J'ouvre maintenant la séance.
Je vous souhaite la bienvenue à la 115e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien.
Je veux souligner que la réunion a lieu sur le territoire traditionnel non cédé du peuple anishinabe algonquin.
Notre réunion se déroule sous forme hybride. Conformément au Règlement, les députés peuvent y participer en personne ou par l'intermédiaire de l'application Zoom.
[Traduction]
Vous connaissez les règles, mais je vais vous les répéter rapidement.
Même si nous ne sommes pas obligés de porter le masque, il est toujours conseillé de le faire pour prévenir les infections et les maladies respiratoires. En outre, rappelez-vous que vous n'avez pas le droit de prendre de photos de votre écran ni quelque autre photo que ce soit pendant la réunion, d'autant que l'enregistrement de la séance sera disponible sur le site Web plus tard. Je veux vous rappeler une chose très importante. Les interprètes risquent de subir de graves blessures auditives. Donc si vous avez un appareil, ne le placez pas à côté de votre microphone et assurez-vous qu'il n'interfère pas avec les bruits statiques ou les craquements afin de ne pas abîmer l'ouïe de nos interprètes.
Nous accueillons aujourd'hui deux témoins de BCE Inc. Par vidéoconférence, nous accueillons Mirko Bibic, président et chef de la direction. Nous accueillons également Robert Malcolmson, vice-président exécutif et chef des affaires juridiques et réglementaires, qui est également en vidéoconférence.
Selon les règles, monsieur Bibic, vous disposerez de cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions. Je vous ferai signe 30 secondes avant la fin pour vous permettre de conclure. N'oubliez pas que, même si vous ne terminez pas votre déclaration en cinq minutes, vous aurez l'occasion de développer votre pensée lors de la période de questions.
Je vais commencer...
:
Je vous remercie, madame la présidente, ainsi que les membres du Comité.
[Traduction]
J'espérais me joindre à vous il y a un mois, avant que le Comité ne reporte notre réunion. Je suis donc ravi d'avoir cette conversation importante aujourd'hui.
Depuis que Bell a acquis CTV en 2011, l'industrie mondiale des médias a subi des changements radicaux. Le secteur des médias est en évolution en raison des changements technologiques, les nouvelles habitudes des consommateurs, les besoins changeants des annonceurs et de la concurrence vigoureuse des diffuseurs étrangers et des géants du Web qui ne sont pas soumis aux mêmes réglementations coûteuses que les diffuseurs canadiens.
En 2026, la moitié des ménages ne seront pas abonnés à la télévision traditionnelle. Entretemps, les revenus de diffusion en continu, qui se chiffrent déjà en milliards, ont augmenté de 14 % l'année dernière et augmenteront encore de 500 millions de dollars cette année, ce qui profitera de manière disproportionnée aux géants du Web étrangers. Le public s'attend désormais à avoir accès aux nouvelles en tout temps, et les entreprises de médias ont dû s'adapter.
Certains ont cherché à déformer les faits concernant la restructuration de Bell. Nous devrions tous nous entendre pour dire que les faits ne mentent pas; les voici donc.
Un: Bell continue d'investir dans les nouvelles et les médias. Depuis que je suis devenu chef de la direction en 2020, Bell Média a investi plus d'un milliard de dollars en capital pour mieux servir nos téléspectateurs. Ce montant s'ajoute à près de 1,7 milliard de dollars que nous investissons chaque année dans le contenu. Malgré ces investissements importants, les chaînes traditionnelles de CTV ont perdu plus de 180 millions de dollars l'an dernier. De plus, Bell Média subit des pertes de plus de 40 millions de dollars par année en lien avec les services de nouvelles.
Deux: Bell Média dépasse largement ses obligations réglementaires en matière de nouvelles locales. Nous diffusons plus de 25 000 heures de nouvelles locale par année. C'est 150 % de plus que le nombre d'heures exigées par le CRTC.
Trois: CTV News Channel, CP24 et BNN diffusent 20 000 heures de nouvelles par année. C'est 300 % de plus que le nombre d'heures exigées par le CRTC.
Quatre: CTV publie environ trois fois plus d'articles d'actualité numériques par jour que lorsque Bell l'a achetée il y a 13 ans.
Cinq: CTV diffuse aujourd'hui plus de bulletins nationaux originaux qu'à n'importe quel moment de son histoire de plus de 60 ans.
Six: Pour la première fois, CTV National News comptera bientôt des journalistes qui produiront des reportages dans les dix provinces et 35 % de plus de correspondants qu'en 2023.
[Français]
Septièmement, nous investissons plus que jamais dans le contenu francophone. En 2021, nous avons lancé Noovo Info. Pensez-y: au cours d'une période difficile, Bell Média a bâti une salle de nouvelles à partir de rien. Nous avons engagé une équipe de journalistes francophones pour diffuser des nouvelles dans cinq marchés québécois. Depuis, la salle de nouvelles s'est agrandie de 25 %.
Enfin, huitièmement, notre plateforme de diffusion en continu, Crave, offre près de 11 000 heures de contenu en français. Par ailleurs, notre émission Véronique et les Fantastiques, diffusée sur Rouge FM, a récemment annoncé qu'elle ne diffuserait que de la musique francophone.
Aucune autre entreprise de médias canadienne n'a réalisé des investissements d'une telle ampleur, mais cela ne suffit pas à relever les défis auxquels notre industrie est confrontée.
[Traduction]
Par conséquent, Bell a pris la décision difficile de procéder à des réductions de personnel, comprenant des départs et la suppression de postes vacants. Au cours de notre récente restructuration, moins de 10 % des départs sont survenus chez Bell Média, c'est‑à‑dire 440 postes au total. Nous savons que cette décision est difficile pour tous les employés touchés. C'est pourquoi nous les soutenons en leur offrant une indemnité de départ équitable, des services de transition de carrière et un accès continu à leur couverture de soins de santé. Nous avons également respecté toute obligation en vertu des conventions collectives.
Bell n'est pas seule. Au cours de la dernière année, CBC/Radio-Canada, financée par les contribuables, a annoncé la suppression de 800 postes; TVA a supprimé près de 550 postes et Corus a réduit ses effectifs d'au moins 15 %. L'année dernière, Telus a annoncé la suppression de 6 000 postes. De son côté, Rogers a également procédé à une restructuration. La liste est longue, puisqu'elle englobe des noms comme Shopify, Canada Goose, Lightspeed, Postmedia, Metroland et SalWire, de même que Paramount, Disney, Microsoft, Apple et d'autres aux États-Unis.
Soyons clairs: nous ne demandons pas de protections spéciales. Nous demandons des conditions de concurrence équitables avec les géants mondiaux du Web. Pourtant, le cadre réglementaire ne s'est pas adapté assez rapidement aux défis considérables auxquels nous sommes confrontés. Il a fallu trois ans pour élaborer la Loi sur la diffusion continue en ligne, et cette dernière n'est toujours pas en vigueur.
Chaque année, Bell verse près de deux milliards de dollars de frais réglementaires et de contributions au gouvernement fédéral. En revanche, Amazon, Disney, Netflix et d'autres, tous beaucoup plus grands que Bell, ne paient rien, et ce, malgré les milliards de dollars de revenus qu'ils tirent des Canadiens.
J'espère mettre à profit les deux heures que nous allons passer ensemble pour discuter des solutions constructives, afin que les générations futures aient accès à des histoires qui reflètent notre pays.
Merci.
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Merci, madame la présidente.
Merci, monsieur Bibic, d'être là.
La conversation d'aujourd'hui découle directement d'une décision que Bell a prise d'éliminer des emplois après, comme vous l'a dit Mme Thomas, avoir reçu d'importantes subventions gouvernementales. En particulier, vous avez bénéficié d'un amendement adopté par les conservateurs et le NPD qui vous a fait épargner une quarantaine de millions de dollars.
Votre réaction a été de congédier des Canadiens, de les relever de leurs fonctions.
Monsieur Bibic, la réponse du conseil à votre travail en 2023 n'a‑t‑elle pas été un impératif stratégique d'« investir dans notre équipe, soutenir son engagement et créer un avenir durable »? Puisque votre conseil vous a donné mandat d'investir dans votre monde, pouvez-vous m'expliquer comment la suppression de 6 300 emplois favorise cet investissement?
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Merci, madame la présidente.
D'abord, j'aimerais dire à M. Bibic que je suis heureux qu'il soit ici aujourd'hui.
J'aimerais aussi faire remarquer au Comité que nous avions envoyé une assignation à comparaître à M. Bibic, parce que nous croyions qu'il refusait de nous donner de l'information. Nous avons appris par la suite que ce n'était pas le cas, mais que l'horaire du Comité et celui de M. Bibic n'étaient pas compatibles. Je pense que l'assignation à comparaître était une mesure un peu radicale, un peu sévère, et je tiens à ce que le Comité réfléchisse à cela à l'avenir.
Monsieur Bibic, je vous remercie d'être ici aujourd'hui. Je reconnais votre bonne volonté à venir répondre aux questions des députés, malgré le fait que je ne pense pas que ce soit des sujets agréables à discuter. Les coupes que Bell a effectuées au cours de la dernière année sont très préoccupantes, notamment sur le plan de l'information régionale. Il s'agit d'un sujet qui me touche particulièrement: au Saguenay—Lac-Saint‑Jean, par exemple, les salles de nouvelles et les radios de Bell ne sont plus en mesure de couvrir les nouvelles des hôtels de ville, les nouvelles des conseils de ville et l'actualité du coin de la rue, parce que les bulletins de nouvelles télévisés sont maintenant faits à partir de Québec pour différentes régions et à partir de Montréal pour d'autres régions.
Comment défendez-vous le fait que vous affirmez investir de façon massive dans l'information, et particulièrement dans l'information locale, alors que, au contraire, quand on écoute les régions du Québec, on réalise qu'on se plaint plutôt du contraire? On se plaint du désinvestissement ou de la réorganisation des salles de nouvelles de Bell, qui font en sorte que la couverture régionale est déficiente.
Comment réagissez-vous à cela, monsieur Bibic?
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Premièrement, il est assez clair que les choses vont bien chez Bell pour ses actionnaires et son PDG, mais pas pour ses travailleurs ou sa clientèle de consommateurs. Bell a déclaré des bénéfices faramineux de 2,3 milliards de dollars l'an dernier. En tant que PDG, vous, le président, avez empoché 13,43 millions de dollars en rémunération. Mais, les frais de téléphonie cellulaire et d'Internet que paient les Canadiens sont parmi les plus élevés au monde. Vous avez mis à pied, en neuf mois, plus de 6 000 employés.
Comment une entreprise rentable peut-elle justifier ces mises à pied, surtout si l'on tient compte des centaines de millions de dollars de subventions du gouvernement? Comment justifiez-vous cela? S'agit‑il simplement de faire encore de meilleurs bénéfices? Vous êtes déjà rentable. Alors, quelle est la justification?
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Je vous remercie de la question.
Je commencerai par dire que nous continuons de baisser le prix du sans-fil tous les jours, au point qu'il est fondamentalement plus bas chez nous qu'aux États-Unis. En fait, j'ai comparu le 18 mars devant le comité de l'industrie, et nous avons établi tous ces faits. Je suis sûr que la transcription est disponible.
Cette semaine, nous avons lancé un nouveau service à très bas prix appelé No Name Mobile, le mobile sans nom, qui permettra de mieux servir les clients qui sont sur le marché pour des forfaits de téléphonie cellulaire à bas prix.
En ce qui concerne les dividendes, il y a un fait important qui échappe à la discussion sur les dividendes de Bell. Nous sommes un cas très particulier. Quarante-six pour cent de nos actionnaires sont des particuliers qui comptent sur ce dividende. Environ 70 % des employés de Bell sont également actionnaires. C'est tout à fait unique. Les actionnaires individuels qui investissent dans Bell, les Canadiens qui investissent dans Bell, aiment le dividende, et nous les soutenons également en cours de route.
Fondamentalement, nous devons comprendre que, si nous n'avons pas d'entreprises canadiennes qui prennent de l'expansion, qui investissent dans des infrastructures essentielles comme la nôtre et qui créent des emplois, nous aurons un énorme problème au pays. Cela vaut également pour les médias. Nous devrions avoir une discussion générale — parce que nous avons la bonne tribune et les bonnes personnes ici — sur la façon de régler le problème des médias canadiens. Sans système de radiodiffusion canadien, il n'y aura pas de nouvelles, sauf peut-être à Radio-Canada. Nous devons...
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Merci, madame la présidente.
Monsieur Bibic, comme je n'ai que deux minutes et demie, je vais essayer d'être rapide et clair dans mes questions.
Bell a eu droit à des allégements réglementaires de la part du CRTC qui ont permis des économies — corrigez-moi si je me trompe — d'environ 40 millions de dollars. Au cours de la même année, près de 6 100 postes ont été supprimés chez Bell dans différents secteurs. Je sais que c'est une grande entreprise, mais quand même.
Bell affirme investir dans l'information. Pourtant, on observe que, dans certaines régions du Québec, particulièrement celles du Saguenay—Lac‑Saint-Jean, de Trois‑Rivières et de Sherbrooke, la qualité de l'information locale est nettement moindre que ce qu'elle a été il y a quelques années.
Or Bell continue de demander un allégement réglementaire pour créer un terrain de jeu équitable avec les géants du Web.
Compte tenu de vos activités récentes, comment pouvez-vous nous garantir que ces allégements ne serviront pas, encore une fois, à affaiblir la couverture journalistique dans les régions du Québec et la diffusion de la culture québécoise en français au Québec?
C'est un mandat auquel Bell accorde de l'importance, si je ne me trompe pas, avec ses stations de radio et de télévision au Québec.
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Je comprends ce que vous me dites et je suis conscient de toutes vos réalisations. C'est correct.
Par contre, les résultats que nous voyons concrètement, quand vous me dites en faire plus que ce que la réglementation vous impose, me donnent plutôt l'impression qu'il faudrait, au contraire, rendre la réglementation encore plus contraignante afin de vous obliger à mieux servir les régions, qui sont actuellement mal servies.
Ce que j'aimerais vous entendre dire, c'est qu'il est vrai que, dans les régions où vous avez supprimé des postes de journalistes pour différentes raisons telles que la vente d'une station de radio, vous allez réinvestir et rétablir des postes de journalistes, parce que la couverture médiatique en région ne doit pas se faire à partir des grands centres.
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Merci, madame la présidente.
Je crois que ce témoignage montre très clairement que les grandes sociétés canadiennes ont complètement perdu le sens de la réalité. J'y vois même une arrogance flagrante. Quelle audace de venir devant ce comité en prétendant que vous n'évitez pas de rendre des comptes quand vous refusez de comparaître avant la fin mai, puis que vous soutenez que le gouvernement doit vous donner encore plus de soutien, alors que des millions de Canadiens n'arrivent plus à joindre les deux bouts et que des milliers de travailleurs ont été licenciés. C'est ahurissant.
Déboulonnons donc les fausses nouvelles et examinons les faits. Je ne parle pas de ceux qui figurent à la page « Les faits ne mentent pas » de votre site Web. Je l'ai même imprimée. Le point 10 s'adresse aux membres du Comité. Nous voudrions savoir pourquoi il vous a fallu près de trois mois pour vous présenter devant nous. En réalité, le gouvernement réglemente votre industrie, tant sur le plan de la radiodiffusion que des télécommunications, et notre comité supervise ce travail. Nous avons dit clairement que vous auriez dû comparaître bien avant cela.
Passons aux enjeux principaux. En une période de huit mois, Bell a éliminé 6 000 emplois, dont 4 800 en février. En même temps, vous avez annoncé une augmentation des dividendes versés à vos actionnaires. Vous avez prétendu que la société Bell avait été forcée de congédier un si grand nombre de travailleurs parce que le gouvernement fédéral tardait à lui fournir de l'aide. Vous avez dit: « Le contexte économique demeure très difficile, et les décisions gouvernementales et réglementaires alourdissent le fardeau qui pèse sur notre entreprise. Celles‑ci compromettent les investissements dans nos réseaux [et] ne soutiennent pas nos activités médiatiques en temps de crise. »
Là où j'habite, une crise, c'est un feu de forêt. Il laisse des milliers de personnes sans emploi, un peu comme les gens qui travaillaient pour Bell Média et que vous avez congédiés. Qui est en crise, monsieur Bibic? Est‑ce vous, avec votre indemnisation de millions de dollars, ou les travailleurs que vous venez de congédier?
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Merci, madame la présidente.
Monsieur Bibic, discutons de choses sérieuses, vous voulez bien?
Ces dernières années, plusieurs employées de Bell Média ont quitté votre entreprise pour avoir subi de la discrimination. Mme Patricia Jaggernauth a quitté CP24 en affirmant qu'à titre de femme noire, elle avait été embauchée pour représenter une diversité de façade. Mme Danielle Graham a quitté CTV Etalk en partie à cause de son atmosphère sexiste. Nous avons aussi vu de nombreux reportages dans les médias laissant entendre que Mme Lisa Laflamme avait été expulsée de CTV News parce qu'elle avançait en âge. Évidemment, maintenant, Bell se réjouit de son supposé engagement à l'égard de la diversité, de l'équité et de l'inclusion.
Nous lisons tout cela dans votre site Web, monsieur Bibic, mais je voudrais vraiment savoir si vous êtes en mesure de rassurer les Canadiens qui s'inquiètent des pratiques d'emploi déplorables de Bell Média.
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Merci de poser cette question.
C'est une question très importante, et nous la prenons très au sérieux. Je suis très fier du groupe de journalistes très talentueux que nous avons partout au pays. Les réductions d'emplois ont été plutôt difficiles et regrettables. Un petit nombre d'entre eux travaillaient à Bell Média, mais nous avons ramené le pourcentage de diversification chez les journalistes à ce qu'il était auparavant. Nous produisons des émissions phénoménales, et certains artistes, comme Sandie Rinaldo qui a célébré ses 50 ans sur les ondes, sont fantastiques.
La chaîne TSN en est un excellent exemple. En diffusion, nous avons des femmes incroyablement talentueuses. Cette chaîne est la première qui ait diffusé une émission de la National Basketball Association animée uniquement par des femmes. Dans toute la société Bell, avant que je devienne PDG, 15 % des employés qui relevaient directement de moi étaient des femmes. Maintenant, ce pourcentage a atteint 30 %. En 2019, 20 % des postes de première vice-présidence de BCE étaient occupés par des femmes. Maintenant, ce pourcentage a doublé.
Nous prenons cela au sérieux. Nous avons encore bien du chemin à faire, évidemment. Nous devons en faire plus.
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D'accord. Je ne voudrais pas que les gens quittent la salle en pensant que le gouvernement du Canada connaissait la situation 16 semaines avant le premier licenciement. Je tiens à vous remercier d'avoir précisé que ce n'était pas le cas.
Cela dit, j'aimerais revenir, monsieur Bibic, à une conversation que nous avons eue précédemment et au cours de laquelle vous avez parlé de l'importance de bâtir des « entreprises canadiennes fortes ». Je suis d'accord avec vous. Je pense qu'il est important de bâtir des entreprises canadiennes fortes. Ces entreprises canadiennes devraient offrir de bons emplois, et les personnes qui occupent ces emplois devraient avoir la certitude que les entreprises pour lesquelles elles travaillent, à qui elles donnent tout, vont prendre soin d'elles, les respecter et faire en sorte qu'elles aient une bonne carrière.
Je ne sais pas comment cela s'est passé pour les 6 000 personnes que vous avez licenciées, mais les primes aux dirigeants sont connues, nous en avons parlé. J'aimerais que nous évoquions vos salles de presse, qui sont un élément important de la capacité de notre pays de raconter ses histoires, et elles permettent de fournir une information de qualité. Depuis que vous avez procédé à ces licenciements, dans quelle mesure avez-vous augmenté l'effectif de votre équipe de journalistes et, le cas échéant, pouvez-vous nous donner des détails sur la répartition de ces effectifs?
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La division de l'information est exploitée par CTV Network, et les stations conventionnelles de CTV perdent 185 millions de dollars par année. Nos revenus publicitaires ont diminué de 140 millions de dollars entre 2023 et 2022.
Il n'y a qu'une seule source de revenus: la publicité. Si le gouvernement fédéral du Canada, qui est l'un des grands annonceurs au pays, consacre 70 % de son budget de publicité à des plateformes numériques, qui appartiennent en majorité à Meta et à Google, cela crée une tension énorme sur l'ensemble de l'écosystème médiatique.
Nous devons discuter de la façon de résoudre la question des médias canadiens, sans quoi il n'y aura pas de système de radiodiffusion canadien, ni de nouvelles canadiennes, ni quoi que soit d'autre. À ce moment‑là, on ne racontera plus d'histoires canadiennes aux Canadiens. Les Canadiens ne recevront plus de nouvelles, qu'elles soient nationales ou locales, à part peut-être celles diffusées par Radio-Canada et CBC, ce qui est un tout autre débat.
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Je suis content, madame la présidente, qu'on parle de la couverture des nouvelles régionales.
Monsieur Bibic, je comprends que tout l'écosystème médiatique est en crise. On le dit depuis des années, et les gouvernements successifs ont trop tardé à réagir. Il n'en reste pas moins que Bell est un acteur majeur dans l'industrie au Canada, et cela s'accompagne de responsabilités. Une de ces responsabilités, une responsabilité morale et sociale, est de s'assurer que son rôle est rempli de la meilleure façon possible.
J'ai regardé les chiffres et, à ce que je sache, Bell n'a pas encore de déficit. Je veux bien croire que les bénéfices ont diminué au fil des ans, mais Bell est encore en train de faire des profits. L'entreprise a donc encore une marge de manœuvre, n'en déplaise à ses actionnaires.
Or la couverture médiatique dans l'Est du Québec est en situation critique depuis des années, et Bell se retire de là, ce qui fait que la couverture médiatique diminue dans cette partie du Québec.
Je vous ai parlé, tantôt, de la couverture médiatique au Saguenay—Lac‑Saint‑Jean. Or, cet hiver, il y a eu une situation extrêmement préoccupante. Des gens étaient coincés sur la rivière et avaient besoin de secours. L'événement était peut-être banal pour les gens de Montréal et de Toronto, mais pour les gens de la région, cette information était cruciale. Toutefois, personne de chez Bell n'était là pour couvrir l'événement, parce que le bulletin d'information régional était réalisé à Québec. Alors, monsieur Bibic, on ne peut pas dire au Comité, ici, que Bell a investi dans l'information et qu'elle a des correspondants dans toutes les provinces du Canada, alors qu'elle délaisse la couverture médiatique régionale en se disant qu'il restera bien Radio‑Canada et CBC pour l'assurer.
Je suis conscient qu'il y a un problème à régler quant à l'équité dans le marché. Je suis conscient que les géants du Web doivent apporter leur contribution, mais ces derniers ne feront pas de journalisme. La responsabilité du journalisme revient, encore une fois, aux entreprises de radiodiffusion, et Bell est probablement la plus grande au Canada.
Monsieur Bibic, je vous lance un genre de cri du cœur. Aujourd'hui, êtes-vous capable de dire aux Québécois que, une fois qu'on aura réussi à rétablir, dans ce marché, l'équité entre les géants du Web, qui abusent du système, et les entreprises de radiodiffusion, qui ont une réglementation extrêmement lourde à suivre — nous en sommes tous conscients —, Bell s'engage à réinvestir dans les postes qui ont été supprimés et dans la couverture médiatique régionale du Québec, qui est déficiente?
Êtes-vous capable de dire aux Québécois, aujourd'hui, qu'une fois que l'équité face aux géants du Web sera rétablie et que Bell aura la marge de manœuvre dont elle a besoin pour exercer ses activités dans le secteur de la radiodiffusion au Canada, elle va réinvestir dans l'information régionale?
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Les oligopoles comme celui de Bell nuisent aux Canadiens. C'est particulièrement évident dans ma province, le Manitoba.
En 2017, on nous a dit que le rachat de Manitoba Telecom Services Inc., MTS, par Bell se traduirait par une baisse des tarifs et par de meilleurs services. Avec l'approbation des libéraux, vous avez dépensé 3,9 milliards de dollars pour acheter Manitoba Telecom Services, une entreprise qui, à une certaine époque était une régie publique, ce qui était un motif de fierté. Non seulement les tarifs ont augmenté, mais la qualité du service a diminué, sans doute en raison du fait que vous avez supprimé plus de 45 % des effectifs au Manitoba. Ce constat est évident dans notre région.
J'ai ici une photo d'une électrice de ma circonscription, Susann Sinclair, qui vit à Dallas. Elle est forcée d'utiliser un walkie-talkie pour communiquer avec son père âgé de 89 ans, un ancien combattant qui vit un peu plus loin sur la route, parce que les lignes terrestres de Bell-MTS ne fonctionnent pas dans sa collectivité. Pourquoi? Parce que Bell-MTS refuse d'effectuer l'entretien requis sur les lignes terrestres qui lui appartiennent au Canada en 2024.
L'exemple le plus flagrant du peu de cas que fait Bell-MTS des Manitobains est peut-être la Première Nation de Bloodvein, qui a communiqué avec Bell-MTS pendant plusieurs mois, à compter de 2020, au sujet de l'installation et de l'exploitation d'une tour de téléphonie cellulaire. Un an plus tard, lorsque les feux de forêt ont frappé la région en 2021, la Première Nation a demandé à travailler de toute urgence avec Bell. À ce moment‑là, la tour de téléphonie cellulaire était construite et l'équipement avait été installé. Tout ce que Bell avait à faire, c'était d'appuyer sur un bouton et de faire fonctionner les téléphones cellulaires.
Alors que les feux de forêt faisaient rage et que de nombreuses collectivités étaient évacuées, y compris la leur, la fumée a envahi Winnipeg et a atteint le sud de l'Ontario. Bell-MTS a réclamé 652 000 $ à la Première Nation de Bloodvein pour activer un commutateur et pour fournir un service de téléphonie cellulaire à cette collectivité située à huit milles d'un feu de forêt actif — un service de téléphonie cellulaire qui pourrait aider à sauver des vies.
Les oligopoles comme les vôtres ont laissé tomber les Manitobains, les Premières Nations, les travailleurs et tous les Canadiens. Trouvez-vous acceptable que votre entreprise ait rejeté les demandes de la Première Nation de Bloodvein au milieu d'une crise grave? Allez-vous travailler avec cette Première Nation pour lui offrir un service de téléphonie cellulaire?
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Merci, madame la présidente.
Monsieur Bibic, il faut des décennies pour établir la confiance dans les salles de presse canadiennes, ce dont CTV s'est enorgueilli durant les périodes où Bell Média en était propriétaire — c'est arrivé à deux reprises ces 40 dernières années. Les nouvelles locales ont toujours été la base du réseau CTV. N'importe qui peut acheter des émissions américaines, et nous y viendrons dans un instant, mais il faut investir dans les salles de presse pour renforcer l'intégrité de tout le réseau.
Vous avez éliminé les bulletins de nouvelles du midi. Vous avez éliminé les bulletins de nouvelles de fin de soirée. Vous avez éliminé les bulletins de nouvelles de fin de semaine, ce qui restreint les débouchés de nombreux médias en Saskatchewan, dans l'ouest du Canada et, en fait, dans tout le pays. Vous avez détruit ce qui a pris des décennies à bâtir pour créer le réseau CTV. Je le sais, car j'en ai fait partie pendant quarante ans. J'ai travaillé de trois heures à minuit. J'ai travaillé les fins de semaine. J'ai travaillé pendant les vacances. Je chéris cette époque. Pourquoi? Parce que j'ai servi la collectivité.
Vous avez sabré les salles de presse locales de notre pays. Ne me dites pas que vous avez apporté quelque chose. Il ne nous reste plus qu'une heure par jour de direct à Saskatoon. Tout se fait à Regina. À Saskatoon, nous n'avons qu'un seul bulletin de nouvelles, de 18 heures à 19 heures. Nous avions six heures et demie de nouvelles locales chaque jour jusqu'à ce que vous preniez votre décision au printemps.
Vous et votre organisation avez détruit les nouvelles locales dans ce pays. Vous devriez avoir honte. J'affirme, en ayant travaillé pour CTV pendant 40 ans, que je vous ai vu, vous et votre réseau, complètement détruire le 216 First Avenue North. Vous avez détruit Vancouver. Vous avez détruit Edmonton, Calgary et Saskatoon, et je pourrais continuer.
Quelles décisions avez-vous prises en salle du conseil qui vous autorisent à dire que vous avez investi dans les nouvelles alors que je dispose d'autres informations qui indiquent que vous avez retiré absolument toutes les personnes disponibles de toutes les salles de presse du pays qui appartenaient à Bell Média?
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Pourquoi ne m'avez-vous laissé qu'une heure? Pouvez-vous investir dans les nouvelles locales? Pourquoi n'avons-nous plus de nouvelles désormais à Saskatoon? Il ne me reste qu'une heure.
Pourquoi la rédaction de Vancouver a‑t‑elle subi des compressions? Et celle de Calgary, et celle d'Edmonton?
Vous investissez, fort bien, mais vous investissez dans les émissions américaines. Prenez une partie des 1,7 milliard de dollars et placez-les dans les salles de presse des villes canadiennes. C'est ce que les gens veulent.
CTV a su fidéliser son auditoire. Vous l'avez détruit depuis que vous êtes devenu chef de la direction en janvier 2020. Je suis très content d'avoir quitté Bell Media et CTV en 2015, car quand vous êtes arrivé sur les lieux, vous avez agi de façon honteuse, et Bell Média n'est plus la même entreprise depuis.
Environ 800 postes syndiqués ont été supprimés de l'effectif de Bell, et 61 % des employés touchés ont accepté une indemnité de départ volontaire. Ils ont dit qu'ils étaient d'accord pour partir, et c'est primordial.
Le processus syndical s'est étendu sur 5 semaines pendant lesquelles nous avons eu 10 jours de réunions avec les représentants syndicaux pour présenter les initiatives que nous allions entreprendre. Nous avons obtenu le consentement du syndicat pour offrir les indemnités de départ volontaire, que la majorité des employés syndiqués ont acceptées.
Avant de lancer l'initiative le 20 mars, nous avons également tenu une réunion de trois heures avec les dirigeants syndicaux afin d'expliquer le processus par lequel nous communiquerions avec les employés. Unifor n'a fait part d'aucune préoccupation. Nous avons tenu ces réunions par vidéoconférence parce que la plupart des employés touchés travaillaient de la maison et se trouvaient dans diverses régions du pays. Ces informations ont été pleinement communiquées aux employés.
Peu importe le processus que nous avons suivi, il est clair que cela a eu des répercussions importantes sur les personnes touchées, et nous étions très sensibles à cela.
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Le projet de loi a été conçu par le gouvernement actuel pour étouffer l'innovation et la créativité. Il ferme la porte aux Youtubeurs et aux créateurs axés sur le numérique, et il met beaucoup plus d'argent dans les poches des radiodiffuseurs traditionnels, comme Bell Média.
Il n'est donc pas étonnant que vous appuyiez ce projet de loi parce qu'il étouffe la concurrence et qu'il joue en votre faveur.
Il est cependant intéressant de constater que Bell, une entreprise incroyablement rentable qui reçoit déjà des centaines de millions de dollars du gouvernement, continue d'en réclamer davantage. Bell n'a pas honte d'affirmer que la créativité et l'innovation sont étouffées au Canada.
Fait intéressant, selon l'un des points de discussion que vous ne cessez de nous resservir, le fait que la créativité, l'innovation et la productivité soient étouffées au pays serait l'un de nos plus gros problèmes. Et pourtant, vous faites partie de ce problème en appuyant le projet de loi . Vous contribuez à étouffer ces valeurs. Vous contribuez à nous empêcher de nous tourner vers l'avenir, en insistant plutôt pour qu'une loi sur la radiodiffusion, incroyablement désuète, soit appliquée à l'Internet.
Sauf votre respect, vous faites partie du problème. C'est par égoïsme et pour vous garnir encore plus les poches que vous voulez encore plus de cadeaux, grâce au contenu créatif de ces créateurs qui privilégient le numérique. Vous voulez que 30 % de leurs revenus servent à financer votre modèle désuet.
Je trouve cela alarmant. Je trouve très inquiétant que Bell fonctionne de cette façon tout en recevant des centaines de millions de dollars du gouvernement.
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Monsieur Bibic, tout à l'heure, je vous ai posé une question avec un long préambule. Je vais faire mon préambule un peu plus court et je vais vous donner des éléments de réponse que vous m'avez servis en réponse à ma question, pourtant toute simple, de tantôt.
Imaginons que le gouvernement investisse davantage en publicité dans les médias traditionnels — cela donnerait déjà un grand coup de pouce —, que les géants du Web soient mis à contribution de façon à ce que le marché soit équitable pour eux et pour les radiodiffuseurs traditionnels, et que le fardeau réglementaire soit allégé ou, à tout le moins, adapté à la réalité d'aujourd'hui, comme les entreprises de radiodiffusion le demandent depuis longtemps.
Monsieur Bibic, on sait que les nouvelles ne sont pas payantes, mais on sait aussi que les nouvelles régionales constituent l'identité des régions, au Québec comme au Canada. On sait aussi que, quand on arrête de parler des histoires du coin de la rue, chez nous, c'est notre coin de rue qui disparaît complètement; c'est l'identité des régions qui est menacée par la disparition des nouvelles.
Vous avez une responsabilité à cet égard. Alors, advenant que l'on rééquilibre le marché pour faire en sorte que le terrain de jeu est équitable pour tout le monde. Sachant que les nouvelles ne sont pas payantes, on craint que les compressions qui ont déjà été effectuées à ce moment-ci soient irréversibles et que vous décidiez d'investir ailleurs les sommes récupérées.
Êtes-vous en mesure, aujourd'hui, monsieur Bibic, oui ou non, d'assurer aux Québécois et aux Canadiens qu'une fois les problèmes de la crise actuelle réglés, vous allez réinvestir dans les salles de nouvelles des régions du Québec et du Canada et ne pas couvrir les nouvelles des régions à distance comme vous le faites présentement?
Êtes-vous capable de prendre, aujourd'hui, cet engagement envers les Québécois et les Canadiens?
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Merci, madame la présidente.
Monsieur Bibic, vous nous avez dit clairement, je crois, que vous n'étiez guère préoccupé par les allégations de tokenisme, de racisme, de sexisme et d'âgisme portées contre Bell Média. Vous nous avez également dit clairement, dans votre tentative de nous « vendre » votre application CTV News dans vos propos liminaires, que vous ne prenez pas cela très au sérieux.
Nous avons entendu parler — et je suis sûr que cela vient de toutes les parties concernées — des multiples préoccupations de nos concitoyens qui, en tant que clients de vos services Internet et de vos services de téléphonie mobile à prix exorbitants, financent une opération médiatique qui fait montre d'un mépris total à l'égard des travailleurs canadiens, même s'ils ont bénéficié d'un allégement réglementaire de 40 millions de dollars de la part du gouvernement libéral, ainsi que d'une attitude discriminatoire à l'égard des employés.
Que diriez-vous aux consommateurs qui craignent de financer une opération médiatique très contestable en faisant affaire avec vos services de téléphonie cellulaire et vos services Internet?
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Merci, madame la présidente.
Monsieur, vous avez dit que Bell est une entreprise canadienne sérieuse qui s'intéresse à ses clients. Vos clients sont votre priorité.
C'est ce même Parlement qui a créé votre entreprise il y a plus de 150 ans.
J'estime que les Canadiens ont investi des milliards de dollars dans Bell. Non seulement ils ont investi de l'argent, mais ils vous ont aussi accordé un traitement de faveur en vous garantissant un monopole dans certaines régions. Ils ont contribué à votre réussite, en aidant à développer tout le spectre de vos services, et en investissant dans votre entreprise pour qu'elle poursuive sa croissance.
Je crois que vous avez l'obligation envers les Canadiens de faire ce qu'il y a de mieux pour eux. Ainsi, les Canadiens ont du mal à accepter qu'une entreprise qui réalise des bénéfices de 2,3 milliards de dollars s'attaque à ce qui est le tissu de l'information au pays, compte tenu des investissements engagés.
Vous avez dit plus tôt qu'Unifor était parfaitement d'accord avec ce processus. Or, j'ai été profondément troublé à la lecture d'un article citant Unifor qui qualifiait de honteux le fait que Bell ait remis des lettres de licenciement à des employés comptant de nombreuses années de loyaux services de leur part.
En fait, Christopher Corsi, qui est gestionnaire des ressources humaines et des relations de travail, a tenu une réunion de 10 minutes pour licencier 400 personnes en ligne, sur la plateforme Zoom. Si vous refusez de protéger les travailleurs canadiens et votre main-d'œuvre, ayez au moins la décence de les respecter. Quand j'ai appris que vous aviez pris cette mesure pour licencier 400 personnes en ligne, sans même leur permettre de poser des questions — cela vient d'Unifor; j'ai lu l'article —, j'ai trouvé cela honteux.
Les Canadiens ont investi dans votre entreprise et ils continuent de le faire. Ce Parlement a créé votre entreprise. Je pense que...
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Merci, madame la présidente.
Monsieur Bibic, le nouveau président de Bell Média a récemment déclaré que la diversité au sein de Bell est importante, et c'est tant mieux. Il a affirmé que l'entreprise souhaitait que la moitié des programmes qu'elle commande cette année soit générée par des créateurs noirs, autochtones, de minorité visible et de groupes sous-représentés. Je suis tout à fait d'accord sur la diversité et l'inclusion, mais je suis aussi d'accord sur l'équité.
J'imagine que Bell est habituée aux quotas, par exemple pour ce qui est du contenu francophone à la radio, mais ne pensez-vous pas qu'il serait préférable que l'entreprise s'affirme comme étant celle qui met en place des mesures pour s'assurer de donner à toutes les communautés, incluant les communautés sous-représentées, les moyens d'avoir accès au processus de création et d'achat de contenu, plutôt que se donner des ratios qui peuvent créer une certaine discrimination dans un milieu où le nombre de créateurs provenant de ces communautés n'est peut-être pas de l'ordre de 50 %, par exemple?
Ne croyez-vous pas qu'il serait préférable de proposer des moyens de rendre accessibles au plus grand nombre possible les processus d'achat et de création de contenu?
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Pour en revenir à cette séance... Il est renversant de voir à quel point Bell est déconnectée de la réalité. Cette entreprise pèse 40 milliards de dollars, et son PDG a empoché 13 millions de dollars l'an dernier en acceptant de mettre à pied des milliers de travailleurs — 6 000 pour être exact — sur une période de huit mois. Il a vidé de leur substance les nouvelles locales et a fermé 45 stations de radio, laissant les grands et les petits centres du pays sans les nouvelles locales auxquelles ils ont droit. Dans une province comme la mienne, le coût des services de télécommunication leur qualité a diminué. D'un bout à l'autre du pays, les consommateurs canadiens paient les tarifs de téléphonie mobile parmi les plus élevés du monde.
Combien devrez-vous empocher pour en avoir assez? Quel profit sera suffisant? Dans quelle mesure les bénéfices et les primes au PDG sont-ils suffisants? Quel montant de dividendes est suffisant?
Cela n'a rien d'un accident de parcours. La démarche commerciale de Bell a aggravé la situation des Canadiens. Bell fait partie d'un oligopole, dont les libéraux et les conservateurs se sont vantés au fil des ans, qui cherche à réaliser de plus en plus de bénéfices au détriment des travailleurs et des Canadiens en général.
Ce que nous avons appris aujourd'hui, outre le désir de fermer... pourquoi ne l'avons-nous pas appris de la bouche de Bell alors que cela aurait dû être le cas et qu'il a fallu une éternité pour savoir exactement quel préavis avait été donné au gouvernement fédéral... Je signale que nous avons appris qu'Unifor n'avait découvert que le 8 février que des mises à pied étaient sur le point d'avoir lieu.
On ne peut parler de respect. Bell n'est pas une entreprise qui valorise ses travailleurs. Il est certain que les coûts que les Canadiens paient démontrent que ce n'est pas non plus une entreprise qui apprécie ce que les Canadiens lui procurent.
Les travailleurs canadiens méritent mieux. Les Premières Nations, les collectivités rurales et nordiques — comme celles que je représente et celles de tout le pays — qui travaillent avec Bell méritent mieux. Les Canadiens qui ont le droit de recevoir des nouvelles locales de la part des membres de leur collectivité méritent mieux.
Nous espérons que Bell changera de cap, réembauchera les travailleurs qu'elle a licenciés, réinvestira dans la radiodiffusion locale et en fera baisser les tarifs, comme les Canadiens le méritent. Les Canadiens méritent mieux.