Passer au contenu
;

ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 124 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 7 octobre 2024

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Français]

     Bonjour tout le monde, et bienvenue à la 124e réunion du Comité permanent de l'environnement et du développement durable.
    Je salue les députés et les témoins présents dans la salle, ainsi que tous ceux et celles qui se joignent à nous par l'intermédiaire de l'application Zoom.
    Aujourd'hui, nous poursuivons notre étude sur les facteurs qui ont mené aux récents incendies dans le parc national de Jasper.
    Pour les témoins qui sont en ligne, si vous n'avez pas la parole, veuillez vous mettre en sourdine, s'il vous plaît.
    Pour les témoins présents dans la salle, veuillez s'il vous plaît, pour éviter les accidents…

[Traduction]

     J'invoque le Règlement.
    Il n'y a pas d'interprétation.

[Français]

    Est-ce que ça va? M'entendez-vous en anglais maintenant?

[Traduction]

    Je suis sur la chaîne anglaise et tout ce que j'entends, c'est votre voix.
     Est‑ce que les gens m'entendent en français?
    Je suppose que nous attendons de pouvoir communiquer d'une façon ou d'une autre.

[Français]

     M'entendez-vous?
    Un député: Non.

[Traduction]

    Le président: Nous allons faire une petite pause.
(1100)

(1110)

[Français]

     Nous reprenons la réunion.
    Nous sommes ici pour poursuivre notre étude sur les facteurs qui ont mené aux récents incendies dans le parc national Jasper.
    Si vous êtes en ligne et que vous n'avez pas la parole, nous vous demandons de vous mettre en sourdine. Si vous êtes présents dans la salle — c'est surtout pour les témoins que je dis ça parce que tous les députés sont au courant —, faites bien attention de ne pas vous tenir trop près du micro quand vous parlez et de ne pas toucher à la tige du micro. Si vous voulez enlever votre oreillette, je vous demanderais de bien vouloir la déposer sur le collant rond qui est devant vous. Nous faisons tout cela pour éviter de nuire aux interprètes, par respect pour eux.
     Sans plus tarder, accueillons notre premier groupe de témoins. Nous recevons M. Mike Flannigan, titulaire de la Chaire de recherche BC Innovation, Services prédictifs, gestion des urgences et science du feu, ainsi que M. Christian Messier, professeur d'écologie forestière. Ces deux témoins comparaissent à titre personnel.

[Traduction]

     De l'Arctic Fire Safety Services Limited, nous accueillons Kristopher Liivam, président et professionnel de la sécurité agréé au Canada, et de l'Association de l'industrie touristique du Canada, Elizabeth Potter, présidente et cheffe de la direction.
     Chaque témoin disposera de cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire. Nous allons commencer par M. Flannigan, qui est en ligne, je crois.
     Monsieur Flannigan, c'est à vous. Vous avez cinq minutes.
     Votre micro semble allumé, donc ce n'est pas le problème. Pourriez-vous dire quelques mots?
    Pouvez-vous m'entendre? Levez le pouce si vous pouvez m'entendre.
    Non.
     Passons donc la parole à M. Christian Messier.

[Français]

    Monsieur Christian Messier, professeur d'écologie forestière, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. C'est un plaisir pour moi d'être ici aujourd'hui. Merci de m'avoir invité.
     Les mégafeux qui se sont produits à Jasper en 2024 ne sont pas le fruit du hasard, mais plutôt le fait d'une accumulation de facteurs anthropomorphiques internes et externes au parc. Il faut savoir que les parcs nationaux et beaucoup de forêts près des centres habités ont fait l'objet d'interventions humaines constantes au cours des 100 dernières années. Ces interventions, visant à éteindre les feux qui auraient normalement affecté ces forêts, ont empêché le rajeunissement des forêts et la venue d'espèces pionnières comme le peuplier et le bouleau, qui sont plus tolérants ou qui diminuent les risques de feu.
    La raison de ces interventions humaines est simple et la même partout: on veut préserver de magnifiques paysages naturels et limiter les perturbations. Toutefois, en faisant cela, on favorise une augmentation de l'âge moyen des arbres et la présence d'arbres morts et de conifères tolérants à l'ombre, comme le sapin et l'épinette, qui sont souvent présents en sous-bois et qui favorisent la montée du feu de la surface vers la canopée. Ces trois facteurs sont bien connus pour augmenter les risques de feu.
     Il faut aussi savoir que, comme le climat se réchauffe rapidement et que Jasper est à une latitude élevée dans l'hémisphère nord, où le réchauffement est plus important, le risque qu'il y ait des conditions propices aux mégafeux augmente. On parle de printemps précoces, chauds et secs, de la présence de combustibles comme du bois mort et des résineux, et d'étés chauds et secs avec beaucoup d'orages, comme on en voit de plus en plus souvent.
    Ce qui est arrivé à Jasper avait d'ailleurs été prévu par plusieurs chercheurs. Plusieurs articles scientifiques mentionnaient que ces genres de feux étaient inévitables, car ils sont causés par la dégradation graduelle de nos forêts et une augmentation de la mortalité de nos arbres. C'est quelque chose qui ne se produit pas seulement au Canada, mais partout dans le monde. D'ailleurs, certains scientifiques prédisent qu'avec l'augmentation des changements climatiques, les feux vont tellement augmenter dans les 50 prochaines années que la forêt risque d'émettre autant de carbone annuellement que la somme des activités humaines au Canada. Ainsi, même si les activités humaines cessaient d'émettre du carbone, les feux de forêt et l'augmentation de la mortalité des arbres risquent dans les 30 ou 50 prochaines années d'en émettre tout autant.
    Je comprends que la réunion d'aujourd'hui vise à comprendre les facteurs qui ont mené aux incendies dans le parc national de Jasper. Cependant, j'aimerais parler plus globalement des risques de perturbation majeure de nos forêts liés au réchauffement climatique et à l'augmentation de l'introduction d'insectes et de maladies exotiques, qui tuent de plus en plus d'espèces d'arbres. Il faut savoir aussi que nos arbres sont de moins en moins adaptés aux nouvelles conditions climatiques, ce qui favorise une perte de vigueur qui les rend plus vulnérables à des insectes et à des maladies qui, normalement, ne devraient pas les affecter.
    Les changements climatiques sont tellement rapides que plusieurs espèces d'arbres se retrouvent en dehors de ce qu'on appelle leur enveloppe climatique normale, ce qui entraîne une perte de vigueur de ces arbres et une dégradation des forêts. Cela augmente les risques d'incendie, les émissions de carbone de nos forêts, la précarité de notre industrie forestière et les risques de perte de biodiversité et de tous les services que nous rend la forêt. Il faut savoir que, depuis une dizaine d'années, la forêt au Canada émet plus de carbone qu'elle n'en absorbe, ce qui contribue au réchauffement climatique sur la Terre.
    Que pouvons-nous faire, par conséquent? Voici des suggestions.
    D'abord, il faudrait favoriser une diversification des espèces d'arbres qui ont des attributs fonctionnels différents et qui sont capables de résister à toutes sortes de perturbations, tout comme on le fait en diversifiant nos investissements dans nos fonds de pension pour réduire les risques et assurer un rendement acceptable dans l'avenir.
(1115)
     De plus, il ne faut pas systématiquement empêcher les petites perturbations qui se produisent, comme de petits feux. D'ailleurs, il faudrait même provoquer des feux contrôlés pour diminuer la charge combustible et réduire la proportion de conifères.
    Ensuite, il faudrait réaliser une évaluation systématique de la vulnérabilité de nos forêts aux insectes, aux maladies et aux feux pour toutes les régions du Canada, afin d'utiliser l'aménagement forestier pour essayer de réduire ces risques.
    Enfin, il faudrait aussi accélérer l'adaptation de nos forêts aux changements climatiques et aux insectes en favorisant ce qu'on appelle la migration assistée des espèces d'arbres, c'est-à-dire une migration faite par l'homme en amenant vers le Nord des espèces qui sont plus au Sud…
    Je dois vous arrêter ici, mais vous aurez l'occasion d'ajouter des commentaires durant la période de questions.

[Traduction]

     Monsieur Flannigan, m'entendez-vous maintenant? Non.
     Monsieur Liivam, je crois que si vous levez le micro, nous pourrons peut-être mieux vous entendre. Pourquoi ne pas essayer maintenant pendant cinq minutes?
(1120)
    C'est bien. Le son n'est pas de très bonne qualité, mais nous pouvons vous entendre.
    D'accord [difficultés techniques]
     Un instant, s'il vous plaît.
     Pourriez-vous monter la tige du micro? Je ne vois pas où est la tige. Ça devrait aller, en fait.
     Pouvons-nous réessayer? Pourriez-vous commencer par le début, monsieur Liivam?
     Monsieur le président et membres du Comité, la déclaration que je fais aujourd'hui fournira un exemple choquant de la façon dont l'incendie de Jasper a été mal géré par Parcs Canada et devrait justifier une enquête plus approfondie sur la gestion des incendies et le rôle global de cette agence en tant que gardienne des biens culturels et naturels les plus importants du Canada.
     Dans la soirée du mardi 23 juillet 2024, l'Arctic Fire Safety Services a été contacté par l'Alberta Emergency Management Agency pour déployer trois camions d'incendie de type 3 et 11 pompiers dans le parc national Jasper. La demande a par la suite été modifiée pour une demande de deux camions de type 3 à Jasper et un camion à un autre incendie.
    Les équipes ont emprunté la route 93 d'Eckville à Jasper. De plus, certaines équipes sont arrivées de Fort McMurray par la route 16. On nous a dit que l'équipe devait apporter des tentes et des sacs de couchage parce qu'il n'y avait pas de chambres d'hôtel à Jasper, alors l'équipe a dû dormir sur la pelouse de la caserne de pompiers de Jasper pendant deux nuits.
    La nuit du 24 juillet, dans un rapport verbal, mon équipe m'a informé de nombreux problèmes qui ont nui à la capacité des pompiers de protéger Jasper.
     Parcs Canada était en train de procéder à un brûlage à contrevent, et l'état de ce brûlage ne semblait pas avoir été communiqué au spécialiste de la protection de la structure de l'équipe d'allumage de Parcs Canada, qui se trouvait à Jasper. Toutes les équipes étaient assises à la caserne de pompiers de Jasper et n'étaient pas à leur position prévue lorsque le foyer principal de l'incendie est entré dans Jasper parce qu'elles croyaient que le comportement de l'incendie qui avait été observé provenait du brûlage à contrevent. Ce n'est qu'après avoir appris que les bâtiments étaient en feu que les équipes d'incendie ont été déployées pour sauver le village. La scène a été décrite comme étant extrêmement chaotique...
     Oui, madame Taylor Roy.
     J'ai de la difficulté à entendre ce qu'il dit en anglais.
     Pardon?
    J'ai de la difficulté à l'entendre.
    Oui, moi aussi.
    Oui, d'accord.

[Français]

    Madame Pauzé, entendez-vous bien les interprètes quand M. Liivam parle?

[Traduction]

    Je ne comprends pas le français.

[Français]

    Mme Pauzé me fait signe que tout est beau.

[Traduction]

    Il me semble que c'est l'anglais qu'on a de la difficulté à entendre ici, dans la salle.
    Veuillez poursuivre, monsieur Liivam, et peut-être parler un peu plus lentement.
    La parole est à vous, monsieur Longfield.
    La version anglaise, la version non interprétée, nous parvient en sourdine. S'il parlait plus lentement, ce serait peut-être plus facile.
    Oui.
    C'est très difficile pour nous d'entendre...
    Monsieur Liivam, veuillez parler un peu plus lentement et nous verrons ce qui se passera.
     Avant l'incendie, Parcs Canada avait commandé pour Jasper des bornes-fontaines dont le filetage sur les ports latéraux était différent de celui utilisé par toutes les municipalités de l'Alberta et de la Colombie‑Britannique. Il n'y avait que sept adaptateurs de bornes d'incendie pour passer de leur filetage au BAT, le filetage utilisé par la Colombie‑Britannique et l'Alberta. Notre équipage a vu un Petro‑Canada et un parc de maisons mobiles brûler, mais nous n'avons pu rien faire parce que nous ne pouvions pas nous connecter aux bornes-fontaines.
    Le capitaine du service d'incendie de Jasper a reconnu que notre équipe avait sauvé ce qui restait du centre-ville parce que nous étions à une borne-fontaine munie d'un adaptateur. Nous avons donc été en mesure d'intervenir sur les bâtiments.
    Aucune source d'eau secondaire n'a été mise en attente en prévision de l'épuisement des bornes d'incendie. Parmi les leçons tirées des événements passés en milieu périurbain, la pratique courante veut que les approvisionnements en eau soient prépositionnés.
    Une fois qu'il a été confirmé qu'Arctic Fire Safety Services déployait des équipes de lutte contre les incendies supplémentaires au nom d'une compagnie d'assurances et du propriétaire d'un centre de villégiature, l'on a dit aux équipes de nos deux camions que leurs services n'étaient plus requis pour l'intervention de Parcs Canada, sans aucune explication. Le spécialiste de la protection structurale a demandé à mon chef d'équipe: « Kris a‑t‑il vraiment 20 camions d'incendie qui attendent à Hinton? »
    L'après-midi du 24 juillet, j'ai été contacté par une entreprise américaine appelée RedZone. Ils effectuent des analyses des feux de forêt et envoient des équipes de lutte contre les feux de forêt au nom des compagnies d'assurances. Ils m'ont demandé si j'avais des ressources pour aller à Jasper pour un de leurs clients.
    Je leur ai dit que j'avais trois camions de type 6, un camion de type 7 et un camion ravitailleur tactique à déployer. Nous avons été embauchés et chargés de protéger la station de ski Marmot Basin et le téléphérique de Jasper.
    Peu de temps après, leur client, Pursuit Collection, a communiqué avec moi. Je leur ai dit que mes ressources étaient complètement déployées. Ils nous ont demandé si nous pouvions trouver des ressources pour protéger leurs propriétés. J'ai communiqué avec mes autres entrepreneurs en lutte contre les incendies, par l'entremise d'une page Facebook, pour faire appel aux pompiers des champs de pétrole. Avant la soirée, j'avais été en mesure d'assembler une flotte de 20 camions de pompiers et de 50 pompiers accrédités, qui se sont tous rendus à Hinton. J'ai même refusé des ressources supplémentaires d'autres entreprises, car j'estimais que nous en avions assez pour répondre à nos besoins. Ces autres entreprises comprenaient Safety First de Drayton Valley, Safety Boss d'Edmonton, New Venture de Whitecourt, Superior Fire Control de Grande Prairie et Elite Oilfield Services de Clairmont.
    Le matin du 25 juillet, la plupart de nos équipes ont été rassemblées à la station-service UFA Cardlock de Hinton afin que nous puissions former un convoi vers Jasper. Toutes les équipes ont parcouru la route pendant la nuit pour être à Hinton le matin. À 9 h 11, nous avons quitté la station-service de Hinton et nous nous sommes rendus à Jasper en pensant, d'après ce que nous avaient dit Pursuit et l'agent de liaison de Parcs Canada, que nous avions la permission d'entrer à Jasper. Nous sommes arrivés à la première série de barrages routiers à l'ouest de Hinton, où on nous a refusé l'accès sur ordre du commandement des interventions de Parcs Canada; nous avons donc dû faire demi-tour.
    Nous avons de nouveau tenté d'entrer dans le parc à 15 h 42 après avoir cru que le problème avait été réglé, mais une fois de plus, on nous a refusé l'accès. À 16 h 49, nous avons finalement obtenu l'accès au parc Jasper. À 18 h 55, nous sommes arrivés à la caserne de pompiers de Jasper et nous avons contacté le spécialiste de la protection des structures.
     Nous avons divisé nos équipes pour effectuer une vérification rapide des propriétés que nous avions eu la responsabilité de protéger. Nous n'avons pas eu accès à Marmot Basin, au téléphérique de Jasper ou au chemin de Maligne Lake. Aucune des propriétés auxquelles nous avons pu accéder n'a été endommagée. Parmi les propriétés auxquelles nous n'avons pu accéder, la Wilderness Kitchen, évaluée à environ 12,5 millions de dollars, a été détruite.
    Nous n'avons vu aucun signe d'incendie actif à ce moment‑là. Nous sommes retournés à Hinton. Nos équipes étaient épuisées après avoir conduit toute la nuit jusqu'à Jasper, et elles étaient moralement abattues de ne pas avoir pu aider à temps.
    Tout au long de l'incendie de Jasper, Parcs Canada a commis de nombreuses erreurs dans la gestion de cette catastrophe naturelle qui ont grandement nui à nos activités et il ne nous a pas fourni de renseignements pertinents sur l'incendie. On nous a fourni des règles d'engagement que nous devions accepter, sans quoi nous serions escortés hors du parc par des gardiens. Le chef de la section des opérations de Parcs Canada, le deuxième responsable du commandement, a répété à deux reprises que nous n'avions pas le droit de nous trouver sur les lieux.
    Ces règles d'engagement précisaient notamment que nous ne faisions pas partie de l'organisation de gestion des incidents. L'entreprise Wildfire Defense Systems du Montana, qui avait été embauchée par d'autres assureurs, a été autorisée à faire partie de l'organisation de gestion des incidents. Pendant l'incident et tout au long de ces règles d'engagement, on nous a également ordonné de ne pas combattre le feu. On nous a refusé l'accès à Marmot Basin et au téléphérique de Jasper jusqu'au 29 juillet. Il était clair que l'incendie menaçait toujours ces sites, et notre retard à y accéder a mis en péril la viabilité économique de Jasper.
     On nous a refusé l'accès à la rivière Athabasca, au système de bornes-fontaines ou aux réseaux d'aqueduc des services d'incendie et d'urgence ou de No Surrender pour nous approvisionner en eau de manière à pouvoir lutter contre les incendies. Nous avons dû faire venir huit camions-citernes de 400 barils et de nombreux camions-citernes remplis d'eau de Hinton. Notre client a dû débourser 60 000 $ rien que pour que nous ayons de l'eau pour combattre l'incendie...
(1125)
    Je suis désolé, monsieur Liivam, mais nous avons vraiment dépassé le temps alloué. Vous aurez l'occasion de répondre aux questions.
     Monsieur Flannigan, m'entendez-vous?
    D'accord, parfait, tout fonctionne.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
     Je signale que puisque l'interprétation en anglais ne fonctionne pas vraiment, j'ai dû l'éteindre.
    Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité.
    Je m'appelle Mike Flannigan. Je suis titulaire de la Chaire de recherche BC Innovation dans les domaines des services prédictifs, de la gestion des urgences et de la science du feu. Oui, c'est un titre très long.
    Je suis honoré de me joindre à vous aujourd'hui. Je suis à Kamloops, en Colombie‑Britannique, territoire traditionnel et non cédé des Tk̓emlúps te Secwépemc.
    J'ai été attristé par le tragique incendie de Jasper, le décès du pompier Morgan Kitchen, la perte de maisons et d'entreprises et les traumatismes émotionnels pour la population touchée.
    La gestion des incendies est difficile, et elle le devient de plus en plus en raison de l'augmentation de la fréquence des conditions météorologiques extrêmes et du comportement du feu. Les conditions extrêmes favorisent les feux. Au Canada, 3 % des incendies brûlent 97 % du territoire brûlé. Une grande partie de ce phénomène se produit pendant un nombre relativement restreint de jours dans des conditions extrêmes, des conditions de sécheresse et un temps chaud, sec et venteux. Un monde plus chaud se traduit par un plus grand nombre de conditions extrêmes et d'incendies extrêmes.
     Que pouvons-nous faire pour être mieux préparés en prévision des prochaines saisons des incendies? Premièrement, les programmes Intelli-feu devraient être obligatoires dans les endroits à risque élevé comme Jasper. Autrement, la pluie de braises qui peut parcourir des kilomètres brûlera des maisons et des entreprises. Nous avons besoin d'une protection structurelle et de gicleurs.
    Grâce à un système d'alerte rapide amélioré, nous savons à quel moment des incendies extrêmes se produiront et nous avons une bonne idée du moment où il faut s'attendre à de nouveaux incendies. Nous devons affecter plus de ressources à ces endroits à l'avance, et non après coup. Même lorsque les conditions sont extrêmes, une première attaque agressive menée avant que l'incendie prenne de l'ampleur sera couronnée de succès.
    Une approche consisterait à mettre sur pied une force nationale de lutte contre les feux de forêt qui travaillerait main dans la main avec les organismes de gestion des incendies existants. Cela pourrait comprendre une flotte aérienne nationale de lutte contre les incendies ainsi que des équipes de lutte contre les incendies au sol. Au lieu de simplement copier ce que d'autres pays font déjà en matière de gestion des urgences, nous pourrions être des chefs de file en agissant avant que la catastrophe ne frappe.
    Pour ce qui est de la prévention et de l'atténuation, il est possible de prévenir les incendies causés par l'humain, et le nombre d'incendies causés par l'humain a diminué grâce à des mesures comme l'interdiction des feux et l'éducation. La gestion de la végétation — les combustibles qui entourent les collectivités — peut aider à réduire la probabilité d'incendies catastrophiques.
    Les feux de forêt et d'autres catastrophes potentielles sont des problèmes à multiples facettes, auxquels nous devons appliquer des solutions à plusieurs volets. Il n'y a pas de solution instantanée.
    Les défis sont nombreux, mais nous devons explorer toutes les options pour être mieux préparés à faire face aux saisons actuelles et futures de feux de forêt. Le Canada possède les connaissances et l'expertise nécessaires pour être un chef de file mondial dans ce domaine.
    Je vous remercie de votre attention.
(1130)
    Merci beaucoup, monsieur Flannigan.
    Enfin, nous allons passer à Mme Elizabeth Potter, de l'Association de l'industrie touristique du Canada.

[Français]

     Je vous remercie de me donner l'occasion d'être parmi vous aujourd'hui.

[Traduction]

     Je m'appelle Beth Potter et je suis présidente et cheffe de la direction de l'Association de l'industrie touristique du Canada. Je représente les intérêts de l'industrie touristique à l'échelle nationale, d'un océan à l'autre.
    Aujourd'hui, je tiens à souligner les risques croissants que posent les feux de forêt pour notre industrie et la façon dont nous pouvons travailler ensemble pour atténuer ces risques. Chaque année, la menace des feux de forêt s'aggrave, dévastant des collectivités partout au Canada, déplaçant des résidants, perturbant des entreprises et décourageant les visiteurs. L'été dernier, à Jasper, nous avons eu un dur rappel que ces événements continuent de menacer des régions entières.
    Pour l'industrie canadienne du tourisme, ces événements ne sont pas seulement des revers opérationnels; ils mettent en péril nos moyens de subsistance. Le tourisme axé sur la nature, qui est au cœur de bon nombre des entreprises de nos membres, dépend de la santé de notre environnement. Les feux de forêt ne font pas que perturber cet environnement; ils mettent en péril les paysages qui attirent les visiteurs au Canada.
    La réalité, c'est que des événements météorologiques extrêmes se produisent plus fréquemment partout au Canada, et leurs répercussions économiques et sociétales sont considérables. Nous devons renforcer notre intervention collective face à ce défi croissant en élaborant un plan national de préparation aux feux de forêt. Ainsi, de nombreux secteurs, y compris celui du tourisme, seraient mieux équipés pour protéger les Canadiens contre les risques liés à l'environnement, à la santé et à la sécurité d'emploi qui découlent de ces incidents.
    La gestion des feux de forêt est une responsabilité partagée. Le secteur du tourisme est déterminé à collaborer avec les organismes gouvernementaux à tous les niveaux, qu'il s'agisse de collectivités locales ou d'organismes comme Parcs Canada, afin d'être mieux préparé aux menaces de feux de forêt.
    La coordination entre les organismes de gestion des incendies et les exploitants d'entreprises touristiques est essentielle. L'échange d'information en temps réel, la planification des mesures d'urgence et la sensibilisation du public permettront de veiller à ce que les visiteurs et les exploitants soient équipés pour agir dans des circonstances difficiles. Cette collaboration se révèle déjà efficace, et le secteur du tourisme continuera de jouer son rôle.
    À l'avenir, la création d'un cadre national qui offre un soutien aux particuliers et aux entreprises après des événements météorologiques extrêmes constituera une étape essentielle. Ce cadre permettrait aux collectivités non seulement de se relever plus rapidement, mais aussi de réduire les problèmes de santé mentale et les pertes d'entreprise. Avec le soutien qui s'impose, les gens sont moins susceptibles de quitter leur collectivité en quête de stabilité économique, ce qui permet une reprise plus rapide et plus forte.
    Nous savons que la fréquence et la gravité croissantes des feux de forêt sont en grande partie attribuables aux changements climatiques. C'est pourquoi les pratiques durables au sein de notre industrie sont si importantes. Parcs Canada a souligné comment la réintroduction du feu dans les paysages aide à créer des écosystèmes plus sains. De même, l'industrie touristique adopte des stratégies qui réduisent notre impact environnemental et contribuent à la résilience à long terme des milieux naturels dont nous dépendons.
     Conformément aux investissements faits dans la gestion des feux de forêt partout au pays, nous pouvons continuer à renforcer nos efforts collectifs. Les initiatives qui améliorent notre capacité d'intervention en cas d'incendie de forêt, comme le dépôt national de matériel de lutte contre les incendies, sont essentielles. En continuant d'investir dans l'infrastructure, la formation et les partenariats public-privé, nous pouvons nous assurer que les collectivités et les entreprises disposent des outils dont elles ont besoin pour réagir efficacement aux feux de forêt.
    En conclusion, nous avons une occasion réelle de renforcer notre approche en matière de gestion des feux de forêt. Il faut une collaboration entre le gouvernement, les collectivités, les services d'incendie et des industries comme la nôtre. En travaillant ensemble à l'élaboration d'un cadre national, en nous engageant à être prêts et en soutenant des collectivités efficacement, nous pouvons améliorer la sécurité publique, préserver la beauté naturelle du Canada et veiller à ce que le tourisme demeure un élément florissant de notre économie.
    Merci.
(1135)
    Merci, madame Potter.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Monsieur Calkins, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    Je vais vérifier. Monsieur Liivam, m'entendez-vous?
     Oui, je vous entends.
     Merci de votre témoignage. Je ne sais pas si vous avez porté attention aux travaux du Comité, mais lors de la dernière rencontre, le ministre de la Protection civile a dit au Comité qu'il « ne ménageait pas les efforts » pour empêcher la perte de biens dans le parc national Jasper.
    Êtes-vous d'accord avec ce qu'il a dit?
     Non.
     Le témoignage que vous avez livré devant le Comité aujourd'hui est en fait très accablant. Pouvez-vous me confirmer qu'en peu de temps, vous avez réussi à rassembler 20 camions de pompiers et 50 pompiers professionnels? Pourriez-vous me dire quelles étaient les compétences de ces pompiers? S'agissait‑il de pompiers ayant déjà combattu des incendies?
     Oui. J'avais 20 camions d'incendie et 50 pompiers. La majorité de ces pompiers étaient des pompiers NFPA 1001 ou 1002, ainsi que de nombreux pompiers en forêt, soit des pompiers en forêt de type 1 ou de type 2.
     Pourriez-vous expliquer au Comité ce que signifie ce niveau de certification? C'est un sujet assez technique. Ce sont des pompiers entièrement accrédités. Vous avez dit que chacun d'entre eux a des titres de compétence et a déjà combattu des incendies.
     C'est exact.
    Les qualifications de la NFPA sont les mêmes que celles de tout pompier municipal. Cela ressemble à celles des pompiers de Calgary, d'Edmonton ou de n'importe quelle caserne de pompiers. La majorité des casernes de pompiers de l'Alberta adhèrent à la norme de la NFPA. Les pompiers volontaires sont formés selon les mêmes normes que les pompiers des grandes villes.
    Les pompiers de la faune sont les mêmes pompiers dont les qualifications sont reconnues par l'ISFSI. Le pompier de type 1 est normalement pompier d'un organisme gouvernemental. Le pompier de type 2 est habituellement un pompier contractuel.
    Dans votre témoignage, vous avez dit que les bornes-fontaines du parc national Jasper ne sont pas les mêmes que celles qui sont utilisées presque partout ailleurs en Colombie‑Britannique et en Alberta. Ai‑je bien compris?
    C'est exact.
    Vous avez aussi dit qu'il n'y avait que sept adaptateurs disponibles. Je suppose que vous voulez dire par là, c'est qu'il n'y avait que sept des adaptateurs dont vous auriez eu besoin pour vous brancher aux bornes-fontaines à Jasper. Je suppose que les camions d'incendie de Jasper, ceux qui sont là tout le temps, réussissent probablement à se raccorder.
    D'après mon expérience de garde à Jasper, il n'y a que quelques camions d'incendie en ville. Je ne veux pas dénigrer leur service d'incendie; je pense que c'est un excellent service de pompiers volontaires, comme partout ailleurs, mais quiconque viendrait dans la collectivité pour aider serait...
    Ils ont sept adaptateurs. Essentiellement, seulement sept tuyaux pourraient être raccordés. Est‑ce bien exact?
     Mis à part leurs partenaires d'aide mutuelle sur lesquels ils peuvent compter, comme ceux de Hinton et de Clearwater County, tous les autres camions d'incendie qui arrivent et qui n'ont pas de relations de travail avec Parcs Canada n'ont pas ces adaptateurs à bord. Cela ne fait pas partie de la trousse couramment utilisée.
     D'accord. C'est certainement un facteur qui n'est pas pertinent, mais vous avez été en mesure de rassembler suffisamment de véhicules pour fournir un approvisionnement en eau, comme mesure d'urgence. On ne compte pas nécessairement sur la capacité de se raccorder à une borne-fontaine. Est‑ce exact?
     C'est exact.
    D'après mon expérience des incendies précédents, les systèmes de bornes-fontaines ne peuvent pas être jugés fiables. Ils sont conçus pour ne s'attaquer qu'à un ou deux incendies d'immeubles à la fois. Lorsque de nombreux camions d'incendie sont raccordés, il n'est pas impossible que le réseau d'alimentation en eau s'épuise complètement. C'est pourquoi nous utilisons maintenant des sources secondaires d'approvisionnement en eau.
(1140)
     Vous aviez les camions d'incendie et les camions d'eau disponibles pour éteindre l'incendie à Jasper et dans le village. Ai‑je raison?
     C'est exact.
    Les responsables des parcs vous ont demandé expressément de ne pas les aider à combattre l'incendie à Jasper. Est‑ce bien ce que vous avez dit?
     Nous avons pu utiliser l'eau de Pyramid Lake, mais pas celle de la rivière Athabasca, et nous n'avons pas été autorisés à combattre l'incendie.
    Vingt camions d'incendie et 50 pompiers n'ont pas été autorisés à combattre l'incendie.
    À votre connaissance, les lois auraient-elles pu les autoriser à vous intégrer à leurs protocoles de commandement en cas d'incident et à vous permettre de vous joindre à la lutte contre l'incendie?
     D'après mon expérience, ce qu'ils auraient pu faire, c'est affecter un chef de la force opérationnelle à notre groupe pour assurer la liaison avec le commandement en cas d'incident. De cette façon, nous aurions pu avoir une relation fonctionnelle avec le commandement de l'intervention.
     De plus, en cas de catastrophe, si un incendie se déclare et qu'ils s'inquiètent pour l'ensemble de la collectivité, ils ont la possibilité, en vertu d'autres lois, comme la Forest and Prairie Protection Act de l'Alberta, d'avoir recours à la conscription pour nous intégrer à leur structure de commandement.
    Croyez-vous que si vous aviez pu combattre l'incendie, vous auriez pu sauver des propriétés dans la ville de Jasper?
     J'en suis absolument certain. Une partie de notre arsenal se composait de deux camions d'incendie d'aéroport et de huit camions d'incendie industriels. Ce sont de gigantesques camions d'incendie qui auraient pu déverser beaucoup d'eau pour aider à protéger les collectivités en première ligne. Les petits camions d'incendies de broussailles auraient pu servir à défendre la collectivité contre les nuages de cendres.
    Qu'avez-vous ressenti, vous et vos équipes, lorsque vous vous êtes fait dire de ne pas prendre part à la lutte contre les incendies et que vous avez dû regarder des propriétés brûler à Jasper?
    Veuillez répondre brièvement, monsieur Liivam.
    Nous étions découragés. Nous estimions que notre mission... Nous aurions pu obtenir plus de résultats.
     Merci.
    Monsieur Longfield, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins.
    Merci à nos équipes de techniciens qui assurent le bon fonctionnement de ces comités avec le soutien que vous offrez à nos témoins et à nous, parlementaires.
     J'aimerais commencer par vous, monsieur Liivam, simplement pour en savoir plus sur votre participation ce soir‑là. Étiez-vous sur le terrain ce soir‑là lorsque tout cela s'est produit?
     Mon intention était d'être là ce soir‑là, mais lorsque mes équipes ont été divisées, j'ai dû emmener avec moi mes pompiers principaux, y compris un ancien chef adjoint des pompiers de la nation crie Enoch.
     D'accord. Une partie de l'information que vous communiquez ne correspond pas à l'information que nous avons obtenue au sujet de la nuit de l'incendie quant à ce qui se passait sur le terrain.
    Je sais qu'il y aura d'autres audiences. Des audiences ont été prévues. Le Comité se penche sur certains problèmes de gouvernance et sur ce que nous pourrions faire en tant que députés pour appuyer les efforts futurs de lutte contre les incendies.
    Au sujet du rôle du commandement unifié et de la gouvernance à cet égard, j'ai posé une question...
     Excusez-moi. Je dois vous interrompre un instant.
    Monsieur Liivam, le son provenant de votre appareil n'est pas assez bon pour que les interprètes puissent faire leur travail.
     Monsieur Longfield, je suis désolé de vous interrompre, mais je crois que vous devrez vous adresser à quelqu'un d'autre.
     Si vous êtes d'accord, monsieur le président, je vais poser la question et demander une réponse...
    Vous allez demander une réponse écrite. D'accord.
    ... puis je passerai à un autre témoin.
    D'accord, c'est à vous.
     Pour ce qui est de la coordination des efforts, c'est le commandement unifié qui assure le commandement et le contrôle de la catastrophe. Nous avons fait venir des pompiers d'autres pays, conformément au cadre de gouvernance d'un commandement unifié. Comment ce groupe a‑t‑il été intégré à la lutte contre l'incendie?
    Je crois savoir qu'une compagnie d'assurances américaine était en cause. Comment s'est passée l'intégration au commandement unifié? Qui leur a demandé d'être là, et comment cela s'est‑il passé ensuite sur le plan de la gouvernance?
    Je vous remercie de votre réponse et du rôle que vous avez joué dans la sauvegarde de certaines propriétés. De toute évidence, je pense qu'une certaine coordination entre votre groupe et la structure de commandement unifié pourrait être améliorée.
    J'aimerais poser ma question à M. Messier.
    Vous avez parlé du dendroctone du pin ponderosa. J'ai travaillé dans l'industrie forestière, où j'ai fourni de l'équipement hydraulique, dans les années 2000. En 2004, cette éclosion s'est produite, et nous avons dû lutter des années — en fait, pendant plus d'une décennie — pour essayer de maîtriser le dendroctone du pin ponderosa.
     Selon l'une des théories à l'époque, le dendroctone du pin ponderosa avait survécu à des hivers qui étaient beaucoup plus rigoureux avant que les changements climatiques ne modifient les conditions météorologiques. Est‑ce de cette façon, directement ou indirectement, que les changements climatiques affectent les forêts en permettant à différents types d'espèces de s'attaquer aux arbres simplement en raison de leur nature et de ce que ces espèces peuvent faire pour survivre? Elles tuent les arbres.
    Pourriez-vous nous parler du rôle des changements climatiques sur les espèces envahissantes qui affectent nos forêts?
(1145)
     Dans le cas que vous avez soulevé, il y avait en fait deux causes à cette augmentation de l'incidence du dendroctone du pin ponderosa. Nous avons notamment planté beaucoup de pins tordus en Colombie-Britannique et en Alberta dans le cadre de nos efforts de foresterie. Je pense que nous avons ainsi créé de grandes monocultures qui sont en fait beaucoup plus vulnérables au dendroctone du pin ponderosa.
    Vous avez raison de dire que les scientifiques ont également montré que lorsque les températures hivernales sont inférieures à -30°, cela tue habituellement les coléoptères ou réduit leur nombre, mais à cause des changements climatiques, nos hivers se réchauffent.
    Il y avait deux facteurs, comme vous pouvez le voir, soit la survie des dendroctones pendant l'hiver et le fait qu'il y a beaucoup plus de pins tordus purs en Colombie-Britannique, et c'est ce qui a créé cette épidémie.
    En fait, cette espèce était une espèce indigène de la Colombie-Britannique, mais pas de l'Alberta, et elle a traversé les Prairies parce qu'elle s'y trouvait en très grande quantité, et elle se répand maintenant vers l'est et menace tous les pins du Canada.
    C'est un exemple d'insectes parmi tant d'autres. Comme je l'ai dit dans ma déclaration d'aujourd'hui, nous ne devrions pas nous inquiéter uniquement des incendies; nous devrions nous inquiéter de la sécheresse et des divers types d'insectes qui n'ont peut-être pas fait beaucoup de dégâts auparavant, mais qui en feront davantage maintenant parce que les arbres s'affaiblissent et deviennent inadaptés. Nous devons examiner la question globalement, plutôt que de nous contenter d'examiner un facteur à la fois.
    Je pense que le danger au sein de ce comité, c'est que nous nous concentrons sur Jasper dans le cadre de notre étude et qu'un projet de loi a été adopté à la Chambre sur la situation à Jasper. La vue d'ensemble de la santé des forêts et des biosystèmes devient plus importante, et les changements climatiques en font partie, comme vous l'avez dit; la biodiversité en est un autre élément important, et le gouvernement national pourrait avoir un rôle à jouer.
    Ai‑je raison pour ce qui est de mettre en place de meilleurs écosystèmes pour l'industrie forestière?
     Oui, c'est en fait ce que je pense que nous devrions faire. Nous devrions utiliser la foresterie comme outil pour aider à diversifier et à adapter nos forêts aux changements climatiques et à d'autres perturbations.
     Je viens tout juste d'obtenir une importante subvention du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le CRSNG et de nombreux partenaires au Canada et dans les provinces pour tester cet objectif partout au Canada. L'idée sera d'utiliser la foresterie non seulement pour simplifier la forêt et produire seulement quelques espèces utiles à l'industrie, mais vraiment pour rendre la forêt mieux adaptée et plus diversifiée. Je pense que si nous réussissons, nous pourrons peut-être réduire le risque de feux de forêt comme celui de Jasper.
    Je terminerai en disant que cela devrait aussi se faire dans les parcs, et pas seulement dans les forêts que nous exploitons. Même dans les parcs, les espèces sont mal adaptées à ce qui se passe et leur risque de mourir et de brûler augmente.
    Merci.
    Merci de votre témoignage.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

     Madame Pauzé, vous avez la parole.
     Je remercie tous les témoins d'être des nôtres.
    Monsieur Messier, votre témoignage ne fait que démontrer l'ampleur des problèmes causés par les changements climatiques. Vous parlez des feux, des insectes et des maladies. Vous l'avez très bien dit: le problème n'est pas seulement à Jasper, il est partout sur la planète. Ce n'est pas très réjouissant, ce que vous dites, mais je pense que c'est très réel.
    On sait que la fumée n'a pas de frontières. On se rappelle les incendies de l'été 2023 au Québec, dont la fumée s'est retrouvée jusqu'à New York, et même dans tout le Nord-est américain. De plus, M. Flannigan a parlé des pluies de braises, qui peuvent causer des incendies ailleurs. Il y a sûrement des choses à améliorer par rapport à ce qui s'est fait à Jasper.
    Une meilleure intégration ou analyse des données provinciales et fédérales sur la surveillance environnementale serait-elle nécessaire, d'après vous?
(1150)
     Je dirais que les provinces et le fédéral travaillent déjà très bien ensemble quand il est question de la collaboration entre chercheurs et du partage de données. J'ai notamment mentionné le projet DIVERSE, que je dirige actuellement, et dans le cadre duquel nous collaborons avec des chercheurs des provinces et du fédéral. Nous essayons de mettre toutes ces données ensemble pour avoir des outils qui vont nous permettre de mieux évaluer la vulnérabilité de nos forêts et ce que nous pouvons faire pour réduire les risques lors de l'aménagement de ces forêts. Ces risques ne sont pas seulement les incendies, un point sur lequel j'aime insister. Il est aussi question des risques croissants de mortalité causée par des insectes ou des maladies exotiques, par des sécheresses ou par les vents, entre autres.
    Je pense que le niveau de collaboration est bon. Il peut être amélioré, évidemment, mais je pense qu'il y a déjà une très bonne collaboration, du moins en ce qui touche la recherche.
    Tantôt, vous avez parlé du fait que le problème est effectivement planétaire. Est-ce qu'il y a des choses qui se passent ailleurs, dont vous êtes au courant, qui pourraient aussi améliorer la gestion des forêts ou encore la gestion des urgences?
    Un des aspects positifs de la recherche mondiale, c'est que nous travaillons tous ensemble. Il n'y a pas de cachotteries, la recherche est publique, elle est publiée dans des revues qui sont publiques. Il y a de nombreux projets de collaboration. D'ailleurs, dans mon projet DIVERSE, j'ai des collaborateurs aux États‑Unis et à peu près dans tous les pays du monde. Nous partageons nos informations, nos données et nos expériences pour essayer de développer des approches qui seront utiles dans tous les pays du monde. Ce genre de collaboration se fait à grande échelle. Je dirais même que le Canada est l'un des chefs de file mondiaux dans ce domaine.
    On parle bien sûr de changements climatiques. On parle toujours d'atténuation et d'adaptation. On constate qu'avec l'accélération des changements climatiques et la hausse des températures, nous devons aussi accélérer notre adaptation. À ce sujet, qu'est-ce qu'un gouvernement peut ou doit faire pour aider à planifier l'allocation de ressources d'urgence quand il y a plusieurs événements catastrophiques? C'est à ça que nous faisons face maintenant.
     C'est une très bonne question, qui me sort un peu de mon domaine d'expertise.
    Selon moi, il faudrait essayer de nous éloigner de nos façons de faire actuelles. Il faut savoir qu'on a toujours considéré que la forêt était relativement stable, qu'elle ne changeait pas, que le climat était constant et qu'on pouvait prédire ce qui allait se produire dans les 150 prochaines années. Or, ce n'est plus le cas actuellement. Par ailleurs, les changements sont rapides. Le niveau d'incertitude augmente. La situation va donc exiger des approches complètement différentes, ainsi que des modifications aux lois et aux règlements.
    Dans toutes les provinces du Canada, il existe un ou plusieurs règlements exigeant qu'on plante les mêmes espèces ou le même groupe d'espèces d'arbres que ceux qui ont été coupés. Or, si on poursuit ces pratiques forestières, on va maintenir nos forêts dans un état mal adapté aux changements à venir. Je pense donc qu'il devrait y avoir des changements de réglementation importants pour faciliter l'adaptation. Il faudrait aussi créer une plus grande diversité de forêts, pas seulement à l'intérieur d'un peuplement, mais aussi dans le paysage. Ainsi, on pourrait réduire la propagation des insectes et des feux.
    Il faut adopter diverses approches. D'ailleurs, quand je donne mes présentations, je dis souvent qu'il faut absolument changer presque complètement notre façon de gérer les forêts. La bonne nouvelle pour l'industrie forestière, c'est que la coupe forestière pourrait servir à accélérer cette adaptation. Par contre, il faudrait alors favoriser la diversification.
    Parlant de pratiques forestières, quand le ministre a comparu devant ce comité, il a dit qu'il existait des zones tampons, coupe-feu, qui étaient importantes et qui pourraient être nécessaires à l'avenir. En peu de mots, quelles sont les caractéristiques d'une zone tampon efficace?
(1155)
     Il est certain que, de plus en plus, on suggère d'aménager des forêts de feuillus autour des municipalités. On pourrait évidemment enlever complètement les forêts, mais ça créerait des milieux un peu désertiques. Il faut donc avoir plus de feuillus. En forêt boréale, on pense notamment aux peupliers et aux bouleaux, qui réduisent de beaucoup les risques de feu. Ajouter des feuillus contribuerait grandement à réduire les risques de feu dans nos forêts à peu près partout autour des municipalités.
    Merci.
    Madame Collins, la parole est à vous.

[Traduction]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence.
    Ma première question s'adresse à M. Flannigan.
    Nous avons vu que les changements climatiques rendent nos saisons de feux de forêt plus intenses et plus longues et qu'elles ont un effet dévastateur sur les collectivités.
    Dans le passé, la gestion des feux de forêt a été laissée principalement aux provinces et aux territoires, avec un certain soutien de la part des militaires. Plus tôt cette année, le chef d'état-major de la défense a dit qu'il ne sera pas en mesure de combler les lacunes et de répondre aux besoins croissants découlant des feux de forêt.
    Vous avez parlé d'un service national de lutte contre les incendies. C'est un service que mes collègues néo-démocrates et moi-même réclamons.
    Pouvez-vous nous parler un peu de la nécessité d'un service national de lutte contre les incendies? Qu'est‑ce que cela signifierait pour la lutte contre les feux de forêt au Canada?
    Les États-Unis ont ce qu'on appelle la FEMA, ou Federal Emergency Management Agency. Nous n'avons rien de tel au Canada.
    La gestion des incendies est la responsabilité des propriétaires fonciers, soit les provinces, les territoires et Parcs Canada, et le ministère de la Défense nationale y participe aussi un peu. Tous ces intervenants s'entraident. C'est une fraternité, mais il leur arrive parfois d'être dépassés et d'avoir besoin de ressources supplémentaires.
    Ce que je propose, c'est un organisme national qui travaillerait main dans la main, en tant que système de commandement unifié, avec Parcs Canada, la Colombie-Britannique, l'Alberta ou qui que ce soit d'autre, avant que des urgences se déclarent.
    Nous avons la capacité de savoir à quel moment des incendies extrêmes se produiront, et ce sont vraiment les phénomènes extrêmes qui provoquent les incendies dans le monde. Il y a simplement trois ingrédients pour un feu de forêt. C'est la végétation, qui est le combustible, les flammes et les conditions météorologiques.
    J'ai un parti pris, mais je pense que la météo est le principal facteur. Il y a de plus en plus de feux de forêt extrêmes, et il continuera d'y en avoir. Sept milliards de dollars ont été consacrés à des catastrophes cet été au Canada seulement — ces chiffres sont ceux du Bureau d'assurance du Canada — et cette somme ne fait qu'augmenter. Nous devons régler ce problème...
    Monsieur Flannigan, je suis désolée de vous interrompre.
    Lorsque vous avez parlé de la météo, j'ai entendu l'un de mes collègues conservateurs dire que puisque c'est le facteur contre lequel on ne peut rien, il faut se concentrer sur les autres.
    C'est une affirmation que nous avons déjà entendue au sujet de la lutte contre les changements climatiques, à savoir que nous devons baisser les bras.
    Pouvez-vous nous parler un peu de la crise existentielle qui est provoquée par les changements climatiques et rappeler comment nous devons faire l'impossible pour lutter contre l'urgence climatique?
     Au Canada, notre zone incendiée a quadruplé depuis les années 1970. Mes collègues et moi attribuons ce phénomène aux changements climatiques d'origine humaine. On ne parle pas seulement des incendies; il y a aussi les inondations et l'élévation du niveau de la mer. Nous changeons le climat à cause de nos activités humaines, principalement les gaz à effet de serre. Jusqu'à ce que nous fassions quelque chose en tant que société, en tant que société mondiale, en tant que communautés, États, provinces, territoires...
    Il faut régler ce problème. Ce qui fait peur, c'est que même si nous arrêtions de produire des gaz à effet de serre aujourd'hui, notre planète continuera de se réchauffer pendant 20 ou 30 ans. Or, un monde qui se réchauffe se traduit par un plus grand nombre de catastrophes.
     Merci beaucoup.
    Madame Potter, vous avez parlé de la nécessité d'un plan national de préparation aux feux de forêt. Nous savons que les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement les protège des feux de forêt. Les entreprises s'attendent à ce que le gouvernement protège l'économie des répercussions de ces feux.
    Pouvez-vous nous parler un peu de ce qu'il faut faire dans le cadre d'un plan national de préparation aux feux de forêt?
     Je vous remercie de la question.
    Je pense qu'il faut rechercher une coordination des efforts ici. Du point de vue de l'industrie, nous le faisons nous-mêmes. Nous voulions nous assurer, surtout après 2022 et 2023, face à la dévastation et l'évacuation massive observées, que du point de vue touristique, pendant que les résidents et les employés étaient pris en charge, les visiteurs l'étaient aussi. Nous nous sommes réunis en tant qu'industrie pour créer nos propres plans nationaux. Je pense que cela doit se faire également.
(1200)
     Il est surprenant que, même après la saison des feux de forêt sans précédent de 2023, le gouvernement n'ait pas créé de plan national de préparation aux feux de forêt qui soit adéquat pour protéger nos collectivités et notre économie. Ils n'ont pas comblé les lacunes qui découleront du fait que les militaires ont déjà dit ne pas avoir la capacité d'intervenir face à ces incendies.
     J'aimerais peut-être m'adresser à vous, monsieur Messier. Vous avez parlé de la nécessité de changer nos pratiques de gestion forestière. Cela semble être une autre lacune due à la négligence, étant donné qu'année après année, le problème s'aggrave. Pouvez-vous nous en parler un peu?
     Oui. En fait, j'ai écrit dans un journal que nous avons besoin d'un plan Marshall. Nous avons besoin du même niveau d'effort que celui qui a été déployé après la Seconde Guerre mondiale pour transformer l'Europe. Nous avons besoin d'un plan Marshall pour ce qui est de la façon dont nous gérons nos forêts, non seulement au Canada, mais dans le monde entier. Beaucoup de scientifiques montrent que la mortalité des arbres augmente dans toutes nos forêts. Les forêts meurent. J'étais en Allemagne il y a trois ans lorsqu'il y a eu une sécheresse. Il n'y a pas eu une goutte de pluie pendant cinq mois. Plus de 30 % à 40 % de la forêt est en train de mourir.
    Nous aurons de plus en plus de sécheresses dans nos forêts. Il y a de plus en plus d'insectes et de maladies qui viennent de partout dans le monde. Je pense que nous avons vraiment besoin d'un gros effort. C'est ce que je préconise ici. Il y aura plus d'incendies, mais il y aura plus de sécheresses, plus de mortalité et plus d'insectes...
     Merci.
    C'est à tout cela que nous devons nous attaquer.
     Merci beaucoup.
    Nous allons passer au deuxième tour, qui sera réduit à quatre minutes et ensuite à deux minutes.
    C'est à vous, monsieur Soroka.
     Merci, monsieur le président.
    J'aimerais commencer par vous, monsieur Liivam.
    Vous avez dit que les lois vous interdisaient de combattre l'incendie à Jasper. Pouvez-vous expliquer pourquoi?
    Je vais vous répéter ce que nous a expliqué le chef de la section des opérations, le deuxième responsable du commandement de l'intervention. À ce que je sache, nous étions autorisés à y être, parce que c'est l'agent de liaison de Parcs Canada et notre client qui ont pris les dispositions nécessaires pour que nous y soyons. Je suppose qu'il n'y a pas de processus législatif permettant aux pompiers contractuels d'être là au nom d'autres parties.
    C'est sans doute la raison pour laquelle on nous a interdit d'y participer, mais nous ne sommes pas arrivés là sans prévenir. Ces dispositions avaient été prises au nom de notre client, Pursuit Collection, et Parcs Canada avant notre arrivée. Nous ne sommes pas arrivés avec nos gros sabots en exigeant de participer à la lutte. Nous nous attendions à ce qu'à notre arrivée, nous soyons autorisés à intervenir et à faire notre travail pour aider à protéger le moteur économique de Jasper.
     Monsieur Liivam, l'une des préoccupations était que lorsque les maisons étaient en train de brûler, elles dégageaient des émanations toxiques. Aviez-vous l'appareil respiratoire autonome approprié pour faire face à un incendie de ce genre?
     Les appareils respiratoires autonomes dans les incendies en MPU — les incendies en milieu périurbain — sont plutôt inefficaces. Vous n'avez qu'environ 30 minutes d'air, et ces camions ne transportent pas assez d'air pour gérer ce genre de charge de travail.
     Ma recommandation pour tous les services d'incendie serait d'avoir des respirateurs à masque complet à adduction d'air motorisés avec piles de secours, mais je ne crois pas qu'il y ait un seul service d'incendie qui ait ce genre d'équipement dans ses camions. Nous avions dans nos camions des respirateurs munis de filtres P100 que notre équipe pouvait utiliser, et c'est ce que la majorité des services d'incendie utilisaient pour ce genre d'événement.
    Étiez-vous qualifié pour des incendies de bâtiments ou non?
     Oui. L'équipe se composait uniquement de pompiers satisfaisant à la norme NFPA 1001. La majorité d'entre eux font partie de services de pompiers volontaires actifs. L'équipe que j'avais à Jasper ce soir‑là se composait uniquement de pompiers qualifiés satisfaisant à la norme 1001.
    Vous étiez tous qualifiés, mais on vous a quand même demandé de partir et de ne pas prêter main-forte dans les cas d'incendie de bâtiment.
     Oui.
     Wow! Vous ont-ils donné une raison?
    La seule raison qui me vient à l'esprit, c'est que parce que nous venions avec une autre partie, ils ne voulaient pas avoir... Je ne sais pas — fuite, ou... Je n'en ai vraiment aucune idée. Ils ne m'ont jamais donné une explication.
     Ils ont tout simplement libéré mes deux camions de pompiers au moment où d'autres camions d'incendie entraient, alors j'ai pris ces deux équipes et je les ai ajoutées à mon intervention privée pour la compagnie d'assurances.
(1205)
    Ils n'ont pas dit que vous n'aviez pas la capacité de vous raccorder aux bornes d'incendie ou les bons raccords ou quoi que ce soit du genre. Il n'y avait aucune autre raison que simplement « Veuillez partir. »
    C'est exact.
     Wow! C'est très intéressant. Bien honnêtement, je ne sais pas comment donner suite à ces questions.
     Je me tourne vers M. Messier. Vous avez parlé de la façon dont on intervient dans les forêts pour éteindre les feux de forêt. Devons-nous commencer à contrôler ou à gérer nos forêts de bien meilleure façon pour éliminer le bois mort et nous assurer que nous pouvons protéger les collectivités, pas seulement au sein du programme Intelli-feu — nous parlons de la proximité immédiate —, mais à un mille, deux milles ou trois ou quatre kilomètres de distance, pour beaucoup mieux gérer la forêt?

[Français]

     Monsieur Messier, veuillez répondre en 20 secondes.

[Traduction]

     Oui, tout à fait. Je pense que nous devons parler aux Premières Nations. Les membres des Premières Nations utilisent les feux de forêt depuis longtemps. Ils savent comment faire. Je pense que cela pourrait avoir un grand impact sur les collectivités.

[Français]

    Merci.
    Madame Chatel, vous avez la parole pour quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Bienvenue à nos témoins.
     Monsieur Messier, vous connaissez très bien les forêts canadiennes, y compris celles de l'Outaouais et de ma circonscription, Pontiac. Je suis donc très heureuse que vous soyez parmi nous.
    Vous avez souvent parlé de foresterie axée sur la résilience. Comme vous le dites, nos forêts, y compris chez nous dans le Pontiac, sont menacées par des insectes et par des maladies qui viennent, entre autres, des changements climatiques. Vous avez mis de l'avant des solutions à ces problèmes, basées sur la science et sur l'expérience. J'ai deux questions pour vous.
    Premièrement, comment, concrètement, cette approche de foresterie axée sur la résilience pourrait-elle être mise en œuvre à l'échelle nationale et à l'échelle locale afin de renforcer la capacité de nos forêts de faire face aux changements climatiques?
    Deuxièmement, quel doit être le rôle des gouvernements fédéral et provinciaux pour soutenir cette transition importante vers une gestion plus résiliente de nos forêts?
    Combien d'heures me donnez-vous pour répondre à cette question?
    Je vais vous parler du projet DIVERSE, que j'ai déjà mentionné. Il s'agit d'un projet national, de la Colombie‑Britannique à la Nouvelle‑Écosse. Nous allons travailler étroitement avec tous les acteurs, notamment les provinces, le fédéral, l'industrie et les groupes environnementaux, pour voir comment améliorer la gestion des forêts de façon à réduire les risques de perdre de grandes superficies de forêt, et pour voir quels genres d'aménagements totalement nouveaux sont possibles en introduisant de nouvelles espèces mieux adaptées aux conditions qui s'en viennent.
    Pour résumer, la science est très claire: notre meilleure alliée contre l'incertitude du futur est la diversité. Le fait d'augmenter la diversité des espèces qu'il y a dans nos forêts aura donc d'importantes retombées. On est capable de le faire et on peut utiliser la coupe forestière pour essayer de favoriser ça.
    Il faut aussi savoir que la gestion des forêts est un domaine provincial. Les lois et les règlements sont donc la responsabilité des provinces. Nous allons étudier cette réglementation et la législation de chacune des provinces et évaluer ce qui pourrait être changé.
     La bonne nouvelle est que la majorité des provinces et la majorité des intervenants de l'industrie forestière ont embarqué dans le projet, de même que des groupes environnementaux. Je pense donc qu'on peut développer un projet de classe mondiale pour essayer d'adapter nos forêts à ce qui s'en vient.
     Comme vous l'avez dit, ce genre de gestion de la foresterie vise à augmenter la résilience, ce qui va sauver nos villes et nos villages. Le potentiel d'un tel projet, c'est de protéger nos villes et nos villages contre les feux de forêt.
    J'ajouterais aussi nos industries, notre secteur récréatif et toutes nos activités. Il faut essayer de préserver ces milieux naturels, puisque l'être humain dépend énormément des services qu'ils lui rendent. Vous avez entièrement raison.
     Merci, monsieur Messier.
    Merci, madame Chatel.
    Madame Pauzé, vous avez maintenant la parole pour deux minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Messier, tantôt, vous avez parlé de la diversité des espèces dans les zones fragiles et des forêts de feuillus autour des villes. D'après moi, les villes ne sont pas considérées comme des zones fragiles.
    Le sont-elles? Selon vous, est-ce un exemple lié à la diversité des espèces, dont vous avez parlé tantôt?
(1210)
    En fait, les villes sont considérées comme des zones fragiles, parce qu'on y trouve des vies et des structures qu'il faut protéger. Il est très important d'agir dans ces milieux en premier et de procéder à des aménagements autour des villes, afin de diversifier les forêts et de les rendre moins vulnérables aux insectes, aux maladies et aux feux. Il s'agit donc effectivement d'endroits où il va falloir intervenir en priorité au cours des prochaines années.
    Tantôt, vous avez dit qu'il fallait modifier certaines lois, parce que celles-ci nous obligent à replanter exactement la même espèce d'arbres. Le gouvernement et les élus vous écoutent-t-ils à cet égard?
    Honnêtement, il y a une plus grande écoute de la part de l'industrie forestière et des groupes environnementaux que de la part des gouvernements. D'ailleurs, j'avoue que je ne comprends pas pourquoi. Les gouvernements provinciaux semblent vouloir conserver leur façon de procéder.
    La plupart des provinces exigent qu'on maintienne la composition des forêts pendant les 150 prochaines années, ce qui, selon moi, n'a aucun sens. Les conditions climatiques et environnementales vont tellement changer d'ici là qu'il faut que la forêt puisse s'adapter et changer. Quand on me demande quels règlements devraient être changés, c'est le premier qui me vient en tête. J'espère y arriver, mais il y a une résistance.
    Il vous reste 15 secondes, madame Pauzé.
     Merci, monsieur le président. Est-ce que M. Messier aurait une étude ou un document à remettre au Comité, afin que nous, en tant qu'élus, puissions accentuer la pression?
    C'est noté, madame Pauzé.
    Madame Collins, vous avez maintenant la parole pour deux minutes.

[Traduction]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Flannigan, dans le cadre de votre recherche, vous avez parlé de la façon dont les politiques de gestion des incendies et leur efficacité continueront de changer. Pouvez-vous nous parler un peu de ce que le gouvernement doit faire et des mesures qui doivent être prises pour prévenir les feux de forêt à l'avenir?
    Soit dit en passant, il faut un examen indépendant et complet de l'incendie de Jasper. Ce qui s'est passé est en grande partie le résultat d'un pyrocumulonimbus, un orage généré par un incendie. C'est la manifestation la plus intense de l'énergie de mère Nature en ce qui concerne le monde des services d'incendie, et c'est en grande partie la raison pour laquelle nous avons perdu un tiers de la ville.
    Que pouvons-nous faire? Comme je l'ai mentionné, il y a Intelli-feu. Jasper est au confluent de trois vallées, un endroit à haut risque: les vallées servent de corridors, de mèches et de chemins. Ils savaient qu'il s'agissait d'un endroit à haut risque et ils faisaient beaucoup de travail, mais ces braises peuvent parcourir des kilomètres; l'incendie de West Kelowna a franchi le lac Okanagan en 2023.
    Il y a trois ingrédients: la végétation, l'inflammation et les conditions météorologiques. Disons que nous ne pouvons rien faire au sujet des changements climatiques et des conditions météorologiques extrêmes. D'accord, très bien, nous ne pouvons rien faire au sujet de la foudre et des incendies allumés par les conditions météo.
    Les gens provoquent des incendies; nous pouvons agir sur ce front et nous le faisons.
    Enfin, il y a la végétation. La gestion de la végétation dans les zones à haut risque et autour des collectivités à haut risque aidera à réduire la probabilité d'un incendie extrême et catastrophique, mais ne l'éliminera jamais. Lorsque les choses sont extrêmes, tant qu'il y a des matières combustibles à brûler, même si ce sont des feuillus, comme le peuplier faux-tremble — à Fort McMurray, nous sommes entourés de peupliers faux-trembles et nous avons vu ce qui s'est passé —, le carburant n'est rien d'autre que du carburant, malheureusement; il brûle et peut brûler à une intensité assez élevée, même s'il ce n'est pas un conifère.
    Merci.
    Monsieur Leslie, vous avez quatre minutes.
     Merci, monsieur le président.
     Je vais commencer par M. Liivam.
     Vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire que Parcs Canada...
     Je suis désolé; cette question s'adresse‑t‑elle à M. Liivam?
    Oui.
    Malheureusement, les interprètes ne peuvent pas faire l'interprétation. Vous pourriez toujours lui demander de faire parvenir quelque chose par écrit si vous le souhaitez, ou de faire une déclaration, mais il ne peut pas...
     Pouvons-nous lui donner la chance de répondre?
    Non, cela ne fonctionnera pas.
     D'accord. Je vais demander à M. Liivam de répondre par écrit si c'est possible.
    Monsieur Liivam, vous avez dit dans votre déclaration préliminaire que Parcs Canada avait commandé des bornes-fontaines pour le parc Jasper qui étaient différentes de toutes les autres en Colombie-Britannique et en Alberta, et que vous n'aviez que sept adaptateurs qui pouvaient être utilisés à court préavis. Il s'agit d'une preuve choquante dont les fonctionnaires de Parcs Canada n'ont de toute évidence pas parlé la semaine dernière. Le ministre Guilbeault et le ministre Sajjan ne l'ont de toute évidence pas mentionné.
    Quelle a été l'incidence de cette omission de commander des raccords adaptés pour les bornes-fontaines? Veuillez fournir cela par écrit au Comité.
    Vous avez également mentionné que vous avez été menacé d'arrestation ou de renvoi à plusieurs reprises. Pourriez-vous nous en dire davantage sur ces cas? Savez-vous quels fonctionnaires de Parcs Canada ont décidé de refuser intentionnellement 20 camions et plus de 50 pompiers? Il s'agissait de pompiers bien formés. Non seulement ils ont été refoulés, mais ils ont été refoulés sous la menace apparente de la force. Veuillez fournir un peu plus de détails au Comité à ce sujet.
    De plus, en votre qualité d'expert qui travaille régulièrement sur le terrain, veuillez expliquer brièvement si, à votre avis, les brûlages dirigés et l'enlèvement mécanique sont des outils efficaces pour atténuer les sources de chaleur éventuelles et les dommages causés par les feux de forêt, en particulier celui de Jasper. À votre avis, est‑ce que Parcs Canada en a fait assez pour prévenir cet incendie?
    Enfin, à votre avis, Parcs Canada a‑t‑il fait preuve de négligence dans l'exercice de ses responsabilités, ce qui a mené à l'incendie désastreux de Jasper?
    Si vous pouviez faire tout cela, je vous en serais reconnaissant.
    Je reviens à M. Messier.
    Vous avez parlé d'une augmentation des ravageurs. Comment les ravageurs se transmettent-ils dans nos forêts?
(1215)
     J'ai fait partie d'un comité national et je peux vous faire parvenir le rapport.
    Nous avons beaucoup d'échanges commerciaux avec l'Europe, les États-Unis, l'Asie et la Chine. Fait intéressant, ces pays ont le même genre de climat et le même type d'arbres. Le risque d'amener des insectes et des ravageurs de ces régions est très élevé. Nous le faisons presque tous les jours.
    C'est en fait l'un des problèmes évidents. C'est que nous faisons du commerce avec des régions du monde qui ont des espèces semblables, et il y a un risque d'importer des espèces auxquelles les arbres se sont adaptés dans le pays d'origine, mais ici, ils ne se sont pas adaptés. C'est ce qui se passe, et cela augmente.
     Merci, monsieur Messier.
     Je vais céder le reste de mon temps à M. Deltell.
    Il vous reste 45 secondes, monsieur Deltell.

[Français]

     Monsieur Messier, je vous remercie de votre approche très pratico-pratique. Vous avez une vision des choses qui est concrète et très impressionnante. Tout à l'heure, vous avez, comme nous, entendu le témoignage du pompier. J'ai vu que vous étiez très attentif à ce qu'il disait. Pouvez-vous nous faire part de vos sentiments par rapport à ça?
    Veuillez répondre en 30 secondes, monsieur le professeur.
    En fait, c'est vraiment très loin de mon domaine. J'avoue que j'étais surpris de savoir qu'on pouvait ne pas avoir toutes les ressources possibles pour combattre les feux. J'imagine qu'il y a des problèmes structurels dans la gestion de différents types d'organisations, mais je ne peux pas vraiment en dire plus.
    Comme nous, vous avez été complètement surpris et outré de voir que des pompiers étaient prêts à agir, mais qu'on leur a dit de retourner chez eux.
     Nous sommes rendus à plus de quatre minutes.
    Madame Taylor Roy, la parole est à vous.

[Traduction]

     Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins.
    Je me rends compte, monsieur Liivam, que vous ne pouvez pas répondre, mais pour le compte rendu, j'espérais que vous pourriez vérifier pour nous que votre entreprise est à but lucratif, qu'elle n'est pas bénévole et que vous avez été embauché sur le terrain par des compagnies d'assurances ou des entrepreneurs.
     Vous avez mentionné que vous ne comprenez pas pourquoi les pompiers privés ou indépendants ne sont pas autorisés à venir combattre les incendies et pourquoi il y a une loi pour empêcher cela. Croyez-vous vraiment qu'il serait sécuritaire de permettre aux pompiers indépendants, qui peuvent être embauchés par de multiples sources différentes, de venir faire ce qu'ils veulent dans la région quand il y a un incendie majeur comme celui dont nous parlons et que cela mènerait à un effort coordonné? Vous pourriez peut-être répondre à ces questions par écrit.
    Mon autre question s'adresse à M. Messier et à M. Flannigan.
    Nous avons deux conversations différentes en cours. La première concerne ce qui s'est passé exactement à Jasper. Je crois que les pompiers ont fait un travail extraordinaire. Ils ont collaboré, et nous avons entendu de nombreux témoins de tous les partis sur ce qui a été fait avant cet incendie.
    Monsieur Flannigan, je crois que vous avez dit que le programme Intelli-feu était important — les brûlages, l'enlèvement mécanique, etc. Vous avez dit que vous pensiez qu'ils avaient fait du bon travail. Maintenant, je crois comprendre qu'ils pourraient en faire plus, compte tenu des conditions actuelles.
    On a également fait valoir, parce qu'il y a encore des feux de forêt, que nos efforts pour réduire les émissions ont d'une certaine manière échoué, que même si nous avons fait pencher la courbe pour réduire les émissions, il y a encore des feux de forêt, alors cela n'en vaut pas la peine. Je me demandais si vous pouviez nous parler de cela dans une perspective plus large quand vous parlez de ce qui arrive à nos forêts et si c'est une évaluation juste.
(1220)
     Voulez-vous que je commence ou que ce soit M. Flannigan?
    Monsieur Flannigan, je crois qu'on vous a posé moins de questions, donc...
     Selon une nouvelle étude, les émissions attribuables aux feux de forêt étaient d'environ 647 téragrammes, ce qui équivaut à peu près aux émissions des combustibles fossiles de l'Inde. Nos forêts sont devenues des sources de carbone en raison des incendies et des insectes, et je ne pense pas que cela changera à court terme puisque nous continuons à faire face aux changements climatiques.
     Cependant, l'accord international sur la déclaration des émissions concerne les feux de forêts aménagées. Cela réduit considérablement les rapports internationaux. Pour être honnête, l'atmosphère se fiche de savoir si le feu brûle dans une forêt aménagée ou non. Il émet toujours des gaz à effet de serre dans l'atmosphère.
     Tout à fait.
    Étant donné qu'il y a encore des feux de forêt, croyez-vous qu'un programme de tarification de la pollution est nécessaire et qu'il peut fonctionner pour réduire les émissions, mais qu'il pourrait encore y avoir des feux de forêt? Est‑ce possible?
     C'est difficile. Nous essayons de gérer les incendies. En toute honnêteté, nous ne faisons pas un excellent travail. Il suffit de regarder toutes les catastrophes que nous avons connues ces dernières années, que ce soit en Nouvelle-Écosse, en Colombie-Britannique ou en Alberta. Cela va continuer.
     Ce qui fait peur, c'est que nos tourbières sont de vastes dépôts de carbone ancien qui emmagasinent depuis la dernière ère glaciaire. Un incendie peut s'y produire et émettre d'énormes quantités de gaz à effet de serre. Ils deviennent plus vulnérables à mesure que ces tourbières et le pergélisol dégèlent, et ils deviennent un combustible disponible.
     Merci.
    C'est tout le temps que nous avions pour ce premier groupe de témoins, qui était extrêmement intéressant.
     Je tiens à remercier les témoins de s'être libérés.
    Nous allons faire une courte pause pour préparer notre prochain groupe de témoins, puis nous poursuivrons pendant une autre heure.
     Merci beaucoup.
(1220)

(1225)
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins.
    Nous accueillons Lori Daniels, titulaire de la chaire Koerner sur la coexistence des feux de forêt, Foresterie, Université de Colombie-Britannique, qui témoigne à titre personnel.
    De l'Alberta Union of Provincial Employees, nous accueillons James Gault, vice-président, région du Nord-Est.
    De l'Association des produits forestiers du Canada, nous accueillons Kate Lindsay, vice-présidente principale et chef du développement durable.
    Nous accueillons, du gouvernement de l'Alberta, le ministre Mike Ellis, vice-premier ministre et ministre de la Sécurité publique et des Services d'urgence, et le ministre Todd Loewen, ministre des Forêts et des Parcs.
    Nous allons commencer par vous, madame Daniels, pour cinq minutes. La parole est à vous.
    Je m'appelle Lori Daniels. Je suis professeure d'écologie forestière et titulaire de la chaire Koerner sur la coexistence des feux de forêt à l'Université de la Colombie-Britannique. Je m'adresse à vous aujourd'hui depuis le territoire ancestral de la Première Nation Musqueam.
    J'ai étudié les régimes historiques des feux et leurs répercussions sur la dynamique forestière dans l'Ouest canadien au cours des 20 dernières années. Je vous remercie de nous donner l'occasion de vous faire part de nos réflexions sur les recherches que nous avons menées, tant sur les facteurs qui ont contribué aux feux de forêt de Jasper que sur les stratégies qui sont nécessaires de toute urgence pour rendre nos écosystèmes et nos collectivités plus résilients aux incendies et aux changements climatiques.
    J'ai trois messages fondamentaux à vous transmettre aujourd'hui.
    Tout d'abord, le Complexe d'incendies de Jasper était en préparation depuis un siècle. Nos recherches montrent que le régime historique des feux à Jasper a commencé à changer au début des années 1900. Au fil des siècles, des années 1600 aux années 1800, des incendies de faible intensité ont brûlé quelque part dans la vallée de l'Athabasca une fois tous les 20 ans en moyenne, ce qui a laissé des cicatrices sur les arbres, mais sans les tuer. Des parcelles d'incendies de gravité élevée tueraient les arbres et créeraient des ouvertures où les graminées, les arbustes, les latifoliés et les conifères se régénéreraient. Les photos de paysages du début des années 1900 montrent une mosaïque d'écosystèmes.
    Les cicatrices de feu ont cessé en 1915. C'est le début de l'ère de la lutte contre les incendies, quand les peuples autochtones ont été retirés de leurs terres et qu'on a mis fin à leur bonne intendance du feu. On a supprimé les incendies allumés par la foudre et des gens pour protéger la forêt. Le paradoxe, c'est que cette bonne intention a eu des conséquences imprévues. Sans les incendies répétés à faible impact, la forêt a mûri en même temps, créant un paysage uniforme de forêts continues de conifères avec des combustibles inflammables abondants, contrastant fortement avec les paysages historiques et les régimes de feux.
    Ces forêts matures constituaient également un habitat optimal pour le dendroctone du pin ponderosa, qui s'est propagé à Jasper. Ce coléoptère est originaire de l'Ouest de l'Amérique du Nord, mais il est nouveau pour les forêts situées à l'est de la ligne de partage des eaux. Son expansion vers l'est a été facilitée par les changements climatiques, et les dendroctones ont causé des taux élevés de mortalité des arbres en Alberta. Des études sur le terrain et des expériences menées avec Parcs Canada ont montré qu'une abondance de grumes et de pins tordus latifoliés morts contribue à l'intensité du feu et à la rapidité de la propagation du feu, en plus d'émettre de grandes quantités de chaleur, de fumée et de carbone, de sorte qu'après 100 ans, la table était mise pour le feu cet été.
    Mon deuxième message est que Jasper n'est pas une anomalie. La perturbation de l'intendance autochtone du feu, l'extinction des incendies et les problèmes de santé généralisés des forêts ont des effets cumulatifs sur l'ensemble des forêts du Canada. Les changements climatiques sont désormais superposés aux paysages vulnérables et amplifient les effets. Le dendroctone du pin ponderosa a touché 19 millions d'hectares de forêts dans l'Ouest canadien; des incendies ont brûlé 15 millions d'hectares partout au pays en 2023 seulement.
    Mon troisième et dernier point est que des changements transformateurs s'imposent de toute urgence. Nous devons diversifier nos approches et amplifier le rythme et l'ampleur de notre réponse aux récents feux de forêt extrêmes et aux changements climatiques. Nous devons également reconnaître que des stratégies précises sont aussi complexes que les divers écosystèmes et forêts du Canada.
    La proaction a besoin du soutien de tous les ordres de gouvernement, y compris du gouvernement fédéral. Les stratégies comprennent, sans s'y limiter, l'investissement d'un montant égal dans les interventions d'urgence en cas de feux de forêt et la gestion proactive pour atténuer les effets futurs des feux de forêt au moyen de traitements mécaniques et de brûlages dirigés et culturels. Il s'agit d'une approche sous-financée et sous-utilisée qui coûte des milliards de dollars aux Canadiens en raison des effets directs et indirects des feux de forêt.
    Deuxièmement, nous pouvons investir dans des programmes Intelli-feu à domicile et dans la collectivité afin d'accroître l'éducation et des mesures visant à améliorer la résilience; nous devons appuyer les programmes dirigés par les Autochtones, étant donné que les incendies touchent de façon disproportionnée les peuples, les communautés et les territoires autochtones; nous devons mettre en œuvre des mesures de gestion des incendies de paysage pour réduire les conséquences négatives des incendies catastrophiques, améliorer la résilience des écosystèmes et soutenir le secteur forestier; nous devons soutenir la bioéconomie et la bioénergie pour surmonter les obstacles économiques; et nous devons investir dans la formation au niveau postsecondaire pour renforcer les capacités nécessaires en pyrosilviculture ainsi qu'en brûlage dirigé et culturel.
(1230)
    Ces mesures transformatrices sont nécessaires de toute urgence pour atténuer les changements climatiques, adapter notre gestion forestière et nous préparer de façon proactive aux répercussions des feux de forêt sur les écosystèmes et les collectivités du Canada.
    Merci beaucoup, madame Daniels.
    Nous allons passer à M. Gault.
     Merci beaucoup de me donner l'occasion de m'adresser au Comité aujourd'hui au sujet d'une question qui a touché les Albertains et les gens du monde entier — l'incendie de forêt à Jasper.
    Je m'appelle James Gault. Je suis l'un des six vice-présidents de l'Alberta Union of Provincial Employees. Je représente la région du Nord-Est. Cette région comprend Lamont, Slave Lake, Fort McMurray, Lloydminster, et j'en passe. Je travaille également en étroite collaboration avec la section locale 005, c'est‑à‑dire les agents nationaux des ressources et de la conservation de l'Alberta.
    Les pompiers forestiers et les agents de conservation de l'Alberta, dont beaucoup font partie de la section locale 005, ont joué un rôle essentiel dans la lutte contre le feu incontrôlé de Jasper. Des collègues de partout au Canada et de pays comme le Costa Rica, l'Australie, l'Afrique du Sud et le Mexique se sont joints à eux. Les Forces armées canadiennes ont également fourni du soutien. Ces braves hommes et femmes ont risqué leur vie pour contenir l'incendie, et leur engagement ne fait aucun doute.
    Bien que leurs efforts aient été héroïques, la réalité, c'est qu'ils fonctionnent dans un système qui les a laissés tomber, non pas par manque de dévouement, mais à cause de mauvaises décisions politiques qui ont réduit les ressources dont ils ont besoin.
    La gestion des feux de forêt en Alberta exige une collaboration entre les autorités provinciales, municipales et fédérales. Cependant, ce système ne fonctionne que lorsque tous les paliers de gouvernement fournissent les ressources nécessaires. Malheureusement, cela n'a pas été le cas. La pression n'est pas attribuable aux efforts de nos pompiers et de notre personnel de soutien, mais plutôt au manque d'investissement dans leur travail en Alberta.
    L'an dernier, 1 088 feux de forêt ont ravagé 26 000 kilomètres carrés de terres en Alberta et déplacé 38 000 personnes. Pourtant, nous sommes arrivés en 2024 sans une meilleure préparation. Alors que le printemps était calme, le mois de juillet a relancé les feux de forêt en force, celui de Jasper n'étant qu'un des nombreux qui ont mis les Albertains en danger. Nos pompiers ont travaillé sans relâche, mais les ressources dont ils avaient besoin pour gérer efficacement ces incendies ont été systématiquement réduites.
    En ce qui concerne l'Alberta, le sous-investissement dans les pompiers forestiers, les agents de conservation et les autres employés essentiels de la province est au cœur du problème. Ces professionnels sont sous-payés et sous-évalués. Bien que les pompiers d'autres provinces et territoires reçoivent des prestations comme la présomption de maladie professionnelle en cas de cancer chez les pompiers en raison du risque auquel ils sont exposés, ce n'est pas le cas des pompiers forestiers de l'Alberta. Cela décourage le personnel expérimenté de rester en Alberta, ce qui entraîne une crise de recrutement et de maintien en poste qui nous rend tous vulnérables. Nos pompiers les plus expérimentés partent pour de meilleures perspectives, et ceux qui restent sont débordés. Ce n'est pas de leur faute. C'est l'échec d'un système qui n'accorde pas la priorité à l'expertise et à la sécurité.
    La tragédie de Jasper est un exemple de ce qui se produit quand le système ne fournit pas le soutien nécessaire. Les pompiers et le personnel de soutien sur le terrain ont fait tout ce qu'ils pouvaient, mais l'aide est arrivée trop tard. Le système n'a pas agi assez rapidement pour empêcher l'incendie de se propager. Malgré les efforts héroïques de nos pompiers, le manque d'action rapide et le manque de ressources ont fait en sorte que l'incendie est devenu non maîtrisé.
    Alors que la première ministre disposait de pouvoirs d'intervention, nous avons entendu dire que le gouvernement fédéral avait demandé de l'aide à la province, mais la réponse a été que l'Alberta était trop occupée à lutter contre d'autres incendies dans la province.
    Cette tragédie n'est pas seulement attribuable à un financement insuffisant, mais aussi à une rivalité nuisible entre les gouvernements, où les conflits de compétence ont fait souffrir les Albertains. Quand les gouvernements ne collaborent pas efficacement, ce sont les gens sur le terrain, tant les résidants que les travailleurs de première ligne, qui font les frais de cet échec.
    Le décès du pompier Morgan Kitchen, âgé de 24 ans, à Jasper souligne les risques auxquels ces professionnels sont confrontés. Il était un héros, mais sa perte devrait nous rappeler qu'il incombe au gouvernement de veiller à ce que les héros soient appuyés et équipés pour faire leur travail en toute sécurité. Combien d'autres vies seront en danger avant que nous n'agissions?
    Le problème ne se limite pas aux feux de forêt; il concerne les choix que nous faisons comme province. Des années de compressions budgétaires ont rendu l'Alberta vulnérable à la menace croissante des feux de forêt qui se sont étendus jusqu'à la ville de Jasper.
    La solution ne consiste pas seulement à investir dans l'équipement. Plus important encore, ce sont les gens qui font fonctionner notre système d'intervention en cas de feux de forêt. Nos pompiers, nos agents de conservation et le personnel de soutien ont prouvé leur dévouement à maintes reprises. Le moment est venu pour les gouvernements de faire preuve d'autant de dévouement et de permettre à un groupe intercoopératif de pouvoir travailler à la lutte contre les incendies à Jasper et dans l'ensemble de l'Alberta et du Canada.
    L'avenir de l'Alberta dépend de ces choix. Si nous voulons vraiment protéger nos collectivités et notre environnement, nous devons rebâtir et financer adéquatement un système qui les protège tous.
    Merci.
(1235)
    Merci beaucoup, monsieur Gault.
    Nous passons maintenant à Mme Lindsay, de l'Association des produits forestiers du Canada.
     Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, de me donner l'occasion d'être ici.
     Je suis heureuse de m'adresser à vous aujourd'hui au nom de l'Association des produits forestiers du Canada.
    L'APFC représente le secteur forestier du Canada à l'échelle nationale et compte des membres dans presque toutes les provinces du pays. Nos membres sont des chefs de file en matière d'aménagement forestier durable et sont déterminés à faire en sorte que nos forêts continuent de procurer des avantages environnementaux, sociaux et économiques aux Canadiens.
    Les répercussions des changements climatiques, y compris les feux de forêt extrêmes, représentent une menace importante non seulement pour nos écosystèmes forestiers, mais aussi pour les collectivités qui en dépendent. La tragédie qui s'est produite à Jasper nous rappelle que nos forêts et les gens qui y vivent et y travaillent sont de plus en plus à risque.
     J'aimerais vous faire part aujourd'hui de trois points principaux.
    Premièrement, il faut agir de façon proactive. D'autres témoins vous l'ont dit. Nous reconnaissons que le gouvernement fédéral a fait des efforts pour s'attaquer au risque de feux de forêt et pour améliorer la résilience, y compris l'investissement très récent dans l'Initiative pour un avenir résilient face aux incendies de forêt. Toutefois, ce financement, qui comprenait un soutien accru au programme Intelli-feu et des mesures préventives à plus grande échelle, comme la réduction des matières combustibles, est probablement insuffisant pour faire face à l'ampleur du défi que nous devons relever collectivement.
    Le deuxième point dont je veux parler est la sensibilisation. Encore une fois, c'est un rôle que le gouvernement fédéral peut jouer: comprendre la vulnérabilité, l'exposition aux feux de forêt et les solutions à l'échelle du paysage. Vous avez entendu M. Christian Messier parler du projet « Diverse ». Des changements sont en cours dans les pratiques forestières et dans le rôle que les forêts peuvent jouer pour atténuer les changements climatiques et accroître leur résilience à ces changements climatiques.
    Le concept et l'approche que j'appellerai la « foresterie intelligente sur le plan climatique » peuvent jouer un rôle à la fois dans l'atténuation et l'adaptation, et ils peuvent contribuer à la résilience de nos forêts. La foresterie intelligente sur le plan climatique adopte une perspective holistique, en mettant l'accent sur trois piliers clés: le potentiel d'atténuation, la capacité des forêts et des produits forestiers de réduire les émissions grâce à une augmentation de l'absorption et du stockage du carbone; la résilience, l'amélioration de la santé des forêts et la réduction de la vulnérabilité aux perturbations comme les incendies et les ravageurs grâce à la gestion adaptative — pensez au traitement du combustible, comme l'éclaircissement et le brûlage, et la sylviculture adaptée; et à la substitution de produits par des produits forestiers, comme les résidus forestiers; comme la bioénergie, qui aide à déplacer des sources et des matériaux énergétiques à plus forte intensité de carbone.
    Enfin, il est urgent que la politique appuie et permette ces mesures proactives. Nous exhortons le gouvernement fédéral à faire de la prévention des incendies et de la résilience des forêts une priorité stratégique nationale et à fournir la souplesse et le soutien réglementaires nécessaires pour mettre en œuvre ces initiatives à plus grande échelle.
    La mise en œuvre de ce type de stratégie ou de plan d'action permettra également de cerner l'absence d'un angle du feu sur les priorités et les politiques existantes du gouvernement fédéral. Cela pourrait prendre la forme d'une stratégie de lutte contre les feux de forêt ou devenir un pilier de la stratégie nationale d'adaptation.
    Nous reconnaissons et appuyons également le rôle essentiel que jouent les peuples autochtones en remettant le feu dans le paysage sous forme de pratiques de brûlage culturel et de leadership en gestion.
    En conclusion, bien que la route à parcourir soit difficile, je pense que nous avons entendu M. Flannigan et M. Messier dire que pour les 30 à 50 prochaines années, nous serons dans des conditions extrêmes. Cependant, le secteur forestier canadien peut être un partenaire clé dans cette approche pansociétale, et l'APFC demeure déterminée à travailler avec tous les partenaires pour trouver des solutions qui améliorent la santé et la résilience des forêts canadiennes.
     Je vous remercie de votre attention. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur le président.
(1240)
    Merci, madame Lindsay.
    Nous passons maintenant au vice-premier ministre. M. Ellis, pour cinq minutes. Allez‑y, monsieur.
    Bonjour. Je vous remercie de nous avoir donné la possibilité, au ministre Loewen et à moi, de vous exposer le point de vue de l'Alberta sur le feu de forêt de Jasper, en 2024.
    Je tiens d'abord à remercier tous les premiers intervenants qui étaient au front lors de cet événement. Ils ont mis leur vie en jeu pour protéger Jasper, pour aider à évacuer des milliers de personnes et pour contribuer à la reconstruction. Leur travail acharné et leur audace ont été une source d'inspiration pour toute la province, et je les en remercie.
    Je souhaite également remercier le maire de Jasper, Richard Ireland, qui a fait preuve d'un leadership remarquable tout au long des événements, même s'il a perdu sa propre maison. Merci, monsieur le maire.
    Cette saison des feux de forêt en Alberta a été difficile pour de nombreuses collectivités. Bien entendu, nous continuons de répondre présent à l'appel des résidants. Le gouvernement de l'Alberta a contribué au renforcement du système de gestion des urgences de la ville en procédant à des examens annuels de ses plans de gestion des urgences, en offrant de la formation sur diverses fonctions opérationnelles de gestion des urgences, en donnant des conseils sur les règlements municipaux et les modifications législatives, en apportant son soutien aux exercices fonctionnels de gestion des urgences et, enfin, en offrant son soutien pendant l'incendie de 2024.
    Tout cela a contribué à la réussite des opérations d'évacuation des résidants de Jasper. En tout, 10 000 Jasperites et plus de 15 000 touristes ont été évacués, en Colombie-Britannique et en Alberta, vers des centres d'accueil à Grande Prairie, à Edmonton et à Calgary.
    Je tiens par ailleurs à remercier M. LeBlanc, le ministre fédéral de la Sécurité publique, ainsi que le ministre Sajjan, responsable de la Protection civile, d'avoir répondu rapidement à nos demandes d'aide. Nous les en remercions. Il ne faut bien sûr pas oublier le soutien des Forces armées canadiennes.
    L'Alberta collabore avec le palier fédéral, mais aussi avec la Croix-Rouge canadienne en vue d'établir les modalités des ententes de contrepartie et de fournir une aide aux personnes touchées par les feux de forêt de Jasper.
    Cependant, j'aimerais profiter de l'occasion pour discuter avec vous des questions concernant le commandement unifié qui contrôlait la compétence pendant la crise de Jasper.
    Le fait est que Jasper est entouré d'un parc national d'où est parti l'incendie, ce qui représente un défi très particulier. Le problème tient au fait que toutes les décisions de gestion des urgences pour le parc et pour la municipalité sont supervisées par le directeur du parc. La province est donc en mesure d'exercer une influence, mais pas de prendre des décisions. Pourtant, c'est la province de l'Alberta qui est responsable de la majeure partie du projet de loi concernant la relance.
    La gestion de la crise a été confiée à un commandement unifié où la ville et Parcs Canada étaient chacun représentés par leur commandant d'intervention. Cela dit, le problème découle du fait que le surintendant demeure le grand responsable, à moins qu'il ne décide de déléguer ses pouvoirs, ses responsabilités et ses obligations redditionnelles.
    La question de la compétence a aussi posé problème dans nos communications avec les personnes évacuées. Comme tous les ordres de gouvernement ont des rôles définis, il a été très difficile de communiquer avec Jasper. Pour cette raison, le gouvernement de l'Alberta a pris l'initiative d'organiser et de tenir des assemblées publiques pour tenir les personnes évacuées au courant de la situation. Les résidants touchés, qui voulaient des réponses en cette période de crise, nous ont fait savoir qu'ils avaient beaucoup apprécié ces assemblées publiques.
    En tant que ministre de la Sécurité publique et des Services d'urgence de l'Alberta, je peux dire que deux choses pourraient aider l'Alberta à se remettre de la catastrophe de Jasper et de toute future catastrophe.
    Premièrement, bien que le feu de forêt de Jasper ait pris naissance dans le parc national du même nom, l'Alberta a approuvé un programme de reprise après sinistre doté d'un budget de quelque 149 millions de dollars pour appuyer le redressement postcatastrophe de Jasper. Cependant, en vertu des Accords d'aide financière en cas de catastrophe, les AAFCC, seule une partie des coûts de l'Alberta est admissible à un remboursement, et nous demandons que la formule de partage des coûts des AAFCC ne s'applique pas dans ce cas, car l'incendie a pris naissance dans le parc national qui est de compétence fédérale. L'incendie a pris naissance dans le parc national et il s'est ensuite propagé à la ville de Jasper. Par conséquent, nous devons avoir une discussion sur les coûts et sur le fait que le gouvernement fédéral pourrait être responsable des coûts de cet incendie.
    Deuxièmement, l'Alberta apprécie les modifications apportées aux AAFCC, annoncées plus tôt cette année, en particulier l'accent mis sur l'atténuation et la prévention. Toutefois, nous demandons que la mise en œuvre soit reportée de la date actuelle du 1er avril 2025 à la fin septembre 2025 afin que l'application des modifications ne se fasse pas en plein milieu d'une éventuelle catastrophe future. Ce bref report nous donnera également le temps de modifier nos politiques pour qu'elles correspondent aux nouvelles lignes directrices, et de former nos partenaires des autorités locales à ces nouvelles lignes directrices.
    Pour terminer, je tiens à remercier toutes celles et tous ceux qui sont déterminés à faire en sorte que nous travaillions tous à l'atteinte d'un objectif commun qui est, bien sûr, celui de la sécurité des Albertaines et Albertains.
    Je vous redonne la parole, monsieur le président.
(1245)
     Merci beaucoup, monsieur le vice-premier ministre.
    Passons maintenant au ministre Loewen qui a cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens d'abord à exprimer ma sincère gratitude à tous les pompiers et intervenants de première ligne qui ont bravement affronté l'incendie de Jasper. Leur courage et leur dévouement ne sont pas passés inaperçus, surtout pas en cette période dévastatrice.
     Je remercie les membres du Comité de me donner l'occasion de discuter de cet événement.
    Tandis que nous méditons sur les événements tragiques qui ont entouré cette catastrophe, nous devons songer aux grandes pertes et aux dévastations dont ont été victimes les habitants de Jasper. Bon nombre d'entre eux ont perdu leur maison, leurs biens et les paysages qu'ils aiment.
     J'aimerais également prendre un moment pour remercier le maire Richard Ireland de son leadership et de ses communications tout au long de cette crise, surtout quand on songe qu'il a perdu sa maison dans l'incendie de la ville. Ses réactions témoignent de son engagement envers la collectivité.
    Nous participerons au nettoyage et à la restauration des secteurs touchés. Ensemble, nous pouvons renforcer nos activités de gestion des feux de forêt et protéger nos paysages pour les générations à venir.
     Compte tenu de la gravité des récents feux de forêt, le gouvernement de l'Alberta a mis en œuvre une approche de commandement unifié avec les municipalités de la province dans le cadre de la loi 21. Nous pensons que cette stratégie devrait être étendue aux terres sous contrôle fédéral afin d'assurer des interventions rapides et coordonnées à l'avenir.
     Nous sommes impatients de mettre à profit notre expertise dans la lutte contre les feux de forêt. Il est clair que la gestion proactive des forêts joue un rôle essentiel dans la protection de nos paysages naturels et des collectivités qui en dépendent. L'approche de l'Alberta en matière de gestion des forêts illustre à quel point l'attention portée à la gestion des insectes et des maladies, à la récolte commerciale soigneusement planifiée, aux brûlages dirigés et aux gardiens d'incendie communautaires peut faire une différence importante dans la réduction des risques de feux de forêt.
    Le gouvernement de l'Alberta adopte une approche globale pour protéger nos forêts. Nous avons investi des millions de dollars dans la lutte contre le dendroctone du pin ponderosa. Notre programme de lutte contre ce parasite a tiré parti de la coupe proactive des forêts à risque élevé à partir d'un recensement et d'un contrôle agressifs des arbres infestés. Ces arbres attaqués posent un risque important parce qu'ils se transforment en combustible potentiel qui alimente les feux de forêt. En coupant et en brûlant ces arbres problématiques, nous avons fait de grands progrès dans la réduction de la population de dendroctones de 98 % depuis 2019, ce qui montre que la gestion ciblée des ressources peut avoir un impact important.
     Nous parvenons aussi à réduire a priori les risques de feux de forêt en demandant aux entreprises forestières de concentrer les récoltes commerciales sur les vieux peuplements à risque élevé et sur les peuplements ravagés par le dendroctone, et d'appliquer la technique du brûlage dirigé pour réduire efficacement la charge de combustible. C'est un aspect important sur lequel je tiens à insister encore une fois, à savoir que des interventions proactives et dûment gérées sont bonnes pour l'environnement et la population. La contre-argumentation qui condamne ces interventions est par trop simpliste et ne tient pas compte des côtés très précieux de ce genre de mesures bien gérées et du rôle important qu'elles ont joué pour nos paysages pendant des milliers d'années.
    Pour ce qui est de la collectivité et des propriétaires immobiliers, nous érigeons des pare-feu — soit des bandes de terre défrichées — pour servir de barrières entre les zones forestières et les zones habitées. Ces zones tampons aident à freiner la propagation d'un feu et permettent aux pompiers de créer des points d'ancrage pour planifier les opérations de lutte, en plus de fournir des points d'accès sécuritaires pour les activités de confinement. Nous fournissons également des fonds aux collectivités pour qu'elles planifient, préparent et mettent en œuvre les principes d'Intelli-feu.
    En revanche, l'approche de Parcs Canada, même si elle part d'une bonne intention, a été critiquée pour sa nature réactive. Les événements tragiques de Jasper soulignent l'importance des mesures proactives en matière de conservation des forêts et de prévention des incendies.
    Les arbres tués par le dendroctone du pin ponderosa ont sans aucun doute grandement contribué aux événements tragiques de Jasper. Le grand nombre d'arbres morts a accéléré le feu de forêt, rendant les mesures de contrôle difficiles pour ne pas dire impossibles. Aucun effort mené à l'échelle réduite de la collectivité n'aurait permis de maîtriser un incendie aussi intense.
     Le feu de forêt qui a finalement atteint le lotissement urbain de Jasper a pris naissance dans le parc national Jasper dont Parcs Canada est responsable. L'Alberta et Parcs Canada ont conclu une entente d'aide mutuelle, et l'Alberta est intervenue dès le début. Le gouvernement de l'Alberta a appuyé l'intervention en envoyant des pompiers, des hélicoptères et de l'équipement lourd. En fait, pendant les feux de forêt, plus de 70 pompiers, de nombreux hélicoptères et de l'équipement essentiel ont travaillé aux côtés de Parcs Canada pour combattre les flammes.
    Notre collaboration comprenait la communication en temps réel et la mise en commun des ressources stratégiques, et les ressources de l'Alberta consacrées à la lutte contre les feux de forêt ont été déployées pour appuyer l'intervention dès le premier jour. À l'époque, l'Alberta luttait déjà contre plusieurs autres grands feux. Avec plus de 160 feux de forêt actifs dont plus de 50 devenus hors de contrôle, notre priorité était de protéger les collectivités et les infrastructures. Pourtant, quand Parcs Canada a eu besoin d'aide, nous en avons fait notre priorité absolue, et nous n'avons jamais laissé entendre que nous étions trop occupés ailleurs, comme d'aucuns l'ont prétendu. En fait, comme nous avons augmenté notre budget de lutte contre les feux de forêt de 55 % au cours de la dernière année, nous avions encore plus de ressources à partager cette année.
    Cet incendie a fait courir de sérieux risques aux équipes sur le terrain et, malheureusement, nous avons perdu un véritable héros le 3 août. Morgan Kitchen qui est mort en combattant l'incendie. Il était résolument déterminé à assurer la sécurité de nos collectivités et il a tout donné pour une cause en laquelle il croyait.
(1250)
     Sans le travail acharné et le dévouement de Morgan et de tous les pompiers forestiers, la situation aurait pu être bien pire à Jasper. Je m'exprime au nom de tous les Albertains quand je dis que nous sommes extrêmement reconnaissants des efforts qu'ont déployés nos pompiers pour protéger notre chère ville montagneuse.
    Pour ce qui est de l'avenir, il est important de reconnaître à quel point les stratégies proactives de gestion forestière de l'Alberta fonctionnent, mais il reste encore beaucoup à faire. En investissant dans le brûlage dirigé, dans les pare-feu et les pratiques de récolte, l'Alberta protège non seulement son patrimoine naturel, mais aussi la sécurité et le bien-être de ses citoyens.
     Les feux de forêt de Jasper nous rappellent à quel point il est essentiel de mettre l'accent sur la prévention et de ne pas se contenter de réagir quand les choses tournent mal. En préconisant des politiques d'aménagement forestier rigoureuses, nous pourrons créer un avenir où nos forêts prospéreront et où nos collectivités demeureront résilientes face aux défis que posent les feux de forêt.
    Merci.
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous allons passer à notre tour de six minutes, et c'est M. Lloyd qui va commencer.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre Loewen, allez-vous déposer les états de dépenses de l'Alberta au chapitre de la gestion des feux de forêt des 10 dernières années pour que le Comité puisse les examiner?
     Oui, absolument.
    Encore une fois, nous avons augmenté notre budget de 55 %. Nous sommes passés de 100,4 millions à 155,4 millions de dollars, et nous avons également augmenté le montant pour éventualités qui était disponible. L'an dernier, il était de 1,5 milliard de dollars et, cette année, il est de 2 milliards de dollars. C'est donc une autre augmentation de 33 %.
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Ellis, vous avez fait allusion à des problèmes liés au commandement unifié. On m'a dit que l'Alberta n'avait pas été invitée à se joindre au commandement unifié avant le 27 juillet, je crois. Est‑ce vrai? Si oui, pourquoi l'Alberta a‑t‑elle tardé à être intégrée au commandement unifié?
(1255)
     C'est une bonne question que vous devriez sans doute poser au ministre ou aux gens du parc national.
    Nous avons bien sûr cherché, dès le début, à faire partie du commandement unifié pour contribuer à la prise de décisions. À l'époque, nous n'avions qu'un rôle consultatif, mais croyez-moi, il en a été question dans mes échanges avec le ministre Sajjan, qui a fait de son mieux pour nous confier un rôle décisionnel.
     Le ministre n'a pas semblé s'opposer à ce que vous siégiez au commandement unifié, mais est‑ce que quelqu'un, à Parcs Canada ou à la ville — qui dirigeait le commandement unifié —, s'est opposé à votre participation?
    D'après mes échanges avec le ministre Sajjan, je n'ai pas eu l'impression qu'il était opposé à ce que nous ayons un rôle décisionnel au commandement unifié, mais ce n'est pas lui qui, en sa qualité de ministre, peut décider de qui peut faire partie de ce groupe.
    Qui le peut?
    Je suppose que c'est le ministre responsable du parc national.
     Ce serait donc le ministre Guilbeault.
    Ma prochaine question s'adresse aux représentants de l'Alberta Forest Products Association.
    En 2017, l'Alberta Forest Products Association, le député conservateur de Jasper, Jim Eglinski, et de nombreux scientifiques forestiers, dont Ken Hodges, ont envoyé de nombreuses lettres à la ministre libérale de l'Environnement à l'époque — Catherine McKenna — au sujet du risque de feu de forêt catastrophique à Jasper.
    Lors de la période de questions et dans la correspondance du ministère, tout ce beau monde s'est fait dire que « l'intégrité écologique » du parc devait être protégée. Votre organisation a été appelée à se conformer en tous points à la réglementation en vigueur en matière de durabilité. À votre avis, celle‑ci, qui consiste à maintenir de vastes étendues de forêts infestées par le dendroctone du pin ponderosa, permet-elle de préserver l'intégrité écologique des parcs nationaux?
     Merci de la question.
    Je ne peux pas parler au nom de Parcs Canada parce que le mode de gestion envisageable est encadré dans la loi, mais je peux dire qu'on savait... Le ministre Loewen a précisé que le secteur forestier et la province de l'Alberta ont commencé à mettre en œuvre une stratégie visant à favoriser des pinèdes en santé et à cibler les peuplements de pins malades pour réduire le risque d'inflammabilité, il a ajouté que le niveau d'intervention n'avait pas été le même dans le parc...
    Permettez-moi de reformuler ma question: est‑ce promouvoir l'intégrité écologique que de laisser sur pied des arbres morts infestés par le dendroctone du pin ponderosa dans un parc national? Est‑ce que cela favorise l'intégrité écologique?
     Eh bien, je pense que cela dépend du niveau de risque que nous sommes prêts à tolérer, selon l'endroit où nous vivons, et ce risque est de plus en plus grand.
    Par le passé, le fait d'avoir des réserves statiques visait essentiellement à permettre une surveillance dans le temps, un peu comme le canari dans la mine...
     Diriez-vous, cependant, que les jeunes forêts... Quand une société forestière réensemence une forêt avec de nouvelles espèces, on dit que celle‑ci devient plus résistante aux incendies de forêt. C'est vrai?
     Oui. En fait, c'est pour gérer la charge de combustibles...
    Merci.
    ... et réduire le volume de combustibles; une forêt replantée est plus résistante, c'est vrai.
     Vous avez fait allusion aux politiques fédérales qui ont une incidence sur les risques de feux de forêt, non seulement dans les parcs nationaux, mais aussi en dehors de ces espaces, et vous estimez que le fédéral ne tient pas compte des incendies.
    La Loi sur les espèces en péril fait-elle partie de ces politiques? Son application contribue‑t‑elle aux risques de feux de forêt au Canada?
     C'est de plus en plus inquiétant.
    J'ai eu l'occasion de survoler certaines régions de l'Alberta, parce que j'ai travaillé sur le rétablissement du caribou à l'échelle du Canada. On craint de plus en plus que les peuplements plus anciens, qui ont été laissés intacts pour le caribou des bois, représentent un risque accru sur le plan des feux de forêt, ce qui, à terme, ne contribuera pas au rétablissement du caribou et ne sera pas utile pour les collectivités de ces régions ni pour les collectivités voisines. Nous recommandons d'adopter un point de vue axé sur la protection contre les incendies.
    En 2017, l'Alberta Forest Products Association, dans une lettre publiés par l'Edmonton Journal, estimait à quelque 85 millions de dollars le coût de la lutte contre le dendroctone du pin ponderosa. L'Association jugeait qu'on avait sciemment laissé le dendroctone du pin proliférer dans le parc national Jasper.
    Selon vous, combien en coûterait‑il au gouvernement fédéral pour gérer les forêts dans les parcs nationaux du Canada?
    Me demandez-vous combien cela coûterait?
    Peut-être pourriez-vous me répondre par écrit, parce qu'il ne me reste qu'une trentaine de secondes.
    D'accord.
    L'autre jour, un de mes collègues libéraux a dit qu'il ne pensait pas vraiment possible d'appliquer des techniques actives de gestion des forêts dans les parcs nationaux et que cela ne ferait pas grand-chose pour prévenir les incendies.
     Êtes-vous d'accord avec son évaluation?
(1300)
    Une vidéo montre l'intervention de Canfor pour pratiquer des éclaircies. Je pense que cela a permis de sauver des parties de Jasper. S'il avait été possible de faire la même chose sur de plus grandes superficies, les mesures d'atténuation auraient été plus efficaces. C'est réalisable.
    Il faudrait, selon moi, que le personnel du parc et le secteur forestier commercial apprennent l'un de l'autre.
    Merci.
     Monsieur van Koeverden, allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Ellis, merci de vous être joint à nous aujourd'hui.
    Notre collègue, le ministre Sajjan, ministre de la Protection civile, était ici la semaine dernière, comme vous le savez probablement. Il a affirmé au Comité que la coordination entre son cabinet et le vôtre, et entre ses fonctionnaires et les vôtres, a été constante tout au long de l'horrible événement de l'été dernier.
    Il peut sembler un peu déplacé de parler de compétences quand il est en fait question de la vie et du gagne-pain des gens, mais il semble que nous en soyons là.
     Je crois comprendre qu'en ce qui concerne le commandement unifié, et du point de vue des fonctionnaires, l'Alberta a été immédiatement accueillie à la table et que l'Alberta a été la première province à recevoir un appel du cabinet du ministre Sajjan.
    Est‑ce bien ce que vous avez constaté cet été?
    À titre consultatif, oui.
     Le ministre Sajjan et moi avons très bien travaillé ensemble. C'est cette relation de travail qui a très bien fonctionné pour les gens de Jasper, face à l'incident critique du moment.
    Mes commentaires ne concernent que le commandement et la capacité à prendre des décisions. Nous n'étions là qu'à titre consultatif; nous n'étions pas là à titre décisionnel.
    Je comprends. Merci, monsieur le ministre.
    Merci.
    La semaine dernière, j'ai demandé au personnel de Parcs Canada de transmettre la sympathie et la gratitude de tout le Comité pour le travail accompli. En effet, ce travail, qui a été fait en collaboration entre tous ces groupes, a sauvé des vies. Je ne crois pas avoir à demander le consentement unanime du Comité, mais j'espère que vous pourrez transmettre ce message d'appréciation à vos collègues et à votre personnel. Ce qui s'est passé cet été était une tragédie, mais le travail préparatoire entrepris par Parcs Canada, par vos collègues et par les ministres concernés a permis de sauver des vies. Nous tous ici, tenons à vous en remercier.
    Monsieur Gault, nous avons entendu des comptes rendus contradictoires au sujet de la collaboration entre les divers ordres de gouvernement et paliers de compétence. Nous avons également entendu des rapports contradictoires au sujet du financement de la lutte contre les feux de forêt en Alberta.
    Pourriez-vous nous dire ce que nous pourrions améliorer, du point de vue de l'emploi des pompiers et des équipes de premiers répondants pour que le personnel dispose de meilleures ressources afin d'éviter la répétition de telles catastrophes et d'y réagir éventuellement?
     Je vous remercie de la question.
    En Alberta, nous avons des pompiers forestiers qui sont des saisonniers. Beaucoup sont des étudiants. Si vous retracez le déroulement des événements dans les médias, vous constaterez que le ministre Ellis a déclaré que nous devions être prêts en mars, puis en avril. En mai, nous ne l'étions toujours pas.
    Je tiens à souligner que notre personnel affecté aux feux de forêt gagne 22 $ de l'heure, sans avantages sociaux ni couverture pour traitement du cancer. D'autres provinces l'offrent. C'est la même chose en Ontario, qui verse une prime de 10 000 $ à la signature. Cette année, des pompiers ont plutôt choisi d'aller combattre les feux de forêt en Ontario pour obtenir la prime de 10 000 $. Il a donc fallu en faire venir 174 de l'Ontario pour aider à combattre les incendies à Jasper et dans toute la province.
    Le gouvernement peut toujours dire qu'il investit 151 millions de dollars, ce qu'il a fait, mais c'est sur trois ans et les sommes sont destinées aux bombardiers d'eau et aux hélicoptères que nous ne pouvons pas déployer à cause de la fumée qui enveloppe les secteurs incendiés. L'argent n'est pas consacré aux ressources sur le terrain, et c'est ce dont nous avons besoin. Les pompiers volontaires sont sous-appréciés, sous-payés et ils ne reprennent tout simplement pas du service.
     Je crois que le gouvernement a supprimé 247 postes en 2021, dont 57 consacrées à la gestion des feux de forêt. Cela signifie que nous avons entamé l'année 2023 sans personnel.
(1305)
     D'accord. C'est très clair. Merci beaucoup.
    J'espère que le projet de loi C‑224 du gouvernement contribuera à unifier la prise en compte de divers cancers liés à la lutte contre les incendies à l'échelle de la province, car je sais que, malheureusement, certaines provinces ne traitent pas tous les différents cancers de la même façon. Or, il est établi que l'exposition aux produits chimiques toxiques, cause des maladies professionnelles chez ces héros. C'est ainsi qu'il faut considérer la chose.
    Merci de votre travail. Les deux dernières réunions ont été difficiles pour quiconque a déjà combattu un feu. J'ai parlé à quelques-uns de mes amis qui, après avoir quitté le sport, se sont lancés dans la lutte contre les incendies. Cet été a été particulièrement dévastateur pour les Albertains. J'ai de la famille à Jasper, et ce fut pour tout le monde une période bouleversante. Si vous pouviez également transmettre notre gratitude et notre sympathie collectives aux gens que vous représentez, je l'apprécierais vraiment.
    La perspective de... La façon dont nous valorisons et percevons la biodiversité au Canada a également été soulignée par divers universitaires et témoins devant ce comité. Compte tenu de l'augmentation du nombre de feux de forêt et de catastrophes naturelles, je crois que nous devons intervenir en tant que comité et en tant que gouvernement. Quand le milieu naturel est ravagé, bien des choses sur lesquelles nous comptons et que nous tenons pour acquises sont mises en péril. Je songe à la qualité de l'air, de l'eau, à la régulation des inondations et à la régulation climatique. À Halton, nous comptons sur notre office de protection de la nature, et je sais qu'il y a un rapport avec la situation.
     Monsieur le président, si vous me le permettez, je vais donner avis de la motion suivante.
    « Je propose que ce comité entreprenne une étude préalable du projet de loi C‑73, Loi concernant la transparence et la responsabilité relativement à certains engagements pris par le Canada en vertu de la Convention sur la diversité biologique; qu'à cet effet, le Comité tienne au minimum 8 réunions; que le Comité invite le ministre de l'Environnement et du Changement climatique et des fonctionnaires; et que les deux dernières séances soient consacrées à l'étude article par article... »
    Une voix: [Inaudible]
    M. Adam van Koeverden: Je l'ai envoyée par courriel.
    Vous ne la proposez pas.
    Non, ce n'est qu'un avis de motion.
    ... « et que cette étude commence dans les 10 jours suivant l'adoption de cette motion. »
    D'accord. Si l'avis a été distribué, nous pouvons nous arrêter là. C'est juste un avis.
    Nous allons passer à Mme Pauzé.

[Français]

    Je remercie les témoins d'être des nôtres.
    Beaucoup de chiffres ont circulé sur ce qu'ont pu coûter les changements climatiques. Ces chiffres donnent une bonne idée du fait que ça coûte cher. On n'en parle pas assez souvent à mon goût.
    Madame Daniels, vous êtes peut-être la meilleure personne pour répondre à ma question.
    Au Québec, en 2023, on a répertorié 566 incendies dans ce qu'on appelle les zones de protection intensive, et 147 autres dans ce qu'on appelle la zone nordique. Plus de quatre millions d'hectares de superficie ont brûlé. Dans 99,9 % des cas, c'est la foudre qui avait déclenché l'incendie. Le nombre de ces incendies est plus élevé que le total de ceux enregistrés pour les 20 dernières années, toutes causes confondues.
    Quand on va sur le site de la SOPFEU, l'organisme québécois de protection des forêts contre le feu, on apprend que sa capacité lui permet de combattre simultanément 30 incendies, ou un seul feu de plus de 1 000 hectares. Or, le 4 juin 2023, 155 feux étaient actifs en même temps. Quand on voit ces chiffres, on comprend l'ampleur de ce qui nous attend, au fond.
    D'après vous, qu'est-ce qu'un gouvernement peut ou doit faire pour aider à planifier l'allocation des ressources d'urgence lorsque plusieurs événements catastrophiques ont lieu en même temps? C'est exactement ce qui s'est passé au Québec: même si des gens luttaient contre les incendies, le nombre de ces derniers était beaucoup trop grand.
    Avez-vous des conseils à donner sur ce qu'un gouvernement pourrait faire?
(1310)

[Traduction]

     Ce problème des incendies multiples et simultanés qui causent des crises ne se limite pas au Québec; on le constate dans toutes les provinces du pays. Nous savons que les feux de forêt, parfois extrêmes, dépassent notre capacité à les maîtriser ainsi que la capacité de toutes les technologies modernes déployées. Il s'agit d'un problème mondial, et c'est pourquoi nous préconisons également une gestion proactive et transformatrice des forêts pour veiller à ce que nos collectivités et nos paysages soient résilients face à d'éventuels incendies, cela par le biais de l'atténuation des risques liés aux combustibles et grâce à des opérations de brûlage dirigé ou culturel concentrées dans la périphérie des collectivités et étendues à la pleine nature.
    Ce sont l'industrie forestière et l'aménagement forestier qui ont le plus grand impact sur nos paysages partout au Canada. Il est essentiel de transformer la gestion de nos forêts de manière à établir des écosystèmes résilients, ce qui comprend la diversification de nos pratiques de sylviculture et de récolte, ainsi que le reboisement et la modification de la façon dont nous laissons le feu attaquer la forêt.

[Français]

    Je vous remercie, madame Daniels.
    Monsieur Loewen, vous faites partie du gouvernement de l'Alberta. Comme vous le savez, le projet de loi C‑76, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada, vise à éliminer les obstacles à la reconstruction de la ville de Jasper, notamment en permettant la rationalisation du processus décisionnel par les élus locaux. À votre avis, ce projet de loi permettra-t-il de faciliter la reconstruction de la ville de Jasper à la suite des feux de forêt?

[Traduction]

     Je pense qu'il sera intéressant de voir comment le projet de loi C‑76 sera mis en œuvre. Je pense que le projet de loi C‑76 est un bon début.
    Nous aimerions que l'Alberta et la ville de Jasper se heurtent à moins d'obstacles et disposent d'une plus grande autonomie. La municipalité est capable de prendre ses décisions et, en vertu de sa Municipal Government Act, le gouvernement provincial est, je crois, capable de s'occuper de ces choses‑là. Je souhaiterais que le gouvernement fédéral et Parcs Canada imposent moins de restrictions à la reconstruction de Jasper.

[Français]

     Je vous remercie.
    Monsieur Gault, vous êtes le porte-parole des employés, donc des syndiqués. Les membres de votre syndicat vous parlent-ils souvent de l'ampleur des problèmes reliés aux changements climatiques?

[Traduction]

    Effectivement, nos membres parlent assez souvent des changements climatiques, de l'action des incendies et de la façon dont ils prennent de l'ampleur année après année.
    Les incendies sont de plus en plus difficiles à maîtriser. Dans certaines régions, nous n'en avions pas connu auparavant, mais à cause des changements climatiques, de nouvelles régions infestées par le dendroctone du pin sont touchées. Tout le monde savait que l'incendie allait éclater là‑bas à un moment donné, mais je ne pense pas que quiconque ait tenu compte du fait que les changements climatiques allaient aggraver la situation.
    Nous sommes confrontés à une nouvelle réalité: même pour à ceux qui ne croient pas dans les changements climatiques, les feux de forêt paraissent de plus en plus intenses et de plus en plus difficiles à combattre, et nos membres font face à cette réalité tandis qu'ils sont à court de ressources.

[Français]

    Je vous remercie, madame Pauzé.
    Madame Collins, nous allons terminer avec vous, étant donné que la réunion dure depuis deux heures et que nous ne disposons pas des ressources nécessaires pour la poursuivre beaucoup plus longtemps. Vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins pour leur présence...
     Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Excusez-moi, veuillez attendre un instant, car j'ai un rappel au Règlement.
     N'avons-nous pas des ressources jusqu'à 13 h 30?
    Oui, mais il est déjà 13 h 15.
    Donc, nous avons d'autres tours...
    Ah, je vois. Je comprends ce que vous dites. D'accord.
     Oui. Il ne nous reste que 30 secondes. Ça n'a aucun sens...
    Allons-nous faire un autre tour?
     Eh bien, nous n'avons les ressources que jusqu'à 13 h 30.
    D'accord. Allons-nous poursuivre jusqu'à 13 h 30?
     Oui.
    M. Dan Mazier: D'accord.
    Le président: S'il ne nous reste que cinq minutes, nous ne pourrons pas... Vous savez, nous pourrions parler de...
     Nous allons donc continuer. D'accord. Très bien.
    Non, je n'ai pas dit que nous allions continuer. Je dis que nous ne pouvons pas entamer un autre tour si nous n'avons que cinq minutes.
    Nous pourrions peut-être en parler après mon tour.
    Nous n'empiétons pas sur votre temps de parole. M. Mazier m'a posé une question.
    Le temps nous est vraiment compté. Nous ne pouvons pas entamer une autre série de questions.
    Mais après Mme Collins...
(1315)
    Cela nous amènerait aux environs de 13 h 25.
    Comment ça? Il n'est que 13 h 15.
    Elle a six minutes et il est maintenant 13 h 21.
    Voyons comment les choses vont aller.
    M. Dan Mazier: Plus nous palabrons...
    Le président: Voyons comment les choses se passent, d'accord?
    Nous pourrons peut-être faire un autre tour.
    Merci.
     Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à vous, monsieur Gault. Je tiens aussi à remercier vos membres. C'est par leur action héroïque qu'ils assurent la sécurité des collectivités. Nous avons beaucoup entendu parler du courage de vos membres. Nous avons entendu des politiciens les remercier, mais souvent, ces remerciements sonnent creux parce qu'ils ne sont pas accompagnés du soutien et des ressources dont ils ont besoin.
    Avant l'incendie de Jasper et avant la saison des feux de forêt, que vous disaient les pompiers? Pouvez-vous nous parler un peu de ce qu'étaient leurs préoccupations?
    Merci beaucoup de la question.
    Chaque année, nous nous disons que nous manquons de personnel, que les pompiers forestiers ne sont pas appréciés à leur juste valeur et qu'ils ne sont pas respectés par le gouvernement. Leur profession subit constamment des compressions budgétaires.
    Comme je l'ai dit, les compressions ont commencé il y a quelques années, et nous voyons le résultat. Il est très difficile d'intervenir dans une province quand on est à bout de souffle et qu'on nous en demande de plus en plus. Cela devient frustrant.
    Nos membres n'ont aucun avantage. S'ils sont malades, ils ont le choix de ne pas aller travailler, mais s'ils sont dans un camp, ils doivent rester sur place parce qu'ils ont besoin des prestations d'assurance-emploi. La saison des incendies dure plus longtemps, mais nos périodes d'emploi. Nous en sommes maintenant à peut-être 50 ou 60 interventions, et je suis sûr que le ministre Loewen, s'il le souhaite. parce que nous avons maintenant des pompiers contractuels... L'an dernier, 64 incendies ont été signalés, ce qui est bien supérieur au nombre habituel.
    Les gens se demandent pourquoi ils font cela. Eh bien, ils le font parce qu'ils adorent ce travail, parce qu'ils aiment les Albertains et parce qu'en définitive, ils le veulent bien, mais on ne peut pas demander à des gens payés 22 $ l'heure d'aller risquer leur vie... La mort de Morgan Kitchen a été une perte considérable, ressentie dans toutes les zones forestières de l'Alberta. Il nous faudra du temps pour nous en remettre.
    Nous nous plaignons d'être pointés du doigt, tandis que nous ne faisons que combattre les incendies. Il ne faut pas oublier que le 24, nous avons été retirés de Jasper. Nous ne combattons pas les incendies de bâtiments. La fumée était trop agressive et nous n'avions pas d'équipement respiratoire. Les équipes sur place ont donc été envoyées à Hinton pour leur sécurité, mais les gens voulaient être là pour combattre. Une partie de nos membres sont des pompiers municipaux qui peuvent continuer à combattre les flammes.
    Au final, ils sont frustrés et fatigués.
     Oui. D'après la province, il semble que celle‑ci n'ait pas été tout de suite invitée à siéger au commandement unifié et à participer à la prise de décisions. D'aucuns se sont notamment plaints su manque de capacité du gouvernement provincial, mais en réalité, c'est sa capacité à collaborer efficacement qui a fait défaut.
    Les gens ne se soucient pas nécessairement de savoir si ce genre de problème est de compétence provinciale ou fédérale; ils veulent que leurs collectivités soient en sécurité, et les pompiers veulent s'assurer qu'ils sont en sécurité, ou le plus en sécurité possible, quand ils combattent des incendies.
    Le problème, c'est que Jasper est une municipalité située sur un territoire domanial, mais c'est une municipalité depuis 2001. La province a une responsabilité envers les pompiers. Si elle décide de ne pas les mobiliser, elle peut invoquer des raisons ou une loi. Elle a donné de nouveaux pouvoirs législatifs.
    Ce n'est pas seulement un affront au gouvernement en place, mais un affront actuel à n'importe quel gouvernement. Il était possible d'intervenir plus tôt et il a été décidé de ne pas le faire. Cela revient à mettre nos pompiers en danger à qui l'on dit: « nous vous sommes très reconnaissants », mais ces mêmes pompiers lisent ensuite dans la presse qu'ils ne méritent pas une augmentation, qu'ils ne valent pas plus.
    C'est la bataille qui se déroule dans la province, à l'heure de la privatisation.
    Vous savez, 22 $ de l'heure pour un pompier forestier et aucun droit aux prestations de santé, c'est épouvantable quand on pense au fait que ces hommes et ces femmes risquent leur vie pour assurer la sécurité des collectivités, mais c'est aussi un défi pratique pour maintenir les effectifs à leur niveau. Pouvez-vous nous parler un peu des répercussions que vous avez constatées sur le plan du recrutement et du maintien en poste?
     Pour ce qui est du recrutement et du maintien en poste, le problème tient à ce que nous travaillons à l'échelle d'une seule province. Au bout d'un an complet, les pompiers progressent dans l'échelle salariale. Toutefois. dans le domaine de la lutte contre les feux de forêt, la saison ne dure que quatre ou cinq mois et il faut trois ans à un pompier pour monter d'un échelon. Ils viennent chercher de l'expérience en Alberta, puis ils vont ailleurs. C'est ce qui se passe. Nous perdons les connaissances approfondies dont nous avons besoin dans la lutte contre le type de feu. Nous avons des gens qui ont deux ou trois ans d'expérience et qui font de leur mieux. Ils travaillent fort et sauvent des vies et des biens.
    En fin de compte, chaque année, la même chose se répète. L'an dernier, le ministre Loewen était censé les embaucher avant mars. Le mois de mai était déjà bien entamé que nous continuions à accueillir de nouveaux soldats du feu. Et puis, le feu de Jasper n'a pas été le seul. N'oubliez pas que nous avons relevé 55 incendies incontrôlés dans la province et qu'il y a eu des évacuations à Fort McMurray et dans d'autres secteurs.
(1320)
     Nous savons que les pompiers meurent plus souvent du cancer que des incendies. C'est assez épouvantable, quand on pense au fait que vous parlez de pompiers qui n'ont pas d'assurance contre le cancer.
    Pouvez-vous nous parler de l'importance de cet aspect des choses?
    D'autres provinces, comme la Colombie-Britannique et l'Ontario, commencent à offrir une couverture pour les traitements du cancer. On entend aux nouvelles que la fumée est si toxique à Fort McMurray que les gens restent confinés chez eux, parce cette fumée est cancérigène. Ensuite, on entend dire que les soldats du feu n'ont pas de couverture pour le cancer. Cela leur donne vraiment l'impression qu'ils ne sont pas appréciés.
    Il y avait un ministre — je ne sais pas s'il s'agissait d'un ministre, mais c'était quelqu'un du gouvernement — qui parlait de nos pompiers forestiers. Les pompiers comprennent ce que combattre un feu veut dire. Ils sont censés le faire en restant en amont du panache de fumée et s'ils sont en aval, c'est que les choses vont mal.
    Cela ne dépend pas des pompiers, mais de l'action du vent et d'autres facteurs. Le gouvernement continue de dire aux pompiers: « C'est à vous d'être responsables. » Sans équipement, sans rien, pourquoi continuer à faire cela? Malheureusement, ils le font parce qu'ils aiment les Albertains, et bon nombre d'entre eux veulent aussi protéger des souvenirs.
     Merci.
    Merci, madame Collins.
    Nous n'avons plus de temps. Nos ressources s'arrêtent à 13 h 30. Nous n'avons pas de temps pour une autre série de questions qui permettrait à six intervenants de poser des questions.
    Je remercie nos témoins, en distanciel et en présentiel.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU