Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. McLean, qui se joint à nous en remplacement de M. Mazier, et à Mme Vignola, qui remplace Mme Pauzé.
Je vous souhaite la bienvenue au Comité.
Mme Elizabeth May est avec nous également, ce soir, depuis la côte Ouest, si je ne m'abuse.
Ceux qui sont autour de la table, peuvent retirer leurs masques lorsqu'ils sont assis et qu'ils participent à la réunion. S'ils ne sont pas assis à la table, ils devront alors porter leurs masques. On demande à tous ceux qui se lèvent pour circuler dans la salle de porter le masque.
Nous sommes prêts à commencer. Je signale à Mme Vignola et à M. McLean qu'il s'agit de la deuxième réunion de cette étude sur les subventions aux combustibles fossiles.
Je demanderais à ceux qui participent à la réunion par l'entremise de l'application Zoom de se mettre en sourdine lorsqu'ils n'ont pas la parole.
C'est à peu près tout ce que j'ai à vous dire par rapport à cela.
J'ai deux points à soulever rapidement auprès des membres du Comité. Premièrement, j'avais espéré tenir une rencontre du comité directeur jeudi prochain, mais c'est la journée du budget et on me dit que les whips étaient d'accord pour ne pas tenir de réunions de comités ce soir-là. Nous ne pourrons donc malheureusement pas nous réunir.
Deuxièmement, pour l'étude, il a été proposé d'inviter le commissaire à l'environnement et au développement durable. Son nom n'a pas été proposé sur les listes remises au greffier pour l'étude. Je demande donc votre permission, exceptionnellement, de l'inviter à comparaître dans le cadre de l'étude. Tout le monde est-il d'accord? Il semble que oui. C'est parfait.
C'est à peu près tout ce que j'ai à dire avant que nous ne passions à notre premier groupe de témoins.
Nous accueillons Dale Beugin, vice-président, Recherche et analyse, de l'Institut climatique du Canada. De Protection environnementale du Canada, nous accueillons Julia Levin, responsable du programme climat et énergie. Du Conseil des ressources indiennes Inc., nous accueillons Stephen Buffalo, président-directeur général.
Nous allons commencer par les déclarations liminaires et chacun aura trois minutes.
Je vous remercie de me donner l'occasion de discuter de cette question importante.
Je m'appuierai sur un récent rapport de mes collègues de l'Institut climatique canadien, Rachel Samson, Don Drummond et Peter Phillips. Leur rapport adopte une perspective économique. Il évalue si les mesures gouvernementales favorisent ou entravent la croissance économique à long terme du Canada et la transition sans heurt pour les travailleurs et les communautés au regard de l'accélération de la décarbonisation sur les marchés mondiaux.
Notre étude met de côté les définitions de « subvention » et « d'inefficacité » et vise à évaluer les politiques en fonction de quatre critères: la cohérence avec la transition, l'optimisation du financement, les résultats sur le plan de l'emploi et l'harmonisation avec les orientations stratégiques.
Je vais vous présenter trois résultats précis.
Premièrement, la transition mondiale vers une économie à faibles émissions de carbone constitue un changement structurel, et non un bouleversement temporaire. Même si les gouvernements peuvent être tentés de protéger les entreprises, les travailleurs et les communautés contre l'évolution des marchés, les secteurs et les régions concernés s'en sortiront mieux si l'on adopte des stratégies qui les aideront à se préparer à l'émergence d'une économie à faibles émissions de carbone et à prospérer au sein de cette économie.
Deuxièmement, le secteur des combustibles fossiles n'est plus la source sûre de croissance économique et de création d'emplois qu'il était autrefois. En effet, la demande en charbon, en pétrole et en gaz diminuera à l'échelle mondiale, quoiqu'on ne sache pas avec certitude quand cela se produira ni comment se déclinera cette diminution au cours de la prochaine décennie. Les investissements publics dans les actifs relatifs aux combustibles fossiles de longue durée comportent désormais des risques et peu d'avantages assurés pour la société, même dans le cadre des bouleversements que connaissent actuellement les marchés de l'énergie.
Troisièmement, les gouvernements doivent faire des choix difficiles pour allouer leurs fonds limités. Les investissements publics dans la décarbonisation de la production des combustibles fossiles pourraient procurer moins d'avantages économiques que les investissements réalisés dans des secteurs susceptibles de profiter d'une partie des marchés en croissance des opportunités relatives à la transition, notamment du marché de l'hydrogène, de celui de l'extraction de minéraux pour batteries et de celui de la production d'acier à faibles émissions de carbone.
Je terminerai par cinq recommandations.
Premièrement, l'aide publique aux entreprises pétrolières et gazières doit prioriser la transition vers de nouveaux secteurs d'activité compatibles avec la transition. Par exemple, les avantages à long terme du captage, de l'utilisation et du stockage du carbone se feront surtout sentir sur le plan de l'élimination du carbone ou du traitement des émissions attribuables aux procédés dans l'industrie lourde plutôt que sur le plan de la décarbonisation de la production actuelle de pétrole et de gaz.
Deuxièmement, le Canada doit maximiser les rares fonds publics en réalisant des investissements publics qui complémentent les politiques sur la tarification et la réglementation du carbone plutôt que de financer les entreprises pour qu'elles respectent les mesures connexes. Par exemple, pour réduire les émissions fugitives attribuables au secteur du pétrole et du gaz naturel, il serait préférable d'améliorer la réglementation sur le méthane que de financer la réduction des émissions de méthane au moyen du Fonds de réduction des émissions de RNCan.
Troisièmement, dans le cadre de toutes ses décisions stratégiques, le Canada doit tenir explicitement compte des futures conditions du marché mondial et du marché intérieur ainsi que du risque d'actifs délaissés. Par exemple, Exportation et développement Canada doit continuer de réduire ses activités en lien avec la production de combustibles fossiles.
Quatrièmement, le Canada doit se concentrer sur la mobilisation des investissements privés et le partage des risques au lieu de transférer entièrement les risques des entreprises privées vers des entités publiques. Par exemple, l'aide pour l'assainissement des puits de pétrole et de gaz abandonnés doit être temporaire et cibler les entreprises qui courent le plus de risques de déclarer faillite.
Enfin, le Canada doit en priorité s'assurer que les nouvelles mesures stratégiques favorisent la réussite de la transition, comme le crédit d'impôt fédéral à l'investissement pour le captage, l'utilisation et le stockage du carbone. Ensuite, le gouvernement pourra passer à des mesures plus difficiles, comme l'élimination progressive des exemptions à la tarification du carbone dans le cas de l'essence utilisée pour les activités agricoles.
Merci beaucoup, et je suis prêt à répondre à vos questions.
Le mois dernier, la communauté scientifique internationale a brossé le tableau le plus noir jamais présenté de l'avenir qui nous attend si nous ne réagissons pas à la crise climatique et ne limitons pas l'augmentation de la température à 1,5 degré Celsius.
Nous savons que, pour éviter la catastrophe, notre économie doit se libérer progressivement de sa dépendance aux combustibles fossiles d'ici 10 ans. Nous avons les solutions pour construire un avenir énergétique propre, et nous savons que la transition vers le renoncement aux combustibles fossiles rendra l'énergie beaucoup plus abordable, plus sûre et créera de meilleurs emplois.
Aujourd'hui, Environmental Defence a publié un rapport sur les subventions aux combustibles fossiles. Nous y constatons qu'en 2021, le gouvernement du Canada a investi pour au moins 8,6 milliards de dollars dans le secteur pétrolier et gazier, directement ou par l'intermédiaire d'Exportation et développement Canada. Cela représente 8,6 milliards de dollars dont on prive le trésor public pour réduire le coût de production de combustibles fossiles qui détruisent notre planète. Pour vous situer en contexte, sachez qu'il s'agit d'un montant comparable à celui annoncé dans le PRE, qui doit être dépensé sur sept ans.
Notre rapport contient aussi la première estimation du financement public accordé aux projets de captage, d'utilisation et de stockage du carbone au Canada. La population canadienne a dépensé 5,8 milliards de dollars depuis l'an 2000 et seulement 3,5 millions de tonnes de carbone ont été captées par année, ce qui représente 0,05 % des émissions de gaz à effet de serre du Canada. Par ailleurs, 70 % du carbone capté est utilisé pour accroître la récupération du pétrole, autrement dit, pour augmenter la production pétrolière. Cela signifie que les énormes subventions versées par le gouvernement n'ont pas fait chuter les émissions et qu'elles les ont fait augmenter.
Les sociétés pétrolières et gazières savent que les technologies qu'elles utilisent ne changeront pas grand-chose aux émissions, mais elles persistent à s'en servir pour justifier le maintien, voire l'expansion, de la production de combustibles fossiles.
Malheureusement, comme on le constate dans le PRE, le gouvernement se fait berner. Les subventions pour le piégeage du carbone sont appelées à croître de manière exponentielle. Bien qu'elles engrangent des bénéfices considérables, les compagnies pétrolières et gazières demandent aux gouvernements de verser plus de 50 milliards de dollars pour équiper les sables bitumineux d'un système de captage du carbone et font pression pour obtenir un crédit d'impôt à ce titre.
Si la ministre Freeland annonce ce crédit d'impôt la semaine prochaine et le rend disponible pour les projets pétroliers et gaziers, y compris pour l'hydrogène fossile, cela créerait une nouvelle subvention importante pour les combustibles fossiles qu'il sera difficile d'annuler ensuite.
Les mesures les plus importantes pour décarboner l'économie canadienne consistent à électrifier les transports, à étendre l'utilisation des énergies renouvelables et à améliorer l'efficacité énergétique, mais le gouvernement y a apporté un faible soutien, disons une fraction de ce que reçoivent les compagnies pétrolières et gazières.
Toutes les subventions aux combustibles fossiles sont inefficaces et doivent être éliminées progressivement. À cette fin, nous exhortons le gouvernement du Canada à éliminer toutes les subventions, le financement public et les autres mesures de soutien financier offertes au secteur pétrolier et gazier d'ici la fin de l'année, selon l'échéancier indiqué par l'AIE. Cela veut dire un soutien financier fourni par l'entremise d'Exportation et développement Canada sans échappatoires pour le gaz, l'hydrogène fossile ou le CUSC, tout cet appui devant être réorienté vers les solutions éprouvées qui permettront d'accorder la part du lion à la réduction des émissions et d'assurer une transition équitable pour tous vers une économie axée sur les énergies renouvelables.
La voie vers la carboneutralité et un avenir sans danger pour le climat ne passent pas par le versement de subventions ou par le financement public pour l'industrie pétrolière et gazière.
Merci. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
Merci, monsieur le président et distingués membres du Comité, de me donner l'occasion de prendre la parole aujourd'hui.
Je m'appelle Stephen Buffalo et je suis PDG du Conseil des ressources indiennes du Canada.
Notre organisation représente plus de 130 Premières Nations qui ont un intérêt direct dans l'industrie pétrolière et gazière. Notre mandat est de promouvoir des politiques fédérales qui amélioreront et démultiplieront les possibilités de développement économique pour les Premières Nations et leurs membres. C'est avec une certaine inquiétude que je m'adresse à vous aujourd'hui.
Notre organisation et nos membres se soucient profondément de notre mère la Terre. Bon nombre des choses qui ont été décrites comme des subventions aux combustibles fossiles sont des programmes et des fonds qui appuient directement nos collectivités des Premières Nations et leur participation dans le secteur. Ces mesures visent à corriger certains des torts économiques qui ont été causés aux Premières Nations par le passé.
Bon nombre de ces programmes sont bons pour l'environnement et nous aident à récupérer les terres de nos réserves, où nous chassons, cueillons des baies et cueillons des remèdes pour que les générations futures puissent en profiter. D'autres initiatives visent à alléger le coût élevé de la vie pour nos gens, surtout pour ceux qui vivent dans des collectivités rurales et éloignées, afin qu'ils puissent avoir accès à des choses de base comme le chauffage, l'électricité, des aliments abordables et à une aide médicale. Cependant, comme ils travaillent dans le secteur pétrolier et gazier, ils sont considérés comme non méritoires.
Je crois savoir que certains membres du Comité veulent se débarrasser de ces programmes, mais je ne comprends pas leur logique. Je ne vois pas en quoi cela est conforme aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation, à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones ou à l'honneur de la Couronne.
Quand j'ai examiné pour la première fois ce qui est considéré comme une subvention aux combustibles fossiles et ce que le comité tente d'éliminer, je n'ai pas pu trouver de sources gouvernementales officielles. J'ai trouvé des rapports d'ONG qui les détaillent, et je suis franchement choqué. L'un de ces rapports concerne le financement d'une centrale diesel de la Première Nation de Nibinamik. L'autre porte sur l'investissement de Services aux Autochtones Canada dans des projets de gaz naturel et de diesel, ou sur le soutien des prix de l'électricité pour la communauté autochtone.
Honnêtement, il n'y a pas d'autre solution que le diesel dans bien des endroits. Si vous pensez que nos gens ne méritent pas d'être chauffés ou alimentés à l'électricité parce que le pétrole est l'énergie de départ, cela en dit long sur ce que vous pensez des peuples autochtones.
J'ai aussi vu que les pipelines de Trans Mountain et de Coastal GasLink étaient sur la liste parce que les exploitants avaient obtenu des prêts et non des subventions. Vous savez probablement au sujet de Trans Mountain que de nombreux groupes autochtones essaient d'acheter ce pipeline au gouvernement fédéral. L'analyse de rentabilisation est solide. Quelle que soit la façon dont cet actif sera réparti, il rapportera des revenus stables, prévisibles et durables à nos collectivités. Cela va nous aider à être plus indépendants sur le plan financier et à avoir de l'argent que nous pourrons dépenser, ce que nous jugeons important, plutôt que ce que le gouvernement décide pour nous, comme en vertu de la Loi sur les Indiens et de ce régime.
C'est la même chose pour Coastal GasLink. Pas plus tard que ce mois‑ci, on a annoncé que 16 des Premières Nations situées le long du tracé avaient conclu une entente de participation pour acheter jusqu'à 10 % du pipeline. Elles ont demandé au gouvernement fédéral de les aider et de leur accorder des prêts pour qu'elles puissent devenir propriétaires à hauteur de 30 %, mais notre gouvernement a refusé parce qu'il s'agit d'un gazoduc. Je ne pense pas avoir besoin de vous rappeler à tous que le monde a besoin d'une énergie plus propre.
Ce qui me dérange le plus, c'est le financement du programme de remise en état des puits orphelins et inactifs. C'est aussi sur la liste. Dans le cadre de la relance liée à la COVID‑19, le gouvernement fédéral a engagé 1,7 milliard de dollars pour nettoyer les puits orphelins et les installations pipelinières.
Comme nous avons dépassé le délai d'environ une minute, nous allons devoir nous arrêter ici, mais j'ai l'impression que nous aurons une excellente discussion ce soir, et tout le monde aura l'occasion de donner son point de vue en répondant aux questions.
Nous allons commencer la première série de questions avec M. Dreeshen, pour six minutes.
J'aimerais m'adresser à M. Buffalo du Conseil des ressources indiennes.
Je connais beaucoup de gens originaires de votre communauté. J'ai entraîné des équipes de hockey qui ont joué dans vos arénas, et je connais les services que vous offrez à votre communauté. Je vous écoute, je vous parle, mais je ne parle pas en votre nom. Je crois que c'est vraiment notre principal problème. J'ai siégé au Comité des affaires autochtones et du développement du Grand Nord, où nous avons parlé de la Commission de vérité et réconciliation, de l'honneur de la Couronne, de la DNUDPA, etc. Nous avons eu des discussions avec votre communauté, et je pense que c'est très important. Il y a tant de groupes — des ONG, des vedettes du cinéma, des responsables politiques, des artistes et des gouvernements — qui prennent la parole à tour de rôle en votre nom.
On vient de nous parler du plan de réduction des émissions d'ici 2030, qui va toucher tous les secteurs des ressources naturelles. Cela aura une incidence sur le territoire et sur les activités qui, comme les activités agricoles, sont utiles à tous les membres de vos communautés. Cela aura une incidence sur vos investissements et sur la rentabilité de vos efforts.
Pourriez-vous nous parler des consultations que vous avez menées dans le cadre de l'élaboration de ce plan?
Nous faisons tout pour avancer. L'objectif est évidemment d'éliminer la pauvreté. Le Canada a la chance d'avoir des ressources naturelles. Personne ne devrait être privé d'eau potable et de meilleurs logements, sans parler des problèmes sociaux associés à la pauvreté. Dans le secteur des ressources naturelles, nous essayons de trouver un équilibre entre la protection de l'environnement et la réduction des émissions de gaz à effet de serre. C'est ce que nous faisons actuellement dans le cadre du programme de remise en état des sites. Nous avons conclu un partenariat avec l'Alberta. Nous sommes très fiers de ce que nous avons fait.
Concernant la consultation, je sais qu'on n'a consulté aucun des membres du Conseil des ressources indiennes et qu'on ne leur a même pas posé de questions au sujet de cette subvention pour le carburant. Vous savez, c'est là que tout commence.
J'aimerais simplement savoir, d'après votre expérience, combien d'ONG représentent effectivement les aspirations des communautés autochtones. Existe‑t‑il des ONG dont le travail a nui aux objectifs de vos communautés? Je crois vous avoir entendu dire que vous en aviez vu de toutes sortes.
Cela dit, pour rester dans le délai, vous avez parlé du programme conjoint de nettoyage des puits orphelins avec l'administration provinciale et le gouvernement fédéral. Vous craignez que ce soit rayé de la liste parce que chacun tient à prouver qu'il en sait plus long que vous. Ces puits ont fait l'objet de beaucoup de mesures et ont permis d'apprendre beaucoup de choses. Quelles leçons pourriez-vous en tirer pour notre bénéfice en matière d'assainissement de l'environnement et de réduction du méthane?
Dans le cadre du programme des puits orphelins, l'Alberta nous a donné 113 millions de dollars pour nettoyer les terres des Premières Nations. Nous avons modifié plus de 1 600 puits, pipelines et installations. Nous avons commencé huit mois après tout le monde. Nous sommes la vedette de ce programme. Nous avons demandé une prolongation pour faire encore plus de travail.
Concernant les émissions de méthane dans l'atmosphère, d'après les données de l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta, il y a eu des fuites dans 933 de ces 1 600 puits. Cela équivaut à 2,6 millions de tonnes de méthane par an. Donc, 220 millions de tonnes d'équivalent CO2 égalent environ 250 000 voitures de moins sur la route. Nous faisons notre part. Nous sommes en train de réparer le gâchis.
Nos réserves ne s'agrandissent pas. Notre masse terrestre ne s'étend pas. Notre population et notre démographie sont en croissance, et il faut donc nettoyer le territoire. C'est un programme qui nous a permis de travailler en partenariat non seulement avec le gouvernement de l'Alberta, mais aussi avec le secteur privé, et nous en sommes très fiers. Il a permis d'employer plus de 250 jeunes Autochtones qui sont fiers de nettoyer le territoire.
Merci. Vous savez, historiquement, il n'y a pas si longtemps, le bois, le gras animal, le fumier, etc. étaient les carburants utilisés par tous nos ancêtres. Et, évidemment, des milliards de personnes sur cette planète l'utilisent encore pour leurs besoins essentiels.
J'aimerais savoir. Connaissez-vous des groupes qui ont la compassion et la clairvoyance nécessaires pour parler au nom de ces communautés? Ou s'agit‑il simplement de mesures visant à repenser le monde occidental moderne, dont vous faites partie et dont vous avez fait l'expérience au cours de votre vie?
Vous avez parlé de notre histoire et de ce qui était utilisé dans le passé. Avec le temps, la technologie a évolué. Quand je vois des pêcheurs de Musqueam accoster, ils n'arrivent pas en pagayant. Ils manœuvrent deux gros bateaux lourds à haute puissance. Pour des raisons d'efficacité. Certains de nos membres pratiquent encore le piégeage. Ils utilisent une motoneige ou un véhicule à quatre roues motrices. Toujours par souci d'efficacité. Nous avons dû nous adapter.
Que je sache, je n'ai jamais rencontré de Première Nation qui se dirait fière qu'une ONG parle en son nom au sujet de son territoire. Ce sont les dirigeants de chaque communauté qui décident de ce qui convient le mieux à leurs membres selon leur mode de vie. On parle de cette orientation, mais on ne parle jamais de la Loi sur les Indiens et des effets qu'elle a sur nous. Aucun parti fédéral n'a encore fait quoi que ce soit pour l'éliminer — ni les conservateurs, ni les libéraux, ni le Parti vert, ni le Bloc.
Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous les témoins de leur présence et de leurs exposés préliminaires.
J'aimerais commencer par M. Beugin, de l'Institut climatique du Canada.
Monsieur Beugin, vos antécédents révèlent que vous êtes un expert en politique environnementale et en économie, et j'en suis ravie. À mon avis, vos observations traduisent un équilibre entre les deux. Nous savons tous à quel point il est important de veiller à ce que nos politiques environnementales favorisent la croissance économique et soutiennent notre économie.
J'aimerais savoir. Dans la lettre de mandat de 2021 de la vice-première ministre et ministre des Finances, la ministre Freeland est invitée à « travailler avec le ministre de l'Environnement et du Changement climatique, et avec l'appui du ministre des Ressources naturelles, pour accélérer notre engagement dans le cadre du G20 d'éliminer les [...] combustibles fossiles de 2025 à 2023 ».
D'après vous, le Canada peut‑il atteindre cet objectif tout en favorisant une économie forte? Deuxièmement, est‑ce le bon moment pour le faire, puisque nous sommes manifestement en période de transition et que c'est une période difficile? Est‑ce faisable à votre avis?
Madame la députée, pour être plus sûr, est‑ce que vous parlez de l'objectif de réduction des émissions ou de l'élimination progressive des subventions aux combustibles fossiles?
Je crois avoir laissé entendre que l'élimination progressive des subventions aux combustibles permet souvent de soutenir la croissance économique et que la gestion prudente des fonds publics est indispensable à la prospérité à long terme. Compte tenu des transitions mondiales et de la profonde transformation des marchés internationaux, les pays représentant 90 % du PIB mondial se sont engagés à atteindre la carboneutralité.
S'ils donnent suite à ces engagements, cela transformera radicalement la demande de produits de combustibles fossiles et modifiera complètement les retombées à long terme des investissements, aussi bien publics que privés, dans ce secteur d'activité. Du point de vue du soutien de la croissance économique et de la gestion prudente des deniers publics, l'élimination progressive de ces subventions tient la route aussi bien sur le plan économique que sur le plan environnemental.
Il semble que, à vos yeux, cette transformation se produira quoi qu'on fasse. En fait, on ne fait que prendre les fonds d'un secteur pour les investir dans quelque chose de plus productif, parce que cette profonde transformation se produira de toute façon.
Monsieur Buffalo, j'ai aussi une question pour vous. J'ai trouvé vos observations et votre perspective très intéressantes, et je vous remercie d'être ici pour représenter les Premières Nations.
Comme M. Dreeshen l'a dit dans son exposé préliminaire, nous ne pouvons pas parler au nom des Premières Nations. Nous ne pouvons pas vous représenter. Nous devons travailler avec vous.
Nous avons entendu d'autres représentants des Premières Nations qui ne partagent pas votre point de vue et qui ont une perspective différente sur les combustibles fossiles, sur l'industrie et sur ce qu'il faut faire.
Diriez-vous qu'il existe toutes sortes de points de vue parmi les Premières Nations au sujet de l'exploitation des combustibles fossiles?
Absolument, mais cela renvoie à un manque de compréhension. Évidemment, quand on met la science derrière l'argent et l'argent derrière la science, les opinions sont polarisées et, évidemment aussi, quand on parle de fonds publics, c'est de l'argent qui vient de quelque part. En ce moment, nous avons un gouvernement qui ouvre simplement un coffre magique dont il sort de l'argent pour financer certaines choses. C'est là qu'il y a polarisation.
Je sais que nous manquons de beaucoup de capacité dans certains domaines, et il y a aussi de la désinformation. Quand les choses sont à sens unique, quand le gouvernement ne peut donner qu'une seule version au sujet de certaines questions, il s'ensuit que, sans consultation équilibrée... Comme je l'ai dit, aucun de nos membres n'a été consulté à ce sujet. Certaines Nations ou communautés vous ont peut-être dit qu'elles sont en faveur de la fermeture complète de ce secteur d'activité, mais il nous a beaucoup apporté.
Pourquoi je pense que c'est le cas? Eh bien, comme je le disais, beaucoup de messages ne sont pas clairs et ne sont pas transmis correctement.
Actuellement, des enseignants nous disent que les sables bitumineux sont mauvais, alors que les revenus qu'ils génèrent et les emplois qu'ils permettent de créer sont toujours une bonne chose. Concernant le captage du carbone, en effet, cette solution ne répond peut-être pas à toutes vos exigences actuelles, mais elle n'en est pas loin, et je parie que les générations à venir régleront cela pour nous.
Vous avez également dit que vous et le groupe que vous représentez êtes très inquiets pour la planète et pour l'environnement. Vous avez dit que certains projets vous semblent bons pour l'environnement. Pourriez-vous me donner un exemple de programme dans le secteur des combustibles fossiles qui, selon vous, serait bon pour l'environnement.
Si une Première Nation investit à titre de propriétaire, par exemple, de Coastal GasLink, les recettes qu'elle en tire ne sont pas assujetties au régime communiste de la Loi sur les Indiens. C'est ce que cela apporte de positif.
Nous sommes tellement en retard à cet égard. Nous ne participons pas à ces discussions. Vous ne faites participer que ceux qui sont vraiment d'accord avec vous. Cela fait partie du problème.
Madame Levin, lors de votre comparution au Comité permanent des ressources naturelles, le mois dernier, vous avez déclaré que, même en utilisant le captage et le stockage du carbone, nous ne pourrions éliminer qu'entre 3 et 9 % du carbone produit tout au long du cycle de vie du pétrole et du gaz.
Durant l'actuelle législature, M. Wilkinson a publiquement dit que la technologie du captage, du stockage et de l'utilisation du carbone, ou CUSC, ne serait pas dans la boîte à outils d'ici 2030, en raison de sa maturité commerciale et de ses coûts. Or, cette semaine, on a assisté à un coup de théâtre lorsqu'on nous a présenté le Plan de réduction des émissions pour 2030, qui contient un crédit d'impôt pour le CUSC.
Pouvez-vous commenter cette annonce au vu des déclarations de M. Wilkinson, tout en indiquant ce qui serait réalisable dans un horizon de cinq à sept ans au sujet des énergies vertes?
Je vous serais reconnaissante de le faire en deux minutes, étant donné que j'ai peu de temps.
M. Wilkinson a fait diverses déclarations au sujet du CUSC. Il a déjà publiquement déclaré que le captage et le stockage du carbone ne feraient pas partie des moyens d'atteindre les objectifs de 2030 en raison des échéanciers nécessaires à la conception et à la réalisation de ces projets, et pourtant il a présenté un plan qui mise fortement sur le CUSC pour réduire considérablement des émissions. Le ministre Guilbeault a déjà dit que le CUSC n'entre pas en ligne de compte dans les objectifs de 2030. Je tiens à souligner cet écart.
Il est tout simplement très risqué de miser sur une technologie spéculative qui n'a pas encore fait ses preuves pour réaliser une grande partie des réductions d'émissions que nous nous attendons à obtenir avant 2030 à l'échelle mondiale. J'ai parlé de la capacité du Canada à capter moins de 0,05 % de nos émissions, et la plupart de ces émissions sont liées à la récupération assistée du pétrole.
Cette technologie existe depuis 30 ou 40 ans et a été fortement subventionnée pendant toute cette période, mais, encore aujourd'hui, nous captons moins de 40 mégatonnes à l'échelle mondiale. Cela représente 0,001 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Cette technologie surfaite s'est révélée peu performante.
L'un des vrais enjeux du captage et stockage du carbone dans le secteur pétrolier et gazier est que cela ne tient pas compte de 80 % du problème, c'est‑à‑dire des émissions en aval provoquées par la combustion des combustibles fossiles dans nos voitures et dans nos maisons.
Je comprends que les succès en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre sont plus notables en Europe et que leurs lois sont plus sévères que les nôtres, notamment au Royaume‑Uni et en France. Le tout est jumelé à la volonté des membres de l'Union européenne, qui porte ses fruits, en somme.
Hier, on apprenait que, en 2021, les sources d'énergie solaire ont connu une croissance de 23 % et les sources d'énergie éolienne en ont connu une de 14 %, et c'est sans parler des autres énergies, notamment la géothermie.
On entend souvent dire que la prévisibilité de l'environnement réglementaire et des politiques publiques est d'une importance capitale si le Canada souhaite attirer des investisseurs réellement tournés vers l'avenir et les générations futures.
Une étude du groupe Ember nous apprenait récemment qu'un taux de croissance des énergies vertes de 20 % maintenu sur 10 ans permettrait de limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius.
Madame Levin, le potentiel économique d'un investissement massif dans les énergies vertes m'apparaît évident, surtout de la part de l'État, qui donnerait enfin l'exemple et mettrait la machine en marche. Qu'en pensez-vous?
Les retombées économiques seraient-elles aussi intéressantes que les retombées environnementales pour les générations présentes et, surtout, les générations futures?
Il faut vraiment investir dans l'expansion des énergies renouvelables au Canada, qui est nettement en deçà de son potentiel en matière d'énergies renouvelables et de production d'électricité provenant d'énergies renouvelables en dehors de l'hydroélectricité. Le rendement du capital investi est énorme. La construction d'une nouvelle source d'énergie renouvelable coûte moins cher que la production d'énergie à partir de combustibles fossiles. Du point de vue de la création d'emplois et des avantages connexes, de l'assainissement de l'air et de la création d'emplois dans toutes les collectivités du pays, il est absolument nécessaire d'investir dans les énergies renouvelables.
Le soutien de la population est également nécessaire, car les combustibles fossiles ont un énorme avantage par rapport au secteur des énergies renouvelables. C'est pourquoi il faut investir des fonds publics dans ce que nous voulons voir advenir. Jusqu'ici, on a prévu moins de 2 milliards de dollars sur quatre ans pour le secteur des énergies renouvelables. Un crédit d'impôt à l'investissement a également été promis pour les énergies renouvelables et les batteries. On n'en voit toujours pas la couleur, et pourtant nous accélérons les choses du côté du crédit d'impôt pour le captage du carbone et nous continuons de subventionner les combustibles fossiles.
Êtes-vous au fait des demandes des gens qui travaillent dans le domaine de l'énergie pétrolière et qui ont des craintes quant au transfert de leurs compétences vers le domaine des énergies renouvelables?
Je ne sais pas très bien ce que l'on craint, mais il est certain que, dans le cadre du recyclage aussi bien de nos VE et de nos batteries que de nos énergies renouvelables, il est important d'adopter les solutions de l'économie circulaire pour réduire au minimum les répercussions environnementales. Il faut également tenir compte de ces chaînes d'approvisionnement et s'assurer de ne pas causer de tort indu aux collectivités sur les terres desquelles elles se trouvent...
Que pensez-vous de l'idée qu'il faudrait éviter de définir trop strictement les subventions et leur efficacité. Pour respecter les engagements internationaux du gouvernement d'éliminer progressivement les subventions aux combustibles fossiles, n'aurait‑on pas besoin d'une définition claire de ce qu'est une subvention et, idéalement, d'une définition qui s'harmonise avec les normes convenues à l'échelle internationale?
En effet, je dirais qu'il est utile d'avoir des définitions claires pour s'assurer que tous abordent la question de la même façon à l'échelle mondiale. Il est vrai que nous nous perdons parfois dans ces définitions au point d'en oublier la forêt derrière les arbres, et cela peut être très dangereux.
On pourrait simplement dire que toute forme de soutien du secteur public — de financement public — accordée au secteur privé est une subvention et qu'elle doit être éliminée.
Ce qui m'inquiète dans l'utilisation du mot « inefficace », c'est qu'il n'y a pas de définition convenue de ce terme et que des gouvernements comme celui du Canada peuvent s'en servir comme échappatoire pour continuer à subventionner le secteur des combustibles fossiles. Des pays comme l'Italie, comme on vous l'a expliqué l'autre jour, viennent de conclure que toutes les subventions sont inefficaces; c'est une façon d'aborder la question.
Je pense qu'il doit y avoir un équilibre entre une définition convenue qui interdise aux gouvernements d'utiliser des termes ambigus pour se soustraire à des mesures réelles, mais qui nous permette de fixer des objectifs comparables à ceux de nos pairs.
Dans le même ordre d'idées, vous avez dit que l'Italie, comme le Royaume-Uni, d'ailleurs, a récemment conclu que toutes les subventions aux combustibles fossiles sont inefficaces. Au moment où le Canada, largement en retard, procède à son examen par les pairs du G20 avec l'Argentine, quelles leçons peut‑il tirer de ces conclusions?
L'une des conclusions les plus importantes est le sentiment d'urgence. La plupart des pays ont terminé leurs examens par les pairs en 12 à 16 mois. Le Canada approche de la quatrième année, et on n'a pas encore vu la partie auto-évaluation, sans parler de ce qui se passe quand les deux pays se partagent... Cela illustre bien le manque d'empressement avec lequel le gouvernement s'est attaqué à ce problème.
Nous avons parlé de la période de 2005 à 2030, mais je rappelle aux membres du Comité qu'il s'agit d'une promesse faite en 2009. Nous avons eu beaucoup de temps pour agir.
Quant aux conclusions, j'aimerais attirer l'attention sur certains examens par les pairs, notamment celui de l'Italie, mais aussi sur le fait que les États-Unis et la Chine ont fait l'objet d'un examen par les pairs avec beaucoup de... Faire l'inventaire est bien beau, mais ce qui compte surtout, c'est la réforme et la prise en compte des mesures proposées dans les autres examens pour réformer le secteur des combustibles fossiles.
En 2021 seulement, Exportation et développement Canada a investi plus de 5 milliards de dollars dans les combustibles fossiles. Si le gouvernement tient sa promesse de mettre fin au financement public des combustibles fossiles, y a‑t‑il des modifications que vous recommanderiez d'apporter à la Loi sur l'expansion des exportations?
Il faut prévoir des principes d'exclusion dans la loi. Nous avons ciblé la société d'État EDC, mais il y a beaucoup de sociétés d'État qui donnent de l'argent au secteur des combustibles fossiles, et le problème est que personne ne fait de suivi. C'est une très lourde tâche qu'assument deux ou trois personnes au sein du mouvement climatique canadien, et c'est tout. Personne d'autre ne fait ce suivi. La CDIC, TMC... il y a des tas de sociétés.
Nous avons besoin d'une loi. Pour remplir la promesse d'éliminer progressivement le financement des combustibles fossiles, il faut une loi plus vaste qui interdise — en instaurant des politiques d'exclusion — toute forme de financement des combustibles fossiles, y compris le pétrole et le gaz au moyen de fausses solutions, par l'entremise du gaz et du CUSC, parce que, pas plus tard que cette semaine en fait, EDC a créé une nouvelle obligation de transition qui va doubler la mise sur le CUSC, et c'est un peu ce qui se passe en ce moment.
Tout le monde se rend compte dans le pays qu'on ne peut plus parler de subventions aux combustibles fossiles comme on le faisait auparavant; alors on va simplement les appeler du CUSC et de l'hydrogène fossile, mais on va prendre exactement les mêmes sommes d'argent et les consacrer à ces technologies en prétendant qu'il ne s'agit plus de subventions. Nous avons besoin de politiques qui s'attaquent vraiment à ce problème.
Le soutien d'EDC est de loin le soutien le plus important du Canada au secteur. L'instauration de politiques d'exclusion à Exportation et développement Canada serait un grand pas en avant. Vous avez parlé de 5 milliards de dollars cette année. La plupart du temps, c'est 13 milliards de dollars par an. Cette année a été lente pour EDC.
Par ailleurs, plutôt que d'éliminer les subventions une par une, je mettrais en place... Il y en a tellement. RNCan a au moins 10 programmes de financement différents, et il existe des programmes qui ne sont pas des subventions aux combustibles fossiles, mais qui, faute de conditions strictes en matière climatique, pourraient permettre d'accorder d'énormes subventions au secteur des combustibles fossiles, comme c'est le cas de l'accélérateur net zéro de 8 milliards de dollars.
Il faut des conditions strictes et une loi contraignante pour s'assurer que des fonds ne soient pas versés au secteur des combustibles fossiles.
Dans le rapport d'aujourd'hui, vous énumérez un certain nombre de programmes qui pourraient facilement devenir des subventions aux combustibles fossiles si des conditions environnementales ne sont pas imposées. Pouvez-vous nous parler un peu de la nécessité d'imposer ce genre de conditions aux dépenses gouvernementales?
Le plus important, c'est l'accélérateur net zéro de 8 milliards de dollars. Il s'agit en général du nettoyage des puits orphelins de pétrole et de gaz. Si cette somme avait été versée aux nations ou aux communautés autochtones pour qu'elles nettoient leurs propres puits de pétrole et de gaz, cela aurait constitué une excellente utilisation des fonds publics. Le problème est que la majeure partie de cet argent est allée à CNRL. Il est allé à Suncor. Ces entreprises ont suspendu leurs propres dépenses et ont utilisé les fonds publics, de sorte qu'il n'y a pas eu de récupération supplémentaire ou d'emplois créés par ces entreprises.
Il y a beaucoup d'exemples de conditions susceptibles d'être imposées à ces programmes en matière d'emploi et d'environnement.
Merci aux témoins de ces renseignements extrêmement instructifs. Je vous en suis reconnaissant.
Permettez-moi de commencer par une chose sur laquelle les témoins sont souvent revenus. Je vais m'adresser à M. Beugin.
Monsieur Beugin, nous parlons ici d'EDC et de prêts de 8,6 milliards de dollars comme subventions inefficaces. Les prêts sont-ils considérés comme des subventions quand ils sont basés sur le taux du marché?
À mon avis, cela dépend du taux. S'il s'agit de prêts préférentiels qui donnent au promoteur des taux supérieurs à ceux qu'il pourrait obtenir sur le marché...
... comme toutes les énergies alternatives en obtiennent, je parle des subventions et d'un taux de DPA de 100 % sur l'équipement installé. Il ne s'agirait pas de subventions comparables au même titre qu'un prêt assorti d'intérêts.
L'impact de cette subvention n'est pas énorme. Ce n'est pas une subvention de 8,6 milliards de dollars, mais peut-être de 1 % de 8,6 milliards de dollars.
Vous avez dit que les pays représentant environ 90 % du PIB mondial se sont engagés à la carboneutralité. Pourriez-vous me dire à quoi ils se sont précisément engagés? Et où ils en sont dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le monde?
Comme dans le cas du gouvernement actuel, ce sont des mots pour l'instant, il n'y a pas de résultats concrets. En fait, il y a des résultats négatifs. En réalité, les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté dans 90 % de ces pays.
Ces pays n'ont pas encore tous mis en œuvre des politiques. Vous avez raison. Cela dit, il faut prendre au sérieux l'éventualité qu'ils tiennent leurs engagements.
Il faut aussi prendre au sérieux l'éventualité qu'ils agissent. Il faut prendre au sérieux l'éventualité qu'ils tiennent ces engagements et passent à l'action.
Je vais m'adresser à Mme Levin, parce qu'elle a parlé du captage, de l'utilisation et du stockage du carbone.
Madame Levin, l'Agence internationale de l'énergie estime que le captage, l'utilisation et le stockage du carbone doivent faire partie des objectifs fixés par la COP26 pour 2050 et que les 7 % des réductions les plus tangibles seraient possibles grâce au CUSC. Et pourtant vous dites que ce n'est pas une bonne subvention. C'est bien cela?
Je dis ce que les scientifiques du GIEC disent également, à savoir que la meilleure voie vers un avenir à 1,5 o C passe par l'élimination du dioxyde de carbone, mais au moyen de solutions naturelles et non de la solution artificielle du CUSC. L'AIE et le GIEC ne permettent évidemment pas...
La part du lion qu'occupe le CUSC dans la feuille de route de l'AIE pour la carboneutralité ne vise pas le secteur pétrolier et gazier, mais des secteurs comme le ciment. Ce sont certains des secteurs dont nous aurons encore besoin en 2050, alors que nous ignorons ce que pourraient être d'autres solutions de décarbonisation.
L'énergie proviendra d'un mélange de sources renouvelables. De plus, nous aurons des mesures d'efficacité énergétique qui réduiront considérablement la quantité d'énergie nécessaire.
Une combinaison de ces éléments a été modélisée pour des pays et à l'échelle mondiale afin de nous permettre d'atteindre nos objectifs climatiques tout en...
Vous vous rendez bien compte qu'aucun de ces modèles ne fonctionne et n'a pas fonctionné jusqu'à présent. En fait, nous continuons de consommer plus d'énergie partout dans le monde, y compris au Canada. La technologie a besoin de plus d'énergie. Tout ce que nous faisons dans la société nécessite plus d'énergie.
Nous aurons probablement besoin de plus d'énergie au Canada, même si nous sommes plus efficaces. Nous avons acquis quatre fois plus d'efficacité depuis 40 ans dans notre consommation d'énergie, mais nous en consommons toujours plus. Nous sommes une société à forte consommation énergétique.
Madame Levin, je vais commencer par vous. Merci à tous les témoins d'être venus ce soir.
Merci également de nous avoir communiqué le rapport de Protection environnementale Canada. En lisant le sommaire, j'ai noté le montant du soutien financier accordé aux combustibles fossiles par le gouvernement fédéral.
Pourriez-vous préciser si ce chiffre fait référence à la subvention salariale, à la Prestation canadienne d'urgence et aux paiements fédéraux aux provinces de l'Ouest pour le nettoyage des puits de pétrole et de gaz?
Le nettoyage des puits de pétrole et de gaz figurait dans le rapport de 2020, mais pas dans celui de 2021.
Dans le rapport de 2020, nous avons indiqué les 18 milliards de dollars versés au secteur pétrolier et gazier. La raison en est que la plus grande partie de cet argent est allée à Suncor et à CNRL, des entreprises qui se sont dotées d'objectifs en matière de nettoyage. Elles ont interrompu leurs propres travaux de nettoyage, ont pris les deniers publics et n'ont fait aucun travail supplémentaire; c'était donc une subvention aux combustibles fossiles.
Nous avons également inclus la partie de la subvention salariale qui a été versée aux sociétés pétrolières et gazières. Mais c'est une énorme sous-estimation, parce qu'on a très peu d'information à cet égard.
Justement, dans le sommaire, vous indiquez également que les vraies solutions climatiques ne sont pas suffisamment financées.
Il y a une chose que je constate dans ma circonscription... Le gouvernement fédéral a dépensé 100 milliards de dollars depuis 2015, mais, dans St. John's-Est, ma circonscription, par exemple, on a promis 4,8 millions de dollars en 2021 pour le Fonds du leadership pour une économie à faibles émissions de carbone dans le but de financer 13 fonds d'action pour le climat dans la municipalité. Le gouvernement provincial y a aussi contribué. Entre 2019 et 2021, le budget de l'innovation et de la recherche-développement en technologies propres dans le cadre du financement de la transition s'est chiffré à 51,8 millions de dollars, dont près de 10 millions de dollars fournis par le gouvernement provincial.
Ce ne sont que deux exemples. Pourriez-vous nous parler des solutions climatiques qui ne sont pas suffisamment financées?
Le chiffre de 100 milliards de dollars comprend toutes sortes de mesures qui ne concernent pas vraiment l'élaboration de solutions climatiques. C'est un chiffre que le gouvernement balance, mais il n'y a jamais de documentation sur ce qu'il englobe. J'aimerais bien voir une documentation plus complète. La plupart du temps, il s'agit de dépenses d'infrastructure qui ne sont pas vraiment destinées à des solutions climatiques.
Je suis heureuse que ces investissements soient faits dans votre collectivité. Je ne dis pas que le gouvernement n'a rien fait pour les énergies renouvelables. Je dis simplement que c'est une fraction.
Prenons l'exemple d'EDC. Dans la plupart des pays du monde, le ratio de financement public entre combustibles fossiles et énergies renouvelables est de 2 pour 1. Au Canada, il est de 14 pour 1. Nous avons un très mauvais bilan quand on compare le soutien aux combustibles fossiles et le soutien aux solutions climatiques qui améliorent la vie de tous.
J'aimerais passer à d'autres questions, mais je tiens à souligner qu'il s'agit d'une déclaration très générale selon laquelle les solutions ne sont pas suffisamment financées.
Je renvoie au rapport 2022 de l'International Institute for Sustainable Development intitulé « Blocking Ambition: Fossil fuel subsidies in Alberta, British Columbia, Saskatchewan, and Newfoundland and Labrador ».
Les provinces canadiennes dépensent également des fonds publics pour stimuler l'exploitation de combustibles fossiles et renoncent à d'importantes redevances et recettes fiscales. Le rapport indique que, au cours de l'exercice 2020‑2021, le gouvernement de la Colombie-Britannique a versé 765 millions de dollars en subventions aux combustibles fossiles. Le gouvernement de l'Alberta, de son côté, y a contribué à hauteur de 1,32 milliard de dollars.
Pourriez-vous nous donner un état comparatif des subventions fédérales aux combustibles fossiles et de ces mêmes subventions à d'autres paliers de gouvernement? Autrement dit, est‑ce effectivement une réalité provinciale-fédérale?
Il est certain que nous devons éliminer progressivement les subventions aux niveaux provincial et fédéral. Mais presque toutes les subventions fédérales sont des subventions à la production, alors que les subventions provinciales sont à la fois des subventions à la production et des subventions à la consommation.
J'inviterais le gouvernement fédéral à faire preuve de leadership. C'est le seul palier de gouvernement qui s'est engagé à réformer les subventions aux combustibles fossiles. C'est également le cas de la Colombie-Britannique, qui est en train de réformer son régime de redevances pour s'assurer qu'elle ne subventionne pas le pétrole et le gaz. Il y a beaucoup de travail à faire à l'échelle provinciale, c'est certain.
Au fond, est‑ce que les subventions fédérales-provinciales peuvent faciliter la transition à des méthodes moins polluantes ou à des énergies renouvelables? Est‑ce qu'elles peuvent faire partie de la transition?
Madame Levin, comme on le sait, le Canada offre 14 fois et demie plus d'aide au secteur pétrolier qu'au secteur des énergies renouvelables. Or c'est le secteur des énergies renouvelables que nous devons faire émerger le plus rapidement possible.
Quels outils, en matière de réglementation ou de politiques, sont-ils requis pour établir correctement les investissements, à votre avis? Devrions-nous mettre au pas Exportation et développement Canada?
J'aimerais que vous me parliez aussi de la finance verte en tant que voie d'avenir et de possibilités pour les investisseurs.
EDC a un rôle énorme à jouer auprès des entreprises canadiennes émergentes pour les aider à tirer parti des occasions qui se présentent au Canada et à l'étranger. Il s'agit d'un organisme de crédit à l'exportation, mais on a vraiment réformé son mandat pour l'axer sur le marché intérieur. C'est donc une occasion en or pour EDC.
Il y en a d'autres. J'aimerais que des crédits d'impôt soient prévus précisément pour les énergies renouvelables. Le gouvernement a fait d'importantes promesses, comme la norme sur l'électricité propre. Il faut s'assurer qu'elle est suffisamment robuste pour que le gaz naturel ne puisse pas se faufiler, parce que ce serait une énorme occasion ratée.
Il y a beaucoup à faire pour assurer la croissance du secteur des énergies renouvelables. Il faudrait avoir plus d'ambition. Il faudrait agir plus rapidement et veiller à ce que les fonds soient disponibles.
Retournons en arrière et imaginons pendant quelques secondes que le gouvernement ait investi au cours des 30 dernières années 14 fois et demie plus d'argent dans l'économie des énergies renouvelables que dans celle du pétrole.
Quelles en seraient les répercussions aujourd'hui, notamment sur les soins de santé?
La situation serait évidemment meilleure, sans aucun doute, et je ne peux que spéculer sur les répercussions, mais j'imagine que cela prendrait la forme de meilleurs emplois. Nous savons que le potentiel de création d'emplois des investissements dans les énergies renouvelables est généralement bien meilleur. L'air est plus propre, et les collectivités seraient plus avancées et auraient plus de contrôle sur leurs propres sources d'énergie. Il y a vraiment de très nombreux avantages.
Si on avait pris la balle au vol il y a 20 ans... Mais il faut commencer aujourd'hui. C'est encore une réalité que nous pouvons faire advenir si nous y mettons les efforts.
Pourriez-vous me dire rapidement combien coûte annuellement la pollution dans le domaine des soins de santé, notamment pour les maladies pulmonaires et cardiaques?
Une autre question à Mme Levin. Les plus grands émetteurs du Canada paient le plus faible taux de taxe sur le carbone, en ne contribuant que pour un quatorzième du prix complet du carbone. Les compagnies pétrolières et gazières font actuellement des profits records.
Ces entreprises ne devraient-elles pas payer le prix de leur propre pollution?
Il y a dans notre rapport une étude de cas sur Suncor qui nous a permis de quantifier le niveau de subvention au moyen des exemptions et de la tarification du carbone. Suncor aurait dû payer 880 millions de dollars en 2020 compte tenu de son volume de pollution au carbone. Elle n'a payé que 59 millions de dollars. Cela représente une subvention de 770 millions de dollars pour une seule entreprise. Et cela ne tient même pas compte de la pollution en aval.
Il faut absolument corriger de toute urgence le régime de tarification du carbone pour qu'il s'applique à toutes les émissions du secteur pétrolier et gazier. Nous n'avons vraiment pas besoin d'un crédit d'impôt à l'investissement dans le CUSC. Nous avons besoin d'un système de tarification du carbone qui fonctionne.
Effectivement. C'est simplement que personne n'a été en mesure de les quantifier, parce que c'est une taxe vraiment onéreuse. Nous nous sommes appuyés sur le travail du CICC pour obtenir certains de nos chiffres, mais c'est une énorme subvention aux combustibles fossiles. C'est un allégement fiscal.
J'imagine que oui, mais seriez-vous en faveur d'un projet de loi comportant un engagement formel et exécutoire de ne pas introduire de nouvelles subventions aux combustibles fossiles? Voyez-vous d'autres moyens?
C'est exactement ce que nous demandons, un engagement contraignant, car, depuis 13 ans, nous avons vu très peu de mesures à cet égard.
Nous avons également besoin de ces solutions vertes.
Nous n'avons pas non plus parlé de l'annulation du projet TMX. C'est l'un des exemples les plus flagrants de subventions aux combustibles fossiles que j'aie vus au Canada.
Un engagement exécutoire est effectivement ce que nous demandons.
Pourquoi les subventions à la décarbonisation de la production de combustibles fossiles sont-elles dangereuses du point de vue environnemental comme du point de vue économique?
Lorsqu'elles vont aux sociétés pétrolières et gazières... Il y a cette idée — que le ministre Wilkinson a souvent réitérée — que, si on paie une entreprise pétrolière et gazière pour réduire ses émissions, ce n'est pas une subvention aux combustibles fossiles. C'est quand même troublant. Cela leur permet de réduire leurs dépenses. Cela leur laisse plus de profits. On voit bien ce qu'elles font de ces profits: ils vont aux actionnaires et se transforment en primes pour les PDG. Il y a cette fausse dichotomie selon laquelle on peut payer une entreprise à telle fin et que cela ne servira pas à telle autre.
Je viens d'Oshawa. Le secteur automobile a une longue histoire dans cette ville. Nous avons eu des difficultés récemment, mais General Motors a de nouveau investi dans notre collectivité. Cela a toujours été en partie grâce à l'aide du gouvernement.
Madame Levin, quelle est la situation comparative des subventions accordées au secteur pétrolier et gazier et des subventions et des aides accordées à d'autres secteurs comme l'agriculture, la fabrication et autres? Le Canada présente certains avantages en raison de son secteur des ressources et de sa population, et nous avons tendance à soutenir ces secteurs.
Quelle comparaison feriez-vous entre ces subventions et celles d'autres secteurs?
Le secteur pétrolier et gazier est le secteur le plus subventionné. Je ne peux pas comparer cela aux engrais et à la fabrication, parce que personne n'a analysé ces subventions. Cela témoigne d'un manque de transparence. Notre ONG produit de la documentation sur les subventions aux combustibles fossiles, mais le gouvernement ne le fait pas, et il ne le fait pas pour d'autres secteurs, de sorte qu'il est très difficile de comparer.
C'est intéressant pour notre rôle et notre place dans le monde. Je sais que, dans le secteur automobile, le gouvernement dispose de différents outils pour nous permettre d'être concurrentiels à l'échelle internationale. Parfois, pour différentes raisons stratégiques, il peut être très coûteux d'exploiter au Canada comparativement à d'autres régions du monde. Compte tenu de certains de nos avantages naturels, comme les combustibles fossiles, le Canada pourrait fournir au monde les sources d'énergie plus propres — relativement parlant — dont nous aurons besoin à l'avenir.
Nous ne serons peut-être pas en mesure de le faire de façon concurrentielle si nous n'avons pas ces différents outils. Si nous renonçons à ces subventions et que d'autres pays ne le font pas, comment pensez-vous que cela va affecter les émissions globales de gaz à effet de serre provenant des combustibles fossiles dans le monde? Que se passera‑t‑il si le Canada détruit son propre secteur industriel pendant que d'autres pays décident de ne pas le faire en même temps?
Je parie sur les pays qui prennent les changements climatiques au sérieux. Le Canada est à la traîne; nous ne sommes pas un chef de file dans ce domaine. De façon plus générale, le pétrole canadien est l'un des plus sales au monde — le quatrième au monde. C'est ce qui est ressorti du PRE, à savoir que nous pourrions avoir le pétrole le plus propre et le plus concurrentiel, mais que cela ne se concrétise pas en réalité.
Les technologies qui existent pour réduire les émissions existent partout. Mais il y a cette pensée magique selon laquelle le Canada serait le seul à pouvoir se permettre un nettoyage superficiel de son pétrole. Cela ne tient tout simplement pas compte de la réalité. Nous savons que notre pétrole, parce qu'il est parmi les plus sales et les plus coûteux, est le premier qui sera laissé pour compte dans la transition énergétique.
La question est la suivante: allons-nous faire l'autruche et faire comme si cela n'existait pas ou allons-nous prendre soin des collectivités et des travailleurs qui dépendent de ce secteur aujourd'hui et veiller à ce qu'ils ne soient pas laissés pour compte quand le secteur s'effondrera? Allons-nous répéter ce que nous avons fait avec le secteur de la pêche à la morue ou en tirer des leçons?
Je ne crois pas que les responsables politiques ici présents veuillent se mettre la tête dans le sable; nous voulons veiller à ce que les Canadiens soient en mesure de mettre du pain sur la table et à ne pas compromettre notre propre avenir pendant que d'autres pays comme la Chine, l'Inde, le Brésil et certains autres ne suivent peut-être pas la même voie.
J'aimerais poser une question parce que M. Buffalo a dit des choses très instructives quand il a dit que certaines mesures considérées comme des subventions sont en fait des programmes qui profitent à différentes communautés, dont la sienne. Malheureusement, les communautés autochtones ne semblent pas être suffisamment consultées au sujet de ces différentes subventions.
Madame Levin, qu'en pensez-vous? À votre avis, est‑ce la bonne approche?
Je pense qu'il est extrêmement important de ne pas éliminer les subventions qui garantissent la sécurité énergétique des nations autochtones. Pour mettre les choses en contexte, c'était 3 millions sur les 18 milliards de dollars. Je dirais qu'on devrait garder ces 3 millions. C'était 2 millions sur les 8,6 milliards de dollars. On devrait garder ces 2 millions.
Mais ce n'est pas l'essentiel de ce dont nous parlons. Je serais favorable à un financement supplémentaire de la transition ou du développement des communautés autochtones, peu importe les décisions que telle ou telle nation souhaite prendre.
J'aimerais poser ma première question à M. Beugin.
Vous avez fait l'éloge de la tarification du carbone, que vous considérez comme l'outil le plus efficace pour réduire les émissions et comme le moyen pour le Canada — comme l'a dit notre ministre de l'Environnement et du Changement climatique — de réduire plus largement et plus rapidement les émissions de notre source d'émissions la plus importante et à la croissance la plus rapide. D'après vous, le gouvernement a‑t‑il un rôle à jouer dans l'appui à la réduction des émissions, outre ce que permettrait la seule réglementation?
À mon avis, la tarification du carbone et une réglementation souple devraient constituer l'épine dorsale d'une politique rentable permettant à la fois de réduire les coûts au minimum et de réduire considérablement les émissions.
Cela dit, il y a des choses que la tarification du carbone ne permet pas. Elle ne permet pas nécessairement de soutenir largement l'innovation et la recherche-développement. Il y a des arguments en faveur de subventions à cet égard. La tarification du carbone n'offre pas d'incitatifs pour construire une infrastructure que les entreprises privées ne construiraient peut-être pas. Cependant, tous ces moyens peuvent se conjuguer plus efficacement. Tous permettent d'offrir un soutien et de l'information supplémentaires et garantissent une certaine stabilité à long terme des prix du carbone, peut-être grâce au soutien de la Banque de l'infrastructure du Canada.
Toutes ces mesures complémentaires peuvent rendre la tarification du carbone encore plus efficace, sur le plan de la réduction des émissions comme sur le plan de la rentabilité de la réduction des coûts.
Dans votre exposé préliminaire, vous avez également dit que le Canada devrait faire des choix difficiles en investissant dans des secteurs où les fonds publics sont rares. L'un de ces domaines serait un secteur susceptible de prospérer dans un avenir à faibles émissions de carbone, à savoir celui de l'hydrogène.
J'espérais que vous pourriez nous parler des possibilités qu'offrent, selon vous, l'hydrogène bleu et l'hydrogène vert et de l'éventualité qu'ils se fassent concurrence à terme.
Les deux pourraient contribuer grandement à la carboneutralité d'ici 2030 et d'ici 2050, et les deux devraient faire partie de la stratégie. Idéalement, la politique est plutôt moins normative en matière de technologie. Cela permet au marché de déterminer les possibilités les plus rentables de réduire les émissions et de contribuer à la croissance économique. Ces possibilités devraient rester ouvertes, absolument, dans les deux cas.
Ces types d'énergie ne vont pas nécessairement évoluer vers des technologies qui changent la donne, mais ce n'est pas impossible. Les marchés nationaux et internationaux vont exiger de plus en plus de carburants à faible teneur en carbone.
J'aimerais poser ma prochaine question à Mme Levin.
Vous avez dit tout à l'heure que nous devons électrifier notre économie et investir dans les énergies renouvelables. Nous le faisons déjà par le biais du cadre pancanadien, de la stratégie pour un environnement sain et une économie saine et, bien sûr, du PRE annoncé hier. Cela couvre beaucoup des objectifs les plus faciles à atteindre dont nous devons nous occuper dans l'immédiat, mais il viendra un moment où nous aurons récolté ces fruits les plus faciles sans avoir encore atteint la carboneutralité.
À votre avis, est‑ce que le gouvernement devrait investir dans la R‑D, dans des technologies audacieuses et dans d'autres projets pilotes, dont les résultats ne seront peut-être pas immédiats, mais qui pourraient se révéler essentiels plus tard, non seulement pour le Canada, mais aussi pour d'autres pays qui veulent une décarbonisation en profondeur.
C'est tout à fait mon avis. Nous avons besoin de R‑D concernant des solutions qui ne joueront pas de rôle dans les 10 prochaines années, mais qui en auront un plus tard.
Je dirais que les solutions permettant d'atteindre les objectifs les plus faciles permettront de régler 80 % de nos émissions. Cela nous permettra de faire beaucoup de chemin, puis d'approfondir un peu la R‑D concernant des solutions qui pourraient jouer un rôle. Ces investissements ne doivent tout simplement pas aller aux entreprises qui alimentent la crise climatique.
Le rapport publié aujourd'hui par Protection environnementale Canada est très critique à l'égard du CUSC.
Le captage du carbone a toutes sortes d'applications. J'aimerais connaître la position de Protection environnementale Canada au sujet du rôle du captage direct de l'air, non seulement pour la réduction des émissions actuelles, mais aussi des émissions héritées.
Il faut faire de la R‑D, mais sans faire de plans climatiques en supposant que les résultats en seraient rentables. Les sociétés pétrolières et gazières ne devraient pas faire de R‑D. RNCan a 400 millions de dollars pour le faire. Si le crédit d'impôt ne vise que le ciment, ou certaines activités de R‑D bien précises, c'est valable aussi.
Je tiens à remercier les témoins de cette discussion très stimulante, pour ainsi dire de ce débat. Tous les témoignages contribueront grandement au rapport que nous rédigerons à la fin de cette étude.
Merci beaucoup. Nous allons faire une courte pause pour nous connecter aux témoins du deuxième groupe.
[Français]
Je remercie tous les témoins de leur témoignage, et je les remercie également d'avoir présenté leur point de vue sur la question de l'heure. Au plaisir de se revoir, peut-être dans un autre contexte.
Nous allons faire une vraie pause afin d'accueillir les prochains témoins.
Passons à notre deuxième groupe de témoins. Nous avons deux témoins.
Nous accueillons M. David Gooderham, qui s'exprimera à titre personnel, et Mme Heather Exner‑Pirot, analyste principale des politiques à l'Institut Macdonald‑Laurier.
Nous allons commencer par M. Gooderham, pour trois minutes, suivi de Mme Exner‑Pirot.
Après quoi, nous passerons immédiatement aux questions.
En ce qui concerne les subventions envisagées pour appuyer le CUSC dans l'industrie des sables bitumineux, j'invite le Comité à étudier les propositions en tenant compte de la situation climatique précaire du Canada.
Il nous faut réduire considérablement les émissions à l'échelle nationale et mondiale au cours des neuf prochaines années. Notre capacité à réaliser ces réductions essentielles d'ici 2030 devrait être le critère prépondérant de cette étude.
Le déploiement du CUSC a notamment pour objectif de permettre une hausse continue de la production pétrolière pendant encore 10 ans ainsi que le maintien de niveaux de production élevés jusqu'en 2050. Le CUSC peut seulement décarboniser le processus de production au Canada. Or, les émissions produites au pays représentent moins de 15 % des émissions générées par chaque baril de pétrole que nous produisons. Les 85 % restants sont générés lors de la combustion du pétrole exporté et rejetés sous forme de gaz d'échappement.
Une fois libérées, ces émissions produites en aval ne peuvent pas être éliminées de l'atmosphère. Il n'existe pas de technologies d'élimination directe dans l'air. Le fait de ne pas compter ces émissions dans notre inventaire ne les empêche pas de réchauffer l'atmosphère.
Dans son rapport Net-Zero by 2050, l'Agence internationale de l'énergie a tiré la sonnette d'alarme: pour que l'on ait une chance réaliste de contenir le réchauffement en deçà de 1,5 °C, la consommation mondiale de pétrole doit diminuer de 25 % d'ici 2030, de 50 % d'ici 2040 et de 75 % d'ici 2050.
À l'opposé, le nouveau scénario des politiques actuelles de la REC montre que la production de pétrole du Canada continuera d'augmenter jusqu'en 2032. La REC a refusé d'étudier la trajectoire que devrait suivre la production pétrolière au Canada pour que le réchauffement ne dépasse pas 1,5 °C.
Le rapport de 2018 du GIEC a révélé que toutes les émissions de CO2 devront devenir carboneutres d'ici 2050 pour que nous ayons des chances de limiter le réchauffement à 1,5 °C. C'est banal. Tout le monde en parle.
Il a aussi établi que, pour atteindre la carboneutralité d'ici 2050, les émissions mondiales annuelles devront être réduites de 50 % d'ici 2030. L'échéance à l'horizon 2030 est inflexible en raison de l'augmentation de la concentration de carbone dans l'atmosphère. Cette variable reflète la concentration croissante de CO2 dans la haute atmosphère, laquelle est à l'origine du réchauffement de la planète. Le niveau de CO2 enregistré en 2020 était de 413,2 ppm. À l'heure actuelle, il augmente de 2,5 ppm par an en moyenne. Pour ne pas dépasser le seuil de réchauffement de 1,5 °C, la concentration de carbone doit être maintenue en dessous de 430 ppm. Si le rythme actuel se maintient, elle dépassera les 430 ppm d'ici 2028.
Le gouvernement affirme que le Canada n'est pas tenu de comptabiliser, dans son inventaire national, les émissions qui sont produites en aval. Mais aucune règle de comptabilisation ne résoudra le problème auquel nous sommes confrontés. Les émissions produites en aval par notre pétrole sont au cœur du problème. Elles contribuent directement aux changements climatiques au Canada, comme si elles avaient été rejetées en Saskatchewan ou en Nouvelle-Écosse. Les émissions issues du pétrole que nous exportons contribueront directement à la dégradation du climat en Colombie-Britannique et dans le Nord du Québec. Ce résultat désastreux, qui transcende les frontières nationales, est régi par la physique des changements climatiques.
Merci, monsieur le président et membres du Comité, de me donner l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui.
Je parle à partir du territoire de la nation Tsuu T’ina, à l’extérieur de Calgary.
Mes observations porteront sur trois questions qui, à mon avis, sont absentes du débat public sur l’élimination des subventions inefficaces aux combustibles fossiles.
Non seulement nous devons définir ce qu’est une « subvention », mais nous devons aussi définir ce que nous entendons par « combustibles fossiles », car il s’agit essentiellement d’hydrocarbures, une molécule incroyablement accessible et polyvalente dont les nombreuses utilisations, comme les textiles, le caoutchouc, les appareils numériques, l'emballage, les détergents, les plastiques, les fibres de carbone, l'équipement médical et les engrais, sont essentielles à notre mode de vie moderne. Pour ce qui est de la transition énergétique, les hydrocarbures sont également essentiels pour la production de panneaux solaires, de pales d’éoliennes, de batteries, d’isolants thermiques pour les bâtiments et de pièces de véhicules électriques.
La demande de produits pétrochimiques est en plein essor, et l’AIE s’attend à ce qu’elle représente plus d’un tiers de la croissance de la demande de pétrole d’ici 2030. Invest Alberta, une société d’État, croit que l’industrie pétrochimique de l’Alberta à elle seule pourrait valoir 30 milliards de dollars par année d’ici 2030. En plus des produits pétrochimiques, l’ammoniac et l’hydrogène bleu sont également dérivés du gaz naturel, un combustible fossile, et un consensus se dégage selon lequel l’ammoniac et l’hydrogène joueront un rôle clé dans la transition énergétique.
Leur utilisation conjuguée au captage du carbone peut produire très peu d’émissions et constitue une excellente solution d’énergie à faible teneur en carbone.Cela peut être produit pour moins cher en Alberta que dans n’importe quel autre région du monde, ce qui est important, parce que ce doit être concurrentiel sur le plan des coûts pour faire concurrence au pétrole et au gaz et assurer la demande qui aidera à atteindre la masse critique d'infrastructure pour l’hydrogène. Je vous dirais qu’il est impératif que tout effort d'établissement de subventions aux combustibles fossiles se concentre sur les activités qui brûlent les combustibles fossiles, au lieu de les confondre avec l’utilisation des hydrocarbures en général.
Cela se rapporte au deuxième point. Si l’objectif de l’engagement à éliminer les combustibles fossiles est d'atténuer les émissions de gaz à effet de serre, alors le soutien public à la recherche et aux projets visant à atténuer les émissions de gaz à effet de serre devrait évidemment être inclus, même si les compagnies pétrolières et gazières en bénéficient. Je note l’opposition au crédit d’impôt à l’investissement dans le captage, l'utilisation et le stockage du carbone dont le groupe précédent a parlé. Aider le secteur le plus émetteur du pays à réduire plus rapidement ses émissions semble très conforme aux engagements climatiques que le Canada a pris dans le cadre de la COP26 et du G20 et ne va pas à l’encontre de ces engagements. Punir le secteur pétrolier et gazier n’est pas plus important que de réduire les GES. Nous devons mener une guerre climatique, pas une guerre culturelle.
Enfin, j’aimerais souligner que, malgré les récents engagements pris à la COP26, la crise énergétique actuelle a incité les gouvernements du monde entier, y compris le Canada, à accorder des subventions et des crédits d’impôt pour le prix de l’essence, les factures de chauffage et les coûts de l’énergie, des mesures qui correspondent parfaitement à la définition de subventions inefficaces aux combustibles fossiles, mais qui ont été mises en œuvre parce que l’énergie abordable est essentielle à notre bien-être collectif et à notre développement. Presque tous les indicateurs de développement humain sont positivement corrélés à la consommation d’énergie par habitant, de la mortalité infantile à l’alphabétisation, en passant par l’égalité des sexes.
Si la situation est mauvaise au Canada, vous savez qu’elle est bien pire dans les pays en développement du monde entier, alors il n’est pas facile de diaboliser les subventions aux combustibles fossiles. Une certaine nuance s'impose. Dans bien des cas, c’est pour aider les plus vulnérables de nos sociétés à avoir accès à l’énergie, et c’est un droit de la personne. Le Comité devrait être conscient du rôle que nous avons à jouer pour que chaque Canadien ait accès à une énergie fiable et abordable.
Avant de passer aux questions, j’aimerais mentionner que le grand chef Phillip devait se joindre à nous aujourd’hui, mais qu’en fin de compte, il n’a malheureusement pas pu venir. Nous allons donc annexer sa déclaration préliminaire aux témoignages une fois qu’ils auront été traduits, et, bien sûr, il en sera tenu compte dans le rapport.
Madame Exner-Pirot, j’ai beaucoup aimé votre commentaire sur la nécessité d’une guerre climatique, et non d’une guerre culturelle. Certaines des choses que nous avons entendues au Comité aujourd’hui, que vous et nous avons entendues précédemment reviennent à dire que pratiquement tout type de crédit d’impôt qu’une société pétrolière et gazière peut utiliser est une subvention, et que, par conséquent, c’est mauvais.
Je me demande si vous pourriez souligner que certains des crédits d’impôt qui sont attaqués en tant que subventions servent, en fait, à atténuer les émissions de gaz à effet de serre.
Celui que je connais le mieux, parce que je travaille beaucoup sur le développement économique des Autochtones, est celui dont M. Buffalo a parlé, c’est-à-dire le programme de remise en état des sites. Comme il l’a dit, c’est un succès éclatant. Il a permis d'atténuer les émissions de méthane et de créer des emplois et des débouchés économiques pour les Premières Nations de l’Alberta et de la Saskatchewan, ainsi que de l’Ontario. Une partie de l’argent a servi à nettoyer des puits en Ontario dans une réserve datant des années 1860, dans les environs de « Petroleum ». Je crois que la ville s’appelle « Petroleum », en Ontario.
Encore une fois, l’idée qu’un crédit d’impôt accordé à une société pétrolière et gazière soit mauvais, alors que c’est une si grande partie de l’économie... L’idée qu’on puisse faire cette transition sans inclure le secteur pétrolier et gazier, avec l’expertise qu’il possède dans le domaine des pipelines...
Lorsque les pipelines ne seront pas remplis de pétrole et de gaz naturel, ils devront être remplis d’hydrogène. Nous aurons toujours besoin de pipelines, et nous aurons toujours besoin de cette expertise sur la façon de fournir de l’énergie à des milliards de clients. Retirer le secteur des combustibles fossiles de l’économie canadienne n’est pas une proposition réaliste ou souhaitable pour le climat ou l’économie.
Je vais essayer de vous donner un exemple, et je ne sais pas s’il existe un crédit d’impôt pour cela. Prenons l’exemple du gaz naturel comme carburant de transition. À l’heure actuelle, il y a deux aciéries en Ontario qui éliminent la majeure partie du charbon dans leurs opérations et qui font la transition vers le gaz naturel. Chacune va économiser trois mégatonnes par année. Cela donne six mégatonnes. C’est une énorme réduction des émissions de gaz à effet de serre.
S’il y avait un crédit d’impôt pour cela, considéreriez-vous qu’il s’agit d’une de ces subventions dont nous devrions absolument nous débarrasser?
Les seules subventions dont nous devrions nous débarrasser sont les vraies subventions. Nous devrions en avoir une définition beaucoup plus rigoureuse.
Les choses qui favorisent la combustion de combustibles fossiles, et non celles qui favorisent l’élimination des gaz à effet de serre... Je pense qu'on voit seulement l'arbre qui cache la forêt à en juger par certaines des discussions publiques que nous avons eues et ce que j'ai entendu dire par le dernier groupe de témoins.
Monsieur Gooderham, vous avez parlé du pétrole et du gaz, et du fait que nous ne sommes responsables que de 15 % des émissions, et vous dites que 85 % de ces émissions sont produites en aval par les tuyaux d'échappement. Voulez-vous dire que lorsque nous calculons les émissions au Canada, nous devrions inclure ces émissions de gaz d'échappement?
C’est juste leur comptabilisation. Vous pourriez le faire, et cela pourrait figurer dans les chiffres officiels.
Ce que je veux faire valoir dans mon mémoire, c’est que le fait que nous ne comptions pas les émissions en aval n’est pas une raison pour ne pas porter attention aux répercussions de l’augmentation de notre production pétrolière. Pour chaque tranche de 15 unités d’émissions, si vous voulez, que nous générons au Canada dans le cadre du processus de production et qui pourraient être recueillies par le CUSC, il y a 85 unités qui sont rejetées ailleurs, comme à Shanghai ou à Detroit.
Tout d’abord, ce que je dis, c’est qu’il faut tenir compte des émissions en aval lorsqu’on prend des décisions stratégiques sur ce que fait le Canada à l'égard de l'augmentation de la production. Je dirais que la réponse, c’est que nous devrions cesser d’augmenter la production, parce que les émissions en aval vont causer d’énormes souffrances, que nous les comptions ou non, alors nous devrions en tenir compte.
Le Canada essaie d’utiliser des choses comme le captage, l’utilisation et le stockage du carbone avec ce genre de crédits d’impôt pour réduire la quantité. Pourquoi ne voudrions-nous pas donner cela et dire que d’autres pays produisent du pétrole et qu’il leur incombe donc d’essayer d’éliminer une partie de ce carbone? Nous n’allons pas le produire, et nous espérons que quelqu’un fera un meilleur travail.
Tout d’abord, si nous éliminions, disons, la moitié de nos émissions en amont, nous éliminerions 7 % des émissions que nous envoyons dans l’atmosphère à partir de la production pétrolière. C’est négligeable, compte tenu de la crise à laquelle nous faisons face.
Pour ce qui est de la délocalisation des émissions de carbone, vous dites que si nous ne le faisons pas, quelqu’un d’autre le fera...
Il y a 20 ans, nous aurions pu dire: « Ne faisons rien tant que nous n’aurons pas une entente avec de nombreux autres pays afin que nous acceptions tous de réduire notre consommation de pétrole au rythme nécessaire pour éviter une catastrophe », mais nous ne l’avons pas fait.
Ce que j’ai dit dans ma déclaration préliminaire, c’est qu’il nous reste neuf ans pour inverser radicalement la courbe des émissions mondiales. Nous y contribuons beaucoup. Dire que nous ferions mieux de ne pas le faire, parce que quelqu’un d’autre le fera est essentiellement suicidaire. Ce que je vous dis...
Non, ce que nous disons, c’est que nous devrions investir dans des choses qui vont réduire les émissions de pétrole et de gaz au Canada. La demande de pétrole est là. Si nous ne le produisons pas, quelqu’un d’autre le fera. Pourquoi ne pas le produire de façon à réduire les émissions réelles de la production?
Merci à nos témoins. C’est une excellente discussion ce soir.
Je tiens à préciser que dans la plateforme libérale, que vous avez sûrement mémorisée, monsieur le président, pendant la campagne électorale, on mentionne dans le document qu'EDC est réorientée pour devenir le plus important bailleur de fonds du Canada dans le domaine des technologies propres.
Je suis fasciné par cette discussion sur le CUSC. Nous avons des ONGE comme l'Institut Pembina qui travaillent en partenariat avec le secteur pétrolier et gazier pour appuyer le CUSC. D’autres organisations non gouvernementales de l’environnement semblent s’y opposer vivement.
Ma question s’adresse à vous, madame Exner-Pirot. En passant, je suis moi aussi diplômé de l’Université de Calgary et j’ai vécu dans cette ville pendant quelques années. Je pense qu’à votre avis, le CUSC est un travail en cours et qu'il peut être considéré comme un investissement dans la R‑D, la recherche et développement, avec la promesse de rendre possibles des industries comme l’hydrogène bleu. Sans le captage du carbone et le stockage souterrain, l’hydrogène bleu ne serait pas possible, à ma connaissance.
Je me demande si vous pourriez nous dire ce que vous pensez du crédit d’impôt 45Q aux États-Unis, de la façon dont il stimule le CUSC et s’il a été couronné de succès au sud de la frontière.
Le dernier groupe de témoins nous a dit que le temps était déjà écoulé pour le CUSC. Je pense que c’est tout à fait faux. Mais si le Canada tire de l'arrière, c’est bien sur le plan des investissements dans le captage du carbone. Nous avons déjà vu la Norvège investir dans le captage du carbone. En fait, elle fournit une subvention directe pour payer les deux tiers du coût d’une stratégie de captage et d’utilisation du carbone, l’industrie ne payant que le tiers du coût, parce que la Norvège est très déterminée à réduire ces émissions de gaz à effet de serre.
Aux États-Unis, comme vous l’avez mentionné, le crédit d’impôt en vertu de l’article 45Q a été introduit en 2008 et réformé en 2018. Les Américains ont donc beaucoup d’expérience à cet égard. Cela a donné le coup d’envoi à de nombreux projets de CUSC. Ce crédit d'impôt bénéficie même maintenant d’un appui bipartite, et nous savons à quel point il est difficile d’obtenir un appui bipartite pour quoi que ce soit à Washington. La principale différence avec le crédit d’impôt 45Q, c’est qu’il appuie également des crédits d’impôt pour la récupération assistée des hydrocarbures. C’est évidemment le crédit d’impôt le plus intéressant pour l’économie et, du point de vue de l’industrie.
En fait, je dirais que le plan du Canada et des libéraux visant à instaurer ce crédit d’impôt pour le CUSC, bien que bon, ne va pas assez loin. Si nous sommes vraiment préoccupés par les émissions, comme l’a fait remarquer le dernier député, quelqu’un d’autre les produit si le Canada ne les produit pas, alors rendons-les aussi propres que possible au Canada. Quand vous faites aussi...
Je pourrais peut-être poser une autre question, parce que je partage mon temps avec Mme May.
Comme la tarification de la pollution passera à 170 $ la tonne en 2030, le captage et le stockage souterrain du carbone seront encore plus concurrentiels. Êtes-vous d’accord avec cette affirmation?
Oui. En fait, le Canada a un énorme potentiel géologique pour le stockage. Nous avons la chance d’avoir autant de ressources naturelles. Nous avons également la chance de pouvoir stocker efficacement le carbone.
Merci beaucoup, monsieur le président, et merci particulièrement à Terry Duguid.
Mes questions s’adressent à vous, monsieur Gooderham. Je sais de quoi vous parlez lorsque vous dites qu'il nous reste neuf ans, mais je ne suis pas certaine que nous soyons sur la même longueur d'onde autour de la table sur les raisons pour lesquelles vous parlez de neuf ans. Je vais simplement passer en revue certains chiffres et vous demander de parler des coûts de renonciation lorsque j’aurai terminé.
C’est le rapport spécial d’octobre 2018 du GIEC sur la hausse de 1,5 degré Celsius qui dit précisément qu’il n’y a qu’une seule façon de maintenir la hausse à 1,5 degré Celsius, et il s’agit de réductions importantes de l’ordre de 50 % par rapport aux niveaux de 2010, d’ici 2030. C’est un chiffre très impitoyable. Le GIEC a dit que si nous échouons, la fenêtre se fermera de façon permanente. Si nous atteignons la carboneutralité d’ici 2050, ce sera trop peu, trop tard. Nous aurons potentiellement dépassé 2°C, 3°C et ainsi de suite.
Ma question porte sur les bilans de carbone et la nature impitoyable de la physique de l’atmosphère. Si nous investissons notre argent dans des subventions aux combustibles fossiles, qu’est‑ce que vous considérez comme un coût de renonciation, surtout s’il s’agit d’une technologie comme le captage et le stockage du carbone, qui n’a pas atteint ses objectifs dans les différents pays du monde? Quel effet cela a‑t‑il sur nos chances de survivre sur la planète au cours de la prochaine moitié du siècle?
Je vais juste décrire le scénario. Le captage et le stockage du carbone ont été proposés ici pour nous permettre de continuer à augmenter la production et de réduire les émissions en amont. Ce que je dis, c’est que si nous augmentons la production, nous allons rater la cible de 2050. Cela ne fait aucun doute.
Nous sommes un fournisseur important et, si d’autres pays le font aussi, nous allons rater la cible. J’ai souligné que le niveau actuel de concentration du carbone est de 4,13. Il augmente de 2,5 par année, et une fois que nous aurons atteint 4,28, nous passerons à 4,30. Nous dépasserons la limite de 1,5 degré, et lorsque nous franchirons 4,50, nous dépasserons la limite de 2 degrés, et cela se produira d’ici 2035, au rythme où nous allons.
Nous nous contentons d'en parler, mais c’est bien ce qui va nous tuer.
Madame Exner‑Pirot, j'aimerais vous demander rapidement s'il vous est possible d'envoyer au greffier les données, les informations et les sources d'information en lien avec toutes les réponses que vous avez données aux questions de M. Duguid, il y a quelques instants.
Monsieur Gooderham, j'aimerais vous laisser une minute pour compléter l'idée dont vous avez parlé avec mon collègue M. Seeback. Ensuite, je poserai mes questions.
Ce que je voulais dire, c’est que je comprends l’argument de la délocalisation des émissions de carbone. Comme vous tous, je suis ce dossier depuis 12 ou 15 ans.
Nous n’avons jamais réussi à négocier un accord avec d’autres pays pour arrêter d’augmenter la production. En fait, nous l'avons considérablement augmentée et il nous reste neuf ans pour atteindre une réduction de 50 %. Cela ne fait aucun doute; c’est la science. Nous ne serons pas en mesure d'y arriver si nous continuons d’accroître la production. Il est tout à fait clair que nous n'y arriverons pas; par conséquent, à l’heure actuelle, dire que « si nous cessons de produire plus de pétrole, d’autres pays continueront de le faire » ne peut être une réponse suffisante parce que c’est suicidaire. Par conséquent, cessons d’augmenter notre production et commençons à essayer d’amener d’autres pays comme la Norvège et l’Angleterre à accepter de faire la même chose. Ensuite, servons-nous de tarifs et d’autres systèmes pour bloquer le pétrole des pays qui continuent d’augmenter leur production. Ou bien nous le faisons, ou bien nous tuons nos enfants.
Merci beaucoup, monsieur Gooderham. Je comprends que nous devions être un modèle et donner le bon exemple en matière de réduction des émissions.
Ma prochaine question est la suivante. La Régie de l'énergie du Canada a publié en décembre 2021 ses scénarios dans le rapport intitulé « Avenir énergétique du Canada en 2021 ». En outre, la Régie présente des scénarios prévoyant une hausse de la production du secteur pétrolier de 19 % jusqu'en 2032, suivie d'une baisse équivalente entre 2032 et 2050. Une baisse équivalente veut dire une baisse de 22,6 %.
Six mois plus tôt, plus d'une vingtaine d'économistes spécialisés et d'experts du climat ont demandé au premier ministre de s'assurer que la Régie intègre à ses scénarios les recommandations du rapport de l'Agence internationale de l'énergie. Nous sommes toujours en attente de ces scénarios.
Cela dit, je m'inquiète d'un possible conflit d'intérêts, alors que la Régie modélise un avenir qui ne modélise en rien les engagements internationaux du Canada. Que se passe-t-il, selon vous?
J'aimerais vous entendre à ce sujet, pendant à peu près deux minutes.
Le rapport du 24 décembre de la Régie canadienne de l’énergie, comme on l’appelle maintenant, a été décisif parce qu’il embrassait, par exemple, cet engagement extraordinaire envers la carboneutralité et le recours au captage et au stockage du carbone. C’est un long rapport que nous avons tous lu. Il a proposé ce qu’on appelle le scénario évolutif. Vous êtes au courant. Il s’agissait d’un niveau de production de pétrole alternatif, légèrement inférieur pour le Canada, mais tout de même d’une augmentation substantielle.
La RCE a ensuite fait observer explicitement dans son rapport que même ce scénario ne nous permettrait pas d’atteindre la carboneutralité. Il ne nous maintiendrait pas à 1,5 degré, et le rapport ne nous a pas dit quelle serait la trajectoire de la production pétrolière au Canada.
C’était en novembre 2020. En juillet 2021, environ 24 économistes et experts canadiens de premier plan en matière d’énergie et de climat ont demandé à la RCE d’élaborer un scénario qui s’alignerait sur le scénario de carboneutralité de l’AIE pour la production de pétrole. Ce serait une ligne descendante dans une certaine mesure. Encore une fois, la Régie a publié un rapport le 9 décembre de l’année dernière qui, encore une fois, ne nous dit pas quel pourrait être ce scénario.
Enfin, vers le 21 décembre, le ministre a demandé, si vous voulez, à la RCE d’aller de l’avant et de faire cette modélisation, mais nous ne l’avons toujours pas.
Je pose la question au Comité, puisque vous demandez au gouvernement de rendre des comptes au Parlement. Comment le gouvernement peut‑il établir ces plans importants, comme l’augmentation de la production de pétrole, tout en procédant à un captage et à un stockage massifs du carbone, sans que nous sachions quel genre de trajectoire pour notre production de pétrole serait compatible avec un maintien à 1,5 degré?
Pourquoi font‑ils cela? Pourquoi ne sortent‑ils pas du cadre pétrolier et ne réfléchissent-ils pas à des solutions à long terme viables et responsables pour les générations futures? Qu'est-ce qui les freine?
L’ONÉ, qui était le même organisme, a mené l’enquête sur le pipeline TMX en 2016. C’était essentiellement le principal projet de pipeline qui devait nous engager dans la croissance que nous constatons maintenant dans la production de pétrole.
En 2016, on avait l'occasion de demander à l’ONÉ d’examiner si l’augmentation prévue de l’approvisionnement en pétrole du Canada pourrait être conforme à la cible de 1,5 degré. Le gouvernement libéral de l’époque aurait pu ordonner à l’ONÉ de le faire, mais il ne l’a pas fait.
Le gouvernement libéral dépense près de deux fois et demie le montant prévu pour l’oléoduc Trans Mountain, tout comme pour son plan de lutte contre les changement climatiques qu’il vient de dévoiler cette semaine.
Le gouvernement continue d'esquiver la situation en subventionnant une technologie de captage du carbone qui n’a pas fait ses preuves au lieu d’investir dans les énergies renouvelables. Nous avons entendu dire que le gouvernement a subventionné les combustibles fossiles 14 fois plus que les projets d’énergie renouvelable.
Seriez-vous d’accord pour dire que les subventions visant à atténuer les émissions dans l’industrie des combustibles fossiles devraient plutôt servir à financer la transition vers les énergies renouvelables?
Pouvez-vous nous donner une évaluation franche de ce que le gouvernement a fait au cours des six dernières années et de l’orientation qu’il prend maintenant?
Je pense certainement que les subventions devraient être retirées de l’industrie. Parallèlement à cela, le prix du carbone applicable en vertu du système basé sur la production devrait être considérablement augmenté. Nous commencerons alors à voir une diminution de notre production. Nous avons les outils pour le faire.
La Cour suprême du Canada a dit que le gouvernement fédéral avait ce pouvoir. Il n’y a aucune raison pour que la norme de rendement soit fixée à un niveau tellement élevé que l'industrie paie un prix du carbone sur une fraction de ses émissions. Il s’agit seulement des émissions en amont.
Nous avons les outils. Supprimez les subventions, gardez cet argent pour aider à la transition des collectivités et acceptez que cette industrie doit maintenant suivre une trajectoire descendante, aussi douce soit-elle.
Voilà ma réponse à votre question. Supprimez les subventions.
Pour poursuivre dans la même veine, les plus grands émetteurs du Canada paient le taux de la taxe sur le carbone le plus bas, soit environ 1/14 du prix total du carbone. Peut-être pourriez-vous répondre par oui ou par non: considéreriez-vous cela comme une subvention aux combustibles fossiles?
Eh bien, cela dépasse vraiment... Je n’ai pas d’expertise en la matière, mais ce que je sais, pour avoir suivi la situation au cours des 10 ou 15 dernières années, c’est que nous avons la possibilité, surtout en Alberta, d’avoir la plus grande industrie d’énergie propre en Amérique du Nord. Je pense que les industries titulaires ont la mainmise sur le processus d’élaboration des politiques.
Pour illustrer cela, je ferai remarquer que, lorsque la question du CUSC est apparue il y a environ 12 mois, elle ne faisait pas partie d’un énoncé de politique du gouvernement; elle est apparue dans les pages du Financial Times, de Bloomberg et des sections financières des journaux faisant état des entrevues avec les PDG de l'industrie. Ensuite, notre gouvernement a répondu par d’autres entrevues dans les journaux et a dit: « Nous allons nous asseoir avec eux et leur parler d’un programme de subvention de 75 milliards de dollars. »
Il n’y a toujours pas de document gouvernemental qui plaide en faveur du captage et du stockage du carbone, que ce soit sur la base des émissions ou sur toute autre base. Tout vient de l’industrie.
En 2020, Exportation et développement Canada a fourni 5 milliards de dollars en renouvellements de prêts pour financer la construction du pipeline Trans Mountain.
Pensez-vous que des modifications doivent être apportées à la Loi sur l’expansion des exportations? Le cas échéant, avez-vous une idée de ce qu’elles seraient et de la façon dont elles seraient conformes à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones?
En ce qui concerne les droits des peuples autochtones, je dirais que le principal élément qui a une incidence sur les droits des peuples autochtones, c’est le pipeline TMX. Nous avons entendu de nombreuses larmes de crocodile à ce sujet, à savoir qu’on ne consulte pas les groupes autochtones et qu’on élimine les possibilités de développement de l’industrie pétrolière, mais l’absence éhontée de consultation au sujet du pipeline TMX a été une grave erreur.
Je pense que ce projet de pipeline aurait dû cesser lorsqu’il n’était plus viable sur le plan commercial. C’était clair en 2018. C’est maintenant clair. Si nous examinons les scénarios d’évolution de la RCE en ce qui concerne la production de pétrole, elle reconnaît elle-même qu’après 2032, lorsque notre production atteindra un sommet, ce pipeline TMX, sera une capacité excédentaire.
Vous avez mentionné que le GIEC a fixé comme objectif une réduction mondiale de 50 % nécessaire pour réduire nos émissions afin d’assurer une planète viable. Pouvez-vous nous parler du caractère adéquat ou inadéquat de la cible actuelle du gouvernement?
Pour ce qui est de l’objectif, j’ai lu le rapport il y a deux jours, et il semble que l'objectif de réduction soit de 40 %, ce qui est plutôt vague... Cela n’a pas beaucoup progressé depuis les chiffres du 11 décembre 2020, qui étaient très similaires.
On promet toujours, dans le cas du secteur pétrolier et gazier, une incroyable réduction des émissions de 80 millions de tonnes d’ici 2030 par rapport au niveau actuel. On ne peut tout simplement pas en rendre compte. Il est impossible que le captage et le stockage du carbone puisse se faire à ce niveau d’ici 2030; c’est un fantasme.
Madame Exner-Pirot, j’aimerais vraiment en savoir plus sur la comparabilité du régime 45Q aux États-Unis par rapport à ce que nous proposons ici au Canada, que ce soit la récupération assistée des hydrocarbures ou non. Pouvez-vous nous dire si le 45Q comprend la récupération assistée du pétrole aux États-Unis?
Ce n'est pas mon domaine d'expertise. La sécurité énergétique et la demande mondiale d'énergie le sont, tout comme l'exploitation des ressources autochtones. Je peux vous dire que, oui, cela comprend la récupération assistée des hydrocarbures, et je suppose que vous savez qu'il y a de très bonnes raisons environnementales de procéder à la récupération assistée des hydrocarbures en ce qui concerne l'impact sur les terres.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le flux de fonds pour la recherche et développement et les emplois liés à la technologie qui ont migré du Canada vers les États-Unis depuis 2018, l'année où le régime 45Q a été mis en place pour mettre au point des technologies visant à améliorer la technologie de captage du carbone utilisée actuellement aux États-Unis?
Je n'ai pas les détails. Vous les avez probablement devant vous. Mais comme vous le savez très bien, il y a eu des sorties d'investissements directs étrangers à l'extérieur du Canada pour le pétrole et le gaz, pour l'exploitation minière dont nous avons besoin pour les minéraux critiques, pour tout, en raison de notre système de réglementation très long et ardu. Nous avons aussi besoin de toutes ces choses pour produire des énergies renouvelables, alors nous devons reconsidérer tout ce que nous faisons pour attirer l'investissement direct étranger ici.
Êtes-vous au courant des sommes investies par le gouvernement et les entreprises dans le développement de cette technologie au cours de la dernière décennie dans l'Ouest canadien?
Il s'agit de milliards de dollars, comme nous l'avons dit, et il s'agit de fonds publics du gouvernement du Canada, du gouvernement de l'Alberta et du gouvernement de la Saskatchewan, et cela capture beaucoup de carbone. Ces technologies de captage du carbone comptent parmi les meilleures au monde. Nous représentons une grande partie des puits de carbone dans le monde grâce à l'engagement du secteur public et des organisations du secteur privé au Canada, alors je vous remercie de me donner l'occasion de soulever cette question.
Pour ce qui est de la viabilité économique du secteur, si nous continuons à donner plus d'avantages économiques à nos voisins, les États-Unis, parce qu'ils offrent de meilleurs programmes économiques pour s'assurer que les entreprises de production peuvent continuer à produire et à fournir un avantage énergétique à leurs citoyens tout en mettant au point une technologie qui capte le carbone et procure d'autres avantages environnementaux au monde, pensez-vous que ces entreprises vont migrer ailleurs?
Nous l'avons déjà constaté, et je pense que la clé de cette question est que le Canada ne fonctionne pas dans une bulle et que l'industrie pétrolière et gazière ne fonctionne pas dans une bulle. Si nous pensons que nous n'aurons pas le captage du carbone dans neuf ans et que c'est une illusion, permettez-moi de vous parler de l'illusion que la demande mondiale de pétrole et de gaz diminuera au cours des neuf prochaines années.
Sommes-nous en meilleure posture? Croyons-nous que le Canada affiche de meilleurs résultats en matière de facteurs ESG que la Russie, l'Iran, le Venezuela et, en fait, les États-Unis? Selon des mesures objectives, oui. La question est de savoir si nous voulons exercer un certain contrôle sur la façon dont ces produits sont produits et exportés non seulement sur le plan environnemental, qui ne devrait pas être la seule considération du gouvernement, mais bien évidemment sur le plan social et sur le plan de la gouvernance, qui est devenu un problème majeur au cours des deux derniers mois.
J'ai assisté aux réunions de l'Agence internationale de l'énergie la semaine dernière, et l'Australie a dit très clairement qu'au cours de la dernière décennie, les pays de l'OCDE, les pays les plus développés au monde, ont réduit leur part des combustibles fossiles en pourcentage de leur bouquet énergétique de 79 % à 77,9 %, soit une réduction de 1,1 % de leur production d'énergie à partir de combustibles fossiles sur une période de 10 ans.
Comme le dirait l'Australie à ce sujet, il est temps d'examiner comment nous pouvons décarboniser ce secteur de la façon la plus efficace et la plus rapide possible, plutôt que de continuer à pencher vers d'autres solutions irréalisables à ce stade‑ci.
Avez-vous quelque chose à ajouter, madame Exner-Pirot?
Absolument. C'est encore pire que cela, parce que nous avons une crise énergétique en ce moment. Les gens n'ont pas eu le gaz naturel, le GNL, qu'ils auraient utilisé à la place et, en fait, la production de charbon atteint des niveaux historiques et les émissions atteignent des sommets cette année.
Lorsqu'on a dit que le GNL n'était pas une solution parfaite et que nous ne pouvions donc pas l'utiliser du tout, et pas seulement en produire davantage, cela a eu pour conséquences inattendues non seulement une hausse du prix des engrais à un niveau record, ce qui a créé de l'insécurité alimentaire et de la famine, mais également une augmentation de la production de charbon et des émissions, qui nous a fait reculer de plusieurs années.
Je remercie les témoins d'avoir, comme le président l'a dit, tenu un bon débat au sein du Comité.
Le greffier prend des notes et je suis certain que nous pourrons tirer cela au clair à l'étape du rapport, mais certains des chiffres comme les 9 milliards de dollars que nous venons d'ajouter, qui s'additionnent aux 100 milliards de dollars que nous avions déjà dépensés, sont assez trompeurs ce soir.
J'aimerais revenir à certains des éléments de base avec Mme Exner-Pirot sur la dynamique du marché qui crée le besoin de subventions. Lorsque les marchés sont en début de développement, la seule façon de prendre de l'expansion et de traverser la vallée de la mort, c'est de recourir à une force ou à un financement externe, souvent de la part des gouvernements fédéraux, et cela se fait partout dans le monde.
Pourriez-vous nous parler de la dynamique dans laquelle nous nous trouvons actuellement en ce qui concerne la transition vers une version plus propre de ce que nous faisons? De plus, pouvez-vous nous dire quand nous pourrions éliminer le besoin de subventions, étant donné que nous disons maintenant que les subventions inefficaces doivent être éliminées d'ici 2023? Le prix du pétrole augmente de nouveau. Le marché devrait être en mesure de gérer certains de ses propres investissements. Pourriez-vous dire ce que vous en pensez?
Oui. Je suis en faveur d'un petit gouvernement, alors lorsque l'industrie pétrolière et gazière réalise des profits records, je pense qu'elle devrait payer pour beaucoup de choses elle-même. Il n'y a aucune raison pour que le contribuable subventionne cela. Cependant, pour des choses comme le captage du carbone, où il s'agit d'une nouvelle technologie non éprouvée, où il y a des coûts initiaux importants, nos concurrents du monde pétrolier et gazier ne font pas de captage du carbone et ne réduisent pas le méthane comme nous le faisons. Lorsque vous demandez à l'industrie pétrolière et gazière canadienne de faire quelque chose selon des normes plus élevées et à un niveau plus élevé, ce qui rend sa production plus coûteuse et donc moins concurrentielle, je pense que le secteur public a un rôle à jouer.
Formidable. Je peux penser à des situations semblables dans le secteur minier lorsque nous luttions contre la couche d'ozone. Personne ne pouvait se permettre les épurateurs qui ont été installés dans les cheminées. Le marché mondial a dû tirer des conclusions à ce sujet, mais entretemps, nous avons dû investir dans ces solutions. Le résultat, c'est que nous avons réglé la crise de la couche d'ozone dans les années 1980.
Absolument, et pour des choses comme les véhicules électriques, oui, il est logique de subventionner les bornes de recharge à ce stade‑ci. Nous sommes tous d'accord là‑dessus. Cela doit aussi être logique en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre.
Merci. J'écoutais les questions de M. Carrie et je me disais aussi qu'en Ontario, l'industrie automobile a reçu des subventions pour que nous nous retrouvions dans une situation où tous les grands fabricants optent maintenant pour les VE ou pour la production de véhicules à zéro émission. Cela ne se serait pas produit avec les seules forces du marché, compte tenu de la faible demande pour ces véhicules, et nous sommes maintenant en mesure de jouer un rôle de chef de file sur ce marché. Il y a un parallèle en Alberta.
Oui, et je dirais qu'une bonne partie de ce qu'on a décrit comme des subventions visait essentiellement à aider l'industrie pétrolière et gazière à traverser cette période difficile de six mois en 2020, lorsque les prix du pétrole et du gaz ont chuté. Cela l'a aidée à rester à flot pendant cette courte période, et maintenant, de toute évidence, elle est en mesure de rembourser ces prêts. Ce ne sont pas les prêts les moins chers. Ce sont les premiers qu'elle aurait voulu éliminer de son bilan, mais le gouvernement a joué un bon rôle en offrant des garanties de prêts pendant cette période exceptionnelle.
D'accord, et les résultats commerciaux viendront. Ensuite, certains de ces prêts seront remboursés, d'autres selon des modalités différentes, ce qui pourrait être considéré comme une subvention inefficace. Nous avons besoin d'une définition internationale du mot « subvention » parce que nous sommes dans un marché mondial, alors il est important que le Canada travaille avec l'Argentine pour essayer d'en arriver à une définition sur laquelle tous les producteurs mondiaux peuvent s'entendre.
Absolument, et encore une fois, je dois vous avertir qu'il faudrait viser la consommation de combustibles fossiles qui sont brûlés, qui augmentent les émissions de gaz à effet de serre, et non les nombreuses autres utilisations des molécules magiques d'hydrocarbures qui ont un impact positif sur nos vies.
Pour ce qui est de la complexité de la question, nous travaillons également à l'établissement d'un plafond. À quoi ressemblera ce plafond? Je sais que le gouvernement fédéral est en discussion. Nous travaillons avec les provinces et les gens qui participent à l'établissement de la tarification du carbone dans les différentes provinces et territoires pour en arriver à un plafond. Que pensez-vous des plafonds?
Au G7, on a annoncé la semaine dernière — le premier ministre Trudeau — qu'on demande aux pays producteurs de pétrole et de gaz d'agir de façon responsable et d'augmenter les livraisons sur les marchés internationaux. Nous ne pouvons pas imposer un plafond sur les émissions sans imposer un plafond sur la production, et devinez quoi? La nouveauté est que ce plafond serait imposé sur le GNL et l'hydrogène bleu parce que les sables bitumineux sont déjà en production. Donc, du point de vue environnemental, cela n'a aucun sens.
Madame Exner‑Pirot, j’aimerais que vous envoyiez au greffier les sources d’information concernant le rendement dont vous avez discuté il y a quelques instants avec mon estimé collègue M. Mclean.
Monsieur Gooderham, l’appétit pour la capture du carbone a fait des bonds de géant au cours des quelques dernières années. Étrangement, les plus ardents promoteurs sont ceux du secteur pétrolier et gazier, qui sont avides, assoiffés, de fonds publics.
Depuis le début de la soirée, on entend la même chose à propos de l’efficacité du CUCS, le programme en lien avec le captage, l'utilisation et le stockage du carbone.
Pouvez-vous chiffrer l’état de l’échec des mesures de capture, d’utilisation et de stockage du carbone? Si vous n'avez pas le temps de répondre à la question, je vous demanderais d'envoyer un complément de réponse au greffier.
Oui, avec plaisir. J'ai déposé un mémoire auprès du Comité, mais je vais répondre à cette question.
Je souligne toutefois qu'il ne faut pas oublier qu'en Alberta, entre 2008 et 2014, il y a eu un immense programme de développement du captage du carbone, et le plan était — selon le plan publié — de réduire les émissions de 139 millions de tonnes d'ici 2050 au moyen du captage du carbone. Le programme a été abandonné en 2014 parce que le gouvernement de l'Alberta de l'époque avait dit qu'il s'agissait d'une expérience scientifique et que ce n'était pas rentable, et le gouvernement néo-démocrate était d'accord. Ce n'est pas allé plus loin.
Nous avons en Alberta les seuls survivants de cet immense programme, le projet Quest et un autre. Quest capture 1,5 million de tonnes. Le gouvernement s'est récemment vanté d'avoir capté 4 millions de tonnes entre le moment où il a été achevé en 2015 et 2019. Quatre millions de tonnes. Pendant cette période, les émissions cumulatives, les émissions en amont dans les sables bitumineux, étaient de 300 millions de tonnes, ce qui représente un peu plus de 1 %.
Par conséquent, l'affirmation selon laquelle il y a beaucoup de captage du carbone au Canada n'est pas fondée. Nous avons le barrage Boundary et, en ce qui concerne la construction, quiconque est bien informé à ce sujet pourrait laisser entendre que d'ici 2030, nous allons capter peut-être au plus 20 millions de tonnes en Alberta.
Vous avez dit que l'objectif du captage et du stockage du carbone est de faciliter l'expansion continue de la production pétrolière et de maintenir des niveaux de production élevés jusqu'en 2050. Le plan déposé récemment par le gouvernement prévoit une augmentation de 22 % de la production au cours des huit prochaines années. On a également annoncé récemment une augmentation de la production de 300 000 barils par jour.
Vous avez aussi souligné qu'un tel niveau de production est incompatible avec le maintien à 1,5 degré et l'évitement de changements climatiques catastrophiques. Un témoin précédent nous a dit que les technologies de captage du carbone n'ont jusqu'à présent capté qu'une fraction de 1% des émissions de GES du Canada, et ce, malgré les milliards de dollars de subventions. Vous avez donné l'exemple de l'Alberta.
Pouvez-vous nous parler un peu plus de la technologie actuelle de captage du carbone et du fait que le gouvernement mise là‑dessus?
En somme, il y en a très peu. Plusieurs grands projets ont été annulés aux États-Unis — des centrales au charbon — il y a quelques années parce qu'ils n'étaient tout simplement pas rentables. Il y a, bien sûr, des projets de longue date en Algérie et un en mer du Nord réalisés par la Norvège, mais l'Agence internationale de l'énergie, l'AIE, en 2013, s'est dite déçue que l'idée du captage et du stockage du carbone n'ait pas été davantage reprise partout dans le monde. Ce n'est toujours pas le cas, et cela s'explique par le coût.
L'Alberta a mené une vaste enquête ou une étude en 2015. Elle a été publiée en mai 2015 par le Conseil des académies canadiennes. Une quinzaine d'ingénieurs connaissaient les sables bitumineux, et ils ont conclu en 2015 que le captage du carbone ne jouerait jamais un rôle important dans la réduction des émissions des sables bitumineux. Pourquoi? Parce que c'est une technologie trop chère.
Ils ont ensuite donné des explications plus détaillées. Une partie du problème, c'est qu'on peut construire un nouveau projet, qui serait peut-être rentable, mais la rénovation de vieux projets représente une dépense importante et c'est ce que représente la majeure partie de la production en Alberta. L'autre problème, c'est que pour la production in situ — qui est désormais la production typique en Alberta —, les économies d'échelle sont trop faibles pour justifier le captage du carbone in situ.
Madame Exner-Pirot, je suis très heureux que vous ayez parlé des hydrocarbures. Tout le monde parle des combustibles fossiles comme s'il comprenait de quoi il s'agit. La réalité, c'est que ce qui sort du sol est utilisé dans tellement de domaines différents, comme les plastiques, les engrais et ainsi de suite. Tous les produits que nous voyons autour de ces tables en font partie.
Il n'y a pas si longtemps, je discutais avec le dirigeant de Dow Chemical à Red Deer. J'en ai déjà parlé. Il faisait remarquer que, dans une éolienne, il y a 17 tonnes de matériaux, dont sept tonnes de plastique. Je trouve vraiment difficile de comprendre qu'on puisse simplement clore la production de la principale matière première dont nous disposons et que cela nous permettra de trouver des idées magiques pour son remplacement.
Si nous prenons l'exemple de l'uranium, qui est bien sûr une source d'énergie, et tous les métaux rares qui seront nécessaires pour les batteries, et que nous trouvons un nouveau produit magique pour remplacer les 40 % de plastique qui, comme je l'ai dit, se trouvent dans les éoliennes... Si cela se trouve sur votre terrain, ou sur une propriété autochtone ou, pour les gens qui se trouvent ici, dans leur propre circonscription... Je me demande si nous pouvons faire confiance à ce gouvernement pour nous donner le permis de développer des corridors de transport et d'accès aux marchés... Ou ces nouveaux produits seront-ils aussi méprisés que le pétrole et le gaz?
Selon vous, quel sera l'avenir du développement au Canada?
Nous avons absolument besoin d'une transition à faibles émissions de carbone. Cette transition du carbone passera de l'exploitation des combustibles fossiles à l'exploitation des minéraux. C'est bien connu.
Des minéraux essentiels sont nécessaires pour les lignes de transport, les batteries de véhicules électriques, les génératrices, les aimants et tout ce qui permet de faire du soleil une véritable source d'électricité dont peuvent profiter les consommateurs. Avec certains des minéraux, comme le lithium, nous avons besoin de 10 ou 12 fois plus d'activités minières qu'à l'heure actuelle. Pour d'autres, comme le cuivre, c'est trois ou quatre fois. Dans l'ensemble, notre projection des minéraux dans le monde... Il ne pourra pas y avoir de transition tant que ces mines ne seront pas construites. Cela prend de 10 à 15 ans. Elles sont abordables, alors nous pouvons commencer à les acheter.
Nous devons rendre l'exploitation minière plus abordable. Nous devons acheminer davantage de produits vers les marchés. Nous devons améliorer nos chaînes d'approvisionnement. Et devinez quoi? Le fait que nous traversions une crise énergétique et que le pétrole et le gaz coûtent plus cher signifie que tout ce qui se trouve dans la chaîne d'approvisionnement des minéraux coûtera plus cher. Pour la première fois après une décennie, les panneaux solaires coûtent plus cher, et les batteries de véhicules électriques coûtent plus cher. Le prix d'une Tesla est trois fois plus élevé qu'il y a un an.
Bien sûr, lorsqu'il est question d'éoliennes, de panneaux solaires ou d'autres types de projets d'énergie renouvelable qui pourraient être mis en œuvre, il faut se demander si nous allons diaboliser les actionnaires de ces sociétés de la même façon que nous le faisons avec ceux des sociétés pétrolières et gazières?
Nous finirons par dire que ces gens gagnent beaucoup trop d'argent, et qu'il faut les imposer aussi. Si nous commençons à faire cela, ils vont soit se tourner vers d'autres pays et nous laisser en plan, soit commencer à importer des produits d'autres pays afin de réduire leurs coûts.
Quand pouvons-nous nous attendre à un retour à la raison à ce sujet?
Pour ce qui est de la sécurité de l'énergie à l'heure actuelle, la Chine contrôle le quart de notre production minière. La Russie en contrôle un autre 9 %. Nous devons absolument intensifier la chaîne d'approvisionnement des minéraux essentiels avec nos alliés. Ils vont se tourner vers le Canada pour obtenir ces minéraux en vue de cette transition vers l'énergie renouvelable.
Nous devons absolument offrir des incitatifs, faciliter les choses et accélérer l'exploitation des mines au Canada. Il est impératif d'avoir une lente transition du carbone en toute sécurité sans transférer l'effet de levier géopolitique de la Russie à la Chine.
D'accord, je vais donc poursuivre. Je pensais qu'elle était encore avec nous.
Monsieur Gooderham, j'ai écouté le débat et il est clair qu'il y a deux côtés très différents à cette histoire.
Pour ce que vous nous avez dit au sujet des neuf ans et de la nécessité d'une transition rapide, je repense à l'histoire du captage, de l'utilisation et du stockage du carbone, ou CUSC qui était en cours il y a 10 ou 15 ans en Alberta, et à beaucoup d'autres initiatives qui ont été prises. Selon vous, que faudra-t‑il faire pour nous amener plus rapidement dans la direction que nous devons prendre, parce que nous en parlons depuis longtemps sans vraiment avancer?
Je comprends ce que disait Mme Exner-Pirot au sujet de la nécessité de procéder de façon méthodique, et je ne suis pas en désaccord, mais il me semble que nous allons manquer de temps.
C'est la grande question frustrante. C'est le cœur de notre dilemme extraordinaire.
Je pourrais dire que personne ne dit qu'il faut arrêter tout le pétrole au cours de la prochaine année, mais nous parlons d'une réduction de 25 % de la production mondiale d'ici 2030.
Tout ce que je peux dire, c'est que je pense que tant que les gens ne pourront pas, si vous voulez, faire une pause et s'éloigner des débats à savoir si telle chose ou telle autre constitue une subvention, sur l'industrie et ainsi de suite, et reconnaître la contrainte fondamentale à laquelle nous sommes confrontés...
Pour les enfants qui ont maintenant cinq et six ans — et nous en connaissons tous — il sera trop tard pour qu'ils puissent faire marche arrière. Voilà à quel point la situation est grave. C'est ainsi que je vois les choses, car je pense que cela traduit le désespoir absolu que nous vivons actuellement. Nous sommes dans cette situation parce que nous n'avons pas agi il y a 10 ou 15 ans.
Je ne vois pas de meilleure façon de répondre à votre question.
Pour beaucoup de gens dans le monde en développement, cet avenir sombre arrive dès maintenant à cause de l'inflation, des coûts élevés de l'énergie, des prix élevés des aliments. En fait, selon la FAO, l'indice des prix alimentaires est aussi élevé...
D'accord. C'est aussi à cause de la sécheresse et de la crise climatique extrême. Certains pays en développement sont en fait ceux qui souffrent le plus des changements climatiques, bien qu'ils n'y aient pas contribué.
Ma question porte sur les changements climatiques en particulier.
Toutes ces questions sont liées. Je conviens que le climat est une question très importante, tout comme la crise énergétique. Je ne pense pas que nous devrions ignorer l'un au détriment de l'autre.
Merci beaucoup. J'ai bêtement enlevé mon casque d'écoute parce que je ne pensais pas avoir une autre occasion de parler.
Si vous le voulez bien, j'aimerais revenir aux questions que j'ai posées plus tôt à M. Gooderham au sujet des délais et de l'urgence.
Si nous avions tout le temps au monde, nous pourrions examiner beaucoup d'options différentes, mais ce qui ne pardonne pas, c'est notre échéancier fixé à 2030. J'aimerais que M. Gooderham nous dise une dernière chose à ce sujet, si possible.
Je vous ai fait parvenir un mémoire qui contient une section sur l'augmentation de la concentration de carbone dans l'atmosphère. Nous pouvons en parler en termes de bilan de carbone et d'autres façons, mais la façon la plus immédiate de voir les choses, c'est à quel niveau se situe la concentration dans l'atmosphère, car c'est ce qui alimente le réchauffement. C'est bien compris et bien documenté, mais on n'en parle jamais dans les rapports du gouvernement canadien.
Comme je l'ai dit, elle était à 413 en 2020. Elle augmentait d'environ 0,03 par année dans les années 1990, mais elle augmente maintenant à un rythme de 2,5 par année. Nous savons que d'ici 2028, la concentration sera supérieure à 430. À 430, le niveau de concentration de carbone dans l'atmosphère est au seuil auquel, à moins que nous développions des technologies étonnantes pour éliminer le carbone de l'atmosphère plus tard, le réchauffement aura irrévocablement dépassé le seuil de 1,5 degré.
Me permettez-vous d'ajouter un autre point de référence selon lequel, au cours du dernier million d'années environ, cette concentration n'avait jamais dépassé 280 parties par million?
Par conséquent, le fait de dépasser 413 cette année et d'avoir une hausse de la température moyenne mondiale de 1,1 degré devrait déjà suffire à nous motiver.
C'était une discussion fascinante dans les deux groupes, avec des points de vue très solides et bien énoncés qui nous aident à définir et à préciser les sujets que nous étudions.
Merci beaucoup aux deux témoins de leurs exposés et de leurs réponses éloquentes.
Sur ce, la séance est levée. Nous nous reverrons mardi prochain à l'heure habituelle, soit 11 heures.