Passer au contenu
;

CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 044 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 septembre 2022

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Français]

     Je déclare la séance ouverte.
    Je vous souhaite la bienvenue à la 44e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes. Je tiens à souligner que cette réunion a lieu sur le territoire traditionnel non cédé de la Première Nation algonquine anishinabe.

[Traduction]

     Conformément à l'ordre de renvoi adopté par la Chambre le mardi 31 mai et à la motion adoptée par le Comité le mardi 20 septembre, le Comité poursuit son étude du projet de loi C‑18, Loi concernant les plateformes de communication en ligne rendant disponible du contenu de nouvelles aux personnes se trouvant au Canada.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en un format hybride conformément à l'ordre de la Chambre des communes du 23 juin. Certains membres participent en présentiel dans la salle, et ceux qui participent à distance le font sur Zoom.
    Si vous participez par Zoom depuis chez vous, n'oubliez pas que la petite icône en forme de globe au bas de votre écran est celle de l'interprétation. Vous n'avez qu'à cliquer dessus pour obtenir la langue de votre choix.
    Ceux qui sont dans la salle savent comment se prévaloir des services d'interprétation.
    Lorsque vous ne parlez pas, veuillez mettre votre micro en mode sourdine. Si vous désirez intervenir, veuillez attendre que je vous donne la parole en prononçant votre nom. Cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro et mettez‑le en sourdine lorsque vous ne parlez pas. Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
    Merci.
    Je suis prêt à accueillir les témoins qui sont ici aujourd'hui.
    Je tiens à rappeler aux témoins que le Comité accorde un temps de parole de cinq minutes par organisme et non par personne. C'est à vous de décider qui représentera votre organisme. Lorsque nous aurons entendu toutes les déclarations préliminaires, nous passerons à la période des questions et réponses.
    Nous entendrons donc, à titre personnel, M. Peter Menzies ainsi que M. Hugh Stephens, membre exécutif, School of Public Policy, Université de Calgary. Nous accueillons également M. Jason Kint, chef de la direction, Digital Content Next. Des Éditeurs indépendants de nouvelles en ligne du Canada, nous avons Mme Jeanette Ageson, éditrice de The Tyee. De la Saskatchewan Weekly Newspapers Association, nous accueillons M. Chris Ashfield et M. Steve Nixon.
    Je vais d'abord céder la parole à M. Peter Menzies.
    Monsieur Menzies, vous avez cinq minutes.
(1105)
     Je vous remercie de m'avoir offert cette occasion de m'adresser à vous. Je tiens à préciser que je comparais à titre de simple citoyen et que je ne suis pas membre d'un parti politique.
    J'ai travaillé dans le secteur de la presse pendant près de 30 ans et j'ai été commissaire au CRTC pendant près de 10 ans. Je connais donc bien ce milieu. Je tiens profondément au maintien du bon journalisme qui, sans vouloir vous offenser, lorsqu'il n'est pas entravé par des faveurs dues aux politiciens, aux privilégiés et aux puissants, peut jouer un rôle utile dans une démocratie libérale.
    Le mauvais journalisme ne donne rien de bon.
    Certains témoins ont expliqué que le projet de loi C‑18 permet malheureusement à l'État de s'infiltrer dans les salles de nouvelles du pays en donnant au CRTC la responsabilité de surveiller les accords et d'imposer la manière de dépenser l'argent. D'autres ont avancé que cela pourrait entraîner des sanctions commerciales de rétorsion. D'autres encore vous ont expliqué, ou le feront éventuellement, que l'argument qu'avancent les médias pour justifier la liaison embarrassante qu'ils entretiennent avec le gouvernement est infondé. S'il en était autrement, ceux qui appuient cet argument ne craindraient pas de participer à un débat ouvert.
    D'autres encore ont décrit en détail le problème que cause, sur les plans pratique et juridique, l'attribution d'une valeur à des liens que l'on réserve aux journalistes que des groupes d'experts nommés par le gouvernement ont approuvés. Vous avez déjà entendu dire que le fait d'attacher un prix à des liens risque d'encourager les commérages et de compromettre le sérieux des reportages.
    Je suis ici aujourd'hui pour vous dire que le projet de loi C‑18 est tout aussi susceptible de tuer le journalisme au Canada que de le sauver. La perspective même de son adoption pervertit la couverture médiatique et sape la confiance des citoyens, dont l'industrie dépend plus que tout. Le projet de loi C‑18 ancrera de façon permanente la dépendance de l'industrie non pas à la loyauté des citoyens, des lecteurs et des téléspectateurs, mais aux bonnes grâces des politiciens et à la prospérité des entreprises de technologie étrangères qui jouissent d'un quasi-monopole.
    Comme Andrew Coyne, ancien journaliste du National Post, l'a souligné il y a à peine quatre ans lorsque le gouvernement envisageait pour la première fois d'accorder un soutien financier à son industrie:
L'argent que le gouvernement nous donne ne va pas régler nos problèmes. Il nous empêchera de les régler, et nous ne tarderons pas à en demander plus.
    Nous en sommes là aujourd'hui.
    Le Livre blanc de la Tribune parlementaire de la presse sur les principes et pratiques journalistiques généralement acceptés souligne que: « la confiance à l'égard du journalisme doit être activement méritée et maintenue ». Pourtant, comme l'indiquent les résultats du plus récent sondage de l'agence Edelman, la confiance à l'égard des médias canadiens n'a jamais été aussi faible. Soixante et un pour cent des Canadiens sont convaincus que les journalistes essaient délibérément de les induire en erreur, et 58 % pensent la même chose du gouvernement. Avec tout le respect que je vous dois, ce partenariat entre ces deux entités ne semble pas être une idée géniale.
    Plus le gouvernement aide les médias d'information, plus il détériore leur relation avec les lecteurs. Plus cette relation se dégradera, plus il faudra de subventions. Ce cycle est interminable.
    Je tiens à souligner respectueusement que l'on ferait une grave erreur en poursuivant cette voie, car la confiance ne se gagne et ne se conserve que dans un contexte d'indépendance. Le projet de loi C‑18 maintiendra peut-être les loups loin de quelques entreprises traditionnelles pendant encore quelques années, mais il ne sauvera pas le journalisme. Même si l'argent versé empêche certaines de ces entreprises de mourir de faim, la plupart d'entre elles resteront affamées, et on les croira reconnaissantes.
    Le Canada a besoin d'un cadre stratégique qui encourage l'innovation, car la durabilité du journalisme en dépend. Nous devrions lancer un examen pour nous demander pourquoi, par exemple, le CRTC crée un excédent artificiel en obligeant pratiquement tous ses radiodiffuseurs à consacrer du temps aux nouvelles comme si nous vivions encore avec les ressources limitées des années 1980. Notre stratégie devrait mettre en valeur les efforts des entrepreneurs canadiens qui ont construit près de 100 nouveaux sites d'information. Il faut que nous comprenions les répercussions que causent les subventions gouvernementales versées à Radio-Canada, qui exploite le site d'information le plus consulté au pays au détriment du reste de l'industrie.
    Depuis des décennies, les radiodiffuseurs se plaignent de voir l'argent de leurs impôts subventionner un concurrent. Cette perversion du marché s'étend maintenant au monde en ligne. Alors qu'une subvention de 1,3 milliard de dollars permet à Radio-Canada — que le projet de loi C‑18 favorise probablement plus que le reste de l'industrie — d'établir des tarifs publicitaires qui, selon beaucoup, sont inférieurs à leur valeur marchande, et d'offrir des nouvelles gratuitement, d'autres diffuseurs ont de la difficulté à établir des bases d'abonnés et d'annonceurs publicitaires.
    Le projet de loi C‑18 ne fera que perpétuer un marché déjà faussé par les subventions et il punira l'esprit d'indépendance.
    Par exemple, même si les journaux de Regina, de Saskatoon, d'Edmonton et de Calgary bénéficient de l'argent prévu dans le projet de loi C‑18, aucun d'entre eux ne dirige son propre journaliste à la Tribune de la presse parlementaire, alors que le Western Standard, qui a refusé de se soumettre à l'approbation du gouvernement, le fait. Je pourrais vous citer plusieurs autres exemples.
    Si le Parlement appuie la liberté de presse, il n'approuvera pas le projet de loi C‑18.
    Merci.
(1110)
    Merci, monsieur Menzies. Vous avez conclu juste avant que votre temps soit écoulé. Merci beaucoup.
    Je cède maintenant la parole à M. Hugh Stephens, de l'Université de Calgary, pour cinq minutes.
    À vous la parole, monsieur.

[Français]

    Je voudrais d'abord remercier le Comité de me donner l'occasion de présenter mon point de vue sur cet important sujet.

[Traduction]

     Bonjour.
    Je parlerai à titre personnel et en faveur du projet de loi.
    Je vais répondre à trois critiques que j'ai entendues à son égard.
    La première soutient que les mesures proposées par le projet de loi C‑18 pour endiguer le déclin du journalisme visent la mauvaise cible, soit les grands intermédiaires de nouvelles numériques. Elle affirme qu'ils ne bénéficient pas financièrement de l'inclusion de contenu de nouvelles dans leurs plateformes et que, même s'ils en profitent, ils fournissent déjà du soutien financier à certains médias.
    La deuxième affirme que la portée du projet de loi est trop vaste, parce que sa définition de contenu « rendu disponible » comprend les liens, les titres et les extraits, qui seraient normalement considérés, en vertu de la Loi sur le droit d'auteur, comme une utilisation équitable.
    La troisième critique soutient que dans sa forme actuelle, le projet de loi C‑18 violerait les obligations commerciales internationales du Canada en vertu de la Convention de Berne et de l'Accord Canada-États-Unis-Mexique, l'ACEUM.
    À mon avis, ces critiques sont infondées.
    En rédigeant un blogue hebdomadaire sur les enjeux internationaux relatifs au droit d'auteur, j'ai remarqué qu'un certain nombre de gouvernements, face à l'opposition féroce des plateformes, ont dû recourir à la législation pour uniformiser les règles du jeu entre les éditeurs de médias d'information et les grands intermédiaires.
    En 2014, l'Allemagne et l'Espagne ont adopté des lois obligeant la société Google à payer les producteurs de nouvelles lorsqu'elle utilise leur contenu. En Espagne, Google a alors tout simplement fermé Google News, sa plateforme d'agrégation de nouvelles. En Allemagne, elle a retiré de sa liste tous les éditeurs qui refusaient de lui accorder un accès gratuit à leur contenu. L'Union européenne s'est attaquée à ce problème en créant un droit limité de deux ans pour les éditeurs de presse. Les sociétés Google et Facebook ont alors conclu des accords avec des éditeurs pour accéder aux nouvelles. La France a particulièrement bien réussi à cet égard.
    Nous savons que lorsque l'Australie s'est risquée à s'attaquer au problème, Google et Facebook ont lancé une vigoureuse campagne de lobbying et ont menacé de se retirer de l'Australie. Google a également tenté, mais sans succès, d'inciter le gouvernement américain à intervenir. Toutefois, face à la législation, les plateformes ont reculé et ont réussi à conclure des accords de partage des revenus avec la plupart des médias australiens.
    Aux États-Unis, le Congrès débat actuellement de la loi bipartite sur la concurrence et sur la préservation dans le domaine du journalisme, qui vise en grande partie à réaliser l'objectif du projet de loi C‑18. Je mentionne ces exemples pour souligner que l'objectif du projet de loi C‑18 n'est pas unique. Il consiste à préserver la viabilité du secteur du journalisme professionnel en exigeant que les grands intermédiaires numériques négocient une compensation lorsqu'ils utilisent du contenu de nouvelles. Cet objectif est en fait très courant dans un certain nombre de démocraties occidentales.
    On critique aussi la définition que donne le projet de loi C‑18 du contenu « rendu disponible » en soutenant qu'elle est trop vaste, parce qu'elle englobe des mesures comme l'établissement de liens avec le contenu ou la publication de manchettes ou d'extraits qui sont normalement considérés comme une utilisation équitable en vertu de la Loi sur le droit d'auteur. Certains font aussi valoir que l'affichage d'hyperliens est avantageux pour les médias, alors pourquoi les plateformes devraient-elles le payer? En effet, les organes de presse tirent un certain avantage de ces renvois, tout comme les plateformes profitent du contenu de nouvelles pour attirer des utilisateurs et des annonceurs publicitaires.
    Le projet de loi C‑18 prévoit que les parties établiront un équilibre entre leurs avantages respectifs dans le cadre de leurs négociations. Il ne nie toutefois pas aux plateformes numériques les droits d'utilisation équitable. Autrement dit, le projet de loi C‑18 ne diminue et ne modifie pas les droits que leur accorde la Loi sur le droit d'auteur. Cependant, elles violeront la nouvelle loi si elles ne négocient pas en toute bonne foi la disponibilité du contenu. Le recours aux exceptions relatives à l'utilisation équitable ne permet pas d'ignorer d'autres lois, qu'il s'agisse de la Loi sur les nouvelles en ligne, des lois sur la diffamation ou autres.
    Enfin, en examinant la critique qui prétend que le projet de loi C‑18 violerait les obligations du Canada au sein du commerce international, notamment la Convention de Berne sur le droit d'auteur et l'ACEUM, et qu'il risque d'entraîner des représailles commerciales des États-Unis, on remarque qu'elle est infondée. Le projet de loi est rédigé de telle façon qu'il ne cible pas les entreprises américaines, mais plutôt les entreprises d'une certaine taille qui dominent le marché. De même, il ne cherche pas à protéger les intermédiaires numériques canadiens qui font directement concurrence à Google ou à Facebook. En outre, son article sur la non-discrimination ne contient aucune exigence qui pourrait contrevenir à l'ACEUM. Dans le cas de la Convention de Berne, qui prévoit un droit de citation, rien dans le projet de loi C‑18 ne déroge au droit de citation même si, évidemment, la citation des fournisseurs de contenu de nouvelles est souvent un point de négociation.
    Outre l'absence d'arguments juridiques solides pour contester le projet de loi en vertu de l'ACEUM ou de la Convention de Berne, il est très peu probable qu'un gouvernement, dont celui des États-Unis, intente une contestation commerciale en vertu de l'ACEUM ou de l'OMC. Je serai heureux de vous expliquer pourquoi, si cela vous intéresse.
(1115)
     Je vais m'arrêter ici, madame la présidente, et je me ferai un plaisir de répondre aux questions.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Stephens.
    Je cède maintenant la parole à Mme Monika Ille, cheffe de la direction de l'APTN.
    Madame Ille, vous avez cinq minutes.
     Bonjour, madame la présidente et membres du Comité.
    [La témoin s'exprime en abénaquis et fournit le texte suivant:]
     Kwaï! Nd'aliwizi Monika Ille. Aln8ba Sqwa nia odzi {Odanak} m8wkaw8gan.
    [Traduction]
    Bonjour, je m'appelle Monika Ille. Je suis une Abénaquise de la communauté d'Odanak.

[Français]

     Je tiens à souligner que je vous parle depuis Tiohtiá:ke, ou Montréal, sur les territoires non cédés des Kanien'kehá:ka et des Anishinabe, traditionnellement une terre d'échange et de rassemblement de nombreuses nations.
    Je suis la cheffe de la direction du Réseau de télévision des peuples autochtones, ou RTPA.
    Lancé en 1999, APTN est le premier télédiffuseur autochtone national au monde. Notre parcours a amplifié les voix des peuples autochtones et a changé le paysage de la télédiffusion au Canada.
    APTN est offert à toute la population canadienne dans le service de base de la plupart des services de câble et de satellite. Nous diffusons des centaines d'heures d'émissions autochtones chaque année, en anglais, en français et dans une quinzaine de langues autochtones.
    En avril 2000, APTN a lancé la première émission autochtone nationale de nouvelles. Par ailleurs, en août 2022, nous avons célébré la troisième année de Nouvelles nationales d'APTN, notre émission d'actualité nationale en français.

[Traduction]

    Nos journalistes encouragent les Canadiens à tenir un dialogue ouvert sur l'histoire du Canada avec les peuples autochtones. APTN News met la voix des peuples autochtones à l'avant-plan, en présentant des reportages sur les changements climatiques, sur le développement économique, sur la revitalisation des langues autochtones, sur les athlètes autochtones ainsi que sur les sports, l'art, la musique et la façon dont les jeunes autochtones reprennent leur place sur nos terres. Notre bulletin de nouvelles présente les sujets qui intéressent moins les autres radiodiffuseurs.
    Ces dernières années, le réseau APTN a reçu de nombreux prix en journalisme, notamment un prix Michener, des prix Écrans canadiens et des prix de l'Association canadienne des journalistes.
    En 2021, pour la première fois dans l'histoire du Canada, la production du débat des chefs fédéraux a inclus des médias autochtones. La journaliste d'APTN, Melissa Ridgen, a été la première journaliste autochtone à participer à la télédiffusion nationale d'un débat fédéral. Si le réseau APTN et d'autres médias autochtones ne se joignaient pas aux médias grand public, les peuples autochtones y seraient gravement sous-représentés. En mettant ces voix à l'avant-plan, les médias autochtones présentent au public la culture autochtone en lui racontant nos luttes et nos réussites.
    À mesure que les téléspectateurs migrent vers le Web et que la consommation de nouvelles en ligne augmente, il est essentiel que le réseau APTN et d'autres organes de presse autochtones reçoivent le soutien d'intermédiaires de nouvelles numériques dominants ainsi qu'une juste rémunération pour leur contenu de nouvelles. Nous appuyons donc le principe et l'intention du projet de loi C‑18.
    Il nous semble cependant que ce projet de loi ne tient pas suffisamment compte des médias d'information autochtones. Par exemple, son paragraphe 11(1) traite des types d'accords que les intermédiaires de nouvelles numériques doivent conclure avec le secteur de l'information pour être exemptés du processus plus formel de l'offre finale. Intentionnellement ou non, ce paragraphe crée une sorte de hiérarchie des services de nouvelles canadiens. Les médias de la diversité, notamment ceux qui servent les communautés autochtones, ne sont mentionnés qu'au dernier alinéa.
    Je suggère donc que l'on modifie le libellé du projet de loi de manière à ce que tout accord avec des intermédiaires de nouvelles numériques comprenne la participation d'une part importante des médias autochtones et appuie de façon significative leur viabilité, tout comme le projet de loi appuie les médias locaux.
     Kchi wliwni. Merci. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
(1120)
    Merci beaucoup, madame Ille.
    Le témoin suivant est M. Jason Kint, chef de la direction de Digital Content Next.
    À vous la parole, monsieur Kint.
     Bonjour, madame la présidente.
    Je représente Digital Content Next, ou DCN.
    DCN est le seul organisme commercial qui se concentre exclusivement sur l'avenir numérique. Il se consacre à répondre aux besoins particuliers et très divers des entreprises de contenu numérique de grande qualité qui entretiennent directement des relations de confiance avec les consommateurs et avec les annonceurs publicitaires. Nos membres comprennent plus de 60 entreprises médiatiques et des milliers de marques, notamment des organismes de presse locaux, nationaux et internationaux comme le New York Times, le Washington Post, le Boston Globe, le Wall Street Journal, The Guardian, The Philadelphia Inquirer et The Financial Times.
    Je suis heureux d'appuyer sans réserve le projet de loi C‑18, Loi sur les nouvelles en ligne. Comme vous le savez, il suit l'adoption, en 2021, d'un projet de loi très semblable en Australie, le code de négociation des médias d'information, que DCN a également fortement appuyé. J'ai suivi de près votre audience de vendredi, lorsque l'ancien président de la Commission de la concurrence et des consommateurs de l'Australie, M. Rod Sims, a témoigné. À mon avis, l'expérience de l'Australie confirme plus que jamais la solidité de votre projet de loi. À une époque où les parlements du monde entier enquêtent et se renseignent les uns et les autres sur la façon dont le duopole de Google et Facebook a monopolisé la croissance de la publicité numérique, drainant l'élément vital de la presse locale, il est essentiel que nous nous informions bien pour ensuite nous inspirer des travaux des différentes nations afin d'améliorer nos processus, comme vous le ferez en adoptant le projet de loi C‑18.
    Vous connaissez déjà les détails du projet de loi, mais je vais énumérer brièvement ce que je considère comme ses éléments les plus importants, et je me ferai ensuite un plaisir de répondre à vos questions sur le marché en général.
    J'ai près de 30 ans d'expérience technique et opérationnelle dans le domaine des médias numériques. J'ai dirigé pendant près de 20 ans des entreprises de contenu numérique extrêmement fiables. Au début des années 1990, j'ai même rédigé des codes lors de l'avènement du Web, avant d'assumer mon rôle actuel, qui est d'assurer l'avenir des marques de contenu fiables.
    Passons maintenant au projet de loi C‑18.
    Premièrement, cette loi contribuera à rééquilibrer le pouvoir de négociation. L'image de marque des éditeurs témoigne de la fiabilité de leur contenu. L'inclusion de contenu de nouvelles provenant d'éditeurs fiables a certainement influencé les Canadiens lorsqu'ils développaient leurs habitudes quotidiennes de recherche et de consultation des médias sociaux. Google et Facebook en sont d'ailleurs devenus les principaux gardiens. L'absence de protection et de droits de négociation sur le contenu, conjuguée — ce qui est important — à un accès presque illimité aux données du Web pour le microciblage publicitaire, a développé un marché où les éditeurs et leur contenu sont devenus des marchandises interchangeables. Un reportage d'actualité coûteux et d'une importance vitale est souvent réduit à la même valeur qu'une copie d'amateur ou de contenu agrégé.
    La Loi sur l'information en ligne protégera les droits de propriété intellectuelle des éditeurs et établira un équilibre dans les négociations avec les plateformes en ligne. Elle garantira une juste rémunération, ce qui soutiendra la liberté et la diversité de la presse.
    Deuxièmement, le projet de loi à l'étude se fie principalement au marché pour déterminer comment et combien les éditeurs devraient être rémunérés pour leur contenu. Cette approche souple permet aux divers éditeurs de chercher des modalités de transaction adaptées à leurs besoins opérationnels. Certains éditeurs en démarrage voudront peut-être renoncer à des revenus en faveur de l'étendue du public à atteindre, alors que les éditeurs établis voudront un rendement maximal pour leurs marques de grande valeur. Par conséquent, nous ne pensons pas que le gouvernement devrait fixer les tarifs du contenu. L'arbitrage sur l'offre finale proposé dans le projet de loi est une solution élégante qui permettra d'accélérer les négociations afin de conclure des accords équitables qui détermineront le nombre de journalistes à embaucher l'année suivante.
    Troisièmement, ce projet de loi ne s'applique que dans le cas d'un grand déséquilibre de pouvoir entre un éditeur de nouvelles et une plateforme intermédiaire. Fait important, l'éditeur de nouvelles se réserve la possibilité de participer ou non. La plateforme dominante n'a pas ce choix.
    Quatrièmement, cela ne change en rien la structure du Web et n'exige d'aucune façon le paiement des liens. Il s'agit là d'une désinformation que nous avons réfutée pendant des heures en Australie, car les défenseurs de Google et de Facebook prétendaient que cette loi détruirait Internet. Deux d'entre eux ont fait part de leurs observations au Comité vendredi. Néanmoins, Internet fonctionne toujours aussi bien en Australie.
    Cinquièmement — et cette observation est importante —, ce projet de loi permet aux éditeurs de négocier en groupe. J'ai été ravi d'apprendre, en écoutant M. Sims vendredi, que les petits éditeurs qui avaient négocié collectivement en Australie ont reçu plus de paiements par journaliste que les grands éditeurs. C'est exactement le cadre que nous cherchons à établir pour les médias locaux et émergents.
    En résumé, ce projet de loi obligera les plateformes intermédiaires à négocier et permettra aux éditeurs de négocier en groupe. Ces deux dispositions sont au cœur de ce projet de loi. Nous avons déjà constaté leur succès en Australie.
    Pour que le marché de l'information du Canada demeure permanent, il est essentiel d'établir des règles du jeu équitables pour les éditeurs dont le contenu est fiable et de grande valeur. Au nom de DCN, nous exhortons la Chambre des communes à adopter ce projet de loi.
    Merci.
(1125)
    Merci beaucoup.
    Je cède maintenant la parole à Mme Jeanette Ageson, éditrice de The Tyee, des Éditeurs indépendants de nouvelles en ligne du Canada. Vous avez cinq minutes.
    Je m'appelle Jeanette Ageson. Je suis rédactrice en chef du magazine d'information en ligne indépendant The Tyee, à Vancouver. Depuis 2003, notre salle de nouvelles, qui est un organisme sans but lucratif, s'efforce de générer des revenus durables afin de soutenir un journalisme d'intérêt public approfondi. Aujourd'hui, notre effectif comprend plus de 20 journalistes et travailleurs médiatiques.
    Je suis ici aujourd'hui non seulement pour représenter The Tyee, mais pour présenter les préoccupations de plus de 100 entreprises semblables à la nôtre.
    La coalition des éditeurs de nouvelles en ligne indépendants du Canada comprend des organes de presse locaux anglophones, francophones et autochtones ainsi que des médias d'information qui défendent des enjeux particuliers. Globalement, cette coalition emploie des milliers de journalistes et rejoint des millions de lecteurs, de téléspectateurs et d'auditeurs partout au Canada.
    Nous, qui représentons la nouvelle génération des nouvelles en ligne du Canada, avons de graves préoccupations au sujet du projet de loi C‑18, cette Loi sur les nouvelles en ligne qui est censée défendre les organismes comme le nôtre. En mai dernier, nous nous sommes réunis pour rédiger une lettre ouverte que certains d'entre vous ont peut-être lue. Nous sommes ici pour vous demander de modifier et de renforcer le projet de loi C‑18. Nos préoccupations portent sur la transparence, l'équité, l'admissibilité et la clause d'exemption.
    Commençons par la transparence. Si ces accords entre les grandes sociétés technologiques et les éditeurs demeurent confidentiels, il sera plus difficile pour les petits éditeurs de négocier des accords équitables, ce qui risque d'accroître la méfiance des Canadiens à l'égard des médias.
    Le Canada fait face non pas à une, mais à deux crises de l'information. L'une est financière, et l'autre est fondée sur la méfiance. Les Canadiens expriment une méfiance sans précédent à l'égard des nouvelles et des journalistes qui les leur présentent. Nous devons leur dévoiler qui finance ces nouvelles et à quelles conditions. Nous devons rétablir la confiance à l'égard des nouvelles et non la détériorer davantage.
    En favorisant la confidentialité de ces accords, nous défavorisons les petits éditeurs pendant le processus de négociation. Au cours de la première journée d'audiences, la semaine dernière, de nombreux intervenants ont dit craindre que les petits éditeurs qui comblent les lacunes de l'actualité dans les collectivités soient laissés pour compte. On nous a répondu que les petits éditeurs en Australie sont satisfaits de leurs accords et que l'intention du processus canadien est d'assurer l'équité entre les organes de presse.
     Malgré cette rassurance, nous ne voyons rien dans ce projet de loi qui nous garantisse les outils nécessaires pour atteindre un résultat équitable et pour effectuer une vérification indépendante. Afin de participer pleinement à ce processus, nous devons recevoir en temps opportun des renseignements complets sur les accords conclus entre les organes de presse et les plateformes technologiques.
    Le projet de loi C‑18 doit également être modifié pour assurer l'équité. À l'heure actuelle, les grandes sociétés technologiques s'ingèrent dans l'industrie journalistique du Canada, et certains éditeurs ont déjà conclu des ententes secrètes avec des plateformes. Cependant, les organes de presse qui n'ont pas été triés sur le volet par ces plateformes ne savent pas comment conclure de telles ententes, quelles en sont les modalités et ce qui est considéré comme équitable par rapport aux autres organismes. Il nous faut une loi qui précise ces éléments.
     Si rien ne se fait, les sociétés Google et Meta continueront à conclure des accords inégaux au cas par cas qui favoriseront les plus grands éditeurs de nouvelles traditionnels. Elles y appliqueront des formules qu'elles n'auront pas à dévoiler ou concluront des accords basés sur les demandes ou sur les critiques les plus vigoureuses que l'autre partie leur aura lancées. Au fil du temps, ces accords inégaux détermineront quels organes de nouvelles survivront et lesquels disparaîtront.
    On ne peut pas laisser les sociétés Google et Meta décider de l'avenir de l'industrie journalistique du Canada. Nous croyons qu'une formule de financement universelle devrait être appliquée à tous les organes de presse admissibles en fonction de l'argent que chaque organisme dépense pour ses frais de rédaction.
    Il est crucial de modifier le projet de loi C‑18 afin d'éliminer les obstacles à l'innovation et à l'entrepreneuriat. Il faut aider les entrepreneurs qui ont investi de leur poche pour présenter l'actualité à leur collectivité et qui, autrement, seront exclus et pénalisés pour avoir risqué leur propre argent.
    Lorsqu'un journaliste lance une entreprise de presse, le reportage et le montage qu'il effectue lui-même devraient être comptés parmi les critères d'admissibilité. Nous devrions encourager les centaines de micro-organes de presse à combler les déserts de l'actualité et non les dissuader. À l'heure actuelle, ces organes de presse sont exclus du projet de loi C‑18.
    Enfin, le projet de loi C‑18 doit être modifié pour empêcher les grandes sociétés technologiques de s'ingérer dans nos salles de nouvelles. Ce projet de loi accordera aux sociétés de technologie des ordonnances d'exemption si elles garantissent au gouvernement que l'argent qu'elles versent aux éditeurs de nouvelles est dépensé à bon escient pour le contenu de nouvelles locales, de nouvelles intéressant les groupes de diversité et de nouvelles novatrices. Ces objectifs sont louables, mais je tiens à affirmer clairement que les sociétés Google et Meta ne devraient pas influencer nos salles de nouvelles. Elles ne devraient pas pouvoir déterminer le type d'actualité que nous présentons ou faire des promesses sur la façon dont nous dépensons notre argent.
     Ces conditions d'exemption menacent gravement l'indépendance de la presse canadienne. Elles ne précisent pas non plus si une société technologique doit conclure des accords avec trois ou avec 300 salles de presse pour être admissible. Cette incertitude risque de faire exclure des centaines d'organes de presse. Nous demandons plutôt que l'on retire les ordonnances d'exemption du projet de loi C‑18 ou qu'elles soient modifiées afin de réduire le plus possible ces menaces.
    Notre coalition a préparé un mémoire détaillé présentant le libellé précis de ces amendements. Il devrait être distribué à tous les membres du Comité. Les enjeux pour la liberté de la presse au Canada — et pour notre démocratie — ne pourraient pas être plus élevés.
     Merci. Je suis prête à répondre à vos questions.
(1130)
    Merci beaucoup, madame Ageson.
    Nous passons maintenant au dernier témoin, la Saskatchewan Weekly Newspapers Association.
    Je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître devant le Comité aujourd'hui.
    Je vous mets un peu en contexte. Je suis un éditeur de journaux de quatrième génération et l'éditeur de cinq journaux communautaires dans le Sud‑Est et le Centre-Sud de la Saskatchewan, dont le plus ancien est publié depuis 1893.
    Depuis plus de 100 ans que ma famille travaille dans l'industrie de la presse, elle n'a jamais été aussi menacée. Oui, il y a eu des moments dans l'histoire où l'industrie a été en difficulté, mais ce n'était rien de comparable à ce que nous voyons aujourd'hui.
    M. Nixon et moi sommes ici aujourd'hui pour parler au nom de la Saskatchewan Weekly Newspapers Association. Cependant, les problèmes sont à peu près les mêmes dans les trois associations de la presse des Prairies, qui représentent pratiquement tous les journaux communautaires de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, soit environ 200 publications. Nos membres vont des petits propriétaires indépendants à des exploitants de journaux appartenant aux plus grands éditeurs canadiens.
    La protection du journalisme d'intérêt public est essentielle, probablement encore plus pour nos petites collectivités éloignées et rurales. On ne saurait sous-estimer l'importance du journalisme local. Dans l'Ouest canadien — nous sommes certains que c'est la même chose partout dans les régions rurales et reculées du Canada —, c'est le journal local qui protège la démocratie et qui rapporte les actualités de la collectivité qu'il dessert. Il est important de souligner aussi que le journal communautaire est, dans la plupart des cas, le seul à consigner l'histoire de sa collectivité.
    Aujourd'hui, nous sommes venus défendre les intérêts des journaux indépendants des Prairies. Nous croyons qu'il est important de bien comprendre la crise existentielle à laquelle font face les petits éditeurs de journaux communautaires indépendants, et que le projet de loi C‑18, la solution de prédilection pour les grands éditeurs, pourrait être de peu d'utilité devant les difficultés financières des petits. Comme les plus grandes entreprises médiatiques du Canada, eux aussi ont vu siphonner par des plateformes numériques qui font du marketing ciblé les revenus publicitaires qui soutenaient autrefois leurs salles de nouvelles. On parle essentiellement de Google et de Facebook, maintenant connue sous le nom de Meta.
    Nous ne croyons pas qu'il y ait une seule solution pour les médias, qu'il s'agisse des journaux communautaires, des médias grand public ou des médias dits traditionnels. Nous faisons peut-être tous du journalisme, mais nos modèles d'affaires sont très différents et reposent entièrement sur ce qui sert le mieux nos collectivités respectives, surtout si on tient compte des défis que présente la révolution numérique.
    Il est facile de dire que des médias n'ont pas réussi à passer aux plateformes numériques. Il est extrêmement difficile de le faire dans des marchés qui ne sont pas d'envergure nationale ou mondiale. Autrement dit, ce qui fonctionne pour le Globe and Mail et son lectorat national ne fonctionnera pas nécessairement pour la plupart des éditeurs communautaires, qui n'ont tout simplement pas la portée ou le public nécessaires pour générer beaucoup de revenus dans un monde numérique où le succès se compte en clics. Un modèle de rentabilité fondé sur le nombre de clics et de vues ne fonctionnera pas pour les petits médias communautaires.
    On ne saurait trop insister sur la gravité de la situation du journalisme communautaire. Les revenus publicitaires ont diminué au point où la plupart des journaux communautaires fonctionnent avec un effectif réduit au strict nécessaire, ce qui fait que l'éditeur-propriétaire doit absorber lui-même les heures supplémentaires dans la charge de travail.
    Le journalisme perd en qualité parce que les revenus ne sont plus là pour verser des salaires durables à ceux qui le pratiquent. Les mesures de soutien appliquées durant la pandémie ont fait la différence entre la vie et la mort pour de nombreux éditeurs à l'époque. Mais elles sont maintenant réduites ou disparues complètement, tandis que les recettes publicitaires restent extrêmement faibles. Des localités sont sur le point de perdre leurs journaux et la couverture de leurs conseils municipaux, de leurs conseils scolaires, de leurs événements sportifs et culturels et de toutes les nouvelles locales sur lesquelles les citoyens comptent depuis des décennies.
    Pour ce qui est du projet de loi C‑18, nous sommes encouragés par le succès d'un projet de loi semblable en Australie, surtout en ce qui concerne les petits médias communautaires. Le journalisme communautaire est menacé par la révolution numérique, mais il n'y a pas de modèle qui permette de préserver la qualité de journalisme nécessaire pour protéger la démocratie locale et continuer de consigner l'histoire dans des centaines de collectivités des Prairies.
    En terminant, nous insistons pour que le projet de loi C‑18 prévoie une formule de négociation collective pour les journaux communautaires, s'ils se jugent incapables de négocier par eux-mêmes.
    Merci.
(1135)
    Merci beaucoup, monsieur Ashfield.
    Je tiens à féliciter tous nos témoins. Vous vous en êtes tous tenus à moins de cinq minutes. C'est très bien. Cela nous laisse beaucoup plus de temps pour les questions.
    Nous allons donc commencer la période de questions. Au premier tour, chacun a droit à six minutes pour les questions et les réponses. Nous devons être très clairs et essayer d'être aussi concis que possible afin de pouvoir caser le plus grand nombre de questions et de réponses possible.
    Nous y allons d'abord avec six minutes pour les conservateurs et John Nater.
     Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui. Je trouve que les six personnes que nous avons entendues et les organisations qu'elles représentent nous ont grandement éclairés.
    J'aimerais commencer par M. Menzies, qui comparaît aujourd'hui.
    Monsieur Menzies, je vois que vous portez votre chandail orange. Je signale que les profits des ventes de ces chandails, je crois, vont au programme des gardiens du savoir ancestral administré par le Royal Saskatchewan Museum. Je tiens à souligner cela, ainsi que le bon travail qui se fait là‑bas.
    J'aimerais faire appel à vos compétences — 30 ans dans les journaux, 10 ans au CRTC — et c'est cet aspect du CRTC qui m'intéresse. Vous avez comparu devant nous au sujet du projet de loi C‑11 et vous avez parlé des conséquences imprévues qu'il pourrait avoir. Je me demande si vous avez des préoccupations semblables au sujet du projet de loi C‑18.
    Oui. Le projet de loi C‑18 prévoit que tout l'argent découlant de cet accord commercial doit être consacré à l'information. L'intention est certainement très bonne, mais s'il s'agit d'une transaction commerciale entre deux parties consentantes, de quel droit le CRTC ou le gouvernement, d'ailleurs, peut‑il dire comment cet argent sera dépensé? Si une entreprise d'information veut le dépenser pour acheter du nouveau matériel informatique ou repeindre sa salle de rédaction, elle devrait être libre de le faire.
    L'autre chose, c'est que le CRTC a tendance, encore là avec de bonnes intentions peut-être, à privilégier certains domaines qu'il est censé promouvoir. Lorsqu'il a renouvelé récemment la licence de Radio-Canada, on a pu le constater en ce qui concerne certains groupes désignés qu'il est censé promouvoir.
    Toutes ces mesures sont bien intentionnées, mais on pourrait se retrouver avec des entreprises qui veulent plaire au CRTC ou avec un CRTC qui veut s'assurer que l'argent dans les salles de nouvelles est affecté à certains sujets, qui peuvent être de bons sujets, mais franchement, cela ne les regarde pas d'avoir... Une presse indépendante dépense son argent comme bon lui semble.
    Vous parlez du renouvellement de la licence de Radio-Canada, et je pense que nous savons tous combien de temps il a fallu pour y arriver. Et voilà que le gouvernement renvoie la question au CRTC pour qu'il la réexamine, mais ce qui m'intéresse ici, c'est la capacité du CRTC de faire ce qu'on lui demande dans ce projet de loi.
    Le texte lui-même donne au CRTC un pouvoir discrétionnaire en différentes matières. On y lit des tournures comme « Le Conseil estime que... », « ... si le Conseil estime raisonnable... », et d'autres du genre qui lui donnent le pouvoir de trancher à sa discrétion.
    Il y a deux angles. Croyez-vous que le CRTC a la capacité de faire ce qu'on lui demande de faire ici? Aussi, trouvez-vous convenable que le CRTC dispose du pouvoir discrétionnaire qu'on lui accorde dans ce projet de loi?
    Tout d'abord, le CRTC va être très occupé ces jours‑ci. On cherche un nouveau président ou une nouvelle présidente. La recherche initiale a dû être prolongée, de sorte que le titulaire actuel doit rester en place encore quatre mois. Il faudra un an à son successeur pour organiser l'endroit comme il l'entend. Il y a aussi tout le travail découlant du projet de loi C‑11. Je ne sais pas s'il y des choses à attendre du projet de loi qui s'en vient bientôt sur les méfaits en ligne, et maintenant nous avons ceci, un domaine qui ne relève pas de ses compétences habituelles. Je pense qu'il vaudrait mieux s'en tenir strictement au rôle du CRTC — si quelqu'un a un rôle à jouer, et il n'est pas nécessaire que ce soit le CRTC — pour confirmer que, si on veut emprunter cette voie, les deux parties sont satisfaites de leur accord, point à la ligne.
    Si on parle d'un accord purement commercial, ce n'est l'affaire de personne d'autre. Si on parle d'une subvention publique, alors les modalités deviennent l'affaire de tout le monde. Cela rejoint ce que disait Mme Ageson. Nous avons besoin de transparence. Est‑ce qu'il s'agit d'une subvention? Dans ce cas, tout le monde doit tout savoir. Cela m'a tout l'air d'une subvention, de la façon dont c'est structuré, parce que c'est le gouvernement qui dicte comment l'argent doit être dépensé. Si ce n'est pas une subvention, mais un accord commercial, ce n'est l'affaire de personne.
(1140)
    Je comprends. Cela m'amène à poser une question à Mme Ageson.
    Vous avez mentionné dans votre exposé, ainsi que dans votre lettre ouverte du 31 mai, certaines des préoccupations, certains des changements qui, selon vous, devraient être envisagés, dont l'idée que le seuil fixé pourrait exclure certaines jeunes pousses de l'information, et le rôle de base qui pourrait être dicté par les géants de la technologie en ce qui concerne l'utilisation des fonds.
    Pensez-vous qu'il faudrait stipuler clairement dans ce projet de loi que le gouvernement, le CRTC ou, d'ailleurs, les géants de la technologie ne peuvent pas à leur discrétion dicter les changements, dicter comment les choses pourraient et devraient se passer?
    Pensez-vous qu'il faudrait mettre cette interdiction expresse dans le projet de loi?
     Parlez-vous du pouvoir des plateformes technologiques d'orienter l'utilisation de leurs fonds vers certains types de couverture journalistique et de frais de rédaction?
    Oui, je parle de cela, de ce qui se passe dans les salles de nouvelles, mais aussi du point de vue du CRTC et du gouvernement quant à savoir qui est admissible au programme pour commencer, afin qu'il n'y ait pas cette capacité de choisir qui peut y participer et qui ne peut pas.
    Pour ce qui est du premier point, je serais en faveur de supprimer cette disposition, à savoir que les plateformes technologiques peuvent décider à leur guise de l'utilisation des fonds.
    Je ne comprends tout simplement pas comment cette relation pourrait exister sans déséquilibrer davantage le rapport de forces entre les éditeurs et les plateformes technologiques, sans que nous ayons à rendre cette information disponible et sans que nous puissions prendre de bonnes décisions d'affaires sur la meilleure façon de gérer nos organisations.
    La question de l'admissibilité vise à rendre compte de ce qui se passe en réalité...
    Madame Ageson, pourriez-vous revenir là‑dessus en répondant à une autre question, parce que M. Nater dépasse maintenant son temps de 39 secondes.
    M. John Nater: C'était 39 secondes merveilleuses.
    La présidente: Nous sommes bien d'accord.
    Nous passons maintenant à Mme Hepfner, du Parti libéral.
    J'aimerais adresser mes questions à M. Kint ici présent.
    Merci beaucoup de nous consacrer de votre temps aujourd'hui. Je me demande si vous pouvez revenir sur cette idée du déséquilibre des forces et nous expliquer comment cela se produit. Comment les géants de la technologie comme Facebook et Google utilisent-ils leur pouvoir dans ce marché quant aux choix éditoriaux qu'ils font et aux décisions algorithmiques qu'ils prennent?
    Pouvez-vous nous en parler? Est‑ce que ma question est claire?
    Absolument. Je vous en remercie.
    En particulier au cours de la dernière décennie, nous avons vu grandir leur force et leur emprise sur le marché. Nous les avons quantifiées en valeur financière. Les géants de la technologie accaparent parfois de 80 à 90 % de la croissance progressive de la publicité numérique. Pour chaque tranche de 5 milliards de dollars dans la croissance du marché, c'est peut-être 4 milliards de dollars qui vont à Google et à Facebook. Il y a lieu de se demander pourquoi.
    Les deux entreprises recueillent plus de données que toute autre sur le Web et dans tous les domaines de notre vie, alors elles ont accès à nos emplacements, elles ont des pixels et des étiquettes presque partout sur le Web. Elles sont constamment en mesure de récolter des données et de s'en servir pour cibler la publicité, ce qu'aucune entreprise ne peut faire à elle seule.
    La plupart du temps, cela se fait à l'encontre des attentes des consommateurs, qui ne veulent pas être suivis lorsqu'ils naviguent sur le Web, mais cela donne à Google et à Facebook une emprise unique sur le marché. Google peut en tirer plus de valeur en contrôlant une grande partie de la conception du Web. Elle domine avec son système d'exploitation, elle domine avec son navigateur et, surtout — ce qui lui vaut des poursuites dans le monde entier —, elle domine outrageusement avec ses plateformes d'achat et de vente de publicité, de sorte qu'elle tire aussi du pouvoir des deux côtés du marché.
(1145)
    Est‑ce que nous devrions nous en inquiéter?
    Absolument.
    Vous discutez beaucoup des torts causés en aval, et cela peut aller de la censure et des préjugés à la protection de la vie privée, en passant par l'utilisation des fonds. Je pense que cela vaut pour tous les partis. Je le constate aux États‑Unis aussi. En amont, c'est l'emprise sur le marché qui est la préoccupation commune, et c'est ce qu'il faut régler.
    Nous avons entendu à quelques reprises, même aujourd'hui, que le projet de loi C‑18 affecterait en quelque sorte l'indépendance journalistique, que le gouvernement aurait plus d'influence sur les éditeurs de nouvelles, ou que Facebook et Google pourraient infléchir la direction des entreprises de presse.
    Pouvez-vous nous en parler? De mon point de vue, c'est en fait le contraire, parce que c'est un projet de loi où les producteurs de nouvelles négocient directement avec les géants de la technologie. Le gouvernement et les géants de la technologie n'ont pas leur mot à dire. C'est purement une décision d'affaires.
    Pouvez-vous nous en parler un peu?
    Ce serait évidemment très préoccupant si c'était le cas, mais je ne vois rien de tel dans le projet de loi. Je n'ai pas vu cela en Australie non plus, où rien de tout cela n'est arrivé.
    Le CRTC a un rôle administratif à jouer si les choses en arrivent à un certain point. Il est fort probable qu'il n'y aura même pas d'arbitrage final si les choses se déroulent comme en Australie. C'est la menace qui oblige les entreprises à négocier et à se servir indirectement du marché en négociant de leur côté ou collectivement avec les plateformes.
    Cela ne donne pas plus de pouvoir à Google et à Facebook, ce qui est presque comique; ils pourraient avoir plus de pouvoir qu'à l'heure actuelle de toute façon. Quant au gouvernement, il a un rôle plutôt limité et il ne dicte absolument pas les tarifs, ce qui nous inquiéterait beaucoup si c'était le cas. On se sert du marché, et c'est la beauté de la chose.
    Je vous félicite de vous être inspirés de l'exemple australien et d'en avoir amélioré quelques aspects.
     Merci. C'est une excellente transition, parce que nous avons effectivement l'exemple de l'Australie. Nous avons ce projet de loi. Il est en place. Nous avons vu ce qui s'est passé là‑bas, et pourtant nous voyons encore beaucoup de... Même aujourd'hui, on nous a dit que ce projet de loi risque autant de tuer le journalisme que de le sauver. Mais nous avons un exemple. Nous avons des preuves à l'appui. Je me demande bien pourquoi on nous sert tous ces scénarios de catastrophe.
    Pourriez-vous nous parler des tactiques que certains géants de la technologie utilisent partout dans le monde, y compris au Canada, y compris en Australie, pour diffuser leur point de vue?
    Oui. Nous avons vu cela se produire dans bien des domaines.
    Google utilise son pouvoir de contrôle et de filtrage des contenus. Avec Search et Gmail, elle utilise ses points d'étranglement pour dire aux consommateurs et aux créateurs que ce sera une mauvaise loi et qu'elle va briser Internet. C'est un problème. Nous voyons des tribunes privées, tenues à huis clos. Google tient chaque année quelque chose qui s'appelle Newsgeist et qui se déroule selon les règles de Chatham House, c'est‑à‑dire en toute confidentialité. Il y a des séances sur différents sujets. Il y en a eu une sur l'Australie, où un professeur, comme ici vendredi dernier, a répandu de fausses informations. Les choses ne se sont pas passées comme il l'avait prédit en Australie.
    C'est puissant, et on y met beaucoup d'argent. Aux États‑Unis, près de 100 millions de dollars auraient été dépensés pour essayer de faire obstacle à notre loi antitrust qui a pourtant la faveur des deux grands partis. L'emprise sur le marché s'exerce de toutes sortes de façons.
    Dans le cas de Facebook, je dirais même qu'on s'en est servi pour éviter de faire comparaître des cadres supérieurs devant des parlements et devant le public, comme cela s'est fait ici au Canada et au Royaume‑Uni, où ils ont été sommés de venir témoigner, Mark Zuckerberg et sa suite.
    Merci. Je crois qu'il ne me reste que 30 secondes.
    Je me demande, madame Ageson, si j'ai le temps d'aborder vos préoccupations au sujet de l'admissibilité. Lors de notre dernière réunion, nous avons entendu l'idée que, plutôt que de modifier les conditions d'admissibilité, le gouvernement canadien devrait offrir plus d'incitatifs pour qu'un plus grand nombre de plateformes apparaissent en ligne, deviennent admissibles et engagent plus de journalistes.
    À titre d'ancienne journaliste, j'estime que nous avons besoin de plus de personnel sur le terrain. Nous avons besoin de gens qui assistent aux réunions, qui parlent aux gens et qui fouillent l'information, pas seulement de gens qui publient leurs opinions en ligne. C'est beaucoup moins cher de simplement publier une opinion. Je pense que cela explique en partie la désaffection du public pour le journalisme.
    Je me demande ce que vous pensez de l'idée de garder l'admissibilité telle qu'elle est, mais d'offrir plus d'incitatifs pour que les petites organisations ou celles déjà en ligne puissent un jour se qualifier.
    Je suis vraiment désolée, madame Hepfner. Nous n'avons plus de temps. Nous allons revenir à vous, et je suis sûre que vous pourrez vous reprendre.
    Oui, monsieur Nater.
(1150)
    Madame la présidente, je pense qu'on serait d'accord pour entendre une brève réponse à ce sujet.
    Eh bien, si nous dépassons le temps alloué, vous n'aurez pas assez de temps, messieurs.
    Il me reste du temps, et je pense que certains veulent entendre la réponse à cette question.
    Écoutez, je suis certaine... si M. Kint aurait assez de temps pour répondre si quelqu'un d'autre lui posait une question.
    Je suis désolée.
    Nous passons maintenant au Bloc québécois. Madame Desbiens, vous disposez de six minutes.

[Français]

    Je profite de l'occasion pour saluer tout le monde ce matin. Je suis très contente de remplacer mon valeureux collègue Martin Champoux.
    Je remercie tous nos témoins. Leurs propos sont toujours d'une pertinence et d'une qualité exceptionnelles. C'est un plaisir de les entendre et cela enrichit notre réflexion.
    Je vais m'adresser à Mme Ille, directrice générale du RTPA. Madame Ille, j'aimerais saluer encore une fois la qualité des productions de votre organisation et votre apport incommensurable à nos connaissances sur les sujets qui vous concernent. Cela enrichit aussi les connaissances des Canadiens et des Québécois, et je vous en remercie.
    Vous avez dit tout à l'heure que le projet de loi C‑18 aurait aussi un impact sur les radiodiffuseurs. C'est intéressant. Les contenus que vous produisez sont d'intérêt très large. Vos images, vos messages et vos contenus sont susceptibles de se retrouver sur les plateformes des géants du Web. C'est d'ailleurs déjà le cas.
    Quel impact le projet de loi C‑18 pourrait-il avoir sur le budget global de votre organisation? Vous permettra-t-il d'avoir plus d'argent? Pouvez-vous chiffrer cet impact et nous dire de quelle façon cela vous aiderait pour ce qui est de la qualité de vos contenus et du développement de votre organisme?
     Je vous remercie beaucoup de vos bons mots à l'intention du Réseau de télévision des peuples autochtones. J'en suis bien fière. Nous les acceptons avec plaisir.
    Il est certain que nous soutenons le projet de loi C‑18.
    RTPA a besoin d'argent. Le Réseau est offert dans le cadre du service de base des services de câble de base, mais il a besoin de plus d'argent, comme tout le monde.
    Je sais que nos nouvelles sont fort appréciées et ce, de plus en plus. Depuis la dernière année et demie, nous avons constaté que les gens venaient plus lire nos nouvelles sur le site Web, www.aptn.ca, ou sur Facebook. Ils le font surtout pour obtenir le point de vue autochtone sur les nouvelles qui touchent les Autochtones.
    Pour ce qui est de savoir dans quelle mesure RTPA va bénéficier du projet de loi C‑18, nous ne le savons pas. Nous n'avons pas d'accord pour le moment et nous n'avons pas été contactés à ce sujet. Quant à savoir comment nous pourrons négocier ces accords, cela reste à voir. Je trouve que nous manquons un peu d'informations pour pouvoir bien répondre à cette question.
    Toutefois, je suis d'avis que la façon dont le projet de loi est rédigé ne donne pas à penser que la place accordée aux médias autochtones est importante. Je trouve cela extrêmement dommage, surtout compte tenu des efforts fournis en vue de l'adoption du projet de loi C‑11, qui reconnaît maintenant les médias autochtones. Ce serait bien que le projet de loi C‑18 reconnaisse aussi les médias autochtones, mais aussi qu'il soit plus inclusif envers les Autochtones plutôt que de seulement ajouter à la fin que l'on doit refléter les points de vue autochtones.
    Je vous remercie de votre réponse. Cela m'éclaire un peu.
    Il est certain que l'on ne peut pas évaluer l'ampleur des retombées financières qu'aura le projet de loi C‑18. Par contre, pouvez-vous dire au Comité que vous êtes à peu près certaine qu'il comportera des avantages importants pour vous?
    Je ne sais pas si les avantages seront importants. Pour ce qui est des retombées financières, par contre, je dirais qu'il en aura. Reste à savoir à combien elles se chiffreront et comment la négociation va se faire.
    Est-ce que l'idée de regrouper les plus petites entreprises vous interpelle également?
    C'est une excellente question.
    J'y ai beaucoup pensé.
    Cela pourrait être une force. Je me demande toutefois s'il y aura une formule adaptée en fonction des entreprises. Il me semble que Mme Ageson a parlé plus tôt d'une formule équitable pour tous. Ce serait bien qu'il y ait une formule. Sinon, s'il faut nous battre chacun dans notre petit coin, nous nous demandons comment cela va se traduire au bout du compte dans les modalités.
    Il reste encore beaucoup de questions, et je n'ai pas de réponses sur la façon dont les choses vont se dérouler. Cependant, il est certain qu'au bout du compte, si je peux obtenir des avantages pour RTPA, ce sera cela de gagné.
    Je vous remercie.
    Je vais m'adresser à M. Ashfield, dont la situation est fort intéressante.
    Dans ma circonscription, Beauport—Côte-de-Beaupré—Île d'Orléans—Charlevoix, il existe plusieurs petits journaux locaux qui n'emploient pas même deux journalistes à temps plein. Je pense que ces petits journaux sont importants parce que, comme le disait plus tôt M. Ashfield, ils permettent de diffuser les informations plus sectorielles, qui sont pertinentes et dont la population a besoin.
    J'aimerais que vous nous parliez des menaces réelles qui guettent ce type d'entreprises, advenant qu'elles ne soient pas visées par le projet de loi C‑18.
(1155)

[Traduction]

     En Saskatchewan, ce serait plutôt désavantageux pour beaucoup de petites publications. L'industrie de la presse a changé. Ce sont les éditeurs eux-mêmes qui font maintenant la plus grande partie du travail, en assumant des tâches multiples.
    Dans ma propre entreprise, je dirige cinq journaux, mais chacun n'a qu'un seul journaliste à temps plein, sinon à temps partiel. Dans la situation actuelle, nous ne serions pas admissibles. Nous ne sommes pas admissibles à des choses comme le fonds d'aide aux initiatives de journalisme local parce que nous n'avons pas deux journalistes à temps plein. À moins qu'on n'amende le projet de loi pour admettre les petites entreprises qui n'ont peut-être qu'un seul journaliste, même à temps partiel, il y aura un contrecoup financier pour nous.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur Ashfield.
    C'est ce que le journaliste et rédacteur du journal Autour de l'Île, à l'Île d'Orléans, que certains d'entre nous connaissent peut-être...

[Traduction]

    Nous allons devoir vous interrompre. Merci beaucoup.
    Tout le monde a 15 secondes de plus, parce que M. Nater a mis la table pour cela.
     Vous n'avez plus de temps. Vous dépassez déjà de 15 secondes.
    Avant de poursuivre, les interprètes nous signalent qu'il y a un problème avec les microphones de deux de nos témoins, M. Menzies et Mme Ille.
    Nous allons suspendre brièvement la séance pour régler ce problème. Merci.
(1155)

(1200)
     Je crois que nous sommes prêts à reprendre nos travaux. Nous passons maintenant à M. Julian.
    Monsieur Julian, vous avez six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je suis très content que vous soyez de retour parmi nous.

[Traduction]

    Merci à tous nos témoins. Vos propos sont très intéressants.
    J'aimerais commencer par vous, monsieur Ashfield.
    J'ai deux questions relativement brèves pour commencer.
    Tout d'abord, vous avez parlé d'un journal de la Saskatchewan qui est publié depuis 1893. Ce serait bien de savoir de quel journal vous parlez.
    Deuxièmement, vous avez dit dans votre témoignage que vous présentez une position semblable, si j'ai bien compris, pour l'association des journaux communautaires du Manitoba et pour celle de l'Alberta aussi. Pourriez-vous confirmer cela également, s'il vous plaît?
    Pour ce qui est de votre première question, le journal publié depuis 1893 est le Whitewood & Grenfell Herald Sun. Il a été publié sous le nom de Whitewood Herald pendant environ 115 ans.
    Il y a environ cinq ans, j'ai acheté les journaux de Grenfell et de Broadview dans les localités avoisinantes et je les ai fusionnés en un seul, simplement en raison de la démographie et de la dynamique de l'industrie. Ce journal‑là est publié depuis 1893. À l'époque où je les ai fusionnés, il s'agissait en fait du plus ancien hebdomadaire permanent de la province, c'est‑à‑dire le plus vieux journal publié sous le nom qu'il avait dès sa création.
     Ma famille a participé...
    Je suis vraiment désolé de vous interrompre. Mon temps est limité. C'était juste une petite question.
    Ma deuxième portait sur le Manitoba et l'Alberta.
     Je suis désolé. Les associations du Manitoba et de l'Alberta ont des problèmes semblables aux nôtres, mais je ne parle pas en leur nom. Cependant, nous communiquons avec elles, et leurs préoccupations sont semblables aux nôtres.
    Serait‑il juste de dire que les trois associations de journaux communautaires — nous connaissons déjà la position de l'Association des journaux communautaires du Québec — sont en faveur du projet de loi C‑18, si on leur garantit une aide à l'échelon local et un résultat semblable à ce qui s'est produit avec le fonds Country Press Australia, qui est venu en aide à 150 journaux communautaires?
    Oui, c'est exact.
    Nous sommes en faveur du projet de loi, avec quelques amendements, dont ceux évoqués par Mme Ageson au sujet des ententes confidentielles et de l'équité, pour nous assurer que les petites publications en profitent également.
    Merci. Je comprends tout à fait.
    Je remarque que dans le territoire couvert par ces quatre associations de journaux communautaires, c'est plus de la moitié de tous les députés conservateurs qui sont représentés. J'espère sincèrement qu'ils vont prendre aussi la question en délibéré.

[Français]

     J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Ille.
     D'autres membres du Comité ont bien souligné l'importance du Réseau de télévision des peuples autochtones, ou RTPA, et la qualité des émissions diffusées. À quelques reprises, j'ai eu l'honneur de participer à des émissions de RTPA pour discuter de questions comme le logement et la réconciliation. La qualité de ce réseau est extraordinaire, et vous faites un travail remarquable.

[Traduction]

    Par ailleurs, avez-vous l'impression que les enjeux touchant les Autochtones et leurs communautés sont pleinement pris en compte dans le projet de loi C‑18, ou souhaiteriez-vous que des amendements et des améliorations y soient apportés afin que, non seulement pour le réseau APTN, mais pour d'autres diffuseurs et publications autochtones... afin d'y inclure les soutiens que nous attendons tous pour renforcer ce secteur?
    Certainement. Le projet de loi doit reconnaître les entreprises médiatiques autochtones. Dans sa forme actuelle, nous sommes simplement inclus dans un grand... et la notion de diversité est mentionnée à la toute fin du texte.
    Ce que nous disons, c'est que notre contribution à l'industrie de l'information est souvent sous-estimée. En présentant les nouvelles à notre manière, nous leur donnons un nouvel éclairage. Nous les poussons plus loin et nous les mettons souvent en contexte afin d'aider les non-Autochtones à comprendre nos luttes et nos problèmes.
    Nous souhaiterions que ce projet de loi soit conforme à l'article 16 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, qui dit que « les peuples autochtones ont le droit d'établir leurs propres médias dans leur propre langue... ».
    APTN a été consulté et nous avons exprimé nos préoccupations. Les représentants de Patrimoine canadien nous ont répondu qu'ils les examinaient et s'efforçaient de trouver une solution. Ils veulent vraiment que le projet de loi soit plus inclusif à l'endroit des médias autochtones et qu'il respecte la Déclaration des Nations unies.
    Je sais que c'est ce qui a été dit, et j'ai hâte de voir si cela va se concrétiser.
(1205)
    Merci. Si vous pouviez transmettre au Comité vos commentaires sur les amendements, nous vous en saurions gré.
    Je vous en remercie.
    Je vais maintenant m'adresser à Mme Ageson.
    Vous avez été très claire au sujet des ordonnances d'exemption et vous avez aussi clairement dit que les petites entreprises de nouvelles devaient en retirer un avantage.
    Vous avez également insisté sur l'importance de la transparence. Pouvez-vous nous expliquer ce qu'il faudrait changer dans ce projet de loi pour garantir cette transparence?
    Bien sûr. Cela concerne surtout le rôle du CRTC en tant qu'arbitre et aussi les règlements que nous n'avons pas encore vus dans leur totalité. Au lieu de nous fier au jugement de l’arbitre, nous aimerions avoir accès à des renseignements complets et à jour afin d'évaluer nous-mêmes si l'entente que nous négocions est équitable et si elle correspond à celles que négocient certains grands éditeurs dont le pouvoir de négociation est plus important que le nôtre.
    Je sais que c'est le but du processus de négociation collective, mais d'après ce que je comprends, les éditeurs doivent absolument faire partie d'une unité de négociation pour obtenir de l'information sur la teneur des négociations qui les concernent. Pour diverses raisons, nous aurions peut-être intérêt à créer nos propres unités de négociation. Nous demandons donc que les éditeurs puissent avoir accès à l'information détenue par les unités de négociation.
    Vous avez bien sûr soulevé la question des deux employés, des pigistes à temps partiel, comme l'a aussi fait la Saskatchewan.
    Je vous ai laissé un peu de latitude, mais je suis désolée, votre temps est écoulé.
    Merci pour ces 35 secondes supplémentaires, madame la présidente.
    Vous avez eu la même prolongation que M. Nater.
    Nous amorçons notre deuxième tour de cinq minutes avec les conservateurs.
    Madame Thomas, vous avez cinq minutes. Allez‑y.
    Ma première question est pour M. Menzies.
    Tout d'abord, je tiens à vous remercier sincèrement d'avoir pris le temps de venir nous éclairer sur ce projet de loi.
    En avril dernier, vous avez dit à peu près ceci dans un article sur le projet de loi C‑18:
... c'est un projet de loi qui a été élaboré à la demande des éditeurs de journaux acculés à la pauvreté et qui est devenu, pour être poli, la tentative la plus audacieuse au monde de puiser dans les poches mieux remplies des entités en ligne.
    Nous entendons souvent le gouvernement se justifier d'exercer un contrôle accru sur les médias canadiens dans le but d'uniformiser les règles du jeu. Je suis curieuse de savoir si vous trouvez que le projet de loi C‑18 atteint cet objectif. Ne désigne-t‑il pas plutôt des gagnants et des perdants? Que répondez-vous à cette question?
     Ce que je voulais expliquer ici, c'est que les règles du jeu actuelles ne sont pas équitables. Elles ne font que perpétuer les inégalités. En fait, ce dont le Canada a besoin... De façon très générale, le projet de loi C‑18 est une réponse à une situation particulière. Il ne s'inscrit pas dans un cadre stratégique plus général, ce dont le pays a justement besoin en cette période de transition. Que ce soit le cas ou non, les règles du jeu actuelles ne sont pas équitables.
     CBC/SRC est un radiodiffuseur subventionné. C'est correct de subventionner un radiodiffuseur public, mais si vous le mettez en concurrence avec tous les acteurs du secteur dans un monde où les nouvelles sont désormais diffusées en ligne et qui seront inévitablement entièrement en ligne, ce n'est plus utile. Le CRTC a aussi un rôle à jouer.
    À lui seul, ce projet de loi ne va pas être utile. Comme j'ai essayé de le dire, il va attiser la méfiance, et cela ne va pas bien finir.
    Je vous remercie, monsieur Menzies.
    Je veux revenir sur un point soulevé par M. Kint. Il a affirmé que le projet de loi n'exigera jamais un paiement pour les liens. À l'émission d'Evan Solomon, sur CTV, voici ce que le ministre Rodriguez a répondu à ce sujet:
Parce qu'il y a une valeur de rattachée à cela. Si vous cliquez sur le lien pour avoir accès à la nouvelle, il y a une valeur...
    En réponse à une question sur la marchandisation des liens, le ministre semble confirmer qu'en fait, une valeur peut leur être attribuée.
    Monsieur Menzies, vous avez abondamment écrit sur ce sujet, notamment sur le danger de s'engager dans cette direction. Auriez-vous l'obligeance d'élaborer votre pensée à cet égard?
(1210)
    Et bien, tout d'abord, au sujet des liens, je ne comprends pas comment on peut leur attribuer une valeur, d'autant plus que la Cour suprême, dans une situation différente, a déjà arrêté que les liens n'ont pas de valeur, et ensuite appliquer cette valeur seulement aux liens vers les journaux. Pourquoi alors ne suis‑je pas payé pour chaque gazouillis que je publie? Pourquoi ne suis‑je pas payé chaque fois que je publie une photo de mes petits-enfants sur Facebook? Pourquoi ne suis‑je pas payé pour mes liens? Ce n'est pas une bonne idée d'appliquer cela seulement aux médias.
    Par ailleurs, les liens en soi n'incitent pas nécessairement les médias à se comporter de manière exemplaire à long terme. Les médias construisent leur intégrité non pas en fonction d'une seule nouvelle, mais bien nouvelle par nouvelle. Si vous créez un environnement où les médias seront payés selon le nombre de liens ou de clics qu'ils génèrent, je pense que vous encouragez alors un jugement irréfléchi dans les salles de presse. Les journaux maintiennent leur intégrité en étant dignes de confiance sur une longue période. Si vous encouragez des comportements qui n'inspirent pas confiance dans l'immédiat, cela ne sert à rien.
    Monsieur Menzie, vous avez laissé entendre que le projet de loi C‑18 allait miner l'indépendance journalistique et encourager la partisanerie dans les salles de nouvelles. C'est un peu ce que vous êtes en train de dire quand vous parlez de confiance et de rigueur de l'information.
    Trouvez-vous que c'est ce qui se passe actuellement?
    Je ne sais pas si cela favorisera la partisanerie dans les salles de rédaction, mais c'est la perception que les gens auront. Si vous devenez dépendants de quelqu'un, que ce soit de Facebook, de Google ou du gouvernement en place... Soyons réalistes, les gouvernements changent et les gens qui pensent aujourd'hui que les médias font des courbettes au gouvernement libéral finiront par croire qu'ils font des courbettes devant quelqu'un d'autre.
    Il n'est pas vraiment important de savoir si c'est le cas ou non. Ce qui est important, c'est que les gens ne les croiront pas.
    Je vous remercie, monsieur Menzies.
    Nous avons dépassé le temps alloué. Je n'accorde pas la prolongation Nater au deuxième tour. Merci.
    Nous entendrons maintenant Michael Coteau, pour les libéraux.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je tiens à remercier également tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Je vais demander à M. Kint s'il veut réagir aux propos de M. Menzies.
    Le mot « liens » suscite un débat interminable et épuisant alimenté surtout par Google. Ce mot n'apparaît nulle part dans le projet de loi.
    Ce qui importe ici, comme cela a été le cas en Australie, c'est que tout le projet de loi vise à corriger le déséquilibre existant entre les pouvoirs de négociation. C'est son point d'ancrage. Oui, le rapport de l'enquête menée sur plusieurs années en Australie, au Royaume-Uni et ailleurs décrit le pouvoir des plateformes. Il indique qu'elles donnent accès au contenu, mais l'idée selon laquelle un paiement pour les liens est exigé est tout à fait farfelue.
    Merci beaucoup.
    J'ai quelques questions pour la cheffe de la direction d'APTN.
    Madame Ille, j'aimerais savoir si un réseau comme le vôtre entretient des liens avec les géants de la technologie.
    Nous n'avons aucune relation avec Facebook ou Google, seulement avec YouTube.
    Que pensez-vous des ententes conclues par les géants du numérique et d'autres grandes entreprises médiatiques? N'avez-vous pas l'impression qu'il y a un déséquilibre dans cette approche par rapport à ce qui se passe en ce moment?
    C'est une excellente question et il est très difficile d'y répondre. Nous n'avons pas été sollicités par ces entreprises et nous ne les avons pas sollicitées non plus.
    Comme tout le monde le sait, nous savons que des ententes ont été conclues avec les grandes entreprises médiatiques. J'essaie de comprendre où se situe notre réseau dans ce tableau. Nous sommes un réseau national. Nous diffusons six jours par semaine en anglais et une journée en français. Nous diffusions beaucoup de nouvelles qui gagneraient à se retrouver sur ces grandes plateformes et... à nous rapporter une juste rémunération pour notre travail.
    Je trouve que les règles du jeu ne sont pas équitables actuellement. J'essaie de voir quel avantage nous apportera ce projet de loi après son adoption.
(1215)
    J'ai toujours respecté le travail accompli par votre organisation, surtout en matière de protection et de bien-être des enfants et de responsabilisation. Le Canada a grandement besoin de votre voix. Je tiens à vous remercier officiellement pour l'excellent travail que votre organisation a accompli dans le passé.
    Si nous n'apportons aucun changement au projet de loi, à quoi ressemblera le parcours d'une organisation comme la vôtre? Si rien n'était fait, si ce projet de loi n'avait pas été déposé et si nous maintenions simplement le statu quo, à quoi ressemblerait l'avenir, selon vous?
    Je crois vraiment que nous devons être rémunérés pour nos nouvelles. Nous avons de plus en plus de succès. Comme je le disais, les gens s'intéressent à nos histoires. Ils souhaitent connaître le point de vue des Autochtones sur ce qui se passe au Canada.
    Facebook et Google sont aujourd'hui incontournables. En tant qu'abonnés aux médias sociaux, nous avons constaté que les gens nous suivaient principalement sur Facebook. Il y a des gens qui s'y connectent pour avoir accès à nos histoires. Ce serait formidable si nous pouvions obtenir quelque chose en contrepartie afin de pouvoir continuer à faire connaître les récits autochtones et à former des journalistes autochtones.
    Nous avons encore tellement à faire. Nous sommes une très petite équipe, mais nous pourrions accomplir tellement plus.
    Votre contenu est téléversé sur Facebook, par le biais de votre organisation ou d'autres, mais aucune compensation n'est prévue en retour, proportionnellement aux recettes publicitaires que votre contenu rapporte à Facebook.
    Pas pour le moment.
    En terminant, vous avez dit que le projet de loi serait renforcé s'il comportait des dispositions particulières soulignant l'importance d'organisations comme la vôtre et de la voix autochtone. Pouvez-vous nous donner une idée du libellé de ces dispositions? Et où faudrait‑il les insérer dans ce projet de loi?
    Bien sûr. Elles pourraient s'insérer à divers endroits, mais j'ai mentionné l'alinéa 11(1)a) qui porte sur les exemptions. Nous venons de parler des communautés autochtones et c'est la seule occurrence du mot « autochtone » dans ce projet de loi.
    Si nous parlons de la nécessité de présenter des nouvelles autochtones, de l'importance de diffuser une part importante de sujets autochtones dans les médias et de la viabilité des nouvelles autochtones... Cela montre simplement combien il est important que les géants de la technologie comprennent l'importance de l'information autochtone.
    Je vous remercie, madame Ille. Nous pourrons peut-être y revenir plus longuement au prochain tour.
    Madame Desbiens, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je vais de nouveau m'adresser à vous, monsieur Ashfield, puisque nous avions commencé à discuter tantôt.
     Je veux attirer votre attention et celle du Comité sur le phénomène entourant l'île d'Orléans et le petit journal local nommé Autour de l'Île. Un auteur-compositeur de l'île d'Orléans est très célèbre en Europe. Il s'appelle Félix Leclerc. Il a évolué sur l'île d'Orléans et est une figure emblématique de cet endroit. Le petit journal Autour de l'Île a une portée qui est aussi internationale, du fait que beaucoup d'Européens viennent le consulter pour rester en contact avec l'Île d'Orléans et Félix Leclerc.
     Cette grande célébrité existe peut-être, de votre côté, dans les petits journaux. Connaissez-vous le même phénomène et les préoccupations qui en découlent? Si le journal disparaît, ce genre de lien avec l'international disparaît également.
(1220)

[Traduction]

    Je suis désolé, mais j'ai perdu le fil un moment. Quelle était la question?
    Je vais arrêter le chronomètre jusqu'à ce que nous démêlions cela.
    Pouvez-vous répéter votre question, madame Desbiens?

[Français]

    Je vais essayer de parler un peu moins rapidement par égard pour nos merveilleux interprètes. C'est peut-être là que se situe le problème.
    Une personne célèbre vient de l'île d'Orléans. Pour sa part, le petit journal Autour de l'Île, qui ne compte qu'un seul journaliste, risque de disparaître si l'on n'apporte pas une petite modification au projet de loi C‑18. Il s'agit d'y inclure les médias écrits qui n'emploient qu'un rédacteur ou un journaliste.
    La portée du journal n'est pas uniquement régionale, puisque la célébrité de Félix Leclerc, auteur-compositeur très connu en Europe, fait en sorte que le journal est consulté à l'échelle internationale. Le journal risque de disparaître si les médias écrits ne comptant qu'un seul journaliste ne sont pas inclus dans le projet de loi. Cette situation nous inquiète.
     Avez-vous connu ce genre de phénomène pendant votre parcours journalistique?

[Traduction]

    Oui, je pense que la majorité des journaux autochtones ont un important lectorat à l'extérieur des communautés, même si la plupart sont publiés à l'intérieur des communautés.
    Personnellement, j'ai constaté à quel point les incidents nationaux survenus ces dernières années dans la région que nous couvrons — par exemple le décès d'un agent de la GRC en fonction et la découverte de tombes anonymes dans la Première Nation de Cowessess — avaient attiré des gens vers nos sites Web. D'autres médias se sont aussi adressés à nous pour obtenir des photos, de l'information, des contacts et d'autres renseignements.
    Nous avons beau être un petit journal, nous couvrons les événements nationaux et internationaux qui se produisent à l'occasion. Il n'y en a pas tous les jours, mais pour nos lecteurs locaux...
    Monsieur Ashfield, je suis désolée, il ne nous reste plus de temps pour cette réponse.
    Je donne maintenant la parole à M. Julian. Vous avez deux minutes et demie à votre disposition.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'ai une très brève question pour Mme Ageson. Combien de membres de votre coalition, les Éditeurs indépendants de nouvelles en ligne du Canada, ne sont actuellement pas protégés par le projet de loi C‑18 dans sa version non amendée?
    Nous avons parlé de pigistes, de journalistes-propriétaires. Combien de membres de votre coalition ne seraient pas couverts actuellement par le projet de loi C‑18 si ces amendements n'étaient pas adoptés?
    C'est une très bonne question. Nous n'avons pas fait une ventilation précise de la taille des entreprises figurant à la liste, mais nous avons joint une liste à la lettre ouverte que nous avons signée. Ce serait une bonne idée de la consulter.
    Oui, en effet. Si vous pouviez fournir cette information au Comité, je pense que cela nous serait très utile. Je vous remercie.
    Je vais maintenant m'adresser à M. Kint.
    Je vous remercie beaucoup d'être venu nous rencontrer.
    Vous avez parlé des plateformes dominantes. Dans ma région, les entreprises de nouvelles en ligne ont pillé nos sources de nouvelles locales. Deux des quatre hebdomadaires ont fermé leur porte et il y a eu des compressions dans les publications. Je représente deux collectivités qui couvrent un tiers de million de personnes et dont les sources de nouvelles locales ont diminué de moitié.
    N'est‑il pas important de juguler cette hémorragie de médias locaux et de nous assurer d'avoir une base solide pour l'avenir? N'est‑il pas important de lutter contre la désinformation qui envahit de plus en plus les plateformes en ligne?
    C'est d'une importance capitale. Je pense que c'est l'un des éléments les plus importants de ce projet de loi — comme en Australie — et c'est exactement ce que fera ce projet de loi. La négociation collective est l'élément central de cette mesure législative. C'est le pilier, comme je l'ai déjà expliqué.
    D'après ce que j'ai entendu au sujet de l'Australie, les petits éditeurs — certains sont venus témoigner vendredi dernier — reçoivent plus de fonds par journaliste que les grandes entreprises médiatiques. Cet argent est donc versé directement aux publications locales... J'ai aussi entendu dire que ces nouveaux fonds couvrent entre 25 et 30 % des salaires. C'est très important, surtout pour préserver la haute intégrité de l'information et des journaux qui ont la confiance de la population locale. C'est aussi une façon de lutter contre la désinformation. C'est essentiel à la démocratie.
    C'est beaucoup, entre 25 et 30 %, c'est près du tiers des salaires. Ce que vous dites, c'est que si nous ne faisons pas la même chose, si le projet de loi C‑18 n'est pas adopté, l'hémorragie dont vous avez parlé va se poursuivre.
    Elle va certainement se poursuivre.
    Merci beaucoup, monsieur Julian.
    Monsieur Kint, je pense que votre temps de parole est écoulé.
    C'est maintenant au tour des conservateurs.
    Monsieur Waugh, vous avez cinq minutes à votre disposition.
(1225)
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vais revenir à la Saskatchewan Weekly Newspapers Association, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    Vous représentez 56 membres. Vous n'êtes pas sans savoir que si le projet de loi C‑18 est adopté, vous devrez avoir deux employés à temps plein dans la salle de rédaction, qui seraient indépendants des propriétaires ou des éditeurs. Donc, sur les 56 journaux que vous représentez dans ma province, la Saskatchewan, combien seraient admissibles à un financement en vertu du projet de loi C‑18, et combien ne le seraient pas? Pouvez-vous nous donner ces chiffres?
    Ma question s'adresse à M. Nixon ou à M. Ashfield.
    En ce moment, seulement quatre publications ont réussi à obtenir ce genre de financement. La plupart de nos membres ne seraient pas admissibles.
    Quatre sur 56... et nous allons secourir la Saskatchewan Weekly Newspapers Association. Donc, si aucun amendement n'est apporté au projet de loi C‑18, il n'apportera rien aux hebdomadaires de Lanigan, de Lloydminster, de Langenburg et d'autres petites villes, malgré ce que notre ami néo-démocrate vient de dire ici.
    J'ai consulté votre page. La semaine dernière, j'ai justement demandé au World-Spectator, de Moosomin, combien d'argent ce journal obtiendrait‑il si le projet de loi était adopté? Personne n'a pu me dire à quoi ce journal était admissible.
    Monsieur Nixon, pouvez-vous me dire si le World-Spectator recevrait de l'argent si jamais le projet de loi C‑18 était adopté à la Chambre?
    Peut-être. Le montant n'est pas déterminé. Beaucoup doutent que ce projet de loi soit bénéfique pour tous les journaux.
    C'est justement le problème que pose ce projet de loi. Au Canada, les journaux ruraux, dont beaucoup appartiennent à des députés conservateurs, que ce soit au Manitoba, en Alberta et en Saskatchewan... C'est la raison pour laquelle vous m'avez invité ici, parce qu'il y a une énorme lacune dans le projet de loi C‑18, comme l'a mentionné mon collègue du Bloc au sujet des régions rurales du Québec. Le gouvernement libéral nous induit en erreur en prétendant que ce projet de loi va sauver le journalisme. Ce n'est pas du tout le cas. Je le sais pertinemment.
    Je veux avoir plus d'information provenant de la Saskatchewan. Je constate que parmi vos 56 hebdos, bon nombre s'en tiennent au strict minimum actuellement. Ils n'ont pas deux employés à temps plein dans leur salle de rédaction. Ce projet de loi ne leur apporte aucun avantage. En fait, il leur nuit parce que ces journaux sont en concurrence avec des entreprises médiatiques plus importantes, comme Glacier, en Saskatchewan, qui compte probablement deux employés à temps plein. Ce projet de loi vous fait plus de tort que de bien.
    Je ne peux pas dire de mal de Glacier ni d'aucun de mes membres. Ils comptent parmi ces 56 publications. Ce que je peux dire, par contre, c'est que le budget de 2022 nous offre une possibilité. Il prévoit 10 millions de dollars pour une initiative de journalisme local. Ce fonds doit être structuré de manière à pouvoir être versé à ces petits médias communautaires.
    Le budget prévoit également 40 millions de dollars en nouveaux fonds pour les trois prochaines années dans le cadre du Fonds du Canada pour les périodiques. Il faut qu'une part importante de cette somme soit consacrée à ces petites publications.
    Je vous remercie d'avoir mentionné ces 40 millions de dollars, mais nous ne savons pas où ils iront. Personne ne nous l'a dit. J'ai vraiment peur que certains de vos 56 membres disparaissent de votre page Web d'ici un an.
    Je suppose que c'est ce qui arrivera.
    Merci beaucoup.
    Madame la présidente, avec votre permission, je vais déposer un avis de motion, comme je l'ai fait le jeudi 22 septembre. Je veux prendre les quelques secondes qui me restent pour en faire lecture:
Que le ministre du Patrimoine canadien soit invité à comparaître devant le Comité au sujet du financement fédéral accordé au Community Media Advocacy Centre (CMAC) par le ministère du Patrimoine canadien et le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).
     Madame la présidente, nous recevrons bientôt le ministre Hussen, mais j'aimerais que nous invitions aussi le ministre du Patrimoine canadien. Ce ministère a cinq canaux de financement distincts. Nous devons entendre le ministre nous expliquer lui-même pourquoi le CMAC a obtenu un financement de 133 000 $.
(1230)
     Je vous remercie, monsieur Waugh. [Inaudible] en discuter. Comme avez un peu dépassé le temps alloué, c'est raisonnable.
    Nous entendrons maintenant M. Louis pour les libéraux.
    Comme nous devons nous réserver 15 minutes pour discuter de nos travaux, ce sera donc notre dernier tour...
    Mme Rachel Thomas: J'invoque le Règlement.
    La présidente: ... et nous aurons cinq minutes à huis clos.
    Mme Rachel Thomas: J'invoque le Règlement.
    La présidente: C'est à vous, monsieur Louis.
    J'invoque le Règlement.
    La présidente: Oui, madame Thomas, je suis désolée.
    Mme Rachel Thomas: Merci.
    Madame la présidente, je crois que mon collègue vient de proposer une motion. Ne devons-nous pas en discuter au lieu de poursuivre les questions.
    D'accord. Je suppose que c'est ce que nous allons devoir faire.
    Monsieur Waugh, un de nos collègues ne pourra donc avoir ses cinq minutes pour poser des questions, mais allez‑y.
    Nous allons devoir interrompre cette partie de notre réunion pour discuter de la motion à huis clos.
    Mme Rachel Thomas: J'invoque le Règlement.
    La présidente: Je vais aussi devoir remercier les témoins d'être venus...
    Mme Rachel Thomas: J'invoque le Règlement.
    La présidente: ... et les laisser partir immédiatement.
    Je vous remercie beaucoup...
    Mme Rachel Thomas: J'invoque le Règlement.
    La présidente: ... de nous avoir consacré du temps.
    Merci.
    Mme Rachel Thomas: J'invoque le Règlement.
    La présidente: Allez‑y, madame Thomas.
    Madame la présidente, conformément au Règlement de la Chambre des communes, lorsque je fais un rappel au Règlement, vous devez en prendre acte.
    Nous n'allons pas poursuivre à huis clos. La motion a été proposée en public, elle donc doit être étudiée en public.
    D'accord, madame Thomas, mais j'aimerais remercier les témoins, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    Madame et messieurs les témoins, je vous remercie.
    L'audition des témoins est maintenant terminée. Nous allons lancer le débat sur la motion de M. Waugh.
    M. Housefather a levé la main.
    Madame Thomas, avez-vous toujours la main levée, ou s'agit‑il d'un oubli?
    Oui, madame la présidente. J'ai d'abord levé la main pour parler de cette motion, mais comme la procédure n'a pas été respectée, j'ai dû invoquer le Règlement.
    Madame Thomas, souhaitez-vous parler de la motion maintenant?
    Puis‑je invoquer le Règlement?
    Bien sûr. M. Housefather invoque le Règlement.
    Je suis désolé, madame Thomas.
    Non, ça va. Le rappel au Règlement a préséance.
    Pourriez-vous nous dire, madame la présidente, si cette motion est recevable ou non, car je crois que le Comité a rejeté une motion identique lors d’une réunion précédente.
    Votre rappel au Règlement est très pertinent, monsieur Housefather.
    Effectivement, je me rappelle que le Comité a refusé de demander au ministre du Patrimoine canadien de venir témoigner sur ce sujet particulier.
    Je pourrais déclarer la motion irrecevable, monsieur Waugh, parce qu’elle a été mise aux voix et rejetée par le Comité. J’aimerais suggérer que nous ne la présentions plus vu qu’elle a déjà été examinée.
    J’invoque le Règlement, madame la présidente.
    Oui, monsieur Nater.
    Tout d’abord, vous songez sans doute à quelque chose qui a eu lieu à huis clos. Il m'apparaît inopportun que le Comité divulgue ce qui se passe à huis clos. C’est une simple mise en garde de ma part à ce stade‑ci.
    Puisque vous avez la présidence du Comité, je trouve troublant que vous divulguiez ce qui a pu se passer ou pas lors d'une séance à huis clos. Sur ce point, j'estime que la motion de M. Waugh est tout à fait recevable.
     Je vais demander à la greffière de rendre une décision là‑dessus. C’est très inusité.
(1235)
    J’invoque le Règlement, madame la présidente.
     Ce n’est pas à la greffière de décider, mais à la présidente.
    Je sais. Elle peut me donner un conseil. Désolée, monsieur Nater.
    On me dit que votre argument n'est pas sans valeur, monsieur Nater, si bien que nous allons poursuivre la discussion sur la motion. Merci.
    Monsieur Housefather, vous avez la réponse à votre question.
    Madame Thomas, la parole est à vous.
    Je veux prendre un moment pour parler de cette motion, que j'estime très importante. Essentiellement, la motion demande que le ministre du Patrimoine, le ministre Rodriguez, se présente devant le Comité et qu’il nous fasse la faveur d'un peu de son temps pour discuter de la motion sur Hockey Canada.
    C’est, bien sûr, ce dont nous discutons. Pour la gouverne de tous ceux qui nous regardent ou qui nous écoutent, nous discutons de Hockey Canada et de l'utilisation qu'il a faite des fonds. En particulier, nous nous penchons sur l’utilisation qu’il a faite des deniers publics, de l’argent des contribuables qui a été acheminé via le ministère du Patrimoine, puis distribué.
    Afin de...
    Ce n’est pas ce dont nous parlons.
    Oh, oh!
    C'est fantastique, ce que vous êtes aimable.
    J’allais justement dire que nous parlions du Community Media Advocacy Centre.
    Oui. C’est exactement ce dont nous parlons.
    Mes excuses; j’essaie de jongler avec plusieurs choses ici. Je recommence.
    Nous ne demandons pas au ministre de venir nous parler de Hockey Canada.
    Oui, monsieur Julian, pour un rappel au Règlement.
    Nous connaissons déjà ce type d’obstruction systématique, madame la présidente. Je me dois de m'interroger sur la pertinence des propos des députés qui ne parlent même pas de la question.
    Nous venons de couper la parole à des témoins à qui j’avais des questions importantes à poser, en particulier à la Saskatchewan Weekly Newspapers Association, qui semble s’écarter très loin de la pensée conservatrice, mais que nous avons pourtant fait taire. Et voici que nous avons une obstruction systématique et que les députés ne parlent même pas de la motion.
    Je m’interroge sur la pertinence. J’aimerais que vous rendiez une décision là‑dessus, madame la présidente.
     Très bien. Je conviens avec vous que les déclarations initiales de Mme Thomas n’avaient rien à voir avec la motion. Nous allons donc passer maintenant à M. Housefather, le prochain sur ma liste.
    Madame la présidente, j’invoque le Règlement.
    Oui, madame Thomas.
    Merci.
    Madame la présidente, soyons raisonnables. Je me suis rattrapée. Bien sûr, je reconnais que je m'éloignais du sujet. Ce n'était pas à dessein, et il est plutôt inapproprié que M. Julian intervienne pour se faire du capital politique.
    Souhaitez-vous continuer de parler de la motion?
     Madame la présidente, je demanderais la permission de prendre la parole pour parler de la motion dont nous sommes saisis.
    Je viens de dire que vous pouvez le faire, madame Thomas.
    Je pense que nous commettons tous de petites erreurs.
     Veuillez poursuivre. Je vais vous permettre de parler de la motion, mais nous n’avons pas — comme M. Julian l'a dit — beaucoup de temps pour en discuter. Alors, veuillez vous en tenir à la motion dont nous sommes saisis. Merci.
    Allez‑y, madame Thomas.
    Merci, madame la présidente, et bienvenue à Ottawa. C’est un bon endroit où se trouver.
    J’aimerais parler de la motion visant à inviter le ministre Rodriguezà nous parler de l’embauche d’une personne démasquée depuis comme antisémite. Patrimoine canadien a embauché cette personne afin de donner une formation contre le racisme, spécifiquement aux médias.
     Cette personne a publié de nombreux messages dans les médias sociaux au sujet des juifs, qu'elle a dénigrés, et dit quel traitement la société canadienne — et, oserais‑je dire, le monde entier — devrait leur réserver. Ses commentaires sont grotesques et totalement déplacés. Cette personne a été embauchée et mise sous contrat, et reçoit des fonds publics par divers canaux pour donner cette formation. Il est difficile de croire qu'elle ait pu être soumise à un processus de vérification quelconque, si tant est qu’il y en ait eu un lorsqu'a été prise la décision d’embauche.
    C'est au ministre Rodriguez de l'expliquer, en tant que ministre du Patrimoine canadien. Je crois comprendre que le ministre Hussen a aussi joué un rôle à cet égard, de par ses responsabilités, mais, à la fin, c’est le chef du ministère — le ministre — qui supervise tout cela. C’est lui qui a la responsabilité.
    Par ailleurs, je crois savoir que les fonds sont venus du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, que le ministre du Patrimoine supervise directement. Ce n’est pas au ministre Hussen d'expliquer ce financement, mais bien au ministre du Patrimoine, le ministre Rodriguez.
    Pour les raisons que j’ai exposées, je crois qu’il serait opportun et dans l’intérêt du public canadien d’entendre le ministre du Patrimoine lui-même, plutôt que seulement le ministre Hussen. Pour cette raison, je crois que la motion dont mon collègue, M. Waugh, a saisi le Comité aujourd’hui est très importante et doit être examinée comme il se doit.
     Je répète que, au bout du compte, c’est l'affaire des Canadiens. Bien sûr, une simple recherche dans Google vous apprendra que les Canadiens ont poussé les hauts cris lorsqu'ils ont appris, cet été, que cette personne, M. Marouf, a eu cet argent pour donner cette formation.
    Malheureusement, la grande majorité des députés libéraux n'ont rien dit. Je félicite M. Housefather de s’être exprimé, d'avoir élevé la voix sur la question et réclamé justice. Je respecte sa voix et sa position. Je suis particulièrement déçu du premier ministre, du ministre Hussen et, enfin, du ministre Rodriguez, qui a mis plus de deux semaines pour finir par commenter l'incident. J'ai trouvé cela totalement inapproprié. Qui plus est, ce n’est pas seulement moi qui ai pensé cela. Les Canadiens d’un océan à l’autre ont estimé que c'était parfaitement inapproprié et que le gouvernement aurait dû agir bien plus tôt.
    Compte tenu des erreurs commises et de leurs graves répercussions sur une partie importante de la population canadienne... Non, tous les Canadiens ont été blessés, car nous devrions tous être soumis à une norme rigoureuse quant à la façon de nous traiter les uns les autres. Le gouvernement et quiconque obtient un contrat du gouvernement devraient être les porte-étendards de cette norme. Tous les Canadiens ont été desservis par l’embauche de cet individu. Toutefois, un groupe en particulier se trouvait à la pointe de l’épée, et c'est la communauté juive du Canada. Elle n’aurait jamais dû avoir à subir cela — jamais.
    Une seule personne peut répondre de cette décision, et c’est le ministre Rodriguez. Mes collègues libéraux ont un choix à faire: ils peuvent permettre qu’on explique cet incident. Ils peuvent mieux l'expliquer par l’entremise du ministre du Patrimoine, ou ils peuvent camoufler l'erreur et empêcher que la lumière se fasse sur la question. En l'occurrence, ils participent — ferais‑je valoir — à l’incident malheureux survenu cet été, parce que plus personne ne rend des comptes.
(1240)
     En fait, on protège le ministre. Encore une fois, je crois qu’il est dans l’intérêt supérieur des Canadiens de le faire venir ici, et pour lui poser les questions auxquelles les Canadiens veulent des réponses.
    Nous passons maintenant à M. Housefather.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie mon amie, Mme Thomas, de ses commentaires. Je suis d’accord sur certains points de ce qu’elle a fait valoir, et en désaccord sur d’autres.
    Je conviens qu’il était absolument scandaleux que Laith Marouf et le Community Media Advocacy Centre, le CMAC, reçoivent un contrat du gouvernement pour donner une formation antiraciste. Cet homme est un antisémite abject, qui a fait d'horribles commentaires sur les Canadiens autochtones, les Canadiens racisés, les Canadiens français et de nombreux autres groupes, même si le gros de ses commentaires visait directement les juifs. Je l’ai déjà dit, on aurait dû résilier son contrat sur-le-champ.
    Je pense que le ministre a essentiellement reconnu que le contrat n’aurait jamais dû être conclu et qu’il a déclaré que des mesures correctives s’imposaient. Il faut une meilleure formation, une diligence raisonnable, et des révisions du contrat et de la déclaration de certification. C’est pourquoi je pense qu'il va venir au Comité. Il devrait nous faire un exposé, pour que le Comité fasse son travail de diligence raisonnable, et soit satisfait des changements qui sont apportés au processus, de sorte qu'un individu comme M. Marouf et le CMAC n’obtiennent jamais plus de contrat du gouvernement du Canada.
    Là où je ne suis pas d’accord, c’est que le ministre responsable est le ministre Hussen. La stratégie antiraciste est l'affaire du ministre Hussen. Le contrat est l'affaire de son ministère. Je ne veux pas accorder moins de temps qu'il n'en mérite au ministre Hussen lorsqu’il viendra présenter les changements qu’il apporte. Si le Comité estime ensuite utile d'entendre d’autres personnes, il pourra toujours en arriver à cette conclusion, mais je ne pense pas que ce soit nécessaire. Sur ce point, ce n'est pas le ministre Rodriguez, mais le ministre Hussen qui est responsable.
    En tant que député juif, j’estime que les députés de tous les partis doivent dénoncer cette situation. Il ne faut pas laisser aux seuls députés juifs la tâche de mener le combat sur une question qui heurte directement la communauté juive. Nous devons tous dénoncer l’antisémitisme et toutes les formes de racisme. Je pense que nous avons une leçon à en tirer: lorsque d’autres groupes sont ciblés, nous devons dénoncer encore plus fort.
    J’espère que nous en tirerons tous des leçons, mais je ne pense pas, je le répète, que le ministre Rodriguez est le bon ministre. Le ministre Hussen est celui qui doit se présenter devant le Comité et c'est lui qui devrait comparaître vendredi, comme le Comité l'avait décidé au départ.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
(1245)
    Merci, monsieur Housefather.
    Monsieur Julian, allez‑y.
     Merci, madame la présidente.
    Ce Community Media Advocacy Centre, le CMAC, est profondément troublant. L'antisémitisme qu'il traduit est consternant. C'est pourquoi j'ai réclamé la résiliation du contrat lorsque nous avons vu les commentaires, comme vous vous rappellerez, madame la présidente.
    Cela s'inscrit dans une tendance plus lourde de la montée de la haine, de l'antisémitisme et de l'islamophobie. Il est certain que l'occupation du convoi des camionneurs en début d'année nous a fait voir les symboles les plus épouvantables — les symboles nazis — voler sur la Colline du Parlement. Nous avons été témoins d'un antisémitisme flagrant. Les partisans du convoi — malheureusement, nous avons vu certains députés appuyer ces actes ignobles et ces expressions de haine — devraient faire un examen de conscience parce que ce fut une période triste de l'histoire du Canada. Cela ne fait aucun doute.
    Je suis d'accord pour faire comparaître le ministre Hussen devant le Comité, et je l'ai répété maintes fois. J'ai demandé à mes collègues de repousser l'idée d'inviter immédiatement le ministre Rodriguez. J'aimerais entendre les réponses de M. Hussen. Ensuite, selon que notre comité sera satisfait ou non de ces réponses, je serai tout à fait disposé à appuyer cette motion.
    Bien honnêtement, je suis insulté qu'on ait présenté cette motion aujourd'hui sachant — son parrain connaissait ma position là‑dessus — que je voulais attendre la première audience avant de porter un jugement et de décider de convoquer ou pas le ministre Rodriguez. Parce qu'on l'a sortie aujourd'hui, en bloquant des témoignages d'une importance vitale... Les hebdomadaires de la Saskatchewan, de l'Alberta et du Manitoba nous ont lancé un appel à l'aide aujourd'hui. Ils croient qu'il faut modifier le projet de loi C‑18 pour l'étendre à tous. J'appuie ces amendements. Les 56 journaux de la Saskatchewan devraient être couverts par les soutiens offerts par le projet de loi C‑18.
    Je crois comprendre qu'il s'agissait de témoins conservateurs. Lorsque cette contradiction entre la position conservatrice et les hebdomadaires est apparue clairement, nous avons tout de suite mis un terme aux témoignages, de sorte que je ne suis pas en mesure, comme député, d'interroger les journaux communautaires de la Saskatchewan sur l'importante position qu'ils ont prise. Leur position contredit celle du Parti conservateur sur le projet de loi C‑18. J'ai l'impression, comme avec le projet de loi C‑11, que nous voyons encore une fois l'interruption des témoignages parce qu'ils soulèvent des vérités douloureuses auxquelles certains députés ici ne veulent pas faire face.
    Très franchement, je suis frustré de l'interruption des témoignages, et frustré que nous ayons maintenant une motion dont nous avons déjà discuté. C'est une motion sur laquelle j'ai déjà indiqué clairement ma position. La majorité des membres du Comité ont déjà exprimé leur position sur la motion. Plutôt que d'attendre la semaine prochaine, pour entendre le témoignage du ministre Hussen sur cette très importante question, avant de décider collectivement, comme Comité, de l'orientation à prendre... Cela a très bien fonctionné par le passé, madame la présidente, comme vous le savez.
    Je félicite M. Nater, en particulier, qui a toujours été prêt à travailler avec les divers partis au sein de notre Comité pour dégager un consensus. Plutôt que de trouver ce consensus, nous avons exclu les témoins et faisons maintenant face à quelque chose que, comme je l'ai clairement dit, je n'ai pas l'intention d'examiner avant d'avoir entendu le ministre Hussen.
    Très franchement, madame la présidente, je suis frustré. Je voterai contre cette motion si elle est mise aux voix, mais elle me semble relever davantage d'une tactique d'obstruction systématique. Je le déplore, parce que nos témoins d'aujourd'hui avaient des témoignages et des renseignements importants à nous livrer. On les a fait taire parce que la motion a été présentée à des fins d'obstruction plutôt que pour tenter d'en venir à un accord.
    Cela dit, je serai disposé à réexaminer la motion après le témoignage du ministre Hussen. C'est à ce moment‑là que, selon moi, nous devrions discuter de la possibilité de convoquer ou pas le ministre Rodriguez.
(1250)
     Merci, monsieur Julian.
    Nous prenons bonne note de votre frustration. Parfois, lorsque nous parlons de certains aspects du fonctionnement de notre comité, cela doit se faire en fonction de principes et pas nécessairement d'un sens arbitraire de la procédure. Mais c'est là que nous en sommes. Et il ne nous est pas permis de parler longuement de ce qui s'est passé à huis clos, de sorte que je dois rappeler aux membres de ne pas trop en parler. Sachez quand même qu'il vous reste deux minutes avant la fin de la réunion et je pense que...
    M. John Nater: Cette horloge prend de l'avance, madame la présidente.
    La présidente: Elle avance vite, oui, en effet.
    Il nous reste deux minutes et j'ai deux autres intervenants. Nous ne pourrons pas passer au vote au cours de notre réunion si nous continuons ainsi. Je voulais simplement prévenir tout le monde.
    La greffière dit que nous pouvons continuer pendant encore deux minutes après 13 heures, mais cela ne nous laisse pas beaucoup de temps. Si tout le monde veut parler en détail de la question, nous n'arriverons même pas à voter, et je...
    J'invoque le Règlement.
    La présidente: Oui, monsieur Julian.
    M. Peter Julian: Madame la présidente, j'ai un engagement à 13 heures et je ne donnerai pas mon consentement pour prolonger la séance après 13 heures.
    D'accord. Merci.
    Je vois que les députés de ce côté‑là de la salle sont d'accord.
    Monsieur Nater, vouliez-vous parler ou vouliez-vous que nous passions au vote? Vous n'avez pas beaucoup de temps.
    Très bien, allez‑y, monsieur Nater.
    Je serai très bref, madame la présidente.
    Très brièvement, personne ne dit que le ministre du Patrimoine canadien doit venir demain, ni même la semaine prochaine, mais nous estimons que nous devons l'entendre dans cette affaire. S'il est utile de dégager ce large consensus, je signalerai également que nous avons invité le ministre à comparaître devant nous pour commenter sa lettre de mandat. Le Comité en est convenu. Cela remonte à plusieurs mois...
    La présidente: Ce n'est pas l'essence de cette motion.
    M. John Nater: Non, madame la présidente, mais je dis cela dans le contexte de cette motion.
    Cela remonte à plusieurs mois, et nous n'avons pas encore entendu le ministre parler de sa lettre de mandat, si bien que cela en fait partie. S'il était possible, dans l'esprit de la recherche d'un consensus, que le ministre Rodriguez accepte de comparaître devant le Comité — et encore une fois, il n'est pas nécessaire que ce soit demain ou la semaine prochaine, mais dans un avenir plus ou moins proche tout de même — pour commenter sa lettre de mandat ministériel, comme le Comité l'y invite toujours, je pense qu'il pourrait y avoir un consensus pour voir que...
(1255)
    C'est une tout autre affaire parce que nous parlons spécifiquement de la question du CMAC.
    Madame la présidente, je dis cela dans l'espoir de dégager un consensus.
    Je sais. Je vous entends bien, monsieur Nater. C'est très bien, mais ce n'est pas l'essence de cette motion.
    Monsieur Waugh, aviez-vous quelque chose à ajouter? J'ai bien votre nom sur ma liste, mais nous n'avons pas le temps. Il nous reste 30 secondes.
    Nous avons parfois de la difficulté à faire venir le ministre du Patrimoine canadien, et c'est une très bonne motion. J'en ai donné préavis la semaine dernière. Je viens tout juste de la remettre sur le tapis. Nous avons d'autres témoins à entendre au sujet du projet de loi C‑18, et en particulier l'Alberta Weekly Newspapers Association, de sorte que nous aurons du temps pour laisser M. Julian en parler lorsqu'ils seront là.
    Voilà. Merci.
    Merci.
    Madame Thomas, étant donné qu'il est maintenant 13 heures et que notre réunion devrait prendre fin, avez-vous autre chose à dire, quelque chose de nouveau à ajouter à notre discussion?
    Madame la présidente, à mon heure, il est 10 h 56, heure des Rocheuses.
    Désolée, je m'en remets à l'horloge de notre salle de comité, s'il vous plaît, madame Thomas, plutôt qu'à votre horloge locale.
    Bien sûr, madame la présidente.
    Permettez-moi de signaler au Comité que, sur le site Web de Patrimoine canadien, où l'on peut présenter une demande au Programme d'action et de lutte contre le racisme, c'est au ministère du Patrimoine canadien que la demande est soumise, au Programme d'action et de lutte contre le racisme, ce qui illustre une fois de plus qu'il est sous la responsabilité de Patrimoine canadien et que le ministre responsable est, de fait, M. Rodriguez. Je ne sais pas pourquoi il faut discuter pour savoir si ce ministre devrait ou pas venir répondre aux questions que les membres de notre comité pourraient avoir, ce qui, une fois de plus, met en lumière le fait qu'il s'agit d'importantes questions à poser au nom des Canadiens, car, bien sûr, ils ont de nombreuses préoccupations qui ont été mises en lumière au fil des mois depuis l'éclatement de ce scandale au cours de l'été.
    Merci, madame Thomas.
    Je vois la main levée de M. Lemire, mais je veux d'abord vous dire que je vais devoir obtenir l'accord du Comité. M. Julian nous a déjà dit qu'il ne peut pas rester plus longtemps. Nous avons déjà dépassé l'heure prévue pour la levée de la séance. Nous n'avons même pas voté sur la motion. Je ne veux vraiment pas avoir à y revenir et à perdre beaucoup de temps encore une fois.
    Monsieur Lemire, allez‑y.

[Français]

     Madame la présidente, je voudrais rappeler l'urgence d'entamer le débat sur Hockey Canada et d'en convoquer les représentants. S'ils ne peuvent pas se présenter le 4 octobre, devrait-on les y obliger? Peut-on les convoquer le 25 octobre? Peut-on convoquer M. Nicholson?
    Ce sont des éléments consensuels très importants sur lesquels nous devrions prendre position au cours des quatre prochaines minutes.

[Traduction]

     Je suis désolée. Nous parlons de la motion ici.
    Puisqu'il n'y a pas d'autres intervenants pour la motion de M. Waugh, je vais la mettre aux voix.
    Madame la présidente, je voudrais confirmer qu'il s'agit d'un vote par appel nominal.
    Merci.
    (La motion est rejetée par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
    La présidente: Merci beaucoup.
    Puis‑je avoir une motion pour lever la séance.
    Oui, monsieur Julian, allez‑y.
    Madame la présidente, je pense que M. Lemire a soulevé un point très important. Nous avons reçu de la correspondance de Hockey Canada. Je pense que nous devrions maintenir son assignation à comparaître pour mardi prochain.
    Je voulais le proposer. Je pense que nous avons peut-être l'accord de tous les partis.
    Très bien, merci.
    Monsieur Nater.
    Sur le même rappel au Règlement, je serais d'accord. L'assignation a été signifiée, et je pense que nous devrions la maintenir pour le mardi 4 octobre. Je m'attendrais à voir ces témoins dans ce siège.
(1300)
    Merci. Je suis très contente.
    Il y a un autre point à régler, mais nous ne pouvons pas le faire tout de suite. Il s'agit du concept des voyages. Selon ce que nous a dit le Comité de liaison, si nous voulons les faire, libre à nous. Je ne parle pas nécessairement de voyages à l'étranger. Il peut s'agir de voyages au Canada.
    J'ai entendu tout le monde. Tout le monde est‑il d'accord pour maintenir l'assignation à comparaître?
    Un député: Oui.
    La présidente: Merci. C'est parfait.
    Monsieur Housefather, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    J'avais un autre point à ajouter sur lequel nous pourrions être d'accord. J'aimerais que la greffière demande à Hockey Canada les projets de procès-verbaux et les notes des séances à huis clos. Si le Comité les avait vendredi de cette semaine, nous aurions le temps de les étudier avant de voir les témoins.
    Merci.
    Tout le monde est‑il d'accord ici là‑dessus?
    Oui, c'est d'accord.
    M. Coteau a mentionné les notes du personnel, également, sur les séances à huis clos. Il y a consensus, je pense.
    Certainement.
    Je pense que nous sommes d'accord ici.
    J'aimerais avoir une motion pour lever la séance, s'il vous plaît.
    M. Chris Bittle: Je le propose.
    La présidente: M. Bittle propose la levée de la séance. La séance est levée.
    Merci beaucoup, tout le monde.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU