Je déclare la séance ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue à la 77e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien.
Je tiens à reconnaître que cette réunion a lieu sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
[Traduction]
Comme le savent la plupart d'entre vous, la réunion d'aujourd'hui se déroulera en mode hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du jeudi 23 juin 2022.
J'aimerais d'abord faire quelques annonces d'ordre administratif.
Bien que les autorités de la santé publique et le Bureau de régie interne n'exigent plus le port du masque, si vous êtes dans la salle, ce serait une très bonne idée, pour votre bien et pour celui des autres, d'en porter un, parce que la COVID-19 et d'autres maladies respiratoires sont toujours présentes autour de nous. L'utilisation du masque est donc recommandée.
J'aimerais profiter de l'occasion pour rappeler à tous les participants à cette réunion qu'il est interdit de faire des captures d'écran ou de prendre des photos de votre écran. Les délibérations seront disponibles sur le site Web de la Chambre des communes, de sorte que vous pourrez obtenir tout ce dont vous avez besoin lorsque vous consulterez ce site.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 20 septembre 2022, le Comité se réunit afin de poursuivre son étude sur la pratique sécuritaire du sport au Canada.
J'ai deux ou trois petites choses à dire. Ne parlez pas à moins que la présidence vous cède la parole. Veuillez adresser toutes vos questions et réponses à la présidence. Au bas de votre écran, pour ceux d'entre vous qui sont ici en mode virtuel, il y a une petite icône de globe. Si vous appuyez sur ce bouton, vous pouvez obtenir l'interprétation en français, en anglais ou dans la langue d'origine, quelle qu'elle soit.
Comme c'est essentiellement tout ce que nous avons besoin de savoir, nous allons commencer à entendre nos témoins d'aujourd'hui.
Pendant la première heure, Steven Reed, ancien président de Canada Soccer, témoignera à titre personnel par vidéoconférence.
Monsieur Reed, vous aurez cinq minutes pour parler, puis il y aura une période de questions et réponses au cours de laquelle on vous posera des questions et vous y répondrez. Je vais vous prévenir lorsqu'il restera 30 secondes... et je vais le faire très énergiquement. Je vais dire « 30 secondes » assez fort pour que vous puissiez m'entendre, parce que parfois, lorsque les gens lisent leur témoignage, ils ne lèvent pas les yeux pour voir un panneau clignotant indiquant 30 secondes ou quelque chose du genre. Lorsque je vous donnerai un préavis de 30 secondes, je m'attends à ce que vous commenciez à conclure. Si vous n'avez pas le temps de terminer ce que vous avez à dire, vous pourrez le faire au moment des questions et des réponses. Vous pourrez alors faire valoir vos arguments.
Monsieur Reed, bienvenue au Comité. Vous avez maintenant la parole pour cinq minutes.
:
Merci, madame la présidente.
Bonjour, madame la présidente et membres du Comité. Comme on l'a dit, je m'appelle Steven Reed.
Pendant la majeure partie de ma vie adulte, j'ai consacré mon temps à faire du bénévolat dans le sport du soccer. J'ai été entraîneur d'équipes de jeunes à Victoria et à Surrey, j'ai été vice-président et président de la British Columbia Soccer Association et j'ai siégé au conseil d'administration de Canada Soccer pendant 15 ans.
Plus récemment, comme le Comité le sait, j'ai été vice-président de Canada Soccer de 2012 à 2017 et président de Canada Soccer de 2017 à 2020. Avant cela, j'ai eu le grand privilège de siéger au comité organisateur national de la Coupe du monde féminine de la FIFA Canada 2015, une compétition qui a été l'un des points forts pour moi et pour le soccer au Canada.
Comme les membres du Comité le savent également, Canada Soccer est l'organisme qui régit le sport du soccer au Canada. Il est composé d'associations provinciales et territoriales et de membres de ligues professionnelles. Canada Soccer est également responsable du perfectionnement des entraîneurs et des arbitres, ainsi que des programmes des équipes nationales pour tous les groupes d'âge.
Pendant que je siégeais au conseil d'administration de Canada Soccer, j'ai concentré mes efforts sur la collaboration avec les partenaires et le personnel pour faire du soccer au Canada un sport plus sécuritaire et j'ai veillé à ce que le soccer soit le sport le plus sécuritaire au pays. Dans la même veine, les observations que je vais faire aujourd'hui porteront sur deux domaines en particulier, le premier étant mon rôle dans les négociations de l'entente entre Canada Soccer et Canadian Soccer Business, ou CSB, et le deuxième, les balises pour la pratique sécuritaire du sport qui ont été mises en place pendant que je siégeais au conseil d'administration de Canada Soccer.
Avant d'aller plus loin, je tiens également à souligner que j'ai quitté Canada Soccer en 2020, lorsque mon mandat a pris fin, et que je n'y ai joué aucun rôle depuis. Par conséquent, ma capacité de commenter des événements plus récents est limitée.
En ce qui concerne l'entente conclue avec CSB, qui a été approuvée à l'unanimité par le conseil d'administration de Canada Soccer le 23 mars 2018, comme le Comité l'a entendu, l'entente avec CSB offre de précieuses possibilités de diffusion et de diffusion en continu aux équipes nationales, tant féminine que masculine. Elle garantit des paiements annuels à Canada Soccer et a permis de trouver de nouveaux partenaires pour le soccer communautaire et de haut niveau au Canada. Avant l'entente avec CSB, Canada Soccer versait des milliers de dollars par année pour diffuser les matchs des équipes nationales féminine et masculine. Aucun radiodiffuseur canadien n'était prêt à payer pour diffuser leurs parties. L'entente a permis de résoudre ce problème et elle a contribué à la croissance de la diffusion des parties des équipes nationales féminine et masculine au Canada. Cette réalité a été l'un des principaux facteurs qui ont motivé le conseil d'administration de Canada Soccer à conclure l'entente. Bref, l'entente comporte des avantages pour toutes les parties.
L'entente avec CSB est un document dynamique. Je sais que la haute direction de Canada Soccer et de CSB explore des façons de la mettre à jour, mais au départ, l'entente était un moyen solide et approprié de créer une certitude de revenus pour Canada Soccer et de contrôler les coûts. Il est également important de noter que l'entente avec CSB n'est pas la source unique de revenus pour Canada Soccer. Par exemple, Canada Soccer reçoit des revenus importants au guichet des matchs qu'elle présente.
En ce qui concerne la pratique sécuritaire et respectueuse du sport, j'ai l'intime conviction que toute personne qui pratique un sport doit avoir le droit et la possibilité de jouer, de s'entraîner et de participer à des compétitions dans un environnement sain et positif qui est respectueux, équitable et libre de toute forme de harcèlement et d'abus.
Pendant que j'étais président de Canada Soccer, le conseil d'administration et le personnel ont pris de nombreuses mesures pour veiller à ce que l'association réponde à cet impératif, notamment en dirigeant ou en aidant à élaborer et à lancer un programme d'accréditation des clubs; l'établissement d'une relation avec le Centre canadien de protection de l'enfance; la signature d'un partenariat à long terme avec Respect Group; l'embauche d'un directeur de la formation des entraîneurs et d'un dirigeant principal du perfectionnement des entraîneurs; ainsi que la publication d'un nouveau parcours de perfectionnement des entraîneurs. Nous avons également élaboré et déployé une accréditation nationale pour les enfants et approuvé et lancé la liste Sport sécuritaire de Soccer Canada, qui combine la certification obligatoire pour tous les entraîneurs, un programme sophistiqué d'accréditation des clubs, un registre national de soccer, une politique de dénonciation et une ligne d'information, un code de conduite et de déontologie et des protocoles sur les commotions cérébrales afin de créer les meilleures conditions possibles pour les joueurs, les entraîneurs, les arbitres et les administrateurs.
Ces initiatives et d'autres témoignent de mon engagement personnel à l'égard de la sécurité dans le sport et de l'engagement de Canada Soccer à assurer la sécurité et le bien-être des joueurs de soccer au Canada.
Je vous remercie de votre attention. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Je n'ai pas eu à vous avertir des 30 dernières secondes, monsieur Reed, et je vous en remercie.
Nous allons passer à la période des questions. Le premier tour est de six minutes. Je dois rappeler à tout le monde que les six minutes doivent comprendre la question et la réponse, alors soyez aussi bref que possible.
Nous allons commencer ce tour avec une députée du Parti conservateur. La première intervenante sera Mme Thomas, du Parti conservateur.
Mme Thomas, vous avez six minutes.
Monsieur Reed, vous avez été président de BC Soccer de 2006 à 2009, et vous avez également siégé au conseil d'administration de Canada Soccer.
En 2008, l'entraîneur de l'équipe féminine, Bob Birarda, a été accusé d'avoir agressé sexuellement des joueuses. Il a fini par être congédié par Soccer Canada, mais les allégations ont été camouflées et on a dit que son départ était survenu par suite d'un « accord mutuel ».
Quelques mois plus tard, M. Birarda a été embauché pour entraîner l'équipe féminine des moins de 14 ans sous l'égide de BC Soccer. À titre de président de BC Soccer à l'époque, quel rôle avez-vous joué dans ce processus décisionnel?
:
D'accord. Je suis certain que mes collègues auront beaucoup d'autres questions à ce sujet.
Permettez-moi de poser une autre question parce que je suis sidéré par cette dernière réponse. Je ne pense pas que je veuille approfondir la question.
À l'article 1.10 des règlements administratifs de Canada Soccer qui étaient en vigueur le jour où vous avez signé l'entente avec CSB, on précise ce qui suit: « Les actes, les transferts, les cessions, les contrats, les obligations et les autres instruments écrits qui requièrent une signature de Canada Soccer sont signés par le secrétaire général et soit par le président, soit par le vice-président. »
Vous êtes le seul à avoir signé l'entente avec CSB, monsieur Reed.
Pourquoi Peter Montopoli, le secrétaire général qui était tenu par les règlements de le signer, ne l'a-t-il pas fait?
:
Vous avez dit dans votre témoignage que le 23 mars 2018, Canada Soccer a autorisé la signature de ces ententes que vous avez signées le 1er janvier 2019.
Ce que vous ne dites pas, monsieur Reed, c'est que Canada Soccer a changé son histoire. Lorsqu'ils se sont présentés ici, c'est ce qu'ils ont affirmé. Je leur ai montré qu'il y avait des procès-verbaux en décembre 2018 montrant que le conseil lui-même avait clairement déterminé qu'il n'approuvait pas l'entente parce qu'elle était encore en cours de négociation.
Ils se sont ensuite présentés mystérieusement avec le procès-verbal du 7 février 2019, dans lequel le conseil d'administration avait approuvé l'entente. Vous avez un administrateur qui s'appelle Ryan Fequet, qui siégeait au conseil d'administration à l'époque, et qui a dit:
Le conseil d'administration a reconnu que cette entente sentait mauvais dès le départ...
Vous devez connaître l'organisation à laquelle vous vous associez si vous lui confiez littéralement tous vos droits de marketing. Et chaque fois que nous avons demandé des renseignements au sujet de Canada Soccer Business, nous nous sommes fait rabrouer. Bref, le conseil d'administration n'a absolument pas approuvé ce contrat.
M. Fequet était membre du conseil d'administration à ces deux dates.
Comment a-t-il pu dire cela alors que vous prétendez que tous les membres du conseil étaient d'accord?
:
Merci, madame la présidente.
Étant donné ce qui a précédé, j'ai presque envie de vous demander si vous connaissez les Whitecaps de Vancouver. Je vais cependant prendre une autre direction.
Compte tenu de votre rôle en tant que membre du conseil d'administration et de trésorier, en 2009, dans quelle mesure étiez-vous au courant des rapports inquiétants d'une entraîneuse-chef concernant la disparition de fonds, des états financiers trompeurs et d'autres actes contraires à l'éthique au sein du programme de l'équipe nationale féminine?
Nous avons appris lundi dernier, lors du témoignage de Mme Andrea Neil, que Canada Soccer, plutôt que de faire enquête et de sanctionner le gérant impliqué, l'avait promu et avait puni les entraîneurs de l'équipe nationale féminine qui avaient pris l'initiative de signaler des actes répréhensibles.
À quel point avez-vous été sensibilisé à ces situations et de quelle façon y avez-vous participé?
:
Merci, madame la présidente.
Au sein de ce comité, l'été et l'automne derniers, nous avons été témoins du dysfonctionnement de Hockey Canada, notamment sur le plan financier, ainsi que de son refus d'accepter sa responsabilité concernant les cas d'abus et de violence sexuelle. D'après ce que nous entendons depuis quelques semaines, je dois dire que le dysfonctionnement de Canada Soccer dépasse largement celui que nous avons constaté chez Hockey Canada.
[Traduction]
Je suis très surpris, monsieur Reed, du témoignage que nous avons entendu au sujet de Canada Soccer, du refus de traiter sérieusement les cas graves d'abus sexuels et de traiter les questions financières de façon responsable.
Très franchement, je crois que Canada Soccer est pire que Hockey Canada à bien des égards pour ce qui est de s'attaquer à ces problèmes importants.
J'aimerais revenir sur les questions qui ont été posées par Mme Thomas et M. Housefather concernant le cas d'un délinquant sexuel, quelqu'un qui est en prison pour des infractions sexuelles, Bob Birarda. D'après ce que je comprends de votre témoignage, qui est maintenant donné sous serment, vous étiez au courant des allégations et vous avez simplement perdu sa trace dans le système de Soccer Canada.
Est-ce une interprétation honnête de ce que vous venez de nous dire?
:
Merci, madame la présidente.
Je vais poursuivre sur la même lancée que ma collègue Mme Thomas.
Monsieur, je pense que ce que nous avons établi, jusqu'à présent cet après-midi, c'est que vous ne vous sentiez pas moralement obligé de veiller à ce que d'autres jeunes athlètes ne soient pas à risque d'être victimes d'abus, compte tenu des abus dont vous étiez déjà au courant après que Bob Birarda eut quitté votre domaine de compétence. Vous semblez nous dire maintenant que tous les problèmes sont réglés et que cela ne se reproduira plus jamais.
Si une équipe apprenait que des joueurs sont victimes de violence au soccer, que se passerait-il maintenant? Comment les parents et les athlètes peuvent-ils se sentir en sécurité, compte tenu des changements que vous avez apportés aujourd'hui?
:
Je vous remercie, madame la présidente.
Je suis extrêmement attristé par le témoignage que nous venons d'entendre à propos de M. Birarda. Il semble qu'on lui ait donné accès à Canada Soccer et ses associations et à d'autres victimes. C'est épouvantable d'entendre ce témoignage.
[Traduction]
Je veux également revenir sur la question des irrégularités financières qui a été soulevée.
Concernant le contrat conclu avec Canada Soccer Business, si j'ai bien compris, monsieur Reed, vous dites qu'aucun examen n'a été fait des autres autres contrats signés par diverses organisations nationales au sujet des droits de commandite et de radiodiffusion. Aucune analyse n'a été faite pour évaluer les recettes potentielles. Ce contrat a simplement été signé, sans avoir une connaissance exhaustive des retombées financières pour l'organisation et, ultimement, pour les équipes de soccer du Canada.
Est-ce exact?
:
Oui, madame la présidente. Merci beaucoup.
Monsieur Reed, votre témoignage est intéressant parce que lorsque vous étiez président de Canada Soccer en 2017, Birarda était l'entraîneur-chef lors du championnat national des moins de 17 ans de Soccer Canada. En octobre 2018, il était l'entraîneur principal d'une équipe de joueuses de moins de 17 ans du club Coastal.
Vous me dites que vous étiez déjà au courant en 2008. Vous n'avez rien fait et, dix ans plus tard, Birarda a refait surface à titre d'entraîneur d'une équipe de joueuses de moins de 17 ans à un championnat national.
Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que le soccer est le sport le plus sécuritaire au pays. Et voilà que j'apprends que Birarda a remporté un championnat national de Canada Soccer pour les moins de 17 ans à titre de chef entraîneur au moment où vous étiez président de Canada Soccer. Qu'avez-vous à dire à ce sujet? Vous deviez certainement savoir qu'il était l'entraîneur principal de joueuses de moins de 17 ans.
Bienvenue à la 77e séance du Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes.
Je tiens à souligner que cette réunion se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mardi 20 septembre 2022, le Comité se réunit pour poursuivre son étude sur la sécurité du sport au Canada.
Avant de poursuivre, j'ai quelques consignes à vous donner pour assurer le bon déroulement de la séance. Je signale à ceux et celles qui participent à distance qu'en cliquant sur l'icône de globe terrestre que vous voyez au bas de l'écran, vous aurez accès à l'interprétation si vous en avez besoin. Vous pouvez choisir l'anglais, le français ou la langue du parquet.
Vous devez toujours vous s'adresser à la présidence — pour répondre aux questions ou pour intervenir. Ne parlez que si je vous donne la parole. Voilà, c'est à peu près tout.
J'ai une question à poser au greffier. Il ne nous reste plus que trois quarts d'heure de séance. Monsieur MacPherson, pouvons-nous dépasser ce délai ou devons-nous nous arrêter à 17 h 30 pile?
:
Je vous remercie. Ce serait très utile.
Nous allons d'abord entendre Mme Julie Macfarlane, cofondatrice de Can't Buy My Silence, et professeure émérite de droit à l'Université de Windsor. Nous entendrons ensuite Jill Shillabeer, coordinatrice de l'appel à l'action Mener le changement, de l'Alberta Council of Women's Shelters, et Anthony Parker, facilitateur pour Mener le Changement.
Madame Shillabeer et monsieur Parker, je vous signale qu'en tant que groupe, vous disposerez de cinq minutes. Vous pourrez vous partager ce temps comme bon vous semble.
Madame Macfarlane, vous disposerez de cinq minutes.
Nous allons commencer par vous, madame Macfarlane. Vous avez cinq minutes. Je vous ferai signe à 30 secondes de la fin pour vous permettre de conclure.
Je m'appelle Julie Macfarlane. J'enseigne le droit depuis 40 ans, j'ai notamment travaillé au Royaume-Uni, en Irlande, à Hong Kong, en Australie, aux États-Unis et surtout au Canada, bien entendu. En 2022, j'ai eu l'honneur de recevoir l'Ordre du Canada pour mon travail sur l'accès à la justice.
Sur le plan personnel, je suis également une survivante d'abus sexuel et de viol. En 2014, j'ai poursuivi l'Église anglicane pour une agression sexuelle commise par un ministre de l'église lorsque j'étais adolescente. C'est à ce moment que j'ai appris que les accords de non-divulgation étaient la solution par défaut pour réduire au silence les personnes qui acceptaient un règlement en cas d'abus sexuel.
J'ai immédiatement fait savoir à l'Église anglicane que je n'avais aucune intention de signer un accord de non-divulgation. En fait, une partie du règlement que j'ai conclu avec l'Église était un nouveau code de pratique à l'intention des assureurs qui avaient affaire à des victimes de violence et d'abus sexuel. Il comportait une clause précisant qu'un accord de non-divulgation ne devrait être conclu que dans des « circonstances exceptionnelles ».
J'étais tellement naïve à l'époque. Aujourd'hui, je sais que cette pratique est courante et c'est ce qui motive mon engagement à l'égard d'une modification législative et non d'un changement purement volontaire impossible à vérifier. Je pense que cela touche également les questions que vous abordez ici au comité.
En 2013, j'ai appris que l'un de mes collègues de l'Université de Windsor harcelait sexuellement des étudiantes. Ayant été mise au courant directement par l'une des étudiantes ciblées, je suis allée voir mon président qui a ordonné la suspension du professeur et la tenue d'une enquête. Un an plus tard, ce professeur a reçu une lettre de congédiement de trois pages pour de multiples cas d'abus et de harcèlement.
Les étudiantes et moi-même étions très soulagées jusqu'à ce que je commence à recevoir des appels de collègues de facultés de droit de l'étranger où ce professeur avait posé sa candidature à un poste. Ils voulaient savoir pour quelle raison un professeur titulaire avait quitté l'Université de Windsor. J'ai immédiatement compris que l'université avait conclu avec lui un accord de non-divulgation, dont j'ai obtenu copie. L'accord prévoyait notamment la suppression de ses dossiers personnels des dix années précédentes et comportait également une lettre de recommandation qu'il a apportée avec lui.
Je suis certaine que cela vous semble familier, après avoir entendu le témoignage de M. Reed de Canada Soccer. Il est tout à fait clair que Bob Birarda a conclu un accord de non-divulgation. C'est la pratique courante pour régler les poursuites pour abus et harcèlement sexuels. De toute évidence, c'est ce qui explique pourquoi rien n'a filtré sur l'endroit où il irait travailler et pourquoi aucun drapeau rouge n'a été placé à côté de son nom. C'est aussi pour cette raison que M. Reed aurait eu besoin d'obtenir un avis juridique s'il avait voulu parler des agissements de l'entraîneur et lancer une mise en garde à son égard.
Cela n'est pas nouveau pour nous.
Après deux ans d'efforts pour persuader l'Université de Windsor de modifier sa politique en matière d'accords de non-divulgation avec des personnes qu'elle reconnaissait être des prédateurs notoires, j'ai démissionné par dégoût en décembre 2020. J'ai joint mes forces à celles de Zelda Perkins, la première femme à avoir rompu son accord de confidentialité avec Harvey Weinstein. Nous avons créé l'organisme Can't Buy My Silence et lancé une campagne mondiale visant à interdire la conclusion d'accords de non-divulgation pour camoufler les actes d'inconduite.
Je suis heureuse de vous annoncer que nous avons fait des progrès rapides au Canada. Nous avons fait adopter un projet de loi en Ontario qui donne plus de moyens aux établissements d'enseignement postsecondaire et qui interdit désormais aux universités, comme celle de Windsor, de faire ce qu'elles ont fait en 2014. Personnellement, je trouve que c'est une mesure très importante.
Par ailleurs, après avoir collaboré avec des législateurs irlandais à l'élaboration d'un projet de loi modèle visant à limiter la conclusion d'accords de non-divulgation seulement s'ils visent l'objectif initialement prévu — c'est-à-dire, je vous le rappelle, la protection des secrets commerciaux —, je vous annonce que cette loi est maintenant en vigueur en Irlande. Elle a aussi été adoptée à l'Île-du-Prince-Édouard, en 2022, sous le titre Non-disclosure Agreements Act. Cette loi couvre tous les milieux de travail, notamment les universités et les emplois bénévoles, comme celui d'entraîneur dans le milieu du sport. Un projet de loi a également été déposé en Colombie-Britannique, en Nouvelle-Écosse et au Manitoba, et un autre le sera bientôt en Ontario.
Can't Buy My Silence a recueilli des données qualitatives au moyen d'histoires anonymes racontées par des personnes qui ont été forcées de signer un accord de non-divulgation, sans comprendre la teneur du document qu'elles signaient et à qui on n'a jamais proposé de solution de rechange...
:
Je vous remercie, madame la présidente.
Je suis ravie de me joindre à vous aujourd'hui depuis Amiskwacîwâskahikan, également appelée Edmonton. Je me désigne par le pronom « elle ». Mon collègue Anthony Parker, qui utilise le pronom « il », habite à Moh'kinsstsis, aussi connue sous le nom de Calgary. Nous reconnaissons que nous sommes tous visés par des traités et que nous avons la responsabilité de comprendre notre histoire afin de pouvoir honorer le passé, prendre conscience du présent et créer un avenir juste et bienveillant.
Mon équipe de l'Alberta Council of Women's Shelters, ou ACWS, s'efforce de sensibiliser une diversité de groupes communautaires, de milieux de travail et d'équipes sportives à la prévention de la violence fondée sur le genre. Mon collègue a été receveur éloigné dans l'équipe des Stampeeders de Calgary et, au fil de nos dix années de partenariat avec cette équipe, il est devenu facilitateur du programme Leading Change. Dans le cadre de notre travail, nous avons été tous les deux témoins des effets transformateurs que peut avoir notre programme.
Notre conseil et nos membres se consacrent à la prévention de la violence fondée sur le genre depuis la création de notre organisation, il y a 40 ans ce mois-ci. Au début des années 2000, nous avons entrepris un travail stratégique pour mobiliser des hommes et des garçons dans le cadre de divers programmes que nous avons regroupés sous l'appellation « Leading Change ». Ce programme trouve ses racines dans la culture du sport et a été conçu par M. Jackson Katz, qui dirige un programme de prévention fondée sur le genre, très prisé aux États-Unis.
Comme vous pouvez le constater d'après le modèle des communautés inspirées que nous avons soumis à votre examen, notre approche repose sur six valeurs clés. Permettez-moi d'en souligner trois.
Premièrement, nous nous appuyons sur les organisations de femmes et sur l'expérience. C'est essentiel. Même si tout le monde peut être victime de violence fondée sur le genre, les femmes et les membres des minorités de genre sont les plus susceptibles d'en être la cible. Notre programme s'appuie sur ces histoires vécues et en rend compte.
Deuxièmement, nous adoptons une approche axe sur les points forts, autrement dit nous mettons l'accent sur ce que nous pouvons faire, plutôt que sur ce que nous ne pouvons pas faire. Cela veut aussi dire que, même si nous savons que la plupart des actes de violence sont commis par des hommes, la plupart des hommes ne sont pas violents. En fait, la majorité des hommes ont une capacité de changement plus grande qu'ils ne l'imaginent, et ils constituent une partie essentielle de la solution, comme vous l'avez constaté dans le cadre de votre étude.
Troisièmement, nous savons que toute transformation exige des efforts coordonnés, à grande échelle et à long terme, et nous sommes reconnaissants au Comité de se pencher sur les défis que doit relever Hockey Canada. Les problèmes ne se limitent pas à quelques événements, mais sont généralisés et systémiques, et touchent bien plus qu'un seul groupe, un seul sport ou un seul lieu.
Au fil des ans, nous avons collaboré avec de nombreuses organisations. Dans les milieux sportifs, nous avons travaillé avec des équipes de football professionnel de l'Alberta et plusieurs équipes de football mineur, avec le personnel de Hockey Alberta et, plus récemment, avec la ligue provinciale de hockey junior.
Nous avons commencé avec une première équipe, les Blackfalds Bulldogs, durant la saison 2021-2022. Dans le cadre de quatre séances, nous avons exploré ce qu'est la violence fondée sur le genre et ce qu'on entend par consentement. Nous avons eu des discussions avec les joueurs sur les formes de saine masculinité et les relations saines. Nous leur avons parlé du rôle de leader qu'ils doivent jouer pour provoquer un changement. Après une saison transformatrice, les Bulldogs nous ont mis en contact avec Ryan Bartoshyk, le commissaire de la Ligne de hockey junior de l'Alberta, afin que nous puissons faire ce travail auprès de toutes les équipes de la ligue.
Le commissaire Bartoshyk s'est montré incroyablement coopératif. Voici ce qu'il a dit de notre travail:
Nous croyons que nos joueurs peuvent mettre à profit leur statut de modèles et de chefs de file au sein des collectivités de l'Alberta afin de contribuer à un changement positif et de promouvoir la lutte contre la violence.
Il a ajouté:
L'Alberta Council of Women's Shelters a sensibilisé nos jeunes athlètes à la prévention de la violence et au consentement et les a encouragés à trouver des moyens de reproduire ce leadership dans leur vie de tous les jours.
Nous remercions l'Alberta Council of Women's Shelters de son engagement à l'égard de cette initiative et nous sommes impatients de poursuivre ce partenariat durant la saison 2023-2024.
Au cours de la dernière année, nous avons travaillé avec près de 400 joueurs de la ligue. Nous avons discuté en profondeur de divers sujets, notamment des messages malsains qui circulent sur certains forums en ligne et de la navigation dans les médias d'information sur les événements liés à la violence sexiste. Nous leur avons fait prendre conscience des efforts quotidiens que doivent faire les femmes pour assurer leur sécurité chaque fois qu'elles sortent de chez elles, et nous leur avons fait comprendre ce que veut dire « non » et l'importance d'y répondre avec respect.
Les joueurs ont tous reçu le même message: même s'ils ne font pas partie du problème, ils doivent quand même participer activement à la recherche d'une solution. Nous avons reçu des commentaires très encourageants.
À la fin de la saison, comme je l'ai mentionné, le commissaire Bartoshyk nous a invités à poursuivre notre travail l'an prochain. Notre travail a été reconnu par la section d'Edmonton du Fonds d'action et d'éducation juridiques pour les femmes et nous avons participé à une conférence nationale pour expliquer notre travail, ce qui a donné lieu à un débat sur un éventuel élargissement du programme.
Si cela peut être utile au Comité, j'ajoute qu'il est important, dans la recherche de solutions à ces problèmes, de tenir compte des ressources requises pour administrer des programmes comme le nôtre. Nous sommes convaincus que le fait d'aider les organisations de femmes à faire ce travail est une façon de nous acquitter de notre responsabilité à l'égard des personnes qui ont vécu la violence et de nous assurer que la réaction fera boule de neige, parce que la violence évolue sans cesse et se manifeste grâce à la technologie en constante évolution et à la faveur d'événements comme la pandémie de COVID-19. Nous devons vraiment être en mesure de relever ce défi permanent en temps réel.
L'an dernier, nous avons eu la chance de recevoir des fonds de la Fondation canadienne des femmes et du Kinsmen Club d'Edmonton pour différents volets de notre travail.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Vous avez déjà comparu devant nous, et la plupart de vos témoignages portaient sur un sujet différent, mais vous avez lancé la présente conversation à la fin, ce dont je vous remercie.
Merci pour le travail que vous faites. Nous avons entendu parler de nombreux défis, mais ceci est quelque chose de plus positif dans ce qui peut être fait.
Je connais le commissaire, et si nous avons le temps dans le cadre de notre étude, il est prêt à comparaître. La Ligue de hockey junior de l'Alberta a amorcé ses séries éliminatoires, ce qui comprend la ville où j'habite, bien sûr.
J'ai parlé au commissaire, qui a participé, si j'ai bien compris, à des séances avec vous. Selon son évaluation de ce que vous faites et de ce que vous essayez de faire avec les joueurs de la ligue, des jeunes hommes de 16 à 21 ans, il estime que c'est incroyablement précieux. Vous l'avez cité. J'aimerais obtenir d'autres réponses d'autres sources. Quels autres commentaires recevez-vous sur ce que vous voulez accomplir?
:
Nous avons eu une excellente réponse. Nous aimons appeler Leading Change une pratique prometteuse qui s'appuie sur plus de 10 années de recherches fondées sur des données probantes. Nous faisons ce travail depuis très longtemps, et toutes nos évaluations sont vraiment très positives.
Je peux vous raconter des histoires au sujet de joueurs. Nous les rencontrons dans leurs vestiaires. Nous leur parlons souvent de ce qu'il en est pour eux et de comment ils vont, parce qu'ils veulent simplement parler par la suite.
Je pense à une joueuse en particulier qui quitte la ligue cette année en raison de son âge. Elle a dit qu'il y a cinq ans, lorsqu'elle a commencé, cette conversation n'aurait jamais eu lieu à l'AJHL, mais maintenant, cela semble tout simplement normal. Elle a dit que cela fait d'eux une meilleure équipe et des joueurs plus forts, et qu'ils sont capables de parler de choses plus difficiles qu'auparavant.
Si vous me le permettez, madame la présidente, j'aimerais céder le micro à mon collègue Anthony, qui a suivi la formation lorsqu'il jouait pour les Stampeders il y a une dizaine d'années et qui a aussi une expérience de facilitateur.
Oui, je peux effectivement vous parler du fait que j'ai participé à cette formation et que je suis devenu ensuite, bien entendu, facilitateur.
Je pense que ce que vous venez de dire au sujet du fait de se rendre dans le vestiaire des joueurs, c'est que cela s'est avéré extrêmement utile. Venant de ce milieu, je comprends ce que c'est que d'être dans cet environnement hypermasculinisé, où on s'attend à ce que nous adhérions à une certaine norme, quelle qu'elle soit.
Dans leur environnement, dans le vestiaire, qui est leur zone de confort, nous sommes en mesure d'y aller et d'avoir des conversations positives en personne dans un environnement où leur garde sera un peu plus baissée et où ils seront un peu plus réceptifs.
Je peux également témoigner du fait que je me souviens d'avoir eu la mentalité, lorsque j'ai lancé ce programme, que ce ne serait pas quelque chose qui pourrait être fait dans le vestiaire avec mes gars. Je me voyais bien avoir cette conversation à l'extérieur du vestiaire. Je peux dire maintenant que j'ai été agréablement surpris de la réponse que j'ai obtenue.
J'aimerais aussi mentionner, à titre d'exemple, l'impact que ce programme peut avoir. Je me souviens d'une conversation que j'ai eue avec les joueurs des Canucks de Calgary dans leur vestiaire il y a quelques mois à peine. C'était une excellente conversation. Ce sont d'excellents types. Ils ont été très réceptifs et ils nous ont remerciés d'être venus pour avoir cette conversation. Ils y ont trouvé énormément de valeur de la part de quelqu'un qui avait été dans leur situation.
J'ai été très impressionné lorsque, le lendemain, à l'école de mon enfant, j'ai vu quatre joueurs des Canucks de Calgary participer à un programme de lecture avec des enfants de la maternelle à la 6e année. Cela montre simplement à quel point, lorsque vous avez un impact aussi positif sur ces joueurs, cette multiplicité peut avoir une incidence partout. Ils auront maintenant l'occasion d'avoir une incidence positive sur tous les membres de leurs collectivités.
J'aimerais simplement dire au Comité à quel point cela a eu un impact extraordinaire, et j'ai pu le constater de mes propres yeux.
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Merci, madame la présidente.
Comme je le mentionnais, nous n'avons pas encore réussi à obtenir un financement pluriannuel pour appuyer le programme. Je dirais que, même si c'est coûteux pour nous comme organisme de bienfaisance, sous l'angle du budget du gouvernement, c'est relativement peu coûteux. Je ne sais pas s'il existe une organisation féminine qui n'a pas encore trouvé une façon de transformer dix cents en un dollar.
Pour ce qui est des voix authentiques qui font avancer ce travail, il est vraiment important que cela soit éclairé par des expériences vécues par des personnes qui ont connu la violence. Comme nous sommes une organisation composée de membres qui représentent des refuges pour femmes dans la province, nous avons été en mesure de faire valoir ces points de vue.
Lorsque j'ai mentionné que nous avions présenté un exposé à une conférence nationale sur ce travail récemment, il s'agissait d'une conférence sur les refuges pour femmes. Un certain nombre d'autres organisations de partout au pays s'intéressent à la possibilité de faire avancer ce travail de prévention; cependant, encore une fois, le financement devient un problème lorsqu'il s'agit de s'assurer que nous pouvons nous déplacer pour rencontrer toutes ces équipes.
En Alberta, nous sommes allés de Fort McMurray à Brooks et, d'est en ouest, de Grande Prairie à Lloydminster, alors nous étions partout en Alberta. Il faut du temps, du personnel et des ressources, sans oublier les frais de déplacement.
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C'est une excellente question.
La mesure législative que nous préconisons se limite aux ententes de non-divulgation qui couvrent l'inconduite, l'inconduite sexuelle, le harcèlement, l'intimidation et la discrimination.
Puis-je ajouter qu'il y a un nombre étonnant de cas de discrimination avérée? Je parle de discrimination fondée sur la grossesse, de discrimination à l'égard des personnes handicapées — on ne leur accorde pas de mesures d'adaptation et on les force à partir —, de nombreux cas de discrimination fondée sur la race et le racisme envers les Autochtones.
Nous constatons une prolifération énorme du recours aux ententes de non-divulgation dans ces cas. Comme vous l'avez dit, elles sont devenues la solution par défaut. Nous avons maintenant des données qui montrent qu'un nombre important de personnes... Par exemple, aux États-Unis, trois études révèlent qu'une personne sur trois est assujettie à une entente de non-divulgation. Il y a des données que nous avons compilées à partir du sondage quantitatif que nous avons mené et qui montrent qu'un tiers des personnes qui ont répondu au sondage ont également été invitées à signer une entente de non-divulgation.
Permettez-moi de prendre un instant et de dire qu'il y a une distinction importante ici entre une entente de confidentialité, qui précise simplement que le montant du règlement ne sera pas divulgué... Je sais que c'est pratique courante. En fait, il y a une exception dans la loi à cet égard.
Il y a peut-être aussi le besoin de confidentialité sur lequel les parties s'entendent pour ne pas parler aux médias ou rendre cela public. Cependant, ce que font actuellement les ententes de non-divulgation, c'est d'empêcher les gens de parler pendant toute leur vie, parce que ce sont des ententes pour une durée indéterminée. Elles sont en vigueur jusqu'à la fin de leur vie. En fait, j'ai entendu des arguments selon lesquels elles survivent, même après la mort du prédateur.
Ce sont des ententes pour la durée de la vie des victimes qui les signent, en vertu desquelles elles ne peuvent parler à personne. On parle de la famille, des amis, des thérapeutes, des conseillers, des aînés et des gens qui pourraient les soutenir. C'est pour cette raison qu'il était apparemment impossible pour Soccer Canada de mettre un drapeau rouge dans le cas de M. Birarda. C'est parce qu'il avait vraisemblablement négocié une entente de non-divulgation qui aurait gardé tout ce qu'il a fait secret, et tout le monde aurait eu trop peur de briser cette entente et de faire savoir que c'est quelqu'un qui devrait être traité comme une personne vraisemblablement dangereuse pour entraîner des jeunes.
Oui, nous limitons cela aux cas d'inconduite, de violence et d'abus sexuels, de harcèlement et de discrimination.
Je dirais également que le Comité devrait savoir que ces ententes de non-divulgation sont également utilisées dans les différends avec les consommateurs. La raison pour laquelle nous n'avons pas été au courant du lait maternisé contaminé pendant presque 20 ans après le premier règlement, et que la formule continuait d'être vendue et d'empoisonner les bébés, c'était à cause d'une entente de non-divulgation.
On les voit aussi dans les désaccords relatifs aux services professionnels, alors qu'on prête apparemment le serment de ne plus jamais en parler. Nous les voyons dans les plaintes dans les foyers de soins, où les gens qui expriment leurs préoccupations au sujet des soins donnés à leurs proches, ou même à l'endroit des professionnels dans les foyers de soins, ces plaintes sont immédiatement visées par une entente de non-divulgation.
Je pense que c'est extrêmement dangereux, et je ne comprends pas pourquoi il y a une raison de perpétuer quelque chose qui a, dans une grande mesure, entraîné la revictimisation des gens dans le sport et ailleurs.
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Évidemment, vous savez, vous qui êtes avocat, que le droit du travail au Canada est presque entièrement de compétence provinciale. Nous avons procédé province par province, parce que cela doit se faire au niveau provincial.
Cependant, j'ajouterais, et j'ai la permission de vous informer aujourd'hui... Il y a tout un groupe de personnes qui travaillent pour le gouvernement fédéral, et il y a de nombreux organismes et organisations qui sont financés par le gouvernement fédéral, notamment Hockey Canada. Un projet de loi sera déposé sous peu au gouvernement fédéral pour empêcher que ces travailleurs soient visés par une entente de non-divulgation.
Encore une fois, nous avons de nombreux exemples de personnes qui travaillent pour le gouvernement fédéral et qui ont porté plainte au sujet de la discrimination et du harcèlement sexuel. Elles ont fait l'objet d'une entente de non-divulgation et ont été congédiées. Je pense qu'il est très important de protéger ce groupe également.
Cependant, la grande majorité de notre travail, puisque cela relève du droit de l'emploi, se fait province par province.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Madame Macfarlane, j'aimerais tout d'abord vous remercier de votre travail, que nous pouvons souligner et reconnaître aujourd'hui. Mon équipe et moi vous remercions de votre dévouement dans cette cause.
Aujourd'hui, vous avez été témoin d'une partie de nos travaux.
Je suis sidéré par l'opération de protection de l'image orchestrée par Hockey Canada ainsi que par l'inaction de ses dirigeants. L'an dernier, lorsque nous avons commencé cette étude, j'ai déclaré que le recours aux ententes de non-divulgation était abusif. Le moment choisi pour faire votre déclaration m'apparaît particulièrement pertinent.
Appuyez-vous l'idée d'une enquête publique indépendante qui viserait à faire la lumière sur les situations d'abus qu'on retrouve dans l'ensemble des sports, et pas seulement au hockey ou au soccer?
Je pense que vous suivez les travaux de notre comité, de même que ceux du Comité permanent de la condition féminine.
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Oui, tout à fait. Il y a un problème de méthodologie ici, comme je le dirais en ma qualité de chercheuse, c'est-à-dire que nous parlons de règlements secrets. La façon dont vous recueillez des données sur les règlements secrets est évidemment très problématique. Nous l'avons fait en permettant aux gens d'être anonymes tant pour raconter leur histoire au complet que pour répondre à notre sondage. De plus, au cours des dernières années, de nombreuses demandes d'accès à l'information présentées par des journalistes ont permis de découvrir beaucoup de choses.
Je pense qu'il sera impératif qu'une enquête porte notamment sur l'utilisation et la prévalence des ententes de non-divulgation — je pense que même les membres du Comité en seront choqués — dans les organisations sportives et ailleurs. Il sera important de dire, par exemple, que des ententes de non-divulgation ont été signées, ce qui empêche habituellement les gens de dire qu'ils ont signé une entente de non-divulgation, parce que, bien sûr, vous vous rendrez compte que même le fait de dire que vous avez signé une entente de non-divulgation constitue une violation d'une entente de non-divulgation. Il sera très important de libérer les gens à cette fin. Sinon, les gens auront inévitablement peur de s'exprimer.
Le Comité sait peut-être qu'au Manitoba, un projet de loi a déjà été renvoyé à un comité de l'Assemblée législative. En réalité, on ne fait que reprendre tout le processus. Le projet de loi est sur le point d'être envoyé de nouveau au comité, car les députés n'ont pas eu suffisamment de temps pour en terminer l'étude à la dernière session. Lorsque nous avons comparu devant ce comité, nous avons dit clairement aux gens qui communiquaient constamment avec nous au sujet de l'utilisation d'ententes de non-divulgation et du fait qu'on les réduisait au silence qu'ils pouvaient parler sans crainte de conséquences, parce qu'ils étaient protégés par le privilège parlementaire pour le faire. Cette séance a été absolument extraordinaire. Les gens peuvent la regarder sur notre chaîne YouTube.
Je pense que l'enquête doit indiquer clairement que les gens peuvent se manifester et qu'ils peuvent leur dire que même s'ils sont liés par une entente de non-divulgation, ils peuvent parler sans qu'il y ait de conséquences pour eux, parce que les gens vivent littéralement dans la peur. Ils vivent dans la crainte que l'argent qu'on leur a peut-être donné pour compenser le tort qui leur a été causé leur soit retiré. Ils vivent aussi dans la crainte que leur nom soit rendu public. Ils ne veulent pas que leur nom soit rendu public. Ils veulent protéger leur propre vie privée et contrôler la situation comme ils le voudraient, ce qui est exactement, par exemple, ce que le gouvernement fédéral fait actuellement en ce qui concerne les interdictions de publication au criminel. Donnez aux victimes le droit de contrôler la façon dont elles veulent se retrouver sur la scène publique.
J'espère que la commission d'enquête se penchera sur le recours aux ententes de non-divulgation, mais il faudra une forme d'amnistie ou de libération pour les signataires.
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Je pense qu'une enquête sera utile, mais je dois aussi — je suis désolée de me répéter — revenir sur le fait que ce qui sera vraiment utile, c'est de retirer le droit actuel d'obliger quelqu'un à signer une entente de non-divulgation afin que le promoteur d'une telle entente puisse protéger sa propre vie privée.
L'une des questions posées dans notre sondage, pour les gens qui ont décidé de ne pas déposer de plainte officielle de discrimination, de harcèlement ou de harcèlement sexuel, était de savoir pourquoi ils ne l'ont pas fait. Plus de 30 % maintenant... Le nombre de personnes qui répondent à notre sondage augmente constamment. On compte actuellement environ 1 200 personnes, ce qui est assez respectable. Le tiers des gens qui ont dit ne pas s'être plaints ont indiqué que c'était parce qu'ils prévoyaient devoir signer une entente de non-divulgation et qu'ils ne voulaient pas le faire.
De plus en plus, les Canadiens comprennent ce que cela signifie. Cela signifie que vous êtes réduit au silence pour le reste de votre vie. Évidemment, ces gens ne sont pas suivis par des caméras vidéo, monsieur Lemire, mais ils ont très peur. Il y a toutes sortes de conséquences sur la santé mentale qui en découlent, et nous avons également beaucoup de données à ce sujet.
Je pense qu'il sera essentiel de simplement éliminer la possibilité d'une entente de non-divulgation à l'avenir, ce que fait notre mesure législative, et de limiter cela à l'utilisation de la propriété intellectuelle et des secrets commerciaux, ce qui était prévu à l'origine dans les années 1980.
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Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
Je remercie également les témoins ici présents.
Vous contribuez énormément, tous les trois, à la réflexion que le Comité doit mener.
Le gouvernement fédéral vient de renouveler le financement versé à Hockey Canada, même si ce dernier n'a pas changé sa position sur les ententes de non-divulgation. Ce renouvellement est prématuré, à mon avis.
J'ai posé une question plus tôt, et je vais vous la poser aussi.
Selon vous, est-ce sain de la part du gouvernement fédéral de laisser croire à Hockey Canada que, même si l'organisme n'a pas changé ses mœurs quant aux ententes de non-divulgation, il peut tout de même obtenir du financement public?
[Traduction]
Hockey Canada reçoit maintenant des fonds du gouvernement fédéral, après une suspension, même si l'organisme n'a pas cessé de signer des ententes de non-divulgation. C'est une question qui a été soulevée à maintes reprises lors des audiences concernant Hockey Canada.
Ma question est très simple. Est-il approprié que le gouvernement fédéral finance Hockey Canada alors que l'organisme n'a pris aucun engagement pour mettre fin à la pression de faire signer aux victimes d'abus sexuels ou de violence sexuelle des ententes de non-divulgation?
J'ai été totalement choquée d'entendre cela. En fait, j'étais au Royaume-Uni quand on a appris, il y a quelques semaines, que Hockey Canada allait récupérer son financement sans avoir parlé d'ententes de non-divulgation.
En fait, le PDG de Hockey Canada a dit au Comité l'été dernier, lorsque les audiences ont commencé, que si quelqu'un voulait être libéré de son entente de non-divulgation, il n'y avait pas de problème — il suffisait simplement de communiquer avec l'organisme. Je ne peux pas vous dire à quel point cette déclaration est malhonnête, car comment les gens sont-ils censés communiquer avec l'organisme? Sont-ils censés chercher Hockey Canada sur Google? À qui s'adressent-ils? Comment font-ils cela? Bien sûr, ce sont tous des gens qui ont très peur des conséquences d'enfreindre leur entente de non-divulgation.
Je pense que la toute première chose que Hockey Canada aurait dû faire — il aurait dû le faire l'été dernier — aurait été de dire: « Nous libérons officiellement les gens des ententes de non-divulgation existantes, afin qu'ils puissent ainsi contribuer au travail de l'étude et du Comité. » C'est ce que Hockey Canada aurait dû faire, et il peut encore le faire en écrivant directement à chacune des personnes. Il sait qui elles sont. Il pourrait leur écrire directement pour leur dire que l'organisme va déchirer leurs ententes de non-divulgation.
La deuxième chose qu'il devrait faire, c'est de s'engager à ne plus en utiliser à l'avenir. Autrement, rien ne va changer, franchement, et tout sera remis sous le tapis. Il peut conclure des ententes de confidentialité quant à la somme d'argent qui a été versée. Il y a peut-être des circonstances spéciales auxquelles il veut consentir pour ce qui est de l'utilisation publique de certains de ces renseignements, mais le fait de réduire au silence les victimes sans qu'elles puissent parler à qui que ce soit et, bien sûr, de ne pas être en mesure d'avertir les autres au sujet des expériences qu'elles ont vécues... C'est devenu extrêmement efficace pour permettre à ces auteurs de récidiver. Nous le constatons encore et encore.
Il y a maintenant beaucoup de recherches — et je suis convaincue que mes collègues témoins le savent très bien — qui montrent que des actes de violence, de violence sexuelle et de harcèlement sont commis à répétition par un très petit nombre de personnes. Il s'agit très rarement d'un cas unique. Nous savons déjà que les gens qui ont déjà fait cela sont très susceptibles de le faire de nouveau, et nous allons tout camoufler pour qu'ils puissent le faire de nouveau.
Je crois que Hockey Canada devrait immédiatement libérer les gens en leur écrivant, mais pas en leur disant: « Communiquez avec nous; nous allons y réfléchir. » Écrivez-leur et libérez-les.
Deuxièmement, on aurait dû demander à Hockey Canada, avant le rétablissement du financement, de s'engager à ne plus jamais recourir à une entente de non-divulgation.
J'ai dit au début que les engagements volontaires constituent un élément très important du changement de culture en ce qui concerne les ententes de non-divulgation, mais je pense que la réalité, c'est que les règlements secrets doivent être interdits parce que nous ne pouvons pas surveiller ce qui se passe derrière des portes closes.
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Merci, madame Macfarlane.
Je suis désolée, monsieur Julian, mais vous avez dépassé de 40 secondes votre limite de six minutes.
Nous pourrions avoir 15 minutes de plus. J'aimerais savoir ce qu'en pense le Comité. Pouvez-vous rester encore 15 minutes?
Il est presque 17 h 30, heure à laquelle la séance est officiellement censée se terminer. Nous pourrions continuer encore 15 minutes. Cela signifierait que nous ferions un tour de trois, trois, 1,5, 1,5, et trois et trois. Vous savez de quoi je parle.
Êtes-vous d'accord?
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Très bien, madame Gladu.
Quelqu'un est-il en désaccord avec Mme Gladu?
Je vous vois tous. Je ne vois personne lever la main, alors il est évident que tout le monde est d'accord.
Je remercie les témoins. Comme l'a dit Mme Gladu, c'est fascinant. La question de la non-divulgation est fascinante, et je pense que l'équilibre, comme nous l'avons toujours entendu, si vous ne faites pas une non-divulgation, les gens ne voudront pas se manifester. Les victimes ne voudraient pas parler de leurs problèmes parce qu'elles auraient peur. Il y a deux côtés à la médaille, mais ce que vous dites est tout à fait logique.
Je tiens à vous remercier tous les trois de votre présence et de vos exposés, du travail que vous faites, et de vos témoignages très intéressants.
Je déclare la séance levée.