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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 057 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 17 avril 2023

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Bonjour à tous. J'espère que vous avez passé une bonne quinzaine de travail dans vos circonscriptions respectives.
    Bienvenue à la 57e réunion du Comité permanent de l'environnement et du développement durable. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 20 mars dernier, nous commençons notre étude de la fuite toxique de bassins de décantation.
    Voici maintenant quelques indications pour assurer le bon déroulement de cette séance qui se tiendra en format hybride.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Les participants par vidéoconférence doivent cliquer sur l'icône du microphone pour activer leur micro et sont priés de se mettre en sourdine lorsqu'ils n'ont pas la parole.
    Des services d'interprétation sont offerts. Ceux qui participent via la plateforme Zoom ont le choix au bas de leur écran entre la transmission du parquet sans interprétation, le français et l'anglais. Les participants dans la salle peuvent utiliser l'oreillette et choisir le canal désiré.
    Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Les participants sur place sont priés de lever la main s'ils souhaitent avoir la parole. Sur Zoom, il faut utiliser la fonction « Lever la main ».
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à Mme McPherson qui remplace aujourd'hui Mme Collins au sein de notre comité, ainsi qu'à Mme Goodrige qui est là à la place de M. Lake. J'espère que vous apprécierez le temps passé avec nous et que vous souhaiterez revenir à un autre moment. Il y a bien sûr aussi Mme May, mais elle est presque devenue une habituée de notre comité.
    Je suis en train de préparer mon arsenal de questions pour tout à l'heure.
    Nous sommes ravis de vous revoir, madame May.
    Je vais maintenant vous présenter notre premier groupe de témoins pour aujourd'hui. Nous accueillons d'abord les représentants de la Première Nation des Chipewyans d'Athabasca, soit le chef Allan Adam et la conseillère en réglementation, Mme Callie Davies-Flett. Nous recevons également M. Martin Grygar, ingénieur, qui représente la Première Nation 468 Fort McMurray. Pour leur part, le chef Billy-Joe Tuccaro et Mme Melody Lepine, directrice, vont témoigner par vidéoconférence au nom de la Première Nation crie Mikisew.
    Je tiens à souligner que vous avez droit un maximum de cinq minutes pour nous présenter vos observations préliminaires. Je devrai donc vous interrompre après cinq minutes, mais je suis persuadé que vous aurez amplement l'occasion de nous transmettre les éléments d'information restants en répondant aux questions des membres du Comité.

[Français]

     Chef Adam, vous avez la parole pour cinq minutes.
(1105)

[Traduction]

    Je m'appelle Allan Adam et je suis le chef de la Première Nation des Chipewyans d'Athabasca. Comme vous le savez, la saison de hockey bat son plein. La dernière fois que j'ai été aussi enthousiaste, c'est lorsque Wayne Gretzky a ramené la coupe chez nous. Connor McDavid va faire la même chose cette année.
    Tout déplacement à Ottawa est significatif pour notre peuple. Nous nous attendons à pouvoir discuter ici avec les élus en vue d'une réflexion sur les moyens à mettre en œuvre pour le mieux-être de tous.
    Je sais qu'il ne me reste sans doute qu'environ quatre minutes, mais je compte bien lire la déclaration que j'ai en main. Venir d'aussi loin pour se faire dire que l'on dispose de cinq minutes à peine… Vous allez écouter ce que j'ai à dire en m'accordant plus de cinq minutes, car il s'agit là de considérations très importantes quant au mode de développement de ce pays dans l'intérêt de tous les Canadiens. Si vous n'écoutez pas tout ce que j'ai à vous dire, je vais simplement me lever et quitter la salle en vous laissant le texte de la déclaration, et le tout sera terminé en 10 secondes.
    Il me faudra sans doute un peu plus de cinq minutes pour lire mon exposé. Tout ce que je demande, c'est sept minutes de votre temps. Je vais être franc et direct avec vous. J'ai fait tout ce chemin depuis l'Alberta pour m'asseoir avec vous aujourd'hui afin de vous faire comprendre ce que vivent nos gens et de m'assurer que vous prenez notre situation au sérieux.
    Bonjour, honorables députés. Merci de nous avoir invités aujourd’hui. Cette question est extrêmement importante et mérite une attention accrue.
    J’aimerais pouvoir vous dire que c’est un plaisir pour moi d’être ici, mais ce serait mentir. Pour une raison ou pour une autre, j’ai hérité de la tâche de venir à Ottawa rappeler au gouvernement ses obligations et ses responsabilités.
    Vous avez la responsabilité de défendre nos droits découlant des traités et garantis par l'article 35 de la Constitution. Vous avez la responsabilité de fournir les services de base en matière de santé, de soutiens sociaux, d’éducation et d’infrastructures que vos communautés de colonisateurs tiennent pour acquis. Vous avez la responsabilité de réglementer comme il se doit les gigantesques projets industriels qui pourraient menacer la santé et la sécurité des résidents de Fort Chipewyan et d’autres collectivités en aval. Vous avez la responsabilité d’avertir les êtres humains que leur eau peut avoir été contaminée par la fuite d’un bassin de décantation qui avait été déclaré sans danger quand il a été approuvé et autorisé par le Canada. Aidez-moi à comprendre comment il peut être possible que cela ait été approuvé par le Canada.
    Vous êtes responsables, peu importe ce que vous pouvez en penser. Il en va de même de l’Alberta, mais cela n'empêche pas les résidus de se répandre dans notre territoire ancestral depuis maintenant 11 mois, sans parler de ce qui s'est passé au cours des 30 dernières années… et de tout ce qui arrive à notre insu.
    Pendant 10 mois, cette fuite n’a pas été signalée, en dépit du fait que l’Alberta Energy Regulator, l'AER, l'organisme de réglementation de l'énergie en Alberta, et l’exploitant des sables bitumineux étaient au courant de ce qui se passait. Combien de gens à Ottawa savaient ce qui se passait en Alberta au cours de cette période de 10 mois?
    Pendant 10 mois, les gouvernements fédéral et provincial n’ont rien fait. Je peux en témoigner personnellement, car je n'ai reçu aucun appel à ce sujet. Il a fallu qu’une fuite plus catastrophique survienne plus tôt cette année pour que nous apprenions la vérité. Même alors, les gouvernements colonisateurs n’ont rien fait.
    C’est seulement quand nous avons alerté les médias nationaux que les gens à Ottawa et Edmonton ont commencé à se préoccuper de la situation. Ce n’est qu’après que nous ayons visité le lieu de la fuite et publié des photos et des vidéos des répercussions sur les plans d’eau fréquentés par des poissons et des animaux que des gens ont mis en doute l’explication officielle fournie par la première ministre de l’Alberta et l’AER.
(1110)
    À entendre la première ministre, il n'y a aucun problème. La faune n'est aucunement touchée. Eh bien, je vous invite à venir manger ce que nous mangeons, à venir boire l'eau que nous buvons, et il est bien possible que votre discours ne soit plus le même par la suite.
    Même après deux mois de reportages à la une, nous ne savons toujours pas au juste ce qui s’est produit. À notre connaissance, personne n’a été congédié et aucune mesure disciplinaire ou sanction n’a été imposée, que ce soit par les entreprises ou par les différents gouvernements, y compris celui‑ci. Certains dirigeants de l'Impériale ont bien tenté de présenter leurs excuses, mais l’Alberta traite toute l’affaire depuis le début comme un simple problème de communication. Il s’agit d’une tentative délibérée de minimiser pour des raisons juridiques et politiques une énorme catastrophe industrielle et les obligations financières et politiques qui en résulteront. Il y a en effet des poursuites judiciaires en cours qui visent notamment le gouvernement albertain.
    Le Canada ne devrait pas croire qu'il va s'en tirer aussi facilement, car vous êtes également responsables de ce qui s'est produit. Je ne serais pas ici aujourd'hui à Ottawa s'il ne se passait rien en Alberta, mais c'est malheureusement encore le cas. La fuite se poursuit au moment où l'on se parle. Aucune solution n'a été proposée pour régler la situation.
    J’en conclus que le Canada est un pays où l’on peut impunément déverser 5,5 millions de litres de boues toxiques dans l’environnement. N'oubliez pas que c'était 5,5 millions de litres en une seule journée. Lorsque j'ai visité le site de l'Impériale, on m'a indiqué que la fuite avait commencé trois jours plus tôt. Vous n'avez qu'à faire le calcul en multipliant par trois. C'est le total auquel on arrive sans que personne n'ait eu de comptes à rendre. Je l'ai vu de mes propres yeux en me rendant sur place. On menace ainsi la santé et le bien-être des collectivités en aval sans subir de conséquences. Le Régime de pensions du Canada et l’Alberta Investment Management Corp continuent d’investir des dizaines de millions de dollars chaque année dans les sables bitumineux.
    Les Canadiens s’attendent à ce que cette industrie soit réglementée comme il se doit. Je suis ici pour vous dire qu’elle ne l’est pas. Il n'y a aucune réglementation. Si l’Alberta porte une grande part de responsabilité, le Canada doit également répondre de ce qui se passe. La Loi canadienne sur la protection de l’environnement, la Loi sur les pêches et l’Entente-cadre sur les eaux transfrontalières du bassin du Mackenzie — que vous avez conclue avec vos homologues sans jamais vraiment y donner suite, ce que j'aurais pu vous prédire il y a 20 ans déjà — sont autant d’instruments et de cadres juridiques qui permettraient au gouvernement fédéral de protéger la santé et la sécurité des résidents en aval des sables bitumineux.
    Nous pouvons dénoncer un contrôle d’application déficient, un financement insuffisant et l’absence de volonté politique, mais ce sont là des excuses et non des solutions. Or, il nous faut des solutions. Cet incident amène tant les communautés autochtones de l’Alberta en aval que les résidents du Nord à se demander s’il s’agit d’un cas isolé ou d’un problème systémique dans l’ensemble du secteur des sables bitumineux. Lorsque je parle de « problème systémique » je fais référence au racisme systémique dont sont victimes les communautés des Premières Nations vivant en aval. Si tout cela se passait à Calgary, je peux vous garantir que c'est vous, et non moi, qui pousseriez les hauts cris aujourd'hui.
    Nous demandons au gouvernement fédéral d’employer tous les moyens juridiques à sa disposition pour se charger de l’enquête et du nettoyage du déversement de Impériale–Exxon à Kearl. Toute confiance dans le gouvernement de l’Alberta est perdue, et ce depuis bien longtemps déjà. On ne peut manifestement pas compter sur lui pour veiller à la réparation de ce désastre.
(1115)
    La situation est désastreuse depuis les années 1960. Quand allez-vous vous décider à mettre de l'ordre dans tout cela? L'Alberta a obtenu 1 milliard de dollars pour décontaminer les sables pétrolifères. Il lui en faudrait 130 milliards. Où le Canada va‑t‑il trouver le reste des fonds requis s'il est impossible pour l'Alberta d'y parvenir? C'est la stricte vérité, et ce n'est pas moi qui l'affirme; ce sont vos pairs qui l'ont écrit.
    Nous exhortons également le gouvernement à entreprendre une inspection complète de l’intégrité structurelle des bassins de décantation dans l’ensemble du secteur des sables bitumineux, et pas seulement à Kearl. Si on peut passer une fuite sous silence pendant 10 mois au site Kearl, qu’en est‑il de la situation ailleurs? Ça nous prend une vérification crédible et contrôlable de tous les bassins de décantation pour rétablir un minimum de confiance. Si cela n'est pas chose possible pour vous, voulez-vous bien me dire ce que vous faites ici?
    Enfin, le Canada doit veiller à ce que les peuples autochtones aient leur mot à dire dans la manière de réglementer les sables bitumineux et de prendre des décisions sur les résidus. Nous devons définir en priorité la politique sur la gestion à long terme des bassins de décantation.
    L’industrie et l’Alberta proposent de traiter les résidus liquides et de les reverser dans la rivière Athabasca. Il n’est pas question pour ma communauté ou quelque autre collectivité en aval d’accepter cette solution. Ce n’est pas notre dégât. Nous ne permettrons pas que les pollueurs rejettent ces résidus dans notre eau potable. Si jamais c'était la solution retenue, est‑ce que le Canada aurait suffisamment de fonds pour déplacer notre communauté et nos gens afin qu'ils se retrouvent en lieu sûr?
    Je vais avoir l'obligeance de vous servir une mise en garde quant à ce que l'avenir pourrait vous réserver. C'est un dossier qui pourrait fort bien donner lieu à des poursuites judiciaires, et le Canada va se retrouver au banc des accusés, au même titre que l'industrie des sables bitumineux et le gouvernement de l'Alberta.
    Il y a une chose qui m'apparaît totalement injustifiée, monsieur le président. Pourquoi les communautés des Premières Nations doivent-elles se présenter devant un comité pour obtenir un permis afin d'exploiter leurs territoires traditionnels? Pourquoi devons-nous dépenser des millions de dollars pour témoigner de ce que nous vivons afin d'obtenir l'accès à de l'eau potable et de pouvoir consommer en toute sécurité du poisson, de la viande d'orignal et tout le reste?
    Pourquoi se fait‑il que pendant que nous dépensons ces millions de dollars, le gouvernement albertain continue d'approuver automatiquement toutes les demandes de permis d'exploitation des sables bitumineux dont il est saisi? Pourquoi ne pourrions-nous pas faire partie nous-mêmes du comité, ce qui nous éviterait d'engager tous ces coûts, pour les entendre parler des torts qu'ils veulent causer à nos communautés?
    L'AER, l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta, c'est une véritable farce. Si, tout bien considéré, vous partagez tous cet avis, alors pourquoi dois‑je encore me présenter ici? Voilà maintenant 40 ans que l'on approuve automatiquement tout ce que l'industrie propose. Vous pouvez bien vous mordre les lèvres; vous avez toutes les raisons de le faire, car ce n'est pas une blague, mais la triste réalité.
    Il y a encore chez nous des gens qui meurent en raison de conditions sanitaires déficientes dont personne n'a daigné parler pendant 10 ans. Si vous souhaitez que j'en traite de nouveau, je vais le faire volontiers, et nous reprendrons tout ce débat.
(1120)
    À ce titre, je peux vous dire que j'attends des nouvelles de mon beau-père. On va lui communiquer aujourd'hui même ses résultats d'analyse après avoir trouvé la semaine dernière une tumeur cancéreuse dans son foie. Je suis censé être avec mon épouse pour la réconforter quand elle recevra cette nouvelle, mais je suis plutôt ici pour témoigner devant tous les Canadiens des problèmes que vit notre communauté.
    Si ces bassins de décantation continuent à fuir, nous n'aurons bientôt plus une espérance de vie de 80 ans. Pour l'ensemble de notre communauté, elle sera sans doute d'environ 60 ans. J'affirme une telle chose parce que des jeunes commencent à être frappés par le cancer, et ce, sans parler de tous les problèmes de santé mentale qui perdurent depuis la fin de la pandémie. Ces problèmes existaient déjà longtemps avant la COVID et nous affecteront encore longtemps après. Si nous n’arrivons pas à régler ces problèmes, la situation va se détériorer. Il ne devrait plus y avoir de nouveaux projets dans notre secteur, car ce sont nos gens qui en paient le prix. Les communautés en aval continuent d'en ressentir les conséquences. Si quelqu'un ici croit que c’est sans danger, je l'inviterais à offrir la source d’approvisionnement en eau de sa collectivité pour le stockage à long terme de résidus.
    Ce problème ne se réglera pas tout seul. Le Canada et la population canadienne ont tiré des milliards de dollars de cette ressource. Le Canada a la responsabilité de s’attaquer à la crise globale des résidus et de la remise en état qui se joue dans notre région et qui menace tout le bassin du Mackenzie en aval des sables bitumineux. Pour ce faire, il doit charger un organisme de cogestion mandaté par le gouvernement fédéral et dirigé par les peuples autochtones d’assurer une surveillance efficace et le doter des pouvoirs d’exécution pour corriger le problème.
    Nous demandons en fait, monsieur le président, que les communautés des Premières Nations qui vont être touchées par les grands projets industriels deviennent elles-mêmes les instances réglementaires. Nous devrions être assis de l'autre côté de la table, plutôt que de témoigner des torts causés à nos communautés par l'industrie et des raisons pour lesquelles c'est encore le cas aujourd'hui.
    Quel est votre mandat? Votre mandat a des répercussions sur les personnes qui vivent en aval, une situation qui ne changera pas de sitôt.
    Je vais en rester là pour l'instant, monsieur le président. Merci.
    Merci.
    Nous allons maintenant entendre M. Grygar.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, chef Adam.
    Je m'adresse à vous aujourd'hui au nom de la Première Nation 468 Fort McMurray. Neil Cheecham devait se joindre à vous, mais malheureusement, il ne peut pas être ici aujourd'hui. C'est un honneur pour moi de prendre la parole en son nom et au nom des membres de notre communauté.
    Personne ne croyait que nous nous retrouverions ici aujourd'hui. Les manquements aux obligations en matière de divulgation et de déclaration à l'égard du MPO et des communautés autochtones sont particulièrement décevants. Nous attendons toujours l'approbation d'une demande d'examen de documents techniques de l'Impériale. Même des demandes visant l'examen de documents supplémentaires de l'Impériale sur la qualité de l'eau ont été retardées ou reportées, ou les détails qui ont été fournis sont très limités. Il va sans dire que tout cela alimente la méfiance au sein des communautés.
    Nous vivons dans une société fondée sur des règles. Je vais répéter cette affirmation: nous vivons dans une société fondée sur des règles. Pourtant, l'incident récent lié à la mine Kearl de l'Impériale montre que les exploitants de sables bitumineux, les organismes de réglementation et les gouvernements continuent à mal se comporter et à accorder plus d'importance aux groupes d'intérêt qu'à la confiance et à la transparence. Par conséquent, nous sommes ici aujourd'hui pour demander expressément que la réglementation et les politiques relatives à l'assainissement, à la protection et à la remise en état de l'environnement soient fondées sur la protection et le maintien des droits ancestraux et issus de traités des Autochtones de la région.
    La Première Nation 468 Fort McMurray est une communauté autochtone titulaire de droits issus de traités située à Fort McMurray. En 2021, la Loi sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones du Canada a reçu la sanction royale et est entrée en vigueur. Il s'agit d'une loi très importante pour les communautés de la région parce qu'elle leur permet de se prévaloir de leurs droits issus de traités sur ces terres lorsque les exploitants de sables bitumineux cessent leurs activités. Par ailleurs, elle fournit une feuille de route au gouvernement du Canada et aux peuples autochtones pour qu'ils travaillent ensemble à la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies en se fondant sur la réconciliation, la guérison et des relations de coopération durables.
    Pour pouvoir exercer nos droits, nous devons absolument avoir la possibilité d'utiliser le vaste réseau de cours d'eau de la région, notamment le bassin versant de la rivière Athabasca. Cela étant dit, les bassins de décantation contenant des eaux contaminées par les procédés et des eaux usées industrielles sont une source croissante de préoccupations. À l'heure actuelle, on estime que ces bassins contiennent 1,7 billion de litres de résidus et qu'ils occupent une superficie de 225 kilomètres carrés. Les risques accrus de fuites ont un effet néfaste sur la faune et la flore, les sources traditionnelles de poissons et l'eau potable. Les bassins de décantation sont difficiles à assainir et les fuites difficiles à éviter; il y a donc des préoccupations grandissantes par rapport aux répercussions sur l'environnement, sur la santé humaine, sur les droits issus de traités et sur la culture.
    Comme le chef Adam l'a déjà dit, les communautés autochtones de la région sont touchées par des taux croissants de cancer. Nous tenions tous pour acquis que les bassins suintaient; aujourd'hui, pour la première fois, nous avons la preuve que des eaux se sont écoulées des bassins de décantation.
    Tous balaient du revers de la main l'augmentation du risque de cancer: les Autochtones fument, ils boivent et ils ont des habitudes de vie malsaines. Je trouve important de comprendre que d'autres facteurs expliquent peut-être le risque accru de cancer dans les communautés autochtones de la région.
    L'incident récent lié à la mine Kearl de l'Impériale et le décret de protection de l'environnement qui s'est ensuivi révèlent de graves lacunes en matière de gestion de la réglementation. À cause de l'absence de surveillance réglementaire et de mesures décisives à l'égard de l'incident, en plus de l'omission de transmettre des renseignements rapidement, la Première Nation 468 Fort McMurray ainsi que toutes les autres communautés de la région ont peut-être été exposées à des risques chroniques et sérieux pour la santé humaine par plusieurs voies, comme les eaux de surface et les eaux souterraines.
(1125)
    Aujourd'hui, on avance des preuves comme quoi c'était l'hiver, il y avait peu de faune et de flore — tout dormait — et le risque de boire l'eau des rivières et des affluents gelés n'était peut-être pas aussi grand qu'il l'aurait été en été. Cependant, il y avait bel et bien un risque, et ce risque perdure.
    La manière dont le dossier a été géré mine encore plus notre confiance envers le régime réglementaire de l'Alberta, ainsi que sa capacité de régler les problèmes et de protéger nos droits. Par conséquent, nous demandons aux personnes ici présentes de prendre nos commentaires en considération et de tenir compte d'objectifs et de paramètres importants pour l'industrie et les parties prenantes, soit les communautés aux environs des projets d'exploitation.
    Il faut un cadre réglementaire relatif à l'environnement, une évaluation régionale réalisée en vertu de la Loi sur l'évaluation d'impact, et une étude des effets cumulatifs des activités non seulement de l'Impériale, mais aussi de Suncor, de Synoil, de Syncrude et de tous les autres exploitants à l'œuvre dans la région. Le rôle joué par chacune des parties doit être pris en considération. Tout le monde pourrait parler du Plan régional pour le cours inférieur de la rivière Athabasca, mais il n'est pas suffisamment contraignant. Il faut renforcer la surveillance de sorte que les effets cumulatifs de toutes les activités soient pris en compte.
    Étant donné les effets néfastes des suintements sur l'environnement, nous sommes également déçus et inquiets par rapport à l'influence exercée par l'industrie sur la réglementation et les politiques liées à la libération des eaux contaminées par les procédés et des eaux usées industrielles contenues dans les bassins de décantation. Je le répète: c'est facile de faire disparaître les eaux, mais les risques auxquels les communautés sont exposées ne disparaissent pas du même coup.
    Le plan proposé de modifier la Loi sur les pêches pour permettre la libération des eaux contaminées par les procédés et des eaux usées industrielles provenant des exploitants de sables bitumineux est un pas en arrière. C'est un autre bon exemple qui montre que les communautés autochtones sont toujours ignorées, surtout en l'absence d'une évaluation des effets cumulatifs.
    Néanmoins, je tiens à prendre le temps de remercier toutes les personnes ici présentes pour le partenariat qui a été noué relativement à la loi adoptée par le gouvernement fédéral. Cette loi pourrait fournir une feuille de route au gouvernement du Canada et aux peuples autochtones pour qu'ils travaillent ensemble à la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies en se fondant sur la réconciliation, la guérison et des relations de coopération durables.
    Par ailleurs, le Groupe de travail Couronne-Autochtones, le GTCA, représente une partie de la solution. Il offre aux communautés autochtones une voie par laquelle trouver des options envisageables pouvant mener au consentement. La structure du GTCA, qui est formé de plusieurs sous-groupes, permet d'avoir des discussions ouvertes et franches dans le but d'obtenir le consentement et de trouver des solutions conformes à la fois au droit constitutionnel canadien et, plus important encore, au droit autochtone. Dans le passé, je crois que l'écart entre le droit autochtone et le droit constitutionnel a été ignoré, ce qui a entraîné des conflits et des différends au sein des communautés. Dorénavant, selon moi, le GTCA pourrait contribuer à combler cet écart.
    Aujourd'hui, nous avons une demande à vous faire. Les concepts de remise en état et de l'équivalence du potentiel des terres proviennent généralement des domaines de l'agriculture et de la foresterie. Dans le passé, les communautés autochtones et les gardiens du savoir ont très peu été appelés à participer aux processus en la matière. Nous aimerions commencer à mettre l'accent sur un cadre réglementaire plus actif pour évaluer les niveaux de protection et pour fixer et imposer des normes autochtones quant aux aliments traditionnels, à l'utilisation des terres et aux pratiques culturelles, au besoin, au lieu de suivre par défaut les lignes directrices établies par l'AER. Le gouvernement du Canada se doit d'adopter de la réglementation et des politiques pour soutenir les efforts d'assainissement et de remise en état afin que les communautés autochtones puissent exercer leurs droits ancestraux et issus de traités.
    Velma, une des membres de notre communauté, est une personne très sage. Elle appuie la communauté depuis très longtemps. Comme elle le dit: « Ce que nous subissons n'est pas le fruit de nos actions; c'est le fruit des actions des autres. » Le problème ne disparaîtra pas. La mise en place d'un processus de réglementation actif contribuera à l'atteinte de résultats concrets dans la région.
    Merci.
(1130)
    Merci beaucoup, monsieur Grygar.
    Nous passons maintenant au chef Tuccaro.
    La parole est à vous, chef Tuccaro.
     Bonjour à toutes et à tous. Je suis le chef Billy-Joe Tuccaro. Je vous appelle depuis Fort Chipewyan, en Alberta.
    À l'instar du chef Adam, je dépasserai, moi aussi, les cinq minutes qui me sont allouées étant donné la gravité de la situation qui se déroule actuellement au sein de ma communauté.
    Sur ce, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui. Je suis Billy-Joe Tuccaro, chef de la Première Nation crie Mikisew. Je suis accompagné aujourd'hui de Melody Lepine, directrice des relations gouvernementales et industrielles de la nation. Elle m'aidera à répondre à vos questions.
    Tout d'abord, nous aimerions profiter de l'occasion pour exprimer notre frustration et nos sérieuses préoccupations concernant les fuites de substances toxiques des bassins de décantation de la mine de sables bitumineux Kearl, qui appartient à l'Impériale, ainsi que leur mauvaise gestion. Notre frustration et nos préoccupations sont liées au fait que, comme le chef Adam l'a aussi mentionné, notre communauté a été informée des fuites seulement 10 mois plus tard. C'est totalement inacceptable. En ma qualité de chef de la Première Nation crie Mikisew, j'aurais dû recevoir un avis dès que l'incident s'est produit.
    Il importe de tenir compte du contexte de la crise. Ce contexte, c'est un manque continu de protection fédérale nécessaire de notre environnement, de nos droits et de notre santé face à un total actuel de 1,4 billion de litres de déchets liquides mis de côté près de nos rivières, de nos marécages, de nos lacs et de nos eaux souterraines et s'écoulant vers notre communauté et jusqu'à l'Arctique. Essayez d'écrire ce nombre: 1 400 000 000 000 litres. C'est beaucoup de zéros.
    Permettez-moi de vous fournir quelques renseignements contextuels additionnels. La Première Nation crie Mikisew est la plus grande nation signataire du Traité no 8 de la région des sables bitumineux. De nombreux intérêts fédéraux convergent sur notre territoire traditionnel.
    Premièrement, on y trouve le plus grand parc national du Canada, qui est aussi un site du patrimoine mondial de l'UNESCO. Deuxièmement, des eaux transfrontalières importantes y sont situées. Troisièmement, il comporte l'une des principales routes de migration d'oiseaux de l'Amérique du Nord. Quatrièmement, il abrite des espèces emblématiques telles que le caribou et le bison des bois. Cinquièmement, il est composé d'un réseau de lacs, de rivières et de marécages qui soutiennent d'importantes espèces de poissons et leur habitat.
    Sixièmement, quelques-uns des plus grands projets industriels au Canada y sont situés. Ces projets produisent des quantités énormes de gaz à effet de serre et toutes sortes de substances toxiques, dont certaines sont réglementées en vertu de la LCPE de 1999 ou devraient l'être. Quand nous, la nation Mikisew, avons signé le Traité no 8 en 1899, nous avons noué un partenariat avec la Couronne. Nous nous sommes engagés à gérer nos terres et nos ressources en partenariat avec le Canada. Pour sa part, la Couronne s'est engagée à ne pas nous empêcher d'exercer nos droits issus de traités et de veiller à ce que nous ayons accès aux terres et aux cours d'eau nécessaires pour maintenir notre mode de vie. Ces droits sont protégés aux termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
    Mesdames et messieurs, nous sommes ici aujourd'hui pour vous dire que la Couronne ne respecte pas ses promesses, et que le Parlement et le gouvernement fédéral doivent en faire plus.
    Je dois ajouter que l'aîné dont a parlé le chef Adam appartient à ma nation. Aujourd'hui sera une journée forte en émotions pour sa famille et pour la Première Nation crie Mikisew. Depuis que cet incident est survenu en mai dernier — j'ai été élu en octobre, mais j'étais alors membre de la communauté —, j'ai remarqué une hausse du taux de cancer. De plus, beaucoup de personnes dont le cancer était en rémission ont rechuté. On a observé récemment une augmentation de l'incidence du cancer des canaux biliaires, la forme la plus rare de cancer qu'on connaît.
(1135)
    Les soins que les membres de notre communauté reçoivent ne font qu'accélérer leur décès. Je le sais. Je l'ai vu de mes propres yeux quand cette maladie que personne ne sait comment soigner a emporté un de mes meilleurs amis. Voilà ce que vit ma communauté.
    Le ruissellement printanier est la période la plus importante pour nous. Quand nous récoltons du poisson, de la viande, de la végétation et des remèdes traditionnels, comment pouvons-nous obtenir l'assurance que nos récoltes nous permettront de maintenir notre mode de vie?
    La crise actuelle révèle des échecs sur de nombreux plans, et nous craignons que le projet Kearl ne soit que la pointe de l'iceberg. Sans réforme profonde, nous nous attendons à devoir faire face à des événements encore plus catastrophiques. L'enjeu ne concerne pas seulement le projet Kearl; il concerne toutes les industries qui utilisent des bassins de décantation. Tenez-vous‑le pour dit: nous ne tolérerons pas qu'un tel incident se reproduise. Il n'y aura pas d'autres incidents de la sorte; sinon, comme le chef Adam l'a demandé, le Canada est‑il prêt à déménager la nation Mikisew en lieu sûr?
    L'été approche. Des enfants se baigneront dans le lac. La MRWB n'analyse que l'eau des robinets. Qui peut m'assurer que les enfants qui joueront dans l'eau au printemps et en été le feront en toute sécurité? Voilà ce que veut la communauté.
    L'une des leçons les plus évidentes à tirer de cette crise, c'est que, comme nous le savions déjà, l'AER est un organisme de réglementation à liberté limitée; ce n'est pas un partenaire de confiance pour la protection des intérêts fédéraux dans notre communauté. Moi qui vis dans une communauté autochtone située en aval des sables bitumineux, je suis bien placé pour affirmer qu'il est épouvantable que l'Alberta en fasse si peu pour maîtriser la croissance et l'expansion progressive des bassins toxiques énormes qui suintent dans notre environnement naturel et nos bassins versants. Notre mode de vie, des écosystèmes d'une importance nationale et le bien-être de la population canadienne s'en trouvent menacés.
    Permettez-moi de vous donner quelques exemples des échecs de l'AER à notre égard et à l'égard du Canada en entier. Il semblerait que l'AER était au courant des suintements depuis des années, mais l'organisme de réglementation n'a fourni aucun avis ou aucune donnée ni au gouvernement fédéral ni à nous. De plus, les données de l'AER montrent que les bassins suintaient depuis des années et elles confirment que les suintements débordaient des systèmes de gestion des fuites; pourtant, l'AER n'a rien fait. En outre, l'AER a ignoré des conclusions sans équivoque tirées par la commission d'examen conjoint du projet Kearl. Encore aujourd'hui, nous avons de la difficulté à obtenir suffisamment de données de la part de l'AER sur l'incident lié au projet Kearl, et l'AER permet à l'Impériale de limiter la collecte et l'échange de données.
    De son côté, le gouvernement fédéral a mieux réagi. Services aux Autochtones Canada a pris des mesures importantes pour assurer l'accès à l'eau potable et à des services de santé mentale en période de crise. En outre, le ministre de l’Environnement s'est entretenu avec nous pour tenter d'établir la voie à suivre en nous traitant comme de véritables partenaires. Toutefois, la crise du projet Kearl montre aussi que le système de réglementation canadien n'est pas non plus irréprochable. La réponse du Canada à la crise a été entravée par le fait que la province n'a pas communiqué de renseignements et qu'elle n'a pas suivi les conclusions sans équivoque de la commission d'examen conjoint du projet Kearl. Pourquoi?
    En outre, le Canada a eu de nombreuses occasions de mieux se préparer, mais soit il n'a pas pris les mesures essentielles qui s'imposaient, soit il a tardé à le faire. Permettez-moi de vous donner quelques exemples.
    Il y a plus de cinq ans que le Comité du patrimoine mondial de l'ONU a demandé une évaluation des risques posés par les bassins de décantation. Pourquoi?
(1140)
    Cela fait plus de 10 ans que nos communautés ont demandé une étude sur la santé, qui aurait pu amener le gouvernement à prendre des mesures de protection. C'est pourquoi il y a environ un mois, les Mikisew ont envoyé au premier ministre une lettre dans laquelle ils demandaient que l'on procède à l'étude sur la santé, compte tenu notamment de la situation actuelle et de la récente hausse des taux de cancer observée au sein de la communauté.
    Depuis plus de 10 ans, des scientifiques soutenus par le gouvernement fédéral ont relevé des problèmes de suintement des bassins de décantation dans des eaux poissonneuses, mais aucune amélioration n'a été apportée à la réglementation ou aux lois.
     Il existe des outils fédéraux, tels que des accords en vertu de la Loi sur les pêches, qui pourraient être utiles sur le plan de la communication d'information, mais ils n'ont pas été mis en œuvre.
     En 2019, la commission d'examen conjoint du projet Frontier de la société Teck a demandé au Canada d'entreprendre davantage de travaux de surveillance et de recherche dans la région en raison des menaces qui pesaient sur le site du patrimoine mondial du parc national Wood Buffalo, mais des mesures doivent encore être prises.
     Mesdames et messieurs, au moment où vous enquêtez sur les nombreuses lacunes liées à la crise du projet Kearl, il est important que vous n'oubliiez pas le coût humain. La plupart des Mikisew, voire tous les Mikisew, passent une bonne part de leur temps à exercer leurs droits conférés par traité sur le territoire, y compris la partie touchée par la Compagnie Pétrolière Impériale et par les nombreux bassins de résidus rejetés le long de la rivière Athabasca.
     Les membres de ma communauté ont peur. Certains ont peur de boire leur eau et nous ne savons même pas combien de temps durera notre approvisionnement en eau potable à Fort Chip. Les gens sont stressés. Ils s'inquiètent pour leur santé. Vous avez probablement entendu parler des cas de cancer rare à Fort Chip. C'est ce qui préoccupe les gens lorsqu'une telle chose se produit.
    Notre mode de vie est touché. Nous vivons de ces terres et de ces eaux depuis des générations. À Fort Chip, nous consommons encore beaucoup d'aliments traditionnels. Nous devons pouvoir compter sur nos terres et nos eaux pour pêcher et chasser. Nous avons besoin de cette certitude.
     La situation a changé à cet égard et il est important que vous compreniez tous que nous sommes très touchés par ce problème. Nous avons des intérêts à la fois immédiats et à long terme. Le problème alarmant du suintement des bassins de décantation préoccupe sérieusement les Mikisew, car les gouvernements ne déploient pas d'efforts pour protéger leurs droits et leur environnement.
     Membres du Comité, nous voulons nous assurer que l'intégrité et la santé de notre environnement et de notre peuple sont protégées, ce qui signifie qu'il faut protéger les eaux poissonneuses des sables bitumineux et nos réseaux hydrographiques. Cela signifie qu'il faut protéger nos sources d'eau potable et mieux réglementer les menaces majeures que représentent les immenses zones de résidus. Cela signifie que l'on doit bien communiquer l'information de façon transparente.
     Je suis sûr que bon nombre d'entre vous veulent savoir ce que les Mikisew demandent. Nous demandons simplement qu'on nous procure la certitude que ces bassins de décantation qui fuient seront entièrement nettoyés; qu'aucun contaminant susceptible de poser un risque pour notre santé et nos moyens de subsistance n'atteindra nos aliments traditionnels et notre eau potable; et que nos eaux seront potables et pourront être utilisées sans danger. Nous avons besoin de certitude quant à la santé des membres de notre peuple, à l'aspect et au fonctionnement de nos terres à l'avenir, à notre capacité de préserver notre mode de vie sur les terres et à la protection de nos droits, comme on nous l'a promis en 1899.
     Tout cela ne sera possible que si le Canada prend des mesures concrètes pour s'assurer que notre communauté fait partie d'un processus de supervision de la situation urgente actuelle et qu'elle sera consultée sur la manière dont l'exploitation des sables bitumineux se poursuivra dans notre région. Cela ne peut se faire que si l'on commence à rendre des comptes et à faire preuve de transparence à propos de cette situation et de tous les bassins de décantation.
    Merci aux membres du Comité.
(1145)
    Merci, chef Tuccaro.
    En raison de la gravité de la question, nous avons prolongé notre réunion d'une demi-heure aujourd'hui. Elle durera deux heures et demie au lieu de deux heures et un autre groupe de témoins comparaîtra à 12 h 15.
     Nous allons procéder à une série de questions dont les interventions sont de six minutes. C'est M. Deltell qui commence. Je crois qu'il cédera une partie de son temps à Mme Goodridge.
    Mesdames et messieurs, merci beaucoup de vos témoignages importants.
    Chef Adam, vous parlez de rétablir un minimum de confiance. Vous avez raison, et voilà pourquoi nous sommes tous ici. Voilà pourquoi nous tous, ici présents, avons demandé que cette réunion du Comité ait lieu. Il est de notre devoir et de notre responsabilité de nous pencher sur le problème.

[Français]

    Nous devons faire en sorte que ce très grave accident ne se reproduise pas et, surtout, comprendre les causes et les effets que cela a eus sur les gens touchés. C'est pourquoi je vais tout de suite passer la parole à la députée qui représente la circonscription où tout cela s'est passé, soit celle de Fort McMurray—Cold Lake.

[Traduction]

    Merci, monsieur Deltell.
     Tout d'abord, vous êtes les premiers témoins que nous entendons dans le cadre de cette étude. Nous recevrons des représentants de l'Impériale jeudi.
     Je me demandais si vous pouviez nous dire quand l'Impériale vous a contacté pour la première fois et sur quoi portait cette communication.
    Je commencerais peut-être par vous, chef Adam.
(1150)
     Kearl n'a jamais communiqué avec la Première Nation des Chipewyans d'Athabasca. L'ancien chef de la Première Nation de Fort McKay, Mel Grandjamb, qui était chef à l'époque, m'a avisé le 24 février. Il m'a demandé si j'avais entendu parler de l'incident qui s'était produit au lac Kearl, où il y avait une fuite du bassin de décantation fuyait dans la rivière Firebag. Je lui ai répondu non et il m'a dit que je ferais mieux d'agir. Il se demandait pourquoi personne ne m'avait prévenu et je lui ai répondu que je n'étais pas au courant. Il était 22 h 30.
    En quelle année était‑ce?
    En 2023.
    D'accord.
    Il m'a appelé le 24 février 2023.
     Lorsque j'ai entrepris les démarches quant à ce qui se passait... Le soir même, un message texte a été envoyé. Le lendemain, le 25, tout s'est déchaîné en raison de ce qui s'était passé.
    C'est très préoccupant.
     Quel engagement l'Impériale a‑t‑elle pris depuis que cet incident est connu du public?
    Concernant la Première Nation des Chipewyans d'Athabasca, l'Impériale nous a permis, à moi et à mes trois collaborateurs, de visiter le site. Lorsque nous nous sommes rendus sur place et que nous avons examiné ce qui se passait, il m'a semblé — et je peux le confirmer, car j'ai toujours les vidéos dans mon téléphone — que la fuite du bassin de décantation touchait non seulement une zone, mais plusieurs zones. On se retrouve avec trois incidents différents dans trois zones où il y a une fuite.
    Chef Tuccaro, quand l'Impériale vous a‑t‑elle contacté pour la première fois, ou l'a‑t‑elle fait?
    À peu près au même moment que le chef Adam.
     Il ne faut pas oublier non plus que je suis devenu chef en octobre. Jusqu'en février, je n'avais aucune idée de ce qui s'était passé avant. Nous avons été informés en février également.
    Le chef Grandjamb a‑t‑il aussi communiqué avec vous, ou l'Impériale vous a‑t‑elle contacté directement?
    Non, le chef Grandjamb n'a pas communiqué avec moi. Nous n'avons pas eu de nouvelles de l'Impériale tout de suite. C'était plus ou moins du bouche‑à‑oreille, ce qu'on disait dans la rue, et c'est pourquoi j'ai demandé à mon équipe de poser des questions.
    Je vous remercie. Je pense qu'il est important de s'assurer que ces faits sont consignés au compte rendu. Il est essentiel que nous disposions de ces renseignements pour la suite des choses.
    Je crois que vous avez tous conclu des ententes sur les répercussions et les avantages avec l'Impériale. Quelqu'un peut‑il nous dire en quoi consiste le volet communication dans le cadre d'une telle entente?
    En ce qui concerne notre entente sur les répercussions, l'Impériale était censée nous informer de tout ce qui se passait sur son site, ce qui vaut aussi pour tout exploitant de sables bitumineux.
    Pour une raison ou pour une autre, il a fallu rompre cette entente. Elle a enfreint sa propre entente. De notre côté, les membres de la Première Nation des Chipewyans d'Athabasca, nous respectons toujours notre part de l'entente et ne parlons pas en mal des exploitants de sables bitumineux. Nous vous avons accordé la confiance nécessaire pour qu'ils puissent mener des activités dans notre région. Il est absurde et consternant de constater qu'on a caché de l'information pendant 10 mois et pendant je ne sais combien d'années.
     Pourquoi continuez-vous à nous mentir? Qu'avons-nous fait au Canada... pour que l'on mente à tout le monde? Nous n'avons jamais rien fait à personne. Tout ce que nous voulons, c'est qu'on nous dise la vérité sur ce qui se passe dans notre région.
     C'est dans notre région que se déroule actuellement le plus grand mouvement économique et industriel de la planète. Dites-moi ce que vous allez faire de différent en respectant l'environnement. C'est tout ce que je demande.
(1155)
    Nous devrons maintenant passer à M. Duguid.
    Merci, monsieur le président.
     Je tiens à remercier le chef Adam, le chef Tuccaro et M. Grygar pour leurs témoignages très éloquents aujourd'hui. Je tiens à vous remercier aussi de mettre en lumière le grave abus de confiance qui a été commis non seulement à votre endroit, mais aussi à l'endroit d'autres communautés en aval.
    Je m'adresserai d'abord au chef Adam. Nous souhaitons la meilleure des chances à votre beau-père et nous espérons qu'il se rétablira.
     D'après ce que j'ai compris, il y a 31 communautés dénées et six communautés inuvialuites en aval du site de Kearl. Il y a également un certain nombre de communautés métisses. Je crois savoir qu'une rencontre, ou du moins une discussion, a eu lieu avec toutes ces nations. Pour toutes ces nations, l'eau est sacrée. Dans votre culture, vous dépendez de l'eau pour vous nourrir et pour boire.
    Pourriez-vous peut-être nous parler davantage des effets sur la santé mentale, des effets psychologiques et de l'inquiétude que cela cause à toutes ces communautés d'après vos récentes rencontres?
    Oui.
     En ce qui concerne les questions liées à la consommation sans risque des aliments et de l'eau, après avoir été informé du déversement au lac Kearl et avoir découvert que tout cela était vrai, je suis rentré chez moi, à Fort Chip. Je devais ouvrir le robinet pour pouvoir cuisiner. Je bois deux tasses de café chaque matin. D'où vient cette eau?
    Étant donné qu'utiliser l'eau du robinet pouvait nuire à ma santé, je devais prendre en considération tous les membres de notre communauté qui ressentaient la même chose, et ils n'étaient même pas encore au courant de cette information. Lorsque je suis rentré chez moi, je me suis senti tellement seul. Je ne savais pas comment dire aux gens ce qui se passait et on me reprochait parfois de dire la vérité.
    Je suis un homme bon. Mon père et ma mère m'ont élevé pour que je sois un homme bon. Je ne fais pas de mal aux gens. J'essaie de leur donner une bonne vie et la responsabilité d'élever leurs enfants pour que notre vie continue. Pourquoi dois‑je à nouveau me présenter devant le Comité pour défendre notre communauté? Quand tout cela va‑t‑il cesser?
    Je vous remercie, chef Adam, de ces paroles poignantes.
    Je pense que M. Grygar veut conclure.
    Allez‑y, monsieur Grygar.
    Je pense que les effets sur la santé mentale, les préoccupations, le manque de transparence et le manque constant de transparence ne font que susciter de plus en plus d'inquiétudes parmi les membres de la communauté, en particulier au moment où le printemps commence et que tout s'écoulera un peu plus facilement. Je pense que nous ne devons pas l'oublier.
     Nous sommes sortis de la COVID. Les communautés ont été isolées. Les communautés autochtones sont très sociales. Nous arrivons maintenant à un stade où les communautés savent que les bassins de décantation suintaient ou que l'on tenait pour acquis qu'ils suintaient. C'est la première fois que l'on confirme les inquiétudes de chacun sur le fait que ces choses échappaient à leur contrôle.
    Je voudrais également répondre à une question qui a été posée précédemment. Il est vrai que dans les ententes, des choses restent confidentielles. Cependant, je pense qu'il est important de souligner que c'était le devoir de l'Impériale. Le fait que l'Impériale n'ait pas consulté les communautés lorsqu'elle a commencé son enquête et qu'elle n'ait pas fourni continuellement l'information et les données au fur et à mesure a constitué la violation initiale de ces ententes. Je pense que nous ne devons pas l'oublier. Cependant, nous continuons de respecter les ententes, parce que nous préservons la confiance en nous-mêmes et le respect pour nous-mêmes afin de garantir que l'Impériale a le devoir de travailler avec les communautés et qu'elle continue de le faire.
    Je terminerai mon intervention par ce qui suit. Les communautés de l'Association locale 1935 des Métis et de la Première Nation 468 de Fort McMurray ont proposé de collaborer davantage avec l'Impériale, de recueillir des données avec l'Impériale et d'examiner les effets sur la santé humaine avec l'Impériale. On nous a répondu que c'était trop compliqué et que nous devrions leur donner une estimation des coûts pour le processus d'examen technique lié à l'ordonnance de protection de l'environnement. Il s'agit là d'une rupture fondamentale dans le système où il y a autoréglementation de l'industrie. Lorsqu'on laisse une industrie s'autoréglementer, on s'attend à ce qu'elle se comporte d'une manière qui respecte les valeurs des Canadiens.
(1200)
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Pauzé.
    Je vous prie d'être très brève, car Mme Pauzé aimerait avoir le temps de poser des questions et d'obtenir des réponses, qui sont tellement importantes.
    Le chef m'a demandé de parler du point de vue des jeunes lorsque vous avez posé votre question sur la santé mentale. Je pense qu'il est très important que nous communiquions de cette façon, par l'intermédiaire des jeunes. Je parle en tant que personne qui a grandi avec l'industrie. Je suis née et j'ai grandi dans la région de Fort McMurray, et Fort Chip occupe une place particulière dans mon cœur. Ma famille est originaire de Fort Chip. Je m'y rends une semaine sur deux, voire toutes les semaines pour mon travail.
    En tant que personne qui commence à peine son parcours et sa vie, je me demande si c'est un endroit sûr pour élever une famille et pour emmener les enfants jouer dans l'eau, comme l'a dit le chef Tuccaro. J'ai nagé au bord du lac. Est‑ce que quelque chose va m'arriver parce que j'ai grandi aux côtés de l'industrie? Ce sont là des choses qui sont liées à la santé mentale et les questions que nous nous posons.
    Je remercie le chef de m'avoir aidé à le dire aujourd'hui. Il est très important de dire que les gens de mon âge et ceux qui sont plus jeunes que moi grandissent avec cela. Soit ils deviendront blasés au point de ne plus s'occuper d'eux-mêmes, soit ils deviendront de plus en plus actifs dans ce processus. Nous devrions donc commencer à agir.
    Merci.
    Allez‑y, madame Pauzé.

[Français]

    Bonjour à tous.
    Je vous remercie de votre présence et de ce témoignage vraiment touchant et émouvant.
    Quand cette affaire a été médiatisée, le chef Adam y a beaucoup réagi, tout comme moi.
    Je crois que je vais attendre quelques minutes, monsieur le président.
    D'accord.

[Traduction]

    Chef Tuccaro, vous avez levé la main. Y a‑t‑il un problème de son?
    Non. J'aimerais ajouter quelque chose à la question sur la santé mentale.
    Tout d'abord, le monsieur qui a posé la question a fait référence aux Inuvialuits, aux Dénés et aux Métis de la région. J'ai une correction à apporter à ce sujet, car il ne faut pas oublier qu'il y a la Première Nation crie Mikisew dans cette région, en aval. Je vous remercie.
    À titre de chef de la collectivité, je sais que depuis le début de l'année en cours, il y a probablement eu 18 décès dans la collectivité, ce qui représente une crise. Les gens se suicident. Est‑ce lié à la situation concernant l'eau et à ce que les gens pensent qu'il se passe? C'est une question qui doit être abordée le plus rapidement possible.
    Je comprends tout à fait ce que veut dire le chef Adam. J'aimerais revenir aux enfants qui se baignent pendant l'été. Comment pouvons-nous leur donner la tranquillité d'esprit et la certitude qu'ils pourront se baigner sans danger? Il ne faut pas oublier que la piscine de la collectivité n'est ouverte que du mercredi au dimanche. Les enfants se baignent dans ces cours d'eau pendant les mois d'hiver, lorsqu'ils ne peuvent pas avoir accès à la piscine. Leurs parents me demandent quelles mesures nous avons prises et comment nous pouvons leur donner la certitude que leurs enfants peuvent se baigner dans ces cours d'eau. Pour parler franchement, à titre de chef de ma Première Nation, je ne peux pas leur donner cette certitude.
    C'est la raison pour laquelle je m'adresse au gouvernement fédéral, au gouvernement de l'Alberta et à tous les intervenants concernés. Vous devez vous ressaisir, cesser de tenir ces réunions en vase clos et vous rendre sur place, dans la collectivité. Nous faisons face à une situation où l'on divise pour mieux régner, comme on dit. Ainsi, une semaine, les représentants de l'Impériale comparaissent pour affirmer que c'est l'affaire de la municipalité régionale de Wood Buffalo. Puis des représentants de la municipalité régionale de Wood Buffalo viennent dans la collectivité et nous disent que non, cette affaire concerne l'ARE, c'est‑à‑dire l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta. J'ai rencontré les représentants de l'AER vendredi dernier et je leur ai posé la même question au sujet des enfants de la collectivité qui se baignent dans ces eaux. Que m'ont-ils répondu? Que c'était l'affaire d'Environnement et Changement climatique Canada.
    Au bout du compte, vous vous contentez de faire tourner ce petit manège, et les personnes dont la vie est menacée sont les habitants de la collectivité de Fort Chipewyan. Nous sommes des cibles faciles. Personne ne se soucie de nous. C'est la vérité. Le profit l'emporte sur les gens.
    Vous savez, nous avons conclu des ententes sur les répercussions et les avantages avec les intervenants de l'industrie. Comme l'a dit le chef Adam, nous sommes toujours le bon partenaire de l'autre côté, et nous pensons toujours que ces intervenants ont nos intérêts supérieurs à l'esprit. Comment pouvons-nous penser ou avoir la certitude qu'ils ont nos intérêts supérieurs à l'esprit lorsque nous ne découvrons quelque chose que 10 mois après les faits?
    À titre de parent de deux petites filles dans la collectivité, je trouve que cette situation est très stressante. Ce qu'a dit le chef Adam à propos du moment où il ouvre le robinet est la même chose à laquelle j'ai pensé il y a une semaine, en prenant ma douche. Je me suis demandé si c'était sécuritaire.
    Imaginez le stress psychologique démesuré que nous éprouvons chaque fois que nous voulons faire quelque chose. Vous avez le droit de faire ce que vous voulez dans vos collectivités saines, où vous pouvez boire l'eau sans problème. Si cette situation se produisait à Ottawa maintenant, je vous garantis qu'on déclarerait qu'il s'agit d'une crise. Quand accordera‑t‑on la même importance à la vie des Autochtones?
    Je pense que vous devez vous pencher sérieusement sur la question et déclarer que le moment est venu, car si cela devait se produire le long de la rivière Athabasca, où l'un des bassins de décantation est situé… Si cela devait se produire, ce serait la fin de la Première Nation Mikisew. Et tout cela parce qu'on aura privilégié les profits au détriment des gens.
(1205)
    Je vous remercie, chef Tuccaro.
    Madame Pauzé, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d'avoir livré ces témoignages, que j'ai trouvés émouvants. D'entrée de jeu, j'aimerais vous dire que si vous avez de la documentation à nous faire parvenir, n'hésitez pas à le faire. Nous allons la lire, c'est certain.
    Chef Allan, j'ai envie de vous dire que votre sang-froid est remarquable. Je vous ai vu quelques fois à la télévision alors que vos communautés subissent des affronts inqualifiables, de la discrimination et des menaces directes à leur santé. Cela ne dure pas depuis 11 mois, mais bien depuis plusieurs décennies.
    Il y a de nombreuses années, le gouvernement de l'Alberta et Santé Canada avaient porté plainte auprès du collège des médecins à propos de l'intervention d'un médecin de famille de votre communauté, le Dr John O'Connor. Ce dernier dénonçait l'incidence élevée des cancers à Fort Chipewyan. Par exemple, un cancer très rare, qui entraîne normalement le décès de trois personnes sur 100 000, a eu la même prévalence à Fort Chipewyan, où la population est de seulement 1 000 personnes.
    À quelques reprises, vous avez demandé à Santé Canada de faire des évaluations précises de la santé de vos communautés en guise de bilan global. A-t-on donné une suite quelconque à votre demande?
(1210)

[Traduction]

    Non, madame, je n'ai reçu aucune confirmation au sujet de la question de la santé.
    Le fait de ressentir les effets de la situation et de ne pas savoir ce que l'avenir nous réserve si nous continuons dans cette voie est une crise en soi. Le problème de santé dont j'ai déjà parlé auparavant — et dont je ne parle plus beaucoup — est toujours là. Il n'a jamais disparu. Il n'a fait que s'aggraver.
    Vous avez entendu le chef Tuccaro mentionner qu'un de ses amis est décédé d'un cancer des canaux biliaires. Vous avez parlé du Dr John O'Connor. Nous sommes la Première Nation qui a exercé des pressions pour que le permis d'exercer du Dr John O'Connor soit rétabli après ce que l'Alberta lui a fait subir. Il n'était pas juste qu'on le punisse et qu'on lui retire son permis d'exercer pour avoir dit la vérité.
    Je reçois toujours des nouvelles du Dr O'Connor. Je lui ai parlé la semaine dernière, car il a repris le dossier de mon beau-père et il sera son médecin. Savez-vous ce qu'il m'a dit? Il m'a dit qu'il craint que mon beau-père n'ait un cancer des canaux biliaires. Je ne voulais pas entendre cela.
    Ce qu'ils disent est vrai, et nous en ressentons les effets. J'ai peine à retenir mes larmes devant vous, madame, à cause de cette situation.
    Mme Lepine a levé la main.
    Madame Lepine, voulez-vous dire quelque chose?
    C'est au sujet de certains des travaux que j'ai effectués sur la santé et de la demande d'une étude sur la santé. Nous avons commencé à demander une étude sur la santé en 2003, lors de l'audience de la commission d'examen conjoint pour la mine CNRL Horizon et de l'audience pour la mine Jackpine de Shell.
    Il y a plus de 10 ans que nous demandons qu'on mène des études sur la santé. Tout récemment, lors de l'audience pour Teck Frontier, en 2019, nous avons présenté au gouvernement fédéral une proposition d'étude sur la santé. Santé Canada et le gouvernement fédéral disposent donc de cette proposition depuis 2019 et y réfléchissent depuis ce temps‑là.
    Ce n'est pas une chose que nous n'avons pas demandée et que nous n'avons pas fait cheminer dans les divers processus réglementaires, notamment le gouvernement fédéral et les commissions d'examen conjoint. Il existe une proposition d'étude en matière de santé. Nous pouvons fournir ces demandes et ces propositions sur la manière de mener une étude en matière de santé dans la collectivité, mais aucune mesure n'a été prise à cet égard.

[Français]

    Madame Pauzé, veuillez faire un commentaire bref, car j'aimerais donner la parole à Mme McPherson.
     Je n'aurai pas eu mes six minutes de temps de parole, monsieur le président.
    Vous aurez eu presque six minutes, mais allez-y.
    Je voulais relancer Mme Lepine, parce qu'elle est à l'origine de la plainte à l'UNESCO concernant le parc national Wood Buffalo, qui est en train de mourir, malheureusement. C'est grâce à elle que l'UNESCO est venue étudier ce parc, où il y a beaucoup d'eau potable, encore une fois, et qui se trouve à proximité de communautés autochtones. Alors, je voulais d'abord la remercier de toutes ses démarches pour protéger ce plan d'eau très important. Notre corps est fait aux deux tiers d'eau, alors l'accès à l'eau potable doit être ce qu'on appelle un service essentiel.
    Madame Lepine, êtes-vous toujours en contact avec les gens de l'UNESCO? A-t-on rendu une décision à ce propos?
(1215)

[Traduction]

    Madame Lepine, vous avez la parole.
    En 2014, nous avons présenté une pétition à l'UNESCO pour demander au gouvernement fédéral de prendre davantage de mesures pour protéger le parc national Wood Buffalo. Nous avons accueilli et organisé deux missions de suivi réactif. La plus récente a eu lieu l'année dernière. Ces intervenants sont sur le point de finaliser un rapport dans lequel des recommandations sont formulées pour le gouvernement fédéral.
    La question du parc national de Wood Buffalo sera abordée lors de la réunion du Comité du patrimoine mondial qui aura lieu cette année. Ce comité pourrait décider de faire du parc national Wood Buffalo un site du patrimoine mondial et de l'inscrire sur la liste des sites menacés. Cependant, les préoccupations en matière de santé ont été communiquées dans notre pétition à l'UNESCO. Nous avons fait part de nos préoccupations au Comité du patrimoine mondial à de nombreuses reprises, mais là encore, aucune mesure n'a été prise en matière de santé, en particulier en ce qui concerne la protection de la qualité de l'eau, les aliments traditionnels et l'écoulement de ces eaux dans le delta. De nombreux problèmes s'ajoutent les uns aux autres. Le Comité du patrimoine mondial est donc saisi de la question et il prendra une décision cette année.
    Je vous remercie.
    Madame McPherson, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    En tant qu'Albertaine, je suis dégoûtée par les témoignages que j'ai entendus aujourd'hui. Je suis vraiment désolée que vous ayez dû revenir pour réclamer des droits que tous les autres Canadiens considèrent comme acquis. Vous avez été trahis par l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta. Vous avez été trahis par l'Impériale. Vous avez été trahis par le gouvernement du Canada et le gouvernement de l'Alberta. Je suis vraiment désolée que cela se soit produit et que vos enfants ne puissent pas savoir s'ils peuvent boire l'eau de la collectivité. Je suis dégoûtée.
    Chef Adam, le fait est que ce n'est pas la première fois que vous avez dû comparaître devant le Comité. Ce n'est pas la première fois que vous êtes trahis.
    Ma question s'adresse donc à vous.
    Des représentants de l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta comparaîtront devant le Comité. Des représentants de l'Impériale comparaîtront également devant le Comité. Que voulez-vous que je leur demande?
    Comment le gouvernement fédéral peut‑il aider la Première Nation des Chipewyans de l'Athabasca? Il peut exercer des pressions pour que le cadre de gestion des résidus en Alberta soit revu. Le gouvernement de l'Alberta ne réglemente pas l'industrie comme il l'avait promis. Le cadre de gestion des bassins de résidus de l'Alberta a été délibérément inscrit dans le cadre de la Oil Sands Conservation Act, c'est‑à‑dire la loi sur la conservation des sables bitumineux, afin d'éviter l'obligation de consultation pour la gestion des résidus dans les sables bitumineux de l'Alberta. Actuellement, le cadre de gestion des bassins de résidus n'est pas visé par une obligation de consultation ou un tel processus n'est pas déclenché, et c'était le cas dès le moment de son élaboration. En effet, l'article 35 ne tient pas compte des impacts ou des droits issus de traités. Les effets cumulatifs ne sont pas pris en compte. L'absence de gestion et de surveillance des fuites, des émissions atmosphériques et de la contamination des eaux souterraines réduit le champ d'application, car il ne vise pas la sécurité, la qualité de l'air ou les interventions d'urgence. On ne tient aucunement compte de…
    Mme Davies-Flett peut vous en dire plus sur ce sujet.
    Je vous cède la parole.
    Ce que le chef tente d'expliquer, c'est que l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta et le gouvernement de l'Alberta ont établi un cadre de gestion des bassins de résidus. C'est essentiellement la cause première de certains des problèmes qui se posent actuellement. Il a décrit comment ce cadre n'est actuellement soumis à aucune obligation en matière de consultation. Le fait que nous soyons tenus à l'écart lors de la prise de ces décisions représente le premier acte répréhensible que nous pouvons même considérer dans ce cas‑ci, et ce n'est que la partie émergée de l'iceberg.
    La principale solution que nous pourrions proposer serait de nous permettre de participer, d'une manière ou d'une autre, à ce cadre de gestion.
    On a demandé ce que le Canada pouvait faire à cet égard. Le Canada pourrait recommander au gouvernement de l'Alberta de ne pas se contenter d'entendre les témoignages des Premières Nations lors d'une audience lorsqu'il s'agit de grands projets, mais de permettre aux Premières Nations de faire partie du groupe d'experts et d'écouter les raisons que donnent les intervenants de l'industrie pour justifier l'établissement de leurs projets sur nos territoires traditionnels. C'est ce que je demande. Je demande une place à la table où l'on prend les décisions. Soit nous donnons le feu vert, soit nous ne donnons rien. À l'heure actuelle, tout le monde a reçu le feu vert, et nous avons seulement obtenu qu'on nous dise à quel genre de pays nous pouvons nous attendre à l'avenir.
(1220)
     Je suis vraiment désolée, chef Adam.
    Vous avez la parole, monsieur Grygar.
    J'aimerais ajouter quelque chose. Je pense que nous pourrions poser des questions et vous demander de les transmettre aux représentants de l'Impériale.
    Quelque chose me dit que le manque de communication au sujet de cet incident a été un peu plus structuré. Ce n'est que lorsque l'enquête d'intérêt public sera menée que la vérité éclatera, car pour continuer aussi longtemps... De nombreuses données ont été collectées, et le fait que l'entreprise a dit qu'elle allait informer les collectivités bientôt signifie qu'il y avait des lacunes dans ces analyses coûts-avantages. En effet, on a accordé une confiance non méritée à l'industrie et à sa capacité de s'autoréglementer et de fournir des renseignements en temps voulu. L'expression « en temps voulu » est très vague et très subjective, et je pense que c'est la raison pour laquelle le système a échoué.
    L'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta propose des solutions pour cacher cette eau, car il y en a une énorme quantité. Il veut la mettre dans de grands trous, la recouvrir d'autres eaux et attendre un millier d'années pour que ces lacs deviennent de vrais lacs. Tous ces renseignements sont connus du public et fondés sur des rapports publics, et toutes les collectivités ont demandé qu'on traite ces eaux rapidement, afin qu'elles ne continuent pas à contaminer l'environnement. Cette région fait l'objet d'une discrimination environnementale permanente. Affirmer que nous pourrions rejeter ces eaux dans la rivière Athabasca et que la dilution est la solution ou que nous pourrions les mettre dans de grands trous et qu'elles finiraient par se traiter elles-mêmes… Ce ne sont pas des solutions de traitement efficaces. La solution proposée, qui consiste à éviter le problème en espérant qu'il se résolve tout seul, ne constitue pas un traitement.
    Je vous remercie.
    Mme Lepine a levé la main.
    Madame Lepine, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Oui. C'est une question très importante, madame McPherson.
    Je pense qu'il faut demander aux intervenants de l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta ce qu'ils ont l'intention de faire pour changer les choses. Que feront-ils pour empêcher les fuites dans les bassins de résidus?
    Nous ne pouvons pas non plus passer outre le fait que l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta se fonde sur les politiques de l'Alberta pour prendre des règlements. Que fait le gouvernement de l'Alberta dans la mise à jour de son plan régional pour le cours inférieur de la rivière Athabasca? Que fait‑il dans le cadre de l'évaluation des risques liés aux résidus et dans le cadre de gestion des bassins de résidus pour limiter la croissance et l'infiltration de ces bassins de résidus?
    Vous pouvez demander aux représentants de l'Impériale pourquoi ils ne répondent pas à notre demande de renseignements sur le partage des données. Nous savons que, premièrement, les rejets — c'est‑à‑dire les infiltrations — dans les eaux souterraines se produisent encore aujourd'hui. Ils se produisent depuis des années, et pourtant, nous ne disposons pas de données sur les eaux souterraines. Nous ne disposons pas des renseignements qui nous permettraient de comprendre ce que sont les HAP. Nous n'avons pas de réglementation fédérale pour limiter les HAP, qui sont cancérigènes. Que fait l'Impériale pour mettre fin aux infiltrations?
    On a informé l'entreprise, dans le cadre de sa demande, que l'endroit où elle construisait ses bassins de résidus n'était pas un bon emplacement selon les données géotechniques, mais elle n'a rien fait pour atténuer le problème. L'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta lui a permis de poursuivre ses activités sans qu'elle n'ait à prendre des mesures d'atténuation et de gestion pour mettre fin aux fuites des bassins de résidus dans notre système fluvial et dans nos sources d'alimentation.
    Ce sont des questions importantes à poser aux représentants de l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta et de l'Impériale.
    Je vous remercie.
    Chef Tuccaro, c'est à vous que revient le mot de la fin sur ce sujet.
    J'aimerais répondre à certaines des questions de Mme McPherson, ou du moins y ajouter quelques petites choses.
    Tout d'abord, ce que demande Mikisew, c'est qu'on lui donne des certitudes. Ainsi, nous aimerions que le gouvernement fédéral s'engage au sujet d'une étude menée par la Chambre. Nous aimerions également que tous les bassins de résidus de la région fassent l'objet d'une évaluation et d'un examen complets.
    Le Canada peut aider l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta à prendre des règlements en établissant des lignes directrices pour les acides naphténiques, car les lignes directrices actuelles… Il n'y a pas vraiment de lignes directrices, car les intervenants établissent leurs propres lignes directrices. Il faut que cet aspect fasse l'objet d'une réglementation plus efficace, afin que nos gens puissent disposer de renseignements adéquats pour faire leur travail.
    Il faut aussi que les représentants de l'Impériale fournissent immédiatement des renseignements et qu'ils déclarent qu'aucune espèce sauvage n'a été touchée. Autoriseront-ils la présence d'observateurs fédéraux indépendants et d'observateurs de Mikisew, ainsi que celle d'appareils photo de surveillance de la faune, dans leur région? Nous demandons également à l'organisme de réglementation de l'énergie de l'Alberta de mener une évaluation des effets cumulatifs dans la région.
(1225)
    Merci beaucoup.
    Merci à tous les témoins de leurs témoignages très profonds, troublants et émouvants.
    Je sais que je parle au nom de l'ensemble du Comité, chef Adam, lorsque je souhaite un prompt rétablissement à votre beau-père et de la force à votre famille pour faire face à sa crise de santé.
    Nous allons faire une brève pause pour accueillir le groupe suivant. J'ai demandé s'il était possible d'ajouter 15 minutes au prochain segment. J'espère avoir une réponse sous peu.
    Je remercie le chef Adam, M. Grygar, Mme Davies-Flett et les autres témoins venus de loin. Je suis déjà allé à Fort Chipewyan. Je sais qu'il n'y a pas de vol direct jusqu'ici, mais c'est un territoire magnifique. Nous avons vraiment aimé le temps que nous avons passé là‑bas en 2009. Je vous souhaite bonne chance. Votre témoignage sera très utile pour interroger à la fois les dirigeants de la Compagnie Pétrolière Impériale et ceux de l'organisme de réglementation. Je vous remercie encore une fois d'être venus.
    Merci encore, monsieur le président. Je remercie tout le monde.
    Mme Davies-Flett est membre de la Première Nation des Chipewyans d'Athabasca et travaille pour la nation. Son témoignage du point de vue des jeunes vous donne de bons exemples. Ils sont très préoccupés par ce qui se passe dans notre communauté.
    Prenez tout en considération. Nous sommes venus ici pour trouver une solution à un problème qui persiste encore aujourd'hui.
    Merci beaucoup.
(1225)

(1230)
    Je remercie les membres du Comité et les témoins.
    Nous accueillons Margaret Luker et Daniel Stuckless, de la nation métisse de Fort McKay, qui sont en ligne. Ils seront les premiers à témoigner.
    De l'Association locale des Métis de Fort McMurray no 1935, nous accueillons Russell Noseworthy, Timothy Clark et Martin Grygar.
    De la nation métisse de Willow Lake, nous accueillons Destiny Martin et Jason McKenzie.
    Qui parlera au nom de la nation métisse de Fort McKay? Est‑ce Mme Luker ou M. Stuckless?
    Allez‑y, s'il vous plaît.
     Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les vice-présidents et les membres du Comité. Merci de nous entendre aujourd'hui.
    Vous m'entendez bien?
    Je pense que oui.
    J'ai le feu vert des interprètes, donc nous pouvons plonger.
(1235)
    C'est très bien.
    Je m'appelle Dan Stuckless. Je suis directeur intérimaire de l'administration de la Nation métisse de Fort McKay. Je suis accompagné de ma collègue, Margaret Luker, qui est directrice intérimaire du centre de développement durable. Nous serons à votre disposition pour répondre à vos questions. À nous deux, nous avons plus de 30 ans d'expérience de travail pour les communautés autochtones et avec le gouvernement et l'industrie sur les questions relatives aux sables bitumineux, aux effets cumulatifs et notamment, aux bassins de décantation et aux résidus.
    La Nation métisse de Fort McKay estime que les événements qui se sont produits relèvent de la négligence. Ils auraient pu être évités dès le départ et n'auraient pas dû se produire. À ce jour, personne n'a été tenu responsable de l'incident, et il est inacceptable que les personnes ou les services qui ont permis à cet incident de se produire travaillent encore au dossier ou dans la région.
    Lorsque nous avons rencontré la PDG de l'Alberta Energy Regulator, Laurie Pushor, récemment, je lui ai demandé qui avait été congédié. Je n'ai toujours pas de réponse à cette question, et je pense vraiment que c'est parce que les dirigeants de l'AER se sont toujours montrés complaisants avec les exploitants de sables bitumineux et qu'ils entretiennent des relations amicales. Pour être honnête, je n'attends pas grand-chose de la part d'un organisme de réglementation aussi conquis. En fait, la seule chose inappropriée que l'AER a dénoncée, c'est le manque de communication depuis les premiers suintements qui ont été observés dans les inondations des terres au printemps dernier jusqu'à aujourd'hui, où les suintements se poursuivent. Ce n'est qu'au début du mois de février qu'une ordonnance de protection de l'environnement a été publiée.
     Toute personne normale voit bien qu'il y a un conflit d'intérêt évident puisque l'Alberta Energy Regulator est à la fois responsable de l'application de la loi et juge pour ces projets et que ce n'est pas correct.
    Si vous connaissez un peu l'Alberta Energy Regulator — et vous en avez probablement beaucoup entendu parler jusqu'ici —, vous savez que ce n'est pas avant d'avoir reçu les lettres numéro un, deux et trois que l'AER ouvrira réellement un dossier de non-conformité sur un exploitant. L'AER n'a aucune crédibilité hors de la chambre d'écho de Calgary, elle rejette et minimise activement les effets des sables bitumineux sur les communautés et leurs droits ancestraux et issus de traités.
    Il est impératif que le gouvernement fédéral exerce un contrôle sur ces questions qui touchent la population, les droits de la personne et l'accès à l'eau potable et bien sûr, qui ont des effets cumulatifs sur les droits ancestraux et issus de traités.
    Nous n'avons pas encore entendu l'Alberta se prononcer sur cette question. Nous entendons maintenant les promesses d'un quatrième premier ministre: après Stelmach, Redford et Notley, c'est au tour de Smith de déclarer qu'il va prendre des mesures concernant les bassins de décantation. Ce n'est que de l'esbroufe, et l'inaction commence à nous lasser.
    C'est là que le devoir de consulter devrait s'appliquer. Bien entendu, lorsque des incidents de ce type se produisent — lorsque les circonstances limitent l'exercice des droits —, l'obligation de prendre des mesures devrait s'appliquer. On ne comprend pas toujours bien quand l'obligation de consulter doit s'appliquer, quand il faut prendre des mesures d'atténuation. Quand les violations qui se produisent devraient être évitées, mais qu'il n'est pas possible de les éviter ou de les atténuer, il devrait y avoir des mesures d'indemnisation ou des accommodements, mais ce n'est pas respecté. En Alberta, il n'est encore jamais arrivé qu'on offre des mesures d'indemnisation ou des accommodements pour les droits bafoués, ni même qu'on reconnaisse les effets observés.
     Nous voudrions simplement demander aux membres du Comité si cela vous semble justifié.
    L'Alberta est absente. Ses mécanismes sont défaillants. Ses systèmes sont conçus pour pointer perpétuellement dans l'autre direction, pour que les plaintes soient réglées tandis que des permis, des approbations et des baux sont accordés à tout vent. Nous avons essentiellement créé un système à deux vitesses au Canada pour l'application de l'article 35, dans lequel les métis sont des citoyens de troisième classe, après les Canadiens et même après les Premières Nations.
    Mes propos vous interpelleront si vous connaissez un peu les enjeux. Si vous ne devez retenir qu'une chose de ce que je vous dis aujourd'hui, ce devrait être que nous avons un gros problème. Il ne s'agit pas seulement d'un problème de suintement de l'Impériale. C'est important, et c'est la raison pour laquelle nous nous adressons à vous aujourd'hui, parce qu'il s'agit d'un problème systémique. Il s'agit d'un problème de discrimination raciale et d'inaptitude du gouvernement, dans ses politiques comme dans ses directives et ses règlements, notamment parce qu'ils ne sont pas mis en application.
    Cela dure depuis des dizaines d'années. Il y a d'autres bassins de décantation, principalement ceux de Suncor qui suintent dans la rivière, mais c'est maintenant que nous décidons d'agir ou d'en prendre note à cause de l'incident de l'Impériale. Les mesures doivent s'appliquer à l'ensemble de l'industrie.
(1240)
     J'ai entendu ma collègue qui a pris la parole avant moi mentionner le plan régional du cours inférieur de l'Athabasca, qui a été contesté, mais n'a pas été modifié. Le cadre de gestion des résidus ne tenait pas compte des effets sur les droits ancestraux et les droits issus de traités. Je le sais parce que j'ai posé la question directement et qu'on m'a répondu. Les directives, les normes concernant les résidus sont abaissées encore et encore. Pendant ce temps, on établit conjointement des critères et un règlement sur les rejets d'eaux contaminées.
    Ce matin, nous avons reçu une lettre du ministre et nous appuyons la création d'un groupe de travail pour continuer le travail sur ces questions.
    C'est ici que se termine ma déclaration préliminaire.
    Merci beaucoup, monsieur Stuckless.

[Français]

     Je ne sais pas qui a été désigné pour prendre la parole au nom de l'Association locale des Métis de Fort McMurray no 1935.
    Est-ce vous, monsieur Noseworthy? D'accord. Nous vous écoutons.

[Traduction]

    Je m'appelle Russell Noseworthy. Je travaille pour la communauté métisse de Fort McMurray. Notre communauté compte environ 800 personnes. Je suis ici aujourd'hui pour les représenter au nom de notre président, M. Hansen.
    Les métis de Fort McMurray forment une communauté autochtone fondée sur des droits et basée à Fort McMurray. Nos plus de 800 membres exercent leurs droits protégés par la Constitution dans tout le Nord-Est de l'Alberta et ailleurs. L'utilisation des nombreux cours d'eau de la région, et en particulier de la rivière Athabasca, est cruciale pour l'exercice de ces droits. C'est la plus importante.
    Nos membres pratiquent régulièrement la chasse, la pêche et le piégeage dans la région située en aval des mines de sables bitumineux. Nous sommes donc très inquiets des effets cumulatifs de l'exploitation des sables bitumineux sur notre capacité d'exercer nos droits de chasse, de pêche et de piégeage dans la région, qui sont protégés par la Constitution.
    L'incident de Kearl nous inquiète beaucoup. L'ordonnance de protection de l'environnement et l'incident lui-même attestent de l'ampleur des problèmes de réglementation en Alberta. Il n'y a pas vraiment de mécanismes pour remédier aux problèmes de communication que nous rencontrons en Alberta lorsque surviennent des incidents comme celui‑ci. Il existe des directives sur papier, mais elles ne sont pas suivies correctement. Par conséquent, nous risquons constamment d'être exposés à des contaminants et à d'autres substances dangereuses susceptibles d'avoir des effets dramatiques sur la santé des personnes qui vivent dans la région et aux alentours. Nous sommes très inquiets.
    Récemment, le gouvernement fédéral a entamé un processus de consultation des communautés de la région sur les résidus miniers. C'est un grand problème dans notre région. Il y a des bassins de décantation partout au nord de l'endroit où j'habite, à Fort McMurray. Nous sommes ici aujourd'hui pour le souligner et pour insister sur l'importance du bassin hydrographique de la rivière Athabasca pour les habitants de la région.
     Le groupe de travail Couronne-Autochtones a été proposé comme mécanisme de collaboration pour l'élaboration d'un règlement sur les rejets d'eaux contaminées, et la démarche s'assortirait d'une sorte de discussion sur la façon dont ils peuvent se répercuter sur les droits des membres de notre communauté, du peuple autochtone vivant aux abords de la rivière. Cependant, nous sommes extrêmement inquiets. Nous avions demandé à ce groupe de mettre en place un processus visant à déterminer comment nos droits seraient touchés par ce qui se passe et par les modifications proposées à la Loi sur la pêche.
    Notre demande n'a pas été approuvée. Nous ne comprenons pas vraiment comment nous serons touchés parce que nous n'avons pas bien analysé la question. Nous n'avons pas de mesure des effets cumulatifs de tout cela sur la région. Nous ne savons pas comment les différents exploitants tiennent compte de la pollution cumulative ni comment elle compromet notre droit de chasser, de pêcher, de piéger et de vivre sainement dans la région. Nous ne le comprenons pas.
    Nous avons besoin d'une étude d'impact des effets cumulatifs. Nous devons bien les comprendre. C'est la première chose dont nous avons besoin dans la région. Parallèlement à cette évaluation des effets cumulatifs, nous devons comprendre comment nos droits sont touchés.
    Je m'exprime à la première personne. Je m'en excuse.
    Je dois ajouter que nous en avons besoin dès maintenant. Nous devons nous atteler à la tâche dès aujourd'hui, dès la fin de cette réunion.
    Le gouvernement fédéral — le gouvernement du Canada — doit se mettre au travail dès maintenant. Votre devoir et votre responsabilité envers moi, envers toutes les personnes présentes autour de cette table et envers les communautés autochtones qui vivent dans la région l'exigent. Si vous ne le faites pas, la santé des gens en souffrira.
    Mme Goodridge est juste ici. Elle vit dans la région, je connaissais son père. Nous devons travailler ensemble pour bien protéger les habitants de notre région. Dans notre région, nous protégeons le Canada. Les sables bitumineux sont le moteur économique du Canada. Ce n'est plus l'Ontario, c'est l'Alberta.
(1245)
     Nous devons être responsables. Nous sommes sur la scène internationale. Nous devons donner le bon exemple. Si nous ne le faisons pas, nos enfants le sauront. Nous devons protéger notre milieu, pour toutes les générations futures. Nous avons besoin d'une évaluation des effets cumulatifs de tout ce qui s'est passé, et nous avons besoin d'une évaluation des droits en parallèle avec cela.
    C'est ici que se termine mon exposé d'aujourd'hui. Je vous remercie de votre attention.
    Merci, monsieur Noseworthy.
    Nous allons maintenant passer à la Willow Lake Métis Nation.
    Madame Martin, allez‑y, s'il vous plaît.
    La Willow Lake Métis Nation représente les droits découlant de l'article 35 d'environ 90 citoyens. Le centre administratif de la nation se trouve à Anzac, en Alberta, juste au sud de Fort McMurray.
    La nation est née à l'époque de la traite des fourrures, entre les rivières Athabasca et Clearwater, (à l'intérieur du territoire actuel de l'Alberta, et Lac La Loche, en Saskatchewan. Traditionnellement, Willow Lake avait des liens de parenté et des liens économiques avec Fort Chipewyan et Lake Athabasca au nord, et avec Lac La Biche au sud, des liens qui persistent à ce jour.
    Les citoyens de la Willow Lake Métis Nation chassent, pêchent, font du piégeage et cueillent des baies et des plantes médicinales sur le territoire de leurs ancêtres. Ces terres comprennent des lignes de piégeage comme celles du vice-président McKenzie, les mêmes depuis plusieurs générations. Les ressources récoltées sont partagées avec les familles et la communauté, et la plupart des citoyens continuent de consommer des aliments traditionnels et d'employer des remèdes ancestraux.
    La Willow Lake Métis Nation, comme d'autres nations dans la région des sables bitumineux, ont subi, et continuent de subir, des répercussions majeures résultant de l'exploitation du pétrole et du gaz, de la foresterie et d'autres développements. La Willow Lake Métis Nation a été avisée de fuites des bassins de décantation au site du lac Kearl de la Compagnie Pétrolière Impériale dans un courriel de l'Alberta Energy Regulator, l'AER, le 7 février 2023. Nous avons ensuite rencontré le personnel de l'AER le 8 mars 2023, pour recevoir une mise à jour.
    La Compagnie Pétrolière Impériale nous a également envoyé un courriel le 8 mars 2023, avec un lien vers les mises à jour de la compagnie concernant l'ordonnance de protection de l'environnement. La Willow Lake Métis Nation a répondu par lettre à la Compagnie Pétrolière Impériale le 17 mars 2023. Elle y exposait les inquiétudes de la nation et demandait des renseignements. En date du 13 avril, nous n'avions pas reçu de réponse de la Compagnie Pétrolière Impériale. Elle affirme pourtant sur son site Web qu'elle assure la liaison avec les communautés autochtones.
    Les citoyens de la Willow Lake Métis Nation pratiquent des activités de cueillette dans des secteurs en amont et en aval du site Kearl et sont très inquiets des répercussions des fuites sur l'eau et d'autres ressources aquatiques, la végétation et la faune. La Willow Lake Métis Nation continue d'entretenir des liens avec les autres nations de la région, avec lesquelles elle mène des activités de cueillette et partage des aliments et remèdes traditionnels. La certitude quant à l'innocuité des aliments traditionnels cueillis est essentielle à l'utilisation des terres, au partage des ressources de la cueillette et au maintien des droits et de la culture.
    Nous devons être tenus au courant des répercussions de ces fuites sur l'environnement ainsi que sur les ressources végétales et animales pour pouvoir continuer d'utiliser les terres. Les fuites et les notifications tardives inquiètent profondément la Willow Lake Métis Nation. La Willow Lake Métis Nation se trouve dans une situation de vulnérabilité, car elle attend la reconnaissance de ses droits en vertu de l'article 35 dans le cadre du processus d'affirmation crédible de l'Alberta. Le gouvernement et l'industrie ne la consultent pas toujours.
    Les fuites illustrent le risque que de tels incidents ne soient pas signalés aux nations autochtones, mais ce risque est particulièrement grand pour les nations dont la situation s'apparente à celle de la nation de Willow Lake. Il est clair que la Compagnie Pétrolière Impériale et l'AER avaient la responsabilité partagée de signaler ces incidents beaucoup plus tôt qu'ils ne l'ont fait. Nous savons gré à l'AER d'avoir communiqué avec nous, de nous avoir rencontrés en mars et de continuer de nous tenir au courant, mais cet incident a nui à la confiance que nous inspirent tant l'industrie que l'AER.
    La Willow Lake Métis Nation souhaite des solutions véritables qui feront renaître la confiance par la coopération, la cogestion et surtout la remise en état conjointe en vue de rendre les exploitations des sables bitumineux vraiment durables. La Willow Lake Métis Nation souhaite trouver des façons de remédier aux lacunes que ces fuites ont révélées. Les solutions dans l'immédiat comprennent des discussions avec l'Impériale pour garantir la participation de la nation à l'intervention en réponse aux incidents et à la surveillance, de même que de nouvelles discussions avec l'AER pour obtenir l'assurance que Willow Lake recevra des notifications rapides au sujet d'incidents sur son territoire.
    Willow Lake recommande en outre une évaluation des répercussions sur la santé humaine pour s'assurer que les ressources traditionnelles touchées par les fuites, que ce soit l'eau, les végétaux ou la faune, ne présentent pas de risque. De façon plus générale, ces incidents ont fait ressortir les effets cumulatifs sur les droits ancestraux dans la région des sables bitumineux. Il faut mieux comprendre ces effets grâce à une évaluation régionale des sables bitumineux, y compris de leurs effets cumulatifs et de leur incidence sur les droits en vertu de l'article 35.
    Au nom de la Willow Lake Métis Nation et de ses citoyens, je tiens à vous remercier de nous entendre et de tenir compte de nos préoccupations. Nous sommes sincèrement reconnaissants d'avoir été invités à nous adresser au comité permanent aujourd'hui.
(1250)

[Français]

     C'est nous qui vous remercions de vous être déplacés de si loin pour venir témoigner devant nous.
    Je me tourne vers Mme Goodridge, qui va entamer le premier tour.

[Traduction]

    Merci à tous nos témoins.
    Mon vol était très tôt hier matin, et je m'attendais à vous y voir plus nombreux, mais il semble que votre trajectoire de vol ait été meilleure que la mienne.
    J'ai demandé à chacune des Premières Nations représentées dans le groupe de témoins précédent la date à laquelle l'Impériale l'avait contactée, non pas au sujet du suintement initial, mais au sujet de la fuite.
    Je vais peut-être commencer par M. Noseworthy, de l'Association locale des Métis de Fort McMurray, qui était un ami très cher de mon défunt père. Quand est‑ce que l'Impériale ou l'AER — l'Alberta Energy Regulator — vous ont alertés pour la première fois au sujet du deuxième incident?
    Nous avons des liens avec la Compagnie Pétrolière Impériale et nous les respectons. Nous avons conclu un accord avec elle concernant la communication de certains renseignements importants pour nous. Aujourd'hui, mes commentaires seront teintés par cet accord.
    Nous travaillons avec la Compagnie Pétrolière Impériale depuis mai pour comprendre ce qui s'est passé à ce moment‑là. Nous avons reçu de l'Impériale une mise à jour indiquant qu'un incident s'était produit en mai et qu'elle y travaillait. Elle se préparait à venir nous faire un compte rendu complet lorsque l'incident s'est produit, puis l'ordonnance de protection de l'environnement a été émise.
    C'est ce qui s'est réellement passé. Je ne sais pas que dire de plus, madame Goodridge.
    Je vais me tourner vers M. Stuckless ou Mme Luker.
    Quand la Fort McKay Métis Nation a‑t‑elle été informée du premier ou du deuxième incident?
    Merci de me donner l'occasion de vous parler de ce sujet aujourd'hui.
    L'Impériale a informé la Fort McKay Métis Nation au moyen d'un courriel informel lorsqu'elle a vu pour la première fois de l'eau de couleur rouille sur le site. En ce qui concerne la communication avec l'Impériale — avec laquelle nous avons une entente sur les répercussions et les avantages et entretenons une excellente relation de travail —, nous avons reçu un avis plus formel en même temps que tous les autres, à peu près au moment où l'ordonnance de protection de l'environnement a été émise.
    Ce que j'aimerais faire comprendre à propos de l'Impériale, parce qu'on tend à en faire grand cas, c'est qu'il ne s'agit pas d'un problème propre à l'Impériale... en ce qui concerne les deux incidents pour lesquels nous sommes ici aujourd'hui. Le problème des résidus est beaucoup plus étendu, par rapport à l'eau... Le problème de l'eau contaminée par le processus d'exploitation des sables bitumineux est beaucoup plus grave.
    Je sais que ce n'est pas la même chose pour nos communautés sœurs, mais je tiens à souligner qu'avec nous, l'Impériale fait preuve d'une grande transparence dans la communication des données, et nous avons la possibilité de nous rendre sur place et de procéder à nos propres contrôles. Quand nous avons tous appris l'existence du suintement, M. Stuckless et moi-même sommes allés sur place pour voir les travaux en cours de nettoyage du déversement en surface, ce qui était la raison pour laquelle l'ordonnance de protection de l'environnement avait été émise. C'est la même chose avec l'AER. En fait, l'ordonnance de protection de l'environnement a été émise avant qu'un avis officiel soit émis, mais officieusement, il y a eu un avis immédiat de la présence d'eau de couleur rouille sur le site. L'intention, d'après nos discussions avec l'Impériale, a toujours été d'y donner suite.
    Je tiens également à exprimer ma crainte que les gens considèrent l'Impériale comme la croix à brûler parmi les compagnies qui exploitent les sables bitumineux, en ce qui concerne les enjeux liés aux sables bitumineux. La vérité, comme l'ont fait remarquer mes autres collègues, c'est qu'il s'agit d'un problème vieux de 45 ans et pas seulement d'un problème avec l'Impériale.
(1255)
    Je vous remercie.
    J'aimerais maintenant que les gens de Willow Lake répondent à la même question.
    Nous avons d'abord été informés de la situation par un courriel très général de l'AER, le 7 février 2023. Nous n'avons eu des nouvelles de la Compagnie Pétrolière Impériale que le 8 mars 2023, sous la forme d'un courriel très général et d'un lien vers leur site Web fournissant de l'information sur l'ordonnance de protection de l'environnement.
    Je vous remercie de cette information.
    Je pense qu'il est très important d'entendre directement les différentes communautés touchées. Je sais que la récolte des baies est d'une importance capitale pour de nombreuses Premières Nations et pour les Métis. Je tiens à remercier Willow Lake. Ils m'ont emmené cueillir des bleuets l'été dernier. Il me reste encore des bleuets sauvages dans mon congélateur. Ils proviennent d'une terre qui ne serait pas très différente de cette terre, parce qu'ils poussent dans des marécages et dans un sol tourbeux.
    Dans le temps qu'il me reste, j'aimerais que vous me fassiez part des questions que vous souhaitez que nous posions à l'Impériale ou à l'AER lorsque nous les recevrons au Comité jeudi.
    Quelles mesures prennent-ils pour améliorer leurs protocoles de communication avec les communautés autochtones de notre région?
    Que font-ils pour demeurer neutres dans les discussions entre les communautés et les exploitants de sables bitumineux? Sont-ils neutres? Je ne le sais pas. Je pense que la neutralité de l'organisme de réglementation en Alberta est remise en question. Nous devons avoir l'assurance que cet organisme exerce son activité conformément à la réglementation en vigueur, et non pas en fonction d'autres orientations.

[Français]

     Merci.
    Madame Thompson, vous disposez de six minutes.

[Traduction]

    Je suis prête à prendre la parole, mais je pensais que c'était le tour de Mme Taylor Roy.
    D'accord.
    C'est à vous, madame Taylor Roy.
    Je n'assiste pas à la réunion en personne, alors je vais commencer par dire que je me trouve dans ma ville natale d'Aurora, en territoire anishinabe. Ces terres font partie des terres des Mississaugas et des Chippewas reconnues par le Traité no 13 et les Traités Williams de 1923.
    Je suis très reconnaissante à tous ceux qui se sont rendus en personne pour parler au Comité. Les témoignages que nous avons entendus jusqu'à présent aujourd'hui nous brisent le cœur.
    Mes questions portent davantage sur les conséquences pour vos communautés au sein des nations métisses. Avec le groupe de témoins précédent, nous avons entendu parler des effets sur la santé mentale de l'incertitude qui entoure cette situation. Je me demandais si vous pouviez nous en dire un peu plus sur les conséquences que cela a eues sur les nations métisses.
    Nous pourrions commencer par Mme Luker ou M. Stuckless, de la Fort McKay Métis Nation.
    J'ai eu la chance d'entendre certains de mes collègues parler de cette question lors de la dernière réunion, alors je ne vais pas répéter ce qu'ils ont dit.
    Je dirai que la Fort McKay Métis Nation est l'épicentre de l'exploitation des sables bitumineux et que nous serons touchés bien avant les autres en cas de rupture ou de problème lié aux résidus. Il s'agit d'une question psychosociale qui continue d'occuper l'esprit des gens. C'est une question qui revient constamment dans toutes les discussions que nous avons avec l'industrie, même avec les industriels qui n'ont pas le même type d'infrastructure et qui n'ont pas de bassins de décantation externes, comme les exploitants sur place. Que faites-vous de vos déchets? Comment sont-ils gérés? Les conserverez-vous sur le site? Pouvez-vous les garder à l'écart de l'environnement réel afin de préserver ma région et mes terres?
    C'est une constante. Lorsque vous ajoutez ce facteur de stress constant à d'autres questions sociales comme celle des survivants des pensionnats et de la rafle des années 1960, vous avez une communauté stressée qui continue d'être stressée par rapport à des terres qu'elle utilise depuis des siècles, voire des millénaires. Ce sera un défi, et c'est la raison pour laquelle il faut maintenir la confiance que Fort McKay a établie avec l'industrie dans son ensemble pour que celle‑ci continue à soutenir un développement responsable — le mot clé est responsable — ou obtienne le consentement de la communauté au moyen d'une entente sur les répercussions et les avantages. C'est l'objectif qui doit primer.
    Nous voyons cela se manifester de différentes manières dans la communauté, et parce que nous sommes une nation métisse, nous ne recevons pas le soutien dont nous avons besoin dans notre communauté. Les mesures de soutien sont offertes par l'entremise d'organismes sans but lucratif à Fort McMurray. À l'heure actuelle, les services sont fournis directement par les services aux Premières Nations. Les Métis n'ont aucun moyen de subvenir à leurs propres besoins et n'ont rien du gouvernement fédéral ou provincial, à l'exception d'une petite subvention ici ou là.
    Nous sommes vraiment livrés à nous-mêmes, et nous finançons la plupart du temps nos activités grâce à nos propres revenus. La situation n'est pas géniale, mais quand il s'agit de développement industriel, c'est un sujet de discussion majeur. On ne peut pas aller à Fort McMurray, à Edmonton ou ailleurs sans passer entre les bassins de décantation. On roule de longues minutes pour les passer. Il y a des lacs de kettle avec des résidus au fond. Il y a des bassins de décantation. Il y a des sites en exploitation. À cette époque de l'année, il y a des canons à oiseaux et tout cela est déclenché dans le lac de la communauté. Le développement à lui seul constitue une véritable surcharge sensorielle, sans parler de la vie quotidienne. Il est difficile d'être à l'épicentre.
(1300)
    Je peux l'imaginer. Je vous remercie beaucoup de cette explication. Cela semble vraiment très difficile.
    Monsieur Noseworthy, aimeriez-vous ajouter quelque chose?
    Je demanderais à mon collègue, Tim Clark, de le faire.
    Merci.
    En réponse à la question, j'aimerais faire quelques commentaires pour que vous puissiez comprendre l'ampleur et les répercussions visuelles de cela.
    Entre les mines de sables bitumineux approuvées et celles qui font l'objet d'une demande, la rivière Athabasca, au nord de Fort McMurray, sera bordée de part et d'autre sur près de 100 kilomètres. La communauté de Fort McMurray est basée à Fort McMurray, mais il est également important de comprendre qu'en raison de la spécificité historique des Métis, il existe des liens régionaux très étroits. Les personnes qui vivent à Willow Lake, Anzac ou Fort McMurray vont régulièrement rendre visite à leur famille à Fort Chipewyan et Fort McKay. Ils vont également récolter dans ces régions.
    M. Stuckless a parlé de la santé mentale et des effets cumulatifs. Il n'y a pas que les effets sur la santé mentale, sachant que l'organisme de réglementation est plus préoccupé par la protection de l'image de l'industrie et de ses investissements que par la protection de la santé et des droits des personnes qui vivent dans cette région. Il y a des conséquences énormes chaque jour, à ne pas savoir ce que l'on ne sait pas. Dans notre communauté, nous avons constaté au fil des ans un recul des pratiques d'utilisation traditionnelle et de l'exercice de ces droits, en partie à cause de la perte de confiance dans la sécurité et la qualité des ressources. Sont-elles saines? L'eau est-elle potable? Autrefois, les gens buvaient régulièrement l'eau des rivières. Aujourd'hui, presque plus personne ne le fait.
    La disparition de ces pratiques a tout un éventail d'incidences sur la santé des personnes, la santé mentale, la société et la communauté. L'utilisation de la terre était traditionnellement le moyen de relier les familles entre elles, de permettre aux aînés de passer du temps avec les jeunes et de transmettre des connaissances sur la culture, l'identité et le mode de vie de chacun. La perte de ces pratiques entraîne la perte des connaissances. Les sens de l'identité, du soi, de la raison d'être et du lieu sont tous compromis et affaiblis, ce qui a d'énormes répercussions sur la santé, la société et la communauté. Les gens sont alors poussés vers des services publics sous-financés et trop lourdement sollicités qui, de plus, ne sont pas conçus pour répondre aux besoins des populations autochtones et aux problèmes qui leur sont propres.
    Il faut comprendre que ce n'est pas un incident isolé, mais bien un incident qui s'inscrit dans un système beaucoup plus vaste et interconnecté qui porte constamment atteinte aux droits, à la santé et aux intérêts des personnes qui vivent dans cette région, en particulier les populations autochtones.
(1305)

[Français]

     Merci.
    Madame Pauzé, vous avez la parole.
    Je remercie les témoins de s'être déplacés et ceux qui sont en ligne de nous accorder du temps. Si vous avez des documents à faire parvenir au Comité permanent de l'environnement et du développement durable, n'hésitez pas. Nous pouvons vous assurer qu'ils vont être lus.
    Mes questions s'adresseront à M. Stuckless ou à Mme Luker, mais peut-être à vous également, monsieur Clark, si je me fie à votre dernier témoignage.
    Lorsque la pandémie est arrivée, l'Association canadienne des producteurs pétroliers a fait des demandes relatives à cette période. Elle demandait notamment de ne pas devoir respecter la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et de ne pas devoir inspecter les sites d'exploration pétrolière pendant cette période.
    Avez-vous l'impression que l'industrie et les autorités albertaines ont décidé que c'était le prix à payer pour la prospérité?
    À qui adressez-vous la question?
    Au départ, je voulais la poser à Mme Luker ou à M. Stuckless.

[Traduction]

    Je vais répondre, monsieur Stuckless.
    Oui, nous avons assisté à un assouplissement des exigences en matière de surveillance dans le contexte de la COVID, et je pense que c'était trop risqué. Il fallait gérer les ressources et le personnel. Je sais que nous avons fait des demandes de soumission à ce sujet, parce que nous avons vu d'autres moyens de mieux répondre aux questions de sécurité. La sécurité des personnes pendant que le travail se poursuivait était une préoccupation majeure. Il y avait vraiment des préoccupations en matière de sécurité.
    Cependant, une question importante se posait quant au choix des assouplissements qu'ils souhaitaient, car les personnes qui se rendaient sur place et effectuaient des contrôles étaient des particuliers ou des organismes qui se déplaçaient en petits groupes, alors que les camps étaient d'importants lieux de propagation de la COVID. Nous n'avons pas vu beaucoup de demandes ou d'exigences visant à minimiser cela. Je pense que des questions ont été posées à juste titre. Heureusement, certaines de ces restrictions ont été retirées très rapidement.
    Je vais demander à M. Stuckless de prendre le relais, au cas où j'aurais oublié quelque chose.
    Je vais juste faire le lien avec le programme de surveillance des sables bitumineux, en plus de ce que Mme Luker a dit au sujet de la surveillance sur place.
    Les responsables du programme conjoint de surveillance des sables bitumineux ont reçu pour consigne d'utiliser leur fonds de réserve, c'est‑à‑dire les fonds non dépensés qu'ils avaient accumulés au fil du temps, pour couvrir les dépenses de la première année de la pandémie de COVID. J'étais membre du comité à cette époque. Il m'a semblé vraiment sournois de compromettre la légitimité et le financement alors que le monde était en proie à des bouleversements économiques à cause de la pandémie. Cela semblait être une excuse commode pour économiser de l'argent et ne pas faire de travail tout en donnant la priorité à d'autres travaux.
    Comme l'a dit Mme Luker, cela ne semblait s'appliquer que dans certains cas. Il était dangereux d'aller mesurer la taille des bleuets dans les buissons, mais il était tout à fait acceptable de travailler sur un site de fabrication, sur un chantier, pour construire des supports de tuyauterie ou des choses de ce genre. Les règles n'étaient pas appliquées de manière cohérente à l'ensemble du secteur.

[Français]

     J'aimerais continuer un peu sur le sujet en vous demandant quelle est votre réaction face à la violation flagrante de vos droits, particulièrement en regard de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Vous êtes mis de côté.
    Tantôt, monsieur Stuckless, vous nous avez dit que vous vous sentiez comme un citoyen de troisième zone. C'est incroyable d'entendre cela. Quelle est votre réaction à la violation de vos droits?
(1310)

[Traduction]

    Je tiens à préciser que je ne suis pas métis moi-même, mais que je travaille pour la communauté métisse.
    En ce qui nous concerne, pendant la pandémie, qu'il s'agisse de l'incendie de forêt à Fort McMurray ou de tout autre événement... J'ai travaillé pour les Premières Nations et pour les Métis, et je sais qu'au sein de Services aux Autochtones Canada, on affecte du personnel d'urgence aux Premières Nations quand un événement se produit, comme une tragédie, ou un événement naturel, comme une tempête. Il y a de la communication entre les premiers intervenants, les bureaux responsables de la gestion de l'urgence et la nation...

[Français]

    Excusez-moi de vous interrompre.
    Nous avons entendu qu'il n'y avait pas de communication, que les gens des Premières Nations avaient demandé à être consultés et ne l'ont pas été, et que toutes les propositions de collaboration ont été rejetées. Il y a donc vraiment un problème en ce qui concerne le respect des droits des Premières Nations.
    Je vais me tourner vers les gens qui sont ici.
    Comment recevez-vous tout cela? Au fond, comment voyez-vous la suite de ce dossier étant donné qu'il y a des manques flagrants de respect de vos droits?

[Traduction]

    Je dirais une chose qui a été maintes fois soulignée ici, soit que la DNUDPA n'est pas vraiment à l'ordre du jour en Alberta. M. Stuckless a mentionné qu'il existe une hiérarchie de droits à multiples niveaux en Alberta, mais aussi dans l'ensemble du Canada. Si vous regardez la décision Yahey, en Colombie-Britannique, et l'absence de mesures concernant les effets cumulatifs en Alberta, vous constatez que la teneur et la qualité de vos droits constitutionnels en tant que personne autochtone varient en fonction de la province dans laquelle vous vivez, et je ne pense pas que cela corresponde à l'esprit ou à la lettre de notre Constitution. Je ne peux pas concevoir que nombre des droits dont nous jouissons tous en tant que Canadiens puissent varier à ce point en fonction de l'endroit où nous vivons ou de notre origine ethnique.
    Comme on l'a dit, il s'agit d'un problème systématique. Il ne s'agit pas de demander simplement: « Comment allez-vous améliorer votre protocole de communication, sachant que vous auriez dû communiquer plus tôt? » C'est un problème systématique qui couvre toute une série de domaines, comme la manière dont l'évaluation d'impact est menée, dont l'obligation de consultation est remplie et dont les responsabilités sont gérées dans le secteur de l'énergie, où l'on observe une capture réglementaire chronique et systématique. C'est le terme employé, mais dans le sens où le régulateur oriente constamment la discussion en fonction des intérêts des parties réglementées plutôt que de l'intérêt public.
    La vraie question qui se pose à nous est de savoir ce qui peut être fait pour changer cela en Alberta, car c'est un problème chronique et c'est l'une des questions sous-jacentes que nous devons aborder. Il ne s'agit pas seulement de changer le protocole de communication de l'Alberta ou de l'AER. Il faut savoir comment créer un organisme de réglementation véritablement indépendant de l'industrie qu'il réglemente et capable de défendre l'intérêt public et de préserver la confiance du public.
    Monsieur Stuckless, veuillez être bref, pour que nous puissions ensuite donner la parole à M. Blaikie. Avez-vous quelque chose à ajouter?
    Oui. Je veux juste informer le Comité que la Nation métisse de Fort McKay a entrepris les démarches pour la reconnaissance de ses droits par le gouvernement fédéral. À ce jour, dans nos discussions avec le gouvernement fédéral, il n'y a aucune reconnaissance de la souveraineté de la Nation métisse de Fort McKay. En fait, l'accord entre la Nation métisse de l'Alberta et le Canada, signé il y a quelques semaines, a fait l’objet d’un examen judiciaire. Nous voulons simplement être nous-mêmes, et cela doit être clair.
    Nous venons d'obtenir l'affirmation crédible au niveau provincial, ce qui est une étape vers la reconnaissance des droits en Alberta. Nous devons prendre des mesures au niveau fédéral et nous améliorer à cet égard en Alberta. Beaucoup de nos collectivités sœurs se sont également engagées dans cette voie, mais il s'agit d'un long, long parcours.
    Merci.
    Monsieur Blaikie, bienvenue au Comité.
    Merci beaucoup. C'est un honneur pour moi d'être ici.
    J'aimerais d'abord remercier nos témoins. Je tiens à souligner leur courage et leur volonté de parler de la vulnérabilité de leurs collectivités face à des choses horribles, d'autant plus qu'ils se trouvent dans une enceinte qui, historiquement, a non seulement été insensible à ces préoccupations, mais qui a parfois vilipendé les peuples autochtones pour avoir dénoncé ces vérités et activement cherché à leur causer du tort.
    J'aimerais revenir aux propos de M. Clark au sujet de la nécessité d'un processus de réglementation véritablement indépendant ayant non seulement la confiance de l'industrie — même si je pense que cela doit être le cas, d'une certaine façon —, mais aussi celle des gens pour qui cette réglementation a de l'importance étant donné son incidence sur la santé de leurs terres et de leurs peuples. Ma question est essentiellement la suivante: selon vous, dans quelle mesure est‑il primordial que les peuples autochtones, dont les terres sont touchées par les projets de développement, aient un siège à la table de l'organisme de réglementation afin de pouvoir intervenir directement dans le cadre du processus de réglementation pour exprimer leurs préoccupations et faire connaître leurs expériences? Cela remplacerait les discussions ici même sur les façons de modifier le processus, discussions qui demeurent fondamentalement le fait de gens de l'extérieur qui prennent toutes les décisions. L'idée est que vous ayez le sentiment d'être plus entendus au lieu de simplement être présents.
    J'espère que les témoins pourront répondre à cette question. Je suis prêt à écouter tous ceux qui voudront s'exprimer sur la question, mais je pensais commencer par Mme Martin, puisqu'elle représente la Nation métisse de Willow Lake. Nous avons entendu les réponses des représentants d'autres nations. Donc, nous pourrions commencer par vous, puis passer aux autres nations.
(1315)
    Pouvez-vous clarifier la question, encore une fois?
    Nous parlons d'établir un meilleur processus de réglementation. De toute évidence, il y a là un échec majeur, et je crois comprendre qu'il s'agit d'une défaillance structurelle, car ce n'est pas un cas isolé. Dans quelle mesure est‑il important que les peuples autochtones, dont les terres sont touchées par ces projets, participent au processus de réglementation, au lieu de chercher des façons d'avoir confiance en un processus mené par des gens de l'extérieur qui n'habitent pas sur les terres touchées? Comprenez-vous ce que je veux dire?
    Cela nous touche directement, et nous devrions certainement avoir un siège à la table. Ce serait plus logique. Nous devrions avoir notre mot à dire sur la façon dont ils traitent notre environnement et ce qu'ils font dans notre environnement.
    Selon vous, quel genre de ressources devrait‑on offrir à vos collectivités afin qu'elles puissent participer de manière significative au processus de réglementation?
    Je ne m'attendais pas à cette question. Je suis extrêmement nerveuse.
    Il n'y a pas de souci. Je n'essaie pas de vous mettre sur la sellette.
    Si quelqu'un d'autre veut intervenir, je suis aussi ouvert à cela.
    Je suppose que la question vise à reconnaître que dire que nous voulons votre opinion, c'est une chose, mais que si vous n'avez pas eu l'occasion de participer à un processus de réglementation dans le passé, il est possible qu'un apprentissage ainsi que des mesures de soutien et des ressources soient nécessaires pour le faire correctement.
    Je vais répondre.
    Je pense, pour avoir travaillé sur les questions de réglementation dans la région durant de nombreuses années et pour diverses collectivités, qu'il est essentiel qu'elles participent aux discussions avec l'organisme de réglementation.
    Une chose qui m'a le plus troublée, dans cet incident... Je répète que l'Impériale a approuvé la tenue d'un examen technique conjoint exhaustif et la présence d'une surveillance sur place. Nous avons été autorisés à entrer sur le site. Je pense qu'ils ont fait preuve d'une grande transparence. Mon intérêt porte sur la série de demandes de renseignements supplémentaires, comme on les appelle. Il s'agit de demandes que l'organisme de réglementation envoie lorsqu'il veut plus de renseignements sur un problème donné. C'est la seule chose qui ne nous a pas été transmise. L'Impériale a répondu que l'AER ne voulait pas divulguer ces informations. J'ai indiqué que je trouvais cela ridicule, parce que je pourrais faire une demande d'accès à l'information, pour 25 $, pour les consulter. L'organisme de réglementation n'inspire pas confiance. À l'instar de nombreuses collectivités, nous avons dit que cet organisme de réglementation est captif de la réglementation.
    L'autre commentaire préoccupant qui a été fait lors de cette rencontre est le suivant... Cela se rapporte davantage à votre question. Les collectivités participent à des processus de réglementations depuis des années, puisqu'elles ont créé leurs propres organismes et entités de réglementation pour traiter de ces questions. Notre principale préoccupation, c'est que leurs présentations ne sont ni entendues ni prises en compte. Nous avons effectué des présentations et des examens pour l'ensemble des rapports sur les bassins de décantation. Toutes ces industries font des rapports annuels depuis plusieurs années. Lors de notre rencontre, les responsables de l'AER ont indiqué qu'ils n'avaient jamais vu ces rapports. Étant donné la façon dont les examens que nous effectuons sont transmis et le manque de transparence, je pense qu'il est important d'obtenir ces renseignements directement des collectivités, parce que nous sommes mobilisés et que nous réagissons à cela.
    Quant à la capacité, je pense que la collectivité a la capacité de participer, mais il va sans dire que le financement et les ressources nécessaires pour le faire sont toujours les bienvenus. Nous sommes toujours très limités. L'organisme de réglementation fédéral et l'Alberta Consultation Office, au provincial, ont des services entiers consacrés à ces questions, tandis que de notre côté, nous avons généralement de petits services qui tentent de régler divers dossiers simultanément.
(1320)
    Allez‑y, monsieur Stuckless.
    J'ajouterais que je pense qu'aucun d'entre nous ne veut perdre son temps à travailler dans un système bancal. Si nous décidons de consacrer du temps à cela — soit dans le cadre d'un processus de réglementation ou d'un processus de consultation avec l'industrie —, c'est dans le but de trouver des solutions à des problèmes complexes. La plupart du temps, on nous dit que les suggestions que nous présentons ne sont pas des exigences réglementaires, même si elles pourraient répondre à une préoccupation. Elles sont souvent rejetées. Ils nous disent qu'ils poursuivront la discussion plus tard. Ils disent: « Donnez-nous notre permis, nous ferons le développement, et lorsque nous aurons d'autres problèmes, nous discuterons ».
     Voilà les réponses qui semblent s'immiscer dans les approbations. Ils sont tenus de maintenir le dialogue. Ils peuvent continuer à avoir des répercussions sur la population, porter atteinte à ses droits et continuer à discuter, mais ils ne règlent rien, de sorte que ces problèmes non résolus deviennent permanents. Puis, cela recommence. Lors des audiences suivantes, soit ils évitent la question, soit ils deviennent plus rusés et changent la formulation et abordent la question d'un autre angle. En fin de compte, c'est un système sclérosé et rien ne change.
    Le principal exemple que je peux donner au Comité est celui des approbations fédérales pour un pipeline ou un projet d'envergure, pas nécessairement des projets pétroliers ou gaziers. Prenons par exemple la liste des conditions et les problèmes qu'elles visent à régler, pour des groupes précis, on constate qu'il y a des centaines de conditions, dans le système fédéral, pour le projet Northern Gateway ou un projet de GNL. Ils sont tenus de respecter certaines exigences, notamment pour la remise en état, et d'avoir un comité quelconque. En Alberta, pour les projets relevant de l'organisme provincial de réglementation, le promoteur établit lui-même une demi-douzaine de conditions. Il s'agit d'un modèle unique et sans cesse répété, jamais modifié, sans exigences supplémentaires, assorti de modalités uniformisées et d'approbations à portée limitée. Il est impossible de répondre aux préoccupations lorsqu'on se contente de discuter perpétuellement des problèmes sans s'y attaquer sérieusement.
    Dans ma carrière, je suis rendu au point où je ne veux même plus jouer. Je ne veux pas jouer à ce jeu. Je ne veux pas perdre mon temps. Si nous pouvons conclure une entente sur les répercussions et les avantages pour contourner le problème, alors nous pourrons trouver une solution avec l'entreprise. Cela pourrait fonctionner. Mes intérêts sont protégés par l'ABA. Étant donné que la Couronne ne veut pas se mobiliser, on se retrouve avec un système dans lequel les promoteurs sont nos interlocuteurs, et ces problèmes importants ne sont jamais réglés.

[Français]

     On me fait signe que nous avons la permission de continuer jusqu'à 13 h 45. Je vais donc lancer le deuxième tour, mais je demande aux députés de s'en tenir à une brève question.
    Monsieur McLean, avez-vous une question?

[Traduction]

    J'invoque le Règlement.
    Nous avons 25 minutes, monsieur le président. C'est suffisant pour un tour complet.
    Non, nous terminons à 13 h 45.
    Oui, donc 20 minutes suffisent pour un tour complet.
    En fait, un tour complet dure normalement 25 minutes.
    Cinq plus cinq, plus deux et demi, plus deux et demi font 15.
    Nous perdons du temps, là. Normalement, un tour...
    Monsieur le président, c'est cinq minutes pour nous...
    Habituellement, le deuxième tour est d'une durée de 25 minutes. Je pense que si tout le monde a droit à une question, cela fera au moins trois minutes par...
    Permettez-moi de refaire ce calcul avec vous, monsieur le président. On dit cinq minutes pour les conservateurs, cinq minutes pour les libéraux, deux minutes et demie pour le Bloc et deux minutes et demie pour le NPD. Selon mon calcul, cela fait 15 minutes.
    Je suis désolé. Voulez-vous dire cinq minutes chacun?
    C'est cinq, cinq, deux et demie et deux et demie. Voilà comment cela fonctionne au deuxième tour.
    Non, il y a six intervenants au deuxième tour.
    Commençons par cinq, cinq, deux et demie et deux et demie. S'il reste du temps, nous pourrons le répartir. Je pense que ce serait juste.
    Est‑ce ce que vous voulez?
    Des députés: Oui.
    Le président: Dans ce cas, allez‑y, pour cinq minutes. Je gérerai le temps rigoureusement.
    Merci, monsieur le président.
    L'aspect sur lequel nous nous concentrons le plus est la nécessité d'un accès à l'eau propre. Il y a assez d'avis d'ébullition de l'eau dans les collectivités des Premières Nations dans ce pays. Nous sommes conscients que pour faire les choses correctement, il faudrait d'abord régler les problèmes au lieu de simplement émettre des avis d'ébullition de l'eau. Ne polluons pas cette eau.
    Il s'agit d'un bassin hydrographique très important. La rivière Athabasca se jette dans la rivière des Esclaves, puis dans le delta du Mackenzie. Un problème à l'un de ces bassins de retenue risque d'entraîner une série de problèmes de pollution. Nous le savons depuis des années. Nous sommes nombreux à avoir travaillé sur des technologies afin d'évaluer les problèmes associés à ces bassins de décantation, dans le but d'assainir ces sites beaucoup plus rapidement qu'ils ne l'ont été jusqu'à maintenant. De toute évidence, nous n'avons pas fait assez de progrès quant au déploiement des technologies nécessaires pour régler ce problème.
    Le risque moral est considérable, comme nous le constatons aujourd'hui lors de cette séance, et nous devons veiller à ce que cela ne se produise pas. Il est question de notre eau. Nous devons veiller à ce qu'elle demeure intacte afin que ceux qui consomment et utilisent cette eau puissent continuer de le faire, comme ils l'ont toujours fait.
    Permettez-moi de passer à la situation actuelle. De nombreux témoins ont parlé du problème de la capture réglementaire. L'AER, l'Alberta Energy Regulator, est un organe quasi judiciaire créé par le gouvernement de l'Alberta pour empêcher tout conflit politique entre le gouvernement et l'organisme de réglementation qui réglemente l'industrie. Je crois comprendre, d'après ce que j'ai entendu ici et ce que j'ai constaté dans les données, que ce mécanisme de production de rapports n'est peut-être pas clair tant pour vos organismes que pour le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, qui est également touché par ce problème, évidemment, et qui a une entente avec le gouvernement albertain. En cas d'incident, on s'attend à être informés, ce qui n'a manifestement pas été le cas.
    La question est de savoir à quel moment le gouvernement de l'Alberta a été informé. Le ministre albertain de l'Environnement me dit qu'il a pris connaissance de la situation lorsque l'AER a publié son avis public, c'est‑à‑dire le 7 février. Émettre un avis public c'est une chose, mais il aurait été beaucoup plus efficace de mobiliser directement les collectivités touchées. De toute évidence, il y a eu une défaillance du système et un problème de communication. Il y a quelque chose qui a déraillé dans ce processus.
    On parle de l'emprise de l'industrie sur la réglementation, mais il s'agit pourtant d'un organisme quasi judiciaire. Le gouvernement de l'Alberta n'a joué aucun rôle dans cette décision. L'affaire, c'est que l'industrie passe directement par un organisme de réglementation qui a son propre processus. De toute évidence, l'information ne se rend pas aux législateurs et aux corps législatifs concernés, y compris le gouvernement de l'Alberta et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest.
    Monsieur Stuckless, permettez-moi d'abord de vous poser une question au sujet de la négligence, puisque vous avez soulevé la question. Lorsque vous parlez de négligence, comment régleriez-vous ce problème, qui semble être une atteinte évidente à la capacité de l'organisme de réglementation d'exercer efficacement son rôle à cet égard?
(1325)
    Mon point de vue à ce sujet n'est pas très positif. Je pense qu'il faut mettre l'organisme de réglementation au rebut et le reconstruire. Je ne pense pas qu'il soit possible de le sauvegarder sous sa forme actuelle. Je ne cherche pas à balayer les efforts de M. Pushor du revers de la main. Il semblait sincère lorsqu'il a parlé de son approche visant à remédier aux lacunes de l'organisme.
    Je crois qu'il y a un problème culturel qui ne peut être résolu. L'organisme est un amalgame de plusieurs ministères et de plusieurs mandats qui ont changé au fil du temps. Ces éléments n'ont pas été bien intégrés. La direction de l'organisme est problématique pratiquement depuis le début. Le problème remonte à plusieurs décennies. Je crois que l'organisme doit être restructuré.
    Merci.
    Ai‑je compris que vous aviez une question à poser à M. Grygar?
    Non, c'était la question que je souhaitais poser.
    Je poserai la même question à M. Noseworthy.
    Normalement, ces problèmes ne surviennent pas, mais je suis tout à fait d'accord avec mon collègue de Fort McKay. Je pense que l'organisation en entier existe depuis trop longtemps. Elle a besoin d'être rafraîchie.
    Les personnes nommées au conseil d'administration de l'AER ne sont pas nommées par l'AER. Elles sont nommées par des personnes qui siègent à l'Assemblée législative de l'Alberta. Il y a là un problème que vous devez également résoudre.
    Malheureusement, le pouvoir politique de l'industrie est bien plus important que celui des communautés. Nous devons corriger cela. Nous devons retirer la politique de la réglementation et commencer à utiliser la réglementation pour nous occuper de la santé des gens. Voilà ce que je recommande.
    Merci.
    Pendant cinq minutes, nous allons donner la parole à M. Weiler.
    Je tiens également à remercier les témoins de s'être joints à nous aujourd'hui afin de discuter d'une question très importante.
    J'aimerais commencer par interroger M. Stuckless.
    Compte tenu de ce que vous avez dit à propos de la crédibilité de l'organisme de réglementation Alberta Energy Regulator et de la nature des évaluations environnementales réalisées par la province de l'Alberta, que pensez-vous que cela signifie en ce qui concerne la nécessité pour le gouvernement fédéral de jouer un rôle dans certaines de ces évaluations environnementales afin de garantir que des conditions rigoureuses sont imposées pour les développements futurs?
(1330)
    Je soutiens cette nécessité de tout cœur, et je représente plusieurs communautés qui soutiennent cette approche.
    J'ai appuyé publiquement le projet de loi C‑69 et le nouvel organisme qui a été créé. J'ai travaillé favorablement avec l'organisme dans le cadre d'un certain nombre de projets, compte tenu de l'approche qu'il a adoptée.
    Toutefois, j'attire votre attention sur un conflit d'intérêts potentiel, dans la mesure où mon nom est également inscrit sur la liste d'un groupe d'experts et qu'il l'était avant la création du nouveau Comité consultatif autochtone (CCA). Cependant, c'est ainsi que je pense que les choses devraient être faites, et ce de manière correcte.
    Je n'ai encore été nommé au sein d'aucun groupe d'experts, mais j'espère l'être. C'est un rôle que j'ai commencé à jouer dans ma carrière et que j'ai vraiment aimé. Cet enjeu me passionne.
    Dans le même ordre d'idées, je voudrais revenir sur ce que M. Clark a mentionné plus tôt à propos de la décision rendue dans l'affaire Yahey en Colombie‑Britannique. Il s'agit d'une première nation visée par le Traité no 8 qui a intenté une action en justice parce les effets cumulatifs que des projets d'exploitation du gaz naturel avaient eus sur son territoire étaient tels qu'elle n'était plus en mesure d'exercer son droit de chasse et de piégeage, protégé par la Constitution. Depuis, la province de la Colombie‑Britannique a lancé au début de l'année une nouvelle approche en matière de cogestion des terres, des eaux et des ressources naturelles.
    J'espérais que vous pourriez nous en dire un peu plus à propos de l'importance d'adopter une approche semblable à l'égard des nations de l'Alberta visées par le Traité no 8 et peut-être à propos des raisons pour lesquelles cela n'a pas encore été fait.
    Cela renvoie au point précédent concernant la nature hiérarchisée des droits ancestraux et des droits issus de traités au Canada. Par exemple, dans le cadre du processus de la Régie canadienne de l'énergie (RCE), un oléoduc est en cours de construction dans le nord-ouest de l'Alberta et le nord-est de la Colombie‑Britannique. En ce qui concerne la gestion des effets cumulatifs de ce projet, la différence est flagrante. La Colombie‑Britannique travaille et négocie avec les nations, alors que l'Alberta brille par son absence.
    Pourquoi cela ne s'est‑il pas produit en Alberta? La réponse est simple: personne n'a encore poursuivi l'Alberta. Mais cela ne saurait tarder. C'est inévitable.
    Les perturbations cumulatives connues dans une grande partie de l'Alberta dépassent de loin celles que nous observons dans le nord-est de la Colombie‑Britannique. Les seuils distingués par la Cour suprême de la Colombie‑Britannique dans l'affaire Yahey sont incontestablement dépassés dans une grande partie de l'Alberta.
    La question n'est pas de savoir si cette approche sera adoptée, mais plutôt quand elle le sera.
    Merci.
    La prochaine question que j'aimerais poser est destinée à Mme Martin.
    Je sais que de nombreuses nations ont demandé le droit d'effectuer leurs propres tests indépendants relativement à la situation sur le site de Kearl. L'entreprise a répondu qu'elle autorisera un examen indépendant des contrôles qu'elle effectue, mais qu'elle n'autorisera pas les nations elles-mêmes à effectuer des contrôles indépendants sur le site. J'espérais que vous pourriez nous faire part de vos commentaires à ce sujet.
    La nation métisse de Willow Lake participe actuellement au programme de surveillance des sables bitumineux. Nous sommes des intervenants relativement nouveaux à cet égard. C'est la deuxième année que nous participons au programme. Nous envoyons certains de nos membres prélever des échantillons d'eau, alors je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas participer également à la surveillance, en collaboration avec l'entreprise Impériale. Je pense que nous aurions la capacité de le faire.

[Français]

     Madame Pauzé, la parole est à vous.
    Monsieur le président, je laisse mon temps de parole à Mme May.
    D'accord, merci.
    Merci, chère collègue.

[Traduction]

    Je suis très honorée de participer aujourd'hui à l'audience cruciale du groupe de témoins. Je tiens à remercier tous les témoins des deux groupes de leur participation, et j'aimerais que cela soit consigné dans le compte rendu.
    Je voudrais poser une question qui n'a pas encore été posée au sujet de la nature des ententes signées entre les Premières Nations et les Métis et l'entreprise Impériale. Le chef Adam et d'autres intervenants ont fait allusion à ces ententes sur les répercussions et les avantages. Je pense que M. Noseworthy a indiqué précisément qu'il y avait des choses dont il pouvait parler et d'autres dont il ne pouvait pas parler en raison d'un accord conclu.
    Monsieur Noseworthy, sans révéler ce que vous ne pouvez pas dire, pouvez-vous décrire la nature de votre obligation de garder certains renseignements entre vous et l'entreprise et la nature des questions dont vous êtes autorisé à parler? Pouvez-vous décrire cela? Merci
    Je peux vous dire que j'ai conclu un accord avec eux. Notre communauté a signé un accord avec eux. Mais, je ne peux rien dire de plus.
(1335)
    Je suis au courant d'un accord conclu entre le gouvernement de la Colombie‑Britannique et la Première Nation Pacheedaht, qui stipule que la Première Nation ne doit pas permettre que des manifestations soient organisées contre l'exploitation des ressources sur son territoire. Pouvez-vous nous dire si c'est une clause tout à fait inédite en Alberta? Je sais que vous ne pouvez pas dire si elle figure dans l'accord. Je comprends cela. Je me demande si la nature de l'accord vous empêche de parler de tout ce qui pourrait être considéré comme une critique de l'industrie.
    Je pense avoir été critique aujourd'hui sans enfreindre l'accord, mais je dirais que nous sommes comme des équilibristes qui marchent tous les jours sur une corde raide. Nous devons nous assurer que nous respectons nos accords, et c'est ce que nous faisons. Sinon, nous ne les aurions pas conclus. Cependant, l'accord lui-même n'a pas protégé notre communauté contre ce qui s'est passé. Nous travaillons actuellement avec l'organisme de réglementation, qui a apparemment surgi de nulle part. Je ne savais même pas qui était le responsable de l'organisme de réglementation jusqu'à ce qu'il m'appelle pour me demander d'organiser une réunion.
    Vous tirez une réponse de cela, je crois.
    Je vous remercie de vos tentatives d'être franc, et je comprends les restrictions auxquelles vous êtes assujetti.
    Je tiens à dire qu'il y a un milliard d'années, avant que j'entre en politique, j'ai participé à l'évaluation environnementale du projet de mine de Kearl Lake avec le Sierra Club du Canada. Je me souviens très bien qu'Impériale avait déclaré que la gestion des bassins de décantation était à la fine pointe de la technologie et qu'il n'y avait pas lieu de s'inquiéter des fuites. Je me souviens que lorsque David Schindler a commencé à documenter les fuites, sa réputation a été attaquée.
    En rétrospective, le processus d'évaluation environnementale nous a‑t‑il permis de découvrir la vérité, ou l'industrie nous a‑t‑elle mis des bâtons dans les roues?
    Je vais m'en remettre à M. Clark à cet égard.
    Je n'ai pas participé à ce processus particulier d'évaluation des impacts environnementaux. Cependant, comme M. Stuckless l'a laissé entendre ici, je peux dire que le processus d'évaluation des impacts environnementaux est extraordinairement inefficace. La première mesure que nous avons prise lorsque la nouvelle mesure législative fédérale a été adoptée a consisté à passer en revue la liste des projets désignés afin de déterminer comment nous pourrions faire en sorte que certains projets soient soumis à une évaluation fédérale, parce que l'évaluation provinciale est complètement inadéquate.
    Je pense que bon nombre de ces questions sont liées au problème plus fondamental de la privatisation progressive de l'obligation de consultation, qui, en tant que responsabilité, a été reléguée de la Couronne fédérale aux provinces, puis à l'industrie et, de plus en plus souvent, à des tiers ayant conclu des ententes contractuelles avec l'industrie. Si vous voulez parler des effets psychologiques du sentiment de ne pas compter et de ne pas être entendu, ils sont pour moi une indication assez claire de la priorité accordée aux droits des Autochtones et des peuples autochtones dans ce processus.
    Merci.
    Monsieur Blaikie, la parole est à vous.
    Merci beaucoup.
    Aujourd'hui, nous avons parlé assez fréquemment du rôle que joue la confiance dans les bons processus réglementaires et du fait que, malheureusement, la politique semble jouer un rôle dans ces processus. Je pense à l'endroit où nous siégeons et à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Récemment, après que le projet de loi a été adopté en deuxième lecture à la Chambre, nous avons vu les libéraux et les conservateurs voter pour éliminer les dispositions liées aux bassins de décantation dans la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et pour laisser les provinces se débrouiller seules dans ce domaine.
    En ce qui concerne le rôle que la confiance et la politique jouent dans l'établissement de bons processus réglementaires, ces amendements ont-ils été un pas dans la bonne direction ou un pas dans la mauvaise direction? Qu'est‑ce que cela signifie pour vos communautés en ce qui concerne le stade où le Parlement en est dans ses efforts pour répondre aux préoccupations que vous avez soulevées aujourd'hui?
    Je pense que c'est une question de leadership ou de manque de leadership parfois, mais non de politique. Ce n'est que lorsqu'un problème sensationnel comme celui‑ci échappe à tout contrôle et attire l'attention des médias que les gens peuvent réévaluer ces décisions. Il s'agit avant tout d'une décision liée au leadership. Le problème de compétences et les processus de consultation à plusieurs niveaux dont nous avons hérité ne sont pas utiles, en particulier à un moment comme celui‑ci. En outre, la confiance diminue lorsque des situations comme celles‑ci surviennent. Nous devons savoir que les services de sécurité sont là pour prendre les mesures qui s'imposent.
    Quel est l'intérêt d'avoir toutes les lois du monde si l'on ne les utilise jamais ou si l'on se décharge de ses responsabilités par crainte de perdre des votes? C'est aussi un autre problème, mais cela force les gens comme nous à travailler en première ligne pour tenter de demander des comptes à des personnes qui ne veulent pas être tenues responsables de leurs actes.
(1340)
    Il est clair que ce n'est pas ce que nous aurions voulu voir.
    Aujourd'hui, le gouvernement fédéral intervient dans la région par l'intermédiaire de son groupe de travail Couronne-Autochtones et parle de modifier la loi et d'élaborer une réglementation pour permettre le rejet de ces eaux de traitement, comme il les appelle. Il a établi un calendrier et un budget totalement irréalistes, et il pensait pouvoir faire approuver tout cela rapidement.
    C'est pourquoi l'un de nos messages en ce moment — un message constant —, c'est que le travail doit être fait correctement. Il doit être étayé par une évaluation régionale en vertu de la loi sur l'évaluation d'impact de cette région. Il est consternant qu'après 60 années d'exploitation à ciel ouvert des sables bitumineux, nous ne sachions presque rien des effets cumulatifs de ces activités. C'est absolument consternant. Rien que pour cela, le ministre devrait autoriser une évaluation régionale dans cette région parce que, en ce qui concerne les bassins de décantation — d'une capacité équivalente à l'eau consommée par plusieurs villes — qui seront déversés, comment pourrons-nous évaluer nos droits pour l'avenir si nous n'avons pas de base de référence pour déterminer notre point de départ?

[Français]

     Merci.
    Notre réunion tire à sa fin. Elle fut extrêmement intéressante et substantielle.
    Nous serons de retour jeudi, à 15 h 30, alors que nous recevrons des représentants de la compagnie L'Impériale. Toute l'information donnée aujourd'hui pendant notre réunion va nous aider à interroger les représentants de cette compagnie.
    Je vous remercie de votre participation et vous souhaite une bonne journée.
    Quant à mes collègues, nous nous reverrons jeudi après-midi.
    Merci.
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