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Bienvenue à la 101
e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes.
Notre réunion se déroule en mode hybride, conformément au Règlement. Des députés siègent en personne et d'autres siègent à distance, au moyen de l'application Zoom.
Je profite de l'occasion pour rappeler de ne pas faire de capture ou de photo de votre écran. C'est interdit.
Nous recevons aujourd'hui des témoins qui viennent nous parler des géants du Web, dont trois qui se joignent à nous par Zoom et un autre qui est ici en personne. Tout d'abord, M. Jean‑Hugues Roy, professeur à l'École des médias de l'Université du Québec à Montréal, témoignera à titre personnel. M. Imran Ahmed représente quant à lui le Center for Countering Digital Hate, dont il est le directeur général, et M. Jason Kint représente l'organisme Digital Content Next, dont il est aussi directeur général. Les trois comparaîtront de manière virtuelle. Enfin, nous avons avec nous M. Michael Geist, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique de l'Université d'Ottawa.
Nous allons entendre les déclarations liminaires de cinq minutes des témoins. Nous commençons avec M. Jean‑Hugues Roy, qui est comme je l'ai dit professeur à l'Université du Québec à Montréal.
Monsieur, vous disposez de cinq minutes pour présenter une déclaration au comité du patrimoine canadien. Nous vous écoutons.
Je ne sais pas si votre microphone est désactivé ou si le problème est de notre côté… Je pensais que ces problèmes avaient été réglés il y a deux ans. Je ne sais pas ce qui se passe. J'étais présente dans la salle quand vous avez effectué un test sonore et tout allait bien. Laissez-moi vérifier de nouveau.
Monsieur Roy, nous ne vous entendons pas. Nous allons passer au prochain intervenant et nous allons revenir à vous dans quelques minutes.
Nous allons donc entendre la déclaration de cinq minutes de M. Ahmed, le directeur général du Center for Countering Digital Hate.
Allez‑y.
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Monsieur le président, distingués membres du Comité permanent du patrimoine canadien, merci de me donner la parole aujourd'hui.
Je m'appelle Imran Ahmed, et je suis le fondateur et le directeur général du Center for Countering Digital Hate. Je vais parler aujourd'hui du rôle que jouent les géants du Web dans notre écosystème de l'information, de la manière dont la conception et le modèle d'affaires de leurs plateformes contribuent au recours croissant à la désinformation et aux discours haineux, ainsi que de leur réaction à l'égard de toute tentative de resserrer la surveillance par la voie d'une réglementation adoptée démocratiquement.
Pour les entreprises de médias sociaux, malgré leur rôle central dans le discours public, la liberté d'expression n'est pas un objectif en soi. Ce sont des entreprises à but lucratif, qui tirent leurs profits des ventes d'espaces publicitaires associés au contenu créé gratuitement par les éditeurs de nouvelles et les utilisateurs des plateformes. Meta et les autres plateformes ne veulent pas assumer la responsabilité éditoriale du contenu publié sur leurs plateformes — pour des raisons liées aux obligations et de nature financière — parce que la modération du contenu et le contrôle éditorial requièrent beaucoup de ressources.
Cependant, en bloquant le partage de nouvelles au Canada, Meta donne la preuve qu'elle s'est toujours arrogé un pouvoir éditorial dont elle est prête à user sans discernement si du contenu compromet son sacro-saint chiffre d'affaires. Ce que nous montre la décision de Meta de bloquer les nouvelles canadiennes, c'est qu'elle et ses semblables sont prêtes à assumer la responsabilité du contenu publié sur leurs plateformes seulement si leurs profits sont menacés.
C'est ce qui explique leur emportement à l'égard de la Loi sur les nouvelles en ligne. Le projet de loi oblige les plateformes à négocier des ententes avec les éditeurs de nouvelles qui leur ont fourni du contenu qui leur a permis de s'enrichir et, pour certains, dont elles ont détruit l'entreprise.
Le Canada se retrouve dans une situation très difficile. Les Canadiens ne peuvent plus partager de nouvelles avec leurs amis, les membres de leur famille et de leur communauté. Cette décision intempestive a été prise dans un accès de colère par une entreprise qui n'a jamais raté une occasion de s'opposer à toute volonté d'un gouvernement démocratiquement élu dans le monde d'exercer une gouvernance.
Selon une enquête sur les nouvelles numériques menée cette année par l'agence Reuters, 27 % des Canadiens partagent des nouvelles par l'intermédiaire des médias sociaux et des applications de messagerie. Maintenant que les nouvelles ont disparu des fils d'actualité des Canadiens, par quoi sont-elles remplacées? Quel contenu les utilisateurs consultent-ils maintenant que les médias d'information fiables ont été muselés?
La disparition des nouvelles laisse un vide…
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Je vais essayer de présenter la plus grande partie possible de mon allocution. Je vous demande encore un peu de patience. Je suis désolé.
Comme je le disais, la disparition des nouvelles a laissé un vide qui va forcément être comblé, et je suis ici pour vous parler du risque qu'il le soit par la désinformation et les discours haineux alimentés par les algorithmes de ces plateformes.
Les algorithmes malveillants contribuent à la propagation de la désinformation. Ils sont conçus pour attirer l'attention en priorité sur le contenu publicitaire et faire en sorte qu'il soit consulté par le plus grand nombre d'utilisateurs possible et le plus longtemps possible.
Mon organisme mène des recherches sur l'intensification de la désinformation et des discours haineux sous l'effet des algorithmes des médias sociaux. Plutôt que de donner aux utilisateurs la liberté de choisir des contenus, les algorithmes recourent à des méthodes comme l'analyse prédictive pour mettre au premier plan les résultats que l'entreprise estime les plus rentables pour elle.
Je tiens à le répéter. Les algorithmes des plateformes ne vous donnent pas accès aux résultats que vous souhaitez. C'est un mythe. Ils vous donnent accès aux résultats auxquels vous devez vous intéresser selon ce qu'eux ont décidé.
Ces systèmes extrêmement personnalisés et invasifs sont responsables de la polarisation de la pensée économique, démocratique et sociale, et il existe une corrélation entre eux et la montée de l'extrémisme, des groupes et des réseaux radicaux et haineux.
Les algorithmes et les systèmes « de recommandation » sont au centre des modèles d'affaires des plateformes technologiques. Cette sensibilité commerciale explique en partie pourquoi les données techniques concernant ces algorithmes sont si difficiles à obtenir.
Nous avons malgré tout réussi à établir, dans le cadre de nos recherches, qu'il existe un lien étroit entre les algorithmes et la promotion de la désinformation et du contenu conspirationnistes et haineux. Ainsi, en août 2020, quand Instagram a ajouté des recommandations à son expérience utilisateur — en insérant du contenu non sollicité dans les flots de données pour que les utilisateurs prolongent le temps passé sur la plateforme —, le CCDH a voulu comprendre l'incidence de ce changement dans la conception sur la fréquence de la mésinformation et des discours haineux.
Dans le rapport sur les algorithmes que nous avons publié en 2021, nous donnons des preuves que ce choix conceptuel a contribué à la radicalisation de la mésinformation extrémiste transmise aux utilisateurs. Une fois que les utilisateurs avaient lu le contenu récent sur tous leurs comptes, du contenu complémentaire leur était proposé qui tenait compte de leur intérêt potentiel au vu de leurs données et de leurs habitudes. Par exemple, si un utilisateur avait consulté du contenu contenant de la désinformation au sujet de la COVID‑19, il se voyait offrir un accès à la désinformation publiée par QAnon et antisémite. Les utilisateurs qui avaient consulté le contenu antisémite se voyaient également offrir de la désinformation antivaccins et sur la COVID‑19 en général.
Les résultats de nos recherches illustrent la manière dont les algorithmes et les choix conceptuels des plateformes peuvent rapidement faire passer les utilisateurs d'un contenu conspirationniste à un autre, d'une question visant à obtenir de l'information sur l'efficacité d'un nouveau vaccin à du contenu conspirationniste sans lien comme celui de QAnon, les théories sur le truquage des élections et la haine antisémite.
Meta possède et contrôle l'algorithme Instagram, et elle en tire profit, et nous avons la preuve qu'il contribue à intensifier la désinformation et les théories du complot dangereuses. C'est un exemple seulement de la dynamique nocive induite par notre dépendance à un algorithme conçu pour maximiser les revenus.
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Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le Comité.
Je vais d'abord faire une observation préliminaire et je vous transmettrai ensuite quatre recommandations.
Tout d'abord, je suis renversé d'entendre des porte-parole de Meta et de Google dire que l'information n'a aucune valeur pour eux. J'aimerais rappeler qu'un chercheur français, M. Tristan Mattelart, a bien documenté les efforts de Facebook, à ses débuts, pour inviter les médias d'information à ouvrir leur page Facebook. Meta — Facebook, à l'époque — était à la recherche de contenu de qualité pour enrichir l'expérience de ses abonnés.
Le président-directeur général, ou PDG, de Meta, M. Mark Zuckerberg, a souvent déclaré que la mission de son entreprise consistait à construire des communautés. En 2017, il précisait qu'il y avait cinq critères pour y arriver et que l'un de ces critères était de construire des communautés informées.
De son côté, Google s'est rendu compte dès 2001 à quel point l'information pouvait avoir de la valeur. Au moment des attentats du 11 septembre, Google s'est rendu compte que les gens lançaient des recherches sur les mots « World Trade Center » et « attentat » et qu'ils ne trouvaient rien, parce que les robots d'indexation de Google ne balayaient les sites Web qu'une fois par mois. Les ingénieurs de l'entreprise se sont dit qu'ils allaient indexer les sites de nouvelles plus souvent afin de répondre aux besoins des utilisateurs. L'information a enrichi les résultats de recherche de Google et a enrichi l'entreprise pendant plus de 20 ans.
Je vais maintenant vous transmettre quatre recommandations à propos de la Loi sur les nouvelles en ligne, soit l'ancien projet de loi . On se rend compte maintenant que ce n'était peut-être pas la meilleure approche. Pour vous éviter d'être victimes de tactiques d'intimidation pratiquées par des plateformes en ligne, je vous invite, vous, les législateurs, à avoir confiance dans votre rôle de parlementaire.
Ma première recommandation s'appuie sur la Charte canadienne des droits et libertés. L'article 3 de la Charte garantit les droits démocratiques des Canadiens. Sur le site Web du ministère de la Justice, on peut lire: « Une mesure qui prive les électeurs des renseignements suffisants pour leur permettre de voter d'une manière éclairée peut porter atteinte au droit de vote garanti par l'article 3. »
Pour moi, le blocage des nouvelles par Meta, c'est une mesure comme celle-là. Le droit du public à l'information n'est pas expressément garanti par les chartes, mais je pense que tout le monde ici va s'entendre pour dire que c'est un droit fondamental. Étant donné que 45 % des Canadiens s'informent par le truchement des médias sociaux aujourd'hui, je pense que vous auriez un bon argument pour obliger les plateformes en ligne à fournir de l'information aux Canadiens ou, à tout le moins, leur interdire de retrancher de l'information d'intérêt public pour les Canadiens. Je pense que l'article 51 de la Loi sur les nouvelles en ligne va dans ce sens. Il faudrait simplement lui donner un caractère rétroactif.
Je passe à ma deuxième recommandation. Les géants du Web Google et Meta ont tous les deux dit qu'ils étaient prêts à verser de l'argent dans un fonds destiné à soutenir le journalisme au Canada. C'est une excellente nouvelle, sauf que c'est à vous, les législateurs, de définir ces montants. Cela pourrait équivaloir à un pourcentage du chiffre d'affaires canadien de ces plateformes en ligne, qui ont permis aux Canadiens d'accéder à de l'information pendant les 15 dernières années. Vous vous demandez peut-être comment on peut calculer ces sommes si on n'a pas d'information financière relativement aux activités de ces plateformes au Canada. Cela m'amène à la troisième recommandation.
Vous connaissez l'enquête que mène actuellement l'Australie sur les plateformes en ligne pour la période de 2020 à 2025. Hier, d'ailleurs, un septième rapport d'étape a été rendu public. À la lecture de ce rapport, on se rend compte que l'Australie oblige les multinationales qui sont cotées en bourse à lui fournir de l'information. Je ne parle pas juste de celles du Web, mais de toutes les multinationales qui ont une filiale en Australie. Elles sont obligées de fournir à l'Australie des états financiers détaillés sur leur filiale. Pourquoi ne pas faire la même chose au Canada? Donnons-nous — donnez-vous — les moyens d'avoir cette information.
Ma dernière recommandation vise à ce que nous nous donnions, collectivement, plus de moyens. Dans le but de protéger les citoyens, les gouvernements se sont donné le droit d'aller voir comment certaines entreprises manipulent les aliments, par exemple. On se donne le droit d'aller inspecter les aéronefs et de fouiller les bagages des voyageurs. Il y a plein de bonnes raisons pour faire ce genre d'activité.
Les plateformes en ligne, en dépit de tous les bienfaits qu'elles nous procurent, peuvent également avoir des effets néfastes. Puisqu'elles ont fait la démonstration, au cours des 12 dernières années, de leur incapacité à atténuer elles-mêmes ces effets néfastes, j'estime que le temps est venu pour le Canada de se donner le droit d'aller voir l'information que ces entreprises possèdent au sujet des citoyens canadiens. Je ne parle pas seulement de Meta et de Google, mais aussi d'Uber, de Netflix, de Spotify et d'OpenAI.
À mon avis, le Canada, devrait se donner le droit d'accéder aux bases de données de ces entreprises et d'en examiner les algorithmes, dans le respect de la vie privée des utilisateurs, évidemment. Je sais que, les algorithmes, c'est comme le secret de la Caramilk. À mon sens, le bien-être des Canadiens est supérieur aux intérêts commerciaux de ces entreprises.
Ce droit devrait également être assorti d'obligations pour ces plateformes de fournir, toujours dans le respect de la vie privée des utilisateurs, des interfaces de programmation d'applications, ou API, pour permettre aux chercheurs et aux chercheuses, comme moi, M. Geist et d'autres au Canada, d'étudier, de connaître, de savoir ce qui se passe sur ces plateformes, qui ont une place de plus en plus importante dans la vie des Canadiens.
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Bonjour. Monsieur le président, merci de m'accueillir devant le Comité.
Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner au nom de Digital Content Next. Nous sommes le seul groupe commercial qui se consacre exclusivement à l'avenir des entreprises de contenu numérique de qualité qui gèrent des relations fiables et directes avec les consommateurs et les annonceurs.
Parmi nos membres se trouvent plus de 60 entreprises de médias et des milliers de marques, y compris des organes d'information régionaux, nationaux et internationaux comme The New York Times, The Washington Post, la BBC, The Wall Street Journal, The Guardian, The Philadelphia Inquirer et le Financial Times.
Mon dernier passage devant le Comité remonte à 2022, soit avant l'adoption de la , que Digital Content Next a soutenue avec enthousiasme. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir fait preuve d'autant de diligence pour l'examen du déséquilibre dans le pouvoir de négocier avec Google et Facebook.
En guise de contexte, je précise que je travaille depuis près de 30 ans dans le domaine des médias numériques. J'ai consacré les 20 premières années à l'exploitation d'entreprises médiatiques et, durant cette période, j'ai négocié des accords commerciaux majeurs avec de grandes entreprises technologiques.
Peu à peu, les poursuites antitrust intentées contre Google et Facebook à l'échelle mondiale permettent de mettre au jour des éléments de preuve qui confirment ce dont nous avons été témoins jusqu'ici quand ces sociétés sentent qu'une initiative législative ou réglementaire menace leur chiffre d'affaires.
Aujourd'hui, je vais commencer par exposer dans les grandes lignes le genre de tactiques d'intimidation dont ces entreprises sont capables.
La première tactique consiste à proférer des menaces concernant la législation. Comme vous le savez, l'Australie nous a donné des repères pour mener cette enquête, établir une législation et contrer les tactiques d'intimidation contre le projet de loi .
Une bonne partie du public a entendu parler du nouveau projet de loi de l'Australie quand Facebook a bloqué le partage de nouvelles par les utilisateurs pendant cinq jours, en mars 2021. C'était en plein dans la période où les vaccins commençaient à être distribués. Ce qui est moins connu, c'est que Facebook avait envisagé de bloquer les nouvelles durant la semaine décisive des délibérations au Parlement. Un courageux lanceur d'alerte a divulgué des documents internes du Wall Street Journal qui indiquaient qu'il y avait eu un accès à l'échelon de la haute direction de la société avant que cette personne fasse marche arrière par crainte d'être identifiée et de subir des représailles. On peut penser que les législateurs en auraient appris beaucoup plus si le lanceur d'alerte n'avait pas été dissuadé de témoigner.
La deuxième tactique est celle des menaces liées aux investissements. Le public est peut-être au courant des hausses importantes des investissements de Facebook au Royaume-Uni ces dernières années. Des dirigeants avaient même été mutés à Londres avant la fermeture du bureau d'Instagram plus tôt cette année. Ce qui est moins connu est ressorti d'une demande soumise au titre de la transparence des dossiers, à l'issue de laquelle nous avons appris que Mark Zuckerberg avait menacé d'annuler un investissement au Royaume-Uni après avoir reçu une demande du Parlement de témoigner sur des questions auxquelles il n'a jamais répondu. Encore aujourd'hui, il refuse d'y répondre, même devant le Parlement canadien, qui l'a même assigné à témoigner.
Dans le même ordre d'idées, la presse mondiale a parlé du fait que la société avait accepté un règlement de 5 milliards de dollars avec le gouvernement américain. Ce qui est moins connu, c'est que cet accord a donné lieu à une poursuite par un actionnaire qui allègue que Zuckerberg a commis un délit d'initié et que la société a versé une somme excessive au gouvernement américain pour protéger son président-directeur général.
La troisième tactique consiste à menacer les éditeurs et les salles de nouvelles. Nous avons vu de nombreuses manchettes depuis quelques années concernant le financement de projets de nouvelles et de programmes scolaires par les deux sociétés. En coulisses, ces sociétés ont réussi à tabler sur leurs relations commerciales pour bloquer les nouvelles contenant de l'information sensible les concernant. C'est clair que ceux qui sont traités comme des partenaires et à qui on offre de participer à des programmes très rentables ou un accès privilégié à de nouveaux produits sont beaucoup plus réticents à critiquer publiquement ces sociétés.
Google et Facebook ont aussi menacé de cesser toute activité liée aux nouvelles. Par exemple, le responsable du secteur des nouvelles de Facebook aurait indiqué aux éditeurs australiens qu'ils pourraient faire une croix sur leur avenir s'ils refusaient de collaborer avec la société.
En 2018, The Guardian et The New York Times ont publié des reportages sur Cambridge Analytica, le plus gros scandale ayant frappé Facebook à ce jour. Là encore, il est moins connu que Facebook a menacé de poursuivre The Guardian la veille du reportage. La propre responsable des nouvelles de Facebook — je vous rapporte ses propos parce que j'étais assis à côté d'elle à l'occasion d'une table ronde — a affirmé que ce n'était probablement pas leur meilleur coup.
La quatrième tactique a trait aux dépenses faramineuses en lobbying, notamment en recourant à des intermédiaires. Google et Facebook figurent parmi les 10 premières entreprises pour ce qui concerne l'enregistrement de lobbyistes dans l'Union européenne et aux États-Unis. Outre les employés qui travaillent directement pour elles et les contributions électorales, une longue liste de groupes relayent les arguments des deux sociétés en échange de montants de financement considérables.
La cinquième tactique est l'intimidation des consommateurs par les sociétés. L'objectif est d'attiser leur indignation, y compris en utilisant les grandes portes d'accès que sont YouTube et les applications de recherche et de messagerie. Cela se fait entre autres en publiant à répétition des allégations comme quoi la réglementation va brimer l'innovation ou mettre fin à un Internet libre et ouvert, même si jusqu'ici Internet a survécu à toutes les nouvelles mesures concernant la protection de la vie privée, que ce soit la directive sur le droit d'auteur de l'Union européenne ou le code de négociation des médias d'information en Australie.
Facebook va souvent plus loin en laissant planer la menace des frais de service ou de la disparition de milliers de petites entreprises et de millions d'emplois. Je vous rappelle que c'est une société qui engrange des dizaines de milliards de dollars de profits annuellement, tirés en très grande partie des marges faramineuses de la publicité.
Vous êtes aux premières loges pour savoir que ces sociétés usent de diverses tactiques coordonnées pour ralentir ou stopper l'adoption de toute mesure réglementaire susceptible de compromettre leur rentabilité. Par chance, leur stratégie est de mieux en mieux connue et les décideurs du monde entier passent aux actes.
Je suis très heureux de prendre la parole devant vous et je suis impatient de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour. Je m'appelle Michael Geist. Je suis professeur de droit à l'Université d'Ottawa, où je suis titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique. Toutefois, je témoigne aujourd'hui à titre personnel et les points de vue exprimés n'engageront que moi.
J'ai comparu à maintes reprises devant le Comité, mais il m'apparaît nécessaire d'ajouter à mon introduction habituelle que je n'ai jamais reçu de compensation ou d'avantage de quelque nature d'une entreprise technologique pour aucun de mes témoignages ou des mémoires et énoncés que j'ai soumis concernant une question législative ou réglementaire. Je ne devrais pas avoir à faire cette mise au point, mais compte tenu de la propension de certains observateurs à considérer les détracteurs des projets de loi et comme des larbins, je dois insister sur le fait que mes idées ne sont pas à vendre.
Je dois préciser également qu'il ne faut pas assimiler mes critiques des projets de loi et à un refus de toute réglementation dans le secteur des technologies. Les préjudices sont réels et une réglementation est nécessaire. J'ai récemment comparu devant le comité de l'industrie, et j'ai réclamé le renforcement du projet de loi sur la protection de la vie privée et de la réglementation de l'intelligence artificielle. Je dois admettre que j'ai consacré une bonne partie de mon temps, après les événements du 7 octobre, à la montée inquiétante de l'antisémitisme et au besoin urgent d'intervenir en ligne et hors ligne, y compris en adoptant le projet de loi sur les préjudices en ligne, qui se fait attendre depuis beaucoup trop longtemps.
Comme votre étude porte sur les efforts des entreprises technologiques pour influencer les politiques, je vais me concentrer sur ce sujet.
Des études et des rapports marquants ont fait état des efforts des entreprises technologiques pour influencer les politiques. Notamment, Tech Transparency Project a produit un rapport sur les recherches soutenues par Google. Le rapport cite de nombreux articles et travaux d'universitaires qui ont des liens avec la société ou qui ont reçu une aide financière de celle‑ci. Toutefois, les enquêtes n'ont relevé pratiquement aucun exemple canadien. En fait, selon une recherche sur les articles et les rapports recensés depuis le début du projet d'enquête auprès de multiples entreprises technologiques, ces pratiques semblent très marginales au Canada.
Pour ce qui concerne les efforts de lobbying — dont nous venons d'entendre parler —pour influencer le projet de loi et le projet de loi , un organisme en particulier mène le bal, et ce n'est pas Meta. La société a eu très peu de rencontres liées à ces projets de loi, et certainement beaucoup moins que l'Association canadienne des radiodiffuseurs, que l'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists, que la Coalition pour la diversité des expressions culturelles ou que l'Association canadienne des éditeurs de musique. Google arrive au deuxième rang pour le nombre de rencontres avec des lobbyistes enregistrés. C'est Médias d'Info Canada qui occupe le premier rang.
Je trouve important de préciser, si vraiment nous parlons aujourd'hui des sanctions à imposer pour le blocage des liens aux nouvelles en réaction au projet de loi , que nous faisons fausse route. Les entreprises et de nombreux experts ont pointé à répétition les graves lacunes de cette mesure législative. Les liens aux nouvelles sont bloqués depuis des mois sur Facebook et Instagram, mais cette entreprise ne semble aucunement intéressée par une réforme réglementaire. Que nous faut‑il de plus pour admettre que c'est une conséquence de la législation et non une tactique pour l'influencer? Ce n'était pas du bluff, comme beaucoup se sont plu à le répéter. Je dirais au contraire que depuis le début, les deux entreprises n'ont pas vraiment dérogé à leurs prises de position sur cette législation.
Sous maints aspects — nous venons d'entendre parler des menaces de supprimer ou de cesser des investissements —, des manœuvres très semblables pourraient être reprochées à Bell quand elle menace de renoncer à un investissement en immobilisations de 1 milliard de dollars par suite d'une décision du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC, au sujet des tarifs de gros des services Internet. La même chose pourrait être dite de Stellantis, qui a mis ses investissements au Canada en veilleuse au début de l'année après l'annonce de l'accord avec Volkswagen. Les lois et les règlements ont des conséquences, c'est aussi simple que cela.
Si l'objectif est réellement de s'attaquer aux préoccupations suscitées par l'influence sur la réglementation et la législation, ce ne sont pas les tactiques qu'il faut mettre en cause. Ce qui est réellement en cause, c'est la capture réglementaire, un aspect qui doit vraiment nous préoccuper au Canada. Le projet de loi a donné lieu à de multiples exemples d'efforts de capture réglementaire menés par un petit nombre de groupes culturels bien établis qui ont monopolisé les réunions avec les fonctionnaires et le temps de ce comité. Les créateurs canadiens de contenu numérique ont souvent été muselés ou tenus à l'écart, y compris des créateurs autochtones et des communautés noires et de couleur. Certains ont même décrié le manque de respect, voire les manœuvres d'intimidation du ministère ou des fonctionnaires à leur égard.
Le problème s'est accentué avec la présentation du projet de loi . Des membres du Comité se sont dits prêts à entamer l'étude article par article avant même d'avoir entendu la version de Meta. Durant cette étude, quelqu'un a même affirmé que les organismes de nouvelles en ligne ne produisent pas de vraies nouvelles. Cette forme de capture réglementaire a été particulièrement nuisible. Les médias d'information en ligne ont sonné l'alarme à propos des risques liés au projet de loi, et ce sont eux qui ont le plus souffert du blocage des liens aux nouvelles. Ils ont aussi été ignorés. Certains ne font plus d'embauches ou ont dû suspendre leurs activités, alors que Médias d'Info Canada a réussi, sur une période de 5 ans, à soutirer une aide financière de 600 millions de dollars, l'adoption rapide du projet de loi et, depuis peu, l'élargissement du crédit d'impôt pour la main-d'œuvre journalistique et la satisfaction complète de ses demandes financières. C'est ce que j'appelle de l'influence.
Les politiques culturelles sont au centre des travaux de ce comité, mais la culture n'est pas statique. Il est primordial que le Comité et le ministère fassent obstacle à la capture réglementaire et qu'ils donnent voix au chapitre à tous les intervenants. Autrement, les politiques qui ressortiront de cet exercice seront forcément bancales et le risque d'intimidation sera encore plus grand, y compris de la part du gouvernement ou du Comité, de façon volontaire ou non.
Merci de votre attention. Je suis impatient de répondre à vos questions.
Ma première question s'adresse à M. Geist. Vous n'êtes pas sans savoir qu'une plainte a été déposée au Bureau de la concurrence par Médias d'Info Canada, l'Association canadienne des radiodiffuseurs et la CBC. La plainte porte sur le projet de loi et la décision de Meta de ne plus publier de liens vers des nouvelles. Bien avant son adoption, Meta avait annoncé sans équivoque que c'est l'avenue qu'elle prendrait en réaction au projet de loi.
Maintenant, les médias — ou les organisations syndicales — que je viens de nommer se plaignent de ce qui suit:
En refusant de négocier de bonne foi avec les organismes de nouvelles canadiens concernant l'accès au contenu de nouvelles canadien sur les plateformes de Meta, et en bloquant ce contenu de nouvelles sur les plateformes, Meta prive ces organismes d'une rémunération juste pour leur contenu. Leurs ressources s'en trouvent limitées et il devient difficile pour eux de soutenir efficacement la concurrence dans le marché de l'information.
Si je me concentre sur la dernière phrase, selon laquelle les ressources limitées des organismes canadiens ne leur permettent pas de soutenir la concurrence dans le marché de l'information, j'en déduis que Meta était un véhicule ou une plateforme pour le partage de ces sources d'information. Ce véhicule n'existe plus et ces médias d'information affirment que cela leur fait du tort.
Pourtant, la prémisse principale du projet de loi était justement qu'étant donné que les médias d'information créent la valeur, Meta doit les rémunérer en conséquence. Or, ils semblent reconnaître maintenant que le véritable avantage découlait du véhicule fourni par Meta.
Pouvez-vous nous en donner votre point de vue ou des précisions à ce sujet?
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Volontiers. Comme beaucoup l'ont fait remarquer, la réalité est que les éditeurs tiraient énormément d'avantages des médias sociaux et des recherches, et qu'ils ont été pendant très longtemps la base de tout cela.
Ce que nous observons depuis l'adoption de la législation en juin n'a fait que le confirmer. Ce serait une erreur de sous-estimer cette réalité. Les préjudices causés sont réels: des organes de presse ont subi une diminution d'achalandage qui peut aller jusqu'à 30 %. Des médias d'information ont tout simplement mis fin à leurs services ou ils ont suspendu leurs activités.
Il faut également souligner les préjudices liés aux investissements au Canada. Des organismes m'ont affirmé que la conjoncture et la structure de la législation ne sont absolument pas favorables aux investissements dans l'information au Canada.
Les préjudices sont réels et ils découlent d'un a priori assez étrange voulant que l'achalandage généré gratuitement sur les sites des éditeurs — dont la valeur nous saute aux yeux actuellement — mérite une rémunération. Il faut l'avouer, l'objectif était d'exiger des paiements pour des liens, et c'est pourquoi j'ai toujours été profondément en désaccord avec les fondements de la législation, et je sais que nous sommes nombreux dans ce cas.
J'aimerais revenir à une autre de vos déclarations, qui a un lien avec ce qui précède.
Nous savons que pour les grands diffuseurs, soit Rogers, Bell et la CBC, le projet de loi pourrait être très avantageux. En revanche, les plateformes émergentes en ligne, qui selon Mme Hepfner ne sont pas de véritables médias d'information — je ne partage pas ce point de vue parce que selon moi elles sont tout à fait légitimes —, seront très désavantagées par cette législation. Vous avez affirmé dans votre déclaration liminaire que beaucoup d'entre elles ne font plus d'embauches parce qu'elles risquent d'avoir à cesser leurs activités à cause de cette législation.
Selon votre estimation… Ce n'est pas juste de vous demander pourquoi, je suis désolée. Je ne peux pas vous demander de faire des spéculations, mais je m'interroge. Pouvez-vous nous en dire un peu plus? Le projet de loi devait avantager les petits joueurs selon le qui était en poste au moment de sa présentation. Il était censé soutenir les journaux locaux, les médias ethniques, les entreprises médiatiques locales, dont plusieurs sont présents en ligne.
Comment sommes-nous arrivés à proposer une mesure qui profite maintenant aux grands diffuseurs?
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Ma réponse comportera plusieurs volets.
Tout d'abord, les grands diffuseurs sont ceux qui sont les plus avantagés. Le directeur parlementaire du budget a indiqué que 75 % des fonds iront aux radiodiffuseurs et aux télédiffuseurs, en raison essentiellement de la structure. Elle ne tient pas compte du cadre actuel des organisations journalistiques canadiennes admissibles qui régit le crédit d'impôt pour la main-d'œuvre journalistique, et fait en sorte que les diffuseurs, et surtout une poignée de gros joueurs, seront les grands gagnants au Canada.
Personnellement, je crois que c'est une erreur. Si l'intention était vraiment de soutenir ce qui constitue le noyau, soit les journaux et les éditeurs de contenu numérique, c'est sur eux que la législation aurait dû se concentrer.
Par ailleurs, je pense qu'il existe une réponse à votre question concernant le pourquoi. Une partie de la réponse vient de ce que beaucoup d'organismes d'information en ligne n'ont pas eu voix au chapitre. Trop souvent, on ne leur a pas donné la possibilité de donner leur point de vue, et les rares fois où ils ont eu cette possibilité, que ce soit devant ce comité ou même devant le Sénat, on leur a manqué de respect.
Je peux citer en exemple le traitement reçu par Village Media, un des principaux organes indépendants, dont les activités touchent plusieurs communautés ontariennes, quand il a comparu devant le Sénat. Le président et chef de la direction, Jeff Elgie, s'est fait demander par le sénateur Harder s'il était content que d'autres journaux cessent leurs activités parce que son entreprise pouvait récupérer une partie de leurs employés et faire sa place dans les marchés d'information désertés.
L'idée qu'un organisme d'information en ligne puisse célébrer ou se réjouir parce que des difficultés s'annoncent témoigne d'une très mauvaise lecture de la réalité. Ce que nous entendons depuis quelques mois de la part de beaucoup de ces organismes, de Village Media à Narcity, ce sont leurs cris de désespoir devant les immenses préjudices subis. Le minimum, selon eux, serait de trouver un terrain d'entente avec Google. Autrement, les conséquences seront désastreuses. Il reste à espérer que tout le monde réussira à trouver une solution de compromis.
Les préjudices sont réels, et non seulement ils étaient prévisibles, mais ils ont été prédits.
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Merci, monsieur le président.
Je vais commencer avec M. Ahmed, qui nous joint en ligne.
J'ai trouvé votre déclaration liminaire fort intéressante. Vous avez dit entre autres que les plateformes comme Facebook ne veulent pas assumer la responsabilité éditoriale, mais qu'elles ont donné la preuve qu'elles peuvent l'exercer en bloquant l'accès à du contenu de nouvelles. À votre avis, c'est une responsabilité que seule une menace pour leurs finances peut les pousser à assumer cette responsabilité. Vous avez aussi dit qu'elles sont des accès de colère.
Tout ce que nous avons obtenu en retour, c'est une montée de la haine et de l'extrémisme en ligne.
Monsieur, que pensez-vous des arguments que nous avons entendus aujourd'hui comme quoi leurs actions découlent de toute évidence d'une décision d'affaires, qu'elles avaient annoncé leurs intentions et que nous ne pouvions pas nous attendre à autre chose?
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Ces arguments reflètent ce qu'on qualifie de doux sectarisme des faibles attentes que nous avons appris à avoir à l'égard de ces sociétés.
De manière assez paradoxale, c'est mon organisme qui a révélé que Meta a accepté de publier des annonces contenant de la désinformation qui étaient payées par des médias d'État de pays totalitaires. En 2022, nous avons publié un rapport sur un média d'État chinois qui a acheté de l'espace publicitaire sur Facebook pour diffuser de la désinformation au sujet du conflit en Ukraine. En même temps que Meta pénalise les éditeurs de nouvelles canadiens en bloquant leurs activités sur la plateforme, elle tire profit du contenu de désinformation payé par des médias contrôlés par l'État ailleurs dans le monde.
La vérité, c'est que nous nous sommes habitués à voir les plateformes, et Meta tout particulièrement, agir de la manière la plus ignoble qui soit. Ces règlements sont non seulement… Je crois que le projet de loi est valable, mais une des mesures que nous avons pressé les ministres canadiens de prendre quand nous les avons rencontrés, et que nous réitérons aujourd'hui, c'est de mettre en place un cadre plus complet pour régir ces plateformes.
Si elles trouvent un moyen d'échapper à leurs responsabilités et de riposter aux mesures que vous proposez, elles n'hésiteront pas. C'est pourquoi il faut un cadre plus complet, conçu pour assurer la sécurité, la transparence des algorithmes, la reddition de comptes et la responsabilité — ce que le CCDH appelle le cadre STAR —, qui tient compte des considérations économiques et qui intègre une politique d'application axée sur les contenus. Ce cadre exige une reddition de comptes véritable et valable à l'égard d'instances démocratiques comme la vôtre, de même que la responsabilité partagée pour les préjudices causés. Les effets externes des actions de ces sociétés ont un coût intenable pour nos sociétés, qu'il s'agisse de la destruction des entreprises d'information ou de la souffrance des jeunes filles et des jeunes enfants qui ont accès à du contenu lié à l'automutilation ou aux troubles de l'alimentation.
Tout cela pour dire que ce qu'il faut comprendre, c'est que ces sociétés vont s'en sortir par tous les moyens possibles. Elles sont prêtes à toutes les bassesses, et c'est pourquoi nous avons besoin d'une législation plus complète, ou d'un cadre, comme l'intervenant précédent l'a évoqué.
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Merci de cette question.
Les poursuites antitrust et liées à l'utilisation abusive des données sont parmi les plus intéressantes. Par conséquent, et c'est d'ailleurs un des thèmes de l'étude menée en Australie, nous savons que leur emprise sur le marché et le déséquilibre dans le pouvoir de négociation découlent, dans le cas de Google et de Facebook en particulier, de leur accès à toutes les données, de la distribution et du fait qu'elles sont les portes d'entrée.
Dès qu'il y a une nouvelle législation, des poursuites sont intentées qui font intervenir ce genre d'interactions des forces du marché.
L'étude porte sur les préjudices causés par le blocage de l'achalandage sur Facebook. C'est un fait que cet achalandage a une valeur pour les éditeurs, mais ces sociétés peuvent se permettre d'agir ainsi, de bloquer entièrement l'accès avec les préjudices immenses qui s'ensuivent, à cause de leur emprise sur le marché. C'est de cela qu'il faut parler: le déséquilibre dans le pouvoir de négociation.
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Oui, sans l'ombre d'un doute. Si un type de contenu est vu plus souvent, l'illusion de fréquence nous porte à croire que c'est plus susceptible d'être vrai. Notre psychologie est ainsi constituée. Les plateformes gavent les utilisateurs de désinformation par l'intermédiaire de leur fil de nouvelles, qui est une action de publier.
Il existe un mythe selon lequel le contenu qui nous est proposé est vu par un milliard de personnes. Bien entendu, c'est faux. Le programme est conçu expressément pour nous. Le discours n'est pas le même pour tous. Il est contrôlé par des algorithmes, qui sont conçus pour avoir un impact commercial. C'est quelque chose qui revient sans cesse dans le témoignage des personnes qui ont été accusées d'infractions criminelles liées à l'insurrection du 6 janvier au Capitole, qui soit dit en passant se trouve à quatre pâtés de ma résidence, où je suis en ce moment. C'est aussi ce que me racontent mes amis et mes collègues du domaine médical, qui ont vu leurs patients à bout de souffle dans les salles de soins intensifs réclamer désespérément un vaccin qu'ils avaient cru nocif et qui arriverait malheureusement trop tard pour eux. Beaucoup de ces personnes sont décédées. Nous parlons d'êtres humains qui ont vécu des situations tragiques et qui ont laissé des familles démunies à cause de la désinformation dont on les a gavés, littéralement, par l'intermédiaire d'actions de publication délibérées.
Je pourrais parler aussi des victimes d'attaques terroristes. Dernièrement, j'ai présenté une allocution à Pittsburgh, à la synagogue Tree of Life. Là encore, nous avons un exemple de gens qui ont été gavés de théories du complot et qui en viennent à croire qu'elles sont acceptables et normales, ou qui considèrent qu'il est acceptable de tuer un autre être humain au nom du dieu qu'ils vénèrent ou de ceux qu'ils choisissent d'aimer.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence aujourd'hui. Je commencerai par M. Geist.
Monsieur Geist, vous avez peut-être pris connaissance de certaines des interventions que j'ai faites ici au sujet du projet de loi , où je commençais par souligner au d'alors ce qui était survenu en Australie quand Meta a bloqué le contenu de nouvelles. Je lui demandais quelles mesures il comptait prendre pour éviter que cela se produise au Canada. Il m'avait répondu qu'il s'agissait d'une simple décision d'affaires.
Quand les représentants de Meta et Google se sont présentés ici, je leur ai demandé si, advenant que le projet de loi soit adopté dans sa forme actuelle et que le gouvernement les oblige à payer pour que les gens partagent des liens d'actualités, ce serait pour eux une décision d'affaires raisonnable de ne pas le faire parce qu'ils devraient payer. Les deux représentants ont répondu par l'affirmative, et c'est pourquoi je n'ai pas été surprise par ce résultat, même si les libéraux et les néo-démocrates ont, eux, semblé choqués et surpris. Il semble que cela ait des effets très négatifs sur les petites entreprises locales, alors que le but premier du projet de loi C‑18 était d'essayer de protéger les petits organes de presse locaux.
Avez-vous été surpris? D'après vous, quels ont été les impacts?
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Je vous remercie de votre question.
Non, je n'ai pas été surpris. J'ai comparu à quelques reprises devant ce comité au sujet du projet de loi , et je pensais qu'en comprenant le modèle d'affaires en place...
Nous avons entendu beaucoup de choses sur les aspects négatifs du modèle d'affaires, et c'est pourquoi je pense que la réglementation a un rôle à jouer pour contrer certains des préjudices qui ont été évoqués, mais là n'était pas la visée du projet de loi . Si vous comprenez le modèle d'affaires, qui, comme on nous l'a dit, consiste à inciter les gens à demeurer sur la plateforme, à saisir l'information et à leur envoyer des publicités, l'idée selon laquelle le contenu de nouvelles est absolument indispensable aux géants technologiques n'a jamais eu beaucoup de sens. En réalité, c'est ce type de contenu qui éloigne les gens, qui les fait quitter le site. Considérant ce qui s'est passé, il me semblait que cette issue était à prévoir.
Je dois aussi ajouter que, parfois, on ne semblait pas avoir pleinement réfléchi à certaines des conséquences. En tout respect, c'est votre comité qui a établi une exception propre aux stations de campus pour les inclure dans la loi, et nous venons d'apprendre aujourd'hui que les stations de campus ne sont pas incluses. Votre comité a littéralement inclus les stations de campus dans un de ses amendements pour les rendre admissibles.
C'est également votre comité qui a adopté un projet de loi indiquant que le fait de faciliter l'accès à tout contenu de nouvelles, que ce soit au Canada ou ailleurs, vous inclut dans la catégorie des intermédiaires de nouvelles numériques. Vous auriez pu choisir de dire que cela s'appliquait uniquement aux nouvelles provenant d'une organisation journalistique canadienne qualifiée, ou provenant d'une entreprise admissible aux paiements, ce qui aurait eu pour effet d'exclure certaines de ces autres entités et un grand nombre d'entités étrangères, mais ce n'est pas le choix que vous avez fait.
À mes yeux, ces choix ont été faits dans la loi et leurs résultats étaient assez prévisibles.
En ce qui concerne les observations sur les chiffres réels, on a clairement assisté à une forte hausse du contenu haineux en ligne, une hausse qui se répercute hors ligne. Quand j'ai lancé le Center for Countering Digital Hate en 2016, il était quelque peu controversé d'avancer que ce qui se passait en ligne avait des répercussions hors ligne. On me traitait constamment de cinglé pour avoir dit cela. Aujourd'hui, personne ne le conteste.
Ce qu'on voit, cependant, c'est une normalisation accrue, où les idéologies marginales se répandent par l'action algorithmique des entreprises qui s'efforcent de diffuser le contenu le plus racoleur, le plus controversé et le plus croustillant possible, et ce le plus souvent possible. C'est la normalisation des concepts marginaux.
Deuxièmement, on assiste à un accroissement du volume de contenu haineux, qui exerce vraiment un impact sur les communautés autochtones, noires et de couleur et LGBTQ+. J'ai la peau brune, et je ne sortirais pas dans ma rue à Washington si les gens me hurlaient des injures chaque fois que je mets le pied dehors. Je resterais chez moi. C'est la même chose avec les plateformes des médias sociaux. Qui peut bien vouloir aller sur une plateforme qui regorge… On l'a vu quand Elon Musk a pris les commandes de X, le volume de discours haineux anti-Noirs a grimpé de 202 %. Pourquoi les gens voudraient-ils publier sur cette plateforme, qui fourmille d'individus utilisant les termes les plus offensants possible? Voilà pour cet aspect.
Aussi, on observe une hybridation des mouvements. À cause de cette activité de barattage que j'ai décrite dans « Malgorithm » au sujet d'Instagram, où les théories du complot s'interfertilisent, nous assistons à l'apparition de nouvelles théories du complot qui émergent tout d'abord en ligne. Je dirais que la « grande remise à zéro » est un très bon exemple d'une telle théorie conspirationniste hybridisée, où la convergence entre mouvements conspirationnistes et mouvements haineux conduit à de nouvelles idéologies hybrides. En fait, ce phénomène progresse à une vitesse vertigineuse, et crée un environnement de menace d'autant plus vociférant et compliqué. Je suis convaincu que vos responsables de la sécurité nationale vous disent la même chose.
La cause réside dans les algorithmes des entreprises, mais aussi dans l'incapacité de ces dernières à appliquer leurs propres politiques, à respecter les normes communautaires que nous, en tant qu'utilisateurs, avons la responsabilité d'observer et, corollairement, dont nous avons le droit de s'attendre à ce qu'elles soient respectées par les autres usagers et à ce que quelqu'un les fasse respecter. Dans l'ensemble, c'est un fouillis.
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Est‑ce qu'elles peuvent s'autoréglementer? Oui. Est‑ce qu'elles le font? Non.
Aujourd'hui, l'indulgence des individus qui étaient autrefois de jeunes cadres cools de San Francisco, aux idées apparemment libérales — bien sûr, ils essaieront de bien faire... Je pense qu'ils ne peuvent plus prétendre au bénéfice du doute... Il est temps de passer à une réglementation complète, comme l'a fait l'Union européenne avec la législation sur les services numériques et comme l'a fait le Royaume-Uni, mon pays d'origine, avec la Loi sur la sécurité en ligne, qui a finalement reçu la sanction royale il y a quelques semaines.
À mon avis, il est grand temps que le Canada emboîte le pas au reste de la planète en adoptant une loi qui fera en sorte que les externalités négatives de ces entreprises, de même que leur incapacité à penser à la sécurité dès la conception, leur conception négligente des produits, débouchent vraiment sur des mesures de dissuasion économique d'où émergera une culture où ces entreprises commenceront à réfléchir à l'impact qu'elles exercent sur notre écosystème informationnel et, par conséquent, sur notre monde.
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Nous n'avons peut-être pas beaucoup de temps, mais je vous remercie de votre question.
Je pense que le moment idéal pour mener le type d'études dont vous parlez — pour mieux comprendre le secteur numérique — est, à bien des égards, avant de légiférer.
Honnêtement, même le titre de cette audience semble en présupposer le résultat. Comme chercheur, je commence généralement par poser la question, après quoi je mène la recherche, et ensuite j'arrive à la conclusion. Le titre de cette étude semble déjà en prévoir la conclusion, tout ce qu'il reste à faire est de remplir les blancs.
Pour répondre à votre question, c'est la même chose. Légiférer et ensuite étudier? Je pense qu'il aurait fallu procéder à l'inverse.
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Cela me préoccupe vivement.
Au sujet de la subvention de 1 milliard de dollars, je crois que vous parlez de l'article 19 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Effectivement, cela n'a aucun sens.
Vous dites que ce qui se passe en ligne a un effet dans la vie réelle. Effectivement, c'est ce que je crains. J'ai aussi de vives inquiétudes concernant le blocage des nouvelles. Il y a beaucoup de gens, surtout nos plus jeunes concitoyens et concitoyennes, dont la vie se déroule par le truchement de leur téléphone cellulaire. Leur vie se déroule essentiellement en ligne, sur les réseaux sociaux, et on exclut l'information de ce qu'ils voient sur les réseaux sociaux. Si cela continue, j'ai l'impression que les gens vont penser que l'information n'existe pas, que l'information journalistique vérifiée n'existe pas. Il n'y aura que des influenceurs.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence. C'est un bon exemple de liberté d'expression et de liberté d'opinion. Je les remercie tous.
Monsieur Geist, pour commencer, quand on parle de verser plus d'argent à Meta, on sait fort bien qu'une fois publiée la mise à jour financière, les libéraux ont immédiatement commencé à dépenser beaucoup d'argent. Une trentaine de publicités ont immédiatement été diffusées sur les géants du Web. Le NPD a récemment dépensé 2,5 millions de dollars, et son chef 400 000 $. Nous utilisons tous ce service particulier. Il y a dans ma circonscription de nombreux hebdomadaires, qui disent que les 30 % de revenus en publicité fédérale qu'ils ont perdus ont abouti dans les poches des grandes entreprises technologiques.
Quel est le rôle du gouvernement dans le secteur de l'information? Est‑ce que c'est faire de la publicité? Quel est le rôle du gouvernement fédéral dans le secteur des nouvelles au Canada?
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Je surveille une partie de l'activité publicitaire. On voit que le Parti conservateur et le Parti libéral diffusent des publicités. Je ne crois pas avoir vu de publicité du NPD.
Cette notion de subventions est souvent évoquée. La publicité gouvernementale n'est pas une subvention. La publicité gouvernementale a pour but d'informer la communauté, que ce soit sur la COVID, sur d'autres questions ou sur les possibilités pour la population de se prévaloir de différents programmes, comme l'obtention d'un passeport ou quoi que ce soit d'autre. Il ne s'agit pas de subventions.
Il me semble que ce que vous devez faire, c'est permettre de rejoindre les gens là où ils se trouvent. S'ils sont sur une de ces plateformes, c'est là que vous ferez de la publicité. Vous pouvez décider de ne pas le faire, comme on l'a vu à la suite du blocage des liens de nouvelles par Facebook. Malgré cela, je ne considère pas qu'il s'agit d'une subvention.
Pour être honnête, cette notion de déduire la publicité à titre de subvention me semble vraiment étrange. C'est une déduction pour les entreprises qui font de la publicité. À mes yeux, cette idée d'empêcher ces entreprises de diffuser des publicités en certains endroits les rend moins concurrentielles.
Je comprends qu'on puisse se désoler de voir les grandes entreprises technologiques empocher cet argent. Taxons-les. Si vous pensez qu'elles ne paient pas leur juste part, alors la solution est de les taxer. Ne plaçons pas nos entreprises dans une position concurrentielle désavantageuse en leur disant qu'elles ne peuvent pas déduire ce type de publicité.
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Il y a clairement un enjeu de liberté d'expression, mais le gouvernement a le loisir de mettre en place une loi sur les préjudices en ligne, qui crée des garde-fous et qui s'attaque à certains de ces enjeux.
Honnêtement, parmi les choses que je trouve les plus inexplicables dans la stratégie du gouvernement, ce n'est pas qu'il n'ait pas décidé d'agir et de s'attaquer à certaines de ces questions. Il est nécessaire de s'y attaquer. Ce qui m'intrigue, c'est que la protection de la vie privée a été largement laissée de côté ou confinée à la fin. On a introduit l'intelligence artificielle sans consultation complète, et on ne s'est pas préoccupé des préjudices en ligne.
Je ne veux pas dire que le gouvernement devrait intervenir pour réglementer tout ce que les gens peuvent dire. Je pense que la réglementation de la mésinformation et de la désinformation présente de réels défis. Nous pouvons certainement veiller à ce que les plateformes agissent de façon responsable lorsqu'il s'agit de contenus dont on sait déjà qu'ils sont illégaux, par exemple les contenus terroristes, certains types de contenus haineux, etc. Il y a là une occasion à saisir, et beaucoup de personnes sont frustrées de voir que cette question n'a pas été priorisée, et que d'autres l'ont été.
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C'est une excellente question, et je vous remercie de l'avoir posée.
C'est en partie dû au fait que notre ministère de la Justice enquête toujours sur Apple. Contrairement à Amazon, Google et Facebook, Apple n'a pas encore fait l'objet de poursuites de la part de notre ministère de la Justice, d'un commissaire fédéral au commerce ou d'un procureur général d'État, qui poursuivent tous les autres entreprises d'une manière ou d'une autre. Je pense que cela rehausse le niveau d'attention.
Vous avez raison de dire qu'Apple a un pouvoir de gardien du goulet d'étranglement. Je pense que c'est pourquoi les auteurs de la législation sur les marchés numériques en Europe ont été si brillants de les inclure. Ça limite leur pouvoir de gardien des portes.
Nous apprenons, notamment grâce au procès antitrust intenté contre Google aux États-Unis, que le partage de pouvoir entre Google et Apple, en vertu duquel Google verse à Apple plus de 20 milliards de dollars par an et 37 % de chaque dollar prélevé sur les recherches faites sur Google à partir d'appareils Apple, représente un véritable goulot d'étranglement. Tout cela commence à être mis en lumière, et je pense qu'Apple attirera également l'attention.
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Je vous remercie, madame Gainey.
Nous allons passer à la troisième série de questions. Je pense que nous avons le temps.
Il y aura cinq minutes pour les conservateurs et, en fait, je vais commencer.
Monsieur Geist, je trouve ironique que le jour où le projet de loi , la Loi sur les nouvelles en ligne, a été adopté à la Chambre des communes — certains pensaient que j'étais conspirationniste —, les grands radiodiffuseurs ont glissé à l'oreille du président du CRTC qu'ils voulaient faire moins de nouvelles locales. N'est‑ce pas ironique?
Évidemment, le projet de loi n'a pas encore rapporté d'argent aux grands radiodiffuseurs, mais ils s'y préparent, et je peux vous dire que, dans ma ville, la chaîne de télévision locale diffuse deux heures par jour depuis le 216 First Avenue North.
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Je pense, en fait, que la réaction des radiodiffuseurs, en ce qui concerne les nouvelles et les appels à revoir à la baisse les obligations de contenu canadien, que nous entendons maintenant, découle de cette loi.
S'agissant du contenu canadien, par exemple, il était évident que, si l'on souhaitait voir des diffuseurs internationaux — des diffuseurs étrangers — prendre une plus grande part de responsabilité, les radiodiffuseurs canadiens allaient, entre autres, demander à réduire leurs obligations dans ce contexte.
Pour ce qui est des nouvelles, je soupçonne qu'il s'agit d'une coïncidence, mais en ce qui concerne la quantité de nouvelles que nous pourrions obtenir de certains de ces radiodiffuseurs, pas grand-chose ne dit que les résultats qu'ils pourraient obtenir du projet de loi , qui semblent à présent très limités — puisqu'une seule entreprise y est maintenant assujettie — changeraient la trajectoire de certaines des choses sur lesquelles ces entreprises se concentrent en matière de nouvelles.
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À mon avis, si le projet de loi sur les préjudices en ligne tarde à être adopté, c'est notamment parce que, selon toute vraisemblance, il est considéré — et à juste titre — comme étant encore plus controversé que les projets de loi et , et je pense que c'est vrai.
Je pense également qu'il n'a jamais été logique de rattacher ce projet de loi à Patrimoine canadien. Je ne sais pas pourquoi les préjudices en ligne relèvent du patrimoine. Il semblerait qu'il ait maintenant été déplacé au sein du gouvernement. Je pense que c'est une bonne chose, car il s'agit davantage, selon moi, d'une question liée à la justice et à la sécurité publique.
Je dirais que ce dont nous avons vraiment besoin dans le cadre de ce projet de loi — et je peux avoir l'air d'un universitaire naïf —, c'est d'une ouverture, d'une volonté de s'engager dans un processus politique itératif ouvert à l'étape de l'étude en comité, car apporter des changements ne constitue pas une erreur et ne signifie pas que quelqu'un s'est trompé, mais plutôt que l'on cherche à améliorer le projet de loi.
Avec tout le respect que je vous dois, j'ai trop souvent l'impression que les comités sont davantage conçus comme un théâtre de consultation que comme un cadre de consultations réelles et engagées, et que l'idée d'apporter des changements, même potentiellement importants, est en quelque sorte considérée comme un aveu d'échec. Or, je ne crois pas que ce soit le cas.
Ce sont des projets de loi qui n'auraient pas dû être aussi controversés. Je pense qu'une partie du problème tient au fait que, dès le jour où ils sont présentés — et cela vaut depuis longtemps pour les gouvernements successifs, à vrai dire, autant conservateurs que libéraux —, tout changement important revient à dire que l'on a commis des erreurs, ce qui est un signe de faiblesse.
Je ne pense pas que ce soit un signe de faiblesse. En fait, c'est tout le contraire, à mon avis. J'y vois un signe de volonté d'élaborer la meilleure politique possible.
Je vous sais gré à tous d'avoir pris le temps d'être des nôtres aujourd'hui.
Monsieur Ahmed, je commencerai par vous.
Compte tenu du peu de temps dont nous disposons, il nous serait très utile que vous acceptiez de nous remettre un mémoire nous expliquant en quoi les choses fonctionnent ou pas — selon le cas —, de votre point de vue, au Royaume-Uni. Nous vous en serions très reconnaissants.
Monsieur Kint, nous vous saurions gré d'accepter de faire la même chose.
Est‑ce que cela vous conviendrait à tous deux?
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C'est très cohérent. Je pense que la seule différence est que l'on accorde beaucoup d'attention ici à la perte de trafic de Facebook lorsqu'il a décidé très tôt, à vrai dire, de bloquer toutes les nouvelles.
Je pense qu'il est important de dire que les nouvelles étaient en difficulté avant l'adoption du projet de loi ou avant que Facebook décide de cesser d'en diffuser. Le trafic de Facebook et de Meta est en baisse dans le monde entier. Cette idée ou ce mythe selon lequel il s'est soudain passé quelque chose parce que vous avez adopté le projet de loi C‑18, qui n'est même pas encore entré en vigueur, et que c'est là le problème, est absurde si l'on examine et étudie le marché international des nouvelles.
Vous avez, selon moi, courageusement adopté un projet de loi en vous inspirant de lois intelligentes qui portent fruit ailleurs. Il s'agit, de la part de Facebook, de ce que l'on a qualifié de crise de colère passagère. Il y a, selon moi, des expériences très cohérentes.
Beaucoup de préjudices en aval dont il est question aujourd'hui correspondent aussi à ce que nous voyons ailleurs. J'encourage vivement tout le monde à s'intéresser aux poursuites intentées par les procureurs généraux de différents États américains contre Meta pour les préjudices causés aux enfants mineurs par ses plateformes. Nous parlons de plus de 40 procureurs généraux qui intentent une action multipartite.
Même si l'on regarde ce qui se passe aux États-Unis et que l'on pense ne pas pouvoir s'entendre sur certaines choses, on s'entend très manifestement sur les préjudices causés et sur le fait qu'Instagram et Facebook ne font pas attention à leurs produits.
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Je suis entièrement d'accord.
Pour ce qui est de la recherche et des universités, j'ai vu des chercheurs très importants... Un groupe de l'Université de New York, ici, aux États-Unis, s'est vu interdire par Facebook la recherche qu'il tentait de mener parce qu'elle était considérée comme conflictuelle, car elle essayait d'exposer certains des préjudices subis sur la plateforme.
D'un autre côté, Google a organisé Newsgeist au Canada lorsque vous commenciez à examiner le projet de loi . Je suis presque sûr que certains des témoins qui ont défendu Google étaient présents à Newsgeist, qui est une conférence à huis clos, sur invitation seulement, qui se déroule selon la règle de Chatham House, et à laquelle sont conviés un grand nombre d'universitaires et de représentants du monde de l'information qui prient pour être invités par Google.
Au fait, je n'y suis pas invité.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous dirai bien franchement que je trouve toujours les discussions très intéressantes. Parfois, nos questions sont trop longues et il ne reste pas suffisamment de temps pour les réponses. Nous devrions, moi le premier, en prendre bonne note. Nous allons certainement finir par bien connaître les ficelles du métier.
Je remercie beaucoup les témoins de nous éclairer sur ces questions, qui divisent beaucoup les gens.
Monsieur le président, comme je suis préoccupé par ce que l'on observe présentement aux audiences que tient le CRTC, mais aussi par l'étude que nous avons faite des projets de loi et par la situation générale des médias, particulièrement les médias d'information, je souhaite déposer immédiatement une motion et en débattre.
Je propose ce qui suit:
1- Une crise secoue les médias de l’information en raison, notamment, de la domination des entreprises numériques étrangères;
2- Des centaines de postes dans les salles de nouvelles à travers le Canada ont été coupés depuis le début de l’année, et que des centaines d’autres risquent de l’être dans un avenir proche;
3- Des radiodiffuseurs canadiens, des associations de journalistes, des syndicats du secteur de l’information et plusieurs experts sont d’avis que des mesures urgentes doivent être mises en place pour permettre une couverture journalistique adéquate et diversifiée dans toutes les régions du Québec et du Canada;
Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne une étude visant à déterminer la pertinence de tenir des états généraux sur les médias et que le Comité en détermine les paramètres.
Que le Comité consacre un minimum de 4 réunions et fasse ses recommandations à la Chambre.
Monsieur le président, nous avons fait parvenir un peu plus tôt à la greffière la version française de la motion. Je vous cède la parole.
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Merci, monsieur le président.
Je vais en profiter pour faire un commentaire à l'intention de mes collègues du Comité. Avec tout le respect que je dois à tous les gens qui siègent à ce comité, cela fait au moins deux fois, récemment, qu'une décision de la présidence est remise en question, alors que cette décision repose sur les règles et usages qui régissent les travaux des comités. Ce n'est pas une question d'interprétation du Règlement. Des règles existent concernant nos pratiques et elles doivent être respectées. On conteste une fois de plus une décision de la présidence pour la casser parce que l'on préfère continuer. Ce qui est tout à fait correct et légitime, on veut continuer d'interroger les témoins.
J'appelle ce comité à faire preuve d'une grande prudence. Il y a des règles, et le Comité a beau être souverain et maître des décisions qu'il prend sur son fonctionnement, on est sur un terrain extrêmement glissant et dangereux quand on casse des décisions qui sont, de toute évidence, conformes aux règles basées sur le Règlement de la Chambre.
C'est arrivé il y a quelques semaines lorsqu'une décision sur une motion proposant de lever la séance a été contestée. Cette fois, on conteste une décision sur l'admissibilité d'une motion.
Je vais m'arrêter là.
Monsieur le président, je tiens à ce qu'il soit bien consigné dans le compte rendu de la réunion que j'invite ce comité à faire preuve d'une grande prudence quant à cet ensemble d'outils parlementaires dont nous disposons.
Merci.
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Je veux juste réagir à ce rappel au Règlement, monsieur le président.
C'est tout à fait de bonne guerre que les libéraux attaquent les conservateurs et que les conservateurs attaquent les libéraux. Cela fait partie du jeu. Je comprends cela.
Par contre, dans ce cas-ci, l'obstruction ne venait pas des conservateurs. Je tiens à dire que ce sont les libéraux et le NPD qui ont voté pour casser votre décision, monsieur le président. Votre décision était basée, je le rappelle, sur le Règlement tel qu'il est écrit, qui est clair et qui devrait être suivi.
Dans des cas exceptionnels, on peut casser une décision d'un président, mais je trouve que cela devient une habitude et cela m'inquiète.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Bien sûr que cette décision était en jeu. Le Comité a parfaitement le droit de prendre cette décision. Je suis d'accord avec M. Champoux pour dire que les travaux des comités reposent souvent sur un consentement unanime, et j'espère que nous y reviendrons.
Monsieur Ahmed, je reviens vers vous.
Je suis stupéfait d'apprendre que votre équipe compte 25 membres. Veuillez transmettre nos sincères remerciements aux 25 personnes qui font un travail aussi remarquable face aux grands groupes technologiques et à l'augmentation massive de la haine et de la désinformation à laquelle nous assistons.
La transparence des algorithmes en ligne est un des moyens de lutter contre la haine et la désinformation. C'est ce que vise à obtenir le projet de loi à l'étude au Parlement du Canada.
Aux États-Unis, comme vous le savez, le sénateur Ed Markey a présenté au Congrès américain un projet de loi similaire visant à obliger les grandes entreprises technologiques à dévoiler les algorithmes qu'elles utilisent pour diffuser, imposer dans ce cas, de la haine et de la désinformation à un si grand nombre de personnes.
Les grandes entreprises technologiques craignent bien sûr des poursuites en diffamation s'il existe un lien direct entre les attaques terroristes massives liées à la haine, qu'elle soit antisémite, homophobe ou raciste, et leurs algorithmes. Une responsabilité juridique serait établie.
Est‑il important pour le Parlement et pour le Congrès américain d'adopter ce type de loi pour que leurs pratiques scandaleuses valent aux grandes entreprises technologiques des poursuites en diffamation?
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Je vous remercie de cette question.
Je pense que beaucoup de créateurs de contenu numérique restent très préoccupés par les conséquences du projet de loi C‑11. Il est évident qu'une orientation stratégique a été donnée afin d'apaiser certaines de ces craintes. Cependant, même dans le cadre de cette orientation stratégique, il reste des références à la perspective d'avoir affaire à des algorithmes, par exemple. Je pense qu'il y a encore des inquiétudes. Il y a eu une couverture médiatique, en particulier sur la question des créateurs autochtones, noirs et de couleur. Dans un cas, Vanessa Brousseau, qui a pour pseudonyme Resilient Inuk, a rencontré des responsables de Patrimoine canadien et elle s'est sentie complètement intimidée et non respectée.
Je dois dire que je trouve qu'il y a un décalage incroyable entre toute une série de changements, légitimes, proposés dans le projet de loi afin de soutenir ces communautés et leur créativité, et l'expérience vécue par certains dans le cadre du processus législatif, où leurs efforts pour exprimer leurs préoccupations, que ce soit au Comité ou, par la suite, au Sénat, ont été ignorés. Le Sénat a entendu beaucoup plus de créateurs de contenu numérique, de tous horizons, que le Comité n'a pris le temps d'en entendre en ce qui concerne le projet de loi C‑11.
Il ne suffit pas, à mon sens, d'avoir un projet de loi qui semble intéressant. Il faut veiller à ce que les groupes concernés aient aussi la possibilité de se faire entendre.
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Je vous remercie, monsieur Geist.
Je voudrais maintenant présenter une motion qui a été déposée et proposée lors de la dernière réunion. Cependant, nous n'avons pas eu l'occasion de la mettre aux voix. J'espère qu'aujourd'hui, nous pourrons le faire assez rapidement pour continuer d'avancer.
Je vais lire la motion.
Étant donné que, le ministère du Patrimoine canadien, sous la direction de l’honorable Pablo Rodriguez, a approuvé des subventions « antiracistes » de plus de 130 000 $ à Laith Marouf du Community Media Advocacy Centre (CMAC), le 21 octobre 2022, l’honorable Pablo Rodriguez a comparu devant le Comité du patrimoine, au cours de laquelle un certain nombre de députés l’ont interrogé sur la date à laquelle il a été mis au courant des remarques désobligeantes de Laith Marouf sur les juifs et les francophones, et le ministre a indiqué au Comité qu’il n’a été informé qu’après le 22 août 2022, un article du Globe and Mail et une demande d’accès à l’information indiquent que des courriels de l’ancien ministre de la Diversité et de l’Inclusion, l’honorable Ahmed Hussein, de son ancien chef de cabinet, de l’ancien chef de cabinet du ministre Rodriguez et de la sous-ministre de Patrimoine canadien ont circulé entre le 17 et le 19 août 2022, y compris un courriel envoyé au compte personnel du ministre Rodriguez intitulé « Laith Marouf et les discours haineux antisémites », le Comité invite l’ancien ministre du Patrimoine canadien, l’honorable Pablo Rodriguez, à comparaître devant le Comité dès que possible pendant au moins deux heures pour clarifier ses propos concernant Laith Marouf, et que le Comité fasse rapport de ses conclusions à la Chambre.
Monsieur le président, j'ai donné lecture de la motion. Ma demande est claire: que nous entendions l'ancien ministre du Patrimoine canadien. C'est lui qui a décidé ou approuvé le versement de 130 000 $ à Laith Marouf. C'est également lui qui a demandé le remboursement de cette somme. Elle n'a pas été remboursée. Laith Marouf aurait dû être rappelé à l'ordre et se voir retirer l'argent bien plus tôt que ne l'a fait le ministre, qui a préféré fermer les yeux.
Il incombe au ministre en question de se présenter devant le Comité pour lui expliquer pourquoi il a pris cette décision ou pour clarifier ses commentaires précédents.
Je propose la motion.
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Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
Nous passons d'innombrables heures à discuter.
M. Champoux a présenté une motion. Le Comité aurait pu travailler en collaboration pour continuer de poser des questions. Malheureusement, cela ne s'est pas fait, car certaines personnes estimaient que ce n'était pas approprié.
Ensuite, nous avons convenu, en tant que groupe, par votre intermédiaire, monsieur le président, que chaque parti restant disposerait de trois minutes.
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C'est exact. C'est ce que nous allions faire.
Il semblerait raisonnable, pour une personne raisonnable, que dans un accord comme celui‑ci, conclu entre des personnes que je suppose honorables, chacun dispose de trois minutes pour poser des questions, étant donné le temps que nous consacrent les témoins.
Il semble que, si telle est l'approche que le Comité souhaite adopter à l'avenir, nous nous protégerons certainement en conséquence, mais comme l'a très bien dit M. Coteau...
Un député: Nous nous sentons pris au dépourvu.
M. Taleeb Noormohamed: ... nous siégeons ici afin de faire ce travail avec beaucoup de députés de l'autre côté dont nous pensons qu'ils agissent de bonne foi.
C'est maintenant la deuxième réunion consécutive où cela se produit, où, sachant que nous nous sommes entendus pour terminer notre temps de parole et pour que cela nous soit permis. Les deux fois, une motion a été présentée à la toute dernière minute, ce qui revient à s'assurer sciemment que nous n'aurons pas notre temps de parole.
Si c'est le ton, la teneur et l'approche que vous voulez adopter au Comité, soit. Cependant, c'est une décision prise par les conservateurs, certainement pas par nous, et je dirais même pas par les membres des autres partis présents dans cette salle.