INAN Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires autochtones et du Nord
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 9 novembre 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je souhaite la bienvenue à tous. Nous poursuivons nos réunions concernant les incendies de forêt et les mesures d'urgence dans les collectivités des Premières Nations. Nous en sommes à la 83e séance du Comité permanent des Affaires autochtones et du Nord.
Dans le premier groupe de témoins, je suis très heureuse d'accueillir des représentants de la First Nations National Building Officers Association, à savoir Keith Maracle et John Kiedrowski. Nous recevons aussi Viola Thomas, qui représente les Tk'emlups. Enfin, nous accueillons le chef David McDougall, de la St. Theresa Point First Nation.
Bienvenue. Je comprends que vous n'ayez pas pu venir à Ottawa, mais j'apprécie que vous puissiez être parmi nous par vidéoconférence.
Chaque groupe aura dix minutes pour intervenir. Vous aurez aussi la possibilité de présenter un mémoire, si vous le souhaitez. Une fois que nous aurons entendu tous les témoins, nous passerons à une série de questions des députés. Je demanderais aux députés de préciser à qui s'adressent leurs questions, parce que nous recevons trois groupes distincts de différentes régions du pays.
Si nous suivons notre ordre du jour, nous allons commencer par la First Nations National Building Officers Association. Lorsque la fin de votre intervention approchera, je vais vous indiquer combien de minutes il vous reste et j'essaierai de vous interrompre si vous dépassez votre temps de parole.
C'est à vous.
Je m'appelle Keith Maracle. Je suis un Mohawk de la bande des Mohawks de la baie de Quinte, dans la région de Deseronto-Shannonville. Je m'occupe de logement autochtone depuis 1974.
L'Association nationale des agents du bâtiment des premières nations a été constituée en 2003. J'ai eu l'occasion de collaborer avec certains de mes collègues d'autres régions du pays, dans le cadre de réunions qui ont lieu à Ottawa. Nous relevions tous du même programme, mais nous faisions tous quelque chose de différent. C'était le souhait de tous que nous fassions les choses différemment. L'Ontario, par exemple, avait une façon de faire différente des autres provinces. Nous nous sommes réunis et nous avons décidé de constituer l'Association nationale des agents du bâtiment des premières nations. À ce moment-là, nous avons recruté John Kiedrowski comme gestionnaire de projet.
Nous sommes un organisme sans but lucratif. Nous ne faisons pas de politique au sein des Premières Nations ni à d'autres niveaux. Nous aimons occuper une place à part, pour ainsi dire. Notre association est entièrement constituée de bénévoles, sauf pour notre gestionnaire de projet. Nous sommes la seule association au Canada qui travaille de façon particulière avec les Premières Nations au sujet des questions de logement, d'inspections, de codes du bâtiment et d'enjeux similaires.
Nous avons récemment établi un partenariat avec le Centre canadien de matériaux de construction, qui nous permettra de recevoir des conseils sur des questions techniques, notamment, que nous pourrons transmettre à nos membres. La chose la plus importante et difficile pour nous est de tenir nos membres au fait de l'évolution des codes du bâtiment, notamment. Ceux-ci changent très rapidement, et compte tenu du financement minime que nous obtenons, il est très difficile pour nous de nous tenir à jour.
Depuis notre création, nous avons déployé beaucoup d'efforts au sujet des conditions de vie de nos populations des Premières Nations. Nous voyons beaucoup de choses. Je suis probablement l'un des inspecteurs les plus expérimentés membre de l'ANABPN sur le terrain. L'Ontario compte 132 Premières Nations. J'ai collaboré avec 128 d'entre elles. J'ai voyagé du Labrador à la Colombie-Britannique, au cours des 20 dernières années, afin de donner des cours de formation, en plus de traiter avec de nombreuses Premières Nations.
En 1974, nous avons mis sur pied un service indien d'inspection en Ontario. Il s'agissait d'un projet pilote, qui a vu le jour grâce principalement au financement d'Affaires indiennes et de la SCHL. Puis, en 2003, nous avons lancé l'ANABPN, l'Association nationale des agents du bâtiment des premières nations. Au cours des cinq premières années, nous n'avons pas pu dépenser tout l'argent reçu de ces deux organisations. Après cinq ans, nous recevons des miettes. Nous devons nous battre pour avoir notre argent. À l'heure actuelle, je crois que l'ANABPN obtient environ...
Nous obtenons 100 000 $ par projet, que nous devons mener à bien, c'est-à-dire faire en sorte que les travaux soient exécutés.
La situation est réellement différente.
J'ai vu de très bonnes choses, mais aussi de très mauvaises. Selon moi, les très bonnes choses se retrouvent dans les Premières Nations plus importantes. Elles ont l'infrastructure, les gens et les fonds nécessaires.
Lorsqu'il est question des Premières Nations plus petites, on se rend compte qu'elles n'ont pas l'infrastructure. Elles tentent de construire grâce aux subventions que leur donnent la SCHL et les ministères. C'est à ce moment-là que les maisons commencent vraiment à se détériorer.
Dans mes déplacements, je parle avec les membres des communautés. Ils ne sont pas différents des personnes assises dans cette salle. Tout ce qu'ils veulent, c'est une maison confortable où vivre. Ils ne veulent pas avoir à se battre pour l'obtenir. Ils veulent être en mesure de construire leur maison, y être confortables et y élever leurs familles, et de vivre leur vie.
Je vais céder la parole à John pendant une minute.
Parmi les enjeux qui touchent les codes de prévention des incendies dans les Premières Nations figure le rôle des autorités compétentes. Par exemple, la ville d'Ottawa est l'autorité compétente pour toutes les constructions à l'intérieur de ses limites, et cela comprend un certain nombre d'inspections. Il faut obtenir des permis de construction, peu importe s'il s'agit d'une construction neuve ou de rénovations, et une série d'inspections ont lieu. Les plans sont passés en revue par les services du bâtiment, de concert avec les responsables de la prévention des incendies.
Ce qui arrive dans les Premières Nations, c'est que... Le concept d'autorité compétente a vu le jour en 1983, au moment où le ministère des Affaires indiennes a confié aux Premières Nations l'application d'un grand nombre des pratiques en matière de construction. On nous a alors dit: « Voilà. Vous êtes maintenant l'autorité compétente ». Parmi les défis auxquels nous faisons face figure le fait qu'un grand nombre de Premières Nations ne comprennent pas la signification réelle du terme autorité compétente, et plus particulièrement lorsqu'il s'agit de codes de prévention des incendies. Les codes de prévention des incendies s'appliquent aux rénovations, alors que les codes du bâtiment s'appliquent aux constructions neuves. Dans le cas des rénovations, il n'y a pas d'inspections, ni de plans ou de processus. Lorsqu'une maison est rénovée, cela se fait de façon ponctuelle, sans inspection et sans réellement que l'on respecte l'un ou l'autre des codes de prévention des incendies, dans de nombreux cas.
Pour ce qui est des constructions neuves, les chefs et les conseils sont les constructeurs, de même que les inspecteurs. Cela équivaut à demander au renard de prendre soin du poulailler. Il s'ensuit que les Premières Nations n'ont pas réellement de processus d'inspection. Les inspections sont faites pour le versement des acomptes, mais pas nécessairement pour veiller au respect du code de prévention des incendies et du code du bâtiment. On construit donc des maisons qui ne respectent pas nécessairement les codes du bâtiment ou les codes de prévention des incendies, et ce problème se pose particulièrement lorsqu'il s'agit de rénovations.
Même si c'est le conseil de bande qui est le propriétaire de la maison, les locataires décident parfois de faire leurs propres rénovations. Il arrive qu'ils refassent l'installation électrique, ajoutent une chaufferette ou un appareil de chauffage au bois, ou procèdent à certaines modifications sans en parler vraiment au chef et au conseil, parce que ceux-ci n'approuveraient probablement pas, étant donné qu'il n'y a pas d'argent disponible pour reconstruire. Le rôle d'autorité compétente cause de réelles préoccupations.
Penchons-nous sur certains des huit ou neuf éléments clés à l'origine de cette situation. L'un d'eux est que nombre de personnes ne croient pas que les permis de construction s'appliquent à elles. Elles sont d'avis que toutes les inspections sont du ressort du gouvernement fédéral, de la SCHL et d'Affaire autochtones et du Nord Canada. Il y a aussi la question des droits issus des traités dans le domaine du logement. Des appareils de chauffage sont installés, qui ne respectent pas nécessairement les certifications du Programme de formation technique en énergie du bois. Un certain nombre d'examens objectifs ne sont pas menés dans les réserves, mais le sont à l'extérieur de celles-ci. Il faut obliger les chefs et les conseils à utiliser les mêmes mécanismes de contrôle.
Il nous reste quelques points à soumettre en conclusion. Je cède la parole à Keith.
Nous faisons actuellement des présentations concernant les responsabilités en matière de logement au Canada. Nous fournissons des renseignements et nous avons un manuel à ce sujet. Nous offrons aux locataires des cours sur l'entretien d'une propriété, notamment. Nous nous occupons de ce genre de choses à l'échelle du Canada.
Nous collaborons avec l'Association des pompiers autochtones pour tenter de résoudre certains problèmes. Nous avons aussi mis au point une liste de contrôle à l'intention des locataires ou d'autres personnes intéressées, afin qu'ils la consultent pour déterminer dans quel état est leur maison et ce qui doit être réparé.
Avons-nous respecté notre temps de parole?
Oui. Merci. Vous êtes très coopératifs et je l'apprécie.
La parole va maintenant à la Première Nation Tk'emlups, ou s'agit-il d'une association?
Viola est la conseillère de la bande. Bienvenue. Nous sommes heureux que vous ayez pu venir à Ottawa. Vous avez fait un long voyage.
Est-ce que vous endommagez notre équipement?
Tout d'abord, kukwstsétsemc à la nation algonquine qui nous permet d'utiliser en permanence son territoire non cédé.
Je vous dis kukwstsétsemc, madame la présidente, à vous et à chacun des membres du Comité, de nous donner l'occasion de vous faire part de nos réflexions concernant les situations d'urgence que nous avons connues dans notre communauté et nation. J'aimerais vous parler un peu de notre peuple et de notre territoire, parce que cela a un lien avec la façon d'intervenir dans les situations d'urgence.
Le territoire d'où je viens comporte de nombreuses terres d'élevage. Il est semi-désertique. Les Secwépemc de Kamloops sont l'une des 27 nations tribales distinctes de la Colombie-Britannique. Nous avons les langues et la culture autochtones les plus diversifiées au pays. Le terme Secwépemc signifie « peuple à la confluence ». Les rivières North Thompson et South Thompson coulent sur nos terres. En ce qui a trait à la faune propre à notre territoire, elle est constituée de mouflons, de cerfs de Virginie et de serpents à sonnette. Nous comptons un grand nombre d'exploitants de fermes d'élevage. En fait, nous en avons une dans notre communauté. Notre territoire est aussi constitué d'un grand nombre de pâturages distincts qui ne se retrouvent nulle part ailleurs au pays et qui nous sont propres.
Notre peuple s'appelle la nation Tk’emlúps te Secwépemc. Nous faisons partie de 17 communautés distinctes qui constituent la nation Tk’emlúps te Secwépemc.
Madame la présidente, j'aimerais vous faire part aujourd'hui de nos réflexions concernant nos interventions au chapitre de la préparation aux situations d'urgence et des défis auxquels notre communauté fait face. J'aimerais commencer par vous parler de mai 2017. Une inondation majeure a eu lieu dans notre communauté. Nous n'avons jamais reçu de soutien approprié de la province ou du gouvernement fédéral pour intervenir. De nombreuses maisons ont été inondées. Les gens attendent toujours une compensation et une réponse des autorités en ce qui a trait à l'impact que l'inondation a eu dans notre communauté.
Le centre des opérations d'urgence n'était pas opérationnel au moment où l'inondation a eu lieu, ce qui fait qu'aucun contact n'a été établi avec le Canada ou la province au fur et à mesure de l'évolution de cette situation d'urgence. La seule personne avec qui nous avons des contacts est le chef du service local des incendies.
Les dommages ont été considérables, et ils n'ont pas touché uniquement les maisons, mais aussi de nombreuses routes. Notre communauté se situe de l'autre côté de la rivière en face de la ville de Kamloops. Notre réserve principale s'étend sur 49 milles carrés, ce qui veut donc dire que le territoire de notre communauté est très vaste. Nous avons une subdivision industrielle dans notre communauté. Nous avons de nombreuses terres louées à bail, ainsi que des sous-locataires, dans notre communauté.
Nous avons besoin d'une infrastructure plus importante pour la protection contre les incendies. Nous devons de toute urgence construire un autre réservoir dans notre communauté, afin que si un autre feu se produit, nous ayons accès à une infrastructure appropriée pour intervenir efficacement.
Au cours des trois dernières années, nous avons communiqué avec Affaires indiennes pour obtenir ce financement de soutien des infrastructures, qui nous a été refusé chaque année. Il s'agit là du défi constant auquel nous faisons face.
Par ailleurs, le plan d'urgence actuel est périmé. Nous devons être en mesure de collaborer avec le Canada et la province pour mettre à jour ce plan d'urgence qui, par exemple, ne comporte pas de carte appropriée.
Nous devons aussi recruter des opérateurs pour amener les matériaux d'urgence, comme le sable. Il n'existe aucun processus officiel de remboursement. Nous devons le faire à nos frais.
Le coût des dommages subis par les maisons est de 54 657 $, certaines d'entre elles étant des unités à loyer modique de la SCHL, mais il n'y a pas de nouveaux fonds pour s'occuper de ce problème.
Au cours de la situation d'urgence découlant des feux de forêt, nous avons connu la même expérience, à savoir l'absence de contact avec le Canada ou la province. Nous avons reçu un certain nombre d'évacués. En fait, nous avons reçu plus de 5 000 évacués dans notre communauté. Ce n'est que trois semaines plus tard que nous avons pu établir un contact avec le Canada et la Colombie-Britannique, en vue d'obtenir du soutien pour les évacués autochtones, ainsi que pour les évacués non autochtones.
Nous avons accueilli beaucoup de bétail des collectivités avoisinantes. Je le répète, il n'y a eu aucun remboursement de ces coûts. Des particuliers continuent de se battre avec le Canada pour obtenir un remboursement approprié.
Il y a deux semaines, un incident impliquant une arme à feu a eu lieu tout près de notre école. Encore une fois, la communication avec le Canada a été déficiente lorsqu'il a fallu résoudre cette situation. Cela a traumatisé nos enfants parce que cela s'est produit de l'autre côté de la rue, en face de l'école, une école élémentaire qui va de la maternelle à la septième année. Le temps était beau. Les enfants jouaient dehors lorsque le tireur est venu sur notre territoire.
Par conséquent, je crois qu'il existe un besoin réel de coordination et de communication efficaces, tant avec le Canada qu'avec la Colombie-Britannique, afin qu'ils collaborent avec les communautés des Premières Nations pour qu'elles puissent mieux réagir et coordonner leurs efforts en vue d'assurer la sécurité et la protection de tous les êtres humains, peu importe leur lieu de résidence ou leur race.
J'exhorte ce comité à se pencher sur l'inefficacité des efforts de coordination de la part du Canada et de la Colombie-Britannique.
Je vais remettre mes documents au greffier, afin qu'ils soient soumis au Comité.
Très bien.
Notre dernier intervenant est le chef David McDougall, du Manitoba, qui représente la St. Theresa Point First Nation.
Bienvenue.
Bonjour. Merci de me donner cette occasion de faire entendre mon point de vue à votre comité.
Tout d'abord, j'aimerais vous présenter la région où est située la St. Theresa Point First Nation. Elle se trouve dans le nord-est du Manitoba et fait partie des trois communautés du lac Island. Le lac Island est un lac dans lequel sont situées de nombreuses îles et qui mesure environ 80 kilomètres sur 40 kilomètres d'est en ouest. Trois communautés s'y trouvent. St. Theresa Point compte environ 4 300 membres dans sa liste de bande. Garden Hill compte probablement 4 600 membres environ. Wasagamack en a plus de 2 000, et Red Sucker Lake, environ 1 200. On parle donc de 12 000 à 13 000 personnes qui sont membres de Premières Nations inscrites visées par des traités. Notre territoire est accessible uniquement par voie aérienne, ainsi que par des routes d'hiver, des routes de glace, pendant environ six semaines maintenant, en raison des changements climatiques.
Ce que nous voulons souligner dans cette présentation c'est que, comme vous le savez, à St. Theresa Point, d'où je viens, et je ne peux pas parler pour les autres collectivités, mais je peux mentionner leur participation à l'ensemble de l'expérience, nous avons un protocole d'intervention en cas d'urgence. Cela découle du fait que nous avons connu trois incendies majeurs dans la collectivité. Dans un cas, cinq résidences ont brûlé.
Je me permettrais d'ajouter, MaryAnn, que l'une d'entre elles était la maison de Judy Klassen.
Nous avons une certaine expérience pour traiter les situations de ce genre.
J'aimerais aussi ajouter qu'en 2007, ou à peu près à cette époque, nous avons fait face à la crise du H1N1, tout comme partout ailleurs au pays. Je suppose que le foyer se trouvait à St. Theresa Point. Nous avons dû prendre des mesures d'urgence.
Un protocole a été déclenché lorsque le feu a commencé à se rapprocher de la Première Nation Wasagamack parce que nous savions qu'il y avait une menace imminente en raison de la fumée. Le feu de forêt a éclaté du côté nord du territoire de la Première Nation Wasagamack, tôt dans l'après-midi du 29 août 2017. Le vent soufflait en direction nord-nord-ouest. Un panache de fumée a rapidement monté dans le ciel et s'est transformé en un vaste nuage de fumée noire qui a obscurci le ciel au-dessus de St. Theresa Point. L'énergie libérée par la fumée a produit des éclairs.
Un feu de forêt, alimenté par une forte brise, s'est approché de la Première Nation Wasagamack et a forcé l'évacuation complète des membres de la collectivité. La Première Nation Wasagamack a été évacuée vers St. Theresa Point, à environ six kilomètres au sud-est de Wasagamack. Le seul aéroport de la région se trouve sur une île en face de St. Theresa Point. Les membres de la Première Nation Wasagamack ont été aidés par ceux de la Première Nation St. Theresa Point, qui les ont reçus dans le gymnase de l'école secondaire et de l'école intermédiaire. Nous avons aussi aidé à leur transport au moyen d'une barge, d'un ponton pour l'aide médicale, ainsi que d'une autre embarcation plus grande pour les personnes évacuées ayant des problèmes de santé. Nous avons aussi réquisitionné une dizaine de bateaux Lund de 16 pieds de la collectivité, et nous avons aidé au transport de la population de Wasagamack. Les gymnases des deux écoles ont accueilli 917 personnes. Nous avons aussi déployé nos autobus d'écoliers pour les transporter du quai aux gymnases des écoles. Initialement, des personnes ont été transportées vers l'île où se trouve l'aéroport, et 197 personnes y ont passé la nuit.
Compte tenu de la situation, nous avons aidé à l'évacuation de Wasagamack et nous avons utilisé nos ressources pour le faire. La Croix-Rouge et Affaires indiennes nous ont demandé de soumettre des factures en vue d'être remboursés, ainsi que pour le versement d'une compensation pour l'utilisation de ces ressources ou de ces actifs.
Le centre de santé et l'ensemble du personnel de St. Theresa Point ont aussi fait des heures supplémentaires pour répondre à cette situation d'urgence attribuable au feu et à la fumée.
La nation Wasagamack a reçu un ordre d'évacuation générale, signifiant que chacun devait quitter St.Theresa Point. Une unité de coordination de l'évacuation a été mise sur pied au bureau de la Première Nation et a été supervisée par le responsable de l'opération. Le centre de santé a établi un ordre de priorité visant les personnes dont l'état de santé pouvait poser problème, comme les personnes âgées, les nouveau-nés, celles souffrant d'une maladie chronique, d'asthme ou d'une pathologie cardiaque, etc. Ces personnes ont été regroupées en trois catégories prioritaires, la priorité numéro un étant P1, et ainsi de suite. Ces personnes devaient être évacuées dans la foulée de l'évacuation de la nation Wasagamack, le jour suivant, même si l'évacuation a commencé le soir même.
La Première Nation de St. Theresa Point a commencé l'évacuation des personnes du premier groupe prioritaire dès le 30 août 2017, en soirée, et au cours de la journée suivante, le 31 août. Le nombre d'évacués de St. Theresa Point s'est élevé à plus de 1 000 personnes. Les dirigeants de la Première Nation ont renoncé à commencer l'évacuation des personnes du deuxième groupe prioritaire parce que la fumée devenait supportable dans la localité. Nous sommes restés en communication avec le service de conservation du Manitoba, au détachement de Stevenson Island. La Première Nation a surveillé la situation et était prête si nécessaire à mobiliser les personnes du groupe prioritaire numéro deux. Du personnel administratif a été envoyé sur place pour assurer le suivi.
Les membres de la Première Nation de St.Theresa Point ayant un problème médical ont été acheminés au centre sportif et au centre des congrès de Winnipeg où on leur a attribué des lits pliants de l'armée. La situation est rapidement devenue problématique parce que ces gens éprouvaient des difficultés en raison du type d'hébergement et de soins. Une unité a été mise en place dans un hôtel pour servir de camp de base pour la population de St. Theresa Point. À partir de ce moment, les évacués ont été installés plus confortablement dans des hôtels, grâce aux efforts de notre équipe.
À ce moment, dans la région d'Island Lake, des incendies faisaient encore rage par endroits et une épaisse fumée se répandait sur St.Theresa Point, rendant l'air irrespirable. L'on a demandé à la plupart des personnes faisant partie des groupes prioritaires deux et trois de demeurer à l'intérieur des maisons jusqu'à ce qu'une mesure soit prise, si un autre incendie se déclenchait. Les températures étaient alors plus fraîches.
La localité voisine de la Première Nation de Garden Hill, située à 10 kilomètres au nord-est de St. Theresa Point, était largement recouverte d'une épaisse fumée provenant des feux de forêt sévissant au nord-ouest de la collectivité. La localité avait été évacuée en raison de la densité de la fumée et des gens ont dit qu'il n'était pas possible de voir au-delà de 50 pieds sur la route. La fumée était épaisse à ce point à Garden Hill.
La plupart des membres de la Première Nation de Garden Hill ont dû être évacués en raison de l'épais rideau de fumée. Quand le ciel s'est éclairci, le service de protection a envoyé des pompiers venant de la Colombie-Britannique et d'autres régions du Canada, des professionnels rompus aux techniques de lutte contre les feux de forêt. Les équipes ont commencé à contrôler les incendies en établissant des lignes d'arrêt et en allumant des feux afin de maîtriser les incendies existants. Les chefs et les conseils, avec l'aide de Conservation de la nature Canada, ont nolisé des hélicoptères et de petits avions pour inspecter les superficies brûlées au nord de Island Lake. Les agents de conservation ont expliqué que la surface brûlée couvrait une grande étendue de forêt et les chefs de la collectivité à bord des avions ont pu observer l'ampleur des incendies. La destruction du milieu naturel s'observait à perte de vue vers le nord. Dix-sept milles carrés ont été détruits sur un territoire jadis utilisé par les Premières Nations pour diversifier leur régime alimentaire et poursuivre les activités traditionnelles comme le camping, la chasse , la pêche, etc.
Pendant les évacuations, plus de 1 100 personnes de St.Theresa ont été déplacées vers Winnipeg. Elles faisaient toutes partie du groupe prioritaire numéro un. Plus de 1 200 personnes de Wasagamack ont également été évacuées, un grand nombre des leurs étant à l'extérieur de la localité à ce moment de l'été. À Garden Hill, on a dénombré 2 900 personnes évacuées.
Au même moment — j'ai vérifié auprès du ministère —, plus de 900 personnes de Poplar River avaient été précédemment évacuées du côté est du lac Winnipeg. Plus de 6 000 membres des Premières Nations ont été évacués vers Winnipeg en raison des feux. Pendant toute cette période, ces gens-là ont dû s'accommoder de la situation dans les centres d'urgence et le gouvernement du Manitoba n'a pas déclaré l'état d'urgence.
Par ailleurs, en ce qui concerne les dépenses, la Croix-Rouge recevait les réclamations approuvées à l'avance par le ministère, mais pour St.Theresa et d'autres Premières Nations, nous avons dû tenter notre chance avec des demandes après les faits.
Nous venons juste de recevoir des nouvelles de notre réclamation de 121 000 dollars. La lettre indique que l'on se réjouit de nous informer qu'un montant de 71 000 dollars a été approuvé. Où irons-nous chercher les 50 000 dollars manquant? Je pense que nous devrons amputer nos budgets existants qui sont déjà serrés.
Je tiens à mentionner ce qui se passe maintenant. Nous sommes en train de présenter nos demandes de remboursement pour les dépenses encourues lors des feux de forêt.
Merci à tous de m'avoir écouté et de m'avoir accordé de votre temps.
Vous avez eu bien peu de temps pour décrire une si importante situation qui a impliqué l'évacuation de 6 000 personnes dans une région isolée. Merci beaucoup.
Nous allons entrer davantage dans les détails avec les questions des députés, en commençant avec M. Bossio.
Merci, madame la présidente, et merci à tous de votre présence aujourd'hui.
C'est formidable de compter sur la présence de Keith Maracle aujourd'hui. Je le connais depuis quelques années. Je dois vraiment le féliciter d'avoir fondé l'Association nationale des agents du bâtiment des Premières Nations, l'ANABPN, et d'en faire la promotion depuis toutes ces années, ce qui a eu des retombées positives dans de nombreuses collectivités autochtones, des retombées qui autrement n'auraient pas eu lieu. Merci beaucoup pour cette contribution.
Premièrement, pourquoi avez-vous jugé nécessaire de créer l'Association nationale des agents du bâtiment des Premières Nations?
Nous l'avons estimé nécessaire parce que de nombreux programmes font l'objet d'un traitement différent. Même si nous devons tous répondre aux mêmes exigences, mes collègues du Manitoba sont traités différemment de ceux de l'Ontario ou de la Colombie-Britannique et cela en tout point. Nous ne pouvions échanger d'information, parce que je n'entendais jamais parler de ce qu'ils faisaient et, inversement, ils n'entendaient pas parler de ce que je faisais. Finalement, certains d'entre nous sont allés à Ottawa, à la SCHL, et nous avons dit qu'il fallait regrouper toute cette information en un seul endroit et faire en sorte que nous soyons tous sur la même longueur d'onde. Ce fut le moteur derrière ce projet.
En faisant cela, vous avez créé un certain degré de protection contre les incendies dans un certain nombre de collectivités autochtones, mais ce n'est pas suffisant. Comme vous le dites, le travail des agents du bâtiment n'est pas uniforme d'un bout à l'autre du pays. Voyez-vous la création d'un bureau du commissaire autochtone aux incendies comme un élément de cohérence au pays, qui contribuerait à pallier le manque de cadre législatif et de normes de protection contre les incendies au sein des collectivités autochtones de tout le pays? Cela pourrait-il remédier à l'incapacité de faire appel au commissaire aux incendies dans les régions d'une même province? Voudriez-vous en parler?
Nous avons besoin d'un tel mécanisme de coordination, parce que nous nous demandons qui coordonne ce genre de chose dans nos collectivités des Premières Nations, comme l'illustrent les récits que nous venons d'entendre. Personne ne le fait. C'est relégué au second plan.
Je suis confronté à cela tout le temps quand je voyage au pays: « Vous relevez de la compétence fédérale, la province n'a donc rien à voir avec vous », ou encore « C'est un enjeu provincial et cela ne s'applique pas à une réserve ». Nous entendons cela tout le temps. Il y a encore une grande division, là-bas, nous et eux, c'est le genre de choses que nous entendons. On nous dit: « Vous, les membres des Premières Nations, vous êtes sous la responsabilité du fédéral ». Cela s'arrête quand nous franchissons les frontières provinciales et qu'il n'y a personne pour récupérer la responsabilité de l'autre côté.
Je ne dis pas qu'elles doivent relever de notre responsabilité. Peu m'importe en réalité. Tout ce que je sais, c'est que quelqu'un doit commencer à avoir notre meilleur intérêt à coeur ici.
John, vous avez les pieds sur terre dans cette affaire. Quelle différence pourrait faire un commissaire autochtone aux incendies?
Je pense que la création d'un poste de commissaire autochtone aux incendies serait très positive. J'en ai souvent parlé à Richard et à Blaine. Le véritable défi est l'autorité compétente. En prenant en compte ce concept de l'autorité compétente, tous les décès ou toutes les blessures attribuables à un incendie dans un bâtiment retombent directement sur les épaules du chef et du conseil. Ce qui est particulièrement intéressant à nos yeux, c'est que cela devient tout à coup un enjeu semblable en regard des décès causés par un incendie et de la responsabilité du chef et du conseil. Ainsi, le commissaire autochtone aux incendies serait en bonne position pour donner plus d'information aux conseils au sujet de l'autorité compétente, sur ce que cela signifie sur le plan de la responsabilité et pour s'assurer que toutes les constructions sont conformes aux codes du bâtiment et de prévention des incendies.
À l'heure actuelle, il n'y a pas de normes techniques. Nous avons un code du bâtiment et un code de prévention des incendies. Dans bon nombre de Premières Nations, les conseils n'ont pas de normes techniques à respecter.
Pour donner suite à ce point, j'ajouterai que la plupart des réserves doivent se conformer aux exigences de la partie 9 du Code national du bâtiment, qui prévoit une seule porte dans un bâtiment résidentiel, alors que le code de prévention des incendies en exige deux. Il y a contradiction entre les codes.
Je sais que vous avez parlé à Blaine et à Richard, mais est-ce que l'Association nationale des agents du bâtiment des Premières Nations a été consultée directement à propos de la création de ce bureau du commissaire autochtone aux incendies?
Ils nous ont fait part de leurs opinions lors de nos discussions. Nous savons probablement tous ce qui se passe actuellement.
Quel conseil donneriez-vous? Je sais qu'il ne me reste pas beaucoup de temps, mais si vous avez en tête quelques points essentiels qui contribueraient à créer un bureau du commissaire autochtone aux incendies efficace, quels seraient-ils?
Je proposerais de faire des inspections dans les édifices rénovés dans les collectivités des Premières Nations. C'est là que sont les pièges et ces inspections ne sont pas faites.
Y a-t-il un agent du bâtiment autochtone dans chacune des Premières Nations? Le savez-vous?
Vous êtes un organisme national, n'est-ce pas?
Il y en a dans chaque province, mais pas dans chacune des Premières Nations. Des inspecteurs du bâtiment sont présents dans toutes les provinces canadiennes.
Est-ce que ces inspecteurs du bâtiment conseillent toutes les Premières Nations sur l'application des codes du bâtiment?
Je pense que le problème, Mike, est que les inspecteurs peuvent bien dire au chef et au conseil quoi faire, mais bon nombre d'entre eux ne disposent même pas d'un encadrement, comme un code du bâtiment ou des règlements de construction.
Par exemple, si Keith entre dans une collectivité et voit qu'un bâtiment en construction ne respecte pas le code de protection des incendies, il ne peut pas donner un ordre de suspendre les travaux. Il ne peut pas stopper la construction. Généralement, les chefs et le conseil lui disent: « Regarde, nous devons construire ce bâtiment et nous ne ferons pas l'inspection parce que nous devons nous assurer que la maison sera construite pour que le paiement soit versé. Il est possible que les travaux ne soient pas conformes aux codes, mais nous avons besoin de recevoir ce paiement ».
Merci, madame la présidente, et merci à tous les témoins.
Je vais commencer en mettant bien sûr l'accent sur la question des feux en Colombie-Britannique. Pour mettre les choses en perspective, je pense que 1,2 million d'hectares ont brûlé. Cela représente 3 millions d'acres et des dizaines de milliers de personnes évacuées. Le principal enjeu n'était pas l'éloignement, mais plutôt l'ampleur de l'événement.
J'aimerais remercier particulièrement Viola, que je me réjouis de voir ici aujourd'hui. Les Tk’emlúps ont ouvert aux évacués leurs terrains de pow-wow. Il importait peu que vous ayez été un Autochtone ou non. Ils ont accueilli des personnes de toute la province et leur ont fourni de quoi manger et prendre une douche. C'était très réconfortant. Je pense qu'il faut saluer ce que votre bande et votre collectivité ont fait.
Quand nous en avons parlé la première fois, nous avons appris qu'il y avait une frontière entre les Premières Nations et les autres. Vous êtes soutenus pour venir en aide aux membres des Premières Nations, mais on vous dit en quelque sorte que les non-Autochtones ne comptent pas quand vous cherchez à obtenir de l'aide, même si vous leur ouvrez votre territoire et vos coeurs et que vous les nourrissez. Est-ce que ce problème est résolu?
Non. Nous tentons toujours de résoudre ce problème et ce n'est pas réglé du tout. C'est un gros défi.
Où est le défi? Visiblement, pour les non-Autochtones, la responsabilité relèverait de la province, peut-être de l'ensemble... Où se situe encore le problème?
Le problème se situe à tous les niveaux. Je cite l'exemple des personnes qui ont été évacuées de Esk'etemc, l'une des réserves voisines de Secwépemc. Parce qu'elles ne figuraient pas sur la liste des collectivités évacuées du centre de préparation aux urgences établi dans la ville, ces personnes ont été privées d'aide. C'était aussi rudimentaire que cela: on ne savait pas que cette localité avait été évacuée. Ces personnes ne pouvaient donc pas recevoir l'indemnité d'urgence parce qu'elles n'étaient pas sur la liste. C'est le niveau le plus élémentaire.
L'autre problème, est que les Premières Nations ne sont pas adéquatement reconnues comme un pouvoir local au même titre que les municipalités. Par conséquent, nous ne sommes inclus dans aucune des activités provinciales ou fédérales de formation sur la préparation aux urgences. Nous devrions l'être parce que notre localité compte quatre ponts et est traversée par l'autoroute 1, la route transcanadienne et le chemin de fer du CN. Exclure les Premières Nations de cette façon revient à mettre nos vies en danger.
Nous sommes déjà en danger parce que les feux de forêt tuent un grand nombre d'animaux. Il s'agit d'une sécurité alimentaire pour beaucoup de nos familles qui chassent en hiver et pêchent en été. De nombreuses familles vivront des temps difficiles cet hiver en raison des répercussions des feux. Par le passé, le Canada était proactif et entretenait des collaborations afin de gérer efficacement les ressources dans le but de prévenir les incendies de forêt. Traditionnellement, nos peuples allumaient des feux au début du printemps pour éliminer les broussailles; c'était une méthode de prévention. Nous procédions à du brûlage traditionnel et nous devons maintenant rétablir certaines de ces pratiques. Mais il faut que le Canada et les provinces nous incluent activement aux activités de formation sur la préparation aux urgences.
J'ai deux questions.
Généralement, un gouvernement local déclare l'état d'urgence. Une province peut déclarer l'état d'urgence... Il y a des échelons. Quand vous dites que Kamloops déclare un état d'urgence local et met en branle le soutien, par exemple, pour les inondations dont vous avez parlé, est-ce que l'état d'urgence était déclaré pour répondre aux inondations, ou les Premières Nations ont-elles la compétence de déclarer une urgence?
Nous n'avons pas le pouvoir de déclarer une urgence, ce qui constitue l'un des obstacles. C'est un très bon exemple qui explique pourquoi vous devez inclure les Premières Nations dans la préparation aux urgences.
Nous avons entendu mardi la Société des services d'urgence des Premières Nations, qui joue un peu un rôle de coordination et dont la mission implique des responsabilités. Comment ce groupe interagit-il avec votre communauté?
Nous avons eu de vraies difficultés à convaincre la Croix-Rouge de venir sur nos terrains de pow-wow pour informer nos bénévoles et notre personnel sur la façon d'accéder aux indemnités d'urgence.
Le processus de demande exige que vous ayez une adresse de courrier électronique. Un grand nombre de nos membres n'ont pas d'ordinateur. Ils ne sont pas connectés à Internet. Le processus fondamental de présentation d'une demande d'indemnité d'urgence ne prend même pas en compte nos réalités dans les collectivités des Premières Nations.
Essentiellement, la Croix-Rouge doit vraiment redoubler d'efforts et former plus d'Autochtones s'ils doivent être les premiers intervenants dans la préparation aux interventions d'urgence dans nos collectivités. Franchement, la Croix-Rouge a été un obstacle pour nous. Il a fallu attendre quatre semaines avant que l'organisme ne soit en mesure d'envoyer du personnel pour former nos bénévoles.
Vous pouvez peut-être prendre quelque temps pour y penser, parce que nous allons entendre des exposés dans la période qui vient, mais si vous pouviez formuler deux ou trois recommandations, et j'entends des membres des communautés autochtones formés par la Croix-Rouge... Que pourrions-nous envisager pour donner suite aux leçons apprises?
... devrait être décentralisé et ne pas être centralisé à l'extérieur d'Ottawa. Il devrait y avoir des bureaux régionaux dans chaque province et territoire qui seraient en mesure d'offrir des ressources aux collectivités en matière de formation, de manière à ce que tous les aspects de la préparation aux urgences soient intégrés.
J'aimerais rappeler aux députés de poser votre question et de laisser suffisamment de temps aux témoins pour répondre.
Monsieur Cannings.
Merci. Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui.
J'aimerais d'abord entendre Mme Thomas.
Kukwstsétsemc d'être venue. Lim'limpt, comme on dit dans l'Okanagan. J'ai bien aimé votre exposé, et en particulier votre description de vos terres. J'ai grandi dans la région aride de l'Okanagan et je vis encore là. Dans ma vie antérieure, j'ai beaucoup travaillé avec les bandes indiennes du coin, celles de Penticton, d'Osoyoos et de Lower Similkameen. Vous avez mentionné quelques-unes des pratiques traditionnelles qui permettaient de gérer les feux de forêt. Je sais que la Bande de Penticton compte des gardiens du feu qui continuent de faire cela d'une certaine manière, mais je suppose qu'il est difficile d'obtenir la permission d'effectuer ces brûlages dirigés, comme on les appelle dorénavant.
Je ne sais tout simplement pas quels sont les problèmes auxquels vous êtes confrontés là-bas et ce que fait votre bande à ce sujet. Est-ce que votre bande est intéressée à appliquer cette mesure plus souvent? Après les incendies de 2003 en Colombie-Britannique, il y a eu un programme qui devait aider à payer tout ça, tant dans les réserves que dans les municipalités afin de les mettre à l'abri du feu, mais on semble l'avoir oublié.
Je me demandais si vous pouviez nous faire part de vos observations à cet égard.
Actuellement, la collectivité de Tk'emlups a un accord avec la Kamloops Fire Rescue. Lors des feux de forêt cet été, on a fini par avoir plein de sans-abri venant de l'autre côté de la rivière. La situation a créé un vrai problème de sécurité dans la collectivité parce que nombre de ces personnes ont des problèmes de dépendance. Bien souvent, ils abandonnent leurs aiguilles souillées sur nos plages et ainsi de suite. Tous les printemps, nous effectuons les brûlages dirigés. Des membres de la collectivité nous apportent leur collaboration.
Il faut néanmoins examiner la question en tenant compte du facteur humain, de ce qui arrive aux personnes marginales ou vulnérables, et en particulier aux sans-abri, dans ces situations d'urgence. J'ai vraiment l'impression qu'il y a un manque de coordination entre les ministères face à ce volet de la préparation aux situations d'urgence.
Est-ce que vous effectuez ce brûlage du printemps dans les zones extérieures, loin de la rivière, à la lisière de la forêt, cette zone intermédiaire qui risque de subir le plus de dommages en cas de feux de forêt?
Je me tourne maintenant vers M. McDougall.
Nous avons entendu dire que de nombreuses collectivités des Premières Nations ont peu d'infrastructures. On m'a dit que des collectivités n'ont pas de camion d'incendie ni même accès à de l'eau. Je suppose que, là où vous habitez, l'eau est assez facile d'accès.
Vous pourriez peut-être indiquer deux ou trois mesures prioritaires qu'il faudrait que le gouvernement fédéral prenne en lien avec cette infrastructure de lutte contre les incendies.
Le problème qu'on a eu vient du fait qu'à l'heure actuelle, on laisse la plupart des incendies qui sont situés près des collectivités autochtones s'éteindre tout seuls, laissant la nature faire son oeuvre, et on ne prend aucune mesure pour contrôler ou éviter un début d'incendie dans ces parties-là. Pourquoi est-ce que Conservation de la nature Canada n'arrive pas à éviter l'évacuation en éteignant les petits incendies situés près des collectivités? On attend que l'incendie se propage pour intervenir.
Les bombardiers d'eau ont été déployés dans un autre secteur. Dans notre secteur, ils le sont uniquement si l'urgence est réelle. C'est le genre de choses que les gens ne savent pas que ça se produit dans les régions éloignées du pays. Pourquoi est-ce qu'on attend avant d'intervenir et dépense-t-on des millions de dollars pour les évacuations, alors qu'on pourrait éviter ces situations si on intervenait tôt? Autrefois, on demandait que les hommes valides du coin soient formés par des pompiers traditionnels spécialistes des incendies de forêt. En compagnie de ces hommes âgés sachant comment s'attaquer à des incendies, nous serions partis éteindre les petits incendies avant qu'ils ne se transforment en incendies majeurs. De nos jours, Conservation de la nature Canada nous dit de ne pas s'occuper des incendies. Il faut trouver une autre stratégie.
Il est vrai que nous sommes entourés d'eau. Cependant, nous n'avons rien pour pomper l'eau afin d'éteindre les incendies. C'est ce qui se passe. De plus, comme je l'ai indiqué, notre collectivité a déjà été menacée trois fois par un incendie. Nous avons pris l'initiative d'utiliser notre machinerie lourde pour creuser des tranchées coupe-feu et nous avons ainsi réussi à sauver un groupe scolaire de 30 000 $. Si on avait suivi la stratégie employée par le gouvernement, nous aurions probablement perdu l'école et serions encore une fois à la case départ à inscrire notre nom sur la liste pour essayer d'obtenir une nouvelle école.
À d'autres occasions, nous avons appliqué nos propres mesures d'urgence et un minimum de personnes ont dû être évacuées. Cependant, comme dans le cas présent, le gouvernement nous demande s'il est temps de déplacer les personnes qui sont en danger et nous lui répondons oui, que nous le déclarons. C'est cela qu'ils donnent au conseil de la Première Nation concernée. Ensuite, quand ces personnes arrivent dans la ville, elles sont livrées aux caprices du degré d'occupation des chambre d'hôtel. Nous allons à l'hôtel. Nous avons dû déménager les aînés d'un endroit à l'autre pour libérer des chambres qui avaient été réservées à l'avance par d'autres visiteurs ou congressistes, tout ça parce que la province n'avait pas déclaré l'état d'urgence. Deux hôteliers qui gèrent le Radisson ici, en ville ont affirmé qu'en 1997, lors des inondations au sud de Winnipeg, ils avaient été en mesure d'annuler les réservations afin d'accueillir les évacués, de sorte que ces personnes n'avaient pas été bousculées. Elles étaient déjà assez traumatisées comme ça, ils voulaient les laisser à cet endroit-là.
On n'a jamais agi ainsi pour nous. Nous déplacions les personnes âgées, les familles peu nombreuses, d'un endroit à l'autre dans la ville, là où il y avait de la place. Ces personnes ne pouvaient pas rester là, en particulier dans l'enceinte de soccer, parce que le bâtiment n'est pas chauffé en raison des activités athlétiques qui y sont pratiquées. On leur demandait de dormir sur un lit de camp. Si vous avez déjà essayé de dormir sur un lit de toile ou un matelas pneumatique, vous savez que rien ne vous isole du froid. Un ou deux aînés ont souffert d'une pneumonie à cause de cela.
Un point à éclaircir, c'est la valeur du groupe scolaire: c'était 30 000 $ ou 30 millions de dollars?
Merci.
Les questions viendront maintenant du député Anandasangaree.
Avant, nous allons prendre une pause d'une minute ou deux. Étant donné que nous avons commencé tard et que des témoins sont venus par avion, on pourrait peut-être...
Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins d'être là.
Monsieur McDougall, je sais que pas mal de jeunes gens ont été affectés. Pouvez-vous nous indiquer les formes de soutien dont ils ont bénéficié pendant l'évacuation?
On a fait preuve d'une très grande imagination, je dirais, pour les tenir occupés et peinards, mais les gens cherchent à connaître vos limites et ainsi de suite. On a vécu des moments angoissants quand des jeunes gens ont disparu pendant quelques heures.
Du coup, j'aimerais louer les efforts de notre députée, Judy Klassen, qui a invité individus et groupes à venir jouer avec les enfants. L'enceinte de soccer prédisposait à tenter de maintenir l'attention des enfants. C'était une enceinte extraordinaire pour cette raison, et notamment l'aire ouverte, le champ. Les enfants se sont beaucoup amusés, grâce, notamment, à la grillade de saucisses et à des activités à l'intérieur. L'installation favorise en soi du bon temps.
Au centre-ville, au centre des congrès, à l'extérieur, j'ai vu traîner des vendeurs de drogue qui essayaient d'attirer leur attention. J'ai dû intervenir une ou deux fois, moi-même et avec le service de police municipal. Je maintenais le contact avec les policiers et ces derniers m'ont pas mal aidé.
Il n'y avait quasiment rien à faire au refuge situé au centre-ville, au centre des congrès. Il n'y avait pas de douches, et ces gens sont restés là pendant huit jours. Par contre, dans le stade de soccer, du côté nord de la ville, il y avait des douches et tout ce qu'il fallait.
C'est pour cela que nous voulions les sortir de là le plus tôt possible. Il y avait de plus en plus de tension.
Je vous remercie, chef McDougall.
Madame la conseillère Thomas, pouvez-vous nous donner une idée des leçons tirées et de ce que nous pourrions mettre de l'avant dans notre rapport?
Les problèmes de communication avec tant d'organismes différents posent un énorme défi. Ainsi, lorsqu'on a fait l'objet de mesures de confinement quand le tireur traversait notre collectivité, ce fut le chaos total parce que, une fois que la GRC eut demandé de boucler la collectivité, soit les écoles, le personnel du bureau du conseil de bande et les préposés au nettoyage du cimetière, il n'y a eu aucune nouvelle quand au moment où le bouclage serait levé. Ça a créé encore plus de chaos et de traumatismes dans les familles, et en particulier chez les jeunes gens.
Lorsqu'il y a une intervention d'urgence, il faut s'assurer d'offrir un counselling adéquat par la suite. Cet incident a marqué les enfants qui étaient dans l'école. Le lendemain, bien des parents craignaient le retour de leurs enfants à l'école. C'est une leçon à retenir. Il faut vraiment encourager le gouvernement à offrir ce genre de soutien après une situation d'urgence.
Une autre leçon concerne la planification avancée, avec tous les organismes, des préparatifs d'urgence de sorte que nous soyons tous d'accord sur la manière de réagir en cas d'urgence, selon le type d'urgence dont il est question.
Nous n'avions certainement pas prévu les feux de forêt. Nous n'avions certainement pas prévu d'accueillir les évacués. De telles situations mettent à rude épreuve les services existants. Une leçon tirée de cela, c'est qu'il faudrait recruter plus de volontaires à l'avance.
L'entrée en relation avec les bons agents officiels a aussi présenté un défi, parce que différentes sources nous fournissaient des renseignements différents. Tous ne disaient pas la même chose. L'important, c'est de s'assurer que nous communiquons avec les agents pertinents.
Je vous remercie.
Le temps imparti est écoulé.
C'est un problème compliqué où beaucoup de facteurs différents entrent en jeu.
Je tiens à remercier chacun de vous d'être venu à Ottawa, sur le territoire non cédé des Algonquins. Nous vous remercions beaucoup de vous être manifestés.
Chef, merci d'être descendu à Winnipeg. Je sais que d'autres feront part de leur point de vue également.
Nous attendons avec impatience vos recommandations quant à ce qui pourrait être amélioré. Donc, si vous décidez de soumettre un mémoire, nous vous en saurions gré.
Meegwetch tout le monde. Soyez prudents. Bon retour.
Nous allons faire une pause et continuer la séance dans cinq minutes.
Reprenons, je vois que nos témoins sont là.
Par téléconférence, nous avons M. Al Richmond, président du Cariboo Regional District.
Al, vous allez nous expliquer comment vous pouvez donner un éclairage sur les incendies et les mesures d'urgence.
Nous entendrons ensuite, par vidéoconférence, Judy Klassen, députée qui représente le secteur qui a fait l'objet d'une évacuation.
Nous sommes très honorés de votre présence.
Ottawa est situé sur le territoire non cédé des Algonquins. Nous le soulignons parce que le processus de vérité et de réconciliation est en cours.
Les témoins ont 10 minutes chacun pour livrer leur exposé et, ensuite, des questions leur seront posées par les députés qui sont à Ottawa.
Le premier à l'ordre du jour, c'est Al Richmond.
Al, êtes-vous prêt? Vous voulez bien passer en premier?
Je vous remercie beaucoup, madame la présidente, mesdames et messieurs, de l'occasion offerte de vous adresser la parole aujourd'hui.
Je m'appelle Al Richmond et j'occupe la fonction de président du Cariboo Regional District, une administration régionale située au centre de la Colombie-Britannique. La région est vaste et sa superficie est de 80 000 kilomètres carrés. Sa population rurale compte environ 60 000 habitants. Nous comptons 15 Premières Nations et l'une d'entre elles est, bien sûr, la Nation Tsilhqot'in dont les revendications territoriales viennent d'aboutir dans l'affaire William.
Vous avez peut-être appris que notre région avait été gravement touchée par des feux de forêt l'été dernier. Notre centre des opérations d'urgence a été actif pendant un nombre de jours sans précédent, soit 77 jours. Pendant cette période, plus de 211 incendies ont fait rage dans notre région. En raison de ces feux de forêt, nous avons transmis 149 ordres d'évacuation et bulletins d'alerte, ce qui représente un nombre stupéfiant. Dans la plupart des cas de ce genre, nous en transmettons six ou sept, mais la situation ne cessait d'évoluer.
Cet été-là, près de 36 000 habitants du Cariboo ont reçu un bulletin d'alerte et un ordre d'évacuation; ce nombre correspond à environ 60 % de la population du district. En fait, 48 % de la population a été évacuée pendant l'été. Ces chiffres sont les données obtenues concernant les habitants de notre district régional et des municipalités, mais ils ne reflètent pas toutes les répercussions de ces incendies sur les collectivités autochtones dans notre région. Pendant les mesures d'urgence, plus de 167 personnes ont travaillé, car vous pouvez comprendre que l'évacuation de nos bureaux nous a obligés à faire appel à des gens de l'extérieur. Nous avons fait entrer 167 personnes environ pendant la période de 77 jours, et ce, avec l'aide du gouvernement britanno-colombien et diverses administrations locales un peu partout dans la province, afin qu'elles nous aident à remplir les diverses tâches de notre centre des opérations d'urgence. Pour faire fonctionner un centre de cette taille, il faut environ 44 personnes.
La mauvaise nouvelle, c'est que 60 maisons ont brûlé et que 167 autres structures sont disparus, ce qui représente une perte totale de 227 structures. Là où nous sommes très chanceux, et qui nous réconforte, c'est qu'il n'y a pas eu de pertes de vie. Des personnes âgées et des personnes très malades sont décédées, mais pas en raison des incendies; peut-être que leur transfert vers d'autres centres de soins a joué un rôle indirect, puisque les hôpitaux ont dû être évacués.
En Colombie-Britannique, les administrations locales exploitent leur centre des opérations d'urgence pour répondre aux urgences qui relèvent de leur compétence, et nous sommes habilitées à transmettre des ordres d'évacuation et des bulletins d'alerte. Le district régional a le pouvoir de répondre aux urgences et les municipalités et les collectivités autochtones font aussi intervenir leur centre des opérations d'urgence, et tout le monde relève du centre régional des opérations d'urgence du gouvernement provincial. Dans notre cas, il est situé à Prince George et le centre de contrôle est situé à Victoria. En tant qu'administrations locales, nous travaillons ensemble dans la mesure du possible, mais nous avons toutes des autorités supérieures différentes et nous transmettons toutes les ordres d'évacuation et les bulletins d'alerte à nos citoyens.
Pour parler plus particulièrement des Premières Nations en Colombie-Britannique, c'est par résolution du conseil de bande qu'elles donnent l'ordre d'évacuer ou mettent les habitants en état d'alerte. Elles n'ont aucun pouvoir à l'endroit des habitants ou à l'égard de leurs zones parce qu'elles relèvent du fédéral, mais les deux travaillent de concert pour coordonner les ordres et les alertes dans des zones adjacentes. Nous avons très bien travaillé ensemble cet été. Un agent de liaison du gouvernement provincial était présent dans le centre des opérations pendant toute la durée de l'urgence; il aidait à coordonner les communications entre le district régional et les diverses Premières Nations. À leur demande, nous avons inclus les collectivités autochtones dans la liste de diffusion des ordres et alertes par notre programme public de cartographie, de sorte que tous les habitants de la région ont pu voir une carte indiquant tous les endroits visés par une alerte ou un ordre.
Ce que nous voulons dire aux Premières Nations, c'est que nous viendrons leur prêter main forte si elles nous invitent à le faire. Nous devons admettre qu'il y a des gouvernements autonomes. Nous sommes heureux de répondre favorablement à leur demande d'aide, mais nous sommes toujours conscients et respectueux du fait que, sur leur territoire, nous reconnaissons le chef et le pouvoir de ses conseils. Je ne saurais trop insister. Nous sommes ici pour aider. Nous ne sommes pas là pour leur dire comment faire les choses.
Nous avons coordonné l'heure de diffusion de nos ordres avec les Premières Nations et, si ces dernières étaient intéressées, nous y apportions quelques changements dans la mesure du possible. Cela s'est traduit par la diffusion de plusieurs communiqués de presse conjoints, l'organisation de conférences de presse à deux et la tenue d'assemblées publiques conjointes qui ont connu pas mal de succès.
Un problème que nous avons observé dans les collectivités autochtones cet été, c'est que chacune a une compréhension différente de son autorité en qualité d'administration locale. Dans certains cas, leur capacité à intervenir est limitée. Certaines Premières Nations organisaient leur propre centre des opérations d'urgence, transmettaient ordres et alertes et coordonnaient les services d'urgence pour des habitants, et ce, sans problème.
Quant aux autres gouvernements des Premières Nations, une chef se trouvait dans notre bureau et elle ignorait si son conseil avait l’autorité pour faire ce que nous avions fait. Elle croyait que c’était de notre ressort, que nos ordres d’évacuation s’appliquaient à elle, mais je lui ai expliqué que non, qu’elle avait besoin d’une résolution du conseil de bande. Je lui ai dit que nous pourrions, au besoin, l’aider à rédiger cette résolution. Nous étions là pour aider, non pour entraver.
Ils sont donc repartis et ils ont réussi à se débrouiller, mais la chef et moi sommes demeurés en contact étroit tout au long des événements et de l’évacuation. Ce n’était pas le bon moment pour nouer des liens, mais nous avons amélioré nos relations là-bas.
Nous avons également eu des réunions périodiques avec les représentants de la bande pour discuter de la réintégration des gens dans nos collectivités et de la gestion de ce processus. Dans la plupart des cas, j’ai constaté que, même s’il est important que notre personnel communique avec celui des Premières Nations, il est essentiel d’assurer une interaction entre les dirigeants. Si je ne communiquais pas avec les chefs, ils avaient l’impression que je ne les traitais pas sur pied d’égalité. Ils désiraient cette forme d’interaction.
Les chefs ont assisté à quelques-unes de nos premières réunions concernant le retour dans les collectivités. Par la suite, ils ont envoyé leur personnel, et j’ai pu me retirer, étant donné que la discussion avait dorénavant lieu entre les employés. Il nous faut garder à l’esprit qu’il est important de communiquer directement avec eux relativement aux enjeux sérieux.
Dans l’ensemble, notre intervention dans la région a eu d’assez bons résultats. Aucun de nos résidents n’a perdu la vie. Ils ont coopéré et quitté la zone en toute sécurité. Nous avons adapté et amélioré nos politiques et nos processus au fur et à mesure de nos interventions tout en coordonnant nos efforts avec les administrations locales. Cette expérience nous a appris beaucoup de choses.
On peut toujours faire mieux. Permettre aux gens de retourner dans les zones touchées a été un défi, mais nous avons réglé certains problèmes en coopérant avec notre association de producteurs de bovins sur les questions agricoles.
La raison pour laquelle je ne suis pas en mesure de communiquer avec vous par vidéoconférence est que nous avons eu 18 réunions communautaires au cours des deux dernières semaines pour consulter les résidents. Nous voulions les sonder quant aux points forts et aux points faibles, afin de tirer parti de notre expérience au cours de cette année, aller de l’avant et améliorer nos efforts si une telle situation se présente encore à l’avenir. Je prie de tout coeur que personne n’aura à revivre notre expérience de l’été dernier.
Mesdames et messieurs, je termine ainsi mes commentaires d’ouverture. J’apprends toujours davantage en écoutant les autres et je serai donc ravi de répondre à vos questions.
Merci beaucoup.
Merci.
Nous allons entendre la députée provinciale Judy Klassen avant de vous revenir avec des questions, j’en suis sûr.
Judy, soyez la bienvenue devant notre Comité. La parole est à vous; allez-y, je vous en prie. Vous avez 10 minutes pour votre exposé et nous passerons aux questions par la suite.
Merci de m’avoir invitée à prendre la parole. Je suis la députée provinciale de Kewatinook, ici au Manitoba. Ma circonscription comprend 16 collectivités, dont deux sont des villes. Par ailleurs, il s’y trouve 14 Premières Nations, dont 11 sont isolées et accessibles par avion seulement. Et bien sûr, on y retrouve Churchill, qui est maintenant une collectivité éloignée et accessible uniquement par avion.
Les feux de forêt forcent constamment mon peuple à quitter ses maisons et à se réfugier dans des abris et des chambres d’hôtel plus au sud. En général, les gens se rendent à Brandon et à Winnipeg. Cette année, plus de 6 500 personnes des communautés autochtones ont été évacuées de leurs foyers. Toutefois, il n’aurait pas été nécessaire d’évacuer les gens de Island Lake, si des mesures de protection-incendie adéquates avaient été en place, et si Conservation Manitoba avait bien fait son travail. Jusqu’à présent, je n’ai reçu aucun rapport sur les coûts de cette évacuation inutile, mais j’attends patiemment.
À la mi-août, on a soulevé des préoccupations quant à un incendie qui se propageait près de la Première Nation Wasagamack. Les résidents se plaignaient de l’épaisse fumée qui se répandait à travers la collectivité. Certains jours, la fumée était vraiment épaisse en raison de la direction du vent. Les gens, notamment ceux qui ont des problèmes respiratoires, éprouvaient des difficultés en raison de la qualité de l’air. On a dit aux gens que les agents de conservation locaux et les dirigeants surveillaient l’incendie. Une meilleure planification aurait été possible. On avait localisé l’incendie et il était petit, couvrant moins de 700 hectares. L’évacuation de Island Lake n’aurait pas été nécessaire si l’intervention avait eu lieu plus tôt.
Les dirigeants ont, en vain, demandé l’aide des avions-citernes pour éteindre l’incendie. Le chef de la Première Nation Wasagamack, M. Alex McDougall, m’a dit que l’agent de conservation était d’avis que l’incendie qui se trouvait près de sa réserve ne relevait pas de sa compétence. J’ai demandé qu’on fasse enquête à cet égard, mais l’agent de conservation n’a pas encore donné de réponse.
Je dois également souligner qu’un petit feu de cuisine a eu lieu dans un des restaurants de l’île Stevenson, où se trouve le bureau des agents de conservation, et qu’on a fait appel à un avion-citerne pour l’éteindre. Plusieurs des résidents de Garden Hill vivent à proximité et ceux qui se trouvent le plus près de l’île Stevenson sont toujours mécontents à cet égard.
Le 29 août, les dirigeants de la Première Nation Wasagamack ont proclamé l’état d’urgence et certains résidents devaient être évacués de façon prioritaire vers St. Theresa Point et ensuite Winnipeg. Je dois dire que la Première Nation Wasagamack n’a pas de piste d’atterrissage, alors nous partageons la nôtre, qui se trouve à St. Theresa, avec la Première Nation Wasagamack.
Les gens ont dû s’y rendre en bateau. La fumée avait noirci le ciel, ce qui rendait le trajet dangereux. Deux femmes enceintes ont perdu leur bébé dans les jours suivants en raison de ce voyage hasardeux en direction de la Première Nation de St. Theresa. Au départ, seulement 300 personnes devaient être évacuées de Wasagamack de façon prioritaire. Il s’agissait d’ainés, de femmes enceintes et de personnes souffrant de maladies respiratoires. Toutefois, moins d’une heure suivant la proclamation de l’état d’urgence, en raison du changement soudain de direction du vent, tous les résidents de Wasagamack ont reçu l’ordre de se rendre sur les quais pour être évacués vers la Première Nation de St. Theresa Point. Il s’agit d’un trajet de 15 minutes en bateau.
Mon rapport intégral comprend plusieurs recommandations; toutefois, la plus importante prône la construction d’une piste d’atterrissage commune pour les Premières Nations Wasagamack et de St. Theresa Point, laquelle pourrait recevoir de plus gros avions, comme le prévoyaient les plans de l’East Side Road Authority. Je sais qu’on démantelé l’East Side Road Authority à l’échelle provinciale, mais les routes identifiées dans ce projet doivent toujours être construites. Il nous faut un meilleur accès pour des questions relatives à la santé, les opportunités économiques, les matériaux de construction abordables et la sécurité alimentaire. Plusieurs facteurs expliquent pourquoi nous avons besoin de ces routes. Il faut noter, comme je l’ai dit, que Wasagamack ne possède pas sa propre piste d’atterrissage. Les gens doivent se rendre à l’île St. Mary. C’est là où se trouve l’aéroport de St. Theresa Point, lequel nous utilisons. Encore une fois, il s’agit d’un trajet de 15 minutes en bateau pour les gens de Wasagamack et de cinq minutes pour les membres de la bande de St. Theresa Point.
Les avions de la Croix-Rouge n’étaient pas disponibles pour le transport aérien. Par conséquent, presque 200 déplacés ont dû attendre à l’aéroport, tandis que 1 200 membres de la Première Nation Wasagamack ont dû être hébergés dans les écoles de St. Theresa Point.
Suivant la proclamation de l’état d’urgence, les Premières Nations de St. Theresa Point et de Garden Hill ont dû procéder à des évacuations étant donné que l’incendie était passé de 700 hectares à 22 000 hectares, je crois. On a identifié plus de 3 700 personnes qui devaient être évacuées. Nous avons rempli les hôtels lorsque nous sommes arrivés à Winnipeg et à Brandon. La majorité des gens ont été placés dans un abri temporaire au centre des congrès de la RBC et ensuite au complexe de soccer Leila.
Le traitement des évacués dans les abris temporaires était horrible à voir. Les personnes qui venaient de subir des chirurgies à coeur ouvert et des amputations ont été placées sur des lits de camp durs. On leur a seulement donné une couverture misérable. Les édifices étaient très froids, pleins de courants d’air et l’éclairage était éblouissant; or, les gens ne pouvaient pas dormir.
Les aînés et les femmes enceintes étaient placés loin des salles de bains. On critiquait les mères épuisées quand leurs enfants couraient librement en cherchant à s’occuper. Des enfants se sont égarés à l’intérieur de l’édifice, mais les gardiens de sécurité ont refusé de verrouiller les portes afin que nous puissions les retrouver. L’un des enfants a même réussi à monter à bord d’un autobus de la ville. Heureusement, on l’a retrouvée le soir, quatre heures après sa disparition et on l’a ramenée au centre.
Cela s’est produit les premiers jours. Certaines mères n’avaient pas dormi en près de 48 heures parce qu’elles devaient rester à l’école. Les évacués ont dû attendre jusqu’à huit heures avant d’être inscrits, d’avoir la possibilité de manger ou de se détendre confortablement. J’ai demandé au responsable du site de la Croix-Rouge de permettre...
Judy, je dois vous interrompre. Nous avons un problème technique. Vous parlez en français maintenant et nous désirons vous comprendre. Nous vous reviendrons immédiatement. Vous ne serez pas pénalisé.
D’accord, tout est beau. Veuillez continuer.
Les évacués ont dû faire la queue pendant huit heures dans certains cas en raison de la lenteur du processus d’inscription de la Croix-Rouge canadienne, avant même de pouvoir manger ou se détendre. C’était très frustrant.
J’ai demandé au responsable du site de la Croix-Rouge de permettre à nos gens de lui venir en aide relativement aux inscriptions, étant donné qu’il disposait de seulement huit personnes et que deux ou trois d'entre elles étaient peut-être en pause. Or, il n’y avait que cinq personnes pour inscrire les 300 à 400 personnes qui faisaient la queue en même temps. C’était déchirant. Après deux refus, j’ai cessé de lui faire cette demande.
Lorsque son quart de travail a pris fin et que son remplaçant est arrivé, j’ai offert notre aide au deuxième responsable du site et il a accepté. Nous leurs sommes venus en aide quant aux données de base — noms, adresses, dates de naissance — et nous n’avons pas eu à demander aux parents les noms des enfants, parce que nous les connaissions déjà, alors nous nous en sommes sortis. Il en a été de même pour les états de santé. Nos gens étaient au courant des conditions médicales de chacun, ce qui a épargné aux déplacés l’embarras d’avoir à décrire tous leurs problèmes de santé en public, devant des personnes assises à leurs côtés.
Nous avons inscrit 300 personnes en moins d’une heure. À l’arrivée des autobus, il a été facile de s’occuper des gens qui en descendaient.
Les gens étaient affamés. Plusieurs des résidents Wasagamack étaient d’avis qu’on n’aurait pas dû les forcer de quitter St. Theresa, étant donné que les membres de leur bande les nourrissaient beaucoup mieux que la Croix-Rouge. Le grand public manitobain a généreusement fait don de nourriture, de vêtements et d’articles, mais la Croix-Rouge ne voulait pas s’en occuper. Toutefois, nous avons trouvé le moyen d’accepter ces dons, chaque groupe ayant organisé une unité de réception dans les hôtels de Winnipeg.
On permettait aux évacués de manger après leur inscription. Nous avons aussi eu des problèmes d’hygiène et d’installations sanitaires. Toutes les personnes sentaient la fumée à plein nez et elles étaient sales, ayant dormi soit sur le plancher de l’aéroport, soit à l’extérieur, en attendant l’avion. Les aînés, les enfants et les jeunes mères ne pouvaient laver leurs vêtements ou prendre des douches. À l’arrivée des évacués, il n’y avait pas de médecins, d’aides-soignants ou d’infirmières, malgré le grand nombre de problèmes de santé.
Nous devions nous occuper de ces gens de façon prioritaire; tous avaient des problèmes de santé. J’ai composé le 911 lorsque j’étais au Centre des congrès de la RBC pour que les évacués puissent recevoir des soins médicaux, étant donné que le personnel de la Croix-Rouge leur avait dit de s’arranger pour se rendre aux cliniques. N’étant pas résidents de Winnipeg, ils n’avaient aucune idée où elles se trouvaient. On leur a également dit d’aller faire la queue dans les salles d’urgence des hôpitaux.
À l’avenir, les soins médicaux sur place devraient être une priorité pour les évacués, notamment en cas de catastrophe naturelle, afin que les malades et les personnes âgées puissent recevoir les soins dont ils ont désespérément besoin. Plusieurs de nos aînés ont attrapé une pneumonie en raison des courants d’air dans les abris d’évacuation. Par ailleurs, nos nouveau-nés et nos femmes enceintes ont tous de sérieux problèmes de santé en raison de ce qu’ils ont enduré.
Malheureusement, nombre de nos évacués n’ont guère eu plus de chance. Certains hôtels n’avaient pas de restaurant. Même s’ils avaient un restaurant, plusieurs évacués ont du débourser pour se procurer de la nourriture, alors que d’autres ont carrément souffert de faim, car les coupons de repas qu’on leur avait donné étaient insuffisants. De plus, les menus avaient un choix très limité. Peu d’aînés peuvent digérer de la pizza ou des aliments épicés.
Encore une fois, ce sont les gens de mon peuple qui sont venus à la rescousse. Les Premières Nations de la région de Winnipeg nous ont apporté de la viande d’orignal, de l’oie, du poisson et du bannock. Nous avons réussi à trouver des cuisines, même si cela était très difficile...
Pardon, Judy. Je suis désolé, mais votre temps est écoulé. Toutefois, vous pouvez nous soumettre votre mémoire. Nous devons passer aux questions. Je suis vraiment désolé d’avoir interrompu votre exposé.
Nous passons aux questions, en commençant par le député Mike Bossio.
Merci, madame la présidente, et merci à vous deux d’avoir témoigné devant notre Comité. Vous nous avez fait part de renseignements importants qui nous aideront à préciser davantage notre rapport.
Maître Klassen, plusieurs des photos que vous avez affichées sur les sites des médias sociaux ont aidé à mettre en perspective, sur le terrain, les feux de forêt pour les Canadiens partout au pays. Elles ont illustré l’ampleur des feux de forêt et l’émotion des évacués. Quelle partie de cette histoire ne racontent-elles pas? Pouvez-vous nous donner d’autres perspectives qui vont au-delà de ces photos?
Oui. La résilience est l’une des choses pour lesquelles mon peuple est connu. Nous avons la réputation de ne pas partager nos problèmes. En toute confidence, nous avions une mère avec un enfant de deux semaines qui restait debout au milieu de l’abri et elle pleurait à chaudes larmes. Elle était très inquiète quant à l’épidémie d’oreillons qui avait éclaté. Son bébé de deux semaines n’avait pas été vacciné. On ne lui avait pas donné de chambre d’hôtel; elle était tellement découragée que je craignais pour sa vie. Nous avons également un taux élevé de suicide et des gens ont effectivement tenté de se suicider. Des gens se sont enfuis. Des enfants nous ont été enlevés en raison de problèmes liés au syndrome de fatigue chronique. Nous savions que certains de nos évacués étaient des survivants intergénérationnels et des alcooliques, mais nous ne pouvions rien faire pour eux.
C’était vraiment déchirant. J’ai dit aux médias à plusieurs reprises qu’ils n’avaient pas besoin de connaître tous nos problèmes, qu’ils pouvaient simplement me croire que nous étions aux prises avec un profond chagrin.
Merci. Je vous remercie d’avoir partagé cela.
Est-ce que des membres de l’une ou l’autre des Premières Nations de la région ont reçu une formation en gestion des urgences?
Oui, mais le financement a été supprimé à cet égard. C’est injuste. Nous tentons de rétablir ces programmes. Le gouvernement Harper a sabré un grand nombre des programmes destinés aux Premières Nations. Nous en voyons toujours les conséquences. Heureusement, il y en avait un grand nombre et nous collaborons avec le gouvernement dans le but de les rétablir dans les collectivités, mais il s’agit d’un long processus. J’ai fait des propositions et j’attends les réponses.
Lors de notre récent voyage à Winnipeg, dans le cadre de notre étude sur les revendications territoriales, nous avons pris connaissance de la caserne Kapyong.
Nous avons discuté de la pénurie d’hôtels et des gens qui ont dû dormir sur les planchers, les terrains de soccer, les lits de camp, et des aînés qui risquaient de prendre froid et d’attraper une pneumonie, etc. Lors de votre exposé, j’ai pensé à cette caserne qui s’effondrait pratiquement. Serait-ce une bonne idée de la transformer en centre d’évacuation? Je sais que plusieurs personnes sont d’avis qu’on devrait remettre cette caserne aux communautés autochtones, mais nous devrions peut-être examiner la possibilité d’en faire un centre d’évacuation permanent.
À mon avis, la meilleure idée serait de remettre cette caserne aux Premières Nations, étant donné que je suis tout à fait persuadée qu’on y accueillerait les populations autochtones en cas d’évacuation. Mon objectif est de rendre inutiles les évacuations en veillant à ce que nous ayons les connaissances nécessaires. Nous avions jadis des connaissances autochtones sur la prévention des incendies et j’en ai fait état dans ma proposition. Cela ressemble à ce que font les Premières Nations en Colombie-Britannique. Je sais qu’ils ont des idées et que l’aménagement de coupe-feux autour des collectivités fait partie des connaissances traditionnelles. Toutefois, je suis persuadé que ces casernes accueilleraient notre peuple en cas d’évacuation si elles étaient confiées aux Autochtones.
Vous avez fait une très bonne transition qui me permet de poser ma prochaine question sur la prévention et la création d’un poste de commissaire aux incendies qui, une fois de plus, devrait être créé, dirigé et formé par des Autochtones.
Selon vous, quelle différence un commissaire aux incendies aurait-il pu faire durant la période précédant l’état d’urgence au Manitoba?
En effet. Un homme formidable dénommé Ivan Mason vivait dans notre communauté. Il avait des plans à porter de la main. Il a nous a quitté étant donné que son poste a été supprimé, mais lorsqu’il vivait dans notre communauté, nous n’avions jamais besoin de courir dans tous les sens à la dernière minute pour assurer la sécurité de tous.
J’ai déjà affronté un feu de forêt qui a détruit ma maison. Je crois que mon chef en a parlé plus tôt. Il est choquant et triste de souligner que le processus à cette époque était fort différent de celui que les gens ont enduré cette année. On devrait nous écouter. Nous savons comment aider notre peuple. Nos communautés possèdent ces connaissances, mais nous n’avons pas la permission d’agir.
Est-ce qu'un bureau du commissaire aux incendies, alors, garantirait aux Premières Nations une participation adéquate aux plans d'urgence, aux préparatifs, à la prévention, aux décisions d'évacuer ou de ne pas évacuer lorsque surviennent des incendies de forêt? Y voyez-vous une fonction essentielle pour établir un standard de service et assurer la sécurité-incendie dans toutes les collectivités autochtones à travers le pays?
Absolument. Il faut mettre quelque chose en place. Il faut que ces plans soient mis au point. J'ai expliqué que nous avons des exercices prévus pour savoir quoi faire en cas d'évacuation. Il faut quelque chose comme cela pour les Premières Nations. Ma proposition reposait largement là-dessus.
Après notre longue marche depuis Leila Avenue jusqu'au parlement provincial, quelle tristesse de voir notre premier ministre Brian Pallister nous répondre par un gazouillis. Nous sommes une collectivité autochtone à peine desservie par Internet. Nous n'allions pas télécharger l'application Twitter. Voilà comment il m'a répondu. Pourtant, je travaille avec lui à l'assemblée législative. J'ai été choquée d'être traitée de la sorte, au point que j'ai présenté une résolution pour que le gouvernement respecte les dirigeants autochtones comme des gouverneurs à plein titre et qu'il donne un coup de fil.
Nous avons dépassé la limite de temps de part et d'autre. Essayons de faire attention.
Nous allons maintenant à Mme Cathy McLeod.
Merci. Mes questions s'adressent surtout à M. Richmond.
Nous avons entendu Mme Thomas, qui vit au sud de mon secteur. M. Richmond vit au nord, près d'un autre secteur qui a été durement touché. Je dois dire un gros bravo aux gouvernements locaux qui, durant huit ou neuf semaines, ont travaillé entre 16 et 20 heures par jour pour faire face à la situation, aux premières lignes de la lutte contre les incendies. Ils ont déployé énormément d'énergie et d'efforts pour protéger leurs collectivités.
Je sais qu'un des problèmes là-bas, tant chez les éleveurs que chez les Premières Nations, pouvait s'exprimer ainsi: « Nous connaissons notre coin de pays, nous savons comment nous y prendre et si nous restons, nous pouvons prendre des mesures de protection que le gouvernement ne peut pas. » En Australie, il y a un programme qui se traduit par « Soyez prêts, restez et défendez la place, sinon partez vite »; on enrôle même des citoyens et on les forme à intervenir en conséquence.
Monsieur Richmond, avez-vous des commentaires au sujet de ces problèmes en particulier? Évidemment, nous voulons toujours garder les gens en sécurité, mais il y en a aussi qui veulent à tout prix protéger leur terre, leur collectivité et leur gagne-pain.
Je suis content que vous ayez cité le titre au complet parce que ce qu'on a retenu de l'Australie, c'est « restez et défendez », ce qui a causé de la confusion parce que la plupart des gens n'ont pas pesé vraiment les enjeux. Le fait est qu'on entraîne des gens en Colombie-Britannique, chez les éleveurs et chez les Premières Nations. Bien sûr, les nations sont autonomes et elles peuvent rester et défendre leurs collectivités. Nous avons eu une discussion à l'effet que notre service des forêts doit mieux collaborer avec les éleveurs et les aider à protéger leurs terres. Il y a de bons arguments à faire valoir quant à leur connaissance du secteur, à leur capacité de se défendre et au fait qu'une grande prairie à faucher ou un grand champ irrigué a des chances de les garder à l'écart du feu.
Il y a probablement de bonnes choses dans la politique de défense de l'Australie, mais il y en a de mauvaises aussi. Rappelez-vous le Samedi noir en 2009, où 173 personnes sont mortes en défendant leurs maisons. Quelquefois, il était tout simplement trop tard pour les évacuer.
Dans beaucoup de nos évacuations ici, le problème était le manque d'issues. Nous avons dû évacuer des gens parce que nous perdions une voie de sortie, parce qu'il n'y en avait pas tellement pour quitter les lieux. C'est tout un problème.
La formation est primordiale. En Colombie-Britannique, le service des forêts exhorte les gens à suivre les cours. Évidemment, ils ne s'inscrivent pas à temps, puis au beau milieu d'un incendie, ils veulent prendre part aux opérations.
Les éleveurs ont de l'équipement, ils connaissent leur secteur et nous devons — et nous allons — encourager le service des forêts à travailler avec eux.
Pour ce qui est des partenariats, il y a eu des fois où un commandant des interventions qui travaillait bien avec la collectivité locale, avec les éleveurs de l'endroit, s'est fait remplacer par un autre qui pensait différemment. Croyez-le ou non, le nouveau disait aux gens de s'en aller: « Nous n'avons pas besoin de vous, dégagez. »
Je suis avec vous aujourd'hui grâce à la téléconférence. Un des problèmes chez nous, comme au Manitoba sans doute et dans d'autres régions, est que nous dépensons beaucoup pour améliorer les services à large bande et le cellulaire; les statistiques disent quelle proportion de la population est desservie au Canada. La réalité est qu'une grande partie du Canada rural n'est pas desservie. Notre problème de communication est que nous n'avons pas de bande large, pas de services cellulaires pour diffuser nos messages. C'est un énorme problème pour les collectivités rurales et autochtones.
Merci. J'imagine que si le gouvernement fédéral en vient à offrir de l'aide aux éleveurs, il serait peut-être bon d'envisager de faire de même pour les collectivités, de leur offrir aussi ce genre de formation et de soutien.
Je pense que ce serait merveilleux de voir l'aide venir d'un autre palier de gouvernement. Bien entendu, vous avez toujours vérifié régulièrement si vous pouviez nous aider d'un point de vue fédéral, mais il faut encore que la province demande l'aide du gouvernement fédéral. Il faudrait un meilleur partenariat pour que les choses se fassent en temps utile au lieu qu'on attende après la paperasse et l'établissement de tel ou tel état d'urgence.
Je pense qu'il serait très proactif d'avoir une formation en place et qu'elle soit mieux comprise de sorte qu'on puisse équiper nos gens. N'oubliez pas que ces gens-là qui décident de rester et de défendre leur bien doivent savoir qu'il faut être en forme pour y arriver. Ils doivent être capables de se préparer à certaines situations qu'ils vont affronter.
Vous savez bien ce qui est arrivé, madame McLeod, à Loon Lake, où des gens sont restés et ont engagé une société privée pour défendre leur propriété. Ils ont réussi, mais ils ont bien dit qu'ils ne voudraient jamais revivre cela, parce que le feu leur est passé dessus. Heureusement, ils ont survécu. On n'arrête pas un incendie de catégorie cinq ou six. Il avance, c'est tout.
Je pense que nous avons deux exemples très différents devant nous aujourd'hui, deux structures très différentes. En Colombie-Britannique, nous avons une entente avec la province. Les centres d'opérations et les services de soutien d'urgence étaient coordonnés à l'échelle provinciale, avec la Croix-Rouge qui jouait un rôle, mais différent de celui qu'elle a pu jouer au Manitoba.
Je pense qu'il vaut la peine d'essayer de comprendre quel modèle fonctionne un peu mieux. J'ai l'impression que si vous avez la province comme partenaire, la Croix-Rouge comme partenaire et tous les paliers de gouvernement, vous serez un peu plus sensibles peut-être. Au centre des services de soutien d'urgence, je sais que l'inscription est toujours difficile, mais si on confie la direction à des membres de la collectivité locale, y a-t-il moyen d'être plus sensible que si on la confie à un organisme comme la Croix-Rouge?
Je suis d'accord avec vous, madame McLeod, que le succès de nos gens des services sociaux d'urgence tient au fait qu'ils sont bénévoles, mais c'est aussi notre faiblesse. Normalement, nous prenons des gens des régions rurales et nous les évacuons vers nos municipalités. Dans notre cas, nous avons quatre municipalités: deux étaient sous le coup d'un ordre d'évacuation. Il n'y avait pas d'hôpital. Il n'y avait pas d'installations médicales.
J'aimerais faire un commentaire au sujet des préoccupations alimentaires des Premières Nations. Il y a une chose que nous avons apprise très tôt avec nos services sociaux d'urgence. En passant, nous essayons de faire changer le nom de services « sociaux » pour services « de soutien », parce que c'est un élément important. Quoi qu'il en soit, nous avons appris très vite qu'il vaut mieux laisser à des Autochtones le soin de fournir la nourriture, ou leur procurer une nourriture qu'ils peuvent servir à leurs aînés, parce que leurs besoins alimentaires sont très différents de ceux des non-Autochtones. Ils ont du mal à survivre quand ils sortent de chez eux et qu'on les amène dans une ville dont le régime et la nourriture ne leur conviennent pas.
C'est une chose à savoir quand on veut venir en aide aux gens des Premières Nations qui sont évacués vers un centre urbain.
Merci.
Merci à vous deux d'être avec nous aujourd'hui.
Mes premières questions seront pour vous, monsieur Richmond. Merci de vous joindre à nous depuis Anahim Lake. J'ai vécu un petit bout de temps à Riske Creek, de sorte que j'ai une idée de la région. J'ai beaucoup exploré le plateau de Chilcotin. L'incendie qui l'a dévasté cet été était d'une taille phénoménale, aussi je suis content de vous avoir parmi nous pour répondre à quelques questions et livrer quelques réflexions.
Vous avez fait observer que même si le moment était peut-être mal choisi pour bâtir des relations entre collectivités et gouvernements et pouvoirs publics, vous l'avez fait. Je me demande si vous projetez de créer un mécanisme pour entretenir ces relations afin de ne pas les perdre et que nous soyons mieux préparés la prochaine fois.
Nous avions de bonnes relations avec la plupart des collectivités des Premières Nations, des relations que je cultivais depuis six ou sept ans. La difficulté évidemment vient avec les changements de gouvernement.
Le gouvernement change assez souvent chez les Premières Nations, non seulement la représentation politique, mais aussi tout le personnel. Je me trouve donc à refaire une bonne partie du travail tous les deux ans. C'est un défi permanent.
Le problème n'était pas l'absence de relations. Nous avions des relations très solides avec certaines des bandes autochtones. Par exemple, nous connaissions la position de M. Joe Alphonse et de la Première Nation des Tl'etinqox. Ils voulaient défendre leurs biens et ils allaient rester. Nos consignes ne s'appliquent pas à eux.
Ce que j'essayais de dire et que je n'ai peut-être pas bien exprimé, c'est que nous avons cultivé une meilleure entente et une relation plus étroite, plus proche d'une amitié. Une des chefs, la chef Belleau de la Première Nation des Esk'etemc, m'a donné tous ses numéros et m'a dit de l'appeler. Elle-même m'appelait pour me parler des problèmes qu'elle avait dans sa collectivité. C'était un grand soulagement pour elle d'avoir quelqu'un de l'extérieur qui apporterait peut-être son soutien et qui parfois, bien honnêtement, se contenterait d'écouter.
Voilà le genre de relations que nous bâtissons, des relations personnelles. Elle comprenait tout à fait lorsque je lui disais: « Nous voulons vous aider, non pas vous dicter quoi faire. S'il vous faut des autocars, dites-le-nous et nous les obtiendrons. » Nous avons essayé d'aplanir les obstacles.
La province voudrait qu'on les laisse établir leurs propres consignes, mais nous disons que nous sommes là pour les aider à remplir leur paperasse parce que certaines des formalités auxquelles elles doivent se plier pour obtenir leur argent dépasse leur entendement. Nous le savions en 2010. Nous les avons aidées à s'acquitter des formalités administratives dans la mesure de nos moyens. Pour nous, ce sont des êtres humains, des êtres de chair et de sang. Je me fiche de quelle autorité ils relèvent, nous allons aider quiconque nous pouvons aider.
Oui, voilà le genre de relations dont je parlais, les amitiés personnelles. Je me demandais si vous aviez des projets pour établir une sorte de structure qui permettrait de les cultiver par des rencontres régulières.
J'aimerais parler de la participation du gouvernement fédéral à l'intervention d'urgence. La GRC de toute évidence avait un rôle à jouer au centre d'opérations de Williams Lake. Je suis sûr que Cathy a eu son mot à dire dans l'appel à l'aide fédérale. Auriez-vous des commentaires, en particulier sur ce que le gouvernement fédéral a fait et ce qu'il pourrait améliorer à l'avenir?
Localement, nous ne pouvons pas demander l'aide directe du gouvernement fédéral. Nous devons passer par la province. Il a été question très tôt de faire venir l'armée, par exemple, parce que nous avons su très rapidement que la GRC serait débordée. Il y a eu [Inaudible] pour le faire. Une fois la demande rendue, l'armée est arrivée très vite.
Je dois dire que les forces fédérales ont fait un travail admirable. Je n'ai pas rencontré un seul soldat qui n'était pas respectueux. Ils étaient tous heureux d'être là. Ils ne couraient pas autour des baraquements en attendant de trouver à s'occuper. Ils avaient vraiment le sentiment d'aider les gens, d'aider leurs propres concitoyens. Cela faisait une grosse différence pour eux.
Un des auditeurs lors de l'exposé que j'ai fait au récent congrès de l'union des municipalités de la Colombie-Britannique était membre des Forces armées. Il m'a abordé et m'a dit qu'il était là pour en apprendre davantage. Il m'a demandé ce qui, à mon avis, avait mal fonctionné dans le déploiement de l'armée. J'ai répondu que le problème au Canada, c'est que dès qu'on voit accourir les soldats, on pense que la loi martiale est instaurée. S'ils venaient plus souvent faire un tour dans nos localités et qu'on pouvait entretenir des rapports avec eux, il n'y aurait plus ce facteur de peur.
Cela dit, beaucoup de gens les ont accueillis et ont compris pourquoi ils étaient là. Ils étaient venus nous aider et je n'ai jamais senti, à aucun moment, que j'étais sous un régime militaire. C'était juste du bon monde et nous aimons vraiment ce genre de soutien.
Vous verrez la même chose au Manitoba, par exemple, mais dans le Canada rural, nous avons besoin d'aide pour étendre et installer comme il faut le réseau à large bande et le service cellulaire pour être capables de communiquer. Nous sommes devenus dépendants de ces téléphones et nous ne pouvons pas fonctionner sans eux. Ce serait tellement plus facile si nous pouvions communiquer entre nous. Les grandes entreprises de télécommunications n'utilisent plus la vieille technologie des radios VHF, ce qui nous fait un moyen de communication de moins. Nous avons presque l'air du tiers monde avec notre capacité de communication limitée au satellite. C'est un vrai problème pour nous, un de nos plus gros problèmes dans les régions vraiment retirées. Nous avons besoin d'aide pour être desservis par large bande et par cellulaire.
Je suis content que vous le disiez parce que je l'entends dans d'autres contextes à la grandeur du Canada rural.
Madame Klassen, vous nous avez parlé, ainsi que le chef McDougall, de la décision de combattre le feu ou non. C'était de toute évidence un sujet litigieux. Vous avez dit que la décision appartenait en premier lieu à un agent de conservation. N'y a-t-il pas des responsables de la lutte contre les incendies au gouvernement du Manitoba pour prendre ces décisions? Pourriez-vous me dire qui décide?
Il y a un bureau de Conservation Manitoba situé à Island Lake, sur l'île Stevenson.
Ce sont ses agents qui prennent la décision finale. Les dirigeants autochtones peuvent recommander et demander, mais c'est à eux qu'incombe la responsabilité finale.
Oui. Ils montent dans un avion et vont inspecter le secteur, puis ils prennent une décision. Ce n'est pas nous, les dirigeants autochtones, qui pouvons commander directement un bombardier d'eau. Il faut passer par eux.
Merci, madame la présidente.
Merci à nos deux témoins.
Madame Klassen, nous avons entendu avant-hier que la collecte de données de première main était une étape importante pour évaluer en continu la fréquence des urgences liées aux incendies, ainsi que pour établir des plans et des pratiques exemplaires.
Y a-t-il des lacunes dans la collecte de données sur les réserves qui, si on les corrigeait, aideraient à mieux se préparer aux situations d'urgence?
Oui, absolument. Nous avons en général un régime électoral de bande dans nos collectivités. Tous les deux ans, un nouveau conseil de bande est élu et, déjà là, des lacunes apparaissent. Il n'y a pas assez de ressources pour enregistrer les faits et les données. Il se perd beaucoup de choses. Nous avons perdu notre bureau de conseil de bande il y a quelques années à St. Theresa Point et, avec lui, beaucoup de données recueillies d'un incendie de forêt à l'autre.
Il faudrait y consacrer des ressources parce qu'au Manitoba, nous avons perdu 860 000 hectares de forêt à cause des incendies qui se sont succédé annuellement de 1990 à 2015. Nous en avons chaque année. La forêt y passe avec ses animaux, de sorte que nous finissons par perdre notre garde-manger.
Avec l'accélération rapide des changements climatiques, ces pertes se sont produites à 45 % au cours des cinq dernières années.
Voilà de quels ordres de grandeur il s'agit. Nous devons réduire ces pertes.
Nous savons que depuis janvier 2017, Affaires autochtones et du Nord Canada a des ententes d'atténuation, de préparation, d'intervention et de rétablissement en vigueur avec l'Alberta, la Saskatchewan, l'Île-du-Prince-Édouard, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest.
Pourquoi n'y en a-t-il pas encore avec le Manitoba?
Comme en témoigne le hansard, chaque fois que je pose une question à mon premier ministre sur un enjeu autochtone, je me fais dire de m'adresser à mes cousins fédéraux. Ce n'est pas juste, car nous sommes plus de 130 000 ici. Je sais que le Manitoba obtient de l'argent pour les Autochtones, mais nous ne savons pas où va cet argent. On est peu disposé à travailler avec moi au nom des Autochtones du Manitoba.
C'est tout un problème.
Merci beaucoup de votre participation, madame Klassen.
Monsieur Richmond de la Colombie-Britannique, j'aurais aimé vous avoir en vidéoconférence. Ce fut un plaisir de faire votre connaissance aussi.
Merci de votre temps. Meegwetch. Merci de vous être confiés à nous.
La séance est levée.
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