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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 125 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 novembre 2024

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la 125e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre des communes.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule sous une forme hybride. J'aimerais rappeler aux participants les points suivants, et cela s'adresse autant aux membres qu'aux témoins. Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Tous les commentaires doivent être adressés par l'entremise de la présidence.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 19 septembre 2024, le Comité reprend son étude de la contribution du Canada à la promotion d'une solution à deux États.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos trois intervenants.
    Nous avons M. Henry Topas, directeur de B'nai Brith Canada pour le Québec et le Canada atlantique.
    Nous accueillons M. Shimon Koffler Fogel, président-directeur général du Centre consultatif des relations juives et israéliennes.
    Nous recevons Mme Maytal Kowalski, directrice exécutive de JSpaceCanada.
    Vous aurez chacun cinq minutes pour présenter votre déclaration liminaire. Veuillez regarder par ici de temps en temps, non seulement en ce qui concerne votre déclaration liminaire, mais aussi les questions suivantes posées par les membres. Il y a des limites de temps, alors si vous me voyez vous faire un signal, cela signifie que vous devrez conclure en 20 secondes à peu près.
    Comme tout a été expliqué, nous passerons à M. Topas, qui présentera sa déclaration liminaire.

[Français]

     Monsieur le président, chers membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à parler aujourd'hui, au nom de B'nai Brith Canada, du rôle du Canada dans la promotion d'une solution à deux États.

[Traduction]

    B'nai Brith est la plus ancienne organisation des droits de la personne du Canada et la voix de la communauté juive de base du Canada. Notre organisation, fondée en 1875, est déterminée à éradiquer le racisme, l'antisémitisme et la haine sous toutes ses formes tout en défendant les droits des personnes marginalisées.
    Je pense qu'il convient de dire dès le début que, alors que nous portons aujourd'hui le coquelicot pour nous rappeler les sacrifices des femmes et des hommes canadiens qui se sont battus pour défendre notre mode de vie, c'est l'État d'Israël aujourd'hui qui est le rempart contre ceux qui veulent déchirer le tissu de la société canadienne et occidentale.
    La présentation de B'nai Brith devant le Comité arrive à un moment crucial alors qu'Israël, la seule démocratie du Moyen-Orient, fait face à une menace existentielle sur de nombreux fronts. Les recommandations que nous présentons aujourd'hui sont essentielles si le Canada veut contribuer de manière utile à tout cadre possible à deux États qui garantit la paix et la stabilité démocratique.
    Notre première recommandation est que le gouvernement du Canada appuie de manière non équivoque les efforts d'Israël pour éliminer toutes les menaces extraterritoriales qui compromettent actuellement sa sécurité. Le défaut de l'Occident de protéger Israël a miné les efforts de paix antérieurs, forçant Israël à se livrer à des actions de défense répétées contre des menaces terroristes. À moins et jusqu'à ce que le réseau terroriste appuyé par l'Iran soit démantelé, une solution à deux États demeure dangereusement irréaliste. Les entités terroristes dans les territoires palestiniens ont démontré à maintes reprises qu'elles ne recherchent pas la paix durable. Jusqu'à ce que tous ces groupes terroristes, y compris le Jihad islamiste palestinien, le Front populaire pour la libération de la Palestine et le Hamas, qui sont tous désignés comme des entités terroristes par le Canada, soient retirés de façon permanente, il ne peut exister de cadre viable.
    En passant, la semaine dernière, au cimetière militaire national d'Israël au mont Herzl, je me suis de nouveau personnellement recueilli sur les tombes de nombreux braves soldats des Forces de défense israéliennes qui ont donné leur vie dans la lutte contre la guerre défensive qui a cours, une guerre ni commencée ni souhaitée par Israël. Ceux qui réclament des cessez‑le‑feu doivent se souvenir que ces groupes n'ont jamais manqué de violer chaque cessez‑le‑feu convenu par Israël.
    À l'extérieur des territoires palestiniens, l'axe de résistance du régime iranien — le Hezbollah au Liban, Ansar Allah au Yémen et les milices chiites en Irak — présente une menace tout aussi dangereuse. Tout soutien véritable doit commencer par la neutralisation de ce réseau que l'Iran a orchestré pour déstabiliser la région et prévenir la paix.

[Français]

     Notre deuxième recommandation est que le gouvernement du Canada s'engage à bâtir un cadre démocratique dans les territoires palestiniens avant de reconnaître un État palestinien. L'Autorité palestinienne, dirigée par Mahmoud Abbas, qui est aujourd'hui à sa vingtième année d'un mandat de quatre ans, manque à la fois de légitimité démocratique et de gouvernance efficace.
(1110)

[Traduction]

    Reconnaître un État palestinien sans gouvernance démocratique stable et éprouvée risque de remplacer les échecs observés ailleurs, l'Afghanistan servant d'exemple de mise en garde.
    La situation en Afghanistan témoigne des dangers d'une reconnaissance prématurée sans structures démocratiques. Il en résulte un État où la gouvernance non démocratique et les influences terroristes ont entraîné des violations graves et répétées des droits de la personne, en particulier contre les femmes. Les difficultés de l'Afghanistan servent d'avertissement contre la reconnaissance de tout État où la gouvernance et la responsabilité démocratiques sont tout à fait absentes.

[Français]

     Le rôle du Canada pour garantir que les territoires palestiniens établissent une gouvernance réelle et démocratique est essentiel. Seules les réformes qui rétablissent les processus électoraux et la responsabilisation au sein de l'Autorité palestinienne contribueront à une paix durable.

[Traduction]

    De plus, une solution à deux États ne peut réussir sans un État palestinien qui reconnaît le droit d'Israël d'exister. La Palestine doit d'abord cesser son éducation haineuse toxique financée par l'UNRWA qui s'adresse aux jeunes. Elle doit d'abord cesser son programme « payer pour tuer » qui récompense le terrorisme. Tout cadre demeure terriblement prématuré si ces conditions préalables sont absentes.
    En conclusion, le gouvernement du Canada ne doit pas reconnaître un État palestinien de manière prématurée, et il doit éviter les erreurs observées dans des cas comme l'Afghanistan, où les échecs de gouvernance et les influences terroristes ont entraîné une instabilité prolongée et de profondes souffrances humaines.

[Français]

    Le soutien du Canada, en tant que chef de file de la consolidation de la paix internationale, est essentiel pour établir une base démocratique et sûre pour toute solution susceptible d'apporter la stabilité et la paix aux Israéliens et aux Palestiniens.

[Traduction]

    Merci, monsieur Topas.
    Nous passons maintenant à M. Koffler Fogel.
    Vous avez cinq minutes pour présenter votre déclaration liminaire, monsieur.
    Monsieur le président, je vous remercie, ainsi que tous les membres du Comité, de l'occasion qui m'est offerte de prendre part à cette discussion cruciale.
    Je m'appelle Shimon Fogel et je suis le président-directeur général du Centre consultatif des relations juives et israéliennes, qui représente plus de 150 000 Canadiens juifs par l'entremise de fédérations juives partout au Canada.
    Le CIJA est une organisation nationale non partisane dont la mission est de préserver et de protéger la qualité de la vie juive au Canada en défendant ses valeurs et ses principes.
    Aujourd'hui, nous vous offrons notre point de vue concernant les travaux du Comité sur la contribution du Canada à la promotion d'une solution à deux États. Ce sujet a des ramifications importantes pour la politique étrangère du Canada, la sécurité d'Israël et la stabilité du Moyen-Orient. Bien que le CIJA soutienne une solution pacifique à deux États, ce résultat doit être obtenu par des négociations directes.
    Votre comité a entendu et entendra de nombreux témoins, reflétant un large éventail de points de vue sur la question, et c'est très bien ainsi. J'aimerais toutefois faire une mise en garde. Si la communauté juive, comme tant d'autres, n'est pas monolithique, sur la question du soutien à l'État juif, il y a un consensus presque universel. Nous avons déposé auprès du greffier deux projets de recherche indépendants qui soulignent ce point. Aussi, de manière imagée, il y a plus de Canadiens qui croient que la Terre est plate que de Juifs qui s'opposent à la création d'un État juif indépendant sur la terre de nos ancêtres.
    Les études confirment que seuls 3 % des Juifs canadiens qui s'identifient comme tels rejettent la légitimité d'Israël. Il serait trompeur d'accorder de l'importance à une opinion aussi marginale et de conclure que, du point de vue de la communauté juive, il existe une ambivalence significative quant à la place d'un État juif au sein de la famille des nations.
    Il importe de rappeler que le statut d'État palestinien n'est pas un droit absolu. Selon les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité des Nations unies, le statut d'État est conditionnel et assujetti, d'abord, à la reconnaissance de la sécurité d'Israël et de la légitimité de l'État juif sur notre terre ancestrale. Ces résolutions prévoient des négociations directes pour atteindre ces conditions avant que la communauté internationale ne puisse accorder le statut d'État. Une reconnaissance prématurée contredit cette formule fondamentale et crée, dans les faits, un précédent déstabilisant.
    La capacité d'agir palestinienne est un autre élément essentiel. À l'heure actuelle, les dirigeants palestiniens font preuve d'un manque inquiétant de responsabilisation. La création d'un État ne peut être considérée comme un droit; elle doit se fonder sur les obligations d'une gouvernance responsable. Reconnaître un État palestinien sans d'abord mettre en place les structures d'une gouvernance efficace risquerait de créer d'emblée un État en faillite. Cela n'aiderait pas les Palestiniens à avoir un avenir meilleur et plus stable, mais les condamnerait plutôt à une instabilité permanente.
    La création d'un État exige que les questions essentielles, comme les frontières, les droits sur l'eau, le réseau électrique, le statut de Jérusalem et la demande palestinienne d'un droit au retour, soient d'abord réglées. Reconnaître un État sans aborder ces questions fondamentales par la négociation équivaudrait non seulement à négliger la fonctionnalité pratique, mais aussi à condamner les deux parties à un conflit durable. Sans accords négociés sur ces points, la fin du conflit envisagée est inatteignable. Une approche unilatérale laisserait toutes ces questions en suspens, sans mécanisme mutuellement convenu pour les traiter.
    Le Canada a toujours eu une approche équilibrée de ce conflit, soutenant des processus de paix fondés sur la négociation, la reconnaissance mutuelle et des garanties de sécurité. S'éloigner de cette approche en adoptant une voie unilatérale risque d'enhardir des éléments problématiques en renforçant l'idée que la paix peut être obtenue sans compromis. En soutenant un engagement direct, le Canada défend, de ce fait, ses valeurs d'équité, de sécurité et d'engagement en faveur d'une paix véritable.
(1115)
    En conclusion, monsieur le président, le CIJA estime que le Canada doit demeurer engagé en faveur d'une résolution équitable et négociée du conflit israélo-palestinien.
    Nous espérons qu'un jour il y aura un État palestinien dynamique et démocratique. Mais prétendre qu'il existe aujourd'hui un État palestinien viable est inexact, irresponsable et fondé sur des demi-vérités préjudiciables. Seule une véritable solution à deux États, obtenue par des négociations directes, peut garantir une paix, une sécurité et une stabilité durables au Moyen-Orient.
    Je vous remercie de l'occasion qui m'a été donnée d'exposer notre point de vue. Je suis prêt à répondre aux questions des membres du Comité.
    Merci, monsieur Koffler Fogel.
    Nous passons maintenant à Mme Kowalski.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs de m'avoir invitée ici aujourd'hui.
    Je m'appelle Maytal Kowalski et je suis directrice exécutive de JSpaceCanada. JSpaceCanada est une organisation juive sioniste en faveur d'Israël, de la paix et de la démocratie qui milite pour que le Canada fasse la promotion de la solution à deux États en Israël et en Palestine et la préserve, tel que la défend notre communauté de Juifs canadiens.
    J'ai moi-même la double citoyenneté canado-israélienne. Je suis née à Winnipeg et suis déménagée en Israël avec ma famille, en 1994. Je tiens à vous remercier de tenir ces réunions à un moment aussi crucial.
    Même si certains diront qu'à peine plus d'un an après les horribles attentats terroristes du Hamas le 7 octobre, ce ne soit pas le moment de parler de paix, j'aimerais citer l'ancien premier ministre israélien Ehud Olmert, qui a déclaré la semaine dernière que l'utilisation du 7 octobre comme argument contre la création d'un État palestinien est une « grossière erreur ». C'est précisément à cause du 7 octobre et parce qu'une solution à deux États est le meilleur moyen de vaincre le Hamas et d'autres entités terroristes que nous devons agir maintenant.
    Depuis février dernier, JSpaceCanada milite pour que le Canada reconnaisse l'existence d'un État palestinien à côté de l'État d'Israël, se fondant essentiellement sur les frontières de 1967. C'est aussi ma recommandation aujourd'hui, mais je veux m'assurer qu'il ne s'agit pas simplement d'un geste symbolique. Par conséquent, je vous demande, en plus de la reconnaissance et de concert avec celle‑ci, d'envisager les mesures suivantes.
    S'engager à poursuivre des sanctions continues contre les entités, organisations et individus qui jouent un rôle direct dans le financement et le soutien de la violence des colons et dans l'annexion dans la Cisjordanie occupée, y compris les politiciens et les fonctionnaires israéliens extrémistes comme Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich.
    Soutenir et renforcer l'Autorité palestinienne comme solution de rechange au règne du Hamas en dépit des projets du ministre des Finances Smotrich de faire tomber l'Autorité palestinienne en retenant les recettes fiscales perçues par Israël.
    Enfin, faire pression sur l'Autorité palestinienne pour qu'elle s'engage à adopter une série de réformes visant à renforcer la démocratie et la gouvernance, à lutter contre la corruption, à revoir son programme de paiement des prisonniers et à réagir à l'incitation.
    Nous savons d'après divers sondages que la majorité des Juifs canadiens, des Israéliens et des Palestiniens appuient toujours une solution à deux États et une solution diplomatique — et non pas militaire — au conflit. Il ne peut y avoir de solution à deux États sans que l'un de ces États soit celui de la Palestine. La position de longue date du Canada est qu'un État palestinien serait reconnu dans le cadre des négociations finales sur le statut directement entre les Israéliens et les Palestiniens.
    Lorsque ma famille est déménagée en Israël en 1994, c'était au plus fort des accords d'Oslo, quelques mois seulement avant que le traité de paix entre Israël et la Jordanie ne soit signé. À l'époque, lorsque les Israéliens et les Palestiniens ont participé aux négociations, peut-être qu'une telle politique était sensée, mais nous ne sommes plus en 1994, et la paix ne semble plus une option.
    L'Israël que j'ai connu et aimé en tant qu'enfant a été pratiquement sacrifié pour des visions messianiques et ultranationalistes de l'extrême droite israélienne. Nous devons reconnaître non seulement ce que nous voulons voir dans l'avenir, mais ce qui existe maintenant. Ce qui existe maintenant est une réalité à un État, où, entre la mer Méditerranée et le Jourdain, un État, Israël, contrôle l'entrée et la sortie des personnes et des biens, supervise la sécurité et a la capacité d'imposer ses décisions, lois et politiques à des millions de personnes sans leur consentement.
    La politique étrangère du Canada doit s'adapter à l'Israël qui existe maintenant. C'est précisément ce que signifie être un ami d'Israël. Si j'empêche mon ami de boire et de conduire, je ne le punis pas: je le sauve. En ce moment, en aidant ce gouvernement israélien dirigé par le premier ministre Benjamin Netanyahou, non seulement nous permettons à notre ami de boire et de conduire, mais nous l'encourageons à prendre quelques verres de plus avant de prendre le volant.
    Après tout, lorsque le propre parti de Netanyahou, le Likoud, parraine un événement pour encourager le ré‑établissement dans le Nord de Gaza, pour citer un ami de JSpaceCanada, le père d'un otage de 20 ans, Nimrod Cohen, détenu à Gaza depuis plus d'un an: « Ils veulent jeter les bases de leurs campements sur le corps de mon fils. »
    Je suis ici pour représenter une grande partie de la communauté juive canadienne qui se sent connectée et attachée à Israël, qui croit au droit d'Israël d'exister comme foyer démocratique sécuritaire du peuple juif et, précisément à cause de cet attachement et de cette connexion, qui s'oppose au gouvernement israélien actuel et veut voir son gouvernement canadien prendre des mesures vigoureuses.
    Vous entendrez peut-être aujourd'hui des raisons pour lesquelles une étape comme la reconnaissance du statut d'État palestinien est risquée. La recherche de la paix comprendra toujours des risques inhérents, mais ceux‑ci ne l'emporteront jamais sur les risques de vivre éternellement par l'épée et d'être dans un état de guerre perpétuel.
    Lors d'un rassemblement avec l'organisation pour la paix Peace Now, en Israël, situé à quelques kilomètres de l'endroit où je vivais au début des années 2000, un homme appelé Haim Perry a exposé une affiche qui disait: « Mieux vaut vivre avec les douleurs de la paix qu'avec les souffrances de la guerre. » Haim Perry a été pris en otage par le Hamas le 7 octobre. En juin dernier, il a été assassiné par le Hamas en l'absence d'une entente sur la libération d'otages et d'un accord de cessez‑le‑feu qui auraient pu le libérer.
    À la mémoire de Haim Perry, de Hersh Goldberg-Polin, de Vivian Silver, de Judih Weinstein et de bien d'autres, y compris des dizaines de milliers de Palestiniens dont nous n'avons jamais pu connaître le nom, nous devons nous engager sur la voie de la paix par tous les mécanismes possibles, comme la reconnaissance de l'État palestinien, même si c'est douloureux, parce qu'il vaut mieux vivre avec les douleurs de la paix qu'avec les souffrances de la guerre.
    Merci.
(1120)
    Merci beaucoup, madame Kowalski.
    Nous allons maintenant passer aux questions des membres. Le premier est M. Marty Morantz.
    Vous avez quatre minutes.
    Je vous remercie tous de vos présentations.
    Monsieur Fogel, c'est la politique de longue date du Canada qu'une solution à deux États est la meilleure voie à suivre, tant qu'elle est négociée et que les deux États vivent côte à côte dans la paix et la sécurité.
    Craignez-vous que la motion, qui est l'objet des présentes délibérations, cherche à changer cette position de longue date?
    Je pense que cette étude reflète un vif désir d'apporter une contribution, de rompre le cycle qui existe actuellement et de trouver une voie à suivre que, je pense, nous partageons tous: un État palestinien indépendant et un État juif sécuritaire qui vivent côte à côte. Cependant, la tentation de faire quelque chose est compensée par la considération des conséquences de ces actions.
    Je m'inquiète du fait que la soif de contribuer se fasse au détriment d'une contribution réfléchie.
(1125)
    Serait‑il juste de dire que la résolution de cette question doit passer par le soutien populaire parmi les citoyens israéliens et le peuple palestinien? Autrement dit, lorsque vous reconnaissez unilatéralement un État palestinien sans consulter adéquatement les deux parties et vous assurer qu'elles sont toutes les deux d'accord, ne courez-vous pas le risque de perpétuer le cycle de la violence?
    Je pense que c'est exactement le cas. En l'absence d'une adhésion des intervenants directs, il n'y a pas de solution imposée de l'extérieur que l'on peut soutenir à long terme, voire, en fait, à court terme. Je pense que l'édification du camp de la paix dans la société israélienne et palestinienne est une première mesure essentielle. Nous n'en sommes pas là. Peu importe à quel point nous le voulons, nous n'avons tout simplement pas en ce moment l'électorat favorable à une solution à deux États, dans une communauté ou dans l'autre.
    Si l'État palestinien devait être reconnu unilatéralement sans négociation ou soutien populaire, quelle serait la probabilité que ce type de résolution fonctionne?
    Je pense qu'elle est nulle.
    Pour les Palestiniens, il n'y aurait pas d'incitatif à régler toutes les questions en suspens avec Israël. Du point de vue d'Israël, cela serait considéré comme récompenser le terrorisme. De plus, il n'y a pas de voie vers la paix durable entre les deux.
    C'était ma question suivante.
    En ce qui concerne cette idée de récompenser le terrorisme, des otages sont toujours détenus, alors j'ai du mal à voir toute adhésion à la reconnaissance unilatérale par le Canada d'un État palestinien chez la grande majorité des Israéliens alors que leurs enfants sont toujours détenus en otage par des terroristes à Gaza.
    Ne le croyez-vous pas?
    Je suis d'accord avec vous.
    Merci.
    Nous passons maintenant à la Mme Fry.
    Madame Fry, vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être venus ici.
    Je pense que nous comprenons tous qu'Israël a le droit de se défendre contre l'attentat terroriste du 7 octobre. Toutefois, nous constatons également l'horrible situation humanitaire à Gaza. La plupart d'entre nous pensent… Pourquoi voulons-nous condamner des générations d'enfants à la haine et à la peur, pendant toutes ces années?
    Le Canada a toujours soutenu une solution à deux États, et j'entends bon nombre d'entre vous dire que c'est important. J'aimerais savoir, si quelqu'un peut me le dire — monsieur Fogel, par exemple — pourquoi cela fait 75 ans qu'on l'a proposée pour la première fois. Or, cela ne s'est pas fait. Quelles sont les difficultés? Quels sont les obstacles? Nous avons eu Shimon Peres. Nous avons eu Olmert. Beaucoup de gens soutenaient cette solution et la voulaient. Il y a eu Oslo. Quelle est la raison pour laquelle cette solution n'a jamais été adoptée?
    De mon point de vue, il n'y a qu'une seule cause, et c'est le rejet de la légitimité de l'État juif. Les États arabes dans la région l'ont rejetée avant l'établissement d'Israël en 1948. Les dirigeants palestiniens l'ont rejetée lors de cinq propositions de paix successives exhaustives et parrainées à l'international par les États-Unis, en commençant par Oslo, mais cela ne s'arrête pas là non plus.
    D'ici à ce que les Palestiniens puissent comprendre et accepter la légitimité d'un État juif en tant que voisin, nous condamnons la région à un conflit.
    Merci. Je n'ai qu'une courte période pour les questions et les réponses.
    Madame Kowalski, vous avez fait quelques déclarations très claires ici aujourd'hui. Que doit‑il se passer avant…? J'entends tout le monde dire que nous…
    La question est la suivante: que se passe‑t‑il? Si le Canada prend unilatéralement une décision avant que les choses ne changent, cela fera‑t‑il dérailler complètement le processus de paix? Que pensez-vous des conditions qu'il faut réunir? C'est ce que nous étudions ici. Quel est le processus pour aller de l'avant avec une solution à deux États négociée?
    Donnez-moi — rapidement, si vous le pouvez — environ cinq conditions qui doivent exister.
(1130)
    Bien sûr.
    Je pense que la première est la reconnaissance d'un État palestinien par le Canada.
    Je tiens à dire très rapidement que c'est important parce que, dans des négociations passées, à Oslo et dans d'autres négociations, nous parlions non pas d'un État palestinien, mais bien d'une région autonome ou de ce que beaucoup de diplomates et de dirigeants désignent comme un « État diminué ». À l'heure actuelle, 146 pays reconnaissent l'État palestinien. À mesure que ce nombre de pays augmente, cela signifie que, lors des prochaines négociations, nous ne négocierons pas pour savoir s'il s'agit d'un État ou d'autre chose; nous négocierons, maintenant que nous savons qu'il s'agit d'un État, afin de savoir à quoi il ressemble et comment nous pouvons le concrétiser.
    Pour ce qui est de savoir comment rendre cela possible, les réponses sont toutes là. Nous avons vu ces processus se produire dans le passé. Nous savons que ce qui manquait était un leadership; un leadership israélien et palestinien capable de s'adresser à sa population et d'expliquer pourquoi ces étapes sont importantes.
    Je dirais également qu'il faut comprendre que, bien qu'il y ait une responsabilité des deux côtés — à la fois pour les Israéliens et les Palestiniens, et pour leurs dirigeants de faire un meilleur travail à ce sujet et de se trouver à la table de négociation — nous devons reconnaître que, dans la situation actuelle, Israël possède la majorité des cartes et est en position de force. Israël est un État souverain, alors que les Palestiniens sont des apatrides divisés entre le leadership du Hamas et de la Palestine. Nous devons pouvoir reconnaître où les systèmes fonctionnent à leur avantage et à leur désavantage, et exercer une pression sur les deux peuples en conséquence.
    Merci.
    Où en suis‑je, monsieur le président?
    Vous avez dépassé le temps.
    Dépassé le temps?
    Je m'excuse. Je vous remercie.
    Pas de souci.
    Nous passons ensuite à M. Bergeron pour quatre minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins d'être des nôtres et de nous présenter leur éclairage sur cette importante question.
    Dans son témoignage, Mme Kowalski a dit une chose qui est ma profonde conviction depuis toujours, à savoir que les peuples d'Israël et de Palestine ne peuvent continuer à vivre dans un état de guerre permanente. Ce n'est pas possible. Elle l'a probablement dit de façon beaucoup plus éloquente que j'aurais pu le faire.
    La semaine dernière, un ancien ambassadeur canadien en Israël, M. Jon Allen, a soutenu que la plus grande menace pour Israël provenait de l'intérieur et que ce pays ne serait jamais en sécurité tant et aussi longtemps qu'il continuera d'occuper les territoires du peuple palestinien en Cisjordanie et à Gaza. Depuis des années, la colonisation se poursuit, particulièrement en Cisjordanie, en contravention du droit international. En 1977, 1 900 colons juifs étaient établis en Cisjordanie; en 1997, on parlait de 331 000 colons juifs; et, en 2022, 741 000 colons juifs étaient établis en Cisjordanie.
    Monsieur Fogel, vous avez insisté sur les conséquences découlant du fait de faire quelque chose. Vous êtes-vous penché sur les conséquences découlant du fait de ne rien faire? En effet, depuis 1977, rien n'a bougé, et cela a mené au massacre du 7 octobre et à la boucherie qui a présentement cours à Gaza et au Liban.
    Selon vous, quelles sont les conséquences découlant du fait de ne rien faire?

[Traduction]

    Je vous remercie de poser la question. Elle est importante.
    Je ne dis pas que nous ne devrions rien faire. Je pense que le Canada devrait investir dans l'Autorité palestinienne, comme Mme Kowalski l'a suggéré. Je pense que nous devrions investir des ressources — pas seulement des finances, mais aussi de l'expertise — pour aider à bâtir, et aussi pour enchâsser, les institutions de la société civile qu'un pays doit avoir pour subvenir à ses propres besoins et gouverner efficacement dans l'avenir. Ce type d'investissement…
    Ramener la société palestinienne pour qu'elle puisse se considérer comme une partie prenante de la protection d'une chose — c'était l'attente des accords d'Oslo, mais elle s'est effondrée en 2000 — est un élément fondamental pour aller de l'avant.
(1135)

[Français]

     J'ai l'impression qu'une chatte n'y retrouverait pas ses petits. Ici, je m'adresse à M. Topas, puisque, le 7 octobre 2023, Richard Robertson, directeur de la recherche et du plaidoyer de B'nai Brith Canada, a déclaré ceci: « Il est inconcevable que le Canada continue de maintenir des relations diplomatiques avec l’Autorité palestinienne, qui a du sang de citoyens canadiens sur les mains. »
    Comment peut-on dire, d'un côté, qu'il faut investir dans l'Autorité palestinienne et, de l'autre, qu'il faut qu'on coupe toute relation avec l'Autorité palestinienne?
     Pour répondre à la question, il faut d'abord rappeler qu'Israël a évacué ses citoyens de Gaza il y a de cela presque 20 ans et qu'il y a laissé toutes les installations. Il a fourni de l'eau et de l'électricité à Gaza, et le peuple de Gaza a voté pour le Hamas. Qu'est-ce que cela a donné? Peu importe le nombre de fois qu'on ordonne un cessez-le-feu, qu'est-ce qui se passe? Ces gens ne les respectent pas, et maintenant, on demande ce qu'on va faire pour investir dans le monde palestinien? On a déjà essayé de le faire. On a mis en place toutes sortes de mouvements et on a conclu des ententes, qui ont été violées l'une après l'autre.
    Il me reste peu de temps.
    Alors, contrairement à M. Koffler Fogel, vous suggérez que nous n'investissions pas dans l'Autorité palestinienne.

[Traduction]

    Je crains de devoir vous interrompre. Vous avez maintenant dépassé le temps.
    Nous passons ensuite à notre ami, le député du NPD.
    Vous avez quatre minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
     D'entrée de jeu, je veux simplement mentionner que j'ai eu la chance d'aller visiter Israël et la Palestine à quelques reprises, notamment en tant que parlementaire. Pour un Québécois et pour un démocrate, être témoin de ce qui se passe en Cisjordanie est une expérience bouleversante. On parle d'occupation militaire, de points de contrôle, d'humiliations quotidiennes et d'enfants qui se font arrêter par des soldats et qui sont jugés par des cours militaires.
    Je pense aussi à l'arrogance des colons extrémistes, notamment à Hébron, au vol de terres et à la destruction de villages, de fermes, d'oliviers et de troupeaux, parfois. Je suis revenu de là avec l'image d'une botte militaire qui écrase sans fin un visage humain. Ce n'est pas un bon sentiment. Je pense qu'on doit agir, comme pays, pour changer cette situation.
     Madame Kowalski, qu'est-ce que vous pensez de ce qui se passe en Cisjordanie, qui est occupée depuis un an, à peu près, et de la violence des colons? Pensez-vous que le gouvernement Nétanyahou utilise la guerre à Gaza en partie pour accélérer l'annexion de la Cisjordanie?

[Traduction]

    Nous avons perdu l'interprétation en anglais pour la dernière partie.

[Français]

    Pensez-vous que le gouvernement Nétanyahou utilise la guerre à Gaza pour accélérer l'annexion de la Cisjordanie?

[Traduction]

    Merci beaucoup de poser la question, et merci beaucoup de témoigner de ce qui se passe dans la Cisjordanie occupée à l'heure actuelle.
    Les ministres extrémistes du gouvernement de Netanyahou utilisent absolument le couvert de la guerre à Gaza pour faire avancer l'annexion. Nous avons vu une augmentation du nombre d'avant-postes — je crois qu'il y a environ 43 avant-postes illégaux, selon le gouvernement israélien — depuis le 7 octobre. En comparaison, au cours des dernières années, entre 1996 et 2023, le nombre d'avant-postes illégaux par année était de sept environ en moyenne. Vous pouvez constater l'accélération.
    Nous voyons également qu'il ne s'agit pas seulement d'une question d'annexion de facto, dont on a beaucoup parlé. Nous passons maintenant à ce que de nombreux experts appellent une annexion de jure. Le ministre des Finances Smotrich a fait passer l'administration de la Cisjordanie d'une administration militaire à une administration civile. Il l'a lui-même reconnu: « Ce sera plus facile à avaler dans le contexte international et juridique », c'est‑à‑dire qu'ils n'auront pas à dire qu'ils font une annexion.
    Je dirais également que, depuis le 7 octobre, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires a documenté près de 1 600 attaques par des colons israéliens contre des Palestiniens. Nous avons également vu les autorités israéliennes détruire, confisquer et voler environ 1 800 structures palestiniennes en Cisjordanie ou en forcer la démolition.
    J'aimerais également noter que, dans un…
    Il ne me reste qu'une minute.
    Dans ce contexte de l'accélération de l'occupation et de l'annexion illégales de la Cisjordanie, quelle est l'importance de reconnaître l'État de la Palestine?
(1140)
    Il est essentiel que nous le fassions et que nous agissions à cet égard maintenant, parce que, comme je l'ai mentionné dans ma déclaration liminaire, nous faisons face à une réalité à un État, et chaque jour, nous la voyons se rapprocher de plus en plus. Il nous reste toujours la possibilité d'une solution à deux États. Cette possibilité n'est pas disparue, et la solution à deux États existe toujours, mais chaque jour que nous attendons pour prendre des mesures audacieuses rend cela plus difficile.
    Merci beaucoup, monsieur Boulerice.
    Nous passons maintenant à M. Aboultaif. Vous avez trois minutes.
    Merci pour les trois minutes généreuses.
    Bienvenue aux intervenants.
    Monsieur Topas, vous posez deux conditions préalables à l'État palestinien qui cherche à s'engager dans une solution à deux États: la première, c'est que l'Iran cesse son ingérence, essentiellement, dans les affaires du Moyen-Orient de la manière dont il le fait, et la deuxième, c'est que pour atteindre une paix durable, nous devons retourner à la table de négociation.
    Les accords d'Oslo ont créé une plateforme pour ce faire. Où les accords d'Oslo ont-ils échoué, et comment pouvons-nous retourner en arrière? La guerre va finir par se terminer, et tout le monde va retourner à la table de négociation. Pensez-vous qu'Oslo soit toujours la plateforme qui nous permette d'aller de l'avant et de commencer une négociation vers la paix durable?
    Je ne peux pas vous dire si Oslo est le cadre approprié pour une paix durable dans le cadre de telles négociations, parce que chaque négociation qui a eu lieu à Oslo a échoué, absolument chacune d'elles.
    Monsieur Fogel, mon collègue témoin, a été très clair en disant qu'il y a eu cinq négociations de ce genre. Si vous lisez les textes de Bill Clinton, il a essentiellement dit très clairement que la Palestine a eu une occasion, mais que ses représentants s'étaient retirés de la table parce que leur propre peuple les aurait tués s'ils étaient allés de l'avant avec cette option.
    Mais la solution est une solution à deux États.
    Monsieur Fogel, pourriez-vous vous prononcer sur la même question? Pensez-vous qu'Oslo soit une bonne base pour poursuivre les négociations en faveur d'une paix durable? Je pense que c'est l'essentiel.
    Vous avez reconnu la condition selon laquelle une solution à deux États doit être mise en place; autrement, où irons-nous à partir d'ici?
    Je pense que tous ceux autour de la table qui appuient la solution à deux États seront d'avis que le cadre de référence de base, tel qu'il a été présenté à Oslo, renferme toujours ce qui pourrait probablement favoriser la résolution du conflit: la reconnaissance mutuelle, les garanties de sécurité, les échanges de terres visant à accueillir et à justifier une partie de la présence israélienne sur les territoires, mais aussi à indemniser les Palestiniens en leur donnant un autre territoire pour que ce soit parfaitement équitable. Je pense que ces paramètres sont toujours là.
    L'avantage que nous avons aujourd'hui, que nous n'avions pas à Oslo, c'est le fait que le monde arabe est de plus en plus rassuré. Grâce aux accords d'Abraham, c'est‑à‑dire aux traités de paix avec la Jordanie, avec l'Égypte, et l'intérêt pour l'Arabie saoudite, les pays voisins sont susceptibles d'appuyer toutes les négociations directes des parties.
    Merci.
    Nous passons ensuite à M. Oliphant. Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins aujourd'hui. Votre présence ici démontre la diversité des opinions et celle de la communauté juive au Canada, et l'importance que le Canada et Israël ont pour vous.
    Je souhaite commencer par souligner très clairement que j'appuie sans équivoque l'État d'Israël, le peuple d'Israël et son droit à la paix et à la prospérité. En revanche, cela ne signifie pas nécessairement que je soutiens inconditionnellement le gouvernement d'Israël ni que je soutiens un gouvernement quelconque à moins qu'il protège ses propres citoyens, la primauté du droit ainsi que l'ordre international fondé sur des règles.
    Je dirais la même chose pour l'État de la Palestine, qui a été reconnu par 146 pays, à l'exception du Canada, qui ne l'a pas encore fait. J'appuie sans équivoque un État de la Palestine. Cela ne signifie pas nécessairement que je soutiens son gouvernement actuel, mais je sépare ces questions, comme je le fais au Canada. Je n'appuie pas tout le temps les gouvernements au Canada non plus, mais cela ne signifie pas que je ne suis pas loyal au Canada.
    Ce sur quoi j'aimerais toutefois être clair, c'est que la question dont nous traitons au sein du Comité est celle de la reconnaissance de l'État de la Palestine par le Canada. La question n'est pas de savoir si oui ou non nous allons le faire. Nous allons le faire. Le Canada va le faire. J'en suis convaincu, donc la question est quand nous allons le faire.
    Nous avons parlé d'une reconnaissance négociée. Je n'ai pas fait d'études en histoire, mais je ne pense pas que la reconnaissance d'États fasse toujours l'objet de négociations. Le Canada reconnaîtra unilatéralement, comme nous l'avons toujours fait, les États. Nous l'avons fait avec le Kosovo et nous l'avons fait avec bon nombre d'endroits.
    Quels sont les avantages et les inconvénients de la reconnaissance de l'État de la Palestine pour le Canada, et pour le peuple juif au Canada? En quoi est‑ce que cela est susceptible d'aider les choses?
    J'aimerais commencer par Mme Kowalski.
(1145)
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, je pense que pour ce qui est des avantages, la question est non pas de savoir quand les négociations vont avoir lieu ni de savoir sur quoi porteront les négociations, c'est‑à‑dire si nous négocions la création d'un État ou autre chose, mais plutôt que nous allons effectivement négocier.
    L'État de la Palestine existe. Il est largement reconnu. La question portera sur ce à quoi il ressemblera, et les négociations porteront en fin de compte sur ces questions de statut final.
    Pour ce qui est des inconvénients — et je pense que c'est quelque chose que j'ai mentionné dans mon témoignage —, nous ne voulons pas que ce soit simplement un acte symbolique. Nous voulons nous assurer que d'autres mesures suivront, et c'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai mentionné non seulement les mesures que nous pouvons prendre pour renforcer l'Autorité palestinienne, mais aussi les mesures que nous pouvons demander à Israël de prendre, car, comme vous l'avez dit, nous pouvons appuyer l'État d'Israël pour finalement nous rendre compte que le gouvernement agit au détriment de cet État.
    Des mesures précises doivent découler de cette reconnaissance. Vous avez raison, et je partage votre avis. Je pense qu'en ce qui concerne la reconnaissance unilatérale de l'État de la Palestine, il n'y a aucune raison pour laquelle le Canada ne devrait pas le faire, et aucune raison de penser qu'il n'y aura aucun avantage, alors nous devrions aller de l'avant avec cela.
    Sans vouloir offenser qui que ce soit, en ce qui concerne la communauté juive, la première chose que je veux dire, c'est que nous ne sommes pas en cause, ici. Ce qui est en cause, ce sont des millions de Palestiniens apatrides qui ont attendu très longtemps pour que justice soit faite et pour être traités comme un peuple souverain sur leurs terres ancestrales. C'est nous, les sionistes juifs, qui devrions être les premiers à le reconnaître. C'est notre histoire. Plus que quiconque, nous devrions avoir de l'empathie pour le fait qu'ils le veuillent.
    Je pense que la seule façon de faire partie de l'histoire, que la communauté juive canadienne fasse partie d'une histoire, c'est qu'il nous incombe, à mes collègues à la table et à moi de ne pas susciter la peur au sein de la communauté juive en évitant d'imaginer des scénarios cauchemardesques au sujet de ce que signifie cette reconnaissance. À la place, nous devrions expliquer à notre communauté en quoi cette reconnaissance est bénéfique et qu'elle favorise l'avènement d'une solution à deux États, étant donné que nous savons que la majeure partie de notre communauté appuie une solution à deux États.
    À part cela, l'accent doit vraiment être mis sur les Palestiniens.
    Je soupçonne que mon temps est écoulé.
    Merci.
    Oui, c'est exact.
    Nous passons maintenant à M. Bergeron.
    Vous avez une minute et 30 secondes, monsieur.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
     Je reviens à vous, monsieur Topas, parce que je n'ai pas eu le temps de finir de vous poser ma question.
    Contrairement à M. Fogel, vous ne proposez pas que nous accordions encore davantage d'attention à l'Autorité palestinienne; vous proposez plutôt que nous coupions les liens avec celle‑ci.
    Ai-je bien compris ce que vous avez dit?
     Je ne pense pas avoir dit cela.
    M. Robertson l'a dit.
    C'était à la mi-novembre, n'est-ce pas?
    Oui, absolument.
     Je vous rappelle que, le 7 novembre, soit 30 jours après le 7 octobre, la synagogue où je suis chantre à Dollard‑des‑Ormeaux avait été la cible d'un attentat à la bombe.
    Dans ce contexte, je pense que ce qu'a dit M. Robertson, à ce moment-là, était très approprié. Si on commence à amener ici tout ce qui se passe là‑bas, le tissu social de notre société sera horriblement déchiré.
     Qu'en est-il de l'Autorité palestinienne?
    Donnez-moi une raison pour laquelle la présente Autorité palestinienne, dirigée par Mahmoud Abbas, en est à sa vingtième année au pouvoir alors que le mandat était de quatre ans.
    On ne peut pas entretenir les relations avec...
    Il faut que des structures soient d'abord mises en place. Je parle ici de démocratie et de responsabilité, entre autres. Or il n'y en a pas.
(1150)

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons passer à M. Boulerice. Vous avez une minute et 30 secondes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Madame Kowalski, j'aimerais que vous nous parliez des communautés et des mouvements avec lesquels vous travaillez en Israël, y compris les groupes comme Standing Together et Peace Now, qui manifestent pour demander un cessez-le-feu et un accord de paix ainsi que la libération des otages, évidemment.
    Quel genre de travail faites-vous auprès de ces groupes?

[Traduction]

    Merci de la question.
    Il est très important de reconnaître qu'il existe de nombreuses organisations, telles que Standing Together et Peace Now, sur le terrain en Israël et en Palestine, qui font ce travail.
    Nous travaillons en étroite collaboration avec les Israéliens et les Palestiniens, car nous pensons que toute solution que nous souhaitons proposer doit émaner, en tout premier lieu, du terrain. Leurs efforts pour faire avancer la solution à deux États, l'État de la Palestine, l'égalité et l'équité sur le terrain, aident énormément à faire progresser la façon dont les Israéliens et les Palestiniens voient leur avenir.
    J'aimerais un petit peu aborder la question autour de l'appui dont jouit la solution à deux États, lequel peut être attribué à bon nombre de ces organisations de la société civile. Nous devrions reconnaître que lorsqu'on leur a donné un cadre énonçant ce à quoi une solution à deux États ressemblerait, les Israéliens et les Palestiniens ont tous deux... Selon bien des témoignages que j'ai entendus, le nombre de personnes qui appuient la solution à deux États en Israël et en Palestine est très faible. En revanche, ce n'est pas le cas lorsqu'on donne un cadre, et qu'on explique en quoi consiste la solution à deux États. On observe un soutien plus grand, et on voit que la majorité des gens soutiennent la solution à deux États.
    Il est important que nous continuions de travailler avec ces organisations de la paix, comme celles qui travaillent sur le terrain, car la société civile... Les approches ascendantes et descendantes sont toutes deux nécessaires.

[Français]

     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Morantz. Vous avez trois minutes.
    Monsieur Topas, j'aimerais saisir l'occasion pour vous parler d'antisémitisme. Certes, l'antisémitisme était déjà présent au Canada avant le 7 octobre 2023, et c'est toujours le cas après cette date.
    Depuis lors, certaines choses très laides se sont passées dans nos rues, nos écoles, nos synagogues, nos institutions et nos quartiers. D'un côté, notre gouvernement affirme qu'Israël a le droit de se défendre, mais d'un autre côté, il vote pour adopter une motion qui vise à l'empêcher de se défendre en interdisant les permis d'armes.
    Notre gouvernement finance l'UNRWA, alors qu'il a été établi que l'agence a été complice des attaques du 7 octobre, et qu'elle enseigne aux enfants palestiniens à haïr les Juifs depuis des dizaines d'années. C'est ce qui a largement contribué au problème.
    Nous étudions maintenant... Étant donné que notre ami Israël a été la cible d'attaques, que 1 200 Israéliens ont été brutalement abattus et que bien plus encore ont été brutalement retenus en captivité, le gouvernement libéral pense que c'est une bonne idée d'étudier la reconnaissance unilatérale d'un État palestinien.
    Pensez-vous que les politiques de ce gouvernement en particulier exacerbent le problème d'antisémitisme qui existe dans les rues canadiennes?
    Ce qui me fait davantage peur, c'est qu'au lieu d'avoir une clarté morale unilatérale face à ce problème, nous cherchons la perfidie morale dans tous les segments de différents ordres de gouvernement. Je ne vais mentionner aucun ordre de gouvernement en particulier.
    Nous savons ce qui se passe dans les rues de Montréal et dans les rues de Toronto. Nous savons ce qui se passe dans nos campus. Nous savons, en gros, que le chat est sorti du sac, et malheureusement, des gens sont en train de profiter de la situation.
    Si vous écoutez l'une des chaînes américaines, vous savez que nous avons une organisation très intéressante à New York appelée Tunnels to Towers. C'est une organisation qui a été créée pour protéger les veuves et les familles des personnes qui ont péri dans les attentats du 11 septembre et les veuves et les familles des soldats qui sont morts en combattant pour les États-Unis dans des guerres, et ainsi de suite, contre la pauvreté abjecte.
    Ce que nous faisons ici, en finançant l'UNRWA, ce n'est pas la même chose que fait Tunnels to Towers: c'est tout l'inverse. En gros, nous donnons de l'argent à l'UNRWA, et l'agence utilise cet argent pour financer, promouvoir et permettre le terrorisme. Cela ne doit plus continuer. C'est un manque total de clarté morale.
    Quant à ma question, est‑ce que vous pensez que ces politiques libérales aident à contenir l'antisémitisme, ou est‑ce qu'elles exacerbent le problème?
    Encore une fois, nous sommes non partisans, donc je ne peux pas caractériser les actions de quelque parti en particulier. Tout ce que je peux dire, c'est que, ce qui se passe en ce moment, à tous les paliers du gouvernement, est inacceptable.
(1155)
    Merci.
    Pour la dernière question, nous allons passer à M. Alghabra. Vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier nos témoins de leur présence et de leur témoignage.
    Monsieur Fogel, j'aimerais revenir sur quelque chose que vous avez mentionné. Vous avez dit que les Palestiniens n'ont pas le droit à un État palestinien. Je suis curieux de savoir ce à quoi, selon vous, ces millions de Palestiniens apatrides dans la bande de Gaza et en Cisjordanie, auraient droit. Est‑ce qu'ils ont droit à quelque chose?
    Je ne pense pas l'avoir formulé de cette façon. Je pense avoir dit que mon avis s'alignait sur les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité des Nations unies, selon lesquelles l'État de la Palestine n'est pas un droit automatique, et que ces deux résolutions sous-tendent des attentes. En toute franchise, nous ne pouvons pas choisir ce qui nous plaît. Soit nous nous engageons auprès de l'ONU, soit nous ne le faisons pas. Si nous nous engageons auprès de l'ONU, nous devons suivre la formule qu'elle a présentée afin de créer l'État de la Palestine.
    Je pense que les résolutions 242 et 338 reconnaissent que si les Palestiniens avaient accepté le plan de partition en 1947, ils auraient eu le droit absolu de devenir un État. Étant donné qu'ils l'ont refusé, et qu'ils ont déclaré la guerre à l'État juif émergent, ils ont compromis la possibilité d'avoir ce droit de devenir un État. Et, aujourd'hui, en toute franchise, ils doivent le mériter.
    Je suis désolé, monsieur Fogel, mais je n'ai que trois minutes, et la première moitié est déjà écoulée.
    J'aimerais revenir sur ma question, car je suis toujours curieux de connaître votre opinion. Alors, nous pouvons débattre de ce que l'ONU dit sur le droit de créer un État palestinien ou non, mais je veux connaître votre opinion, car je pense qu'il n'est pas de notre ressort de donner ce droit à la Palestine ou de le retirer. Ce n'est pas à nous de récompenser qui que ce soit ou de ne pas le faire. Les Palestiniens ont droit à leur État palestinien. Cela ne préjuge pas de l'aboutissement des négociations, ou des frontières, ou du droit au retour, et ainsi de suite.
    Les Palestiniens ont‑ils le droit d'avoir leur propre État? À l'heure actuelle, ils sont apatrides.
    J'appuie sans équivoque l'État de la Palestine, dans la mesure où il découle de négociations directes.
    En passant, chaque fois que le Canada a reconnu un État, la reconnaissance était unilatérale. Les gens utilisent le terme « unilatéral » à tort et à travers; c'est toujours unilatéral, car c'est une admission. Encore une fois, cela n'empêche pas ni ne préjuge le résultat d'une négociation. Donc, il y a une certaine sagesse à affirmer le droit des Palestiniens au statut d'État, particulièrement aujourd'hui alors qu'il semble que nous nous éloignons de plus en plus de la solution à deux États.
    Tout en ayant conscience du temps qui m'est imparti, je dirai simplement ceci: au Canada, des gouvernements successifs ont reconnu à maintes reprises la finalité désirée d'arriver à un statut d'État palestinien qui découlerait de négociations directes. Ce n'est pas la question qui est sujette à débat ici. Ce que le Comité, selon moi, examine, ce sont les conditions et les critères qui aideraient à accélérer la réalisation de cet objectif final.
    Merci. Je vois qu'il nous reste quelques minutes.
    M. Morrice est là. Plaît‑il au Comité de lui accorder la permission de poser une question?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Excellent.
    Monsieur Morrice, vous disposez de deux minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci, chers collègues.
    Nous avons accueilli de multiples universitaires au sein du Comité la semaine dernière qui ont affirmé que, selon leurs perspectives, il ne peut y avoir un chemin vers une solution à deux États si nous ne reconnaissons pas l'existence de deux États. Aujourd'hui, j'ai entendu le même argument de la part de Mme Kowalski, et je vous ai entendu, monsieur Fogel et monsieur Topas, énoncer des conditions que le Canada devrait appliquer avant de reconnaître deux États.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Fogel. Vous avez mentionné la démocratie, donc, devrions-nous cesser de reconnaître d'autres États s'ils ne sont pas assez démocratiques? Par exemple, l'Érythrée n'est-elle pas un État?
    Je vais poser la même question à M. Topas également, qui a avancé que nous devons en premier lieu établir des structures pour assurer une gouvernance efficace avant de reconnaître l'État palestinien.
    Je ne crois pas avoir laissé entendre que la démocratie en elle-même est un critère. Ce que j'ai proposé, c'est de mettre en place des institutions de la société civile qui garantiraient des bons gouvernements durables. Ce sont des composantes nécessaires afin que nous ayons la certitude que l'État serait en mesure de supporter les pressions auxquelles chaque État sur la planète fait face et de perdurer même si ces pressions se font sentir.
(1200)
    Allez‑y, monsieur Topas.
    Si un quelconque État souhaitant être créé a, au fondement de sa constitution, une loi énonçant que ses citoyens, incluant les employés de l'UNRWA, peuvent brûler, violer, mutiler et massacrer des gens, je ne crois pas que cet État est tout à fait prêt.
    Merci beaucoup, monsieur Topas, monsieur Fogel et madame Kowalski. Nous sommes très reconnaissants que vous ayez partagé vos points de vue et que vous nous ayez accordé de votre temps.
    Voilà qui clôt la période de questions.
    Nous allons suspendre la séance pour quatre minutes.
(1200)

(1205)
    Nous poursuivons notre étude d'une solution à deux États.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins. Nous sommes reconnaissants de leur présence avec nous aujourd'hui.
    Nous recevons M. Michael Bueckert, vice-président de Canadiens pour la justice et la paix au Moyen‑Orient.
    Nous accueillons également M. Mohamad Abu Awad, coordonnateur de la Coalition of Canadian Palestinian Organizations.
    Nous sommes également très reconnaissants d'avoir avec nous M. Corey Balsam, coordonnateur national de Voix juives indépendantes Canada.
    Vous disposez chacun de cinq minutes pour vos remarques préliminaires, et à la suite de cela, les députés auront l'occasion de vous poser des questions.
    Nous allons commencer par M. Bueckert. Je vous cède la parole.
    Vous disposez de cinq minutes, mais si je vous fais signe, cela signifie que vous allez devoir résumer rapidement vos commentaires et conclure en 20 secondes.
    Merci, monsieur Bueckert. Vous avez la parole.
    Merci au président et merci au Comité de l'invitation.
    Votre étude porte principalement sur la question de la reconnaissance de l'État de la Palestine par le Canada. Nous croyons que le Canada devrait procéder à cela immédiatement. Bien que la reconnaissance du statut d'État palestinien ne mettrait pas automatiquement fin à l'occupation illicite de la Palestine par Israël, cette reconnaissance renforcerait la capacité des Palestiniens d'obtenir justice dans diverses tribunes internationales, incluant l'Assemblée générale des Nations unies ou la Cour pénale internationale.
    Plus de 145 pays reconnaissent déjà la Palestine, y compris des pays européens comme l'Irlande, l'Espagne et la Norvège. Le Canada peut et devrait faire comme ces pays, et ce, sans plus attendre.
    Cependant, je voudrais parler de manière plus générale de ce que le Canada peut faire pour faire progresser l'autodétermination palestinienne, surtout à la lumière de l'avis consultatif récemment émis par la Cour internationale de justice. Je veux mettre l'accent sur l'autodétermination et pas nécessairement sur une solution à deux États, car il serait irresponsable de ne pas faire mention de la croyance répandue et croissante selon laquelle Israël a délibérément éliminé toute possibilité de créer un État palestinien viable et indépendant.
    Les actions d'Israël sur le terrain cherchent explicitement à empêcher la création d'un tel État et cherche à garantir la domination israélienne de façon permanente, alors que le parlement d'Israël a voté majoritairement contre l'idée d'un État palestinien, en principe et pour toujours. Dans ce contexte, nous devons demeurer ouverts à la possibilité qu'une solution à deux États peut être déjà peu envisageable et que l'autodétermination pourrait être mise de l'avant par d'autres moyens — par exemple, grâce à un seul État partagé et démocratique dans lequel tous les citoyens jouiraient d'une égalité totale.
    Pour être parfaitement clair, cela n'est pas une question qui doit être tranchée par mon organisation ou par le gouvernement canadien. Il revient aux Palestiniens eux‑mêmes de le faire. Cela est clair: pour favoriser l'autodétermination palestinienne, que cela suppose au bout du compte un État ou deux, le Canada doit exercer des pressions significatives sur Israël pour que le pays cesse d'exercer un contrôle illégal sur la vie des Palestiniens et le territoire palestinien.
    Dans son avis récent, la CIJ est arrivée à la conclusion que la présence d'Israël en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et à Gaza est illégale et doit prendre fin le plus rapidement possible. La CIJ a clairement énoncé que le droit des Palestiniens à l'autodétermination est inaliénable et ne saurait être soumis aux conditions du pouvoir d'occupation. En d'autres mots, Israël n'a pas un droit de véto sur les libertés des Palestiniens. Le Canada ne peut plus continuer à permettre à Israël d'utiliser des négociations inexistantes comme justification pour refuser d'octroyer aux Palestiniens leurs droits fondamentaux en tant que peuple.
    Certains membres du Comité ont déclaré à maintes reprises que le Canada soutient une solution à deux États, mais je ne crois pas réellement que cela est vrai, car la politique de longue date au Canada a contribué à la prise de contrôle israélienne illégale des territoires palestiniens et en a profité. De multiples manières, le Canada voit la vie en rose depuis la période des accords d'Oslo au milieu des années 1990, où régnait ce faux espoir que les pourparlers de paix donneraient lieu à une solution à deux États. Durant cette période, le Canada a mis fin à son embargo sur les armes contre Israël, qui avait été imposé sous le gouvernement Mulroney. Le Canada a également signé un accord de libre-échange avec Israël, qui a été étendu à tous les territoires sous contrôle israélien, y compris des colonies dans la Palestine occupée.
    On croyait que ces gestes serviraient de dividende de la paix qui encouragerait le gouvernement israélien à compléter le processus. Par contre, au lieu de promouvoir la paix, cette approche ratée a encouragé Israël à persister dans ses visées annexionnistes. Israël a plutôt accéléré ses activités illégales et colonialistes, a plus que triplé le nombre de colonies et a tué des dizaines de milliers de Palestiniens par la suite.
    Au cours des trois dernières décennies, les politiques pro-Israël du Canada ont donné le feu vert à Israël pour qu'il poursuive son contrôle permanent sur la Palestine et qu'il impose un système d'apartheid à des millions de personnes. Même à ce jour, le Canada s'accroche à cette approche anachronique, qui a lamentablement échoué à nous rapprocher d'un retrait des forces israéliennes, dont la présence même est illégale, de la Palestine. Cette attitude n'a fait que démontrer aux dirigeants israéliens qu'ils ne souffriront d'aucune conséquence pour avoir défié le droit international. Pas même les actes de génocide et de nettoyage ethnique perpétrés par Israël à Gaza ont été suffisants pour pousser le Canada à tenir les dirigeants israéliens responsables de leurs actes.
    Pour briser ce cycle honteux d'impunité et pour respecter les obligations du Canada décrites par la CIJ, des pressions économiques réelles sont nécessaires, notamment des sanctions. Ces mesures devraient au moins inclure un embargo sur les armes complet et bidirectionnel en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales, la suspension de l'Accord de libre-échange Canada-Israël, une interdiction de commercer avec les colonies et l'imposition de sanctions aux dirigeants militaires et politiques israéliens.
    Plus que jamais, il est impératif pour le Canada de faire usage de chaque outil dont il dispose pour sauvegarder les droits du peuple palestinien.
    Merci.
(1210)
    Merci, monsieur Bueckert.
    Nous allons passer à M. Awad.
    Bienvenue. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Par l'entremise du greffier, je remercie le Comité de m'avoir donné l'occasion de témoigner ici aujourd'hui.
    Je m'appelle Mohamad Abu Awad. Je suis né au Canada et j'ai grandi en Palestine. Je suis le coordonnateur de la Coalition of Canadian Palestinian Organizations, qui regroupe 26 organisations d'un bout à l'autre du pays.
    Je voudrais donner mon opinion sincère sur la nature de votre étude en guise de préambule.
    Nous avons tous entendu parler de la solution à deux États. Le Canada a déclaré qu'il croit en la solution à deux États, mais en réalité un État a été unilatéralement reconnu sans qu'on ait à former un comité, sans qu'on ait à mener une étude et sans qu'on ait à faire quoi que ce soit.
    Je vais poursuivre en disant que j'ai le sentiment que nous sommes réunis ici pour fournir de l'espoir dans ces temps obscurs auxquels nous faisons tous face. Le peuple palestinien a désespérément besoin d'espoir en ce moment, plus que jamais, car cet espoir s'estompe. La solution à deux États est mourante. Le peuple palestinien a été déçu à maintes reprises, encore et toujours, par la communauté internationale et malheureusement, par le Canada également.
    Nous ne pouvons pas discuter honnêtement de la reconnaissance de la Palestine sans revenir 75 ou 76 ans en arrière pour parler de la Nakba. Les Nations unies ont dit:
La Nakba a eu de graves répercussions sur les Palestiniens, qui ont perdu leurs maisons, leurs territoires et leur mode de vie. Elle reste un événement profondément traumatisant dans leur mémoire collective et continue à avoir un impact sur leur lutte pour la justice et pour leur droit de retourner chez eux.
    La question principale que nous cherchons à trancher aujourd'hui est la suivante: le Canada devrait‑il reconnaître la Palestine ou pas? Le Canada devrait‑il reconnaître la Palestine maintenant ou devrait‑il attendre à plus tard? Croyons-nous au droit international?
    La CIJ, la Cour internationale de justice, dans sa décision du 19 juillet 2024, est arrivée à la conclusion selon laquelle l'occupation israélienne de la Cisjordanie et de la bande de Gaza est illicite. Si nous croyons en cette cour de justice et que nous croyons au droit international, voici nos obligations et nos responsabilités. La Cour a déclaré:
La Cour considère que les violations, par Israël, de l'interdiction de l'acquisition de territoire par la force et du droit du peuple palestinien à l'autodétermination ont un impact direct sur la licéité de la présence continue d'Israël, dans le Territoire palestinien occupé. L'utilisation abusive persistante de sa position en tant que puissance occupante à laquelle Israël se livre en annexant le Territoire palestinien occupé et en imposant un contrôle permanent sur celui‑ci, ainsi qu'en privant de manière continue le peuple palestinien de son droit à l'autodétermination, viole des principes du droit international et rend illicite la présence d'Israël dans le Territoire palestinien occupé.
    Que devons-nous faire? Cette présence en Cisjordanie est illicite. La Cour internationale de justice l'a déclarée illicite. Quelle est la responsabilité du Canada? Comment pouvez-vous corriger cette illégalité? Si quiconque siégeant au sein du Comité peut prétendre qu'il existe une autre façon de faire qui ne nécessite pas la reconnaissance de la Palestine, s'il vous plaît, dites‑le‑moi.
    Quant à l'argument qui touche le processus de paix, malheureusement, la CIJ a discrédité le message que le Canada a fait valoir auprès de la CIJ, selon lequel les choses devraient se faire par l'entremise de négociations finales sur le processus de paix. En tant que chef de file mondial, le Canada est dans une position aujourd'hui où son message n'est pas entendu à la CIJ.
    Notre position aujourd'hui est que nous traînons derrière 147 pays qui ont déjà reconnu la Palestine. Parmi les 20 pays du G20, neuf ont déjà reconnu la Palestine, et cinq alliés de l'OTAN ont fait de même. Nous sommes assis ici, à dire que nous devrions faire cela. La question qui se pose, c'est: quand allons-nous le faire?
(1215)
    Allons-nous attendre encore 75 ans de négociations pour le faire?
    On me fait signe que mon temps est presque écoulé, j'aimerais donc remercier tout le monde. J'espère que cet exercice nous permettra de corriger le tir et de faire la bonne chose pour le peuple palestinien.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Awad.
    Monsieur Balsam, allez‑y.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président et merci au Comité de me donner l'occasion de vous présenter notre point de vue, aujourd'hui.

[Français]

     Voix juives indépendantes est une organisation nationale qui compte des membres et des sections locales partout au Canada et au Québec. Dans notre diversité, nous nous rassemblons en tant que Juifs et Juives pour la poursuite d'un avenir juste, pacifique et digne pour les peuples palestinien et israélien et contre toutes les formes de racisme, y compris l'antisémitisme et le racisme à l'égard des palestiniens.

[Traduction]

    Alors que nous sommes réunis, aujourd'hui, nous devons souligner que le peuple palestinien, à Gaza, fait face à ce qui est communément reconnu comme un génocide. Il y a deux ou trois jours, les responsables de grandes agences de l'ONU ont dit que la situation dans le nord de Gaza est « apocalyptique », rien de moins. En tant que Juifs et Canadiens, nous vivons selon la règle post-holocauste « plus jamais ». Pour nous, « plus jamais » s'applique à tout le monde, sans exception.
    Nous sommes également motivés par les valeurs juives, en particulier la poursuite obstinée de la justice. J'ai personnellement vécu parmi les Palestiniens, en Cisjordanie, pendant plusieurs années, et je peux témoigner des graves injustices qui y sévissent, et également de la gentillesse et de la bonté du peuple palestinien.
(1220)

[Français]

    Monsieur le président, nous ne pouvons pas permettre que le statu quo perdure, et je dis cela dans l'intérêt de tous les habitants de la Palestine et d'Israël.

[Traduction]

    Depuis trop longtemps, les gouvernements canadiens successifs ont réitéré la position du Canada en matière de politique étrangère consistant à soutenir la solution à deux États, tout en négligeant de prendre quelque mesure concrète que ce soit pour réaliser l'objectif. Au contraire, le Canada est resté pleinement complice, en particulier des efforts déployés par Israël pour établir les « faits sur le terrain » sous forme de colonies illégales d'Israéliens juifs en Cisjordanie et à Gaza, et peut-être très bientôt encore, à Gaza, ce qui empêchera ultimement la création d'un État palestinien.
    Le Canada a refusé de faire des distinctions dans ses échanges commerciaux avec Israël, permettant aux colonies illégales d'avoir un accès privilégié aux marchés canadiens, ce qui va directement à l'encontre de la position officielle du Canada et de la résolution 2334 du Conseil de sécurité. Le Canada a maintes fois voté contre les résolutions de l'ONU favorables aux droits humains fondamentaux des Palestiniens, et il continue de le faire.
    Les Canadiens peuvent également bénéficier d'avantages fiscaux lorsqu'ils soutiennent des organismes de bienfaisance qui, souvent, servent d'intermédiaires à des organisations violentes de colons qui terrorisent les Palestiniens, leur volent leurs terres et même empêchent les camions d'aide humanitaire d'entrer à Gaza. Tout cela est réel.
    Monsieur le président, le Canada doit rectifier le tir. Nous croyons que la reconnaissance de l'État palestinien par le Canada est une étape importante vers la réalisation des droits à l'autodétermination des Palestiniens, ce que le Canada reconnaît et ce que nous soutenons.
    Bien sûr, nous ne pouvons pas nous arrêter là. La reconnaissance de l'État palestinien, à elle seule, sans mesures pour mettre fin à notre complicité et sans pressions sur Israël, aurait un effet négligeable. Si le Canada veut sérieusement soutenir un ordre international fondé sur les règles, il doit agir maintenant et appuyer la reconnaissance du statut d'État en prenant des mesures concrètes à cette fin.
    Voici nos recommandations.
    Premièrement, le Canada doit prendre des mesures immédiates pour mettre fin à sa complicité dans l'occupation et les colonies israéliennes, comme le demande la récente décision de la Cour internationale de justice. Pour ce faire, nous recommandons de faire pour commencer un audit des fonctions politiques canadiennes qui, de diverses manières, directement ou indirectement, entravent davantage, chaque jour, l'autodétermination des Palestiniens et l'État palestinien, sans oublier que le Canada est complice des crimes de guerre auxquels il dit s'opposer.
    Deuxièmement, il faut imposer des sanctions aux responsables et aux institutions d'Israël, au plus haut niveau, en lien avec le génocide en cours et l'occupation militaire ainsi qu'avec le projet de colonisation en Cisjordanie. Le Canada a commencé à imposer des sanctions à quelques acteurs de bas niveau. C'est un pas dans la bonne direction, mais c'est largement insuffisant, compte tenu de l'urgence de la situation actuelle.
    Pour finir, nous recommandons au Canada de ne plus utiliser la définition antipalestinienne de l'« antisémitisme » du guide de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste publié la semaine dernière, d'une part parce que c'est une perversion absolue du combat important contre l'antisémitisme et d'autre part parce qu'elle refroidit les efforts essentiels de sensibilisation aux droits humains des Palestiniens, à ce moment critique.

[Français]

    Monsieur le président, le gouvernement canadien a un rôle important à jouer pour favoriser les conditions d'une autodétermination viable pour le peuple palestinien. Nous devons aux Israéliens et aux Palestiniens de contribuer à créer un avenir dans lequel tous les peuples de la région pourront vivre en paix et librement.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Balsam.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Monsieur Aboultaif, allez‑y. Vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à tous les témoins présents ce matin.
    La paix au Moyen‑Orient se traduit par la paix dans le monde. C'est une très longue histoire. Nous espérons tous que le Canada continuera d'être un chef de file en matière de défense de la paix et de la sécurité dans de nombreux endroits du monde, et en particulier au Moyen‑Orient. Ça fait mal d'entendre le Canada se faire reprocher de ne pas offrir assez de soutien. Le Canada a déployé beaucoup de ressources pour soutenir l'Autorité palestinienne après les négociations d'Oslo.
    Ma question est la suivante: Quelles sont les conditions nécessaires pour une paix durable dans la région? Vous pouvez tous trois répondre à ma question. Je vais commencer par entendre la réponse de M. Balsam, puis celle de M. Awad et celle de M. Bueckert.
    Allez‑y, s'il vous plaît.
(1225)
    Je vous remercie de la question.
    Je crois que l'une des conditions essentielles est la reconnaissance des droits humains et de l'humanité de tous ceux qui vivent dans la région. Je crois que le Canada devrait reconnaître le droit à l'autodétermination des Palestiniens et l'État palestinien, ce qui ferait une différence et faciliterait des négociations plus authentiques entre les deux parties, et qu'il devrait, bien sûr, prendre des mesures pour que justice soit rendue, y compris traiter de la question des colonies et faire pression sur Israël, surtout en ce moment, pour qu'il cesse son massacre à Gaza et dans la région.
    Merci.
    Allez‑y, monsieur Awad.
    Merci beaucoup.
    Je crois que la première chose qui me vient à l'esprit est de respecter le droit international. Il doit y avoir une loi de référence pour permettre l'établissement de la paix. En cas de conflit, nous pouvons nous fier au droit international.
    Je crois que le droit international a fait défaut. La région ne s'en est pas préoccupée. Nous devons commencer à déployer des efforts afin que le droit international soit appliqué et mis en œuvre.
    Je dirais moi aussi qu'il est extrêmement important que le Canada rappelle à Israël ses obligations devant la Cour internationale de justice pour qu'il mette fin à son occupation aussi rapidement que possible. C'est sans condition. Ce n'est pas négociable. C'est demandé par la plus haute cour du monde.
    Le Canada a souvent exprimé son soutien à la cour, mais il n'a pas exprimé son soutien pour ce jugement précis de la Cour internationale de justice. J'aimerais que le Canada dise clairement qu'il s'attend à ce qu'Israël mette fin à son occupation aussitôt que possible et qu'il prenne part à toutes les mesures internationales par l'entremise de l'ONU et d'autres entités pour réaliser cet objectif.
    Nous savons que les accords d'Oslo ont probablement été le moment où les deux parties se sont le plus rapprochées en vue d'un plan pour une paix durable. Croyez-vous que les accords d'Oslo sont encore un bon point de référence pour le chemin à parcourir?
    Comme je l'ai fait tantôt, je vais commencer par vous, M. Bueckert, puis ce sera aux autres témoins.
    Malheureusement, les accords d'Oslo devaient être une période temporaire d'environ cinq ans, et il devait s'ensuivre des négociations finales et la création d'un État palestinien indépendant. Certains des enjeux clés concernant le statut de Jérusalem et les droits des réfugiés ont été, en quelque sorte, mis de côté pour être traités plus tard, et c'était, selon moi, une erreur.
    À l'époque, certains Palestiniens affirmaient que cela aussi était injuste. Les accords d'Oslo ne soutenaient pas un État palestinien, mais une entité palestinienne qui est moins qu'un État, comme l'a dit Rabin. Les accords n'auraient pas permis aux Palestiniens de jouir de la pleine souveraineté, mais, indépendamment des perspectives d'avenir à l'époque, il est clair que, 30 ans plus tard, nous sommes encore pris dans cette période transitoire. C'est clairement un échec. Il doit y avoir un nouveau paradigme. Heureusement, la Cour internationale de justice a élaboré un nouveau paradigme pour que nous agissions maintenant.
    Je suis désolé. Le temps est écoulé, monsieur Bueckert.
    Monsieur Alghabra, c'est à votre tour.
    Vous avez quatre minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins de comparaître devant nous, cet après-midi, et de nous faire part de leurs opinions très importantes.
    Monsieur Awad, j'ai quelques questions à vous poser.
    Certaines des questions posées portent sur le calendrier de la reconnaissance. Pourquoi devrions-nous dévier de la politique canadienne des 20 dernières années consistant à attendre la fin des négociations pour reconnaître l'État palestinien? Pourquoi croyez-vous que nous devrions reconnaître l'État palestinien le plus rapidement possible?
    J'ai parlé, dans mon intervention, de notre responsabilité à l'égard du droit international. Aujourd'hui, plus nous attendons, plus les habitants de la région et plus nous-mêmes, en tant que Canadiens palestiniens, perdons espoir quant au droit international.
    La première réponse à cette question est de savoir si le peuple palestinien a le droit d'être reconnu. Aujourd'hui, en tant que Palestinien, je crois que nous attendons depuis trop longtemps. Nous avons souffert pendant si longtemps. Nous avons payé le prix pour être reconnus.
    Les Palestiniens sont parmi les gens les plus éduqués du Moyen‑Orient. Ils méritent d'être reconnus et de faire partie de la communauté internationale. En retardant notre reconnaissance, le Canada nous assoit, nous, le peuple palestinien, à la table de négociations, dans l'attente d'une négociation en tant que sous-élément de la négociation.
    Si nous attendons l'État final ou l'établissement d'un gouvernement, comment pensez-vous que le peuple palestinien peut mettre en place sa gouvernance et ses institutions, alors que ses territoires sont occupés? Vous ne pouvez pas travailler à partir d'un village, tout comme vous ne pouvez pas aller de Kanata au centre-ville d'Ottawa.
    J'ai grandi là‑bas. Je devais monter sur le dos d'un âne pour me rendre à l'hôpital, près de Jérusalem.
    Merci.
(1230)
    Merci, monsieur Awad.
    Mon autre question pour vous a trait à un point commun qui est soulevé. Aucun de nos alliés, ou très peu de nos alliés, ont franchi cette étape.
    Pourquoi devrions-nous faire cela maintenant? Qu'avez-vous à répondre?
    La semaine dernière, le Japon, qui fait partie du G7, a commencé une étude sur la question de la reconnaissance de l'État palestinien.
    Je crois que, en tant que Canadiens, nous avons tous été inspirés par M. Mulroney, qui s'est levé pour défendre les droits des Sud-Africains. Nous sommes fiers de ce moment. Aujourd'hui, c'est ce Canada‑là que nous voulons voir. Le Canada doit faire le premier pas, redevenir un chef de file mondial et mener le G7 sur ce chemin. Il ne doit pas être le deuxième ou le troisième à le faire.
    À votre connaissance, combien de nos alliés du G20 ou des pays européens ont déjà reconnu l'État palestinien?
    La Palestine est reconnue par neuf pays du G20. L'État palestinien est reconnu par cinq alliés de l'OTAN.
    La France envisage de reconnaître l'État palestinien. L'Angleterre envisage de reconnaître l'État palestinien. Le Japon fait de même. La Belgique aussi.
    Il y a quelques mois, la Norvège, l'Irlande et l'Espagne ont reconnu la Palestine. Au total, 147 pays l'ont fait.
    Dans les dernières 20 secondes restantes, pourquoi serait‑il avantageux que le Canada reconnaisse l'État palestinien?
    C'est avantageux pour tous les pays de la communauté internationale de faire respecter le droit international. Nous avons l'obligation de le faire, conformément à la recommandation de la Cour internationale de justice. C'est très avantageux d'établir la paix au Moyen‑Orient et de poser des fondations pour établir la paix, qui commence par la reconnaissance de la Palestine.
    Merci.
    Merci, monsieur Awad.
    Monsieur Bergeron, c'est à vous. Vous avez quatre minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins d'être des nôtres aujourd'hui et de nous éclairer encore une fois de leurs lumières par rapport à cette question importante, mais pas nécessairement évidente, sur laquelle nous nous penchons présentement.
    Sans crainte de me tromper, je crois que tout le monde autour de cette table croit à la solution à deux États. C'est parce que je crois à la solution à deux États que je crois qu'il faut reconnaître l'État de la Palestine. Par le fait même, je reconnais à Israël le droit d'exister, et le droit d'exister de façon sécuritaire.
    Tout à l'heure, M. Fogel a laissé entendre qu'une partie congrue de la communauté juive au Canada n'était pas d'accord sur cette idée qu'Israël a le droit d'exister, et de façon sécuritaire.
    Monsieur Balsam, croyez-vous qu'Israël a le droit d'exister, et de façon sécuritaire?
     Je vous remercie de votre question.
     Oui, nous soutenons le droit d'Israël d'exister en paix et en sécurité, mais aucun pays n'a le droit de pratiquer l'apartheid ou d'être un État oppresseur.
    Bien sûr, les droits de la personne sont pour tout le monde. Cependant, c'est là le problème de ces propos. L'idée de reconnaître le pays comme un pays juif, c'est comme reconnaître que le Canada est un pays de Blancs ou de chrétiens. Non, absolument pas. C'est pour tout le monde. Ainsi, ce que nous appuyons, c'est l'égalité et les droits de la personne pour tout le monde. Il peut y avoir deux États, un État, trois États ou même une confédération. C'est cela qui est important.
     Vous êtes en train d'ajouter un élément à l'équation, parce que l'étude que nous menons présentement s'appuie sur l'idée de la solution à deux États, c'est-à-dire la Palestine d'un côté et Israël de l'autre.
    Croyez-vous à la solution à deux États?
(1235)
     Nous croyons que la reconnaissance de l'État palestinien est la première étape. Après, il pourra y avoir des négociations pour trouver une solution à la situation actuelle. Comme vous l'avez dit, il y a 700 000 colons en Cisjordanie. Aujourd'hui, les peuples sont très mélangés, et ce, des deux côtés. Par exemple, 20 % de la population d'Israël est palestinienne.
    Comment peut-on garantir les droits de tout le monde? Ce n'est ni à moi ni à nous de le dire, mais je crois que donner un peu de pouvoir aux Palestiniens, dans les négociations, est extrêmement important.
    Il faut donc reconnaître la Palestine, Israël étant déjà reconnu, et engager des négociations entre les deux États. Ces négociations pourraient mener à Dieu sait quoi.
    Vous avez expliqué que, en contradiction directe avec son discours officiel et la résolution 2334 du Conseil de sécurité, le Canada a refusé de différencier ses relations commerciales avec Israël, permettant ainsi aux colonies juives dans les territoires occupés de bénéficier d'un accès privilégié au marché canadien.
    En clair, qu'est-ce que cela veut dire sur le plan du droit international, selon vous?
     Cela signifie qu'on va à l'encontre du droit international. Les décisions du Conseil de sécurité sont souvent bloquées par les États‑Unis, mais celle-là a été adoptée. Il est clair et net qu'on devrait différencier des produits des colonies d'Israël.

[Traduction]

    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Green. Vous avez quatre minutes, monsieur.
    Monsieur Awad, je tiens à vous remercier de comparaître devant nous.
    Je suis conscient que cette année a été dévastatrice pour tous les Palestiniens, y compris les Palestiniens du Canada, qui sont exposés à un génocide continu, pas seulement à Gaza, mais aussi dans le système d'apartheid des territoires occupés de la Cisjordanie.
    Vous avez parlé des conséquences juridiques et du devoir moral. J'aimerais que vous preniez un moment pour nous parler de l'expérience de la communauté palestinienne canadienne, cette année, et de ce que représenterait pour eux la reconnaissance de l'État palestinien par le gouvernement du Canada.
    Je vous remercie de m'inclure dans ce témoignage.
    Les communautés palestiniennes du Canada, en particulier dans la dernière année, ont vécu énormément de racisme anti-palestinien. Le racisme anti-palestinien commence par le refus de reconnaître l'existence du peuple palestinien. Le défaut du Canada et d'une partie de la communauté internationale de reconnaître l'État palestinien constitue une première étape envers la non‑reconnaissance des Palestiniens.
    En tant que Palestiniens canadiens, nous avons été victimes de nombreux incidents, et nous avons été témoins de nombreux incidents alors que nous essayons simplement de parler des droits humains et de parler du génocide actuel et du massacre du peuple palestinien. Des médecins sont congédiés de leurs hôpitaux. Des professeurs universitaires ont été interdits de travail, et puis sont retournés au travail parce que... Nous avons tous vu cela, et nous sommes encore dans le même bourbier.
    Donc, selon vous, la reconnaissance de l'État palestinien ici, au Canada, offrirait une sorte de légitimité sociale aux défenseurs des droits des Palestiniens ou, devrais‑je dire plus précisément, aux victimes d'un profond racisme anti-palestinien, ici, au Canada?
    Tout à fait.
    Comment la communauté palestinienne au Canada défend-elle ses droits auprès du gouvernement?
    Vous vous souvenez certainement de la motion de la journée de l'opposition. Évidemment, les néo-démocrates ont proposé la reconnaissance de l'État palestinien. Le gouvernement libéral, à ce moment‑là, l'a retirée de la table.
    Selon vous, comment la communauté a‑t‑elle réagi quand elle a vu son identité et son identité nationale être entièrement effacées de cette motion?
    Même avant les événements du 7 octobre, la communauté palestinienne faisait face à un problème, puisqu'il y a d'un côté la politique et de l'autre, la mise en œuvre de la politique.
    Nous avons formé la Coalition et nous avons publié une étude sur la politique versus la mise en œuvre des politiques. Nous l'avons transmise à presque tous les membres du Parlement. Nous disons sous la rubrique de la politique étrangère de notre site Web que nous croyons à la solution à deux États, mais le Canada reconnaît un État et ne reconnaît pas l'autre.
    Pour ce qui est de la politique versus la mise en œuvre des politiques, nous allons aux Nations unies et nous votons contre nos propres politiques, que nous disons être nos pratiques officielles. La communauté palestinienne a assisté à cela tout au long de l'année, et, lorsque la question de la reconnaissance officielle de la Palestine a été retirée de la table de négociation, la communauté palestinienne entière était furieuse.
(1240)
    En tant que défenseur actif des droits auprès du gouvernement libéral, avez-vous l'impression qu'il vous écoute?
    Encore une fois, la Coalition est impartiale. Nous allons continuer de défendre les droits, de diffuser le message et de faire entendre nos voix.
    Je vais répéter ma question très précisément. Puisque le Parlement actuel est probablement à bout de souffle, pourquoi est‑il urgent que cela soit fait maintenant plutôt que d'attendre une prochaine élection pour le faire?
    Eh bien, premièrement, je crois que nous ne devrions pas trop attendre pour faire la bonne chose, parce que c'est la bonne chose à faire. Cela aurait dû être fait il y a très longtemps.
    Deuxièmement, nous ne voulons pas attendre une autre année, parce que le nouveau Parlement, le nouveau gouvernement qui sera élu, devra partir de zéro.
    Merci.
    Nous allons maintenant commencer le deuxième tour de questions.
    Monsieur Epp, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici.
    En passant, je vais croire sur parole M. Green, qui dit que nous sommes à bout de souffle, mais revenons à nos moutons.
    La paix durable est notre but à tous ici présents. C'est le but de la communauté internationale et des peuples israélien et palestinien. Depuis longtemps, le Canada et ses alliés soutiennent la solution à deux États qui a résulté des négociations entre les deux parties — et ce sera l'élément central de certaines de mes questions —, et cette solution est largement soutenue par les Israéliens comme par les Palestiniens. C'est la seule voie vers une paix durable.
    Ce n'est pas un phénomène limité à Israël ou à la Palestine; c'est un phénomène dont nous avons fait l'expérience ici, dans notre propre pays. Les accords constitutionnels conclus par les dirigeants n'ont pas survécu — pensez à ceux du lac Meech et à celui de Charlottetown —, puisqu'ils n'ont pas réussi à obtenir l'approbation des Canadiens, les habitants de leur pays. Heureusement, ici, nous n'avons pas connu la mort et la destruction que les Israéliens et les Palestiniens ont connues.
    Premièrement, j'aimerais me concentrer sur le mécanisme du soutien populaire. Que vous soyez en accord ou en désaccord avec les décisions du gouvernement israélien, une élection est prévue en 2026, et ce mécanisme permettra au peuple israélien d'exprimer sa volonté par l'entremise d'un processus autodéterminé. J'ai entendu, dans les témoignages d'aujourd'hui, l'importance de l'autonomie.
    Du point de vue du peuple palestinien, qui est le porte-parole de la Palestine? Quel est le processus permettant d'établir une paix durable? Des enquêtes montrent que 40 % des Palestiniens sont en faveur de la solution à deux États. Selon vous, ou selon votre organisation, quel mécanisme permettrait de faire entendre la voix du peuple palestinien afin d'amener la paix?
    Je crois que nous allons commencer par M. Bueckert.
    Eh bien, évidemment, le peuple palestinien est divisé en de nombreuses factions et partis. C'est en partie dû à l'occupation elle-même.
    Nous devons tenir compte du fait que l'Autorité palestinienne, par exemple, n'agit pas dans un système démocratique et est soumise à l'État israélien. Lorsque nous parlons de la légitimité populaire, l'occupation est le principal obstacle à la démocratie palestinienne. Elle la nie clairement.
    Lorsque nous parlons de la légitimité populaire d'un État palestinien pour les Israéliens, nous devons nous rappeler que... Pourquoi Israël aurait‑il un droit de veto sur le statut d'État de la Palestine? Ce n'est pas aux Israéliens de trancher la question, c'est aux Palestiniens de le faire.
    Pour continuer dans la même veine, est‑ce que votre organisation soutient le droit d'Israël d'exister? Je sais que M. Balsam l'a dit. Est‑ce que votre organisation soutient le droit de l'État d'Israël d'exister?
    Nous soutenons le droit de toutes les personnes de vivre en paix et en sécurité. Nous ne soutenons pas les droits des États. Les États n'ont pas de droits, mais oui, évidemment, qu'il s'agisse d'une solution à deux États ou d'un seul État démocratique, nous devons nous assurer que l'option choisie permet à toutes les personnes de vivre dans l'égalité, la paix et la sécurité.
    Monsieur Awad, pourriez-vous nous parler de la voie...
    Gardez votre réponse pour plus tard.
    C'est maintenant au tour de M. Zuberi. Vous avez trois minutes.
    Merci aux témoins de comparaître devant nous dans le cadre de cette étude très importante, et merci à tous les membres de partager le but commun d'assurer la paix et la sécurité pour tous dans la région, peu importe la foi, l'origine ethnique ou la position géographique.
    J'aimerais vous demander quel serait l'espoir suscité dans une société palestinienne, pour les Palestiniens, si et quand le Canada reconnaît qu'il existe un État palestinien et reconnaît l'État palestinien.
    Je crois, monsieur Balsam et monsieur Awad, que vous avez tous deux des liens profonds, de manières différentes, avec des Palestiniens qui vivent dans la région. J'aimerais entendre ce que vous avez tous deux à dire.
    Monsieur Balsam, j'ai cru comprendre que vous avez travaillé pour Oxfam et que vous avez été en poste à Ramallah pendant quatre ans. Pourriez-vous nous parler de l'espoir que cela ferait naître?
    Monsieur Awad, la question est également pour vous.
(1245)
    Merci, monsieur Zuberi.
    Je crois que nous devons faire attention de ne pas créer de faux espoirs. Je crois que la reconnaissance est un morceau important du casse-tête, mais elle doit avoir un peu de mordant. Je crois que le Canada peut jouer un rôle de chef de file ici, à l'échelle mondiale.
    Nous avons donné aux Palestiniens de faux espoirs de nombreuses fois. Pour ce qui est du soutien populaire, il y avait un soutien massif pour la solution à deux États à l'époque des accords d'Oslo, il y a 20 ans, mais ce soutien s'est refroidi alors que le territoire se désagrège.
    La reconnaissance est importante, mais, je le répète, elle doit avoir un peu de mordant.
    Je comprends cela. Vous avez dit, dans votre témoignage, qu'il faut lui donner un peu de mordant.
    Monsieur Awad, pourriez-vous nous dire quelles seraient vos attentes, pour ce qui est de l'espoir, si et quand le Canada reconnaît...?
    Je vais vous répondre d'après mon expérience personnelle, car j'ai vécu en Palestine avant et après les accords d'Oslo. Je me souviens du moment où l'Autorité palestinienne a pris le contrôle de Ramallah. J'ai quitté mon école de médecine en Jordanie pour fêter l'événement dans les rues de Ramallah. Voilà comment le peuple palestinien a réagi au processus de paix.
    Un an plus tard, Yitzhak Rabin, le premier ministre d'Israël, a été assassiné par le parti israélien de droite qui est au pouvoir aujourd'hui. C'est à partir de ce moment‑là que nous avons vu s'amenuiser l'espoir et le processus de paix.
    Selon vous...
    Le président: Il vous reste 10 secondes.
    M. Sameer Zuberi: ... croyez-vous que la paix et la sécurité seraient rehaussées par la reconnaissance?
    Bien sûr.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Bergeron.
    Vous avez une minute et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
     Monsieur Bueckert, votre organisme soutient que la Palestine remplit au moins trois des quatre critères de la Convention de Montevideo pour être reconnue comme un État aux termes du droit international. Le dernier critère est le fait d'avoir un territoire. Vous dites que le territoire de la Palestine n'est pas défini étant donné qu'Israël occupe illégalement les terres palestiniennes.
    Pourquoi conseille-t-on d'opter pour la reconnaissance même si votre organisme constate que la solution de la reconnaissance ne s'attaquerait pas aux moyens substantiels par lesquels Israël occupe les terres palestiniennes et méprise les droits de la personne des Palestiniens?

[Traduction]

    Je suis désolé. J'attendais que les interprètes terminent.
    Oui, il y a un nombre de critères en vertu de la Convention de Montevideo de 1933, pour ce qui est de la reconnaissance d'un État. Il n'est pas nécessaire de tous les respecter. Certains autres critères — être peuplé en permanence, être doté d'un gouvernement, être apte à entrer en relation avec les autres États — sont déjà respectés, et il n'est pas nécessaire de respecter toutes les conditions pour que le statut d'État soit reconnu.
    La question de l'absence de définition de territoire est quelque peu réglée si nous regardons encore une fois la décision de la Cour internationale de justice, qui indique clairement que Jérusalem-Est, Gaza et la Cisjordanie n'appartiennent pas à Israël. Cela serait probablement le fondement de la reconnaissance, et l'on pourrait ensuite négocier les frontières définitives, plus tard, entre deux parties égales, plutôt qu'entre une puissance occupante et une population occupée.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Green.
    Vous avez une minute et demie.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Balsam, j'aimerais vous donner l'occasion de réfléchir à ce que je considère être une contradiction flagrante. Certains disent que la diversité des idéologies et des affiliations politiques des Palestiniens les empêche d'obtenir le statut d'État, alors que certains groupes, y compris des groupes qui ont comparu aujourd'hui, prétendent parler au nom de toutes les personnes juives du Canada.
    Monsieur, j'ai vu que vous et votre organisation étiez parfois dénigrés, et entendu dire que vous n'étiez pas un porte-parole légitime des Juifs, que vous n'étiez pas une voix juive progressiste dans la conversation. Je tiens à vous donner l'occasion de répondre à cela et d'expliquer pourquoi vous croyez que la diversité au sein de notre pays pourrait témoigner d'une plus grande ouverture à la reconnaissance de l'État palestinien que ce que d'autres témoins ont peut-être dit au Comité.
(1250)
    Vous savez, je prends l'accusation d'être dans la frange un peu comme un compliment, car les Juifs en fait sont tenus de porter des tzitzits, qui sont littéralement des franges, qui leur rappellent les commandements de Dieu.
    Je ne veux pas dire que nous sommes une frange, car Voix juives indépendantes et d'autres organismes comme le nôtre connaissent, en fait, une croissance très importante. Depuis le 7 octobre, le nombre de nos membres a pratiquement doublé, et nous comptons maintenant environ 25 sections dans tout le pays, jusqu'au Cap‑Breton. En fait, nous sommes présents d'un bout à l'autre du pays.
    Je crois que c'est d'une manière de délégitimer les voix qui, dans la communauté juive, soutiennent les Palestiniens. Il y a beaucoup d'alarmisme au sein de la communauté — et j'ai grandi avec — et c'est dans le but de maintenir la communauté unie derrière Israël. Il y a beaucoup de financement de différents organismes de bienfaisance ou d'autres choses du genre. Il y a une sorte de récompense pour cela.
    Cependant, encore une fois, oui, l'argument de la diversité est très important à souligner.
    Merci.
    Monsieur Epp, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président. Encore une fois, merci à tous les témoins.
    Dans le même ordre d'idées, j'aimerais juste apporter un peu plus de clarté. La question présentée au Comité et au Canada n'est pas de savoir s'il faut reconnaître la Palestine en tant qu'État. Je crois que cette question bénéficie d'un large soutien, ici. La question plus générale est de savoir quand reconnaître la Palestine en tant qu'État pour que cela conduise à la paix et que la paix bénéficie d'un soutien populaire. C'est à cette question que je veux revenir.
    Je le demande d'abord à M. Awad, puis à vous.
    Je ne pense pas que quiconque demande une position unanime du peuple palestinien sur ces enjeux. Ma question porte plutôt sur le système à mettre en place pour parvenir à une paix durable et permettre à la voix du peuple palestinien d'être reflétée et représentée. Pour l'instant, ce n'est pas ce que je vois.
    C'est pour cela que le résultat des négociations et l'autodétermination doivent venir du peuple palestinien, mais comment y parvenir? L'Iran fait‑il partie du problème?
    Merci de poser la question.
    Je crois que, comme nous l'avons dit ici, nous sommes tous à la recherche d'une solution à deux États et d'une paix durable. Le principal problème, ici, c'est que l'occupation se poursuit. Si le peuple palestinien vit sous occupation et que les gens ne peuvent pas aller de chez eux au travail librement, comment pensez-vous peuvent-ils construire une gouvernance, construire un système politique... C'est pourtant bien ce qu'a fait le peuple palestinien et, nous avons établi des institutions. Je vais vous donner les chiffres.
    Avant 1992 et les accords d'Oslo, de 1967 à 1992, quand les Palestiniens de Cisjordanie étaient sous occupation, le nombre de lits d'hôpitaux n'a pas augmenté sous le régime militaire d'Israël. De 1992 à aujourd'hui, en 30 ans, le nombre de lits d'hôpitaux a quadruplé. Il en va de même pour les chaises dans les écoles.
    Lorsque les Palestiniens se sont fait donner cette sorte d'autonomie, ils ont construit une économie; des ministères; des institutions. Il y a le Conseil national palestinien, qui existe depuis maintenant 60 ans. Il y a le Conseil législatif palestinien. Le peuple palestinien a construit et édifié des fondations sur lesquelles établir un État palestinien, toutefois, avec l'occupation, le nombre de colonies a triplé depuis 1996.
    Même depuis juillet dernier, Israël a, selon l'Associated Press, saisi la plus grande superficie de terres dans la vallée du Jourdain; cinq milles carrés. L'État d'Israël a délivré des permis de construction pour 5 295 unités d'habitation. Quand le Canada et la communauté internationale reconnaîtront la Palestine, le gouvernement israélien saura qu'il s'agit bel et bien de la Palestine et que la colonisation doit cesser.
    Qui parle pour la Palestine?
    Qui parle pour la Palestine? C'est le peuple palestinien.
    Comment?
    Votre temps est écoulé.
    Un député: Donnez-lui une chance, monsieur le président.
    Le président: Monsieur Awad, vous avez 30 secondes et pas une de plus.
    Merci.
    Qui parle pour la Palestine? Le peuple palestinien, qui est éduqué. Il y a un Conseil national palestinien, aujourd'hui. Donnez-nous de l'espace pour respirer, et vous serez émerveillés par le peuple palestinien. Allez dans les universités. Vous y verrez des professeurs prêts à s'asseoir et à élaborer un système complet.
    Cependant, lorsque vous vivez sous occupation, c'est comme si vous étiez ligoté et que vous ne pouviez littéralement même pas vous rendre de Kanata au centre-ville d'Ottawa sans passer par un point de contrôle. Vous voulez que je vous dise qui représente le peuple palestinien? L'Organisation de libération de la Palestine est établie et elle est là. Le Conseil national palestinien est là. Le Conseil législatif palestinien existe. Il a besoin d'une réforme, certes, nous sommes tous d'accord là‑dessus.
(1255)
    Merci.
    La dernière question sera pour Mme Chatel. Vous avez trois minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Les Canadiens observent cette guerre, cette tragédie, et souhaitent voir leur gouvernement défendre la paix et la dignité humaine. C'est très clair. C'est ce que j'entends dans ma communauté. C'est très difficile pour les Canadiens de comprendre comment on peut avancer dans une situation à deux États quand un des deux États n'est pas reconnu. Certaines personnes semblent être prises dans un dilemme. D'un côté, la Palestine ne peut pas fonctionner pleinement comme un État sans être reconnue, de l'autre, elle ne peut pas être reconnue sans démontrer qu'elle fonctionne comme un État. C'est un peu l'œuf et la poule.
    Monsieur Awad, la reconnaissance de l'État palestinien par le Canada pourrait-elle renforcer la position du Canada en tant que promoteur des droits de la personne et de la résolution pacifique des conflits? Le Canada s'alignerait donc sur son rôle plus traditionnel de médiateur dans les conflits internationaux.

[Traduction]

    Merci. J'écoutais l'interprétation.
    Oui, encore une fois, certainement, reconnaître la Palestine remettra le Canada au premier plan de la diplomatie internationale. Cela favorisera la paix. Plus important encore, nous ferons preuve de la diligence requise à l'égard du droit international et de la communauté internationale, que nous avons toujours défendus.

[Français]

     Monsieur Bueckert, vous qui défendez les droits de la personne, croyez-vous que la position du Canada en tant que défenseur des droits de la personne serait renforcée par cette reconnaissance?

[Traduction]

    Oui, je le crois.
    Encore une fois, je ne crois pas que c'est la seule chose que le Canada puisse faire pour montrer qu'il assume un rôle de chef de file.
    Vous savez, la réputation du Canada est affectée par cela. Le Canada a vu deux fois sa candidature au Conseil de sécurité des Nations unies rejetée, en partie parce qu'il a décidé de se ranger du côté des États‑Unis et d'Israël sur ces questions, contre le reste de la communauté internationale. Il y a de fortes chances que cela continue ainsi.
    Les pays qui y ont gagné un siège — l'Irlande et la Norvège — montrent la voie. Ils reconnaissent la Palestine. L'Irlande s'apprêterait à interdire le commerce avec les colonies. Ils ouvrent véritablement la voie et montrent que...
    Ce ne sont pas de grands et puissants pays, mais ils se font un nom et gagnent beaucoup de respect parce qu'ils joignent le geste à la parole. Le Canada pourrait être l'un de ces pays. Il n'est pas obligé d'être le subalterne des États‑Unis ou de faire tout ce que veut Israël. Il peut tracer sa propre voie.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je me demandais si vous pouviez inviter les témoins, au cas où ils auraient des informations supplémentaires qu'ils n'ont pas eu la chance de fournir aujourd'hui, au cours de cette courte période, à les soumettre par écrit pour le bénéfice de l'étude.
    Absolument. Oui, nous invitons toujours ceux qui comparaissent devant nous à faire cela. S'il y a des informations supplémentaires que vous aimeriez présenter, alors n'hésitez pas à le faire. Cela nous sera certainement utile.
    Vous pouvez y aller, monsieur Bergeron.

[Français]

     Monsieur le président, pourrait-on demander le consentement unanime pour accorder deux minutes à notre collègue M. Mike Morrice pour qu'il puisse également...

[Traduction]

    J'aimerais poser une question moi-même, monsieur Bergeron. Je le fais très rarement. Il ne nous reste que deux minutes. Je remercie les témoins d'être venus.
    Comme vous pouvez l'imaginer, tous les témoins que nous avons entendus jusqu'à présent ont affirmé qu'ils seraient tout à fait favorables à un processus de paix au Moyen‑Orient, mais, ce qui me préoccupe, c'est que nous n'avons pas vu de proposition de paix de la part du gouvernement israélien depuis 2008.
    Je me demandais si vous pouviez dire brièvement chacun votre tour pourquoi vous pensez que c'est le cas.
    Comme je l'ai dit dans ma déclaration, le Canada a montré à Israël qu'il n'y a pas de conséquences au maintien du statu quo. Pour Israël, le statu quo est tout à fait acceptable, mais, pour les Palestiniens, il signifie que tout le monde est apatride, dépourvu de droits, dépossédé et soumis à une violence horrifiante. C'est inacceptable. Soit ils ont un État, soit ils ont des droits égaux au sein d'un État démocratique. C'est l'un ou l'autre. Le statu quo n'est pas une option.
    Si le Canada s'engage à la solution à deux États, il doit concrètement chercher à ce qu'elle se réalise, car la plupart des gens croient que l'idée est morte ou qu'elle est mourante.
(1300)
    Merci.
    Vous pouvez y aller, monsieur Awad.
    L'État d'Israël a fait clairement savoir qu'il n'a pas l'intention de respecter la décision de la Cour internationale de justice. Israël a fait clairement savoir qu'il n'a pas l'intention de respecter le droit international. Israël planifie maintenant d'envahir le nord de Gaza et d'y réétablir des colonies. Depuis juillet, Israël a, comme je l'ai mentionné plus tôt, saisi les plus grandes superficies de terres... Je crois que ce que nous constatons présentement, c'est que personne au sein de la communauté internationale ne tient Israël responsable de ces actions.
    Merci, monsieur Awad.
    Vous pouvez y aller, monsieur Balsam.
    Merci.
    Israël n'a aucune raison de proposer la paix dans son propre intérêt, à l'heure actuelle, sans pression. Il n'y a pas de véritable pression, et je crois que les conséquences de cette impunité sont manifestes, présentement, dans la région.
    Pendant très longtemps, Israël avait pour politique de négocier tout en s'assurant, par la construction de colonies, qu'un État palestinien ne serait pas chose possible. Cela a été dit ouvertement à la Knesset par des politiques israéliens. Ils ont reconnu qu'il était acceptable de laisser Tzipi Livni ou une autre personne s'asseoir à la table de négociation, mais que, si le gouvernement acceptait la création d'un État palestinien, ils feraient tomber le gouvernement. Voilà qu'elle a été l'approche.
    Israël doit véritablement ressentir de la pression pour faire bouger les choses.
    Eh bien, merci beaucoup. Nous vous remercions du temps que vous nous avez accordé, de vos perspectives et de votre expertise.
    Avant de vous donner la parole, monsieur Bergeron, j'aimerais m'assurer d'avoir votre consentement unanime pour adopter les budgets du sous-comité, à savoir 1 250 $ pour l'étude sur le ciblage de la société civile au Venezuela, 6 500 $ pour l'étude sur les modèles de migration forcée, 2 750 $ pour l'étude sur la mise en œuvre de l'examen périodique universel du Canada et 5 000 $ pour l'étude sur la répression transnationale dans les démocraties en développement. Tout le monde est‑il d'accord?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Excellent.
    Vous pouvez y aller, monsieur Bergeron.

[Français]

     Monsieur le président, je me permets de vous demander encore de demander le consentement unanime pour permettre à notre collègue M. Mike Morrice de poser des questions.

[Traduction]

    Monsieur Green, a‑t‑il le consentement unanime?
    Vous avez deux minutes, monsieur Green.
    Oh, monsieur Green... Il n'y en a qu'un, ici.
    Des voix: Ha, ha!

[Français]

    Je remercie M. Bergeron et tous mes collègues de me donner cette occasion.

[Traduction]

    Ma question concerne certaines remarques que nous avons entendues.
    Un certain nombre d'universitaires et les trois intervenants présents ont déclaré que le bon moment pour reconnaître l'existence des deux États est maintenant. Une solution à deux États n'existe pas si l'on ne reconnaît pas qu'il y a deux États.
    Dans le groupe de témoins précédent, certains ont avancé l'idée qu'il devrait y avoir des conditions. C'est ce que la ministre des Affaires étrangères a déclaré elle aussi, récemment. J'ai posé la question aux témoins qui avaient avancé cette idée. Je crois que votre point de vue nous serait très utile.
    Monsieur Awad, vous pourriez peut-être commencer? Si j'ai le temps, monsieur Balsam pourrait répondre ensuite.
    Que répondez-vous à ceux qui disent qu'il devrait y avoir des conditions pour que la Palestine soit reconnue en tant qu'État?
    Je rirais à l'idée de mettre des conditions. Nous ne sommes pas immatures. Nous ne sommes pas des enfants ou des bébés. Les Palestiniens sont des gens. Ce sont des professeurs, ils sont intelligents et ils méritent leur indépendance.
    Commencer par des conditions, c'est comme dire à une nation qu'elle n'est peut-être pas prête à devenir un État. Je ne crois pas qu'il existe une nation dans le monde entier qui vous dira que la Palestine est prête à devenir une nation. Chaque nation est un processus évolutif. Permettez-nous d'évoluer.
    Merci, monsieur Awad.
    Vous pouvez y aller, monsieur Balsam.
    Je ne n'ai pas grand-chose à ajouter, excepté que, comme l'a mentionné M. Bueckert, les conditions sont déjà réunies pour la création d'un État palestinien. Je crois qu'ajouter plus de conditions maintenant ne fait qu'empêcher les choses d'avancer.
    C'est excellent.
    Merci encore. Nous vous sommes très reconnaissants.
    La séance est levée.
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