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Je déclare la séance ouverte.
Bonjour à tous. Bienvenue à la 103e réunion du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes. La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, conformément au Règlement.
Conformément à la motion adoptée le 7 novembre 2023, le Comité reprend son étude sur l'enquête et les révélations récentes sur Technologies du développement durable Canada.
Ce soir, nous accueillons M. Simon Kennedy, sous-ministre d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada. Merci de vous joindre à nous, monsieur Kennedy.
Nous recevons également M. Mitch Davies, sous-ministre adjoint principal, Fonds stratégique pour l'innovation, et M. Andrew Noseworthy, sous-ministre adjoint, Secteur de l'industrie.
Monsieur Kennedy, vous avez la parole pour cinq minutes.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Je remercie les membres du Comité de nous avoir invités à prendre la parole sur cette question.
Je sais que les membres connaissent la chronologie des événements présentée lors des réunions du comité ETHI, mais si vous me le permettez, il serait peut-être utile que je replace la discussion de ce soir dans son contexte. Je tiens à souligner que nous sommes déterminés à aller au fond des choses. Nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour rétablir la confiance envers la gestion des fonds publics de Technologies du développement durable Canada, ou TDDC.
[Français]
Comme vous l'avez entendu, en mars 2023, après avoir pris connaissance des allégations portées contre Technologies du développement durable Canada, ou TDDC, le ministre de l'Industrie a demandé au ministère d'engager le cabinet Raymond Chabot Grant Thornton pour mener un exercice d'établissement des faits. Il s'agissait d'allégations sérieuses qui appelaient la mise en place de mesures de diligence raisonnable et d'étapes ultérieures fondées sur une évaluation de tous les éléments de preuve.
[Traduction]
Cette enquête était fondée sur un examen de la documentation sur les politiques et les procédures organisationnelles ainsi que sur la gouvernance du programme, le processus d'approbation du projet et certaines entrevues. Les résultats de cet examen des faits n'ont révélé aucune preuve claire d'actes répréhensibles délibérés. Ils ont toutefois signalé des faiblesses dans la gouvernance et dans les contrôles ainsi que des cas où l'organisme n'avait pas entièrement respecté son accord de contribution. Pour cette raison, TDDC a reçu un plan d'action de la direction avec une date d'échéance fixée au 31 décembre.
[Français]
La réponse de la direction et le plan d'action sont complets et comprennent des mesures visant à garantir l'existence d'un processus clair et cohérent de déclaration et de documentation des conflits d'intérêts réels ou perçus, à rendre le processus d'approbation du projet pleinement conforme à l'accord de contribution, ainsi qu'à améliorer les protocoles de documentation et les contrôles internes.
TDDC doit également renforcer les exigences en matière de rapport, afin de permettre à Innovation, Sciences et Développement économique Canada, ou ISDE, d'exercer un contrôle accru sur la conformité continue.
[Traduction]
Le financement de TDDC a été suspendu jusqu'à ce que les mesures correctrices donnent des résultats satisfaisants.
Bien que l'intervention et le plan d'action de la direction portent spécifiquement sur les conclusions de l'enquête, le ministère a consulté le Bureau du vérificateur général, qui a décidé d'effectuer un audit de TDDC. Nous lui avons évidemment promis notre entière collaboration et nous avons hâte de lire son rapport final.
Monsieur le président, en menant cette enquête, le cabinet Raymond Chabot Grant Thornton n'a pas pu examiner directement les récentes allégations d'infraction des politiques de main-d'œuvre et d'emploi. Il n'a pas pu examiner les allégations de harcèlement et d'abus qu'auraient subis les plaignants de la part de la direction, car TDDC est considéré comme une société indépendante à gouvernance partagée. Toutefois, les résultats de l'enquête ont révélé certaines faiblesses. Après en avoir discuté, le conseil d'administration de TDDC a accepté de permettre à une tierce partie d'examiner ces allégations de plus près. À cet égard, le a demandé au ministère de la Justice de charger un cabinet d'avocats d'enquêter sur les allégations et de faire rapport de ses conclusions au ministre. Le cabinet McCarthy Tétrault a été nommé agent juridique.
Pour faciliter l'enquête du cabinet McCarthy Tétrault, TDDC a accepté de permettre aux employés actuels et passés de parler librement aux avocats sans craindre de violer les ententes de règlement et de non-divulgation applicables. Un rapport de cet examen des faits sera produit et préparé dans le respect des lois sur la protection des renseignements personnels.
[Français]
Mesdames et messieurs les membres du Comité, le gouvernement est en train d'achever son exercice de diligence raisonnable, ce qui constitue une étape importante et nécessaire. Des mesures de contrôle provisoires sont en place et le résultat final sera déterminé par la vérificatrice générale et l'examen des ressources humaines mené par McCarthy Tétrault.
[Traduction]
J'ai bon espoir que les mesures que nous prenons nous permettront de combler les lacunes organisationnelles et de rétablir la confiance envers notre gestion des fonds publics.
Je tiens à souligner que TDDC a joué un rôle clé en répondant aux besoins des entreprises canadiennes de technologies propres, et les statistiques le démontrent clairement. Jusqu'à présent, TDDC a investi dans plus de 500 entreprises, qui ont généré des revenus annuels de 3,1 milliards de dollars, créé 24 500 emplois et lancé 194 nouvelles technologies sur le marché. On estime que ces technologies ont réduit un volume d'émissions de gaz à effet de serre équivalant à celles d'environ sept millions d'autos.
À notre avis, le rôle de TDDC est crucial. Il est important de bien examiner les faits pour que notre organisme puisse regagner la confiance du public.
[Français]
Sur ce, monsieur le président, je suis prêt à répondre aux questions.
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TDDC est ce qu'on appelle techniquement une société à gouvernance partagée. Elle a un conseil d'administration dont la majorité des membres ne sont pas nommés par le gouverneur en conseil. Seule une minorité — 7 des 15 membres — est nommée par le gouverneur en conseil.
ISDE aide à désigner, par exemple, les membres qui pourraient être nommés par le gouverneur en conseil. À cet égard, le ministère collabore directement avec TDDC. De plus, le gouvernement a conclu un accord de contribution avec TDDC pour offrir certains programmes. Nous sommes les gardiens de cette entente. C'est comme un contrat, et nous gérons cette entente.
Nous devons veiller à ce que TDDC respecte cet accord de contribution. Depuis sa création, il y a environ 20 ans, cet organisme a conclu plusieurs accords de contribution. Lorsqu'un gouvernement fournit de nouveaux fonds, comme les gouvernements successifs l'ont fait au fil des ans, ISDE prépare la présentation au Conseil du Trésor. Nous effectuons le travail requis pour obtenir l'autorisation d'exécuter l'accord de contribution avec TDDC.
J'essaie de vous décrire cela avec précision. Nous collaborons de deux façons principales avec TDDC. La première est la gestion de l'accord de contribution, et la deuxième est la nomination, par le gouvernement, de membres au conseil d'administration.
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Nous avons reçu la plainte le 16 février. Elle était volumineuse, elle contenait beaucoup de détails. Il a fallu un certain temps pour bien l'étudier et pour déterminer les étapes à suivre.
En outre, après avoir consulté d'autres collègues du gouvernement, nous avons appris que le plaignant avait présenté cette dénonciation à d'autres organismes. Il y a au moins deux ou trois pistes à explorer dans le cadre d'une enquête, d'un examen des faits.
Par exemple, comme je l'ai mentionné, le gouverneur en conseil nomme quelques membres du conseil d'administration. Certaines des allégations concernaient le comportement du conseil et de sa présidente. Nous nous sommes demandé: en cas d'enquête, à qui serait-elle confiée? À ISDE ou au Bureau du Conseil privé? En fin de compte, le BCP gère le processus de nomination des fonctionnaires au conseil d'administration. Nous avons consulté certaines personnes au gouvernement pour déterminer quel organisme en serait le premier responsable. Nous en avons déduit qu'ISDE devrait prendre le relais et mener l'enquête.
Nous avons attribué un contrat au cabinet RCGT le 17 mars. Je dois dire que le avait déjà été informé bien avant cela. Entre le 16 février et la fin février, nous avons consulté des gens à l'interne et examiné la documentation. Le ministre a été informé au cours de la première semaine de mars. Nous avons ensuite attribué un contrat au cabinet RCGT le 17 mars en le chargeant de faire enquête.
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Merci, monsieur le président.
Sous toute réserve, je ne suis pas sûr que l'information qui a été donnée par mon collègue M. Perkins correspond à ce que nous avions entendu de la part des témoins de la semaine dernière. Je parle particulièrement de Mme Méthot. Je serais curieux de valider cela dans le procès-verbal, parce qu'il me semble que ce n'était pas de la même ampleur. Comme on parle de la réputation de certaines personnes, je pense que c'est quelque chose qu'il ne faut pas prendre à la légère.
Monsieur Kennedy, suite aux allégations et aux rapports d'enquêtes subséquents, TDDC a gelé l'approbation de nouveaux projets et refusera toute nouvelle demande jusqu'à ce que le processus de mise en œuvre soit complété. Selon les témoignages de la semaine dernière, il est indéniable que cette suspension a des conséquences graves sur les entreprises opérant dans le secteur des technologies durables ou écotechnologies.
Comment le gouvernement compte-t-il s'assurer que cette situation n'affectera pas de manière irréversible le développement et l'innovation du secteur des écotechnologies au Canada?
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Je vous remercie de la question.
Je n'ai pas le document devant moi, mais je comprends que le ministre a déjà fait quelques remarques à ce sujet. Nous sommes bien conscients du risque d'impact important sur les entreprises dans le domaine des écotechnologies, et nous nous penchons sur la question de savoir comment nous devons régler ce problème.
Le a indiqué clairement que nous allions examiner les résultats des enquêtes en cours et prendre les mesures nécessaires. Cependant, en même temps, nous ne voulons pas créer de problèmes pour les entreprises.
Nous sommes en train d'étudier les solutions maintenant. Je ne suis pas en mesure de discuter des décisions, cela appartient au gouvernement, mais j'aimerais qu'on note que nous sommes bien conscients de ce risque et que nous sommes en train d'examiner comment régler ça. Voilà mes commentaires pour le moment.
Nous les députés réagissons souvent à ce que nos électeurs nous disent. Je pense que votre ministère se préoccupe aussi de toutes ces allégations.
L'enquête du cabinet RCGT a permis de relever un certain nombre de cas où TDDC ne respectait pas son accord de contribution avec ISDE.
Je voudrais savoir si, en tirant une leçon de cette expérience et en cherchant à prévenir de nouveaux incidents, vous avez découvert des situations dans d'autres accords de contribution où ces problèmes pourraient se reproduire. Quelles leçons tirez-vous de tout cela?
Vous attendez les résultats d'un examen approfondi, évidemment, mais vous craignez sûrement de découvrir d'autres problèmes ailleurs. Que faites-vous pour prévenir cela? Vérifiez-vous si les autres accords de contribution sont conformes?
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Dans mon rôle de sous-ministre, c'est l'une des premières questions que j'ai posées et à laquelle on pense dans de telles situations.
Je vais mentionner deux ou trois choses. D'abord, en examinant attentivement les résultats du rapport du cabinet RCGT, le ministère a formulé une réponse et un plan d'action de la direction assez détaillés. Nous les avons remis à TDDC. Je dirais que cela fait partie de la réponse à votre question, en ce sens que nous avons examiné toutes les préoccupations soulevées par RCGT et nous nous sommes demandé comment l'organisme pourrait s'attaquer directement à ces problèmes. Faudra‑t‑il modifier certaines procédures? Par exemple, pouvons-nous renforcer le libellé de l'accord de contribution pour éviter certains de ces problèmes?
Je dirais qu'au sein de la constellation d'organismes qu'ISDE soutient, TDDC diffère par le fait qu'il s'agit d'une société à gouvernance partagée. Par exemple, pour bon nombre des organismes que nous appuyons, nous établissons des accords de contribution. Les fonds leur sont versés à des fins précises. TDDC est, en somme, un organisme indépendant du secteur privé. Son conseil d'administration prend la plupart des décisions. Il décide des manières de dépenser l'argent et de bien d'autres choses.
Les accords de contribution que nous avons conclus avec d'autres organismes ne sont pas toujours semblables à celui‑ci, mais nous envisageons d'y appliquer ces leçons de façon plus générale pour les améliorer. Nous avons déjà entrepris cette tâche.
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Nous prenons les conflits d'intérêts très au sérieux, surtout dans les organismes dirigés par un conseil d'administration ou par un conseil consultatif composé de spécialistes. Dans le cas de TDDC, la loi exige qu'une partie des membres du conseil d'administration soient des spécialistes.
Il y a toujours un risque, puisque le secteur des technologies propres est relativement petit. L'économie du Canada est aussi relativement petite par rapport à celle d'autres pays. Lorsqu'une partie du conseil d'administration se compose d'experts, on risque toujours de se heurter à des conflits d'intérêts. Voilà pourquoi la gestion des conflits est vraiment, vraiment essentielle. J'ai acquis beaucoup d'expérience à ce sujet, car j'ai occupé divers postes gouvernementaux. Il faut produire de la documentation, des procès-verbaux, effectuer une énumération minutieuse et bien d'autres choses.
Je dirais que le rapport du cabinet RCGT a démontré que nous devrons renforcer ce domaine. L'intervention et le plan d'action de la direction indiquent très clairement que nous devons en faire plus dans ce domaine, qui est très important. Nous prenons cette question très au sérieux auprès de tous les organismes avec lesquels nous traitons. Cet incident nous a rappelé l'importance de veiller à traiter ces enjeux très sérieusement. Je vous dirai franchement qu'il est important d'établir des processus, mais il est encore plus important, surtout dans le secteur public, de démontrer que ces processus sont solides, que les dossiers sont très bien tenus et que l'on maîtrise tous les enjeux.
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Si vous n'avez pas la date... Mon temps est très limité.
Le 15 mai de cette année, M. McConnachie aurait dit que très évidemment, lorsqu'on reçoit les résultats d'une enquête sur les faits, on ne peut pas s'endormir dessus. On ne peut pas prétendre qu'ils ne sont pas importants et les jeter aux oubliettes. On doit passer à l'action.
Vous étiez censé discuter avec le de la mauvaise gestion flagrante d'un fonds, de l'argent des contribuables, d'une valeur d'un milliard de dollars et des conflits d'intérêts commis en traitant cet argent. Cette conversation devait avoir lieu au début juin.
La réunion a‑t‑elle eu lieu en début juin?
Répondez par oui ou par non, s'il vous plaît.
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Il a dit que vous aviez reçu les conclusions et que le allait être mis au courant. Il y a ensuite ce long laps de temps sans que rien ne se passe. Il a aussi dit qu'une série de mesures allaient être prises. Il semblait bien au courant de la situation et a dit qu'un nouveau bureau allait être responsable de ce dossier. Un éminent Canadien serait mandaté de le superviser. Il a été très ouvert à ce sujet et dit que votre ministère croyait vraiment que les problèmes signalés par les lanceurs d'alerte étaient vrais.
Vous parlez de rétablir la confiance; aujourd'hui à la Chambre des communes, le a justement parlé de la nécessité de restaurer la confiance dans la gouvernance de cette organisation. Vous avez vanté le bon travail accompli par l'organisation. Si vous voulez que les Canadiens fassent confiance à cette organisation et à sa gouvernance, je pense qu'il faudrait rendre compte de la malversation de l'argent des contribuables.
Une enquête de la vérificatrice générale est en cours. Deux personnes nommées par le gouvernement sont visées par une enquête du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique. RCGT a relevé de multiples exemples de mauvaise gestion des fonds publics en dehors de l'accord de contribution.
Y a‑t‑il un plan pour recouvrer les fonds détournés? Veuillez répondre par oui ou par non.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur Kennedy, par votre présence ici et celle de vos collaborateurs, vous permettez au Comité d'avoir accès au sommet de la pyramide d'ISDE. Vous exercez d'importantes responsabilités au sein de votre ministère. Si je comprends bien, il y aura une période d'attente en raison de tous les examens en cours.
Pour vous personnellement, en tant que sous-ministre, quel est le but ultime de toute cette expérience? Voulez-vous regagner la confiance du public dans ce dossier? Souhaitez-vous que les règles et les processus soient mieux compris? Espérez-vous un raffermissement de la confiance dans les entreprises qui profitent de ces investissements? Quel est votre objectif ultime de toute cette expérience?
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Il est certain que l'un de mes objectifs fondamentaux, en tant que fonctionnaire du gouvernement, est d'essayer de répondre fidèlement aux demandes du , c'est‑à‑dire de comprendre les faits, d'aller au fond des choses, comme il l'a dit, de soutenir le gouvernement, puisque nous serons probablement appelés à donner suite aux conclusions de l'examen de McCarthy Tétrault et ensuite, de mettre en œuvre fidèlement tout changement à l'accord de contribution et de préparer la réponse et le plan d'action de la direction. Mon objectif est également de soutenir toute mesure qu'ISDE prendra pour donner suite aux conclusions de la vérificatrice générale dès qu'elles seront publiées, probablement plus tard au cours l'année.
Mes priorités seront de soutenir le gouvernement dans ses efforts pour aller au fond des choses et de prendre les mesures nécessaires pour rétablir la confiance du public.
D'une manière plus générale, je dirais simplement, en ma qualité de haut fonctionnaire, que TDDC a le soutien d'ISDE dans le cadre de cet accord de contribution. Certaines lacunes ont été signalées dans ce domaine. Comme ce dossier a une certaine visibilité publique, nous devons faire preuve de diligence pour rétablir la confiance du public dans la manière dont les fonds publics sont utilisés. De plus, si des lacunes sont décelées, elles seront corrigées rapidement. Je dirais que ce n'est pas plus compliqué que cela.
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Monsieur Perkins, comme vous le savez, nous en avons déjà discuté avec la greffière et nous devons nous interrompre à 21 heures pile. Si prenons plus de temps maintenant, nous en aurons moins pour la deuxième heure. Avant le début de la séance, nous avons dit, je pense, que nous allions consacrer plus de temps au témoin que nous entendrons durant la deuxième heure.
C'est vraiment au Comité qu'il revient de prendre cette décision, mais je vais m'en tenir à ce que nous avions convenu avant de commencer, monsieur Perkins, et nous allons suspendre la séance.
Je tiens à remercier M. Davies, M. Kennedy et M. Noseworthy de leur présence ce soir.
Chers collègues, nous allons maintenant suspendre la séance et nous reprendrons nos travaux à 20 heures pile.
Merci beaucoup. La séance est suspendue.
:
Chers collègues, il est 20 heures et nous reprenons nos travaux.
[Français]
Pour la prochaine partie, nous avons avec nous un témoin qui, à sa demande, préfère que nous ne le mentionnions pas par son nom. Je vous demande de vous conformer à cette demande.
Commençons sans plus tarder.
[Traduction]
Monsieur, je vous cède la parole. Nous vous remercions d'être parmi nous à cette heure tardive pour nous faire part de votre point de vue. Nous vous en sommes reconnaissants.
Vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes.
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Je vous remercie, monsieur le président et distingués membres du Comité.
D'entrée de jeu, je tiens à préciser mes intentions. Je ne suis pas ici pour attaquer TDDC, son personnel et les entreprises qu'il finance. TDDC joue un rôle essentiel au sein de l'économie canadienne. Je crois sincèrement en son mandat. Je peux témoigner personnellement de l'utilisation efficace de l'argent des contribuables par l'organisation pour créer des emplois et favoriser l'essor de nouvelles industries. Cette organisation doit survivre. Les employés qui y travaillent doivent être protégés, car il est essentiel de leur donner les moyens d'aider TDDC à s'acquitter de son mandat avec succès.
La seule façon de remettre TDDC sur les rails, c'est de discuter des faits et de faire la lumière sur ce qui s'est passé. La reddition de comptes est la pierre angulaire d'une société juste. C'est l'unique raison de ma présence ici. Le conseil d'administration de TDDC, les cadres supérieurs et la haute direction doivent être tenus responsables de leur mauvaise gestion flagrante des fonds publics et de la grave inconduite de l'équipe toxique de la haute direction qui a causé du tort à d'innombrables employés. Le gouvernement fédéral doit également être tenu responsable de son troublant manque de vigilance qui a fait que ces problèmes ont persisté ainsi que du camouflage éhonté de la vérité qui a eu lieu cet automne.
Au début de cette année, nous avons rédigé et présenté au Bureau du Conseil privé un dossier exhaustif de 345 pages, à la demande du Bureau du vérificateur général vers lequel nous nous sommes d'abord tournés. Ce dossier contenait des preuves de la mauvaise gestion flagrante dans tous les aspects des activités et de la gouvernance de TDDC, du non-respect de la Loi sur la Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable, ou TDDC, et de l'accord de contribution dans tous les volets de financement de l'organisation ainsi que de graves violations des politiques sur les conflits d'intérêts par les cadres supérieurs et le conseil d'administration.
Ce dossier comportait également des preuves de la culture d'entreprise toxique créée par la PDG, Leah Lawrence, et son amie et vice-présidente actuelle, Zoë Kolbuc, qui ont pu continuer leurs tactiques d'intimidation et de harcèlement à l'endroit des employés grâce à une équipe passive de la haute direction et à un conseil d'administration qui les protègent et dissimulent leurs abus.
Tous ces renseignements ont été examinés par le Bureau du Conseil privé, puis transmis à ISDE, qui a demandé à la firme RCGT de mener une enquête indépendante d'établissement des faits afin de valider l'information. Je vais vous donner un aperçu des conclusions.
Le fonds d'amorçage, le fonds pour l'écosystème et le fonds de croissance ont tous été jugés non conformes en raison de multiples violations de l'accord de contribution, d'écarts importants par rapport au processus de diligence raisonnable et de violations des règles sur les conflits d'intérêts par des membres du conseil d'administration et des cadres supérieurs. Cette constatation concerne près de 200 entreprises qui ont toutes reçu plus de 80 millions de dollars, ce qui constitue une malversation de l'argent des contribuables.
Les deux versements liés à la COVID‑19, en 2020 et 2021, ont été faits à l'ensemble du portefeuille d'entreprises et totalisaient près de 40 millions de dollars. Ces versements ont également été jugés non conformes, parce que l'utilisation de cet argent n'a pas fait l'objet d'un suivi efficace. Dans ce cas‑là, plusieurs membres du conseil d'administration se sont également mis en situation de conflit d'intérêts en approuvant près de quatre millions de dollars pour eux-mêmes — soit pour plus d'une douzaine d'entreprises dans lesquelles ils détiennent tous des droits de propriété ou y occupent des postes de direction.
Le rapport a également révélé que TDDC n'avait pas de processus ni de politiques en matière de ressources humaines. Certains problèmes n'ont jamais été signalés au conseil d'administration. Par un curieux hasard, les enquêteurs de RCGT n'ont pas réussi à trouver un seul dossier de plainte de toute l'histoire de l'organisation.
Il s'agit là d'un niveau renversant d'incompétence, d'ignorance délibérée et de corruption qui a amené TDDC à distribuer de façon inappropriée près de 150 millions de dollars provenant des poches des contribuables au cours des dernières années seulement, et à intimider des dizaines de personnes dont le seul tort a été de vouloir faire éclater la vérité.
L'organisation méritait d'être suspendue. Elle méritait aussi d'avoir un nouveau conseil d'administration, une nouvelle équipe de direction et de nouveaux cadres supérieurs, mais cela ne s'est jamais produit. Aucune des personnes responsables de ces problèmes n'a été inquiétée. Aucun membre de la direction ou du conseil d'administration n'a été licencié ou, encore moins, menacé de se faire passer les menottes. Toutes les personnes directement en cause ont même vu leur nom caviardé et protégé par ISDE dans le rapport RCGT.
Ce qui est encore plus choquant, c'est que malgré ces conclusions, ISDE laisse toujours ces personnes gérer l'argent des contribuables. Le ministère leur permet aussi de continuer à intimider des employés qui cherchent désespérément à se mettre sous la protection de leur propre gouvernement depuis plus d'un an. Cela ne peut pas durer.
Le conseil d'administration et la haute direction de TDDC persistent à dire qu'il s'agit seulement d'incohérences mineures, tandis qu'ISDE et le continuent d'affirmer qu'aucune constatation ne justifie la prise de mesures sérieuses. Ce sont des mensonges et je suis ici pour vous fournir des preuves documentées de tous les mensonges qui ne cessent d'être perpétués par TDDC et ISDE.
Je crois que mon témoignage peut vous donner un vaste aperçu des principaux problèmes existant à TDDC, car j'ai travaillé sur la diligence raisonnable financière et sur la conformité des projets à TDDC pendant la période clé de deux ans coïncidant avec les constatations les plus graves du rapport RCGT.
Je suis également parfaitement au courant de la façon dont ISDE a compris les problèmes ainsi que des directives claires établies par l'ensemble des fonctionnaires. Le et le Bureau du Conseil privé étaient au courant de ce dossier depuis plus longtemps qu'ils ne l'affirment publiquement. Il existe même des preuves bien documentées selon lesquelles ils ont communiqué avec tous les membres du personnel d'ISDE pour s'assurer que les notes d'information allaient être révisées avant qu'elles leur soient officiellement envoyées.
Tous ces faits sont étayés par des documents, des transcriptions et des enregistrements dont certains ont déjà été remis au Comité.
Je vous remercie et je suis prêt à répondre à toutes vos questions.
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Concernant la situation à ISDE, les représentants du ministère ont été ouverts et transparents au sujet de l'enquête dès le premier jour et ils ont fourni des comptes rendus hebdomadaires des progrès réalisés. Il n'y a eu aucune coercition à cet égard.
Voici les faits réels. Des représentants d'ISDE ont affirmé à maintes reprises que le BCP n'a jamais été mis au courant de la situation. C'est un mensonge. Nous avons la preuve que le sous-ministre et le sous-ministre adjoint ont eu des échanges constants avec le BCP, parce que l'enquête portait sur des personnes nommées par le gouverneur en conseil. Le a affirmé publiquement et à maintes reprises n'avoir été informé des conclusions que le 27 août, mais ce n'est absolument pas vrai. Il a menti au comité de l'éthique. Le sous-ministre a parlé au cabinet du ministre et au ministre lui-même à plusieurs reprises avant même la tenue des séances d'information, notamment au sujet des corrections qui avaient été faites au nom du cabinet du ministre.
La pure vérité, c'est que les fonctionnaires d'ISDE et du BCP s'entendaient pour dire qu'il fallait mettre fin au mandat de tous les membres du conseil d'administration et de l'équipe de direction de TDDC. C'est ce qu'on nous a expliqué à maintes reprises à la fin août et en septembre. La situation a changé seulement quand le cabinet du est intervenu. Il est le responsable ultime de TDDC. C'est lui qui doit dire la vérité sur la situation réelle.
À ce sujet, nous avons déjà déposé des extraits et des transcriptions des échanges du 1er et du 29 septembre qui fournissent tous les détails. S'il me reste du temps, j'aimerais en parler brièvement.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Bienvenue parmi nous ce soir, monsieur.
Ayant travaillé dans le secteur privé avant d'intégrer la fonction publique, ce qui est évidemment très important, et ayant travaillé au sein de grandes organisations qui s'occupent de ressources humaines — et la structure d'une organisation ayant une compétence en matière de ressources humaines —, je pense qu'il est très important de soulever un éventail de questions, allant de la manière dont l'organisation traite ses employés jusqu'aux processus internes en place pour gérer les questions financières. De toute évidence, vous avez soulevé certaines préoccupations.
Ma question porte d'abord sur le processus interne de TDDC que vous avez été en mesure de suivre.
Pouvez-vous nous en parler? Comment vos préoccupations ont-elles été traitées à l'interne et comment les avez-vous exprimées? Comment ont-elles été accueillies et ainsi de suite?
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Concernant les politiques en matière de ressources humaines, il y a eu un roulement massif du personnel, mais ce n'est pas tout. En l'espace de deux ans, tous les directeurs des ressources humaines, c'est‑à‑dire presque quatre, ont été congédiés ou ont pris un congé pour cause de stress. Même lorsque des plaintes étaient déposées, tous les employés chargés de les traiter, quand ils les prenaient au sérieux, étaient écartés ou congédiés. Ils ont tous dû signer une entente de confidentialité contenant des dispositions leur interdisant de s'adresser au gouvernement fédéral pour se plaindre des problèmes qui se posaient.
Concernant l'organisation dans son ensemble, la culture de la peur existe depuis longtemps. Même lorsque des employés ont eu la force et le courage de porter ces problèmes à l'attention de quelqu'un, ils ont été réduits au silence à cause de gens comme Leah Lawrence, Zoë Kolbuc et tous les membres de la haute direction.
Concernant les problèmes de financement, tous les problèmes constatés par RCGT avaient déjà été signalés à maintes reprises par des employés. Nous avons des courriels que nous pouvons vous faire parvenir dans lesquels nous et d'autres employés signalions des problèmes aux cadres et même à la PDG.
Je peux vous donner l'exemple de la demande de financement que le Centre Verschuren a fait parvenir au fonds pour l'écosystème. Ce fonds, que RCGT a jugé non conforme, a été approuvé par le conseil d'administration, sans consultation avec ISDE. Après l'approbation de ce fonds par le conseil d'administration, les trois premiers projets présentés avaient tous un lien avec des membres du conseil d'administration et posaient des conflits d'intérêts. La deuxième demande, en particulier, venait du Centre Verschuren. Des employés se sont plaints maintes fois aux cadres supérieurs, même par courriel, les informant qu'il y avait un conflit d'intérêts évident, mais ces plaintes sont restées sans suite. Nous avons été constamment ignorés jusqu'à ce les plaintes soient relayées jusqu'au conseil d'administration. C'est alors que d'autres membres du conseil ont enfin admis qu'il s'agissait d'une situation évidente de conflit d'intérêts.
Après le rejet de la demande, des cadres sont même allés jusqu'à forcer les employés à demander personnellement à d'autres organismes fédéraux ou provinciaux de financer le Centre Verschuren, en faisant valoir la réputation de TDDC.
Même lorsqu'un projet n'est pas approuvé, l'équipe de direction exerce toujours des pressions sur les employés pour faire en sorte que certaines choses aboutissent.
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Ma dernière question porte sur le fonctionnement de TDDC.
Au Canada, nous avons un écosystème technologique. Nous avons de solides niveaux de capitaux, mais pas autant que nos voisins du Sud, compte tenu du grand nombre d'investisseurs, de fonds de capitaux privés et tout le reste existant aux États‑Unis. À mon avis, TDDC s'acquitte d'un rôle précis et très important.
Seriez-vous d'accord pour dire que la mission de TDDC est de remplir son rôle en investissant, au moyen de subventions non remboursables, dans des entreprises canadiennes qui utilisent des technologies propres, qui ont un avenir très prometteur et qui pourraient devenir de grandes entités et créer elles-mêmes tout un écosystème?
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J'ai combien de temps pour répondre?
Le président: Vous avez environ 40 secondes.
Witness-Témoin 1: Je suis d'accord. Les questions dont nous parlons ici ne sont pas liées à ce mandat.
Je conviens que les subventions elles-mêmes ne posent pas de problème, et que la majorité des entreprises les méritent.
Un enjeu dont nous parlons ici dans le rapport de Raymond Chabot Grant Thornton, RCGT, était aussi relié au fonds d'expansion. En moyenne, Technologies du développement durable Canada, TDDC, fournit de 2 à 3 millions de dollars aux entreprises, mais dans le cadre du fonds d'expansion, c'est près de 20 millions de dollars par entreprise. Ce sont des entreprises qui sont entièrement commerciales; elles ont d'importants investissements de centaines de millions de dollars, et elles sont assez grandes pour acheter d'autres entreprises, mais, parce qu'elles ont des liens avec différents cadres ou membres de conseils d'administration, elles obtiennent ce financement.
:
C'est que je ne suis pas un employé mécontent. J'ai quitté TDDC de mon plein gré, et je suis l'un des rares employés qui n'ont pas été congédiés ou qui n'ont pas eu à signer d'entente de confidentialité.
Je peux également produire des preuves et des documents montrant que, même lorsque j'ai remis ma démission, on m'a offert une promotion et plus d'argent pour rester à TDDC, parce que pendant les deux années que j'ai passées là, j'ai connu d'excellents résultats. J'ai reçu tout cela par écrit, et je peux aussi vous le fournir.
J'ai également travaillé sur chacun de ces fonds, soit le fonds de démarrage, le fonds pour l'écosystème, le fonds pour les compétences et le fonds pour la technologie ordinaire.
Étant dans les finances, j'ai pu voir tous les aspects de ces projets et, chose encore plus importante, de l'application des règles financières. Nous savions exactement quelles étaient les règles parce que nous nous en occupions, et nous pouvions voir où étaient les écarts, s'ils étaient mineurs ou majeurs.
C'est pourquoi je crois être un témoin crédible. Je ne suis pas un employé mécontent, comme TDDC continue de dire des autres. Je ne suis pas visé par une entente de confidentialité, alors j'ai choisi de venir ici de mon plein gré, en assumant tous ces risques.
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L'essentiel devrait être la protection des employés. Le a déclaré qu'aussitôt le rapport terminé, l'enquête sur les ressources humaines a débuté. C'est un mensonge.
Dès le premier jour, nous avons commencé à signaler les problèmes de RH, qui sont l'aspect le plus important de l'enquête. Comment pourrait‑on mener une bonne enquête lorsque les employés ne sont pas protégés à l'intérieur? Ils connaissent les problèmes de culture depuis le premier jour, et ils en ont eu la preuve même en mai.
La chose la plus flagrante qui s'est produite pendant l'enquête d'ISDE est qu'en septembre, en plein milieu de l'enquête, un autre employé a été congédié par Leah Lawrence, et rien n'a été fait pour protéger cet employé. C'était pendant l'enquête d'ISDE. ISDE a refusé d'intervenir pour empêcher le congédiement.
Cet employé a été soumis à la même sorte d'entente de confidentialité que tous les autres, si bien qu'ISDE était au courant mais n'était pas disposé à lever le petit doigt pour protéger les employés, exactement comme aujourd'hui.
Même l'enquête McCarthy Tétrault qu'on a lancée a déjà rompu la confidentialité, parce que le nom de chaque personne qui s'inscrit est communiqué aux cadres de TDDC, et qu'il est possible de dresser la liste de toutes les personnes inscrites.
Toute l'enquête sur les RH est une farce. D'un autre côté, nous n'avons pas réclamé le congédiement de tout le monde. Nous avons demandé une enquête en bonne et due forme, et tout a changé en mai lorsque tout cela a été mis au jour. Tout au long de l'enquête, les règles du jeu n'ont pas cessé de changer, et le principal problème est que, comme personne n'était protégé, la situation a persisté.
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Ma foi, en ce qui concerne notre expérience de toute cette situation, je pense que c'est franchement embarrassant. Tout le processus de dénonciation nous prouve essentiellement qu'il existe un système à deux vitesses. Pour le citoyen canadien normal, il est absolument inutile de s'adresser à son gouvernement pour dénoncer des actes répréhensibles, en mettant en jeu sa carrière et sa réputation professionnelle.
Il est faux de dire que nous étions mécontents et qu'il y avait une certaine forme de coercition... Rien de tout cela n'est vrai, parce que nous étions patients. Comment l'établissement des faits peut‑il prendre sept mois? C'est tout à fait incorrect, et ils le savent, car cela a donné lieu à une enquête en juin, et ils ont continué de le faire. Je trouve dégoûtant qu'ils continuent de nier la vérité la plus élémentaire.
Aucun dénonciateur n'a jamais été protégé. À tous ceux qui se sont adressés à ISDE à ce sujet, on a dit catégoriquement qu'ils ne pourraient pas compter sur la protection du gouvernement fédéral s'il se trouvait qu'un retour de fouet des dirigeants ou des membres du conseil d'administration de TDDC frappe ces employés.
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Merci, monsieur le président.
Merci d'être ici aujourd'hui, monsieur.
Avant d'être élu, j'ai travaillé pour quelques entreprises différentes, et j'ai vu différentes cultures de gestion. Il y a certainement un large spectre. Parfois, la mauvaise gestion est imputable aux personnes qui sont là; et d'autres fois, elle peut être le résultat de la mauvaise culture générale ou de la piètre qualité de l'écosystème. L'absence de processus rigoureux peut permettre aux mauvaises personnes de prendre des mauvaises décisions, alors qu'avec de bons processus en place, il y a toujours moyen d'au moins voir à ce que ces personnes suivent les règles.
J'ai noté dans votre déclaration préliminaire que vous avez parlé de l'excellent travail accompli par TDDC. Vous pensez que TDDC est une excellente entreprise qui, moyennant certains changements, devrait pouvoir continuer à faire son très bon travail. Mais lorsqu'on parle de la culture de travail toxique qui existe là‑bas, je me demande si vous pourriez nous donner un peu plus de détails à ce sujet. J'essaie de comprendre. Est‑ce parce qu'on n'avait pas les bonnes personnes en place, ou que les processus n'étaient pas bons? La dégradation de la situation est-elle la conséquence d'une combinaison de deux facteurs: l'absence des bonnes personnes en place et le recours aux mauvais processus?
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Les deux, pour la raison que les incompétents bloquent la mise en place des processus.
Plusieurs employés des RH, tous congédiés depuis, ont essayé de mettre en place des processus. Ce qui se passe à TDDC, comme l'ont constaté les auteurs du rapport RCGT, c'est qu'il « n'existe pas de processus ». Il y en a déjà eu. Tout s'est dégradé depuis les débuts de Leah Lawrence. Ce fut lent, mais c'est ce qui est arrivé.
Vous savez quand je parle de cela, c'est un peu comme si on se débarrassait de tous les cadres, un par un. Ensuite, on commence à embaucher des amis personnels dans ces postes de direction, puis ces amis personnels commencent à embaucher d'autres amis personnels dans toutes ces organisations différentes et dans toutes ces différentes parties de l'organisation. Il a fallu beaucoup de temps pour en arriver là, mais c'est là que nous en sommes, parce que personne à TDDC, même au niveau du conseil d'administration, n'est jamais appelé à rendre des comptes.
Il y a une chose que je veux souligner en ce qui concerne le niveau scandaleux de corruption et les problèmes de gouvernance. Simon Kennedy est venu vous dire que seulement 7 des 15 membres du conseil d'administration sont nommés par décret du conseil. Les huit autres, dont plusieurs font partie des comités des ressources humaines de TDDC, sont nommés par ce qu'on appelle un « comité de membres » ou un « conseil de membres », comme le prévoit par ailleurs la loi de TDDC, selon laquelle l'intérêt public est représenté par ces comités de membres: un groupe de 15 personnes nomme les huit autres qui forment la majorité des membres du conseil.
Depuis quatre ou cinq ans, ce comité ne compte plus que deux personnes, dont l'avocat interne de TDDC, Ed Vandenberg. Au cours des cinq dernières années, deux personnes ont nommé la majorité des membres du conseil, selon un processus essentiellement illégal. Ce n'est pas seulement qu'il y a des problèmes de gouvernance à la base. C'est aussi au sommet, et les personnes que l'on recrute, même au conseil d'administration, sont des amis personnels de la présidente-directrice générale et d'autres personnes, parce qu'il n'y a pas un seul niveau de supervision dans tout cela.
Encore une fois, le problème a été porté à l'attention d'ISDE, qui l'a compris mais n'a pas voulu intervenir, même s'il s'agit clairement d'une personne ou d'un groupe de personnes qui enfreint la loi. En effet, comment peut‑on permettre à des gens qui ont été nommés illégalement au conseil d'administration de TDDC de prendre des décisions qui coûtent des millions de dollars aux contribuables chaque jour? C'est partout pareil.
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Il y a une foule de recommandations. Je pense que la principale, c'est que le gouvernement fédéral doit offrir un débouché pour permettre à tous ces employés d'entrer dans la fonction publique fédérale. C'est l'élément clé à concrétiser, parce que, même à ce jour, dans le cadre de cette enquête du côté des ressources humaines, il y a des gens qui ont été victimes d'abus pendant si longtemps qu'il leur est presque impossible de faire confiance à la situation, surtout quand on pense à la façon dont ISDE a tout bâclé à la fin.
Le capital de confiance a fondu. Prenons l'enquête McCarthy Tétrault; personne ne croit vraiment qu'elle donnera quoi que ce soit, mais il n'y a pas d'autre choix. Ils vont essayer de voir si cela mène quelque part, mais ce qu'il faut vraiment, c'est ce que Brian Masse a dit: le gouvernement fédéral doit donner aux employés la possibilité de quitter TDDC et d'aller voir ailleurs. C'est là qu'ils peuvent fournir tous les témoignages requis. C'est la seule façon d'aller de l'avant. En effet, personne ne se sent en sécurité, même à ce jour, parce que la bureaucratie d'ISDE et le ne veulent pas leur donner cette sécurité.
C'est le gouvernement qui détient le pouvoir ultime dans cette situation. TDDC est financé par les contribuables, à 100 % par ISDE. Comment peut‑il dire qu'il n'avait pas de contrôle sur les RH? Comment peut‑il dire qu'il n'a pas la capacité de protéger les employés? C'est cinglé.
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Pour ce qui est de tous les problèmes au sein de l'organisation, ils existent depuis des années, alors cela pourrait même remonter à 2017 ou avant.
En décembre 2022, les enjeux et la façon dont les plaintes ont été traitées ont d'abord été présentés au Bureau du vérificateur général, qui, après examen, a demandé d'envoyer l'information au BCP. Et c'est à ce moment‑là que toute l'information a été regroupée dans la présentation de 345 diapositives, qui, encore une fois, couvrait tous les documents et toutes les références pour former un dossier complet — et pas seulement une liste d'allégations.
Par la suite, le BCP l'a transmis à ISDE, qui a alors ouvert son enquête en mars.
En mai, on a dit à tout le monde que les conclusions étaient tirées. Tous les problèmes qu'ISDE avait invoqués pour suspendre TDDC en octobre étaient donc fondés depuis mai. Après plus de quatre mois de temporisation, le cabinet du est intervenu, parce qu'une fois qu'on lui en a parlé, il nous a indiqué que « C'est là toutes les enquêtes subséquentes. » Il s'agissait alors d'un exercice d'établissement des faits, dont le résultat a été un examen de six semaines qui, s'il y avait eu quelque chose à prouver, aurait déclenché les enquêtes nécessaires, par application régulière de la loi. Cela aurait provoqué l'intervention du Bureau du vérificateur général, l'examen de tous les enjeux de ressources humaines, avec un examen d'ISDE, à cause de problèmes majeurs relevés dans l'accord de conformité du côté des contributions.
Tout cela était fondé, nous a‑t‑on dit, et il était prévu de lancer l'enquête. En juin, après avoir entamé certaines de ces conversations avec le cabinet du , on a soudainement dit qu'il fallait plus de temps pour vérifier les faits.
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Non, ils n'ont pas dit cela aux employés. Encore une fois, aucune des informations relatives à l'enquête n'a été communiquée directement aux employés de TDDC, malgré la demande d'ISDE, qui l'aurait voulu. Les dirigeants de TDDC ont continuellement caché aux employés l'information sur le déroulement et même le lancement de l'enquête, jusqu'à ce que les médias commencent à en parler.
Pour revenir à la chronologie, en juin et en juillet, on a dit avoir conclu qu'on ne pouvait même pas faire confiance aux cadres de TDDC pour ces documents, parce que RCGT et ISDE constataient que les documents étaient manipulés et modifiés. Il y avait un certain degré de méfiance au sein d'ISDE, même à l'égard de ce que TDDC lui communiquait. C'est pourquoi, en juillet, on nous a demandé de fournir d'autres documents qu'on n'arrivait pas à obtenir de TDDC.
En août, tout a changé. Cette demande a alors été annulée. On a dit qu'on allait congédier tous les cadres et tous les membres du conseil d'administration. C'est ISDE qui a commencé à discuter de la façon dont il allait congédier tout le monde. Puis, en octobre, on a soudainement dit qu'on ne ferait rien de tout cela.
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ISDE lui-même a été informé du processus d'Osler lorsqu'il a lancé l'enquête initiale. Une plainte a été déposée auprès du membre du conseil, Stephen Kukucha à la fin de janvier. Il a déclaré qu'on avait demandé de l'information aux dénonciateurs, qui étaient des employés internes, mais qu'on n'avait jamais rien reçu. Nous sommes prêts à fournir tous les courriels concernant cet incident.
Le choix s'est donc reporté sur Osler, qui est clairement un cabinet en conflit dont TDDC se sert constamment pour ses ententes de confidentialité. Certaines des plaintes les plus importantes qui ont été déposées réclamaient l'exemption des ententes de confidentialité: comment peut‑on enquêter sur une situation si les personnes concernées ne sont même pas interrogées?
Il y a eu des échanges entre les employés et Osler. Une fois qu'on a décidé qu'Osler allait faire enquête, on a mentionné qu'on allait utiliser la politique d'éthique de TDDC comme cadre de référence pour l'enquête. Cependant, lorsque les employés ont signalé que cette politique exige la divulgation et la transparence de l'enquête et des résultats, Osler a tout de suite changé d'idée. Tout à coup, il a dit que cela ne relevait pas de la politique d'éthique en place, comme il l'avait lui-même dit aux employés.
Il apparaissait alors clairement qu'il s'agissait d'une opération de camouflage. Depuis le lancement de son enquête en mars et jusqu'à maintenant, ISDE n'a jamais changé d'avis. Toute cette affaire concernant le recours aux services d'Osler par TDDC vise clairement à détourner l'attention et à cacher la vérité.
Je sais qu'Osler a également fourni les résultats de l'enquête. Aucune de ces enquêtes n'a été menée comme il faut et aucun de ces enjeux n'a été décortiqué. Ce qu'il dit est complètement faux. Encore une fois, nous pouvons fournir tous ces documents. On ne veut même pas en parler à ISDE, qui était quand même au courant de tous ces échanges de courriels.
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Merci, monsieur le président.
Une bonne partie de l'attention que j'ai observée jusqu'à maintenant à cette réunion a porté sur ce que l'exécutif du gouvernement va faire. Autrement dit, nous venons d'entendre le sous-ministre et ses adjoints nous dire qu'ils vont faire à l'interne, mais tout est l'affaire de l'exécutif. Ma question porte davantage sur ce que le pouvoir législatif peut faire. Vous en voyez une partie en ce moment même dans un comité parlementaire qui se penche sur la question et publie un rapport avec ses recommandations.
Vous avez décrit en détail tous les problèmes au fur et à mesure que vous les avez vécus, et vous êtes en contact avec d'autres employés. En ce qui concerne l'autorisation législative que détient TDDC par l'entremise de la Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable, pensez-vous que le pouvoir législatif a un autre rôle à jouer en matière de renforcement des balises législatives?
Avez-vous déjà songé à cette partie de la question, et auriez-vous des recommandations à soumettre au Comité?
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Lorsque nous parlons de la Loi sur TDDC, l'un des problèmes que nous avons constatés, c'est que personne ne semble veiller à la conformité des organisations à cet égard. La loi existe, et quand je parle des membres de comités qui étaient illégalement nommés au conseil, nous ne savions toujours pas qui relevait la surveillance à cet aspect. Rien n'est fait de ce côté pour l'instant, même s'il s'agit d'un grave problème de gouvernance à TDDC.
Il existe déjà des règles évidentes pour, disons, les membres du conseil. Je peux vous lire la politique du gouvernement fédéral en matière d'éthique:
Les titulaires nommés par le gouverneur en conseil doivent s'acquitter de leurs fonctions dans l'intérêt public. Leur conduite personnelle et professionnelle doit être irréprochable.
Je pense que personne ici ne peut vraiment dire que la conduite du conseil d'administration de TDDC était irréprochable. De plus, il y a d'autres dispositions de l'accord qui précisent:
Il doit exercer ses fonctions officielles et organiser ses affaires personnelles d'une manière si irréprochable qu'elle puisse résister à l'examen public le plus minutieux; pour s'acquitter de cette obligation, il ne lui suffit pas simplement d’observer la loi.
C'est l'autre élément. Beaucoup de membres du conseil et de cadres de direction viennent vous dire qu'ils ont tout fait correctement, parce qu'ils ont parlé à leurs propres avocats. Ce n'est pas suffisant lorsqu'il s'agit de l'argent des contribuables. Le libellé de nombreuses lois et politiques du gouvernement fédéral est clair et il montre clairement que tout ce qui a été fait jusqu'à maintenant par les cadres de direction et les membres du conseil d'administration ne respecte même pas ce seuil minimal. Je pense que la question est la suivante: même s'il y a d'autres formulations, qui va effectivement en assurer l'application? Il n'y a aucune mesure d'application de la loi dans tout cela.
Si ISDE avait réellement fait appliquer son accord de contribution, rien de tout cela ne se serait produit. C'est là que le bât blesse. Vous pouvez avoir autant d'accords que vous le voulez, si personne ne fait respecter quoi que ce soit et personne ne supervise les activités quotidiennes... Il y avait même une personne au sein du conseil qui ne respectait pas les règles, mais cette personne était de toute évidence incompétente et ne comprenait pas ce qui se passait.
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L'une des choses que le Comité doit comprendre au sujet des paiements liés à la COVID‑19, c'est qu'il ne s'agissait pas seulement du fait que les règles sur les conflits d'intérêts n'étaient pas respectées. Ces deux paiements ont été effectués dans les jours suivant la fin de l'exercice 2020‑2021, et les deux fois le montant payé a eu une incidence importante sur les primes que les cadres de direction ont reçues. Lorsque, d'un côté, les membres du conseil d'administration obtenaient toutes leurs entreprises et toute l'information... Ils obtenaient tout ce financement d'un côté, et en approuvant ce financement, par lequel ils enfreignaient les règles sur les conflits d'intérêts, ils donnaient également des primes à tous les cadres, qui étaient ceux qui présentaient cette information aux membres du conseil.
De plus, l'autre problème, c'est que pour le deuxième paiement lié à la COVID‑19, il n'était tout simplement pas relié à la COVID‑19. Les membres du conseil d'administration de TDDC, à l'automne 2020, avaient déjà convenu qu'ils n'allaient pas faire de paiements généraux, comme ils l'avaient déjà fait. C'était dans la présentation au conseil, que nous pouvons déposer. TDDC a même fait une enquête complète de tout le portefeuille des entreprises de TDDC, qui a révélé qu'en moyenne, chaque entreprise avait plus de 14 mois de liquidités devant elle, ce qui était amplement suffisant. Aucune n'avait donc besoin de financement. Au lieu de cela, les membres du conseil d'administration ont reçu une demande pour autre paiement lié à la COVID‑19, qu'ils ont acceptée. En l'occurrence, les membres du conseil d'administration viennent ici et disent que les entreprises étaient désespérées, qu'elles en avaient besoin et que c'était une exigence. C'est absolument faux. Les entreprises n'en avaient pas besoin, et les cadres ont choisi de le donner à chacune.
Je comprends. Merci beaucoup.
Voilà, c'était mes questions très simples, monsieur.
C'est tout le temps dont nous disposons.
Je vous remercie, chers collègues. La séance s'est bien déroulée.
[Français]
Nous avons respecté le temps et le budget alloués.
Monsieur le témoin, je vous remercie.
Chers collègues, nous nous revoyons demain.
Sans plus tarder, je remercie les interprètes, l'analyste, notre greffière et tout le personnel de soutien.
La séance est levée.