Bienvenue à la 63e séance du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Le Comité se réunit aujourd'hui pour poursuivre son étude sur l'ingérence étrangère dans les élections.
Avant de commencer, je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. La greffière et moi-même tiendrons une liste consolidée des députés qui souhaitent prendre la parole.
Nous accueillons ce soir M. Michael Wernick, titulaire de la chaire sur la gestion dans le secteur public de l'Université d'Ottawa.
Monsieur Wernick, tout d'abord, je suis ravie de vous revoir. Cela fait un certain temps que nous ne vous avions pas reçu, alors je vous remercie d'avoir pris le temps de venir. Merci d'avoir répondu si rapidement à notre demande. C'est très important pour nous.
Je vais vous céder la parole pour votre déclaration préliminaire.
Monsieur Wernick, je vous remercie d'être revenu. Je vous remercie d'avoir été au service de notre pays pendant si longtemps et, surtout, du rôle très important que vous avez joué pour le Canada lors de votre dernière fonction au titre de greffier du Conseil privé.
Je ne vais pas vous poser de questions précises qui vous feraient peut-être risquer de révéler des renseignements qui pourraient être liés à la sécurité nationale. J'aimerais que nous parlions un peu plus du processus, si vous me le permettez.
Si je me souviens bien, vous êtes devenu greffier quelques mois après le début du mandat du nouveau gouvernement, en 2015. À peu près à cette époque, le gouvernement a établi un certain nombre de processus pour répondre aux préoccupations relatives à l'ingérence étrangère dans les élections, comme nous l'avons vu en France, comme vous l'avez mentionné, aux États-Unis et en Grande-Bretagne — au Royaume-Uni, devrais‑je dire.
Pourriez-vous nous décrire certains des processus que vous avez supervisés ou dont vous avez été chargé en prenant vos nouvelles fonctions de greffier du Conseil privé?
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Je vais faire de mon mieux pour reconstituer une chronologie à l'aide de Google. Je vais peut-être me tromper dans l'ordre.
Oui, j'étais sous-greffier en 2015. J'ai été nommé sous-greffier par le premier ministre Harper et je suis resté pour la transition et les premiers jours du mandat de M. . Il m'a nommé greffier en janvier 2016, et j'ai assumé ce rôle durant les trois années suivantes.
Il y avait plusieurs choses en jeu à l'époque.
Une des premières priorités du gouvernement, vous vous en souviendrez peut-être, a été de créer le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement afin de donner à un groupe de parlementaires ayant les autorisations de sécurité appropriées un aperçu des questions de sécurité nationale et de renseignement. Le projet de loi était une des premières initiatives du gouvernement.
De plus, un certain nombre d'initiatives étaient en cours, de sorte que lorsque nous sommes arrivés en 2017, la période qui vous intéresse ici, il y avait pas mal de choses en jeu. Le projet de loi , qui était une refonte complète de la législation sur la sécurité nationale, a été lancé fin 2016 ou début 2017. Nous étions très préoccupés par les questions de désinformation. Il est de notoriété publique que la Russie de Poutine a tenté de perturber les élections en France en mai 2017 et qu'elle a tenté de perturber les élections en Allemagne en septembre 2017.
À l'époque, la cybersécurité était un enjeu de taille. Les députés qui sont ici depuis assez longtemps se souviendront des cyberattaques de la Chine contre le Conseil national de recherches qui ont été dénoncées par le gouvernement Harper — par le ministre Baird — au début 2014. Personnellement, j'ai beaucoup mis l'accent sur la cybersécurité, les communications sécurisées pour le et pour le Cabinet, ainsi que les investissements dans la cybersécurité, qui ont abouti au budget de 2018.
Je pourrais continuer, mais cela vous donne une idée de ce qui se passait à ce moment‑là.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Wernick, je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui.
J'aimerais poser quelques questions en lien avec l'entrevue que vous avez accordée à Mme Esther Bégin, qui a été diffusée sur la Chaîne parlementaire canadienne, ou Cpac, il y a environ un mois. J'aimerais rebondir sur les questions posées et sur les réponses que vous aviez données.
Vous aviez notamment mentionné que l'idéal ne serait pas qu'un juge préside l'éventuelle commission d'enquête publique, mais plutôt quelqu'un qui a une bonne connaissance en matière d'analyse de renseignements.
Est-ce exact et, si c'est le cas, pourquoi?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Comme toujours, toutes mes questions s'adressent à la présidence.
Je remercie le témoin d'être ici aujourd'hui. J'ai vraiment apprécié certains éléments de son témoignage.
Je pense que c'est difficile. C'est une discussion difficile. Au bout du compte, ce qui me préoccupe, c'est que les Canadiens se méfient de plus en plus de nos systèmes. Cela m'inquiète. Il est difficile de trouver un moyen de composer avec cette situation très précaire.
Je tiens tout d'abord à remercier le témoin d'avoir servi le Canada.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Je pense que la meilleure façon d'aller de l'avant, c'est de poursuivre le processus.
Je sais que le président des États-Unis a la capacité de déclassifier des renseignements au besoin, par exemple, lorsque le gouvernement a des renseignements classifiés qui pourraient être communiqués et qui permettraient de tirer les choses au clair et de rassurer les gens sur ce qui se passe. Sans parler, bien sûr, des sources ni divulguer des renseignements sur les méthodes de collecte. Je sais que cela impliquerait d'y réfléchir sérieusement.
Pensez-vous que nous devrions explorer cette piste au Canada? Vous avez beaucoup parlé d'examiner la législation et d'aller de l'avant. Je pense à certaines de ces situations. Si des renseignements recueillis dans le cadre de la sécurité nationale peuvent être divulgués sans risquer de nuire à qui que ce soit, ni à nos relations avec d'autres pays, y a‑t‑il un moyen de le faire en temps opportun afin de réduire les tensions?
Avez-vous des remarques à formuler au sujet de ce processus aux États-Unis et de ce que nous pourrions mettre en place au Canada?
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C'est une très bonne question.
Je pense que c'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons un comité de parlementaires auxquels des renseignements classifiés peuvent être divulgués. Cela crée un dilemme, comme nous l'avons constaté, car que peuvent faire alors ces parlementaires de cette information? Je pense qu'il est utile que les chefs des partis de l'opposition soient informés et acceptent les séances d'information sur la sécurité lorsqu'elles leur sont recommandées.
Je ne suis pas avocat, mais je sais que la loi canadienne prévoit la déclassification et la communication de renseignements. C'est en fait le greffier du Conseil privé, qui est le secrétaire des documents du Cabinet, qui en est le gardien.
J'ai approuvé la publication des documents pour le procès du vice-amiral Norman. J'ai autorisé la divulgation de documents pour d'autres raisons. En ce qui concerne la commission Rouleau qui a examiné les événements survenus à Ottawa l'an dernier, je crois que mon successeur aux fonctions de greffier a remis des documents classifiés au juge Rouleau. Il y a des mécanismes au Canada pour cela. Il est toujours possible de les modifier.
Soyez prudents parce que l'une des conventions veut que vous ne divulguiez pas les documents d'un gouvernement précédent. J'étais le gardien des documents des gouvernements précédents lorsque j'étais greffier et il y a eu des demandes de divulgation de documents datant du gouvernement Harper pour ce procès. J'ai dû communiquer avec M. Harper pour obtenir son consentement.
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Merci. C'est extrêmement utile.
En ce qui concerne les questions que mon collègue vous a posées tout à l'heure au sujet des enquêtes publiques et du fait que, peut-être, quelqu'un de l'extérieur du pays soit à la tête de ces enquêtes, je pense que c'est une idée novatrice et intéressante.
Nous avons entendu beaucoup de témoignages selon lesquels l'ingérence étrangère est en train de changer. Il y a de nombreux pays — vous y avez fait allusion dans votre témoignage —, alors je pense qu'il est injuste de se concentrer sur un seul pays en particulier. Nous savons que les choses changent rapidement et que nous devons réagir de façon très énergique et travailler en étroite collaboration avec les pays avec lesquels nous avons des partenariats.
Compte tenu de l'évolution constante de la situation, devrions-nous discuter des processus qui nous permettent d'établir des partenariats avec d'autres pays avec lesquels nous entretenons des relations étroites. Cela nous permettrait de surveiller la situation si elle devient problématique dans notre propre pays?
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Merci, madame la présidente, et merci à notre témoin.
Merci, monsieur Wernick, d'avoir prouvé que lorsque l'on quitte la fonction publique, on ne le fait jamais complètement. Je suis heureux d'avoir l'occasion de vous poser des questions.
Vous étiez greffier du Conseil privé en janvier 2019. Est‑ce exact?
M. Michael Wernick: Oui.
M. Blaine Calkins: Dans le courriel que vous avez envoyé au Comité, vous avez dit que pour: « la production des documents, il serait peut-être plus utile de demander les extraits du registre des documents ». Dans ce paragraphe, vous dites:
Le bureau du greffier tenait un registre de tous les documents transmis au PM par le BCP. Ces documents sont de deux types: notes pour décision et notes pour information ne nécessitant pas la prise d'une décision. Le BCP doit constamment faire des démarches pour obtenir un « retour » du Cabinet du premier ministre. Le CPM accuse réception de la plupart des notes ou les retourne, mais certainement pas dans tous les cas.
J'ai en main un document émis par le Bureau du Conseil privé en date du 17 janvier 2019, date à laquelle vous étiez greffier du Conseil privé. On peut y lire:
Activités d'espionnage et d'ingérence étrangère
La Chine est toujours l'auteur le plus actif et le plus sophistiqué des activités d'espionnage et d'ingérence étrangère au Canada.
L'espionnage est la collecte parrainée par un État et par des moyens clandestins, d'informations politiques, économiques ou de sécurité sensibles.
Les activités d'ingérence étrangère désignent les actions d'acteurs étatiques, de mandataires ou d'acteurs cooptés qui sont secrètes, trompeuses ou coercitives, qui vont au‑delà des activités diplomatiques normales ou acceptables et qui visent à induire en erreur ou à compromettre activement l'État hôte.
Il s'agit en gros d'un document caviardé, mais je n'ai lu que les parties auxquelles j'ai accès en tant que parlementaire. Dans vos réponses précédentes aux questions de M. Cooper, vous avez soutenu au Comité que vous ne vous souvenez d'aucune façon d'avoir eu des discussions au sujet de l'ingérence étrangère de la Chine. Cependant, j'ai ici un document émanant de votre bureau, dont vous étiez le greffier à l'époque, qui dit: « La Chine est toujours l'auteur le plus actif et le plus sophistiqué des activités d'espionnage et d'ingérence étrangère au Canada », activités que le document définit ensuite.
Pouvez-vous m'expliquer cela, monsieur Wernick? Comment est‑ce possible que vous ne soyez pas au courant de l'ingérence étrangère de la Chine, étant donné que vous étiez greffier du Conseil privé à l'époque?
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Je peux reconstruire la séquence des faits.
Nous avions vu les Russes s'ingérer dans les élections françaises de 2017, ainsi que dans les élections allemandes de 2017. Nous avons appris un peu plus tard qu'ils s'étaient aussi ingérés dans les élections américaines de novembre 2016. En Australie, on avait fait grand cas d'une possible ingérence de la Chine dans la politique australienne. Je suis certain que quelques-uns d'entre vous ont lu le livre qui est paru en 2018 en Australie à ce sujet. L'Australie a légiféré sur l'ingérence étrangère aux alentours de décembre 2017 ou janvier 2018.
La question qui se posait était la suivante: si les services de sécurité et de renseignement avaient connaissance de tentatives visant à perturber les élections... et cela pourrait se faire de façon très subtile par la désinformation. C'est ce qui s'est passé dans les élections en France, de la désinformation par des cyberattaques et dans les médias sociaux. Il pouvait y avoir aussi des attaques par déni de service contre Élections Canada, ou par toute sorte de moyen d'ingérence dans le processus électoral. Qui allait s'en occuper?
Si c'était le ministre du moment ou le premier ministre du moment, ils étaient en pleine campagne électorale. On aurait pu les accuser de sonner l'alarme pour des raisons politiques ou de retenir des renseignements pour des raisons politiques. Il était donc important de trouver quelqu'un qui puisse donner l'alerte d'ingérence étrangère pendant une campagne électorale, pendant la période de transition.
Les idées que je me rappelle avoir proposées étaient la nomination d'un commissaire indépendant, ou le groupe de hauts fonctionnaires que nous avons constitué en janvier 2019. J'ai recommandé au d'y aller avec ce groupe qui a été créé en 2019 et qui est en place depuis.
À ce propos, j'aimerais parler un peu du CPSNR, le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. Quelques collègues en ont parlé. On entend souvent dire que c'est un comité secret qui fait du travail clandestin. Vous étiez là au moment de sa création.
Plus tôt aujourd'hui, je regardais les délibérations du comité de la sécurité, où le président du CPSNR faisait un exposé et répondait à des questions sur le CPSNR. Je crois que vous étiez greffier à l'époque de sa création et que vous avez reçu quelques-uns de ses premiers rapports. Lorsqu'on entend les mots « comité secret », l'idée qui vient à l'esprit est qu'il s'y fait du travail clandestin et qu'on ne veut pas que cela se sache.
Pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, pouvez-vous expliquer un peu la différence entre un comité secret clandestin et l'importance de comprendre les renseignements classifiés en ce qui concerne la sécurité nationale et nos partenaires du Groupe des cinq, et ce qui pourrait s'ensuivre pour la communauté du renseignement si nous manquons de rigueur avec des renseignements sensibles?
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C'est une très bonne question. Je recommande d'aller télécharger le projet de loi et d'y jeter un coup d'œil.
Essentiellement, toute loi canadienne suivrait à peu près le même modèle. Tout d'abord, vous devez créer une nouvelle infraction et un ensemble de peines. Cela vous amène aux définitions. Qu'est‑ce qu'on entend par « ingérence étrangère »? C'est différent de l'espionnage, de la trahison, du sabotage, de la déception ou de la désinformation. La loi britannique et la loi australienne définissent l'ingérence étrangère.
Votre comité pourrait recommander au gouvernement une définition de l'ingérence étrangère. Vous devez définir ce qu'est un agent étranger. Est‑ce que c'est toujours un agent de l'État? Qu'en est‑il des activités étrangères qui sont blanchies par des cabinets d'avocats, des sociétés, des groupes de réflexion, etc.? Est‑ce que l'Institut Confucius ou l'Alliance française font de l'ingérence ou s'agit‑il seulement de diplomatie culturelle?
Il ne sera pas facile de trouver les définitions justes. Le projet de loi australien entraînait des modifications à une vingtaine d'autres lois australiennes. Il y a toutes sortes de répercussions à prévoir pour d'autres lois. Vous devez déterminer si quelqu'un a agi en pleine connaissance de cause ou s'il l'a fait sans se soucier des conséquences.
Je ne me lancerai pas dans la rédaction — ce n'est pas mon fort —, mais vous pouvez suivre le modèle australien et le modèle britannique et voir le genre de problèmes que vous, les parlementaires, aurez à régler. Il y a 39 millions de Canadiens et vous êtes seulement 338 à pouvoir rédiger des lois. Vous pourriez prendre la loi britannique comme première ébauche et, en travaillant de concert, je pense que vous pourriez régler ces problèmes dans une loi de facture canadienne en l'espace de quelques mois.
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Merci, madame la présidente. [
Difficultés techniques] de bonnes recommandations que le Comité pourrait formuler et que le gouvernement pourrait tirer de cette réunion également.
Je tiens aussi à remercier le témoin d'avoir contribué à la création du centre de cybersécurité. Brampton, la ville d'où je viens, a pu bénéficier d'une partie du financement prévu dans ce budget‑là, en obtenant un centre de formation en cybersécurité, une chose dont nous avons grand besoin, je crois.
Ce sont justement des questions comme celles‑là qui m'empêchent de dormir la nuit. Comme je siège à ce comité depuis de nombreuses années, je sais que la façon dont nous protégeons nos institutions démocratiques et notre processus démocratique, et l'incidence que la désinformation et toutes ces choses peuvent avoir sur nos comportements et nos réactions, ont vraiment changé et infléchi le cours des choses.
J'ai aussi été très touchée par des propos que vous avez tenus au comité de la justice en 2019. Vous avez dit:
Je suis actuellement très préoccupé par rapport à mon pays, à ses politiques et à son orientation. Je m'inquiète au sujet de l'ingérence étrangère au cours des prochaines élections, et nous travaillons d'arrache-pied à ce sujet. Je m'inquiète de la montée en puissance des incitations à la violence lorsque des gens utilisent des termes comme « trahison » et « traître » dans des discours ouverts. Ce sont les mots qui mènent à des assassinats. Je m'inquiète du fait que quelqu'un puisse se faire abattre au pays durant la campagne politique cette année.
Cela fait plus de quatre ans que vous avez tenu ces propos. Avez-vous l'impression que les choses se sont améliorées, ou est‑ce qu'elles ont empiré?
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Merci pour ce retour en arrière.
De toute évidence, les choses ne se sont pas améliorées. Le climat politique s'est détérioré, le pouvoir de la désinformation s'est accru, et nous devrions tous nous en inquiéter. Ce n'est pas facile à enrayer. S'il y avait des solutions faciles à la désinformation dans les médias sociaux, on les aurait appliquées dans d'autres pays. Il n'y en a pas, et vous allez devoir continuer à vous débattre avec cela pendant de nombreuses années.
Ce que vous pouvez faire par contre, c'est changer la teneur du discours politique entre vous. Avec tout le respect qui vous est dû, je pense que les Canadiens ont besoin de voir leurs élus — vous, qu'ils ont choisis — travailler dans la collaboration et le respect. Bien sûr, il faut demander des comptes au gouvernement, mais il y a des moments où l'intérêt national commande de faire cause commune et de rédiger les lois qui touchent les autres Canadiens.
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Je suis tout à fait d'accord avec vous. Ces derniers temps, et même actuellement, nous voyons des députés s'abaisser à des comportements indignes de leur rôle, en utilisant quantité de mots de ce genre.
Vous êtes passé par là vous-même. Lorsque vous étiez greffier du Conseil privé, on vous a aussitôt accusé d'être partisan, même si vous avez occupé cette fonction sous deux partis différents. Morris Rosenberg aussi a été accusé de copinage libéral. Le ne s'est pas gêné non plus pour décrire le très honorable David Johnston comme le « compagnon de ski » et le « voisin » du premier ministre.
Beaucoup de ces attaques partisanes contre des personnes crédibles et de ces campagnes de dénigrement menées contre des fonctionnaires de longue date... Il semble qu'il n'y ait plus de limite à ce que les gens peuvent dire si cela sert leurs intérêts politiques, jusqu'à salir les médias, comme nous le voyons maintenant. Cela n'a pas aidé que Twitter ait créé ses propres politiques qui poussent à imaginer encore des théories complotistes pour s'en prendre aux médias.
Où en sommes-nous maintenant? Selon vous, comment pouvons-nous nous éloigner de tout cela et faire en sorte qu'on fasse confiance à nos journalistes indépendants, qu'on respecte nos fonctionnaires et qu'on défende nos institutions?
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Merci, madame la présidente.
Je vous remercie de l'invitation.
Je félicite le Comité pour cette étude. Il est primordial que les Canadiens puissent compter sur une démocratie exempte d'ingérence étrangère, autant lors d'élections que dans son expression quotidienne.
Je suis heureux de vous rencontrer, mais je ne peux divulguer d'informations classifiées, comme vous le savez. Je suis tenu au secret comme les autres. Par conséquent, j'ai choisi de discuter de certains épisodes en matière d'ingérence étrangère qui sont du domaine public et qui pourraient vous être utiles dans vos travaux.
Bien que je sois retraité depuis cinq ans, je demeure impliqué dans ces dossiers comme professionnel en résidence à l'École supérieure d'affaires publiques et internationales de l'Université d'Ottawa et comme administrateur du conseil d'administration de l'Institut de la Conférence des associations de la défense.
[Traduction]
Examinons quelques épisodes qui appartiennent au domaine public.
Le 15 juillet 2015, deux semaines avant le début de la campagne électorale, alors que j'étais sous-ministre des Affaires étrangères, le bureau du protocole du ministère des Affaires étrangères a tenu à rappeler aux missions diplomatiques étrangères l'obligation de la Convention de Vienne de ne pas s'ingérer dans les affaires du pays hôte. À une époque où le public n'était pas aussi sensibilisé à l'ingérence étrangère au Canada, on nous a reproché d'avoir servi cette mise en garde.
En septembre 2016, un des premiers actes majeurs de cyberingérence étrangère visait une institution internationale, soit l'Agence mondiale antidopage à Montréal, ainsi que plusieurs de ses partenaires internationaux, dont le Centre canadien pour l'éthique dans le sport, dans le cadre d'une importante campagne de désinformation visant à riposter aux sanctions imposées à la Russie par l'AMA et le mouvement olympique. Bien que de nombreux médias étrangers aient fait état de l'incident, les médias canadiens ne s'y sont pas intéressés avant octobre 2018, lorsque le Canada et d'autres pays ont attribué cet acte d'ingérence au GRU, l'organisme russe de renseignement militaire.
Peu de temps après, les mêmes agents du GRU étaient de nouveau à l'œuvre lors des élections américaines de 2016, avec des méthodes et des tactiques semblables. En janvier 2017, quelques jours avant la transition, le président Obama a déclassifié une partie des renseignements recueillis par les organismes de sécurité nationale des États‑Unis. Son geste a eu une incidence limitée, ce qui soulève des questions importantes pour votre travail, comme l'indépendance de la personne qui va intervenir pour divulguer l'information; la fiabilité des renseignements, parce qu'ils étaient vraiment de fraîche date; et le moment choisi pour agir de la sorte, quelques jours à peine avant l'arrivée d'un président issu d'un autre parti.
En juillet 2018, à la suite d'une enquête approfondie, l'avocat spécial Robert Mueller a porté des accusations contre 12 officiers du renseignement militaire russe, appartenant au même GRU.
En octobre 2018, les États‑Unis et plusieurs pays dont le Canada ont condamné les agissements d'agents russes dans l'empoisonnement de la famille Skripal au Royaume‑Uni, leurs tentatives d'ingérence dans l'enquête de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques aux Pays‑Bas; et l'attaque contre l'AMA de Montréal et ses partenaires, dont le Centre canadien pour l'éthique dans le sport. Les autorités américaines ont porté de nouvelles accusations contre sept agents russes du GRU. Trois d'entre eux avaient aussi été inculpés dans le contexte des élections américaines.
[Français]
Parlons un peu des mesures.
Ces divers incidents ont motivé plusieurs des mesures discutées récemment dans vos réunions, par exemple: des modifications à la Loi électorale du Canada; une évaluation annuelle par le Centre de la sécurité des télécommunications, le CST, des risques de cyberingérence étrangère; de même que des séances d'information offertes à tous les partis politiques. Par la suite, puisque ces risques sont tout aussi présents dans l'univers analogique, des mesures semblables ont été prises par le Service canadien du renseignement de sécurité. Ces mesures ont progressivement évolué vers les mécanismes d'observation et la directive sur le protocole d'intervention en période électorale, dont vous avez discuté au cours des dernières séances et dont vous venez de discuter avec M. Wernick à la fin de sa comparution.
Cela m'amène aux questions soulevées dans les publications du Globe and Mail et de Global News. D'une part, je ne peux discuter des informations de juin 2017 alléguées dans un des articles de Sam Cooper de février 2023. D'autre part, j'ai pris ma retraite en mai 2018, soit avant la date des autres informations alléguées. Dans ce contexte, mes propos se basent strictement sur mon expérience professionnelle et sur l'intérêt que je maintiens pour ces questions à titre personnel.
[Traduction]
D'une part, il est essentiel d'assurer aux Canadiens que toute allégation grave d'ingérence étrangère, que ce soit lors d'une élection ou dans un autre aspect de notre vie démocratique, fera l'objet d'un examen rigoureux. J'espère que les différents examens qui ont été entrepris feront la lumière sur les informations alléguées et, ce qui est tout aussi important, qu'ils sauront éclairer la politique publique sur les mesures nécessaires pour équiper les agents institutionnels compétents en matière de prévention, de dissuasion et d'application des conséquences.
La proposition d'un registre de l'influence étrangère mérite considération, mais ce ne peut être qu'un élément d'une stratégie plus vaste, comme le suggèrent des rapports antérieurs d'organisations comme le groupe de travail sur la sécurité nationale de l'École supérieure d'affaires publiques et internationales à l'Université d'Ottawa, ou le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement.
Cependant, la lecture des différents articles fait courir le risque de confondre renseignement et preuve. Je vous encourage à lire attentivement la lettre d'opinion de la professeure Stephanie Carvin sur ce qu'est le renseignement et ce qu'il n'est pas.
Je détiens une cote de sécurité de niveau très secret depuis plus de 25 ans. Bien que le renseignement soit essentiel pour mieux comprendre une menace, il n'y a pas grand-chose dans ce que nous pourrions recueillir qui justifie l'intervention d'autorités compétentes. Même dans ce cas, il y a souvent des réticences à s'en servir en raison de la nécessité de protéger les méthodes et les sources, ou de la lacune législative qui empêche de présenter des renseignements comme éléments de preuve tout en permettant une défense équitable.
Dans ce contexte, votre examen et tous les autres en cours sont non seulement essentiels pour faire la lumière sur l'information alléguée, mais aussi pour procurer au Canada et aux Canadiens la trousse d'outils qui leur permettra de contrer l'ingérence étrangère dans tous les aspects de leur vie démocratique.
[Français]
Merci.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Monsieur Jean, je vous remercie de votre travail pour notre pays et de votre rôle névralgique sur le plan de la sécurité des Canadiens. Je vous en suis très reconnaissant, tout comme le sont certainement tous mes collègues du Comité.
Depuis 2015, le gouvernement a notamment créé le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement ainsi que l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, c'est-à-dire le CPSNR et l'OSSNR, afin qu'ils examinent les questions liées à la sécurité nationale du Canada.
Diriez-vous qu'il s'agit des meilleures tribunes pour parler d'ingérence étrangère et des mesures prises par le gouvernement, compte tenu de la nature délicate de la situation? Pourriez-vous nous expliquer pourquoi?
D'ailleurs, ce matin, les membres du Comité permanent de la sécurité publique et nationale ont eu une belle discussion à ce sujet précisément avec le président du CPSNR, qui était venu témoigner.
Monsieur Jean, j'aimerais vous poser une question que j'ai aussi posée à M. Wernick. Vous ne l'avez pas entendue, car vous n'étiez pas encore dans la salle. Je ne vous demande pas de dévoiler des secrets nationaux, mais simplement de parler du processus.
Le gouvernement actuel a mis en place un groupe non partisan composé de sous-ministres et d'experts ayant pour mandat de se pencher sur les incidents électoraux majeurs, dans le contexte de la Directive du Cabinet sur le Protocole public en cas d’incident électoral majeur. Le gouvernement a aussi mis en place le CPSNR et l'OSSNR.
S'il était à ce point nécessaire, en 2015, de mettre ces outils en place, comment se fait-il que ce besoin n'ait pas existé avant? Pourquoi n'a-t-on pas créé ces institutions avant l'arrivée au pouvoir du présent gouvernement? Est-ce que le contexte avait changé?
Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, de toute évidence, il faut avoir une stratégie qui doit comprendre certains éléments. Je vais parler de certains d'entre eux. Le registre des agents étrangers en est un, mais ce n'est pas une panacée en soi. Il est très important pour moi de rappeler que l'ingérence étrangère est beaucoup plus vaste que la seule question électorale. En fait, il peut y avoir de l'ingérence dans des partis politiques entre les élections. Il ne faut pas juste se concentrer sur les élections. Il faut donc une stratégie et certains outils doivent être affûtés.
Par exemple, depuis la Commission d'enquête sur l'affaire Air India, on ne s'est pas encore donné les outils législatifs nécessaires pour aller chercher et protéger des renseignements qui sont assez solides pour être utilisés comme éléments de preuve et ainsi s'assurer d'une défense juste devant des personnes contre lesquelles on veut déposer des accusations. Ce qu'on a présentement, c'est une béquille. Cela doit donc être revu.
Comme M. Wernick en a parlé, on a beaucoup renforcé les agences de cybersécurité par l'entremise de la Loi de 2017 sur la sécurité nationale, mais il n'y a pas eu de révision en profondeur de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité depuis sa création en 1984. Pendant ce temps-là, on a connu une évolution numérique très importante. Il y a donc énormément d'outils qui doivent être revus.
J'ai participé à la rédaction du rapport qui a été fait par l'Université d'Ottawa, l'année dernière...
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Il y a deux éléments à préciser.
Tout d'abord, en ce qui concerne la question de la société et des médias qui, progressivement, deviennent de plus en plus sensibilisés, je veux être très clair. Par exemple, The New York Times, The Guardian et plein d'autres réseaux dans le monde ont parlé de ce qui se passait à l'Agence mondiale antidopage, à Montréal, alors que les médias canadiens n'avaient pas vu cela. Pour moi, c'était un signe que, à ce moment-là, le public n'était pas sensibilisé à cela. Ce n'est pas différent de ce qui est arrivé aux États‑Unis lors des élections. Parmi les agences de nouvelles étrangères, une journaliste du Washington Post expliquait à un moment donné que les journalistes avaient l'impression d'être tombés dans la jarre à bonbons. Toutes ces informations visant les élections leur étaient communiquées et ils écrivaient des articles à ce sujet, jusqu'au jour où ils ont commencé à se demander qui leur envoyait ces informations et si quelqu'un était en train de les manipuler. C'est d'ailleurs ce que l'enquête a démontré plus tard.
En ce qui concerne le deuxième élément que vous avez soulevé, je ne veux pas me prononcer sur le forum qui sera choisi. La préoccupation que j'ai quant aux commissions d'enquête, c'est le temps que cela prend, alors qu'à mon avis, il est urgent de prendre les bonnes mesures.
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Merci, madame la présidente.
Bien sûr, c'est toujours à la présidence que je m'adresse, et je tiens à remercier le témoin de sa présence aujourd'hui.
Je suis très heureuse de vous voir, car j'espère que vous pourrez clarifier un point.
J'ai posé une question sur la capacité du président des États-Unis de déclassifier des informations au besoin. S'il se révélait possible de fournir des renseignements classifiés pour tirer au clair une question importante pour le pays, il est permis de les déclassifier sans toutefois divulguer les sources ou les méthodes de collecte.
Mme Telford a répondu à ma question en disant qu'elle s'interrogeait à ce sujet. Je paraphrase. Lorsque j'ai posé une question semblable à M. Wernick, il a dit que cela pouvait arriver. Dans votre témoignage, vous avez donné des exemples précis pour illustrer comment cela s'est fait.
Pourriez-vous nous expliquer, sans donner les détails, comment cela se ferait, et peut-être nous dire un mot des règles que nous avons déjà au Canada? Y a‑t‑il quoi que ce soit que nous devrions changer ou explorer à ce sujet? À votre avis?
Je ne voudrais pas que l'information soit déclassifiée, c'est évident, mais si elle était révélée, cela pourrait calmer les esprits et rassurer un peu les Canadiens. Parce que nous n'avons pas les bons outils... mais je ne comprends plus très bien. Avons-nous les bons outils, et pourriez-vous nous dire si nous avons quelque chose à y ajouter pour les renforcer?
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Soyons clairs. Dans les postes que j'ai occupés, je n'ai jamais eu à travailler dans le domaine de la collecte ou de la garde de renseignements. J'ai toujours été un consommateur. Je ne suis pas nécessairement le plus grand expert en la matière. C'est une question qu'il vaudrait beaucoup mieux poser à David Vigneault ou à Caroline Xavier du Centre de la sécurité des télécommunications, ou CST.
Cela dit, de façon générale, si nous jugeons qu'il est dans l'intérêt public de... Lorsque nous disons « déclassifier », cela ne veut pas dire que nous allons vous remettre le document. Cela signifie simplement que nous allons décider que nous allons rendre publique une partie de l'information classifiée, parce que nous pensons qu'il y va de l'intérêt public, comme nous l'avons fait en 2014 dans le contexte de l'attaque contre le Conseil national de recherches et dans le contexte de l'attribution dont j'ai parlé dans mes remarques.
Notre système est bien différent. Ces décisions ne viennent habituellement pas du côté politique. Elles découlent habituellement de conversations où les fonctionnaires donnent des avis sur ce qui serait dans l'intérêt public et sur le pour et le contre. Ils ont leur propre processus pour cela.
Comme je l'ai dit, cela a été fait. Ce n'est jamais « voici le renseignement; lisez‑le », mais dans ce renseignement, pour cet élément, nous rendons la chose publique, parce que nous voulons mettre le public au courant. C'est pourquoi nous prenons ces mesures.
Prenons l'exemple de Skripal... En mars 2018, nous nous sommes joints à de nombreux autres pays pour attribuer le coup à la Russie. Nous avons produit le PNG de quatre Russes. Dans le communiqué, le a expliqué que ces gens‑là avaient participé à des activités d'ingérence étrangère en sol canadien.
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Merci. Cela me donne une petite idée.
J'ai entendu ce que vous avez dit tout à l'heure au sujet des inquiétudes que nous inspire une enquête publique. Personnellement, je pense qu'elle reste nécessaire, parce que nous en sommes au point où les Canadiens sont tellement préoccupés qu'il m'apparaît impossible de faire autrement. C'est dommage que nous en soyons arrivés là, mais voilà. Je pense qu'une enquête publique est importante.
Cependant, M. Wernick nous a aussi dit très clairement que la législation est une autre composante. Cela pourrait être rendu public et partagé avec les Canadiens. Sa recommandation, bien sûr, était de copier-coller ce que le Royaume-Uni fournit.
Avez-vous songé aux mesures que nous devons prendre chez nous, surtout dans le cas précis que nous avons aujourd'hui? Je sais que vous n'avez pas d'informations classifiées ou très importantes, parce que vous ne faites plus le même travail qu'avant. Dans cette perspective — puisque vous avez exercé ces rôles —, quel genre de législation, selon vous, serait-il important d'envisager? Pensez-vous que le Royaume-Uni est le meilleur endroit où commencer? Y a‑t‑il d'autres pays qui font des choses novatrices qu'il serait important de faire pour régler ce problème au Canada?
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J'ai lu la lettre que ce monsieur a écrite au
Globe and Mail. D'ailleurs, en lisant sa lettre, on s'aperçoit qu'il se dit lui-même déçu de ce qui se passe, parce que ce n'est pas ce qu'il voulait.
Je ne peux pas appuyer ce genre de démarche. Lorsqu'il y a des discussions sur le renseignement à l'interne, même si on occupe un poste de responsable, on accepte d'être contesté. Il y a des moyens d'avoir ces discussions.
Une chose me fait très peur en ce qui concerne nos besoins pour peaufiner nos mesures. Lorsqu'on va aller au fond de l'affaire, si on s'aperçoit, comme beaucoup de gens l'ont dit jusqu'à maintenant, qu'il n'y avait pas vraiment matière à prendre des mesures, cela va-t-il ternir la réputation du Service canadien du renseignement de sécurité ou de l'agence d'où provient la fuite — en effet, on ne sait pas d'où elle vient — ou celle de la communauté de la sécurité et du renseignement en général? Cela va-t-il rendre encore plus difficile l'accès aux outils dont ils ont besoin?
Il faut se rappeler la manière dont a été créé le Service canadien du renseignement de sécurité, en 1984, et tout ce qui est venu avec cela. Cela a créé des contraintes.
Je pourrai en parler davantage plus tard.
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Merci, madame la présidente.
Monsieur Jean, vous nous avez dit plus tôt aujourd'hui que l'ingérence étrangère ne s'arrête pas aux élections, mais qu'elle se produit entre les élections et touche beaucoup de personnes. De nombreux aspects de notre société, comme nos entreprises, nos organismes de bienfaisance, nos établissements d'enseignement postsecondaire, nos établissements de recherche, les députés et les diasporas, en particulier, sont souvent la cible d'ingérence étrangère. Souvent, ceux qui ont échappé à un régime peuvent se retrouver ciblés ici, au Canada. La menace est donc omniprésente.
Vous avez mentionné des pays comme la Chine et la Russie dont nous devrions être au courant. Y a‑t‑il d'autres pays, d'autres États, dont nous pourrions être conscients? Avez-vous des conseils à donner aux diasporas et au sujet des différents aspects qui sont touchés?
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Je pense que les Canadiens ont besoin d'être rassurés.
Les allégations d'ingérence étrangère étaient-elles vraiment fondées et auraient-elles dû atteindre le seuil établi? Beaucoup de gens nous ont dit que cela n'avait pas été le cas. Vous vous demandez sans doute si le seuil est trop élevé. Le seuil est élevé pour des raisons valables.
Toutefois, les Canadiens ont le droit de savoir s'il aurait dû ou non y avoir une intervention, compte tenu des informations disponibles. C'est ce que j'appellerais des mesures à très court terme. Ce qui m'intéresse, c'est que notre coffre à outils permettant de prendre ces mesures n'est pas à jour.
En général, une commission d'enquête demande quelques années. Cela demande même parfois quelques décennies, comme dans le cas de l'affaire d'Air India. C'est ce qui me tracasse au sujet des commissions d'enquête.
Je pense qu'il existe d'autres moyens crédibles de faire la lumière sur des événements. Je comprends que les gens veulent des moyens crédibles et veulent savoir que les bonnes mesures ont été prises, mais n'avons-nous pas un moyen de trouver plus rapidement des solutions? Déjà, le processus législatif n'est pas rapide.
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Merci, madame la présidente.
Monsieur Jean, merci d'être ici. Je vous remercie de votre témoignage.
Vous avez mentionné à plusieurs reprises, en réponse à diverses questions au sujet de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, que le SCRS est né en 1984. Je sais que notre gouvernement a ajouté des mesures de réduction de la menace dans le projet de loi , qui a été déposé à la Chambre en 2017. Je sais que ces mesures sont assujetties à une autorisation légale, si bien qu'il y a eu un certain renforcement des pouvoirs du Service canadien du renseignement de sécurité et du Centre de la sécurité des télécommunications, si je ne m'abuse, en ce qui concerne les mesures de réduction de la menace.
Compte tenu de vos connaissances approfondies dans ce domaine et de la révision de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité — une révision que vous semblez juger nécessaire et sur laquelle je suis d'accord avec vous —, quels changements particuliers faudrait‑il apporter à la Loi sur le SCRS, à votre avis?
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Monsieur Jean, on vous rappellera peut-être pour une autre raison la prochaine fois, semble‑t‑il.
Au nom des membres du comité de la procédure et des affaires de la Chambre, je tiens à vous remercier de votre disponibilité, surtout que nous nous réunissons en soirée. J'estime que vos commentaires ont été très éclairants, du moins pour moi.
Je tiens également à féliciter les députés pour les échanges et pour le niveau des questions qui ont été soulevées. Cela en dit long sur la gravité de la situation.
Monsieur Jean, si vous pensez à autre chose dont vous aimeriez faire part au Comité, veuillez l'envoyer à la greffière. Nous le distribuerons aux membres du Comité.
Sur ce, nous vous souhaitons la meilleure des chances. Je vous félicite d'être redevenu grand-père. Votre petite est bien chanceuse.
Portez-vous bien et soyez prudent. La séance est levée.