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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 079 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 26 octobre 2017

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Veuillez nous excuser pour le retard. Nous avions un vote.
    Nous n'avons que deux minutes de retard. Veuillez s'il vous plaît prendre place.
    Je vois que nous avons un témoin qui va intervenir par vidéoconférence. Bonjour. Bienvenue.
    Ce doit être très tôt pour vous. D'où nous appelez-vous?
    Je vous appelle de Yellowknife.
    Nous allons commencer notre 79e séance et je vais souligner d'entrée de jeu que nous nous trouvons aujourd'hui sur les terres non cédées du peuple algonquin.
    Les Premières Nations ont accueilli les colons. Elles nous ont aidés à survivre dans ce beau pays et nous ont aidés à bâtir ce pays qui est considéré aujourd'hui comme le meilleur du monde. Cependant, ces mêmes peuples qui ont aidé les colons ont été victimes d'injustices auxquelles nous devons remédier. Les ententes sur les revendications territoriales et les processus que nous utilisons pour réparer les torts et les erreurs du passé sont des outils que nous avons à notre disposition. Voilà pourquoi le Comité, les députés, a décidé d'étudier les ententes relatives aux revendications particulières et aux revendications territoriales globales, et de se pencher sur l'autonomie gouvernementale, les traités modernes et les mécanismes qui fonctionnent et ceux qui ne fonctionnent pas.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous entreprenons une étude portant sur les revendications particulières et les ententes sur les revendications territoriales globales.
    Nous accueillons des témoins ici même devant le Comité et à distance. Bienvenue à notre comité.
    Je vous explique rapidement que vous disposez de 10 minutes ou moins pour présenter vos observations. Ne vous sentez pas obligés d'utiliser les 10 minutes au complet. S'il nous reste du temps, nous aurons la chance de vous poser des questions plus précises car, après vos exposés, nous aurons une période de questions. Je vous ferai signe lorsque vous approcherez de la fin du temps qui vous est accordé, afin que vous puissiez écourter votre présentation.
    Nous avons devant nous Peter Di Gangi, du Secrétariat de la nation algonquine. Il est accompagné du chef Wayne McKenzie de la Première nation de Timiscaming et du chef Harry St. Denis de la Première Nation de Wolf Lake. Le grand chef Herb Norwegian des Premières Nations du Dehcho interviendra par vidéoconférence. Nous étions à Yellowknife lundi et je suis très heureuse que vous puissiez communiquer avec nous par vidéoconférence.
    Si vous n'y voyez pas d'objections, nous allons procéder en suivant la liste qui figure à l'ordre du jour. Herb, voulez-vous prendre la parole en deuxième, puisque vous avez des affaires urgentes qui vous attendent? Combien d'intervenants avons-nous?
(1105)
    Certainement, ça me convient d'être le deuxième.
    Très bien.
    Le groupe qui représente les Algonquins compte-t-il faire une seule présentation?
    Oui, nous allons présenter un seul exposé que je vais partager avec le chef McKenzie.
    Très bien. Allez-y donc. Vous disposez de 10 minutes.
    [Le témoin s'exprime en langue algonquine.]
    Je vais maintenant commencer la présentation de nos observations.
    Bonjour, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité. Bienvenue en territoire algonquin.
    Hier, nous avons fait parvenir un long rapport détaillé au greffier du Comité. Nous vous demandons de le lire attentivement, car il contient des informations beaucoup plus importantes que celles que nous serons en mesure de vous fournir aujourd'hui.
    Nous sommes les porte-parole du Secrétariat de la nation algonquine qui représente trois communautés algonquines, celles de Timiskaming, de Wolf Lake et du Lac Barrière. Nos territoires se situent en Ontario et au Québec, de la source de la rivière des Outaouais à Cabonga jusqu'aux bassins versants de Dumoine, Kipawa et Timiskaming. Vous avez une carte sur laquelle vous pouvez voir le bassin hydrographique de l'Outaouais et l'emplacement de ces communautés.
    Nous revendiquons le titre et les droits ancestraux non cédés sur nos terres traditionnelles qui se trouvent dans le territoire indien établi par la Proclamation royale de 1763. Nous sommes signataires de traités avec la Couronne britannique établis à Oswegatchie et Kahnawake en 1760 et Niagara en 1764, qui reconnaissent notre titre.
    Nos droits n'ont jamais été éteints par traité ni par aucun autre moyen légitime. Il est important d'ajouter que nous n'avons jamais mandaté aucun autre groupe pour négocier nos droits. Beaucoup de dossiers sont restés en suspens au cours des négociations entre notre peuple et le Canada. Timiskaming n'a obtenu une réserve qu'en 1854, mais a perdu par la suite plus de 90 % de ses terres en raison de changements des limites et de cessions plutôt troubles. Au Lac Barrière, il a fallu attendre 1962 pour qu'une réserve soit établie et encore, elle n'était que d'une superficie de 59 acres, ce qui suffisait à peine pour les habitations. Quant à Wolf Lake, même si le Canada a reconnu la bande depuis les années 1800, elle ne dispose toujours pas de terres de réserve pour les besoins communautaires. Nos communautés ont des revendications particulières et globales et, après bien des années d'effort, nous n'avons toujours pas réglé la question territoriale.
    Les politiques fédérales relatives aux revendications constituent un obstacle à la réconciliation. C'est la raison principale qui nous a empêchés de progresser vers la réconciliation. Le plus grand problème est le conflit d'intérêts. Ces revendications sont dirigées contre l'État, mais l'État est à la fois juge, juré et banquier. Grâce à certains efforts, la politique relative aux revendications particulières est devenue plus indépendante, avec la création du Tribunal des revendications particulières, mais le processus des revendications globales ne bénéficie d'aucune indépendance. Le seul espoir d'échapper au conflit d'intérêts du gouvernement est de s'adresser aux tribunaux, mais une telle démarche est coûteuse et risquée.
    La Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones propose une solution pour résoudre ce conflit d'intérêts. L'article 27 stipule que les États doivent mettre en place « un processus équitable, indépendant, impartial, ouvert et transparent... afin de reconnaître les droits des peuples autochtones... et de statuer sur ces droits ». L'article 28 précise que nous devrions recevoir une indemnisation juste pour nos terres. Si le gouvernement a sérieusement l'intention de mettre en oeuvre la Déclaration des Nations unies, il peut commencer par les articles 27 et 28.
(1110)
    Nous avons soulevé ces questions, recommandé des solutions à maintes reprises, et de plusieurs manières différentes, mais rien ne semble changer. Nous voilà lancés dans une autre étude. On peut se demander si cela aura un jour une fin, mais nous n'avons pas le choix de nous présenter ici aujourd'hui, car la résolution de ces revendications est essentielle à notre survie juridique, économique et culturelle.
    Quant aux revendications particulières, le ministre de la Justice et AANDC ont annoncé, en septembre, l'engagement du gouvernement fédéral à revoir en profondeur la politique, en collaboration avec les Premières Nations. Nous nous félicitons de cet engagement, mais nous nous demandons où cela nous mènera. Nous espérons qu'il s'agit d'un effort honnête en vue de mettre en place un processus indépendant qui nous rendra justice.
    Pour l'information du Comité, voici ce que nous recommandons instamment:
    Nous voulons la mise en place d'un processus de revendications véritablement indépendant. Le gouvernement du Canada doit cesser d'évaluer lui-même les revendications qui sont dirigées contre lui. Cela ne fait qu'entretenir une situation de conflit d'intérêts et va à l'encontre de la réconciliation.
    Il faudrait également prévoir d'autres modalités de financement des processus de recherche et de négociation des revendications.
    Entre-temps, pendant que se déroulent les discussions visant à réformer la politique, le Canada devrait accorder des ressources appropriées à AANDC et aux Premières Nations afin d'établir et de négocier les revendications particulières. Les politiques de financement du Canada doivent être modifiées afin de faciliter l'accès aux tribunaux, plutôt que d'élever des obstacles. Lorsque le Canada fait appel de la décision d'un tribunal, il devrait fournir des fonds aux Premières Nations pour leur permettre d'avoir une audience appropriée.
    De mon côté, je vais vous parler un peu des revendications globales. Comme je dispose de peu de temps, je vais m'appuyer sur un examen juridique effectué par Mark Stevenson et Albert Peeling en 2002. Cette étude a révélé les manquements suivants dans le règlement des revendications globales: l'exigence d'extinction du titre ancestral au lieu de la réconciliation; le refus de verser un dédommagement pour les atteintes passées; la demande de supprimer les terres de réserve relevant du paragraphe 91.24 et de les remplacer par des terres en fief simple; des mesures provisoires inadéquates pour protéger les intérêts autochtones jusqu'à la conclusion d'une entente.
    Depuis, le gouffre n'a fait que se creuser entre la politique des revendications globales et la loi, surtout depuis la décision de la Cour suprême dans l'affaire Tsilhqot'in,
    La politique soulève d'autres problèmes. Le financement des prêts place les Premières Nations en situation de vulnérabilité dès lors qu'elles ont des dettes de l'ordre de dizaines de millions de dollars. On insiste pour que les citoyens et les entreprises autochtones renoncent à leurs exemptions fiscales en échange de la signature d'une entente finale. Les règles d'admissibilité manquent de rigueur, comme on peut le constater dans la revendication des Algonquins de l'Ontario qui a permis à des millions de non-Algonquins de négocier nos titres et nos droits.
    Harry.
(1115)
    Oui, madame.
    Je crois que les députés seraient intéressés à vous accorder plus de temps.
    Madame la présidente, la version anglaise de l'avis de convocation prévoit accorder des temps de parole distincts au chef St. Denis et au chef McKenzie. D'après moi, ils devraient tous deux avoir 10 minutes pour s'exprimer.
    Il en a été question ce matin, mais avec l'approbation des membres du Comité, nous pouvons envisager de prolonger la période consacrée aux observations.
    Est-ce qu'il y a des objections? Non.
    Chef St. Denis, pourquoi ne prenez-vous pas le temps nécessaire pour nous présenter vos recommandations une à une? Nous ne voulons pas vous presser, nous pensions que vous aviez un seul exposé.
    S'il vous plaît, prenez votre temps.
    Merci, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité.
    C'est une question très importante, surtout pour la nation algonquine. Cela fait au moins 20 ou 25 ans que nous tentons de faire modifier la politique relative aux revendications globales.
    Nous avons fait plusieurs tentatives au fil des années et présenté différentes recommandations aux divers gouvernements. Avant le gouvernement libéral, il y avait bien sûr le gouvernement conservateur. Jamais nos recommandations n'ont été prises au sérieux ou tout au moins incluses. Nous avons aussi présenté nos doléances à M. Eyford qui est le dernier à avoir examiné la politique relative aux revendications globales. Aucune de nos recommandations n'a été retenue dans son rapport.
    C'est un enjeu très grave, surtout au moment où nos gouvernements parlent beaucoup de réconciliation. Il ne peut y avoir de réconciliation tant que la question des terres ne sera pas réglée. C'est un aspect fondamental de notre culture, de notre langue et le reste. C'est aussi un aspect fondamental de notre avenir en termes de possibilités de développement économique. Comme tout un chacun, nous devons avoir notre mot à dire à propos de ce qu'il adviendra de notre territoire traditionnel.
    Permettez-moi de citer le très honorable premier ministre. Chaque fois qu'il ouvre une réunion avec les Premières Nations, il dit ceci:
J'aimerais souligner que nous sommes sur le territoire de la nation algonquine, gardienne passée, présente et future de ce territoire.
    Comment pouvons-nous être les gardiens présents et futurs de ce territoire alors que nous n'avons pas notre mot à dire et que l'on nous demande d'abandonner notre titre sur le territoire que nous voulons transmettre aux générations futures?
    Voilà exactement ce que dit le très honorable premier ministre. Pour qu'une véritable réconciliation soit possible entre les Premières Nations et le reste du Canada, il est indispensable d'établir un dialogue fondé sur le respect et de reconnaître qu'il s'agit de notre territoire, que nous ne l'avons jamais cédé. Nous n'avons signé aucun traité.
    Nous n'avons autorisé personne d'autre à négocier en notre nom. Les Algonquins de l'Ontario négocient actuellement avec le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Ontario à propos du territoire algonquin situé en Ontario. Or, ce n'est pas parce que nous habitons aujourd'hui dans un territoire situé au Québec que nous n'avons pas des intérêts du côté ontarien. Nous détenons un titre ancestral sur certaines parties de l'Ontario qui font actuellement l'objet de négociations de la part des Algonquins de l'Ontario qui regroupent des personnes chez lesquelles il n'y a eu aucun mariage mixte avec des Algonquins depuis 200 et parfois même 300 ans. Ce sont eux qui vont signer l'abandon de notre titre en notre nom.
    Prenons même le cas des chutes de la Chaudière qui font actuellement l'objet de négociations avec les Algonquins de l'Ontario. Parmi tous ces gens qui comptent environ 7 000 personnes actuellement, seulement 2 000 sont des Algonquins inscrits. Ce sont eux qui vont signer l'extinction du titre.
    Je prends comme exemple les chutes de la Chaudière, Akikodjiwan, qui étaient et demeurent un site sacré pour les Algonquins — tous les Algonquins et pas seulement ceux de Pikwàkanagàn. Nous avons tous fréquenté ce site à un moment ou à un autre dans le passé et nous devrions tous avoir voix au chapitre avant qu'une entente soit signée, surtout à propos du titre du peuple algonquin.
    Je vais terminer ici, car je veux garder du temps pour la période des questions.
    Merci, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité de m'avoir accordé un peu plus de temps.
(1120)
    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole au grand chef Herb Norwegian des Premières Nations du Dehcho.
    Bienvenue.
    Bienvenue au grand Dehcho. Je vous ai entendu dire que vous étiez ici dans le territoire de Yellowknife. Je regrette de vous avoir manqués. Je me trouvais alors à Fort Simpson, pour une audience de l'Office national de l'énergie portant sur un oléoduc qui était endommagé et touché par des fuites. C'était assez important. Je suis désolé de vous avoir manqués.
    Je vous remercie de me donner la possibilité de parler devant votre comité. Je m'appelle Herb Norwegian et je suis le grand chef des Premières Nations du Dehcho. Le territoire du Dehcho se trouve en plein milieu du bassin hydrographique du fleuve Mackenzie. Nous sommes situés à l'ouest de Yellowknife et à l'est de Whitehorse, juste le long de la frontière du Yukon. On compte 10 grandes collectivités sur notre territoire. Notre population est d'environ 4 000 personnes.
    Nous sommes en négociation avec le Canada depuis le début des années 1990. Les Dénés et les Métis de toute la vallée se sont réunis au début des années 1980. À l'époque, nous tentions de conclure une entente sur les revendications avec le gouvernement Mulroney. Les discussions avançaient très bien jusqu'à ce que la question de l'extinction et de la certitude furent mises sur la table. Je pense que les négociations relatives à la revendication étaient achevées à près de 90 %. Lorsque la question de l'extinction nous a été présentée, notre peuple l'a rejetée. Il n'était pas prêt à parler d'extinction. En conséquence, l'accord de principe s'est effondré et plusieurs groupes régionaux se sont détachés et ont conclu des ententes séparées au cours de l'année qui a suivi. Les régions des Tlichos, des Gwich'ins, du Sahtu — diverses composantes de la nation dénée — ont conclu des ententes. Il y a encore deux ou trois autres revendications en attente dans la nation dénée et celle du Dehcho en est une.
    Notre territoire couvre environ 220 000 kilomètres carrés de terres de part et d'autre du Mackenzie. Depuis 1999, nous sommes parvenus à réunir toutes nos communautés et à présenter une position très sérieuse qui est aussi tout à fait unique, puisqu'elle réunit les Dénés et les Métis. Les Métis sont apparentés aux Dénés — ce sont des descendants des Dénés — et nous présentons des positions communes. Plusieurs choses ont vu le jour à la suite des travaux que nous avons effectués et grâce aux orientations excellentes et fermes données par nos aînés.
    Nous avons créé notamment une entente-cadre indiquant la façon dont nous allions procéder, comment nous allions travailler ensemble et quelles seront les règles d'engagement avec le Canada et le gouvernement de type provincial qui serait représenté à la table, dans notre cas, le gouvernement territorial.
    L'entente a été signée. Elle a donné naissance à quelques autres ententes excellentes, notamment l'entente sur les mesures provisoires.
    L'entente sur les mesures provisoires était un document très créatif. Nous voulions nous assurer que les terres soient bloquées. En effet, nous avons pu constater à plusieurs reprises que pendant les négociations avec des Premières Nations, alors que leurs chefs étaient assis à la table, les gouvernements distribuaient littéralement les permis d'utilisation des terres, les licences. Une fois que les Premières Nations étaient prêtes à signer les ententes finales, elles découvraient que la plupart des terres avaient été distribuées à des tiers. C'est parce que nous ne voulions pas que cela se produise que nous avons créé une entente sur les mesures provisoires. L'entente sur les mesures provisoires contenait également un décret ordonnant le retrait des terres dans tout le territoire du Dehcho. Environ 46 % de notre territoire était devenu inaliénable. Nous avons été très occupés.
(1125)
    Nous avons aussi créé un parc national sur notre territoire, près de la frontière du Yukon. Cela nous a bien occupés pendant quelques années, puisque le parc lui-même est contrôlé et géré conjointement par les Premières Nations du Dehcho et Parcs Canada, selon l'entente que nous avons conclue. Nous avons également d'autres ententes concernant des secteurs très sensibles que nous avons conservés grâce à la stratégie des aires protégées. Le processus a été très créatif, mais près de 50 % de notre territoire traditionnel est couvert grâce à une certaine forme de protection.
    Les négociations avec le Canada avançaient très bien, jusqu'en 1996, je crois, quand le gouvernement conservateur est arrivé au pouvoir. À l'époque, nous n'avions pas choisi d'utiliser la politique relative aux revendications globales. Nous avions mis de l'avant une approche très réfléchie. Nous ne voulions pas négocier la cession des terres. Nous voulions négocier la gestion du charbon et la compétence juridique sur les terres.
    Les discussions avançaient très bien jusqu'au moment des élections. Peu de temps après, le négociateur fédéral est arrivé d'Ottawa avec un nouveau mandat et a présenté sa proposition. Il nous a dit littéralement que la nouvelle équipe au pouvoir avait décidé de tout changer. À partir de maintenant, on devait oublier toutes les négociations qui avaient été faites auparavant et entamer un nouveau processus basé sur la politique relative aux revendications globales. Ce fut un choc pour nous, mais nous sommes parvenus à nous en remettre et nous nous sommes penchés sur la politique elle-même. Pendant ce temps, nous avons poursuivi nos efforts afin de faire aboutir la revendication dans son ensemble, puisque nous avions déjà une entente-cadre. Environ 48 % de notre territoire était inaliénable, grâce aux retraits des terres ou aux aires protégées.
    Par ailleurs, nous avions créé un plan d'utilisation des terres du Dehcho. Aujourd'hui ce plan est toujours actif et nous attendons la signature d'une entente. C'était probablement un des premiers plans de ce type au pays, car il s'agit d'un plan public réunissant le Canada, le gouvernement territorial et les groupes des Premières Nations qui s'entendent pour dialoguer et travailler à un plan très détaillé pour notre territoire. Ce plan a été très productif au cours des dernières années. Tout cela était sur la table lorsqu'est arrivée cette nouvelle approche. Nous sommes parvenus à la contourner. Nous avons déclaré que nous ne voulions pas parler d'extinction et que toute la question de la certitude devait être mise de côté, sinon, nous ne bougerions pas. Très rapidement, les choses ont commencé à bouger.
    Cela fait environ une dizaine d'années que nous avons dû nous rajuster. Aujourd'hui, nous continuons à négocier et nous avons mis de côté la question de l'extinction. En ce moment, les négociations sont achevées à 95 %.
    Après les élections fédérales et l'élection du gouvernement territorial, nous étions prêts à poursuivre les négociations et régler les points qui étaient restés en suspens lorsque le gouvernement territorial a demandé de s'asseoir à la table. Depuis pratiquement toujours, nous avons dit que ce n'était pas une question de traité, mais une question de titre ancestral et que la discussion concernant les terres et les droits doit se faire sur une base bilatérale entre le Canada et le Dehcho.
    Nos négociations reposaient sur ces prémisses jusqu'à ce qu'une série d'ententes interviennent dans les Territoires du Nord-Ouest, dont une entente prévoyant que le ministère des Affaires indiennes cède le pouvoir de conclure des ententes au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. Tout à coup, nous nous trouvions face à un gouvernement désireux de faire usage des quelques pouvoirs qu'on lui avait conférés. Les représentants du gouvernement territorial ont cherché des histoires et nous ont dit qu'ils voulaient désormais prendre part aux négociations. Nous nous trouvons dans une sorte de confrontation. Le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest veut s'asseoir à la table. Il ne se passe rien. Depuis quatre mois, il n'y a eu aucun progrès.
(1130)
    Voilà où nous en sommes actuellement. Nous attendons.
    J'ai vu votre signal, mais je pourrais continuer à l'infini, quitte à faire de l'hyperventilation.
    Merci beaucoup.
    Je comprends qu'il peut être difficile de faire en 10 minutes le tour d'une question qui a fait l'objet de négociations pendant plus de 10, 20 ou 30 ans.
    Oui. En effet.
    On nous a demandé quelle était l'utilité de revenir sur une démarche qui avait déjà été entreprise à plusieurs reprises.
    L'objectif est de remettre ce dossier à l'ordre du jour et de le faire examiner par le gouvernement. En tant que parlementaires, nous déposerons un rapport au Parlement et le ministère devra y répondre. Cela place à nouveau le processus au premier plan. Espérons que cela nous permettra de progresser sur le nouveau chemin que nous tracerons ensemble.
    Passons maintenant aux questions.
    Est-ce qu'il y a un autre témoin?
    Non, c'est terminé.
    Je précise que le Secrétariat de la nation algonquine est représenté aujourd'hui par trois personnes. Deux d'entre elles ont présenté un exposé.
    Le premier tour de questions commence avec le député Amos.
    Meegwetch à tous nos témoins du Nord et du Sud. J'aimerais particulièrement remercier nos hôtes algonquins puisque nous sommes sur leur territoire et j'aime la façon dont ils nous ont présenté cela.
    En tant que député du Pontiac, j'ai eu bien entendu l'occasion de parler longuement avec le chef St. Denis. Je crois que notre dernière conversation portait essentiellement sur la question de la réforme réglementaire.
    Chef McKenzie, c'est vraiment agréable de pouvoir aussi parler avec vous aujourd'hui.
    Mon collègue, M. Bossio, a eu la générosité de me céder son temps de parole pour me permettre de poser des questions aujourd'hui. J'espère donc que nous pourrons poursuivre une conversation soutenue.
    J'espère et je souhaite que dans les années à venir, dans un avenir proche et à moyen terme, nous serons en mesure de mettre en place un processus qui permettra l'avènement d'une réconciliation entre la nation algonquine et tous les ordres de gouvernement — provinciaux et fédéral — afin d'entamer un chapitre plus souriant dans les relations entre l'État et les Algonquins. Il y a tant à faire, tant de confiance à rebâtir! La pente est raide et je n'utilise pas cette expression à la légère. Il faudra de la bonne volonté de part et d'autre.
    Mettons de côté l'approche basée sur la politique des revendications globales. Visiblement, elle n'a pas fonctionné pour les Algonquins. Elle n'a pas eu grand succès. Vous avez évoqué de nombreuses critiques et j'approuve un certain nombre d'entre elles.
    J'aimerais demander au chef McKenzie et au chef St. Denis de nous dire à quoi ressemblerait un processus adapté aux Algonquins. Si le gouvernement fédéral devait inventer un processus tout nouveau spécialement adapté aux besoins des Algonquins, quelle forme prendrait-il selon vous? Il est clair qu'il n'existe pas qu'une seule perspective algonquine, mais s'il existait une meilleure façon de procéder, adaptée au contexte de la nation algonquine et au contexte des revendications territoriales qui se recoupent, à quoi ressemblerait-elle précisément?
    Je souhaiterais entendre vos points de vue à ce sujet, mais je vous invite également à les formuler par écrit car j'aimerais vraiment aller au fond des choses afin de définir un processus susceptible de fournir de bons résultats.
    Comme je l’ai dit, pour les Algonquins, l’exigence de prescription du titre de propriété n’est absolument pas envisageable. L’examen d’une revendication doit toujours reposer sur les faits, et ne saurait être le simple tracé à la main de quelques lignes sur une carte. Nous faisons des recherches là-dessus depuis une vingtaine d’années, au moyen de contributions et non pas de prêts, mais dès qu’une revendication est jugée recevable par le gouvernement fédéral, un prêt est octroyé automatiquement. Après la recherche, ou si le gouvernement fédéral ou qui que ce soit demande des éclaircissements, on est obligé d’emprunter de l’argent pour répondre. Je ne pense pas que nous devrions être obligés d’emprunter de l’argent. Le processus devrait reposer totalement sur des contributions et sur les faits.
    C’est très bien d’avoir une revendication générale des Algonquins, mais, si ce n’est pas possible, alors ceux qui sont prêts à négocier, si les conditions conviennent aux deux parties… Vous dites que tout le monde doit faire preuve de bonne foi. En ce qui nous concerne, nous faisons preuve de bonne foi depuis plusieurs centaines d’années. Que devrions-nous faire de plus? À quoi devrions-nous renoncer maintenant pour plaire aux gouvernements? Il est grand temps que les gouvernements tiennent sérieusement compte de nos propres intérêts. Les gouvernements provinciaux ont évidemment un rôle à jouer puisque beaucoup de responsabilités leur ont été transférées, notamment en ce qui concerne les terres et les ressources, dont nous avons besoin. Donc, les gouvernements provinciaux doivent participer au processus et même, dans certains cas, les municipalités. Le gouvernement fédéral devrait jouer le rôle qui lui revient à l’égard du peuple algonquin en intervenant pour amener les gouvernements à la table de négociation, en tenant réellement compte des intérêts des Algonquins, pour une fois. Voilà à quoi devrait ressembler le nouveau processus.
     Mettre en oeuvre une nouvelle politique ne sera pas facile. Il ne peut pas y avoir une seule politique applicable à tout le monde, car nos collectivités sont diverses. C’est déjà le cas entre les collectivités algonquines, et ça l’est encore plus à l’échelle du pays. Les situations sont différentes, les réalités sont différentes, la géographie est différente. Si certains veulent négocier dans le cadre de la politique actuelle, grand bien leur fasse, mais nous ne devrions pas y être forcés. Si nous voulons une politique différente ou une démarche différente, nous devrions pouvoir l’obtenir. Comme l’a dit M. Norwegian, on devrait prévoir des mesures provisoires. On devrait assurer la protection intérimaire des terres et des ressources pendant que les négociations se poursuivent. Des mesures provisoires devraient être acceptées par les gouvernements et les Premières Nations sinon, il ne restera plus rien à négocier. Comme vous l’avez dit, certaines des négociations durent depuis 30 ou 40 ans et ne sont pas plus avancées que lorsqu’elles ont commencé.
    Merci.
(1135)
    Je reviendrai sur cette question à mon prochain tour. Continuez donc, je vous prie. Nous y reviendrons plus tard.
    Je voudrais ajouter un mot sur la composition du peuple algonquin, en parlant de qui a vraiment du sang algonquin dans les veines. Je reviens sur les Algonquins de l’Ontario. Je me suis laissé dire qu’on donnait des cartes de statut à n’importe qui dans ces... on les appelle des bureaux de bande, mais je ne sais pas de quoi il s’agit vraiment. Des gens ont entendu dire qu’ils vont recevoir des terres, et des terrains de choix le long des cours d’eau, avec de l’argent, peut-être même 300 millions de dollars, grâce à leur revendication. Nous devons être certains que ce sont vraiment des Anishinaabemowins, que ce sont vraiment des gens qui portent cet esprit. C’est pour ça que nous sommes ici. Quand nous parlons de ces revendications, nous le faisons pour les générations futures, pas seulement pour nous-mêmes.
    Monsieur le député Viersen.
(1140)
    Merci, madame la présidente. Je remercie nos invités de leur participation à nos travaux. Nous apprécions beaucoup leur contribution.
    Dans les Territoires du Nord-Ouest, les choses semblent parfaitement claires en ce qui concerne les revendications territoriales particulières. Lorsqu’on présente une revendication, les limites territoriales semblent assez fermes. Pourriez-vous nous expliquer, Herb, comment ces limites sont tracées et s’il y a parfois des chevauchements avec d’autres revendications?
    Les limites sont des choses qui existent depuis des milliers d’années. Elles sont le prolongement des unités familiales qui ont exploité leurs territoires, leurs plans d’eau et leurs zones montagneuses. On connaît parfaitement les limites des zones que les familles exploitent. Nous avons été en mesure de définir ces limites et de les relier. C’est ainsi que nous sommes parvenus à délimiter le territoire dehcho.
    Cela dit, une bonne partie de ce territoire mord sur d’autres régions comme le Yukon et des parties de la Colombie-Britannique et de l’Alberta. Le territoire que nous exploitons traditionnellement depuis des milliers d’années va largement au-delà des limites officielles qui ont été tracées.
     Ces dernières années, nous nous sommes contentés de définir ce que nous pouvons protéger dans le contexte actuel. C’est ainsi que nous sommes parvenus à ce que nous appelons une entente sur les mesures provisoires. Dans cette entente, nous avons utilisé les limites existantes, comme la limite en Alberta, la limite en Colombie-Britannique et la limite au Yukon. Ces limites sont devenues nos territoires parce que nous avons pu identifier les terres concernées qui relèvent selon nous de notre juridiction.
     Il y a également d’autres revendications proches de la nôtre qui ont été réglées, comme celle des Sahtus. Dans la région de Norman Wells, ils ont obtenu un territoire dans le cadre de leur accord définitif, qui se trouve au nord de notre revendication. De même, les Tlichos ont une limite à l’est de la nôtre. Nous avons des limites que nous avons pu négocier avec nos Premières Nations voisines. Il y a également quatre ou cinq autres Premières Nations avec lesquelles nous devons encore négocier.
     Les limites sont toujours des questions qu’on règle quand on approche d’un accord définitif. Quand on est sur le point de parvenir à un accord définitif, les limites sont toujours les questions qu’on négocie à la fin. Ce sont normalement des choses qui se règlent très rapidement. Les informations sont là, tout le monde les connaît et on peut avoir une discussion franche et directe.
    Chef St. Denis, avez-vous eu des conversations avec les Algonquins de l’Ontario? Comment parviendrez-vous à un accord au sujet des limites territoriales? Partout où nous allons, cela semble être toujours un gros sujet de discussion.
    J’ai discuté avec le chef Kirby. Je ne traite pas avec les neuf autres prétendus « Algonquins ». Je ne les considère pas comme des Algonquins, parce qu’ils n’en sont pas.
    Nous étudions aussi en ce moment un autre projet de loi, le projet de loi S-3, et des témoins que nous avons entendus ont avancé l’idée de tests génétiques. Qu’en pensez-vous?
    Ce serait peut-être un bon investissement si c’était pour vérifier l’ADN des 7 000 Algonquins de l’Ontario. Je ne sais pas combien il en resterait à la fin, mais je pense que les communautés devraient avoir leur mot à dire à ce sujet. Je pense que c’est tout le peuple algonquin qui devrait prendre la décision parce que c’est lui que cela concerne au premier chef.
     Nous avons eu des réunions avec les gouvernements fédéral et provincial au sujet des Algonquins de l’Ontario; c’était en janvier 2013, si je me souviens bien, Pete, mais ça n’a rien réglé. Bien qu’on nous dise que nos droits seront protégés dans tout nouvel accord qui sera signé, ce n’est tout simplement pas vrai. Même aujourd’hui, certains membres de nos communautés, notamment des membres de la Première Nation Kebaowek, qui réclame la propriété d’un territoire proche de North Bay, sont bousculés et harcelés, alors que ce sont des Autochtones inscrits. On leur dit qu’ils doivent avoir une carte des Algonquins de l’Ontario s’ils veulent pouvoir chasser et pêcher à une certaine période de l’année. Je parle ici de gens qui ont des droits protégés dans la Constitution, pas des droits accordés pour avoir signé une carte d’appartenance à une corporation, car c’est en réalité ce qu’est le groupe des Algonquins de l’Ontario. Nous sommes donc loin d’avoir un accord.
(1145)
    On nous a dit la même chose dans les Territoires du Nord-Ouest, au sujet de listes de gens qui réclament aussi ce statut. Vous conviendrez cependant, puisque vous dites que tout cela doit reposer sur des faits, que ce sont des listes qu’il sera difficile de dresser à partir de faits. Si l’on n’est pas prêt à faire des contrôles d’ADN, on sera obligé de se baser sur un critère de communauté, ce qui est extrêmement controversé. Il y a dans ma propre circonscription une dame qui peut prouver par son ADN qu’elle est la fille d’un ancien chef, mais dont le statut n’est pas reconnu. Comment pourrons-nous nous entendre sur qui devra dresser les listes? Comment quelqu’un pourra-t-il interjeter appel si son nom ne figure pas sur la liste? En outre, s’il y a sur la liste quelqu’un qui ne devrait pas y figurer, comment pourrez-vous rayer son nom?
    Il ne vous reste que quelques secondes.
     Je tiens à rappeler aux députés que notre objectif est d’entendre ce que les témoins ont à nous dire. Si vous consacrez tout votre temps de parole à poser vos questions, vous ne laissez pas de temps aux témoins pour répondre. Il ne reste maintenant que quelques secondes. Vous devrez être très bref.
    C’est une question difficile, car la seule option est d’avoir recours à un tribunal. En ce qui concerne le peuple algonquin, nous avons nos propres critères pour dire qui en fait vraiment partie, mais, si des gens veulent contester notre décision, nous nous retrouvons finalement devant un tribunal. C’est toujours là qu’on finit par se retrouver quand on parle de questions constitutionnelles. Votre question est difficile, je l’admets.
    Merci.
    Je donne maintenant la parole au député Stetski, à qui je souhaite la bienvenue au sein de notre comité.
     Je remercie les témoins de comparaître devant nous aujourd’hui.
     De 2012 à 2015, j’ai représenté des municipalités du sud-est de la Colombie-Britannique lors de la négociation d’un traité avec les Premières Nations Ktunaxas. Les discussions durent depuis une dizaine d’années. Lors de la dernière réunion à laquelle j’ai participé, les parties étaient arrivées à l’étape d’un accord de principe. Pendant les trois années où j’ai participé à ce processus très détaillé, je suis devenu un farouche partisan des traités. Toutefois, je sais qu’il y a des Premières Nations qui estiment qu’il y a d’autres méthodes que des traités pour avancer, et éventuellement d’autres méthodes que le recours à des tribunaux, comme les mesures provisoires qui deviennent des mesures permanentes. Je demande donc à tous les chefs qui participent aujourd’hui à nos délibérations ce qu’ils en pensent de tout cela.
     Je peux vous dire, chef St. Denis, que je suis absolument d’accord avec vous. La raison pour laquelle le processus a avancé, dans notre cas, est que tous les négociateurs, fédéraux et provinciaux avaient à coeur les meilleurs intérêts des Ktunaxas. Les discussions portaient sur des questions d’argent, de terres et de gouvernance.
     Étant donné la situation actuelle, quelle est selon vous la meilleure solution pour que les choses avancent et pour assurer un meilleur avenir. Je pense que les traités permettent d’assurer un meilleur avenir à tout le monde.
(1150)
    Je pense qu’il faut commencer, comme je l’ai dit tout à l’heure, par le respect et la reconnaissance de nos titres de propriété et de nos droits. Cela pourrait être une reconnaissance conjointe de la propriété fédérale et de la propriété algonquine. Je pense que nous pouvons trouver des ententes sur les choses qui affectent réellement les Premières Nations, comme l’environnement, par exemple. Il faut que nos membres aient leur mot à dire sur les questions environnementales. Il faut aussi qu’ils aient leur mot à dire sur le partage des revenus tirés des ressources. Cette question concerne dorénavant aussi les provinces puisque le Canada a dans un sens cédé toutes nos ressources aux provinces, sans notre consentement, bien sûr. Voilà une ou deux idées que je propose.
     Il ne sera peut-être pas nécessaire d’en arriver à un traité formel en bout de ligne, si tant est que nos droits sont reconnus. Nous avons tous l’intention de rester ici. Nous pouvons tous profiter des terres et des ressources. Nous avons tous intérêt à protéger l’environnement, qui nous préoccupe tous aujourd’hui. Voilà par quoi nous pouvons commencer.
    Chef McKenzie, voulez-vous ajouter un mot à cela? Ensuite, j’aimerais connaître également l’avis du chef Norwegian.
    Beaucoup de traités contemporains portent prescription de toutes sortes de droits. Je sais que ma communauté n’accepterait pas ça ni, probablement, la nation algonquine. Comme l’a dit Harry, il devrait y avoir beaucoup de séances de négociation. Le partage des revenus et des ressources est notre grande préoccupation. On extrait toujours les ressources sans que nous ayons notre mot à dire, même lorsque cela touche directement notre développement économique.
     Je reviens aux exemples. Dans la municipalité d’Ottawa, selon ce qu’on m’a dit, lorsqu’un promoteur veut lancer un projet, il commence par prendre contact avec les Algonquins de l’Ontario. Pour le barrage hydroélectrique des chutes Chaudière, eux seuls ont été contactés. Nous n’avons pas eu notre mot à dire. Nous n’avons rien eu à voir avec ce projet. En plus, il y a en ce moment une rénovation d'un milliard de dollars sur la Colline parlementaire. J’ai eu beau chercher, je n’y ai vu aucun travailleur algonquin.
     Qu’est-ce que c’est que cette fameuse réconciliation? C’est ici même qu’on n’arrête pas d’en parler alors qu’il n’y a pas un seul Algonquin sur la Colline parlementaire. Et vous voudriez nous faire croire que vous reconnaissez la présence des Algonquins sur leur propre territoire? Il faudrait que les actes commencent à concorder avec les paroles.
    Il vous reste deux minutes.
    Chef Norwegian, vous avez un modèle très intéressant et je pense qu’on le considère partout au Canada comme un modèle très novateur qu’il faudrait peut-être appliquer dans tout le pays. Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez des traités, des mesures provisoires et des autres moyens d’aller de l’avant?
    Merci à nouveau. Le nom du peuple pour lequel vous travaillez, les Ktunaxas, semble très déné, mais du nord ou du sud-est de la Colombie-Britannique. C’est un travail intéressant que vous avez fait.
     Chez les Dehchos, nous avons interprété de manière très différente toute la notion de « traité ». Il y a des Métis qui vivent parmi nous, et ce sont des descendants directs des Dénés. Nous avons d’emblée considéré que nous sommes une seule communauté, que nous avons un passé commun et que nous sommes tous reliés. De ce fait, les Métis et les Dénés se sont unis et négocient maintenant ensemble avec le Canada.
     Ce qu’il faut dire au sujet du traité, c’est que ce n’était pas un outil pour prescrire les droits de propriété, alors que c’est comme ça que l’autre partie l’interprète en disant qu’il signifie très clairement que nos droits ont été prescrits par le Canada. En ce qui nous concerne, notre position est que le traité est un traité de paix. C’est un arrangement en vertu duquel nous nous engagions à ne pas déclarer la guerre ni nous attaquer aux nouveaux arrivants. C’est sur cette base que nous avons négocié le traité.
     Le concept même du traité signifie qu’on reconnaît notre autorité, l’autorité que nous détenons foncièrement comme peuple de Première Nation. Les traités sont en réalité des documents internationaux reconnaissant l’autorité du peuple avec qui ils ont été négociés. Dans notre cas, les Dehchos ont signé le traité de paix de 1921. Cela confirmait notre présence sur notre territoire, non colonisé. Voilà où nous en sommes maintenant.
(1155)
    Merci.
    Nous essayons de clarifier notre position de manière à indiquer très clairement que c’est toujours notre territoire; nous sommes ensemble et nous négocions. Voilà où nous en sommes maintenant.
    Très bien.
     Pour conclure, le député Anandasangaree aura quatre minutes pour poser les dernières questions.
    Je vais poser des questions très précises et je donnerai deux minutes de mon temps à mon ami Will Amos.
     Je reviens d’abord sur la question de la prescription des droits, qui a déjà été mentionnée. En ce qui concerne les discussions en cours, et je m’adresse particulièrement au chef Norwegian, est-ce que cela a été une exigence dès le départ? Sinon, avez-vous réussi à surmonter les exigences de prescription qui ont été formulées au départ?
    C’était le grand problème il y a une vingtaine d’années, quand d’autres groupes essayaient de négocier, mais, aujourd’hui, avec notre revendication, nous avons mis de côté cette question de prescription en disant que nous ne reconnaissons absolument aucune prescription de nos droits. La prescription des droits n’est pas une chose qui peut encore se faire à notre époque. De ce fait, nous avons fait preuve d’audace dans notre démarche en disant que nous affirmons notre pouvoir sur notre territoire.
     L’une des méthodes que nous avons employées pour ce faire était de faire référence à ce qu’on appelle l’aménagement des terres. Nous nous sommes adressés au Canada et au GTNO et nous avons commencé à parler de la manière dont nous pouvons protéger notre territoire. Le plan d’aménagement des terres est devenu un outil de développement économique. Il y a différents outils que l’on peut employer pour contrer toute cette affaire de prescription des droits. En ce qui nous concerne, les choses avancent et la période actuelle est très intéressante.
    Merci.
    Nous avons réussi à mettre de côté la question de la prescription des droits.
    Merci, chef.
     Je donne maintenant le reste de mon temps de parole à Will Amos.
    Merci, monsieur Anandasangaree. J’apprécie ce geste.
     Chef St. Denis, pouvez-vous m’aider à mieux comprendre? Quand vous avez formulé l’affirmation de vos droits en 2013, quelle a été la réaction? D’après vous, où en est maintenant la discussion avec le gouvernement fédéral? Est-ce que les choses avancent? Est-ce qu’elles sont au point mort?
     Nous avons entendu ce que vous avez dit au sujet de la prescription des droits et de la nécessité d’aller de l’avant. Le chef Norwegian a présenté un autre point de vue sur la manière d’aller de l’avant en s’engageant dans une direction différente. Où en êtes-vous maintenant, et que faut-il faire désormais pour faire avancer le dossier?
    Comme vous l’avez dit, nous avons effectivement présenté ce que nous appelons une affirmation de nos droits. C’était essentiellement un résumé des preuves que nous avons réunies au cours des années. C’était en réponse à la demande des gouvernements fédéral et provincial sur la base de ce qui se passait avec Pikwàkanagàn, ou la revendication des soi-disant Algonquins de l’Ontario.
     Nous avons présenté un document auquel nous n’avons pas eu de réponse. Nous ne savons pas si l’on a examiné notre affirmation. On ne nous a jamais demandé d’informations supplémentaires. Au fond, le document repose sans doute sur une étagère quelque part, avec les quelques centaines ou milliers d’autres rapports ou documents que nous avons présentés depuis 25 ans, à peu près.
(1200)
    Pensez-vous que vous allez recevoir une réponse et, dans ce cas…
    Eh bien, c’est en 2013 que nous avons présenté ce document. Croyez-vous que nous allons recevoir une réponse un jour?
     Le gouvernement actuel est au pouvoir depuis deux ans. Il devrait avoir eu le temps d’examiner le dossier et de nous contacter si la question l’intéresse, et s’il s’intéresse sérieusement à ce qui se passe avec les Algonquins de l’Ontario ou les Algonquins de Pikwàkanagàn; cela vaut surtout pour l’Ontario et le gouvernement fédéral. Le Québec n’est pas concerné par ces négociations.
     Nous n’avons eu aucune discussion sérieuse au sujet de nos préoccupations. La seule chose qu’on nous dit constamment c’est: « Ne vous inquiétez pas, vos droits sont protégés. Si jamais un accord quelconque est signé, vos droits seront protégés. » Comme on l’a déjà dit, ce n’est tout simplement pas le cas. Voilà essentiellement où on en est avec cette affirmation de nos droits.
    Merci.
    Les provinces la voulaient aussi, aux fins d’une consultation sur cette série de dispositions législatives. Elles ont demandé quelque chose; nous l’avons donné et nous n’en avons jamais plus entendu parler.
    C’est une bonne remarque. C’est très frustrant que l’autre partenaire ne réponde jamais.
     Cela dit, c’est tout le temps que nous avions. Nous sommes arrivés à la fin.
     Ce fut une discussion fascinante, à la fois du Nord... Je regrette que nous n’ayons pu vous rencontrer. Veuillez remercier tous les gens de leur accueil. Nous avons beaucoup aimé notre voyage à Yellowknife.
     Je m’adresse maintenant à ceux qui sont venus ici aujourd’hui en leur disant un grand merci. Nous sommes très heureux de votre contribution. Je vous remercie tous de votre patience.
     Meegwetch.
    Merci, madame la présidente et messieurs les députés. Nous avons préparé un document complet qui a été traduit et remis au Comité.
    Merci.
     Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes. Nous avons trois autres témoins à entendre.
(1200)

(1205)
    Nous accueillons maintenant les représentants du Treaty and Aboriginal Rights Research Centre of Manitoba. Bienvenue devant le Comité. Nous avons hâte de vous entendre.
     Je cherche les deux représentants de ce centre: Douglas Eyford, d’Eyford Macaulay s.r.l., et Glenn Archie, négociateur en chef des réclamations touchant les inondations, Première Nation Mishkosiminiziibiing.
     Les députés sont ici. Lorsque les autres témoins se présenteront, nous aurons peut-être assez de temps pour les entendre. En attendant, pourquoi ne pas commencer?
     C’est toujours un plaisir d’accueillir quelqu’un du Manitoba. Je vois que Statistique Canada vient de publier des chiffres importants. Lors de notre voyage, nous nous sommes arrêtés à Winnipeg et je vous ai vu alors dans la salle d’audience, mais nous n’avons pas eu l’occasion de recueillir le témoignage de votre organisation. Je vous donne donc maintenant la parole.
    Merci, madame la présidente et messieurs les membres du Comité, de nous accueillir aujourd’hui.
     Avant de continuer, je tiens à souligner que nous sommes ici sur un territoire algonquin non cédé.
     Ces dernières semaines, TARR Manitoba a eu l’occasion de se pencher sur diverses questions qui ont été soulevées par d’autres groupes directement touchés par la politique et les mandats de financement d’AADNC sur les revendications territoriales. S’agissant du processus de traitement des revendications par AADNC, nous souhaitons présenter le point de vue de TARR Manitoba concernant le soutien financier instable consenti à la recherche sur les revendications ainsi que l’impact des coupures budgétaires.
     Le Treaty and Aboriginal Rights Research Centre of Manitoba se trouve à Winnipeg. Il dispense des services de recherche sur les revendications à 54 des 63 Premières Nations du Manitoba.
     Les Premières Nations du Manitoba sont les signataires des traités 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 10. Il y a également au Manitoba cinq Premières Nations Dakota qui n’ont pas signé de traité au Canada.
     D’après le site Web des revendications particulières d’AADNC, il y a pour le Manitoba 51 revendications qui ont été réglées, 9 revendications faisant l’objet de négociations actives, 2 revendications en cours d’évaluation au ministère de la Justice, 6 revendications devant le tribunal, 14 revendications portant l’indication « conclue sans aucune obligation légale trouvée » et 19 revendications avec l’indication « dossier fermé ».
     En ce qui concerne les revendications « conclues sans aucune obligation légale trouvée » et les « dossiers fermés », l’information du site Web est relativement trompeuse, car certaines de ces revendications font encore l’objet de recherches actives ou sont sujettes à des recherches qui dépendent des ressources humaines et financières. En outre, le TARR Centre compte 17 autres revendications dans son plan de travail actuel. J’ajoute qu’il y a encore un nombre indéterminé de revendications qui vont venir s’ajouter, mais le TARR Centre n’a de toute façon pas la capacité de s’en occuper.
     Ces dernières années, des directeurs de recherche avaient été prévenus par le ministère que des coupures budgétaires étaient imminentes au motif que le nombre de revendications soumises à la Direction générale des revendications particulières, ou DGRP, reflétait les progrès réalisés par l’organisme de recherche concerné. Les coupures budgétaires n’avaient rien de nouveau, elles existaient déjà depuis plusieurs années, mais de manière plus subtile.
     Toutefois, la position de la DGRP ne tenait pas compte du nombre de revendications en cours d’évaluation au niveau de l’unité de recherche. Au lieu de cela, la DGRP aurait dû évaluer chaque revendication en fonction de son caractère unique, étant donné que chaque revendication progresse à un rythme différent. La recherche sur les revendications n’est pas un processus qui coule de source et peut souvent être compliquée par des facteurs imprévus, comme un changement politique, l’absence de ressources internes, etc.
     Comme le TARR Centre reçoit 100 % de son financement de l’unité de financement de la recherche ou UFR, il a tenté de travailler directement avec cette unité dans le but de prévenir d’autres coupures budgétaires. D’autres démarches ont été entreprises pour tenter de montrer qu’il était inapproprié de juger les progrès uniquement en fonction du nombre de revendications présentées dans une année. Toutefois, ces démarches ont été vaines.
     Durant l’exercice budgétaire de 2014-2015, le TARR Centre a subi une coupure budgétaire de 60 %. En conséquence, son effectif de quatre employés de Winnipeg, comprenant un directeur, un administrateur de bureau et deux chercheurs à temps plein, a été ramené à un seul employé. Le bureau de Thompson, qui employait un chercheur, a été immédiatement fermé et cette personne a par la suite été mise à pied.
     Les conséquences de ces coupures ont été graves pour TARR Manitoba. La réduction de 60 % de son financement en 2014-2015 a eu pour effet de bloquer toute recherche sur les revendications au Manitoba pendant plusieurs années et aussi, ce qui est probablement plus grave encore, de suspendre le droit des Premières Nations de poursuivre le processus de revendication.
     Pendant trois ans, TARR Manitoba a dû fonctionner avec un effectif ne comprenant qu’un directeur et un assistant de recherche pour dispenser ses services à ses 54 Premières Nations clientes du Manitoba. Aujourd’hui, le financement a retrouvé son niveau d’avant 2014 et nous avons pu stabiliser notre effectif à cinq personnes. Toutefois, et je tiens à insister là-dessus, l’instabilité du financement fait qu’il est difficile de garantir des ressources financières et humaines suffisantes pour travailler efficacement. Encore une fois, cela affecte le droit des Premières Nations de poursuivre le processus de revendication
    . Le TARR Centre a été obligé de déménager deux fois au cours des trois dernières années à cause des fluctuations de son financement. Chaque fois, il a fallu engager des services de gestion bibliothécaire pour classer les principaux documents et revues du centre, ce qui a réduit d’autant le temps pouvant être consacré à la préparation des revendications.
     Pour chaque exercice budgétaire, TARR Manitoba doit passer une nouvelle entente de contribution avec l’UFR. La nouvelle entente de contribution n’est signée qu’après l’expiration de l’entente précédente, ce qui donne bien peu de temps pour l’examiner et en discuter, d’autant plus que l’UFR bloque l’octroi de tout financement supplémentaire tant que la nouvelle entente n’est pas signée.
(1210)
    De manière générale, les dépenses mensuelles de TARR Manitoba correspondent à l'affectation de fonds stipulée dans l'accord de contribution. Toute pause dans le versement de fonds mensuel fragilise TARR Manitoba. Les factures et le loyer sont généralement en retard, et le temps consacré en plus à l'administration pour atténuer le manque de fonds l'est au détriment du processus de règlement des revendications. TARR Manitoba aimerait avoir assez de temps à l'avenir pour examiner et peut-être négocier les accords de contribution proposés.
    Depuis 2008, nous recevons de fonds supplémentaires les tout derniers mois de l'année financière. La Division du financement de la recherche d'AANDC a toujours soutenu que ce financement supplémentaire ne se prolonge pas dans l'exercice suivant. Encore une fois, l'accord de financement est une entente financière ponctuelle, ce qui veut dire qu'il n'y a aucune garantie de niveau de financement stable d'année en année.
    La Direction générale des revendications particulières travaille en collaboration avec l'Assemblée des Premières Nations afin de régler le problème de financement, mais elle n'a pas trouvé pour l'instant de solution adéquate. Rien ne garantit tout simplement un financement qui permette de fonctionner de manière adéquate année après année, ce qui ne permet pas de nourrir la dynamique voulue dans la recherche sur les revendications.
    Le Canada a apporté des changements récemment pour améliorer le processus de règlement des revendications, comme l'élimination des exigences relatives aux revendications particulières antérieures à la Confédération, l'injection des ressources financières supplémentaires dans le processus, à AANDC et pour les Premières Nations, et aussi la création de l'organisme qui réunit le Canada et les Premières Nations appelé groupe de travail technique commun, le GTTC, qui a été mis sur pied pour examiner la question des revendications.
    Nous espérons que cette tendance se maintiendra. Le Canada, toutefois, reste à la fois l'inculpé et le juge en chef tout au long du processus de règlement des revendications. Suivant les recommandations formulées par le GTTC, l'APN et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, TARR Manitoba appuie sans réserve le principe selon lequel le Canada doit se retirer du processus de règlement des revendications afin d'en garantir l'impartialité. Le TARR Centre of Manitoba espère également qu'une structure de financement stable sera créée pour garantir à ses Premières Nations membres des recherches proactives sur les revendications.
    Je vous remercie.
(1215)
    Je vous remercie.
    L'autre témoin ne s'est toujours pas manifesté, vous aurez donc toute notre attention.
    Nous allons commencer la période de questions. La parole est à M. Anandasangaree.
    Madame la présidente, je partagerai mon temps de parole avec Mme Zahid.
    Je vous remercie de votre présence. J'ai quelques questions très précises qui concernent le processus de règlement des revendications particulières.
    Si vous deviez recommander des changements au processus même, quels seraient-ils? Pourriez-vous nous donner trois recommandations précises?
    Je m'appelle Patricia. Je répondrai aux questions, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    Quels changements recommanderais-je d'apporter au processus de règlement des revendications? L'an dernier, on a créé le groupe de travail technique commun qui réunit l'APN, AANDC et plusieurs directeurs de recherche de tout le Canada. Ils ont constitué quatre sous-comités qui ne sont chargés que de quatre questions, à savoir le financement, les revendications supérieures à 150 millions de dollars, la négociation et la médiation, et j'en oublie un. Nous ne sommes pas allés très loin au sous-comité chargé du financement. J'y siégeais.
    Patricia, si je puis, nous avons très peu de temps. Permettez-moi de vous demander d'être très précise dans vos recommandations. Je sais qu'il est important de remettre en contexte, mais malheureusement, le processus ne s'y prête pas vraiment. Si vous le pouvez, soyez très précise dans ce que vous recommanderiez.
    Comme l'a mentionné Cam, il faut que ce soit un organisme qui puisse s'occuper du processus de règlement des revendications et qui ne soit pas juge et partie. C'est l'essentiel. Il devrait aussi contrôler le financement. C'est une des clés de la question du financement.
    Comme je l'ai souligné, la question financière nuit tout bonnement au processus. Le financement est une question importante pour nous, en particulier sur le terrain.
    En ce qui concerne les délais, êtes-vous satisfaits de celui utilisé par le Tribunal des revendications particulières?
    Les délais...?
    En ce qui concerne les audiences obligatoires... Je sais que pour l'instant il n'y a pas de délai pour la médiation.
    Nous parlons du Tribunal maintenant.
    Oui.
    TARR Manitoba n'est pas mandaté pour participer au processus du Tribunal. Nous ne disposons que de l'information qu'il nous transmet chaque année et qui nous permet de savoir où en sont les revendications.
    Avez-vous des propositions à faire à partir de l'expérience de vos intervenants?
    Quelques Premières Nations du Manitoba ont des revendications devant le Tribunal et, apparemment, le processus est très long et très coûteux.
    Quand vous dites que la Couronne est actuellement juge et partie, que voulez-vous dire?
    Je parle du processus de règlement des revendications particulières. Nous soumettons les revendications à la Direction générale des revendications particulières d'AANDC qui fait ses propres recherches internes et est alors à la fois juge et partie.
    Je vous remercie.
    Je souhaite laisser le reste de mon temps de parole à Mme Zahid.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie tous les deux de votre présence aujourd'hui.
    J'aimerais vous poser des questions sur l'engagement et l'éducation communautaires au sein des communautés autochtones. Quel niveau de connaissance et quel degré de mobilisation voyez-vous dans les communautés autochtones du Manitoba en ce qui concerne le processus de règlement des revendications territoriales?
(1220)
    Quel genre de participation communautaire...?
    C'est cela, que pensez-vous de l'engagement et de l'éducation communautaires?
    Il n'y a pas assez de mobilisation, selon moi. Nous avons bien une organisation au Manitoba, la Commission des relations découlant des traités, qui a entre autres pour mandat d'informer non seulement le public, mais aussi la population autochtone, les bandes du Manitoba, au sujet des relations découlant des traités au Canada.
    Avez-vous des recommandations quant aux mesures que nous pourrions prendre pour mobiliser la communauté par rapport au processus de règlement des revendications territoriales?
    Je crois que quand une bande donnée à une revendication, qu'elle soit traitée par la Direction générale des revendications particulières ou soumise au Tribunal, les ministères concernés devraient venir dans les communautés leur parler directement pour qu'elles soient plus mieux concentrées sur le processus.
    Peut-être au niveau des consultations...
    Est-ce que cela répond à votre question?
    En partie.
    Je vais passer à la question suivante. Nous avons beaucoup entendu parler au Comité des revendications particulières et des revendications territoriales globales. Pourriez-vous nous en dire plus sur votre expérience personnelle? Quels retards et problèmes rencontrez-vous, par exemple, dans leur règlement? Avez-vous des solutions à proposer pour améliorer le processus?
    C'est une question de financement.
    Encore une fois, c'est une question de financement.
    Comme pour les autres recommandations, je n'ai pas beaucoup de temps, mais nous avons également un problème avec les bandes de la nation Dakota au Manitoba. Comme nous le disions, elles ne sont pas parties au traité et nous cherchons toujours un moyen pour que le gouvernement reconnaisse leurs droits ancestraux sur les territoires.
    Au Manitoba, la situation n'est pas tout à fait même que dans d'autres provinces, comme la Colombie-Britannique, qui ne sont pas parties à des traités. Nous sommes parties à des traités, sauf les Dakotas, et le gouvernement n'a pas encore reconnu qu'il s'agit de leur territoire ancestral.
    Je vous remercie. Je pense que mon temps de parole est écoulé.
    Très bien. Nous avons trouvé un de nos témoins.
    Le Comité souhaite-t-il continuer de poser des questions ou accorder 10 minutes au témoin? J'attends une recommandation. Les deux options sont possibles. Tout dépend de ce que préfère le Comité.
    Madame McLeod, vous avez la parole.
    Madame la présidente, il me semble que nous aurons le temps pour une première série de questions, donc j'aimerais entendre le témoin. Je crois qu'il a des choses à nous apprendre, ce qui nous aidera aussi dans nos questions.
    Y a-t-il une objection?
    Des députés: Non.
    La présidente: Parfait.
    Monsieur Eyford, vous avez 10 minutes.
    Je vous remercie de votre indulgence. Je vous remercie aussi de m'avoir invité à m'exprimer au sujet du processus de règlement des revendications territoriales globales. La question est importante et je vous suis reconnaissant de pouvoir en parler.
    En 2014, Bernard Valcourt, alors ministre des Affaires autochtones, m'a demandé de diriger un dialogue avec des groupes autochtones et des intervenants clés sur le renouvellement de la Politique sur les revendications territoriales globales du Canada. En février 2015, j'ai remis au ministre un rapport reposant sur mes conclusions. Je comprends que trois années puissent paraître une éternité dans l'élaboration et la mise en oeuvre d'une politique publique, mais je crois toutefois que bon nombre des conclusions et des recommandations dans mon rapport restent pertinentes, et je serai heureux de répondre à toute question que les membres du Comité auraient à son sujet.
    Je pensais qu'il serait bon de traiter trois questions pour lancer la discussion. La première est la nécessité, selon moi, pour le Canada de maintenir la dynamique aux tables de négociation dont il est raisonnable de penser qu'elles aboutiront à un résultat positif. Si je dis cela, c'est qu'à sa nomination, il y a deux ans, la ministre Bennett s'est vu remettre une lettre de mandat qui inscrivait 13 priorités ambitieuses à son programme. La négociation de traités modernes n'en faisait cependant pas partie, ce qui en a amené beaucoup à se demander quelle place le gouvernement accordait au règlement des revendications territoriales globales dans son engagement à l'égard de la réconciliation. Sur les quelque 75 revendications territoriales qui en sont à divers stades de négociation, seules 8 ou 10 probablement, à mon sens, ont une bonne chance d'aboutir à une conclusion favorable. Ce que je veux dire, c'est que le Canada devrait identifier des tables prioritaires et concentrer les ressources sur la conclusion de ces négociations. Je note que la lettre de mandat la plus récente de la ministre Bennett mentionne parmi ses priorités l'accélération du processus de règlement des revendications territoriales globales.
    Il serait bon d'envisager, en même temps, d'éliminer progressivement le processus de règlement des revendications territoriales globales. Toutes les communautés autochtones qui souhaitent négocier un traité moderne sont dans le processus depuis au moins 10 ans. Il n'y a pas une foule de groupes autochtones qui attendent leur tour. C'est pourquoi il est important, à mon avis, que le Canada étudie d'autres options en matière de réconciliation pour les communautés qui ne sont pas intéressées par le processus des traités modernes ou qui ne sont pas en mesure d'en négocier un.
    Je tiens à souligner qu'en mai 2016, le Canada a approuvé une série de propositions visant à améliorer et à accélérer le processus de négociation des traités en Colombie-Britannique. C'est une initiative utile et importante. En outre, le Canada montre depuis quelques années qu'il est prêt à faire preuve de souplesse et de créativité par rapport aux intérêts des groupes autochtones en dehors du processus des traités. Il s'agit d'une vaste initiative. Je donnerai deux exemples dont les membres du Comité ne connaissent peut-être pas. Le premier est la création d'un bureau de gestion des grands projets en Colombie-Britannique, et le travail qu'il accomplit depuis. Le deuxième est la participation très fructueuse de RNCan, d'Environnement Canada et de Transports Canada qui a permis de tenir compte des intérêts autochtones dans l'aménagement d'infrastructures sur la côte Nord de la Colombie-Britannique et, tout particulièrement, dans l'installation de gazoducs et d'usines de GNL.
    Je comprends que le gouvernement du Canada n'est pas une barque facile à mener, et c'est pourquoi tous les ministères doivent montrer un intérêt et une aptitude à participer véritablement à la réconciliation. Ce qui m'amène à mon deuxième point, que voici. La contribution la plus tangible et la plus immédiate que des gouvernements puissent apporter au processus de réconciliation consiste, que je sache, à soutenir et à promouvoir le renforcement des capacités dans les communautés autochtones. Je tire cette observation de mon travail d'avocat exerçant dans le privé en Colombie-Britannique. Depuis 10 ans, je représente des communautés des Premières Nations, des gouvernements et l'industrie dans la négociation de traités modernes, de protocoles de réconciliation et d'ententes sur les répercussions et les avantages.
(1225)
    Ces négociations offrent d'immenses possibilités aux participants autochtones, mais elles sont extrêmement délicates. Je crois qu'il va sans dire que le changement est difficile à gérer et que c'est encore plus le cas lorsque les dirigeants communautaires manquent d'expérience dans des négociations complexes.
    Il ne faut pas perdre de vue non plus que ces ententes changent souvent la dynamique de relations depuis longtemps conflictuelles. Dans bien des régions reculées de la Colombie-Britannique et du Yukon, où je travaille, les membres des communautés ne sont tout simplement pas prêts à saisir les différentes possibilités d'emploi et de contrat qu'offre l'exploitation des ressources.
    Ce qui m'amène à l'observation suivante. La Couronne devrait, à mon sens, constituer et renforcer des capacités dans certaines régions. Il s'agit, par exemple, de formation des adultes, de s'assurer que les membres des communautés sachent au minimum lire, écrire et compter afin d'être aptes au travail. Ensuite, la Couronne a un rôle dans le financement de soutiens sociaux nécessaires face à des problèmes comme la toxicomanie, l'alcoolisme, les garderies et le logement. Chose remarquable, le manque de permis de conduire est un obstacle important à l'emploi autochtone dans beaucoup de régions reculées de la province. Voilà un domaine où la Couronne a, selon moi, un rôle à jouer dans le renforcement des capacités.
    Ensuite, il y a une préoccupation plus primordiale qui concerne la capacité de gouvernance des dirigeants des communautés autochtones. Je crois qu'à cet égard, le gouvernement peut favoriser l'échange d'expériences entre des dirigeants autochtones dans différentes régions. Je travaille beaucoup dans le secteur des hydrocarbures. À mon avis, les dirigeants de communautés autochtones de l'Alberta peuvent certainement donner aux dirigeants autochtones de la Colombie-Britannique des exemples de ce qu'ils ont réussi à faire par rapport à l'exploitation pétrolière et gazière dans leur région.
    Des mentorats et d'autres initiatives sont également importants pour renforcer la capacité de gouvernance.
    Une planification communautaire globale et la définition de stratégies de formation et d'emploi sont, à ma connaissance, essentielles, mais elles nécessitent l'appui et le financement du gouvernement. Faute de quoi, il revient dans une large mesure à l'industrie de répondre à ces besoins. Il s'agit, cependant, d'un domaine où il me semble que les gouvernements doivent en faire plus.
    Je tiens à souligner que l'importance que le gouvernement attache à des initiatives telles que les traités modernes et l'application de la Déclaration des Nations unies ne veut pas dire grand-chose dans des communautés confrontées à un chômage chronique, à de piètres résultats scolaires et à des problèmes sociaux omniprésents.
    Ma troisième et dernière observation, madame la présidente, porte sur la mise en oeuvre des traités modernes. Bien qu'on ne m'ait pas demandé de me pencher sur la question, quand je préparais mon rapport en 2014, il est vite apparu que le Canada a pris du retard dans le respect de ses obligations aux termes des traités. À titre d'exemple, vous n'êtes pas sans connaître les problèmes de mise en oeuvre de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, qui ont conduit à une procédure civile qui s'est soldée par un règlement de 1,4 milliard de dollars. La mise en oeuvre des traités est problématique. La Cour suprême du Canada dit clairement que l'honneur de la Couronne doit guider l'interprétation et l'application des traités modernes.
    Je sais que vous avez entendu le témoignage de Marg Rosling, avocate de Vancouver qui représente le gouvernement nisga'a. Elle vous a présenté des mémoires sur la mise en oeuvre des traités, et je suis tout à fait d'accord avec les témoignages que vous avez entendus à ce propos.
    Je conclurai en soulignant que la négociation de traités modernes est difficile et complexe. Pour celles et ceux d'entre vous qui s'intéressent à l'histoire de la négociation des traités modernes, il suffit de parcourir la politique initiale publiée en 1973 par Jean Chrétien, qui était alors ministre des Affaires indiennes. Elle tient en deux pages. Les événements ont vite montré que les difficultés pour les gouvernements et pour les communautés autochtones sont, à bien des égards, considérables.
    Je vous remercie, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité. Ce sera tout pour mes observations préliminaires.
(1230)
    Je vous remercie.
    Si nous continuons notre série de questions, nous allons passer à Mme Cathy McLeod.
    Madame la présidente, je partagerai mon temps de parole avec Kevin Waugh.
    Je remercie les témoins ici présents.
    Votre principale recommandation est très différente de celles d'autres témoins que nous avons entendus. Si j'ai bien compris, vous recommandez, au fond, de se débarrasser du processus. Or, beaucoup de communautés nous ont dit qu'elles en retirent des avantages importants arrivées à ce point. Je crois comprendre, aussi, que les études disent la même chose. Je sais qu'il existe de nombreuses autres solutions. Je viens moi aussi de la Colombie-Britannique et beaucoup dans la région que je représente ont choisi d'autres options, le partage des redevances et d'autres façons de définir leur succès. Je ne crois pas qu'on accepterait l'idée qu'il n'y ait pas de processus auquel puissent recourir les communautés qui aspirent à conclure un traité moderne global.
    Qu'en dites-vous?
    Soyons clairs, je ne préconise pas de se débarrasser du processus. Ce que je dis, c'est qu'après plusieurs décennies d'expérience du processus de négociation des traités modernes, seules 8 à 10 communautés ont encore une chance de franchir la ligne d'arrivée. Je comprends ce que disent certaines communautés, que deux ou trois décennies passées dans le processus de négociation des traités leur ont permis de renforcer leurs capacités, mais cela se fait à un coût très élevé pour le gouvernement du Canada. Les prêts consentis au titre des négociations et le financement des capacités dépassent le milliard de dollars et il existe certainement de meilleures façons pour le gouvernement de promouvoir le renforcement des capacités dans les communautés autochtones.
    Vous connaissez Judy Wilson, qui a témoigné devant le Comité et qui vient de votre région, je le sais. Elle fait partie des dirigeants de l'Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique. Cette organisation est farouchement opposée au processus de négociation des traités. Pour elle, la réconciliation s'opère autrement. Il est très évident en Colombie-Britannique que plus de la moitié des bandes de la province assujetties à la Loi sur les Indiens ont choisi de ne pas participer à ce processus, ce qui met, selon moi, le gouvernement au défi de trouver d'autres façons de concilier leurs intérêts et ceux de la Couronne.
(1235)
    Dans votre rapport, vous parlez du financement des négociations. Je vais vous citer. Vous dites qu'il a « entraîné un grave endettement des collectivités autochtones » qui est devenu « insoutenable », ce que nous entendons depuis un mois environ. Vous recommandez que les Premières Nations n'empruntent pas pour négocier des traités et que le Canada efface la dette.
    C'est dans votre rapport.
    Je ne suis pas certain que ce soit une interprétation fidèle de sa teneur.
    Ce que j'ai dit, c'est qu'il doit exister une meilleure façon de financer la participation autochtone au processus. Nous avons à présent une situation où la Commission des traités de la Colombie-Britannique déclare que la façon dont les Premières Nations ont dépensé ces fonds ne regarde en rien le Canada. L'endettement de certaines communautés est tel qu'elles ont peur de se retirer du processus parce qu'elles sont tenues de rembourser ce qu'elles doivent. Le Canada va devoir trouver le moyen d'expliquer que bon nombre de ces communautés ont utilisé ces fonds.
    J'ai recommandé que le Canada définisse un processus de financement des négociations pour la suite. Ce que j'ai recommandé ressemble au processus de tarification en droit civil. Le gouvernement déclare qu'il leur donnera x dollars pour financer différentes étapes du processus, au lieu d'avoir un carnet de chèques ouvert avec lequel il couvre toutes les dépenses qui se présentent. Il appartient aux communautés autochtones, en l'occurrence, de décider quel type d'experts, d'avocats, de comptables ou de tiers fournisseurs de services elles vont engager et comment elles les paieront si le coût dépasse le montant du tarif.
    La question des prêts est très importante et je pense que, sur ce point, le gouvernement du Canada doit procéder autrement.
    Je ne peux qu'être d'accord.
    Les tiers veulent souvent plus que leur part du gâteau dans ces ententes. Nous l'avons remarqué.
    Murray Coolican, qui avait été retenu en 1985 pour examiner l'état des négociations des traités modernes, a fait un commentaire selon lequel l'engagement à financer les négociations ne devrait pas mener à ce que les traités deviennent des vaches à lait. Or, à bien des égards, c'est ce qui s'est produit au cours des 30 dernières années.
    Je vous remercie. Je suis entièrement d'accord avec vous. Quand on parcourt le pays comme nous l'avons fait, on voit que certaines régions sont plus informées à ce sujet que d'autres. Certaines se sont fait détrousser. Elles se retrouvent avec une ardoise de 70 ou 80 millions de dollars qu'elles n'ont aucun moyen de récupérer jusqu'à l'annulation de toute la somme dans 10 ou 20 ans.
    Ce qui amène à se demander pourquoi il faut des décennies pour parvenir à des ententes.
    Nous avons étudié la question. Continuez.
    Je faisais remarquer, entre autres, dans mon rapport que, bien qu'il s'agisse d'ententes complexes, la conclusion des traités ne devrait pas demander 15, 20, 25 ou 30 ans aux parties.
    Combien de temps devrait-elle prendre?
    C'est difficile à dire. Certaines ententes que j'ai négociées avec l'industrie, où il était impératif d'arriver à s'entendre, ont demandé deux ou trois ans. Je comprends que les traités sont extrêmement compliqués, mais, à mon sens, leur conclusion ne devrait pas demander plus de trois à cinq ans.
    Les éléments d'un traité sont assez standard. On ne persuadera pas le gouvernement du Canada ou de la Colombie-Britannique de procéder autrement qu'ils l'ont déjà fait pour d'autres traités. Le défi pour les Premières Nations qui veulent un traité est de préciser pourquoi elles veulent un traité. Il me semble que l'expérience de la bande de Tsawwassen et des Nisga'a montre qu'il faut qu'il y ait un intérêt primordial dans la communauté pour vouloir faire valoir cet intérêt dans le cadre d'un traité. C'est, à mon avis, sur cela que l'accent devrait être mis.
(1240)
    Il me reste probablement 30 secondes.
    Votre temps de parole file.
    D'accord.
    Patricia, vous êtes la première à mentionner l'APN et sa participation.
    Quelle est sa participation? Vous l'avez mentionnée tout à l'heure. J'en ai pris note. C'était à propos du groupe de travail technique commun. Quel y est son rôle?
    L'APN représente toutes les Premières Nations du Canada.
    Nous le savons.
    Son rôle dans le...
    Le groupe de travail technique commun.
    Le groupe de travail technique commun a été formé avec AANDC et des organismes de recherche de tout le Canada afin de s'asseoir autour d'une même table pour essayer de rectifier le processus de règlement des revendications particulières.
    Je crois que votre temps de parole est écoulé.
    Bienvenue à Big Grassy.
    Cette réunion est très inhabituelle, car nous ne commençons pas en temps voulu. Ce n'est pas normal, mais ce n'est pas grave. C'est comme le processus de négociation des traités, c'est très particulier.
    Cette fois, je crois comprendre qu'il est convenu que nous allons entendre votre exposé, Glenn. Nous vous donnerons 10 minutes et nous allons prolonger la réunion de 15 minutes. Est-ce qu'on est d'accord?
    Cathy, vous avez la parole.
    Nous sommes certainement d'accord, étant entendu que si des membres ont d'autres engagements, il ne sera pas possible d'avoir des motions ou ce genre de choses.
    Entendu. Je crois comprendre que nous sommes d'accord.
    Glenn Archie, bienvenue. Nous vous écoutons avec intérêt.
    Ça ne vous dérange pas si je me lève? Je préfère être debout lorsque je parle en public. Je ne peux pas le faire assis.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Je m'appelle Glenn Archie. Je suis le négociateur en chef de la revendication relative aux inondations de la Première Nation de Big Grassy River, qui a débuté en novembre 2009, c'est-à-dire il y a huit ou neuf ans. Vous avez certainement mon mémoire en mains. J'espère que vous avez eu le temps de le lire. J'espère aussi que vous pourrez me poser quelques questions.
    J'ai amorcé les négociations en 1999, lorsque je suis devenu pour la première fois conseiller de la Première Nation de Big Grassy. Cela fait maintenant 22 ans que je négocie des revendications territoriales. J'ai déjà réglé trois revendications territoriales, et j'en négocie une quatrième. Nous traitons trois autres revendications, dont deux pourraient finir devant un tribunal. On propose d'en retirer une du tribunal et de la soumettre à une médiation. Voilà où nous en sommes, cinq revendications auxquelles j'ai participé au cours des 22 dernières années.
    Lorsque je suis arrivé, j'ai entendu mon ami assis ici formuler certaines observations. J'ignore qui il est, mais si j'en juge par la façon dont il s'exprime, c'est un ami. Quoi qu'il en soit, je voulais juste aborder un peu cette question également.
    Vous connaissez le financement par prêts des Premières Nations. Celui de la Première Nation de Big Grassy est supérieur à 1,1 million de dollars, soit une hausse en l'espace de huit ou neuf ans. Cela a de sérieuses conséquences sur notre capacité d'emprunter pour les infrastructures et le logement. Cela nous empêche véritablement de fournir des services à notre communauté, car cet argent est immobilisé. La province de l'Ontario assure expressément le financement par prêts chaque année pour nous aider à neutraliser les coûts des négociations. C'est précisément là que les choses devraient bouger un peu plus du côté fédéral. À mon avis, il devrait y avoir des subventions. Comme le dit si bien le dicton, le gouvernement du Canada est à la fois jury, bourreau et pourvoyeur de fonds. Il y a une personne qui porte trois chapeaux et qui décide de tout. Or, il faut séparer ces trois éléments pour être vraiment entendus.
    Nous avons également besoin de choses comme celle-ci pour parler à coeur ouvert. Ce n'est pas autrement que je m'exprimerai. Tels sont les faits. C'est à coeur ouvert que je souhaite m'adresser à vous.
    Notre peuple souffre depuis longtemps, depuis que le colonialisme s'est imposé ici. Nous avons dû modifier notre existence, notre mode de vie. Or, notre mode de vie est en cours d'appauvrissement pour ce qui est des connaissances traditionnelles et culturelles, des forêts et des ressources. Rien n'est épargné. Les Premières Nations ne peuvent plus vivre tout bonnement de la pêche, car nos eaux sont désormais contaminées. Dans nos forêts, les orignaux ont été décimés. Je ne suis ni médecin ni scientifique, mais je pense qu'il s'agit d'une maladie dégénérative du cerveau. Et ainsi disparaît aussi notre alimentation. Tous les animaux sont touchés. Et cela n'est qu'un seul élément des problèmes dont nous sommes victimes.
    Sur le plan économique, nous souffrons beaucoup. Nous essayons bien de soumettre des propositions pour sortir la communauté de la situation où elle est plongée, pour la sortir de la pauvreté. Or, les organismes de financement ici nous rejettent, jusqu'au plus haut placé. Permettez-moi de vous donner un exemple. En 2000, nous avons tenté de construire une usine de transformation du poisson, en achetant le poisson de toutes les communautés visées par le Traité no 3 et en respectant les quotas existants. C'est ce que nous avions prévu, pour trouver un meilleur moyen de commercialiser les poissons de nos membres. Or, le financement nous a été refusé au niveau de l'agence.
(1245)
    On nous a dit qu'on allait vider le lac de tous ses poissons. Mais ce n'est pas du tout le cas. Nous allons utiliser les quotas existants imposés à chaque Première Nation. Or, ces quotas n'ont pas augmenté, mais plutôt baissé.
    J'ai un collègue à Thunder Bay qui n'est pas autochtone. Il m'a téléphoné il y a environ quatre mois pour me dire qu'il commençait tout juste la construction d'une usine de transformation du poisson, ce qui m'a littéralement fait exploser. Comment a-t-il fait pour obtenir des fonds, alors qu'une telle usine nous a été refusée? Telle est la question que je me pose.
    Pour ce qui est du développement économique, les Autochtones sont opprimés et brimés. Nous ne pouvons aller nulle part. Nous essayons de vivre notre propre existence, mais le gouvernement du Canada n'arrête pas de nous marcher sur les pieds et de nous humilier. C'est le plus grave problème que j'éprouve aujourd'hui. Les Autochtones ne peuvent aller nulle part. Nous essayons et essayons encore, mais en vain.
    Le racisme qui règne ici est invraisemblable. Depuis l'élection de Trump, tout le monde a le droit désormais de dire ce qu'il veut à qui que ce soit, à n'importe quelle minorité et telle est la réalité à laquelle nous sommes confrontés chaque jour de l'année. Je peux me rendre au magasin et payer ma facture et quelqu'un me jette littéralement ma monnaie sur le comptoir. Voilà les rapports que nous avons.
    Le plus grave problème ici est ce refus de financer une usine de transformation du poisson. Nous avons rempli toute la documentation nécessaire. Nous avons prouvé que nous avions toutes les qualifications préalables que la province et le gouvernement fédéral exigeaient. Nous avons fait tout cela, nous avons franchi tous les obstacles, et en fin de compte, le financement nous a été refusé.
    Par ailleurs, ma Première Nation voulait aménager une usine d'embouteillage d'eau. J'occupais alors le poste de chef, et j'étais tout prêt à investir dans notre communauté. Mais une fois de plus, cela nous a été refusé, et nous n'avons eu nulle part où aller.
    Nous avions fait des incursions dans un projet de quatre millions de dollars pour approvisionner en eau les Jeux olympiques d'hiver en Colombie-Britannique. Tel était notre horizon de planification.
    Nous essayons d'arrache-pied de sortir notre communauté du marasme, mais c'est souvent pour y replonger encore plus profondément.
    À propos des revendications particulières, c'est avant tout de cela que je me suis occupé. Je n'ai pas traité de revendications globales, mais essentiellement des revendications particulières.
    Madame la présidente, vous me dites qu'il me reste trois minutes, Dieu, comme cela est allé vite.
    La situation du financement est celle dont je veux parler, de même que des paiements préalables. Lorsque le Canada accepte une revendication pour la négocier, par définition, cela signifie que le Canada reconnaît, pour les besoins de la négociation, qu'il n'a pas respecté l'obligation qui lui incombe et qu'une indemnité doit nous être versée. Les paiements préalables pourraient être un moyen de fournir quelque chose au requérant au moment où cela est nécessaire, et également un moyen d'atténuer les incidences humaines décrites ci-dessus. Cela prouverait également la bonne foi du Canada, en plus de donner une certaine impulsion aux négociations.
    Il existe un précédent dans le secteur des assurances au sujet des paiements anticipés, qui sont parfois versés par les compagnies d'assurance une fois qu'elles sont convaincues qu'elles seront contraintes de verser une indemnité. Ces paiements sont versés sans préjudice, et sont reconnus et protégés par les conditions de la police d'assurance, par les contrats et par les règles de procédure judiciaire.
    Les modalités des paiements anticipés semblent bien adaptées aux revendications particulières. À ce stade, lorsqu'une lettre de validation est expédiée par le Canada, un requérant autochtone a déjà entièrement justifié sa revendication, et le Canada a entièrement examiné et évalué la revendication et déterminé qu'elle était partiellement ou entièrement justifiable. Pourquoi ne pas faire en sorte qu'à ce même moment, le Canada fasse savoir à la Première Nation qu'il lui accordera un paiement anticipé d'un certain montant?
    Ce sont nos Aînés. Si nous présentons une revendication aujourd'hui, cet Aîné est en vie. Cinq ans plus tard, il n'est plus parmi nous. Ce sont eux qui ont pâti des plus graves conséquences de la colonisation, pourquoi devrions-nous les laisser continuer à souffrir? À mon avis, certaines réponses devraient être fournies à ces gens. Aidez-les à essayer de mener une vie décente. Ce sont nos Aînés qui souffrent le plus.
    Nous entendons aujourd'hui parler des pensionnats, et ceux-ci ont fait l'objet de nombreux reportages dans les journaux et retiennent l'attention du public. J'avais 28 ans lorsque je suis devenu chef, et les Aînés m'ont dit alors que les pensionnats avaient anéanti notre langue. À l'époque, je n'ai pas compris, car je parlais couramment l'ojibway, et tous les gens qui m'entouraient la parlaient également. Je constate aujourd'hui sa disparition. Je suis la dernière personne de mon âge à savoir parler couramment l'ojibway. Tous les autres connaissent quelques mots, mais ils ne peuvent pas mener une conversation comme moi.
(1250)
    Ainsi nous perdons également notre langue, et c'est un crime que les pensionnats ont commis à l'encontre de notre peuple. C'était une très très mauvaise idée et je pense qu'on peut le dire, mauvaise pour les Autochtones. Certes, les pensionnats nous ont enseigné la civilisation occidentale. Certes, ils nous ont appris comment vivre dans la société d'aujourd'hui. Certes, nous parvenons à vivre un peu de telle manière, mais nous ne pouvons pas vivre de la façon dont nous aimerions vivre.
    Nous sommes un peuple libre, tout comme les autres groupes ethniques de ce pays. Les autres Canadiens sont libres d'exercer leurs croyances et de vivre de la manière dont ils entendent vivre. Notre façon de vivre est d'ordre culturel et traditionnel. Nous vivions jadis au pourtour des forêts et au bord des lacs, car le Bon Dieu nous avait fait don de cette nourriture pour qu'on nous puissions vivre. Il nous a mis sur cette terre pour une raison, car il y avait de la nourriture et que nous pouvions subvenir à nos besoins. C'est la raison pour laquelle Dieu nous a mis ici, et je crois très profondément en Dieu. Nous pouvons l'appeler le Créateur, je sais que vous préférez l'appeler Dieu. Mais c'est la même personne.
    Cela étant dit, j'espère que vous comprenez ce que je dis et que vous en tenez compte.
    Merci.
    J'ai une autre chose à ajouter.
    Nous devons avoir de meilleures communications avec les bureaux régionaux d'AANDC pour mettre en oeuvre les ententes de règlement. Quand nous parlons de certains modèles, Toronto et Ottawa nous accordent leur appui, mais lorsque nous parlons au niveau régional, leur appui disparaît, comme dans le cas du PPCG. C'est maintenant ce qu'ils utilisent pour évaluer les revendications particulières. Or, nous n'avons jamais donné notre accord. Le gouvernement fédéral veut utiliser le PPCG, et nous n'avons pas donné notre accord, et maintenant les bureaux régionaux ne veulent plus l'utiliser non plus.
    Où en sommes-nous donc dans l'entente de règlement? Actuellement, nous avons conclu une entente à l'amiable au sujet d'une plaine submergée, mais il y a également un conflit avec le Manitoba et l'Ontario. Le gouvernement fédéral veut que le Manitoba paie sa part avant de débourser le total de l'indemnité. Nous sommes d'avis que le gouvernement fédéral doit régler la note dans son intégralité. Le gouvernement peut se battre avec les provinces, ou avec qui que ce soit dont il cherche à obtenir de l'argent. On nous doit 100 % de notre réclamation, car le gouvernement fédéral est investi d'une responsabilité fiduciaire à l'égard des Premières Nations.
    Ah, c'est vraiment dommage que je n'aie pas 10 minutes de plus.
    Je vous en ai accordé 12, par générosité.
    D'accord.
    Vous venez d'une région qui a été particulièrement durement touchée. Je me suis rendue dans votre territoire traditionnel à maintes reprises. Je vous remercie de vos propos pleins de sagesse.
    Nous allons retourner à nos questions, aussi aurez-vous peut-être l'occasion de nous fournir plus de précisions.
    Je cède la parole à M. Stetski.
(1255)
    Merci.
    Merci d'être avec nous aujourd'hui.
    Je suis originaire du sud-est de la Colombie-Britannique, soit le foyer des Ktunaxa. Comme je l'ai mentionné devant le groupe de témoins précédent, j'ai eu le plaisir de représenter des municipalités dans le cadre des négociations du traité amorcées par les Ktunaxa. Ces négociations en sont arrivées au stade d'un accord de principe, mais celui-ci n'a pas encore été signé. Les détails sur le traité doivent être revus par les Ktunaxa, de manière très détaillée, pour savoir s'ils veulent vraiment signer l'EP.
    Ma question s'adresse à M. Eyford. Vous connaissez bien la Colombie-Britannique. Je suis un partisan convaincu des traités, car en définitive, je pense qu'ils profitent à tous les partenaires concernés, y compris les Ktunaxa. Comment se fait-il dès lors que plus de la moitié des Premières Nations de Colombie-Britannique aient décidé qu'elles ne voulaient pas poursuivre les traités? Quels sont, à votre avis, certains des obstacles à un traité moderne?
    Pour mettre cela dans un contexte historique, lorsque le processus de négociation des traités de la Colombie-Britannique a été entrepris en 1990, on s'attendait à ce que toutes les Premières Nations de la Colombie-Britannique ne faisant pas partie du Traité no 8 et des traités Douglas sur l'île de Vancouver participent à ce processus. Cela ne s'est manifestement pas concrétisé, et ce, entre autres, parce qu'il y a des organismes comme l'Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique qui représentent les points de vue légitimes de certains de leurs membres, et ont une approche plus fondée sur les droits dans leurs échanges avec la Couronne. Ils réclament la reconnaissance de leurs droits ancestraux non éteints, y compris les titres, et ils estiment que le processus de négociation des traités exige l'extinction de ces droits. Ils ne sont pas disposés à participer à ce processus. Je crois que c'est probablement la principale raison.
    Il y a d'autres communautés que je représente en Colombie-Britannique qui sont sur la voie du développement économique et, franchement, le développement économique offre davantage d'avantages financiers, de possibilités de marchés et d'occasions de formation et d'emploi que n'offre la voie des traités. Aussi, les accords conclus avec l'industrie ne prennent pas des décennies à conclure. Certains groupes considèrent que c'est un moyen plus pragmatique de défendre leurs intérêts.
    Ils ne considèrent pas que ce soit là simplement des mesures intérimaires avant qu'un traité ne soit conclu.
    Certains groupes dans la région de Prince Rupert, plusieurs groupes tsimshians participent au processus de négociation des traités, mais ils n'y participent pas aussi activement qu'ils le font dans le développement du port de Prince Rupert, le développement de terminaux de GNL dans cette région et de gazoducs.
    Monsieur Archie, vous avez commencé en parlant de certaines des négociations réussies que vous avez menées au cours des dernières années. En dehors du fait que vous êtes un excellent négociateur menant à des négociations réussies, quels étaient certains des facteurs qui ont mené à la réussite des négociations? Quels éléments clés contribuent à un règlement ou à un accord à l'issue de ces négociations?
    Nous avons poussé et poussé nos demandes sans répit. Je suppose que nous avons fini par gagner... Le gouvernement a fini par reculer un peu et par décider d'accepter nos demandes, parfois à 100 % et d'autres fois à 50 %...
    Quels étaient certains des problèmes clés? J'aimerais savoir où se situait le débat.
    Nous avons eu, en 1997, la résolution des revendications territoriales d'Assabaska. Les terres étaient un élément très important du règlement. Nous avons pu acheter deux autres parcelles de terre qu'il a été convenu d'intégrer au processus d'ajouts aux réserves. Cela est terminé. Les décrets ont été exécutés et signés. Essentiellement, le problème clé se situait au niveau de l'ajout de terres.
    Comment avez-vous réglé le problème du financement à la fin de ces négociations?
    Il faut que je me rappelle comment cela a été réglé. C'était il y a 21 ans. Je crois qu'ils ont fait grâce du prêt à la fin. Je crois que c'est ça qui est arrivé.
    C'est ce qu'ils proposent pour les demandes d'indemnisation à la suite d'inondations. Ils vont faire grâce des prêts, mais ceci figure encore dans nos écritures comptables, et c'est le gros problème auquel nous sommes confrontés. Nous sommes en train d'emprunter pour des projets de logement et d'infrastructure.
(1300)
    C'est au tour du député Bossio.
    Merci à tous d'avoir fait tant d'efforts pour vous joindre à nous aujourd'hui. Je sais que c'était échelonné, et nous vous sommes vraiment reconnaissants d'avoir fait l'effort de participer à ce groupe de témoins aujourd'hui.
    Lors de notre dernière réunion, je me suis reporté au député Saganash qui n'a pas pu se joindre à nous aujourd'hui. Quand nous avons parlé des Cris du Nord et du fait qu'ils ont négocié une revendication territoriale, et que les négociations se sont poursuivies pendant longtemps, probablement 20 négociations, 20 accords ont été conclus au cours d'une génération. Mardi, avec le Nunavut et l'ITK ici, nous avons parlé du même genre de problème, que ces règlements de revendication doivent être des documents évolutifs.
    Monsieur Eyford, pouvez-vous nous parler de la nécessité de la nature évolutive de ces accords au gré des changements découlant des accords et de conséquences non prévues?
    Je suis d'accord; ce sont des documents évolutifs. Des groupes qui ont conclu des traités se plaignent du fait que, une fois le traité en vigueur, le Canada estime que la relation a pris fin, quand, de fait, c'est une toute nouvelle relation. C'est une relation étendue et compliquée sous bien des aspects. Le Canada a des obligations continues à l'égard des communautés visées par des traités modernes. Il y a, dans ces traités des mécanismes de révision selon lesquels les parties, après un certain temps, doivent revoir la façon dont le traité est mis en oeuvre.
    J'ai parlé de mise en oeuvre dans mes remarques. Un point sur lequel je veux insister porte sur la grande nécessité, au fur et à mesure que des traités modernes sont conclus, que le Canada soit en mesure de mieux coordonner la façon dont il interprète et met en oeuvre ces traités. Si le Canada ne fait pas cela, il y aura d'importantes conséquences négatives.
    C'est crucial pour une véritable relation de nation à nation. C'est un partenariat. Merci beaucoup pour cela.
    J'aurais aimé pouvoir approfondir davantage cet aspect, mais il y a certains autres points que j'aimerais couvrir, en particulier avec M. Stewart.
    Le Manitoba et, je crois bien, la Colombie-Britannique ont aussi un organisme qui effectue de la recherche pour des organismes autochtones provinciaux. Je suppose que l'Ontario n'a pas cette relation. Vous pourriez peut-être revenir un peu sur l'aspect historique du financement de la recherche pour les revendications territoriales. Pouvez-vous nous présenter une fois de plus la perspective historique? Quelles répercussions cela a-t-il sur la capacité de différentes communautés autochtones de négocier ces revendications territoriales et sur l'ampleur de la dette qu'ils finissent par assumer parce que vous ne pouvez plus leur offrir ces services? Est-ce qu'elles laissent simplement tomber cette recherche?
    Je peux parler des répercussions, et je laisserai Patricia parler de l'histoire.
    Le fait que nous allons d'une année à l'autre signifie que nous n'avons pas une assise solide. Nous pouvons recruter du personnel, mais nous ne sommes pas certains de pouvoir le conserver l'année suivante, tout simplement, et cela influe sur tout. Cela influe, une fois de plus, sur le droit des Premières Nations de faire des revendications. Si nous avons une revendication dans nos livres et nous ne pouvons pas y donner suite l'année suivante parce que notre entente de financement est inadéquate, la communauté en souffre parce que la réclamation est mise de côté.
    C'est une des raisons pour lesquelles ces revendications finissent par prendre 25 ou 30 ans à aboutir sur un règlement.
    C'est possible. Dans notre cas, oui, absolument. Mais il y a d'autres raisons aussi. Il y a des raisons politiques. Il y a aussi le fait que les communautés changent leurs intérêts. Enfin, une fois de plus, il y a le manque de ressources que nous accordons parce que le financement n'est tout simplement pas là, et donc, nous ne pouvons donner suffisamment suite à la revendication.
(1305)
    Quand vous aviez un personnel de six personnes, diriez-vous que c'était un niveau de ressources optimal?
    Non.
    Bon. Pouvez-vous nous donner une idée du nombre optimal de ressources dont vous auriez besoin pour pouvoir véritablement effectuer le travail de recherche nécessaire à ces revendications, et quel genre d'économies cela représenterait-il pour les diverses communautés? Nous voyons, dans le cas de M. Archie, que sa communauté a 1,1 million de dollars de dettes et les gens ne pensent qu'à la dette. Ils ne pensent pas à l'autre côté des choses, où brusquement il ne peut plus exécuter d'autres projets d'infrastructure parce qu'il ne peut les financer en raison du niveau d'endettement qui s'ajoute à tout cela.
    C'est exact, et ils ne retirent aucun avantage, juste la dette.
    À ma connaissance, nous n'avons pas encore eu cette influence de tiers au Manitoba, pas au point que d'autres personnes l'ont vécue. Nous sommes dirigés par une Première Nation, et nous rendons des comptes aux membres de notre Première Nation. Quelquefois, c'est presque honteux que nous ne puissions fournir ce que nous voulons fournir. Cela revient principalement à l'état de notre financement fondamental. Il descend lentement, de toute évidence, du niveau fédéral.
    Quel niveau de financement, cependant, serait optimal pour que vous puissiez vous acquitter de vos fonctions?
    C'est vraiment difficile à dire, parce que nous avons tant de revendications sur la planche. Nous ne pouvons même pas faire face à la charge. Nous avons trois chercheurs, je crois, trois chercheurs à plein temps. Tout ce qu'un chercheur peut faire est peut-être une ou deux revendications par année. Ça prend entre six mois et deux ans pour élaborer une revendication. Si nous avons 21 revendications dans notre charge de travail actuelle, elles sont toutes à des étapes différentes — il y a encore d'autres revendications que nous ne pouvons même pas regarder.
    À l'heure actuelle, c'est d'année en année. Une fois de plus, quelle serait une durée plus optimale pour établir les niveaux de financement? Vous pouvez en avoir 21 aujourd'hui, mais, avec un peu d'espoir, si nous trouvons des moyens d'accélérer le processus, cela pourrait varier dans le temps, n'est-ce pas?
    N'importe quoi qui dépasse une entente d'année en année serait fantastique. Sincèrement, ça le serait.
    Est-ce que cinq ans seraient...
    Cinq ans, oui, ce serait un bon départ, tout à fait. Nous pourrions acquérir une assise. Nous pourrions établir notre infrastructure, pour ainsi dire, notre infrastructure de recherche.
    Cela vous permettrait d'accélérer le processus de votre côté également.
    Tout à fait, oui; 100 % au Manitoba, certainement.
    Nous craignons un peu cette influence de tiers parce que je crois qu'elle aurait un effet négatif dans l'ensemble. À mon avis, ce que nous faisons fondamentalement est probablement le meilleur moyen de le faire parce qu'il n'y a pas de coûts imposés aux Premières Nations, et les communautés souffrent déjà comme c'est là.
    Monsieur Viersen.
    Merci, madame la présidente, et merci à nos invités pour leur présence aujourd'hui.
    Monsieur Archie, je suis fasciné. Vous dites que vous travaillez à cinq revendications, que vous en avez réglé trois et que vous avez eu recours au tribunal. Pouvez-vous nous parler un peu de votre expérience au tribunal? L'expérience a-t-elle été positive? La durée a-t-elle été ce à quoi vous vous attendiez?
    À l'heure actuelle, notre réclamation concernant l'autoroute est devant le tribunal, et cette expérience n'est pas très bonne. Pour chaque petit document de preuve que nous présentons, le gouvernement du Canada veut dépenser 10 millions de dollars pour renverser cette petite preuve qui, à notre avis, est un fait, est réelle, est vivante. C'est le problème auquel nous sommes confrontés: le gouvernement du Canada conteste chaque petite preuve que nous présentons. C'est le plus gros problème au niveau du tribunal.
    L'autre problème important, c'est le fait que le gouvernement du Canada peut faire appel de toute décision prise par le tribunal, ce qu'il n'est pas supposé faire sauf s'il y a une erreur juridique quelque part dans la façon dont le tribunal est arrivé à sa décision. Le gouvernement semble en trouver une chaque fois.
    Un appel a été interjeté en Colombie-Britannique, et je devrais en être davantage au courant. Je n'en entends parler que par nos avocats. Le tribunal peut aussi améliorer son fonctionnement.
    Il faudrait aussi fournir un financement, et pas un financement d'emprunt, comme nous en avons parlé. Cela ne fonctionne pas très bien pour les Premières Nations. Cela ne nous sert pas très bien. Pour que nous puissions faire avancer notre cause, nous devrions recevoir un financement par subventions dans ce domaine.
(1310)
    Les durées dans le processus étaient-elles adéquates à votre avis?
    Quelquefois, on a trois semaines pour produire un document ordonné par le juge. Parfois nous n'avons que trois semaines pour nous précipiter et obtenir des renseignements à des moments donnés, surtout lorsqu'on parle d'obtenir des preuves d'aînés. Rassembler tous les aînés prend du temps et leur parler prend du temps. Il faut du temps pour élaborer les bonnes questions, et cela doit se faire au bon endroit.
    Vous dites que vous avez réglé deux de vos revendications. En ce qui concerne la mesure dans laquelle cela prend du temps de réunir les preuves et les autres choses du genre, en ce qui concerne les deux que vous avez réglées, estimez-vous que le rythme auquel la décision a été prise est adéquat? Je sais qu'en général, les deux côtés tentent de réunir des documents, tentent de rassembler des témoignages.
    Nous avons entendu dans des témoignages que rien n'aiguillonne cela plus qu'une date, une date précise. Les deux côtés ressentent de la frustration, à l'occasion, dans leurs tentatives de réunir tout ce qu'il faut, et la date les stimule souvent à avancer plus rapidement. Diriez-vous que c'est ce que vous avez vécu?
    En 1997, c'est par le truchement de négociations que la revendication territoriale de l'Assabaska a été réglée.
    J'ai oublié la dernière partie de votre question, parce que je réfléchissais quand vous parliez.
    Le rythme était-il bon?
    Non, le rythme n'était pas bon. Cela a pris plus de 25 ans pour que cette revendication soit finalement réglée, parce que les deux ordres de gouvernement ne voulaient pas venir à la table. Cela a pris un blocus sur une autoroute pour que les deux gouvernements se présentent à la table, surtout en ce qui concerne la revendication liée à l'autoroute. À l'époque, j'étais conseiller et j'étais négociateur. Les membres m'ont ordonné d'organiser un blocus parce que le gouvernement ne voulait pas nous écouter; il nous écouterait peut-être si nous faisions cela, une mesure extrême.
    J'ai une autre question qui s'adresse à M. Stewart pour mes 30 dernières secondes.
    Quelle est la structure organisationnelle du TARR Centre of Manitoba? Est-ce un organisme à but non lucratif?
    Il est à but non lucratif
    Sous-traite-t-il la majeure partie de son travail?
    Non, le travail se fait principalement à l'interne, parce que c'est tout ce que nous pouvons nous permettre.
    Bon, merci.
    Cela met fin au temps que nous avions.
    Merci beaucoup d'avoir pris la peine de voyager, de vous présenter, d'être patients et de collaborer avec nous dans une structure de comité parlementaire quelquefois difficile.
    Nous tiendrons compte de vos paroles et de votre témoignage. Vous pouvez présenter votre témoignage. Assurez-vous de présenter vos mémoires. Notre rapport ira directement au Parlement du Canada, puis nous demanderons probablement au ministère de réagir en fonction de nos recommandations.
    Veuillez garder le contact. Surveillez le site Web pour y voir, espérons-le, quelques développements positifs à ce sujet.
    Meegwetch. Merci beaucoup.
    La séance est levée.
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