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Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la 126e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.
La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride. J'aimerais rappeler aux participants les points suivants.
Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Tous les commentaires doivent être adressés par l'entremise de la présidence.
Mesdames et messieurs, veuillez lever la main si vous souhaitez prendre la parole, que ce soit en personne ou par Zoom. Le greffier et moi ferons de notre mieux pour gérer l'ordre des interventions.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le 22 octobre 2024, le Comité entame son étude sur l'ingérence électorale et les activités criminelles au Canada par des agents du gouvernement de l'Inde.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui.
Nous entendrons Nathalie Drouin, sous-greffière du Bureau du Conseil privé et conseillère à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre.
Nous accueillons Daniel Rogers, directeur du Service canadien du renseignement de sécurité.
Nous recevons David Morrison, sous-ministre des Affaires étrangères du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement.
Nous accueillons Tricia Geddes, sous-ministre déléguée du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
Nous recevons Michael Duheme, commissaire de la Gendarmerie royale du Canada.
Merci à tous d'être ici aujourd'hui malgré le court préavis. Je crois comprendre que Mme Drouin partira dans les prochains jours, alors c'était vraiment bien que nous ayons pu vous accueillir tous à cette date.
Il a été convenu que Mme Drouin prononcera une déclaration liminaire au nom de tous les témoins.
Je vous cède la parole, madame Drouin. Allez‑y, s'il vous plaît.
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Merci beaucoup, chers membres du Comité.
Mes collègues et moi tenons à remercier le Comité de nous avoir invités à venir vous parler de la sécurité publique des Canadiens et des Canadiennes, et de l'ingérence étrangère en lien avec le gouvernement de l'Inde.
Comme le Comité le comprendra, même si nous sommes entièrement prêts à collaborer avec vous et que nous sommes aussi prêts à répondre à vos questions, il y a des obligations et des lois qui dictent ce qui peut être divulgué au Comité, et ce, en raison des enquêtes actuellement en cours qui limitent ce qui peut être dit. C'est pourquoi nous ne pouvons pas non plus vous fournir des détails sur la preuve.
Par contre, nous sommes en mesure de vous parler des raisons pour lesquelles nous avons des inquiétudes au sujet de la sécurité publique. Nous pouvons également vous parler de nos tentatives de coopération avec l'Inde et de la façon dont le refus de coopérer de l'Inde nous a amenés là où nous en sommes aujourd'hui.
[Traduction]
En guise de contexte, des forces chargées de l'application de la loi enquêtent sur la violence extrême au sein des communautés, et le SCRS étudie l'ingérence étrangère de l'Inde depuis des années.
Comme vous le savez, le 18 septembre 2023, le a annoncé à la Chambre des communes que le Canada avait pris connaissance d'allégations crédibles, fondées sur des renseignements de sécurité, concernant un lien possible entre des agents du gouvernement indien et le meurtre d'un citoyen canadien au Canada.
Depuis la déclaration du l'an dernier, la réponse du gouvernement a consisté à suivre deux voies distinctes, soit celle de l'application de la loi et celle de la diplomatie. La voie de la diplomatie permet d'entretenir nos relations avec le gouvernement de l'Inde dans de nombreux domaines. La loi de l'application de la loi est axée sur la sécurité publique et l'application de la primauté du droit.
La sécurité publique des Canadiens et Canadiennes a été le facteur prépondérant chaque fois que nous avons décidé de nos actions et que nous avons évalué nos relations avec l'Inde. Nous comprenons et valorisons tout ce que l'Inde représente pour le Canada, en tant que partenaire international, ainsi que les liens importants qu'entretiennent les membres de nos populations respectives. Cependant, nous ne pouvons pas faire fi des tentatives des agents du gouvernement de l'Inde de commettre des actes de coercition et de violence au Canada, et ainsi de miner notre démocratie.
La GRC a également envoyé des ressources pour travailler directement avec l'agence centrale indienne de lutte contre le terrorisme, afin de permettre une coopération en matière d'extrémisme violent.
[Français]
Il est important que le public comprenne les mesures qui ont été prises pour favoriser la coopération avec l'Inde.
Au cours d'une série de réunions tenues depuis août 2023, nous avons clairement indiqué qu'il est essentiel que nos fonctionnaires maintiennent des voies de communication et de coopération significatives avec l'Inde.
Plus précisément, la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement du Canada, soit ma prédécesseure ou moi-même, et d'autres hauts fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada, du SCRS et du Bureau du conseil privé se sont entretenus à six occasions avec le conseiller à la sécurité nationale de l'Inde, soit en août et en septembre 2023 à New Delhi, en novembre 2023 à Dubaï, en décembre 2023 en Arabie saoudite, en janvier 2024 à Londres et en mars 2024 à Dubaï.
[Traduction]
J'ai également parlé à mon homologue en mai 2024 lorsque la GRC a procédé à des arrestations dans l'affaire Nijjar. En outre, je me suis entretenue à plusieurs reprises avec le haut-commissaire de l'Inde au Canada de l'époque. Le a également discuté de ce sujet avec le premier ministre Modi, au sommet du G20 à New Delhi l'an dernier. En réponse, l'Inde a prétendu que le Canada ne lui avait montré aucune preuve et que nous ne tenions pas compte de ses préoccupations au sujet de l'extrémisme violent du Khalistan.
Après des mois d'enquête et plusieurs mises à jour, la GRC a communiqué avec le sous-ministre des affaires étrangères et moi à la fin août pour nous faire part de ses graves préoccupations concernant la sécurité publique et examiner tous les outils dont nous disposons pour démanteler le réseau de l'Inde au Canada. Cette requête sans précédent de la GRC pendant une enquête en cours témoigne de l'importance du risque pour les Canadiens et Canadiennes et les personnes vivant au Canada. La preuve a dévoilé le mécanisme employé par l'Inde pour cibler des personnes vivant au Canada.
Le mécanisme du gouvernement indien commence par la collecte de renseignements sur les personnes résidant au Canada, par l'intermédiaire de diplomates et d'agents consulaires au Canada et d'autres personnes agissant comme mandataires. Certaines de ces personnes et entreprises sont contraintes et menacées. Cette information est communiquée aux hautes sphères du gouvernement de l'Inde qui ordonnent ensuite à des groupes criminels relevant de Lawrence Bishnoi de perpétrer des actes criminels contre des Indo-Canadiens. M. Bishnoi est actuellement emprisonné en Inde et en mesure de commander ces actes par l'intermédiaire de son groupe qui compte de vastes réseaux criminels en Inde et sur la scène internationale. Les crimes graves commis au Canada comprennent des homicides, des complots d'assassinat, des extorsions et d'autres actes de violence extrême.
Comme la preuve était alarmante, nous savions que nous devions agir sans tarder. Nos actions étaient motivées par une inquiétude pressante et grave pour la sécurité publique. L'important était de faire en sorte que les agents du gouvernement de l'Inde mettent fin à leurs activités illégales au Canada, et nous avons demandé la collaboration des autorités indiennes.
[Français]
Nous nous sommes préparés à trois réactions possibles du gouvernement indien.
Premièrement, une réaction coopérative où l'Inde cesse ses activités de violence au Canada et assume ses responsabilités à cet égard.
Deuxièmement, une réaction relativement coopérative.
Troisièmement, une réaction non coopérative, soit le déni et le refus d'assumer sa responsabilité.
Nous espérions évidemment une réaction coopérative pour apaiser nos inquiétudes concernant la sécurité publique au Canada.
[Traduction]
En octobre, la GRC a cherché à rencontrer ses homologues indiens pour partager des preuves à deux reprises, sans succès. Premièrement, la GRC devait se rendre en Inde pour rencontrer ses homologues chargés de l'application de la loi. Malheureusement, l'Inde a eu recours à une formalité administrative pour empêcher la tenue de cette réunion. Deuxièmement, la GRC s'est rendue à Washington le 10 octobre. Bien que l'officier indien ait confirmé la réunion, il ne s'est jamais présenté.
Pour souligner la gravité de cette question, je me suis rendue à Singapour avec le sous-commissaire de la GRC et le sous-ministre des Affaires étrangères pour rencontrer le conseiller à la sécurité nationale de l'Inde, le 12 octobre. Le sous-commissaire a présenté des éléments de preuve démontrant clairement les liens entre les agents du gouvernement de l'Inde et les activités criminelles violentes qui ont lieu au Canada.
Nous avons présenté trois options au conseiller à la sécurité nationale de l'Inde qui nous permettraient de répondre aux questions de sécurité publique et à la reconnaissance de la responsabilité de son gouvernement.
La première option était de lever l'immunité des diplomates impliqués dans ces machinations pour permettre à la GRC de les interroger.
La deuxième option, l'option globale — était que l'Inde assume la responsabilité et gère la violence: premièrement, que les activités illégales commises au Canada cessent, y compris en demandant à Bishnoi de cesser ses activités et d'y renoncer; deuxièmement, que le gouvernement de l'Inde déclare publiquement que notre affaire sera examinée en Inde, comme il l'a fait avec l'affaire des États-Unis; troisièmement, qu'il rappelle ses diplomates impliqués dans les machinations; et, enfin, quatrièmement, qu'un nouveau dialogue de haut niveau Inde-Canada sur la lutte contre l'extrémisme soit annoncé.
Si les deux premières options étaient refusées, le Canada déclarerait les diplomaties persona non grata, et la GRC ferait une déclaration publique pour expliquer la situation aux Canadiens. C'est ce que nous avons appelé l'« action unilatérale ».
Afin de répondre aux graves préoccupations du Canada en matière de sécurité publique, notre objectif, comme je l'ai dit précédemment, était l'option de la responsabilisation. Au cours de la réunion, notre homologue n'a pas refusé d'examiner l'option de la responsabilisation, cependant il a refusé de reconnaître tout lien et a nié tout ce que nous avons présenté. Nous avons finalement convenu de faire une pause, de garder cette réunion confidentielle — comme l'a suggéré mon homologue — et de nous réunir à nouveau le 14 octobre, le lundi de l'Action de grâces, pour poursuivre la discussion à ce sujet. Au lieu de cela, le gouvernement de l'Inde a choisi de ne pas respecter notre accord et a rendu publique sa position le lendemain, le dimanche 13 octobre, en utilisant à nouveau son faux discours selon lequel le Canada n'a fourni aucune preuve.
En s'exprimant publiquement, le gouvernement indien a clairement indiqué qu'il n'allait pas rendre de comptes ni prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité publique. La GRC a alors compris que nous devions prendre des mesures unilatérales, c'est‑à‑dire déclarer les diplomates persona non grata et faire une déclaration publique. Par la suite, nous avons décidé d'avoir recours à notre stratégie de mobilisation des médias pour rejoindre un public plus vaste et maximiser l'impact.
Le sous-ministre Morrisson et moi avons parlé au Washington Post du contexte, tard dimanche après-midi le dimanche 13 octobre. Nous lui avons donné de l'information non classifiée sur nos tentatives de coopérer avec l'Inde et nous avons expliqué en quoi les éléments de preuve que la GRC avait recueillis démontrent que le gouvernement de l'Inde menait des activités illégales contre des Canadiens allant jusqu'à menacer leur vie.
Dès le début, le gouvernement de l'Inde a accusé le Canada de mener une enquête à des fins politiques et d'utiliser les médias canadiens pour arriver à ses fins. Ce n'est évidemment pas le cas; toutefois, nous étions prêts à ce que ces accusations refassent surface. Par conséquent, nous avons pris la décision stratégique de mobiliser un organe médiatique international respecté, qui avait déjà publié sur le sujet, pour nous assurer que les pendules soient remises à l'heure et que notre version des faits soit entendue par le plus de gens possible.
[Français]
Dans l'intérêt de la sécurité publique et dans le but de perturber le réseau qui alimente la violence dans les collectivités canadiennes, la a expulsé six représentants indiens accrédités.
L'Inde a fait de même en déclarant persona non grata six représentants canadiens de notre haut-commissariat à New Delhi.
Ce n'est pas une décision que le Canada a prise à la légère. Notre relation avec l'Inde est un pilier central de notre stratégie indo-pacifique.
Notre position est claire: le Canada demeure prêt à coopérer avec l'Inde, mais il faut un engagement significatif de sa part au sujet de nos inquiétudes graves et bien fondées en matière de sécurité publique.
Nous vous remercions, et nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins.
Il n'y a pas si longtemps de cela, la GRC a annoncé qu'elle avait à sa disposition des preuves selon lesquelles des agents du gouvernement de l'Inde étaient activement impliqués, ici au Canada, dans un réseau d'activité criminelle incluant notamment l'homicide, l'extorsion, le crime organisé et l'ingérence dans notre processus démocratique. Il s'agit d'un réseau criminel qui pourrait potentiellement révéler l'implication de certains politiciens et diplomates indiens aux plus hauts échelons.
Tout d'abord, je tiens à remercier sincèrement les organismes d'application de la loi de leur travail, d'avoir découvert tout cela et d'avoir pris des mesures pour protéger les Canadiens et Canadiennes. Au moment même où je dis ces mots, je suis profondément reconnaissant que... je ne sais pas si vous avez conscience de la portée de vos actes. Pour bien des Canadiens d'ascendance sikhe, vos paroles confirment ce qu'ils savaient et sentaient déjà. Depuis des décennies, dans leurs gurdwaras, leurs foyers et derrière des portes closes, les sikhs savaient qu'ils étaient épiés, surveillés et ciblés. Grâce aux éléments de preuve récoltés et à l'enquête que vous menez, vous avez légitimé leurs inquiétudes.
Chaque fois qu'une information nouvelle survient ou qu'une annonce est émise, mes collègues, ma famille ainsi que des membres de la communauté me demandent « Comment vas‑tu? Comment est‑ce que la communauté en général se porte? » La communauté est profondément soulagée que sa détresse ne soit pas écartée du revers de la main et qu'elle soit, en fait, entendue et que des mesures soient prises à cet égard. J'estime que tous les Canadiens peuvent reconnaître que la possibilité qu'un lien soit établi entre le meurtre d'un sikh, et d'autres crimes au Canada, et l'État indien menace la sécurité que beaucoup de sikhs et de membres appartenant à d'autres communautés étaient venus chercher au Canada. C'est pourquoi j'estime que votre travail est d'une importance aussi cruciale, et je vous remercie sincèrement de vos efforts.
Madame Drouin, ma première question s'adresse à vous. Un criminel incarcéré dans une prison étrangère, en Inde, agissant sur ordre du gouvernement indien afin d'obtenir une immunité de base pour l'exécution de ses activités, est littéralement l'intrigue de plusieurs films bollywoodiens que j'ai écoutés dans ma jeunesse, et il est amusant de voir que le gouvernement indien s'inspire de Bollywood. Il s'agit d'une personne qui est détenue dans une prison indienne, et des ministres indiens et diplomates sont potentiellement impliqués dans cette affaire. Quelles sont les limites de notre compétence? Quelles mesures peuvent être prises contre une personne comme Lawrence Bishnoi si la preuve établit effectivement l'existence d'un lien?
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Monsieur le président, la priorité de tout corps de police est d'assurer la sécurité publique.
Vous avez raison, madame Michaud, de dire que ce sont des circonstances extraordinaires. C'est un dossier comme je n'en ai jamais vu.
Examinons l'historique des événements à la suite de l'annonce du meurtre de Hardeep Singh Nijjar, en juin. Nous avons fait un point de presse lors de l'arrestation de certaines personnes. Nous avons dit vouloir procéder à une enquête distincte pour l'homicide de M. Nijjar, laquelle visait les activités criminelles dans lesquelles le gouvernement indien était impliqué.
Au cours de l'année, nous avons vu plusieurs situations où des gens ont été intimidés, tués ou harcelés. À certaines occasions, nous avons également dû nous prévaloir du devoir de mise en garde, utilisé lorsque nous avons de l'information jugée crédible et imminente concernant la sécurité d'une personne. Nous avons alors l'obligation de rencontrer cette personne et de l'avertir que sa vie est en danger.
Nous avons vu une escalade d'événements liés à des éléments de l'enquête. Au cours de cette dernière, il est devenu de plus en plus clair que des diplomates et des agents du consulat étaient impliqués dans cette affaire. Pendant son enquête, la GRC a pris une position plutôt inhabituelle pour préserver la sécurité publique à cause de tout ce qu'elle entrevoyait pour les années à venir.
Je reviens aux remarques d'ouverture de Mme Drouin. Nous avions offert des options. La GRC cherchait des moyens d'atténuer le risque pour la sécurité publique avant l'enquête.
Le fait d'aller de l'avant dans les médias peut parfois provoquer des situations au cours de l'enquête. Dans notre cas, le sous-commissaire Flynn a essayé de rencontrer ses homologues en Inde. On a refusé de lui accorder un visa. Le plan B était d'aller rencontrer, au mois d'octobre, son homologue du consulat de l'Inde, à Washington. On lui a signifié, là aussi, une fin de non-recevoir.
Par conséquent, nous avons décidé que le sous-commissaire Flynn se joindrait à Mme Drouin et à M. Morrison, à Singapour. Lors de cette réunion, le sous-commissaire Flynn a expliqué ce que nous avions réussi à établir sur le plan de l'information et des actions menées par le gouvernement indien. Dans ses remarques d'ouverture, Mme Drouin a mentionné que les objectifs établis n'avaient pas été atteints et qu'il y avait eu une fuite dans les médias indiens à la suite de cette rencontre, qui ne devait pas avoir lieu. Nous avons cru comprendre qu'il ne semblait y avoir aucun appétit pour ce qui est de coopérer avec le Canada et la GRC, d'où l'importance, pour nous, d'aller de l'avant.
Je sais que de nombreuses personnes ont demandé pourquoi nous avions choisi la date du 14 octobre. C'était une longue fin de semaine pour moi aussi, mais nous sentions le besoin de divulguer l'information immédiatement. Mme Drouin devait faire un appel le lundi 14 octobre vers 9 h 30 ou 10 h 30, mais cela n'a pas eu lieu. Nous voulions éviter la désinformation, et c'est pourquoi nous avons décidé de rendre publics deux éléments. D'abord, nous voulions envoyer le message selon lequel nous voulions assurer la sécurité publique des gens. Nous voulions aussi aviser les gens des communautés que, s'ils voulaient nous rencontrer, nous serions là pour écouter ce qu'ils avaient à dire.
C'est un peu la raison ayant motivé la décision de rendre publics certains détails.
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Merci, monsieur le président.
Selon le rapport spécial sur l'ingérence étrangère du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, après la République populaire de Chine, « [...] l'Inde est devenue la deuxième menace en importance en matière d'ingérence étrangère envers les processus et institutions démocratiques du Canada. »
Toujours selon le rapport:
Bien que les efforts consentis par l'Inde en matière d'ingérence étrangère ne se soient intensifiés que progressivement, il est devenu manifeste [...] que ses activités allaient désormais au-delà des revendications pro-Khalistan exprimées au sein de la société canadienne et incluent l'ingérence dans les processus et institutions démocratiques canadiens, notamment en ciblant des politiciens canadiens, des médias ethniques et des communautés ethnoculturelles indo-canadiennes.
Monsieur Duheme, vous avez dit que, lorsque vous vous rendez compte que les preuves accumulées indiquent que la vie d'une personne en sol canadien pourrait être en danger, vous devez rencontrer cette dernière.
Que peut-on offrir à cette personne en matière de protection? La GRC est-elle habilitée à offrir de la protection à ces gens?
Cela m'amène à une autre question.
Rencontrez-vous seulement les personnes dont la vie serait en danger? Rencontrez-vous également les gens qui seraient soupçonnés d'avoir participé à des activités d'ingérence étrangère?
On dit souvent que des personnes pourraient avoir participé à des activités d'ingérence étrangère sans vraiment s'en rendre compte. On parle notamment de politiciens. Je pense à un contexte où un politicien en mission parlementaire à l'étranger irait prendre un verre avec un collègue d'un autre pays et qui lui communiquerait de l'information sur le Canada, sans trop se rendre compte qu'il s'agit d'une information privilégiée, par exemple.
Dans ce cas, rencontrez-vous les gens soupçonnés d'avoir collaboré avec l'Inde, par exemple, ou le faites-vous seulement avec des gens dont la vie serait en danger?
Il y a un débat sur le nom de personnes impliquées, dont a parlé le . Le ne veut pas aller chercher son habilitation de sécurité pour prévenir ces gens qui pourraient être impliqués dans des activités d'ingérence étrangère. Est-ce le chef de l'opposition officielle qui pourrait les prévenir, ou est-ce que, vous, vous pourriez le faire?
Je suis désolée si ma question est un peu longue.
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Merci, monsieur le président.
Je dois dire que je suis assez préoccupée. Après les commentaires de mon collègue M. Sarai, nous venons d'entendre plus d'une heure et demie de témoignages. Il y a eu environ cinq séries de questions pour les conservateurs et je pense qu'au moins trois de ces séries de questions ont été consacrées à l'information qui a été donnée comme contexte aux médias et à confirmer que l'information n'était pas classifiée. Nous le savons simplement parce que leur propre a reçu la même information et nous savons tous qu'il n'a pas la cote de sécurité. L'information qui a été donnée à tous les chefs a aussi été donnée aux médias, et les conservateurs ont passé au moins trois séries de questions sur cet enjeu: l'information que leur parti avait déjà.
Puis, il y a aussi ce que nous venons d'entendre à l'instant de M. Motz. Plutôt que de s'intéresser à ce que disait M. Sarai au sujet de la menace réelle à laquelle sont exposés les membres de la collectivité — je ne peux qu'imaginer ce que les gens ont pu ressentir en entendant ces rapports —, les conservateurs ont posé des questions au sujet des criminels canadiens en Inde. Pas une seule question n'a concerné le fait que le gouvernement indien travaillait avec le crime organisé — c'est ce que les médias prétendent — pour faire subir de la violence aux Canadiens. Il y a une enquête pour meurtre. Il y a d'autres enquêtes en cours, et le Parti conservateur n'a pas posé une seule question sur l'incidence que cela pourrait avoir sur notre collectivité ici au Canada. En ce qui concerne le fait de poser des questions au sujet des criminels canadiens à l'étranger, j'imagine que les Canadiens partout au pays, surtout ceux de la communauté sikhe, de la communauté indo-canadienne, sont très peu réconfortés par ce que nous venons de voir à l'instant. Je ne sais pas comment faire pour ne pas encore le dénoncer. Je pense que les Canadiens méritent mieux.
Je vous remercie tous d'être présents et de tenter de faire la lumière là‑dessus.
Nos hauts responsables de la sécurité sont ici pour presque deux heures, et c'est la qualité des questions que nous avions. Je dois adopter le point de vue de la collectivité, et je suis assez déçue de voir que c'est ainsi que nous avons passé notre temps. Ce sont les conservateurs qui doivent répondre aux électeurs de partout au pays et expliquer pourquoi ils préfèrent ne pas dénoncer les actes présumés du gouvernement indien, lesquels ont été largement rapportés.
Ceci dit, j'aimerais m'adresser à Mme Drouin. En ce qui concerne la communication de ces informations aux médias, vous avez mentionné quelque chose qui n'a pas été soulevé dans les trois séries de questions, puisque l'on a préféré se concentrer sur cela plutôt que sur la sécurité des Canadiens. C'est le fait que ces reporters et ces journalistes avaient d'autres sources, et que, si les représentants et les dirigeants canadiens n'avaient pas donné le point de vue des Canadiens, on comprenait que beaucoup de mésinformation n'aurait pas été vérifiée. Cela faisait‑il partie de la stratégie de s'assurer que l'information qu'avait déjà le Parti conservateur soit aussi communiquée aux journalistes de façon que la mésinformation ne circule pas sans être vérifiée?
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être présents ici, aujourd'hui.
[Difficultés techniques] J'ai perdu le fil. C'était peut-être quatre, cinq ou six fois…
Une voix: C'était neuf fois.
M. Doug Shipley: C'était neuf fois — mon ami a gardé un œil sur cela —, dans sa déclaration préliminaire, donc, je crois que les gens trop partisans se trouvent peut-être, aujourd'hui, de l'autre côté de la table.
Quoi qu'il en soit, nous avons une question sérieuse à régler. Ils peuvent sourire du coin de l'œil et ils peuvent rire, mais je vais poser mes questions.
J'ai une première question à poser à M. Morrison et à Mme Drouin. Un rapport de 2019 du CPSNR disait:
Le SCRS a noté une augmentation des activités liées aux menaces indiennes, ciblant la diaspora indo-canadienne [et] les institutions gouvernementales.
Le même rapport du CPSNR indiquait également que:
Les agents consulaires indiens tiennent des « listes noires » des dissidents, contrôlent les visas de voyage pour l'Inde… et recrutent des sources communautaires qui « interagissent avec des députés et des candidats politiques pour réaliser les objectifs de l'Inde. »
Puisque chacune de vos organisations a vraisemblablement lu, à ce moment‑là, le rapport et avait connaissance de ces activités, qui se déroulaient depuis au moins 2019 et qui violaient clairement la norme des activités diplomatiques, pourquoi le gouvernement a‑t‑il attendu que les menaces s'intensifient jusqu'à la violence et le meurtre, pour expulser des agents consulaires?
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie encore une fois les témoins de comparaître devant nous. Nous avons un groupe de témoins assez impressionnant: le commissaire de la GRC, la conseillère à la sécurité nationale, le directeur du SCRS et deux sous-ministres de haut niveau des ministères de la Sécurité publique et d'Affaires mondiales. Je vous remercie de prendre le temps de venir ici, et je vous remercie de votre engagement envers la sécurité nationale du pays. Il ne fait aucun doute que vous travaillez d'arrache-pied pour préserver la sécurité des Canadiens.
Ultimement, bien sûr, vous relevez tous du d'une façon ou d'une autre. Il est à la tête du gouvernement. Vous vous rappelez sûrement, en 2015, lorsque M. Trudeau est devenu premier ministre pour la première fois, qu'un document nommé « Pour un gouvernement ouvert et responsable » a été publié. Je suis certaine que vous le connaissez tous déjà. Le document dit que, en sa qualité de chef du gouvernement, le premier ministre est investi de responsabilités particulières touchant la sécurité nationale, les relations fédérales-provinciales-territoriales et la conduite des affaires internationales.
Êtes-vous tous d'accord pour dire que le premier ministre est le chef de notre appareil de sécurité nationale? Est‑ce que quelqu'un est en désaccord?
Non.
Comme vous en avez convenu, la responsabilité ultime lui incombe.
Voici la situation actuelle: de multiples personnes — une personne a été confirmée par l'article du Washington Post et il y en a peut-être d'autres — ont été assassinées par des personnes ayant des liens directs avec le gouvernement de l'Inde. Nous faisons face à une situation extraordinaire. Il y a également la Juge Hogue, qui mène une enquête sur l'ingérence étrangère. L'épicentre de tout cela, c'est la Chine, qui a fait de l'ingérence dans de multiples élections et qui essaie de miner notre démocratie. La Russie diffuse massivement de la mésinformation. Nous avons des problèmes avec l'Iran. Nous avons des problèmes avec le Pakistan et d'autres pays. Le Canada, selon ma compréhension, n'a jamais été dans une situation aussi délicate — c'est le moins qu'on puisse dire — où de nombreux adversaires et d'autres personnes que nous pensions être amies du Canada, nous attaquent de tous les côtés.
Madame la sous-ministre, pourriez-vous nommer un autre moment où le Canada a fait face à autant de menaces d'acteurs étrangers sur son territoire? Cela s'est‑il produit, par exemple, dans les deux dernières générations?
:
Monsieur le président, je m'excuse de couper la conseillère à la sécurité nationale, mais ce n'était pas, spécifiquement, ma question. Je comprends les observations qu'elle a faites au sujet de mes observations, mais elle ne répondait pas directement à ma question.
Je vais laisser cela de côté pour l'instant, puisque mon collègue du NPD a dit qu'un rapport du CPSNR avait qualifié le Canada de milieu « permissif » permettant essentiellement aux adversaires étrangers — par exemple, des acteurs indiens — de venir au Canada, de causer des ravages, de commettre énormément de crimes, de semer le chaos et même de commettre des meurtres comme vous l'avez dit. Je m'inquiète du fait que la seule personne qui a la responsabilité ultime pour la sécurité nationale...
Des personnes sont mortes. Treize autres personnes étaient en danger. D'un point de vue objectif, la situation au Canada est peu glorieuse. Je comprends que vous avez fait des choses que nous n'allons jamais savoir, mais pour lesquelles nous devrions être reconnaissants. Je comprends certainement cela, mais le fait que des personnes sont tuées au Canada par un gouvernement étranger dépasse l'entendement. Je suis certaine que vous êtes d'accord.
De notre point de vue, en tant que parti de l'opposition officielle, qui aie la responsabilité de demander des comptes au gouvernement libéral, le fait que des personnes ont été assassinées et qu'il y ait des communautés dans le pays — la communauté sikhe, par exemple — qui se sentent extrêmement vulnérables sous le soi-disant leadership du actuel, représente un échec retentissant. Je crois que nous sommes ici parce qu'il a été incapable de préserver la sécurité nationale. Nous avons une enquête nationale sur l'ingérence étrangère parce que l'intégrité de notre démocratie a été fragilisée par les attaques de la Chine: le manque de confiance que cela a suscité dans l'ensemble du Canada est extrêmement inquiétant, et le message qui est envoyé aux autres adversaires est qu'ils peuvent prendre avantage de nos processus démocratiques et de notre nature confiante.
Je crois vraiment que cela doit être souligné, que les limites sont les limites du leadership du pays. Je tiens à souligner cela, car j'ai l'impression que des membres de l'opposition semblent obsédés par le , alors que j'aimerais que les libéraux mettent la même énergie à tenir leur propre responsable de son incapacité de prévenir les nombreux homicides commis au Canada par un gouvernement étranger, et de son incapacité de mettre fin à l'ingérence étrangère dans nos élections. C'est une situation assez frustrante qui s'est déroulée sous leurs yeux, eux qui faisaient partie du gouvernement libéral.
Pour conclure, je tiens à vous remercier encore une fois de vos efforts, et je suis très reconnaissante de ce que vous avez fait pour protéger les Canadiens et pour combler les lacunes créées par le manque de leadership de notre et son échec à le faire.