Bienvenue à la 104 e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes.
Avant de commencer, j'aimerais rappeler à tous les députés et à nos témoins les importantes mesures de prévention suivantes.
Afin de prévenir les incidents de rétroaction acoustique, qui perturbent la séance et qui peuvent être néfastes et causer des blessures, je rappelle à tous les participants qui sont ici en personne de tenir leur oreillette loin des microphones, et ce, en tout temps. Comme l'a mentionné le Président dans le communiqué envoyé à tous les députés le 29 avril, les mesures suivantes ont été prises afin d'aider à prévenir la rétroaction acoustique.
Premièrement, toutes les oreillettes ont été remplacées par un modèle qui réduit considérablement les risques d'une rétroaction acoustique. Les nouvelles oreillettes sont noires, alors que les anciennes étaient grises. Je vous prie donc de seulement utiliser une oreillette noire approuvée.
Deuxièmement, par défaut, toutes les oreillettes inutilisées seront débranchées au début de la réunion.
Troisièmement, lorsque vous n'utilisez pas votre oreillette, je vous demande de la placer à l'envers au milieu de l'étiquette prévue à cette fin, que vous pouvez voir devant vous sur la table. Je vous demanderais de consulter les cartes disposées sur la table pour prendre connaissance des lignes directrices visant à prévenir la rétroaction acoustique.
Enfin, la disposition de la salle a été modifiée afin d'éloigner davantage les microphones les uns des autres et d'ainsi réduire la probabilité d'une rétroaction causée par une oreillette dans la salle.
Ces mesures ont été mises en place pour que nous puissions mener nos travaux sans interruption et pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris, bien sûr, les interprètes.
La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride. J'aimerais faire quelques observations à l'intention des membres du Comité et des témoins.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Les députés présents dans la salle sont priés de lever la main s'ils souhaitent prendre la parole. Ceux qui sont sur Zoom doivent utiliser la fonction « Lever la main ». La greffière du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour gérer l'ordre des interventions.
Vous pouvez vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Des services d'interprétation sont disponibles. Vous avez le choix entre le parquet, l'anglais ou le français. Si vous n'entendez plus l'interprétation, veuillez m'en informer immédiatement. Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés par l'intermédiaire de la présidence.
Conformément à la motion de régie interne du Comité concernant les tests de connexion pour les témoins, la greffière m'a informé que tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant notre réunion.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 29 janvier 2024, le Comité reprend son étude sur l'approche du Canada à l'égard de l'Afrique.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Nous accueillons M. Alessandro Arduino, chargé de cours affilié à l'Institut Lau China du King's College de Londres.
Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui, en personne, M. Walter Dorn, professeur au Département des études de la défense du Collège militaire royal du Canada.
Nous recevons également M. Mamoudou Gazibo, qui est professeur de sciences politiques à l'Université de Montréal.
Vous disposerez chacun de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Je demanderais à chacun de vous de regarder l'écran, car lorsque les cinq minutes seront presque écoulées, je lèverai mon téléphone cellulaire. Lorsque vous le verrez, je vous demanderais de conclure vos observations en 15 secondes. Cela ne vaut pas seulement pour vos déclarations liminaires, mais aussi pour les réponses que vous fournirez aux députés.
Maintenant que je vous ai donné toutes ces explications, nous allons commencer par M. Arduino.
Vous avez cinq minutes pour votre déclaration préliminaire.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens tout d'abord à remercier le président et les membres du Comité de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui. Les points de vue dont je vous ferai part sont les miens et ne représentent aucune organisation à laquelle je suis affilié.
Afin d'établir l'approche stratégique du Canada à l'égard de l'Afrique, il est impératif, à mon avis, de tenir compte d'une variable fondamentale qui a trait à la sécurité. Cette variable est l'influence croissante des mercenaires ou des mandataires armés — comme le groupe russe Wagner — qui défendent des intérêts étrangers.
Bien que l'engagement du Canada en Afrique soit ancré dans des objectifs communs et qu'il s'appuie de façon très importante sur des solutions locales, plusieurs initiatives clés dans la région, en particulier en Afrique de l'Ouest et dans la région du Sahel, se heurtent à de grandes difficultés en raison des mercenaires et des quasi-sociétés militaires privées. Par exemple, une part importante des investissements canadiens en Afrique se concentre dans le secteur minier, mais ce secteur est devenu une plaque tournante pour les mercenaires, en particulier pour le groupe Wagner, qui sont en mesure d'exploiter les ressources naturelles locales en échange de la protection du régime local.
Sur le plan de l'économie et de la sécurité, un autre problème se pose certainement du fait que les mercenaires mettent progressivement de côté des programmes très importants, comme ceux au profit des femmes, de la paix et de la sécurité. Ces mercenaires assurent la formation des milices locales, en faisant fi non seulement des femmes et des principes de paix et de sécurité, mais aussi des droits fondamentaux de la personne.
L'importante décision d'inclure les femmes dans les efforts de maintien de la paix est essentielle, en particulier en Afrique, où les reculs à cet égard mettent en péril tout espoir de paix. L'engagement du Canada à promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes en tant que pilier des programmes d'aide internationale en Afrique est toutefois maintenant menacé.
Un autre problème — qui a trait à la sécurité — est que le contexte de sécurité en Afrique évolue extrêmement rapidement et que la menace du terrorisme et des coups d'État militaires augmente. Par conséquent, le rôle du Canada dans les institutions locales et régionales, comme l'Union africaine et l'organe des Nations unies chargé de la consolidation et du maintien de la paix, doit tenir compte du fait que les mesures prises par les quasi-sociétés militaires privées, comme le groupe Wagner, visent à saper les efforts de lutte contre le terrorisme menés par l'Occident, que le Canada a activement appuyés.
Les mercenaires sont présents en Afrique depuis la seconde moitié du 20e siècle, et l'on a recours à eux pour protéger les dirigeants en place ou en installer de nouveaux dans les zones de conflit. La situation à laquelle nous étions habitués — il s'agissait de soldats armés —, qui n'a pas bougé pendant des décennies, est en train de changer. Depuis quelque temps, les mercenaires changent et exercent de nouveaux rôles. Ils sont conseillers techniques pour les systèmes d'armes sophistiqués, mènent de la propagande, répandent de la désinformation et continuent de combattre sur la ligne de front. Dans ce contexte, l'Afrique est un environnement très fertile pour les mercenaires. Les conflits de faible intensité y sont fréquents, ce qui signifie que la région pose moins de risques pour la vie des mercenaires.
Le continent regorge de ressources naturelles et offre des possibilités d'exploitation. De plus, l'instabilité omniprésente dans de nombreux pays africains permet aux mercenaires de poursuivre leurs activités dans une relative impunité, ce qui renforce leur attrait pour les acteurs étatiques et non étatiques, qui peuvent les mobiliser et les embaucher, et ce, grâce au recours au démenti plausible.
Permettez-moi de conclure en soulignant que les mercenaires, lorsqu'ils rallient leurs intérêts à ceux de la junte militaire locale, s'infiltrent dans toutes les sphères de la société. Ils drainent les ressources de projets essentiels, comme ceux qui visent à lutter contre la pauvreté, à favoriser la sécurité alimentaire, ceux qui se concentrent sur la migration, et en particulier les projets relatifs à l'inégalité entre les sexes et même aux changements climatiques. Toutes ces initiatives pâtissent des activités des mercenaires.
Je pense que j'ai parfaitement respecté le temps qui m'était imparti. Je vous remercie de votre attention. Je serai heureux de répondre à vos questions.
:
Monsieur le président, je vous remercie de votre invitation et je remercie sincèrement le Comité de son intérêt pour l'Afrique.
[Traduction]
L'Afrique est un continent qui a souvent été négligé et qui, au cours des siècles précédents, a fait l'objet de nombreux abus de la part des pays occidentaux. Aujourd'hui encore, des forces extérieures exploitent les vulnérabilités du continent. L'Afrique fait l'objet d'une course unilatérale, mais nous, au Canada, semblons y être insensibles. Cela ressemble à la ruée vers l'Afrique qui a eu lieu dans la seconde moitié du 19e siècle.
La Chine, grâce à sa puissance commerciale et financière, cherche à contrôler les vastes ressources minérales de l'Afrique et, comme nous venons de l'entendre, la Russie profite du déficit démocratique de l'Afrique en soutenant des instigateurs de coups d'État, des dictateurs et des dirigeants naïfs. J'ai vu de mes propres yeux que les forces du groupe Wagner assurent la protection rapprochée du président de la République centrafricaine. J'ai vu des soldats chinois construire des routes en République démocratique du Congo, et j'ai vu des stades construits par les Chinois dans diverses villes africaines dans le cadre de la campagne de la Chine qui vise à conquérir les cœurs et les esprits.
En ma qualité de professeur, je me concentre sur les opérations et j'essaie de me rendre fréquemment sur le terrain. Je m'attarde à ce qui doit être fait pour améliorer la paix et la sécurité. L'une des solutions clés est une invention canadienne: les forces de maintien de la paix proposées pour la première fois par Lester B. Pearson. Les missions de l'ONU, malgré tous leurs défauts, restent le meilleur moyen d'assurer une présence bienveillante sur un grand territoire afin de renforcer la sécurité des Africains. Le bilan positif — bien que méconnu — de ces missions est impressionnant. Elles ont permis d'interrompre l'éclatement du Congo dans les années 1960; elles ont contribué à l'indépendance de la Namibie en 1989; elles ont favorisé l'élection de Nelson Mandela en 1994; elles ont contribué à mettre fin aux guerres civiles au Mozambique, au Liberia et en Sierra Leone; elles ont aidé l'Angola à progresser vers la démocratie; et elles ont rétabli la démocratie, y compris grâce au recours à la force, en Côte d'Ivoire. J'ai également eu le plaisir d'assister en personne au procès de l'ancien dictateur Charles Taylor devant le Tribunal spécial des Nations unies pour la Sierra Leone.
Même les échecs du maintien de la paix en Afrique soulignent son importance. La mission de l'ONU au Rwanda, dirigée par votre ancien collègue, le parlementaire Roméo Dallaire, a permis de sauver 20 000 à 30 000 vies avec une force réduite de seulement 300 Casques bleus.
En tirant les leçons du passé, le Canada peut faire beaucoup plus pour soutenir la cause du maintien de la paix en Afrique. Par exemple, il pourrait fournir la force de réaction rapide promise depuis longtemps à la mission de l'ONU en République centrafricaine. Il pourrait répondre à l'appel à la protection du peuple congolais, en aidant à neutraliser une fois de plus le M23. Le Canada pourrait accroître son soutien à la mission de l'ONU au Soudan du Sud, le pays le plus récent du monde. Tant d'autres endroits auront besoin des forces de maintien de la paix de l'ONU, notamment le Soudan, le Cameroun et la Libye.
Le Canada a déjà été le champion du travail mené par l'ONU pour la sécurité humaine en Afrique et dans le monde. Pendant des décennies, le Canada a été la principale nation de maintien de la paix. Neuf chefs des forces de l'ONU dans les années 1990 étaient canadiens. Quatre d'entre eux étaient en Afrique, mais nous n'en avons eu aucun autre depuis.
Le Canada n'a aucune troupe ou unité déployée dans les opérations de paix de l'ONU en Afrique, et dans le document que je vous ai fourni, vous verrez qu'il n'y a que 17 militaires déployés dans les opérations de maintien de la paix de l'ONU et que le nombre de femmes militaires canadiennes déployées en Afrique sous l'égide de l'ONU n'est que de deux, malgré l'initiative Elsie.
L'Afrique est importante et il faut résoudre les conflits qui la touchent. Ces conflits sont des plaies ouvertes sur le corps du monde. Ils provoquent des hémorragies, répandent des maladies, créent des enfants soldats, affaiblissent la démocratie, favorisent la dictature et provoquent d'importants mouvements de réfugiés.
Cela dit, l'Afrique a beaucoup à offrir. Elle possède des ressources naturelles qui contribueront à alimenter le monde à l'avenir, et des ressources humaines qui peuvent aider à résoudre les problèmes relatifs à la population vieillissante en Occident. Les Africains ont fait preuve de courage face à l'adversité, de joie en pleine pauvreté et d'un espoir inébranlable malgré les coups portés à leur corps politique. Ils ont toutefois besoin d'aide.
[Français]
Le Canada peut faire beaucoup plus pour la paix et la sécurité en Afrique.
Je vous remercie profondément de m'offrir cette occasion de m'exprimer.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie de me donner la parole sur un thème aussi important que les relations entre le Canada et l'Afrique.
Étant donné que je ne suis pas un spécialiste de la politique étrangère ou africaine du Canada, je voudrais, en guise de propos introductifs, soulever quatre points qui me paraissent importants pour mieux comprendre le contexte dans lequel il faut situer l'engagement du Canada en Afrique.
Le premier point renvoie aux mutations rapides du contexte intérieur en Afrique et de ses implications internationales. Cela se manifeste par l'engagement des citoyens, par exemple dans les questions internationales, ce qui n'était pas le cas auparavant. Les citoyens développent en Afrique de plus en plus de nouvelles formes de ce que l'on pourrait appeler des points de veto sur les relations entre leur pays et l'extérieur, particulièrement les pays occidentaux. Cela est rendu possible par plusieurs facteurs qui sont négligés, comme l'urbanisation rapide, la réduction du fossé numérique, l'utilisation généralisée des réseaux sociaux comme WhatsApp, ainsi que le développement d'applications locales qui utilisent des langues locales et faciles d'accès, même pour des personnes qui ne sont pas allées à l'école. Ces changements sont également favorisés par l'émergence d'une classe moyenne et d'une diaspora éduquée et de plus en plus connectée au continent.
Le deuxième point concerne les défis posés au Canada et à d'autres pays occidentaux en Afrique par les pays émergents, avec la Chine au premier rang. Alors que la Chine institutionnalise des relations solides avec l'Afrique et que d'autres puissances émergentes comme la Turquie, l'Inde, le Brésil et d'autres suivent son exemple, l'Afrique gagne en marge de manœuvre politique, économique et stratégique. Elle devient ainsi moins vulnérable que par le passé par rapport à l'Union européenne, au Canada ou aux États-Unis. Pour illustrer cette situation, mes collègues ont déjà souligné l'exemple de la France, une des puissances principales de la région, qui est maintenant quasiment expulsée du contexte sahélien, notamment du Mali, du Niger et du Burkina Faso. Il y a un autre exemple que vous connaissez tous, soit le récent vote des pays africains à l'ONU lors de l'adoption des résolutions condamnant l'invasion de l'Ukraine par la Russie. On voit là que les pays africains s'alignent de moins en moins sur les positions occidentales.
Le troisième point concerne les défis sécuritaires et les remous politiques qu'ils provoquent dans plusieurs régions, que ce soit au Sahel, dans la Corne de l'Afrique ou en Afrique Centrale. Cette situation peut être vue soit comme une opportunité d'un engagement plus fort et plus en phase avec les attentes des Africains, soit comme un motif du désengagement. Là aussi, comme mes collègues l'ont souligné, certains pays comme la Russie ou la Turquie font le pari d'aller dans le sens des événements en espérant que cela leur ouvre des opportunités pour gagner en influence, même si ce n'est pas nécessairement dans l'intérêt des populations africaines. Ce que je remarque, c'est que d'autres pays, notamment les pays occidentaux, ont généralement tendance à être plutôt rebutés par cette situation et laissent la scène à leurs concurrents. Je pense donc que le Canada devra définir sa politique dans de telles circonstances.
Le dernier point, qui est lié au précédent, renvoie à ce que Christopher Hill, un auteur spécialisé dans les relations entre l'Union européenne et l'Afrique, a appelé l'écart entre les attentes et les capacités. C'est un problème qu'une collègue italienne et moi avons exploré en profondeur dans un livre collectif sur les relations entre l'Union européenne et l'Afrique. Cependant, je pense que cela s'applique encore mieux au cas du Canada, comme l'a rappelé mon collègue tout à l'heure. Cette question d'écart entre les attentes et les capacités fait référence au fait que les ressources, les instruments, les procédures et les valeurs que le Canada met de l'avant ou dont il dispose ne sont souvent pas suffisamment solides ou adaptés pour donner au Canada la possibilité de mettre en œuvre des politiques ambitieuses sur le continent africain.
Pour conclure, je mets en exergue trois idées principales. Premièrement, dans un contexte comme celui que je viens d'exposer, il est indéniable que les approches des partenaires traditionnels de l'Afrique sont obsolètes par rapport aux dynamiques politiques et sociales actuelles du continent. Deuxièmement, toute politique visant l'Afrique doit être adaptée en fonction de ses dynamiques internes et internationales. Enfin, troisièmement, le respect et la concertation doivent être au cœur des politiques à l'égard de l'Afrique, car l'Afrique change et est de plus en plus demandeuse de souveraineté et de plus d'autonomie.
Je vous remercie.
:
C'est une excellente question.
Tout d'abord, dans la région où se trouve le groupe Wagner — et nous constatons que son empreinte s'élargit; elle a commencé au Mali et au Mozambique et se déplace plus rapidement vers le Burkina Faso, le Niger et, probablement bientôt, le Tchad —, il n'est pas possible d'être concurrentiels alors qu'il faut assurer la sécurité des travailleurs locaux et des travailleurs étrangers. Je vous donne un exemple. Il existe une mine canadienne que les travailleurs ont temporairement quittée en raison de l'insurrection en République centrafricaine, non loin de Bangui. C'est maintenant le groupe Wagner qui la possède, et le Trésor américain estime qu'elle vaut entre 1 et 2,8 milliards de dollars américains.
Le problème auquel est confronté le secteur minier canadien n'est pas propre au Canada. Il touche aussi d'autres pays qui exercent leurs activités en partenariat avec des pays africains dans le secteur, même la Chine. C'est assez paradoxal, mais même la Chine, qui a une amitié sans limites avec la Russie, est en concurrence avec la Russie, notamment avec le groupe Wagner et les mercenaires. Les mercenaires sont là pour profiter du chaos et le favoriser afin d'exploiter les ressources naturelles, car les activités minières normales ne fonctionnent que lorsque la situation est sécuritaire.
:
Dans tous les pays que j'ai examinés, les populations veulent la paix. Les forces en présence, comme les mercenaires et le groupe Wagner, qui s'en prennent aux populations locales et qui utilisent la guerre comme moyen de s'enrichir sont celles qui sont réfractaires à la paix. Les Casques bleus devraient être là pour protéger les civils. Chaque mission multidimensionnelle de l'ONU depuis que le Canada a adopté la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU — lors de notre dernier mandat au Conseil de sécurité de l'ONU — pour la protection des civils, a eu l'obligation de protéger les civils. Il est vraiment important que l'ONU soit présente pour gagner les cœurs et les esprits.
Toutefois, pour répondre à votre deuxième question, l'ONU ne dispose pas des outils dont elle a besoin pour faire ce travail, car trop peu de pays sont prêts à fournir leurs hommes et leurs femmes en uniforme pour prendre des mesures musclées, comme nous l'avions promis avec la force de réaction rapide, qui visait précisément cela. Les Portugais ont fait un travail remarquable en République centrafricaine en protégeant les civils et en s'attaquant à certaines bandes qui sévissaient contre les civils. Il faut que d'autres pays suivent cet exemple et fournissent des unités capables de faire du bon travail.
Il existe une foule d'outils pour amener les parties à la table des négociations. L'un d'entre eux consiste à leur montrer qu'elles se porteront mieux dans une société où règne la primauté du droit que dans une société où ils peuvent eux-mêmes être victimes du chaos.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
[Français]
Je remercie les témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
Plus tôt, M. Gazibo nous a dit qu'il fallait respecter l'Afrique, sa souveraineté et son autonomie.
[Traduction]
M. Akuffo a parlé d'un sujet similaire durant son témoignage. Lorsque j'ai discuté avec lui en dehors d'une réunion du Comité, il a dit que nous devions utiliser une approche distincte envers l'Afrique et ne pas nécessairement répondre à la Russie et à la Chine. Nous devons évidemment être au courant de leur situation et de celle d'autres acteurs. Il faut toutefois traiter l'Afrique de façon distincte, comme le suggère le témoignage que nous venons d'entendre.
Monsieur Dorn, je sais que vous êtes professeur au Collège militaire royal. J'ai déjà été dans la réserve, alors je comprends l'environnement dans lequel vous travaillez. Vous avez parlé de Roméo Dallaire et d'autres personnes qui ont mené des missions de maintien de la paix dans le passé. Souvent, lors de nos interventions et de nos activités, nous ne suivons pas le principe qui vient d'être mentionné ici devant le Comité et ailleurs.
Comment devraient se dérouler les futures interventions de notre pays — si nous décidons d'agir —, afin de maintenir la paix et la sécurité tout en assurant le respect de la souveraineté, de l'autonomie et de la capacité d'agir des pays et des régions d'Afrique où nous intervenons?
:
On peut le faire parce que le premier principe qui guide les opérations de maintien de la paix de l'ONU est le consentement. Il faut obtenir le consentement de l'État hôte et des principaux acteurs du conflit. Le deuxième est l'impartialité et le troisième est le recours minimal à la force pour la défense et l'appui au mandat.
Nous pouvons renforcer ce partenariat avec les pays africains si nous le considérons comme tel. Les forces de maintien de la paix ne s'imposent pas. Elles sont là pour travailler avec les forces locales. Cela fait partie d'un processus de transition, de sorte qu'au fur et à mesure que les forces de maintien de la paix sont réduites, les forces locales puissent assumer une plus grande responsabilité.
Un problème survient lorsque certains pays, comme le Mali, deviennent des dictatures. Ils ne veulent plus être surveillés. Les dirigeants ne veulent pas que l'ONU assure une surveillance. Lorsqu'on a autant de gens sur le terrain, on a énormément de poids. Grâce au déploiement des Casques bleus dans le nord, le centre et le sud du Mali, l'ONU exerce beaucoup d'influence dans le pays. Les dirigeants n'aiment pas ressentir cette pression de l'ONU.
Je pense qu'il est vraiment important d'assurer le maintien de la paix et de considérer ces efforts comme un partenariat. Cependant, c'est très difficile de le faire lorsque les dirigeants eux-mêmes veulent commettre des violations des droits de la personne puisque l'ONU a une politique de diligence raisonnable en matière de droits de la personne.
Ma réponse est probablement trop longue.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence et de nous éclairer de leurs commentaires et de leurs réponses.
Professeur Gazibo, puisque vous avez été jusqu'à présent négligé par nos collègues, je vais me concentrer sur vous. Vous avez entrepris une série de travaux, notamment sur la question de la démocratie, mais également sur la montée en puissance de la Chine. J'aimerais peut-être faire un lien entre les deux.
Je suis d'accord avec mon collègue M. Zuberi sur le fait qu'il faut nous intéresser à l'Afrique pour l'Afrique, et non pas en réaction à l'implication d'autres puissances. Cependant, le fait est que d'autres puissances occupent désormais un terrain qui, comme vous l'avez souligné, avait été laissé vacant par nombre de pays occidentaux, dont le Canada. Ces autres puissances comprennent la Chine et la Russie, entre autres.
J'aimerais faire un lien entre la démocratie et la montée en puissance de la Chine et de la Russie, qui, on le sait, cherchent à faire la démonstration que la démocratie n'est pas un bon système. Croyez-vous que ces deux pays agissent comme agents perturbateurs quant au développement de la démocratie en Afrique?
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Merci beaucoup de la question.
J'ai effectivement travaillé sur la Chine. Je suis allé à Pékin il y a quelques années pour mener une recherche qui se concentrait sur cette question. Quand on pose la question aux diplomates et aux chercheurs, on constate que, en réalité, la Chine est très différente de la Russie. Aujourd'hui, la Russie est assurément un élément perturbateur en matière de démocratie, de liberté et de sécurité. Pour ce qui est de la Chine, par contre, c'est en fait un pays qui est essentiellement intéressé par la stabilité. Bien sûr, la Chine ne va pas promouvoir la démocratie, mais, si un régime démocratique travaille avec elle, elle ne va pas essayer de renverser le gouvernement ou de pervertir le système démocratique.
Il faut comprendre qu'on a affaire à des puissances émergentes qui sont très différentes, qui sont parfois en concurrence entre elles et qui sont en concurrence avec les pays occidentaux. Cette concurrence se joue sur des plans différents. Elle peut être politique, comme c'est le cas pour la Russie. Ce pays a un véritable programme politique, comme en témoigne aussi son incursion dans certains pays comme ceux du Sahel, la République centrafricaine et d'autres. Pour la Chine, par contre, la concurrence se situe essentiellement sur le plan économique. Par ailleurs, il y a d'autres acteurs dont on ne parle pas beaucoup, comme la Turquie, le Brésil et les Émirats arabes unis. Le contexte est donc très complexe.
Voilà ce que j'avais à dire sur la question.
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Oui. Je parlais tout à l'heure de l'écart entre les attentes et les capacités. Dans le cas du Canada, cela fait référence au fait que le pays n'investit pas les ressources nécessaires. Je ne suis pas un spécialiste de la politique du Canada, mais, si on recule de 20 ans, on constate que sa politique de concentration a fait qu'il a abandonné un grand nombre de pays.
Comme mon collègue l'a dit tout à l'heure, le Canada n'investit pas dans les questions de sécurité en Afrique. Le Canada n'investit pas assez, il est beaucoup plus préoccupé par l'industrie minière. Or, d'autres pays, comme la Turquie, dont le produit intérieur brut est beaucoup plus faible, investissent aujourd'hui beaucoup plus que le Canada.
Pourtant, de tous les pays occidentaux autres que ceux de l'Europe du Nord, le Canada est en réalité un de ceux qui ont le plus d'atouts sur le continent africain. En effet, il n'a pas de passé colonial et n'est pas perçu comme dominateur. Il ne fait pas montre de cette arrogance qu'on prête parfois à la France ou aux États‑Unis. Il a tout un passé de maintien de la paix et de construction d'écoles. Le Canada est en outre perçu comme un pays accueillant et où on peut se réaliser, même quand on est étranger. Le Canada dispose donc d'énormément d'atouts, mais les moyens qu'il met en œuvre…
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup pour tous ces témoignages intéressants. Cela a été très instructif.
J'aimerais parler un peu du maintien de la paix. De toute évidence, nous n'avons pas respecté nos obligations en matière de maintien de la paix dans quelque cadre que ce soit. Nous savons que le gouvernement actuel a promis d'augmenter considérablement le nombre de Casques bleus, mais cela ne s'est pas concrétisé.
Je suis très déçue de voir qu'il n'y a que deux femmes au sein des Casques bleus — du personnel militaire — en Afrique, surtout si l'on tient compte de notre politique d'aide internationale féministe. L'un des six piliers est « la paix et la sécurité », l'accent étant mis sur le fait de s'assurer que les femmes contribuent aux solutions, sachant que lorsque les femmes sont impliquées, la paix est, bien sûr, beaucoup plus durable.
Monsieur Dorn, qu'est‑ce qui empêche le Canada d'avoir plus de Casques bleus? Qu'est‑ce qui empêche le Canada d'avoir plus de femmes qui veulent jouer un rôle dans le maintien de la paix sur le continent africain?
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Un grand nombre d'officières veulent être déployées et se plaignent d'essayer depuis plus de cinq ans. Elles sont très nombreuses. En effet, les femmes représentent environ 16 % de notre armée et je ne pense donc pas qu'il s'agisse d'une question de ressources.
Au cours des 20 dernières années, j'ai demandé des explications et plaidé pour l'augmentation des activités de maintien de la paix auprès de presque tous les chefs d'état-major de la défense, ou CEMD. En général, on me répond en évoquant l'aversion au risque. On veut éviter les déploiements dans certaines régions. Quand j'ai parlé au CEMD Vance, il m'a dit ne pas vouloir déployer de femmes au nord du Soudan du Sud parce que c'est très dangereux. C'est ce qu'il m'a dit.
Cela décrit bien leurs priorités militaires. Cela fait 20 ans que je m'interroge. J'ai quitté les États-Unis pour revenir au Canada parce que je voulais participer aux activités canadiennes de maintien de la paix: c'était un facteur très important. J'ai été brutalement déçu de voir le Canada passer de la première à la 67e place. Je ne me l'explique toujours pas. J'envisage d'écrire un livre à ce sujet. Le principal facteur est la réticence des Forces armées canadiennes. L'aversion au risque est plus forte et on manque de volonté politique pour faire avancer les choses.
Je sais que je risque d'avoir des ennuis en disant cela, mais c'est ce que me mènent à conclure les 10 années que j'ai passées à essayer de m'expliquer le problème.
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Les coûts sont très importants, mais je répondrai de manière positive.
De nombreux officiers à qui j'ai parlé ont fréquenté le Centre Pearson pour le maintien de la paix, qui a existé de 1994 à 2013, mais qui a aujourd'hui fermé ses portes. Le Canada n'a plus de centre où former les militaires, les policiers et les civils au maintien de la paix. Auparavant, nous accueillions des gens des quatre coins du monde.
J'ai travaillé au Collège des Forces canadiennes, dont les étudiants viennent de plus de 20 pays. Le Collège contribue vraiment à notre réputation.
Même si nous ne participons plus au maintien de la paix, nous bénéficions toujours du fait d'avoir ajouté un millier de soldats de la paix pendant 40 ans. Cette réputation s'étiole avec le temps et finira par ne plus nous servir.
Le Canada est le seul pays qui a renforcé sa présence au Rwanda pendant le génocide de 100 jours en 1994. Ce moment est une source de grande fierté. Je connais certains des soldats qui ont risqué leur vie lors de cette opération et qui ont souffert du syndrome de choc post-traumatique par la suite.
Quant au Soudan, lorsque le Pentagone m'a demandé d'examiner la résolution provisoire à soumettre au Conseil de sécurité, j'ai fait remarquer que la mission des Nations unies là‑bas était une mission politique spéciale, et non pas une opération de maintien de la paix. J'ai dit que cette stratégie était inadéquate et que des forces de maintien de la paix devaient être déployées. Il faut vraiment renforcer la présence de l'ONU. La mission politique spéciale a laissé le Soudan aux prises avec une guerre entre les deux généraux.
Il est extrêmement urgent de déployer au Soudan des forces de maintien de la paix qui seront en mesure d'apaiser la tension entre deux individus qui entretiennent une animosité mutuelle et qui ont mis sur pied des institutions tout aussi hostiles les unes envers les autres.
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Merci, monsieur le président.
Je reviens au point soulevé par ma collègue.
Je vais rependre les propos du sénateur Dallaire, qui a dit que les cercles onusiens de maintien de la paix percevaient le Canada comme un « grand parleur, petit faiseur » — l'expression est de lui — qui évite de s'engager dans des missions à long terme. Je supposais que cette inaction était due au nombre insuffisant de recrues ou à la pénurie des effectifs.
Si je vous ai bien compris, le problème n'est pas là. Il y a des gens au Canada qui voudraient assumer des fonctions de maintien de la paix. C'est la volonté politique qui manque.
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Merci, monsieur le président. Merci à tous les témoins.
Nous ne sommes pas le comité de la défense, mais je voudrais creuser la question du maintien de la paix.
Je suis content que vous ayez mentionné le Collège des Forces canadiennes. Je me rends compte que les opérations de maintien de la paix qui se déroulent en 2024 en Afrique ont changé par rapport à ce qu'elles étaient dans les années 1990. Aujourd'hui, nous déployons des forces lorsque notre aide est sollicitée. Nous ne nous engageons pas et nous n'essayons pas de fournir de ressources aux Africains, car ils ont déjà les leurs. Je reprends ce que vous avez dit.
Je veux être bien certain de comprendre quels seraient, selon vous, les besoins dans le spectre de l'édification de la paix, du rétablissement de la paix et du maintien de la paix et le rôle que le Canada pourrait jouer. Si l'Afrique a déjà des soldats, quelle valeur ajoutée le Canada peut‑il fournir qui différait de ce que nous faisions lorsque nous envoyions des militaires dans le monde révolu des années 1990?
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Merci, monsieur le président.
Ce commentaire quant à la différence des approches empruntées par la Russie et la Chine est fort intéressant.
Monsieur Gazibo, je reviens à vous pour parler d'un autre sujet qui retient votre attention, celui de la francophonie.
L'Afrique est probablement le prochain eldorado sur le plan économique. L'Afrique est également le motif qui fera que le français sera l'une des langues, sinon la langue, qui connaîtra la progression la plus importante au cours des 50 prochaines années. Le Canada en est-il conscient, et pose-t-il les gestes qu'il devrait poser pour être conséquent à l'égard de ces facteurs?
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Je suis d'accord avec vous.
Certains pays, comme la République démocratique du Congo, sont les réservoirs de locuteurs francophones d'aujourd'hui et de demain. Est-ce que le Canada en est conscient? Je crois que oui. Par contre, le Canada laisse trop souvent la direction des opérations à la France. C'est ce que j'ai pu constater lorsque j'ai participé il y a longtemps à plusieurs rencontres de la Francophonie, notamment celles portant sur la préparation de la Déclaration de Bamako.
C'est comme s'il y avait eu un retour de manivelle. Aujourd'hui, on peut dire que la France est en grande difficulté dans son espace, et ce, pour plusieurs raisons: la question du colonialisme et du néocolonialisme, la monnaie et les interventions étrangères. Comme je le disais tout à l'heure, le contexte a changé, mais pas les pratiques.
Si le Canada ne prend pas un rôle plus directeur par l'entremise du Québec, en arrimant mieux les objectifs de la Francophonie à la vision que partagent davantage les pays africains, il y a le risque que le français soit vu essentiellement à travers le prisme de la France. Cela dit, je n'ai rien contre la France. Je remarque simplement qu'aujourd'hui, toute politique qui passe par la France est plus…
Monsieur Dorn, je vais vous poser une autre question.
Certains ont soulevé la question de savoir si les opérations de maintien de la paix remplissent encore leur mandat en 2024. J'ai parcouru le document intitulé Un Nouvel Agenda pour la paix publié par les Nations unies l'été dernier, il y a environ un an. En voici un extrait: « Pour que le maintien de la paix reste adapté à sa finalité, il convient de mener une réflexion approfondie et rigoureuse sur son avenir, en vue d'élaborer des modèles de missions souples, modulables et dotées de stratégies de transition et de sortie appropriées et prospectives. »
Quel est le meilleur moyen d'intégrer le Canada à la conversation? De quels outils avons-nous besoin?
:
Sur ce, nous mettons fin à la première moitié de la réunion.
Monsieur Arduino, merci encore une fois de vous être joint à nous à partir de l'Italie à une heure très tardive.
Monsieur Dorn, merci de nous avoir fait part de vos observations et de votre expertise.
Monsieur Gazibo, un immense merci de votre présence parmi nous aujourd'hui. Nous vous enverrons un exemplaire du rapport aussitôt qu'il sera prêt.
Nous allons suspendre la séance pendant trois minutes pour laisser le deuxième groupe de témoins s'installer.
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Nous reprenons nos travaux.
Nous sommes de retour avec le deuxième groupe de témoins.
Nous avons la chance de recevoir M. Andrew Grant, de l'Université Queen's. Nous avons Mme Amali Tower, fondatrice et directrice exécutive de Climate Refugees. Enfin, nous accueillons — le dernier et non le moindre — M. Jean-Louis Roy, président de Partenariat international.
Vous disposerez de cinq minutes chacun pour votre déclaration liminaire. Nous enchaînerons ensuite avec les questions des membres du Comité. Je vous demanderais de regarder de temps en temps la présidence. Vous saurez qu'il vous reste 10 secondes si vous me voyez agiter mon cellulaire. Soyez attentifs à ce signal pour que nous ne prenions pas de retard.
Sur ce, nous allons commencer avec M. Grant.
La parole est à vous. Vous avez cinq minutes pour votre déclaration liminaire.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de me recevoir.
Mes remarques s'appuient sur les travaux que je mène sur le terrain depuis plus de 20 ans un peu partout en Afrique, notamment sur des entrevues réalisées avec des représentants des gouvernements, des employés de sociétés minières, des organismes de la société civile ainsi que des mineurs-artisans et des commerçants de minéraux. Elles tiennent compte également des observations de participants dans les zones minières éloignées des capitales nationales.
Comme le Canada, de nombreux pays en Afrique sont riches en ressources minières. Par contre, ces pays ne possèdent pas la capacité du Canada qui leur permettrait de mettre en place de bonnes pratiques de gouvernance dans le secteur minier.
Sur la scène internationale, le Canada est un acteur puissant dans l'industrie minière. Les sociétés minières canadiennes font partie des plus importantes sur la planète. Un nombre élevé d'ingénieurs et de cadres canadiens travaillent pour des sociétés minières de toutes les tailles aux quatre coins du globe. Les scientifiques et les ingénieurs canadiens sont à la pointe de l'innovation dans le domaine des technologies minières, des batteries rechargeables et des technologies variées d'énergie propre. Depuis plus de 20 ans, le Canada se pose en meneur dans les initiatives mondiales visant à améliorer la sécurité des travailleurs des mines, telles que le Processus de Kimberley sur les diamants de la guerre et les Principes volontaires sur la sécurité et les droits de l'homme.
Comme d'autres témoins l'ont souligné, le Canada a une longue tradition de coopération avec l'Afrique, qui s'est traduite toutefois par des engagements plus ou moins longs. L'établissement d'une mission et d'un poste d'observateur permanent à la Commission de l'Union africaine est l'exemple le plus récent de la promesse de coopération du Canada.
Le Canada peut tirer parti de son statut de puissance minière pour renforcer et faire progresser encore plus la coopération économique avec l'Afrique en déployant des efforts diplomatiques qui favoriseront les échanges commerciaux et les investissements accrus avec les partenaires africains dans le secteur minier sur le continent. Pour les pays africains, les partenariats avec le Canada sont attrayants étant donné la réputation du Canada d'intermédiaire honnête et de défenseur des échanges commerciaux et des investissements fondés sur des règles de même que le soutien qu'il apporte à la sécurité des travailleurs, à la primauté du droit et au développement durable. Ces éléments contribuent à l'atteinte des objectifs de développement économique des pays africains.
Il existe de nombreuses raisons de maintenir une coopération économique étroite entre le Canada et l'Afrique dans le contexte du secteur des ressources minières dans la région. Je vais m'attarder sur l'une d'entre elles, soit l'importance géopolitique que revêtent les chaînes d'approvisionnement de minéraux critiques en raison de la transition énergétique mise en œuvre pour répondre à l'accélération rapide des changements climatiques.
Les minéraux critiques et le contrôle des chaînes d'approvisionnement représentent la nouvelle frontière géopolitique, ce que la Chine a anticipé avec clairvoyance il y a une trentaine d'années. Ces ressources minérales très convoitées sont essentielles à la fabrication des composantes aérospatiales, magnétiques et électroniques et à celles des équipements liés à la défense et aux énergies propres.
Les plus proches alliés et partenaires commerciaux du Canada — les États‑Unis, le Royaume‑Uni, les membres de l'Union européenne, le Japon et l'Australie — ont tous compris que ce serait dans leur intérêt national d'éviter la dépendance aux minéraux critiques provenant d'un pays en particulier qui est par ailleurs un concurrent principal sur la scène internationale, que ce soit en amont de la chaîne d'approvisionnement avec les minéraux bruts ou transformés, ou en aval, avec les produits manufacturés tels que les véhicules électriques et les technologies militaires et de défense.
La notion d'économie d'affinité devrait aussi guider l'approche du Canada par rapport aux chaînes d'approvisionnement des minéraux critiques. Le Canada et les nombreux pays africains qui comptent des réserves importantes de ces minéraux pourraient donc réaliser des profits considérables de l'exploitation minière et de la transformation de ces ressources. Pour que ces avantages se concrétisent, ces pays doivent renforcer la qualité de la gouvernance de la chaîne d'approvisionnement et apprendre comment mieux évoluer dans un environnement géopolitique complexe, y compris avec les risques que pose la dépendance envers un pays en particulier.
Le Canada peut se servir de son statut de puissance minière pour promouvoir les pratiques exemplaires qui permettront d'instaurer des chaînes d'approvisionnement de minéraux critiques inclusives, transparentes et responsables sur le plan environnemental dans les États membres de l'Union africaine et pour offrir par le fait même une solution attrayante qui les soustrairait à l'influence de la Chine en Afrique. L'augmentation du nombre de délégations commerciales canadiennes en Afrique est un outil important de promotion des pratiques exemplaires et de l'établissement de partenariats solides avec les pays et les entrepreneurs africains.
Merci encore une fois, monsieur le président. Je serai heureux d'approfondir n'importe lequel des points que je viens d'aborder.
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Bonjour, et merci aux membres du Comité de m'avoir aimablement invitée à participer à cette importante discussion sur l'approche du Canada à l'égard de l'Afrique.
J'ai fondé Climate Refugees il y a 10 ans après avoir travaillé avec des réfugiés partout dans le monde, surtout en Afrique. Ce travail m'a permis de constater que les changements climatiques ont de plus en plus de répercussions sur la mobilité partout dans le monde. En Afrique, les collectivités sont aux prises avec une pauvreté croissante, des pertes et des dommages de plus en plus importants, un recul du développement et l'érosion des droits de la personne. Les migrations forcées ne sont que l'un de ces effets néfastes, mais elles sont inextricablement liées à la sécurité humaine où les conflits sont exacerbés.
Même si l'Afrique est responsable de moins de 4 % des émissions de carbone, elle est aux premières lignes des répercussions climatiques et dispose de la plus faible capacité et du plus faible soutien international pour y répondre. Cette injustice fondamentale doit être au cœur de toute stratégie concernant le continent africain.
Les pertes que subit actuellement l'Afrique sont un recul par rapport aux gains déjà réalisés dans le cadre des objectifs de développement durable des Nations unies qui sont une priorité clé du programme d'aide internationale du Canada. Au Kenya, les gens m'ont raconté comment des pluies avaient submergé des écoles et des cliniques locales, ce qui met clairement en péril les objectifs de l'ONU de fournir une éducation de qualité et de bons soins de santé pour tous. Dans une collectivité insulaire isolée aux prises avec la montée du lac et l'empiétement de la faune, j'ai parlé à une femme qui a dû accoucher dans un bateau fragile entouré de crocodiles. On peut donc facilement comprendre pourquoi certaines personnes en viennent à se dire qu'elles n'ont pas d'autre choix que d'aller vivre ailleurs, tandis que d'autres restent prises au piège parce qu'elles n'ont pas les ressources nécessaires pour partir.
Les discussions que Climate Refugees a eues avec des collectivités au Kenya, en Somalie et dans le bassin du lac Tchad confirment que le climat est un moteur d'insécurité. Les scientifiques ont confirmé que l'Afrique se réchauffe plus rapidement que le reste de la planète, ce qui entraîne de la sécheresse et une rareté des ressources. Le mois dernier, l'Organisation internationale pour les migrations et l'Union africaine ont confirmé que les changements climatiques exacerbent de plus en plus les conflits et l'insécurité en Afrique.
La Corne de l'Afrique est aux prises avec la pire sécheresse qu'elle ait jamais connue. J'ai parlé à des éleveurs au Kenya et en Somalie qui ont perdu leur bétail — leur gagne-pain —, et les familles font maintenant face à la famine ou à une grave insécurité alimentaire. Dans certains cas, les conflits entre les groupes sont devenus mortels.
J'ai vu une situation semblable autour du bassin du lac Tchad, où vivent au moins 40 millions de personnes, où les températures ont augmenté de près de deux degrés Celsius depuis les années 1960, et où les précipitations sont devenues de plus en plus imprévisibles. Le début du conflit avec Boko Haram, en 2009, a forcé de nombreuses personnes à quitter la région, même si, dans bien des cas, les gens ont d'abord été déplacés à l'intérieur de la région en raison des changements climatiques. Au cours de mes discussions avec les habitants, certains ont déclaré avoir été déplacés pour la première fois en 1973.
Quel est le rôle du Canada dans tout cela? D'une part, le Canada a la réputation d'être généreux en matière d'aide étrangère et d'être très accueillant à l'égard des réfugiés. D'autre part, des difficultés internes font en sorte que ses politiques d'immigration sont bloquées.
Je rappelle aux membres du Comité que personne ne veut être forcé de quitter sa maison, et pourtant, c'est ce qui se passe de plus en plus souvent partout dans le monde aujourd'hui, en Afrique et ailleurs. À l'échelle mondiale, plus de 114 millions de personnes ont été déplacées de force, et c'était avant Gaza.
Les conflits et la violence continuent d'être les principaux moteurs des migrations et des déplacements en Afrique subsaharienne, mais ils sont accentués par les chocs climatiques, ce qui met en lumière les liens entre les moteurs des migrations et la pauvreté, la perte de moyens de subsistance et l'instabilité politique. Les efforts du Canada en Afrique peuvent être renforcés en offrant un soutien financier solide et accessible aux collectivités, un soutien proportionnel à ses émissions mondiales historiques et courantes et conforme à ses promesses climatiques et à ses engagements à l'ONU à l'égard de l'hémisphère Sud. Cela veut dire notamment augmenter de façon rapide et urgente son financement par subvention destiné aux mesures d'adaptation climatiques et ses contributions au nouveau Fonds pour les pertes et dommages.
Il ne faut pas oublier qu'une grande partie des déplacements en Afrique a lieu à l'intérieur du continent et que, même si les États africains ont intensifié leur collaboration transfrontalière, les pays de l'hémisphère Nord n'en ont pas fait autant pour répondre aux besoins et assumer leurs responsabilités. Le Canada peut aider les Africains à s'adapter aux changements climatiques sur le continent, dans la mesure du possible; il peut soutenir et faciliter les migrations volontaires lorsque les déplacements deviennent nécessaires; et il peut indemniser les collectivités qui ont subi des pertes indues en raison des effets irréversibles des changements climatiques. Le Canada peut également, et a le devoir de le faire, poursuivre son engagement à l'égard du droit international en matière de droits de la personne et de ses programmes de gestion des migrations, de l'asile et de sa frontière avec les États-Unis, en assurant la protection des migrants et des demandeurs d'asile qui arrivent à ses frontières.
Le Canada devrait examiner des façons de protéger les personnes déplacées en raison des changements climatiques, et partager cette responsabilité avec l'Afrique. Par exemple, la politique d'asile canadienne pourrait inclure la décision du Comité des droits de l'homme des Nations unies de ne pas déporter les personnes dont le droit à la vie est menacé par les changements climatiques. Le Canada pourrait également mettre à profit son populaire programme de parrainage en créant une catégorie pour les migrants climatiques afin de protéger les personnes dont la vie est menacée par cette crise. L'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés a mentionné ces options.
En fin de compte, ces suggestions vont au‑delà de l'approche du Canada à l'égard de l'Afrique. Si elles sont mises en œuvre en partenariat avec les pays et les collectivités touchés, le Canada peut être un exemple de collaboration mondiale et une lueur d'espoir dans la crise climatique.
Je vous remercie.
:
Monsieur le président, merci beaucoup.
Mesdames et messieurs les députés, je vous salue tous. J'ai presque envie de garder le silence.
[Traduction]
Il y a tellement de choses à dire au sujet de la nouvelle Afrique, comme l'a mentionné M. Oliphant. Nous ne sommes pas en 2000. Nous sommes en 2024, et nous serons un jour en 2030, en 2034 et en 2040.
[Français]
Nous serons bientôt en 2045. Tous les 10 ans, la population de l'Afrique augmentera de l'équivalent de la population des États‑Unis. Le nombre d'Africains augmentera de 400 millions au cours des 10 prochaines années, de 800 millions dans les 20 prochaines années et de 1,2 milliard dans les 30 prochaines années. C'est urgent, nous parlons de choses vraiment urgentes. Je voudrais aussi dire qu'il va entrer sur le marché du travail en Afrique 150 millions de jeunes de moins de 25 ans d'ici 2035.
[Traduction]
C'est dans 10 ans, pas dans 50 ans, mais bien dans 10 ans.
Un jour, l'Afrique représentera le quart de l'humanité. L'Inde en représentera 15 %, la Chine 12 %, l'Union européenne 4,5 %, et les États-Unis 4 %. On parle de 25 % des collectivités humaines.
[Français]
Quelque chose est urgent. Comme on va un peu critiquer, peut-être, je voudrais d'abord saluer le travail que font les Canadiens en Afrique. Il y a plein de choses formidables qui…
:
Je saluais le travail que font les Canadiens en Afrique.
Le professeur Grant a dit tantôt qu'il allait en Afrique depuis 20 ans. Pour ma part, j'y vais depuis 21 ans, sinon 30. J'ai vu l'évolution de la présence canadienne. Je suis beaucoup allé en Afrique à titre de président de l'organisme Droits et Démocratie pendant sept ans et, précédemment, comme secrétaire général de la Francophonie pendant 12 ans. Je crois donc connaître l'Afrique, dans la mesure où on connaît une autre société, ce qui n’est pas évident, même si on l'a beaucoup fréquentée. Je vois les Canadiens travailler; je les vois chercher à marquer de leur présence les changements du continent. Toutefois, ils le font dans un contexte où la notoriété et la visibilité du Canada se sont beaucoup amenuisées ces dernières années.
[Traduction]
Il y a une quinzaine d'années, le Canada avait une signature importante en Afrique. Ce n'est plus le cas. Beaucoup de choses sont faites par des Canadiens — de grandes choses — en Afrique, mais il manque quelque chose.
[Français]
Qu'est-ce qu'on veut? Quelle est la vision? Quels sont les domaines visés? Est-ce qu'on veut travailler en énergie? On connaît ça, l'énergie, alors que je regarde un député de l'Alberta, qui est ici, au Comité. Le Québec aussi connaît ça, le secteur de l'énergie. Est-ce qu'on veut travailler dans ce secteur, ou plutôt dans le secteur de l'agriculture, ou encore dans le secteur de l'éducation? On ne peut pas travailler dans tous les secteurs, mais on a l'impression actuellement qu'on travaille à peu près dans tous les secteurs, un peu ici, un peu là.
Ce n'est pas inintéressant, mais il n'y a pas de signature canadienne qui apparaisse aujourd'hui sur le continent africain. Je regrette de le dire, et je m'ennuie. J'écoutais les gens qui ont parlé tantôt et qui parlaient du Centre Pearson pour le maintien de la paix. Je me rappelle du temps où il y avait ce centre, mais aussi l'organisme Droits et Démocratie, la coopération de la Cour suprême du Canada et celle des parlementaires, qui n'existe plus. Tout cela est à peu près disparu. Le Canada n'a plus les instruments qu'il a déjà eus, des instruments d'une très grande qualité.
Dans le cadre de la discussion qui va suivre, j'aimerais qu'on me pose des questions sur les domaines, les méthodes et les visées que devrait avoir le Canada pour le continent africain, y compris le Sahel, le Mali, le Burkina et le Niger.
:
Merci, monsieur le président.
Je veux parler de la situation économique de l'Afrique, particulièrement en ce qui a trait à l'énergie. La dette souveraine de l'Afrique a augmenté considérablement au cours des dernières années. Selon les données dont je dispose, le niveau d'endettement a augmenté d'environ 183 % depuis 2019, ce qui est beaucoup plus rapide que l'augmentation du PIB. La croissance africaine sur tout le continent a essentiellement stagné depuis la grande crise financière de 2008.
Actuellement, l'Afrique consomme 4 millions de barils de pétrole par jour pour une population de 1,4 milliard d'habitants. Pour mettre les choses en perspective, au Canada, nous consommons 2,5 millions de barils de pétrole par jour pour une population de 40 millions d'habitants. On assistera probablement au cours des prochaines années, à mesure que la croissance africaine se rétablira, à une hausse substantielle de la consommation d'énergie sur le continent. La plupart des pays en développement consomment trois fois plus de pétrole par habitant que l'Afrique, soit environ trois barils de pétrole par jour par habitant. Cela voudrait dire que dans tout le continent africain, on passerait de 4 millions de barils par jour à 12 millions.
Je voulais simplement vous faire part de ces chiffres et vous demander votre avis à ce sujet.
[Français]
Je sais que vous connaissez ces questions, mais je vais vous dire que certaines régions d'Afrique, notamment de l'Afrique de l'Ouest, sont en train de devenir des fournisseurs d'énergie, comme le Nigeria pour l'Égypte et pour le Maroc, ou le Niger pour d'autres parties du continent. N'oublions pas non plus les nouvelles technologies en matière d'énergie, qui sont très développées dans certains pays. J'en nomme un seul, le Maroc, où les nouvelles énergies, notamment l'énergie solaire, sont très développées. Le Maroc va sans doute aller du côté des énergies nouvelles.
:
Merci, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue aux témoins qui sont des nôtres aujourd'hui.
Madame Tower, je vais vous poser des questions en rafale et vous choisirez ensuite la façon d'y répondre.
D'abord, j'ai vu les résultats de vos recherches sur le bassin du lac Tchad, qui ont été présentés lors de la COP 26. Selon vous, quels aspects devrions-nous intégrer dans notre stratégie à l'égard de l'Afrique pour tenir compte des changements climatiques? Dans votre allocution d'ouverture, vous avez abordé certains aspects, mais nous avons entendu beaucoup de témoins parler de l'expertise du Canada en résilience climatique, notamment dans les secteurs de l'agriculture et de l'énergie verte. S'agit-il d'un aspect que nous devrions intégrer? Quel rôle le Canada pourrait-il jouer pour aider l'Afrique à atteindre ses objectifs en matière de sécurité climatique?
Enfin, comme vous l'avez bien mentionné, les populations vulnérables, entre autres en Afrique, sont disproportionnellement affectées par les changements climatiques. Comment le Canada pourrait-il soutenir davantage le Fonds vert pour le climat des Nations unies, qui vise à soutenir ces populations?
:
Je vous remercie de ces questions. Permettez-moi de commencer par la dernière.
En 2009, la communauté internationale s'est réunie et a promis — elle ne s'est pas engagée, mais a promis — que l'hémisphère Nord commencerait à verser 100 milliards de dollars par année à l'hémisphère Sud pour l'aider à s'adapter aux changements climatiques. Quand on parle de résilience, il faut se demander si cet argent s'est matérialisé de 2009 à 2024? Il ne s'est pas matérialisé, même une seule année. Le montant le plus élevé à avoir été versé s'élève à un peu plus de 80 milliards de dollars, et c'est un chiffre très contesté. C'est l'OCDE qui le dit. De ce montant, plus de 60 % sont généralement des prêts. C'est censé être du financement par subvention.
J'ai entendu quelqu'un poser une question au sujet de ce que je qualifierais de crise croissante de la dette en Afrique. Si on n'aide pas les pays à s'adapter et à renforcer leur résilience — réfléchissons bien à ce que signifient ces termes — et si on fournit du financement sous forme de prêts, est‑ce différent de ce qu'on a vu dans les années 1990 avec les programmes d'ajustement structurel qui ont été mis en place? Nous savons déjà qu'ils n'ont pas fonctionné, et leurs effets négatifs se font déjà sentir. Les États africains ont dû privatiser l'éducation. Ils ont dû privatiser l'eau. Ce ne sont pas des systèmes durables à l'ère de la crise climatique, alors c'est le problème le plus grave.
Nous sommes maintenant à l'ère de l'Accord de Paris, qui dit que l'hémisphère Nord a la responsabilité d'éviter, de minimiser et de réparer les pertes et les dommages. En n'ayant pas fourni de financement, nous avons raté l'occasion de nous attaquer au problème et de le minimiser. Beaucoup de pays d'Afrique sont à l'ère des pertes et des dommages, et nous allons nous trouver dans une situation où il faut nous occuper des pertes et des dommages tout en aidant ces pays à s'adapter. Il faut les deux modes de financement. Le Fonds pour les dommages et pertes a été établi lors de la dernière COP, et il faut que ce soit du financement par subvention.
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Merci, monsieur le président.
Au cours de la première partie de cette réunion, j'ai eu l'occasion de dire à quel point l'Afrique s'avérait un continent d'avenir. J'ai parlé, bien sûr, de la croissance économique et de la croissance linguistique pour ce qui est du français.
Monsieur Roy, vous avez fait état de la croissance de la population, qui va doubler au cours des 25 prochaines années. Vous avez souligné à quel point la population africaine était jeune, puisque 70 % des gens ont moins de 30 ans. Il y a donc d'immenses opportunités pour le Canada et le Québec.
Vous insistez depuis plusieurs années sur la nécessité de nouer des partenariats avec l'Afrique au lieu de s'inscrire dans une perspective d'aide au développement. Les représentants d'Affaires mondiales Canada qui ont comparu devant ce comité ont également souligné dans leurs témoignages l'importance des partenariats. Cela dit, on a l'impression qu'ils naviguent à vue, qu'ils ne savent pas trop où ils vont ni la direction à suivre. Il était question d'une stratégie africaine, qui est devenue une espèce de politique africaine, qui est pour sa part devenue un cadre concernant l'Afrique. Maintenant, de l'aveu même des fonctionnaires, on ne sait plus comment on va l'appeler.
Qu'auriez-vous à suggérer au gouvernement canadien pour redresser le cap?
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En renégociant l'accord de libre-échange, ces dernières années, le Canada a réglé sa relation avec les États‑Unis, en fait avec l'Amérique du Nord. Il a réglé sa relation avec l'Europe en établissant avec elle un traité de libre-échange. Il cherche à régler — et c'est normal — sa relation avec la région indo-pacifique par l'entremise de la Stratégie du Canada pour l'Indo‑Pacifique.
Il faudrait quelque chose d'équivalent pour l'Afrique, un plan du Canada. Cependant, que veut-il vraiment faire en Afrique? Dans quels domaines est-il prêt à engager ses ressources et ses meilleurs talents? J'en ai parlé tantôt: est-ce dans l'énergie, l'agriculture, l'éducation?
J'aimerais dire quelques mots au sujet de l'éducation. Plus de 600 millions d'enfants vont intégrer les systèmes scolaires africains. Je ne sais pas ce que cela implique, mais c'est un très grand nombre d'enfants. Le Canada pourrait-il prendre la direction d'une coalition mondiale pour s'assurer que les enfants d'Afrique seront scolarisés? Les pays africains ont fait un effort important, puisque environ 85 % des enfants sont scolarisés au primaire et 40 % le sont au secondaire. Les filles sont cependant moins nombreuses que les garçons à être scolarisées au secondaire, ce qui constitue un très sérieux problème de droit.
Que fait-on quand, tout à coup, 30 millions ou 40 millions d'enfants par année intègrent le système? C'est une situation à laquelle nous devons réfléchir. En fait, il faut cesser de réfléchir, et plutôt intervenir. Il faut créer des systèmes d'éducation et former des professeurs pour de larges groupes. Autrement, ce sont les écoles coraniques qui le feront, si vous voyez ce que je veux dire, des écoles indépendantes et privées qui échappent à tout contrôle, du n'importe quoi, comme on le voit de plus en plus sur le continent africain.
Je voudrais revenir à votre question, mais me reste-t-il encore une minute?
Comme vous, monsieur Roy, j'ai tellement de choses à dire que je ne sais pas par où commencer. De très nombreux sujets ont été abordés.
Merci beaucoup à vous tous de vos témoignages.
Monsieur Grant, j'ai l'impression que nous vous avons oublié, alors je vais vous poser rapidement une question.
J'étais en Tanzanie en février dernier et j'ai rencontré des membres d'une collectivité rurale, une collectivité masaïe. Une société minière canadienne voulait négocier et travailler avec la collectivité. Vous savez que nous n'avons pas toujours une excellente réputation dans le monde, et en fait, nous n'avons pas un bon mécanisme pour tenir les sociétés canadiennes responsables des violations des droits de la personne et des droits environnementaux qu'elles commettent à l'étranger.
Quel est le risque pour le Canada si des sociétés minières se rendent dans des collectivités et agissent mal en empoisonnant l'eau et en nuisant aux collectivités. Souvent, les victimes de nombreux crimes commis par ces sociétés sont des femmes et des filles, et nous n'avons pas de mécanisme en place pour les obliger à rendre des comptes.
Comment pouvons-nous trouver un équilibre? Bien sûr, nous voulons faire du commerce en Afrique. Nous voulons que les sociétés minières canadiennes soient de bons acteurs là‑bas. Cependant, il y a beaucoup de mauvais acteurs, et nous n'avons aucun mécanisme pour les obliger à rendre des comptes.
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Certaines vont prendre cela au sérieux, mais d'autres ne le feront pas nécessairement. Les gens sur le terrain le savent. Encore une fois, n'oubliez pas que ce ne sont pas des saintes.
En ce qui concerne les mécanismes, des projets de loi ont été présentés au Parlement au cours des dernières années qui n'ont pas été adoptés, mais qui portaient précisément sur ce sujet. Il y a eu différentes tentatives. En tant que politologue, je constate que ces projets de loi progressent, mais qu'ils ne passent pas le seuil.
Nous avons le bureau de l'ombudsman. Encore une fois, il fait beaucoup de bon travail, mais il fait aussi l'objet de critiques. Cela a‑t‑il été une solution de rechange utile? On ne lui accorde pas beaucoup d'attention, mais il a obtenu des ressources au cours des dernières années.
Je pense qu'au sein même du Parlement, il y a un intérêt pour une certaine forme de surveillance législative des sociétés minières canadiennes en général, parce que c'est considéré comme souhaitable. Je pense que c'est ce que veulent les Canadiens. Nous y sommes presque. Il suffirait peut-être de présenter un autre projet de loi pour qu'il franchisse le seuil.
Le financement de la lutte contre les changements climatiques n'est qu'une façon élégante de maintenir en place un système financier international déjà inadéquat qui a toujours soutenu de façon disproportionnée l'hémisphère Nord, où des États extractifs se sont développés sur le dos d'États qui ont été victimes du colonialisme. Ces éléments font partie de la crise climatique actuelle. Le fait de considérer les changements climatiques uniquement comme un facteur environnemental était déjà un échec monumental, parce que nous avons perdu environ 30 ans. On parle souvent du grand nombre de négationnistes ou de détracteurs qui n'ont pas compris les données scientifiques, mais on n'a pas compris non plus qu'il s'agissait d'une question d'intersectionnalité, d'une question humaine, d'une question de justice et de droits de la personne.
Si on veut parler de solutions, il faut parler de solutions adéquates. Comment faut‑il s'y prendre pour remédier à la crise climatique quand on sait qu'on ne peut plus continuer à fournir des prêts à des gens qui...? Comme je l'ai dit, l'Afrique compte 54 États qui produisent moins de 4 % des émissions de carbone. Est‑il juste maintenant de demander à l'Afrique de s'endetter davantage?
Je dirais aussi, en raison de certaines...
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Je crois que le Canada ne peut vraiment pas être dans tous les secteurs. Le Canada n'est pas l'Union européenne, les États-Unis ou la Chine. Il n'a pas les mêmes moyens. Il faut savoir dans quel secteur on veut investir.
Dans le rapport sur le futur de l'Afrique qu'on attend d'un de vos collègues, qui est avec nous aujourd'hui, j'espère que les secteurs d'intervention du Canada seront connus. Pour chaque secteur, quels sont vraiment les objectifs canadiens? Est-ce qu'on veut soutenir l'éducation, ou est-ce qu'on veut avoir 2 millions d'enfants de plus à l'école dans cinq ans? Ce n'est pas du tout la même chose. Soutenir l'éducation, c'est participer à des colloques, c'est avoir des discussions théoriques. C'est un peu comme la question de l'environnement: on peut se réunir sans arrêt et en débattre sans arrêt, comme on peut parler sans arrêt de la responsabilité des entreprises minières, par exemple. Cependant, à un moment donné, il faut décider ce qu'on veut, il faut dire, par exemple, qu'on veut envoyer plus d'enfants à l'école et qu'on veut qu'il y ait de la formation technique et professionnelle.
Donc, il faut déterminer dans quel secteur, dans quel domaine et dans quelle coalition on veut intervenir. On est dans toutes sortes de coalitions en ce moment. On donne de petits montants. Toutefois, dans l'Afrique qui s'en vient, celle de 2,4 milliards de personnes, les gens auront besoin de résultats.
Ils ont besoin de vraies écoles. Chaque ville d'Afrique va doubler de population dans les 30 prochaines années. Les besoins en matière de sécurité, d'habitation, d'éducation et de santé seront immenses. Où le Canada peut-il mettre sa signature?
Par exemple, les Coréens ont décidé qu'ils allaient travailler sur les 31 Bourses du continent africain et viennent de créer avec la Banque africaine de développement une plateforme commune pour toutes ces Bourses. Avant, pour un investisseur d'Afrique du Sud, il était presque impossible d'investir en Égypte. Aujourd'hui, tout se fait sur la même plateforme. C'est une signature qui restera pour toujours. La Norvège, quant à elle, a travaillé pour que les 46 monnaies de l'Afrique puissent s'échanger en Afrique, plutôt qu'on doive aller à Paris ou à Londres. On peut donc échanger des monnaies entre deux pays voisins, plutôt que de payer des commissions aux Européens.
Ce sont deux exemples de signatures, des choses qui durent. Le Canada doit trouver les domaines où il veut marquer le continent.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence.
Monsieur Grant, ma question s'adressera à vous. Comme l'ont fait certains témoins précédents, vous avez souligné l'importance de nous assurer que la diplomatie économique fait partie intégrante de notre approche à l'égard de l'Afrique. Comme l'a fait M. Roy, vous avez parlé de la manière dont les entreprises et l'expertise canadiennes peuvent contribuer grandement à répondre aux besoins actuels de l'Afrique.
Vous avez parlé brièvement du Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises. Ma question a deux volets. Premièrement, peut‑il servir d'outil important pour aider les entreprises canadiennes à accroître leurs activités en Afrique? Deuxièmement, que pouvons-nous faire d'autre? Que recommandez-vous au gouvernement pour que le Bureau devienne l'outil qu'il peut être?
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Le Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises a évolué au fil des ans. Souvent, nous le dynamisons avec de grandes attentes. Il y a toujours le problème des ressources. Dispose‑t‑il de toutes les ressources nécessaires? C'est discutable. Des personnes vives d'esprit travaillent au sein du Bureau, mais encore une fois, les ressources sont limitées.
À cet égard, je pense qu'en investissant des ressources, on obtiendrait des résultats significatifs. On peut vraiment renforcer le Bureau en l'enrichissant et en lui donnant plus de ressources. Il a déjà accompli des progrès importants depuis qu'il est en activité. Il passe inaperçu, mais il fait déjà beaucoup de bonnes choses. Il peut être amélioré. C'est quelque chose qu'il ne faut pas mettre de côté.
Même au sein d'Affaires mondiales Canada, de Ressources naturelles Canada et d'un certain nombre d'organismes gouvernementaux, il y a des personnes très intelligentes qui peuvent améliorer les choses quant aux recommandations dont j'ai parlé et à celles formulées par d'autres témoins. Il s'agit de faire en sorte que la volonté politique et le financement aillent de pair. D'autres témoins ont parlé des difficultés qu'ils rencontrent. On doit leur donner les moyens d'agir. Ils doivent disposer des ressources nécessaires pour établir les réseaux et les liens qu'il faut.
Pour en revenir au bureau des délégués commerciaux, là encore, les besoins sont importants. Les gens se débrouillent déjà très bien malgré des ressources limitées, mais on pourrait faire tellement plus s'il y avait davantage de ressources ou une plus grande volonté politique.
Ce n'est pas hors de portée si nous pensons aux budgets. Ce sont des documents politiques. Ces formes de soutien financier peuvent être allouées aux entreprises et, là encore, avoir des retombées extrêmement positives.
Pour revenir aux observations que vient de faire mon collègue, si l'on pense aux minéraux critiques, c'est un secteur dans lequel le Canada peut jouer un rôle de premier plan à l'échelle mondiale. Cela se fait dans des secteurs connexes, et c'est un autre secteur dans lequel ce serait possible.
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Depuis trois ans circule cette idée assez étonnante qu'il pourrait y avoir au milieu du présent siècle 500, 600, voire 700 millions de locuteurs du français à cause de l'Afrique. Je ne suis pas de cet avis. La croissance des francophones dans le monde ne sera pas en Amérique ni en Europe, certes. D'ailleurs, l'Union européenne fonctionne actuellement à 98 % en anglais et l'enseignement du français en Europe a diminué de 10 % dans les deux dernières années.
C'est grâce à l'Afrique qu'il va y avoir une croissance importante des locuteurs du français, mais seulement s'il y a des écoles qui enseignent en français sur ce continent. Or, pour qu'il y ait des écoles qui enseignent en français, il faut les créer et les financer. Il faut que des pays comme le nôtre, comme la France, comme la Belgique, comme la République de Maurice, c'est-à-dire des pays de la francophonie qui ont réellement des ressources, regardent ce qu'ils font et ne font pas pour soutenir l'éducation dans l'espace francophone africain.
N'oublions pas non plus la montée des langues africaines. Les Africains ont des langues qui peuvent parfois être parlées par 100 millions de personnes. Ces langues se trouvent sur Internet et sur les moteurs de traduction. Aujourd'hui, la Banque africaine de développement publie d'abord ses rapports dans les langues africaines, puis les traduit en français et en anglais, entre autres. Ce que je veux dire, c'est que les langues africaines prennent de la place.
Il peut donc effectivement y avoir une croissance importante du nombre de locuteurs du français. Est-ce qu'il y en aura 100 millions de plus, ou 150 millions? Il est très difficile de l'établir. Pour obtenir cette croissance, par contre, il faudra que les enfants puissent aller à l'école où on enseigne la langue française. C'est aussi clair que cela. Cependant, je trouve que l'effort qui est fait actuellement est complètement insuffisant.
Si vous me le permettez, je voudrais revenir sur une question trop importante sur l'investissement…
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Une intervention d'une minute et demie passe très vite.
Je veux souligner rapidement qu'à mon avis, le problème en ce qui concerne le Bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises, c'est qu'il n'a pas la capacité d'obliger des personnes à témoigner. Ce n'est pas une question de ressources. Le problème, c'est qu'on nous avait promis un bureau de l'ombudsman canadien de la responsabilité des entreprises qui serait en mesure de le faire, mais ce n'est pas le cas.
Je voudrais revenir à vous, madame Tower, parce que nous avons interrompu notre conversation. Vous avez parlé d'intersectionnalité. Nous avons une politique d'aide internationale féministe. Nous avons, nous a‑t‑on dit, une politique étrangère féministe, bien que personne ne l'ait vue. Pouvez-vous nous parler de la manière dont les femmes et les filles, en particulier, sont touchées lorsque nous parlons des questions liées au développement?
Malheureusement, nous n'avons pas assez de statistiques, ce qui montre à quel point peu d'attention est accordée au groupe des femmes et des filles. Il semble que, dans l'ensemble, le risque de déplacement soit plus élevé pour elles que pour tout autre groupe, mais nous ne le savons pas vraiment.
Il a beaucoup été question d'éducation au sein de ce comité. Je peux vous dire que les écoles existent peut-être, mais les filles doivent y renoncer pour aller chercher de l'eau. Quand on parle aux familles, on s'aperçoit que les filles allaient à l'école auparavant, mais que ce n'est plus le cas. Il y a eu une sécheresse, la pire que la région n'a jamais connue, et les filles doivent aller chercher de l'eau. C'est là qu'intervient la violence fondée sur le sexe. C'est là qu'interviennent tous les conflits et l'insécurité à cet égard.
C'est ainsi qu'il faut vraiment voir les choses. On ne peut pas se contenter d'examiner la question sous l'angle de la migration ou de la finance internationale. Quelqu'un m'a demandé plus tôt ce qu'il en était des ressources financières. Seul un quart de 8 % des fonds consacrés à l'adaptation va à l'Afrique. Ce n'est tout simplement pas une priorité, qu'il s'agisse des secteurs de population ou du continent dans son ensemble.
Les États africains demandent constamment à l'ONU, à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques ou même au Conseil de sécurité, que les pays du Nord investissent dans les énergies renouvelables, dans la technologie et dans le transfert de technologie, mais cela ne se produit pas. J'entends beaucoup parler ici d'investissement. Les gens demandent de l'information et des connaissances. Ils veulent voir cet échange, cette coopération à l'échelle mondiale. Il y a des possibilités.
Je me pencherais également sur les discussions relatives à la sécurité climatique qui ont lieu au sein du Conseil de sécurité de l'ONU et sur les demandes des États africains, car on parle d'une population qui est très jeune, mobile et vive.
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Merci beaucoup, madame Tower.
Voilà qui met fin à nos questions.
Je voudrais maintenant profiter de l'occasion pour vous remercier tous les trois. Madame Tower, monsieur Grant, monsieur Roy, merci de nous avoir accordé du temps, de nous avoir parlé de votre expérience et de nous avoir donné vos points de vue. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Chers amis, avant de conclure, je vous rappelle que la semaine dernière, un communiqué a été distribué à tous les députés. Il concernait le rapport sur les capacités diplomatiques du Canada, que j'ai déposé aujourd'hui.
Êtes-vous tous pour l'adoption du communiqué qui vous a été envoyé?
Des députés: Oui.
Le président: Merci.
La séance est levée.