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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 123 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 10 octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Bienvenue à la 123e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes. La réunion d'aujourd'hui se déroule sous une forme hybride.
    J'aimerais rappeler les points suivants aux participants. Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Tous les commentaires doivent être adressés par l'entremise de la présidence. Mesdames et messieurs, veuillez lever la main si vous souhaitez prendre la parole, que vous participiez en personne ou par Zoom. Le greffier et moi ferons de notre mieux pour gérer l'ordre des interventions.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 19 septembre 2024, le Comité reprend son étude de l'ingérence russe et des campagnes de désinformation au Canada.
    J'aimerais accueillir nos témoins pour la première heure.
    Nous recevons M. David Agranovich, directeur des politiques de perturbation des menaces, par vidéoconférence; et dans la salle, Mme Rachel Curran, directrice des politiques publiques, Canada, de Meta Platforms Inc.
    Nous accueillons Steve de Eyre, directeur des politiques publiques et affaires gouvernementales, Canada; et par vidéoconférence, Justin Erlich, responsable mondial du développement des politiques, de TikTok.
    Nous avons Lindsay Doyle, chef des affaires gouvernementales et des politiques publiques pour le Canada; et John Hultquist, analyste en chef, Mandiant Intelligence pour Google, qui comparaît par vidéoconférence, de YouTube.
    Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui et de nous aider dans le cadre de notre étude.
    J'aimerais maintenant inviter M. Agranovich à présenter une déclaration liminaire d'un maximum de cinq minutes.
    Allez‑y s'il vous plaît, monsieur.
    Merci beaucoup, et merci de me fournir l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
    Je m'appelle David Agranovich et je suis directeur des politiques de perturbation des menaces chez Meta.
    Mon travail se concentre sur la coordination de nos efforts interentreprises pour repérer, perturber et dissuader les menaces adverses sur nos plateformes. Depuis les six dernières années, je m'attache à contrer ces menaces chez Meta. Auparavant, j'ai travaillé au gouvernement américain sur des questions liées à l'ingérence russe, où j'ai fini par agir comme directeur du renseignement et directeur pour la Russie au Conseil de sécurité nationale.
    Je suis accompagné aujourd'hui de Rachel Curran, qui est notre directrice des politiques publiques pour le Canada.
    À Meta, nous travaillons fort pour repérer et contrer les menaces adverses. Cela comprend le piratage, les logiciels espions et les opérations de cyberespionnage, ainsi que les opérations d'influence ou ce que nous appelons les « comportements non authentiques coordonnés », ou CIB en anglais, que nous définissions comme tout effort coordonné de manipulation du débat public à des fins stratégiques, dans le cadre duquel les faux comptes sont au cœur de l'opération.
    À Meta, nos normes communautaires interdisent les comportements non authentiques, y compris de la part d'utilisateurs qui cherchent à se faire passer pour d'autres, à utiliser de faux comptes ou à rehausser artificiellement la popularité du contenu. Cette politique vise à protéger la sécurité des utilisateurs et de nos services et à créer un espace où les personnes peuvent faire confiance aux personnes et aux communautés avec lesquelles elles interagissent sur nos plateformes.
    Nous savons également que les acteurs des menaces cherchent à nuire au débat public et à le manipuler, à exploiter les divisions sociétales, à promouvoir la fraude, à influencer les élections et à cibler l'engagement social authentique. Contrer ces mauvais acteurs est l'une de nos plus grandes priorités. C'est pourquoi nous avons beaucoup investi dans les gens et les technologies pour lutter contre les comportements non authentiques. Les équipes de sécurité de Meta ont élaboré des politiques, des outils de détection automatisés et des cadres d'application de la loi pour s'attaquer aux acteurs trompeurs, tant étrangers que nationaux. Ces investissements dans la technologie nous ont permis d'intercepter des millions de tentatives pour créer de faux comptes chaque jour et d'en détecter et d'en éliminer des millions de plus, souvent dans les minutes suivant leur création.
    Cette année seulement, Meta a désactivé plus de deux milliards de faux comptes, dont la grande majorité, soit plus de 99 %, a fait l'objet d'une identification proactive avant que l'on reçoive un signalement d'un utilisateur.
    Notre stratégie pour contrer ces menaces adverses s'articule autour de trois axes principaux. Le premier consiste en des enquêtes menées par des experts afin de découvrir les opérations les plus évoluées. Le deuxième est la divulgation publique et l'échange d'information pour permettre une défense intersociétale. Troisièmement, il y a les efforts en matière de produits et d'ingénierie pour tirer parti des renseignements tirés de nos enquêtes afin de rendre plus efficaces la détection et l'application de la loi à l'échelle voulue et de façon automatisée.
    Nos rapports trimestriels publics sur les menaces représentent un élément essentiel de cette stratégie. Depuis le début de nos travaux, nous avons éliminé et divulgué plus de 200 opérations d'influence clandestines. Elles provenaient de 68 pays différents et s'effectuaient dans au moins 42 langues différentes, de l'amharique à l'ourdou en passant par le russe et le chinois.
    Le partage de cette information a permis à nos équipes, aux journalistes d'enquête, aux fonctionnaires et aux pairs de l'industrie de mieux comprendre et d'exposer les risques de sécurité sur Internet, y compris en prévision des élections cruciales. Nous communiquons également des indicateurs techniques détaillés liés à ces réseaux dans un dépôt public hébergé sur GitHub, qui contient plus de 7 000 indicateurs d'opérations d'influence sur Internet.
    Je veux vous faire part très rapidement des principales tendances observées au cours de nos enquêtes sur les opérations d'influence dans le monde.
    Premièrement, la Russie continue d'être la source la plus prolifique de CIB. Nous avons perturbé plus de 40 opérations de la Russie qui visaient des publics dans le monde entier. Deuxièmement, l'Iran demeure au deuxième rang des sources les plus actives de CIB à l'échelle mondiale. Troisièmement, bien que l'activité clandestine d'origine chinoise ait été traditionnellement limitée dans nos plateformes, nous avons observé un changement des opérations chinoises au cours des deux dernières années, qui ciblent maintenant des publics élargis et mondiaux dans des langues autres que le chinois.
    Dans l'ensemble des différentes opérations géographiques, nous avons observé le recours de plus en plus important aux sociétés privées qui vendent l'influence en tant que service; l'utilisation d'outils d'IA génératifs, même si, soit dit en passant, ils ont peu d'incidence sur nos capacités d'enquête; et enfin, l'amplification de ces réseaux à l'aide d'une couverture médiatique non essentielle.
    Je serai heureux de discuter de ces opérations de manière plus détaillée dans le cadre de notre discussion aujourd'hui.
    Contrer les opérations d'influence étrangère nécessite l'effort de toute la société, et c'est pourquoi nous travaillons avec nos pairs de l'industrie — certaines personnes sont représentées ici aujourd'hui — ainsi que des chercheurs indépendants, des journalistes d'enquête, ainsi que des membres du gouvernement et des forces de l'ordre.
    Je vous remercie de vous consacrer à ce travail. Je suis impatient de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Agranovich.
    Nous allons maintenant passer à M. de Eyre et à M. Erlich, qui présenteront une déclaration liminaire d'au plus cinq minutes.
(1540)
    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs.
    Je m'appelle Steve de Eyre, et je suis directeur des politiques publiques et affaires gouvernementales pour TikTok Canada. Je suis accompagné aujourd'hui de mon collègue, Justin Erlich, le responsable mondial du développement des politiques de l'équipe de confiance et de sécurité de Tiktok, qui se joint à nous virtuellement depuis la Californie.
    Merci de nous avoir invités à vous rencontrer aujourd'hui pour parler de la question importante de la protection des Canadiens contre la désinformation. Le sujet de l'audience d'aujourd'hui est important pour nous, pour la fondation de notre communauté et pour notre plateforme. TikTok est une plateforme mondiale où un éventail incroyablement diversifié de créateurs et d'artistes canadiens ont connu un succès sans précédent auprès de publics mondiaux, où les créateurs autochtones racontent leurs propres histoires en utilisant leurs propres voix et où les petits propriétaires d'entreprise, comme Caitlin Campbell, qui propage un message de positivité tout en fournissant aux Canadiens leur dose de caféine avec Street Brew Coffee, trouvent de nouveaux clients pas seulement au Canada, mais dans le monde entier.
    Les Canadiens adorent TikTok à cause de l'authenticité et de la positivité du contenu, et c'est pourquoi il est important et dans notre intérêt de maintenir la sécurité et l'intégrité de notre plateforme. Pour ce faire, nous investissons des milliards de dollars dans notre travail sur la confiance et la sécurité. Cela comprend la modération automatisée avancée, les technologies de sécurité et des milliers d'experts de sûreté et de sécurité dans le monde, y compris des modérateurs de contenu situés au Canada. Nous employons également des experts en politiques locales qui aident à garantir l'application de nos politiques et à tenir compte des nuances des lois et de la culture locales.
    En ce qui concerne la manipulation extérieure et l'ingérence étrangère, TikTok adopte une approche objective et robuste. Pour commencer, nos directives communautaires interdisent la désinformation qui peut causer un préjudice important aux personnes ou à la société, peu importe l'intention. Pour aider à contrer les informations erronées et la désinformation, nous travaillons avec 19 organisations indépendantes de vérification des faits pour appliquer nos politiques à ce contenu.
    De plus, nous investissons afin d'améliorer les sources d'information fiables pendant les élections et les événements en cours et dans les sujets de la santé et du bien-être. Nous poursuivons et retirons sans relâche les comptes qui enfreignent nos règles de comportement trompeur, y compris les opérations d'influence clandestines. Nous menons des enquêtes très techniques pour repérer et perturber ces opérations de façon continue. Nous avons éliminé des milliers de comptes appartenant à des dizaines de réseaux actifs partout dans le monde, et nous signalons régulièrement ces retraits dans notre centre de transparence accessible au public.
    Lutter contre la désinformation est un défi à l'échelle de l'industrie qui nécessite une approche collaborative et une action collective, qui vient à la fois des plateformes et du gouvernement. À titre d'exemple, TikTok s'est allié à d'autres entreprises pour lutter contre l'utilisation trompeuse de l'IA dans les élections. Nous sommes devenus la première plateforme de partage de vidéos à mettre en œuvre une technologie de la Coalition for Content Provenance and Authenticity, qui reconnaît automatiquement le contenu généré par l'IA. Nous appuyons les directives volontaires pour l'intégrité électorale des entreprises technologiques de la Fondation internationale pour les systèmes électoraux, qui prévoient un ensemble commun d'attentes et de pratiques des entreprises et des autorités électorales afin de promouvoir l'intégrité électorale.
    Ce type de collaboration est également essentiel à l'approche des prochaines élections fédérales. En 2021, TikTok a travaillé avec Élections Canada pour concevoir un outil centralisé intégré dans une application, qui fournissait de l'information authentifiée sur le moment de voter, l'endroit où voter et la façon de le faire. Cette année‑là, TikTok a également été la seule nouvelle plateforme à signer la Déclaration du Canada sur l'intégrité électorale en ligne du Bureau du Conseil privé. À l'approche des prochaines élections, nous nous appuierons sur ces efforts et tirerons parti des apprentissages et des pratiques exemplaires d'autres élections qui se déroulent partout dans le monde, y compris aux États-Unis.
    Avant de terminer, j'aimerais fournir au Comité des renseignements concernant les actions de TikTok liées aux révélations faites par le département de la Justice des États-Unis concernant Tenet Media. À la suite de témoignages présentés par le département de la Justice des États-Unis et de notre propre enquête, nous avons retiré les comptes appartenant à Tenet Media, à sa fondatrice Lauren Chen, ainsi qu'à un faux organe de presse, parce qu'ils ont contrevenu à nos politiques sur la promotion des comportements trompeurs et de la promotion politique rémunérée.
    Je tiens également à souligner que TikTok a éliminé les comptes associés à Rossiya Segodnya et à TV‑Novosti, qui ont participé à des opérations d'influence clandestines sur TikTok, ce qui contrevient à nos directives communautaires. Nous désignons d'autres comptes de médias affiliés à l'État sur notre plateforme afin de fournir à la communauté un contexte important sur la source de l'information.
    Merci encore une fois de nous avoir invités à nous adresser au Comité, et nous sommes impatients de vous en dire plus sur la façon dont nous nous attaquons à ces questions importantes.
(1545)
    Je vous remercie, monsieur, de votre exposé.
    J'invite maintenant Mme Doyle et M. Hultquist à présenter une déclaration liminaire d'au plus cinq minutes.
    Allez‑y, s'il vous plaît.

[Français]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, mon nom est Lindsay Doyle et je suis responsable des affaires gouvernementales et des politiques publiques pour YouTube au Canada.

[Traduction]

    Je suis heureuse d'être accompagnée à distance par mon collègue John Hultquist, analyste en chef de Mandiant Intelligence.
    Chez YouTube, la responsabilité est notre principale priorité. Plus de 500 heures de vidéo sont téléversées chaque minute sur YouTube. Notre ampleur et notre portée mondiale nous obligent à prendre au sérieux l'importance de la protection de la liberté d'expression, tout en nous assurant de faire la bonne chose pour nos utilisateurs, nos créateurs et nos annonceurs.
    Un aspect essentiel de nos efforts en matière de responsabilité consiste à faire notre part pour protéger l'intégrité des processus démocratiques dans le monde. C'est pourquoi nous avons longtemps investi dans les capacités et les outils de lutte contre les menaces à l'intégrité électorale. Nous reconnaissons l'importance de permettre aux utilisateurs de nos services, au Canada et à l'étranger, de s'exprimer librement au sujet des questions politiques les plus importantes pour eux. En même temps, nous continuons de prendre des mesures pour prévenir la mauvaise utilisation de nos outils et de nos plateformes, en particulier les tentatives de la part d'acteurs étatiques étrangers pour compromettre les élections démocratiques et les discours politiques.
    En ce qui concerne la Russie, depuis l'invasion de l'Ukraine en 2022, YouTube a bloqué des milliers de chaînes et des millions de vidéos de la part d'organisations parrainées par l'État russe, y compris des chaînes directement associées à RT et à Sputnik. Jusqu'ici, en 2024, nous avons mis fin à plus de 11 000 chaînes YouTube associées à des opérations d'influence coordonnées qui ont des liens avec la Russie. Nous continuons également de mettre fin à des chaînes qui appartiennent à des entités et à des particuliers russes visés par des sanctions.
    À la suite d'une mise en accusation du département de la Justice des États-Unis, faite le 4 septembre, concernant le soutien secret de la Russie à une entreprise médiatique établie aux États-Unis, nous avons mis fin aux chaînes de Tenet Media, détenues ou exploitées par ses propriétaires, et au matériel publié sur d'autres chaînes. Nous avons également éliminé les copies et les nouveaux téléversements de contenu de Tenet Media provenant de chaînes additionnelles. Notre enquête se poursuit, tout comme nos efforts pour lutter contre les opérations d'influence coordonnées.
    Au cours des dernières semaines, le Canada, les États-Unis et le Royaume-Uni ont sanctionné RT pour avoir participé à des opérations d'influence clandestines et à de la désinformation directe. Ces récents faits nouveaux ont mis en lumière l'importance de recevoir des renseignements des forces de l'ordre, du gouvernement et de signaleurs de confiance, qui s'ajoutent aux signaux que nous observons concernant l'activité sur nos plateformes. Nous continuons de garantir la conformité avec les sanctions applicables tout en maintenant nos conditions de service.
    Enfin, au cours des deux dernières années, le gouvernement russe a périodiquement bloqué l'accès à YouTube. Au cours des deux derniers mois, nous avons observé des efforts fréquents pour réduire et même bloquer YouTube en Russie. YouTube a longtemps été l'une des dernières sources de médias indépendants à l'intérieur de la Russie et a refusé de se conformer à un certain nombre de demandes du gouvernement russe pour éliminer les discours politiques et le contenu similaire.
    Pour aider à faire avancer notre travail contre l'ingérence étrangère et l'activité parrainée par les États, Google a créé le groupe chargé du renseignement sur les menaces. J'inviterai mon collègue à présenter brièvement son travail.
    Je suis désolé, mais pouvons-nous nous interrompre un instant?

[Français]

     Il y a un micro d'allumé et ça crée de l'interférence.

[Traduction]

    Monsieur Hultquist, si vous pouvez mettre votre micro en sourdine pour l'instant, nous verrons si cela règle le problème… à moins que vous n'alliez prendre la parole.
    Je suis le point de parler, cela explique pourquoi. Je suis désolé.

[Français]

    Il faudrait peut-être équilibrer le son. Quand j'écoute Mme Doyle, il faut que je règle le volume au maximum. Ensuite, M. Hultquist commence à parler et c'est l'inverse. Je pense qu'il y a un petit problème d'équilibre de volume, mais je ne sais pas comment le régler, car je ne connais rien là-dedans.
    C'est bon. Nous continuons avec M. Hultquist.

[Traduction]

    En passant, pour les personnes qui sont en ligne et ne connaissent pas notre système Zoom, si vous regardez au bas de votre fenêtre, il y a un bouton pour l'interprétation. Vous pouvez choisir d'écouter l'anglais, le français ou la version originale.
    J'espère que ces témoins sont versés en technologie.
    Je suis un gars de TI, mais je suis un peu en retard sur la technologie ces temps‑ci.
    Monsieur Hultquist, allez‑y s'il vous plaît.
(1550)
    Merci de me donner l'occasion de parler de cette question importante et de discuter de notre travail.
    Dans le cadre de notre mandat à Mandiant Intelligence, nous repérons, surveillons et contrôlons les menaces, y compris les opérations d'influence coordonnées et les campagnes de cyberespionnage. Nos équipes perturbent l'activité de manière régulière et publient nos constatations. Nous fournissons également des analyses d'expert sur les menaces provenant de pays comme la Russie, la Chine, l'Iran, la Corée du Nord et des organisations criminelles.
    La Russie dispose d'un vaste appareil clandestin qui comprend ses services du renseignement, ainsi que des entrepreneurs de son secteur privé. Ces organisations possèdent des capacités différentes, qui varient d'opérations d'intrusion complexes au comportement non authentique coordonné sur les plateformes de médias sociaux. Bien que ces menaces soient graves, nous avons réussi à perturber ce type d'activité sur nos plateformes de manière rapide et efficace.
    Les opérations d'information de la Russie ont été utilisées dans un certain nombre de contextes pour soutenir les préoccupations stratégiques et tactiques de la Russie, mais visent surtout à miner la société démocratique en mettant en lumière les questions politiques et sociales polarisantes. Depuis le lancement de l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, cette activité a accordé la priorité aux récits conçus pour éroder le soutien occidental à l'Ukraine.
    Notre équipe est constamment à l'affût, car cette activité s'adapte sans cesse. Les acteurs élaborent de nouvelles techniques qui se confondent avec les utilisateurs réels ou amplifient leurs opérations ou, dans le cas des acteurs d'intrusion, de nouvelles techniques qui peuvent les aider à obtenir un accès illicite aux systèmes. Nous continuons de surveiller ces activités et de nous adapter pour utiliser les nouvelles techniques afin de lutter de manière proactive contre ces nouvelles menaces.
    Nous, nos utilisateurs, l'industrie, les forces de l'ordre et la société civile jouons tous des rôles importants pour protéger la démocratie et lutter contre la désinformation. Chez YouTube, nous nous engageons à faire notre part pour assurer la sécurité, la fiabilité et l'ouverture à la libre expression de l'écosystème numérique.
    Nous remercions le Comité d'avoir organisé cette réunion importante et sommes impatients d'entendre vos questions.
    Je vous remercie de votre commentaire.
    Nous allons maintenant commencer nos questions par Mme Dancho.
    Allez‑y s'il vous plaît pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici. J'ai aimé le témoignage de Facebook et de Meta, de YouTube et de Google, ainsi que celui de TikTok. Je suis heureuse que vous ayez invité vos experts en renseignement sur l'ingérence étrangère et que vous disposiez chacun de votre propre vision désignée pour vous attaquer à ce problème croissant.
    Je suis également reconnaissante que vous ayez tous mentionné que vous avez démantelé la portée de Tenet Media. Je pense que c'est la principale priorité, et je vous remercie d'avoir tous pris des mesures à cet égard.
    Certes, les conservateurs sont d'avis que tout acteur qui prend de l'argent à un gouvernement étranger pour miner l'intérêt canadien devrait être tenu pleinement responsable et, bien sûr, vos plateformes ont un rôle très fort à jouer pour s'assurer que c'est fait. Compte tenu de votre technologie, je m'imagine que vous sauriez avant même le gouvernement, dans de nombreuses circonstances, lorsque ce type d'activité a lieu. J'ai l'impression que vous êtes très proactifs.
    J'aimerais mieux comprendre ce que le gouvernement a fait de manière concrète pour aider vos plateformes. Nous avons beaucoup entendu le gouvernement libéral actuel proclamer qu'il prend au sérieux l'ingérence étrangère.
    Nous pourrions commencer par Meta. Quels efforts concrets ont été faits pour aider Facebook, par exemple, dans ces activités pour lutter contre l'ingérence étrangère?
    Le gouvernement du Canada n'a pas communiqué spécialement avec nous concernant cette question. Nous communiquons avec les ministères lorsque nous pensons que des renseignements sont pertinents et nécessaires à leurs mandats, et nous les renseignons sur notre travail, y compris le travail lié à l'ingérence étrangère.
    Nous avons tenu ces séances d'information pour les agences du gouvernement au cours de la dernière année ou deux, mais nous n'avons pas reçu de communication particulière de la part des ministères ou des agences gouvernementales sur cette question au cours des 12 à 24 mois, je dirais.
    Merci.
    À titre de confirmation, vous avez pris l'initiative, de votre propre chef, de communiquer avec le gouvernement, mais au cours des deux dernières années, le gouvernement n'a pas communiqué avec vous ni fourni de ressources concrètes concernant l'ingérence étrangère. Je ne veux que le confirmer.
    C'est exact, oui.
    C'est surprenant, compte tenu de la portée de Facebook et, bien sûr, du fait que la Chine, l'Iran, la Russie et d'autres essaient d'utiliser votre plateforme, qu'aucune mesure n'ait été prise, mais je vous remercie d'avoir pris l'initiative.
    YouTube, avez-vous quelque chose de différent ou de semblable à ajouter?
    Encore une fois, nous renseignons régulièrement le gouvernement, ainsi que les parlementaires, sur nos efforts, surtout en ce qui concerne l'ingérence étrangère.
    Pour ce qui est de certaines de nos équipes internes, notre groupe d'analyse des menaces, qui est une équipe composée d'experts et d'analystes de sécurité qui détectent et perturbent régulièrement les campagnes étrangères, serait également l'entité susceptible de coordonner ces questions et d'en discuter directement avec les forces de l'ordre, mais ces séances d'information se sont tenues à notre initiative.
(1555)
    Comme Mme Curran l'a dit, vous n'avez pas reçu de communication proactive de la part du gouvernement. Vous avez pris l'initiative. Est‑ce exact?
    Nous fournissons ces séances d'information de façon proactive, oui.
    Merci.
    Les libéraux ont tenté d'établir un lien entre le Parti conservateur et Tenet Media. Vu votre portée, savez-vous s'il y a un lien entre le Parti conservateur et Tenet Media?
    La question s'adresse à Mme Curran.
    Je vais céder la parole à mon collègue, David Agranovich. Je pense qu'il s'est penché sur la question de savoir s'il y a un lien entre Tenet Media et le Parti conservateur du Canada et qu'il peut répondre à la question directement.
    En fonction de nos enquêtes sur Tenet Media et les médias plus larges contrôlés par la Russie, nous ne voyons pas de preuve qui associe le Parti conservateur du Canada à Tenet ou à RT.
    Je dirai que nous faisons très attention, lorsque nous menons des enquêtes, d'éviter de spéculer au‑delà des preuves que nous pouvons voir sur notre plateforme. Nos enquêtes se concentrent sur le comportement que nous constatons sur notre famille d'applications. Dans nos enquêtes, nous tirons parti des comportements que nous observons et des évaluations que nous faisons en fonction de ce que nous observons sur notre plateforme.
    Merci beaucoup.
    Il est certain que nous avons tous suivi l'ingérence étrangère depuis un certain temps, notamment l'ingérence étrangère de la Chine dans nos élections et les efforts qu'elle a faits par l'intermédiaire de médias sociaux et d'autres plateformes pour influencer les élections canadiennes. Comme je l'ai mentionné, l'Iran est aussi un acteur étatique populaire dans l'ingérence étrangère et, bien sûr, la Russie est le sujet de la conversation d'aujourd'hui.
    Toutefois, ce qui m'inquiète, c'est que tous ces acteurs observent comment le monde occidental réagit à leur ingérence étrangère. Par exemple, nous avons récemment appris dans le Globe and Mail et dans le cadre de l'enquête sur l'ingérence étrangère qu'un ancien ministre de la Sécurité publique du gouvernement libéral a pris 54 jours pour autoriser un mandat de surveillance visant un membre influent du Parti libéral à l'échelle provinciale — également ancien ministre du cabinet libéral à l'échelle provinciale — et qu'il s'est traîné les pieds en ce qui concerne l'ingérence étrangère. Ces exemples sont nombreux. Il a fallu six ans pour désigner le Corps des gardiens de la révolution islamique comme organisation terroriste.
    La question s'adresse peut-être plus davantage aux spécialistes du renseignement que vous avez fait venir. Quelle sorte de message l'inaction ou la réticence à agir, et la réticence à prendre les choses au sérieux, envoie‑t‑il à la Russie lorsqu'elle cherche à interférer avec la désinformation sur les plateformes de médias sociaux? Envoyons-nous un message suffisamment fort à la Russie?
    Ma question s'adresse à l'agent du renseignement de Facebook.
    Mon rôle chez Facebook est d'enquêter et de perturber les réseaux que nous voyons sur notre plateforme. Il ne serait pas approprié pour moi de spéculer quant à la façon dont les gouvernements pourraient percevoir les actions d'autres gouvernements.
    Merci.
    La question s'adresse à son homologue de YouTube.
    Je dois me faire l'écho du commentaire de M. Agranovich.
    Je suis expert des comportements adverses et des comportements cyberadverses. Je ne serais pas en mesure de spéculer quant à la façon dont le gouvernement a réagi à quelque chose du genre.
    Merci beaucoup de votre témoignage.
    Merci, madame Dancho.
    Nous passons maintenant à M. MacDonald, pour six minutes, s'il vous plaît.
    Merci, chers témoins, d'être ici aujourd'hui.
    Rapidement, par rapport aux récents commentaires de Mme Dancho, je voulais savoir pourquoi, si l'on fait tant de travail à ce sujet, Tenet Media n'a été retiré qu'après la mise en accusation des États-Unis.
    Meta pourrait en parler en premier, s'il vous plaît.
    Je vais céder la parole à mon collègue, M. Agranovich.
    Je serai heureux de répondre à la question.
    Je vais prendre un peu de recul quant à la façon dont nous gérons les entités médiatiques des États chez Meta, puis lorsque ces entités médiatiques des États commencent à s'adonner à des activités d'influence clandestines, comme ce que vous avez vu avec Tenet.
    Depuis maintenant plusieurs années chez Meta, nous avons désigné des entités médiatiques contrôlées par l'État de dix pays différents. En ce qui concerne précisément les médias contrôlés par la Russie, nous avons mis en place des mesures supplémentaires qui limitaient les médias contrôlés par la Russie après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie. Parmi ces mesures, on comptait non seulement l'étiquetage de leurs pages sur notre plateforme, mais aussi la mise en place de ce que nous appelons la « friction interstitielle ». Si quelqu'un essaie de cliquer sur un lien, par exemple, vers une histoire de Rossiya Segodnya, il reçoit une fenêtre contextuelle qui dit: « Hé, êtes-vous sûr de vouloir visiter cette page? Il s'agit d'un média contrôlé par la Russie ».
    Nous avons également étiqueté des publications de tout utilisateur…
    Monsieur Agranovich…
    Je suis désolé; allez‑y.
    J'ai quelques questions de plus. Je veux m'assurer de les poser, parce que je n'ai pas beaucoup de temps.
    Plus tôt aujourd'hui, je suis allé…
    Excusez-moi.
    Voulez-vous la réponse, ou voulez-vous poser vos questions? M. Agranovich est l'expert sur ces questions.
    C'est le temps du député.
    Excusez-moi.
    Nous avons un problème, à ce que je peux voir.
(1600)

[Français]

     Il y a des problèmes techniques.

[Traduction]

    Nous allons suspendre les travaux un instant.
(1600)

(1600)
    Nous reprenons.
    J'aimerais demander aux témoins et à tout le monde de ne pas interrompre. C'est difficile pour les interprètes de faire l'interprétation lorsque cela se produit.
    Monsieur MacDonald, nous allons tenir compte de l'heure. Veuillez poursuivre.
    En prévision de votre comparution aujourd'hui, j'ai fait une expérience sur ma page Facebook. J'ai essayé de publier un article du Globe and Mail du 10 septembre, rédigé par Shannon Kari, intitulé « Canadian right-wing influencer’s alleged dealings with Russian media company took place despite sanctions ». Après ma publication, il y a eu une fenêtre contextuelle, comme vous venez de le mentionner. Je l'ai ici: « Le contenu médiatique ne peut être partagé » au Canada. Après l'échec de cette publication, je suis retourné et j'ai essayé: « How Indian Scams Will Be The End of Canada », par Lauren Southern, qui se trouve toujours sur la page Rumble de Tenet Media. J'ai été en mesure de publier cet article, sans problème, ni aucune fenêtre contextuelle. Je l'ai ici. Vous pourrez l'essayer lorsque vous serez en ligne, si vous le voulez, parce qu'elle est toujours là. Il y a une photo du premier ministre avec un drapeau canadien d'un côté et un drapeau indien de l'autre, où l'on voit « The New India ».
    Vous travaillez peut-être très fort pour accomplir ce que nous avons entendu dans tous les préambules, peut-être, mais je me demande, avec la quantité d'argent que fait Meta — 134 milliards de dollars américains, une augmentation par rapport aux 119 milliards de dollars américains en 2022 — avons-nous besoin que le gouvernement adopte plus de lois concernant les plateformes de médias sociaux pour pouvoir le faire? Quels sont les enjeux?
    Je pourrais peut-être répondre à cette question et à la première.
    Lorsque nous avons supprimé Tenet Media et Rossiya Segodnya, cette entité médiatique contrôlée par l'État russe, les mesures que nous avions mises en place avaient déjà réduit de 94 % les activités à l'égard de notre contenu. Ces entités avaient réduit leurs publications d'environ 55 %. C'était avant que nous les supprimions.
    Nous avons finalement pris la décision de les supprimer, mais pas en raison de l'acte d'accusation du département de la Justice. Nous pensons qu'il est important, en tant qu'entreprise de technologie, de ne pas supprimer des éléments simplement parce que le département américain de la Justice dit qu'ils sont mauvais. Nous les avons supprimés parce que nous avons pu constater des violations de nos politiques sur notre plateforme. Rossiya Segodnya et ses groupes subordonnés ont violé nos politiques interdisant l'ingérence étrangère dans les élections. Ils ont violé notre politique interdisant de proclamer la pratique d'ingérence étrangère dans nos élections.
    Pour répondre à votre deuxième question, ces groupes — que ce soit Rossiya Segodnya, des marques clandestines qu'ils ont créées ou des opérateurs d'influence de façon plus générale — sont des acteurs incroyablement antagonistes. Ce que nous avons vu avec RT, par exemple, lorsque nous avons commencé à les étiqueter, c'est qu'ils se sont mis à créer des centaines de domaines similaires, où ils réhébergeaient leur contenu. En fait, ils essayaient d'éviter les fenêtres contextuelles interstitielles que vous avez mentionnées, d'éviter les frictions interstitielles et l'étiquetage, en créant domaine après domaine après domaine, afin que nos équipes soient obligées de continuer à les traquer partout sur Internet — ce que nous allons certainement faire, et c'est un volet dans lequel nous allons continuer d'investir.
    Cependant, je pense que, en raison de la nature de ce problème, les adversaires auxquels nous et nos partenaires du gouvernement et de l'industrie technologique sommes confrontés sont très motivés à continuer d'essayer de faire ce qu'ils font. Ils agissent souvent au nom des gouvernements. Ils n'agissent pas par intérêt commercial. Ils agissent pour faire avancer une directive d'un État-nation. Par conséquent, notre objectif n'est pas de les éliminer complètement d'Internet, car il est peu probable que cela se produise un jour. Notre objectif est de faire en sorte qu'il soit si difficile pour eux d'obtenir la portée recherchée que cela les pousse ainsi à aller ailleurs ou à trouver d'autres endroits où mener leurs opérations.
(1605)
    Merci, monsieur Agranovich.
    Écoutez, je ne vous mets pas en cause, mais ce que je dis, c'est que nous étions assis ici et avons entendu les préambules concernant tout ce qui se passait. Il y a trois heures, quand j'ai pu faire ce que j'ai fait... il est difficile de croire tout ce qu'on nous dit.
    J'ai une autre question, peut-être pour vous tous. En ce qui concerne les plateformes de médias sociaux présentes ici aujourd'hui, partagez-vous de l'information sur les problèmes qui se posent aujourd'hui? Dans quelle mesure communiquez-vous entre vous lorsque vous faites face à un incident comme celui‑ci?
    Tout le monde peut répondre à cette question.
    Je suis heureux de répondre à cette question en premier, mais mes collègues de ce groupe de témoins participent également à ce partage d'information.
    Lorsque nous démantelons un réseau de comportements inauthentiques coordonnés, ou CIC, nous nous engageons à partager nos conclusions publiquement. Nous le faisons tous les trimestres dans nos rapports sur les menaces. Nous partageons également des indicateurs techniques détaillés avec des équipes de sécurité de l'ensemble du secteur.
    De plus en plus, nous avons commencé à partager les indicateurs publiquement. Nous avons créé un référentiel GitHub auquel toute équipe de sécurité, y compris celles dont nous ne connaissons peut-être pas les coordonnées, peut accéder et trouver des indicateurs pour, par exemple, les réseaux russes sur plusieurs plateformes sur Internet. Nous avons environ 7 000 indicateurs jusqu'à présent dans ce référentiel GitHub, et nous continuerons à en ajouter au fur et à mesure.
    Vous ne partagez pas particulièrement votre information avec Instagram ou TikTok. Rien ne leur est directement adressé. Il n'y a rien dans votre politique ou votre règlement.
    Nous allons devoir vous interrompre.
    Nous faisons les deux. Nous partageons directement nos renseignements avec les équipes de sécurité d'autres entreprises de technologie lorsque nous voyons des opérations qui ciblent leurs plateformes. Nous les partageons également publiquement, en partie parce que ces opérations ciblent souvent de très petites entreprises, qui n'ont peut-être pas d'équipe de sécurité.
    Merci.

[Français]

     Nous allons maintenant céder la parole à M. Fortin pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Curran, à notre avis, Meta a beaucoup de pouvoir relativement à l'information qui circule au Canada et au Québec. L'Internet est un média qui évolue rapidement, voire jour après jour.
    Je ne veux pas revenir sur une autre position qui a été soulevée dans un autre comité, mais, depuis quelques mois, nous avons constaté que Meta interdit notamment la publication de certains articles de journaux. Évidemment, ce n'est pas ce qui aide à mieux informer les Canadiens et les Québécois sur les situations importantes qui les concernent.
    Par ailleurs, il semble y avoir beaucoup de fausses informations qui circulent sur Facebook et sur les autres réseaux sociaux aussi. Sur Facebook, particulièrement, beaucoup de fausses informations et de désinformation circulent. Or, nous ne sentons pas que Meta se préoccupe de cette situation. Nous avons plutôt l'impression que Meta cherche à faire des profits, et que si les profits ne sont pas au rendez-vous, tant pis pour l'information et tant pis pour la démocratie. C'est une opinion qui m'apparaît assez répandue.
    Ce n'est peut-être pas le cas, toutefois, et je vous donne l'occasion de remettre les pendules à l'heure au besoin. Si c'est le cas, par contre, veuillez nous dire franchement que vous êtes là pour faire de l'argent, et que la démocratie et l'information ne sont pas de votre créneau. Est-ce le cas? Je vous laisse répondre à cette question.

[Traduction]

    Je pense que c'est faux.
    Écoutez, je pense que vous parlez de deux problèmes différents.
     Le premier est le retrait des nouvelles de nos plateformes. Nous aimerions rétablir les nouvelles sur Facebook et Instagram. La raison pour laquelle nous avons dû les retirer de nos plateformes est que le gouvernement actuel a présenté et adopté le projet de loi C‑18, la Loi sur les nouvelles en ligne, qui allait nous obliger à payer environ 80 millions de dollars par année pour du contenu qui n'avait aucune valeur commerciale particulière pour nous. En fait, nous pensons que nous avons fourni une grande valeur aux éditeurs de nouvelles. Nous avons estimé que la valeur du service de distribution pour les éditeurs s'élevait à 230 millions de dollars par année. Nous avons travaillé avec Le Devoir, La Presse et des éditeurs du Québec en général pour distribuer leur contenu sur Facebook et Instagram et le diffuser à un public plus large. Nous pensons que nous avons très bien réussi à le faire.
    Le gouvernement actuel a présenté une loi qui ne nous a pas donné d'autre choix que de retirer les nouvelles de nos plateformes, sinon nous aurions eu à payer pour cela. Mes collègues de Google sont toujours empêtrés avec le CRTC pour essayer de comprendre comment ce système va fonctionner.
    Nous aimerions rétablir l'accès aux nouvelles sur nos plateformes. Nous pourrions le faire dès demain si nous étions exclus du champ d'application du projet de loi C‑18, la Loi sur les nouvelles en ligne, si la Loi était abrogée ou même si les éditeurs avaient la possibilité d'adhérer ou non à cette loi. Nous pourrions rétablir le contenu de nouvelles sur nos plateformes dès demain. En tant que Canadienne, j'aimerais beaucoup le faire. J'aimerais que les nouvelles canadiennes reviennent sur nos plateformes. J'aimerais que les nouvelles du Québec reviennent sur nos plateformes.
     Nous ne pouvons pas le faire à l'intérieur du cadre législatif du projet de loi C‑18, mais je pense que cela peut être réglé.
(1610)

[Français]

     Si je comprends bien, madame Curran, le problème vient du fait que ça coûterait 18 millions de dollars par année à Meta pour publier ces nouvelles. Dois-je comprendre que ce montant de 18 millions de dollars est le prix de la démocratie et de l'information pour Meta? Voulez-vous dire que ça ne vaut pas plus que ça?

[Traduction]

    Non, pas du tout. En fait, je dirais que nous avons toujours du contenu sur notre plateforme provenant d'organisations non gouvernementales. Nous avons toujours du contenu provenant d'établissements universitaires…

[Français]

     Excusez-moi de vous interrompre, mais le temps est…

[Traduction]

    Nous disposons toujours de contenu provenant de Canadiens ordinaires que nous considérons comme crédible et exact.

[Français]

    Je suis désolé, madame Curran, mais le temps nous est compté; il ne nous reste qu'une minute.
    Je comprends votre position. Je m'attendais à ce que vous me disiez précisément ce que vous êtes en train de me dire. Dans le contexte actuel, cependant, nous sommes confrontés à ce problème de désinformation émanant des autorités russes. Au Canada, tout le monde est inquiet. Or, on sait que les citoyens ordinaires vont beaucoup chercher leur information sur les réseaux sociaux. À tort ou à raison, on pourrait souhaiter que ce soit différent, mais c'est la réalité.
    Pour ma part, je m'interroge sur la responsabilité sociale de Meta. Je parle de Meta parce que je m'adresse à vous, mais il pourrait s'agir de tous les autres médias sociaux, qui ne sont pas exempts de responsabilité à ce sujet. Cela dit, vous avez un rôle important, voire crucial, à jouer, en l'occurrence rendre accessible aux citoyens de l'information liée au maintien de notre démocratie. On s'attendrait — c'est du moins notre cas — à ce que des gens ayant autant de pouvoir aient un sens des responsabilités plus développé. Je pense que Facebook pourrait débourser sans difficulté 18 millions de dollars par année et jouer un rôle important dans le maintien de la démocratie au Canada.
     Pouvez-vous me dire en quelques secondes si, oui ou non, vous êtes de cet avis et me faire part de votre point de vue sur la question?

[Traduction]

    Monsieur Fortin, je suis d'accord avec vous: nous devrions avoir du contenu de nouvelles sur nos plateformes. Nous aimerions avoir du contenu de nouvelles sur nos plateformes, y compris de la part de médias du Québec. Nous avons conclu des ententes privées d'une valeur de plus de 20 millions de dollars avec des médias privés. Nous aimerions avoir de nouveau ce contenu sur nos plateformes.
     Nous ne pouvons pas le faire à l'intérieur du cadre très restrictif prévu dans le projet de loi C‑18. Si nous sommes exclus du champ d'application du projet de loi C‑18, ou si les médias d'information ont la possibilité d'adhérer ou non au projet de loi C‑18, nous aimerions les réintégrer sur nos plateformes.
    Nous avons travaillé avec des médias du Québec. Nous aimerions travailler de nouveau avec eux et nous pourrions réactiver ce contenu dès demain.

[Français]

    Merci, monsieur Fortin.
    Je cède maintenant la parole à M. Boulerice pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie aussi les témoins qui ont pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui. Je m'adresse maintenant aux représentants des trois compagnies ici présentes.
    Nous sommes tous des utilisateurs de vos plateformes, comme le sont des millions de personnes au Québec et au Canada. Je pense qu'il est important de prendre du recul et d'admettre que vos compagnies n'ont pas été fondées pour défendre la démocratie. Elles n'ont pas été fondées pour promouvoir la qualité du débat public ou des idéaux démocratiques, ce n'est pas votre mission première. Elles l'ont été pour faire interagir les gens, mais, ultimement, pour faire des profits et de l'argent.
     Par contre, l'évolution des technologies fait que vous avez maintenant une responsabilité supplémentaire. Cette responsabilité a été assumée par les médias traditionnels pendant des années, mais il revient maintenant à vos compagnies d'adopter des règles claires pour éviter la désinformation, la mésinformation, la manipulation et l'ingérence étrangère, même si ce n'était pas votre raison d'être au départ. Comme députés et élus, nous sommes inquiets de la situation.
    Vous vous êtes bien préparés, mais, de mon côté, j'ai une idée de la façon dont fonctionnent les comités. Vous énumérez toutes les belles choses que vous avez accomplies. Vous nous parlez des millions de dollars que vous avez dépensés, de tous les comptes que vous avez fermés et de tel ou tel service qui travaille là-dessus. Pour nous, il est assez difficile de vérifier en cinq minutes si tout est vrai ou non. J'imagine que c'est vrai.
    Nous constatons toutefois que, même si vous avez dépensé beaucoup d'argent, la désinformation et la mésinformation sont toujours présentes et que nous continuons à nous en inquiéter. Par conséquent, je ne veux pas savoir ce que vous avez fait, mais ce que vous comptez faire pour améliorer la situation dans un contexte où des pays comme la Russie ne veulent miser que sur les divisions sociales et instaurer le chaos dans nos sociétés. Qu'allez-vous faire pour nous rassurer et pour que, dans l'avenir, la situation s'améliore?
(1615)

[Traduction]

    Permettez-moi d'intervenir en premier.
    Meta possède le plus grand réseau indépendant de vérification des faits de toutes les plateformes en ligne. Nous avons plus de 90 vérificateurs des faits indépendants dans plus de 60 langues qui vérifient l'information sur nos plateformes pour déterminer s'il s'agit de fausse information ou de désinformation. S'ils déterminent qu'elle est fausse ou partiellement fausse, nous étiquetons ces publications et ce contenu, ou nous les supprimons de nos plateformes.
    Mon collègue, M. Agranovich, a parlé de la désinformation malveillante des acteurs étatiques, mais la désinformation ou la mésinformation provenant d'autres sources est un élément que nous soumettons à notre réseau de vérification des faits regroupant plus de 90 vérificateurs de faits.
    Au Canada, ce travail est effectué par l'Agence France-Presse. Nous travaillons aussi, potentiellement, avec un autre partenaire canadien en prévision des prochaines élections pour examiner également cette information. Notre objectif est de nous assurer que la mésinformation et la désinformation sont supprimées de nos plateformes.
    Cela dit, nous sommes aussi une plateforme qui permet aux Canadiens de communiquer entre eux et de s'assurer qu'ils peuvent partager de l'information, partager leurs points de vue et communiquer avec leurs amis et leur famille, et nous voulons le faire sans supprimer ou limiter leur capacité à s'exprimer.
    Comme vous pouvez l'imaginer, monsieur Boulerice, la ligne est mince. Nous devons nous assurer de ne pas empêcher les Canadiens de s'exprimer tout en supprimant la désinformation.
    Merci beaucoup.
    Je vous demanderais de partager le temps avec vos collègues.
    Désolée, ce sujet me passionne.
    Merci beaucoup de la question.
    D'abord et avant tout, nous partageons absolument vos préoccupations concernant la désinformation à grande échelle et l'ingérence étrangère.
    Nous savons qu'il s'agit d'une responsabilité partagée, une responsabilité que nous prenons tout à fait au sérieux. Au bout du compte, pour nous, la sécurité des utilisateurs de notre plateforme est essentielle, et nous sommes absolument convaincus que nous jouons un rôle essentiel pour assurer la sécurité des gens en ligne.
    Nous avons des politiques très claires et strictes concernant la désinformation, ainsi que les opérations d'influence étrangère et la désinformation. Nous avons des équipes qui appliquent nos politiques à grande échelle tous les jours, 24 heures sur 24. Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous avons notre groupe d'analyse des menaces, qui travaille activement à perturber les activités en cours. Ce groupe partage également cette information avec les forces de l'ordre sur le terrain pour garantir que nous avons une approche holistique dans toute la société.
    J'apprécierais que mon collègue, M. Hultquist, puisse nous donner son avis sur ce que fait son équipe. Je sais que mon temps est limité, mais peut-être que s'il reste du temps…
    Peut-être que nous entendrons d'abord M. de Eyre, et ensuite, au deuxième tour, je pourrai revenir.
    Pas de problème.
    En fait, je vais laisser mon collègue, M. Erlich, parler un peu de nos politiques sur la mésinformation et la désinformation.
    Je voudrais intervenir et revenir à ce qui a été dit auparavant. Nous prenons très au sérieux la responsabilité de protéger l'intégrité de notre plateforme.
    Notre mission est d'inspirer la créativité et d'apporter de la joie. La division est contraire à la communauté que nous essayons de créer. C'est pourquoi nous travaillons très dur pour protéger notre plateforme avec certaines des politiques de désinformation les plus dynamiques du secteur. Nous supprimons tout contenu que nous considérons comme pouvant être particulièrement préjudiciable à notre communauté et nous n'ajouterons pas foi à d'autres contenus qui pourraient ne pas être vérifiés.
    Nous adoptons également une stratégie d'initiation aux médias, sachant que nous devons contribuer à renforcer la compréhension de notre communauté et de nos utilisateurs pour être plus résilients. Comme notre collègue de Meta l'a mentionné, nous travaillons également en étroite collaboration avec des vérificateurs de faits indépendants et nous collaborons avec eux pour évaluer la véracité et l'exactitude de tout le contenu présent sur notre plateforme.
(1620)

[Français]

     Merci, monsieur Erlich.

[Traduction]

    Nous allons terminer ce tour avec M. Boulerice.
    Nous allons commencer le deuxième tour.
    Monsieur Motz, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici cet après-midi.
    Je veux simplement revenir sur certaines des conversations que nous avons eues avec Meta au sujet du projet de loi C‑18.
     Madame Curran, le projet de loi C‑18 crée‑t‑il un vide sur votre plateforme de médias sociaux? Il restreint certainement l'accès des Canadiens à un contenu de nouvelles fiable, mais permet‑il à davantage de désinformation ou de mésinformation d'être diffusée sur ces plateformes?
    Nous dirions qu'il y a encore beaucoup d'information crédible disponible sur nos plateformes: on retrouve des institutions universitaires, des pages gouvernementales, des pages de politiciens, des pages d'organisations non gouvernementales et d'organisations civiques. Toute cette information est toujours disponible sur nos plateformes, y compris l'information des Canadiens ordinaires, que nous ne qualifierions pas non plus de mésinformation.
     Cependant, en tant que Canadienne, j'aimerais que les nouvelles canadiennes reviennent sur nos plateformes. Nous aimerions beaucoup avoir la possibilité de les diffuser à nouveau sur nos plateformes, et nous pourrions le faire dès demain si le projet de loi C‑18 était abrogé ou si nous étions exclus du champ d'application de ce projet de loi.
    Merci beaucoup.
    Les témoins que nous avons reçus jusqu'ici, dans le cadre de notre étude, ont mentionné que l'ingérence russe est souvent utilisée dans l'ensemble du spectre politique. Il n'y a pas de droite ou de gauche. En fait, contrairement aux allusions précédentes de mes collègues d'en face, il ne s'agit pas d'un phénomène émanant de l'extrême droite. En réalité, selon les rapports des médias, parmi les 90 comptes principaux qui promeuvent le sentiment en faveur de Moscou, 33 % sont gérés par des personnes de l'extrême gauche.
    Une question pour les représentants de YouTube, qu'est‑ce que ces tactiques russes signifient, de votre point de vue? Comment les choses se déroulent‑elles, dans les autres pays?
    Merci beaucoup de cette question, et de nous avoir donné l'occasion de partager notre point de vue.
    Je vais demander à mon collègue, M. Hultquist, de nous dire ce qu'il en pense.
    Il est assez habituel de voir que ces acteurs évoluent des deux côtés du spectre politique. Il importe de ne pas trop catégoriser des opérations spécifiques, quelles qu'elles soient, car plusieurs de ces opérations ont un pendant qui cible le public du côté opposé.
    Pour vous donner un exemple, Internet Research Agency est une agence qui était très active en 2016, lors des élections américaines. Elle existe toujours, ou du moins, ce qu'il en reste. Récemment, elle a entrepris une opération qui penchait vers la droite. Or, avant cela, elle avait entrepris une autre opération qui penchait vers la gauche. Il n'est donc pas inhabituel de voir que son travail s'effectue des deux côtés du spectre politique.
    La deuxième chose très importante concernant cette activité, c'est qu'on ne va pas vous montrer une version préférée de la vérité. L'objectif est, bien souvent, d'inonder la zone avec des histoires qui sont souvent entièrement contradictoires.
    Merci beaucoup de cette information.
    Je souhaite poser cette question aux représentants des différentes plateformes qui sont présents.
    Il semblerait que le gouvernement ait tendance à ne pas assumer sa responsabilité quant à son rôle au moment de composer avec l'ingérence étrangère, et qu'il trouve plus aisé de pointer du doigt les plateformes de réseaux sociaux comme s'il incombait seulement à ces plateformes de s'assurer qu'il n'y a pas d'ingérence étrangère, ou que le public canadien est à l'abri de la désinformation ou de la mésinformation.
    Cela dit, qu'est‑ce que les gouvernements devraient faire, selon vous... on y a justement fait allusion, récemment... pour mettre les Canadiens à l'abri de la mésinformation ou des campagnes de désinformation, sans porter atteinte à leur liberté d'expression? Que peut faire le gouvernement, de concert avec les plateformes de réseaux sociaux, pour assurer le maintien de la liberté d'expression, tout en protégeant le public de la désinformation et de la mésinformation?
    Je vais commencer par Meta.
    Il s'agit d'une question très intéressante. Je vais laisser mon collègue, David Agranovich, y répondre. Il pourra parler des travaux que nous avons effectués avec d'autres gouvernements. Je serai ravie de parler aussi du travail que nous avons effectué, de concert avec le gouvernement du Canada.
    Merci de la question.
    Peut-être que je vais diviser ma réponse en trois points principaux.
    Premièrement, plus nous renforçons, de manière dynamique, les réseaux sur nos plateformes, plus nous voyons ces campagnes se disperser partout sur Internet, et compter de plus en plus sur des tactiques semblables aux techniques d'espionnage traditionnelles de la guerre froide. Ce sont souvent les gouvernements et les organisations des forces de l'ordre qui ont la meilleure visibilité à cet égard. Nous voyons d'un très bon œil le partage d'informations émanant des organisations de la sécurité, qui auraient un meilleur aperçu des services de renseignement d'États-nations, ou de leurs mandataires, afin que nous puissions utiliser ces informations pour les besoins de nos propres enquêtes, sur nos propres plateformes.
    Deuxièmement, nous sommes très prudents dans nos propres divulgations publiques, de manière à éviter de spéculer sur le potentiel d'influence de ces activités. Nous voulons également nous assurer que nos rapports exposent, de manière critique, l'efficacité de ces opérations. Par exemple, un réseau russe, connu sous le nom de DoppelGänger, a récemment fait l'objet de bon nombre de rapports publics. Le réseau cherche moins à rejoindre les personnes réelles qu'à donner l'illusion qu'il y parvient très bien. Ce qui se passe souvent, c'est que ces organisations essaient de convaincre leur chef ou leur commanditaire de la validité d'une histoire autant qu'elles essaient d'en persuader leurs cibles. Les gouvernements, en partenariat avec les organisations de la société civile, c'est-à-dire, nous, et les médias, devrons être très prudents quant à la manière de parler de ces efforts pour éviter, par exemple, de donner l'illusion que la Russie est aussi puissante qu'elle veut bien nous le faire croire.
    Troisièmement, les gouvernements disposent d'outils concrets susceptibles de rendre ces opérations beaucoup plus difficiles. Ils peuvent, par exemple, imposer leur pouvoir géopolitique, que ce soit par le biais de sanctions diplomatiques ou financières, ou le partage d'informations, comme nous l'avons vu avec la mise en accusation visant Tenet Media. Cela peut encourager d'autres acteurs à prendre des mesures. Ensuite, nous avons remarqué que les réseaux d'influence comptent de plus en plus sur les domaines de réseaux hors plateforme. Il s'agit de sites Web que nous ne pouvons fermer, même si nous essayons de les bloquer, mais dont le contenu persiste sur Internet. L'année dernière, nous avons publié un rapport exposant des recommandations concrètes auxquelles les gouvernements qui envisagent...
(1625)
    Je m'excuse, monsieur, mais je dois vous interrompre. Merci.
    Nous allons maintenant passer à Mme Zahid.
    Allez‑y, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci aux témoins de s'être présentés devant le Comité.
    J'aimerais que les trois témoins répondent à ma première question. J'aimerais que la réponse soit verbale.
    Est‑ce que l'un de nos témoins, aujourd'hui, a discuté de son témoignage avec l'un des membres ou des employés du Comité, avant la réunion?
    Je vais commencer par Mme Curran.
    Non, nous ne l'avons pas fait.
    Nous avons demandé à tous les membres du Comité s'ils avaient des questions ou des réponses avant notre témoignage, aujourd'hui.
    Vous avez parlé de votre témoignage avec tous les membres?
    Nous n'avons pas parlé de notre témoignage, mais nous avons communiqué avec eux, vous y compris.
    Non.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à M. de Eyre, de TikTok.
    En 2023, ByteDance a déclaré que son revenu était d'environ 120 milliards de dollars américains. Quelle part de ce revenu avez-vous réinvestie en vue d'épurer vos sites et d'éliminer la mésinformation et la désinformation?
    Je n'ai pas de chiffres exacts.
    Peut-être que mon collègue, M. Erlich, pourra vous parler un peu de la façon dont nous traitons la mésinformation et la désinformation.
    Merci, monsieur de Eyre, et merci d'avoir posé la question.
    Premièrement, je tiens à souligner à quel point nous nous consacrons au maintien de la sécurité de la plateforme. Rien que cette année, nous investissons plus de 2 milliards de dollars pour promouvoir la confiance et la sécurité. Plusieurs de nos équipes, en particulier, s'efforcent de faire de la mésinformation et de l'influence secrète notre priorité. Ces quatre dernières années, nous en avons fait notre objectif, dans le cadre de 150 élections tenues partout dans le monde. Nous continuons d'investir davantage de ressources dans chacune des élections.
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, pour protéger notre communauté, notre approche se décline en trois volets. Nous retirons d'abord le contenu. Ensuite, nous habilitons notre communauté à l'aide de campagnes de littératie et de partenariats avec des experts. Et enfin, nous travaillons en étroite collaboration avec des vérificateurs des faits, lesquels évaluent la véracité du contenu sur la plateforme.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse également à vous. Nous savons que le matériel incendiaire génère plus de mobilisation, et le fait d'avoir plus de mobilisation signifie que les revenus publicitaires sont plus élevés. Est‑il juste d'affirmer que votre plateforme en bénéficie financièrement quand et si vous permettez la diffusion de rumeurs et de désinformation sur votre plateforme?
    Non, je ne suis pas d'accord. Comme l'a mentionné M. Erlich plus tôt, l'objectif de TikTok est de créer un endroit propice à la créativité et à la joie. Les gens viennent sur TikTok pour trouver du contenu attrayant et authentique, mais le contenu doit être bienveillant.
    Lorsque vous passez du temps sur TikTok, et que vous lancez une vidéo, que vous la regardiez en entier, la commentiez, l'aimiez, ou la partagiez, cela nous indique le type de contenu que vous pourriez aimer. Les gens me disent que c'est pour cela qu'ils viennent sur TikTok.
    Je suis sûr que vous avez entendu parler, plus tôt cette année, de Keith Lee, le créateur américain de contenu alimentaire sur TikTok, qui est allé manger dans certains restaurants de Scarborough. Il y avait de longues files pour accéder à ces restaurants. Il y avait un restaurant de shawarmas, et un autre qui servait des plats jerk. C'était le plus grand événement de l'été sur TikTok, à Toronto. C'est le genre d'expérience que nous essayons de cultiver.
(1630)
    Monsieur le président, je vais partager le reste de mon temps avec M. Gaheer.
    Allez‑y, monsieur Gaheer.
    Monsieur le président, combien de temps me reste‑t‑il?
    Il vous reste une minute et 30 secondes.
    Monsieur le président, j'aurais aimé être dans la salle, pour pouvoir discuter plus longtemps avec Mme Curran, par la suite. Je n'arrive pas à croire certains des témoignages que j'ai entendus aujourd'hui. En tant que génération [difficultés techniques], j'ai vu les effets que Facebook et les autres réseaux sociaux ont eus sur ma génération.
    Madame Curran, est‑ce que vous venez de dire qu'il y a 90 vérificateurs des faits pour votre plateforme, une plateforme qui compte des centaines de millions d'utilisateurs? Il y a probablement des milliards d'utilisateurs. La plateforme est accessible dans toutes les langues, et vous disposez de 90 vérificateurs de faits pour 60 langues. Donc, selon vous, il y aurait un vérificateur et demi environ pour chaque langue dans laquelle vous vérifiez les faits.
    Avez-vous une statistique sur le nombre de publications qui sont produites sur votre plateforme, par minute, et est‑ce que vous pensez que 90 vérificateurs des faits est un nombre adéquat pour vérifier autant de publications?
    Je reviendrai au Comité avec une réponse concernant les publications par minute. Pour le moment, je n'ai pas la réponse. Nous disposons de plus de 90 vérificateurs des faits indépendants, qui vérifient les contenus sur nos plateformes, dans 60 langues différentes. Oui, ce sont les chiffres actuels.
    Je trouve ces statistiques très effrayantes. Vous disposez de 90 vérificateurs des faits pour je ne sais combien de centaines de millions d'utilisateurs dans chaque pays du monde. Combien de publications sont produites par minute? C'est très effrayant sachant à quel point la mésinformation et la désinformation sont répandues dans le monde.
    Je m'excuse. Je peux clarifier. Il ne s'agit pas de 90 individus. Il s'agit de 90 organisations différentes qui vérifient les faits dans plus de 60 langues. Au Canada, par exemple, nous avons l'Agence France-Presse. Auparavant, nous avions la Presse canadienne qui vérifiait également la véracité des faits, au Canada.
    C'est plus de 90 organisations. Ce n'est pas...
    Je suis désolé, mon temps est très limité.
    Pouvez-vous dire au Comité le nombre de personnes — pas d'organisations, mais de personnes — qui vérifient les faits? Il peut s'agir de plusieurs personnes par organisation.
    La deuxième chose, c'est que votre organisation a généré 134 milliards de dollars, l'année dernière. C'est plus que les 119 milliards de dollars de l'année précédente. Vous venez juste de dire au Comité que vous préféreriez épargner à Meta...
    Monsieur Gaheer, je dois vous interrompre. Je suis désolé.
    Monsieur le président, j'ai besoin d'environ 30 secondes de plus pour expliquer mon point.

[Français]

     Monsieur Fortin, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur de Eyre, TikTok a diffusé beaucoup de publicités de la part de Tenet Media, une chaîne qui s'est beaucoup fait connaître par votre plateforme. Combien d'argent Tenet Media a-t-elle gagné à la suite des publicités faites sur TikTok? Avez-vous un chiffre à nous donner?

[Traduction]

    Je n'ai pas les chiffres là‑dessus, et j'ignore si ces chiffres ont été publiés. Je me ferai une joie de faire le suivi auprès de vous, et de chercher la réponse. Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, nous avons fermé le compte TikTok de Tenet Media, à la suite des allégations du département de la Justice des États-Unis.

[Français]

     De son propre chef, TikTok fait-elle des enquêtes avant de verser des sommes à une organisation, quelle qu'elle soit? Vous me dites que les États‑Unis ont sonné l'alarme et que TikTok a fermé le compte de Tenet Media.

[Traduction]

    Peut-être que M. Erlich peut parler de la façon dont nous enquêtons sur l'influence secrète sur la plateforme.
    Merci, monsieur de Eyre.
    Merci de la question. C'est quelque chose dans quoi nous investissons énormément.
    Nous disposons de plusieurs équipes qui travaillent exclusivement là‑dessus. Elles essaient toujours, de manière proactive, de détecter et supprimer les réseaux et les comptes trompeurs, tels que Tenet Media.
(1635)

[Français]

     Monsieur Erlich, il ne me reste que quelques secondes.
    Si vous faites ces enquêtes, comment expliquez-vous que vous ayez eu besoin que les États‑Unis lèvent un drapeau rouge avant que TikTok ferme le compte de Tenet Media? Vous ne l'aviez pas découvert vous-mêmes.

[Traduction]

    Je ne dirais certainement pas que c'est le cas. Nous avons plusieurs enquêtes internes en cours, et nous prenons des mesures sans avoir recours à du renseignement externe. Nous exploitons également plusieurs sources de renseignement externe, qu'il s'agisse de nos fournisseurs ou de tiers, et nous tirons parti des enquêtes du gouvernement.
    Aussitôt que nous avons entendu parler de l'enquête du département de la Justice, nous avons davantage enquêté sur Tenet Media, étant donné que nous ne pouvons pas directement adopter la conclusion d'un gouvernement quelconque. Nous devons évaluer les éléments probants sur notre propre plateforme. Une fois que nous avons trouvé ce que nous cherchions, nous avons immédiatement pris des mesures, et fermé à la fois le compte de Tenet Media et celui de son fondateur...

[Français]

     Merci.

[Traduction]

    ... pour violation des politiques qui visent à réduire le nombre d'acteurs trompeurs et celles qui visent à dissuader la publicité politique rémunérée. Il s'agit, dans les deux cas, de violations claires de nos lignes directrices.
    Merci, monsieur Erlich.

[Français]

    Je remercie également tous les autres témoins.
     Monsieur Boulerice, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je m'adresse aux représentants des trois compagnies ici présentes.
    Je vais être tout à fait franc avec vous: je n'ai pas trouvé très satisfaisantes les réponses que j'ai obtenues à mes dernières questions. Je vous avais demandé ce que vous alliez faire de plus pour améliorer la situation, et vous m'avez principalement répondu en me parlant de ce que vous faisiez déjà. Ce n'était pas ce que je cherchais comme réponse.
     Je voudrais vous entretenir d'un autre phénomène. On a parlé de manipulation, de désinformation et de mésinformation, mais il y a aussi tout le phénomène des chambres d'écho, où les gens se répètent entre eux les mêmes propos, qui sont parfois faux et qui peuvent mener à la radicalisation de certaines personnes. On dirait que les algorithmes utilisés favorisent ce phénomène, sûrement parce que ça génère plus d'interactions entre les gens, ce qui est bon pour les affaires. Cependant, nous voyons que, sur le terrain, ça radicalise des gens qui se trompent complètement sur la science, par exemple, ou sur d'autres sujets. Ces chambres d'écho rendent le débat public beaucoup plus difficile.
    J'aimerais entendre vos commentaires sur ce phénomène.

[Traduction]

    Pour ce qui est de TikTok, je vais laisser M. Erlich parler de la façon dont nous traitons l'information non vérifiée.
    Merci, monsieur de Eyre.
    Nous prenons l'écosystème de l'intégrité de l'information très au sérieux. Je vous ai déjà parlé de certaines de nos politiques au sujet de ce que nous supprimons, mais nous intégrons également l'éducation aux médias et l'étiquetage. Pour ce qui est des contenus que nous ne retirons pas complètement de la plateforme, mais qui ne sont peut-être pas vérifiés ni pertinents, nous mettrons une mention pour que l'utilisateur ait une meilleure idée du contexte global. Nous n'allons pas en augmenter la diffusion dans le flux pour nous assurer que nous limitons la portée des comptes non vérifiés.
    De manière plus générale, nous offrons également du contenu supplémentaire, comme un flux d'information sur la science, la technologie, l'ingénierie et les mathématiques, sur certains marchés. Nous le déployons pour aider à améliorer le contenu que nous considérons comme instructif ou intéressant.

[Français]

    Est-ce que les représentants de YouTube ou de Meta veulent intervenir là-dessus?

[Traduction]

    Je suis heureuse d'intervenir sur cette question.
    En ce qui concerne YouTube, nous adoptons une approche similaire à celles des autres. En particulier, en ce qui nous concerne, nos systèmes de recommandation augmentent le nombre d'informations fiables, de qualité, et réduisent la diffusion d'informations de qualité médiocres. Nous considérons nos systèmes de recommandation comme l'une de nos lignes de défense les plus efficaces pour lutter contre la mésinformation et prévenir exactement la diffusion que vous avez mentionnée. De plus, il est essentiel de supprimer le contenu à la source pour s'assurer de mettre un terme à la diffusion. C'est évidemment là qu'interviennent nos lignes directrices pour la communauté, ainsi que les politiques de modération du contenu que nous appliquons à grande échelle.

[Français]

     Merci, monsieur Boulerice.

[Traduction]

    Cela met fin à notre discussion avec ce groupe de témoins.
    Monsieur le président...
    Allez‑y, madame Damoff.
    J'ai une suggestion que, je l'espère, le Comité approuvera. Elle repose sur le témoignage que nous avons entendu aujourd'hui, en particulier, les commentaires de Mme Curran sur le fait que les nouvelles canadiennes ne soient pas diffusées. Tenet est encore partagé sur Facebook, par le truchement de Rumble, et je trouve qu'il est vraiment inquiétant que Tenet continue de diffuser de fausses informations. La désinformation russe parvient encore aux Canadiens.
    J'aimerais...
(1640)
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, pourrons-nous débattre de cette question? Cela fait un moment que cela dure et je veux m'assurer que nous pouvons y répondre.
    J'aimerais inviter ces trois témoins à revenir pour une autre heure pour que nous puissions avoir plus de temps avec eux. C'est ce que je proposais.
    Avec l'accord du Comité, le greffier inviterait ces trois témoins à revenir pour une heure.
    Le Comité est‑il d'accord?
    Madame Dancho, allez‑y, rapidement, s'il vous plaît.
    Je propose que nous en discutions en sous-comité, parce que nous pouvons inviter de nombreux témoins à revenir.
    Je serais heureuse d'en discuter en sous-comité, ou ouvertement, mais en temps voulu.
    J'en déduis que Mme Damoff a proposé une motion.
    Le Comité est‑il d'accord avec cette motion?
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, si elle n'a pas donné un avis de motion adéquat, elle aurait besoin du consentement unanime pour la proposer, n'est‑ce pas?
    Non. Cela concerne directement la question qui nous occupe.
    Nous en aurons alors besoin dans les deux langues officielles.
    La motion vise à inviter ces témoins à revenir pour une autre heure.
    Le Comité souhaite‑t‑il appuyer la motion?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Nous inviterons les témoins à revenir.
    Nous vous remercions de vous être joints à nous, aujourd'hui. Nous apprécions votre témoignage. Évidemment, nous voulons que vous reveniez, le greffier vous contactera donc quand nous aurons trouvé une heure pour cela. Merci à tous de votre contribution précieuse à notre étude.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance.
(1640)

(1645)
    Reprenons nos travaux.
    J'aimerais accueillir les témoins pour la deuxième heure. À titre personnel, nous accueillons M. Anthony Seaboyer, professeur adjoint au Collège militaire royal du Canada, et M. Adam Zivojinovic, journaliste.
    Merci, messieurs, de votre présence.
    J'aimerais maintenant inviter M. Seaboyer à présenter sa déclaration, pour cinq minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, merci de me donner l'occasion de témoigner devant vous, aujourd'hui. Il est rassurant de voir que le Comité de la Sécurité publique et nationale prend très au sérieux la menace que représentent la désinformation et les opérations d'influence russes pour le Canada et les Canadiens ainsi que pour notre démocratie et notre société.
    Les points que je soulève, aujourd'hui, n'engagent que moi, et ne représentent la position d'aucune organisation.
    Mes recherches portent principalement sur l'instrumentalisation de l'information par les régimes autoritaires. J'étudie comment la Russie, la Chine et l'Iran ciblent des démocraties au moyen de la guerre hybride en zone grise et de la désinformation afin d'affaiblir les pays démocratiques fondés sur des règles, comme le Canada. J'étudie spécifiquement la façon dont les applications utilisant l'intelligence artificielle touchent les infoattaques contre les démocraties et ce que l'on peut faire pour défendre les démocraties contre les infoattaques et d'autres tentatives visant à influencer et affaiblir nos sociétés.
    Aujourd'hui, je me concentrerai en particulier sur ce que le Kremlin fait quand il cible le Canada, pourquoi et comment il cible le Canada, et ce que je recommande de faire à ce sujet.
    Que fait la Russie? La Russie cible délibérément et systématiquement le Canada et ses alliés, 24 heures sur 24 et sept jours sur...

[Français]

     Je suis obligé de vous interrompre, car je n'ai pas d'interprétation.

[Traduction]

    Suspendons la séance un instant.
(1645)

(1650)
    Reprenons.
    Que fait la Russie quand elle cible le Canada? La Russie cible délibérément et systématiquement les alliés du Canada, 24 heures sur 24, sept jours sur sept, dans l'espace d'information. Le Kremlin se considère comme étant en guerre contre l'Occident et croit que, comme dans un jeu à somme nulle, plus l'Occident est mal en point, mieux le Kremlin se porte.
    Il est important de souligner que ce n'est pas la position de tous les Russes, bien sûr. C'est la position des élites au pouvoir et de ceux qui tirent parti du régime corrompu de Poutine.
    Le Kremlin cherche à profiter des divisions dans la société et à les exagérer, à perturber notre régime politique et nos sociétés, dans le cadre d'une stratégie appelée le contrôle réflexif russe, dont le but est de changer la vision du monde et les mentalités des citoyens, à long terme. L'objectif est de changer le comportement des pays occidentaux pour que Poutine atteigne ses objectifs personnels.
    Tous les résidents canadiens sont la cible de la désinformation et des opérations d'influence russes, pas seulement certains politiciens. La Russie cible les Canadiens et les intérêts canadiens non seulement au niveau national, mais aussi au niveau mondial, et cela vise également à produire un effet ou des répercussions sur le Canada au‑delà de ses frontières.
    Certaines activités russes d'ingérence visent à provoquer une réaction, dont le Kremlin pourra ensuite tirer parti pour nuire aux intérêts canadiens à l'étranger. Elles font partie des menaces plus importantes et hybrides suivantes avec lesquelles la Russie cible l'Occident en général: la déstabilisation des processus électoraux et de la fonction des institutions démocratiques; les menaces et le sabotage visant les activités économiques, les services d'intérêt public et les infrastructures essentielles; le recours à une désinformation coordonnée, à la manipulation des informations étrangères et à l'ingérence dans celles‑ci pour radicaliser les citoyens et les priver de leur droit de vote; et les cyberattaques. Il s'agit d'un ensemble dont la désinformation et l'ingérence étrangère font partie.
    Pourquoi la Russie cherche‑t‑elle à influencer l'Occident? Pour le Kremlin, comme pour d'autres régimes autoritaires non démocratiques, comme la Chine, la simple existence des démocraties est une menace à la survie de leur régime. Des pays comme le Canada montrent tous les jours que la répression, la violence, la censure et la corruption qui existent dans les régimes autoritaires non démocratiques sont non seulement inutiles, mais sont préjudiciables, et fondamentalement contraires à l'intérêt des citoyens.
    La prévention de la libre circulation de l'information et de la confrontation des idées, la violence et la corruption ainsi que la répression de la dissidence conduisent à des sociétés qui ne peuvent pas rivaliser avec les démocraties fondées sur la primauté du droit, comme le Canada. Le régime ne peut pas non plus rivaliser au chapitre des conditions de vie, du développement économique, de la stabilité politique ou du bonheur général de la population. Par conséquent, la manière dont nous vivons et dont nous nous épanouissons remet directement en question et menace les régimes autoritaires, car cela montre aux citoyens qui vivent sous des régimes autoritaires que l'on vit mieux dans des démocraties.
    Comment la Russie influence‑t‑elle l'Occident? Les opérations russes d'ingérence visent à éradiquer la création d'une volonté politique organique... la véritable volonté du peuple. La Russie y parvient en augmentant la charge cognitive des publics cibles au point où ils se détournent des processus politiques. Voici comment la Russie parvient à cette surcharge cognitive au moyen de l'information. D'abord, elle inonde l'espace d'information avec des campagnes de désinformation ciblées et de la mésinformation qui créent en plus du bruit et de la confusion. Cela entraîne une soi-disant surcharge d'information. À grande échelle, ce qui est possible au moyen des applications de l'intelligence artificielle, cela crée une asphyxie de l'information. Les citoyens sont alors submergés d'informations, et il leur est tellement difficile de savoir ce qui se passe vraiment qu'ils se détournent des sources d'information, ce qui entraîne ce que l'on appelle « l'apathie face à l'information ». Avec le temps, le public se sent comme un « chevreuil ébloui par les phares » et ressent une paralysie face à l'information. Les publics cibles sont tellement submergés qu'ils cessent de participer au processus politique. Cela conduit à l'objectif final des régimes autoritaires qui exploitent l'information, à savoir le sentiment de perte d'autonomie des citoyens.
    Au bout du compte, cela éradique la société civile et empêche la création d'une volonté politique organique, parce que les citoyens ont l'impression de ne pas pouvoir participer, ni de savoir ce qui se passe, ni avoir de l'influence. Les applications utilisant l'intelligence artificielle permettent d'y parvenir beaucoup plus facilement et plus rapidement que ce qui était possible dans le passé. Vous trouverez dans les notes que j'ai pour vous — je ne vais pas toutes les lire — comment cela est fait au moyen de l'intelligence artificielle, et comment cela change ce que la Russie peut faire.
    Pour gagner du temps, je vais passer à mes recommandations. J'en ai cinq.
    Premièrement, je pense qu'il faut envisager une révision générale de la politique de l'information au gouvernement canadien. Où sommes-nous vulnérables aux infoattaques? Il faudrait mettre cela à jour en fonction des possibilités que l'intelligence artificielle offre, aujourd'hui.
    Deuxièmement, il faut adapter un cadre de sanctions, similaire à ce que l'Union européenne a instauré tout juste hier. Cela permet de cibler beaucoup plus efficacement les personnes qui soutiennent les opérations russes d'ingérence.
    Troisièmement, il faut approuver une mise à jour de la politique d'exploitation de l'information du ministère de la Défense nationale, pour remplacer celle de 2018, qui ne correspond clairement pas à la situation de la sécurité dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui.
    Quatrièmement, il faut se concentrer davantage sur le rôle des influenceurs dans les campagnes d'ingérence russes.
    Enfin, on doit demander des comptes aux entreprises canadiennes qui nous aident à contourner les sanctions mises en place pour accéder aux médias russes.
    Je vais m'arrêter là. Vous trouverez davantage d'informations dans mes notes.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
(1655)
    Merci, monsieur.
    Nous allons maintenant passer à M. Zivojinovic.
    Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du Comité, merci de m'accorder le privilège et l'occasion de témoigner devant vous, aujourd'hui.
    Au cours des deux dernières années et demie, j'ai vécu à temps partiel en Ukraine. En tant que journaliste indépendant, j'ai écrit près de 100 articles sur le pays. Dans le cadre de mon travail, j'ai essayé de réfuter certains discours de désinformation russes, principalement en travaillant avec la communauté LGBTQ, la communauté juive et les communautés racisées de l'Ukraine.
    Dans ce contexte, rapporter la vérité peut sembler impossible. La machine de propagande russe est formidable et bien financée. Comme on l'a vu avec le scandale récent de Tenet Media, les commentateurs influents sont parfois payés pour diffuser des mensonges empoisonnés. On sait également que de nombreuses personnes diffusent gratuitement, et avec joie, les discours de Moscou, parce qu'elles ont été séduites par la propagande qui a été soigneusement conçue pour flatter leur vision idéologique du monde. Il est difficile de distinguer ces idiots utiles, qui croient sincèrement ce qu'ils disent, des acteurs payés ou non payés qui travaillent sous les ordres directs ou indirects du gouvernement russe.
    Dimitri Lascaris, un militant écosocialiste, qui est populaire au sein de l'extrême gauche du Canada, est un exemple évocateur. Depuis le début de l'invasion russe à grande échelle, Lascaris a fait la promotion du discours de propagande de Moscou avec une obsession agressive. À l'automne 2023, il s'est rendu en Russie, a rencontré des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères, et a blanchi de manière flagorneuse le régime et les crimes de guerre de Poutine. Il est également apparu plusieurs fois sur RT, un média sanctionné appartenant au Kremlin qu'Affaires mondiales Canada a identifié comme étant un organe de l'appareil de renseignement russe. Il l'a fait tout en reconnaissant, dans ses propres écrits, que RT fait de la propagande,<.
    Les aventures de Lascaris, dignes de Potemkine, qu'il a lui-même entièrement financées, selon ses dires, ont été largement critiquées, y compris dans un article que j'ai écrit pour le National Post et, fait plus important encore, dans un essai écrit par Alexey Kovalev, un journaliste russe dissident, de renom, qui vit aujourd'hui en exil. Cependant, on ne sait toujours pas si Lascaris est un agent d'ingérence étrangère ou un simple fanatique. On ne sait pas non plus dans quelle mesure il reçoit l'aide des Russes, que ce soit de manière délibérée ou non.
    En tant que simple journaliste, je n'ai pas la capacité de tirer ces conclusions. Les médias peuvent jouer un rôle essentiel en matière de désinformation, de sécurité nationale et d'affaires étrangères, mais nos ressources sont limitées. C'est aux institutions de l'État canadien, avec leur formidable pouvoir d'enquête, d'examiner les affaires ambiguës et d'établir un cadre juridique qui définit, cerne et sanctionne la collaboration inacceptable avec les gouvernements étrangers hostiles.
    J'aimerais souligner qu'il ne s'agit pas d'une question partisane. Même si Lascaris est un parfait exemple des échecs de l'extrême gauche, l'extrême droite est tout aussi toxique. Par exemple, au début de 2023, il semblait y avoir une campagne coordonnée parmi les influenceurs adeptes de Make America Great Again, MAGA, actifs sur Twitter, pour présenter la guerre en Ukraine comme un canular et affirmer qu'il n'existe aucune image de la guerre. Les affirmations de ces influenceurs étaient si exaspérantes et absurdes qu'il semblait impossible d'y répondre. Comment discuter avec quelqu'un qui insiste sur le fait que le ciel est rouge, et pas bleu?
    Je ne peux pas apporter plus de précisions sur les activités russes de propagande ni sur les outils disponibles pour les contrecarrer, car cela va au‑delà de mes compétences. Cependant, ce que je peux fournir, c'est une idée de la façon dont cette propagande se fait sur les médias sociaux, ainsi qu'une analyse des lacunes en matière de connaissances qui permettent à la désinformation de proliférer.
    En ce qui concerne les recommandations, je conseille au Canada de protéger proactivement son environnement d'information en finançant les initiatives d'éducation du public et des médias. Il ne suffit pas de colmater une fuite d'eaux usées. Il est nécessaire de procéder à certains travaux d'assainissement de l'environnement. L'une des façons d'y parvenir, c'est de faire entendre davantage les voix des minorités en Ukraine, en particulier la communauté LGBTQ ukrainienne, qui peut briser les mythes qui circulent dans les cercles ultra-progressistes, et les Juifs ukrainiens, qui pourraient s'adresser aux publics conservateurs.
    Je crois également que l'expérience directe est un antidote puissant, bien qu'imparfait, à la désinformation. De nombreux journalistes que j'ai rencontrés, quand j'étais en Ukraine, ont dit qu'ils ont été surpris quand ils ont visité le pays pour la première fois. Avant de visiter le pays, il semblait que leurs perceptions étaient influencées par des stéréotypes négatifs et dépassés sur l'Europe de l'Est. En voyant l'Ukraine en vrai, il était évident pour eux que les discours russes, principalement en ce qui concerne le néonazisme et la soi-disant persécution des locuteurs russes, étaient ridicules.
    C'est pourquoi je recommanderais d'offrir aux personnalités des médias et aux leaders d'opinion des possibilités de financement pour visiter l'Ukraine, à condition que cela soit fait de manière prudente qui ne nuit pas à l'indépendance des médias canadiens.
(1700)
    Merci, monsieur.
    Nous allons commencer notre série de questions. Nous allons réduire le temps de questions à quatre minutes.
    Monsieur Shipley, vous avez quatre minutes, allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux deux témoins d'être présents aujourd'hui.
    Tout d'abord, monsieur Zivo, je dois m'excuser. Je vous ai croisé dans le corridor et je n'ai pas réalisé qui vous étiez; je suis passé tout droit. Excusez‑moi.
    Ma première question s'adresse à vous, monsieur. Vous avez mentionné Dimitri Lascaris dans vos déclarations liminaires. Je veux seulement préciser qui est cette personne et ce que vous avez fait dans cette situation. Dimitri Lascaris est un influenceur canadien de la gauche qui a des dizaines de milliers d'abonnés sur Twitter et YouTube. Il a aussi participé à la course de la chefferie du Parti vert en 2020 et a perdu de peu, obtenant 40 % des votes. L'année passée, vous avez fait savoir qu'il appuyait la propagande du Kremlin et mis en lumière la prolifération d'opérations d'information russe contre les influenceurs de gauche au Canada.
    Pouvez-vous nous expliquer votre travail et dire pourquoi l'extrême gauche est ciblée par les opérations d'ingérence du Kremlin?
    Je pense que c'est un problème depuis des dizaines d'années; des personnes de l'extrême gauche soutiennent une version irréfléchie de l'anti-impérialisme, où tout ce qui est contre l'Occident est bon. Dans les années 1970, nous avons vu des gens s'excuser pour les Khmers rouges. Nous avons vu des gens vanter la Chine maoïste. Nous avons vu des gens s'excuser pour la Révolution culturelle. Ce n'est pas un nouveau phénomène.
    Dimitri Lascaris s'inscrit dans la longue tradition des gens en marge de la gauche qui se comportent de cette façon. En ce qui concerne son travail, j'ai été invité à comparaître il y a seulement trois jours environ, donc je n'ai pas pu revoir son contenu systématiquement, mais je l'ai survolé aujourd'hui et hier. Un exemple qui m'a sauté aux yeux était un article qu'il a écrit lorsqu'il a visité la Russie. Il est intitulé « 10 jours à Moscou ». On y trouve un passage au sujet de la légitimité du régime de Poutine. Il y avait environ 24 paragraphes, dont 22 justifiaient la façon dont Poutine dirigeait son pays. Il était dit essentiellement que la plupart des Russes aiment Poutine et que c'est pour cette raison que leur niveau de vie est excellent. Il a effectivement mentionné la répression de la dissidence, mais il n'y avait qu'environ un paragraphe et demi sur le sujet. Je pense que cela reflète assez bien la façon dont il a approché le sujet.
    Lorsque je l'ai interviewé, l'année dernière, l'une des choses que j'ai remarquées, c'était qu'il s'obstinait à dire que le néonazisme était un problème en Ukraine, et un problème important. Je lui ai demandé s'il pouvait justifier cela, puisque les partis de l'extrême droite n'avaient jamais obtenu plus de 2 % des votes depuis 2014. Il a semblé un peu dérouté, et il a mentionné quelques faits anecdotiques qui donneraient à penser que certaines personnalités de l'extrême droite ont une influence démesurée, en Ukraine. À ce moment‑là, je lui ai dit que les membres de la communauté LGBTQ et les Juifs d'Ukraine n'étaient pas d'accord, qu'ils disaient qu'il n'y avait pas de problème avec l'extrême droite en Ukraine — aucun problème important — et que l'on exagérait le problème. Il ne semblait pas prêt à le croire, ce qui en disait assez long, selon moi.
    Merci, monsieur Zivo.
    Monsieur Seaboyer, ma prochaine question est pour vous. Il ne me reste que quelques minutes, parce que nous avons peu de temps aujourd'hui.
    Pourriez-vous parler des liens qui existent entre RT et l'appareil de renseignement du Kremlin?
    RT est considéré à tort par plusieurs comme étant une organisation médiatique. Je dirais que ce n'en est pas une. Ce n'est pas un média d'État. On utilise mal la terminologie. C'est en fait une organisation de propagande qui se coordonne directement avec les services de renseignement russes. Dans les faits, RT fait partie du service de renseignement russe pour ce qui est du message.
    Tous les médias russes fonctionnent maintenant d'une façon similaire, dans la mesure où, si les journalistes ne disent pas exactement ce que le Kremlin veut, on leur coupe la parole. Ils sont emprisonnés ou leur organisation est fermée. Il n'y a pas de média libre ni de média d'État quelconque en Russie présentement.
(1705)
    Il ne me reste que 10 secondes, donc je vais en rester là.
    On vous devra 10 secondes. Merci.
    C'est maintenant au tour de Mme O'Connell, pour quatre minutes; allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins d'être présents.
    Monsieur Zivo, je vais commencer par vous. Je ne sais pas si vous avez pu l'entendre, mais, dans notre dernier groupe de témoins, nous avions des représentants de Meta qui parlaient du fait que... Mon collègue ici présent, M. MacDonald, a donné un exemple où le contenu médiatique canadien ne pouvait pas être partagé sur Facebook, mais les articles de Tenet Media, oui.
    Je vous pose la question parce que vous avez mentionné que vous aviez écrit un article entre autres pour le National Post. Vous êtes un journaliste qui n'est pas payé par la Russie. Comme Facebook ne veut pas payer pour du travail comme le vôtre, Facebook est disposé à conserver du contenu — de la propagande russe — qui est gratuit et payé par la Russie.
    Comment le public canadien, et le public en général, peut-il faire la différence entre la mésinformation et la vérité si les journalistes canadiens n'arrivent pas à être payés par les plateformes pour le travail qu'ils font, alors que ces plateformes sont tout à fait disposées à faire des profits sur du travail qui est fait et payé par la Russie?
    Je dirais que, si les Canadiens ne peuvent pas accéder aux médias grand public sur les réseaux sociaux populaires comme Facebook ou Instagram, cela les prédispose certainement à s'informer auprès d'autres sources, lesquelles pourraient être moins fiables, appliquer des normes éditoriales moins serrées et être financées de façon assez opaque. Je pense que c'est préoccupant. En même temps, je ne pense pas que ce soit le seul facteur en jeu, mais je pense effectivement que c'est un facteur souvent sous-estimé, donc j'aurais tendance à être d'accord avec votre analyse.
    Merci.
    Je crois que tous les Canadiens devraient s'inquiéter de voir que Facebook peut promouvoir gratuitement la propagande russe, mais que cela leur coûte trop cher de payer les journalistes canadiens.
    Oui, je suis d'accord.
    Merci.
    Monsieur Seaboyer, je suis aussi préoccupée par... Vous avez mentionné certaines recommandations. Au Canada, avec l'adoption et la sanction royale du projet de loi C‑70, nous avons pu établir un registre des agents étrangers.
    Il est certain que l'accusation portée par les États-Unis, qui a incité les plateformes à agir, a donné quelque chose: la loi sur l'enregistrement des agents étrangers, la Foreign Agents Registration Act. Pendant que l'on établit notre registre, pourriez-vous expliquer un peu les modèles de sanctions que vous aimeriez que l'on applique pour punir ceux qui enfreignent ces règles?
    J'ai recommandé d'examiner de près ce que l'Union européenne vient tout juste de présenter, hier, qui est beaucoup plus ciblé et qui permet d'interdire l'entrée au pays des gens qui ont été reconnus coupables d'appuyer les opérations d'influence russe. Cela permettrait aussi de saisir leurs ressources financières et de les empêcher de survoler le pays. C'est beaucoup plus strict, et je pense que nous devrions coopérer.
    Ce problème ne touche pas n'importe quel pays. Nous devrions collaborer aussi étroitement que possible avec nos alliés de l'OTAN et nos partenaires de l'Union européenne. Pour faire cela, nous devons pouvoir accéder, au sein du gouvernement, aux capacités et aux ressources prévues à cette fin et les mettre à profit pour réellement collaborer avec eux. Présentement, à l'OTAN, malheureusement, nous ne sommes pas seulement incapables de coopérer au même niveau, mais nous ne sommes même pas capables de fonctionner en interopérabilité avec les autres partenaires importants de l'OTAN, ce qui est un grave problème sur le plan de l'information.
    Merci.
    Ce n'est pas juste un problème pour le Canada. C'est une attaque contre les démocraties occidentales. Est‑ce juste?
    Vous avez mentionné l'OTAN. Y a‑t‑il une possibilité de coordination plus large pour composer avec le fait que, encore une fois, cela ne cible pas seulement le Canada; on vise à saper toutes les démocraties dans le monde?
    Absolument. Comme je l'ai dit, toute démocratie est une menace pour les régimes autoritaires parce que c'est un modèle. Elle fonctionne manifestement bien. Il y a la liberté d'expression et les gens ne se font pas arrêter pour avoir affiché des choses en ligne, comme en Chine, par exemple. Nous sommes essentiellement un modèle, et les citoyens de ces régimes autoritaires pensent: « Pourquoi ne pouvons-nous pas vivre de cette façon? » Cela met de la pression sur leurs systèmes. Ils réagissent entre autres en dévalorisant le plus possible les démocraties occidentales. Ils le font en diffusant de la désinformation et de la mésinformation.
    Oui, les pays de l'OTAN font de plus en plus d'efforts — et aussi pour se coordonner avec l'UE — et travaillent ensemble, partagent de l'information sur les attaques et partagent aussi les leçons retenues sur les façons de prévenir ces attaques ou de mieux se défendre, mais nous ne sommes qu'au début du processus, nous en sommes là.
(1710)
    Merci.
    Merci, madame O'Connell.

[Français]

     Monsieur Fortin, vous avez maintenant la parole pour quatre minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins d'être parmi nous.
    Monsieur Seaboyer, dans votre présentation, vous avez parlé de cinq recommandations que vous aviez pour nous. Est-ce qu'il vous est possible de nous les fournir par écrit?
    C'est déjà fait.

[Traduction]

    Je les ai données au greffier, avec beaucoup plus d'autres points à ce sujet, parce que je n'ai pas eu assez de temps pour les mentionner.

[Français]

    Je vous remercie.
     J'aimerais vous demander autre chose. J'entends tout ce que vous nous dites. Nous avons accueilli un groupe de témoins avant vous et il y en a eu d'autres avant. Je n'étais pas présent, mais ma collègue était là.
    En 2019, vous avez publié un rapport de recherche qui traitait des effets de l'information générée par les missions spéciales russes et les agences de renseignement russes. Votre rapport concluait par un examen des tactiques, des techniques et des procédures employées, et des contre-mesures possibles.
    J'aimerais que vous nous parliez de ces contre-mesures. Qu'est-ce que le Canada pourrait faire, à votre avis? Qu'est-ce qu'on pourrait mettre en place comme contre-mesures pour contrecarrer les plans ou l'effet de ces ingérences russes sur notre territoire?
    Je vous remercie de la question.

[Traduction]

    On peut faire beaucoup de choses.
    Premièrement, la toute première chose que je dirais, en tant qu'universitaire, c'est que nous devons comprendre comment tout cela fonctionne et réellement comprendre la menace qui en découle. On pense encore que, s'il n'y a pas d'explosion, s'il n'y a pas de sang direct visible, ce n'est pas dangereux, et on affecte des ressources. On préfère aussi prioriser les autres menaces à la sécurité — et nous avons beaucoup d'autres menaces de sécurité aussi — mais je crois que, à long terme, c'est une menace très sérieuse. Il faut d'abord que la population comprenne la situation, et il faut inclure les dirigeants. Nous avons progressé à cet égard, mais nous sommes encore loin de l'objectif.
    Deuxièmement, l'approche est... Il y a deux côtés. Je recommande de renforcer la cible. À long terme, la meilleure stratégie c'est toujours de renforcer la cible. Il faut encourager les gens à bien connaître les médias, leur permettant ainsi de faire la différence entre la vraie information, la mésinformation et la désinformation. Il y a des modèles prometteurs. Nous voyons ce que des pays comme la Finlande, la Suède et le Danemark font. Ils sont très efficaces sur ce plan. Nous pouvons apprendre de leurs programmes. C'est une chose.
    L'autre chose que j'ai mentionnée concerne le gouvernement. Vous verrez mes recommandations. Du point de vue militaire, nous devons mettre à jour la politique pour indiquer clairement ce que les Forces armées canadiennes peuvent faire à ce chapitre et ce qu'elles ne peuvent pas faire, et établir des lignes directrices claires sur ce qui peut être fait. Je recommande aussi d'imposer des sanctions plus efficaces et de faire appliquer la loi actuellement en vigueur, par exemple en s'attaquant aux entreprises qui offrent des moyens de contourner les sanctions imposées sur l'accès des médias russes depuis le Canada.
    Voici quelques recommandations: renforcer la cible, mais aussi mieux comprendre la menace et offrir des ressources et de la formation aux agents des services de sécurité pour qu'ils soient plus efficaces.

[Français]

     Merci, monsieur Seaboyer.
    Plus tôt cette semaine, M. Oksanen a comparu devant le Comité et, en réponse à des questions posées par ma collègue Mme Michaud, il nous disait que les Russes font les choses différemment d'un pays à l'autre, en tenant compte du contexte. Selon ce que j'en comprends, la mission russe au Canada serait de briser le soutien du Canada à l'Ukraine.
    En quelques secondes, puisqu'il ne me reste presque plus de temps, qu'est-ce qui pousse la Russie à utiliser cette méthode ici, et pourquoi ses méthodes diffèrent-elles d'un pays à l'autre?

[Traduction]

    Eh bien, c'est l'un de leurs objectifs: briser le soutien public envers l'Ukraine, surtout le soutien financier que nous leur versons et un appui possible en matière d'armement. C'est l'un des objectifs.
    J'aimerais souligner que les campagnes de désinformation de la Russie ne dépendent pas du cycle électoral. Elles ne se concentrent pas sur un enjeu. À long terme, elles tentent essentiellement de modifier la vision du monde des gens, des citoyens et des démocraties et de donner l'impression que la démocratie est moins intéressante et qu'elle fonctionne moins bien qu'il n'y paraît.
    Bien entendu, dans des campagnes particulières, les efforts, leur but clair présentement — c'est sans doute leur objectif principal — est de briser le soutien à l'Ukraine afin que le gouvernement canadien cesse de donner son appui à l'Ukraine.
(1715)

[Français]

    Merci, messieurs Fortin et Seaboyer.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de M. MacGregor pour quatre minutes; allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux deux témoins de s'être joints à nous, aujourd'hui.
    Monsieur Seaboyer, je vais commencer par vous. J'ai bien aimé votre déclaration préliminaire, lorsque vous avez parlé des menaces qui planent sur le Canada, en particulier la façon dont le Kremlin utilise une stratégie de saturation d'informations pour trouver les failles de la société canadienne et les exploiter. Le résultat final est une population apathique, qui semble douter des institutions auxquelles elle faisait auparavant confiance. En tant que députés, nous observons ce phénomène presque quotidiennement dans nos relations avec les électeurs.
    Cette étude nous a, entre autres, permis de questionner des témoins habitant en Europe de l'Est, pour qui la Russie a toujours représenté une menace existentielle — nous ne parlons pas ici des dernières dizaines d'années, mais bien de centaines d'années. Je m'intéresse d'ailleurs beaucoup à l'existence de l'Agence de défense psychologique, en Suède.
    Nous avons également entendu des témoins dire que le Canada doit mettre en œuvre une stratégie de résilience numérique et fournir les outils appropriés pour permettre aux citoyens de déceler les tentatives de mésinformation et de désinformation, tout en autorisant — et c'est l'enjeu ici — la libre circulation des idées.
    Avez-vous des commentaires à formuler sur le modèle suédois? Pensez-vous que le Canada devrait un jour mettre sur pied un tel organisme indépendant? Pouvez-vous nous en dire plus sur cela?
    Oui, je crois fermement que c'est quelque chose que nous devrons faire, à long terme. Nous avons besoin d'un organisme central mieux coordonné, équipé et formé pour faire cela. Je crois que le modèle suédois est idéal.
    Oui, cela comporte des défis. Nous souhaitons, d'un côté, défendre la liberté d'expression, mais une limite claire que nous pouvons tracer est que les Canadiens, au Canada, peuvent s'exprimer librement, mais que les organismes du renseignement étrangers n'ont pas le droit de s'exprimer en sol canadien. Si nous regardons ce que font ces derniers, par l'entremise de RT et d'autres organismes, c'est une limite claire que nous pouvons tracer, et c'est la principale menace qui se dresse devant nous, dont les auteurs sont en particulier la Chine, la Russie et l'Iran, aujourd'hui.
    Oui, il doit y avoir un organisme centralisé et coordonné, et qui est lui-même contrôlé et qui a l'obligation de rendre des comptes, bien sûr, comme c'est l'habitude dans les institutions publiques du Canada, mais oui, nous en avons besoin. Je suis d'accord.
    Merci.
    Monsieur Zivojinovic, je m'adresse à vous.
    Je crois que l'un des défis auxquels nous faisons face, aujourd'hui, c'est que beaucoup de débats publics se font sur des plateformes de réseaux sociaux détenues par une poignée de milliardaires dont la motivation principale est de s'enrichir. Ce n'est pas tout le monde qui peut se faire entendre sur les réseaux sociaux. Ce n'est pas comme si nous étions tous rassemblés sur la place publique. Nous savons que certaines voix sont amplifiées et que les algorithmes entraînent les gens dans des directions étranges. Pour bien des gens, le phénomène demeure inexpliqué.
    Je crois que c'est une question similaire et qu'elle reflète exactement le problème: comment le gouvernement canadien peut-il régler le problème sans que le public canadien ait l'impression d'être censuré? Comment pouvons-nous mettre en place ces outils pour défendre notre démocratie tout en assurant la libre circulation des idées, mais en nous protégeant de l'influence corruptrice d'un gouvernement étranger qui cherche à nous nuire?
    La plateforme X, anciennement Twitter, est un excellent exemple du fait que certaines voix sont plus amplifiées que d'autres sur les réseaux sociaux. Après qu'Elon Musk a acheté Twitter, de nombreux influenceurs ukrainiens ont dit avoir remarqué une baisse significative de la portée de leurs publications et des commentaires qu'elles suscitaient. Pendant des mois, ils se sont demandé s'ils s'imaginaient des choses, puis on a appris que l'algorithme pénalisait les publications qui mentionnaient l'Ukraine. Toutefois, cela fait longtemps que j'ai écrit un article à ce sujet, donc j'ai oublié les exemples plus précis. Cependant, nous savons que, par exemple, M. Musk, à un certain moment, avait programmé l'algorithme pour qu'il favorise ses propres publications au détriment d'autres publications, et nous savons qu'il n'y a aujourd'hui aucune impunité sur X, donc il est plausible que le contenu ukrainien soit marginalisé politiquement à l'avenir.
    Maintenant, pour ce qui est de la solution, c'est une question très compliquée, et je ne suis pas qualifié pour y répondre, mais intuitivement, je dirais que les entreprises de médias sociaux devraient compter plusieurs propriétaires et un grand nombre d'actionnaires. Dans une entreprise privée où le pouvoir est détenu par une seule personne ou une seule famille, personne n'a à rendre des comptes, alors que si vous devez rendre des comptes à un grand nombre d'actionnaires, il y aura moins d'abus.
(1720)
    Nous allons commencer la deuxième série de questions avec Mme Dancho, s'il vous plaît.
    Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins de comparaître devant nous, aujourd'hui. Je vous remercie de vos excellents témoignages. Il est clair que le Canada est exposé à de sérieuses menaces à la sécurité publique et à la sécurité nationale en raison de l'ingérence étrangère.
    Monsieur le président, compte tenu de cela, je tiens à donner un avis de motion de vive voix, le voici:
Étant donné que:
Samidoun est un mandataire du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), une organisation terroriste inscrite sur la liste du Canada depuis 2003, qui recueille des fonds pour financer les attaques violentes du FPLP contre le peuple juif;
Le jour du premier anniversaire de l'horrible attentat terroriste perpétré par le Hamas en Israël le 7 octobre 2023, Samidoun a organisé une manifestation à Vancouver au cours de laquelle un orateur a déclaré à la foule: « Nous sommes le Hezbollah et nous sommes le Hamas », et a scandé « Mort au Canada! Mort aux États-Unis! Et mort à Israël! »;
Samidoun soutient ouvertement le Hezbollah et le Hamas, qui figurent tous deux sur la liste des organisations terroristes au Canada;
Samidoun est interdit en Allemagne, le gouvernement allemand affirmant qu'il sert de « réseau international qui diffuse de la propagande anti-israélienne et anti-juive » et qu'il « soutient et glorifie diverses organisations terroristes étrangères, y compris le Hamas »;
Les dirigeants de Samidoun ont été expulsés d'Allemagne en 2019 et se sont vu refuser l'entrée dans l'Union européenne en 2022;
Les manifestations de Samidoun promeuvent la haine des juifs et des messages pro-terroristes qui encouragent les menaces et la violence antisémites au Canada.
Étant donné que:
Ansar Allah, également connu sous le nom de Houthis, est un groupe terroriste mandataire de l'Iran basé au Yémen qui, depuis les attaques terroristes du 7 octobre, fait fi du droit international en lançant des attaques contre des civils innocents et des navires marchands dans la mer Rouge et le golfe d'Aden;
Nos plus proches alliés, les États-Unis, l'Australie et Israël ont déjà désigné les Houthis comme un groupe terroriste;
Le Canada a fourni un soutien logistique aux forces armées des États-Unis et du Royaume-Uni qui ont mené des frappes aériennes contre les Houthis.
Le Comité rapporte à la Chambre qu'il reconnaît que Samidoun et les Houthis constituent une menace pour la sécurité publique et recommande qu'ils soient tous deux inscrits sur la liste des entités terroristes en vertu de l'article 83.05 de la Loi antiterroriste.
    Monsieur le président, j'aimerais le consentement unanime de tous les partis pour adopter cette motion maintenant, pendant la séance.
    Vous avez dit que c'était un avis de motion, mais maintenant vous voulez un consentement unanime.
    C'est bien ça.
    Avons-nous le consentement unanime pour adopter la motion?

[Français]

     J'aimerais qu'on nous fasse parvenir le texte de la motion, monsieur le président. Ma collègue l'a lue rapidement, et même l'interprète n'arrivait pas à suivre tellement le débit de la députée était rapide. J'aimerais avoir le temps de lire la motion.

[Traduction]

    Nous allons suspendre la séance pour deux minutes.
(1720)

(1725)
    Reprenons nos travaux.
    On demande le consentement unanime sur cette motion. Il n'y a pas de débat sur le consentement unanime. Si nous avons le consentement unanime, la motion est adoptée. Si nous ne l'avons pas, puisque nous avons un avis, la motion peut être présentée plus tard.
    Avons-nous le consentement unanime?

[Français]

     Monsieur le président, je ne peux malheureusement pas donner mon accord à cette motion, car je remplace ma collègue Mme Michaud à ce comité. C'est une longue motion qui me semble bien fondée, mais j'ai besoin de faire des vérifications avant de donner mon accord et je dois consulter notre équipe de recherche. Par conséquent, je vous demanderais de reporter la décision sur cette motion à la prochaine rencontre du Comité. Je ne pense pas qu'il y ait urgence de l'adopter aujourd'hui. À la prochaine rencontre, les membres du Comité seront en mesure de prendre une décision.
     Merci, monsieur Fortin.

[Traduction]

    Nous n'avons pas le consentement unanime.
    La motion peut être présentée à la prochaine séance.
    Madame Damoff, c'est à votre tour.
    Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos deux témoins de s'être présentés aujourd'hui et merci de leurs observations enrichissantes.
    Je sais que Mme Lauren Chen a décliné notre invitation. J'aimerais proposer une motion, qui, je l'espère, pourra être réglée rapidement:
Que le Comité convoque Lauren Chen à comparaître pendant au moins deux heures dans le cadre de l'étude sur l'ingérence soutenue par la Russie et les campagnes de désinformation d'extrême droite visant à manipuler le public canadien, et qu'elle comparaisse avant le 8 novembre 2024.
    Pour commencer, le greffier m'avertit que la date et l'heure doivent être précisées.
    Est‑ce que je peux poser une question à ce propos? Si nous convoquons quelqu'un pour une date précise et qu'il a une raison légitime de refuser — il se fait opérer ou il est à l'étranger —, est‑ce que cela veut dire que nous devons le convoquer de nouveau? C'est pour cette raison que je n'ai pas précisé la date, ici, parce que les gens peuvent avoir des raisons légitimes. Je croyais que cela fonctionnait ainsi; et à un autre comité auquel je siège, nous donnons une date limite.
    C'est ce que dit notre greffier en chef.
    Nous pouvons le faire de cette façon, si vous le désirez, mais pour l'huissier, habituellement, j'ai besoin d'une date précise et, conformément à notre procédure, nous avons habituellement besoin d'une heure précise, mais nous pouvons nous adapter. Je vais vous revenir sur cette question, mais nous pouvons procéder de cette manière et voir ce que cela donne. Habituellement, pour l'huissier, je dois donner une date précise. Je peux, pour votre motion, être plus précis.
    Je crois que cela vous donne une certaine flexibilité. Si vous dites le 22 octobre, par exemple, et que la personne vous répond que, pour des raisons légitimes, elle ne peut pas — et non pas elle ne veut pas — comparaître cette journée‑là, eh bien cela vous donne la possibilité de lui proposer de se présenter le 29 octobre.
    Je suis d'accord pour dire que cela me donne des options.
    D'accord. Laissons alors « avant le 8 novembre ».
    La motion est d'inviter cette personne...
    De la convoquer.
    Je suis désolé. De convoquer cette personne avant une certaine date, et à une certaine heure, et le greffier se chargera de combler les informations manquantes. Nous allons régler cela.
    Avez-vous besoin d'une copie écrite? D'accord.
(1730)
    S'il vous plaît, ne prorogez pas le Parlement.
    C'est « avant le 8 novembre », donc elle pourra nous dire: « non, je ne peux pas » pendant quatre séances. Elle doit avoir quatre raisons légitimes distinctes.
    Exactement.
    Pour l'avis de convocation, nous devons préciser la date et l'heure. Ne pas respecter un avis de convocation est ultimement un outrage au Parlement.
    Sommes-nous prêts à voter?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Je crois que nous avons eu le consentement unanime. Merci.
    Il est 17 h 30. Je sais que beaucoup de gens doivent partir.
    Nous avons M. Fortin et M. MacGregor, qui auront chacun deux minutes.

[Français]

     Monsieur MacGregor, vous me faites signe que vous ne voulez plus intervenir.
    Monsieur Fortin, vous avez la parole pour deux minutes.
     Je n'ai rien à ajouter, monsieur le président.
    Dans ce cas, nous avons terminé.
    Merci à toutes et à tous.

[Traduction]

    La séance est levée.
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