Bienvenue à la 123e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
J'aimerais rappeler certaines indications aux participants et aux témoins. Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Les députés qui se joignent à nous virtuellement sont priés de lever la main s'ils souhaitent prendre la parole.
Aujourd'hui, conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 19 septembre 2024, le Comité entreprend son étude sur la contribution du Canada à la promotion d'une solution à deux États.
Nous vous écoutons, monsieur Bergeron.
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Est-ce que l'interprétation fonctionne? On me dit que oui.
La semaine dernière, j'ai posé une question au greffier, et celui-ci m'a référé à la présidence.
Nous avons donc posé la question à la présidence. N'ayant pas eu de réponse de la part de la présidence, je vous pose la question bien simplement, monsieur le président.
À la suite des réunions antérieures, avons-nous envoyé une invitation formelle à Mme Albanese?
Quelqu'un d'autre veut‑il intervenir au sujet de cette motion? Non.
D'accord. Je vais mettre la question aux voix.
(La motion est rejetée. [Voir le Procès-verbal])
Le président: Je vais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Nous sommes très heureux d'accueillir en personne M. Mark Kersten, professeur à l'Université de la vallée du Fraser. Nous accueillons par vidéoconférence M. Jon Allen, qui est actuellement agrégé supérieur à l'École Munk des affaires mondiales et des politiques publiques. Nous recevons également Mme Katherine Verrier-Fréchette, qui se joint à nous virtuellement.
Vous disposerez de cinq minutes chacun pour nous faire part de vos observations préliminaires. Nous allons commencer par M. Kersten. Nous écouterons ensuite M. Allen et Mme Verrier-Fréchette.
Monsieur Kersten, vous avez cinq minutes.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Il n'y a aucune raison pour que le Canada attende avant de reconnaître la Palestine. Le moment est venu de le faire. L'État palestinien est une réalité juridique. Pas moins de146 des 193 États membres des Nations unies reconnaissent actuellement la Palestine. Nos alliés, la Suède, l'Irlande, l'Ukraine, la Norvège et l'Espagne reconnaissent tous la Palestine, mais pas le Canada. Pourquoi donc?
Je profite de l'occasion pour réfuter certains arguments qui ont été avancés contre une reconnaissance immédiate.
Premièrement, d'aucuns prétendent que le Canada ne devrait pas reconnaître la Palestine, parce que nous irions ainsi à l'encontre de nos alliés de l'OTAN et du G7. Pourtant, la Suède, la Norvège et l'Espagne sont membres de l'OTAN, tout comme la Pologne et la Tchéquie, et tous ces États reconnaissent la Palestine. Les pays du G7, comme la France et le Japon, se sont également rapprochés d'une reconnaissance de l'État palestinien. Lors du vote de mai à l'Assemblée générale des Nations unies, les États-Unis ont été le seul pays du G7 à se prononcer contre le statut d'État palestinien.
Deuxièmement, on dit que la reconnaissance de la Palestine en tant qu'État est une récompense pour le Hamas et le terrorisme. Cet argument est à la fois hypocrite et, il faut bien le dire, dangereux. Il repose sur l'hypothèse que les Palestiniens sont eux-mêmes des membres du Hamas ou des partisans du terrorisme, une notion qui alimente le châtiment collectif des civils palestiniens et qui est régulièrement invoquée pour justifier les atrocités.
La reconnaissance n'est pas une récompense, pas plus qu'elle n'est une consolation pour les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité incessants et bien documentés commis aux dépens du peuple palestinien. La libre disposition de soi est un droit de la personne fondamental et inaliénable. C'est un droit dont les Palestiniens doivent pouvoir jouir.
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels — deux traités que le Canada a signés et ratifiés — stipulent que tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. C'est ce que prévoit l'article 1.
Troisièmement, certains disent que la reconnaissance de la Palestine en tant qu'État minerait les chances d'en arriver à une solution négociée à deux États. Il n'y a aucune preuve à l'appui d'une telle affirmation. La perspective d'une solution à deux États est en fait assombrie par les atrocités commises par le Hamas et Israël, qui ne souhaitent ni l'un ni l'autre la coexistence d'un État palestinien et d'Israël. Il est difficile de ne pas conclure que l'argument suivant lequel la reconnaissance ne peut être obtenue que si Israël y consent par voie de négociation est un prétexte pour permettre la destruction et l'annexion continues de terres palestiniennes.
Il est impossible d'affirmer que la reconnaissance de deux États compromettra une solution à deux États. Cette reconnaissance pourrait plutôt donner le coup d'envoi à une nouvelle solution politique au conflit au Moyen-Orient, une solution qui serait meilleure et plus prometteuse. L'Espagne, notre alliée, a déclaré que la reconnaissance de la Palestine est « la seule façon de progresser vers ce que tout le monde considère comme la seule solution possible pour parvenir à un avenir pacifique, un État palestinien vivant aux côtés de l'État israélien en paix et en sécurité ». Pourquoi le Canada ne peut‑il pas en faire autant?
Comme l'a statué la Cour internationale de justice, le droit à l'autodétermination ne peut pas être rattaché à un processus de paix inexistant. Le Canada ne peut pas assujettir le droit des Palestiniens à l'autodétermination aux intérêts d'un gouvernement ouvertement engagé dans la destruction et l'occupation illégale de la Palestine.
Enfin, certains soutiennent que la reconnaissance de la Palestine serait une erreur, car on s'éloignerait ainsi de la politique canadienne de longue date. Qu'est‑ce qui justifie le maintien d'une telle politique dans un contexte d'extermination massive?
Le Canada devrait s'écarter de sa politique de longue date. Autrement, il risque de se retrouver dans une situation où il poserait les mêmes gestes encore et encore et déclarerait les mêmes choses encore et encore tout en s'attendant à un résultat différent. Le statu quo n'est pas acceptable. Reconnaître la Palestine maintenant devrait être facile pour le Canada. La Palestine existe. Nous ne ferions que joindre notre voix à celle de nos alliés. En effet, il n'y a pas de bons arguments pouvant nous inciter à ne pas reconnaître la Palestine. Il n'y a aucune raison d'attendre.
Permettez-moi de vous laisser sur une image. Projetons-nous dans 15 ans d'ici. Le monde a de la difficulté à assumer son inaction face aux atrocités commises contre les civils à Gaza. Les députés canadiens prennent la parole à la Chambre des communes pour souligner une journée de deuil pour les dizaines de milliers de vies perdues. Peut-être même que le premier ministre présente ses excuses à la télévision nationale pour ne pas en avoir fait plus, alors que nous savions tous et que nous avons tous vu les massacres se produire. Que direz-vous à vos enfants ou à vos petits-enfants qui vous demanderont alors: « Qu'avez-vous fait? »
Le Canada a l'occasion de poser un geste qu'aucun gouvernement canadien n'a posé auparavant, un geste qui est la bonne chose à faire sur les plans juridique, politique et diplomatique. Le Comité a convenu d'étudier la voie la plus rapide vers la reconnaissance. Le chemin le plus rapide est celui que vous emprunterez dès aujourd'hui. Le moment est venu de reconnaître la Palestine.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Permettez-moi de commencer par dire que je suis juif. Les parents de ma femme étaient des survivants de l'Holocauste. J'ai une sœur, des nièces et des neveux qui vivent en Israël, à quelques kilomètres de la frontière libanaise, une région qui est la cible de tirs quotidiens de roquettes du Hezbollah. Pour moi, l'existence et la sécurité d'Israël sont fondamentales.
C'est précisément la raison pour laquelle tout ce que je vais vous dire repose sur ma conviction profonde que « deux États pour deux peuples » est la seule solution qui puisse mettre fin au conflit entre les Israéliens et les Palestiniens et, en fin de compte, apporter la sécurité à ces deux peuples. La plus grande menace pour Israël vient de l'intérieur et la sécurité n'est pas envisageable tant que l'on continuera à occuper le territoire et à opprimer le peuple palestinien en Cisjordanie et à Gaza.
La solution à deux États et l'illégalité des colonies israéliennes — qui figurent parmi les plus grands obstacles à cette solution — sont au cœur des politiques étrangères du Canada et de ses alliés occidentaux depuis des décennies. Malheureusement, nos gouvernements n'ont pas fait grand-chose, voire rien du tout, pour empêcher l'expansion de ces colonies ou faire avancer l'objectif des deux États. Cependant, si je comprends bien, le Comité souhaite d'abord et avant tout que nous discutions aujourd'hui de la reconnaissance d'un État palestinien.
Permettez-moi de dire d'entrée de jeu que la reconnaissance d'un État palestinien ne se traduira pas par un rétablissement de la paix dans la région aujourd'hui ou même demain. Peu de gens en Israël ou en Palestine peuvent se concentrer sur la solution à deux États en ce moment. Les Israéliens vivent toujours un traumatisme national collectif à la suite des événements du 7 octobre et continuent à se préoccuper surtout de leurs otages, de leurs soldats, de leurs évacués et de leur gouvernement très impopulaire. Les Palestiniens subissent leur plus grande tragédie depuis la Nakba à Gaza, pendant que la violence et la peur règnent en Cisjordanie.
Reconnaître un État palestinien maintenant, c'est envoyer un message d'espoir et d'engagement aux Palestiniens, et envoyer un message clair à Israël et à d'autres que la simple gestion du conflit — la politique d'Israël depuis 17 ans — n'est pas une option et ne l'a jamais été. Si le 7 octobre nous a appris une chose, c'est que la poursuite de l'occupation de la Palestine et de l'oppression des Palestiniens sans qu'une voie ne soit créée pour mettre fin au conflit ne peut que mal finir pour les deux peuples.
Pourquoi suis‑je en faveur de la reconnaissance rapide d'un État palestinien?
Je crois que le peuple palestinien a désespérément besoin d'un horizon de paix et d'une voie claire à suivre si l'Autorité palestinienne veut se revitaliser et commencer à se gouverner pleinement en tant qu'État.
De plus, la reconnaissance d'un État palestinien confirmerait dès maintenant que les Palestiniens forment un peuple national légitime qui mérite les mêmes droits et responsabilités que les Israéliens juifs. Cela montrerait aux Palestiniens que les paroles de la communauté internationale concernant la solution à deux États, l'expansion de la colonisation et la violence se traduisent par des actions et un engagement bien concret. Une telle reconnaissance n'élimine pas la nécessité d'un nouveau gouvernement aussi bien en Israël qu'en Palestine. Il faudra quand même pouvoir compter sur une volonté de compromis de part et d'autre. Cela ne signifie pas que les questions relatives au statut définitif ont été réglées entre Israël et la Palestine, mais cela envoie un message clair: c'est la direction dans laquelle le Canada et la communauté internationale s'engagent, et que les Israéliens et les Palestiniens devront également emprunter.
Troisièmement, cela donnerait de l'espoir à un peuple qui — après 57 ans d'occupation, la mort et la destruction qui font actuellement rage à Gaza et la violence continue en Cisjordanie — a désespérément besoin d'un signal indiquant que la communauté internationale ne considère pas tous les Gazaouis comme des « Hamasniks » et tous les Palestiniens comme des adeptes de la violence. L'espoir et une voie bien tracée pour mettre fin au conflit peuvent contribuer grandement à réduire la violence et à offrir à la prochaine génération de Palestiniens et d'Israéliens un avenir meilleur.
Quatrièmement, cela envoie le signal qu'Israël n'a pas de droit de veto sur l'avenir du peuple palestinien.
Israël devrait‑il avoir son mot à dire sur l'avenir de la région? De toute évidence, oui. A‑t‑il droit à la paix et à la sécurité dans cette région dangereuse et impitoyable? Absolument. Les négociations sur les questions relatives au statut final seront-elles difficiles? Sans aucun doute, mais les Palestiniens ne sont pas des écoliers qui doivent faire tous leurs devoirs, changer de leadership, mettre fin à la corruption, tenir des élections et donner leur approbation aux frontières définitives avant que les Israéliens soient même prêts à commencer à parler de paix.
Qui demandera des explications à Israël lorsque son premier ministre tiendra une carte aux Nations unies qui montre son pays qui s'étend de la Méditerranée au Jourdain? Qui soumet Israël à des conditions avant d'accorder son soutien lorsque l'entente de coalition du gouvernement israélien prévoit l'annexion de la Cisjordanie ou lorsque ses ministres et des membres de la Knesset préconisent la recolonisation de Gaza?
Comme on vient tout juste de le mentionner, 146 membres des Nations unies parmi les 193 membres reconnaissent déjà un État palestinien, dont 14 pays européens. D'autres, y compris la Belgique, envisagent d'en faire autant. Le Canada a consulté l'Australie et la Nouvelle-Zélande, qui étudient également la question. Les États-Unis et le Royaume-Uni ont demandé des recommandations. De toute évidence, le train quittera bientôt la gare. À mon avis, le Canada et ses plus proches alliés, qui appuient tous une solution à deux États — plus que jamais depuis le 7 octobre —, devraient tous monter à bord de ce train.
Merci, monsieur le président. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions à ce sujet et sur la solution à deux États de manière plus générale.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les autres distingués membres du Comité ainsi que les citoyens canadiens.
C'est un honneur d'être ici aujourd'hui. Je m'adresse à vous depuis le Moyen-Orient, où je vis et travaille en ce moment. J'ai accepté de comparaître aujourd'hui pour donner mon point de vue sur la solution à deux États et pour dire si la communauté internationale, en particulier le Canada, peut encore l'appuyer et amorcer une période de paix et de sécurité avec un État palestinien et un État israélien qui existent côte à côte.
Je vous parle aujourd'hui à titre personnel, et les points de vue que je vais présenter sont les miens.
Je suis une ancienne diplomate canadienne, plus particulièrement une ancienne cheffe de mission et une ancienne représentante du Canada auprès de l'Autorité palestinienne. Comme le Canada, j'appuie une solution à deux États qui mettra fin une fois pour toutes au conflit israélo-palestinien. En ces moments tragiques, plus que jamais, je soutiens que le principe traditionnel et fondamental de la politique étrangère du Canada concernant ce conflit devrait être la vision rassembleuse et inébranlable pour l'avenir que le Canada remet de l'avant: une solution négociée entre les Israéliens et les Palestiniens qui repose sur la solution à deux États, c'est‑à‑dire un État israélien et un État palestinien qui existent côte à côte dans la paix et la sécurité.
La tragédie actuelle offre un portrait qui donne à réfléchir quant à ce que l'avenir nous réserve si les Israéliens, les Palestiniens et la communauté internationale ne réussissent pas à collaborer pour atteindre cet objectif rassembleur. Ce serait un avenir caractérisé par une violence inacceptable, encore plus inacceptable que ce que nous observons actuellement. L'extrémisme l'emporterait des deux côtés et le terrorisme serait en plein essor.
Dans ce scénario, les Palestiniens n'auraient pas d'État et Israël n'aurait pas de sécurité. Le régime israélien serait corrompu jusqu'à la moelle et deviendrait sur la scène internationale un intervenant violent dont les fils et les filles jouent un rôle d'oppresseurs. Le régime palestinien serait également corrompu jusqu'à la moelle. Il ne ferait que servir de base au terrorisme, à la violence et à la misère, et il priverait les Palestiniens de leur pouvoir d'agir, de leur avenir et de leur honneur.
Une solution négociée à deux États pour résoudre le conflit israélo-palestinien demeure la seule voie à suivre pour établir un État palestinien à part entière puisqu'on n'a trouvé aucune autre solution pour atteindre cet objectif et parce que l'histoire nous a appris qu'une solution négociée pour résoudre un conflit est la plus susceptible de fonctionner à moyen et à long terme. Cela dit, que peuvent faire le Canada et la communauté internationale?
Ce sont d'abord et avant tout les Israéliens et les Palestiniens qui doivent décider qu'il est dans leur intérêt de négocier pour résoudre le conflit. Cette possibilité est mince à ce stade‑ci, compte tenu de la tragédie qui se déroule sous nos yeux. Le Canada et le reste de la communauté internationale peuvent toutefois jouer un rôle pour essayer de les engager sur une voie qui mène à des négociations.
Je décris ici une poignée d'idées stratégiques qui pourraient potentiellement servir de fondement à la politique étrangère du Canada. Ces idées ne couvrent pas tous les aspects, et aucune d'elles ne serait suffisante pour nous engager sur une voie menant à des négociations et à un État palestinien. Elles représentent toutefois des outils pour établir notre politique étrangère, des options que nous n'examinons pas aujourd'hui et sur lesquelles nous devrions nous pencher.
La première de ces options est un cadre assorti de paramètres clairs pour parvenir à une solution à deux États.
La première option est un cadre assorti de paramètres clairs pour parvenir à une solution à deux États avec le Conseil de sécurité des Nations unies. Une résolution du Conseil est le seul outil international à notre disposition pour mettre en œuvre et appliquer des paramètres pour négocier. C'est le seul outil qui n'a pas été envisagé jusqu'à maintenant, et il devrait l'être.
La deuxième option est un soutien tangible pour permettre à un État palestinien de se gouverner lui-même en tant qu'État.
La troisième option est la prise de mesures fortes contre les extrémistes — palestiniens et israéliens —, ce qui peut comprendre d'autres recours politiques et juridiques contre les colons violents et leurs dirigeants, de même que contre des représentants politiques à la Knesset et au sein du gouvernement.
La quatrième option est un solide appui aux voix modérées des deux côtés.
La cinquième...
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Merci, monsieur le président.
Je veux remercier Mme Verrier-Fréchette de son témoignage.
Lorsque nous examinons ce dossier, je pense qu'il est important... Les personnes qui commencent tout juste à nous écouter maintenant pourraient avoir erronément l'impression que cette discussion n'a jamais eu lieu auparavant, mais on a tenté à maintes reprises au cours de l'histoire moderne de faire la paix et d'avoir deux États.
Je pense par exemple au plan de partage des Nations unies, qui a mené à l'établissement de l'État d'Israël; aux accords de Camp David; à la conférence de Madrid; aux accords d'Oslo; et au sommet de Camp David.
Même si ce n'était pas des négociations de paix, je pense que vous pourriez avancer que c'était un prélude à ce qui s'est produit le 7 octobre. Je parle de la décision du gouvernement Sharon de se retirer de la Cisjordanie. Des citoyens israéliens vivaient là. Le gouvernement israélien s'est rendu sur place, il a démantelé les colonies de ses propres citoyens et les a réinstallés en Israël.
Au fil des ans, il y a eu des tentatives vraiment légitimes et sincères de la part du gouvernement israélien pour faire la paix et pour avoir deux États qui coexistent dans la paix et la sécurité. N'êtes-vous pas d'accord, madame Verrier-Fréchette?
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Oui, il y a une nette distinction ici. Le fait que 146 pays, y compris beaucoup de nos alliées de l'Union européenne, reconnaissent la Palestine témoigne de cette différence. Nous sommes tous conscients que les questions relatives au statut final de Jérusalem — les réfugiés, les frontières, la sécurité — doivent faire l'objet de négociations. Le problème est que, depuis plus de 17 ans, le gouvernement de Nétanyahou refuse essentiellement de négocier. Nous ne pouvons pas laisser aller les choses plus longtemps. On ne peut pas négocier avec seulement une des parties concernées.
Je conviens qu'on a déjà déployé des efforts pour négocier une solution à deux États, mais sans succès. Cela ne signifie toutefois pas que nous devons abandonner maintenant et ne plus jamais réessayer. Il est essentiel pour nous de réessayer, à l'aide d'un engagement ferme des deux côtés pour que cela devienne réalité.
La dernière fois que le gouvernement Obama et l'ancien secrétaire d'État, John Kerry, ont pris part à des négociations, on a affirmé qu'elles ont échoué à cause du gouvernement Nétanyahou. Par conséquent, amenons les deux parties à la table pour qu'elles discutent.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence.
Je remercie M. Allen de la dernière réponse qu'il a donnée. Celle-ci m'est apparue extrêmement éclairante relativement à des objections fallacieuses qui sont souvent soulevées à l'égard de la reconnaissance de l'État de Palestine.
Monsieur Kersten, lorsque des pays comme la Slovénie, l'Espagne, la Norvège ou l'Irlande disent qu'en reconnaissant l'État palestinien, ils ne confèrent aucune forme de reconnaissance, de légitimité ou de soutien au Hamas, cela peut paraître un peu contradictoire dans l'esprit du commun des mortels.
Selon votre expérience de juriste, quelle est la différence entre reconnaître un État et reconnaître un gouvernement?
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Merci beaucoup de la question.
Je pense que vous avez tout à fait raison de dire que l'Espagne, la Suède et, bien entendu, la Norvège ont reconnu la Palestine dans les accords d'Oslo. Ces pays n'ont toutefois aucunement l'intention de reconnaître des activités terroristes ou d'appuyer le Hamas.
Une fois de plus, je pense que la question renvoie en partie à ce que l'ambassadeur Allen disait, à savoir que le Hamas ne veut pas d'une solution à deux États. Il est très important de le reconnaître. Ni Israël ni le Hamas ne veut de cette solution. Je réfléchis à la question et je me penche là‑dessus depuis très longtemps, et je pense que ce sont les civils qui veulent d'une solution à deux États.
Le gouvernement israélien actuel et les différentes entités en Palestine ne sont pas favorables à cette solution. C'est pourtant la bonne chose à faire. C'est le droit du peuple palestinien et le droit du peuple israélien.
Monsieur Allen, le 9 octobre 2023, un article a été publié dans le Toronto Star à la suite du massacre du 7 octobre.
[Traduction]
Il avait pour titre: « The violence between Israelis and Palestinians will not end until each side recognizes the other’s legitimacy » ou « la violence entre les Israéliens et les Palestiniens ne cessera pas avant que les deux parties reconnaissent la légitimité de l'autre ».
[Français]
Vous y mentionniez que, dans les circonstances actuelles, la solution à deux États était de moins en moins envisageable.
Aujourd'hui, vous avez amorcé votre présentation en disant que la solution à deux États était la seule solution.
Pouvez-vous nous aider à réconcilier ces deux prises de position de votre part?
:
Merci, monsieur le président.
Ce que j'ai voulu dire et ce que j'ai dit après la tragédie du massacre du 7 octobre et, bien franchement, compte tenu de ce qui se produit à Gaza et en Cisjordanie depuis, c'est qu'on ne peut pas s'attendre à ce que les gens pensent à une solution à deux États. Les Allemands et les Britanniques, après la Deuxième Guerre mondiale, n'auraient pas pu s'imaginer qu'ils allaient être ensemble dans l'Union européenne et d'importants alliés. Les catholiques et les protestants en Irlande du Nord, qui se sont entretués pendant 400 ans, n'auraient pas pu s'imaginer qu'ils allaient parvenir à un accord de paix. Les Israéliens et les Palestiniens ne vont jamais surmonter leurs tragédies, mais ils doivent se rendre compte que, pour assurer leur propre paix et leur propre sécurité, ils doivent unir leurs efforts. Il y a 7,5 millions de Juifs et 7,5 millions d'Arabes qui se partagent ce territoire, et aucun groupe ne va disparaître. Personne ne va partir.
Ce que je dis, c'est que, à partir de maintenant, mais au fil du temps, de bonnes personnes venant des deux pays vont se rendre compte que la poursuite de la violence — en envoyant leurs soldats mourir à la guerre — n'est pas la solution. C'est ce qui va se produire un jour, mais il faudra du temps, surtout à cause du massacre du 7 octobre et de ce qui se produit depuis.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui pour participer à cette discussion très importante.
Monsieur Kersten, vous avez dit qu'il faut agir maintenant. Je veux répéter qu'un ministre pourrait reconnaître l'État de la Palestine aujourd'hui. C'est une chose qui ne nécessite pas de vote au Parlement.
Je suppose que je veux prendre un moment pour parler de l'urgence de la situation. Nous savons qu'elle a beaucoup empiré au cours des dernières semaines. Nous savons que les efforts de la communauté internationale n'ont manifestement pas empêché le génocide en cours. Ils n'ont pas freiné le gouvernement extrémiste d'Israël.
Pouvez-vous parler de la détérioration de la situation, y compris en Cisjordanie compte tenu de la poursuite de la construction dans les colonies, et dire pourquoi la fin de l'occupation et la reconnaissance de l'État de Palestine pourraient aider à réparer cette injustice?
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Je vous remercie de vos questions.
Je pense que nous devons reconnaître, lorsque nous parlons d'une solution à deux États, que l'occupation illégale de la Cisjordanie, les activités de colonisation qui se poursuivent et la violence manifestée par les colonisateurs visent à saper les perspectives d'une solution à deux États en soi.
Lorsque nous parlons des différents éléments qui caractérisent les États, y compris le contrôle du territoire et d'autres éléments connexes, si un autre État — dans ce cas‑ci, le gouvernement d'Israël — tente intentionnellement de ruiner les chances que le peuple palestinien puisse exercer un contrôle sur son propre territoire, il est littéralement en train de miner directement la solution à deux États, ce qui en réduit la possibilité. Encore une fois, je pense qu'il s'agit là d'une attitude dangereuse et sournoise, et nous pouvons observer la violence quotidienne que subissent les habitants de la Cisjordanie.
Je pense qu'il est important que le Comité sache que nous voyons effectivement les bombes et les missiles, mais que nous voyons aussi des gens qui veulent simplement cueillir des olives de temps en temps, et qui sont pris pour cible parce qu'ils sont sur place au moment de la récolte et ils sont abattus et chassés de leur terre. Nous entendons des ministres déclarer ouvertement que ces colonisateurs sont dans leur droit et qu'ils aimeraient leur fournir des armes pour faciliter leurs actes violents.
Nous assistons maintenant à l'expansion possible des colonies à Gaza.
Tout cela se fait au grand jour. Personne ne cache quoi que ce soit. Tous ces renseignements sont accessibles en ce moment même.
Je pense que la reconnaissance est importante et que les Palestiniens y ont droit, mais que cela indique aussi clairement que la Cisjordanie est un territoire palestinien et que tout cela est conforme au droit international et aux décisions les plus récentes de la Cour internationale de Justice en la matière.
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Comme je l'ai déjà dit, nous sommes en quelque sorte à la croisée des chemins. Israël est menacé par des roquettes en provenance du Nord, des houthistes et du Hamas. Israël se trouve dans une situation très difficile, et ce depuis longtemps.
Toutefois, cela n'empêche pas la nécessité de tendre la main aux Palestiniens maintenant ou dès que possible. C'est aussi simple que cela. Le fait qu'une personne souffre ne signifie pas qu'une autre ne souffre pas aussi.
Je ne peux que répéter que la sécurité d'Israël peut seulement être garantie... Vous n'êtes pas obligés de m'écouter. Les anciens premiers ministres Ehud Barak et Ehud Olmert, 500 anciens chefs du Mossad et des chefs du Shin Bet et de l'Armée de défense d'Israël ont tous déclaré que la menace venait de l'intérieur. Ils plaident tous pour l'ouverture des discussions avec les Palestiniens.
Comme je l'ai dit, ce ne sera pas facile, mais il faut enclencher ce processus et déployer des efforts concrets en ce sens.
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Je vous remercie, monsieur le président. Je remercie également les témoins de comparaître aujourd'hui.
J'aimerais adresser ma première question à Mme Verrier-Fréchette.
Les États-Unis, le Royaume-Uni, le Japon, l'Italie, l'Allemagne, la France et, bien entendu, le Canada… Nous sommes aux côtés de nos alliés du G7 dans la quête d'une solution à deux États. Il y a longtemps que notre pays a adopté — quel soit le parti au pouvoir — la position selon laquelle une solution à deux États résultant de négociations et profitant du soutien populaire des Palestiniens et des Israéliens est la voie de la paix.
Toutefois, le site Web d'Affaires mondiales Canada indique maintenant que la reconnaissance de l'État palestinien n'est pas nécessairement la dernière étape sur la voie d'une solution à deux États, qui profite du soutien de tous nos partenaires du G7. Que le Canada aborde maintenant… Je pense qu'il est généralement reconnu que le Canada n'est peut-être pas le pays qui a la plus grande influence parmi nos alliés du G7 dans la région, et j'aimerais donc savoir ce qui arriverait si le Canada allait au‑devant de ses partenaires du G7…?
J'aimerais d'abord entendre la réponse de Mme Verrier-Fréchette.
Quelles seraient les implications, sur le plan diplomatique, d'une telle initiative en ce qui concerne nos partenaires du G7?
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Merci, monsieur le président.
Le gouvernement du Canada soutient le droit des Palestiniens à l'autodétermination. Le Canada s'oppose au contrôle permanent exercé par Israël sur les territoires occupés et il s'oppose à la colonisation.
Ma question s'adresse à M. Allen et à Mme Verrier‑Frechette.
Qu'a fait le Canada, jusqu'à présent, pour soutenir le droit à l'autodétermination des Palestiniens, pour s'opposer à l'occupation permanente et pour s'opposer à l'expansion des colonies?
J'ai posé ma question à M. Allen et à Mme Verrier‑Frechette.
L'un d'eux veut-il répondre à ma question?
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie les témoins. C'est un sujet très important.
Monsieur Allen, 30 ans se sont écoulés depuis les Accords d'Oslo. Il s'agissait d'un cadre temporaire qui était censé contribuer à la mise en place d'une solution qui permettrait d'établir définitivement la paix au Moyen-Orient, afin que le reste du monde puisse également en profiter.
Le cadre établi dans le cadre des Accords d'Oslo est‑il toujours valable, oui ou non, et pourquoi?
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je tiens à remercier les trois témoins. J'assiste à de nombreuses réunions de comité et il est rare que j'écoute chaque mot de chaque intervention de chaque témoin. J'ai trouvé vos témoignages très touchants, mais aussi très utiles. Je vous remercie tous de vos efforts, de votre passion et de votre travail.
Je pense que nous sommes d'accord, au sein du Parlement et du Comité, sur la notion d'une solution à deux États. C'est ce qu'ont dit les gouvernements successifs. Pour y arriver, il faut qu'il y ait deux États. La question n'est pas de savoir s'il devrait y avoir deux États — en reconnaissant la Palestine —, mais quand cela se produira. Nous trouvons également qu'il est important de conclure un règlement négocié.
J'aimerais savoir ce qui, selon vous, pourrait encourager les deux parties à conclure un règlement négocié.
Enfin, si nous ne pouvons pas obtenir un règlement négocié, quelles sont les autres options possibles en vertu du droit international ou dans le cadre des Nations unies?
En résumé, monsieur Kersten, ma question concerne les façons d'encourager Israël et les Palestiniens à conclure un règlement négocié, et le rôle que le Canada peut jouer à cet égard.
En ce qui concerne la carotte et le bâton, je pense que nous devons admettre que la reconnaissance de la Palestine ne nuit pas à une entente négociée, si bien qu'ils n'ont pas besoin d'être sur la même longueur d'onde. Encore une fois, pendant longtemps, l'Espagne et la Norvège étaient d'avis qu'ils devaient être sur la même longueur d'onde et que la reconnaissance ne pouvait venir qu'à la fin d'un processus négocié. Ils ont rompu avec cette croyance parce qu'ils ne pensent plus que c'est vrai.
Je sais que nous voulons rester sur la même longueur d'onde avec nos alliés du G7, mais encore une fois, six sur sept envisagent maintenant la question que vous avez soulevée. Ils envisagent essentiellement de reconnaître la Palestine avant la fin d'une entente négociée, et je pense que le Canada devrait se joindre à eux et essayer d'influencer le moment exact où cela se produira.
Maintenant, il est très difficile...
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Très brièvement, monsieur le président, ce dont Israël a besoin, la carotte dont il a besoin — et ce n'est pas seulement une carotte —, c'est la sécurité. Le Canada, les États-Unis et d'autres pays s'efforcent de garantir la sécurité si une solution à deux États est trouvée.
Il faut un état palestinien démilitarisé, et l'autorité palestinienne doit commencer à gouverner à Gaza une fois que l'État de droit y sera instauré, si bien qu'elle a besoin d'un partenaire.
Bien entendu, la Palestine, en tant que gouvernement et État, doit renoncer à la terreur, reconnaître pleinement l'État israélien tel qu'il est, et continuer, comme l'autorité palestinienne le fait depuis des années, de collaborer avec Israël pour prévenir le terrorisme dans ce pays.
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Je déclare à nouveau la séance ouverte.
Nous sommes très reconnaissants d'accueillir parmi nous aujourd'hui M. Rachad Antonius, qui est un professeur au département de sociologie à l'Université du Québec à Montréal. Nous sommes également ravis de recevoir la professeure Momani de l'Université de Waterloo, qui est bien connue de tous les membres ici. Nous attendons toujours l'arrivée du professeur Imseis de l'Université Queen's, mais j'imagine que nous allons commencer.
Chacun de vous disposera de cinq minutes, après quoi nous passerons aux questions des membres.
Monsieur Antonius, puisque vous êtes ici, la parole est à vous. Vous disposez de cinq minutes.
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Bonjour, monsieur le président.
Avant de commencer ce que j'ai à dire en quelques minutes, je veux insister sur le fait que toutes les sources que j'emploie sont des sources israéliennes. Non pas que les sources palestiniennes ne sont pas fiables, mais cela permet de dire que, à l'intérieur d'Israël, il y a des gens qui soutiennent les points de vue que je soutiens. Si la plupart sont des sources qui sont critiques des politiques de l'État d'Israël, d'autres ne le sont pas.
J'aimerais d'abord énoncer un principe fondamental qui devrait guider les politiques canadiennes et qui guidera mes propres commentaires. Lorsqu'il traite de questions internationales, le Canada a tout intérêt à s'en tenir au droit international, pour des raisons qui tiennent à la fois au contexte national et au contexte international.
Sur le plan national, s'en tenir au droit international fournit un critère objectif qui peut contribuer à résoudre les tensions entre les différents groupes sociaux qui ont des revendications concurrentes. Se référer au droit international est un bon critère pour traiter ces revendications de manière équitable. Une telle position contribuerait à l'apaisement des tensions sociales. Sur le plan international, la promotion et le respect du droit international ont traditionnellement été la marque de fabrique de la politique canadienne et un facteur important de la bonne réputation dont jouit le Canada sur la scène internationale.
Cependant, ces dernières années, le poids du Canada a été obscurci par des positions qui reflétaient des politiques partisanes plutôt que la légalité internationale. Je vais le démontrer. Le fait que le Canada ait perdu, en 2020, son siège au Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies est un indicateur de cet état de fait. Dans cette affaire, il y a, dans l'espace public, une sorte de renversement de la notion d'agresseur et de victime. Tout le monde parle comme si le Hamas était l'agresseur, mais on oublie que, pendant 100 ans, des politiques ont systématiquement été mises en place pour prendre le contrôle de la terre de Palestine et pour en expulser les Palestiniens. Je vous demande d'en référer au livre de l'historien israélien Ilan Pappé, intitulé Le nettoyage ethnique de la Palestine, qui a été publié en anglais et en français. J'ai documenté tout cela dans un livre que j'ai terminé récemment, et que je vais déposer ici.
Dans le document intitulé « Politique canadienne sur les aspects clés du conflit israélo‑palestinien », le gouvernement du Canada affirme tous les principes juridiques de droit international de façon exceptionnelle. Cependant, le Canada n'a fait qu'approuver ces principes du bout des lèvres, et il les contredit régulièrement et de façon systématique. Il m'est arrivé, par le passé, de rencontrer des ministres des Affaires étrangères pour faire valoir certains points de vue. Ce que je faisais, c'est que j'imprimais la politique officielle du Canada et je leur demandais de l'appliquer. Le Canada reconnaît que les colonies sont illégales, mais aucune pression sérieuse n'est faite pour mettre fin à ces colonies. Aucune.
Je vais arriver rapidement à la question de la solution à deux États.
Dans les accords d'Oslo, l'enjeu est la carte publiée par le groupe israélien The Israeli Committee Against House Demolitions. Il s'agit de la carte standard que tout le monde publie, qui montre les territoires de la Cisjordanie et de Gaza, qui ne forment que 22 % de la Palestine historique. Ces territoires ont été conquis en 1967, et les 78 % restants l'ont été en 1949; une partie a été conquise en vertu de la légalité internationale de la résolution 181 et une partie comme résultat de la guerre.
En pratique, le monde entier, y compris la grande majorité des Palestiniens, reconnaît aujourd'hui Israël dans les territoires de facto de 1949. Ce qui est arrivé dans les accords d'Oslo, c'est que le principe...
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Bonjour. Merci. Je suis désolée de ne pas avoir pu me joindre à vous en personne. Je vous remercie tous du temps que vous m'accordez.
Je veux me concentrer sur ce que je pense être la réalité démographique des territoires dont nous parlons. Si nous voulons parler d'une solution à deux États, nous devons comprendre les gens qui sont sur le terrain. En comprenant la réalité démographique, il devient plus clair qu'une solution à deux États est encore très ambitieuse et très nécessaire parce qu'elle répond aux désirs des Palestiniens et des Israéliens. Toutefois, de manière réaliste, cette solution devient de plus en plus difficile à mettre en œuvre avec le temps.
Selon les données démographiques israéliennes et palestiniennes, en 2022, il y avait 7 millions de Palestiniens et 9,8 millions d'Israéliens. Ce que je voudrais souligner, bien sûr, c'est que la communauté palestinienne est divisée en 3 millions de personnes en Cisjordanie, 2,1 millions de personnes à Gaza et environ 2 millions de personnes en Israël.
Il convient de noter qu'en Cisjordanie, où vivent la plupart des Palestiniens, il y a également 468 000 colons juifs. Cela représente environ 12 à 14 % de la population de la Cisjordanie. Le hic, c'est que ces deux communautés ont des enfants très rapidement, environ sept ou huit enfants par ménage du côté juif israélien et un peu moins par ménage du côté palestinien en Cisjordanie.
En Israël, il y a, comme je l'ai dit, deux millions d'Arabes israéliens qui s'identifient également, pour la plupart d'entre eux, comme étant Palestiniens, bien que certains se qualifient d'Arabes israéliens. Il est important de souligner que 40 % des membres de la population sont des Juifs non pratiquants, mais la population qui a le plus besoin de notre attention, parce qu'elle est aussi de plus en plus active sur le plan politique et se radicalise, ce sont les membres de la communauté haredi, de la communauté juive ultraorthodoxe, qui représente actuellement un peu moins de 10 %. C'est toutefois la communauté qui est la plus susceptible à l'heure actuelle de vouloir vivre en Cisjordanie pour créer ce qu'on appelle des « faits sur le terrain ». Le nombre de ces personnes augmente. Il y en a un demi-million en Cisjordanie seulement, comme je l'ai dit.
Je voudrais également signaler que l'ensemble du territoire dont nous venons de parler, que ce soit Israël, la Cisjordanie ou Gaza — pour vous donner une idée de l'étendue du territoire —, se parcoure en six heures de route du Nord au Sud et en 90 minutes de l'Est à l'Ouest.
Je dis tout cela parce que l'un des grands défis auxquels nous sommes confrontés est que, dans le passé, nous pouvions faire une analyse approfondie de ce qui nous a menés là où nous sommes. Bien entendu, l'expansion sans entrave des colons juifs israéliens en Cisjordanie a rendu extrêmement difficile la création d'un État contigu pour le peuple palestinien, en commençant par la Cisjordanie.
La guerre contre Gaza a aggravé le problème. Nous constatons non seulement que 70 % de tous les immeubles ont été détruits à Gaza, mais il est très clair aussi que nous voyons et que nous continuerons de voir que les éléments extrémistes au sein du cabinet de Nétanyahou souhaitent rendre Gaza inhabitable pour ouvrir la voie à l'augmentation du nombre de colons juifs à l'heure actuelle. Il y a une abondance de preuves, énormément de preuves, qui le démontrent. Ces éléments extrémistes au sein du cabinet, au sein du mouvement politique, bien qu'ils ne représentent qu'un petit pourcentage de la population, ont une influence démesurée.
Si quelqu'un est curieux de comprendre cela, c'est le système de représentation proportionnelle à Israël qui donne à un petit nombre de personnes et de partis la voix décisive qui ne permet... Parce que nous n'avons pas eu de majorité clairement élue par l'entremise du système de représentation proportionnelle à Israël, cela signifie souvent que ces voix minoritaires, bien qu'unies au sein de leurs partis, peuvent exercer une influence démesurée.
À l'heure actuelle, ces personnes dirigent en grande partie les vents politiques, pour ainsi dire. C'est très simple: elles souhaitent ce qu'on appelle un « Grand Israël », ce qui signifie de s'emparer de Gaza et, plus important, de s'emparer de la Cisjordanie. En fait, la conquête de la Cisjordanie relève davantage d'une conviction religieuse plus forte que la conquête de Gaza.
La prise de contrôle de Gaza peut servir ce que ces gens pensent être leurs intérêts en matière de sécurité, mais — et je pense que c'est compréhensible — ceux qui suivent la politique israélienne depuis de nombreuses années savent qu'il y a un profond désir de prendre le contrôle de la Cisjordanie. L'annexion de la Cisjordanie est absolument un impératif politique de cette petite communauté qui a une influence démesurée. À bien des égards, les Israéliens non pratiquants, qui représentent environ 40 % de la population, ont de plus en plus l'impression d'être noyés dans la masse.
C'est la situation actuelle. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci, monsieur Ehsassi.
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Merci, monsieur le président.
Le Canada a depuis longtemps comme politique d'appuyer une solution à deux États pour régler le conflit israélo-palestinien. La façon la plus pratique dont dispose le Canada pour y parvenir, surtout en cette période décisive, est de reconnaître immédiatement l'État de Palestine.
Parmi les nombreuses raisons pour expliquer cela, trois me viennent à l'esprit.
Premièrement, la reconnaissance immédiate de l'État de Palestine servirait d'opération de fixation contre le rejet clair d'Israël de la solution à deux États. Le 18 juillet 2024, le Parlement israélien a adopté une résolution pour rejeter officiellement l'établissement d'un État palestinien dans le territoire palestinien occupé. Israël maintient cette position depuis des années, comme l'ont déclaré publiquement les plus hauts responsables gouvernementaux. Le programme du parti au pouvoir, le Likoud, rejette ouvertement l'établissement d'un État palestinien.
Par ailleurs, les soi-disant principes directeurs du gouvernement actuel de l'État israélien font état que « le peuple juif a un droit exclusif et incontestable sur toutes les [régions] de la terre d'Israël », ce qui inclut le territoire palestinien occupé, et que « le gouvernement encouragera et favorisera l'établissement » dans ce territoire à cette fin.
Afin d'appliquer ce qu'il appelle sa souveraineté dans le territoire palestinien occupé, Israël a nommé un ministre spécial, M. Bezalel Smotrich, qui a affirmé le 18 mai 2023 que la mission principale du gouvernement israélien consiste à augmenter le nombre d'établissements dans la Cisjordanie de 500 000 personnes d'ici deux ans.
Je signale que tout cela s'est produit avant le 7 octobre 2023.
Deuxièmement, la reconnaissance immédiate de la Palestine serait conforme à l'obligation juridique internationale du Canada de veiller à ce que le droit à l'autodétermination du peuple palestinien, qui est frustré depuis longtemps, soit réalisé.
Le 19 juillet de cette année, cette obligation a été confirmée par la Cour internationale de justice lorsqu'elle a jugé illégale la présence continue d'Israël dans le territoire palestinien occupé, en partie parce qu'elle viole le droit à l'autodétermination du peuple palestinien. La Cour internationale de justice a répété que « tous les États » — ce qui inclut évidemment le Canada — doivent veiller « à ce qu'il soit mis fin à toute entrave à l'exercice du droit du peuple palestinien à l'autodétermination résultant de la présence illicite d'Israël dans le territoire palestinien occupé ». La reconnaissance est un moyen évident pour le Canada de s'acquitter de cette obligation juridique internationale qui lui incombe.
Le secteur politique canadien croit malheureusement que le seul moyen qu'un État palestinien voie le jour est de mener des négociations bilatérales, mais c'est une position erronée sur le plan juridique. La présence d'Israël sur le territoire est un fait internationalement illicite, et la fin de ce fait ne peut pas faire l'objet de négociations en vertu du droit international. Il faut immédiatement retirer cette présence — l'occupation —, et ce, sans condition.
Troisièmement, la reconnaissance immédiate de la Palestine serait conforme au fait que l'État palestinien existe déjà juridiquement en vertu du droit international. La Palestine répond aux quatre critères d'existence d'un État en vertu du droit international, qui ont dans le passé fait l'objet d'une interprétation très libérale, souple et permissive dans la pratique des États.
Le premier critère est que la Palestine ait une population permanente de plus de 5 millions de personnes, dont 2,3 millions dans la bande de Gaza sont aujourd'hui menacés de nettoyage ethnique.
Le deuxième est que la Palestine ait un territoire défini: le territoire palestinien occupé.
Le troisième est que la Palestine ait des fonctions gouvernementales suffisantes pour le fonctionnement d'un État, comme l'ont affirmé l'Assemblée générale des Nations unies, la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, le Comité spécial de liaison, etc.
Le quatrième est que la Palestine ait acquis la capacité d'entretenir des relations étrangères, comme le démontre le fait que l'Assemblée générale des Nations unies lui ait accordé un statut d'État observateur non membre et que 149 autres États le reconnaissent, ce qui représente la grande majorité des peuples et des États de la planète Terre. Cela inclut des amis et alliés du Canada tels que l'Irlande, la Norvège, l'Espagne et la Suède.
Je conclurai avec ceci: le Canada soutient officiellement une solution à deux États en Israël-Palestine depuis 1949. Depuis cette année‑là, le Canada n'a reconnu qu'une moitié de cette solution: Israël. À une époque où Israël cherche ouvertement et publiquement à adopter une politique visant à éliminer la solution à deux États, le Canada doit faire tout en son pouvoir pour empêcher que cela se produise. La reconnaissance immédiate de l'État palestinien est le moins que le Canada puisse faire, à la fois conformément à ses obligations en vertu du droit international, et pour préserver toute perspective de paix conforme à la politique des deux États à l'avenir. Le Canada doit agir maintenant avant qu'il soit trop tard.
Je vous remercie. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Mes questions s'adressent à madame Momani. Merci d'avoir pris le temps de comparaître devant nous, de l'Université de Waterloo.
Vos remarques liminaires à propos de la réalité démographique m'ont beaucoup intéressée. Il nous semble que la voie vers une solution à deux États — sur le plan politique, et non juridique — doit être le résultat d'un règlement négocié entre Israéliens et Palestiniens et doit également bénéficier de l'appui du peuple. Je suis très intéressée d'étudier la réalité démographique des Palestiniens et des Israéliens à l'heure actuelle. Vous avez mentionné qu'il y a environ 9,8 millions d'Israéliens: 40 % d'entre eux sont non pratiquants, environ 1 million d'entre eux se trouvent en Cisjordanie et près de 2 millions sont des Arabes israéliens ou des Palestiniens.
Quel est le niveau de soutien populaire parmi les 9,8 millions de citoyens israéliens? Pouvez-vous nous fournir une ventilation parmi les différents groupes de citoyens israéliens? J'aimerais ensuite aborder le côté palestinien.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue à tous nos témoins et je les remercie de leur participation à cette importante étude.
Je pense qu'il n'y a pas de dissidence au sein de ce comité et du gouvernement quant à l'importance d'avoir un État palestinien et un État israélien côte à côte pour avoir une paix durable. Je pense que tout le monde le reconnaît.
Justement, aujourd'hui, avec le premier groupe de témoins, on a beaucoup parlé du processus de négociation relatif aux accords d'Oslo. Il a aussi été question des conditions nécessaires pour ramener les parties à la table de négociation dans un contexte très difficile où les deux populations sont traumatisées, comme on l'a entendu. C'est très difficile.
Monsieur Imseis, comment le Canada pourrait-il jouer son rôle de façon à ramener les parties à la table de négociation afin que les discussions en vue d'une paix durable et d'une solution à deux États puissent continuer d'avancer?
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Je vous remercie de la question.
Je pense que le meilleur rôle que le Canada puisse jouer est d'adhérer au droit international. Nous nous targuons de respecter l'ordre juridique international fondé sur des règles. Toute solution à un conflit doit être mesurée et être conforme aux garde-fous du droit international. Comme je l'ai mentionné, l'organisme judiciaire principal des Nations unies, la Cour internationale de justice, a jugé le 19 juillet que la présence d'Israël dans le territoire palestinien occupé est, en soi, illégale et constitue donc un fait internationalement illicite. La loi sur la responsabilité des États n'exige pas que la fin de ce fait fasse l'objet de négociations.
Il en va de même pour le droit inaliénable du peuple palestinien à l'autodétermination. Si vous exigez la fin de l'occupation et l'exercice du peuple palestinien de son droit à l'autodétermination fassent l'objet de négociations entre un occupant belligérant de mauvaise foi — qui se trouve physiquement sur le territoire et le colonise illégalement — et une population sans défense soumise à son contrôle, vous donnez en fait à la puissance occupante un droit de veto, par l'entremise de négociations, sur l'exercice du droit à l'autodétermination du peuple palestinien.
Le Canada doit respecter le droit international et encourager Israël à se retirer — conformément à la décision de la Cour internationale de justice — du territoire palestinien occupé. Les deux États peuvent ensuite discuter d'autres enjeux dans le cadre de négociations entre eux.
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Il est évident qu'elle y serait conforme. Cependant, il ne s'agit que d'une étape; ce ne serait pas suffisant.
Sur papier, tous les grands principes qui orientent la politique du gouvernement du Canada renforcent le droit international et en reconnaissent l'importance, mais ceux-ci ne sont pas mis en application. Il faut apprendre des erreurs du passé.
Au moment des accords d'Oslo, il y avait un appui énorme, de tous les côtés, en faveur du processus de paix et de la reconnaissance mutuelle. Même à Gaza, la popularité du Hamas était tombée à zéro, ou presque.
Si cela n'a pas fonctionné, c'est parce que le jour où les accords d'Oslo ont été signés, soit le 13 septembre 1993, la construction des colonies de peuplement dans les territoires occupés reprenait de plus belle, de telle sorte que, en sept ans, entre 1993 et 2000, Israël a installé quatre fois plus de colons dans les territoires occupés que durant les 25 années précédentes. Tout cela a été fait en violation du droit international. Pourtant, aucune pression sérieuse n'a été faite pour mettre un terme à cela. C'est là que se trouve le problème.
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Je suis de cet avis, oui. Les Israéliens ont depuis longtemps un problème avec l'UNRWA. En adoptant la loi qu'ils ont adoptée hier et en retirant à l'Office les privilèges et les immunités qui lui permettent d'exercer ses activités sur les territoires palestiniens occupés, on l'empêche de s'acquitter de ses obligations.
Par exemple, l'une des dispositions de la loi stipule qu'aucun Israélien ne peut communiquer, discuter de quoi que ce soit ou entrer en contact avec un représentant de l'Office. Vous pouvez imaginer que les centaines de points de contrôle érigés, entretenus et pilotés par l'armée israélienne sur le territoire palestinien occupé doivent être traversés par des représentants de l'UNRWA dans des véhicules plaqués et identifiés par les Nations unies tous les jours, ou toutes les heures. Il est maintenant illégal pour ces soldats de parler aux représentants de l'UNRWA ou même de songer à leur présence sur ce territoire.
Puisque l'UNRWA est le plus important fournisseur d'aide humanitaire et d'assistance aux Palestiniens dans le territoire occupé, en éliminant sa présence — comme les Israéliens tentent de le faire —, il sera beaucoup plus difficile pour les Palestiniens de vivre.
La puissance occupante a l'obligation, en vertu du droit international, de fournir de l'aide humanitaire, de l'assistance et des fournitures de secours aux populations protégées — voir l'article 59 de la quatrième Convention de Genève — et elle a l'obligation de le faire également en vertu de l'article 60. Si l'UNRWA n'est pas là pour le faire pour la puissance occupante, ce fardeau incombe aux Israéliens, et ils ne le feront pas. Ils ont été très clairs à ce sujet.
Il s'agit en fait d'une tentative d'accélérer le nettoyage ethnique de la Palestine occupée, à mon humble avis. Je dis cela en tant qu'ancien conseiller juridique de l'UNRWA, un poste que j'ai occupé pendant environ 12 ans. J'ai travaillé pour l'UNRWA. Je m'entretenais régulièrement avec des représentants israéliens, y compris au sein de l'Armée de défense d'Israël. Je comprends les activités de l'organisation, et je me tiens prêt à répondre à toute question concernant l'UNRWA.
Je remercie tous les témoins d'être avec nous aujourd'hui. Cette conversation est d'une grande importance.
Monsieur Imseis, j'aimerais vous poser trois questions, si j'en ai le temps.
À la fin du mois de septembre, le ministre des Affaires étrangères de la Jordanie, Ayman Safadi, a dit devant les Nations unies que les pays arabes étaient prêts à garantir la sécurité d'Israël si le pays mettait fin à son occupation et qu'un État palestinien était établi.
Pouvez-vous nous parler du rôle des pays musulmans et arabes en ce qui a trait à la sécurité d'Israël une fois que l'occupation aura pris fin et que l'État palestinien sera reconnu?
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C'est essentiel. En 2002, après de nombreuses décennies de revendications du gouvernement israélien pour la reconnaissance de ses voisins dans le monde arabe et dans le monde musulman, l'Initiative de paix arabe a été lancée par la Ligue des États arabes, qui offrait la pleine reconnaissance de l'État d'Israël si celui‑ci se retirait, comme il est légalement tenu de le faire, de l'ensemble du territoire palestinien occupé. C'était il y a 22 ans. Cette offre est toujours sur la table.
Ce qu'a dit le ministre des Affaires étrangères, M. Safadi, était très important, parce que dès qu'Israël se retirera, tous les États arabes et les États musulmans — il y en a plus de 51 — reconnaîtront Israël.
Ils auront donc des relations bilatérales avec Israël qui les obligeront à respecter l'intégrité territoriale d'Israël et son indépendance politique à l'intérieur de ses frontières. L'élément clé ici, c'est qu'Israël n'est pas la Palestine. Israël n'a aucun droit souverain ni aucun droit juridique en Palestine occupée. L'entente serait la suivante: si vous respectez le droit international, nous allons vous reconnaître et vous protéger.
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Comme je l'ai mentionné plus tôt — ou comme j'aurais dû le dire —, la Cour internationale de justice a clairement indiqué que le Canada avait l'obligation, premièrement, de ne pas reconnaître la légalité de la présence continue d'Israël sur le territoire ni de faire quoi que ce soit pour l'aider à maintenir sa présence illégale sur le territoire.
Il faut donc une révolution complète des relations bilatérales entre tous les États — mais dans ce cas-ci, entre le Canada et Israël — pour s'assurer qu'aucune de ces relations ne fait quoi que ce soit pour aider Israël à maintenir sa présence dans le territoire palestinien occupé. Je parle ici des relations économiques, politiques, diplomatiques, sociales, civiles... Tout cela.
Par exemple, nous avons un accord de libre-échange avec Israël, ce qui est très bien. Toutefois, cet accord reconnaît qu'Israël se définit comme incluant le territoire palestinien occupé. Il s'agit d'une violation de l'avis consultatif de la Cour internationale de justice. C'est une violation du droit péremptoire du peuple palestinien à l'autodétermination. L'accord lui-même, du point de vue du droit international — voir l'article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités — est illégal. Il faut le revoir.
Monsieur Antonius, j'aimerais vous poser une question. Au départ, le cadre de l'accord d'Oslo avait été accepté par 70 % des Palestiniens. Toutefois, en octobre dernier, le taux d'approbation n'était que de 30 %. De plus, seulement 20 % des Israéliens de 18 à 34 ans appuyaient une solution à deux États. Il semble que le soutien des Palestiniens et des Israéliens, que ce soit pour l'accord d'Oslo ou la solution à deux États, soit faible.
Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet et sur les mesures que peut prendre le Canada pour faire avancer les choses, étant donné le point de vue de tout le monde au sujet de la guerre qui se déroule sur le terrain?
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Il est très difficile d'amener deux peuples qui sont en guerre en ce moment à se parler et à se reconnaître. Cela ne peut se faire que par des gens bien intentionnés, à l'extérieur du cercle immédiat de la confrontation, afin de garder le dialogue ouvert.
Cependant, encore une fois, pourquoi l'appui a‑t‑il diminué? Pourquoi ce grand soutien dont nous avons bénéficié tout de suite après l'accord d'Oslo est‑il tombé? C'est parce que l'accord a été utilisé comme excuse pour s'emparer de plus de terres, avec la bénédiction du Canada. Sur papier, le Canada a dit que c'était illégal, mais il n'a jamais exercé de pression sérieuse sur Israël.
Par conséquent, la première chose à faire maintenant est de mettre fin aux massacres, puis d'essayer de mettre quelque chose en œuvre. Bien sûr, Israël ne se retirera pas aujourd'hui, mais si le pays pouvait dire qu'il a l'intention de se retirer, cela aiderait.
À l'heure actuelle, je crois qu'aucune des solutions disponibles n'est équitable, et qu'aucune des solutions équitables n'est disponible. Nous sommes dans une impasse à cause de la guerre et de la politique de prise de contrôle des terres, y compris des terres occupées, en contravention du droit international et de la politique canadienne.
Le chemin n'est pas facile, mais on doit le parcourir par étapes, et la première chose à faire est de mettre fin à la violence dès maintenant.
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Merci, monsieur le président.
C'est un plaisir d'être ici avec les membres du Comité alors que nous discutons de la façon dont nous pouvons parvenir à la paix au Moyen-Orient, idéalement par l'entremise d'une solution à deux États, où Israël, le seul État à majorité juive au monde, vivrait en paix et en sécurité avec ses voisins palestiniens. Idéalement, cela se ferait dans le cadre de négociations entre les deux parties, mais si ce n'est pas le cas, il faut comprendre quelles conditions seraient nécessaires pour reconnaître l'État de Palestine.
Monsieur Imseis, j'aimerais commencer par vous. J'ai lu plusieurs de vos écrits, y compris un discours que vous avez prononcé plus tôt cette année aux Nations unies et qui s'intitule « The Nakba and the UN's Permanent Responsibility for the Question of Palestine ». Je vais lire un paragraphe, qui énonce ceci:
Pour ce faire, il est essentiel de discuter de la décision fatidique prise par l'Assemblée générale des Nations unies, alors dominée par l'Occident, de recommander la partition de la Palestine contre la volonté de la population majoritairement autochtone du pays par l'entremise de la résolution 181 du 29 novembre 1947. Un examen des modalités du plan de partition et du dossier des Nations unies qui l'accompagne [...] révèle que le plan était illégal en vertu du droit international en vigueur. Cette illégalité a contribué à jeter les bases de la Nakba de 1948 [qui signifie « catastrophe »] et de ses résultats douloureusement injustes qui se sont poursuivis et, en fait, se sont accélérés depuis.
Il me semble que votre thèse — et je l'ai lue — veut essentiellement que la création d'Israël était illégale en vertu du droit international. Par conséquent, je vais vous demander si vous reconnaissez l'État d'Israël. Nous parlons d'une solution à deux États.
Reconnaissez-vous qu'Israël a le droit d'exister en tant qu'État démocratique et juif?
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Merci, monsieur le président.
D'une certaine manière, Israël a été créé par la résolution 181 de 1947, adoptée par l'ONU . Cette résolution prévoyait la division de la Palestine mandataire en un État juif et un État arabe.
Je m'adresse au professeur Antonius et au professeur Imseis, et j'aimerais avoir une réponse rapide, s'il vous plaît.
Comment expliquez-vous l'actuelle hostilité du gouvernement israélien à l'égard de l'ONU?
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Il y a une longue réponse à cette question. Je vais essayer d'être bref. Les Nations unies ne sont pas un organisme monolithique. Elles comportent six organes principaux. Les Nations unies ont le Conseil de sécurité, où Israël jouit d'une position privilégiée en raison de sa relation spéciale avec un membre permanent. Les Israéliens n'ont aucun problème avec le Conseil de sécurité, à l'exception des décisions qu'il a prises et auxquelles ils contreviennent depuis de nombreuses années.
En ce qui concerne l'Assemblée générale, Israël a un véritable problème, parce que la dynamique politique de l'Assemblée est différente. Elle est dominée par l'hémisphère Sud, qui a toujours été très favorable au peuple palestinien en raison des ravages historiques du colonialisme et de l'impérialisme, entre autres. Israël a donc un problème avec ce que dit l'Assemblée générale.
Il y a aussi un problème avec le secrétaire général. On lui a dit qu'il était persona non grata. Cela concerne le Secrétariat des Nations unies. C'est un autre organisme des Nations unies. Lorsque la Cour internationale de justice a examiné ce dernier avis consultatif, les Israéliens ont dit qu'il s'agissait d'une forme de terrorisme juridique.
Le problème est exactement lié à ce qu'a dit M. Antonius. Les Nations unies sont un porte-étendard du droit international, et lorsque les organes des Nations unies se prononcent sur les actions israéliennes dans le territoire palestinien occupé et déterminent que ces actions sont illégales, cela déplaît naturellement aux Israéliens. C'est la base de leurs préoccupations à l'égard de l'ONU.
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Je ne peux qu'émettre une hypothèse fondée sur mes lectures. Je crois qu'en raison de sa politique étrangère, le Canada est tenu de respecter le consensus de Washington dans ce dossier. Pendant longtemps, la position du gouvernement américain, étant donné la proximité des États-Unis avec Israël, consistait à dire qu'il n'était pas possible de créer un État palestinien et que la reconnaissance d'un tel État par d'autres pays n'était pas non plus possible en l'absence d'une solution négociée.
Comme je l'ai dit, cela va complètement à l'encontre des principes fondamentaux du droit international. Le peuple palestinien existe sur le plan juridique. Il a droit à l'autodétermination et sa zone d'autodétermination constitue le territoire palestinien occupé. Les Palestiniens ont le droit de créer un État sur ce territoire, à l'exclusion de tous les autres peuples. Israël n'y est pas souverain.
L'organe juridique principal des Nations unies a conclu qu'Israël avait l'obligation de se retirer de ce territoire aussi rapidement que possible. Lors d'une session extraordinaire tenue le 18 septembre 2024, l'Assemblée générale a adopté la résolution d'urgence ES‑10/24, qui précisait qu'Israël devait quitter le territoire au plus tard le 17 septembre 2025. Cette obligation relève du droit international.
Le Canada n'a aucune raison de ne pas reconnaître... en l'absence de négociations, lesquelles n'auront jamais lieu. Le bilan historique est sans équivoque. Il faut prendre au sérieux les paroles et les gestes des Israéliens.
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Je vous remercie, monsieur le président.
J'aimerais parler du contexte géopolitique dans son ensemble.
Seulement 8 % des habitants de la planète vivent dans une démocratie. Quarante pour cent de la population mondiale vit dans un État autoritaire. Ces données nous viennent de l'Economist Intelligence Unit. Des quelque 190 États membres des Nations unies, un peu plus d'une trentaine de pays seulement constituent une véritable démocratie. Les quelque 150 États restants ne sont pas considérés comme tels. La grande majorité des pays démocratiques croit que la reconnaissance de l'État de Palestine doit résulter d'une solution négociée créant deux États et qu'elle ne devrait pas avoir lieu immédiatement.
Je crois que nous devons envisager ce conflit au Moyen-Orient dans un contexte beaucoup plus vaste. Tout le monde ici conviendra que le Canada est une démocratie libérale. Israël en est également une. Les démocraties sont imparfaites, mais le Canada et Israël sont tous les deux des démocraties libérales.
Les conflits faisant rage entre Israël et le Hamas, entre Israël et le Hezbollah et entre Israël et l'Iran s'inscrivent dans un contexte. Ils émanent d'une discordance entre la montée de l'autoritarisme et les démocraties comme Israël, l'Ukraine et Taïwan.
De l'autre côté de l'échiquier, nous retrouvons des États autoritaires comme la Fédération de Russie, la République populaire de Chine et la République islamique d'Iran. Pour nous, la position que le Canada devrait adopter est sans équivoque: nous devons appuyer les démocraties libérales.
J'aimerais que les témoins commentent le contexte général actuel.
Cette question relève du droit international et les critères sont très clairs.
Être un pays démocratique, ce n'est certainement pas un critère, puisque cette notion est subjective et varie d'un État à l'autre. En revanche, tous les États s'entendent sur le fait que leurs interactions sont régies par le droit international. La Palestine a déjà été reconnue en droit international. Comme je l'ai dit, 149 États ont reconnu que les critères de la Convention de 1933 de Montevideo étaient satisfaits.
Le Canada doit simplement faire preuve de volonté politique et reconnaître ce fait.
Cela conclut la période de questions prévue. Toutefois, j'aimerais préciser aux députés que M. Morrice écoute patiemment depuis deux heures.
Plaît‑il aux membres du Comité de lui accorder trois minutes pour poser des questions?
Des voix: D'accord.
Le président: Je vous remercie.
Monsieur Morrice, vous avez la parole.
Vous disposez de trois minutes.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Je remercie également mes collègues.
Je trouve déconcertant que le Canada affirme qu'il souhaite une paix durable et qu'il appuie une solution à deux États, sans toutefois reconnaître l'un d'entre eux.
Monsieur Imseis, j'aimerais vous rappeler les propos qu'a tenus notre . J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Elle disait que le gouvernement travaille avec les pays aux vues similaires afin de convenir des conditions qui devront être réunies pour que le moment soit propice à une telle reconnaissance.
Que répondez-vous à cela?
Les faits, tels qu'ils sont consignés dans le dossier des Nations Unies, y compris le dossier de la Cour internationale de Justice, montrent que la puissance occupante agit de mauvaise foi et illégalement. Elle a indiqué ouvertement, et on l'a entendu très clairement dans les délibérations de son assemblée législative, qu'il n'y aura pas d'État palestinien.
Si vous attendez qu'elle change d'avis, vous allez attendre longtemps. C'est pourquoi les pays tiers doivent reconnaître l'État de Palestine afin de pallier la situation actuelle et veiller à ce que la puissance occupante cesse ses activités. C'est un geste de préservation.