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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 056 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 10 février 2023

[Enregistrement électronique]

(0850)

[Traduction]

    Bienvenue à la 56e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.
    Soulignons tout d'abord que nous nous réunissons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en mode hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 23 juin 2022. Les députés participent, selon le cas, en personne ici même ou à distance au moyen de l'application Zoom.
    Conformément à l'ordre de renvoi du mardi 1er novembre 2022, le Comité entreprend son examen du Rapport annuel 2021‑2022 du Bureau de l'enquêteur correctionnel du Canada.
    Nous avons avec nous aujourd'hui, en personne, des témoins du Bureau de l'enquêteur correctionnel du Canada, soit M. Ivan Zinger, enquêteur correctionnel du Canada, et Mme Hazel Miron, enquêtrice principale. Bienvenue à vous deux.
    À la demande de M. Zinger, nous avons prévu 20 minutes pour la déclaration préliminaire du groupe.
    Sur ce, j'invite M. Zinger à faire son exposé.

[Français]

    Je remercie également tous les membres du Comité de m'accorder deux heures ce matin. C'est avec grand plaisir que je suis ici aujourd'hui.
    Je suis accompagné de Mme Hazel Miron, une des enquêtrices principales du Bureau de l'enquêteur correctionnel du Canada. Je précise qu'elle a aussi le rôle de championne des questions autochtones. Elle a énormément d'expérience en la matière. Lorsque les membres du Comité nous poseront des questions sur les questions autochtones, elle va pouvoir fournir un complément de réponse et aider les membres du Comité à mieux comprendre les défis que doit relever le Service correctionnel Canada.
    Ce que je propose aujourd'hui, c'est simplement de vous parler du contenu du rapport annuel. Je vous ai fait parvenir deux présentations PowerPoint. Je vais simplement vous présenter les grandes lignes du rapport annuel avant de passer à ma deuxième présentation, qui porte sur le profil des gens incarcérés dans un établissement fédéral. Je pense que cela vous donnera un grand contexte.
    Je dois avouer que, historiquement, les questions correctionnelles ne sont pas une grande priorité. Quand elles le sont, c'est souvent pour les mauvaises raisons.
    Notre rapport annuel, qui a été déposé au début du mois de novembre 2022, comprend plusieurs mises à jour sur des questions d'importance et sur les préoccupations de notre bureau, notamment l'utilisation de cellules sèches, l'examen du programme mère-enfant, les véhicules d'escorte de sécurité et la stratégie antidrogue du Service correctionnel du Canada.
    Mon rapport contenait aussi trois enquêtes systémiques nationales, dont une sur les Autochtones, une sur les personnes de race noire incarcérées et une sur les formes restrictives de détention dans les établissements correctionnels fédéraux.
    Je vais maintenant passer à la présentation qui porte sur les profils. J'en parlerai pendant une quinzaine de minutes, puis je répondrai aux questions.
    Je précise que je vais commencer par la deuxième diapositive de la présentation PowerPoint.

[Traduction]

     Je voulais simplement mettre en contexte le profil des détenus sous responsabilité fédérale.
    Tout d'abord, il y a certaines choses que beaucoup d'entre vous ne savent peut-être pas, et une partie de la population canadienne ignore assurément certains faits concernant le système correctionnel fédéral. La première chose, c'est qu'en général, partout dans le monde, les services correctionnels drainent des sommes importantes, et je vous dirais que le Canada ne fait pas exception. Comparativement à d'autres, nous dépensons un montant démesuré pour les établissements correctionnels fédéraux. Le Service correctionnel du Canada, ou SCC, dispose d'un budget de près de 3 milliards de dollars pour gérer environ 12 500 personnes incarcérées ainsi que près de 9 000 personnes qui purgent le reste de leur peine fédérale dans la collectivité.
    Le système correctionnel fédéral compte environ 19 000 employés. Qu'est‑ce qui explique une somme d'argent aussi exorbitante? Force est de constater que le rapport entre le personnel et les prisonniers dans les établissements correctionnels fédéraux est probablement le plus élevé au monde, soit un rapport de 1,2 employé par détenu. C'est extraordinaire, à tous points de vue, et si ce n'est pas le taux le plus élevé, c'est certainement parmi les plus élevés. Je n'ai aucune objection à dépenser de grosses sommes dans les établissements correctionnels fédéraux, mais si nous dépensons autant d'argent, nous devrions nous attendre à un rendement et à des résultats exceptionnels dans tous les domaines de l'activité correctionnelle.
(0855)
    En matière de coût par personne incarcérée, si vous prenez les 3 milliards de dollars et que vous enlevez 6 % de ce budget pour la composante des services correctionnels communautaires, vous obtenez un coût moyen total, incluant les frais généraux, d'environ 225 000 $ par année par personne. Le coût officiel mentionné dans les documents organisationnels est de 126 000 $, mais ce montant n'englobe pas les coûts d'ensemble, comme les coûts liés à l'administration centrale, aux administrations régionales, etc. Le coût réel est donc extrêmement élevé.
    Je tiens également à souligner que, dans l'état actuel des choses, le Service gère environ 43 pénitenciers, mais beaucoup d'entre eux ont des cellules inoccupées. À l'heure actuelle, il y a plus de 4 000 cellules vides au Canada. Si la moyenne des pénitenciers au Canada est d'environ 500 personnes incarcérées par établissement, cela représente environ 8 pénitenciers vides.
    Je l'ai déjà dit, et j'ai même fait remarquer au ministre qu'il est peut-être temps de penser à rationaliser un peu ces pénitenciers. Trois d'entre eux ont plus de 100 ans, et l'âge moyen de nos pénitenciers au Canada se situe entre 45 et 50 ans. Ce sont de très vieilles infrastructures où il est très difficile d'assurer une garde humaine ainsi que des services correctionnels efficaces, c'est‑à‑dire un bon environnement de réadaptation.
    En ce qui concerne le taux d'incarcération, je dois vous dire qu'au cours de la pandémie, le système correctionnel fédéral a perdu environ 10 % de ses résidants en détention; la population carcérale s'est donc réduite d'environ 10 % pendant la pandémie de COVID. Cette situation s'explique principalement par le fait que, durant la pandémie de COVID, les tribunaux n'ont pas traité les dossiers aussi rapidement qu'ils l'auraient dû. Aucune tentative n'a été faite pour vider nos pénitenciers en vue de gérer les différentes vagues d'éclosion.
    Au niveau provincial, les services correctionnels ont obtenu de bien meilleurs résultats. Ils ont agi de manière proactive. Voici l'explication: dans le système fédéral, il y a des cellules individuelles. Ce n'est pas étonnant, avec toutes ces places vides. Le Service correctionnel du Canada a géré l'épidémie en isolant les détenus dans leur cellule. Telle était la stratégie. Les gens ont passé énormément de temps dans leur cellule pendant la pandémie de COVID, et c'est d'ailleurs toujours le cas en raison de certains problèmes systémiques qui en découlent.
    Dans les établissements correctionnels provinciaux, il y a des dortoirs. Ils sont surpeuplés. On a recours à la double occupation; autrement dit, deux personnes se trouvent dans une cellule qui a été conçue pour une seule personne. Il y a même des cas de triple occupation des cellules. On a donc déployé un effort réel et proactif pour réduire le nombre de personnes incarcérées à l'échelle provinciale. Ainsi, les provinces ont réussi à réduire leur population carcérale de 25 à 50 %. Je dis cela parce que, malgré ces énormes réductions — du jamais vu dans l'histoire du Canada pour ce qui est de vider nos prisons —, les taux de criminalité n'ont pas augmenté.
    Je sais que vous faites face à de nombreuses pressions, notamment en ce qui concerne la libération sous caution. Les réductions dans les établissements provinciaux étaient en grande partie attribuables à la révision des décisions relatives à la libération sous caution et à la mise en liberté de personnes qui seraient normalement restées en prison.
    En tant que décideurs et législateurs, pensez‑y un instant. On réduit la population carcérale et pourtant, la criminalité n'augmente pas.
    Certes, il existe des cas flagrants, qui doivent faire l'objet de règles plus strictes et de réformes considérables, mais gardons ce constat à l'esprit. Tâchons d'avoir une vision équilibrée de ces choses.
(0900)
     Permettez-moi de vous parler un peu du profil des personnes incarcérées dans les établissements correctionnels fédéraux. Si vous me suivez, je vais passer à la huitième diapositive. J'aimerais d'abord faire quelques brèves observations.
     Pourquoi le profil est‑il si important? Nous pouvons nous en servir pour prendre des décisions sur les approches fédérales en matière correctionnelle.
    Vous avez probablement entendu le célèbre dicton qui dit qu'on peut en apprendre beaucoup sur une société en visitant ses prisons. Il suffit d'entrer dans les prisons de n'importe quelle société pour se faire une bonne idée du degré de civilité qui y règne et du sens de l'engagement envers la justice sociale ou les droits de la personne. Je me suis toujours demandé, depuis le début de ma carrière, de quoi aurait l'air une visite dans un pénitencier canadien. Que verrait‑on? J'espère que vous avez tous pris le temps d'aller en visiter un, car la loi vous y autorise.
    Ce dicton a été cité pour la première fois par Fiodor Dostoïevski. Il a été repris par Winston Churchill et, plus tard, même par Nelson Mandela.
    Le traitement des prisonniers a toujours été au centre de nos préoccupations. Cela en dit long sur une société. Je pense toutefois qu'il faut aller plus loin. On doit se demander: « Qui sont les hommes et les femmes qui se trouvent dans nos pénitenciers? Représentent-ils un échantillon aléatoire de la société canadienne, ou viennent-ils plutôt de segments particuliers de notre société? »
    Par exemple, le gouvernement Harper a utilisé le profil des détenus tout au long de ses 10 années au pouvoir pour justifier un programme de répression de la criminalité. Il s'en est servi pour dire: « Regardez le profil. Nous avons affaire à des gens dangereux qui méritent des peines minimales obligatoires, des peines plus longues, des conditions d'emprisonnement plus sévères et moins de possibilités de libération conditionnelle. » Voilà l'approche qu'on a adoptée en utilisant le profil pour justifier de telles mesures.
    Je soutiens, pour ma part, qu'il est possible d'utiliser le profil comme, disons, un baromètre pour mesurer les bons et mauvais coups des grandes politiques canadiennes. Nous pouvons ainsi savoir si nos politiques sont ancrées dans les bons principes des droits de la personne et si elles sont équitables, justes et conformes aux droits de la personne. Le profil peut certes servir à mettre davantage l'accent sur les mesures d'aide aux personnes incarcérées.
    Permettez-moi d'entrer dans le vif du sujet et de vous donner un aperçu du profil.
    Il est clair pour moi que toutes les données laissent entendre que la prévalence de personnes atteintes de maladie mentale en prison est extraordinairement élevée. Les personnes incarcérées ont d'importants problèmes de santé mentale. Si vous examinez les données sur la prévalence, elles montrent que près de 80 % de tous les hommes et femmes incarcérés souffrent d'un trouble mental. Il s'agit d'une définition très large de la santé mentale, car cela englobe des choses comme les problèmes de toxicomanie et les troubles de la personnalité. Même si l'on réduit la portée de la définition, selon les données du SCC, environ 30 % des détenus ont besoin de services psychologiques ou psychiatriques au moment de leur entrée dans le système fédéral.
(0905)
    À cela s'ajoute un nombre démesuré de médicaments psychotropes administrés tous les jours; c'est quatre fois plus élevé que dans la société canadienne en général.
    Nous savons, grâce aux recherches du SCC, qu'environ le tiers des femmes sont atteintes du trouble de stress post-traumatique. Nous manquons de données pour les hommes, mais je soupçonne que le taux est également très élevé. Nous savons aussi que le nombre de cas d'automutilation est extraordinairement élevé et qu'il n'a cessé d'augmenter au cours de la dernière décennie.
    Fait moins connu, notre population carcérale présente également des déficits cognitifs importants, qui prennent la forme de déficience intellectuelle, de lésions cérébrales, de syndrome d'alcoolisme fœtal, de difficultés d'apprentissage et de trouble d'hyperactivité avec déficit de l'attention. Tous ces facteurs font qu'il est beaucoup plus difficile pour le Service correctionnel du Canada de mettre en œuvre des programmes efficaces, car il s'agit de problèmes qui durent toute la vie. Ce ne sont pas des choses que l'on peut régler avec une simple pilule.
    À cet égard, les troubles d'apprentissage sont, à mon avis, vraiment problématiques parce que le Service ne fait rien pour les traiter. Il ne les évalue pas. Il est mal outillé pour les soigner. Il n'a pas recours à des enseignants spécialisés. C'est une honte.
    Permettez-moi de passer à un autre sujet parce que je veux m'assurer d'avoir le temps de tout dire.
    Passons à la diapositive suivante, à la page 9, sur l'autonomie gouvernementale des Autochtones. Comme vous le savez, au cours des trois dernières décennies, le pourcentage d'Autochtones dans les établissements correctionnels fédéraux n'a cessé d'augmenter. La population carcérale compte aujourd'hui 32 % de personnes d'origine autochtone. Pour les femmes, la situation est pire. Le taux est maintenant de 50 %.
    Les Autochtones ne s'en tirent pas bien en prison. Ces chiffres proviennent de mon dernier rapport annuel. Les dernières données dont nous disposons montrent à nouveau que, comparativement à leurs homologues non autochtones, les détenus autochtones sont plus nombreux à être admis en détention plutôt qu'à être placés sous surveillance communautaire. Ils sont plus susceptibles d'être visés par des interventions de recours à la force. Ils sont surreprésentés dans les établissements à sécurité maximale, ainsi que dans les placements en isolement cellulaire ou dans les nouvelles unités d'intervention structurées. Ils sont plus susceptibles d'être affiliés à un groupe menaçant la sécurité ou à un gang; ils sont aussi plus susceptibles de s'automutiler et de faire des tentatives de suicide. Ils étaient surreprésentés dans les cas de suicide en prison au cours du dernier exercice. Ils purgent une plus grande partie de leur peine que les non-Autochtones, et leur taux de récidive et de suspension ou de révocation de la libération conditionnelle est plus élevé.
    Bref, les détenus autochtones ne s'en tirent pas bien. Laissez-moi vous dire que, pour tous ces résultats, le Service correctionnel du Canada dispose de moyens pour changer le cours des choses. Lorsque ses représentants me disent qu'ils n'ont aucun contrôle sur la composition de la population carcérale, ils ont raison, mais ils peuvent exercer une certaine influence sur les résultats correctionnels.
     Pour les Canadiens noirs, c'est la même chose. Nous avons également abordé dans notre dernier...
    Le président: Il vous reste deux minutes.
    M. Ivan Zinger: D'accord.
     C'est la même chose en ce qui concerne les résultats correctionnels, qui sont tout aussi navrants.
     En ce qui concerne la stratégie antidrogue, 75 % de notre population carcérale a des antécédents de toxicomanie.
    Pour ce qui est de l'éducation, les détenus possèdent, en moyenne, un niveau de scolarité équivalant à la huitième année au moment de leur incarcération. En outre, la plupart d'entre eux — plus de 60 % — étaient sans emploi au moment de la perpétration de l’infraction à l’origine de la peine, et ils ont très peu de compétences professionnelles.
    Passons enfin à la dernière diapositive. En ce qui a trait à la réduction des méfaits, nous savons qu'il y a un taux beaucoup plus élevé de VIH, ainsi que d'hépatite C, bien que les cas d'hépatite C soient à la baisse grâce à de nouveaux médicaments. Il est intéressant de noter que, malgré nos efforts de réduction des méfaits, environ 25 % des personnes incarcérées reçoivent actuellement un traitement à la méthadone ou au Suboxone.
(0910)
     Les femmes constituent l'un des segments de la population carcérale dont la croissance est la plus rapide. N'oublions pas que la grande majorité d'entre elles ont indiqué avoir été victimes de sévices sexuels, psychologiques ou physiques. Il y a donc lieu de se demander si elles devraient toutes être incarcérées comme elles le sont.
    Le vieillissement est un autre problème. Les détenus âgés représentent un segment de plus en plus important de la population carcérale. Il y a 20 ou 25 ans, environ 15 % des détenus étaient âgés de 50 ans ou plus. Aujourd'hui, il s'agit de 26 %. Nous avons mené une enquête systémique à ce sujet et nous avons constaté qu'il y a un nombre excessivement élevé de personnes qui souffrent de démence et de la maladie d'Alzheimer, qui sont en phase palliative ou terminale, qui ont d'importants problèmes de mobilité, qui sont branchées à des réservoirs d'oxygène ou qui sont alitées. À mon avis, ces personnes n'ont pas leur place dans les pénitenciers.
     Pourriez-vous conclure, monsieur?
     Merci beaucoup.
     J'espère que cette mise en contexte vous sera utile.
    Je vous remercie de cet excellent exposé.
    Nous allons entamer notre première série de questions. La parole est à Mme Dancho, qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous, monsieur Zinger et madame Miron, d'être parmi nous aujourd'hui. Nous vous remercions beaucoup de travailler sans relâche à la défense des intérêts et à la surveillance de nos établissements correctionnels et, surtout, de défendre la dignité de tous ceux qui sont dans nos établissements correctionnels.
     Je me suis récemment rendue au pénitencier de Stony Mountain, qui se trouve à l'extérieur de ma collectivité. Un certain nombre d'agents correctionnels qui y sont employés viennent de ma circonscription. Il s'agissait de ma deuxième visite là‑bas pour en apprendre davantage sur bon nombre des questions que vous avez soulevées aujourd'hui et sur certains des problèmes auxquels nos agents correctionnels doivent faire face.
    Une question qu'ils m'ont signalée à deux reprises durant mes visites au cours des trois dernières années concerne le programme d'échange de seringues en prison. J'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet et je me demande si vous pouvez aborder un certain nombre de préoccupations qui m'ont été exprimées.
    Pour ceux qui ne le savent pas — et je suis sûre que vous le savez —, le programme d'échange de seringues dans les prisons est un programme dans le cadre duquel des trousses de seringues sont distribuées aux détenus qui s'injectent des drogues illicites, lesquelles sont introduites clandestinement au profit d'organisations criminelles et de gangs au Canada.
    Les agents correctionnels s'inquiètent notamment de leur propre sécurité. Bien entendu, une aiguille, c'est un peu comme un petit couteau qui pourrait servir à faire du mal aux autres détenus et aux agents correctionnels. Si je me fie à ce que j'ai entendu, je dirais que les agents correctionnels du pénitencier de Stony Mountain redoutent beaucoup cet échange de seringues en prison. Ils craignent pour leur propre sécurité et celle des autres détenus.
    Que leur répondriez-vous en quelques mots?
    Oui. Nous avons inscrit certaines des préoccupations dans ce rapport annuel.
    Il y a beaucoup de crainte, c'est évident. C'est une question que mon bureau a soulevée en 2005 quant à son introduction dans les pénitenciers. Face au risque de poursuites, le Canada a finalement offert le programme dans les pénitenciers. L'idée première est de prévenir les méfaits. Nous savons que...
    Pour que ce soit bien clair, c'est pour prévenir les méfaits découlant de la propagation du VIH, de l'hépatite et de ce genre de maladies quand un détenu utilise une seringue de fortune ou une seringue de contrebande. Si cette seringue est partagée, elle peut transmettre différentes maladies.
    Est‑ce à cela que vous faites référence quand vous parlez de réduire les méfaits?
    Tout à fait. Vous avez absolument raison.
    Les pays qui ont introduit ce programme ont connu beaucoup de succès dans la réduction de la propagation de maladies infectieuses, mais leurs prisons sont aussi devenues plus sûres pour le personnel carcéral, ce qui est le point le plus important, bien que difficile à faire accepter au personnel carcéral.
    Merci beaucoup.
    Si vous voulez bien soumettre ces données en particulier au Comité afin que nous puissions les étudier, cela serait extrêmement utile à nos travaux.
    Mon temps est limité, mais je crois que c'est une preuve importante qui doit être examinée.
    Je comprends les objectifs louables que vous venez de fournir au Comité, mais il y a aussi des préoccupations chez les détenus. Je suis persuadée que vous connaissez très bien l'établissement pour femmes d'Edmonton, où les détenues ont volontairement soumis une pétition contre l'introduction de ce programme dans leur prison.
    Elles ont déclaré plus spécifiquement qu'une injection sûre n'existe pas en prison. Elles ont écrit avoir besoin de guérir plutôt que de voir le gouvernement fédéral introduire ce programme. Elles affirment avoir de la valeur; ce sont des êtres humains et elles n'ont pas besoin de seringues. Ce dont elles ont besoin, ce sont des employés qui soutiennent leur réinsertion sécuritaire.
    Elles ajoutent différentes choses. Elles éprouvent une grande crainte et cette pétition compte divers noms. Elle vient d'une prison pour femmes.
    Je me demande de quelle façon vous pouvez remédier à la crainte exprimée et répondre aux demandes des femmes sur l'introduction d'un programme dont elles ne veulent pas.
(0915)
    Là encore, je dois admettre qu'il y a manifestement des difficultés liées à l'introduction d'un programme d'échange de seringues dans les centres correctionnels fédéraux, à tel point que l'on peut lire dans mon rapport annuel que, en ce moment, le programme n'est que théorique, car fort peu de détenus sont visés, Service correctionnel Canada ayant rendu la participation au programme extrêmement difficile. C'est pourquoi, en réalité, le programme cause plus de tort et de risques aux agents correctionnels. Les quelques détenus qui ont maintenant ces trousses les louent aux autres ou font l'objet d'intimidation par ceux qui veulent ces seringues, qui sont maintenant propres, espérons‑le.
    Vous devez faire beaucoup plus de travail là‑dessus: apaiser les craintes dues à la culture des agents correctionnels, de même que celles des détenus comme tels, et montrer la validité du programme de même que sa sécurité.
    Il y a d'autres programmes, bien sûr. C'est une demi-mesure, pas une panacée. Par exemple, le projet pilote de service d'injection supervisée s'annonce très prometteur. Cela dit, son déploiement demeure trop lent. Il n'est présent que dans le pénitencier Drumheller. Le syndicat et les agents correctionnels sont plus à l'aise avec ce programme, mais il ne fonctionne malheureusement que de jour, quand les services de santé sont ouverts et que l'on peut superviser les injections.
    Mon temps est écoulé, donc je vous remercie de vos remarques. J'apprécie beaucoup votre point de vue.
    Je vous exhorte maintenant à tenir pleinement compte de la protection des agents correctionnels qui triment dur, de même que de celle des détenus, surtout les femmes qui ont de très grandes craintes et préoccupations par rapport à l'arrivée de ce programme dans leur pénitencier.
    Merci beaucoup.
    Je conclurai en disant que le danger est le suivant: sans le programme, il y aura des seringues souillées partout et, quand les agents correctionnels procéderont à une fouille, il y aura des risques de piqûre. Voilà le risque. C'est ce qui a été illustré ailleurs: vous pouvez réduire le risque des seringues souillées et du contact accidentel avec celles‑ci au moment de la fouille. C'est ce que j'espère que les syndicats, ainsi que les agents correctionnels, vont comprendre.
    Merci.
    Merci pour votre point de vue.
    Merci, madame Dancho.
    Passons maintenant à Mme Damoff pendant six minutes.
    Monsieur Zinger et madame Miron, je vous remercie, de même que toute votre équipe, pour votre travail dévoué depuis de nombreuses années, et pour vos réflexions utiles sur ce qui se passe dans nos établissements correctionnels.
    J'aimerais vous entendre sur le Programme mère-enfant. J'ai visité le site du programme l'an dernier, à Grand Valley. À ma demande, la Bibliothèque du Parlement a pondu un fabuleux rapport sur le Programme mère-enfant. Certains renseignements sont fort perturbants. En 2011, et je suis persuadée que c'est pire aujourd'hui que ce ne l'était en 2011, Statistique Canada affirmait que 48 % des enfants en foyer d'accueil étaient Autochtones et que, dans la majorité des cas, leur mère était derrière les barreaux. La même année, on approuvait l'accès des mères allochtones au Programme mère-enfant dans les prisons fédérales, un programme qui demeure sous-utilisé à ce jour par Service correctionnel Canada.
    Pour ceux qui ne le savent pas, ce programme permet non seulement aux mères d'avoir des contacts avec leur nouveau-né, amais aussi, dans le cas des mères que j'ai rencontrées, de garder contact avec leurs enfants plus âgés. Toutefois, voici l'un des défis: l'une de ces mères est à Kitchener, à l'établissement Grand Valley, tandis que ses enfants sont à Flin Flon, ce qui veut dire qu'ils n'ont pour ainsi dire aucune chance de se voir.
    L'une de vos recommandations précise que Service correctionnel Canada devrait « revoir les exigences du Programme mère-enfant ainsi que ses critères d'admissibilité ». Ces critères ont changé à l'époque du gouvernement Harper, rendant la participation des femmes autochtones beaucoup plus difficile. Je me demande si vous pourriez nous parler un peu des avantages du programme et de ce que Service correctionnel Canada devrait faire pour permettre une plus grande participation à celui‑ci.
(0920)
    Nous avons soulevé la question il y a de nombreuses années et nous l'avons certes fait quand certaines décisions politiques visaient à restreindre l'accès à ces programmes. Nous l'avons incluse cette année, grâce à vous, car nous savions que la Bibliothèque du Parlement menait des recherches qui étaient conformes à nos propres conclusions. Nous avons pris le temps d'y réfléchir.
    Nous avons constaté qu'il y a en effet des facteurs comme la grande difficulté d'accès et la faible capacité de SCC à assurer le suivi du nombre de participantes. Les données que nous avons montrent un taux de participation extrêmement bas. Comme vous l'avez dit, les critères sont trop contraignants et discriminatoires quand il est question des femmes autochtones. Il y a des incohérences partout au pays et dans les cinq établissements régionaux pour femmes. En outre, nous savons que très peu a été fait quant à l'incidence de cela sur les enfants qui participent à ces programmes.
    Tel qu'il est structuré actuellement, le programme se limite aux établissements à sécurité minimale, où l'on trouve très peu de femmes autochtones. La majorité d'entre elles sont en effet dans des établissements à sécurité moyenne ou maximale. Mon rapport annuel précise que, dans un établissement à sécurité maximale, 60 % des détenues dans les unités de garde, c'est‑à‑dire les établissements à sécurité maximale pour femmes, sont autochtones. Les mères d'origine autochtone sont ainsi incapables d'accéder au programme. Voilà pourquoi nous estimons que le programme doit être revu.
    Je vais maintenant céder la parole à Mme Miron qui traitera de la question de son point de vue, car elle a énormément d'expérience relativement aux établissements pour femmes.
    En réponse à votre question sur les critères d'admissibilité à ce programme, madame Damoff, ils sont en effet très contraignants pour les femmes autochtones. Il n'y a rien de culturel dans les critères, et c'est presque un obstacle pour elles quand elles veulent se prévaloir du programme. La famille est très importante pour les Autochtones, donc ce programme doit être favorisé et les critères doivent être entièrement revus afin d'y inclure une optique culturelle.
    Je suis allée à Buffalo Sage, à Edmonton, et j'ai voyagé partout au pays pour visiter divers établissements et pavillons de ressourcement. À Buffalo Sage, j'ai vu des mères avec leur bébé et l'effet que cela avait sur les autres femmes était incroyable.
    Il me reste seulement 30 secondes.
    Est‑ce que cela se traduit par de meilleurs résultats pour les femmes en prison? Ce n'est pas seulement un beau geste. De ce que j'en comprends, ces femmes obtiennent également de meilleurs résultats.
    Oui, elles obtiennent de meilleurs résultats, car elles ne sont pas constamment en train de s'inquiéter à propos de leur famille. Elles voient leur enfant et souhaitent en faire davantage pour elles-mêmes, parce qu'elles commencent à établir un lien mère-enfant. Elles veulent en faire plus pour leurs enfants. À mon sens, c'est vraiment efficace, mais les critères doivent être revus et tenir compte des particularités culturelles de celles qui veulent en bénéficier.
    Merci.
    Merci, monsieur Motz.

[Français]

    Madame Michaud, vous avez la parole pour six minutes.
    Monsieur Zinger, je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui et d'accomplir votre travail de façon aussi rigoureuse.
    Je veux vous poser quelques questions sur le pouvoir du Bureau de l'enquêteur correctionnel.
    Dans votre rapport, vous avez exprimé une certaine frustration par rapport aux mesures prises par Service correctionnel Canada à la suite de vos recommandations. Il semble que, depuis longtemps, les recommandations que vous formulez sont souvent copiées-collées d'une année à l'autre ou simplement reformulées, parce que les changements ne sont pas nécessairement apportés.
    Nous pourrions penser que Service correctionnel Canada n'applique pas ces nouvelles recommandations parce qu'il n'a pas assez de moyens ou qu'il y a un manque de personnel, par exemple. Cependant, selon le profil que vous nous avez donné au départ, vous dites que le ratio du nombre d'agents correctionnels par rapport au nombre de prisonniers est l'un des meilleurs du monde. Vous dites aussi que Service correctionnel Canada a un budget de près de 3 milliards de dollars. Nous pouvons donc écarter ces éléments.
    À votre avis, pourquoi Service correctionnel Canada ne met pas en application vos recommandations année après année?
(0925)
    C'est une très bonne question. Ce sujet me concerne au plus haut point.
    En ce qui concerne l'efficacité du Bureau, je précise que nous n'avons qu'un pouvoir de recommandation, ce qui ne lie ni Service correctionnel Canada, ni le gouvernement, ni le ministre. C'est l'approche appropriée.
    Pour ce qui est de l'efficacité sur le terrain, quand mes enquêteurs et enquêtrices rencontrent les directeurs et directrices des établissements, le taux de succès est très élevé. Nous arrivons à régler des dossiers avec eux. Au fil des ans, j'ai toujours eu un très grand respect pour les gens qui occupent ces postes. Ils sont très forts, très professionnels, et les choses fonctionnent très bien.
    Le problème survient quand je fais des recommandations qui sont davantage d'ordre systémique, entre autres dans mon rapport annuel, et qui visent la commissaire de Service correctionnel Canada, le ministre ou le gouvernement du Canada. Il est évident pour moi que, dans de tels cas, notre taux d'efficacité baisse de façon importante.
    Je dis aussi dans mon rapport que, parfois, lorsque Service correctionnel Canada refuse ou ignore nos recommandations, il le fait à ses risques et périls. Nous documentons de façon très rigoureuse diverses questions et préoccupations, et cette documentation est utilisée par les avocats à la cour. Récemment, soit il y a à peine deux semaines, des peines minimales ont été rejetées dans deux arrêts de la Cour suprême du Canada, et ces décisions se fondaient sur trois rapports du Bureau. Ces rapports sont cités dans les deux arrêts de la Cour suprême du Canada.
    La même chose peut être dite en ce qui concerne les cellules sèches. Le gouvernement doit maintenant changer la Loi sur le système correctionnel et la liberté sous condition à cause de litiges. Or, nous avions soulevé cette question il y a plus de cinq ans. Il en va de même pour l'isolement préventif. Dans le cadre des procédures de cour, des recours collectifs et de processus de ce genre, le travail de notre bureau a abondamment été cité. C'est le cas également pour des questions comme l'échange de seringues, les personnes transgenres et la difficulté de procéder à des adaptations en fonction de l'identité ou de l'expression sexuelle des gens. Un jour ou l'autre, cela les rattrape.
    Cela demeure donc positif.
    Le Bureau devrait-il avoir un peu plus de pouvoir?
    Concernant la façon dont fonctionnent les choses actuellement, d'après ce que je comprends, vous êtes relativement satisfait de n'avoir qu'un pouvoir de recommandation. Comme vous vous rendez sur place, il est possible qu'un grand nombre de questions ne soient pas soulevées dans votre rapport, précisément parce qu'elles se règlent directement avec les directeurs des établissements. Certaines choses avancent sans que Service correctionnel Canada ait à intervenir.
    J'en conclus que c'est tout de même très bien. Je vous en remercie.
    Vous avez abordé la question des cellules sèches. Au fait, les expressions « cellules sèches » et « cellules nues » sont-elles synonymes ou s'agit-il de deux choses complètement différentes?
(0930)
    Les cellules sèches sont utilisées lorsqu'on soupçonne qu'une personne a ingéré de la drogue ou qu'elle l'a cachée dans des orifices corporels. On attend que tout cela soit évacué. Ce sont des cellules munies de toilettes sèches.
    Dans le cas des cellules nues, vous aviez recommandé d'interdire tout placement indéfini d'une durée supérieure à 72 heures. Je suis allée visiter l'Établissement de Port‑Cartier l'été dernier. C'était ma première visite dans un établissement carcéral. J'étais accompagnée de Mme Damoff. Nous avons vu à quoi cela ressemblait. Je pense qu'une directive du ministre Mendicino avait justement été diffusée au sujet des cellules nues quelques jours auparavant.
    Que se passe-t-il quand une telle directive est prise? Service correctionnel Canada n'a-t-il pas d'autres choix que de mettre ces changements en vigueur? Il ne semblait pas y avoir de date pour la mise en application de la directive.
    Les directives de ce genre vous aident-elles dans votre travail?
    Que se passe-t-il quand le ministre intervient directement au sujet de questions au sujet desquelles vous avez fait des recommandations?
    Dans ce cas-ci, il était question d'un arrêt de la Cour suprême, d'une décision à laquelle le gouvernement devait donner suite dans un certain délai. Il est donc évident que le ministre a été proactif en attendant que de nouvelles directives soient mises en place pour atténuer le problème existant.
    Je vais vous donner un exemple de ce qui me déçoit un peu. C'est la deuxième fois que des lettres de mandat sont transmises par le premier ministre au ministre de la Sécurité publique et par le ministre de la Sécurité publique à la commissaire de Service correctionnel Canada.
    La dernière lettre est excellente. Le contenu est absolument extraordinaire, parce qu'il reflète toutes les situations problématiques que mon bureau documente depuis plusieurs années. Malgré le contenu fabuleux, le problème que posent les lettres, c'est qu'elles ne contiennent pas d'échéances ni de mesures concrètes. C'est difficile de rendre quelqu'un responsable en l'absence d'échéancier concret ou de produit livrable.
    Si j'avais une recommandation à faire pour aider mon bureau, ce serait qu'un plan d'action approuvé par Service correctionnel Canada accompagne les mesures proposées pour démontrer de façon concrète comment améliorer la situation. Autrement, on se retrouve quatre ans plus tard sans voir beaucoup de progrès.
    Merci, monsieur Zinger et madame Michaud.

[Traduction]

    Passons maintenant à M. MacGregor pendant six minutes, je vous prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Bienvenu, monsieur Zinger. C'est super de vous avoir tous les deux avec nous.
    Pendant un bon moment, notre comité s'est vraiment concentré sur le projet de loi C‑21. J'estime donc que c'est un rappel important de toute l'ampleur du portefeuille de la sécurité publique et de toute l'importance du travail que vous faites. Je suis heureux que nous puissions passer à ce sujet important.
    Je tiens à traiter de la réduction des méfaits dans le contexte de la consommation de drogues. Je viens de Colombie-Britannique, qui est, à bien des égards, l'épicentre de la crise des opioïdes. Dans ma collectivité, dans la vallée de la Cowichan, le problème est très grave. J'ai parlé à des gens qui sont en première ligne face à cette crise. Mes amis conservateurs aiment insister sur l'importance du traitement, et je suis d'accord avec eux, mais je répondrai à cela qu'il n'est pas possible de traiter un mort.
    Actuellement, il y a tant de personnes qui souffrent de traumatismes. Elles jouent à la roulette russe chaque fois qu'elles se procurent des drogues illicites en raison de leur teneur en fentanyl. Beaucoup d'entre elles ne sont tout simplement pas prêtes à être traitées. Pour que le traitement soit efficace, le processus doit être graduel.
    Dans votre profil de la population incarcérée, vous précisez le nombre de personnes qui ont des problèmes de consommation ou qui vivent des crises de santé mentale. Ma première question est la suivante: quand il s'agit de réduire les méfaits dans nos prisons, pouvez-vous mettre en contexte le taux de surdose dans celles‑ci?
    Le fait est que les détenus, qui sont nombreux à avoir des problèmes de consommation, vont trouver une façon de se procurer des drogues. C'est un fait. Les drogues vont circuler en prison. J'ai parlé à du personnel de l'établissement Kent et de l'établissement Mountain. On trouvera toujours moyen de se procurer de la drogue en prison.
    Pour ce qui est de réduire les méfaits et de simplement essayer de garder ces détenus en vie afin qu'ils puissent, peut-être, un jour, intégrer un programme avec succès, j'aimerais que vous nous fournissiez plus de contexte sur cette très vaste question.
(0935)
    Merci.
    Il s'agit certes de quelque chose qui empoisonne Service correctionnel Canada. C'est très préoccupant. Pour être efficaces, vous devez recourir à un large éventail d'initiatives qui visent à réduire la quantité de drogues introduites dans les pénitenciers, de même que la demande. Nous appelons « interdiction » toute mesure appliquée pour prévenir l'accès aux drogues. Si vous adoptez une approche équilibrée, vous devriez également avoir d'excellents programmes de lutte contre la toxicomanie, ce qui vous permettra d'être proactifs dans la réduction des méfaits. Vous avez besoin de tout cela.
    Dans le cas de Service correctionnel Canada, on constate que l'accent est encore mis sur une approche de tolérance zéro par rapport aux drogues. C'est ce qui figure dans mon rapport annuel. La politique sur la stratégie de SCC date de 2007. C'est incroyable. Elle est plus qu'obsolète. Elle ne tient même pas compte des mesures positives qui ont été prises par SCC. Nous consacrons des sommes énormes à l'interdiction, des sommes faramineuses, et elle est inefficace. L'interdiction en soi, c'est‑à‑dire l'approche de tolérance zéro, est inefficace. Elle ne fonctionne pas dans notre société ni ailleurs dans le monde. Elle ne fonctionne tout simplement pas dans nos pénitenciers.
    Il y a de graves problèmes et d'autres plus récents, par exemple celui des drones et de la détection du largage de drogues, mais les drogues seront toujours accessibles. C'est pour cette raison que vous devez avoir une capacité exceptionnelle de réduction de la demande. La seule façon d'y parvenir est d'avoir des programmes de lutte contre la toxicomanie très accessibles et de qualité inégalée. SCC n'en a plus. Il avait auparavant des programmes de base qui visaient spécifiquement la toxicomanie. Aujourd'hui, tout est intégré dans un nouveau modèle où l'on traite tout, qu'il s'agisse de violence conjugale, de gestion de la colère ou de toxicomanie. Tout est regroupé en un seul programme.
    Ce n'est vraiment pas adéquat. Puisque la consommation de drogues peut parfois s'étendre sur de nombreuses années, vous avez besoin de counselling professionnel et personnalisé. Vous avez besoin de groupes et de toutes sortes d'autres mesures. Certains pays ont même instauré des prisons sans drogue, où les gens s'engagent à travailler sur eux-mêmes. Il y a toutes sortes de choses que vous pouvez faire pour cela.
    Du point de vue de la réduction des méfaits, sur papier, la réduction des méfaits au Canada est au premier plan avec un programme d'échange de seringues. Toutefois, quand nous avons rédigé notre rapport annuel, nous avons effectué une évaluation ponctuelle: seulement 46 personnes au cours du dernier exercice participaient au Programme d'échange de seringues dans les prisons, tandis que 3 000 ont recours à la méthadone et au Suboxone. Ils ont des problèmes de toxicomanie. Comme je l'ai dit, c'est le point le plus préoccupant.
    C'est tout simplement inefficace. Il n'y a qu'un programme pilote, soit le service d'injection supervisée, à Drumheller. Bravo pour l'effort, mais pour ce qui est de la mise en œuvre, il y a nombre d'obstacles. Comme quelqu'un l'a signalé, certains de ces obstacles sont bien réels. Il y a beaucoup de crainte, mais nous devons changer d'approche. Celle employée est mal équilibrée et inefficace. Elle n'aide personne.
    Je suis désolé de vous dire que nos prisons demeurent des passoires quand il est question de drogues. Ce n'est pas en déversant des centaines de millions de dollars pour tenter de les rendre hermétiques que nous allons vraiment réussir. Nous devons adopter une approche différente, et c'est...
(0940)
    Merci, monsieur Zinger.
    Nous allons maintenant lancer le deuxième tour de questions.
    Monsieur Shipley, je vous en prie. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence et de votre rapport, monsieur Zinger.
    Je vais probablement reprendre brièvement la discussion là où M. MacGregor s'est arrêté, car je trouve la connaissance de ce sujet un peu fascinante et un peu alarmante.
    J'ai visité un pénitencier fédéral il y a longtemps, et je n'ai pas passé beaucoup de temps dans des pénitenciers depuis, ce qui est heureux, n'est-ce pas? J'ai toutefois quelques questions à vous poser.
    La première sera très élémentaire. Le tabac est-il légal là-bas? Peut-on fumer du tabac dans un pénitencier fédéral?
    La réponse est non. Le tabac est considéré comme de la contrebande, et vous pouvez être sanctionné si vous fumez.
    Le tabac est évidemment une substance légale dans la société canadienne. Lorsqu'il est introduit dans des pénitenciers, un sachet de tabac peut se vendre jusqu'à 800 $ sur le marché clandestin...
    Merci.
    Je dispose de très peu de temps, et je suis désolé de vous interrompre.
    Je suis content d'avoir posé cette question, car votre réponse n'était pas celle que j'attendais. Je pensais que le tabac était légal.
    Ma prochaine question allait consister à demander si la marijuana est légale là-bas, car c'est maintenant un produit légal, mais de toute évidence, elle ne l'est pas non plus dans les pénitenciers.
    Ce que j'ai un peu de mal à comprendre, c'est la pile de communiqués que Service correctionnel Canada a publié en janvier seulement. Parmi tous les objets de contrebande qui ont été saisis, certains avant qu'ils ne soient introduits illégalement — ce qui est du bon travail, évidemment —, mais une grande partie d'entre eux pendant qu'ils sont dans les établissements... L'une de ces saisies comptait même 10 téléphones cellulaires et 13 chargeurs. La liste d'objets est longue et comprend 45 grammes de THC et 1,8 gramme de méthamphétamines. Je ne vais pas tout lire, mais c'est tout simplement hallucinant de voir la quantité d'objets qui sont introduits dans les établissements.
    Dans votre dernière observation, vous avez mentionné que les pénitenciers fédéraux sont, pour reprendre vos paroles, des « passoires » quand il est question d'introduire des drogues. Vous avez également mentionné au début de votre intervention que notre ratio gardes/prisonniers était... Je ne pense pas que vous ayez utilisé le mot « excellent », mais vous avez indiqué que le ratio était très bon, et nous dépensons beaucoup d'argent à cet égard. Que pouvons-nous faire pour tenter, en premier lieu, d'empêcher certains de ces articles d'entrer dans les établissements?
    Nous devons regarder plus loin que le trafic de la drogue et les conditions de détention en général si nous voulons avoir un effet positif sur cette situation.
    Une partie du problème réside dans le fait qu'il serait utile de disposer de programmes constructifs, qui traitent les problèmes de toxicomanie et réduisent une partie de la demande.
    De plus, si nous offrions aux détenus de la formation professionnelle constructive, de la bonne nourriture afin que les détenus n'aient pas à utiliser les quelques ressources financières dont ils disposent pour compléter leur alimentation, et une rémunération plus élevée, parce qu'en 1981, la rémunération des détenus a régressé à 6,90 $, et seulement quelques-uns d'entre eux quotidiennement...
    Monsieur Zinger, je dois vous interrompre, car vous mentionnez des mesures qui doivent toutes être mises en oeuvre à l'interne. N'y a-t-il rien que Service correctionnel ou le gouvernement puisse faire de l'extérieur pour empêcher que ces objets soient introduits dans les établissements?
    Vous mentionnez des mesures qui seraient autant de programmes visant à les aider à moins rechercher des drogues, et je le comprends. N'y a-t-il rien que nous puissions faire pour empêcher les drogues d'entrer dans les établissements?
    Ce que je peux vous dire, c'est que, chaque année, nous dépensons à cette fin une somme d'argent démesurée par prisonnier. Cet argent pourrait-il être mieux utilisé si nous tentions de lutter contre la toxicomanie dans la communauté carcérale? Ce serait une façon de gérer le problème.
    Si nous prenions les devants afin de traiter les problèmes de dépendance chronique au sein de la communauté carcérale, parce que l'alcool et les drogues sont souvent utilisés pour gérer les problèmes de santé mentale, s'il y avait moins de problèmes de santé mentale au sein de la communauté carcérale et de meilleurs services et traitements des dépendances offerts à cette communauté, cela réduirait le...
(0945)
    Je suis désolé de vous interrompre encore une fois, mais vous parlez de sevrer les détenus. Ne pouvons-nous pas faire quelque chose comme inspecter tous les visiteurs de ces établissements?
    J'essaie de simplifier les choses pour moi-même et pour les gens qui nous regardent. Ne pouvons-nous pas simplement inspecter chaque colis ou chaque personne qui entre dans ces établissements? Il s'agit d'une zone à accès restreint, et je ne cherche pas à minimiser le problème, car ce n'est pas un problème mineur. J'essaie de me faire ma propre idée... Je suis sûr que d'autres personnes essaient de comprendre comment ces objets entrent dans ces établissements.
    Toutes les mesures que vous mentionnez visent à faire en sorte que les gens ne cherchent plus à se procurer d'alcool ou de drogues ou qu'ils réduisent leur consommation. Je partage votre avis, mais je parle uniquement de l'étape qui consiste à réduire la possibilité d'introduire ces objets dans les établissements. N'y a-t-il aucune façon de le faire, même des façons liées à ces installations — vous les avez étudiées, et vous avez parlé aux travailleurs dans ces établissements — ou d'autres moyens que nous ne mettons pas en œuvre pour essayer d'empêcher la contrebande de toutes sortes d'entrer dans ces installations?
    De nombreux pays ont essayé, et c'est pratiquement impossible, à moins de fermer complètement un établissement.
    L'ingéniosité humaine et la cupidité auront toujours une longueur d'avance sur vous. Human ingenuity.
    Je pense que vous pouvez certainement poser cette question à la commissaire du Service correctionnel. Elle a peut-être un avis à ce sujet.
    J'ai visité des prisons partout dans le monde. La dernière visite en date a eu lieu il y a une semaine. J'étais à Austin, au Texas, et j'ai visité une prison là-bas. Je vais en visiter une à Rome à la fin du mois.
    La disponibilité des drogues est toujours problématique dans tous les établissements correctionnels que j'ai visités dans le monde entier.
    Merci, monsieur Shipley.
    Monsieur le président, puis-je dire rapidement que, s'il a besoin de quelqu'un pour l'accompagner au pénitencier de Rome, je suis prêt à le faire. Je soutiens simplement que je pourrais peut-être apprendre un peu ce qui se passe là-bas.
    Nous pouvons porter vos bagages. Cela ne posera pas de problèmes.
    Monsieur Noormohamed, veuillez prendre la parole pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur Zinger. Merci, madame Miron.
    Vous parliez de l'ingéniosité dont certaines de ces personnes font preuve pour faire entrer des drogues dans les prisons. Je vous signale que M. MacGregor et moi-même avons visité l'établissement de Kent, à l'extérieur de Vancouver, par une journée d'été très chaude de 40 degrés, et le personnel nous a parlé de drones et de gens qui essayaient d'utiliser des drones, ce qui intéressera M. Shipley. Malgré tout ce que les gardiens de prison tentaient de faire, des gens essayaient d'utiliser des drones pour larguer des drogues, et le personnel là-bas a réussi à les intercepter.
    Nous comprenons, je crois, qu'il est assez difficile d'empêcher ces drogues d'entrer dans les établissements.
    L'un des facteurs que vous avez mentionnés est une chose qui — et là encore, je ne veux pas parler au nom de M. MacGregor — nous a frappés tous les deux. Il s'agissait des questions liées à la nutrition et à l'alimentation. On nous a dit que des compressions budgétaires et un certain nombre de modifications des politiques entreprises sous les gouvernements précédents — et je ne cherche pas dénigrer le gouvernement précédent — avaient rendu l'accès à des aliments d'origine locale et à des denrées moins coûteuses impossible pour les prisons locales. On les a forcées à adopter le modèle suivant: « Voici la nourriture que vous devez servir à telle ou telle date, et elle doit provenir d'un établissement central », ce qui, bien sûr, a entraîné des problèmes de nutrition et certaines des autres difficultés dont vous avez parlé.
    L'un des aspects qui m'ont frappé, ce sont les répercussions que les mauvaises conditions que nous avons observées et les facteurs de ce genre ont sur le moral du personnel et sur sa capacité de bien faire son travail. Ces personnes étaient aussi préoccupées par le bien-être des prisonniers, ainsi que l'effet que cela peut avoir sur leur capacité de s'améliorer et, avec un peu de chance, de réintégrer un jour la société.
    Selon vous, lorsque nous parlons de questions comme les cellules nues, le soutien en matière de santé mentale, certaines des mesures que vous avez observées et que le ministre a demandé à SCC de prendre ainsi que d'autres aspects, quelles sont certaines des victoires faciles sur lesquelles nous devrions vraiment nous concentrer et examiner pour nous assurer que les conditions dans ces établissements s'améliorent, non seulement pour les détenus, mais aussi, par extension, pour le personnel et pour que, espérons-le, de meilleurs résultats soient obtenus au cours de la réinsertion sociale des détenus?
    Permettez-moi de revenir en arrière, car je veux m'assurer, de manière préventive, que je ne m'attire pas d'ennuis.
    Je vais à Rome, mais toutes les dépenses seront assumées par l'Organisation internationale de droit du développement. Le voyage a pour but de donner une formation juridique sur les droits de la personne et d'élaborer des documents que subventionne le département de la Justice des États-Unis, entre autres.
    Que cherchez-vous à apprendre exactement, compte tenu de votre question? Vous intéressez-vous à la question de la nourriture ou...?
(0950)
    Non, il y a une liste de mesures que le ministre a demandé à SCC de prendre. Il y a évidemment la liste de problèmes que vous avez mentionnés. Vous avez distingué le problème de la nourriture, le problème de la santé mentale et les problèmes liés à un certain nombre de ces différentes difficultés.
    Ce qu'il serait bon pour moi de savoir — et je suppose pour d'autres personnes qui ont visité ces endroits pour au moins y jeter un coup d'œil, mais non y demeurer, heureusement —, c'est quelles sont les mesures les plus faciles que SCC pourrait prendre et qu'il n'a peut-être pas prises?
    Je pense que c'est un bon point de départ.
    Permettez-moi de commencer par certaines des plaintes les plus fréquentes que nous recevons, et de vous démontrer que les choses n'ont pas vraiment évolué à ces égards.
    Ces deux éléments sont la nourriture et le salaire des détenus. Je précise encore une fois que le salaire des détenus a été établi en 1981. C'était il y a plus de 40 ans. Il n'a pas été indexé depuis, et seules quelques personnes bénéficient du taux maximal de 6,90 $ par jour.
    Je suis désolé de vous interrompre, monsieur Zinger. Toutefois, je tiens à préciser qu'il y a des gens qui disent, « Oh, ils sont en prison. Pourquoi devraient-ils être rémunérés? ».
    Pourriez-vous expliquer dans ce contexte la raison pour laquelle ces salaires sont réellement importants?
    Malheureusement, la stratégie du service consiste — parce qu'une partie de cette stratégie n'est pas sous son contrôle — à laisser la population carcérale dans un état de dénuement complet. Les détenus ne peuvent pas avancer. Si vous ne pouvez pas avancer parce que vous n'avez pas assez d'argent pour acheter des articles de cantine pour rendre votre séjour un peu plus confortable, pour acheter peut-être des cadeaux à votre famille ou pour économiser un peu d'argent pour le jour où vous serez libéré de prison, alors vous finissez par participer à une économie souterraine qui est très nuisible. En fait, les gens font tout ce qu'ils peuvent pour faire avancer leur situation, y compris la violence sexuelle, la coercition, le trafic de la drogue, l'intimidation, et toutes sortes d'autres choses. La rémunération des détenus est vraiment importante.
    En outre, ce n'est pas un bon message à faire passer. Si je vous demandais si, en tant que députés, vous trouveriez acceptable que votre salaire ait été établi en 1981 et qu'il n'ait pas été augmenté depuis, malgré l'inflation et tout le reste, vous diriez que ce n'est pas juste ni correct.
    Pourquoi est-ce acceptable pour ceux qui sont incarcérés?
    C'est vraiment fondamental...
    Soyez très bref.
    La nourriture est également très importante. Comme la nourriture est très peu attrayante, la plupart des gens complètent leur régime en achetant des articles provenant de la cantine. La cantine ressemble à votre épicerie IGA, Metro ou Sobeys locale. On y vend des protéines, du poulet et de la pizza, c'est-à-dire toutes sortes d'aliments. Les établissements ne cuisinent plus pour la totalité de leurs détenus. Ils cuisinent pour environ 70 % d'entre eux, car ils savent que tous les détenus ne mangeront pas cette nourriture et qu'elle sera gaspillée autrement.

[Français]

     Merci, monsieur Zinger.
    Madame Michaud, vous avez maintenant la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais me permettre de continuer sur le même sujet, car M. Noormohamed m'a devancée.
    Lors de ma visite à l'Établissement de Port‑Cartier, nous avons eu la chance de rencontrer un comité de détenus — je pense que c'est comme cela qu'on l'appelle. Ses membres nous ont notamment parlé des défis auxquels les détenus doivent faire face. Il a évidemment été question du salaire des détenus. Vous en avez parlé en lien avec la hausse du coût de la vie, qui touche tout le monde, y compris les détenus.
    Il y avait là-bas un petit tableau à côté de la cantine. J'ai constaté que le prix d'un sandwich était exorbitant en comparaison des sous que les détenus reçoivent pour le travail qu'ils effectuent. Je pourrais évidemment vous poser des questions sur tous les sujets du rapport de cette année, mais cela m'a particulièrement interpellée. J'ai envoyé une lettre au ministre Mendicino et à la commissaire de Service correctionnel Canada pour leur dire que la situation n'a pas évolué depuis des années.
    Avez-vous fait des recommandations en ce sens ou comptez-vous en faire?
(0955)
    Oui, nous avons documenté depuis bien des années le problème relatif au salaire versé aux détenus.
    Il est évident que c'est difficile, sur le plan politique, et j'accepte ce fait. Toutefois, je pense que Service correctionnel Canada pourrait, malgré tout, être un peu plus innovant quand il tente de régler ce problème, en s'assurant peut-être d'augmenter le pouvoir d'achat des détenus sans même changer le salaire maximal de 6,90 $ par jour.
    Il y a beaucoup de déductions sur ces 6,90 $. Comme je vous l'ai dit, c'est à peu près juste 10 % de la population carcérale qui a ce salaire maximal. En enlevant des déductions et en réduisant, par subvention, le coût des articles qui peuvent être achetés, cela améliorerait les choses.
    Il y a toutes sortes de stratégies possibles. On pourrait rendre gratuits certains articles que les détenus doivent actuellement acheter, des choses aussi simples que le dentifrice, le savon et des produits tels que l'aspirine ou d'autres liés aux soins de santé.
    Même sans changer le salaire, les choses pourraient être améliorées. Service correctionnel Canada ne l'a pas fait. Selon moi, c'est très peu d'argent dans un budget de près de 3 milliards de dollars. On consacre à la nourriture moins de 6 $ par jour et par détenu. Il ne faut pas oublier cela non plus. C'est un montant vraiment minime.
    Vous parlez de l'Établissement de Port‑Cartier. C'est peut-être un des établissements où la nourriture est la meilleure dans tout le pays parce que les gens ont été capables, du fait qu'ils sont dans une région éloignée, de trouver des façons d'améliorer le menu. Entre autres, ils ont commencé à faire eux-mêmes le pain et toutes sortes de...
    Merci, monsieur Zinger.

[Traduction]

     Ces réponses sont excellentes, mais très longues. Nous vous en sommes toutefois reconnaissants.
    Monsieur MacGregor, vous avez la parole pendant deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais juste formuler une brève observation au sujet de la question de l'alimentation. La visite de l'établissement de Kent avec M. Noormohamed m'a ouvert les yeux. J'ai été heureux de porter une passe de visiteur lorsque j'ai franchi ces portes.
    C'était tout simplement incroyable. Ces deux établissements, c'est-à-dire l'établissement de Mountain et de Kent, sont situés à Agassiz, en Colombie-Britannique, et ils sont entourés des terres agricoles les plus fertiles que cette province puisse offrir. Il est tout simplement incroyable que nous ne stimulions pas l'économie locale et que nous n'achetions pas d'aliments locaux. Dans une vie antérieure, j'ai été planteur d'arbres — j'ai fait ce travail pendant huit ans —, et je sais que la qualité de la nourriture servie dans les camps a une énorme incidence sur le moral des travailleurs. Si elle n'est pas bonne, il peut y avoir une mutinerie.
    Je veux simplement souligner le fait qu'une alimentation de bonne qualité peut avoir un effet considérable sur le moral des gens et leur comportement général. C'est vraiment incroyable.
    Monsieur Zinger, vous avez déclaré que notre budget de trois milliards de dollars — que ce genre de somme — devrait nous permettre d'obtenir des résultats de classe mondiale. Il est évident que ce n'est pas le cas.
    Je suis incroyablement frustré, car nous ne cessons de parler de Service correctionnel Canada, mais cette responsabilité incombe au ministre de la Sécurité publique. Notre travail de législateur ne consiste pas seulement à examiner la loi habilitante, c'est-à-dire la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Nous devons également demander des comptes au ministère de la Sécurité publique.
    Je suppose que ma question très élémentaire est la suivante: en notre qualité de députés de l'opposition, que pourrons-nous faire pour vous aider? Avez-vous besoin d'une modification législative? Avez-vous besoin que le ministre joue un rôle plus énergique? En fin de compte, Service correctionnel Canada rend des comptes au ministre, qui occupe son poste grâce à la confiance de la Chambre des communes.
    C'est une question tendancieuse à laquelle il est difficile de répondre, mais oui, le fait est que la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition remonte à 1992. Elle a été présentée par le gouvernement Mulroney, et c'était une très bonne loi qui englobait la protection des droits garantis par la Charte et les principes du droit administratif, mais elle a été minée au fil des ans et, sous le gouvernement Harper, elle a été affaiblie davantage.
    Elle a 30 ans. Elle a besoin d'être réformée.
    Mon bureau, dans le cadre de notre frustration... Lorsque le gouvernement Trudeau a présenté une nouvelle mesure législative, environ trois essais ont été requis avant de régler la question de l'isolement préventif, et cela a été fait sans consultation. Cela n'a fait qu'aggraver notre frustration. Mon bureau a produit ce à quoi ressemblerait une Loi 2.0 sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition si l'on commençait par appliquer de nouveaux principes conformes à ce que nous savons mieux que quiconque dans le domaine des services correctionnels.
    Oui, une modification législative serait certainement la bienvenue.
    Le problème de l'approche en matière d'isolement cellulaire, c'est qu'elle répondait à un recours collectif. Elle s'attaquait au problème de manière très étroite et ne posait pas la question épineuse de savoir pourquoi tant de personnes se retrouvent en isolement. C'est peut-être parce que l'accès à des services de santé mentale n'est pas très bon. Vous vous attirez peut-être des ennuis parce que le salaire des détenus est trop bas ou parce que la nourriture est si mauvaise que vous devez faire toutes sortes de choses...
(1000)
    Merci, monsieur. Pourriez-vous conclure votre réponse?
    Toutes ces questions pourraient être abordées, bien au-delà de la seule vision étroite de l'isolement.

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    Nous allons maintenant donner la parole à M. Lloyd.
    Veuillez intervenir pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur Zinger.
    J'ai rencontré des défenseurs des personnes atteintes du syndrome d'alcoolisation fœtale, et ils ont été très déçus par le manque de soutien du gouvernement fédéral et des différents paliers de gouvernement. Nous disposons actuellement d'un seul programme qui reçoit environ 1,5 million de dollars par an. Comme vous, ils ont remarqué qu'une grande partie de la population carcérale est atteinte du syndrome d'alcoolisation fœtale.
    Les prisons offrent-elles des programmes destinés aux personnes atteintes du syndrome d'alcoolisation fœtale? Quelles mesures supplémentaires pourrions-nous prendre pour réduire le nombre de personnes atteintes du syndrome d'alcoolisation fœtale qui commettent des crimes et, par conséquent, se retrouvent dans les prisons canadiennes?
    J'ai mentionné dans mon profil que des études menées par le Service ont conclu qu'entre 10 et 23 % des détenus répondent aux critères du trouble du spectre de l'alcoolisation fœtale. Soit ils en présentent des symptômes, soit ils en ont reçu le diagnostic.
    Ce que je trouve scandaleux, c'est que bien que le taux de prévalence soit très élevé, le Service n'évalue pas systématiquement les détenus, afin de leur fournir un traitement et une thérapie pour les aider, et de leur offrir le soutien nécessaire pendant l'incarcération, mais aussi par la suite. Il s'agit de problèmes de la vie qui nécessitent un soutien, et nous n'en faisons pas assez dans ce domaine.
    Je vais m'arrêter là.
    Merci pour cette excellente remarque.
    Je constate toujours, en lisant des études de cas menées dans d'autres pays, que les programmes axés sur la foi et la spiritualité autochtone peuvent avoir une incidence considérable sur la vie des gens et sur la réduction du taux de récidive, et améliorer les résultats pour tous.
    Qu'en est‑il de ce type de programmes axé sur la foi au sein des prisons canadiennes? Pourrait‑on les développer davantage?
    Je vais demander à Mme Miron de parler un peu des services adaptés à la culture fournis aux détenus autochtones, et notamment des services spirituels liés aux aînés, etc.
    Allez‑y, madame Miron.
    D'après ce que j'ai vu lorsque j'ai visité les établissements, les perspectives religieuses et culturelles sont très importantes pour la population autochtone, car un grand nombre des détenus ne connaissent pas vraiment leur culture lorsqu'ils sont incarcérés. Une fois qu'ils ont établi ce lien... On obtient de meilleurs résultats lorsqu'ils sont en contact avec leur culture, qu'ils rencontrent les aînés et qu'ils participent à un plus grand nombre de programmes autochtones.
    Les programmes qui réussissent sont ceux qui adoptent une perspective autochtone authentique. C'est un fait dont Service correctionnel Canada doit tenir compte. Nous devons continuer d'introduire ces types de programmes dans les établissements.
(1005)
    Le nombre de ces programmes est‑il suffisant? En faut‑il plus?
    Ils disposent actuellement d'un programme universel, qui n'est pas adapté aux autres cultures. J'estime que la perspective culturelle n'est pas prise en compte. La seule façon d'assurer l'efficacité des programmes est de tenir compte de cette perspective.
    Pour obtenir des renseignements, je me rends sur place et je parle aux détenus. Je leur demande comment nous pouvons les aider. Trop peu de gens vont les voir, s'assoient avec eux et leur demandent comment ils peuvent améliorer leur vie en prison. Du moins, c'est ce que je fais avec les détenus auxquels je rends visite.
    Ils veulent nous voir davantage. Ils veulent voir plus de gens. La dotation en personnel autochtone... Il n'y a pas assez de membres du personnel autochtones.
    Qu'en est‑il des programmes autres que ceux destinés aux Autochtones, comme ceux destinés aux groupes musulmans, chrétiens ou autres?
    La situation est probablement la même.
    Il y a des lacunes. D'accord.
    Ils doivent adopter cette perspective culturelle pour pouvoir toucher les gens.
    Je suis d'accord.
    Mon temps est limité.
    Ma dernière question porte sur un sujet que nous avons étudié à maintes reprises avec Sécurité publique.
    Il vous reste en fait 12 secondes, monsieur Lloyd.
    D'accord.
    Comment pouvons-nous démanteler le crime organisé dans nos prisons?
    Il s'agit d'un véritable problème. Les gangs et le crime organisé sont des préoccupations réelles. J'aimerais commencer par parler de l'une des enquêtes systématiques que nous avons menées l'année dernière au sujet des prisonniers noirs qui sont trop souvent désignés comme membres de gangs, ce qui a des conséquences très néfastes sur eux. Parfois, on ne sait pas très bien comment on leur a attribué cette étiquette, et elle est lourde de conséquences.
    Nous avons également remarqué que les détenus noirs sont traités comme des membres de gangs. Ceux qui ne sont pas affiliés à des gangs ou ne sont pas officiellement désignés comme des membres de gangs ou des menaces importantes selon l'évaluation de Service correctionnel Canada sont traités de la même manière. C'est un véritable problème.

[Français]

    Merci, monsieur Zinger.

[Traduction]

    Merci, monsieur Lloyd.
    Nous allons maintenant passer à M. Chiang.
    Monsieur Chiang, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et bonjour.
    J'aimerais remercier les témoins d'être parmi nous aujourd'hui et de nous faire bénéficier de leur savoir.
    En ce qui concerne la discrimination, je suis heureux d'apprendre que votre bureau se soit senti encouragé par la lettre de mandat du premier ministre au ministre de la Sécurité publique, dans laquelle il lui demande de s'attaquer au racisme systémique au sein du système de justice pénale, y compris des services correctionnels fédéraux.
    Quelles sont les mesures que le gouvernement du Canada doit prendre pour répondre de façon adéquate aux préoccupations systémiques liées aux droits de la personne au sein des services correctionnels fédéraux?
    Oui, il y a... Je ne suis pas complètement blasé. J'ai de l'espoir. Le ministère de la Justice et le ministre de la Justice mènent deux initiatives particulières qui, à mon avis, sont encourageantes, si elles sont déployées de manière adéquate, évidemment. La première est la stratégie sur la justice pénale pour les Autochtones. L'autre stratégie concerne les Canadiens d'origine africaine et le système pénal. Ces deux initiatives sont dirigées par le ministère de la Justice, mais le ministre de la Sécurité publique a évidemment également un rôle à jouer dans ces initiatives.
    Lorsque le ministère de la Justice dirige quelque chose, je crains toujours qu'il se concentre uniquement sur ce qu'il connaît, à savoir les tribunaux, les condamnations et ce genre de questions. Cette année, j'ai donc recommandé dans mon rapport annuel que les services correctionnels jouent un rôle important dans cette stratégie globale: N'oubliez pas les services correctionnels. Ils ont assurément assez de fonds. Nous pourrions faire beaucoup de choses pour résoudre certains de ces problèmes, plus particulièrement, si je devais citer quatre groupes ou segments qui, selon moi, doivent subir des réformes, ils seraient les suivants: les services correctionnels pour Autochtones, les personnes souffrant de troubles mentaux importants, les personnes suicidaires ou qui s'automutilent de façon chronique, les femmes et la population vieillissante, car j'estime qu'il est inutile de garder bon nombre de ces personnes dans les pénitenciers. Elles ne constituent pas une menace pour la société.
(1010)
    Merci, monsieur Zinger.
    En ce qui concerne ces recommandations, réalise‑t‑on des progrès dans la lutte contre la discrimination au sein de notre système correctionnel?
    Je vous avoue que je suis très déçu de la réponse de Service correctionnel Canada aux recommandations que je formule depuis plus d'une décennie au sujet des peuples autochtones. Dans notre rapport intitulé « Une question de spiritualité » et dans le rapport que nous avons produit sur les expériences des Noirs incarcérés dans des établissements correctionnels fédéraux, qui date également de 2013, je suis consterné...
    Je ne suis pas le seul à avoir formulé des recommandations. Mes recommandations ont été intégrées aux travaux du groupe d'experts de l'ONU sur les personnes d'origine africaine, qui a copié-collé certaines des recommandations que j'avais déjà formulées. C'était en 2016, mais on a pris très peu de mesures.
    J'ai remarqué que le problème avec Service correctionnel Canada est qu'il semble être très doué pour produire de nombreux documents ministériels, mais que ceux‑ci n'ont pas d'effet sur les pénitenciers et n'entraînent pas de changement. La dernière vague d'activité n'a pas eu lieu en réponse à mes recommandations, mais à la directive du premier ministre exigeant que chaque ministère dispose d'une stratégie de lutte contre le racisme. Il y a eu une vague d'activité, mais elle ne semble pas avoir eu de répercussions sur la façon dont les gens sont traités dans nos pénitenciers. Ils sont toujours soumis à une discrimination, à des préjugés et à un racisme omniprésents. C'est très regrettable.
    Merci, monsieur Chiang.
    Voilà qui conclut notre deuxième tour. Nous allons commencer notre troisième tour avec M. Motz.
    Monsieur Motz, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Zinger, lors de notre dernière réunion sur la sécurité publique, nous avons également discuté de Service correctionnel Canada. Je remarque que dans votre résumé, vous faites état de nouveaux problèmes auxquels vous êtes confrontés, l'un d'eux étant l'aide médicale à mourir. C'est l'une des nouvelles difficultés que rencontrent les services correctionnels. Vous ne mentionnez toutefois pas beaucoup cette pratique dans le reste de votre rapport.
    Une demande d'accès à l'information et aux renseignements personnels a révélé qu'en août 2020, au total, 11 personnes placées sous la garde de Service correctionnel Canada avaient présenté une demande d'aide médicale à mourir. Trois d'entre elles ont été acceptées.
    Combien de personnes incarcérées ont demandé l'accès à l'aide médicale à mourir depuis le début de l'exercice en cours? Combien de personnes incarcérées ont reçu l'aide médicale à mourir? Pouvez-vous nous donner ces chiffres, monsieur?
(1015)
    La réponse est non. C'est une question qui me contrarie beaucoup. Lorsque la nouvelle loi a été proposée, on m'a demandé de témoigner. J'ai proposé des changements qui, selon moi, étaient très judicieux et importants et devaient être apportés. L'un concernait le fait que Service correctionnel Canada n'a pas l'obligation légale d'informer mon bureau lorsqu'une personne demande ou reçoit l'aide médicale à mourir. Je pense que c'est inapproprié. C'est quelque chose qui me dérange un peu.
    Le deuxième changement est le plus évident, et concerne le fait que certaines des procédures ont été menées au sein même des pénitenciers, ce qui est selon moi contraire à l'éthique. Le Canada est en passe de devenir le seul pays au monde à offrir l'aide médicale à mourir dans des établissements carcéraux. Je trouve que c'est incroyable. Les services correctionnels ne devraient pas avoir pour mission d'abréger la vie des personnes dont ils ont la garde. Cette procédure devrait être menée à bien dans un hôpital externe. C'est pourquoi j'ai également mentionné cet enjeu.
    Ce sont de petits changements qui sont selon moi importants.
    Le troisième vise le fait que les services correctionnels n'effectuent pas d'examen de la mortalité relativement à l'aide médicale à mourir. Je pense qu'ils devraient le faire. Pourquoi? Parce qu'il y a des questions importantes à se poser, non seulement pour s'assurer qu'une procédure d'aide médicale à mourir était appropriée, mais aussi pour savoir, par exemple, si les soins de santé fournis à cette personne étaient adéquats et n'ont pas accéléré la présentation d'une demande d'aide médicale à mourir. Est‑ce que tout a été fait pour essayer de transférer la personne hors du pénitencier pour qu'elle puisse prendre une décision beaucoup plus éclairée et libre de toute contrainte dans la communauté avant de demander une aide médicale à mourir? On devrait mener des enquêtes à cet égard.
    Monsieur Zinger, je comprends parfaitement la frustration que vous éprouvez à ce sujet. En plus de ce que vous avez mentionné, je m'interroge sur ce qui suit. Je sais que vous ne connaissez pas la réponse à cette question, et il s'agit plutôt d'une déclaration, mais je m'interroge sur les préoccupations que suscite la tendance à la dérive qu'est devenue l'aide médicale à mourir. Nous savons, dans l'ensemble du pays, jusqu'à l'examen de l'automne dernier, que des personnes demandent l'aide médicale à mourir ou ont reçu une aide médicale à mourir pour des problèmes de santé mentale et non pas parce qu'elles étaient sur le point de mourir et souffraient d'un problème de santé irrémédiable. Je pense que cette question poserait encore plus problème au sein de notre Service correctionnel. Malheureusement, avec cette prolongation et une prolongation d'un an pour commencer à envisager l'aide médicale à mourir pour les personnes qui souffrent de problèmes de santé mentale, nous sommes le seul pays au monde qui envisagerait même une telle mesure. C'est inquiétant. Je pense que ce sera inquiétant pour vous et pour le Service correctionnel à l'avenir.
    Je change un peu de sujet, monsieur. La dernière fois que vous êtes venu, nous avons abordé cette question. Mme Damoff se souvient certainement des conversations que nous avons eues. Vous avez déclaré, dans le résumé que vous nous avez fourni, chiffres à l'appui, que les Noirs et les Autochtones étaient surreprésentés au sein du système correctionnel canadien. Compte tenu de votre rôle actuel et de votre expérience en la matière, pourquoi pensez-vous que ce soit le cas? Pouvez-vous expliquer la surreprésentation de ces groupes au sein du système correctionnel?
    Je vais demander à Mme Miron de vous répondre, car elle connaît mieux le sujet que moi. Je vais répondre plutôt en tant que défenseur des droits de la personne.
     Ce que je peux vous dire, c'est qu'au sein de la société canadienne, les peuples autochtones et les Canadiens d'origine africaine ne bénéficient pas des mêmes droits socio-économiques, culturels et politiques que les autres Canadiens, et ce, pour toute une série de raisons.
    Je vais me tourner vers Mme Miron, qui pourra vous fournir une meilleure réponse au sujet des problèmes profondément ancrés dans l'histoire, qui font qu'ils ne bénéficient pas des mêmes droits que vous et moi, en tant qu'hommes blancs vieillissants.
(1020)
    Madame Miron, veuillez répondre rapidement, car le temps de M. Motz est dépassé.
    La surreprésentation actuelle au sein des établissements carcéraux est due à l'absence de volonté ou de désir de transférer les populations autochtones ou noires vers des établissements à sécurité moyenne ou minimale.
    La plupart de nos pavillons de ressourcement sont également vides, car Service correctionnel Canada semble avoir un facteur de contrôle sur ces personnes. Ils ne veulent pas les faire descendre à un niveau de sécurité adéquat.
    Les établissements à sécurité moyenne comptent un nombre considérable de Noirs et d'Autochtones, principalement les établissements les moins souhaitables, comme Sas Pen ou Stony Mountain. La majorité des détenus de ces établissements sont autochtones. Ils s'accumulent à cet endroit parce qu'ils ne sont pas transférés dans des établissements à sécurité moyenne.
    Évidemment...
    Merci. Je vais devoir vous interrompre. Le temps est écoulé.
    Nous allons maintenant passer à Mme Damoff. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avons si peu de temps ici. Je veux parler des gangs et des détenus gériatriques.
    Très rapidement sur ce point, Service correctionnel Canada dispose‑t‑il d'une stratégie nationale sur les gangs? Devrait‑il en avoir une? Je sais que le cadre visant à réduire la récidive mentionne les gangs. Étant donné la prévalence des gangs au sein des établissements, pourriez-vous formuler quelques commentaires rapides sur ce point?
    Nous demandons au Service de mettre en place une stratégie nationale de lutte contre les gangs ainsi qu'une initiative particulière pour la désaffiliation aux gangs. Jusqu'à présent, nous n'avons pas réussi à convaincre le Service de l'intérêt de disposer d'une telle stratégie et initiative globale.
    Nous avons documenté certaines de nos préoccupations à l'égard des jeunes détenus. Nous avons mené une enquête systématique sur les détenus âgés de 18 à 21 ans. Il en est clairement ressorti qu'ils sont soumis à... Ils craignent pour leur vie. Lorsqu'ils arrivent dans les pénitenciers, ils cherchent proactivement à rejoindre un gang pour bénéficier d'une protection. Cette situation a un coût énorme pour ces personnes et perpétue un problème.
    Je vous remercie, monsieur Zinger.
    Avant de parler des détenus gériatriques, j'aimerais mentionner que lorsque je suis allée dans l'Établissement Grand Valley, j'ai vu le Programme d'échange de seringues dans les prisons à l'oeuvre et j'ai parlé à l'infirmière responsable. C'est une grande réussite. Si j'ai bien compris, il n'y a eu aucun incident dans le cadre de ce programme.
    Je reconnais la crainte qui existe dans les établissements qui n'ont pas ce programme. Dans cet établissement, on pouvait certainement voir des autocollants qui s'y opposaient un peu partout, mais lorsque j'ai parlé à l'infirmière et aux responsables du programme, ils m'ont dit qu'il n'y avait eu aucun problème dans les établissements.
    Votre rapport indique que l'âge moyen est de 45 à 50 ans. Toutes les personnes assises dans cette salle se disent que ce n'est pas un âge très avancé.
    En fait, j'ai eu une révélation lorsque je suis allée à l'Établissement de Millhaven, monsieur Zinger. En effet, j'ai vu un détenu et un groupe de détenus qui, selon moi, avaient plus de 80 ans. Ils auraient pu être à une table dans un établissement de soins de longue durée. Pourtant, j'ai découvert qu'ils étaient plus jeunes que moi.
    La nourriture épouvantable — il est difficile pour les Canadiens de comprendre à quel point la nourriture est mauvaise —, les conditions, la détention et le manque d'activité physique font vieillir ces détenus beaucoup plus rapidement que la population générale.
    Pensez-vous qu'il serait avantageux de mettre en place un continuum de soins en établissant des partenariats dans la collectivité pour permettre à ces détenus qui ne présentent pas de risque pour la société d'être dans des établissements de soins de longue durée ou dans un autre établissement de ce type?
    Oui, nous utilisons l'âge de 50 ans dans le cas des personnes incarcérées, car il faut reconnaître que les antécédents de longue date de maladie mentale, les problèmes de toxicomanie et la vie criminelle entraînent le vieillissement prématuré du corps. Vous pouvez ajouter un facteur chronologique de 10 ans à leur âge lorsqu'il s'agit de leur santé.
    Je ne sais pas quoi vous dire. C'est un nombre qui augmente de plus en plus. Pour moi, il est évident que d'autres pays ont été en mesure de libérer ces personnes dans la collectivité en toute sécurité et à un coût bien moins élevé. En effet, détenir une personne vieillissante et mourante en prison coûte aux Canadiens de deux à quatre fois le coût moyen de l'incarcération, qui est de 225 000 $, comme je l'ai mentionné au début. C'est donc extrêmement dispendieux.
    Si on pouvait y arriver sans entrer en concurrence avec… C'est le point important. Les intervenants du Service me disent qu'il ne faut pas entrer en concurrence. On tente de transférer des personnes à l'extérieur du milieu carcéral, mais aucun lit n'est disponible. Il n'y a pas de place dans les établissements de soins de longue durée et on ne peut donc pas y envoyer ces personnes. Si le Service, compte tenu du niveau de ressources, pouvait augmenter le nombre de lits… Par exemple, l'État du Connecticut a demandé au secteur privé de construire des établissements de soins de longue durée, car le coût est beaucoup moins élevé. En effet, il ne coûte pas 225 000 $ ou deux à quatre fois plus pour garder un parent âgé dans une résidence pour personnes âgées ou dans un établissement de soins de longue durée. On peut donc réaliser d'énormes économies. C'est aussi un processus plus humain et plus digne. Cela n'a donc aucun sens.
    De 50 à 60 personnes décèdent chaque année dans un pénitencier, et l'âge moyen au décès est de 62 ans. C'est insensé. Les deux tiers de ces personnes meurent de causes naturelles. La grande majorité de ces décès sont prévisibles. Par exemple, les gens contractent des maladies chroniques, deviennent des malades en phase terminale et palliative, et meurent en prison. Il n'y a absolument aucune raison pour que ces personnes gèrent les derniers mois ou la dernière année de leur vie dans un pénitencier.
    Lorsque nous avons mené notre enquête systématique sur le vieillissement, nous avons interrogé plus de 200 détenus et ils nous ont tous dit que leur plus grande crainte était de mourir en prison. Les intervenants du Service, même dans le cas de l'aide médicale à mourir, nous disent qu'ils le font en prison parce que c'est ce que veulent les détenus. Mais ce n'est pas ce qu'ils veulent. C'est inapproprié, c'est dispendieux et je pense que nous pourrions faire mieux. Étant donné qu'il s'agit d'une proportion de notre population pénitentiaire qui s'accroît sans cesse, nous devrions être beaucoup plus proactifs. Si une loi peut aider, par exemple, à obliger le Service à faire le nécessaire en ce qui concerne les libérations pour raisons médicales ou gériatriques, il faut adopter cette loi.
(1025)

[Français]

    Merci.
    Madame Michaud, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux de nouveau remercier les témoins. Leurs propos sont très intéressants. Je remercie aussi mes collègues, qui posent des questions sur à peu près tous les sujets. Nous en apprenons énormément.
    J'aimerais en savoir davantage sur l'expérience des personnes noires dans les pénitenciers. Vous avez fait quelques recommandations dans votre rapport. Vous parlez de préjugés raciaux qui sont, évidemment, très présents. Il est aussi question de la disponibilité des produits de soins personnels et des do-rags, un accessoire que certaines personnes utilisent pour couvrir leurs cheveux. Le rapport contient aussi des témoignages de gens disant qu'ils obtenaient un meilleur service ou se sentaient davantage en confiance lorsqu'ils étaient servis par une personne de leur communauté, ou une personne noire.
    Pouvez-vous nous parler plus en détail de vos recommandations concernant ces sujets en particulier?
    Nous avons fait plusieurs recommandations dans cette section de notre rapport annuel, qui a été bien reçu. J'ai d'ailleurs été très encouragé de voir que notre dernier rapport a été cité dans une décision de la Cour suprême. Selon cette décision, un jeune individu de race noire ne devait pas se voir infliger la peine minimale, compte tenu de ce qui se passait dans les établissements correctionnels et de la discrimination dont il pouvait faire l'objet, car cela rendait sa peine disproportionnée.
    On a clairement reconnu que Service correctionnel Canada ne tenait pas compte des produits de soins pour la peau pour les personnes de race noire, qui ont des défis différents de ceux des gens de race blanche, et qu'il considérait que les do-rags étaient liés aux gangs. Je dois dire que la réponse de Service correctionnel Canada concernant ces deux éléments a été positive, et nous étions contents de cela.
    La plus importante recommandation que nous avons faite consistait en la conception d'une stratégie nationale bien détaillée qui change vraiment la donne quant à la façon dont les Noirs sont traités dans le système correctionnel fédéral. J'avoue que je n'aime pas beaucoup cela, parce que je critique souvent ce genre de document organisationnel, mais c'est important pour mon bureau, dont le rôle est de s'assurer de la conformité avec la loi et les politiques. S'il n'y a pas de politiques, il est très difficile pour moi de demander des comptes à Service correctionnel Canada. C'est pourquoi j'ai fait cette recommandation. Elle touche toutes sortes de domaines dans lesquels Service correctionnel Canada pourrait réellement changer les choses pour ceux qui sont incarcérés dans nos pénitenciers et qui sont de race noire.
(1030)
    Merci.

[Traduction]

    La parole est maintenant à M. MacGregor. Il a deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Zinger, je fais partie d'autres comités, dont le Comité mixte permanent sur l’aide médicale à mourir. La semaine prochaine, nous publierons notre rapport final. Un témoin, Mme Jessica Shaw, a comparu devant ce comité pour parler de l'aide médicale à mourir dans les prisons. J'aimerais citer un extrait de son témoignage. Le voici:
Eh bien, ce que nous qualifions officieusement de libération pour des raisons humanitaires, est en fait appelée libération conditionnelle à titre exceptionnel, et il est extrêmement rare qu'elle soit accordée au Canada. Dans deux des trois cas connus d'aide médicale à mourir consentie à des patients sous la garde du SCC, les détenus avaient demandé une libération conditionnelle et se l'étaient vu refuser. Le troisième prisonnier n'a pas présenté de demande. Il savait apparemment que ses perspectives de libération étaient minimes, même compte tenu du stade avancé de sa maladie.
    Elle dit aussi ce qui suit:
Le Canada est le seul pays au monde, où l'aide à mourir est légale, à disposer de lignes directrices précises sur la façon dont la politique doit être mise en œuvre dans le cas des prisonniers.
    Je n'ai pas beaucoup de temps. Que voudriez-vous voir dans ces lignes directrices? J'aimerais que vous nous donniez plus de détails à cet égard, car il s'agit manifestement d'une question urgente.
    Pourriez-vous également parler du 2e volet? Il vise les personnes dont la mort naturelle n'est pas prévisible, mais qui souffrent d'un problème de santé grave et irrémédiable.
    Connaissez-vous bien cette population dans les établissements fédéraux du Canada?
    Je suis d'accord avec ce qu'a mentionné Mme Shaw, et je pense que certaines des histoires proviennent directement de ce que nous avons pu obtenir.
    Le problème, comme je l'ai dit, se divise en trois volets. Tout d'abord, il faut prévoir une obligation en vertu de la loi de déclarer les cas pour que mon bureau soit informé, car il faut exercer une surveillance dans ce domaine. Deuxièmement, le Service doit mener une enquête pour ces cas comme il le fait pour chaque décès d'une personne incarcérée. Troisièmement, on doit interdire explicitement cette procédure dans les pénitenciers, point à la ligne. Cela ne devrait se produire sous aucune condition.
    Je pense qu'il est très important de souligner qu'en situation carcérale, il faut essayer d'agir de façon extrêmement proactive et amener les personnes en phase palliative ou en phase terminale ou les personnes qui sont atteintes de maladies chroniques — et pour lesquelles la mort n'est qu'une question de temps — à l'extérieur du milieu carcéral, afin qu'elles puissent prendre leur décision dans un autre endroit, sans craindre de mourir en prison et dans des conditions de coercition perçues ou réelles. Je pense que c'est ce que j'aimerais voir dans ces lignes directrices.
    En ce qui concerne le 2e volet, ou l'élargissement de sa portée, étant donné la proportion élevée de personnes atteintes de troubles mentaux importants qui vivent dans des conditions d'incarcération, en particulier certaines personnes atteintes d'une maladie mentale grave, il s'agit de leur donner les moyens de sortir de prison avec la mort, car elles luttent contre une maladie mentale et vivent dans de très mauvaises conditions d'incarcération.
    Je peux vous dire que les personnes atteintes de maladie mentale en milieu carcéral ont tendance à être détenues dans des établissements à sécurité élevée ou à sécurité maximale. Elles sont surreprésentées dans ces unités d'intervention structurées, qui constituent le nouveau régime en matière d'isolement préventif.
    Il faudrait certainement accroître les exigences en matière de surveillance et de rigueur si l'on souhaite élargir ce régime. Ce n'est pas seulement parce que ces gens souffrent et qu'ils veulent que cette souffrance cesse, si possible, mais aussi parce que la souffrance accrue causée par les conditions de détention peut affecter leur… Oui, il faudrait certainement procéder avec beaucoup de prudence.
(1035)

[Français]

     Merci.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer aux deux dernières séries de questions, et nous les réduirons à des séries de questions de quatre minutes.
    Monsieur Shipley, vous avez la parole. Vous avez quatre minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Zinger, j'ai bien aimé notre dernière conversation. Je l'ai trouvé utile, et j'ai appris certaines choses. J'aimerais donner suite à l'une d'entre elles, et j'aimerais ensuite aborder un autre sujet. Je ne veux pas trop m'attarder sur le point dont nous discutions.
    Lors de notre dernière discussion, vous avez mentionné que l'un des programmes qui pourraient être améliorés dans les établissements était celui de l'emploi. Cela pourrait être utile. Dans le cadre de mes recherches, nous avons constaté que 60 % des prisonniers dans des établissements à sécurité maximale ont un emploi, mais que près de la moitié de ces emplois sont liés à l'entretien. Notamment, dans l'Établissement d'Edmonton, 80 % des emplois sont liés à l'entretien. Même s'il n'y a absolument rien de mal avec les travaux d'entretien, il serait probablement bien d'offrir quelques options différentes. Ces derniers temps, j'ai rencontré les représentants de nombreux organismes professionnels qui font état d'une énorme pénurie de main-d'oeuvre.
    Est‑ce qu'on envisage d'offrir davantage de formation à l'emploi dans les établissements? Cela pourrait faciliter l'intégration des détenus lorsqu'ils sont libérés dans la société.
    Oui, la plupart des emplois dans les pénitenciers ont très peu de valeur sur le plan des compétences professionnelles. Il s'agit surtout de travaux d'entretien. Le travail en cuisine avec la réfrigération après cuisson… Ce n'est pas une compétence qu'il vaut vraiment la peine d'acquérir.
    Le meilleur programme offert par le Service s'appelle CORCAN. Il s'agit d'un programme d'atelier industriel en établissement, mais moins de 10 % de la population carcérale en profite, et 80 % de ces emplois sont dans le domaine des textiles. Ces employés utilisent essentiellement des machines à coudre, et je suppose que c'est mieux que de rester à ne rien faire dans leur cellule. Ils peuvent néanmoins acquérir quelques compétences légitimes, par exemple lorsqu'ils arrivent au travail à l'heure. Cependant, ces compétences ne sont pas transférables sur le marché du travail canadien. En effet, au Canada, nous n'avons pas beaucoup d'emplois en confection de draps de lit, de sous-vêtements ou de jeans bon marché.
    Nous devons faire mieux.
    Toutefois, le programme CORCAN a de petits groupes de gens très doués qui travaillent avec le secteur privé. Parfois, s'ils ont des placements à l'extérieur pour le travail, ils peuvent effectivement se rendre sur ces sites, mais il s'agit d'un très petit nombre de personnes. Je pense que c'est le plus grand défi auquel fait face le Service à cet égard. Il faut développer ce programme et le rendre beaucoup plus accessible. Pour l'instant, il ne profite qu'à un petit nombre de personnes, et ces personnes ont généralement déjà acquis des compétences, et elles profitent donc d'une formation professionnelle, mais elles ont déjà la formation et la rigueur…
(1040)
     Je vous remercie de votre réponse.
    Je suis désolé de vous avoir interrompu, mais je dois poser ma dernière question, car mon temps est presque écoulé.
    C'est une question qui me trotte dans la tête depuis que j'ai lu ceci. Si elle a été posée plus tôt, veuillez m'excuser de l'avoir manquée.
    Vous avez beaucoup parlé des coûts officiels annuels. Dans les documents que vous nous avez remis, à la page 2, vous indiquez que les derniers coûts officiels sont de 126 000 $ pour les hommes détenus dans un établissement fédéral et de 222 000 $ pour les femmes détenues dans un établissement fédéral. Pourquoi ce montant est‑il beaucoup plus élevé — 100 000 $ de plus — pour les femmes?
    Il s'agit simplement d'une économie d'échelle. Au Canada, seulement environ 600 femmes sont incarcérées, mais elles le sont dans cinq établissements différents à l'échelle du pays, ce qui signifie que nous avons tout de même besoin de beaucoup de personnel. Il est beaucoup plus rentable d'avoir un seul établissement avec beaucoup de personnel que d'avoir cinq établissements différents, mais nous avons décidé d'avoir cinq établissements en 2000 — et c'était la bonne décision — pour que les femmes puissent rester plus près de leur communauté. Dans l'ensemble, ce n'est donc qu'une question d'économie d'échelle.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à M. Chiang. Il a quatre minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je remercie également nos témoins d'être ici aujourd'hui.
    En ce qui concerne la surreprésentation des Noirs, dans les recommandations de votre rapport, vous demandez l'élaboration et l'examen de diverses politiques en matière de plans d'action nationaux. Cependant, vous soulignez également qu'une grande partie des mesures déjà prises par le gouvernement pour s'attaquer à des problèmes persistants comme le racisme, par exemple, n'ont guère donné lieu qu'à « des exercices politiques qui ont peu d’impact direct sur la vie des personnes noires incarcérées ».
    Dans ce cas, comment peut‑on concilier ces observations pour mettre en œuvre un changement efficace?
    On peut certainement se poser la question. Selon moi, le Service a grand besoin de l'aide de dirigeants et d'organismes de la communauté noire. De nombreux obstacles empêchent de fournir des services et des conseils à la population carcérale. Je pense que c'est dans ce domaine qu'on peut apporter un changement. Il faut laisser les gens avoir accès à la population carcérale et leur permettre d'offrir des programmes, des conseils, des initiatives culturelles, de la musique et des arts aux détenus. Laissez-les entrer dans les pénitenciers. Permettez aux membres de la communauté d'entrer dans les pénitenciers et d'orienter les politiques, afin que ces dernières reflètent la perspective afro-canadienne, que les initiatives interpellent les détenus et qu'elles soient appropriées sur le plan culturel.
    En même temps, faites toutes les autres choses que vous devriez faire, c'est‑à‑dire assurer une représentation du personnel beaucoup plus diversifiée et adaptée à la culture à tous les niveaux de l'organisme.
     Je vous remercie beaucoup, monsieur Zinger.
    Ces recommandations que vous venez de formuler… Sont-elles mises en œuvre quelque part ou restent-elles sur les tablettes à accumuler la poussière?
    Je pense vous avoir dit que j'étais déçu de la réponse globale du Service, et je vais m'en tenir à cela. Quelques changements ont toutefois été apportés. Par exemple, j'ai parlé des produits de soins de santé, etc. Nous avons formulé quelques commentaires sur le fait que les professionnels de la santé qui travaillent pour le Service devraient être un peu plus conscients de certains enjeux culturels. Le Service a répondu de manière tout à fait appropriée et proactive, et je ne veux donc pas rater une occasion de faire l'éloge de certaines réponses constructives et judicieuses.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Zinger.
    Je suis heureux que certaines choses aient été faites pour aider notre population carcérale. J'espère que nous verrons des initiatives et des changements positifs à l'avenir.
    Je vous remercie beaucoup d'être venus aujourd'hui, et je vous souhaite une bonne journée.
(1045)
    Je vous remercie, monsieur Chiang.
    Je vous remercie, monsieur Zinger et madame Miron, d'avoir comparu aujourd'hui. Il est évident que vous avez beaucoup de sages conseils à nous offrir. Nous vous remercions d'avoir passé deux heures complètes devant le Comité, même s'il est évident que nous aurions probablement besoin de vous pendant bien plus longtemps. Nous vous remercions de votre temps, et je tiens à remercier le Comité de tout le travail accompli aujourd'hui.
    Je rappelle au Comité que l'étude sur la Russie a été publiée, du moins à l'interne, et j'espère que, si elle ne soulève aucun problème, nous pourrons l'adopter mardi, après avoir entendu les témoins.
    Je vous remercie. La séance est levée.
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