:
Je déclare la séance ouverte.
Bonjour à tous. Soyez les bienvenus à la 62e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément à l'ordre de laChambre du 23 juin 2022. Les membres du Comité assistent à la réunion en personne dans la salle ou à distance au moyen de l'application Zoom.
J'aimerais maintenant formuler quelques commentaires à l'intention des membres du Comité et des témoins.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer et veuillez le mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas. Pour les participants sur Zoom, le service d'interprétation est accessible au bas de votre écran. Vous avez le choix entre le parquet, l'anglais et le français. Pour les participants dans la salle, vous pouvez utiliser l'écouteur et sélectionner le canal désiré. Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
Je demande aux membres du Comité de faire preuve d'indulgence ce matin. Pour des raisons indépendantes de ma volonté, j'ai raté mon vol d'avion.
Aujourd'hui, conformément à l'article 81(4) du Règlement, le Comité entreprend son examen du Budget principal des dépenses 2023‑2024: crédits 1, 5, 10, 15, 20 et L30 sous la rubrique ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, crédit 1 sous la rubrique Centre de recherches pour le développement international et crédit 1 sous la rubrique Commission mixte internationale (section canadienne), qui ont été renvoyés au Comité le mercredi 15 février 2023.
J'ai le plaisir de souhaiter la bienvenue à l'honorable Harjit Sajjan, ministre du Développement international. Je souhaite également la bienvenue aux représentants du ministère qui l'accompagnent aujourd'hui pour l'aider à répondre aux questions sur le Budget principal des dépenses 2023‑2024.
Nous accueillons donc plusieurs représentants du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Nous recevons Christopher MacLennan, sous-ministre, Développement international; Anick Ouellette, sous-ministre adjointe et dirigeante principale des finances; Peter MacDougall, sous-ministre adjoint, Enjeux mondiaux et du développement; Patricia Peña, sous-ministre adjointe, Partenariats pour l'innovation dans le développement; Annie Boyer, directrice générale et directrice financière adjointe, Gestion et planification financière; et Andrew Smith, directeur général, Politique d'aide internationale.
Monsieur le ministre Sajjan, je vous remercie encore une fois de comparaître devant notre comité. Vous disposez de cinq minutes maximum pour votre déclaration liminaire. Ensuite, nous allons passer aux questions des membres du Comité.
Monsieur le ministre, la parole est à vous pour cinq minutes.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les membres du Comité.
Je suis ravi d'être ici aujourd'hui pour discuter du leadership du Canada en matière d'aide internationale.
Comme les membres du Comité le savent, le monde fait face à une vague croissante d'instabilité en raison des effets persistants des perturbations dans les chaînes d'approvisionnement mondiales causées par la pandémie, de l'invasion illégale de l'Ukraine par Poutine, de la crise humanitaire multidimensionnelle en Haïti, de la flambée de violence dévastatrice au Soudan, de la fréquence et de l'ampleur accrues des phénomènes météorologiques à cause des changements climatiques, des mesures agressives prises par les talibans qui visent les femmes et les filles, de la restriction des droits génésiques en Pologne, aux États-Unis et dans d'autres pays, et d'un coup de barre contre l'égalité des genres partout dans le monde.
Il s'agit là d'énormes défis mondiaux. Le Canada a joué et continuera de jouer un rôle important lorsqu'il s'agit de répondre aux besoins.
Dans ce contexte, je suis fier d'annoncer que le Canada continue d'atteindre et même de surpasser ses objectifs en matière d'aide au développement international dans le cadre de sa politique d'aide internationale féministe. En 2021‑2022, près de 99 % de l'aide bilatérale au développement international du Canada visait ou intégrait des résultats en matière d'égalité entre les sexes, atteignant et dépassant ainsi l'objectif de 95 % d'ici 2022.
Le Canada continue de s'attaquer aux causes profondes de la pauvreté et des inégalités en se concentrant sur les personnes les plus susceptibles d'être laissées pour compte et en favorisant l'autonomisation des femmes et des filles dans toute leur diversité.
Le Canada est également résolu à améliorer continuellement la qualité et l'efficacité de son aide internationale.
Ces réalisations ne sont pas passées inaperçues. Le Canada a été l'un des premiers pays dans le monde à mettre en place une politique internationale féministe. D'autres pays nous emboîtent maintenant le pas. Pour la quatrième année d'affilée, l'Organisation de coopération et de développement économiques a classé le Canada au premier rang des donateurs bilatéraux pour l'égalité des genres.
Tournons-nous maintenant vers l'avenir. Le leadership du Canada est plus important et nécessaire que jamais. Par exemple, le Canada respecte l'engagement qu'il a pris dans le cadre de l'Accord de Paris de s'assurer que l'objectif de 1,5° C demeure atteignable. Nous prévoyons que nos investissements climatiques à l'échelle mondiale vont permettre d'éviter ou de réduire l'émission de plus de 228 mégatonnes de gaz à effet de serre.
Prenons par exemple la contribution du Canada au Fonds pour l'environnement mondial. En tant que septième plus important donateur, le Canada offre un soutien qui contribue à aider plus de 8 millions de personnes à s'adapter aux changements climatiques et à protéger près de 99 millions d'hectares de biodiversité marine.
Nous savons toutefois qu'à lui seul, le financement ne suffit pas à atténuer les effets inégaux des changements climatiques. C'est pourquoi nous continuons de favoriser la résilience et l'adaptation dans les pays en développement par le biais de notre contribution au Fonds vert pour le climat et au Fonds d'investissement pour le climat.
En parallèle, nous continuons de travailler avec des partenaires aux vues similaires aux nôtres, notamment des organismes multilatéraux, pour éliminer progressivement le charbon et favoriser des investissements dans les énergies propres.
Sur la scène internationale, nous continuons de plaider pour le soutien des petits États insulaires en développement et des pays les moins développés, qui contribuent le moins aux changements climatiques, mais qui sont les plus susceptibles d'en subir les répercussions.
Les pays les plus vulnérables actuellement sont aux premières lignes de certaines des crises les plus graves de notre époque, notamment les changements climatiques. À l'heure actuelle, en 2023, plus de 346 millions de personnes ont besoin d'aide humanitaire. Plus de 100 millions de personnes ont été déplacées de force. On estime que plus de 345 millions de personnes souffrent d'insécurité alimentaire.
Le Canada continue d'être un chef de file en matière de réponse aux besoins humanitaires, qui ne cessent d'augmenter d'année en année.
En 2022, le Canada était le cinquième donateur en importance au chapitre de l'aide humanitaire, fournissant plus d'un milliard de dollars en aide humanitaire.
L'année dernière, nous avons octroyé plus de 400 millions de dollars en aide humanitaire pour répondre aux besoins en Afrique subsaharienne, 227 millions de dollars pour répondre aux besoins en Ukraine et plus de 143 millions de dollars à l'Afghanistan et la région.
Nous avons également versé près de 650 millions de dollars en aide humanitaire alimentaire et nutritionnelle en réponse à la crise alimentaire mondiale grandissante. L'aide que nous avons fournie a permis au Programme alimentaire mondial de venir en aide à un nombre record de 158 millions de personnes qui vivaient de l'insécurité alimentaire en 2022. Il s'agit là d'une augmentation impressionnante de 27 % par rapport à 2021.
Nous avons également contribué à fournir une aide humanitaire et des mesures de protection, par le biais du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, à plus de 100 millions de réfugiés et autres personnes déplacées de force en 2022.
Dans le cadre de la Politique d'aide internationale féministe, le Canada continue de plaider en faveur de l'aide humanitaire tenant compte des sexes.
Le Canada demeure résolu à mettre en œuvre l'approche de la triple articulation, qui comprend les actions humanitaires, de paix et de sécurité, en vue de réagir plus efficacement aux conflits et de les prévenir. C'est ce que l'aide au développement permet de faire. Elle va de pair avec des actions de paix et de stabilisation.
Affaires mondiales Canada s'emploie continuellement à améliorer la qualité et l'efficacité de l'aide internationale canadienne. Bien que le récent rapport de la vérificatrice générale confirme le besoin impératif d'avoir une politique d'aide internationale féministe au Canada, il préconise aussi l'amélioration des systèmes permettant de faire rapport de ses résultats ainsi qu'une meilleure intégration dans nos projets des considérations intersectorielles et des facteurs liés à l'égalité des genres et aux droits de la personne, pour veiller à inclure les personnes les plus démunies et vulnérables.
Grâce à l'Initiative de transformation des subventions et des contributions, Affaires mondiales Canada trouve de nouvelles méthodes de travail qui se révèlent plus rapides, plus transparentes et plus souples. Elles permettront d'accroître la capacité du Canada d'obtenir des résultats durables qui ont une incidence positive sur la vie des gens, et d'en faire rapport.
Des actions pour le climat et une aide humanitaire significatives vont de pair avec l'égalité des genres et les droits de la personne en vue de bâtir un monde plus juste et prospère pour l'ensemble des habitants de la planète.
C'est pourquoi nous tirons le meilleur parti du potentiel de transformation de l'approche féministe du Canada à l'égard de l'aide internationale. Nous nous attaquons aux causes profondes des inégalités et de la pauvreté afin de transformer la vie des personnes les plus démunies dans le monde.
Merci de votre écoute.
Je serai ravi de répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais en premier lieu honorer la mémoire de Kyle Porter et de Cole Zelenco, deux héros canadiens qui ont perdu la vie au combat à Bakhmut, après s'être joints à la légion internationale de l'Ukraine. Les personnes qui les ont connus doivent ressentir une grande douleur en ce moment, mais également une grande fierté pour le courage dont ces jeunes hommes ont fait preuve durant cet important combat.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'être ici pour répondre à nos questions.
Durant la chute de l'Afghanistan, une sénatrice nommée par M. a distribué de faux documents de voyage canadiens. C'est, bien entendu, extrêmement grave. À cette époque, vous avez reçu des courriels à ce sujet, mais vous avez affirmé ne pas avoir les avoir lus.
En tant que ministre du Développement international actuellement, est‑ce que vous vérifiez vos courriels et diriez-vous que vous les lisez tous?
:
Je vous remercie de votre question.
Malheureusement, je dirais que les changements climatiques ont déjà, depuis un certain temps, des conséquences considérables sur les pays en développement. Les exemples les plus récents sont les inondations au Pakistan et les catastrophes — les typhons — aux Philippines et, comme vous le savez, dans diverses régions d'Afrique.
Grâce à son financement pour l'adaptation aux changements climatiques et, plus récemment, à son financement pour la biodiversité, le Canada apporte sa contribution afin d'aider les nations à faire face aux conséquences de la crise qu'ils ont très peu contribué à créer. Il ne s'agit pas seulement de réagir directement aux catastrophes, mais aussi de réfléchir à la manière de mettre en place des systèmes d'alerte précoce, de veiller à pouvoir apporter une aide humanitaire et, enfin, d'essayer d'atténuer certaines de ces catastrophes. Ces programmes ont eu de très bons résultats dans certaines parties du monde.
Malheureusement, des catastrophes frappent d'autres régions que nous n'avions pas prévues. Mais grâce aux fonds prévus, nous allons envisager les possibilités de protéger et de sauver la vie des gens, mais aussi leurs moyens de subsistance. Par exemple, les champs agricoles sont complètement inondés dans certaines régions. Dans d'autres parties du pays, c'est la sécheresse qui sévit. Nous prenons des mesures pour faire face à cela, parce qu'en fin de compte, ce que nous essayons de faire, c'est de gérer les répercussions sur la sécurité alimentaire.
:
En matière de sécurité alimentaire, l'approche est multidimensionnelle.
D'une part, là où il y a un besoin, il faut fournir une aide humanitaire directe. Nous le faisons, et nous avons dû augmenter notre aide. En fait, nous avons dû augmenter notre soutien l'année dernière et avons fait une demande de budget hors cycle. Le a fait l'annonce du montant attribué, soit 250 millions de dollars. Une partie de ce financement est allée à l'Ukraine, mais la majorité était destinée aux pays de l'hémisphère sud.
Maintenant, nous essayons d'accroître notre soutien au renforcement des capacités au sein des pays, en travaillant avec les pays, en particulier en Afrique, pour qu'ils examinent leurs propres plans nationaux, leur vision et la manière dont nous les soutenons. Je tiens également à souligner que l'objectif n'est pas seulement d'augmenter les produits alimentaires agricoles ou l'économie bleue. Il faut créer des systèmes alimentaires. Où cultive‑t‑on les aliments? L'entreposage est un élément clé. À l'heure actuelle, 30 % des aliments sont perdus par manque de capacité d'entreposage ou de transport. Par ailleurs, comment créer des emplois durables?
Nous étudions l'ensemble du système alimentaire et examinons les autres obstacles à ce que nous pouvons faire. Il y a parfois des barrières commerciales. Comment soutenir les nations en matière de commerce?
C'est une démarche qui comporte de multiples facettes, mais en fin de compte, ce que nous voulons faire, c'est renforcer les capacités. Cela a bien fonctionné dans certaines parties du monde, en particulier dans le Pacifique, au cours des décennies précédentes, et nous mettons aujourd'hui l'accent sur d'autres parties du monde à cet égard.
:
Monsieur le ministre, c'est ce que j'ai l'habitude d'appeler la « pause traduction ».
Dans votre lettre de mandat, le premier ministre vous a donné pour objectif d'augmenter l'aide au développement international du Canada chaque année jusqu'en 2030, afin d'atteindre les objectifs de développement durable des Nations unies. Je rappelle que la cible que doivent atteindre les pays donateurs a été fixée à 0,7 % de leur produit national brut.
Pourtant, dans le dernier budget fédéral, le gouvernement a annoncé une ponction de 15 % des montants qu'il consacre à l'aide internationale. Dans un reportage de Radio‑Canada, vous avez déclaré que l'argent n'était pas tout et qu'il ne s'agissait pas seulement d'annoncer de l'argent, mais de vous assurer d'avoir les bons programmes en place pour obtenir les résultats que vous souhaitez.
Ma question est fort simple, monsieur le ministre: considérez-vous toujours que cette cible de 0,7 % du produit national brut est un objectif qu'on doit atteindre et vers lequel on doit tendre? Avez-vous toujours l'intention de l'atteindre?
:
Monsieur le président, le Canada répondra toujours présent lorsque des crises surviennent. Vous vous souviendrez que le montant de 250 millions ne figurait pas dans le budget initial. La demande a été faite pour répondre aux besoins des gens pendant l'année en cours.
Nous affectons des fonds à la sécurité alimentaire dans le budget actuel. Nous travaillons aussi à l'élaboration d'un plan plus vaste afin de collaborer à l'accroissement des ressources dans de nombreux pays. Le plan n'est pas encore prêt, mais lorsqu'il le sera, il sera présenté au cabinet pour qu'il soit peaufiné.
L'argent est important, et notre gouvernement a pris des engagements à cet égard, mais nous devons aussi nous assurer que nous avons un plan pour atteindre les résultats souhaités.
Le travail ne consiste pas seulement à accroître la capacité alimentaire ou les dons de nourriture. Nous voulons nous pencher sur les recherches, par exemple, celles que nous finançons à Nairobi. Les aliments et les haricots qui y sont développés sont souvent plus nutritifs. Mes collègues qui s'occupent d'alimentation me rappellent toujours qu'il faut des aliments, mais des aliments nutritifs.
Malheureusement, dans des endroits comme le camp de réfugiés de Kakuma que j'ai visité, les repas étaient réduits à un par jour. C'est triste, mais les aliments qu'ils cuisinaient étaient, à tout le moins, plus nutritifs.
En situation de crise alimentaire, comme l'ancien responsable du Programme alimentaire mondial l'a dit, on prive les uns pour nourrir les autres. C'est la raison pour laquelle nous axons nos efforts sur ce problème.
:
Merci, monsieur le ministre. Nous serons très intéressés d'entendre les nouvelles annonces à cet égard.
Je vais me permettre de vous faire part d'une préoccupation que j'ai eu l'occasion de discuter avec mes collègues, dans le cadre de nos contacts avec d'autres pays occidentaux, particulièrement dans le cadre du conflit en Ukraine.
L'une des choses qu'on observe à l'échelle mondiale, c'est qu'une bonne partie des budgets alloués à l'aide internationale par plusieurs pays occidentaux a été détournée pour accorder de l'aide — tout à fait nécessaire, soit dit en passant — à l'Ukraine, privant de ce fait les pays du Sud d'une partie des sommes qui leur auraient normalement été destinées. On a déjà le sentiment que, pour les pays du Sud, la guerre en Ukraine est une querelle entre pays riches. C'est ce que démontrent les résultats des votes aux Nations unies. On voit également que des pays comme le Canada se sont désengagés au fil des années de continents comme l'Afrique, ce qui a permis à des pays comme la Russie ou la Chine de s'y installer, avec les résultats qu'on connaît et qui se sont notamment transposés dans les résultats des votes aux Nations unies concernant la guerre en Ukraine.
Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, plutôt que de divertir vers l'Ukraine une partie des sommes normalement allouées aux pays du Sud, de hausser encore une fois les budgets alloués à l'aide au développement, de sorte à ne pas réduire l'aide aux pays du Sud tout en débloquant des sommes supplémentaires, de l'argent frais, pour aider l'Ukraine?
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie aussi nos témoins.
Et merci aussi à vous, monsieur le ministre, d'être avec nous aujourd'hui.
Comme vous le savez, avant d'arriver en politique, j'ai fait carrière dans le secteur du développement international. J'ai beaucoup de questions à vous poser, alors je vous prie de m'excuser si je dois vous interrompre.
Je dois commencer par vous dire que vos paroles ne riment pas toujours avec les actions de votre gouvernement.
Vous parlez du besoin de paix et de sécurité. Le gouvernement a promis de déployer 600 Casques bleus. Je pense qu'on en compte 60 actuellement sur le terrain. Vous êtes allé au Qatar. Vous n'avez pas dénoncé le fait que l'Arabie saoudite a pris les armes contre des civils innocents. C'est une situation qui m'inquiète.
Vous parlez du besoin d'accroître le développement international, mais nous avons vu dans le budget que l'aide publique au développement a été réduite de 15 %. À un moment où nous vivons une crise climatique, où des gens souffrent partout dans le monde de manière disproportionnée, où une crise alimentaire sévit, où un conflit cause d'énormes problèmes, et où nous avons une politique d'aide internationale féministe, notre pays réduit l'aide au développement international de 15 %, et ce, même si nous sommes déjà 16e sur 30 pays donateurs, et bien en deçà jusqu'à maintenant des objectifs de Pearson, et en deçà des ambitions que les Canadiens ont pour leur pays.
En tant que ministre du Développement international, votre travail consiste à promouvoir le développement international, à vous assurer que le caucus comprend pourquoi le développement international est si important.
Quels efforts avez-vous déployés en ce sens? On se demande ce que vous avez fait pour défendre ce secteur quand on constate que l'aide publique au développement a été réduite de 15 %.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je croyais que j'avais cinq minutes, mais voilà.
Merci, monsieur le ministre, d'être venu. Vous avez accompli un travail extraordinaire dans une période très difficile, marquée par des conflits et des crises, par l'insécurité alimentaire et par des crises sanitaires. Vous avez vraiment essayé de faire face à beaucoup de choses, et je tiens donc à vous remercier d'être venu et d'avoir passé un peu de temps avec nous.
Je veux vous poser une question à vous précisément. Comme vous le savez, le gouvernement a parlé de consacrer la moitié du financement de 1,4 milliard de dollars à la santé et aux droits sexuels et reproductifs dans les domaines qui ont été négligés. Vous savez que ces domaines négligés sont les soins post-avortement, l'éducation sexuelle complète, l'accès à des avortements sécuritaires et la santé sexuelle et reproductive et les droits connexes.
Comment y parvenez-vous? Quels sont les défis auxquels vous êtes confrontés? C'est une question.
Comme je n'ai que quatre minutes, je vais vous poser mes trois questions.
La deuxième est basée sur cette question. Comme vous l'avez mentionné dans votre déclaration, vous savez qu'en Ukraine, l'accès à l'avortement... Les pays qui accueillent des migrants ukrainiens, comme la Pologne et la Hongrie, offrent très peu d'accès aux soins et aux droits en matière de santé sexuelle et reproductive, même si le viol a été annoncé comme l'une des tactiques de guerre, et que les femmes ukrainiennes se font violer.
Comment gérez-vous cette barrière que vous recevez de ces pays?
Enfin, si vous le pouvez, parlez-moi des vaccins dont nous avons besoin pour nous préparer à la prochaine pandémie, non pas après qu'elle se soit déclarée, mais avant. Que faisons-nous avec l'OMS pour traiter de l'accès à la santé et de l'accès à l'approvisionnement en vaccins pour une future pandémie?
Je vous remercie.
:
Non, c'est tout à fait correct.
Les secteurs négligés de la santé et des droits sexuels et reproductifs, ou SDSR, sont une grande source de préoccupation pour notre gouvernement et moi. En fait, nous travaillons à l'heure actuelle à l'élaboration d'un plan pour accroître notre soutien aux secteurs négligés car même dans les pays où l'avortement est illégal, cela ne signifie pas que les avortements cessent. Les femmes ont toujours besoin de soutien après un avortement, et c'est donc dans ces domaines où nous augmenterons le soutien. Le plan n'est pas encore achevé, mais dès qu'il le sera, je me réjouis à l'idée de l'annoncer.
En ce qui concerne l'Ukraine, les situations de guerre et les violences accrues et les viols, c'est absolument horrible. Lorsque j'étais dans la région, je me suis assuré, en discutant avec les membres de notre équipe, de leur donner le feu vert pour qu'ils fassent preuve de créativité pour trouver des moyens d'apporter du soutien à ces gens, même si un pays donné ne le fait pas, qu'il s'agisse de les aider à trouver du soutien dans un autre pays, voire de les faire venir au Canada... Je sais que les équipes se sont concentrées sur cette question.
En ce qui concerne le vaccin, c'est un domaine sur lequel je veux insister car nous sommes malheureusement passés d'une crise à une autre, et nous ne pouvons pas oublier la crise précédente que nous avons eue sur les bras. En ce qui a trait au vaccin, j'ai eu de bonnes discussions et un bon suivi.
Le renforcement du système de santé se poursuit. Une partie du financement que nous avons actuellement en place, par exemple, certains des travaux de recherche menés en Afrique du Sud en tant que plaque tournante potentielle pour les vaccins... L'objectif n'est pas seulement de concevoir plus de vaccins, mais de nous assurer que nous disposons de centres régionaux où de bons systèmes sont en place, de manière à ce que si une pandémie devait éclater à nouveau, nous ne soyons pas confrontés aux mêmes problèmes. Nous avons une chaîne d'approvisionnement frigorifique avec des personnes formées pour pouvoir fournir ces produits. Nous avons l'équipement de protection individuelle, EPI, en place et, plus important encore, les centres de vaccination qui peuvent administrer les vaccins.
C'est un projet que nous surveillons de très près et sur lequel nous travaillons avec nos organisations multilatérales.
:
Merci, monsieur le président.
Il est dommage que Mme Fry ait utilisé ses dernières secondes de temps de parole pour faire un commentaire éditorial de cette nature. Je comprends que nous avons des ressources limitées, mais nous nous sommes engagés à augmenter notre contribution à l'aide publique au développement à hauteur de 0,7 % de notre produit national brut. Conséquemment, furent-elles limitées, nos ressources doivent être augmentées de sorte à pouvoir apporter notre contribution aux efforts mondiaux de lutte contre la pauvreté.
J'abonde dans le sens de Mme McPherson pour dire à quel point je suis préoccupé par la crise alimentaire qui a cours présentement et qui ne va pas aller en s'améliorant. Je comprends qu'il y a d'autres budgets qui sont alloués à la lutte contre la crise alimentaire, mais cela me préoccupe de voir que l'on réduit, malgré tout, notre contribution.
On a également réduit le financement accordé aux pays en développement pour les aider à s'adapter aux changements climatiques. La somme de 433,2 millions de dollars sera réduite progressivement jusqu'en 2025‑2026, et ce, bien qu'on ait pu constater l'impact considérable des changements climatiques au Pakistan ces derniers mois. Nous avons eu l'occasion d'en discuter ensemble, monsieur le ministre. Est-ce le bon geste à poser alors qu'on sait que, très souvent, les pays en développement sont proportionnellement plus touchés par les changements climatiques que les pays développés?
En fait, comme je l'ai expliqué au cours des dernières années, nous devons réagir aux situations d'urgence qui surviennent. Nous allons malheureusement devoir continuer à le faire. Les chiffres dont nous parlons sont analysés à la fin de l'année, et nous commençons un budget au début de l'année. Le budget de base a systématiquement augmenté. Même dans le budget actuel, nous demandons plus de 100 millions de dollars de plus que dans le budget de base précédent.
J'exhorterais les membres du Comité à examiner l'évolution des montants prévus. En même temps, nous devons intervenir en temps de crise, et c'est ce que nous avons fait, que ce soit pour l'Ukraine ou... Malheureusement, il y a eu la COVID. Une autre crise pourrait survenir. Je vous rappellerai que nous avons dû déposer une demande de budget de 250 millions de dollars. Cela n'inclut pas tous les défis auxquels nous avons dû faire face. Notre gouvernement est absolument déterminé à augmenter l'aide au développement. Nous avons montré les schémas et les graphiques à cet égard. Je peux les montrer aux membres du Comité.
Je tiens également à parler du travail accompli. Je prends le temps d'aller sur le terrain pour visiter de nombreux sites de projet. Nous avons beaucoup à faire pour rassembler toutes les informations, projet par projet. J'encouragerais le Comité à visiter les sites de projet si l'occasion se présente. Le personnel d'Affaires mondiales fait un travail remarquable sur le terrain, tout comme nos partenaires. Je vous encouragerais à constater les répercussions de ce travail de visu.
Je peux vous donner un exemple. Depuis le début de la crise au Soudan... Je suis allé au Soudan du Sud. J'estimais devoir m'y rendre, parce que l'accord de paix était sur le point de prendre fin, et je suis allé à un endroit où il y avait un programme agricole d'entrepreneuriat féminin. Les femmes cultivaient des produits qu'elles ne pouvaient pas cultiver avant. C'est une petite région. Je viens moi-même d'un petit village. Elles sont capables de nourrir leur village et de vendre l'excédent de nourriture. C'est cet excédent qui peut parfois leur permettre d'obtenir un soutien médical pour leurs enfants ou d'envoyer leurs enfants à l'école. Ce n'est qu'un micro-exemple de répercussions sur la vie des gens... On peut également penser aux cliniques dans les bidonvilles du Bangladesh. La liste est longue.
Je vous encouragerais à visiter certains de ces sites de projet.
[Traduction]
Nous fonctionnons depuis cinq ans selon le cadre stratégique de la Politique d'aide internationale féministe. Dans ce cadre, nous nous sommes penchés sur la façon de nous attaquer à certains problèmes sous-jacents qui sont au cœur de certains obstacles au développement.
L'une de nos initiatives de marque dans ce cadre est le Programme Voix et Leadership des Femmes. En parallèle, nous consacrons du financement au Fonds Égalité. Ces projets partagent un engagement commun, celui de tenter de donner des ressources directement aux organismes, aux personnes qui travaillent à l'échelle locale dans leur communauté.
Cette façon de faire tient compte du fait que ce sont les personnes les mieux placées pour connaître les besoins de leur communauté et pour prendre des décisions qui profiteront à celle‑ci.
Nous avons eu l'occasion de voir les répercussions de ce travail. Par exemple, en attribuant une quantité relativement faible de ressources à des organismes, comme ceux qui défendent les droits des femmes dans certains pays, ces organismes ont été en mesure de militer pour l'adoption de lois — par exemple, des lois relatives à la société civile pour garantir l'inclusion des droits et être en mesure de s'attaquer aux enjeux concernant les droits de la personne, et pour avoir accès à la propriété, à des titres.
Tous les jours, ces personnes travaillent dans de nombreux pays de l'Afrique subsaharienne et à l'échelle mondiale pour défendre leurs besoins individuels, ceux des femmes et des filles, et aussi ceux de leur communauté.
Ce type de travail consiste à leur donner du pouvoir. L'effet sous-jacent est que ces gens sont en train de changer la dynamique de leur pays et sont de puissants moteurs de changement.
:
Merci, monsieur le président.
Dans un premier temps, j'aimerais réagir aux commentaires de Mme Vandenbeld. Je pense qu'on peut faire dire bien des choses aux chiffres.
Je crois que les ONG responsables des dossiers de coopération internationale avaient exprimé le souhait que le gouvernement ne prenne pas prétexte de la crise pour réduire sa contribution, mais qu'au contraire, il l'accroisse. Or, en dépit de ce souhait, le gouvernement invoque la crise. Cette dernière n'est toujours pas terminée, d'ailleurs, comme le soulignait notre collègue: la crise sanitaire n'est pas terminée, la crise alimentaire n'est pas terminée, et la crise des changements climatiques n'est pas terminée. Cependant, le gouvernement invoque la soi-disant fin de ces crises pour réduire sa contribution à l'aide publique au développement. Je vais simplement dire que je trouve malheureux qu'il ait fait ce choix, un choix politique qu'il devra assumer.
Maintenant, j'aimerais poser une question aux témoins. D'abord, merci d'être des nôtres. Je n'ai pas eu l'occasion précédemment de vous en remercier. Je sais que vous auriez probablement plein d'autres choses tout aussi importantes à faire, mais vous vous êtes libérés, et nous vous en sommes reconnaissants.
Mme McPherson a posé tout à l'heure une question au ministre concernant la stratégie africaine. Il a semblé un peu surpris de la question, ne sachant pas trop ce à quoi elle faisait allusion. J'ai sous les yeux un article du Hill Times dans lequel on rappelle que le , notre collègue M. Robert Oliphant, avait déclaré en juillet 2022 qu'il espérait pouvoir soumettre cette stratégie au Cabinet avant décembre 2022. Or, l'article date du 7 décembre 2022 et cela ne semblait pas avoir été fait à ce moment-là. Nous sommes maintenant en avril 2023: où en est l'élaboration de cette stratégie africaine de la part du gouvernement?
On constate que l'aide publique au développement accordée par le Canada est principalement orientée vers certains pays. En 2021 et 2022, ces pays étaient l'Éthiopie, l'Afghanistan, le Bangladesh, l'Ukraine, la République démocratique du Congo et le Nigéria. Dans le cas de l'Afghanistan et de l'Ukraine, on peut très bien comprendre les raisons pour lesquelles le gouvernement a fait de ces deux pays une priorité. Par contre, dans certains autres cas, la réponse n'est pas aussi claire. Je pense notamment à l'Éthiopie, principal bénéficiaire de l'aide publique au développement accordée par le Canada, mais où, pendant des mois, le gouvernement éthiopien a mené une guerre sale contre le Tigré.
Ma question est fort simple: pourquoi avoir choisi l'Éthiopie, le Bangladesh, la République démocratique du Congo et le Nigéria au détriment d'autres pays avec lesquels nous avons davantage de liens, entre autres, sur le plan culturel? Je pense notamment à Haïti.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être ici et de nous faire part de leur expertise aujourd'hui.
Je veux répondre très rapidement à vos propos, monsieur Smith, relativement à l'importance du commerce. Je suis d'avis que le gouvernement canadien a promu davantage le commerce que le développement, que la diplomatie et que le maintien de la paix. Bien franchement, le commerce sans développement, sans diplomatie et sans maintien de la paix, ce n'est pas du commerce; c'est de l'exploitation. Je le souligne à l'intention de tous.
Quand je travaillais dans le domaine, je siégeais au Groupe d'action pour une efficacité améliorée d'Affaires mondiales Canada. De nombreuses inquiétudes soulevées par ce groupe d'action n'ont pas été réglées par Affaires mondiales. Elles demeurent en suspens. L'une des inquiétudes concernait le temps nécessaire pour qu'une proposition passe de l'état de proposition à celui de projet complété.
Je veux maintenant parler d'un problème concernant l'initiative pour les petits et moyens organismes, qui a fait un appel à propositions en septembre 2021. On a demandé à 18 de ces organismes de soumettre une proposition complète en mai 2022. Les résultats ne sont toujours pas connus. En gros, nous avons une situation où Affaires mondiales Canada est incapable d'évaluer 18 propositions en une année, ce qui est épouvantable, bien sûr, particulièrement en raison des répercussions de ce retard sur ces organismes, comme vous le savez, j'en suis certaine. D'après ce que je comprends, il faut jusqu'à 17 approbations différentes pour avaliser une proposition.
J'ai deux questions.
D'abord, est‑ce acceptable? Cela répond‑il aux normes relatives aux échéanciers d'Affaires mondiales Canada?
De plus, si c'est le cas, comment diable peut‑on s'attendre à ce que le projet de loi fonctionne en contexte de crise humanitaire, puisqu'il exige qu'Affaires mondiales soit en mesure d'intervenir?
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les fonctionnaires de leur présence.
J'aimerais reprendre le sujet abordé par mon collègue, plus précisément le système de gestion de l'information, qui a été pointé du doigt par la vérificatrice générale, comme vous l'avez reconnu. Il y a eu des retards. Des renseignements partiels ont été soumis pour 9 des 60 projets évalués, et aucun renseignement n'a été fourni pour l'un d'entre eux.
Je vais vous demander de nous donner une réponse plus précise. Est‑ce lié au système de gestion de l'information? D'après mon collègue, les problèmes avaient déjà été soulevés il y a cinq ans. Est‑ce une question de personnel? Est‑ce à cause de la COVID ou encore du lieu de travail?
Quand un problème est signalé dans un rapport de la vérificatrice générale, j'y porte attention, peu importe de quoi il retourne. Je vous demanderais donc une réponse.
:
Je vous remercie de la question, monsieur le président.
Nous assurons le développement continu de nos projets. Nous le faisons à la fois en réaction à ce qui se passe dans les pays avec lesquels nous travaillons, en nous assurant de répondre à leurs besoins et à ce qu'ils recherchent, et aussi, en particulier dans les cas où nous travaillons avec des partenaires canadiens, aux idées qu'ils ont et aux relations qu'ils entretiennent avec leurs homologues dans les pays en développement.
Nous ne travaillons pas à un projet comme celui que vous décrivez, mais il existe des initiatives qui nécessitent, par exemple, de faire appel à l'expertise canadienne.
Je pourrais établir un lien avec une question qui a été posée plus tôt. Une initiative de partenariat pour le climat est en cours. Nous avons lancé un appel de propositions qui touche des organisations autochtones canadiennes. L'idée est de leur permettre de transmettre leurs connaissances et leur expertise, puis d'établir des partenariats avec ces communautés au pays, de manière à ce qu'il y ait un apprentissage partagé.
Cela fait partie de nos projets en constante évolution. Ces projets n'existaient peut-être pas auparavant, mais ils sont tout à fait adaptés aux problèmes cernés par ces pays et ces communautés.
:
Je vous remercie, monsieur Sarai.
Il est maintenant 12 h 45, et je crains que cela ne mette fin à notre période de questions et réponses avec les fonctionnaires.
Permettez-moi de remercier M. Peter MacDougall, Mme Anick Ouellette, Mme Patricia Peña, Mme Annie Boyer et M. Andrew Smith d'avoir été parmi nous et d'avoir répondu à toutes les questions posées par les députés.
Je rappelle aux députés qu'à notre prochaine réunion, le jeudi 4 mai, la comparaîtra.
Nous allons suspendre brièvement la séance pour permettre à nos témoins de partir et nous poursuivrons avec la dernière partie de notre réunion, qui se déroulera à huis clos.
Les députés qui participent sur l'application Zoom doivent utiliser l'autre hyperlien et les consignes de connexion qui ont été envoyés par la greffière.
Nous reprendrons la séance à huis clos dans quelques minutes. Je vous remercie.
[La séance se poursuit à huis clos.]