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Je déclare la réunion ouverte.
Bonjour, chers collègues. Bon mercredi.
Je vous souhaite la bienvenue à la 124e réunion du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Conformément au Règlement et à l'ordre de renvoi du lundi 24 avril 2023, le Comité reprend l'étude du projet de loi . Aujourd'hui, nous allons poursuivre l'étude article par article du projet de loi.
Avant de commencer, j'aimerais rappeler à tous les députés et aux autres participants à la réunion dans la salle les importantes mesures préventives suivantes.
Pour prévenir les incidents acoustiques perturbateurs et potentiellement dangereux et susceptibles de causer des blessures, nous rappelons à tous les participants de toujours garder leur oreillette éloignée de tous les microphones. Comme l'a indiqué le communiqué du Président à tous les députés le 29 avril, les mesures suivantes ont été prises pour aider à prévenir les incidents acoustiques. Toutes les oreillettes ont été remplacées par un modèle qui réduit considérablement la probabilité d'un incident acoustique. Par défaut, toutes les oreillettes inutilisées au début d'une réunion seront débranchées. Lorsque votre oreillette n'est pas utilisée, nous vous demandons de la placer, face vers le bas, au milieu de l'autocollant sur la table. Nous vous demandons aussi de consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices sur la prévention des incidents acoustiques. Comme vous pouvez le constater, la disposition de la salle a été modifiée pour prévenir ce type d'incident. Ces mesures sont en place pour que nous puissions exercer nos activités sans interruption et pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris les interprètes. Je vous remercie à l'avance de votre collaboration.
Sans plus tarder, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins, qui proviennet du ministère de l'Industrie. Nous recevons M. Samir Chhabra, directeur général des politiques-cadres du marché, et Mme Runa Angus, directrice principale, Secteur des stratégies et politiques d'innovation. Madame et monsieur, je vous remercie d'avoir accepté de vous joindre à nous.
(Article 2)
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être revenus. Je suis certain que la réunion sera très fructueuse, même s'il manque notre habitué, M. Schaan. Je suis sûr que nous nous débrouillerons.
Je dirais, aux fins du compte rendu, qu'il y a eu au cours de la dernière semaine beaucoup de discussions concernant l'amendement CPC‑7 et le sous-amendement de M. Garon, et aussi sur ce que nous pourrions faire pour trouver une solution qui convient à tout le monde. Je pense que nous devons trouver un compromis. De notre point de vue, il faudrait appuyer le sous-amendement de M. Garon à l'amendement CPC‑7. Si nous trouvons une issue favorable, je proposerais ensuite un nouveau sous-amendement qui, je crois, ajoutera des détails, affinera la motion et fera en sorte qu'elle fonctionne pour tout le monde.
Oui, je suis d'accord pour dire qu'il y a eu d'excellentes discussions, alors j'espère qu'au point où nous en sommes... Je pense que ce que M. Perkins a rédigé et distribué serait une issue. Je sais que nous étudions le sous-amendement de M. Garon.
Je pense que nous avons convenu que les discussions avant la réunion du Comité étaient... Du point de vue de la procédure, je ne suis pas certain de la meilleure voie à suivre, mais peut-être pourrions-nous voter en faveur du sous-amendement de M. Garon, et ensuite, d'après ce que j'ai compris, M. Perkins va proposer un sous-amendement à cela.
Je dirais seulement que nous allons évidemment devoir faire un petit acte de foi, quant à la façon dont les choses vont se faire, mais dans la mesure où les membres du Comité s'entendent clairement pour dire que nous allons procéder ainsi, nous finirons avec le libellé que M. Perkins a distribué, où on a ajouté « lesquels peuvent comprendre ». Je pense que c'est un détail très important. D'après les témoignages des fonctionnaires, ces mots ont une grande incidence sur la façon dont la loi sera interprétée. Je pense que c'est important que ce soit l'issue à laquelle nous arrivions.
Pourvu que nous convenions tous de l'issue, je ne m'oppose pas à ce que nous poursuivions et à ce que nous votions en faveur du sous-amendement de M. Garon, et ensuite que nous votions en faveur des modifications proposées par M. Perkins.
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur Turnbull.
Je suis content de voir tout le travail de collaboration que les membres du Comité ont accompli durant cette précédente semaine de relâche.
Je ne vois plus d'autres intervenants. Y a‑t‑il consensus pour adopter le sous-amendement de M. Garon, étant entendu que l'amendement fera l'objet d'un sous-amendement?
(Le sous-amendement est adopté.)
Le président: Merci beaucoup, chers collègues.
Nous revenons à l'amendement CPC‑7, tel que modifié.
La parole va à M. Perkins.
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Merci, monsieur le président, et merci, chers collègues.
Pour donner suite à ce que M. Turnbull et moi-même venons de dire — et je vous remercie aussi, M. Garon, de votre amendement —, j'aimerais proposer un autre sous-amendement à l'amendement CPC‑7, qui avait été proposé, à l'origine, par M. Vis.
Le sous-amendement a été distribué. Je vais vous le lire dans un instant, avec les mots supplémentaires que nous venons d'adopter.
À titre de rappel, pour les personnes qui nous regardent, nous étudions présentement les définitions dans le projet de loi, et nous ajoutons la définition de l'expression « de nature sensible ».
Je cite:
De nature sensible, s’agissant de renseignements, vise notamment tout renseignement au sujet d’un individu à l’égard desquels l’individu a généralement une attente élevée en matière de protection de la vie privée,
Puis, nous ajoutons les mots « lesquels peuvent comprendre, », ce qui donne « lesquels peuvent comprendre, qui comprend notamment et sans limite », puis tout ce qui figure déjà dans la motion, les points a), b), c), d) et e), et au point f), en anglais, on remplace le mot « security » par « social insurance », parce que ce n'est pas une expression canadienne; donc, on substitue « insurance » à « security ». Encore en anglais, on élimine le mot « or » au point g), et dans les deux langues, on ajoute le nouveau point i) après le point h), comme nous en avons discuté, je crois, lors de la dernière réunion:
i) des données de géolocalisation révélant l’endroit où il se trouve. (sensitive)
Je ne changerai rien à ce qui a été proposé.
J'ajouterais que, durant la semaine de relâche, nous avons consulté l'actuel commissaire à la protection de vie privée ainsi que le commissaire précédent, et tous les deux acceptaient ces modifications.
Il manque un « ou » après le point h). D'ailleurs, j'en parlais avec les conseillers législatifs.
Quant au point i) « des données de géolocalisation révélant l'endroit où il se trouve », il est un peu bizarre aussi.
Monsieur Garon, je vous regarde parce que le texte anglais dit ceci:
[Traduction]
« geolocation data revealing an individual's location »
[Français]
La traduction est la suivante: « les données de géolocalisation révélant l'endroit où il se trouve ». Devrait-on plutôt écrire « où un individu se trouve » ou « où l'individu se trouve »?
Une voix: Non, c'est bien ainsi.
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Je crois comprendre que les modifications proposées dans ce sous-amendement modifieraient ainsi la définition de l'information de nature sensible:
De nature sensible, s’agissant de renseignements, vise notamment tout renseignement au sujet d’un individu à l’égard desquels l’individu a généralement une attente élevée en matière de protection de la vie privée, lesquels peuvent comprendre, notamment et sans limite:
Ensuite vient la liste, du point a) au point i).
D'après notre interprétation, cela fournit une orientation au Commissariat à la protection de la vie privée, le CPVP, quant à l'information qui serait généralement considérée comme étant de nature sensible, tout en laissant au commissaire à la protection de la vie privée la possibilité, selon le contexte, de statuer que de l'information est de nature sensible, dans un contexte que le Comité n'a peut-être pas prévu dans la liste.
Cela laisse aussi la possibilité que certaines de ces catégories d'information... par exemple, en conformité avec l'arrêt de la Cour suprême que nous avons expliqué au Comité il y a quelques semaines, Banque Royale du Canada c. Trang, le CPVP ou les cours auraient la possibilité de réaliser une analyse contextuelle et de conclure que, dans certains cas — probablement des cas rares —, des données financières, par exemple, ne seraient pas considérées comme étant de nature sensible.
Voilà donc la conséquence ultime, d'après notre interprétation.
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D'accord. Merci beaucoup, chers collègues.
Pour ce qui est du sous-amendement proposé par M. Perkins, y a‑t‑il le consensus pour l'adopter?
(Le sous-amendement est adopté.)
Le président: Nous revenons à l'amendement CPC‑7, tel que modifié.
(L'amendement modifié est adopté par 11 voix contre 0. [Voir le procès-verbal])
Le président: Merci, chers collègues et félicitations.
L'amendement NDP‑6 est sur ma liste, mais je ne crois pas que M. Masse va le proposer.
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Merci, monsieur le président.
L'expression « incidence importante » est utilisée à plusieurs endroits dans la Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs, et nous sommes préoccupés du fait qu'il n'y a pas, dans la LPVPC de définition explicite de ce que cela veut dire. Compte tenu de l'importance de cette expression dans tout le projet de loi, cela constitue un grave problème, advenant des interprétations et des opinions conflictuelles du sens de cette expression entre les parties prenantes et les entreprises.
L'expression « incidence importante » apparaît présentement deux fois dans le projet de loi. À l'alinéa 62(2)c) proposé, il est écrit, sous « Politiques et pratiques », à la rubrique « Ouverture et transparence », que l'organisation rend accessible:
une explication générale de l’usage qu’elle fait des systèmes décisionnels automatisés pour faire des prédictions [...] qui pourraient avoir une incidence importante sur les individus concernés
Il est aussi écrit que cet article concerne la façon dont une organisation « rend [...] accessibles [toutes] les politiques et les pratiques qu’elle a mises en place afin de respecter les obligations qui lui incombent ».
Ensuite, au paragraphe 63(3) proposé, au sujet de l'accès aux renseignements personnels et concernant l'utilisation de systèmes décisionnels automatisés, on trouve une autre mention: « Si l’organisation a utilisé un système décisionnel automatisé [...] concernant l’individu et que [cela] pourrait avoir une incidence importante pour lui, elle lui en fournit, à sa demande, une explication ». Cet article concerne l'obligation pour une organisation, sur demande, d'informer pleinement une personne de toute utilisation de ses renseignements personnels, en plus de lui rendre cette information accessible.
Tout comme l'expression « système décisionnel automatisé » est définie dans la LPVPC de manière à expliquer et décrire exhaustivement l'utilisation de certaines technologies, l'incidence de ces technologies devrait être définie explicitement dans le projet de loi, afin d'éliminer toute ambiguïté et de protéger les Canadiens. Sans la définition de l'expression « incidence importante », la conformité et la protection en matière de renseignements personnels seraient menacées. Nous avons utilisé la formulation « critères prévus par règlement » ce qui, je crois, laisse une certaine souplesse aux politiques et peut-être même à la réglementation qui sera élaborée après l'adoption du projet de loi à cet égard, mais j'aimerais savoir ce que pensent les fonctionnaires.
Cela nous amène à l'amendement CPC‑9.
Avant de céder la parole à M. Williams, je dois vous informer que, si l'amendement CPC‑9 est adopté, les amendements NDP‑32, NDP‑38 et CPC‑70 ne pourront pas être proposés, en raison d'un conflit de lignes; lL'amendement NDP‑37 ne pourrait pas non plus être proposé, en raison d'un conflit de lignes, ainsi que pour des raisons de cohérence.
Monsieur Williams, vous avez la parole.
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Merci, monsieur le président.
Comme vous l'avez dit, cet amendement a une portée assez grande. Il modifie un grand nombre des articles et des sous-articles proposés dans la LPVPC. Le but de l'amendement est de transférer le pouvoir d'imposer des sanctions pécuniaires, lorsqu'il y a contravention à la LPVPC, du tribunal à la protection de la vie privée au commissaire à la protection de la vie privée, à qui il devrait revenir, de l'avis du Parti conservateur, et à qui il aurait toujours dû revenir.
Nous croyons que ce tribunal est tout à fait inutile et contre-productif. Il fera du Canada un acteur marginal sur la scène internationale, en comparaison des pays comparables. Il s'agit d'un fardeau administratif inutile qui ne fera que ralentir et diluer le règlement des atteintes à la vie privée. Cela va également nuire à la capacité des commissaires fédéral et provinciaux à la protection de la vie privée de collaborer dans le cadre d'enquêtes conjointes, mais le plus préoccupant est le fait que les membres de ce tribunal, puisqu'il fera partie d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada, seront nommés par favoritisme par le ministre; il s'agit d'une tentative de miner ou d'entraver l'indépendance et la compétence d'un agent indépendant du Parlement.
Le tribunal qui est proposé fera du Canada un acteur marginal sur la scène internationale. Aucun autre pays comparable — aucun pays de l'Union européenne, ni les États-Unis, ni le Royaume-Uni, ni l'Australie, ni aucun autre pays du G7 — ne s'est doté d'un tribunal à la protection de la vie privée. Chacun de ces pays utilise le même système. Un organisme de réglementation de la protection de la vie privée mène une enquête et impose des sanctions pécuniaires aux contrevenants. Dans l'éventualité où le contrevenant s'oppose aux résultats, il peut entamer un litige contre l'organisme de réglementation devant une cour. Nous savons cela, parce que c'est de cette façon que fonctionne actuellement notre régime d'application de la loi en matière de protection de la vie privée. Le commissaire à la protection de la vie privée, la Loi sur la protection des renseignements personnels et des documents électroniques — la LPRPDE — et la Loi sur la protection des renseignements personnels n'ont pas un tribunal, et pourtant, le processus d'application de la loi fonctionne très bien.
Selon le Commissariat à la protection de la vie privée, le processus a fonctionné ainsi pendant plus de 40 ans, et il n'y a eu qu'un cas durant ces 40 années où les cours ont modifié une décision du Commissariat. Il n'y a aucune raison de réinventer la roue en ajoutant un organisme quasi judiciaire dans le processus d'application de la loi, en cas de contravention. Si on essaie de réinventer la roue avec ce tribunal, le résultat sera que nous retarderons la justice pour les Canadiens dont le droit fondamental à la vie privée a été violé. Justice différée, justice refusée.
Quand je pense aux tribunaux quasi judiciaires d'ISDE, je pense bien sûr immédiatement au Tribunal de la concurrence, tout aussi inutile. Dans ses presque 40 années d'existence, ce tribunal n'a jamais, même pas une seule fois, empêché une fusion dont le Bureau de la concurrence avait démontré le caractère anticoncurrentiel. Ce tribunal prend en moyenne plus d'un an pour rendre une décision, sauf — et c'est bien surprenant — lorsqu'il s'est agi de la décision Rogers-Shaw. De toute façon, les décisions peuvent être portées en appel devant les cours.
Le tribunal fera aussi en sorte de différer le règlement efficient des affaires. Je vais laisser les propos du commissaire à la protection de la vie privée parler d'eux-mêmes. Voici ce qu'il a dit:
Quatrièmement, et c'est sans doute l'aspect le plus important, le fait que le Commissariat ne serait pas autorisé à imposer des pénalités administratives, et que ses ordonnances feraient l'objet d'un appel administratif avant le contrôle judiciaire normalement applicable, aurait pour effet de réduire les incitatifs qu'ont les organisations dans le modèle en place ailleurs dans le monde à s'entendre rapidement avec l'organisme de réglementation. Ainsi, dans toutes les autres juridictions, où l'autorité de protection des données est la dernière autorité administrative et où elle peut imposer des sanctions pécuniaires, les organisations ont intérêt à trouver un terrain d'entente lorsqu'il semble probable qu'une enquête en cours révélera une contravention et qu'une pénalité sera imposée. Malheureusement, la création du tribunal inciterait probablement les organisations à ne pas chercher un terrain d'entente, mais plutôt à emprunter les voies d'appel, ce qui priverait les consommateurs de recours rapides et efficaces. Ultimement, comme le suggère le vieil adage: justice différée, justice refusée.
L'ajout du tribunal dans ce projet de loi, comme l'affirment les commissaires fédéral et provinciaux à la protection de la vie privée, minera également les processus d'enquête conjoints entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Ce processus va aussi diminuer l'interopérabilité entre les provinces, et le gouvernement fédéral pourrait éventuellement faire du tribunal à la protection de la vie privée une obligation pour la conformité avec la loi fédérale.
Nous avons vu plusieurs exemples, récemment, de commissaires fédéral et provinciaux à la protection de la vie privée qui ont collaboré pour protéger les droits fondamentaux des Canadiens à la vie privée.
En 2021, le commissaire fédéral et ceux de la Colombie-Britannique, de l'Alberta et du Québec ont tous travaillé ensemble pour enquêter sur Clairview AI et l'empêcher de violer les droits des Canadiens à la vie privée, ce que cette intelligence artificielle faisait en ratissant illégalement des images sur les sites de médias sociaux pour constituer une base de données de reconnaissance faciale. En 2022, les commissaires du gouvernement fédéral, de l'Alberta, de la Colombie-Britannique et du Québec ont encore une fois collaboré pour enquêter sur Tim Hortons et l'empêcher de récolter illégalement les données de localisation des Canadiens après leur achat. En 2020, les commissaires du gouvernement fédéral, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique ont empêché le propriétaire du centre d'achats Cadillac Fairview de récolter et d'utiliser les photos de ses clients qui s'arrêtaient pour utiliser les répertoires numériques du magasin.
Nous avons longuement discuté et entendu beaucoup de choses jusqu'ici, lors de l'étude article par article, quant à la nécessité de veiller à ce que les lois en matière de protection de la vie privée soient cohérentes à l'échelle du pays, pour faciliter l'application de la loi et faciliter les activités commerciales. Comme l'ont dit les commissaires fédéral et provinciaux à la protection de la vie privée, le tribunal va miner la facilité avec laquelle les organismes de réglementation de chaque province et territoire et même dans tout pays pourront appliquer la loi.
Le commissaire à la protection de la vie privée et le Commissariat comptent parmi les neuf agents du Parlement entièrement indépendants. Pour citer la Bibliothèque du Parlement:
Les hauts fonctionnaires du Parlement appuient le Parlement dans ses fonctions de reddition de comptes et d'examen en s'acquittant de responsabilités en matière de surveillance indépendante, lesquelles leur sont confiées par la loi. Ces hauts fonctionnaires relèvent directement du Parlement et non du gouvernement ou d'un ministre fédéral.
Je tiens à insister sur la dernière phrase à nouveau: « Ces hauts fonctionnaires relèvent directement du Parlement et non du gouvernement ou d'un ministre fédéral ».
Le ministre de l'Industrie ne devrait rien avoir à dire sur le processus décisionnel du commissaire à la protection de la vie privée. Le CPVP est censé être entièrement indépendant. Si le ministre ou le gouvernement veulent contester une décision du commissaire à la protection de la vie privée, ils peuvent porter la décision en appel devant les cours, comme ils l'ont fait depuis la création du CPVP en 1977. Le tribunal proposé va complètement miner cette indépendance, en plaçant un tribunal à la protection de la vie privée dirigé, administré et financé par ISDE et nommé par le ministre de l'Industrie entre chaque jugement et décision du CPVP. Le Commissariat à la protection de la vie privée est un organisme indépendant, et l'amendement proposé aidera à protéger cette indépendance.
La question suivante s'adresse à M. Chhabra, quoique tous les fonctionnaires sont libres de répondre. Nous savons, d'après les mémoires et les témoignages, que le commissaire actuel à la protection de la vie privée ainsi que le commissaire précédent s'opposent à ce tribunal; que les commissaires provinciaux à la protection de la vie privée s'y opposent; et que pour ainsi dire tous les spécialistes et experts en matière de protection de la vie privée s'opposent au tribunal. C'est votre ministère qui en a demandé la création, et... en parlant des ministres et des parties prenantes, lors des fameuses réunions avec le ministre, plus de 300 en tout, quelles parties prenantes appuyaient activement le tribunal?
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Comme cela a été mentionné, l'amendement CPC‑9 propose un ensemble très large de modifications qui, d'après ce que nous comprenons, entraîneraient trois changements importants. Premièrement, cela limiterait l'octroi de dépens adjugés contre le CPVP. Deuxièmement, il semble éliminer le droit privé d'action qui permettrait aux gens qui ont été touchés par une contravention à la loi d'être indemnisés pour ce qu'ils ont perdu. Troisièmement, il éliminerait le tribunal de la partie 1 de la loi.
Nous croyons que le tribunal est un élément essentiel, qui est nécessaire si nous voulons veiller à ce que le système soit crédible et équitable. L'éliminer serait incohérent avec les recommandations du commissaire en poste. Depuis 2018, nous avons tenu un très grand nombre de consultations et de discussions, pour mobiliser les Canadiens à grande échelle. Je pense que, en 2018, plus d'une trentaine de tables rondes ont été organisées à l'échelle du pays. Plus de 550 Canadiens ont participé à ces discussions. Le chiffre le plus récent de 300 réunions, que le député a mentionné, je crois, renvoie à la partie 3 du projet de loi, qui concerne la Loi sur l'intelligence artificielle et les données — la LIAD —, dont nous discuterons évidemment plus tard.
Un certain nombre de parties prenantes ont souligné que ce serait peut-être sans précédent, et certainement une exception sur la scène internationale, et même parmi certains modèles et exemples nationaux, d'avoir une seule personne qui assume à la fois les rôles d'ombudsman, d'enquêteur et d'arbitre. D'après nos calculs, il y a eu 50 décisions du commissaire à la protection de la vie privée qui ont fait l'objet d'un litige devant une cour. Selon nos données, dans 70 % de ces affaires, la cour n'a pas maintenu la décision du CPVP. Si l'on s'attend à ce que le commissaire à la protection de la vie privée s'acquitte de toutes ces fonctions très distinctes, en plus des nouveaux pouvoirs importants qui lui ont été accordés...
La LPVPC accordera au commissaire à la protection de la vie privée de nouveaux pouvoirs pour faire appliquer la loi, dont celui de rendre les ordonnances ayant force exécutoire à l'issue des enquêtes, et ces ordonnances peuvent comprendre l'obligation de respecter la LPVPC ainsi que l'interruption des activités pour les organisations qui contreviennent à la LPVPC. La conformité peut être imposée dans le cadre d'un accord de conformité, et toutes les mesures prises pour respecter la LPVPC peuvent être rendues publiques.
Aussi, la LPVPC habilite le commissaire à recommander l'imposition de sanctions administratives pécuniaires. C'est à ce moment‑là que la recommandation serait faite au tribunal d'imposer une sanction. Les ordonnances et tous ces autres pouvoirs, cela appartient directement au commissaire, et non pas au tribunal. Il est aussi important de reconnaître que le tribunal a un rôle important à jouer en matière d'appel, et qu'il a une expertise dans ce domaine, puisque trois de ses six membres doivent être des experts chevronnés en matière de protection de la vie privée.
Je crois qu'il est aussi important de souligner que, à notre avis, il n'y a aucun risque de nuire aux enquêtes conjointes que le commissaire fédéral à la protection de la vie privée et ses homologues provinciaux pourraient entreprendre. Un certain nombre de nos homologues internationaux ont effectivement adopté des approches de ce type, avec un tribunal, par exemple l'Australie, la Nouvelle-Zélande et l'Irlande, et ce ne sont que ceux qui me viennent à l'esprit. Le Royaume-Uni a aussi une approche axée sur un tribunal, même si son organisation est légèrement différente. La Commission d'accès à l'information du Québec a aussi cette approche axée sur un tribunal, pour remplir ce rôle. Nous ne croyons pas que cela causera quelque problème que ce soit en ce qui concerne les enquêtes conjointes. À dire vrai, la LPVPC encourage et autorise spécifiquement le CPVP à collaborer avec d'autres organismes de réglementation, en partageant de l'information et en en tirant parti, pour protéger les Canadiens le mieux possible. Cela s'harmonise aussi avec les autres domaines sous réglementation fédérale, où on utilise des tribunaux: l'agriculture, le transport, la concurrence et le commerce international.
Récemment, dans la discussion sur le sujet, on a soulevé la question de l'efficacité du tribunal créé par la LPVPC. Il est important de reconnaître que, si nous voulons voir des gains d'efficacité, il faut avoir un tribunal qui, tout d'abord, fasse preuve de déférence à l'égard des décisions du commissaire, à l'inverse d'une cour qui tiendrait une procédure de novo. En ayant des procédures qui sont plus informelles et qui sont plus faciles à comprendre et à suivre pour le Canadien ordinaire, au lieu d'avoir besoin d'un avocat pour aller devant la Cour fédérale, cela coûtera moins cher, pour toutes ces raisons, et ce sera plus facile pour les Canadiens ordinaires d'y accéder et de l'utiliser.
Il y a diverses raisons très importantes pour lesquelles nous croyons que le tribunal est l'approche appropriée. Le ministère a effectivement reçu un très, très grand nombre de commentaires en ce sens, venant de tout un éventail de parties prenantes, et ce, depuis 2018, avant même l'introduction du projet de loi précédent, le projet de loi .
J'espère que cela aide à répondre à votre question.
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D'après ce que nous avons compris, ces recommandations sont dans l'éventualité où un tribunal serait mis en place, mais il préférerait tout de même qu'il n'y ait pas de tribunal et qu'on accorde plus de pouvoirs aux commissaires à la protection de la vie privée et à leur commissariat.
Je peux aussi réfuter l'autre allégation: il a demandé plus de ressources; il a dit qu'il avait besoin de plus de ressources pour accomplir ses tâches. Il faudrait toute une division pour s'acquitter du fardeau que vous avez mentionné, pour s'occuper des amendes et des sanctions, et alors le commissaire aurait plus de temps pour s'occuper d'un plus grand nombre de dossiers. Je pense que c'est ce qui a été dit en témoignage.
Laissez-moi seulement énumérer les témoins qui se sont prononcés contre le tribunal, parce que j'ai cette liste, au cas où vous cherchez toujours la liste de ceux qui sont en faveur.
Il y avait le Centre for Digital Rights. La commissaire de la protection de la vie privée de l'Alberta était contre ce tribunal. Option consommateurs était contre. L'ancienne commissaire à la protection de la vie privée du Royaume-Uni était contre. On peut dire que le Centre pour la défense de l'intérêt public était contre. L'Association canadienne des libertés civiles était contre le tribunal. Le Conseil du Canada de l'accès et de la vie privée était contre, tout comme l'Université d'Ottawa. M. David Fraser, avocat chez McInnes Cooper, était contre. M. Daniel Therrien, l'ancien commissaire à la protection de la vie privée, était contre un tribunal. M. Philippe Dufresne, le commissaire actuel à la protection de la vie privée du Canada, est contre l'idée d'un tribunal dans son ensemble.
Pendant que vous cherchez votre liste de gens qui appuient le tribunal, je vous ai énuméré tous les témoins que nous avons écoutés qui étaient contre. Avez-vous trouvé votre liste?
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D'accord. Je vais vous lire le témoignage du commissaire actuel à la protection de la vie privée. Je sais que cela a déjà été mentionné au début.
Il y avait un échange entre M. Vis et M. Dufresne, et M. Vis a demandé: « Croyez-vous qu'un tribunal retardera votre capacité ou la capacité des gens à faire effacer d'Internet des renseignements de nature sensible? »
M. Dufresne a répondu: « Je pense que l'ajout d'un niveau de contrôle au processus ajoutera un délai et un coût, et c'est pourquoi j'ai proposé deux options pour résoudre ce problème. »
Il a aussi dit ce qui suit:
il reste l'ajout proposé d'un nouveau tribunal, qui deviendrait un quatrième palier de contrôle dans le processus de plaintes. Comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire au Comité, cette solution rendrait la procédure plus longue et plus coûteuse que les modèles communs utilisés à l'échelle internationale et dans les provinces.
Essentiellement, le commissaire actuel et les anciens commissaires qui ont témoigné ont insisté sur le fardeau que cela représente. J'aimerais m'aventurer sur un autre sujet avec vous, en ce qui concerne...
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Je voulais seulement intervenir au sujet de la déclaration du commissaire actuel, selon laquelle le tribunal ajouterait une quatrième couche au processus. Je pense que c'est important de comprendre le processus actuel et comment le tribunal le modifierait.
Dans le processus qui existe présentement, le commissaire à la protection de la vie privée joue le rôle d'ombudsman. Dans les faits, il est investi de pouvoirs d'enquête, mais d'aucun pouvoir décisionnel, ce qui veut dire que le commissaire tire des conclusions, et l'entreprise peut choisir ou non de suivre les recommandations formulées à la lumière de ces conclusions. Si l'entreprise ne coopère pas, la seule option pour le commissaire est d'intenter un litige contre l'entreprise devant la cour, et dans cette situation, la cour ne fait preuve d'aucune déférence à l'égard du commissaire. C'est comme s'il s'agissait de n'importe quel autre plaignant qui intente une poursuite en cour contre une entreprise: il doit prouver le bien-fondé de son affaire. Comme mon collègue l'a laissé entendre, il arrive souvent que le commissaire perde ces litiges, comme cela est arrivé tout récemment en 2023, dans l'affaire contre Facebook. Évidemment, il est possible d'interjeter appel à la Cour d'appel fédérale, et ensuite à la Cour suprême. Voilà le processus actuel.
Le nouveau processus, tout d'abord, accorde des pouvoirs décisionnels au commissaire. Le commissaire peut délivrer des ordonnances de conformité — ce qu'il ne peut pas faire maintenant — afin d'obliger concrètement une organisation à faire ou à ne pas faire quelque chose, et peut aussi recommander l'imposition de sanctions administratives pécuniaires. Ces décisions peuvent être portées en appel devant le tribunal, mais une fois que le tribunal rend sa décision... Et même avant cela, le tribunal doit s'en remettre au CPVP sur de nombreuses questions de fait et de droit.
C'est donc la première différence avec une cour, qui n'agirait pas ainsi. La deuxième différence est que la décision du tribunal est finale. La décision ne peut pas être portée en appel. Le seul recours possible est un contrôle judiciaire.
Un contrôle judiciaire est différent d'un appel. Un appel est un nouvel examen exhaustif du bien-fondé d'une affaire. Dans le cas d'un contrôle judiciaire, la cour — dans ce cas‑ci, ce serait la Cour fédérale — décide simplement si le tribunal a agi raisonnablement ou pas. Il ne s'agit pas d'un nouvel examen exhaustif de l'affaire. Par conséquent, ce n'est pas un appel, et la décision du tribunal est définitive. Cela veut dire que le processus est plus court; le processus est plus rapide et moins coûteux.
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Il y a eu un témoin, M. Jim Balsillie du Centre for Digital Rights, qui a donné le point de vue d'une entreprise. Il a parlé de l'autre couche. Il a dit que ce qui va arriver, si vous êtes une entreprise qui essaie de négocier avec le commissaire, c'est que vous allez simplement hausser les épaules et dire: « On se verra au tribunal quasi judiciaire. »
Nous avons un peu vu le même genre de chose au Bureau de la concurrence. Dans l'affaire Rogers-Shaw, les choses ont si mal tourné que, quand le tribunal a rendu une décision que le commissaire à la concurrence a contestée, l'entreprise elle-même a pu poursuivre le commissaire par la suite. Cela a ajouté une autre couche. Cela a créé un précédent que nous ne voulons pas voir dans nos lois en matière de protection de la vie privée.
J'aimerais aussi soulever une autre question. Il n'y a aucun autre régime législatif en matière de protection de la vie privée dans le monde qui a ce genre de tribunal. Nous avons étudié des régimes progressistes de l'Union européenne, ainsi que des régimes en Californie, en Utah, au Colorado, en Virginie et au Connecticut ainsi que la loi américaine qui a été proposée, l'American Data Privacy and Protection Act, et nulle part a‑t‑on proposé ou établi un tribunal comme celui qui est proposé, alors pourquoi le Canada essaie‑t‑il d'être un acteur marginal? Quel serait l'avantage?
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Je pense que c'est une question très importante.
Je comprends que les membres du Comité veulent cerner quelles sont les pratiques exemplaires et les occasions à saisir afin d'intégrer dans la pratique canadienne ce qui a fonctionné ailleurs. Je pense que c'est aussi très important d'établir des distinctions entre les façons dont les divers régimes fonctionnent. Nous ne pouvons pas importer indistinctement n'importe quel élément, sans d'abord comprendre le contexte et la manière de sa conception.
Si je ne me trompe, le député vient tout juste de mentionner la Californie. La Californie n'a pas de système axé sur le consentement. La Californie dispose d'un tout autre régime, où les gens peuvent essentiellement demander que leurs données ne soient pas recueillies, mais cela se fait d'une manière totalement différente d'avoir à demander le consentement, ce qui est fondamental dans votre approche.
Si j'évoque cela, c'est parce que c'est tout à fait essentiel de comprendre comment ces régimes législatifs fonctionnent dans leur intégralité, afin de comprendre quels éléments peuvent simplement être ajoutés ou extraits dans un ensemble donné, et lesquels seraient logiques et cohérents dans ce cadre législatif, puis dans la Constitution ou dans un autre cadre législatif plus général, dans une administration donnée. Relativement à cela, nous avons vu des tribunaux en matière de protection de la vie privée être mis en place efficacement au Royaume-Uni et au Québec. Les approches en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Irlande sont tout particulièrement proches de celle que nous proposons ici.
Il y a certains aspects du droit canadien qui laissent croire que ce serait approprié, et que les Canadiens s'attendent à ce que l'équité procédurale soit respectée. Ils s'attendent à ce qu'il n'y ait pas une seule instance qui soit à la fois juge, jury et bourreau, mais qu'il y ait plutôt une approche qui permet qu'une enquête soit faite sans entrave, qui permet un effort conjoint et qui permet des régimes harmonisés et une collaboration. Pour dire les choses simplement, par rapport à l'imposition de sanctions pécuniaires, un comité d'experts peut se livrer à un examen, à la lumière d'une enquête, comme l'a souligné ma collègue, Mme Angus, et en faisant preuve de déférence à l'égard de l'approche du commissaire pour rendre ces décisions.
Le deuxième aspect que ma collègue a, je pense, déjà très efficacement expliqué, c'est que, en cas d'appel, le tribunal devra faire preuve de déférence à l'égard de l'examen des faits et des résultats de l'enquête du commissaire. En réalité, c'est une bien meilleure situation pour le commissaire, et cela rationalise et accélère beaucoup le processus, pour que l'on puisse en arriver à une décision finale. S'il arrive que des participants se livrent à un scénario faisant l'objet d'une enquête par le commissaire à la protection de la vie privée et qu'ils ne sont pas d'accord avec lui, je pense que la plupart des Canadiens s'attendraient à ce qu'il y ait un recours ou un appel ou un autre endroit où aller pour qu'il y ait un arbitrage par un organisme expert en matière de protection de la vie privée.
Cela est particulièrement vrai, à mesure que nous faisons face à de plus en plus de questions concernant le numérique et les marchés numériques; les enjeux relatifs à la protection de la vie privée peuvent être très complexes à comprendre, et peut-être au‑delà de ce que le profane aurait l'habitude de voir. Le fait d'avoir une entité qui acquiert de l'expertise dans ce domaine et qui peut se développer avec l'économie numérique est, je crois, un élément fondamental, et cela montre pourquoi ce serait utile de l'avoir.
:
Le modèle du Québec est vraiment très proche du tribunal que constitue la Commission d'accès à l'information. La principale différence, c'est que le tribunal est intégré à la Commission. La loi, pour cette Commission, comprend plusieurs articles dont l'objectif est très clair.
[Français]
Il y a un article pour la surveillance et un article au sujet des compétences.
[Traduction]
À l'échelon supérieur, il y a le bureau de la présidente, qui a l'appui de huit juges administratifs; ils constituent un peu un mécanisme d'appel. Une affaire concernant une sanction administrative pécuniaire qui vient d'une autre administration peut faire l'objet d'un appel. Ce sont les juges administratifs, ceux qui soutiennent le bureau de la présidente, qui vont contrôler cette décision. Cette organisation, en réalité, est dotée d'un tribunal.
Ce que nous proposons est très proche de ce modèle, sauf qu'il existe une séparation structurelle entre les deux entités qui assument ces fonctions.
:
Cela dépend des décisions que le Comité prendra et de la structure que cela aura, mais je crois que la mise en œuvre de l'amendement CPC‑9, tel qu'il est structuré, sera probablement difficile à mettre en œuvre, y compris en ce qui concerne la partie 2 du projet de loi. Je crois qu'il faudra probablement plusieurs... Nous allons avoir besoin de temps pour passer tout cela en revue, pour voir...
Je crois que ce que vous demandez, c'est ce qui restera par défaut si le tribunal est supprimé. Je crois qu'il y aura des problèmes de principe ainsi que des problèmes de mise en œuvre. En ce qui concerne les principes, il y a le principe de la justice naturelle et de l'équité administrative, et il faudra je crois y voir. Je crois quand même que, dans un certain scénario, on passe des cours fédérales à la Cour d'appel et à la Cour suprême, et je crois que l'on en a déjà parlé.
Au bout du compte, on se retrouverait à peu près dans la même situation qu'aujourd'hui, puisqu'il sera possible d'interjeter appel des décisions. Chaque appel constituerait une nouvelle procédure. Pour chaque appel, il faudrait d'abord revoir les faits. Et ce processus sera long, il s'éternisera, il sera plus compliqué qu'un processus devant un tribunal.
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D'accord, je vais donc laisser les membres en discuter plus avant, monsieur le président, mais, si j'ai bien compris, nous allons devoir revoir la partie 2. Je crois que l'amendement vise justement cela, le fait qu'il est question d'un tribunal.
Vous savez, une bonne partie de ce que nous faisons, de notre côté, c'est écouter les témoins, comme nous l'avons fait avec l'actuel commissaire à la protection de la vie privée et tous les anciens commissaires à la protection de la vie privée qui ont étudié le système, son fonctionnement et son fonctionnement idéal. Fait plus important encore, quand nous cherchons une façon de protéger les droits des consommateurs canadiens, un droit fondamental de protection de leur vie privée, nous examinons les systèmes et les pratiques exemplaires en cours dans le monde, nous ne voulons pas réinventer la roue. Plus précisément, de notre côté, nous regardons ce qu'il en est du tribunal et du commissaire de la concurrence, et nous examinons ce qui n'a pas fonctionné ou pas fonctionné aussi bien que nous l'aurions voulu.
Pour finir, monsieur le président, je dirai que j'estime quand même que ce tribunal est inutile. Je crois que nous aurions avantage à améliorer le processus du système d'appel ainsi que les pouvoirs, et aussi, bien sûr, donner plus de pouvoirs au commissariat à la protection de la vie privée.
Je finis sur ces mots. Merci, monsieur le président.
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Si c'est le Commissariat à la protection de la vie privée qui recommande une sanction administrative pécuniaire, le tribunal n'aura pas à reprendre l'examen à zéro. Il pourra s'appuyer sur les faits de l'affaire et décider de la sanction qu'il convient d'imposer.
Il y a une autre chose qu'il est important de comprendre, ici, quand on parle de procédure. Le Commissariat à la protection de la vie privée peut, au bout du processus, prendre une ordonnance pour dire à telle ou telle entreprise de cesser un comportement donné, ou il peut lui demander de modifier son programme de gestion de la protection des renseignements personnels et sa structure de gouvernance.
Si une telle décision est portée en appel, c'est le tribunal qui en serait saisi, et, je le répète, il ne s'agirait pas d'une toute nouvelle procédure. Il devrait respecter les conclusions du Commissariat. Il ne remettrait pas en question la totalité des conclusions ou de l'enquête, mais il effectuerait un examen sous un angle beaucoup plus précis que l'examen que ferait la Cour fédérale en l'absence de ce tribunal. Ce serait une procédure différente.
Je suis heureux de participer à ce débat. Je voulais revenir sur la déclaration liminaire de M. Williams, car il m'a fait sourciller quand il m'a dit, je crois, en se fondant sur un unique argument, que le tribunal ralentirait les choses, ajouterait des couches de bureaucratie et rendrait tout cela moins efficient.
Si j'ai bien lu, et selon ce que vous avez répondu à M. Vis, il me semble que s'il est question de « déférence », cela veut littéralement dire que toutes les données probantes réunies pendant l'enquête du CPVP seraient accessibles au tribunal, qu'il soit saisi d'un appel ou qu'il cherche à déterminer le bon montant d'une sanction administrative pécuniaire.
Pourriez-vous démêler tout cela? Comment est‑ce que... Je comprends bien ce que cherchent à faire les conservateurs et certains autres intervenants. Je comprends bien: nous ne voulons pas ajouter des couches de bureaucratie et ralentir les choses. Ce n'est pas là le but. Si j'ai bien compris, le tribunal va en fait accélérer les choses.
Je vais vous poser une autre question à ce sujet, mais j'aimerais en savoir plus sur la confiance et l'équité administrative, et j'aimerais que vous nous démêliez tout cela. Parlons d'abord de l'efficience et de l'élimination de la bureaucratie. J'aimerais que vous démêliez tout cela pour nous.
:
Nous croyons qu'avec un tribunal, nous pourrons augmenter et la vitesse et l'efficience. Le tribunal, contrairement à une cour, devra faire preuve de déférence à l'égard des décisions du commissaire. Je crois que c'est la première chose à comprendre. Ce que cela veut dire, c'est que le tribunal n'aura pas à tout reprendre à zéro, de nouveau, lorsqu'il est saisi d'un dossier. Il peut faire siens la démarche et le raisonnement du commissaire.
Cela donne lieu à un processus plus simple et plus efficient et, surtout, cela fait en sorte que la décision du tribunal, elle, sera finale. Il sera impossible d'en appeler à une instance supérieure. On pourrait peut-être demander le contrôle judiciaire de la décision, mais le contrôle judiciaire d'une décision, c'est beaucoup moins que cela. Il ne s'agit pas de rouvrir un dossier. Il s'agit de déterminer si la décision de l'entité administrative était correcte, raisonnable et légitime. De manière générale, la Cour doit décider si le tribunal a agi dans le respect de ses compétences ou de son mandat.
C'est un scénario tout à fait différent des appels interjetés devant une cour, puis une autre, des remises en litige, où le dossier est repris du début à chaque fois et où de nouveaux faits peuvent être portés à l'attention du décideur. Cette façon de faire devrait permettre d'y aller beaucoup plus rapidement et plus efficacement qu'avec un processus d'appel.
Si j'ai bien compris, un des autres avantages de ce tribunal, c'est l'expertise de ses membres.
Pourriez-vous nous expliquer, à partir de deux scénarios — l'un où il y a un tribunal, et l'autre où il n'y a pas de tribunal et où il faut s'adresser à la Cour fédérale —, en quoi les délais et peut-être la confiance...? J'ai dans mes notes, et je crois que vous en avez parlé, monsieur Chhabra, une affaire concernant Facebook, dans laquelle le CPVP n'avait peut-être pas reçu suffisamment d'éléments de preuve, ou que la qualité de cette preuve... Corrigez-moi si je me trompe, mais je me demandais seulement pourquoi il est important, non seulement pour assurer l'équité de la procédure, mais aussi pour accélérer la procédure, que ces personnes aient une expertise spécifique en matière de la protection de la vie privée.
:
Je crois que l'on a vu que ces questions sont plutôt complexes, quand il s'agit de renseignements personnels, de flux de données et de la manière dont l'information est utilisée. Ce n'est pas nécessairement un processus linéaire, et pas nécessairement un processus où un juge, normalement, pourrait se fonder sur une abondante jurisprudence. Il y a bien sûr une certaine jurisprudence, dans ce domaine, mais pas au point qu'elle puisse être considérée comme une approche couramment comprise.
Quant à l'aspect de la vitesse, il faut à la fois s'assurer que les décisions du tribunal sont elles-mêmes considérées comme finales, de façon à ce qu'aucun appel ne soit possible, mais aussi que le niveau d'expertise des membres du tribunal répond spécifiquement aux commentaires des intervenants, recueillis avant le dépôt du projet de loi , au sujet de l'importance qu'au moins trois membres de ce tribunal aient une expertise dans le domaine des lois sur la vie privée et l'information. C'est un domaine du droit en croissance, et les experts commencent à mieux comprendre les enjeux et aussi la façon dont les nouveaux enjeux du domaine des technologies numériques, la façon dont les données sont utilisées, pourraient avoir des répercussions importantes sur la protection des renseignements personnels.
Il faut comprendre les liens entre la cybersécurité, les liens avec les techniques de dépersonnalisation ou d'anonymisation, comprendre l'importance des approches de gouvernance prises par les organisations et comprendre les approches prises dans les autres administrations également. C'est pour une foule de raisons qu'il sera utile de posséder de l'expertise dans les domaines des lois sur la vie privée et la protection des renseignements personnels et de l'information, car cela accélérera le processus et nous assurera que les décisions seront efficaces et équitables sur le plan de la procédure.
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Merci de votre réponse.
J'aimerais vous poser une autre question, encore une fois en m'opposant aux commentaires qu'a faits M. Williams quand il a proposé son amendement. Pour reprendre ses mots, selon mes notes, il a dit que cela ferait de nous un acteur « marginal sur la scène internationale ». Il a aussi parlé de justice « différée », et je crois que nous en avons déjà parlé. Il a aussi dit, je crois — je suis désolé, mes notes ne sont pas aussi claires que je le pensais —, que l'efficacité du CPVP, les pouvoirs de ce commissariat, seraient quelque peu diminués s'il y avait un tribunal.
Je ne sais pas si cela se peut, selon ce que j'ai lu. Si j'ai bien compris, ce que la LPVPC propose va donner au CPVP un grand nombre de nouvelles attributions et de nouveaux pouvoirs, bien au‑delà de ce dont il disposait dans le passé.
Est‑ce que quelqu'un pourrait énumérer et expliquer ces nouveaux pouvoirs spécifiques? J'aurais ensuite deux ou trois questions de suivi.
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Les nouveaux pouvoirs du commissaire lui permettraient entre autres d'émettre des ordonnances exécutoires, après une enquête. Comme je l'ai dit plus tôt, il pourrait par exemple ordonner à une organisation de faire une chose ou une autre pour se conformer à la LPVPC. Il pourrait également ordonner à une organisation de cesser de faire une chose qui contrevient à cette loi.
Le commissaire aurait aussi la capacité de conclure des accords de conformité. Comme je l'ai dit plus tôt, les amendements déposés par le gouvernement visent à ce que ces accords de conformité puissent être conclus à n'importe quelle étape du processus et qu'ils tiennent compte aussi de considérations d'ordre financier. Cela veut dire, par exemple, que, si une organisation est déclarée contrevenir à la LPVPC, le CPVP aura le pouvoir de négocier avec elle un accord de conformité qui inclurait, essentiellement, une sanction financière ou une pénalité.
Il s'agit là des nouveaux pouvoirs que le projet de loi conférerait au CPVP; il n'a pas ces pouvoirs‑là actuellement.
En ce qui concerne l'harmonisation avec les autres administrations, comme je le soulignais plus tôt, nous devrions toujours être très prudents lorsque l'on cherche à harmoniser les choses sur un sujet très précis. Il y a, on le sait, des tribunaux s'occupant de la vie privée au Royaume-Uni, en Irlande, en Australie et en Nouvelle-Zélande, et leur approche est très analogue à celle que nous voulons adopter ici, avec quelques petites variations, mais, encore une fois, il y a dans chaque administration un cadre constitutionnel particulier et d'autres lois qui expliquent ces légères variations.
Ce que je cherche à vous faire comprendre, c'est que nous examinons les pratiques exemplaires et les approches exemplaires adoptées ailleurs dans le monde, et que nous avons entrepris d'importantes consultations, ici au Canada, afin de pouvoir présenter une proposition qui, selon nous, améliore grandement l'application des lois canadiennes sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé en donnant au commissaire les importants nouveaux pouvoirs nécessaires.
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Je crois qu'il y a deux réponses.
Premièrement, quand il s'agit de la capacité de déterminer une sanction administrative pécuniaire, ce dont le tribunal serait chargé, je crois que vous avez raison de dire qu'il s'agit d'un système de freins et de contrepoids. C'est une question d'équité. Il faut une certaine expertise pour déterminer de manière appropriée le montant des sanctions pécuniaires.
En ce qui concerne le processus d'appel, encore une fois, vous avez parfaitement raison de dire qu'il accélérera le processus par rapport à ce que peut faire un système judiciaire. Puisque les décisions du tribunal seront définitives, le processus est beaucoup plus rapide et plus efficient, et le résultat arrive plus vite. On pourrait dire que, en fait, les pouvoirs du CPVP et la capacité du commissaire d'en arriver à une décision finale, d'influencer le marché et d'amener les entreprises à se conformer profitent de la rapidité et du soutien du tribunal, ce qui vaut mieux que d'avoir à passer par les multiples instances d'appels des systèmes judiciaires.
J'ai une autre question sur le même sujet. J'ai bien vu que certains membres du Comité faisaient état du nombre de dossiers qui ont été contestés devant les cours fédérales. À mon avis, c'est trompeur d'utiliser ces chiffres pour essayer de calculer le volume de contestations qu'il pourrait y avoir, puisque nous parlons ici d'un nouveau cadre législatif. Le cadre législatif précédent, la LPRPDE, date de 20 ans, et ne tenait pas compte de l'ère numérique dans laquelle nous nous trouvons. Elle ne tenait pas compte de toutes les formes d'atteintes à la vie privée qui se produisent probablement plus fréquemment dans l'économie d'aujourd'hui.
Je crois que, lorsqu'il s'agit d'introduire un nouveau cadre législatif, dans lequel le CPVP dispose de nouvelles attributions et de nouveaux pouvoirs, et que l'ancien cadre législatif n'est plus adapté à l'époque, on peut imaginer qu'il y aura beaucoup plus de contestations, devant le CPVP et devant le tribunal, une fois que, espérons‑le, nous aurons pu mettre en œuvre ce nouveau cadre législatif.
Pourriez-vous nous expliquer tout cela et nous dire si, à votre avis, le nombre de contestations augmentera, à l'avenir? Encore une fois, je crois qu'il est juste de dire que, si nous pensons que le nombre de contestations va augmenter, ce qui sera le cas selon moi, nous devrions nous poser une question: voulons-nous que ces contestations se règlent devant une cour fédérale ou devant un tribunal, qui va beaucoup accélérer le processus, va donner des résultats et va augmenter la confiance et la transparence dans un système relativement nouveau?
:
Comme vous l'avez dit à juste titre dans votre question, l'Australie et la Nouvelle-Zélande sont deux cas analogues, et nous avons étudié le mécanisme de leur tribunal. Le mécanisme du tribunal du Royaume-Uni est légèrement différent de ce que l'on propose avec la LPVPC. Encore une fois, chaque administration a son propre cadre constitutionnel, d'où les différences.
Il est important aussi de reconnaître que, lorsqu'on étudie les cas analogues ailleurs dans le monde, les applications et la portée de bon nombre de règlements en matière de vie privée et de cadres législatifs sont très différentes, et c'est pourquoi les mécanismes de supervision nécessaires sont eux aussi différents. Nous avons parlé plus tôt de la Californie, un bon exemple, et le Comité en a parlé plusieurs fois ces dernières semaines. Le régime de sanctions administratives pécuniaires de la Californie impose un plafond qui se situe entre 2 500 $ et 7 500 $ par infraction. À ce niveau‑là, il n'est peut-être pas nécessaire de créer un groupe d'experts chargé de faire la lumière sur les problèmes et de déterminer le montant de la pénalité monétaire qu'il convient d'imposer.
Dans le cas qui nous occupe, selon la LPVPC, la sanction pourrait aller jusqu'à 10 millions de dollars ou 3 % des recettes globales. C'est très important. Je crois qu'il faut s'attendre à un certain niveau d'équité procédurale. C'est pourquoi le tribunal est au cœur de la proposition du gouvernement.
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Il y a d'abord, pour commencer, le tribunal de la concurrence, et je crois que nous en avons déjà parlé.
Autre exemple intéressant, c'est celui du CRTC, qui est aussi un tribunal administratif. Ce qui est intéressant, c'est que, selon la loi antipourriel du Canada, le responsable de l'application de la loi a tous les pouvoirs qu'aurait un CPVP. Il peut mener des enquêtes, émettre des avis d'infraction et présenter des recommandations, même pour des SAP, mais c'est le tribunal, en réalité, qui rend ces décisions, puisqu'il est, je le répète, un mécanisme de supervision.
Encore une fois, cela ressemble beaucoup au modèle de la Commission d'accès à l'information, puisqu'il y a un mécanisme d'appel intégré dans l'organisation, tout comme dans le CRTC, mais c'est une seule organisation, et non pas deux organisations. Le Bureau de la concurrence est un autre exemple où il s'agit de deux organisations. Il y a le Bureau de la concurrence, et il y a le Tribunal de la concurrence; leurs fonctions sont les mêmes.
:
Il me semble que cela contredit ce que d'autres membres du Comité ont dit, si j'ai bien compris, c'est‑à‑dire qu'ils voulaient pouvoir protéger une chose fondamentale, le droit à la vie privée.
Merci beaucoup de votre témoignage. Ce sera ma dernière question, parce que je n'arrive pas à me la sortir de la tête.
Je crois que M. Williams et M. Vis ont laissé entendre que le CPVP ne voulait pas d'un tribunal. Je crois que M. Angus a dit que ce n'était pas tout à fait vrai. Pourriez-vous nous dire ce qu'il en est, parce qu'il me semble que le désaccord ici est clair?
J'ai un grand respect pour l'actuel commissaire à la vie privée, M. Dufresne, et j'aimerais savoir où...? J'aimerais beaucoup savoir comment nous pouvons nous assurer...
Quelle est l'opinion du commissaire à la vie privée au sujet de ce tribunal? Pourriez-vous nous répondre de manière générale, encore une fois? Je sais que vous nous en avez déjà parlé, mais il me semble que tout le monde ne s'entend pas sur ce qu'a dit le commissaire à la vie privée et je crois qu'il serait utile d'en avoir le cœur net, si c'était possible.
:
Bien sûr. L'an dernier, le commissaire à la vie privée a publié 15 recommandations au sujet des priorités ou des changements qu'il voulait voir intégrer à la LPVPC; il n'a jamais demandé la suppression du tribunal. Il a demandé deux choses: une qui concernait le tribunal et une autre qui concernait ses autres pouvoirs d'application de la loi.
En ce qui concerne le tribunal, il a dit qu'il préférerait que les décisions de ce tribunal puissent être portées en appel devant la Cour d'appel fédérale plutôt que devant la Cour fédérale, comme c'est actuellement le cas. Mais, comme nous l'avons déjà dit, il s'agit non pas d'un appel, mais d'un contrôle judiciaire, alors on ne parle pas de la même chose. Ce n'est pas en sautant une étape que l'on va accélérer le processus, étant donné qu'il ne s'agit pas d'un appel.
La deuxième recommandation visait à prévoir une plus grande marge de manœuvre en ce qui concerne les accords de conformité. Plus précisément, il voulait pouvoir conclure un accord de conformité à n'importe quelle étape du processus; il voulait que ces accords de conformité tiennent compte de considérations d'ordre financier, l'équivalent des SAP, et les amendements proposés par le gouvernement sont justement là pour ça.
Je vais revenir à ce que M. Turnbull a mentionné. On a soulevé de bonnes questions, et c'était nécessaire au débat.
On a beaucoup parlé du nombre de cas qui ont été traités par le commissaire dans le cadre législatif actuel. J'ai questionné le secrétaire parlementaire, le ministre et le sous-ministre à ce sujet. Effectivement, on peut convenir qu'en changeant la loi, il pourrait y avoir davantage de cas et une jurisprudence à bâtir, entre autres, ce qui soulève la question de l'expertise.
Dans mon esprit, que ce soit au sein du bureau du commissaire ou du tribunal, il y a une expertise à acquérir. À mon avis, cette question est un peu latérale. Ce qui nous intéresse, c'est de savoir quelle expertise a été bâtie au bureau du commissaire.
Combien de décisions du commissaire ont été contestées devant la Cour fédérale et, parmi celles-ci, combien ont été invalidées?
:
D'abord, il est important de préciser que le commissaire n'a pas de pouvoir décisionnel, en ce moment. Le commissaire publie un rapport d'enquête qui contient des recommandations et, si l'entreprise ne veut pas les suivre, c'est là que le commissaire ou le plaignant peut poursuivre l'entreprise devant la Cour.
Nous nous sommes penchés un peu sur cette question et nous avons constaté qu'entre 2003 et 2024, il y a eu à peu près 50 décisions concernant un rapport d'enquête du commissaire, et que, dans 70 % des cas, la Cour n'était pas d'accord sur les constats et le rapport d'enquête du commissaire.
Plus récemment, dans le cas qui opposait le commissaire et Facebook, la Cour fédérale a estimé que le commissaire ne s'était pas acquitté du fardeau de la preuve qui lui incombait. Il n'avait donc pas vraiment justifié sa cause. Il faut aussi préciser que le commissaire en a appelé de cette décision. Comme on l'a dit, c'est un long processus, évidemment, alors il faudra voir combien d'années on va attendre avant qu'une décision soit rendue là-dessus. Cela n'arrive pas tous les jours, mais cela arrive quand même assez souvent.
:
C'est donc ce à quoi vous faisiez allusion.
Par intérêt personnel et au bénéfice du Comité, j'aimerais avoir ces statistiques et la liste de ces jugements, si cela ne vous dérange pas. Je dois souligner que j'ai déjà fait cette demande en privé et que je n'ai pas reçu l'information demandée. Toutefois, je sais qu'on ne doit pas divulguer les conversations privées.
Plus tôt, M. Chhabra a dit que
[Traduction]
Dans la plupart des cas, « le commissaire perd ».
[Français]
La Cour fédérale aurait donc invalidé plusieurs des constats du commissaire. On veut maintenant créer un nouveau tribunal en invoquant, entre autres choses, le fait allégué que la Cour fédérale n'aurait pas l'expertise nécessaire.
Expliquez-moi cela. Je ne suis pas juriste, mais, d'un point de vue logique, cela me semble être une justification douteuse.
:
Si je vous pose cette question, c'est précisément parce que c'est arrivé à plusieurs reprises.
Vous avez dit qu'il fallait une nouvelle institution, de nouvelles personnes nommées, un nouveau tribunal et une nouvelle bâtisse, parce que la Cour fédérale n'aurait pas l'expertise nécessaire.
Je vais vous expliquer mon raisonnement. Personnellement, j'ai l'impression que la création de cette nouvelle institution pourrait avoir comme effet de décrédibiliser le commissaire. On nous a dit qu'il fallait qu'il y ait un nouveau tribunal qui possède l'expertise nécessaire. On justifie cela en nous disant que les décisions du commissaire ont souvent été invalidées par la Cour fédérale; celle-ci aurait donc l'expertise nécessaire pour le faire. Par contre, si nous vous disons que nous préférons que cela aille directement à la Cour fédérale, on nous dit qu'elle n'a pas l'expertise voulue.
Pour une personne qui a un quotient intellectuel de plus de 80, c'est complètement illogique.
:
Monsieur Garon, attendez un instant.
Chers collègues, comme vous avez pu le constater, la sonnerie d'appel au vote retentit en ce moment. Elle a commencé vers 18 h 42, alors le vote va avoir lieu vers la fin de la réunion. La réunion devait se terminer à 19 h 12, mais je propose de lever la séance vers 19 h 5. Ainsi, tous ceux et celles qui veulent se rendre à la Chambre pour voter vont avoir le temps de le faire. Cela dit, j'ai besoin du consentement unanime des membres du Comité pour poursuivre la réunion jusqu'à environ 19 h 5.
Ai-je le consentement unanime du Comité?
[Traduction]
Je voulais dire jusqu'à environ 19 heures. Êtes-vous d'accord?
Des députés: D'accord.
Le président: D'accord. Merci.
:
Encore une fois, je vous remercie.
On ne fait pas de distinction entre l'expertise du commissariat et celle des tribunaux. En fait, l'établissement de ce tribunal respecte l'expertise du commissaire en vertu du fait qu'il doit accorder une grande importance aux décisions du commissaire.
[Traduction]
Autrement dit, le tribunal fait preuve d'un plus grand respect à l'égard de l'expertise du commissaire parce qu'il s'appuie sur les faits ainsi que sur les décisions et conclusions du commissaire.
La deuxième chose, en ce qui concerne l'expertise, c'est que le tribunal sera chargé de toutes les affaires liées aux atteintes à la vie privée et à la protection des renseignements personnels. Les membres acquerront au fil du temps une expertise, une sensibilité et une compréhension, alors que, s'il s'agissait d'une cour — un juge, une cour, sans distinction —, elle serait saisie d'une affaire donnée. C'est une différence importante.
L'expertise, ici, tient à au moins trois choses: l'expertise qui se traduit par la capacité à déterminer la sanction administrative pécuniaire appropriée; l'expertise découlant de la déférence envers le commissaire, puisque le tribunal doit tenir compte des faits et des conclusions du commissaire; et l'expertise que se constitue le tribunal lui-même, puisque ce groupe d'experts se spécialise de plus en plus à mesure qu'il entend ces appels, puisque tous les cas où la vie privée...
:
J'aimerais continuer ma réponse, si vous me le permettez, monsieur Garon.
[Traduction]
En Europe, où il existe un règlement général sur la protection des données, l'Irlande a adopté un système selon lequel l'organisme de réglementation de la vie privée ne peut lui-même imposer une amende. Il doit s'en remettre à un organisme d'arbitrage, qui, lui, établira le montant de l'amende.
Les amendes prévues selon ce règlement général sur la protection des données, en Europe, sont très élevées, et ce n'est pas parce que tous ces processus existent que les amendes seront réduites, comme certains membres du Comité l'ont laissé entendre aujourd'hui, ou que le processus décisionnel sera moins rapide. Ce qui se passe ailleurs dans le monde, c'est en fait tout l'opposé: le travail du commissaire est en fait renforcé par l'existence d'un tribunal d'experts, qui s'occupe exclusivement de ces questions.
:
Laissez-moi poser mes questions, s'il vous plaît. Merci.
Je comprends cela, et je sais qu'il existe différents systèmes, mais les commissaires à la protection de la vie privée se parlent les uns les autres. Ils ne sont pas des personnes indépendantes, isolées. En fait, les commissaires à la vie privée du monde entier se parlent entre eux.
Je suis convaincu que vous avez déjà lu ceci, mais voici ce qu'a écrit l'actuel commissaire à la protection de la vie privée dans son mémoire à propos du projet de loi , en 2021:
La question centrale de conception est la suivante. Pour rehausser la confiance des consommateurs, le système décisionnel relié au jugement des plaintes doit selon nous être le plus rapide et efficace possible. Pour avoir confiance, les individus s’attendent à ce qu’il y ait des conséquences réelles, en temps opportun, lorsqu’il y a violation de la loi. Évidemment, le système doit aussi être juste pour les entreprises. La performance du CPVP à cet égard, sur une période de 40 ans, est excellente et nous sommes tout à fait ouverts à rendre nos procédures plus transparentes et à consulter pour les bonifier. Nous sommes aussi prêts, si le Parlement nous octroyait le pouvoir d’imposer des sanctions pécuniaires, à devoir prendre en compte tous les facteurs pertinents, au‑delà de ceux prévus...
Il a mentionné un article particulier du précédent projet de loi.
Il poursuit ainsi:
À notre avis, la conception du système décisionnel proposé dans la LPVPC va dans le sens contraire de celui souhaité. En ajoutant un tribunal d’appel administratif et en réservant à ce palier le pouvoir d’imposer des sanctions pécuniaires, la LPVPC encourage les organisations à emprunter les voies d’appel plutôt que de chercher un terrain d’entente avec le CPVP lorsque ce dernier s’apprête à rendre une décision défavorable. Les concepteurs du projet de loi veulent que les dossiers se règlent de façon informelle, mais ils soutirent au Commissariat un outil de persuasion important. Et cela, avec une conception hors norme parmi les juridictions comparables.
Nous avons déjà longuement discuté de ce sujet.
Et il poursuit:
Compte tenu des considérations qui précèdent, notre principale et vive recommandation est de retirer les dispositions portant sur le Tribunal de la protection des renseignements personnels et des données...
Et cela concerne le projet de loi précédent, le projet de loi , qui est revenu à l'avant-scène.
Lorsque le commissaire à la protection de la vie privée est venu témoigner devant le Comité, le 19 octobre 2023, il a dit:
Troisièmement, il reste l'ajout proposé d'un nouveau tribunal, qui deviendrait un quatrième palier de contrôle dans le processus de plaintes. Comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire au Comité, cette solution rendrait la procédure plus longue et plus coûteuse que les modèles communs utilisés à l'échelle internationale et dans les provinces.
C'est pourquoi nous avons recommandé deux options pour résoudre ce problème. La première option consisterait à faire contrôler les décisions du tribunal proposé directement par la Cour d'appel fédérale, et la seconde option serait de conférer au Commissariat le pouvoir d'infliger des sanctions pécuniaires et de faire en sorte que ces décisions puissent être contrôlées par la Cour fédérale sans qu'il soit nécessaire de créer un nouveau tribunal.
C'est un expert, mais c'est aussi ce qu'avait dit le précédent commissaire à la protection de la vie privée, lorsqu'il avait comparu devant notre comité. Il avait d'ailleurs souligné que tous les commissaires à la protection de la vie privée provinciaux étaient contre la création d'un tribunal. En fait, plus précisément, la commissaire à la protection de la vie privée et à l'information de l'Alberta avait fait cette déclaration suivante, devant le Comité, à la réunion no 104:
Nous craignons aussi que la constitution d'un tribunal chargé d'entendre les appels interjetés contre certaines ordonnances du commissaire ait une incidence sur notre capacité [en tant que commissaires à la vie privée provinciaux] de mener des enquêtes conjointes
Il y a donc beaucoup d'opposition face à cette proposition. Nous l'avons entendu. Je ne vois vraiment pas comment... Presque tous les experts du domaine affirment que cela ralentira le processus et le rendra plus compliqué, tout le monde, sauf le gouvernement.
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Je crois que nous avons expliqué très clairement notre raisonnement et pourquoi à notre avis ce modèle sera plus efficient. Je crois que nous avons également dit clairement que, dans certains cas, les commissaires provinciaux n'ont pas le pouvoir d'imposer des sanctions administratives pécuniaires.
Le précédent commissaire réagissait, il y a de cela plusieurs années, à un autre projet de loi et à une autre approche. L'actuel commissaire à la vie privée a dit qu'il aimerait que les accords de conformité s'appuient sur une approche plus souple. L'amendement du gouvernement propose exactement cela.
Comme l'a dit plus tôt ma collègue, Mme Angus, la possibilité de changer de paliers d'appel, c'est‑à‑dire remplacer la Cour fédérale par la Cour d'appel fédérale, une chose que le commissaire Dufresne a soulignée, ne peut être faite au moyen de la présente procédure, puisque le projet de loi ne peut pas modifier la Loi sur les Cours fédérales.
Les autres approches suggérées par le commissaire Dufresne ont, en fait, été adoptées. Nous avons discuté avec le commissaire à la protection de la vie privée, et il nous semble que tout le monde comprend pourquoi cela est important et que tout le monde est ouvert à cette proposition. En fait, la dernière fois qu'il est venu témoigner devant le Comité, le CPVP lui-même a dit ceci:
Étant donné qu'on donne le pouvoir de délivrer des ordonnances et des amendes pécuniaires importantes, on se demande s'il n'y aurait pas lieu d'avoir davantage d'équité procédurale.
Je crois qu'on peut répondre à ces préoccupations en disant qu'effectivement, il doit y avoir une équité procédurale plus grande. C'est le modèle qu'on a au Québec et à l'international.
Pendant son témoignage devant le Comité, c'est lui-même qui a soulevé la question et qui a reconnu qu'il existait de bonnes raisons de procéder ainsi.
J'aimerais aussi souligner que, dans votre commentaire précédent, vous présentiez les choses comme si le commissaire ne pouvait pas agir rapidement. En fait, c'est exactement le contraire que prévoit la LPVPC. Le commissaire peut agir rapidement quand il s'agit de prendre des ordonnances, qu'il s'agisse d'une ordonnance de conformité ou d'un arrêté de suspension.
L'idée selon laquelle la fonction du tribunal empêchera le commissaire d'agir rapidement dans les situations où il doit agir rapidement est hors de propos, l'idée selon laquelle d'une façon ou d'une autre les enquêtes ou les enquêtes conjointes seraient impossibles en raison des sanctions administratives pécuniaires, lesquelles, je le dis en passant, sont de toute façon une chose distincte... la capacité de collaborer dans le cadre d'une enquête n'est pas du tout menacée par l'existence d'un tribunal. La seule chose dont le tribunal sera chargé, c'est, au bout du compte, de déterminer le montant des sanctions administratives pécuniaires.