide à l'enfance autochtones et non autochtones de l'Ontario fournissent des services aux enfants et aux familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis. À titre d'exemple, le projet de loi C-92 et la LSEJF contiennent des dispositions différentes en ce qui concerne l'intérêt supérieur de l'enfant. Des éclaircissements supplémentaires de la part du Canada quant à la façon dont la disposition sur les « normes minimales » doit être interprétée en cas de conflit ou d'incohérence, tout particulièrement dans les cas où celles-ci sont moins contraignantes dans le projet C-92 qu'elles ne le sont dans la LSEJF de l'Ontario, seraient accueillis d'un bon oeil.
En troisième lieu se pose la question de la prépondérance. Il serait souhaitable de recevoir, du Canada, des éclaircissements supplémentaires sur la façon dont la question de la prépondérance s'appliquerait dans le contexte d'un certain nombre de questions et notamment les situations de conflit ou d'incohérence entre des lois autochtones, provinciales et fédérales, ou parmi celles-ci. Une analyse complémentaire serait nécessaire pour identifier les dispositions de la LSEJF qui pourraient être rendues inopérantes, sur le plan constitutionnel, en vertu de la doctrine du projet de loi , si celui-ci devait être adopté. Nous aimerions que la Direction du droit constitutionnel de l'Ontario s'efforce... d'intervenir à l'égard de cette question.
Le quatrième aspect est celui de l'affirmation du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Cette affirmation, par le Canada, dans le projet de loi , en vertu de laquelle le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale est reconnu et confirmé par l'article 35 et comprend la compétence en matière de services à l'enfance et à la famille, va au-delà de l'état actuel du droit. Cette affirmation pourrait appuyer la tenue de discussions trilatérales sur la question de la compétence dans le but de faire progresser les aspirations autochtones. Nous aimerions recevoir des éclaircissements sur la meilleure façon dont nous pourrions intervenir à l'égard de cette question.
Le cinquième aspect est celui de la compétence et de la législation. Il pourrait y avoir des répercussions sur le plan d'un processus bilatéral avec les partenaires des Premières Nations sur la mise en oeuvre potentielle des lois et des systèmes. Certains partenaires pourraient estimer que la législation fédérale représente une complication ou un fardeau et inciter la province à précipiter la conclusion d'accords avant que la loi n'entre en vigueur.
Le sixième aspect est celui du financement. À défaut de financement fédéral imposé pour appuyer le projet de loi , il est difficile d'établir clairement comment la mise en oeuvre de celui-ci sera financée et quelles seront les répercussions sur les modalités de financement existantes entre le Canada, l'Ontario et les Premières Nations. L'absence de financement imposé dans le projet de loi C-92 accentue également le fossé existant dans les services financés par le gouvernement fédéral à l'intention des enfants et des familles des Inuits et des Métis.
J'aimerais enfin réitérer les remarques formulées par le chef au sujet du principe de Jordan. Comme vous aurez l'occasion de le constater et, probablement, de l'entendre de la part de mes collègues des provinces et des territoires, nous aimerions obtenir plus de précisions à cet égard.
Si les positions des partenaires autochtones de l'Ontario seront représentées ici aujourd'hui, j'aimerais simplement vous faire part d'un certain nombre d'entre elles que j'ai reçues à mon ministère.
Les Premières Nations de l'Ontario se sont également penchées sur l'intention du projet de loi en vue d'en évaluer les répercussions et de déterminer leur soutien. Elles ont cependant toutes fait part à notre ministère des inquiétudes qui sont les leurs quant à l'absence d'un engagement spécifique en matière de financement dans le projet de loi. Dans sa réponse, la chef régionale de l'Ontario, RoseAnne Archibald, a déclaré que « rien ne garantit que le financement [...] sera fondé sur les besoins et équitable » et qu'à défaut de financement lié à la législation « nous risquons de ne pas être en mesure d'exercer nos compétences ». Les chefs de l'Ontario ont également exprimé leurs craintes que le projet de loi entraîne la disparition des gains réalisés en Ontario et abaisse les normes. Le grand chef de la nation nishnawbe-aski, Alvin Fiddler, a déclaré dans sa réponse que le projet de loi omet de reconnaître la compétence exclusive des Premières Nations à l'égard des enfants, où qu'ils résident. Le grand chef de l'Association of Iroquois and Allied Indians (AIAI), Joel Abram, a souligné que le manque de financement en vertu de la loi pourrait se traduire par l'absence du soutien de la part de l'AIAI. Le chef Glen Hare du Grand conseil de la nation Anishinabek a déclaré que la nation Anishinabek était « encouragée par le dépôt de ce projet de loi aujourd'hui et qu'elle parvenait à cerner un mécanisme visant à réparer les torts que continuent de subir nos familles et nos communautés ».
D'autres partenaires des Premières Nations, des Inuits et des Métis ont exprimé des préoccupations similaires à notre ministère au cours des dernières semaines, depuis mon retour de Saskatoon.
Compte tenu de ce qui précède, j'aimerais inviter le gouvernement fédéral à préciser plus clairement, tant pour l'Ontario que pour nos partenaires autochtones de la province, quels articles seraient proclamés au moment de l'adoption du projet de loi. Je me permets de réitérer, ici, l'appel lancé par mes partenaires provinciaux et territoriaux invitant le à revenir à la table et à rencontrer ses homologues afin que nous puissions mieux comprendre les répercussions sur la protection de l'enfance au sein de nos communautés autochtones non seulement partout dans notre province de l'Ontario, mais aussi dans le reste du Canada, puisqu'en la matière, nos compétences sont partagées.
Merci beaucoup de votre temps et de votre attention. Ce fut un grand honneur pour moi d'être présente ici avec vous, madame la présidente, de même qu'avec mes honorables présentateurs et, bien évidemment, avec vos collègues.
:
Bonjour, membres du Comité. Merci de me donner l'occasion de m'exprimer sur cette question de la plus haute importance pour l'avenir de nos enfants.
[Le témoin s'exprime en ojibway.]
[Traduction]
Mon nom est Theresa Stevens, je suis directrice exécutive de l'Association of Native Child and Family Services Agencies of Ontario (ANCFSAO). L'ANCFSAO a été constituée en organisation en 1994, bien que nos organismes aient été désignés depuis 1987. Sous une forme ou une autre, nos organismes fournissent des services de prévention de diverse nature, depuis les années 1970. Nous sommes une organisation autochtone provinciale. Nous avons pour mission d'offrir une vie meilleure à tous les enfants autochtones grâce à la promotion de services axés sur la culture à nos enfants, nos familles et nos communautés. Nous représentons 13 des 14 organismes responsables du bien-être des enfants autochtones de l'Ontario et ceux-ci desservent 90 % de toutes les Premières Nations de l'Ontario.
Comme nous sommes le porte-parole technique de la protection de l'enfance autochtone, nous sommes les praticiens en cette matière sur le terrain et nous servons de groupe de référence que les gouvernements et les organismes connexes consultent sur le sujet du mieux-être des enfants autochtones. Notre organisation se compose de membres et notre travail consiste à fournir des ressources à nos organismes membres de sorte que soient offerts des services de qualité à ceux-ci par le biais de l'éducation et de la formation, de l'élaboration et de l'analyse de politiques, ainsi que de la recherche et de la défense des droits.
Affaires autochtones et du Nord Canada a mobilisé nos membres sur le projet de loi en août 2018. Cette consultation a permis de relever plusieurs thèmes. En tout premier lieu, en tant qu'experts techniques, nous avons fait part à Affaires autochtones et du Nord Canada de l'importance de la congruence culturelle et de la mise en valeur des identités culturelles. Nous avons fait preuve de cohérence en affirmant que cet aspect était essentiel à toute législation éventuelle touchant le mieux-être des enfants autochtones. Nous avons également affirmé, de manière uniforme, que la législation fédérale devait prendre acte de la diversité culturelle de toutes nos Premières Nations et que des systèmes culturels devaient être mis en place afin de constituer le fondement de toute pratique en matière de protection de l'enfance.
Nous nous inquiétions également du processus de mobilisation. Nous souhaitions nous assurer qu'il était acquis que notre participation au processus ne pouvait être interprétée comme constituant une consultation prévue en vertu des obligations de la Couronne. Nous avons ensuite formulé des recommandations sur les conditions socioéconomiques. Nous avons affirmé que nous estimions qu'à moins que le projet de loi ne s'attaque aux conditions socioéconomiques à l'origine du fait que les enfants doivent être pris en charge en tout premier lieu, il n'irait pas suffisamment loin. Nous avons souligné la nécessité de réduire la surreprésentation et les raisons pour lesquelles les enfants sont pris en charge, comme la pauvreté, le chômage, les mauvaises conditions de logement, l'instabilité alimentaire, la violence familiale et la toxicomanie.
Nous avons également formulé une recommandation sur la question du financement en précisant que celui-ci devait être fondé sur les besoins et basé sur les coûts réels, tout en tenant compte de l'éloignement et de la complexité des cas.
Puis, sur la question de ces quatre thèmes, nous avons également exprimé quatre principes. Nous étions d'avis qu'il était important que la loi fasse preuve de souplesse en plus de tenir compte des questions relatives à la prévention et à la préservation de la famille, de la communauté et de la nation, dont nous estimons qu'elles sont au coeur de la pratique en matière de protection de l'enfance autochtone. Furent également évoqués les questions de la compétence et de la souveraineté des Premières Nations ainsi que le fait que les soins de qualité doivent être fondés sur les pratiques exemplaires.
Je me permets de répéter que notre mandat nous vient de nos Premières Nations. Nos organismes sont formés par la réunion d'un groupe de Premières Nations qui, par résolution, nous désignent comme leur fournisseur de services chargé de protéger leurs enfants en leur nom. En cela, notre approche est dictée par les dirigeants de nos Premières Nations et nous nous conformons à l'orientation qu'ils nous soumettent relativement à la façon dont ils souhaitent que nous abordions la question de la législation fédérale.
[La témoin s'exprime en ojibway.]
[Traduction]
Je suis de la Première Nation d'Alderville, et mon nom est Amber Crowe. Je suis la directrice exécutive de Dnaagdawenmag Binnoojiiyag Child and Family Services, l'organisme le plus récemment habilité d'Ontario, par le biais du ministère de l'Ontario. Nous desservons huit Premières Nations.
Vous avez nos observations écrites. Je soulignerai quatre points ou préoccupations essentiels qui s'y retrouvent en tant que praticiens ou prestataires des services devant être fournis en vertu de la loi.
Comme Theresa vient de le souligner, notre mandat nous provient des dirigeants des Premières Nations et d'autres communautés autochtones, dans le cas des organismes qui desservent une population plus vaste. À ce titre, nous nous conformons aux décisions politiques et à la volonté des Premières Nations qui font partie de nos organismes bien que nous recevions également un mandat en vertu de la loi provinciale.
Parce que nous suivons le leadership de nos Premières Nations, se pose le risque, en vertu de ce projet de loi, que nous soyons assujettis à plusieurs lois et compétences. Nous servons plusieurs Premières Nations qui se sont dotées de leurs propres approches et priorités à l'égard de la façon dont les services doivent être assurés en vertu de cette loi. Si tel est le cas, nous devons assurer l'atténuation des risques liés à la prestation des services en vertu, éventuellement, de multiples lois régissant les Premières Nations.
Nous voulons également soulever la question de la définition retenue dans cette loi. Il s'agit de la même définition des peuples autochtones que celle que l'on retrouve dans la Constitution. Cette définition n'inclut que les Indiens, les Métis et les Inuits. Pour bon nombre de nos organismes, ceci ne rend pas compte de nos populations actuelles. Nous desservons des populations plus étendues que celles qui sont admissibles en tant qu'Indiens en vertu de la Loi sur les Indiens. Nous estimons également que l'emploi de cette définition irait à l'encontre de la Charte elle-même. Cela nous imposerait de faire preuve de discrimination à l'encontre de nos enfants, sur la base de leur statut, et peut-être sur la base de leur lieu de résidence.
Les principes mis de l'avant dans ce projet de loi incluent la continuité culturelle, l'intérêt de l'enfant et l'égalité réelle. Ces principes ne constitueraient pas le fondement du projet de loi si cette définition des peuples autochtones devait être utilisée.
Un autre enjeu dont nous souhaitons faire part est celui du financement fondé sur les besoins. Nous ne devons pas nous doter d'un moyen basé sur des formules pour assurer le financement de la protection de l'enfance. Celui-ci ne doit pas inciter à la prise en charge d'enfants autochtones. Il doit être fondé sur les besoins, il doit aussi être souple. Il doit être en mesure d'assurer le financement de nos modèles de service qui sont holistiques et basés sur la prévention. Enfin, il doit tenir compte de l'éloignement, de la complexité des besoins et de la disponibilité des ressources dans la région où les services sont fournis.
Le dernier point sur lequel nous souhaitons attirer l'attention dans nos observations orales concerne l'expérience des praticiens fournissant des services en vertu de normes et de règlements imposés qui sont définis pour nous et nous sont fournis, plutôt qu'ils ne proviennent de nos communautés autochtones qui se seront chargées de les développer intégralement elles-mêmes, à partir de la base. Nous craignons que les dispositions de cette loi aient une incidence sur notre capacité à fournir des services de la façon dont nos Premières Nations nous le demandent. Si cela ne signifie pas pour autant que nous soyons en désaccord avec un aspect ou l'autre du projet de loi, sur ces questions, ce n'est pas au Canada qu'il revient de les fournir. C'est aux communautés autochtones qu'incombe cette responsabilité.
Merci.
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En Ontario, nous reconnaissons que, sur les plans constitutionnel et juridique, les responsabilités des gouvernements fédéral et provinciaux se chevauchent en ce qui concerne les relations avec les Autochtones. Je pense que mon exposé a permis d'établir relativement clairement le fait que nous nous inquiétons davantage de la fragilisation, en quelque sorte, de certaines des normes que nous avons instaurées en Ontario du point de vue de la protection de l'enfance qui nous incombe.
Comme je l'ai dit au ministre lorsque nous étions à Saskatoon, je faisais preuve d'un optimisme prudent et nous espérons que cette initiative sera couronnée de succès. Je souhaite simplement, ici, faire part de certaines des préoccupations qui sont les nôtres, tout particulièrement en ce qui concerne les articles 10 et 17 du projet de loi et leur signification quant à la Loi sur les services à l'enfance, à la jeunesse et à la famille. Devrons-nous apporter des modifications à cette loi?
Telle est la raison pour laquelle je souhaite obtenir des précisions quant à ce qui se passera lorsque le projet de loi sera adopté. Vous disposez d'une majorité: je sais pertinemment comment fonctionne le système. Tous les aspects du projet de loi recevront-ils la sanction royale sur-le-champ ou les provinces et les territoires se verront-ils offrir l'occasion de prendre un peu de temps et de collaborer avec le gouvernement fédéral pour régler certains de ces détails?
Comme je l'ai déjà dit, en Ontario, nous sommes très fiers de compter sur 50 sociétés d'aide à l'enfance dont 12 — et bientôt 14 — seront dirigées par des Autochtones. Je pense que nous accomplissons de grands progrès et mes deux homologues de l'Ontario qui se trouvent avec nous ici aujourd'hui et qui se sont exprimés sur le sujet de l'enfance et de la jeunesse dans ce contexte autochtone témoignent des possibilités qui s'offrent à nous.
Il me semble que nous adoptons une approche axée sur la collaboration entre notre province et le gouvernement fédéral en ce qui concerne cette mesure législative. Si je ne peux affirmer que tel sera le cas pour chaque projet de loi, nous nous réjouissons indiscutablement à l'idée de faire en sorte qu'en l'espèce, nous nous préoccupions principalement non pas d'un groupe de politiciens à Toronto et à Ottawa, mais plutôt des enfants, des familles et des communautés.
C'est ce que nous avons essayé de faire en Ontario et je veux tout simplement m'assurer qu'au coeur des préoccupations de ce projet de loi, au demeurant tout à fait louable, figure ce jeune enfant qui sera pris en charge par un programme de responsabilités traditionnelles en Ontario et qui continue de recevoir de telles mesures de soutien global.
Telle est ma motivation. Tel est mon objectif. Je me soucie moins d'engager un débat d'ordre constitutionnel que de m'assurer que les normes dont nous nous sommes dotées dans notre loi et qui ont conféré des pouvoirs aux organisations de Mme Crowe et de Mme Stevens ne soient pas édulcorées. Tel est le défi qui se pose à nous à titre de législateurs et telle est simplement la situation dans laquelle nous nous retrouvons.
Nous voulons tout simplement obtenir cette précision. Puisque je m'exprime au nom de mes collègues des provinces et des territoires, si je suis très heureuse de pouvoir converser de nouveau avec le ministre, je me réjouis indiscutablement de la possibilité qui m'a été offerte de me joindre à vous aujourd'hui et de faire part de certaines des préoccupations que nous avons à l'égard de la loi que nous avons déjà adoptée, notre objectif étant de veiller à en préserver l'intégrité.