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Chers collègues, bon après-midi.
Je déclare la séance ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue à la seizième réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
Conformément à la motion adoptée le 31 janvier 2022, le Comité se réunit dans le cadre de son étude sur l'équité vaccinale et les droits de propriété intellectuelle.
[Traduction]
M. Marty Morantz (Charleswood—St. James—Assiniboia—Headingley, PCC): Monsieur le président...
Le président: S'agit‑il d'un rappel au Règlement? Laissez-moi terminer mon introduction, si cela ne vous dérange pas. Je vous remercie, monsieur Morantz.
Comme toujours, chers collègues et témoins, vous avez accès à l'interprétation simultanée en sélectionnant l'icône du globe au bas de votre écran. Les députés présents dans la salle sont priés de respecter les directives concernant les masques ainsi que les protocoles sanitaires du Bureau de régie interne.
[Français]
Je profite de l'occasion pour rappeler à toutes et à tous qu'il n'est pas permis de faire des captures d'écran ni de prendre des photos de leur écran.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme et, lorsque vous avez la parole, veuillez parler lentement et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, je vous invite à mettre votre micro en mode sourdine.
Je vous rappelle également que toutes les observations des députés et des témoins doivent être adressées à la présidence.
[Traduction]
Je voudrais à présent accueillir nos témoins. Je donnerai ensuite la parole à M. Morantz avant de commencer, s'il s'agit d'un rappel au Règlement, mais je souhaiterais faire les présentations d'abord.
Chers collègues, nous avons avec nous cet après-midi Mme Ihlas Altinci, conseillère technique, santé sexuelle et reproductive, de CARE Canada.
Merci beaucoup, madame Altinci, de vous joindre à nous en fin de journée dans votre fuseau horaire. C'est très apprécié.
Nous avons également Mme Nicole Tobin, cheffe des programmes, Santé globale. De Médecins Sans Frontières, nous avons avec nous le Dr Adam Houston, chargé de la politique médicale du plaidoyer, et le Dr Jason Nickerson, représentant humanitaire au Canada. Nous recevons également Mme Ana Nicholls, directrice, Analyse de l'industrie, de l'Economist Intelligence Unit. Bienvenue et merci d'être avec nous.
Nous donnerons la parole à chacun des trois groupes pour des déclarations liminaires de cinq minutes, en commençant par CARE Canada.
Encore une fois, monsieur Morantz, est‑ce en rapport avec la discussion ou bien est‑ce quelque chose de différent?
De nos bureaux, situés sur le territoire non cédé de la nation algonquine anishinabe, je remercie le Comité de nous avoir invitées à comparaître dans le cadre de cette étude.
Je m'appelle Nicole Tobin, et je suis cheffe des programmes, Santé globale, à CARE Canada.
La justice entre les hommes et les femmes est au coeur de tout le travail humanitaire et de développement que nous accomplissons au sein de la confédération CARE. Les progrès accomplis en santé ont été mis à mal par les crises concurrentes de la COVID, des conflits et du climat. Il est essentiel d'avoir des femmes aux postes de responsabilité afin de reconstruire des régimes de santé qui assurent à tous des services pouvant sauver des vies.
CARE se joint à la société civile canadienne pour exhorter le Canada à s'efforcer d'obtenir un consensus à l'OMC afin d'améliorer la proposition de dérogation fragilisée à l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, ADPIC, déposée récemment. Aujourd'hui, nous sommes invités à témoigner sur la distribution équitable des stocks de vaccins, du point de vue de l'égalité des genres.
Je suis très heureuse de vous présenter la Dre Ihlas Altinci, conseillère technique en santé sexuelle et reproductive, basée à Gaziantep, en Turquie, et qui travaille en Syrie.
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Je vous remercie et je vous sais gré de me donner cette occasion.
Il est essentiel de régler la question des droits de propriété intellectuelle pour améliorer l'accès aux vaccins dans le monde et cela doit être coordonné avec un investissement dans les régimes de santé et dans les travailleurs de la santé pour la distribution des stocks. La confédération CARE a rejoint 15,7 millions de personnes dans 53 pays grâce à ses programmes en réponse à la COVID. Bien que les contextes soient tous différents, l'analyse effectuée par CARE montre que le coût réel est souvent bien plus élevé que ce qui est pris en compte par les chiffres estimatifs mondiaux, si l'on comptabilise les dépenses de main-d'œuvre de la santé et de préparation des collectivités.
L'équité en matière de vaccins exige un investissement plus important et ciblé sur la distribution. En avril, CARE a témoigné devant le Conseil de sécurité des Nations unies à propos des lacunes en matière d'équité vaccinale dans le secteur humanitaire.
Aujourd'hui, je prendrai dans mon témoignage le cas du Nord-Ouest de la Syrie pour l'équité vaccinale et les activités de sensibilisation. Je vais vous décrire brièvement le contexte syrien.
Par rapport à la population mondiale et à la population canadienne, peu de Syriens ont été vaccinés. Près de 9 % de la population syrienne seulement a reçu une première dose de vaccin et seulement 5 % des Syriens sont entièrement vaccinés.
En Syrie, la COVID est au bas de la liste des priorités. Les gens sont aux prises avec tellement de difficultés, notamment les bombardements, la violence, le manque de nourriture et d'abri, sans parler des masques contre la COVID. Ils vivent dans des tentes ou des abris improvisés et ne peuvent pas respecter la distance sociale. Cependant, et c'est positif, 70 % des travailleurs humanitaires et de la santé sont actuellement complètement vaccinés en Syrie.
Dans notre travail en Syrie, nous manquons cruellement de travailleurs de la santé. Ils travaillent de longues heures dans des conditions difficiles et la plupart des établissements de santé sont improvisés. Ils peuvent se trouver dans une maison, un édifice abandonné ou une école, et ne disposent pas des équipements d'un hôpital ou d'un établissement normaux. La santé et la sécurité des travailleurs sont constamment menacées. Ils n'ont pas toujours accès à un équipement de protection individuelle. Au tout début de la pandémie, ils n'avaient pas de congés de base. Parfois, les membres du personnel cachaient jusqu'à leurs symptômes pour ne pas perdre leur salaire.
Parce qu'ils travaillent dans ces circonstances, certains sont menacés, battus ou même poignardés, et pourtant les travailleurs de la santé — dont plus de 70 % dans le monde sont des femmes — sont la clé permettant d'administrer équitablement les vaccins. Des fournisseurs de confiance peuvent se rendre dans des communautés mal desservies, peuvent faire du porte-à-porte et parler aux gens en personne pour leur faire accepter le vaccin. Les gens leur font confiance, car ils subviennent à tous les besoins sanitaires des familles, comme l'immunisation des enfants et les soins reproductifs et maternels. C'est très important d'avoir des femmes pour administrer les vaccins, car les patientes ont tendance à leur faire davantage confiance.
Voici mes principales recommandations pour obtenir l'équité en matière de vaccins.
Il est tout à fait essentiel que tous les protagonistes investissent dans des régimes de soins médicaux équitables. Nous demandons que le Canada finance correctement et de façon continue les travailleurs de la santé communautaires et de première ligne ainsi que les organisations pour lesquelles ils travaillent.
Nous devons également mettre en place des normes uniformes afin que tous les travailleurs de la santé obtiennent un salaire équitable et des conditions de travail sécuritaires qui les soutiennent, y compris pour les interventions humanitaires. Notamment, il faut qu'ils aient accès à des équipements de protection individuelle, à des tests et à des traitements, aux vaccins et à des congés de maladie payés.
En dernier lieu, afin de nous assurer que les travailleurs de la santé et leurs organisations jouent un rôle important dans les prises de décision ainsi que dans le déploiement et la distribution du vaccin contre la COVID, leur leadership et leur expertise doivent être déterminants dans les décisions concernant la prestation des soins dans les situations de crise. Ils peuvent convaincre les indécis et aplanir les disparités liées au genre en ce qui concerne l'accès aux informations sur la COVID et aux services connexes, notamment recueillir et utiliser des données désagrégées sur le sexe, l'âge et le genre. Ils peuvent aussi élaborer des stratégies en vue de rejoindre les femmes et d'autres personnes marginalisées en particulier.
Je vous remercie.
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Je vous remercie de nous avoir invités.
Médecins Sans Frontières, ou MSF, œuvre sur les lignes de front depuis plus de 50 ans afin de pourvoir aux besoins médicaux créés ou aggravés par les conflits armés, les catastrophes naturelles ou les épidémies. Bien sûr, cette expérience a influé sur notre réponse à la pandémie de COVID‑19.
Même avant l'arrivée des vaccins sur le marché, nous avions exhorté les différents pays et l'industrie pharmaceutique à évacuer les obstacles dus à la propriété intellectuelle sur les technologies médicales contre la COVID et à donner priorité à la distribution de vaccins sécuritaires et efficaces contre la COVID aux travailleurs de la santé et aux personnes vulnérables dans le monde. Nous les avons exhortés à cela parce que, pendant des décennies, MSF a pu constater de quelle façon les brevets entravent la distribution de médicaments vitaux aux patients qui en ont besoin lorsqu'ils sont infectés de maladies telles que le VIH ou la tuberculose. Nous savions pertinemment à quel point il était hautement probable que des vaccins efficaces soient rendus inaccessibles à la population de pays à revenus faibles ou moyens.
Comme vous le savez, cette inégalité a été avérée et la COVID‑19 continue de circuler et d'évoluer, pendant que les vaccins restent hors de la portée de beaucoup de gens.
Nous voulons souligner que l'iniquité d'accès aux médicaments dans le monde causée par les contraintes de propriété intellectuelle n'est pas propre à la COVID‑19. En fait, l'inégalité d'accès aux vaccins contre la COVID est le symptôme de dysfonctionnements dans les cadres de recherche et développement pharmaceutiques et de distribution des produits pharmaceutiques. Par conséquent, la conversation d'aujourd’hui doit dépasser les nécessités actuelles de cette pandémie et englober des questions plus vastes concernant la propriété intellectuelle et l'accès futur aux médicaments.
Cette conversation a également lieu dans le contexte de réformes plus larges dans le cadre du droit international et en particulier du traité sur les pandémies dont la négociation vient de commencer sous l'égide de l'OMS. Le spectre de l'inégalité vaccinale hante ces négociations. L'action ou l'inaction du Canada face aux vaccins pourraient bien influencer la façon dont il est perçu par les autres pays à la table de négociation de ce traité sur les pandémies.
À cette fin, le fait que la communauté internationale n'ait pas réussi à s'entendre sur la question restreinte d'un assouplissement limité dans le temps des règles de propriété intellectuelle pendant la pandémie, comme l'illustre la dérogation aux ADPIC, proposée dès l'automne 2020 et non résolue à ce jour, n'est pas un signe prometteur. Le refus du Canada d'adopter une position publique sur la question n'en est pas un non plus.
Une importante majorité, plus de 100 pays, s'est prononcée en faveur de la dérogation aux ADPIC. Le Canada semble avoir traîné les pieds pendant 18 mois, apparemment en espérant que le problème se résoudrait de lui-même.
Si aujourd'hui l'approvisionnement mondial en vaccins n'est plus la barrière principale à l'accès comme elle l'a été il y a six mois, la propriété intellectuelle continue d'entraver l'accès à d’autres outils contre la COVID comme les médicaments thérapeutiques et restera un problème lors de prochaines pandémies.
Le Canada et les autres pays doivent en faire beaucoup plus pour promouvoir l'accès aux technologies vaccinales, non seulement pour la COVID, mais encore pour d'autres maladies anciennes et nouvelles. Nous savons qu'il y aura d'autres pandémies. Nous savons qu'il y a des maladies aujourd'hui qui pourraient se transformer en pandémies et pour lesquelles il n'y a aucun vaccin, aucun traitement efficace et si peu de recherches à l'heure actuelle. Le Canada a soutenu l'excellent travail effectué pour créer des vaccins et des médicaments thérapeutiques, mais le fait est que ces investissements mènent souvent à des technologies qui ne sont pas développées au‑delà des premières étapes par manque de fonds ou intérêt commercial. Prenons par exemple le vaccin contre l'Ebola découvert au Canada et qui est resté sur les tablettes pendant des années.
Sinon, s'ils sont développés davantage, leur prix est hors d'atteinte pour les patients et les régimes de santé parce que le Canada refuse d'exiger que les médicaments et les vaccins mis sur pied avec l'argent public soient rendus abordables et accessibles lorsqu'ils se retrouvent sur le marché, même pour les Canadiens. C'est une mauvaise politique de santé publique et, honnêtement, une mauvaise pratique commerciale. Un principe directeur essentiel devrait être que les investissements publics dans la santé publique devraient, d'abord et avant tout, produire des bénéfices publics. Ils ne devraient pas être des subventions pour des entreprises incroyablement rentables qui vont en fin de compte contrôler toutes les décisions quant à l'accessibilité et au fait qu'ils soient ou non abordables.
Le soutien renouvelé du Canada pour la recherche et le développement et la fabrication nationale est une bonne chose, mais il devrait être assorti de conditions. Le résultat devrait être mesuré non pas en dollars gagnés, mais en vies sauvées.
Un secteur pour lequel le Canada peut faire quelque chose de positif est celui de la technologie développée au Canada et qui a joué un rôle primordial dans la réponse à la pandémie. La technologie des nanoparticules lipidiques qui est à la base des vaccins à ARN messager comme Pfizer et Moderna, a été inventée au Canada par des entreprises issues de l'Université de la Colombie-Britannique. Le Canada devrait être fier de cette réalisation, mais plus encore, le Canada devrait veiller à ce que cette technologie canadienne permettant de sauver des vies parvienne à tous ceux qui en ont besoin. Au lieu de cela, le Canada a été étrangement silencieux à propos du transfert de la technologie des nanoparticules lipidiques. Pour encourager un tel transfert, le Canada pourrait utiliser le bâton, la carotte ou une combinaison des deux. À l'heure actuelle, tout n'est que silence.
Nous devons continuer d'insister pour que les personnes partout dans le monde soient protégées contre la COVID‑19, mais nous devons également nous préparer aux pandémies à venir en tirant les leçons des réussites et des erreurs de ces deux ans et demi.
Nous serons heureux de répondre à vos questions. Je vous remercie.
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Bonjour. Merci de m'inviter à titre de témoin pour votre étude.
Vous avez sûrement entendu beaucoup de témoignages au sujet du déploiement des vaccins à l'échelle mondiale. Je dois dire que l'inégalité était prévisible. L'Economist Group l'avait prévue en mai 2020, alors que les vaccins étaient en cours de développement. Nous avons publié une carte par la suite qui a été virale parce qu'elle était si controversée. Elle prévoyait que les pays à faible revenu ne verraient pas de vaccination à grande échelle avant 2023 ou même plus tard. Depuis, les événements nous ont donné raison.
Les raisons étaient nombreuses pour façonner nos prévisions. Tout d'abord, il y avait les ententes de financement et d'achat qui servaient à appuyer la recherche et qui visaient à garantir les premiers approvisionnements. Nous avions compris que l'approvisionnement mondial serait lent, ce qui donnerait lieu à des réserves de vaccins. Nous nous attendions à des goulots d'étranglement pour l'expédition et la logistique, ainsi qu'à des difficultés de livraison au niveau local, surtout dans les pays ayant un système de soins de santé peu efficace. Enfin, nous avons estimé que l'hésitation face à la vaccination dans de nombreux pays allait, à des degrés divers, réduire l'adhésion.
À vrai dire, le déploiement de vaccins a été plus rapide que ce à quoi on s'attendait dans certains pays. Je pense notamment aux Émirats arabes unis, au Rwanda et au Cambodge. C'est entre autres grâce à COVAX, mais également grâce aux efforts de ces pays, ainsi que les dons de vaccins faits par d'autres gouvernements et institutions, y compris le Canada. N'en demeure pas moins qu'il y a encore 2,7 milliards de personnes dans le monde qui ne sont pas vaccinées. La plupart d'entre elles vivent dans des pays à faible revenu.
D'autres témoins ont évoqué les répercussions sur la santé de ce déploiement inégal de vaccins, y compris une plus grande possibilité de mutations dangereuses de la COVID. L'Economist Group a également souligné les conséquences économiques. Selon nos prévisions en septembre 2021, l'inégalité en matière de vaccins allait causer une perte du PIB à l'échelle mondiale de 2,3 billions de dollars, les pays les plus pauvres étant les plus touchés. Sur les quatre années, de 2022 à 2025, nous avons prévu que l'Afrique subsaharienne perdrait environ 2,9 % de son PIB en raison d'un faible taux de vaccination. Le Moyen-Orient et l'Afrique perdraient 1,4 % de son PIB, et l'Asie-Pacifique perdrait 1,3 %. En revanche, les pertes dans les autres régions, comme l'Amérique du Nord et l'Europe, seraient négligeables.
Ces prévisions font ressortir les conséquences graves, tant économiques que sanitaires, causées par l'inégalité en matière de vaccins. La question sur laquelle se penche le groupe d'experts vise à savoir si les droits de propriété intellectuelle ont joué un rôle crucial dans cette inégalité, et si un assouplissement mondial des droits de brevet pourrait être bénéfique.
Bien que des sociétés telles que Moderna aient déclaré qu'elles n'allaient pas faire appliquer leurs droits de brevet pendant la pandémie, les défenseurs d'une dérogation au brevet ont fait valoir qu'elle donnerait une protection juridique aux fabricants de produits génériques. Par contre, je doute qu'une dérogation aurait empêché la pénurie de vaccins à l'échelle mondiale qui a été la principale source d'inégalités en 2021. Le droit de pouvoir produire des médicaments novateurs peut être protégé de trois façons — par des brevets et des droits de propriété intellectuelle, mais aussi, dans la plupart des pays, par des droits d'exclusivité de mise en marché et d'exclusivité des données.
Qu'est‑ce qui est protégé au juste? Il n'y a pas que des obstacles juridiques. Il s'agit essentiellement de protéger les connaissances. Cela comprend les connaissances techniques sur la formulation, mais aussi les connaissances non écrites du processus de production. Je dirais que ces connaissances ne peuvent être acquises que par le transfert de technologies, ce qui nécessite la coopération et l'adhésion à long terme par le concepteur d'origine. Cette coopération ne sera pas au rendez-vous si on lui impose une dérogation des droits à la propriété intellectuelle contre son gré.
Je fonde cette opinion en partie sur l'expérience que j'ai acquise en discutant avec des sociétés dans des marchés en développement au sujet des efforts précédents de dérogation aux brevets en vertu de l'ADPIC — au Brésil, par exemple, la loi sur les licences obligatoires a été resserrée pendant la pandémie. Malgré cela, ces dernières années, les sociétés pharmaceutiques du pays ont préféré avoir recours à des licences volontaires négociées avec le titulaire du brevet, puisque ça leur donne accès au transfert de connaissances et de technologies. La société Fiocruz, par exemple, a conclu une entente avec AstraZeneca qui lui permet non seulement de produire ce vaccin, mais aussi de concevoir le sien.
Le transfert de technologies prend du temps, mais l'augmentation de la production aussi. La situation s'est avérée difficile au début de la pandémie, en partie à cause de la pénurie des ingrédients pharmaceutiques actifs. Plus récemment cependant, ces ententes ou contrats de licences volontaires, soutenus par diverses institutions gouvernementales, ont permis d'augmenter la production mondiale de vaccins contre la COVID. D'autres témoins ont aussi remarqué que l'approvisionnement n'est plus un obstacle au déploiement des vaccins.
Je crois, en outre, que la protection des droits à la propriété intellectuelle a été utile au départ pour favoriser l'innovation dans la production de vaccins. Certains des vaccins les plus financés par les fonds publics, notamment les vaccins russes, chinois et Oxford-AstraZeneca, avaient moins d'impératifs commerciaux.
Cependant, les vaccins à ARN messager et les autres technologies à l'origine des vaccins Pfizer et Moderna ont été largement développés dans un environnement commercial au cours des décennies avant la COVID.
Selon un rapport publié dans la revue Nature, il y avait déjà 130 brevets pour des vaccins à ARN messager en 2019, dont 70 % ont été déposés par l'industrie, notamment par Moderna, CureVac, BioNTech et GSK. Ces sociétés ont investi dans cette recherche pendant des décennies parce que ces technologies offrent un grand potentiel bien au‑delà de la COVID. Ces technologies à ARN messager peuvent servir à combattre d'autres maladies infectieuses comme le VIH, le cancer et les troubles génétiques.
C'est pourquoi je soutiens que la levée des protections du brevet des vaccins contre la COVID, à l'encontre de la volonté des titulaires de brevets, ne réduirait pas les inégalités d'accès aux vaccins, car cela découragerait le transfert des connaissances. Si les investisseurs n'ont pas l'impression que leurs brevets sont protégés, cela pourrait nuire à l'innovation future de médicaments qui sauvent des vies.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Il est important de souligner le contexte de cette motion également. C'est un peu frustrant car, en tant que conservateurs, nous voulions, d'une part, protéger les droits du Parlement d'accéder aux documents et, d'autre part, avoir une relation de travail fructueuse et constructive avec ce comité. Nous ne nous réjouissons pas de devoir présenter une motion comme celle‑ci alors que nous avons des témoins, mais le fait est que cette motion a été présentée pour la première fois en décembre. Le gouvernement a laissé traîner les choses à l'époque, et comme mon collègue l'a signalé, nous travaillons et cherchons des occasions de pouvoir présenter cette motion. On nous a continuellement mis des bâtons dans les roues pour pouvoir tenir ce débat ici à ce comité sur la question des documents du laboratoire de Winnipeg.
En tant que Comité des affaires étrangères, nous devons prendre très au sérieux le fait que nous discutons de menaces à la démocratie, du déclin de la démocratie dans le monde. Nous répondrions en partie à cela en veillant de toujours nous conformer aux pratiques démocratiques exemplaires, à la primauté du droit et aux droits du Parlement quant à notre fonctionnement et à nos pratiques ici au Canada.
Nous avons eu une situation dans le passé où un comité de cette Chambre, exerçant tous ses droits en tant que comité, a ordonné la production de documents. Le gouvernement a refusé à plusieurs reprises de s'y conformer et, dans ce contexte, tous les partis d'opposition, conservateurs, bloquistes et néo-démocrates, ont été très fermes sur la question des droits des comités parlementaires. En outre, la demande initiale de documents a été en fait acceptée à l'unanimité par tous les membres du Comité, y compris par les membres du gouvernement.
C'est un principe important pour ce qui est de l'accès aux documents. Nous avons essayé de ramener cette question devant le Comité afin d'en débattre. Malheureusement, vous n'avez pas répondu à mon collègue, le vice-président. Vous n'avez pas jugé bon de réserver du temps pour planifier cette discussion. Je pense que nous devons en parler. Il ne s'agit pas seulement de savoir si le gouvernement peut créer une occasion pour des intervenants externes, des juges, de se prononcer sur ce que les comités parlementaires peuvent et ne peuvent pas voir. Les parlementaires ne devraient pas avoir la prétention de dire aux juges comment faire leur travail, et les juges ne devraient pas avoir la prétention de remplacer le fonctionnement des comités parlementaires.
Je pense que la question est claire. Nous disons de ramener la motion, de tenir un débat et d'en terminer en tenant un vote. Si nous ne sommes pas en mesure de procéder ainsi, nous aurons vraiment miné le bon fonctionnement de ce que les comités sont censés faire.
Encore une fois, je reviens simplement sur le fait que, en tant que Comité des affaires étrangères, nous devons penser aux normes démocratiques. Nous devons penser à l'exemple que nous donnons. Nous ne voulons pas voir un déclin démocratique au Canada, comme nous l'avons vu dans certains autres pays. Cela signifie qu'il faut défendre et respecter les prérogatives du Parlement d'exiger la production de documents et de ne pas reculer ou prétendre que nous sommes victimes d'une impasse. Il n'y a pas d'impasse ici. Il s'agit d'un problème où le gouvernement a tout simplement refusé d'adhérer à ses obligations constitutionnelles.
J'espère que cette motion de mon collègue sera adoptée, et j'espère que nous pourrons aller de l'avant avec cette motion.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
Pour poursuivre dans le même ordre d'idées que mon collègue, nous avons des institutions démocratiques établies de longue date dans ce pays, dont l'une est le système de comités permanents auquel nous participons actuellement. Dans ce cas particulier, M. Chong a présenté une motion qui a été adoptée par la Chambre des communes lors de la dernière législature. Il s'agit d'une motion très réfléchie qui traite de manière très raisonnable de l'idée de s'assurer qu'il y a du caviardage et que les documents sont examinés par le légiste et le conseiller parlementaire, ainsi que par ce comité, qui rend des comptes directement au Parlement. Le comité spécial que votre gouvernement a proposé ne rend pas de comptes au Parlement. On veut vraiment s'interroger à savoir si quelque chose de très grave est survenu, s'il y a eu une grave atteinte à la sécurité nationale au laboratoire de Winnipeg.
Il est essentiel à ce stade‑ci que ce comité, qui est saisi de cette motion depuis décembre, débatte de la question, obtienne ces documents, discute de ce qui doit être caviardé ou non et abandonne l'idée d'un comité spécial. En tant que parlementaires, nous ne disons pas aux juges comment ils doivent régler leurs causes. Franchement, trois juges à la retraite ne devraient pas nous dire, en notre qualité de parlementaires élus qui siègent à ce comité en tant qu'institution démocratique, comment nous devrions régler cette affaire.
Je vous exhorte, afin de veiller à ce que tous les Canadiens aient confiance en l'intégrité de nos institutions démocratiques — sur une question aussi importante que celle‑ci, où l'on a demandé la production de documents à maintes reprises au cours de la présente législature et la précédente —, à ce que cette question soit traitée conformément aux systèmes historiques établis de longue date qui ont été créés expressément à cette fin. Le Comité est saisi à juste titre de cette motion, et j'exhorte tous nos collègues...
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Merci, monsieur le président.
Je crois qu'il est important de souligner que le nouveau comité formé pour étudier la question de nature très sensible est un comité spécial de parlementaires. Cela a déjà été fait par le passé. Nous l'avions fait à la demande des membres de l'opposition, pour la question de l'Afghanistan, entre autres.
La seule différence dans le cas présent, c'est que trois juges à la retraite, choisis par tous les partis — ce sera donc un appel fondé sur le consensus —, détermineront les passages à caviarder pour protéger la sécurité et la nature sensible du rapport. C'est là où les juges entrent en jeu, pour éviter toute forme de partisanerie. Ainsi, nous respectons nos accords avec le Groupe des cinq et les autres organismes pour protéger la nature de nos renseignements.
Ces opinions indépendantes sont très importantes et font partie intégrante de notre gouvernance. En tant que parlementaires, nous avons des obligations, qui seraient prises en compte par ce comité. Nous avons aussi d'autres engagements, et la population fait confiance aux juges et à leur intégrité. Par conséquent, il est tout à fait approprié que trois juges à la retraite, qui ont une grande expérience, soient responsables de veiller à ce que ce qui est publié soit sécuritaire, protège l'intégrité de nos systèmes et protège les rapports de renseignement que nous recevons.
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Monsieur le président, soyons clairs ici. Nous avons présenté une motion sur le droit démocratique des parlementaires d'accéder aux documents. Nous l'avons présentée il y a quatre mois, à la suite d'une situation où le gouvernement avait traîné le de la législature précédente devant le tribunal pour l'empêcher de faire respecter les droits des parlementaires, pour ensuite lancer des élections pour empêcher le Parlement d'agir à la suite de la violation des privilèges des parlementaires.
Les parlementaires ont le droit fondamental de demander des documents qu'ils peuvent utiliser dans l'exercice de leurs fonctions. Le gouvernement a fait fi de ce principe constitutionnel de base et a ensuite lancé des élections après avoir essayé d'intenter une poursuite contre le .
Nous sommes revenus en décembre avec une motion visant à obtenir ces documents, pour reprendre les travaux qui avaient été entamés dans le cadre d'une législature précédente. Par la suite, vous, monsieur le président, et d'autres membres du Comité ne nous avez pas donné l'occasion de discuter de cette motion en quatre mois. Il est scandaleux qu'aujourd'hui vous laissiez entendre que nous sommes d'une quelconque façon responsables du fait qu'il soit nécessaire de débattre de la question en la présence de témoins.
Si le président avait eu la courtoisie ne serait‑ce que de répondre au courriel de mon collègue, le vice-président du Comité, lui demandant de prendre 15 minutes pour discuter de la question, nous aurions pu facilement prévoir du temps à cet effet. Nous aurions également pu débattre de la question demain, puisque nous avions une heure de libre. D'ailleurs, je crois que cette plage horaire est toujours disponible. La demande du porte-parole de l'opposition, M. Chong, voulant que nous débattions de la question des documents du laboratoire de Winnipeg pendant une heure a été complètement ignorée. Lorsque le gouvernement ignore de façon aussi irrespectueuse le droit fondamental des parlementaires d'accéder aux documents, à un certain point nous devons faire valoir l'importance des normes démocratiques.
J'ai des petites nouvelles pour le Comité. Il existe des organisations internationales qui surveillent et suivent l'état de la démocratie, et ils ont constaté un déclin démocratique au Canada. Je vais vous donner un exemple. Selon l'Institut international pour la démocratie et l'assistance électorale, un groupe de réflexion suédois qui évalue la démocratie, la note du Canada relative aux contrôles du gouvernement a baissé de façon considérable et est passée de 0,77 à 0,68. Nous accusons un retard par rapport aux autres pays en ce qui a trait à l'efficacité du Parlement et aux contrôles du gouvernement.
On parle du déclin démocratique et de ce qui se passe ici, au Canada, dans nos propres institutions. Il faut prendre la question très au sérieux. J'ai un grand respect pour le travail important que font les témoins, mais si le gouvernement se montre aussi irrespectueux à l'égard de nos institutions et du droit des députés de demander des documents, alors il est temps pour nous d'agir.
Je souligne que le , qui était membre du Comité spécial sur les relations sino-canadiennes lors de la dernière législature, avait été très clair au départ et avait dit que nous devions avoir accès à ces documents. Les membres de ce comité avaient voté deux fois à l'unanimité pour l'obtention de ces documents, que le gouvernement avait refusé de transmettre, ce qui portait atteinte aux privilèges du comité et de la Chambre.
Cette saga dure depuis longtemps. Elle n'est pas compliquée. Nous ne sommes pas dans une impasse ou dans une affaire complexe sur le plan procédural. Le gouvernement ne respecte tout simplement pas la loi et ne reconnaît par les prérogatives juridiques fondamentales du Parlement. Ce sont d'anciennes prérogatives, qui existent dans les parlements du monde entier. M. Sarai parle de nos obligations à l'égard des pays du Groupe des cinq. Ces pays ont des gouvernements qui respectent les droits de leurs parlements.
Je pourrais vous dire que le Royaume-Uni n'aurait pas de problème à échanger des renseignements avec le Canada, même si le Canada respecte les droits des parlementaires, parce que le Royaume-Uni échange des renseignements avec les comités parlementaires et respecte le droit de ces comités de faire de telles demandes.
Le gouvernement tente de répandre la confusion quant à la différence évidente entre l'idée d'un comité parlementaire et l'idée d'un comité formé de parlementaires. La distinction est claire. Cela signifie qu'un comité de parlementaires peut être n'importe quel groupe de parlementaires qui se réunit pour étudier n'importe quelle question.
Si M. Aboultaif, M. Morantz et moi formions un comité pour boire du scotch une fois par mois à Winnipeg, il s'agirait d'un comité de parlementaires, parce que c'est ce que nous sommes. Ce serait très différent d'un comité parlementaire, qui est formé par la Chambre et qui se voit conférer des droits par celle‑ci. Cela fait partie de la fonction démocratique de notre pays.
Lorsque le gouvernement dit qu'il va créer un comité de parlementaires qu'il pourra contrôler et qui sera assujetti à un ensemble de règles distinct, ce n'est pas du tout la même chose qu'un comité parlementaire.
M. Sarai a dit que nous avions créé d'autres comités spéciaux par le passé. C'est vrai: nous avons créé des comités parlementaires spéciaux. Le comité sur l'Afghanistan auquel il a fait référence est un comité parlementaire. Il y a eu le Comité spécial sur les relations sino-canadiennes, des comités sur l'équité salariale et d'autres depuis que je siège au Parlement. Ce sont des comités spéciaux du Parlement. Il y a les comités parlementaires et surtout, il y a les droits de ces comités, notamment le droit de demander des documents non caviardés et de les étudier.
Ce n'est pas la même chose que la création, par le gouvernement, d'un comité de députés qui sera assujetti à de nouvelles règles particulières.
Le gouvernement essaie de nous confondre alors qu'il s'agit d'une question très claire et très simple: un comité parlementaire n'est pas simplement un comité formé de parlementaires. Il ne s'agit pas seulement d'un groupe de députés qui se réunit. Le comité parlementaire joue un rôle juridique et constitutionnel particulier au pays. Il exerce des fonctions démocratiques. Il étudie les lois. Il joue un rôle clé dans le processus législatif. Il n'est pas simplement créé pour entendre les témoins et faire des recommandations stratégiques. Il peut demander des choses précises, comme certains documents. Il peut examiner des renseignements de nature délicate et donner des directives précises qui, dans certains contextes, doivent être respectées.
Malheureusement, les comités ont peu de recours. Ainsi, lorsque le gouvernement ignore ses obligations juridiques de répondre à un comité, celui‑ci doit s'en remettre à la Chambre, qui peut prendre d'autres mesures.
La question dont nous sommes saisis est simple: est‑ce que le gouvernement doit respecter la loi ou est‑ce qu'il se croit au‑dessus de la loi? Est‑ce que les députés veulent insister sur le principe voulant que les comités aient des droits ou non?
Je souligne que les députés de tous les partis de l'opposition, y compris les députés du NPD, ont justifié très clairement l'existence de ces droits par le passé. Je me souviens d'une motion présentée lors de la dernière législature devant le Comité au sujet de l'accès à l'information sur l'exportation des armes. La motion avait été présentée par l'ancien député Jack Harris, et avait été appuyée par tous les membres de l'opposition. Je crois même qu'elle avait été appuyée par les députés du gouvernement.
Les députés du NPD ont, à certaines reprises — et même de façon constante jusqu'à maintenant — insisté sur ce principe même. Je crois qu'il faut être conscients de ce que nous perdrions si nous permettions l'érosion de ce principe.
J'ai parlé plus tôt du déclin de la démocratie. Ce n'est rien de nouveau. Des groupes de réflexion internationaux crédibles qui surveillent et mesurent l'état de la démocratie tiennent compte de diverses variables et de divers indicateurs. Nous constatons au pays un manque de respect du gouvernement à l'égard des normes démocratiques et à l'égard de la loi. Je pourrais vous donner de nombreux autres exemples qui font les manchettes à l'heure actuelle. Je ne le ferai pas, mais je crois que les membres du Comité savent de quoi je parle. Le fait est que ces comportements contribuent aux problèmes et défis fondamentaux auxquels nous faisons face aujourd'hui.
Ma question à l'intention des membres du Comité est la suivante: croyons-nous qu'un président qui est député du gouvernement devrait pouvoir ignorer, tout simplement, les droits et le souhait des députés du Parlement de discuter d'un enjeu et, de façon particulière, de soulever la question du droit d'accès aux documents, pendant des mois? Est‑ce que les députés sont prêts à baisser les bras et à accepter que l'on remplace un comité parlementaire par un groupe de parlementaires qui se réunira selon des règles définies, mises en œuvre et contrôlées par le gouvernement?
Il faut éviter de penser uniquement à court terme. Il s'agit d'un principe fondamental de notre démocratie et des normes qui doivent être respectées.
Par conséquent, j'espère que nous allons appuyer la motion. Nous pourrons la présenter et enfin faire une chose que nous aurions dû faire il y a quatre mois — et même six mois avant cela —, c'est-à-dire insister — pour la question clé des documents du laboratoire de Winnipeg et pour toutes les questions des Canadiens à ce sujet — pour que les parlementaires aient accès aux documents dans le contexte d'un comité parlementaire doté de réels pouvoirs, qui nous ont été conférés non pas par le gouvernement, mais bien par les gens qui nous ont élus et par le cadre constitutionnel qui est essentiel au pays.
J'espère que les députés éviteront d'adopter une vision à court terme et tâcheront de défendre ce principe, parce que si le NPD ou tout autre parti...
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Merci, monsieur le président. Je serai bref.
Je tiens à affirmer avec fermeté que, comme l'a dit M. Genuis — je ne le cite pas avec exactitude —, je crois en la suprématie du Parlement. Je crois au droit absolu des parlementaires de demander des documents, des articles et d'autres éléments pour faire leur travail, mais je suis aussi très fermement convaincu que, dans cette situation, la solution trouvée est élégante. J'espère que le Parti conservateur et le Bloc Québécois saisiront l'occasion de lire les documents non caviardés et de comprendre la nature des éléments qui avaient été caviardés, puis de suivre le processus qui fera intervenir un comité judiciaire indépendant, lequel rendra une décision définitive. Je pense que cette démarche est respectueuse du Parlement. Il n'y a rien dans notre tradition qui dit que les comités parlementaires ont la primauté sur les parlementaires, et il y a de la flexibilité. La tradition permet toujours le changement et la compréhension.
J'ai entendu M. Genuis parler tout à l'heure d'un ministre du cabinet fantôme. Je lui demanderais, par votre intermédiaire, monsieur le président, de me dire à un moment donné où, dans notre Règlement, ce titre existe. Nous l'acceptons parce que c'est une tradition émouvante qu'un parti a choisi de mettre en place, mais cela ne fait pas partie de la tradition parlementaire, et cela ne fait pas partie de notre Règlement. Cependant, nous le tolérons, et nous leur permettons de l'utiliser, bien que cela ne fasse pas partie de notre tradition. De même, les comités parlementaires font partie de notre tradition, mais il n'y a rien dans notre tradition qui interdise autre chose.
En toute franchise, nous empruntons une page à l'ancien premier ministre Stephen Harper, qui, je pense, a également trouvé une solution élégante en ce qui concerne les documents sur l'Afghanistan. Cette solution était acceptable pour les conservateurs de l'époque, dans une situation très comparable. J'espère qu'ils verront qu'il s'agit d'une solution très acceptable et élégante.
Cette solution accomplit deux choses. Elle préserve le droit des parlementaires, qui sont délégués. Je ne suis pas présent à tout ce qui se passe au Parlement, mais tant que des parlementaires partageant mon point de vue y participent, je me sens inclus. Cela donne une chance au Parlement d'exprimer sa suprématie et de faire cette demande.
En même temps, cela respecte la nature de la sécurité publique. J'espère que le parti des droits civils — titre que s'est attribué le Parti conservateur après l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme sous un gouvernement conservateur — verra également que nous avons la responsabilité, en tant que parlementaires, de défendre le bien de l'ensemble du pays. Cela dépasse la politique partisane. Cela nous amène à faire quelque chose de bien.
De notre côté, nous allons voter contre cette motion, sans toutefois créer un vide. Nous voterons contre en sachant qu'une solution a été proposée. Nous voterons contre en sachant que, avec un peu d'espoir, les membres de l'opposition officielle trouveront un moyen de participer. Ils ont demandé à voir les documents. Les documents seront disponibles. C'est un moyen pour eux de les voir. J'espère qu'ils feront confiance à leurs collègues qui ont été choisis pour faire partie de ce comité afin de faire ce travail en leur nom.
Je vous remercie, monsieur le président.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je vais tâcher d'être bref. Je vais voter en faveur de cette motion. J'ai toutes les raisons d'y être favorable. D'abord, je faisais partie, au départ, du groupe des députés qui avaient réclamé la transmission de ces documents. Ensuite, les députés du Bloc québécois ont été exclus de ces tractations entre le NPD et le Parti libéral pour la constitution de ce comité ad hoc qui échappe aux règles parlementaires.
Cela étant dit, je trouve extrêmement disgracieuse la façon dont nos collègues s'y sont pris aujourd'hui pour amener cette motion. D'abord, nous n'en avons pas été informés. Nous ne savions pas ce qui allait se passer aujourd'hui. Sur le plan de la collaboration entre parlementaires, il aurait fallu, à tout le moins, nous donner un petit aperçu de ce qui se tramait.
Je comprends qu'il y a un élément d'actualité qui peut expliquer le fait que l'on veuille procéder rapidement. Toutefois, j'avoue que j'ai trouvé un peu exagéré l'effet de toge de M. Genuis, de le voir déchirer sa chemise. Il a invoqué le fait que c'était inadmissible que cette motion, qui avait été déposée au mois de décembre, n'ait jamais été adoptée. Je regrette de le dire, mais nous avons eu l'occasion de définir un plan de travail. À ma grande surprise, les conservateurs ne sont pas revenus avec la motion concernant le Laboratoire national de microbiologie de Winnipeg. J'ai demandé à mes collègues s'il y avait une erreur ou une raison pour laquelle ils ne revenaient pas sur cette motion à propos du laboratoire de Winnipeg. Apparemment, il y avait des considérations de nature interne qui faisaient que ce n'était pas le moment de revenir sur cette motion.
Or, à part les tractations secrètes entre les libéraux et les néo-démocrates, il n'y a rien qui justifiait que cela doive nécessairement se passer aujourd'hui et que l'on doive cavalièrement libérer des témoins qui s'étaient préparés pour venir nous apporter leurs points de vue et jeter de la lumière sur la question importante de l'équité vaccinale.
Je suis extrêmement embarrassé. Bien que je sois tout à fait solidaire quant à ce qu'amènent aujourd'hui nos collègues du Parti conservateur, je suis extrêmement embarrassé de la façon dont ils l'ont fait et de la façon très cavalière et malpolie dont nous nous sommes comportés conséquemment avec les témoins. Nous avons évoqué, il y a quelques instants, la possibilité de leur demander de revenir à une date ultérieure. Bien honnêtement, si j'étais un de ces témoins, je dirais:
[Traduction]
Merci, mais non merci.
[Français]
Ces témoins ont pris le temps de se préparer. Ils étaient prêts. Il y a même des témoins qui nous appelaient de l'étranger. Je sais ce qu'ils vivent, parce que, ce matin, j'étais en ligne pour l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. Je suis donc exactement sur le même fuseau horaire que nos amis européens. Je trouve inadmissible que nous nous soyons comportés comme de véritables malappris à leur égard. Si nous voulons prétendre pouvoir défendre et représenter correctement nos concitoyennes et concitoyens, cela requiert, avant toute chose, de faire preuve d'un minimum de considération à leur égard quand nous nous donnons la peine de les inviter et qu'ils se donnent la peine de se préparer pour nous éclairer sur une question fort importante.
J'ai dit ce que j'avais à dire, monsieur le président.
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Merci, monsieur le président.
Je veux simplement me faire l'écho de certaines des choses que mon collègue, M. Bergeron, a dites.
Ce que j'espérais vraiment éviter au sein de ce comité, c'était l'obstruction, les manigances, les va‑et‑vient qui ont empêché ce comité de faire son travail au cours de la dernière législature. C'était mon objectif. C'est ce que j'espérais.
Sachant que nous vivons une époque où l'équité vaccinale est un enjeu qui touche des milliards de personnes dans le monde, que nous sommes en pleine guerre et que nous devons nous assurer d'avoir le temps d'examiner ce que fait la Russie en Ukraine, qu'il y a des conflits au Tigré, que nous devons avoir l'occasion d'examiner ce qui se passe en Palestine et en Israël, ainsi qu'en Afghanistan, je suis consternée que les conservateurs aient choisi de faire passer leur petite politique avant toutes ces questions très importantes.
Ils affirment qu'ils ont fait tout ce qu'ils pouvaient pour travailler avec les membres de ce comité, ce qui est totalement faux. On nous a demandé, avec trois jours de préavis, d'être ici un vendredi après-midi. J'ai fait savoir très clairement aux membres du Parti conservateur que ce ne serait pas possible.
Tout d'abord, j'ai un devoir envers la Chambre. Je suis une agente supérieure de la Chambre. Je ne peux pas renoncer à ce devoir. J'ai l'obligation de représenter mes électeurs à la Chambre des communes.
Je dois retourner dans ma circonscription et rencontrer mes commettants. C'est ce que font les députés, la fin de semaine. Je fais des projets. Toutes sortes de choses sont inscrites à mon calendrier: je vais ainsi à la rencontre de mes commettants pendant la fin de semaine, puis je reprends l'avion pour Ottawa, afin d'être ici la semaine suivante pour accomplir mon travail.
Je suis désolée, mais trois jours de préavis ne suffisent pas. Vous dites que vous vous êtes efforcés pendant quatre mois de faire en sorte que le Comité travaille ensemble, puis vous nous convoquez à une réunion d'urgence avec un préavis de trois jours: c'est tout à fait inapproprié.
Nous avons une solution qui donnerait aux parlementaires la possibilité de voir ces documents. Nous devons trouver un moyen de travailler ensemble comme de véritables adultes, afin de ne pas tomber dans l'obstruction systématique au sein de ce comité. Notre travail est trop important. Je suis profondément déçue que nous n'ayons pas été en mesure d'entendre nos témoins aujourd'hui. Je présenterai une motion pour demander le retour de ces témoins. J'espère certainement que M. Bergeron a tort de prédire qu'ils trouveront que c'est une perte de temps et que cela n'en vaut pas la peine. J'espère qu'ils accepteront de se joindre à nous à nouveau. C'était un groupe important. Ces témoins allaient nous fournir de l'information importante, et j'espère qu'ils pourront revenir.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Je serai bref. Très respectueusement, si un membre particulier veut que ce comité travaille bien et de façon collégiale, ce membre ne devrait pas s'engager avec le gouvernement dans des négociations secrètes qui n'incluent pas tous les partis membres de ce comité, concernant le traitement de ces documents qui ont prétendument été remis.
Je conviens que le travail de ce comité sur de nombreux fronts est d'une importance capitale. Le droit de ce comité d'accéder aux documents est également d'une importance capitale. Les droits des comités parlementaires et les conventions qui sont au cœur des droits des parlementaires dans notre Constitution sont également d'une importance capitale.
Nous aurions pu réserver du temps demain. Nous aurions pu réserver du temps aujourd'hui. La raison pour laquelle cela était nécessaire, en particulier cette semaine — l'urgence —, c'est la révélation des négociations secrètes qui a obligé ce comité à se prononcer sur cette question.
Pour terminer, je veux parler des comparaisons qui ont été faites avec la situation des documents relatifs aux détenus afghans. N'oublions pas que dans le cas des documents sur les détenus afghans, le Président Milliken a rendu une décision, selon laquelle le Parlement avait le droit d'accéder à ces documents. Cependant, il a donné le temps nécessaire à une discussion impliquant tous les partis. Cette discussion a eu lieu et s'est déroulée en totale conformité avec la décision du Président Milliken, lequel, ce qui est plutôt drôle, avait été élu à l'origine en tant que membre du caucus libéral.
Lorsque le , qui avait été élu par le parti du gouvernement de l'époque, contrairement au Président Milliken, a pris une décision, le gouvernement n'a pas suivi sa décision et l'a même poursuivi en justice. La façon dont le gouvernement de Stephen Harper a agi à l'égard du Président Milliken et la façon dont le gouvernement actuel a agi à l'égard du Président Rota ne pourraient pas être plus différentes: dans un cas, le gouvernement a respecté la décision; dans l'autre, le gouvernement a poursuivi le Président en justice.
Les arguments sont là et je suis prêt à passer au vote, mais permettez-moi de dire que de toutes les questions que nous traitons en tant que comité, tout est en fin de compte en aval de notre reconnaissance des droits des comités parlementaires, de leur capacité d'exiger des documents, d'exiger des preuves, et du rôle important de ces comités pour ce qui est d'agir en fonction de ces droits particuliers. C'est notre principale directive en tant que comité: la capacité d'exercer ces droits pour accéder à des documents et à de l'information, et la capacité d'informer le gouvernement grâce à cet accès d'une manière que d'autres personnes étudiant les mêmes questions n'ont pas le pouvoir de faire.
Nous ne pouvons pas céder, et nous ne pouvons pas accepter la solution qui part du principe que le gouvernement n'a pas à se conformer aux ordres des comités parlementaires. Sur ce point, nous sommes fermes.
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On demande un vote par appel nominal.
(La motion est adoptée par 11 voix contre 0.)
Le président: Merci beaucoup. La motion est adoptée à l'unanimité. En théorie — espérons que cela ne se produira pas —, le débat est de nouveau ouvert sur la motion dont est saisi le Comité.
Est‑ce que quelqu'un souhaite poursuivre le débat sur la motion de M. Chong telle qu'elle a été proposée aujourd'hui et dont le Comité est saisi?
Il n'y a personne. Est‑ce que quelqu'un souhaite la tenue d'un vote par appel nominal sur cette motion également? D'accord.
(La motion est rejetée par 6 voix contre 5. [Voir le Procès-verbal])
Le président: Merci beaucoup. Cela règle la question de la motion.
Monsieur Oliphant, attendez un instant. J'aimerais signaler rapidement quelque chose.
Mesdames et messieurs, avant que nous terminions, je tiens à vous signaler qu'un ensemble de deux propositions de voyages vous a été distribué. Je vous invite à l'examiner au cours de la fin de semaine, pour que nous nous entendions rapidement sur une motion à l'appui de cela lundi, avant ou après nos groupes de témoins. Je vous en saurais gré.
Monsieur Oliphant, c'est à vous.