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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 121 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

     La séance est ouverte. Bienvenue à la 121e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.
     La réunion d'aujourd'hui se déroule en mode hybride. J'aimerais rappeler aux participants les points suivants. Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Je rappelle également aux collègues qu'ils doivent lever la main pour demander la parole, que ce soit en personne ou sur Zoom. Le greffier et moi-même gérerons de notre mieux l'ordre des interventions.
    Nous entreprenons aujourd'hui l'étude sur l'ingérence russe et les campagnes de désinformation au Canada. Je présente mes excuses au Comité, car l'avis a été envoyé ce matin. Bien qu'il soit valide selon les règles, ce n'est pas la meilleure façon de faire. J'avais l'intention de l'envoyer vendredi, mais à cause d'une erreur de ma part, cela n'a pas été fait, alors veuillez m'en excuser.
     Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 19 septembre 2024, le Comité entreprend son étude sur l'ingérence russe et les campagnes de désinformation au Canada.
     Je souhaite maintenant la bienvenue à nos témoins pour la première heure. De l'Alliance démocratique des Canadiens russes, nous accueillons Yuriy Novodvorskiy, fondateur et administrateur, et Guillaume Sirois, avocat. Du Congrès des Ukrainiens Canadiens, nous accueillons Alexandra Chyczij, présidente.
     J'invite maintenant MM. Novodvorskiy et Sirois à faire une déclaration préliminaire d'un maximum de cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
     Je vous remercie de votre invitation et de vous pencher sur la menace pour la sécurité nationale que représentent la propagande et la guerre cognitive russes.
    Je m'appelle Yuriy Novodvorskiy. Je suis le directeur de l'Alliance démocratique des Canadiens russes. Je suis accompagné de notre conseiller juridique, Guillaume Sirois.
    L'ADCR est une organisation sans but lucratif dirigée par des bénévoles et créée à la suite de l'invasion criminelle de l'Ukraine par la Russie. Sa mission principale est d'appuyer le développement de la communauté russo-canadienne autour des idéaux de la démocratie, des droits de la personne, des libertés civiles et de la primauté du droit. L'opposition à l'invasion de l'Ukraine et au régime de Poutine est l'un des principaux objectifs de notre organisation, de même que le soutien aux prisonniers politiques en Russie.
    J'aimerais me concentrer aujourd'hui sur trois points clés.
    Premièrement, la Russie se livre activement à une guerre cognitive contre le Canada et ses alliés.
    Deuxièmement, cette guerre cognitive a des répercussions importantes sur la stabilité de la société civile et des institutions au Canada.
    Troisièmement, cette menace n'a pas été prise au sérieux depuis trop longtemps, et nous faisons maintenant face aux effets conjugués d'années de propagande russe.
    Je terminerai mon exposé par une série d'appels à l'action immédiats.
    La Russie mène depuis des années au Canada des campagnes de propagande visant à semer la division sociale et à miner la confiance dans nos institutions, y compris les médias. Le but de ces campagnes est de créer une société divisée et méfiante que la Russie peut plus facilement manipuler et contrôler. La Russie cherche à influencer la façon dont les Canadiens pensent et votent et, au bout du compte, à façonner les politiques du Canada pour faire avancer ses propres intérêts stratégiques. Il s'agit notamment de rétablir un ordre mondial conforme à ses valeurs autoritaires, de démanteler l'OTAN, de lever les sanctions et de mettre fin au soutien du Canada à l'Ukraine. Ces efforts ciblent la communauté russo-canadienne et l'ensemble de la population canadienne, comme en témoigne l'opération Tenet Media.
    Bien que le Canada ait fait preuve d'une plus grande résilience à l'égard de la propagande russe que nos voisins américains, nous commençons déjà à en voir les effets. Le soutien à la guerre en Ukraine diminue, la radicalisation et les divisions sociales augmentent, et la confiance dans nos institutions démocratiques s'effrite. Ce sont des objectifs stratégiques pour la Russie depuis au moins l'annexion de la Crimée, en 2014. Cette propagande, notamment l'opération Tenet Media, et pendant les deux dernières élections générales, a ciblé directement le premier ministre, surtout en raison de son appui à l'Ukraine et de sa condamnation des violations des droits de la personne commises par la Russie.
    De plus, ce discours est notamment repris par certains médias et au moins un parti politique au Canada, qui a reçu près d'un million de votes en 2021, et qui est sur le point d'en recueillir encore plus aux prochaines élections. Même si les éléments marginaux n'arrivent pas à leurs fins, les grands partis pourraient être tentés de courtiser leurs électeurs en adoptant une position moins ferme en faveur de l'Ukraine, par exemple. Comme nous l'avons vu aux États-Unis, il ne s'agit pas de savoir si ces narratifs feront partie du discours national dominant, mais quand ce sera le cas. D'ici là, il sera peut-être trop tard.
    Les vidéos de Tenet Media au sujet du Canada ont fait les manchettes, mais elles ne représentent que la pointe de l'iceberg de la propagande russe au Canada. La Russie mène sa guerre cognitive au Canada depuis près d'une décennie. On ne devrait pas permettre à un pays étranger de façonner les pensées et les politiques des Canadiens, surtout lorsqu'il s'agit d'un problème qui dure depuis si longtemps.
    Les vidéos de Tenet Media sur le Canada ont été visionnées plus d'un demi-million de fois. Si une puissance étrangère avait affrété un avion-cargo pour larguer 500 000 dépliants de propagande au‑dessus de Vancouver, de Toronto, d'Ottawa et de Montréal, critiquant les politiques canadiennes et le premier ministre et minant notre société et nos institutions, quelle aurait été la réaction? L'opération Tenet Media est bien pire que cela.
    Nos institutions ne sont pas équipées pour réagir à ces menaces de la Russie, ni même pour les détecter. Nous avons appris l'existence de l'opération Tenet Media à la suite d'une mise en accusation aux États-Unis, et notre gouvernement ne veut rien nous dire de plus que ce qui est déjà public. Sans nos alliés américains, cette campagne de propagande n'aurait peut-être jamais été détectée. À l'exception des condamnations publiques, notre gouvernement n'a apparemment rien fait en représailles. Les déclarations publiques ne dissuadent pas Vladimir Poutine.
    Par conséquent, l'ADCR a les appels à l'action suivants à vous soumettre.
    Premièrement, nous devons nous attaquer à ce problème en tant que menace nationale. Ce n'est pas seulement de la désinformation ou de la propagande. C'est une guerre cognitive qui cible tous les Canadiens, et en particulier la communauté russo-canadienne.
    Deuxièmement, un organisme ou une institution devrait être clairement chargé de la défense contre cette menace et de la réponse à y apporter, de la coordination avec les autres acteurs concernés, comme les autres pays démocratiques, le SCRS, le CST, Affaires mondiales Canada, les partis politiques et la société civile.
    Troisièmement, nous devons demander à la commission sur l'ingérence étrangère d'examiner et d'évaluer les événements liés à Tenet Media. L'ADRC a déjà fait cette demande il y a des semaines, mais nous attendons toujours une réponse, et aucun témoin lié aux activités de Tenet Media n'a été cité à comparaître devant la commission.
    Enfin, les plateformes de médias sociaux fournissent l'infrastructure qui a rendu possible une grande partie de cette guerre cognitive. Par conséquent, elles devraient être tenues de respecter des normes plus élevées en matière de rapports et de gestion de l'ingérence étrangère.
    En conclusion, nous devons reconnaître la gravité de cette menace et prendre des mesures immédiates pour contrer les stratégies de guerre cognitive de la Russie. Notre sécurité nationale, notre cohésion sociale et nos valeurs démocratiques en dépendent.
    Merci.
(1105)
    Merci.
    J'invite maintenant Mme Chyczij à faire une déclaration préliminaire d'un maximum de cinq minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
     Merci, monsieur le président et membres du Comité, de me donner l'occasion de m'adresser à vous ce matin.
    La communauté canado-ukrainienne est la cible de la désinformation soviétique et, maintenant, russe depuis des décennies. Beaucoup de Canadiens ont de la difficulté à comprendre que ce n'est pas notre pays d'origine qui s'en prend à notre diaspora. Notre gouvernement ukrainien ne nous cible pas. C'est un gouvernement étranger, le gouvernement russe, qui a fait de nous l'objet de sa désinformation.
     Comme mes amis y ont fait allusion, le SCRS a identifié la Russie comme un acteur étranger de la désinformation. Dans son rapport, il dit que « La Russie continue aussi de tenter de discréditer la communauté ukrainienne du Canada, prétendant faussement qu'elle est composée de néo-fascistes qui contrôlent la politique étrangère du Canada. » Il en dit plus, mais je suis sûre que vous avez lu le rapport.
    Lorsque notre service de renseignement tire ces conclusions, pourquoi le Canada demeure‑t‑il un refuge pour les agents russes? L'une des raisons, c'est que certains politiciens, conseillers en politique étrangère et employés d'Affaires mondiales Canada ont une vision naïve de la Russie et de la menace qu'elle représente pour le Canada et nos institutions démocratiques.
    Pendant plus d'une décennie, notre communauté a préconisé l'interdiction de RT, la télévision russe. Cela ne s'est produit qu'un an après l'invasion complète de l'Ukraine. RT a finalement été sanctionnée par le Canada — avec d'autres institutions russes, comme le laboratoire d'idées de Poutine, le club Valdai —, mais aucune mesure n'a été prise par le gouvernement à l'égard de ceux qui, au Canada, collaborent avec ces institutions. De nombreux collaborateurs canadiens de RT sont autorisés à opérer en toute impunité. En fait, certains d'entre eux sont invités à comparaître devant des comités parlementaires canadiens. D'autres reçoivent des subventions des contribuables canadiens pour produire des films de propagande russe.
    Nous savons également que le Canada est une destination de choix pour les agents dormants russes. Il ne semble pas y avoir de détection ou de prévention de l'espionnage étranger au Canada. Ils viennent ici parce que nous leur permettons d'établir facilement leur identité, tout en poursuivant leurs activités d'espionnage. Ils se rendent ensuite dans d'autres pays alliés, en se faisant passer pour des citoyens d'un partenaire allié fiable. Ce sont maintenant des Canadiens.
    Vous connaissez l'histoire de la famille Vavilov et, bien sûr, Mikhail Mikushin, qui a récemment participé à l'échange d'Evan Gershkovich. C'était un colonel du renseignement militaire russe, un atout précieux de Poutine.
    La Russie coopère avec des personnes faisant autorité, influentes et persuasives, comme des universitaires, des journalistes et des influenceurs des médias sociaux, ceux que Staline appelait des « idiots utiles », pour répéter et amplifier ses narratifs. Lorsque ces narratifs reprennent mot pour mot ce que disent l'ambassade de Russie et Poutine, pourquoi personne ne demande pourquoi?
    Nous savons que nous sommes ici pour discuter de l'opération Tenet ou Doppelganger menée par RT, dans laquelle était impliquée une entreprise canadienne appartenant à deux Canadiens et faisant appel à des influenceurs sociaux canadiens. Ils ont produit des vidéos sur des thèmes canadiens, sur des sujets brûlants propres à semer la discorde. Une fois qu'ils ont retenu l'attention d'un auditoire effrayé et mécontent, ils ont attribué les problèmes économiques et tout ce qui ne va pas dans le monde au soutien que le Canada apporte à l'Ukraine — remplie de nazis, soit dit en passant. Le gouvernement n'a rien fait. Cela crée une culture d'impunité qui normalise ce comportement qui consiste à qualifier les Ukrainiens de nazis. Malheureusement, cela représente aussi une menace pour notre communauté. Nous avons fait des sondages et constaté une augmentation importante du nombre d'incidents haineux contre les Ukrainiens. Nous avons demandé à deux ministres de la Sécurité publique successifs de dénoncer et de condamner ce comportement, mais ils restent silencieux.
    Nous savons que pendant des décennies, l'Union soviétique a eu recours à des « mesures actives », ou des opérations visant à discréditer notre diaspora après la Seconde Guerre mondiale, parce qu'elle était très critique à l'égard du régime soviétique. Elle nous voyait comme une menace. Une de ces opérations, malheureusement, a été la Commission Deschênes. Les preuves provenant d'Operation Payback montrent une campagne visant à enflammer la population canadienne en prétendant à tort que le tristement célèbre Dr Mengele se cachait au Canada. Cette campagne a été lancée par un représentant canadien du Centre Simon Wiesenthal, Sol Littman, qui a délibérément semé de fausses histoires. Une fois que la population canadienne a été suffisamment enflammée, le gouvernement Mulroney a mis sur pied une commission d'enquête qui a innocenté tout le monde, à l'exception de 29 personnes.
(1110)
     Cependant, aujourd'hui, nous entendons des appels répétés en faveur de la divulgation des noms de ces personnes, plus de 800 d'entre elles, qui ont plusieurs générations de descendants.
    Je suis désolé. Puis‑je vous demander de conclure?
     Oui.
    Nous aimerions également parler du film de propagande russe Russians at War, qui a été produit par une ancienne réalisatrice de RT. C'est un exemple du genre de naïveté que nous avons au Canada, qui non seulement tolère, mais finance le blanchiment du génocide.
    Je serai heureuse de répondre à vos questions.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Bezan, pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence et de leur participation à cette importante étude.
    J'aimerais commencer par approfondir un peu la question du Fonds des médias du Canada. Une somme de 340 000 $ provenant de l'argent des contribuables a été versée à Anastasia Trofimova. Comme vous l'avez mentionné, elle était une ancienne employée de RT, Russia Today.
    Croyez-vous que le gouvernement du Canada devrait récupérer cet argent parce qu'il a financé la désinformation russe?
(1115)
    Absolument, je pense que c'est... Je suis désolée. Je ne sais pas si cette question m'était adressée.
    Elle s'adressait aux deux témoins. Vous pouvez commencer.
    Je vais donc commencer.
    Absolument, je trouve scandaleux que l'argent des contribuables canadiens ait financé cette production, et nous demandons une enquête approfondie sur ce que Mme Trofimova a dit dans sa demande. A‑t‑elle révélé qu'elle avait travaillé pour RT? Bien sûr, RT a fait disparaître son nom de son site Web, comprenant que c'est devenu gênant pour elle. Cependant, nous devons voir si les organismes de financement canadiens savaient qu'elle était une ancienne employée — elle a réalisé 11 films pour RT — et s'ils savaient qu'elle entrerait dans le territoire souverain de l'Ukraine avec une armée d'invasion qui commet des crimes de guerre.
    Ce sont des questions qu'il faut se poser, et je pense qu'il faudrait récupérer ce financement, car je suis certaine que le Kremlin jubile d'avoir si habilement dupé les Canadiens.
    Un des autres témoins voudrait‑il parler de ce film de propagande?
    Merci.
    L'ADCR s'oppose à tout film qui minimise ou cache les atrocités commises par le gouvernement russe ou l'armée russe lors de l'invasion de l'Ukraine. En même temps, nous croyons qu'il y a une place pour le journalisme honnête et pour des documentaires sur le conflit.
    L'ADCR n'a pas d'information. Nous n'avons pas vu ce film, mais si l'enquête montre que ce film a été organisé sous de faux prétextes et qu'il a été réalisé à la connaissance et avec l'approbation du gouvernement russe, alors nous appuyons d'autres mesures.
    Ne pourrions-nous pas supposer, cependant, que si un journaliste ou, dans ce cas‑ci, une réalisatrice, accompagne des troupes russes, c'est avec la bénédiction du Kremlin?
     Je peux répondre à cette question.
    Absolument. Il est inconcevable que les services de renseignement militaires russes ne sachent pas que cette femme a passé sept mois en territoire occupé.
    Quel est donc le rôle du gouvernement canadien? À part récupérer l'argent des contribuables, quel rôle a‑t‑il à jouer pour voir si elle a effectivement filmé des crimes de guerre, si elle a peut-être des images de crimes de guerre commis et qui sont, bien sûr, tous passés sous silence dans le film de propagande? Quelles infractions aux lois internationales a‑t‑elle commises, auxquelles le gouvernement n'a pas encore donné suite?
     Nous savons qu'elle a violé la loi ukrainienne en entrant dans un territoire occupé sans la permission des autorités ukrainiennes. Il est possible qu'elle ait violé les sanctions, et la GRC ferait bien d'enquêter sur les circonstances entourant le tournage de ce documentaire. De plus, bien sûr, la GRC recueille des preuves de crimes de guerre et devrait saisir ses images.
    Elle prétend n'avoir vu aucune preuve de crimes de guerre, pendant sept mois, mais nous savons que dans chaque territoire libéré de l'occupation russe, nous trouvons des preuves de crimes de guerre. Nous savons qu'ils torturent et exécutent des prisonniers de guerre ukrainiens, alors il est inconcevable qu'elle n'ait rien vu en sept mois.
     Vous avez dit que vous avez eu quelques réunions avec l'ancien et l'actuel ministre de la Sécurité publique au sujet de la désinformation russe, et que vous n'êtes pas satisfaite de la réponse que vous avez reçue jusqu'à maintenant de l'un ou de l'autre. Je suppose que c'était le ministre Blair et son prédécesseur.
    Non, je devrais apporter une précision. C'était avec le ministre Mendicino.
    D'accord.
    Il n'a pas donné suite à notre demande de déclaration publique, et nous n'avons pas réussi à obtenir une rencontre avec le ministre Leblanc.
    D'accord. Il ne veut même pas vous rencontrer pour discuter de cette question importante et de ce que nous faisons contre la désinformation. C'est une autre opération de camouflage en cours.
    Vous avez mentionné d'autres activités de la Fédération de Russie qui remontent à l'époque soviétique. En dehors des médias sociaux que les Russes ont vraiment pénétrés comme nous le savons, et de RT, bien sûr, et d'autres outils de propagande qu'ils ont utilisés, croyez-vous que nos principaux médias sont compromis par les Soviétiques ou le Kremlin aujourd'hui?
(1120)
    Si vous regardez ce qu'ils disent, ils reprennent très souvent mot pour mot ce qui sort du Kremlin et de l'ambassade de Russie.
     Je vous dirai, monsieur Bezan, que si ça marche comme un canard et cancane comme un canard, ce n'est pas un poulet.
    En terminant, savez-vous s'il y a des journalistes ou des universitaires aujourd'hui qui sont compromis en raison de leurs liens avec le Kremlin?
    Nous savons qu'à l'Université d'Ottawa, il y a un collaborateur régulier de la télévision russe, et nous savons qu'à l'Université Carleton, il y a un membre éminent du club Valdai, qui est le laboratoire d'idées de Poutine.
     Merci, monsieur Bezan.
    Nous passons maintenant à Mme O'Connell.
    Madame O'Connell, vous avez la parole. Vous avez six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je suis heureuse de voir que mes collègues conservateurs prennent cette étude si au sérieux, et j'espère sincèrement qu'ils ne chercheront pas à la clore ou à la limiter, car nos premiers témoins ont déjà souligné des sujets de préoccupation assez importants. Je pense qu'il est impératif que ce comité fasse ce travail. Je serais très déçue, après cette série de questions, de voir les conservateurs limiter cette étude ou essayer de ne pas la laisser continuer alors que c'est notre première journée. Nous verrons bien, je suppose. Je suppose que nous verrons si les paroles que nous venons d'entendre sont suivies de gestes concrets.
    Pour ce qui est de mes questions — et cela s'adresse aux deux organisations — en tant que députée, au niveau local, j'ai vraiment pu constater un changement dans la perception du public à l'égard de l'invasion de l'Ukraine. Par exemple, je me souviens d'avoir participé à des vigiles, au début de la guerre, dans ma collectivité d'Uxbridge, qui compte une importante population ukrainienne, et de la rapidité avec laquelle l'appui à l'Ukraine a commencé à s'effriter dans les médias sociaux. Lors de nos premiers débats sur l'Accord de libre-échange Canada-Ukraine, les choses se sont déroulées plutôt bien. L'accord semblait avoir l'appui de tous les partis. Ensuite, les choses ont commencé à changer.
    Cela s'explique en grande partie par l'évolution du discours en ligne dans les comptes de médias sociaux. Lorsqu'on a appris que des influenceurs avaient peut-être été payés par la Russie pour se faire passer pour des organisations canadiennes ou des pages de médias sociaux canadiens, on a commencé à faire le lien entre les deux. En tant que simple députée, je pouvais très bien voir ce changement, par exemple avec les Ukrainiens de ma circonscription, mais de façon générale, j'entendais des gens commencer à défendre la Russie, ou je voyais des drapeaux russes sur la Colline et des manifestations contre tout...
    Ma première question est la suivante — et j'aimerais avoir votre point de vue à tous les deux à ce sujet —, croyez-vous que les influenceurs qui avaient des comptes financés, ou prétendument financés, par la Russie ne savaient pas vraiment qui payait, ou y a‑t‑il un monde dans lequel les gens ne sauraient pas que la Russie envoie de la propagande?
    De même que si ça marche comme un canard et cancane comme un canard, si vous répétez de la propagande russe et que vous prétendez ensuite ne pas avoir su qu'on vous payait pour répéter de la propagande russe... Avez-vous vu d'autres exemples de gens qui ont prétendu ignorer qui payait la note? Je vais peut-être commencer par cela, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
     Même si, à l'heure actuelle, ce sont encore des allégations, une simple recherche sommaire montrerait que ces points de vue viennent du gouvernement russe. Souvent, si ce n'est pas mot pour mot, l'idée est exactement la même. L'idée vient du Kremlin et s'est propagée dans les canaux de propagande du gouvernement russe.
    Pour répondre à ce qui a été dit plus tôt, je suis d'accord avec Mme Chyczij. L'ADCR est insatisfaite de la réponse du gouvernement canadien à la désinformation qui s'est répandue dans les médias sociaux canadiens, mais aussi en ce qui concerne l'application des mesures qui ont été adoptées, y compris les sanctions.
    Nous nous demandons comment ces sanctions sont appliquées, pourquoi les violations des sanctions semblent... Ces enquêtes semblent provenir des États-Unis, et non du Canada.
    Même si une bonne partie de la désinformation semble se faire aux États-Unis, en raison de l'interdépendance des écosystèmes canado-américains, les récits qui en émanent se répandent et finissent par se retrouver au Canada et avoir une incidence sur le discours national ici.
(1125)
     Pour revenir à ce que vous avez dit tout à l'heure au sujet de l'évolution du discours parmi vos électeurs, c'est en fait quelque chose qui est de plus en plus confirmé par des données.
    Certaines analyses intéressantes, notamment celle de Marcus Kolga, montrent que de plus en plus de Canadiens sont exposés en ligne au discours du Kremlin. Ces récits ont une incidence sur la façon dont les Canadiens pensent à la guerre en Ukraine, par exemple. Il ne s'agit pas seulement de la guerre en Ukraine. Cela cible aussi des enjeux plus vastes de la politique canadienne, comme la crise du logement, l'inflation et même le premier ministre Justin Trudeau. C'est quelque chose que le Kremlin fait au Canada depuis près d'une décennie, comme mon collègue l'a mentionné dans son témoignage...
    Désolée. Je ne veux pas vous interrompre, mais mon temps est limité.
    Pensez-vous que c'est également problématique lorsque des institutions comme l'Institut du Danube paient des élus pour des voyages partout dans le monde? Cet organisme est connu pour promouvoir la propagande anti-Ukraine et, plus encore, la propagande du Kremlin. Estimez-vous problématique que des membres de la classe politique canadienne soient aussi payés par des instituts qui diffusent cette désinformation?
    Je vais commencer par cela, car je sais que mon temps est limité.
    Absolument, parce qu'il y a une possibilité et une apparence de partialité. Tous les voyages payés par d'autres entités devraient être interdits aux élus canadiens.
     Je ne suis pas d'accord avec mon collègue. Je crois qu'une influenceuse canadienne des médias sociaux, Lauren Southern, travaillait pour Tenet. Elle a produit des vidéos sur la criminalité en matière d'immigration, les sentiments anti-blancs, la paranoïa à l'égard des LGBTQ+, les pensionnats, les tombes anonymes, l'inflation et la crise du logement. Elle a dit que le Canada était au bord du chaos et que le Canada devenait un enfer communiste sous Justin Trudeau.
    Ce discours n'est pas seulement dirigé vers les États-Unis. Le Canada a été directement ciblé.
    Merci.
    Merci, madame O'Connell.

[Français]

     Monsieur Fortin, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Madame et messieurs les témoins, je vous remercie d'être parmi nous, aujourd'hui.
    Comme les témoignages le montrent, la question de l'ingérence, notamment l'ingérence russe, est une question importante et inquiétante.
    Je ne sais pas si vous connaissez d'autres États qui pratiquent de l'ingérence au Canada. À votre avis, y a-t-il une différence importante entre les pratiques, une façon de reconnaître le type d'ingérence?
    En fait, dans ce cas-ci, nous savons que cela vient de la Russie. Y a-t-il une différence entre l'ingérence russe et, par exemple, l'ingérence chinoise ou indienne, ou encore celle d'autres États? À votre avis, y a-t-il quelque chose de particulier qui nous permettrait de reconnaître les types d'ingérence?
    Monsieur Novodvorskiy, avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
    Je pourrais commencer à répondre à la question.
    En effet, on voit une convergence des intérêts entre les différents États pour essayer de s'ingérer dans nos institutions démocratiques. Chaque État étranger autoritaire a ses propres intérêts. Il y a certainement des intérêts qui se rejoignent afin de renverser l'ordre mondial et avoir un ordre mondial qui tolère davantage les actions autoritaires comme celles entreprises par la Russie en Ukraine.
(1130)
    Croyez-vous que l'ingérence russe a quelque chose de particulier ou s'agit-il simplement du même problème, qui devrait être combattu de la même façon, peu importe d'où provient l'ingérence?

[Traduction]

    Le gouvernement russe a consacré des ressources considérables à sa propagande via les médias sociaux, plus que l'Inde et certains autres pays. Je ne suis pas en mesure de parler des efforts potentiels de la Chine en matière d'ingérence étrangère.
    Ces méthodes sont plus sophistiquées et font appel à de nombreux canaux différents, différentes plateformes de médias sociaux, Russia Today, des chaînes de télévision et d'autres médias dans le but d'inonder les gens des mêmes récits trompeurs.

[Français]

    Comment le Canada pourrait-il mieux se protéger quant à ces ingérences?

[Traduction]

    Voici l'une des choses que je soulèverais. L'un de nos appels à l'action mentionnait qu'idéalement, il devrait y avoir un organisme ou une institution clairement responsable de la défense contre ces menaces. La dernière fois que j'ai examiné cela, la lutte contre la désinformation semblait être une responsabilité partagée entre de nombreux organismes différents, ce qui pourrait signifier qu'aucun d'entre eux ne se concentre directement là‑dessus.

[Français]

    Madame Chyczij, veuillez m'excuser de prononcer aussi horriblement votre nom. J'en suis désolé.
    Je crois que vous vouliez vous exprimer sur cette question.

[Traduction]

     Je pense que le Canada aurait intérêt à suivre l'exemple de la Finlande, de la Norvège et du Danemark. Ils commencent à enseigner la pensée critique et la détection de la désinformation à la maternelle. Aujourd'hui, la Finlande est en tête de l'indice européen de la maîtrise des médias, qui mesure la résilience d'un pays à la désinformation.
     Ce matin, j'ai regardé sur PBS une émission où des élèves de 6 e année étaient interviewés. Leur capacité de détecter la désinformation dans les médias sociaux était vraiment stupéfiante et ferait honte à tous les Canadiens. Je crois que si nous commencions ce genre d'enseignement dans nos écoles, notre pays s'en porterait mieux.

[Français]

    L'avenue que vous proposez est intéressante, mais, dans une école primaire, que dirait-on aux enfants? Leur parlerait-on d'ingérence étrangère? J'ai de la difficulté à voir comment on pourrait, de façon concrète, appliquer cela.

[Traduction]

    Ils ne leur disent pas que le père Noël n'existe pas. Ils utilisent des mécanismes adaptés à l'âge pour leur enseigner à départager les faits de la fiction. Ils leur apprennent la pensée critique, à remettre en question et à ne rien accepter aveuglément.
    Il y avait un étudiant américain dans cette école qui disait qu'aux États-Unis, chaque fois qu'il exprimait des doutes, ses enseignants lui disaient que si c'est rapporté dans les journaux, ce doit être vrai. Il s'agit de la capacité de ne pas tout accepter à première vue.
     Je suis certaine que la Finlande, la Norvège et le Danemark partageraient ces programmes avec nous. C'est une mesure que le Comité pourrait recommander.

[Français]

    Depuis combien de temps ce programme est-il en place en Finlande?

[Traduction]

     Je n'en suis pas certaine, mais puisque nous avons déjà des élèves de sixième année, c'est donc depuis au moins six ans. Bien sûr, la Finlande et les pays voisins de la Russie sont très conscients de la désinformation. Ils partagent une frontière avec la Russie. Ils vont construire un mur entre la Finlande et la Russie. Ces pays ont été les victimes ou les cibles de tentatives de désinformation.

[Français]

     Merci, monsieur Fortin.
     Merci.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. MacGregor, pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins d'être ici aujourd'hui. Nous vous en savons gré.
     Personne ici n'a jamais entendu parler de la désinformation. J'aimerais pouvoir vous montrer ce que je trouve chaque jour dans ma boîte de réception. Honnêtement, je pense que si l'on examine un certain nombre de théories du complot... de multiples diagrammes de Venn pourraient être établis à partir de ce dont nous parlons aujourd'hui.
    De mon point de vue, c'est en partie frustrant. Le Comité et la question de l'ingérence étrangère sont au cœur des préoccupations depuis quelques années. En fait, le Comité a mené une étude en 2022. Le rapport a été déposé à la Chambre des communes en mars 2023. Il s'agissait d'examiner la position du Canada en matière de sécurité par rapport à la Russie. Nous avons examiné toutes sortes de domaines où la Russie a participé à des activités d'espionnage en matière de cybersécurité et à des campagnes de désinformation et de mésinformation, et nous avons formulé une série de recommandations dans ce rapport. C'était il y a environ un an et demi.
    Je vais peut-être poser cette question à l'Alliance démocratique des Canadiens russes, parce que dans votre déclaration préliminaire, vous vouliez que nous considérions ce problème comme une menace à la sécurité nationale. Vous vouliez qu'une institution unique soit responsable de ce dossier. Nous avons recommandé au gouvernement d'examiner l'ampleur de la désinformation russe ciblant le Canada, c'est‑à‑dire les acteurs, les méthodes, les messages et les plateformes en cause.
     En réponse, le gouvernement a dit que, dans le budget de 2022, il s'était engagé à fournir 13,4 millions de dollars sur 5 ans pour renouveler et élargir le Mécanisme de réponse rapide du G7. Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez, parce que si nous avons fait une recommandation et qu'ils y ont donné suite, j'aimerais avoir votre avis sur les résultats obtenus, afin que nous puissions peut-être mettre à jour notre recommandation dans ce rapport.
(1135)
    Je vais commencer par dire que peu importe ce qui a été fait, je pense qu'il pourrait y avoir... Il faudrait accroître la transparence quant à l'efficacité des mesures, car d'après ce que nous avons entendu le plus récemment, nous ne savons pas clairement quelles mesures le gouvernement a prises au‑delà des déclarations publiques.
    Je vais céder la parole à M. Sirois.
     Je suis d'accord avec mon collègue.
     Pour ce qui est du Mécanisme de réponse rapide du Canada, le MRR, ils sont actifs et essaient de cerner ces menaces, mais Lauren Chen, qui a aidé à mettre sur pied Tenet Media, a été très active lors de l'élection générale de 2021 pour amplifier le contenu lié au Parti populaire du Canada, le PPC et discréditer le Parti conservateur et le Parti libéral.
    Elle a organisé un débat avec Maxime Bernier et un candidat du PPC, qui a été vu 16 000 fois le 10 septembre de cette année électorale. Le MRR n'a pas détecté cette opération, ni celle de Tenet Media. Donc, même s'ils essaient de détecter ces menaces, ils n'y arrivent pas, pour quelque raison que ce soit, d'après ce que nous avons constaté.
    Merci.
     Nous avons aussi beaucoup examiné le rôle que jouent les fournisseurs de services Internet à cet égard, ainsi que les plateformes elles-mêmes. Il suffit de penser à Twitter, maintenant appelé X. Si je publiais un gazouillis sur l'Ukraine, les réponses seraient instantanées.
     Je suppose que je vais vous poser cette question sur tout ce que vous... Comme nous nous sommes attaqués à ce problème, nous avons formulé nos recommandations par le passé. Il semble que les fournisseurs de services Internet et les grandes plateformes de médias sociaux continuent de fonctionner d'une manière qui permet à cette désinformation de se propager. Il semble pour la plupart des gens que rien n'a vraiment changé au cours des dernières années. Y a‑t‑il quelque chose que vous pourriez ajouter et que notre comité devrait vraiment faire valoir?
    Oui. Je suis parfaitement d'accord. Je pense que nous devons achever l'interdiction de RT, c'est‑à‑dire les bloquer sur les chaînes Internet, et chez les fournisseurs Internet. D'autres pays et certaines plateformes de médias sociaux l'ont fait. Meta/Facebook et TikTok l'ont fait. Si nous les bloquons sur les serveurs Internet parce qu'il y a... Il n'est pas nécessaire d'être abonné au câble pour voir la télévision russe au Canada aujourd'hui, et c'est là le problème.
    Une autre solution consiste à bloquer la source de cette désinformation. Le Canada est le seul pays qui n'a pas expulsé un seul soi-disant diplomate russe depuis l'invasion à grande échelle de l'Ukraine. L'Union européenne et d'autres pays de l'OTAN en ont expulsé 600. Nous n'en avons expulsé encore aucun. De plus, la représentation diplomatique est extrêmement disproportionnée. Il y a 69 diplomates russes enregistrés au Canada, mais il n'y a que 17 diplomates canadiens à Moscou. Où est la proportionnalité?
     Je vais mettre fin à ma première série de questions. Je pense que tout le monde autour de cette table est assez conscient de l'importance de ce sujet et de la raison pour laquelle nous l'étudions. Cependant, pour que cela figure au compte rendu pour les Canadiens qui nous regardent, en quoi cela sert‑il les intérêts stratégiques de la Russie si la population canadienne est inondée de désinformation?
(1140)
     Nous savons qu'ils ont de la difficulté sur le front. La bataille de Kiev qui devait durer trois jours en est maintenant à sa troisième année. Les Russes cherchent d'autres moyens, c'est‑à‑dire miner le soutien à l'Ukraine partout dans le monde. Nous savons que les Européens ont découvert des politiciens qui étaient payés directement par les Russes. Nous savons que les Européens ont mis sur pied toute une commission chargée d'enquêter sur la désinformation, de l'identifier et de la combattre. Je crois que le commissaire de l'Union européenne responsable de ce dossier se trouve en fait au Canada, où il rencontre notre commission sur l'ingérence étrangère.
    Il faut une plus grande coopération entre les pays alliés et une mise en commun des ressources, parce qu'il est difficile de mener ce combat seul, mais en travaillant avec des partenaires aux vues similaires, il est possible d'amplifier les résultats de nos travaux.
    Merci, monsieur MacGregor.
     Nous entamons notre deuxième série de questions. Monsieur Lloyd, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être ici aujourd'hui. C'est très intéressant. J'ai bien aimé quand Mme Alexandra Chyczij a parlé de la Finlande. Récemment, dans le cadre de mes autres fonctions en tant que militaire canadien, j'ai eu le plaisir de rencontrer un colonel de la Finlande et de discuter de la préparation militaire et de la cyberpréparation de ce pays par opposition à celle de notre pays, et j'en suis ressorti très impressionné.
    Toutefois, pour revenir à la question, en fait, en juin 2022 devant ce comité, l'ancien ministre Bill Blair avait témoigné. Il était ministre de la Protection civile à l'époque, mais pendant la campagne électorale de 2021, il était ministre de la Sécurité publique. À l'époque, j'étais très préoccupé, et je le suis encore aujourd'hui, par l'ingérence étrangère dans nos élections. Je lui ai demandé à brûle-pourpoint, comme le montre le compte rendu: « Votre gouvernement a‑t‑il déterminé que la désinformation lors des élections fédérales de 2021 provenait de sources étrangères? »
     Voici ce qu'il a répondu: « Je peux vous dire — et j'ai vérifié en prévision de votre question — que je n'ai reçu aucune information selon laquelle la Russie aurait participé à des efforts d'ingérence étrangère lors des dernières élections fédérales. »
    J'ai alors dit:
Je comprends cela, mais si la Russie voit qu'il est possible pour un pays d'influencer nos élections, elle pourrait être incitée à le faire elle-même.
Votre gouvernement a‑t‑il décelé de l'ingérence étrangère dans les élections fédérales de 2021?
    Il m'a répondu que ses agences étaient très vigilantes et qu'elles n'avaient pas décelé d'ingérence étrangère.
    Nous savons maintenant que ce n'était pas le cas, et qu'il y a bel et bien eu ingérence étrangère dans nos élections. Avez-vous été surprise d'apprendre que, dès 2022, des ministres du gouvernement affirmaient qu'il n'y avait pas d'ingérence étrangère dans notre pays? Est‑ce que cela vous surprend?
    Je pense qu'il y a une question de définition que nous devons établir. En quoi consiste au juste l'ingérence étrangère?
    Je sais que, dans le cadre de l'enquête sur l'ingérence étrangère, nous nous efforçons de faire comprendre que l'ingérence ne se traduit pas par le transport des électeurs à une assemblée d'investiture. C'est la forme la plus évidente d'ingérence. Or, l'ingérence comprend aussi le genre de désinformation qui est répandue au Canada depuis 60 ou 70 ans, et je pense donc qu'il est important de bien s'entendre sur une définition ici.
     J'ai remarqué dans votre témoignage que vous parliez des obstacles au sein du gouvernement qui empêchent de prendre des mesures efficaces contre l'ingérence étrangère, y compris l'ingérence russe. Vous parliez de personnes, à Affaires mondiales, qui ont une vision naïve de la situation. Pourriez-vous nous en dire plus sur leur naïveté? Quel est le problème?
     Eh bien, je ne vais pas révéler mon âge, mais je me souviens d'être allée à l'école dans les années 1980. Les universitaires qui enseignaient l'histoire, qu'il s'agisse de Russes, d'Européens de l'Est ou d'autres, avaient tous fréquenté l'école universitaire soviétique. Ils passaient tous leurs étés à Moscou à boire et à manger avec des gens du KGB, et ils revenaient et répétaient, en fait, la pensée soviétique.
    Le monde universitaire s'inquiète du fait que les études slaves et de l'Europe de l'Est ont été colonisées par les Russes. Nous devons donc commencer par nos établissements d'enseignement, commencer à les décoloniser et à se concentrer non pas sur la vision impérialiste russe du monde, mais sur les autres pays voisins de la Russie, notamment l'Ukraine.
    Nous avons des politiciens, du personnel et des conseillers à Affaires mondiales Canada qui ne semblent pas voir la menace que constitue la Russie. Lorsque l'invasion à grande échelle de l'Ukraine a commencé, beaucoup d'entre eux se sont demandé ce qui s'était passé et ils semblaient complètement surpris.
    Il s'agit de remplacer ces personnes par des gens qui comprennent ce qu'est la Russie aujourd'hui. La Commission d'Helsinki recommande au gouvernement des États-Unis et à d'autres gouvernements de procéder à une réinitialisation, et je ne parle pas ici de la réinitialisation russe de l'administration Obama. Nous devons repenser complètement notre approche à l'égard de la Russie et la considérer comme une menace à la sécurité mondiale.
(1145)
     Merci. Je me souviens, dans les semaines qui ont précédé la deuxième invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022, lorsque les conservateurs réclamaient des expéditions accélérées de matériel militaire essentiel pour l'Ukraine... que les conservateurs avaient alors été accusés d'être des va‑t‑en‑guerre. Pensez-vous que le fait que ceux qui essaient d'aider et de préparer l'Ukraine en prévision d'une invasion imminente soient qualifiés de va‑t‑en‑guerre illustre bien comment la Russie a réussi à infiltrer la pensée et à fausser les débats dans ce pays? Est‑ce un bon exemple?
    Pas seulement au Canada. J'entends par là que le Canada travaille avec ses alliés. Ce que le président Zelensky a vécu et vit à Washington, c'est un ralentissement de la livraison des armes. On pense actuellement que les Américains et les alliés donnent à l'Ukraine suffisamment d'argent pour ne pas perdre, mais certainement pas assez pour gagner. Nous espérons que, dans les derniers jours de l'administration Biden, cette situation sera corrigée.
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Zahid. Madame Zahid, vous avez cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de comparaître devant le Comité aujourd'hui.
    Ma première question s'adresse à Mme Chyczij. Pour faire suite à la question de ma collègue Mme O'Connell au sujet du Danube Institute et de ses liens avec le Kremlin et la propagande russe, nous savons que quatre députés conservateurs — Stephen Ellis, Philip Lawrence, Rosemarie Falk et Shannon Stubbs — ont accepté un somptueux voyage commandité, financé par le Danube Institute et Canadians for Affordable Energy, qui comprenait une facture de repas de 6 000 $ et des bouteilles de champagne de 600 $. Les Canadiens devraient-ils s'inquiéter des voyages comme celui‑ci et de liens possibles avec la propagande russe?
    Je pense que tout lien avec... Il y a d'autres conflits dans le monde. Il y a d'autres gouvernements qui essaient de séduire des politiciens canadiens, mais cela ne se limite pas aux politiciens. Il y a aussi le Club Valdaï. Il y a au moins quatre ou cinq universitaires de longue date dans nos universités canadiennes qui se rendent régulièrement à Moscou à l'invitation de Poutine, qui se font payer par le président russe de somptueux repas bien arrosés et qui continuent d'enseigner dans nos universités.
     Merci.
    Croyez-vous que la campagne de désinformation, de mésinformation et d'influence de la Russie a joué un rôle dans la décision du Parti conservateur de voter contre la mise en œuvre de l'accord de libre-échange du Canada avec l'Ukraine, malgré la demande du président Zelensky et du gouvernement ukrainien pour que le Parlement canadien vote en sa faveur?
    Je trouve malheureux que le Canada n'ait pas pu démontrer l'appui de tous les partis à l'égard de l'accord de libre-échange, mais pour ce qui est de l'influence exercée, je vais demander à M. Bezan de répondre à cette question.
    Monsieur le président, suggérer l'ingérence russe, alors que les Russes me traitent de nazi et m'insultent...
     Je vous prie de m'excuser.
     ... continuellement sur leur chaîne de télévision nationale... Je pense que c'est très fort de la part de la députée.
    Monsieur Bezan, vous n'avez pas la parole pour un rappel au Règlement.
    C'est mon temps de parole, alors j'invoque le Règlement.
    Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Oui, je suis d'accord pour dire que, pour toute organisation qui a des liens avec le gouvernement russe à quelque titre que ce soit, ces liens devraient faire l'objet d'une analyse critique avant que les représentants du gouvernement n'acceptent des invitations d'institutions de ce genre.
     Merci.
    Quel rôle les plateformes de médias sociaux occidentaux jouent-elles dans l'amplification des campagnes de désinformation appuyées par la Russie, et comment ces plateformes sont-elles utilisées pour créer des divisions au sein de ces sociétés?
(1150)
     Eh bien, nous avons entendu parler de Tenet. C'est‑à‑dire que si vous lisez l'acte d'accusation et, bien sûr, si vous regardez les plateformes de ces influenceurs, vous verrez exactement ce qu'ils ont fait. J'ai parlé des thèmes et des récits qu'ils véhiculent.
    Cependant, comme je l'ai dit, Facebook a maintenant interdit RT. Ce n'est toutefois pas suffisant. Je pense qu'il faut de meilleurs filtres sur les médias sociaux pour déceler les robots, les fermes de robots. Vous avez dit qu'il suffit de publier n'importe quoi sur l'Ukraine pour être inondé par, vous savez, le résultat de l'intelligence artificielle. C'est un phénomène auquel nous devons faire face en tant que pays, car il ne s'agit pas seulement de la question de l'Ukraine, mais de tous les aspects de notre société et de l'arène politique.
     Pour aller plus loin au sujet de RT, comment la Russie utilise‑t‑elle RT et d'autres médias d'État pour faire avancer ses objectifs, tant au niveau national qu'international?
    Nous savons que c'est un outil du gouvernement russe. Ils travaillent en étroite collaboration avec le FSB. Ils ne font qu'un, et ils font exactement ce que nous avons vu, à savoir qu'ils achètent des politiciens de l'Union européenne et des influenceurs des médias sociaux. Ils sont bien en avance sur nous pour ce qui est des mécanismes qu'ils utilisent, et nous sommes, à bien des égards, des témoins impassibles ici, parce que nous sommes très à l'aise au Canada depuis très longtemps.
    Nous avons souscrit au dividende de la paix après la guerre froide, et nous devons maintenant recadrer notre pensée et bâtir nos défenses pour être plus résilients. Comme je l'ai dit, cela commence à l'école avec nos jeunes, et il faudra une génération ou deux avant qu'ils ne soient éduqués, mais nous devons commencer cette forme d'éducation avec les politiciens. Nous devons éliminer les vecteurs de cette désinformation, en commençant par l'ambassade de Russie, et empêcher que ces déchets n'entrent au Canada.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Fortin, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Chyczij, je pense que je vais vous appeler par votre prénom, comme vous l'avez suggéré plus tôt. Alors, madame Alexandra, je comprends qu'en Finlande, on a mis en place un tel programme d'éducation au primaire. Corrigez-moi si je me trompe, mais je crois comprendre que cela a aussi été fait en Norvège et au Danemark. Vous m'avez dit que c'était en place depuis environ six ans.
    A-t-on évalué la portée ou l'effet de ces mesures sur la désinformation dans les pays qui ont décidé de procéder de cette façon?

[Traduction]

    Oui, il y a ce qu'on appelle l'indice européen de la maîtrise des médias, qui mesure la résilience d'un pays à la désinformation. Il mesure la capacité des pays européens à résister à la désinformation, et ces trois pays se classent au premier, au deuxième et au troisième rang.

[Français]

    Avez-vous une copie de ce rapport? Sinon, pouvez-vous en obtenir une et la transmettre au Comité?

[Traduction]

    Je suis désolée. Vous avez dit une copie de...?

[Français]

    Je parle du rapport que vous mentionnez et qui fait état des études effectuées en Europe sur l'effet de la désinformation.

[Traduction]

     Oui, nous pouvons vous faire parvenir ce rapport, et je crois certainement que l'ambassadeur de la Finlande au Canada serait prêt à vous en faire part.

[Français]

    Je suis désolé. Je ne veux pas vous bousculer, mais il me reste seulement quelques secondes.
    Avez-vous également l'information concernant le programme d'enseignement dans les écoles primaires de Finlande? Avez-vous une copie de ce document?

[Traduction]

     Je suis désolée — le volume...

[Français]

    Avez-vous une copie du programme d'enseignement dans les écoles primaires de Finlande dont vous nous parlez?

[Traduction]

     Non, nous n'avons pas le programme d'enseignement, mais je recommande que le Comité fasse une étude à ce sujet, et nous nous renseignerons certainement auprès de l'ambassadeur de la Finlande au Canada.
(1155)

[Français]

    Je crois qu'il ne me reste plus de temps.
    Il vous reste 15 secondes.
    Je vous remercie, madame, d'avoir été avec nous. Ce que vous nous dites est important, et j'aimerais que nous vous invitions à nouveau quand vous le voudrez. Si vous avez d'autres éléments information sur la question, veuillez nous les transmettre, parce que nous devons réagir.
    Merci, monsieur Fortin.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. MacGregor, pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Le Service canadien du renseignement de sécurité a souvent comparu devant le Comité pour faire le point sur ses activités. Bien sûr, une grande partie de ce qu'ils font de par sa nature même n'est pas déclarée. Ils doivent fonctionner dans un contexte très clandestin. Ils doivent être très conscients que leurs sources pourraient être compromises et que leur vie pourrait être mise en danger s'ils révélaient trop de renseignements.
    Cependant, au cours de la session du printemps, il y a eu un rare moment d'unité lorsque toute la Chambre des communes s'est réunie très rapidement pour adopter le projet de loi C‑70 qui, entre autres choses, a mis à jour une loi analogique dans un monde numérique. Cela a permis au SCRS d'être un peu plus proactif dans la façon dont il communique des renseignements à d'autres entités. J'ai eu des rencontres avec des représentants du SCRS depuis que cette loi a reçu la sanction royale. Le service est encore en train de s'entendre sur la façon de mettre en œuvre certaines mesures, mais il est certes un peu plus proactif.
    En ce qui concerne le travail que font nos organismes de sécurité et de renseignement — et cela comprend les fonctionnaires de Sécurité publique Canada —, si on le compare à certains exemples européens, avez-vous des souhaits quant à la façon dont ces organismes pourraient être un peu plus proactifs avec la population canadienne, de façon apolitique, pour souligner la gravité de la menace et les mesures qui doivent être prises pour la contrer? Pourraient-ils être un peu plus proactifs lorsque nous réussirons à mettre fin à certaines de ces campagnes?
    Je vais peut-être commencer par vous, et nous pouvons demander à tous de commenter rapidement.
    Merci, monsieur MacGregor.
     Je dirais qu'il n'est pas surprenant que la transparence des organismes de sécurité soit limitée, parce que c'est la nature du travail. Cependant, en tant que membre du public, sans une plus grande transparence, il est très difficile de comprendre ce qui se fait en coulisse par opposition à ce qui ne se fait pas du tout.
    Nous l'avons vu dans le cadre de l'enquête publique actuelle sur l'ingérence étrangère, où il semble parfois que le gouvernement canadien ne soit tout simplement pas au courant des campagnes d'ingérence étrangère, et nous découvrons plus tard les allégations. Il semble, du moins aux yeux du public, que le gouvernement canadien ne travaillait pas du tout sur ces cas.
     À mon avis, il est inconcevable qu'un colonel du renseignement militaire de la Russie, Mikhail Mikushin, ait pu passer une décennie au Canada et obtenir deux diplômes, dont un à l'Université Carleton, où ce membre du Club Valdaï a la permanence. Il est inconcevable que les services de renseignement du Canada ne l'aient pas identifié pendant plus d'une décennie. Ce sont les Norvégiens qui ont dû le faire pour nous.
    De même, les Vavilov ont passé plus d'une décennie ici. Ils sont allés aux États-Unis. C'est ainsi que cela fonctionne. Ils deviennent de bons Canadiens — nous sommes tous de bonnes personnes — et ils poursuivent ensuite leur travail en tant qu'alliés de confiance. Leur stratagème a été mis au jour par les Américains.
    Je ne comprends pas. Que font nos services de sécurité?
    Merci.
    Je dois tracer la ligne ici et mettre fin à cette discussion.
    Je remercie tous nos témoins d'être ici aujourd'hui. Merci à tous pour vos commentaires.
    C'est à vous.
     Je n'ai pas de question à ce sujet.
    La témoin, Mme Chyczij, a parlé du Club Valdaï à quelques reprises. Je me demande simplement si elle pourrait envoyer au Comité des renseignements à ce sujet, afin que nous les ayons pour notre rapport.
    J'invite tous les témoins, s'ils ont d'autres renseignements à communiquer au Comité, à les faire parvenir au greffier. Il veillera à ce qu'ils soient traduits et distribués aux membres du Comité.
    Merci beaucoup.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance pour accueillir le prochain groupe de témoins.
(1155)

(1205)
     Nous reprenons nos travaux.
     Nous accueillons, Marcus Kolga, chercheur principal au Macdonald-Laurier Institute, qui est ici à titre personnel, et Aaron Shull, directeur général et avocat général du Centre for International Governance Innovation.
    Nos deux témoins comparaissent par vidéoconférence.
    Avant de passer aux déclarations des témoins, je tiens à rappeler que nous avons demandé à tous ceux qui ont des recommandations et des suggestions à formuler pour le rapport de l'étude sur l'industrie automobile de nous les faire parvenir, espérons‑le, d'ici aujourd'hui. Le plus tôt sera le mieux, car les analystes doivent les intégrer au rapport. Pourrions-nous faire cela?
    Je demanderais également au greffier de rappeler aux gens qu'ils doivent proposer des témoins pour cette étude d'ici vendredi, si possible, afin que nous puissions organiser cela également.
    Nous passons maintenant à M. Kolga, pour une déclaration d'un maximum de cinq minutes.
    C'est à vous.
     Merci, monsieur le président et membres du Comité, de me donner le privilège et l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui. Je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir reconnu la grave menace que l'information russe et les opérations d'influence de la Russie posent pour notre démocratie et notre société.
    Depuis 15 ans, je me consacre à la surveillance et à l'exposition de la guerre de l'information russe et des campagnes d'influence ciblant le Canada et nos alliés. Ce n'est pas une question partisane. La protection de la souveraineté cognitive du Canada et de l'intégrité de notre environnement de l'information est essentielle à la défense de notre démocratie et au maintien de la cohésion sociale.
    La mise en accusation du 4 septembre 2024 par le département de la Justice des États-Unis souligne l'ampleur de cette menace, mais ce n'est que la pointe d'un iceberg beaucoup plus vaste. Depuis plus d'une décennie, les Canadiens collaborent avec des médias d'État russes comme RT et Sputnik News, ainsi qu'avec des plateformes comme le Centre de recherche sur la mondialisation de Montréal, que le département d'État américain considère comme un pilier clé de l'écosystème russe de désinformation. Ils favorisent également la répression transnationale russe et collaborent en la matière, ciblant des militants canadiens comme moi, des communautés et même des parlementaires.
    De plus, des Canadiens continuent de collaborer avec des groupes de réflexion sanctionnés par le Kremlin, comme le Club Valdaï et le Conseil russe des affaires internationales, qui ont joué un rôle central dans le blanchiment de la désinformation et dans les efforts visant à influer sur les politiques et les opinions au Canada par l'entremise des influenceurs qui y étaient liés. Ces entités contrôlées par le Kremlin, y compris RT, ne sont pas que des outils de propagande. Ils sont conçus pour utiliser l'information comme une arme afin de manipuler notre compréhension du monde qui nous entoure, de miner notre démocratie et d'éroder notre tissu social. Ils ne sont pas non plus restreints par des frontières physiques.
     Une déclaration sous serment du FBI publiée en même temps que l'acte d'accusation du 4 septembre par le Département de la justice renferme les procès-verbaux détaillés de réunions de haut niveau et des documents stratégiques de la Russie. L'un des plus proches conseillers de Vladimir Poutine, Sergey Kiriyenko, a participé à ces réunions, soulignant l'importance de ces opérations à titre personnel pour Poutine. Parmi les documents contenus dans la déclaration sous serment figurent des instructions aux agents de propagande russes de surveiller les environnements d'information occidentaux pour déceler les conflits, les points de friction et les crises nationaux, et de créer artificiellement et d'intensifier les tensions dans les pays alliés avec les États-Unis. Dans ces documents, on demande aux agents de créer de faux récits et mensonges, qui sont ensuite relayés par des influenceurs occidentaux et des plateformes médiatiques étatiques comme RT. Affaires mondiales Canada a maintenant désigné RT comme une branche de l'appareil de renseignement de la Russie qui participe à des manipulations psychologiques et à des opérations de désinformation, tandis que ses cyberacteurs ciblent les pays occidentaux, y compris les infrastructures essentielles canadiennes.
     La mise en accusation aux États-Unis révèle la participation importante de Canadiens aux activités de RT. On y allègue qu'une entreprise mise sur pied par deux Canadiens a reçu 10 millions de dollars de RT pour créer une plateforme de transmission de ces récits à des auditoires canadiens et américains. Bien que cela puisse sembler une somme importante, ce n'est qu'une fraction des 3 milliards de dollars que la Russie dépense annuellement en opérations d'information à l'échelle mondiale. L'acte d'accusation allègue que les Canadiens produisaient du contenu pour RT dès mars 2021 et que RT a acheminé de l'argent à ces personnes par l'intermédiaire de sociétés fictives du Royaume-Uni pas plus tard que cette année. RT a été ajouté à la liste des entités qui font l'objet de sanctions du Canada en juillet 2022, ce qui soulève de sérieuses questions sur les violations potentielles des lois canadiennes en matière de sanctions. Le Comité devrait demander si la GRC enquête sur ces Canadiens et d'autres personnes qui collaborent avec des entités contrôlées par le Kremlin.
    La mise en accusation du Département de la justice et la déclaration sous serment du FBI sont très révélatrices. Elles montrent clairement que les opérations russes ciblent le Canada, une menace qui persiste depuis près de 90 ans. Le cas le plus alarmant des opérations de renseignement russes au Canada, et dont on a trop peu fait de cas, est peut-être celui du colonel Mikushin du service du renseignement militaire, le GRU. Pendant plus d'une décennie, Mikushin a fréquenté l'Université Carleton et l'Université de Calgary. Il a même écrit un article pour la revue Canadian Naval Review et a été bénévole pour une campagne politique canadienne. Ce qui est le plus troublant, c'est que ce ne sont pas le SCRS, le Centre de la sécurité des télécommunications, le CST, ou la GRC qui ont découvert récemment que Mikushin est un colonel du GRU, mais bien le renseignement norvégien. C'est la Norvège qui l'a découvert, et non le Canada. Le service fourni par Mikushin aux opérations de renseignement de la Russie était si important pour Vladimir Poutine qu'il a été inclus dans le swap de prisonniers du mois d'août, retournant en Russie aux côtés des autres assassins et pirates informatiques du GRU de Poutine.
(1210)
     Il est peu probable que Mikushin ait été le seul agent de renseignement russe à travailler au Canada et que les Canadiens à la solde de Tenet Media ne soient pas les seuls Canadiens à collaborer avec la chaîne RT et d'autres médias du Kremlin. Pour arriver à perturber, décourager et faire cesser ce genre d'opérations, nous devons obliger ces médias et leurs collaborateurs canadiens à rendre des comptes, en menant des enquêtes sur eux et en les dénonçant, en appliquant nos lois en vigueur, en mettant en œuvre de nouveaux outils législatifs comme le Registre de transparence en matière d'influence étrangère et le projet de loi C‑70 et en cessant d'ignorer délibérément cette menace.
    Merci. Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Kolga.
    Nous entendrons maintenant M. Shull.
    Monsieur Shull, vous disposez de cinq minutes. Allez‑y.
    Je remercie également les membres du Comité. Je suis ravi de vous revoir.
    Je vais commencer par rappeler ce que nous savons tous, à savoir que les campagnes de désinformation russes représentent une grave menace pour notre démocratie et qu'elles s'inscrivent dans ce que nous appelons une chaîne de destruction calculée de la désinformation. Cette opération consiste d'abord par détecter les vulnérabilités sociétales, puis à élaborer du contenu trompeur afin d'exploiter ces faiblesses. Propagés au moyen de robots et de faux comptes, ces discours mensongers acquièrent une importance indue et sont relayés par des influenceurs involontaires. En manipulant la réaction du public, ces acteurs sèment la discorde et la confusion, tout en atteignant leur objectif, celui de miner nos processus démocratiques.
    Le Canada a réagi en mettant en place diverses mesures. L'une d'elles est le mécanisme de réponse rapide, qui exerce une surveillance et traite les cas de manipulation de l'information par un État étranger. Nous avons également le programme de contributions en matière de citoyenneté numérique, mis en place par Patrimoine canadien, qui appuie ces efforts en faisant la promotion de la culture numérique et en sensibilisant le public.
    Nous devons toutefois redoubler d'efforts pour renforcer nos défenses. Premièrement, en élargissant notre régime de sanctions en coordination avec nos alliés, nous pourrons imposer des sanctions concrètes aux entités qui perpétuent la désinformation. Deuxièmement, en utilisant les cybercapacités offensives du Centre de la sécurité des télécommunications, nous pourrons perturber les réseaux de désinformation à la source, en nous inspirant du modèle efficace que l'Agence de sécurité américaine, la NSA, a utilisé durant la période précédant les dernières élections aux États‑Unis. Enfin, nous devons nous doter d'une stratégie nationale de résilience numérique mobilisant toutes les sphères de la société.
    Cette stratégie nécessiterait la collaboration des gouvernements provinciaux et territoriaux afin d'intégrer la culture numérique dans les programmes scolaires pour faire en sorte que les élèves acquièrent, dès leur jeune âge, les compétences de pensée critique nécessaires pour s'orienter dans le monde numérique. De plus, la mise en place de programmes flexibles d'éducation des adultes, qui seraient dirigés par les établissements d'enseignement avec le soutien d'organismes communautaires, permettrait de fournir aux populations vulnérables et au grand public les outils nécessaires pour détecter et contrer la désinformation.
     Le lancement de campagnes de sensibilisation, sous la coordination de pôles communautaires comme les bibliothèques et les établissements culturels locaux, renforcerait ces efforts et ferait en sorte que la littératie numérique devienne une priorité nationale.
    Permettez‑moi de m'attarder un moment sur ce point. La littératie numérique doit devenir une priorité nationale. En favorisant la collaboration entre le gouvernement, les organisations de la société civile et les établissements d'enseignement, nous pourrons créer un front unifié et résilient contre la manipulation de l'information par des acteurs étrangers, tout en aidant les Canadiens à analyser d'un œil critique l'information qu'ils reçoivent et en réduisant l'impact de la désinformation au sein de la société.
    De récentes analyses du renseignement, notamment le rapport du SCRS sur la guerre menée par Moscou en Ukraine et ses répercussions sur les activités d'ingérence russes au Canada, mettent en évidence le risque auquel nous faisons face. Même si le Canada se distingue des autres pays occidentaux par sa forte exposition aux activités d'influence étrangères menées par la Russie, ces opérations persistent et ciblent des groupes précis, notamment la diaspora russe du Canada, dans le but de promouvoir la désinformation sur le conflit en Ukraine.
    Selon le SCRS, la Russie fait appel à des agents pro‑russes et à des influenceurs, volontaires ou non, pour amplifier les messages visant à discréditer les politiques du Canada à l'endroit de l'Ukraine et à dénigrer la diaspora ukrainienne. Ces tentatives sont particulièrement inquiétantes, en raison de l'importance de la population russophone au Canada et des efforts ciblés du Kremlin pour exploiter les divisions au sein de la société canadienne. Le SCRS souligne également que, même si les activités d'influence de la Russie à l'étranger ont diminué dans certaines régions à cause de sa perte de réputation dans les pays occidentaux, nous ne pouvons pas nous permettre de sous‑estimer cette menace constante. Les acteurs étatiques russes demeurent déterminés à relayer des informations mensongères dans le but de miner la cohésion sociale et la confiance dans les institutions canadiennes et de contrer la position ferme du Canada à l'égard de l'Ukraine.
    Notre compréhension de cette menace ne cesse d'évoluer, et les recherches récentes nous apportent de précieux renseignements. Le rapport intitulé Canadian Vulnerability to Russian Narratives About Ukraine, rédigé par mon collègue Marcus Kolga, révèle qu'un pourcentage élevé de Canadiens, soit 71 %, a été exposé à au moins un message mensonger propagé par le Kremlin. Bon nombre de ces gens croient en ces discours ou ne sont pas certains qu'ils sont mensongers. Cela met en évidence le besoin urgent de mettre en place des programmes exhaustifs d'éducation aux médias et de sensibilisation accrue du public afin de contrer la propagation de la désinformation russe au Canada.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je répondrai volontiers aux questions.
(1215)
    Merci.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Monsieur Shipley, nous allons commencer par vous. Vous disposez de six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie également nos deux témoins de se joindre à nous aujourd'hui.
    Je vais commencer par M. Kolga.
    Monsieur Kolga, bienvenue à nouveau à notre comité. J'ai une question à deux volets à vous poser. Premièrement, pouvez‑vous nous expliquer comment la Russie utilise la répression transnationale pour décourager la dissidence et exercer un contrôle sur des personnes résidant au Canada?
    Deuxièmement, comment pouvons‑nous, en tant que législateurs, mieux protéger les groupes de la diaspora contre ces formes de contrôle et de coercition?
    La répression transnationale russe constitue en effet une menace persistante et croissante pour notre démocratie. On parle de répression transnationale quand un régime étranger utilise la coercition, les menaces, l'intimidation et la violence pour discréditer et faire taire les critiques du régime, notamment les activistes, les groupes minoritaires et même les parlementaires. C'est ce qui se passe au Canada. Dans les pires cas, le Kremlin a tenté d'empoisonner ses détracteurs, comme les Skripal au Royaume‑Uni, ou se livre à des actes de brutalité, par exemple contre le collègue d'Alexeï Navalny, Leonid Volkov, en Lituanie.
    Au Canada, nous avons constaté que le gouvernement russe surveillait des groupes de la diaspora, lançait des campagnes visant à discréditer des parlementaires et déployait des efforts pour fomenter la haine à l'endroit de la diaspora ukrainienne. J'ai moi‑même été maintes fois la cible du Kremlin et de ses agents et influenceurs au Canada qui cherchaient à m'intimider et à me discréditer. Les médias d'État russes publient régulièrement des articles à mon sujet. D'anciens diplomates, universitaires et fonctionnaires canadiens liés à des groupes de réflexion du Kremlin, comme le club de Valdaï, de même que des entreprises russes et un organisme de promotion commerciale, ont déjà tenté de me discréditer et de salir ma réputation au moyen de campagnes de lettres toxiques. J'ai été l'un des premiers Canadiens à figurer sur la liste des sanctions du Kremlin.
    En 2019, j'ai reçu de nombreux courriels de menace de mort contre ma famille et moi‑même provenant d'adresses IP au Canada et à Moscou. Quand j'ai demandé l'aide de la GRC, on m'a dit de signaler ces menaces aux forces de l'ordre locales qui, elles, m'ont dit de les signaler à GRC, qui m'a ensuite orienté vers le Service canadien du renseignement de sécurité. Comme nous le savons tous, le SCRS est un trou noir qui se concentre surtout sur la collecte de renseignements. Heureusement pour moi, au bout de quelques mois, un agent de la région de York s'est intéressé à mon dossier et a ouvert une enquête. Un coupable a été identifié, un nationaliste russe radicalisé qui vivait entre Thornhill et la Floride. Par chance, le service de police régional de York nous a invités à participer, ma famille et moi, à une séance d'information sur les droits des victimes et nous a donné un numéro de téléphone à composer en cas d'urgence.
    Je dois également mentionner que pour la communauté ukrainienne, les tactiques d'incitation à la haine de la Russie ont donné lieu à des actes de vandalisme contre des membres de la communauté ukrainienne, notamment des entreprises, des domiciles et même des véhicules. Des étudiants ont été victimes d'intimidation et le Congrès des Ukrainiens canadiens a même été obligé d'établir une ligne téléphonique d'urgence nationale d'aide aux victimes.
     Des parlementaires ont également été ciblés par la répression transnationale. En 2018, la vice‑première ministre, Chrystia Freeland, et sa famille ont été la cible d'une campagne de désinformation qui déformait et manipulait des faits historiques dans le but de ternir sa réputation, celle de toute sa famille et, en fait, celle de toute la communauté ukrainienne. Un article a d'abord été diffusé dans un blogue de Moscou qui était géré par un prétendu ex‑agent du KGB. Cet article a ensuite été relayé dans la constellation des plateformes intermédiaires en ligne alignées sur le Kremlin. Ces mensonges ont fini par se métastaser dans nos médias nationaux, qui ont volontairement relayé cette opération de désinformation russe très bien orchestrée contre elle. Cela ressemble un peu à la campagne du Global Times lancée par la Chine, en 2021, contre l'ancien chef du Parti conservateur, Erin O'Toole. En passant, c'est mon organisation, DisinfoWatch, qui a été la première à dénoncer cette campagne.
    La campagne contre Mme Freeland démontre également que la Russie se livre à ce jeu entre les campagnes électorales, et non pas seulement durant, afin d'influer sur les résultats électoraux. C'est un fait important qui a clairement échappé à la commission chargée d'enquêter sur l'ingérence étrangère dans nos élections. Sur le plan de la sécurité nationale, il s'agit là d'une grave menace, parce que nous laissons actuellement la porte grande ouverte à la Russie, à la Chine et à l'Iran pour venir cibler et attaquer nos citoyens et nos résidents. Nous devons redoubler d'efforts pour protéger ces collectivités vulnérables.
(1220)
    Monsieur Kolga, pourriez‑vous déplacer votre microphone juste au‑dessus de votre lèvre supérieure?
    Est‑ce mieux ainsi?
    Peut‑être un peu plus bas encore.
    Allez‑y, monsieur Shipley.
    Merci, monsieur le président. Monsieur Kolga, je vous remercie pour votre réponse et je vous félicite aussi pour le courage dont vous faites preuve dans tout ce que vous entreprenez. Merci d'être de retour parmi nous aujourd'hui.
    Ma deuxième question est également pour vous, monsieur Kolga. Les Canadiens ont récemment appris que le gouvernement libéral avait dépensé 340 000 $ de l'argent des contribuables pour financer un film de propagande russe intitulé Russians at War. À votre avis, est‑il approprié que le gouvernement du Canada finance un film de propagande russe?
    La réponse est non.
    Le contenu et la nature de ce film ont largement été commentés dans les médias au cours des dernières semaines. Il y a cependant un point qui n'a pas été suffisamment bien expliqué, c'est le manque flagrant de rigueur du processus d'approbation du financement pour ce genre de projets, même pour les festivals de films qui décident de présenter des films comme celui‑ci. Nous fermons les yeux sur la menace posée par les activités d'information russes, la façon dont elles tentent de nous manipuler et la façon dont elles y parviennent.
    En ce qui concerne ce film, il aurait suffi d'une simple vérification des antécédents de la cinéaste. Le fait qu'elle ait réalisé 12 films pour la chaîne RT au cours de la dernière décennie — depuis environ six ans — aurait dû sonner l'alarme. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, nous savons que RT est un prolongement de l'appareil de renseignement de la Russie. Là encore, il aurait suffi de lancer le nom de la cinéaste dans Google pour vérifier.
    Par contre, nous devrions soutenir d'excellents journalistes russes, notamment Dmitry Muratov, le rédacteur en chef de Novaya Gazeta, qui est à Toronto aujourd'hui à titre de conférencier à un gala de l'organisation Journalistes pour les droits humains. Il a le courage de dénoncer le Kremlin, malgré toutes les menaces qui pèsent contre lui, et il continue de vivre à Moscou.
    Des centaines de journalistes russes indépendants vivent à l'étranger et méritent notre soutien. Ils sont prêts à dire la vérité sur la guerre et ils le font. Ils ont été forcés de s'exiler.
    Nous pourrions faire beaucoup plus. Je le répète, nous devons faire preuve de prudence quand nous finançons quelqu'un qui propose un contenu au sujet de la Russie.
(1225)
    Merci, monsieur Shipley.
    C'est maintenant au tour de Mme Damoff. Vous disposez de six minutes. Allez‑y.
    Désolé, monsieur le président. Je ne m'étais pas rendu compte que j'étais la prochaine sur la liste. Je vous remercie.
    Je remercie également nos deux témoins de leur participation aujourd'hui.
    Monsieur Kolga, c'est un plaisir de vous revoir.
     Nous avons beaucoup parlé de la désinformation concernant l'Ukraine, mais le témoin précédent a également parlé de la désinformation sur la crise du logement, l'inflation, l'immigration et le premier ministre alimentée par la Russie et qui se retrouve dans le discours canadien.
    Monsieur Kolga, commençons par vous. Pouvez‑vous nous parler de l'influence que la Russie exerce sur ces discours?
    Merci de votre question. Moi aussi, je suis ravi de vous revoir.
    C'est une excellente question. Je pense que nous ne sommes pas vraiment capables de mesurer directement l'impact de ces messages. Vous avez raison de dire que les médias d'État russes et leurs influenceurs, tant à l'extrême gauche qu'à l'extrême droite — il est important de noter qu'ils sont des deux côtés de l'échiquier politique —, ciblent les enjeux les plus polarisants au sein de la société aujourd'hui. Ils ciblent les deux extrêmes et utilisent des influenceurs, des plateformes intermédiaires et des médias d'État, comme la chaîne RT, dans le but de semer la discorde dans les deux pôles et de démanteler la cohésion de notre société.
    Les documents mentionnés dans l'affidavit du FBI — et je recommande fortement à tous les membres du Comité de prendre connaissance de cet affidavit et des documents qui y sont mentionnés — énoncent clairement ces objectifs qui correspondent tout à fait à ce que j'ai dit tout à l'heure. C'est ce que cherchent ces influenceurs. Ils scrutent notre espace médiatique. Ils fouillent les médias sociaux pour trouver des sujets précis, puis ils élaborent des messages au Kremlin et avec les organisations qui travaillent avec eux pour s'attaquer à ces messages. C'est vraiment ce qu'ils ont fait.
    Dans l'affidavit en question, qui est lié à l'affaire Doppelganger, l'une des principales tactiques consistait à créer de faux médias d'information. D'après moi, cela n'a probablement pas eu beaucoup d'impact et je pense que nous y avons accordé trop d'attention. Par contre, nous ne nous sommes pas concentrés sur le rôle que jouent les influenceurs dans ces campagnes.
    Selon l'affidavit, près de 2 000 influenceurs occidentaux ont été utilisés pour amplifier ces messages. Je sais que des influenceurs canadiens en sont de ce nombre, tant à l'extrême gauche qu'à l'extrême droite. L'acte d'accusation visant Tenet Media nous apprend clairement que des Canadiens contribuent à l'amplification de ces messages.
    C'est là que se trouve la véritable menace. Nous ne savons pas quel en est l'impact, mais un élément important de la désinformation russe consiste à effacer toute empreinte de l'État russe et de faire en sorte que ces messages soient amplifiés au sein de notre propre écosystème.
    En terminant, j'ajoute que dans le cadre d'une étude que nous avons réalisée avec Digital Public Square, en 2023, nous avons constaté que 200 000 comptes Twitter faisaient activement la promotion de ces messages auprès d'auditoires canadiens, et que plus de 90 % d'entre eux étaient des comptes d'extrême gauche et d'extrême droite. Ces chiffres nous permettent donc d'évaluer l'impact.
     Il y a un sous-reddit canadien où il est apparu que quatre comptes d'utilisateurs représentaient 92 % des publications, et qu'il s'agissait de propagande gérée par les Russes.
    Je ne suis pas sur Reddit, mais je me demande si vous pourriez nous parler de la manière dont ces commentaires sont diffusés sur des plateformes telles que Reddit, Rumble et autres… Les Canadiens peuvent se dire que s'ils ne sont pas sur Reddit, ils ne sont donc pas influencés par eux, mais comment ces commentaires passent-ils de ces plateformes au discours commun, de sorte que les gens croient que la désinformation est vraie, même si elle ne l'est pas?
    Je répondrai très rapidement, et je laisserai mon collègue répondre également.
    Il n'est pas nécessaire d'être sur Reddit pour être exposé à ce genre de récits. Vous avez parlé de Rumble. Il s'agit d'une plateforme très importante pour l'extrême droite. Il vous suffit d'être sur Twitter ou tout autre compte des médias sociaux. Ces récits sont diffusés partout par les agents russes, de sorte que…
(1230)
    Je vous interromps. Même si vous n'êtes pas sur Twitter… Une personne âgée est venue me voir dans mon bureau après avoir entendu des informations dans un groupe de discussion. Il n'est pas sur Twitter, mais ces plateformes de médias sociaux filtrent dans les groupes de discussion des personnes âgées.
     Est‑ce exact?
    Vous avez tout à fait raison, parce qu'ils passent des médias d'État russes aux médias sociaux et aux influenceurs, puis ils migrent également vers des plateformes médiatiques alternatives que certains membres de notre communauté peuvent utiliser parce qu'ils n'ont pas confiance dans les médias grand public ou qu'ils ne voient pas l'intérêt de ce type de médias. C'est ainsi que ces récits se propagent à partir des médias d'État — encore une fois, les médias sociaux — par l'intermédiaire de plateformes mandataires.
     Comme nous l'avons vu avec Tenet Media, le Kremlin paie également ce type d'influenceurs. Les personnes qui participent à ces groupes de discussion consomment peut-être des médias provenant de ce type de plateformes. Tenet Media est la seule plateforme dont nous ayons connaissance à l'heure actuelle. Je suis certain, comme je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, qu'il s'agit seulement de la partie visible de l'iceberg.
    Monsieur Shull, je ne sais pas combien de temps il me reste, mais souhaitez-vous faire un commentaire à ce sujet?
    Oui, bien sûr. Pour revenir sur ce qu'a dit M. Kolga, car je ne veux pas laisser passer ce point, ils poussent à la fois des idéologies de gauche et de droite. Cela signifie qu'ils ne se soucient pas du message; la question est donc de savoir quel est l'objectif. Il s'agit de polariser les sociétés. Il s'agit de saper la confiance dans les institutions. Il s'agit d'exploiter les tensions sociales. Il s'agit de discréditer les opposants. Il s'agit de faire évoluer l'opinion publique en matière de politique étrangère. Il s'agit de promouvoir les intérêts russes. Tout cela pour semer la confusion et susciter la méfiance. C'est ce qu'ils essaient de faire.
    Votre question était pertinente, mais elle concernait l'approche tactique. L'approche tactique consiste à choisir les plateformes que l'on utilise, le message que l'on envoie, sa longueur ou le nombre de caractères qu'il contient, mais l'essentiel est que le courant sous-jacent à tout cela soit constitué d'objectifs plutôt mal intentionnés.
    Merci, madame Damoff.

[Français]

    Monsieur Fortin, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, messieurs Kolga et Shull. Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui pour discuter de cette importante étude.
    Monsieur Kolga, vous avez mentionné un affidavit du Federal Bureau of Investigation, ou FBI. Ce document expliquerait un peu la situation telle que vue par le FBI aux États‑Unis. En avez-vous une copie? Pouvez-vous en faire parvenir une au Comité?

[Traduction]

     Oui, je le ferai.

[Français]

    Merci, monsieur Kolga.
    Vous avez dit tantôt avoir été vous-même victime de comportements répréhensibles, mais ne pas avoir su où adresser vos plaintes. La Gendarmerie royale du Canada, ou GRC, la police régionale, municipale ou autre, ainsi que le Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, se lancent tous la balle. Un témoin appartenant au groupe précédent a touché le sujet en suggérant qu'un organisme destiné exclusivement à combattre l'ingérence soit créé.
    J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet. À votre avis, cela pourrait-il répondre aux besoins et aider à combattre ces activités d'ingérence?

[Traduction]

     Je suis tout à fait d'accord pour dire qu'une agence, une unité au sein du gouvernement, pour soutenir les victimes de la répression transnationale serait extrêmement utile.
    Lorsque ce type d'attaque se produit, c'est psychologiquement éprouvant. Il est très difficile d'y faire face. Des réputations sont entachées. Il y a des répercussions sur les membres de la famille. Pour l'instant, il n'y a aucun soutien pour les victimes.
     Je dirais également qu'il y a des centaines, voire des milliers, de victimes de la répression transnationale au Canada à l'heure actuelle. Nous avons vu comment le gouvernement chinois a ciblé sa propre diaspora et comment il a ciblé les activistes ouïghours et tibétains dans ce pays.
    Le seul soutien dont ils disposent, c'est lorsque nous nous parlons. Nous avons un réseau informel et nous essayons de faire tout ce que nous pouvons pour nous entraider. Le gouvernement a vraiment un rôle à jouer pour soutenir ces victimes, mais aussi pour appliquer les lois en vigueur en mettant en œuvre le projet de loi C‑70, qui assurera un certain degré de protection aux victimes de la répression transnationale.
    Je dirais également que le Canada a un rôle à jouer dans la création d'un réseau international de nations où il y a des victimes qui sont la cible de répression transnationale. Le Canada n'est pas le seul pays où il y a des victimes. Nous savons que des citoyens britanniques et suédois, entre autres, ont été pris pour cible. Travailler ensemble, peut-être dans le cadre du G7 ou de l'OTAN, pourrait être utile pour créer ce réseau international et un front international, comme une coalition, pour faire reculer la répression transnationale.
(1235)

[Français]

    Merci, monsieur Kolga.
    De votre côté, avez-vous fait des démarches auprès d'une instance gouvernementale fédérale dans le but de créer une telle agence ou un poste de relais où l'on pourrait adresser des plaintes en matière d'ingérence?

[Traduction]

    Je ne pense pas l'avoir fait officiellement. J'ai fait cette suggestion dans plusieurs rapports. En tant que témoin dans d'autres comités, j'ai fait cette suggestion.
    Je voudrais faire une suggestion concrète dès maintenant. Une telle unité pourrait être placée sous l'autorité du commissaire à la transparence de l'influence étrangère. Il s'agit d'un bureau indépendant qui doit être créé par le biais du registre et qui pourrait être hébergé par ce dernier, étant donné que le commissaire serait relativement indépendant.

[Français]

    Merci, monsieur Kolga.
    Je voudrais aborder une dernière chose avec vous.
    Vous nous avez parlé du manque de soutien envers des personnes que l'on pourrait appeler « les vrais journalistes ». Je ne me souviens pas précisément de l'expression que vous avez employée. Si j'ai bien compris, il s'agit de journalistes indépendants russes qui travailleraient davantage à l'extérieur du territoire russe. Ces journalistes relaient de l'information fiable pouvant être utile dans la lutte contre les ingérences étrangères.
    J'aimerais avoir plus de détails sur cette question. Qui sont ces vrais journalistes? Comment peut-on les reconnaître? Que pourrait-on apporter comme soutien pour contribuer à ce qu'ils continuent leur travail précieux?

[Traduction]

    J'ai eu le privilège de travailler avec des militants des droits de la personne et avec des journalistes indépendants russes depuis une vingtaine d'années. La plupart de ces journalistes, qui étaient autrefois basés à Moscou — que ce soit il y a 15 ans ou même il y a deux ans, avant le début de l'invasion à grande échelle — ont été contraints de fuir la Russie.
    Il s'agit de médias tels que Novaya Gazeta, Echo of Moscow, Mediazona, Proekt Media et TV Rain. Ils sont nombreux. Ils sont basés dans des villes comme Riga, Vilnius, Varsovie et Berlin. Ils opèrent à partir de ces villes, essayant du mieux qu'ils peuvent de contourner les censeurs de l'État russe et de diffuser les faits et la vérité en Russie. La vérité et les faits sont toxiques pour le régime de Poutine.
    À l'heure actuelle, le Canada soutient de façon assez importante ces médias en finançant de la formation et en appuyant la création de contenu, mais nous devons faire beaucoup plus. Nous devons travailler avec nos alliés pour garantir la pérennité de ces médias. Tous leurs revenus en Russie se sont complètement taris. Nous devons travailler avec nos alliés pour nous assurer qu'ils sont en mesure de poursuivre leurs efforts, encore une fois, pour promouvoir les faits et la vérité en Russie. Ce sont les faits et la vérité qui conduiront finalement à un changement vers la démocratie en Russie et à une paix durable en Europe.

[Français]

    Je pense qu'il ne me reste pas beaucoup de temps. Je vais donc être bref.
     Comment reconnaît-on ces journalistes? J'imagine qu'il n'y a pas de registre, quelque part, de véritables journalistes russes. Y a-t-il une façon de les repérer et un processus pour les appuyer?

[Traduction]

    Vous avez tout à fait raison, il n'existe pas de registre ni de liste de ces journalistes, mais certains Canadiens, comme moi, ont travaillé en étroite collaboration avec eux et continuent de le faire.
    Je pense qu'en collaborant avec des personnes comme moi et des organisations comme Journalists for Human Rights, qui travaillent activement dans ce domaine, nous pouvons créer une liste de ce genre et veiller à ce que les journalistes et les plateformes qui correspondent aux valeurs démocratiques reçoivent notre appui.

[Français]

     Merci, messieurs.
     Merci.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. MacGregor, qui a la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président, et merci aux deux témoins d'être ici aujourd'hui.
     L'ingérence étrangère a évidemment été un sujet brûlant cette année. Nous avons eu droit aux révélations explosives du rapport du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, et nous avons également vu la Chambre des communes s'unir dans une rare manifestation de soutien unanime à un texte législatif important, le projet de loi C‑70. Nous avons certainement hâte de savoir comment nos organismes de renseignement et de sécurité se serviront de cette loi pour renforcer leurs capacités.
    J'aimerais revenir un peu en arrière parce que, bien entendu, messieurs Kolga et Shull, vous avez tous deux été de très bons témoins dans le cadre de notre précédente étude sur la position du Canada en matière de sécurité vis‑à‑vis de la Russie. Votre témoignage en 2022 a certainement aidé le Comité à formuler beaucoup de recommandations au gouvernement. C'est dans ce contexte que j'aimerais que vous interveniez tous les deux.
    Y a‑t‑il autre chose que vous aimeriez dire au Comité? Si vous comparez les recommandations que nous avons formulées dans ce rapport, qui a été présenté à la Chambre des communes en mars 2023, et où nous en sommes aujourd'hui, y a‑t‑il quelque chose de plus sur lequel vous souhaiteriez que le Comité se concentre, alors que certaines de ces recommandations sont encore en cours d'élaboration? Y a‑t‑il quelque chose que nous devrions souligner dans ce contexte?
     Monsieur Kolga, je vais commencer par vous, puis je passerai à M. Shull.
(1240)
    Je vais essayer d'être bref.
     Je pense que le gouvernement a fait des progrès, et même des progrès importants, en ce qui concerne les opérations d'influence étrangère. Je pense que le mécanisme de réponse rapide d'Affaires mondiales Canada en est un excellent exemple. Il a démarré assez lentement, il y a six ou sept ans, mais il a vraiment fait preuve de beaucoup d'audace dans ses efforts pour exposer aux Canadiens des récits d'information et des tactiques étrangères afin de les sensibiliser. C'est exactement ce qu'il faut. C'est cette audace à exposer clairement ces récits et ces tactiques qui contribuera à sensibiliser les gens.
    Le projet de loi C‑70, comme vous l'avez mentionné, est un pas dans la bonne direction. Nous ne savons toujours pas comment cela sera mis en œuvre.
    Le groupe précédent a mentionné le fait que des changements majeurs ont été apportés à la Loi sur le SCRS. Il est extrêmement important de permettre au SCRS de communiquer les menaces qu'il détecte et observe aux groupes ethniques vulnérables, par exemple. Il est extrêmement important qu'ils puissent communiquer avec des organisations de la société civile comme DisinfoWatch pour nous faire savoir ce qu'ils voient, afin que nous puissions dénoncer certains de ces récits et tactiques.
    Il sera également essentiel de veiller à ce que le registre pour la transparence en matière d'influence étrangère soit correctement mis en œuvre, afin de protéger les Canadiens contre ce type d'opérations et contre la répression transnationale.
    La dernière chose que je dirai, c'est que nous devons appliquer nos lois sur les sanctions. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, dans l'affaire Tenet Media, nous savons maintenant, grâce aux États‑Unis et au ministère de la Justice, que deux Canadiens ont reçu des financements et des fonds directement de RT — enfin, par l'intermédiaire de sociétés-écrans britanniques. Ils ont reçu ce financement en 2024, selon l'acte d'accusation.
    Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, RT était déjà sur notre liste de sanctions en 2022. Cela soulève un certain nombre de questions au regard de la Loi sur les mesures économiques spéciales, qui nous permet d'imposer des sanctions à ces entités. On se demande si cette loi a été violée.
    L'application de nos lois sur les sanctions est la première chose que nous devons faire.
    Merci.
    Monsieur Shull.
     Par votre intermédiaire, monsieur le président, je voudrais remercier M. MacGregor pour sa question.
    Au risque de passer pour un flagorneur, je pense que vous avez tous fait un excellent travail sur ce rapport. J'ai particulièrement aimé la cinquième recommandation, qui concernait les déductions pour amortissement et les mesures fiscales pour les contrôles de base sur le cyberespace.
    Je voudrais évoquer un point plus important qui n'a pas été abordé lors de cette discussion. Il s'agit de ce dont M. Kolga a parlé lorsqu'il a été ciblé. Un éminent Canadien est pris pour cible, et personne ne sait qui doit intervenir en premier. Nous ne pouvons pas accepter cela. Nous devons examiner le fonctionnement de la GRC. Bien que j'aime l'idée que le commissaire assume une certaine responsabilité, dans sa forme actuelle, cela ne fait pas partie de son mandat.
    C'est une activité criminelle. Traitons‑la comme telle. À quoi ressemblerait une GRC repensée si elle suivait l'exemple du FBI, en mettant davantage l'accent sur la sécurité nationale, en renforçant ses capacités de contre-espionnage et en améliorant sa capacité à coordonner et à collaborer avec ses alliés? À la question « Qui est responsable? » lorsque ce type d'événement se produit, chaque personne connaît la réponse.
    Merci.
    Monsieur Kolga, je me tourne vers vous pour ma dernière minute. Notre dernier groupe a utilisé l'expression « idiots utiles ». Vous avez parlé de Russia Today et du fait que nous devons vraiment commencer à mettre en œuvre notre régime de sanctions. Mais je voudrais parler des influenceurs eux-mêmes.
     L'ignorance est-elle une défense? Pensez-vous que ces personnes sont activement au courant? Quelle est la part de responsabilité de ces personnes? Comment cela devrait‑il influencer les recommandations de notre comité au gouvernement?
(1245)
    C'est une très bonne question. Nous savons depuis 2012 environ, et même avant cela, car je pense que RT a été créée en 2005, qu'il s'agirait d'un organe de propagande du gouvernement russe. Tous ceux qui figurent, ou du moins les experts, les universitaires et les activistes qui continuent de figurer sur RT aujourd'hui…
    En fait, nous savons qu'un militant canadien a participé la semaine dernière à une émission de RT. Nous ne savons pas si cette personne a reçu une compensation pour sa participation, mais le fait est que nous avons des Canadiens qui savent exactement ce qu'est RT. Ils savent exactement quel est son rôle dans notre espace d'information, et ils continuent à y figurer.
    Cela comprend ceux qui y figuraient avant 2022; nous connaissons au moins deux universitaires. Un universitaire canadien était ce que l'on pourrait appeler un « chroniqueur vedette » pour RT jusqu'au 24 février 2022, date de l'invasion totale. Si vous allez sur RT et que vous cherchez le nom de cet universitaire canadien, vous verrez des centaines de colonnes. Cette personne produisait du contenu pour RT sur une base hebdomadaire. Il s'agissait d'un expert de la Russie. Il savait exactement ce qu'il faisait et à qui il s'adressait.
    Je sais que le groupe précédent a également mentionné les groupes de réflexion russes tels que le club Valdai. Il existe plusieurs…
    Je suis désolé, monsieur. Je dois mettre un terme à la discussion. Pouvez-vous conclure rapidement?
    Je me ferai l'écho des intervenants précédents, qui ont dit que nous devrions nous intéresser au club Valdai et à d'autres groupes de réflexion russes, dont plusieurs, probablement une douzaine, d'universitaires canadiens sont membres.
     Merci.
    Nous entamons maintenant notre deuxième tour avec M. Motz.
    Monsieur Motz, la parole est à vous pendant cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, mesdames et messieurs, pour votre présence.
    Tous les intervenants qui se sont succédé aujourd'hui ont parlé de la désinformation et de la mésinformation, et de la manière dont elles minent la démocratie canadienne, érodent la confiance dans nos institutions publiques et polarisent les Canadiens. Faisons-nous assez pour lutter contre ce phénomène, à votre avis?
    Monsieur Kolga.
    Non. Nous pouvons toujours en faire plus. Je pense avoir mentionné dans ma déclaration préliminaire que la Russie dépense 3 milliards de dollars par an pour ces opérations.
    Les opérations qu'elle finance visent sa propre population, mais aussi la nôtre. L'acte d'accusation du département de la Justice des États-Unis indique clairement que le gouvernement russe a dépensé 10 millions de dollars pour tenter d'influencer directement notre espace d'information. Nous sommes loin d'égaler la Russie en ce qui concerne les ressources que nous déployons pour contrer ce genre de discours. Comme je l'ai dit précédemment, je pense qu'il y a des signes d'espoir et quelques points positifs où nous essayons de nous défendre, mais encore une fois, nous devons faire beaucoup plus.
    Je pense que le groupe de témoins précédent a également mentionné que nous devrions envisager une approche à l'échelle de la société. Nous devrions nous assurer que nos médias comprennent bien ces opérations et qui sont les influenceurs, par exemple, afin qu'ils ne les invitent pas par inadvertance à participer à des émissions de débat ou à des programmes politiques.
    Nous devons nous assurer que nos…
     Monsieur Kolga, je vous interromps.
    Vous avez mentionné que nos médias doivent être sensibilisés. Cela me fait penser à une préoccupation que beaucoup de Canadiens ont, je crois. J'ai certainement cette préoccupation.
    Connaissez-vous des journalistes canadiens, anciens ou actuels, qui ont agi en tant qu'agents du Kremlin?
    Dans le passé — ces opérations remontent aux années 1930 — un agent du GRU de l'époque, nommé Igor Gouzenko, a quitté l'ambassade soviétique en 1945 avec une valise pleine d'informations. Elle contenait les noms de dizaines de Canadiens qui collaboraient directement avec les Soviétiques à l'époque. Parmi eux se trouvaient des journalistes.
    Cela n'a pas changé. La Russie recherche activement des journalistes dans les pays occidentaux dont les points de vue correspondent avec les siens, afin de contribuer à amplifier ces récits. Justin Ling, un journaliste canadien, a écrit un article, il y a environ deux ans, sur la façon dont le gouvernement russe et l'ambassade russe s'y prennent pour essayer de présenter des histoires aux journalistes canadiens, dont certains ont mordu à l'hameçon et ont amplifié ces récits. Nous pouvons constater que certains de ces récits sont amplifiés dans nos médias grand public. C'est ce que nous constatons depuis une dizaine d'années.
(1250)
    Savez-vous de qui il s'agit?
     Oui.
    Pouvez-vous les nommer?
    Je ne préfère pas.
    Comme je l'ai mentionné précédemment, j'ai été la cible d'une répression transnationale dans le passé. Certains de ces journalistes ont participé à ces opérations.
     Je préfère ne pas entrer dans ce domaine.
    D'accord. J'apprécie votre franchise limitée sur cette question, monsieur Kolga.
    Monsieur Shull, vous avez fait un commentaire sur la littératie numérique et sur la nécessité pour le Canada d'améliorer la littératie numérique de ses citoyens.
    Qu'est‑ce qui empêche cette littératie numérique? Quels sont les obstacles qui existent actuellement au Canada au niveau du gouvernement ou de la législation… pour donner à cette question la priorité qu'elle mérite?
    Il s'agit probablement de deux ou trois choses.
    La première est un manque de volonté politique et de leadership. C'est difficile à faire.
    Le deuxième obstacle est constitué par les articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle, mais je vais éviter de vous ennuyer avec les détails. Le fait est qu'une fois que l'on entre dans cette sphère interjuridictionnelle, les choses deviennent de plus en plus délicates.
    Si l'on ajoute à cela les commissions scolaires, de nombreux acteurs doivent être coordonnés. Cela rend les choses plus difficiles, mais ce n'est pas parce que c'est difficile qu'il ne faut pas le faire. Il s'agit de doter nos enfants des compétences dont ils ont besoin: logique, raisonnement, compréhension et capacité d'analyse. Ces compétences seront utiles dans ce domaine, c'est certain, mais elles le seront aussi dans la vie en général. Nous devrions leur enseigner ce genre de choses de toute façon.
     Merci.
     Merci, monsieur Motz.
    La parole est à M. MacDonald pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui et de la résilience dont ils ont fait preuve, en particulier M. Kolga, malgré tout ce qu'il a dû affronter.
    Il est évident que la lutte contre l'ingérence est essentielle au maintien de la souveraineté et des valeurs démocratiques d'une nation.
    Chacun d'entre vous peut‑il, assez rapidement, dire au Comité trois choses sur ce que nous pourrions faire pour améliorer les résultats de cette étude et nous assurer que nous sommes sur la bonne voie? Nous avons parlé de beaucoup de choses différentes, et il y a beaucoup de témoins différents ici aujourd'hui, de sorte que certaines choses se répètent.
    Afin d'établir un ordre de priorité pour les trois points sur lesquels nous pourrions nous concentrer dans le cadre de notre étude, chacun d'entre vous pourrait‑il me donner un résumé très rapide?
    Monsieur Kolga, je propose d'y aller en premier.
    Premièrement, j'ai parlé d'une stratégie nationale pour la littératie numérique. Une telle stratégie nécessitera un leadership politique. C'est l'une des questions les moins partisanes que je puisse imaginer: faire en sorte que la prochaine génération soit équipée pour cela. Il faut se pencher sur cette question, car nous avons un problème. Le programme de contributions en matière de citoyenneté numérique que j'ai mentionné était bon. Il s'agit simplement d'un problème de dosage. Il n'en a pas fait assez. Il n'allait pas assez loin, et il s'agissait d'un ministère gouvernemental à un niveau de gouvernement qui faisait des choses intéressantes. Nous devons le diffuser et en faire une priorité nationale.
    Deuxièmement — j'ai déjà dit ce que j'en pensais — il s'agit d'examiner la GRC et de s'assurer qu'elle est équipée pour le XXIe siècle et qu'elle dispose des outils et des capacités dont elle a besoin, de déterminer si l'institution est adaptée à ses objectifs, tant en matière de contre-espionnage que de lutte contre les adversaires étatiques. Ce que M. Kolga a dit ne devrait pas se produire. Nous devons savoir qui est aux commandes dans ce pays. Si nous n'y parvenons pas, et si nous en arrivons à ce que tout le monde pointe du doigt quelqu'un d'autre, nous avons un grave problème auquel il faut remédier.
     Troisièmement, il faut agir rapidement et le faire avec sérieux et détermination, parce que tout cela va empirer. Il suffit de regarder les tendances de l'IA. La situation va s'aggraver à un point impossible à imaginer, et mon troisième point est donc le suivant: examinez les points 1 et 2, et concrétisez-les avec détermination.
     Monsieur Kolga?
    Écoutez les suggestions de M. Shull, et suivez-les. C'est le premier point.
    Deuxièmement, je reviendrai sur les influenceurs. Nous devons travailler avec nos alliés et trouver un moyen de les exposer. C'est la meilleure façon de nous protéger et de protéger notre démocratie contre ce genre d'opérations. Il est très important de dénoncer les influenceurs en utilisant la législation existante et en travaillant avec les journalistes et nos alliés pour y parvenir.
    Nous devons interdire tous les médias d'État russes. Nous avons pris les devants en 2022, en bannissant RT de nos systèmes satellite et câble. Nous devons suivre l'exemple de l'Europe et interdire complètement RT, Sputnik et tous ces médias d'État russes sur Internet et sur nos ondes.
    Je dirais également l'étude des médias — en suivant l'exemple de la Finlande, en travaillant avec les provinces pour s'assurer que nos programmes scolaires dans toutes les provinces, de la maternelle à la douzième année, incluent l'étude des médias numériques. Cela ne signifie pas seulement un cours ou une heure par année. Cela signifie qu'il faut l'intégrer dans chaque cours afin que nos enfants, nos générations futures, deviennent résistants face à ces types d'opérations d'information et de désinformation.
    Comme l'a dit M. Shull, la situation ne peut que s'aggraver. Nous avons déjà vu la Russie utiliser l'IA pour commencer à produire du contenu. Elle produit du contenu à un rythme rapide dans différentes langues en Afrique et en Amérique du Sud. Elle gagne le jeu de la désinformation dans ces territoires, grâce à l'IA. Nous devons nous y préparer.
(1255)
    Je vous remercie de vos commentaires.
    L'un des points que vous avez omis de mentionner — et je pense que je n'en parlerai que brièvement — est qu'autour de cette table, nous devons travailler ensemble. C'est un tournant pour le Canada. C'est une situation effrayante dans laquelle nous nous trouvons. Vous parlez de notre avenir. Vous parlez de nos enfants. Je pense qu'il est extrêmement important que la politique partisane, non seulement autour de la table de ce comité, mais aussi à la Chambre des communes... Lors des votes, nous avons vu ce que nous pouvions faire avec le projet de loi C‑70, et j'y reviendrai dans une seconde. Je pense qu'il est également important que des personnes comme vous exercent une pression accrue sur les hommes politiques de tous bords.
    Cela dit, il faut appliquer le projet de loi C‑70 à ce cas, c'est‑à‑dire à l'ingérence étrangère. En quoi le projet de loi C‑70 pourrait‑il nous aider dans ce genre de situation?
    Je dirai rapidement qu'il y a trois aspects à considérer.
    Tout d'abord, les dispositions relatives aux données du SCRS ont été quelque peu nettoyées, ce qui les rendra plus efficaces.
    Deuxièmement, ils vont pouvoir partager des renseignements avec les personnes qui ont été ciblées par ce type d'activité, d'une manière qu'ils n'auraient pas autrement pu faire.
    Troisièmement, si quelqu'un entre dans les paramètres du registre des agents, il peut en principe se faire épingler pour cela. D'une certaine manière, c'est comme Al Capone, n'est‑ce pas? Ils n'ont pas arrêté Al Capone pour meurtre. Ils l'ont arrêté pour blanchiment d'argent. Le fait de ne pas s'enregistrer, en soi, est désormais un délit.
    Merci, monsieur MacDonald.
    Vous avez la parole, monsieur Kolga. Vous pouvez répondre rapidement.
    Je suis d'accord avec tout cela.
    Pour en revenir à la question de l'adoption d'une approche faisant abstraction de tout intérêt partisan et multipartite, je suis tout à fait d'accord. Il ne s'agit pas d'une question partisane. Je plaide depuis longtemps pour la création d'un groupe de travail au sein du Parlement, un groupe multipartite qui se réunirait régulièrement pour recevoir des renseignements sur les récits de désinformation dominants et émergents, afin que tous les partis soient conscients de ce qu'ils sont. Ils peuvent rendre compte à leurs propres caucus, afin que leurs propres membres ne deviennent pas des proies.
     Merci.

[Français]

    Monsieur Fortin, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais être bref.
    Messieurs Kolga et Shull, au fond, vous dites un peu la même chose. Vous concluez qu'il faut travailler avec nos alliés, déterminer qui ils sont et soutenir les vrais journalistes. Il faut bannir des réseaux sociaux les faux médias, si je peux m'exprimer ainsi, ou les influenceurs. Il y a plein d'idées comme cela.
    Je trouve qu'il est important de donner de la formation dans les écoles. Toutefois, nous avons un problème ici, parce que la formation, l'éducation, relève des provinces, et non pas du fédéral. C'est un défi auquel il faudrait s'attaquer, mais c'est de la cuisine. Je pense que nous pouvons y arriver.
    La vraie question qui me chicote depuis tantôt, et que je veux poser, particulièrement à M. Shull, qui est avocat général, est la suivante.
    Comment pouvons-nous faire tout cela efficacement tout en protégeant la liberté d'expression, qui est un trésor important dans notre société? Selon moi, il y a là un problème ou, du moins, un défi.
    M. Kolga pourrait répondre en premier, puis M. Shull pourrait poursuivre.

[Traduction]

     C'est cette liberté d'expression que notre adversaire étranger a exploitée.
    Je dirais que des plateformes comme RT et Sputnik, et Global Times en Chine, ne jouissent pas de ce droit à la liberté d'expression dans notre pays. Ce qu'elles font, c'est arsenaliser l'information pour tenter de saper et de déstabiliser notre démocratie.
    En ce qui concerne l'interdiction des médias d'État russes sur nos ondes, je ne me préoccupe pas de la liberté d'expression. Les Canadiens peuvent s'exprimer librement sur les médias sociaux. Dans les médias eux-mêmes, chacun peut écrire à son rédacteur en chef ou rédiger un article d'opinion. Personne ne propose de l'interdire. Ce que nous suggérons, c'est de nettoyer notre espace d'information de ces adversaires étrangers et de l'arsenalisation de l'information à laquelle ils se livrent.
(1300)

[Français]

    Quand on va déterminer ceux qu'on veut exclure, ne bâillonnera-t-on pas certains individus ou certains organismes? Ne tombera-t-on pas dans ce piège?

[Traduction]

    Il ne s'agit pas de musellement. La liberté d'expression n'est pas synonyme d'absence de surveillance…

[Français]

    Je suis désolé de vous interrompre, mais je ne parlais pas des musulmans.
    Je vous laisse continuer à répondre, mais je tenais à préciser que je n'ai pas employé le mot « musulman ».

[Traduction]

    Le mot que j'ai utilisé est « musellement », c'est‑à‑dire le fait de réduire au silence.
    Veuillez terminer votre réponse, puis nous passerons à M. MacGregor.
    Personne ne suggère de faire taire qui que ce soit ni d'empêcher quiconque de s'exprimer. La liberté d'expression n'est pas synonyme d'absence de surveillance. Ce n'est pas pour les réduire au silence que l'on expose les personnes qui comparaissent volontairement dans les médias d'État russes, iraniens ou chinois. Il s'agit simplement de faire ressortir ce fait très important pour que les Canadiens comprennent qui ils entendent et de quels sujets ils entendent parler, et pour qu'ils soient sensibilisés à ce type d'opérations.
     Merci, monsieur.
     Nous passons donc ensuite à M. MacGregor, pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
     Monsieur Shull, j'aimerais vous donner l'occasion de développer cette idée autour de votre stratégie de résilience numérique. De nombreux députés, par le biais de projets de loi d'initiative parlementaire, ont élaboré les paramètres législatifs de différentes stratégies nationales. En général, cette législation ou ce projet de loi précise les éléments de la stratégie. L'avantage de cela, c'est d'éviter les dérives politiques, parce que si la loi est adoptée, peu importe le parti au pouvoir à Ottawa, il faut respecter la loi et la maintenir.
     Avez-vous une préférence? Souhaiteriez-vous que la Chambre des communes assume ce rôle, en adoptant une loi qui établisse les lignes directrices de ce type de stratégie, ou êtes-vous convaincu que le gouvernement fédéral pourrait le faire par lui-même, dans le cadre de ses relations avec les premiers ministres des provinces et les dirigeants des territoires?
    Oui, s'il vous plaît, pour tout ce qui précède.
    Si vous deviez vous charger de légiférer, ce serait le plus grand et le meilleur signal. Ce n'est pas pour rien que nous vivons dans un système de suprématie parlementaire, et si tel était le cas, je serais votre plus grand admirateur.
    Il faudrait également que nous ayons une table FPT sur ce sujet, qui devrait se situer au niveau des dirigeants. À mon avis, il n'y a probablement pas de sujet plus important que la sécurité des Canadiens. Les méchants sont là, et ils essaient d'empoisonner notre société de l'information pour nous empêcher de vivre en démocratie. Dans la mesure où nous devrions faire tout ce qui est en notre pouvoir pour y parvenir, cela commence par ce leadership.
     Merci.
    Je m'en tiendrai là.
     Merci, monsieur MacGregor.
     Merci, chers témoins, pour votre présence aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de vos observations et de vos commentaires.
     Si vous avez d'autres informations à communiquer au Comité, veuillez les envoyer au greffier. Il veillera à ce qu'elles soient traduites et distribuées de manière appropriée.
    Monsieur le président, si vous me permettez d'ajouter un petit point, je suis toujours heureux de me présenter devant ce comité, mais j'aimerais demander une faveur.
     Je vous ai envoyé à tous une note invitant votre personnel à un dîner à Ottawa. Nous avons fait de même pour tous les membres du personnel du Sénat chargés des questions de sécurité nationale. Il s'agira d'un dîner éducatif, et pas d'une réception... il n'y aura pas de champagne. Nous offrons plutôt des sandwichs à la dinde. Il s'agit d'informer les gens sur ce qui se passe dans le domaine de la sécurité nationale. Chacun d'entre vous a reçu un courriel. Si je pouvais vous encourager à inciter votre personnel à y participer, je vous en serais très reconnaissant.
    Merci. C'est bien aimable.
    Je rappellerai aux membres du Comité qu'ils doivent faire parvenir le plus rapidement possible leurs recommandations pour l'étude sur le secteur de l'automobile, ainsi que tout autre témoin qu'ils souhaiteraient proposer pour cette étude.
    Merci, messieurs.
    Sur ce, la séance est levée.
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