Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bonjour à tous. Bienvenue à la 5e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.
Nous tenons aujourd'hui une séance hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Les députés assistent à la réunion soit en personne dans la salle, soit à distance à l'aide de l'application Zoom. Les délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. Je précise, pour que vous le sachiez, que l'écran montrera toujours la personne qui parle plutôt que l'ensemble du Comité.
Compte tenu de la pandémie en cours, des recommandations des autorités sanitaires et des directives publiées par le Bureau de régie interne le 19 octobre 2021, pour rester en sécurité et en bonne santé, toutes les personnes qui assistent à la réunion en personne doivent maintenir une distance entre elles et porter un masque, comme vous le savez tous si bien.
Si cela vous va, je ne lirai pas les autres consignes à cet égard. Est‑ce correct? Merci.
Pour les membres qui participent en personne, procédez comme vous le feriez habituellement quand l'ensemble du Comité est réuni dans la pièce. Gardez à l'esprit les lignes directrices du Bureau de régie interne concernant le port du masque et les protocoles sanitaires.
Quand vous intervenez, veuillez parler lentement et intelligiblement. Quand vous ne parlez pas, votre micro devrait être désactivé. Je vous rappelle que toutes les interventions doivent s'adresser à la présidence. En ce qui concerne la liste des interventions, le greffier du Comité indiquera à la présidence qui lève la main, en faisant de son mieux. Nous ferons tout notre possible pour maintenir une liste unifiée pour tous les membres, qu'ils participent virtuellement ou en personne.
Conformément à l'ordre adopté par la Chambre des communes le mardi 7 décembre 2021 et à la motion adoptée le mardi 14 décembre 2021, le Comité poursuit son étude du contrôle des armes à feu, du trafic illégal des armes et de l'augmentation des crimes commis par armes à feu par des personnes issues des gangs de rue.
Aujourd'hui, nous recevons par vidéoconférence M. Shawn Dulude, chef de police du service de police mohawk d'Akwesasne. Nous accueillons également deux représentants du Conseil des Mohawks d'Akwesasne: le grand chef, M. Abram Benedict; et la cheffe, Mme April Adams-Phillips. Enfin, nous recevons des représentants de la Winnipeg Police Association: le président, M. Maurice Sabourin; et le détective, M. Philip Neyron.
Cinq minutes vous sont allouées pour faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions.
Bienvenue à tous.
J'invite maintenant M. Dulude à faire une déclaration préliminaire d'au plus cinq minutes.
Bonjour à tous. Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître au sujet de cette question.
J'aimerais en profiter pour dire que j'espère que les réponses que je vous fournirai permettront à tout le monde de comprendre notre situation, qui est très semblable à celle des services de police des Premières Nations ailleurs au pays. J'espère que cette première partie de votre réunion et les témoignages qui suivront aideront tous les services de police des Premières Nations du pays à avancer, et pas seulement le service de police mohawk d'Akwesasne.
Grand chef Benedict, je vous invite maintenant à faire une déclaration préliminaire d'au plus cinq minutes. La parole est à vous. Allez‑y, s'il vous plaît.
Bonjour. She:kon. Je remercie les honorables membres du Comité et vous, monsieur le président, de me donner la possibilité de m'adresser à vous aujourd'hui. Nous vous transmettons les salutations du Conseil des Mohawks d'Akwesasne et de la communauté d'Akwesasne.
Nous fournirons aujourd'hui au Comité de l'information sur notre communauté unique, notre situation et les efforts que nous déployons pour assurer la sécurité d'Akwesasne.
Je suis accompagné de la cheffe April Adams-Phillips, qui est membre de notre conseil, et du chef de police Shawn Dulude.
Je vais demander à la cheffe Phillips de commencer notre exposé.
Akwesasne a une situation géographique unique. C'est aujourd'hui le territoire des frontières. La frontière internationale entre le Canada et les États-Unis traverse notre territoire. La moitié des membres de la communauté habitent au Canada, dans les provinces du Québec et de l'Ontario, et l'autre moitié, aux États-Unis, dans l'État de New York.
Le Conseil des Mohawks d'Akwesasne est le corps dirigeant du territoire d'Akwesasne du côté canadien. Nous représentons environ 13 100 membres. Nos membres vivent des deux côtés de la frontière internationale, dans les différents districts d'Akwesasne en Ontario, au Québec et dans l'État de New York. Si un membre veut se rendre d'un district à l'autre par voie terrestre, il doit traverser la frontière internationale. La seule route qui va de Kawehno:ke, l'île Cornwall, en Ontario, à Kana:takon, Saint-Régis, au Québec, traverse le pont international qui relie le Canada et les États-Unis.
Les Mohawks qui se rendent au travail ou à l'école, qui vont à l'église, qui vont magasiner ou qui voyagent à des fins récréatives, sociales et culturelles doivent traverser la frontière internationale et se présenter aux douanes canadiennes et américaines. Il n'est pas rare que lorsqu'ils vont à des funérailles, ils doivent traverser la frontière internationale à plusieurs reprises. Un cortège funèbre peut quitter le domicile du défunt sur l'île de Cornwall, traverser le pont international et les douanes américaines pour se rendre à l'église communautaire principale, qui est située dans le village sur la rive sud du Saint-Laurent. Après la messe, ils peuvent traverser à nouveau la frontière jusqu'à l'île de Cornwall pour l'enterrement. Après l'enterrement, ils peuvent se rendre du côté new-yorkais d'Akwesasne pour un repas familial avant de rentrer chez eux dans l'un de ces trois districts canadiens.
Avant la COVID, Cornwall était le 10e point d'entrée le plus fréquenté en Ontario, avec environ deux millions de véhicules traversant la frontière chaque année. Environ 70 % de ces passages sont effectués par des Mohawks qui se déplacent d'un district d'Akwesasne à un autre. Cela équivaut à 1,4 million de passages aux douanes canadiennes par des Mohawks voyageant à Akwesasne, soit plus de 100 passages par membre chaque année. Je suis sûre que vous comprenez que les lois du Canada et l'imposition des frontières internationales et provinciales ont de graves conséquences pour les Mohawks et notre communauté dans son ensemble.
Je tiens à préciser que la sécurité publique est une priorité pour Akwesasne, mais qu'il s'agit d'une responsabilité partagée. En tant que membres d'une grande communauté autochtone avancée, nous vivons sur un territoire vraiment unique. Cependant, nous sommes confrontés à de nombreux défis créés par la frontière internationale. Notre service de police mohawk d'Akwesasne fait partie d'une équipe d'enquête mixte avec la GRC, la PPO, la SQ et l'ASFC, mais nous devons participer aux forums conjoints sur les activités frontalières, l'élaboration de politiques et de lois. Le service de police mohawk d'Akwesasne doit être présent là où les décisions sont prises et où les renseignements sont communiqués. Nous devons déployer des efforts concertés tout en respectant la compétence et les droits d'Akwesasne. Le respect de l'autorité d'Akwesasne est un élément essentiel de notre réussite collective.
La sensibilisation et la prévention sont des éléments essentiels dans la lutte contre le trafic et la criminalité transfrontalière. Le fonds pour la sécurité communautaire est un début, mais il est nécessaire d'adopter une approche pangouvernementale pour lutter contre la criminalité et la violence armée. Tout le monde sait que notre communauté est exploitée par le crime organisé, mais nous savons que de nombreux individus qui sont impliqués dans le trafic transfrontalier le sont pour l'argent.
Le Conseil des Mohawks d'Akwesasne est l'un des plus importants employeurs de la communauté, suivi de nombreuses petites entreprises. Le gouvernement doit venir à la table pour promouvoir le développement économique, collaborer et créer plus d'emplois. Le gouvernement du Canada a légalisé le cannabis. Santé Canada a délivré une licence au premier producteur de cannabis d'une réserve, ici même à Akwesasne, mais il n'en demeure pas moins que chaque dollar en taxe d'accise qui est prélevée dans notre communauté, dans cette installation autorisée, va directement au Canada. Le Canada doit conclure des ententes sur le partage des revenus avec Akwesasne afin que ces revenus puissent être réinvestis dans la communauté pour qu'elle puisse prospérer.
Vous savez déjà que le trafic d'armes à feu est lié au trafic de drogue, mais ce que nous savons, c'est que dans de trop nombreux cas, l'argent lié au trafic contribue aux problèmes de toxicomanie. De nombreuses communautés sont confrontées à une crise des opiacés, en particulier pendant la pandémie de COVID, et nous avons également ces problèmes. Le cycle de la perte, de la criminalité et des dépendances se poursuit, le crime organisé et l'argent alimentant l'exploitation de notre communauté.
Il faut que le gouvernement continue d'investir et qu'il soit prêt à sortir des sentiers battus. Le service de police mohawk d'Akwesasne a besoin d'investissements. Dans un rapport de 2019 de Sécurité publique Canada portant sur une évaluation de l'Initiative de lutte contre le crime organisé avec Akwesasne, l'Équipe d'enquête mixte, il est recommandé que l'on continue « d'aider le Service de police mohawk d'Akwesasne à renforcer sa capacité afin qu'il participe pleinement à l'Équipe d'enquête mixte et contribue à la perturbation du crime organisé à Akwesasne et dans les environs ».
Le Canada doit continuer à investir dans le service de police mohawk d'Akwesasne. Nous devons renforcer nos capacités, améliorer notre aptitude à mener de longues enquêtes et acheter des technologies nouvelles et avancées pour pouvoir patrouiller les 25 kilomètres de voies navigables dans notre réserve. Le budget consacré à notre service de police n'a pas augmenté de façon significative au cours des dernières années, sauf en ce qui concerne l'Ontario, qui a fourni des fonds pendant cinq ans pour créer une unité de la sécurité nautique, à motoneige et en véhicule tout-terrain, connue sous le nom de SAVE.
Aucun autre partenaire financier n'a investi dans le service de police mohawk d'Akwesasne pour accroître sa capacité à combattre la criminalité. Aucun autre service de police au Canada n'est financé comme celui d'Akwesasne. Cette entente de financement entraîne des problèmes comme celui de l'œuf et la poule: aucun gouvernement n'augmentera le soutien sans que l'autre n'accepte de le faire, à cause de la formule de partage des coûts.
En terminant, je suis ici pour vous dire que la sécurité publique est l'une de nos priorités. Nous sommes toujours ouverts à des partenariats. Nous voulons assurer la sécurité de notre communauté. La police mohawk d'Akwesasne a besoin d'être désignée comme un service essentiel, à l'instar de nombreux autres services de police de Premières Nations. Nous devons être à la table à laquelle les décisions sont prises et les renseignements sont communiqués, et nous avons besoin des ressources qu'il faut pour continuer à protéger notre communauté et à y effectuer des patrouilles.
J'ai terminé mon exposé.
Nia:wen au Comité de m'avoir donné l'occasion de faire un exposé. Nous sommes prêts à répondre aux questions.
Merci, monsieur le président. Je remercie les membres du Comité de m'avoir invité à participer à la réunion.
Je m'appelle Maurice Sabourin. Je suis président de la Winnipeg Police Association depuis huit ans. Je suis un fier agent de police au sein du Service de police de Winnipeg depuis 32 ans. J'ai acquis de l'expérience dans la division des crimes contre les biens en tant que détective, l'unité des crimes majeurs, l'unité des vols d'automobiles et l'unité des homicides. Je siège au sein de notre association depuis 14 ans et, comme je l'ai déjà mentionné, j'en suis le président depuis huit ans.
Je suis accompagné aujourd'hui par le détective Phil Neyron, qui est directeur de la Winnipeg Police Association. J'ai estimé qu'il était nécessaire de faire appel à son expérience. Il est détective au sein de notre unité des armes à feu et des gangs de rue, ce qui est approprié pour le sujet d'aujourd'hui. Il est policier depuis 20 ans.
Encore une fois, je suis ravi de l'occasion qui m'est donnée de m'exprimer sur le sujet d'aujourd'hui, le projet de loi C‑5, qui, à mon avis, part d'une très bonne intention, lorsqu'on pense à la sécurité publique, aux gangs et à la contrebande d'armes à feu. J'ai toutefois quelques préoccupations au sujet du projet de loi C‑5, car on n'y tient peut-être pas compte de ce qui pourrait en découler.
La sécurité publique est primordiale pour nous, en particulier. Je pense que nous couvrons sans doute l'un des territoires les plus violents au pays, et je dirais même que notre service de police est probablement le plus occupé par habitant, même si nous sommes en tête de liste sur le plan de la présence policière, du nombre de policiers par tranche de 100 000 habitants. La violence armée est un phénomène quotidien à Winnipeg. Tout ce que nous pouvons faire pour contribuer à résoudre le problème est très apprécié.
Je crains que le projet de loi C‑5 et la proposition d'abroger des peines minimales aient un effet négatif sur la sécurité publique ici, à Winnipeg. En tant que membre de notre unité des crimes contre les biens et de notre unité des vols d'automobiles, j'ai pu voir quels étaient les avantages d'une surveillance intensive ainsi que de l'incarcération et du placement en détention préventive de criminels.
L'autre effet négatif que nous avons déjà observé, c'est le potentiel de rachat d'armes à feu illégales. Ce que nous voyons dans la rue aujourd'hui est le résultat de cette proposition. Le coût des armes à feu illégales a doublé, ce qui crée davantage d'opportunités pour les trafiquants d'armes. Lorsque la possibilité de faire un profit de 300 % plutôt que de 100 % se présente, les gens sont prêts à prendre plus de risques dans la contrebande d'armes à feu.
En outre, le registre des armes à feu a évidemment ses avantages et ses inconvénients. L'avantage, c'est qu'il y a un meilleur suivi des armes à feu lorsqu'il s'agit d'achat et de revente. C'est un avantage. Malheureusement, les mesures législatives pourraient être renforcées à cet égard. Je pense que la majorité des infractions qui sont commises dans la rue ne sont pas commises par les propriétaires légaux d'armes à feu, et la majorité des armes à feu qui sont saisies ne sont pas enregistrées légalement. À Winnipeg, en particulier, on saisit à peu près le même nombre d'armes à feu qu'à Toronto.
Je serais heureux d'en dire plus, mais c'est ainsi que se termine ma déclaration préliminaire.
J'aimerais remercier tous les témoins d'être ici aujourd'hui. Nous avons une belle diversité de témoins très intéressants. Nous avons notre police provinciale essentielle à Winnipeg, qui est sur le terrain avec 40 ans d'expérience, et nous avons cette situation très particulière à la frontière.
Je ne m'étais pas rendu compte qu'Akwesasne était située à la frontière de l'Ontario, du Québec et des États-Unis. Je savais qu'elle partageait une frontière avec les États-Unis et le Canada, mais je ne m'étais pas rendu compte qu'elle avait aussi une frontière interprovinciale. Je ne peux pas imaginer toute la paperasserie et la bureaucratie auxquelles vous devez vous soumettre simplement pour assurer la sécurité de votre collectivité. J'ai hâte de vous poser quelques questions.
J'aimerais d'abord m'adresser aux témoins de la Winnipeg Police Association.
Monsieur Sabourin, je vous remercie beaucoup d'être ici aujourd'hui. Je vous remercie également de votre déclaration. Nous avons récemment parlé du Comité et de la violence armée, ainsi que de la violence liée aux gangs et j'ai également attiré votre attention sur le projet de loi C‑5, qui a été déposé. J'aimerais également connaître votre opinion sur le projet de loi C‑5. Lors de notre dernière conversation, vous avez mentionné qu'à Winnipeg — qui, nous le savons, est malheureusement l'une des capitales provinciales les plus dangereuses en matière de crimes violents —, les appels de service ont augmenté de 45 % au cours des 10 dernières années, et que les crimes violents et les infractions contre les biens sont en hausse. En fait, vous avez mentionné que l'Indice de gravité de la criminalité de Statistique Canada avait dû augmenter son échelle pour le Manitoba. Je crois que nous avons dépassé 150, et notre échelle de criminalité était à 161. Nous savons très bien ce qui se passe sur le terrain à Winnipeg, et nous sommes de tout cœur avec ceux qui, à Montréal, sont victimes de ces mêmes crimes violents.
Vous avez indiqué que les méthamphétamines et les autres drogues font partie du problème. Vous avez également mentionné que cela découle peut-être du fait que le taux d'incarcération est le plus bas depuis 20 ans, car de nombreux facteurs entrent en jeu. Pouvez-vous faire connaître au Comité votre point de vue à ce sujet et expliquer comment, selon vous, l'incarcération et les crimes violents sont liés entre eux?
Oui, certainement. Ce que j'ai observé, d'après mon expérience, c'est que lorsque les délinquants sont tenus à l'écart des rues, les taux de criminalité commencent à diminuer.
J'ai effectivement mentionné que nous avons le plus faible taux d'incarcération en près de 20 ans, mais nous observons également des problèmes liés au système de mise en liberté sous caution au Manitoba. Vous entendrez souvent l'expression « porte tournante » à cet égard, c'est‑à‑dire que les délinquants ne sont pas en détention provisoire ou incarcérés jusqu'aux dates d'audience. En général, ces mêmes délinquants commettent d'autres crimes. Je ne me souviens pas des statistiques exactes sur la réadaptation, mais je crois qu'elles indiquent qu'à moins qu'une personne soit condamnée à une peine de plus de cinq ans, la réadaptation est peu probable.
J'ai fait partie de nombreuses unités, notamment l'unité des vols de véhicules, où l'on exerçait une surveillance intensive. Nous avons essentiellement retiré la question de la surveillance intensive aux tribunaux, car à une certaine époque, Winnipeg occupait malheureusement le premier rang pour le nombre de vols de véhicules au pays, et nous n'en sommes pas fiers. En effet, près de 35 véhicules étaient volés chaque jour, et les tribunaux ne nous aidaient pas à l'époque. Nous avons donc mis en œuvre la Stratégie d'élimination des vols de véhicules de Winnipeg, qui prévoyait des systèmes de mandats accélérés, un partenariat avec les services de probation et un partenariat avec les procureurs de la Couronne, ce qui permettait, en cas de manquement aux conditions de la probation, d'incarcérer la personne le jour même.
Lors de notre rencontre précédente, vous avez mentionné que le lien si étroit entre le vol de véhicules et les crimes violents et la violence armée est souvent attribuable au fait que de très jeunes personnes — vous avez parlé d'enfants de huit ans seulement — sont recrutées par les gangs. Ils leur disent d'abord, en quelque sorte, d'aller voler un certain véhicule. Ensuite, ces jeunes s'enfoncent dans la criminalité. Je sais que la police préconise la prévention et l'aide aux jeunes en leur fournissant d'autres ressources pour les empêcher d'entrer dans des gangs. Il faut les appréhender quand ils volent leur premier véhicule et les diriger vers une meilleure voie à suivre.
Il me reste environ une minute et demie. J'aimerais vous poser des questions sur le moral de la police. Vous avez parlé d'une augmentation importante des appels au cours des 10 dernières années, mais les ressources policières n'ont pourtant pas beaucoup augmenté. En fait, vous avez dit qu'il y a moins de policiers dans les rues actuellement.
J'aimerais brièvement aborder la question du programme de rachat d'armes à feu mis en œuvre par le gouvernement. La police a‑t‑elle le temps de mettre en œuvre les ordres émanant du gouvernement fédéral pour ce rachat ou son temps serait‑il mieux utilisé à combattre les criminels violents et la violence armée?
Je suis tout à fait d'accord. Nous n'avons pas les ressources nécessaires. Vous avez raison.
Au cours des six dernières années, notre effectif a diminué de plus de 100 policiers, et nous sommes devenus un service complètement réactif. En effet, il n'y a plus de patrouille dans les ruelles pour enrayer la violence des gangs ou la violence armée. Malheureusement, nous avons besoin de plus de ressources dans les rues, mais aussi de plus de ressources dans les programmes sociaux, car si nous pouvons intervenir rapidement auprès de ces enfants, cela les empêchera d'entrer dans un gang ou de continuer d'en faire partie.
Je crois que le financement de ce programme de rachat devrait être transféré aux programmes sociaux. Nous avons un intervenant qui occupe un poste — je ne me souviens pas du nom exact — qui concerne l'intervention auprès des gangs. Cette personne s'efforce de convaincre les jeunes de sortir des gangs et de faire quelque chose de positif de leur vie. Mais il n'y a qu'une personne qui occupe ce poste pour plus de 700 000 citoyens à Winnipeg. Un financement serait donc nécessaire et très utile pour freiner certaines des initiatives déployées par les gangs.
Ma question s'adresse au Service de police de Winnipeg. Je suis moi-même policier à la retraite, et je suis préoccupé par les gangs et les crimes commis avec des armes à feu dans notre pays.
La police de Winnipeg dispose d'une unité spécialisée dans les armes à feu et les gangs. Selon la police de Winnipeg, près de la moitié des membres de gangs sont âgés de moins de 18 ans. Pourriez-vous nous parler du travail de cette unité et des mesures qui sont prises pour réduire le nombre alarmant de jeunes impliqués dans ces gangs?
Oui, monsieur. Je n'ai pas de données statistiques précises à ce sujet. Malheureusement, je pense qu'il reste beaucoup de travail à faire pour s'attaquer aux problèmes du jeune âge des membres des gangs. Comme je l'ai dit, nous avons une personne qui travaille avec les jeunes pour tenter de les sortir de la vie de gang. Je pense que c'est une tâche très difficile pour cette personne. Nous aurions évidemment besoin de plus de ressources dans ce domaine. Cette personne travaille fréquemment avec certains organismes à vocation sociale. Je n'ai rien de plus précis à cet égard, mais je sais que ces organismes s'efforcent de réduire l'activité des gangs.
La triste réalité de cette unité spécialisée dans les armes et les gangs, c'est qu'elle s'occupe d'une grande majorité d'enjeux liés au trafic de drogues et à la contrebande d'armes illégales, comme je l'ai déjà mentionné. Compte tenu de la taille de notre service et de la population de Winnipeg, nous saisissons autant d'armes à feu illégales qu'à Toronto. Il s'agit d'un véritable problème.
La question du budget ne représente qu'un aspect du problème, c'est‑à‑dire que nous manquons de ressources pour traiter adéquatement tous les problèmes socioéconomiques auxquelles nous faisons face. Je pense également que la situation de Winnipeg est assez unique. Malheureusement, il faut en faire plus, et cela se résume à obtenir les ressources nécessaires. Au cours de la dernière année, je crois que nous avons reçu en moyenne 600 000 appels de service. C'est presque un appel par citoyen par année.
Vous avez mentionné plus tôt que le coût des armes illégales était en train de tripler à Winnipeg. Avez-vous entendu parler localement de la possibilité que les membres des gangs louent des armes à feu au lieu de les acheter? Est‑ce une situation qui se produit à Winnipeg?
Encore une fois, je ne suis pas au courant de cette statistique, mais je pourrais donner la parole à mon collègue, le détective Phil Neyron, car il sera plus en mesure de vous dire si c'est une situation qui se produit ici, à Winnipeg.
En ce qui concerne la question des armes à feu louées, c'est plutôt... Nous observons une tendance selon laquelle les armes à feu sont utilisées dans différentes régions du pays. En effet, grâce au traçage, nous apprenons qu'elles ont été utilisées pour des crimes commis en Colombie-Britannique et qu'elles arrivent ensuite à Winnipeg. Les criminels nettoient pratiquement leurs armes et les objets utilisés dans un acte criminel. Une arme à feu est donc une marchandise; au lieu de la jeter dans la rivière ou de la cacher, les criminels la vendent et en tirent un profit. Le prix des armes illégales a au moins doublé, surtout les armes de poing avec leurs munitions. Les gens les expédient dans différentes parties du pays où ils peuvent en tirer un profit.
Ils nettoient techniquement l'arme à feu. Ensuite, ils ont de l'argent pour acheter une nouvelle arme. C'est ce que nous observons.
Je vous remercie beaucoup de votre réponse à cette question.
Je crois savoir que le Service de police de Winnipeg participe au programme Turnabout du Manitoba pour les enfants de moins de 12 ans qui ont eu des démêlés avec la police dans le cadre de la loi. Pourriez-vous nous fournir plus de renseignements sur ce programme et sur le partenariat en place entre l'organisme provincial, des groupes communautaires et les services de police locaux? Ce programme a‑t‑il été utile pour le Service de police de Winnipeg?
Monsieur, je n'ai malheureusement aucune statistique à cet égard.
Je sais que nous avons un programme de déjudiciarisation dirigé par l'unité spécialisée dans les armes à feu et les gangs. La personne chargée de l'intervention auprès des gangs dont j'ai parlé plus tôt était également responsable de la déjudiciarisation. Cela se faisait également en consultation avec l'organisme provincial. Malheureusement, je n'ai pas de statistiques sur l'efficacité de ce programme pour le moment.
Je vais remercier mes anciens collègues, c'est‑à‑dire les représentants du Service de police de Winnipeg, d'avoir pris le temps de comparaître devant le Comité et de nous fournir des renseignements.
Je remercie les témoins d'avoir accepté notre invitation et d'être parmi nous aujourd'hui. Nous leur en sommes très reconnaissants.
Mes questions s'adresseront au grand chef Benedict et au chef Adams-Philips. Je les invite à nous donner le plus d'information possible.
Grand chef Benedict et chef Adams-Philips, selon vos dires, votre territoire est unique en raison de son emplacement géographique. Selon plusieurs reportages réalisés par certains médias, il existe une fameuse route des armes et les trafiquants peuvent en profiter.
Êtes-vous inquiets du trafic illégal des armes à feu sur votre territoire? La sécurité de votre communauté vous préoccupe-t-elle?
Sentez-vous que vous avez les ressources nécessaires pour lutter contre ce trafic?
Je crois que je suis mieux outillé qu'eux pour répondre à ces questions.
Notre situation géographique mène évidemment à une plus grande prospérité pour les gens qui s'adonnent à ce genre d'activités. Sommes-nous outillés pour lutter contre cela de façon adéquate? La réponse est non. Nous n'avons pas le personnel nécessaire pour assurer une surveillance 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 sur nos cours d'eau et sur tous les terrains qui mènent vers le fleuve Saint‑Laurent.
Comme cela a été expliqué d'entrée de jeu par le grand chef, notre territoire est divisé en trois secteurs, c'est-à-dire une portion québécoise, une portion ontarienne et une portion américaine, ce qui rend notre travail très difficile. Au Canada, c'est le Code criminel qui s'applique. Que ce soit sur le territoire ontarien ou québécois, les mêmes lois s'appliquent. Là où notre travail devient plus difficile, c'est lorsque nous devons traverser la frontière des États‑Unis au cours de la journée pour répondre à des appels de service et pour faire notre patrouille quotidienne, ce qui se produit constamment. Les criminels qui traversent notre territoire à la recherche de profits liés à la criminalité le savent aussi.
Il y a deux postes douaniers, en réalité, permettant d'entrer sur le territoire: celui de Dundee et celui de Cornwall. Outre cela, il n'y a plus de douane. Dans notre communauté, nous avons sept routes qui sont sans surveillance. Si nous sommes à la poursuite d'un contrebandier, par exemple, et que nous traversons la frontière internationale, la poursuite s'arrête là. Nous savons où se trouvent nos limites, et les criminels le savent aussi, ce qui, pour répondre à votre question, rend notre travail de plus en plus difficile.
Le fleuve Saint‑Laurent délimite aussi notre territoire, ce qui rend aussi notre travail plus difficile, puisque cela devient une patrouille nautique spécialisée. Nous sommes équipés pour le faire et nous le faisons très bien. Nous avons fait de multiples saisies au cours des années. L'an dernier, nous avons augmenté le nombre de saisies, et il ne s'agit pas seulement d'armes à feu, même si nous avons fait une bonne saisie d'armes qui a fait les manchettes il y a quelques semaines, mais aussi de stupéfiants. Nous interpellons aussi des sans-papiers qui essaient d'entrer au pays et d'en sortir.
Comme le grand chef Benedict l'a expliqué, nous avons une entente bilatérale avec l'Ontario qui nous permet d'avoir une patrouille nautique, mais les sommes qui nous sont accordées par l'Ontario ne suffisent pas pour avoir une patrouille 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Il y a une semaine, j'ai fait une demande au ministère de la Sécurité publique du Québec pour conclure une telle entente avec lui aussi pour combler ce manque.
Il ne faut pas oublier que, même quand le fleuve gèle, il peut être utilisé par les contrebandiers pour faire entrer leurs biens, que ce soit en automobile, en motoneige ou en chaloupe, s'il reste des sections d'eau navigable.
La géographie du territoire rend donc notre travail très difficile, mais le fait que nous sommes régis par différents États le rend encore plus difficile. En effet, nous sommes situés au centre, et nous sommes ceinturés par le fleuve Saint‑Laurent au nord et par les États‑Unis au sud. Notre pouvoir à titre d'agents de la paix et de policiers prend donc fin dès que nous traversons la frontière des États‑Unis.
Vous dites que cela complique votre travail de ne pas pouvoir aller là où votre autorité s'arrête, mais considérez-vous que l'échange de renseignements ou la collaboration avec les autres services de police sont suffisants pour continuer le travail là où vous devez vous arrêter, par exemple?
Lorsque je vous dis que nous devons nous arrêter là, je parle d'exemples concrets. Au-delà de cela, nous mettons en commun, bien sûr, en amont et en aval, tous les renseignements portant sur des activités criminelles. Nous faisons aussi partie de différents groupes, dont le programme des équipes intégrées de la police des frontières, ou EIPF. Nous ne sommes pas chargés de l'application de la loi au sein de cette équipe, mais plutôt de tout ce qui touche aux renseignements sur des activités criminelles.
Récemment, nous avons aussi fait une demande pour faire partie de l'organisme Service de renseignements criminels Ontario, ou SRCO, parce que les enquêtes que nous avons à mener et auxquelles nous devons participer pour permettre l'arrestation des individus qui font le trafic d'armes ou qui se livrent à d'autres activités criminelles commencent toutes par la collecte de renseignements en matière de criminalité.
Avant de poser mes questions, je tiens à informer les membres du Comité que j'aimerais lire un avis de motion pour le compte rendu.
Voici l'avis de motion:
Que le Comité invite dès que possible des représentants de GoFundMe à comparaître pour répondre aux questions concernant les mesures de sécurité que l'entreprise a mises en place pour s'assurer que les fonds ne sont pas utilisés pour promouvoir l'extrémisme, la suprématie blanche, l'antisémitisme et d'autres formes de haine, qui ont été exprimées parmi les organisateurs éminents du convoi de camions actuellement à Ottawa, y compris:
a) comment l'entreprise empêche l'utilisation de l'anonymat pour acheminer des fonds vers des groupes extrémistes;
b) quelles mesures sont en place pour empêcher que des fonds étrangers soient utilisés pour soutenir ces opinions, et aux sous-groupes qui ont exprimé l'intention de mettre en place leur propre gouvernement non démocratique;
c) quelles mesures et assurances sont en place pour garantir que le million de dollars qui a déjà été débloqué ne serve pas à promouvoir toute forme des opinions et activités inacceptables susmentionnées.
Monsieur le président, c'est l'avis de motion que j'ai versé au compte rendu. Je comprends qu'il faudrait obtenir le consentement unanime du Comité pour que cette motion soit proposée aujourd'hui. Compte tenu des manifestations d'antisémitisme et de harcèlement dont nous avons été témoins au cours de la dernière semaine dans la ville d'Ottawa et de certains comportements extrémistes, je me demandais si mes collègues accepteraient à l'unanimité que je propose cette motion aujourd'hui et qu'elle fasse l'objet d'un vote rapide.
Y a‑t‑il consentement unanime au sein du Comité pour approuver cette motion? Je demanderais à tous les députés qui sont contre la motion de lever la main.
Monsieur le président, j'ai seulement une question. Je ne me prononce ni pour ni contre la motion en ce moment. Je ne fais que poser une question, si vous me le permettez.
Le président: Vous avez la parole.
Mme Raquel Dancho: Je ne suis pas certaine de la procédure à suivre. Lors de réunions de comité précédentes, certaines motions présentées ont été jugées irrecevables lorsqu'elles n'avaient rien à voir avec le comité en question.
Je reconnais qu'il s'agit d'une question urgente pour le NPD et pour tous les Canadiens, mais je reconnais également que nous sommes actuellement saisis de l'étude de Mme Michaud. Des témoins comparaissent devant le Comité et leur horaire chargé ne leur permet pas de le faire en tout temps.
J'aimerais simplement savoir si le greffier peut nous éclairer sur le plan de la procédure technique. Serait‑il préférable de traiter cette question à la fin de la réunion? Quand pouvons-nous aborder cette question? Par expérience, je sais que des choses semblables ont été jugées irrecevables. Pouvez-vous nous éclairer à cet égard, s'il vous plaît?
Il s'agit d'un avis de motion, et ce n'est donc pas lié au sujet à l'étude aujourd'hui. M. MacGregor peut le lire pour le compte rendu et il peut présenter un avis de motion. Toutefois, à moins qu'il y ait consentement unanime, la motion ne peut pas faire l'objet d'un débat aujourd'hui. La question peut être traitée maintenant ou plus tard, à la discrétion du Comité.
Je trouve dommage que nous perdions du temps à ce sujet, alors que des témoins ont bien voulu participer à la réunion du Comité aujourd'hui. Nous pourrions peut‑être réserver un peu de temps à la fin de notre rencontre pour débattre de la motion.
Je tiens à ce que les autres membres du Comité sachent que je serai respectueux de leur temps. J'ai une bonne idée du temps que j'ai pris pour mon intervention. Je me bornerai donc à une seule question, aux représentants d'Akwesasne.
Je ne sais pas trop lequel d'entre vous tentera d'y répondre. Dans la lettre de mandat du ministre de la Sécurité publique, ce dernier devait s'engager à « [c]ontinuer à travailler avec les partenaires des Premières Nations afin d'élaborer conjointement un cadre législatif pour les services de police des Premières Nations, et continuer à collaborer avec les Inuits et les Métis en matière de services de police. [Le ministre aura] l'appui de la ministre des Services aux Autochtones et du ministre des Relations Couronne-Autochtones ».
Je sais que votre nation devance considérablement beaucoup de Premières Nations de partout au Canada. Voilà donc pourquoi, peut-être, vous avez une idée de ce à quoi pourrait ressembler ce cadre législatif ou des premières étapes que vous aimeriez voir appliquer pour son élaboration, pour le bien des nations de notre pays.
Visiblement, nous sommes bien disposés à l'égard de l'élaboration en commun d'un cadre législatif, mais, plus particulièrement, dans notre communauté, il faut reconnaître nos compétences et notre autorité. Une frontière entre deux provinces traverse le territoire de notre communauté. D'autres lois délèguent l'autorité législative aux provinces. Notre communauté, selon la partie dans laquelle on peut se trouver, peut être assujettie aux lois de l'Ontario ou à celles du Québec. En matière de police, l'autorité est déléguée aux provinces. Dans une partie de la communauté, ça déterminera la réaction du service de police, une réaction qui sera complètement différente dans l'autre partie de la communauté, parce qu'il y en a une en Ontario et l'autre au Québec.
Les lois doivent donc en tenir particulièrement compte, même à l'extérieur de la question des services de police, pour des communautés comme la nôtre, situées de part et d'autre d'une limite interprovinciale.
J'interrogerai d'abord le service de police et le chef, évidemment, des Premières Nations d'Akwesasne. Diriez-vous que des communautés socio-économiquement stables, prospères, où le taux de chômage est faible, la cohésion des familles et de la communauté bonne et les problèmes de toxicomanie peu nombreux, sont moins vulnérables aux manifestations du crime organisé telles que l'intimidation, la corruption et d'autres de ce genre?
Oui, absolument! Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, beaucoup basculent dans la criminalité transfrontalière pour s'enrichir. Quand les occasions sont moins nombreuses, ils cherchent donc à subvenir à leurs propres besoins par d'autres moyens que le soutien social. Absolument.
Notre communauté a besoin de meilleures chances. Croyez‑moi, sa situation géographique pose problème sur le plan économique, parce que, je le répète, certains secteurs industriels sont réglementés de l'extérieur. L'emplacement influe sur les possibilités qui peuvent être intéressantes.
Le gouvernement fédéral a proposé un plan. Il pourrait en coûter plus d'un milliard de dollars pour racheter leurs armes à feu aux propriétaires légitimes. Quelles possibilités cette somme offrirait-elle aux communautés frontalières, autochtones particulièrement? Que pourrait‑elle faire pour neutraliser efficacement le crime organisé dans vos communautés?
En fin de compte, il nous faut plus d'hommes sur le terrain et plus de technologies et d'équipement pour continuer à en préserver la sécurité.
Ces marchandises — armes à feu, personnes ou drogue —, nous ne les manufacturons pas, nous ne les cultivons pas. Elles ne viennent pas d'ici, mais d'ailleurs. Ça signifie aussi que c'est d'abord du ressort de beaucoup de polices avant d'aboutir dans notre petite, mais également importante, communauté.
La presse, en prétendant que ça passait par ici, a considérablement terni notre réputation, mais, en même temps, la frontière canadienne a 8 800 kilomètres de longueur. Je peux vous assurer que tout ça ne passe pas par ici.
Ça tend la perche pour questionner la police de Winnipeg.
Vos propos sur les marges de profit de la contrebande d'armes à feu illégales, disons des armes de poing sont intéressants. Ces marges ont atteint 300 %. Cette augmentation, compte tenu de la loi de l'offre et de la demande, incitera les éventuels acheteurs à prendre plus de risques et à se montrer plus imaginatifs. Connaissez-vous les principales filières? Comment ces armes sont‑elles introduites? Nous avons appris, mardi, que les trains sont très vulnérables, de même que les ports maritimes.
Comment, d'après vous, ces armes entrent-elles au Canada?
Manifestement, chez nous, à Akwesasne, il n'y a pas de chemin de fer. Ça entre principalement par voie terrestre ou fluviale.
À la question antérieure, j'ai répondu qu'une fois le Saint-Laurent gelé, le trafic augmente, que ce soit celui des armes, des drogues ou des personnes, par motoneige.
Monsieur le président, l'interprétation des propos de M. Neyron ne peut pas se faire. Je crois qu'il ne porte pas de casque d'écoute. Les interprètes nous signalent qu'ils ne peuvent pas interpréter ce qu'il dit.
Monsieur Sabourin, je reviens vous questionner. Vous parliez d'un aspect économique. J'ai l'impression que si nous faisons preuve de plus d'imagination, à la frontière, nous pouvons vraiment intercepter beaucoup d'armes à feu, ce qui, ensuite, fera passer les profits en question de 300 à 1 000 %.
Que pouvons-nous faire pour perturber la loi de l'offre et de la demande qui incite à la contrebande des armes à feu? Que recommanderiez-vous?
Monsieur Lloyd, la réponse devra attendre. Malheureusement, il ne reste plus de temps. Merci.
Chers collègues, il ne reste que deux minutes à écouler dans l'heure. Je demande donc à M. Zuberi, le prochain intervenant, de limiter son temps de parole à deux minutes, après quoi nous accueillerons le deuxième groupe de témoins.
Monsieur Zuberi, vous disposez de ce peu de temps.
Je précise d'abord que je suis à Montréal, sur le territoire historique de la nation des Mohawks.
J'ai une question pour M. Sabourin. Vous avez dit que l'intervention antigang manquait cruellement de ressources. Une seule personne, en fait, travaille dans ce domaine. Croyez-vous que le besoin d'élargir ce domaine dans la police de Winnipeg est criant?
Oui, absolument. Il faut augmenter son effectif. Nos ressources affectées aux écoles ont des rapports très limités avec les membres de gang. Le membre d'un gang qui contacterait l'une de nos ressources dans les écoles serait dirigé vers le responsable de l'intervention antigang. Mais, comme je l'ai dit, une personne, c'est…
Est‑on conscient de l'unicité des activités des Autochtones et des non‑Autochtones sur lesquelles porte cette étude? Est‑ce que vous, localement, vous activez cette conscientisation?
Oui. Une formation est régulièrement donnée aux patrouilleurs, notamment, ainsi qu'à nos unités des armes à feu et antigang. Malheureusement, elle est assez limitée. Ce pourrait être à l'occasion d'une journée de perfectionnement à laquelle nos équipes de patrouilleurs assisteraient de façon régulière, mais la COVID nous a empêchés de nous rassembler de la sorte en grand nombre.
En fin de compte, nous avons effectivement besoin de plus de ressources pour aider certains de ces jeunes à sortir des gangs.
Merci, monsieur Zuberi. C'est exact. Votre temps est écoulé, à la seconde près.
Chers collègues, je vous remercie. C'est ici que se termine la première heure de notre réunion.
Je remercie les témoins. Merci beaucoup pour le temps que vous nous avez généreusement accordé et pour vos idées qui sont le fruit de tant d'années d'expérience. Au nom de tous les membres de notre comité, merci beaucoup de votre apport à cette étude.
Chers collègues, entamons notre deuxième heure. Je vous présente les personnes qui feront des exposés, après quoi vous pourrez les questionner.
Accueillons: M. Mitch Bourbonniere, intervenant pour la fondation Ogijiita Pimatiswin Kinamatwin; le directeur par intérim de la Bear Clan Patrol, M. Kevin Walker; enfin, les représentantes des Native Counselling Services of Alberta, leur directrice générale Mme Marlene Orr et leur coordonnatrice communautaire Mme Nicole Whiskeyjack.
Ils disposeront de cinq minutes pour leur déclaration préliminaire. Après quoi, nous passerons aux questions.
Soyez tous les bienvenus. Merci d'être des nôtres.
J'invite M. Bourbonniere à faire sa déclaration préliminaire. Vous disposez de cinq minutes…
Monsieur le président, si vous permettez, pourriez-vous suspendre les travaux quelques minutes? Il faut laisser le premier groupe de témoins s'en aller, inviter le deuxième, puis faire un contrôle du son.
Je remercie également les témoins qui seront des nôtres au cours de la prochaine heure ou presque. Merci de nous offrir votre sagesse et vos connaissances.
Les témoins ont déjà été présentés. Je demande donc directement à M. Bourbonniere de faire sa déclaration préliminaire, pour laquelle il dispose de cinq minutes.
Merci, monsieur Carr. Je remercie également tous les membres du Comité, dont le travail est important.
Je me nomme Mitch Bourbonniere, de Winnipeg, intervenant dans un programme de sortie d'un gang appelé Ogijiita Pimatiswin Kinamatwin ou OPK Manitoba. Je fais ce travail depuis 35 ans. Je suis également honoré d'être de service avec mon homologue M. Walker, du Bear Clan.
De notre point de vue, le nombre de violences perpétrées par armes à feu à Winnipeg a augmenté. Ceux avec qui je travaille me disent avoir utilisé des armes d'épaule, modifiées ou non, ainsi que des armes à feu artisanales, des copies d'armes de poing et des armes de poing, mais les armes de loin les plus utilisées sont celles d'épaule qui ont déjà servi, soit sous leur forme actuelle, soit modifiées.
Les trafiquants de drogue ont besoin d'armes à feu pour se protéger, intimider, recouvrer des dettes, pour des prises de contrôle hostiles, pour châtier, rembourser, se venger. À Winnipeg, on peut se procurer illégalement une arme à feu à peu près aussi facilement que de la drogue. À ma connaissance, ces armes sont surtout fabriquées aux États-Unis et traversent clandestinement nos deux frontières avec les provinces voisines et la frontière canado-américaine.
Je suis convaincu qu'il faut consacrer argent et ressources à l'application de la loi aux contrebandiers et aux trafiquants d'armes à feu et plus d'argent et de ressources à des groupes comme le Bear Clan et OPK Manitoba, qui aident les membres de gang à changer de vie.
Bonjour. Je m'appelle Kevin Walker et je suis directeur général par intérim de Bear Clan Patrol Inc.
Notre organisation a été formée en 1992 et est depuis passée d'un seul chapitre dans le Nord à quatre chapitres à Winnipeg et à de nombreux autres dans la province et au Canada. Notre mission consiste à assurer une présence visible et constante dans la rue afin de prévenir les conflits grâce à des interventions non violentes, favorisant et en assurant ainsi la sécurité et l'habilitation des femmes, des jeunes, des aînés et des secteurs vulnérables de notre communauté.
Comme bon nombre d'entre vous le savent, Winnipeg compte la plus importante population autochtone urbaine en Amérique du Nord. Elle se concentre au centre-ville, où on enregistre des taux élevés de pauvreté, d'itinérance, de dépendance, de problèmes de santé mentale, d'exploitation et de traumatisme intergénérationnel. Tous ces ingrédients alimentent les problèmes dont nous traiterons aujourd'hui.
Depuis sa formation en 1992, Bear Clan Patrol Inc. maintient son mandat de base à titre d'organisation communautaire, tout en évoluant pour combler les besoins toujours croissants de la communauté. Parmi les initiatives qui méritent d'être soulignées figurent le programme de sécurité alimentaire, la patrouille jeunesse, les personnes disparues et notre collaboration avec le service de police de Winnipeg, et notre relation de travail avec l'armée canadienne en cas de catastrophes naturelles et d'opérations de recherche et de sauvetage.
Dans le cadre de notre programme de sécurité alimentaire, 400 paniers ont été assemblés à la main et livrés à des aînés, des familles dans le besoin, des membres éprouvant des problèmes de mobilité et certaines des personnes les plus vulnérables de notre communauté. Malheureusement, sans financement de base, nous ne pouvons pas continuer à ce rythme. Notre centre alimentaire sert toutefois de 300 à 500 personnes par jour à la porte grâce à des dons d'alliés communautaires comme Costco, Red River Co‑Op et Sobeys. La sécurité alimentaire peut favoriser la cohésion familiale et améliorer la santé physique et mentale, ce qui se traduit par une communauté plus saine.
Nous avons instauré une patrouille jeunesse assortie de programmes culturels et d'activités allant de la cueillette d'herbes médicinales au perlage, à la peinture et à d'autres activités menées sur les terres. Ce programme constituera l'avenir de notre organisation. Nous espérons inspirer les jeunes des quatre coins de la ville. C'est une initiative que nous espérons poursuivre avec un financement adéquat.
À Winnipeg, le nombre de personnes disparues augmente continuellement, et nous avons ressenti le besoin de nous impliquer. Nous connaissons un grand succès dans le cadre de cette initiative et nous avons noué une solide relation de travail avec le service de police de Winnipeg, avec lequel nous échangeons de l'information pour mieux servir les familles de personnes disparues.
Notre plus récente initiative consiste à collaborer avec les Forces canadiennes, particulièrement avec la 17e Escadre, qui participe à nos patrouilles. Nous cherchons des moyens pour que le Bear Clan apporte de l'aide en cas de catastrophe naturelle ou lors de missions de recherche et de sauvetage. Avec une formation et des protocoles adéquats, nous pensons pouvoir être un atout et un lien dans les communautés du Nord.
Le Bear Clan connaît du succès dans nos communautés, car il s'agit d'une organisation non violente et non menaçante qui a gagné la confiance de la communauté en agissant avec constance et en suscitant le respect en faisant preuve de respect.
Chez Bear Clan Patrol Inc., nous nous efforçons d'habiliter les femmes et les jeunes. Toutes les patrouilles sont dirigées par des femmes. Nous avons fièrement mis en place une patrouille et des programmes jeunesse. Au cours des dernières années, le nombre de crimes violents a augmenté dans la ville, particulièrement dans le Nord. Le Bear Clan fait ce que doit en contribuant au contrôle des armes à feu. Chaque fois que nous pouvons empêcher que des armes à feu soient utilisées de manière violente, nous nous réjouissons. À titre d'exemple, preuve de la confiance dont nous jouissons au sein de la communauté, une arme de poing entièrement chargée et des munitions nous ont été remises; nous avons immédiatement communiqué avec le service de police de Winnipeg pour qu'il en prenne possession et en dispose avec un grand nombre d'autres armes improvisées.
En ce qui concerne le trafic d'armes à feu et notre relation avec ce fléau, nous observons une augmentation constante de l'utilisation des armes à feu dans la ville et dans de nombreuses autres communautés de la province et du pays. Les armes à feu semblent plus accessibles pour les personnes aux tendances criminelles. Nous sommes témoins des tragédies et de la tristesse que les crimes commis avec des armes à feu par les gangs de rues provoquent chez les personnes touchées par la violence liée aux armes à feu et aux gangs. Le Bear Clan a participé à presque toutes les veillées organisées pour les personnes touchées par cette violence. C'est avec ces tragédies à l'esprit que nous avons instauré un programme de patrouille jeunesse. Avec un financement de base adéquat, nous pourrons peut-être combler le besoin d'acceptation des jeunes pour qu'ils aient le sentiment de faire partie d'une famille et qu'ils aient la possibilité de croître et de prospérer dans un environnement sûr pour, un jour, devenir la prochaine génération de dirigeants.
Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir offert l'occasion de parler au nom de Bear Clan Patrol. Je voudrais dire un gros merci à Mitch Bourbonniere, qui est toujours dans le voisinage et qui est un frère pour nous, le Bear Clan. Nous sommes vraiment heureux qu'il soit là avec nous.
Je remercie toutes les personnes qui participent à cette discussion.
Bonjour, mesdames et messieurs. Je salue également mes collègues autochtones. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
Je m'appelle Marlene Orr et je vous parle depuis Amiskwaciy Waskahikan, le nom cri d'Edmonton, en Alberta, sur le territoire visé par le Traité no 6.
Je témoigne pour vous faire part de ce que j'ai appris au sujet des gangs au cours des nombreuses années que j'ai passées à travailler avec des délinquants autochtones dans les systèmes correctionnels fédéral et provinciaux, à œuvrer dans les communautés autochtones avec des personnes qui tentent de quitter les gangs et à composer avec des comportements à problème, rencontrant des membres de gang incarcérés ou aidant des membres de gang à quitter ce genre de vie. Ce sont là quelques exemples du travail que j'ai accompli auprès de membres de gang autochtones.
J'ai été invitée à faire partie du réseau de lutte contre les gangs et les armes à feu de l'Alberta afin de servir de lien avec le gouvernement, la police et les professionnels. La première question que j'ai posée, c'est pourquoi la police d'Edmonton et la GRC ne participaient pas à cette initiative. Personne n'a pu répondre à cette question.
Quand j'ai rencontré un membre de l'équipe de direction du service de police d'Edmonton et lui ai posé cette question, je me suis fait répondre que la police était lasse de l'inefficacité des réseaux comme celui‑là, car ils n'avaient pas réussi à apporter de changement, et que ces initiatives démarrent une année par‑ci par‑là, mais ne mènent à rien. Comment un réseau de lutte contre les gangs et les armes à feu peut‑il fonctionner sans la participation de la police? J'éprouve le plus grand respect pour cette personne, car elle a énormément travaillé pour comprendre la criminalité chez les Autochtones et les activités des gangs, et a réalisé des recherches pour établir une corrélation entre le traumatisme historique et la victimisation et la criminalité.
Comment le traumatisme historique alimente‑t‑il l'activité des gangs? La manière dont les survivants des pensionnats autochtones ont élevé leurs enfants est le résultat direct de la manière dont ils ont été conditionnés par la violence et la maltraitance. Avant la création des pensionnats autochtones, l'éducation des enfants faisait intervenir de nombreux membres de la communauté, qui leur enseignaient les valeurs enchâssées dans les lois naturelles, soit celles de bonté, de respect, d'humilité, de partage et d'autodétermination. Les pensionnats autochtones ont remplacé les enseignements de la communauté par le contrôle, la violence, la maltraitance, la honte identitaire et la perte de liens avec la famille, la communauté et la nation. Les survivants de ces pensionnats ont élevé leurs enfants selon la seule méthode qu'on leur avait inculquée: avec la violence et la maltraitance.
Cette violence intergénérationnelle, associée à d'autres répercussions coloniales comme la pauvreté de la communauté, la perte d'identité culturelle, le racisme criant et le manque d'occasions d'éducation et d'emploi, a rendu les jeunes Autochtones démunis et sans espoir. L'intervention de la protection de la jeunesse, qui sépare les familles, punit les enfants et les parents pour des comportements découlant de traumatismes historiques et continue de traumatiser nos jeunes, mène ces derniers directement des familles d'accueil au système carcéral.
La normalisation de la violence résultant de comportements appris, la pauvreté, le blanchiment de l'histoire des Autochtones, le racisme systémique et les traumatismes rendent les jeunes déconnectés et oppressés. Les gangs tirent parti de ces faiblesses et exploitent les comportements causés par les traumatismes, comme l'alcoolisme et la toxicomanie, et le besoin profond d'identité culturelle et d'appartenance. Ils utilisent des concepts d'identité historique, comme celui des guerriers, et les pervertissent à leur avantage.
Dans les Prairies, les gangs autochtones contrôlent les établissements. Même les puissants membres de gang ayant des liens internationaux savent que leur statut ne les protège pas dans les établissements fédéraux du Canada. Il est courant que l'on paie les gangs autochtones en échange de leur protection. La surreprésentation des Autochtones dans le système de justice et les établissements correctionnels fait en sorte qu'un pouvoir considérable est centralisé entre les mains des gangs autochtones présents dans les établissements. De par leur nombre même, les membres de gang autochtones jouissent d'un pouvoir qui rime avec force dans les établissements. Ainsi, en maintenant des taux élevés d'incarcération des Autochtones, nous contribuons aux problèmes de gang au pays.
Les jeunes délinquants autochtones purgeant leur première peine dans des établissements fédéraux sont vulnérables à la pression. On les cible pour les recruter dans des gangs et on leur apprend à devenir plus violents et plus dangereux. Ils apprennent à élargir leurs compétences criminelles pendant leur incarcération.
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Même si le placement pénitentiaire direct dans des pavillons de ressourcement autochtones dirigés par des communautés autochtones est possible, les évaluations effectuées lors de la première détention provisoire rendent cette solution impossible. Ainsi, l'occasion de corriger les répercussions du traumatisme historique, de renforcer la fierté dans l'identité culturelle et de remplacer les versions des valeurs autochtones perverties par les membres de gang par de véritables enseignements...
Ce qui me préoccupe, c'est que les fonds supplémentaires qui seront investis pour soigner le traumatisme historique au Canada iront à des organisations non autochtones qui ne comprennent pas nos communautés et nos traumatismes, et qui n'ont aucun lien avec les personnes que nous servons.
Ce sont les groupes autochtones qui doivent recevoir les fonds qui contribueront à la guérison des Autochtones.
Je remercie tous les vaillants témoins du travail extraordinaire qu'ils accomplissent pour s'adapter aux besoins de leur communauté et combler les lacunes des établissements et des programmes gouvernementaux actuels. J'ai pour votre travail la plus grande admiration. Je vous remercie donc de prendre le temps de témoigner aujourd'hui devant nous dans le cadre de notre étude.
Monsieur Walker, j'ai eu le plaisir de vous rencontrer avec le Bear Clan lorsque j'étais députée et représentante de Winnipeg. Comme je vous l'ai déjà dit, une des premières choses que j'ai faites lorsque j'ai été élue a été d'aller marcher avec le Bear Clan. J'ai choisi un jour comme aujourd'hui à Winnipeg pour aller marcher au grand froid dans la communauté. J'admire donc tout ce que vous faites quotidiennement sur le terrain et vous remercie de votre travail.
Je trouve le modèle du Bear Clan fort intéressant et je peux comprendre qu'il essaime au pays. Ce sont des femmes qui le dirigent. Les matriarches autochtones de Winnipeg s'unissent pour créer ce programme phénoménal sur le terrain. Dans votre exposé, vous avez même indiqué qu'un membre de votre communauté vous avait remis une arme de poing chargée. Grâce au lien de confiance que vous avez établi avec la communauté que vous représentez et soutenez, cette arme de poing vous a été remise et vous avez pu la donner à la police.
Je voudrais seulement que vous nous en disiez plus sur ce que vous observez sur le terrain et sur ce qu'il faut faire, à votre avis, pour arrêter l'augmentation de la violence à Winnipeg. Bien entendu, vous savez que les gangs séduisent de nombreux jeunes. Comment pouvons-nous empêcher cela de survenir?
Je sais que pour notre part, nous tentons d'instaurer un programme de patrouille jeunesse pour pouvoir travailler avec les jeunes. Je pense que l'essentiel pour tout, c'est de mobiliser les jeunes. Dans ma jeunesse, les sports ont exercé sur moi une grande influence et m'ont évité des problèmes en me tenant occupé. Voilà où le bât blesse aujourd'hui: les jeunes ne sortent pas pour s'occuper et s'adonner aux sports. Il n'est pas nécessaire que ce soit du sport, mais ils doivent trouver une activité qui les passionne pour réellement croître et prospérer. C'est essentiel, à nos yeux.
Selon ce que j'entends de la part d'organisateurs communautaires, c'est que les programmes du gouvernement envoient peut-être des travailleurs sociaux et d'autres représentants du gouvernement qui sont fort instruits et qui ont étudié la meilleure manière d'aborder ces situations, mais il semble parfois que, du fait qu'ils ne viennent pas de la communauté, les gens ne leur font pas confiance et qu'il leur est difficile de pénétrer la communauté pour ramener les jeunes sur le droit chemin.
Pouvez-vous m'expliquer le manque que comble le Bear Clan et comment vous pouvez nouer des liens humains, parler directement aux gens et abattre leurs défenses?
En ce qui me concerne, je marche cinq soirs par semaine dans le Nord de la ville. Je suis sur le terrain avec mes gens, et il importe pour nous d'être constants dans nos démarches, d'être là pour parler avec les membres de la communauté et les rencontrer à leur niveau, sans chercher à changer ce qu'ils sont. Nous voulons simplement les rencontrer à leur niveau, combler leurs besoins et leur fournir les ressources dont ils ont besoin.
À l'heure actuelle, avec la COVID et tout ce qui se passe, les ressources se font rares à Winnipeg. Tout le monde fait de son mieux et nous tentons également de changer les choses.
De votre point de vue et dans la communauté à laquelle vous vous adressez, observez-vous une augmentation de l'utilisation des armes, comme les armes à feu? En voyez-vous plus dans les rues? Voyez-vous plus de drogues également, sachant que les décès qui leur sont attribués augmentent à Winnipeg.
C'est un phénomène que nous voyons beaucoup, avec l'augmentation des armes improvisées et de l'utilisation des armes de poing. Les crimes violents sont certainement en augmentation.
Tout découle de la pauvreté, du traumatisme et de facteurs semblables. Si nous pouvons commencer par des programmes pour prendre soin des gens, peut-être pourrons-nous nous attaquer à certains problèmes de criminalité.
Il a été beaucoup question des diverses interdictions des armes à feu au pays. Avez-vous l'impression que les criminels qui attirent les jeunes dans leurs gangs, les criminels que vous rencontrez quand vous arpentez les rues et qui, vous le savez, influencent les jeunes remettraient leurs armes à la police si un gouvernement les interdisait?
Je ne le pense pas. Selon moi, les personnes qui utilisent les armes à des fins criminelles ne sont pas à la veille de s'en départir.
Nous avons été chanceux d'avoir établi la confiance une fois, quand nous avons réussi à retirer une arme à feu de la rue, mais ce n'est pas comme... Nous ne retirons pas les armes de la rue. Les gens ne nous en remettent pas du tout.
Que pensez-vous de l'influence du trafic de stupéfiants? Qu'est‑ce que ce problème fait à nos jeunes? Nous savons que des drogues traversent la frontière et qu'une bonne partie des drogues dures ne sont pas produites localement; elles entrent au pays grâce à la contrebande et au trafic. Ce phénomène a‑t‑il une influence également?
De toutes les drogues dures consommées dans la ville, les méthamphétamines sont en train de devenir un véritable problème. Juste pour vous donner un exemple, depuis septembre, nous avons ramassé 11 000 seringues. Cela vous donne un aperçu de ce qui se passe dans le Nord et dans les alentours.
Oui, je me rappelle avoir marché avec les gens de Bear Clan pour ramasser de nombreuses seringues de méthamphétamine usagées. Nous en avons trouvé plein dans un banc de neige légère. Nous nous empressions tous de les ramasser pour nous en débarrasser de manière sécuritaire. Il faisait nuit, et j'ai vu une maison à deux étages. Nous étions dans la cour arrière à ramasser ces seringues, et il y avait trois petits enfants. Leurs têtes sortaient de la fenêtre pour regarder toutes les lampes de poche et la commotion. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser à quel point ce banc de neige légère rempli de seringues aurait été invitant pour ces trois jeunes enfants qui nous regardaient.
Je vous remercie sincèrement de tout ce que vous faites. Je vous prie de continuer et de maintenir la pression sur nous pour que nous vous donnions le soutien nécessaire à l'accomplissement de votre bon travail.
Madame Whiskeyjack, nous n'avons pas eu l'occasion de vous entendre. Je sais que votre histoire est très intéressante. Si nous n'arrivons pas à obtenir l'interprétation dans nos casques d'écoute, vous pourriez peut-être nous faire part par écrit de ce que vous avez vécu et des recommandations que vous pourriez avoir.
Je me demande si nous pouvons prendre quelques minutes pour prendre connaissance de votre expérience et de ce que nous devrions faire selon vous au gouvernement fédéral.
Bonjour. Je m'appelle Nicole Whiskeyjack. Je vis à Pendleton, dans l'État américain de l'Oregon. Je m'adresse à vous après avoir vécu tout ce qui s'est dit aujourd'hui.
J'ai vécu de nombreux traumatismes en grandissant. Ma mère est décédée quand j'avais 14 ans. Mon père est décédé quand j'avais 16 ans. J'ai trois jeunes frères que j'ai dû élever pour en faire ce qu'ils sont aujourd'hui.
J'ai été essentiellement manipulée par un membre de gang notoire quand j'avais 18 ans; je suis tombée enceinte; j'ai eu l'enfant; je me suis retrouvée face à de nombreuses choses que je n'avais pas connues dans ma vie, comme la drogue, les gangs, la violence, les fusillades, toutes les choses dont vous discutez ici.
À l'âge de 18 ans — mes parents n'étaient plus là —, je n'avais aucun encadrement ni aucune expérience de la vie adulte, alors que je devais essentiellement être un parent pour mes frères plus jeunes. J'ai vécu tout ce qui s'est dit aujourd'hui. Pendant cette période, j'ai commis de nombreuses infractions, je me suis retrouvée en prison une première fois et j'ai ensuite reçu une peine d'emprisonnement de cinq ans, mais cela ne me définit pas en tant que personne aujourd'hui.
C'est un sujet très difficile pour moi, car personne ne voit ce que les gens vivent. Ils racontent leur histoire à des personnes qui veulent écouter, et je suis donc très reconnaissante de tout le travail accompli par tout le monde, envers toutes les personnes qui écoutent, car la plupart du temps, les plaintes des enfants autochtones et leurs demandes d'aide tombent dans l'oreille de sourds, et personne n'écoute.
On finit toujours par se demander pourquoi les enfants autochtones agissent ainsi. Pourquoi se retrouvent-ils dans cette situation? Quelle est l'explication? Mais tout remonte — je fais écho aux propos de Mme Orr — aux pensionnats. De nombreux enfants autochtones ne font pas confiance aux services de police dans leur communauté parce qu'ils savent qu'ils sont venus enlever leurs parents pour les conduire dans un pensionnat. On ne les a jamais revus. C'est à cause de tout cela.
Comment peut‑on établir un climat de confiance chez les enfants autochtones, dans les communautés autochtones, lorsque c'est le genre de relation qui persiste depuis la rafle des années 1960, depuis les pensionnats? Ces enfants ont tous vécu de nombreux traumatismes au cours de leur vie, des traumatismes hérités, et il n'y a jamais personne pour les aider à y faire face, pour leur donner les outils nécessaires.
Il n'y a personne pour tisser les liens nécessaires, que ce soit à l'école, dans le système de santé, au gouvernement fédéral, auprès des travailleurs sociaux ou dans les services de garde. La solution consiste toujours à envoyer les enfants ailleurs. Mettons-les en famille d'accueil. Changeons leurs vêtements et coupons leurs cheveux. Apprenons-leur toutes les choses qu'ils ne savent pas, qu'ils n'ont jamais apprises en grandissant. Privons-les de leur identité culturelle. Ces enfants subissent tout cela. Ils perdent alors leur identité et oublient d'où ils viennent. Comment vont-ils réussir à subvenir à leurs besoins?
C'est à ce moment‑là que les gangs les approchent, les recrutent et tissent des liens avec eux, leur donnent un sentiment de sécurité, et les armes à feu entrent en jeu: « Nous allons te donner une arme pour te protéger. » Ils se sentent alors en sécurité. Ils tissent des liens et ont un moyen de se protéger. La plupart du temps, c'est ce que les enfants autochtones veulent, c'est‑à‑dire des liens, une protection et de la confiance, une personne en qui ils peuvent avoir confiance et avec qui ils peuvent bâtir une relation.
Madame Whiskeyjack, je regrette de devoir vous interrompre, mais il ne me reste qu'une minute et je voulais vous poser une question sur l'incarcération, car vous avez dit que vous avez fait de la prison.
J'ai demandé à la Bibliothèque du Parlement de faire une étude étonnante sur le programme mère-enfant. En 2011, 48 % des enfants en famille d'accueil avaient une mère en prison, ce qui signifie que le lien avec les enfants était rompu.
À quel point est‑il important de se pencher sur le nombre de femmes autochtones qui se retrouvent en prison, les enfants en famille d'accueil et le lien entre les deux ainsi que sur le virage vers les gangs, les armes à feu, la drogue et tout le reste?
Comme je l'ai dit, j'avais 20 ans quand je suis allée en prison. À vrai dire, j'avais 21 ans, car j'étais au centre de détention provisoire d'Edmonton la première fois que j'ai été incarcérée. C'est fou, car c'était ma première infraction à vie. Je n'avais jamais été impliquée dans les gangs, dans le trafic de drogues, rien dans le genre. Après la première infraction de ma vie, je me suis retrouvée au centre de détention provisoire pour toute une série d'accusations, toutes les accusations qui découlent de l'implication dans les gangs, des gangs notoires, et qui sont liées aux armes à feu. Je n'ai finalement pas pu être relâchée sous promesse de comparaître devant un juge de paix.
Je me suis retrouvée au centre de détention provisoire d'Edmonton. J'étais enceinte de cinq mois de ma première fille, qui a maintenant 15 ans.
C'est une histoire fascinante qui mérite beaucoup plus de temps, que nous n'avons malheureusement pas. J'espère que nous aurons d'autres occasions de vous entendre, madame Whiskeyjack, car ces expériences de vie sont absolument essentielles.
Merci beaucoup de nous faire part de la vôtre, et je suis désolé que nous n'ayons pas plus de temps.
Madame Michaud, vous avez six minutes pendant ce tour de questions. La parole est à vous.
Je vous remercie, madame Whiskeyjack, de votre témoignage, qui est vraiment très touchant.
J'ai plus d'une question à poser et nous accueillons plusieurs témoins intéressants, mais je vais vous laisser le temps de continuer ce que vous étiez en train de dire. Prenez le temps qu'il vous faut.
Lors de mon incarcération, la première chose qui s'est produite... J'étais enceinte de cinq mois de ma fille, et j'ai été condamnée à une peine d'emprisonnement. Alors que j'étais enceinte et incarcérée, le but des services de police et de tout le monde autour de moi était d'appréhender mon bébé tout de suite après sa naissance. Mais j'ai agi intelligemment par rapport à tout cela et j'ai tout mis en place pour que ma fille, après sa naissance, se retrouve à la maison avec ma famille, et personne d'autre.
Elle vit maintenant avec moi, de toute évidence, car je l'ai récupérée à ma sortie du pénitencier. Elle était avec les membres de ma famille qui s'en sont occupés et qui sont venus me chercher. Juste pour cela... Il n'y avait aucun système en place pour qu'elle soit avec des membres de sa famille. C'était immédiatement les services à l'enfance: « Emmenons‑la ailleurs; prenons‑la. Elle est la famille d'une membre de gang, le bébé d'une membre de gang; prenons‑la et emmenons‑la ailleurs. »
Il n'y avait aucun système en place. Il n'y avait aucune ressource pour que quelqu'un vienne me voir pendant mon incarcération afin de me demander ce que je voulais pour mon enfant à naître, à quel endroit je voulais qu'elle se retrouve. Il n'y avait rien dans le genre. C'est en faisant moi-même preuve de discernement et grâce à mon intuition que j'ai refusé de la confier aux services à l'enfance; je ne voulais pas qu'elle se retrouve dans une famille d'accueil; je ne voulais pas la dépouiller de son identité culturelle.
C'est ce que j'ai fait. Je me suis organisée pour que mon jeune frère l'emmène à la maison en sortant de l'hôpital où elle est née, et c'est ce qui s'est fait.
Vous aviez l'impression de ne pas avoir accès aux ressources dont vous aviez besoin, de ne pas être bien accompagnée. Aujourd'hui, voyez-vous une amélioration? Il y a ici des témoins qui représentent des organismes qui aident vraiment la communauté. Trouvez-vous que les choses ont changé? Pensez-vous que le gouvernement doit investir davantage dans ce domaine?
L'implication des gangs dans le trafic d'armes à feu est vaste, mais, à mon avis, il ne s'agit pas d'investir uniquement dans les services de police. Il est possible de faire de la prévention et de l'accompagnement dans les communautés. J'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet.
Je pense que le plus important, c'est avoir des gens comme moi, qui... Quand je suis sortie de prison, j'ai tout changé dans ma vie. J'ai coupé les liens avec toutes ces personnes. Comme je l'ai dit, ma fille a maintenant 15 ans. Nous sommes déménagées aux États-Unis il y a cinq ans. Elle n'a jamais eu de contact direct avec son père biologique. C'est désolant, mais il est probablement encore en prison quelque part, à vivre la même vieille vie de gang, à distribuer des armes à feu et de la drogue et à commettre des actes violents. Je vous garantis que rien n'a changé, car c'est ce qu'il a fait toute sa vie. Je ne lui ai pas parlé depuis 20 ans.
Je vous dirais de demander à des gens comme moi, qui ont vécu ces expériences, qui ont changé leur vie, de se faire entendre et de dire ce qu'il en est. Laissez des personnes comme moi aider à faire la lumière sur les vrais enjeux. Je sais que lorsque je parle aux gens, et que je leur dis...
Ma fille fréquente l'école Pendleton High. Elle est une étudiante douée. Elle a reçu un prix hier pour avoir été première de classe au premier semestre en leadership avancé. Je vous garantis que si elle faisait une présentation à l'école et disait qu'elle est née lorsque sa mère était incarcérée, personne ne la croirait. On penserait qu'elle ment.
Les gens comme moi ont le vécu et savent ce que c'est. Nous sommes passés par ces systèmes. Je pense que si on parlait de ces systèmes en recourant aux expériences vécues, il y aurait plus de lumière au bout du tunnel par rapport à ce qui doit être fait, au travail à accomplir. Quand on est incarcéré, on est essentiellement oublié. C'est une chambre et une pension gratuites. Personne ne se préoccupe de vous. Personne n'a besoin de s'en faire pour vous, ou on pense ne pas avoir à s'en faire, car la personne est incarcérée. C'est vraiment le gouvernement fédéral qui met de l'argent là‑dedans, pour nourrir ces personnes, les vêtir et leur donner un endroit où dormir.
Souvent, pour certaines personnes qui vivent dans la rue, qui sont dans ce genre de situation, c'est la raison pour laquelle ils se retrouvent dans les gangs, la violence et la drogue. Bien souvent, c'est une porte de sortie sécuritaire. Ils se disent que s'ils commettent un crime et se retrouvent en prison, ils auront un endroit où dormir, où manger, qu'ils n'auront pas à s'en faire pour cela. Certaines personnes font ces choses pour pouvoir enfin se concentrer sur elles-mêmes et obtenir l'aide et les ressources dont elles ont besoin. C'est parfois un moyen pour eux d'arrêter de consommer de la drogue.
Je vais maintenant passer au ministre... à M. MacGregor. Le « ministre » MacGregor... Eh bien, on ne sait jamais. Nous sommes dans un domaine très imprévisible. Mais ce matin, vous êtes M. MacGregor, et vous avez six minutes pendant cette série d'interventions pour poser vos questions ou formuler vos observations.
Très rapidement, au sujet de la motion pour laquelle j'ai donné un préavis au cours de la première heure, j'ai cru entendre que des membres du Comité souhaitent en discuter. Je crois que c'est un sujet très pertinent en ce qui a trait au fonctionnement du modèle de GoFundMe et à l'anonymat des donateurs, surtout lorsqu'ils sont à l'étranger.
Je me demande juste si nous avons le consentement unanime du Comité pour peut-être réserver cinq minutes à la fin de la réunion pour discuter de la motion et la mettre aux voix. Si le Comité est d'accord, je suis disposé à céder le reste de mon temps pour nous permettre de le faire. Je ne veux pas en discuter maintenant. J'espère juste pouvoir obtenir le consentement unanime pour avoir cinq minutes à la fin de la réunion afin de mettre aux voix la motion.
Nous pouvons en discuter pendant cinq minutes à la fin de la réunion. C'est dans quelques minutes seulement, car il sera 13 heures dans environ 15 minutes.
Monsieur MacGregor, vous avez cédé du temps, mais vous ne l'avez pas tout utilisé.
Nous avons maintenant deux ou trois décisions à prendre concernant notre utilisation des 10 dernières minutes. Nous avons une autre série de questions. Nous devrions peut-être commencer en suivant l'ordre et demander aux membres de ne prendre que la moitié de leur temps pour que nous puissions entendre le plus de personnes possible.
Monsieur Van Popta, vous êtes le premier sur la liste. Pouvez-vous vous contenter de deux minutes et demie? C'est ce que nous allons voir. Vous avez la parole.
Oui, je peux me contenter de deux minutes et demie. Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins.
J'ai une question pour M. Kevin Walker, mais M. Bourbonniere peut peut-être intervenir aussi. Vous nous avez dit que la population autochtone est très grande à Winnipeg. Je ne sais pas vraiment à quoi m'en tenir, et vous pourriez donc peut-être nous le dire. Dans la même veine, des services de police autochtones auraient-ils la moindre utilité selon vous dans un milieu urbain comme Winnipeg?
Je vais laisser mon collègue, M. Mitch Bourbonniere, en parler. Il n'a pas eu l'occasion de prendre la parole, et j'aimerais donc l'entendre là‑dessus.
Les personnes qui déclarent leur statut autochtone représentent entre 15 et 25 % des habitants de Winnipeg. Comme l'a mentionné M. Walker, au centre-ville et au nord de la ville, c'est beaucoup plus.
Nous allons toujours voir d'un bon œil un maintien de la paix et de la sécurité assuré par des Autochtones dans notre collectivité, et c'est ce que fait déjà Bear Clan. Pour ce qui est des services dirigés par des femmes, Mama Bear Clan à North Point Douglas est également un modèle et une organisation sœur de l'organisation de M. Walker. C'est également ce qui se fait.
Nous avons beaucoup entendu parler des services de police autochtones et de leur utilité, mais qu'en est‑il dans un milieu urbain? Accorde‑t‑on assez de ressources à cela?
Je pense que ce travail se fait. Le programme de M. Walker et Mama Bear Clan le font. Ce ne sont pas des services de police, mais ce sont des services de maintien de la paix dirigés par la communauté et par des femmes. Nous aussi, nous avons fait disparaître des armes à feu de la rue au moyen de notre programme, OPK Manitoba. Avec du soutien supplémentaire, nous pourrions continuer à faire ce genre de travail. Les services de police pourraient alors affecter une moins grande partie de leur budget à la santé mentale, aux vérifications de l'état de santé, aux personnes disparues et aux affaires non criminelles, et en affecter une plus grande partie à la contrebande et au trafic d'armes à feu.
En un mot, je recommande de confier des tâches effectuées par les services de police à des organisations communautaires comme Mama Bear Clan, OPK et Bear Clan.
Je suis prêt. Je vous remercie, monsieur le président.
Madame Whiskeyjack, je pense que votre témoignage exceptionnel nous a tous touchés. Vous avez complètement transformé votre vie. Je crois que vous en avez beaucoup à nous apprendre. En tenant compte de ce que vous avez entendu aujourd'hui, pouvez-vous nous dire ce qu'il faut faire en priorité, d'après vous, pour créer les conditions nécessaires pour permettre aux jeunes de quitter le monde des gangs? Selon vous, faut‑il impérativement débarrasser les rues des armes utilisées par les gangs?
Selon moi, ce qu'il faut faire en priorité, c'est apprendre aux jeunes à réussir, peu importe leur éducation. Beaucoup des enfants auprès desquels j'interviens dans le cadre du programme pour lequel je travaille aujourd'hui... Je suis la coordonnatrice communautaire du programme LAUNCH, un projet autochtone qui vise à coordonner les actions en vue de répondre aux besoins en santé non comblés des enfants. C'est le programme pour lequel je travaille. Dans de nombreux cas, la situation est exactement la même que celle que j'ai vécue avec mes frères. Je dirige donc toujours les familles auprès desquelles j'interviens vers les outils et les ressources qui peuvent leur servir à obtenir de l'aide. La plupart du temps, je deviens leur défenseure et je dois leur tenir la main.
Souvent, comme Mme Orr l'a souligné, les enfants ne reçoivent pas les enseignements, l'amour et le soutien dont ils ont besoin. Avoir quelqu'un pour les défendre et pour parler en leur nom; se sentir en sécurité; savoir que quelqu'un a des obligations envers eux et que cette personne devra répondre à toutes leurs attentes — tout cela est nouveau pour eux et leur fait le plus grand bien.
La plupart du temps, ce sont ces enfants que les gangs attirent dans leurs rangs, des enfants placés en famille d'accueil qui ne reçoivent pas l'amour, les enseignements, le respect ou l'identité culturelle auxquels ils s'attendent. C'est inculqué aux enfants autochtones. Ils l'apprennent dès la naissance. Ce n'est pas quelque chose qu'ils reçoivent; ce n'est pas un avantage dont ils bénéficient.
Ma famille est une famille de pow-wow. Nous voyageons aux quatre coins du Canada, des États-Unis et ailleurs pour participer à des pow-wow et pour chanter. Mon mari est un chanteur bien connu qui produit des albums de musique de pow-wow et de danse en rond. L'identité culturelle, c'est une question difficile pour eux, qui les a amenés à de nombreux endroits.
Je vais adresser aux autres témoins une question semblable à celle que j'ai posée tout à l'heure à Mme Whiskeyjack.
Monsieur Bourbonniere, d'abord, j'aimerais que vous nous parliez du financement nécessaire pour contrer le trafic illégal des armes et la criminalité liée aux gangs de rue, notamment. Je crois que l'on peut investir davantage dans les services de police et que les organisations peuvent communiquer davantage entre elles, mais je pense qu'il faut aussi considérer la demande. Il faut tenter de comprendre pourquoi les gens, en général les jeunes, veulent se procurer des armes à feu. Nous devons nous questionner là-dessus.
Comment peut-on faire en sorte que la demande soit moins élevée? Parle-t-on ici d'action communautaire, d'action sociale, ou encore de prévention? Qu'en pensez-vous?
En ce qui concerne l'argent et les ressources, je pense qu'il y a deux volets. D'un côté, les services de police doivent recevoir le soutien nécessaire pour réprimer la contrebande et diminuer le nombre d'armes qui entrent dans nos territoires. De l'autre côté, nous avons besoin d'autant, voire de plus de ressources pour faire le travail dont parle Mme Whiskeyjack. Nous nous efforçons d'accomplir ce travail. C'est l'objectif des programmes comme OPK. M. Walker dirige un programme Bear Clan destiné aux jeunes. Ces jeunes‑là ne deviennent pas membres de gangs, ou plutôt ils deviennent membres de bons gangs, comme le sien et le nôtre. Nous avons besoin de beaucoup plus de ressources destinées aux jeunes pour réussir à faire ce travail.
Croyez-vous qu'il serait avantageux que les organisations comme la vôtre soient davantage financées? Considérez-vous avoir en ce moment les outils et les ressources nécessaires pour bien faire votre travail et vous assurer que le plus grand nombre possible de jeunes intègrent « le bon gang », comme le formulait plus tôt M. Bourbonniere?
Monsieur Walker, Mme Michaud vous demande si vous avez besoin de davantage de ressources pour accomplir votre travail important et transformer la vie des jeunes.
Certainement. Nous avons lancé un programme jeunesse qui incorpore des concepts et des enseignements fondés sur le territoire. D'après moi, ce genre de programme est essentiel pour mobiliser les jeunes et les empêcher de devenir membres de gangs, par exemple.
Je suis désolé que nous manquions de temps, mais malheureusement, nous avons un horaire à respecter.
Passons maintenant à M. MacGregor. M. MacGregor a cédé une partie de son temps de parole durant la période de questions pour que nous puissions traiter sa motion.
Je remercie les témoins de nous avoir si généreusement consacré du temps. Je suis sûr que nous aurions pu poursuivre la discussion avec chacun d'eux pendant bien longtemps, mais malheureusement, nous ne pouvons nous offrir ce luxe.
Mesdames et messieurs, au nom du Comité, je vous remercie chaleureusement pour votre sagesse, vos suggestions et votre dévouement.
Merci à mes collègues d'avoir donné leur consentement unanime.
Vous avez tous reçu une copie de la motion. Je n'ai pas besoin de la relire pour la consigner au compte rendu. Tout ce que je vais dire, c'est que je la dépose officiellement et que j'espère que nous pourrons la mettre aux voix rapidement.
Je propose de modifier la motion de M. MacGregor par adjonction du mot « CANAFE » après « GoFundMe ». La phrase deviendrait, si le Comité est d'accord: « Que le Comité invite dès que possible des représentants de GoFundMe et du CANAFE à comparaître ».
Je peux répondre rapidement, monsieur le président.
Nous pourrons certainement tenir une réunion d'organisation pour déterminer quand la réunion aura lieu. Je veux simplement ajouter le dossier à la liste des travaux du Comité.
L'amendement est recevable. Le débat porte à nouveau sur la motion. Le premier amendement a été mis aux voix et il a été adopté à l'unanimité. Nous avons donc repris l'examen de la motion principale. Nous avons commencé le débat, et M. McKinnon a proposé un nouvel amendement.
En revanche, je n'ai pas eu le temps de débattre de la motion avant que des amendements y soient proposés.
J'aurais aimé poser quelques questions à propos de la logistique. Si j'ai bien compris, la motion de M. McKinnon ferait en sorte que nous aurions du temps pour en débattre lors de la rencontre.
Oui, monsieur le président. La motion vise à les inviter « dès que possible », et j'accepte qu'on y ajoute à la fin l'amendement proposé par M. McKinnon.
J'ai des réserves par rapport à l'imprécision du libellé. Durant la réunion d'organisation, on pourra discuter du nombre de réunions nécessaires, que ce soit deux, trois ou plus. C'est un peu vague d'écrire dans la motion en tant que telle que l'étude peut être élargie. À mes yeux, ce n'est pas une façon très professionnelle de... Je n'ai jamais vu une motion rédigée en de tels termes.
J'appuierais la motion originale avec l'ajout du CANAFE, mais j'attendrais la réunion d'organisation pour déterminer combien de réunions seront nécessaires pour réaliser l'étude. Formuler la motion de manière imprécise, en laissant entendre que l'étude pourrait être élargie... Nous devrions essayer de fixer une date de début et une date de fin précises, parce que nous avons discuté de beaucoup de dossiers importants. Le Sous-comité s'est réuni et il a établi un programme pour toute l'année. Il ne faudrait surtout pas que ce programme soit interrompu par une étude susceptible d'être prolongée indéfiniment.
Je comprends les réserves de M. Lloyd, mais je dirais que le Comité est le maître de sa destinée. Nous pouvons élargir l'étude ou nous pouvons en limiter la durée plus tard. Je cherche simplement à faire en sorte que la séance d'information de GoFundMe et des autres ne soit pas la seule réunion consacrée à ce dossier. Je recommande que nous y pensions.
Quoi qu'il en soit, je suis prêt à ce que l'amendement soit mis aux voix.
Non, monsieur le président. J'invoque le Règlement.
J'aimerais simplement dire que ma caméra a arrêté de fonctionner et que je n'arrive pas à la redémarrer, mais je suis là. Je ne voulais pas que vous pensiez que j'avais disparu.
Voilà qui met fin à nos travaux pour aujourd'hui et pour la semaine. J'attends mardi et jeudi prochains avec impatience. J'espère être là en personne, soit dit en passant. Je ne sais pas qui d'autre planifie être à Ottawa la semaine prochaine. C'est mon intention, si les circonstances le permettent.
Je suis prêt à recevoir une motion d'ajournement. Nous n'avons pas à la mettre aux voix, n'est‑ce pas?
Vous voyez mon marteau. La séance est officiellement levée.