:
Bonjour à tous. Vous êtes de nouveau pris avec moi à la présidence.
La séance est ouverte. Bienvenue à la 14e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes.
Je tiens à reconnaître que cette réunion prend place sur le territoire traditionnel non cédé des Algonquins anishinabes.
Conformément à la motion adoptée par le Comité le lundi 31 janvier 2022, cette réunion est consacrée à l'étude de la Loi sur le statut de l'artiste et son impact sur l'amélioration des conditions minimales de travail des artistes.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le 25 novembre 2021. Les membres participent en personne ou avec l'application Zoom.
Je vais sauter la partie sur les personnes sur place. Je pense que nous connaissons tous ces règles.
Pour ce qui est des membres qui assistent à la réunion par Zoom, attendez que je vous nomme pour prendre la parole. Cliquez alors sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Veuillez vous mettre en sourdine lorsque vous ne parlez pas. L'interprétation est disponible pour les utilisateurs de Zoom. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais ou le français. Ceux qui sont sur place savent quoi faire.
Les utilisateurs de Zoom peuvent se servir de la fonction « Lever la main » lorsqu'ils désirent prendre la parole. Si vous perdez l'accès à l'interprétation, veuillez soulever un rappel au Règlement aussi vite que possible. Conformément à la motion de routine, tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
Nous commençons maintenant par les mots de bienvenue et les déclarations. Chaque groupe disposera de cinq minutes pour s'exprimer, et cette durée pourra être divisée entre les divers témoins d'un même groupe.
Commençons par le ministère du Patrimoine canadien.
Thomas Owen Ripley et Kelly Beaton, vous avez la parole pour cinq minutes.
:
Merci, monsieur le président.
[Français]
Bonjour à tous.
Je vous remercie de nous avoir invités ici pour discuter avec vous aujourd'hui.
[Traduction]
Je me joins moi aussi à vous depuis le territoire non cédé des Algonquins anishinabes.
[Français]
La Loi sur le statut de l'artiste du Canada est née de la reconnaissance du fait que le chemin emprunté par les artistes est difficile. Malgré la valeur de leur travail dans nos vies et dans notre société, de nombreux artistes doivent se battre pour obtenir le revenu et les conditions de travail qu'ils méritent.
La Loi a été adoptée en 1992, mais ses origines remontent à 1980, lorsque l'UNESCO a présenté la Recommandation relative à la condition de l'artiste, laquelle reconnaissait les façons atypiques dont les artistes gagnaient leur vie et proposait des mesures que les États membres de l'UNESCO pouvaient prendre pour améliorer la situation socioéconomique des artistes.
La Loi sur le statut de l'artiste du Canada est composée de deux parties. La première partie, qui expose un ensemble de dispositions générales, relève du ministre du Patrimoine canadien. Elle sert de pilier pour la deuxième partie de la Loi, qui établit un cadre pour régir les relations professionnelles entre les artistes et les producteurs de compétence fédérale. Cette deuxième partie relève du ministre du Travail.
Les dispositions générales de la première partie de la Loi comprennent une reconnaissance du rôle important que jouent les artistes dans nos vies, dans notre société et dans notre économie. De plus, elles établissent un lien entre cette reconnaissance et l'importance pour les artistes de recevoir une indemnisation pour l'utilisation de leurs œuvres et d'avoir un statut social représentatif du poids de leur apport à la société. Cette reconnaissance des richesses que les artistes apportent à la vie des Canadiennes et des Canadiens et de notre responsabilité collective de reconnaître et d'indemniser de façon juste ces contributions se trouve au cœur non seulement de la Loi sur le statut de l'artiste, mais aussi de ce que nous nous efforçons de réaliser au ministère du Patrimoine canadien.
[Traduction]
Les événements de l'actualité font ressortir l'importance de ces objectifs. On ne peut nier que la pandémie a fait des ravages dans le secteur artistique. Nous avons eu des échos de centres des arts de la scène, de troupes de danse et de théâtre, de pôles culturels, d'institutions de formation dans les arts, de syndicats d'artistes et de techniciens, et d'autres partenaires depuis que leur monde et le nôtre s'est effondré, il y a deux ans. Nous avons vu les chiffres. Nous savons grâce aux données de l'Enquête sur la population active qu'en 2020, le nombre d'heures travaillées par les artistes ayant le statut de travailleur autonome a chuté de 29 %, un record. Nous savons grâce au propre sondage du ministère du Patrimoine canadien sur les artistes et les créateurs de contenu canadiens que 62 % d'entre eux ont perdu des revenus depuis la pandémie de COVID‑19. Nous avons entendu Sophie Prégent, présidente de l'Union des artistes, rapporter à ce comité en février dernier que 40 % des membres de l'organisme avaient envisagé ou envisageaient encore d'abandonner leur carrière artistique à long terme.
Actuellement, les besoins sont sans précédent. Tout au long de la pandémie, le ministère n'a ménagé aucun effort pour verser des fonds afin d'aider les organismes artistiques et culturels qui embauchent les artistes et qui les aident à tenir bon, et nous savons que ces investissements ont des effets positifs. Le ministère a réalisé dernièrement une étude auprès d'environ 10 000 bénéficiaires du Fonds d'urgence pour soutenir les organismes chargés de la culture, du patrimoine et du sport, d'une valeur de 500 millions de dollars. Plus de trois répondants sur quatre, soit 77 % d'entre eux, ont indiqué que le fonds avait permis à leur organisation de maintenir ses activités, et la plupart des répondants, soit 95 % se sont dits satisfaits de la rapidité avec laquelle les fonds ont été déboursés. Nous constatons par ailleurs que les secteurs des arts, de la culture et du patrimoine commencent à se rétablir des effets de la pandémie. Nous pouvons maintenant concentrer nos efforts sur le soutien à la relance des secteurs frappés le plus durement par la pandémie grâce, par exemple, au nouveau Fonds pour la résilience des travailleurs du secteur des spectacles sur scène, d'une valeur de 60 millions de dollars, qui offrira une aide financière directe et des programmes de soutien aux travailleurs des arts par l'intermédiaire des guildes, des syndicats et des associations qui les touchent au plus près.
[Français]
Même si la plupart des travailleurs et des lieux de travail du secteur culturel sont régis par les lois du travail provinciales ou territoriales, la Loi sur le statut de l'artiste du Canada demeure un instrument important pour protéger les droits des artistes au moyen de la négociation collective. De plus, elle inscrit dans ses dispositions générales la reconnaissance cruciale de tout ce que les artistes apportent à notre pays. Il s'agit d'un outil qui permet de soutenir les artistes et les créateurs, mais l'objectif primordial est de nous assurer que les artistes sont soutenus, qu'ils reçoivent une indemnisation équitable et que le statut qu'ils méritent leur est accordé en retour.
Je vous remercie.
[Traduction]
Meegwetch.
:
Merci, monsieur le président, et merci également au Comité pour l'invitation.
[Français]
La Loi sur le statut de l'artiste a été adoptée en 1992 et promulguée en 1995, soit il y a un peu plus de 25 ans.
La partie II de la Loi établit un cadre pour la négociation collective entre des artistes qui sont des travailleurs indépendants et les producteurs qui veulent retenir leurs services pour des projets particuliers. Cette loi avait pour objectif de permettre la négociation d'accords-cadres entre associations d'artistes et producteurs afin d'établir des conditions d'emploi minimales pour les secteurs désignés.
La Loi sur le statut de l'artiste du fédéral a un champ d'application limité, c'est-à-dire qu'elle trouve application lorsque le producteur est une institution fédérale, c'est-à-dire un ministère ou un organisme de régie fédérale, par exemple l'Office national du film, ou lorsqu'il s'agit d'une entreprise de radiodiffusion selon la définition du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, par exemple TVA, Radio‑Canada ou CTV.
La Loi est grandement inspirée du Code canadien du travail en ce qui a trait au processus d'accréditation des associations d'artistes comme agents négociateurs et aux modalités entourant la négociation collective. Cependant, on y trouve des distinctions particulières qui sont nécessaires pour s'adapter aux réalités du domaine artistique et à la nature de la relation entre les producteurs et les travailleurs indépendants que sont les artistes.
[Traduction]
Comme vous le savez, la Loi a également institué un tribunal spécialisé chargé de ces questions, le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs, ou TCRPAP. Des modifications apportées à la Loi en 2012 ont toutefois aboli ce tribunal en confiant la responsabilité de la partie II de la Loi au Conseil canadien des relations industrielles.
À l'époque, j'étais directrice générale du Conseil et j'ai pris directement part à la transition. Le Conseil a immédiatement lancé des consultations avec le milieu artistique afin de mettre au point et d'adopter des règlements et des procédures régissant le traitement des dossiers soumis aux termes de la Loi. Il en a découlé l'adoption du Règlement sur les procédures se rapportant à la Loi sur le statut de l'artiste, en 2014, qui assure un traitement transparent des dossiers dont le Conseil est saisi.
L'ancien tribunal, le TCRPAP, a été très actif dans les premières années qui ont suivi l'entrée en vigueur de la Loi. Il a été appelé à définir les divers secteurs et à accréditer des associations en tant que représentantes des artistes dans ces secteurs. Il y a actuellement 26 secteurs qui sont reconnus par la Loi et pour lesquels une association est accréditée pour représenter les artistes. Le Conseil tient un registre des accréditations accordées en vertu de la Loi sur le statut de l'artiste, accessible sur notre site Web.
Les activités eu égard à la Loi tournent actuellement au ralenti. Le Conseil n'a reçu que huit demandes ou plaintes aux termes de la Loi depuis 2013, lorsque les responsabilités lui ont été transférées. Quand nous recevons une demande ou une plainte, nous l'assignons sur‑le‑champ à un agent, qui intervient auprès des parties en cause afin de préciser les problèmes à régler et de recueillir les renseignements nécessaires pour que le Conseil rende une décision. Dans certains cas, la question se résout par la médiation.
Je sais que d'autres témoins qui ont comparu devant le Comité ont évoqué l'importance de traiter les plaintes et les demandes rapidement. Je peux informer le Comité que le temps médian de traitement de toute question soumise au Conseil est d'un peu moins de six mois, de la date de la soumission à celle de la décision définitive. Certains dossiers peuvent requérir plus de temps, selon les problèmes soulevés, la nécessité de tenir une audience et la disponibilité des participants au processus. Nous cherchons assurément à fournir des services de résolution de conflits rapides et efficaces.
Puisque le tribunal est responsable d'interpréter et d'appliquer les dispositions de la Loi, je veillerai à ne pas prendre position sur des enjeux stratégiques. Je serai néanmoins heureuse de répondre à toutes vos questions. Merci de m'avoir permis de témoigner.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous et à toutes.
J'aimerais tout d'abord vous remercier de m'avoir invité à contribuer à vos travaux.
Le Conseil des arts du Canada joue un rôle fondamental dans le soutien de l'écosystème artistique du pays dans son ensemble. Depuis plus de 60 ans, nous versons des subventions à des artistes individuels pour appuyer la création et la diffusion de leurs œuvres. Nous soutenons aussi des centaines d'organismes pour favoriser la production et la diffusion des œuvres artistiques et littéraires.
Au cours de l'exercice 2021‑2022, qui vient tout juste de se terminer, nous avons versé 314 millions de dollars en subventions dans le cadre de nos programmes réguliers et plus de 141 millions de dollars en financement additionnel d'urgence pour tenter de limiter les effets dévastateurs de la pandémie sur notre secteur.
[Traduction]
Bien que la pandémie ait fait ressortir des déséquilibres et des iniquités, il importe de comprendre que la précarité existe depuis des décennies. Souvent, le travail des artistes est incompris et correspond mal à la valeur accordée au travail dans la société.
Une combinaison de facteurs explique la différence du secteur des arts. Primo, il y a la précarité du travail à la pige, saisonnier ou temporaire.
Secundo, il existe un besoin objectif d'un surplus d'artistes ainsi que de projets et de créations artistiques comparativement à la demande immédiate. C'est ce surplus de talent qui nous garantit un secteur des arts diversifié et florissant. C'est ce même déséquilibre entre l'offre et la demande qui a mené à la dure concurrence entre les artistes pour les ressources et les débouchés limités.
Tertio, contrairement à la majorité des travailleurs dans notre économie, beaucoup d'artistes continuent de créer, d'écrire, de répéter et de s'entraîner, qu'il y ait ou non une promesse de rémunération au bout de leurs efforts. Les artistes et les écrivains sont animés par une passion et une soif de création, et non seulement par la rémunération. Beaucoup d'artistes travaillent tout le temps. Ils réfléchissent, ils expérimentent, ils s'entraînent et ainsi de suite, habituellement sans être rémunérés de quelque façon que ce soit. Le travail non payé, invisible, est devenu la norme attendue des membres du milieu artistique.
Cette combinaison de facteurs illustre pourquoi les modèles économiques conventionnels basés sur la main-d'œuvre, les salaires et les aides sociales sont mal adaptés au secteur artistique et pourquoi il convient d'envisager des modèles plus inclusifs de soutien des artistes.
Le Conseil des arts du Canada continue de financer directement des milliers d'artistes et d'écrivains, ce qui en retour favorise l'essor économique du secteur artistique. Ainsi, au cours de l'année qui vient de se terminer, il a accordé 128 millions de dollars à plus de 4 600 artistes sous forme de subventions. Près de 50 % de ces artistes ont ainsi touché pour la première fois une aide financière, pour un total de 50 millions de dollars.
Bien que le Conseil soutienne l'écosystème artistique de manière générale, il n'a aucun contrôle sur les mécanismes et les systèmes actuellement en place qui se répercutent directement sur les conditions de travail, comme l'assurance-emploi, l'impôt sur le revenu et les lois comme la Loi sur le statut de l'artiste. Comme l'indique un rapport récent de l'UNESCO, intitulé Re|penser les politiques en faveur de la créativité, la pandémie a mis en évidence la nécessité, maintenant plus que jamais, de fournir aux artistes un filet de sécurité sociale plus solide et d'explorer les diverses avenues qui méritent d'être envisagées.
[Français]
Au Conseil, nous reconnaissons ouvertement qu'il y a beaucoup à faire pour que notre société soutienne mieux un secteur artistique qui contribue autant à la qualité de vie de chacune et chacun de nous.
Nous nous posons en ce moment des questions fondamentales, courageuses et complexes qui auront une grande influence sur notre travail dans les années à venir. Nous sommes résolument engagés sur la voie de la décolonisation, qui vise à rendre le secteur artistique plus inclusif, représentatif, équitable et durable.
Au Conseil, nous réfléchissons aux postulats historiques qui sous-tendent notre travail. Nous sommes conscients de l'importance de dépasser une vision eurocentriste des arts. Que signifie être un artiste professionnel? Comment devrait-on définir l'excellence ou le mérite artistique? Qu’est-ce qui est ou n'est pas de l'art? Ces questions et bien d'autres nous préoccupent, et nous cherchons des réponses avec les artistes et les communautés dont ils sont issus.
La pandémie a démontré hors de tout doute que la société a besoin d'art et de culture. Imaginez ce que nous aurions vécu, durant les longues semaines de confinement, sans musique, sans lecture, sans fiction à la télé ou sur Internet. Cependant, cette même pandémie a aussi précarisé la situation des artistes. N'oublions pas qu'il n'y a pas d'art sans artistes.
Merci.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Bienvenue à tous au Comité. [Difficultés techniques] comme vous le constatez.
Bienvenue au ministère du Patrimoine canadien. Une fois de plus, monsieur Ripley, de même que madame Beaton, je vous remercie de votre présence pour cet examen de la Loi sur le statut de l'artiste.
La Loi a été instituée en 1992. Dix ans plus tard, elle a été revue en profondeur. Pensez-vous que la Loi pourrait de nouveau être revue, puisque ce n'est pas arrivé depuis 2002?
:
Merci de la question, monsieur Waugh.
Vous avez raison. La Loi a été revue sept ans après son entrée en vigueur. À l'époque, le rapport avait déterminé que, dans l'ensemble, tout fonctionnait bien. Il n'y a alors eu aucune recommandation majeure pour ce qui est de modifier la Loi.
Certainement, nous nous entretenons régulièrement avec les intervenants du milieu des arts et de la culture afin de prendre connaissance de leurs préoccupations. Actuellement, rien n'est prévu pour modifier la Loi, mais nous savons pertinemment que le Comité envisage cette possibilité. Nous nous intéresserons aux recommandations que le Comité décidera de formuler.
Je passe au Conseil des arts du Canada.
Monsieur Brault, vous avez présenté beaucoup de chiffres. Au cours de la dernière année environ, 314 millions de dollars ont été accordés en subventions et 141 millions de dollars, en subventions additionnelles, selon ce que je comprends.
Quel est le processus pour verser ces sommes? Avez-vous d'abord examiné les nouvelles ou les anciennes demandes? Les anciens bénéficiaires ont-ils eu accès à l'argent les premiers, si vous le vouliez?
:
Normalement, nous distribuons l'argent à l'issue d'un processus de jury. Les artistes ou les organismes soumettent une demande au Conseil des arts du Canada, puis des jurys composés d'artistes spécialistes évaluent chacune d'entre elles. Ce sont eux qui décident de l'argent qui sera versé et des modalités qui y seront rattachées.
Au cours de la pandémie — l'an dernier et l'année d'avant —, le gouvernement a ajouté beaucoup d'argent pour soutenir le secteur, qui se trouvait dans une situation très précaire. Nous avons établi un équilibre entre le soutien de nos clients principaux... Ce sont les organismes qui touchent habituellement des subventions de fonctionnement du Conseil. Il s'agit habituellement de fonds complémentaires. Nous nous sommes fondés sur l'évaluation antérieure pour octroyer à ces organismes une partie de leur subvention habituelle.
Durant la pandémie, nous avons aussi insisté pour que le Conseil continue de recourir à des jurys pour offrir du soutien à ce que j'appellerais la scène indépendante. Il s'agit des artistes et des collectifs d'artistes de tout le Canada qui tentent encore de travailler et de créer. Je suis très fier de dire que nous avons atteint le degré de soutien le plus élevé pendant la pandémie. À vrai dire, comme je l'ai mentionné dans mon allocution, pour plus de 50 % des artistes bénéficiaires, c'était la première fois qu'ils touchaient une subvention. Ils n'avaient jamais reçu d'argent du Conseil des arts du Canada.
Je crois que nous sommes arrivés à ratisser très large, de manière à couvrir le secteur entier et à faire en sorte que la création artistique et littéraire se poursuive pendant la pandémie. Tous les Canadiens pourront profiter de ces œuvres maintenant qu'elles seront présentées.
J'espère avoir répondu à votre question.
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Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins d'être présents aujourd'hui et d'expliquer l'importance de ce que vous faites.
J'aimerais poursuivre avec M. Brault. Vous avez mentionné que 50 % des bénéficiaires avaient touché pour la première fois une subvention, qu'il y a un équilibre entre les clients principaux et les nouveaux bénéficiaires. Auparavant, il y avait un obstacle à ce chapitre, car les artistes indépendants avaient du mal à obtenir des subventions.
Pouvez-vous décrire, grosso modo, le montant des subventions, la taille des organismes et le nombre de demandeurs de subvention? J'ai l'impression que les artistes indépendants ont accès aux mêmes possibilités. Selon mon expérience, l'aide financière modeste aux artistes indépendants fait boule de neige sur le plan des retombées.
Envisagez-vous de conserver le nouveau modèle que vous avez adopté au cours de la dernière année?
:
Je suis certainement ravi de l'entendre, merci.
Dans un même ordre d'idées, davantage d'artistes se tournent vers la technologie pour propulser leur carrière, et la pandémie a fait ressortir l'importance de le faire.
Y a‑t‑il des filières de financement, par l'intermédiaire du Conseil des arts du Canada, consacrées à la formation, plus précisément pour la numérisation et la promotion, afin de faciliter la transmission de nos histoires non seulement au Canada, comme vous l'avez dit, mais aussi à l'échelle internationale, étant donné que nous sommes très doués pour exporter nos talents dans le monde?
:
Assurément. Il y a des filières de financement pour la formation. Au cours de la pandémie, ce fut extrêmement important pour les artistes canadiens, peu importe ce qu'ils font, de maîtriser davantage l'univers numérique, qu'il s'agisse entre autres de production, de diffusion ou de présentation.
C'est très encourageant de constater que nous nous trouvons en meilleure posture pour offrir un produit de qualité, même les personnes qui travaillent normalement sur scène. Le secteur se rétablit. Beaucoup de troupes de théâtre veulent conserver un mode de fonctionnement hybride et offrir, de toute évidence, des spectacles sur scène, mais aussi un accès par voie numérique.
Alors, oui, je pense que nous avons accompli des progrès majeurs au cours des deux dernières années dans la maîtrise du numérique dans notre secteur.
:
C'est encourageant, merci.
Je pourrais peut-être adresser mes questions à M. Ripley, du ministère du Patrimoine canadien.
Écouter les artistes pendant la pandémie — et je ne parle pas que de les écouter dans leur activité artistique — et prendre connaissance de leur rétroaction, comme on vient de l'entendre, est extrêmement important compte tenu des leçons que nous pouvons en tirer. Je vous suis très reconnaissant d'avoir tendu la main aux artistes pour obtenir leur rétroaction pendant la pandémie.
Pourriez-vous nous en dire davantage sur le rapport? Qu'avez-vous entendu directement des artistes, comme on l'a mentionné pour les théâtres, qui pourraient conserver un mode de fonctionnement hybride?
:
Ce que je peux dire au Comité, c'est que, juste avant la pandémie, le ministère envisageait de lancer un sondage auprès des artistes et des créateurs, donc lorsque la pandémie a frappé, nous avons adapté ce sondage pour tenir compte de cette réalité afin de vraiment obtenir une vue d'ensemble des créateurs et des artistes. Nous l'avons envoyé à des milliers d'artistes et de créateurs. Nous avons reçu environ 4 700 réponses.
Parmi les principaux constats, le quart des artistes rapportent que les revenus qu'ils tirent de leur travail artistique fluctuent d'au moins 100 % d'une année à l'autre. De plus, 35 % des répondants affirment que ces revenus fluctuent de 50 % d'une année à l'autre. Nous savons qu'une majorité des répondants, soit 57 %, déclarent gagner moins de 40 000 $ brut, contre une médiane nationale de 71 000 $, par exemple.
Nous savons qu'une majorité des artistes exercent leur profession créative à temps partiel. Ils sont des entrepreneurs. Ils sont des gens d'affaires. Une minorité d'entre eux exercent leur profession artistique à plein temps. Le sondage a également montré que 62 % des 4 700 répondants déclarent qu'ils ont perdu des revenus durant la pandémie et que l'aide gouvernementale, qu'elle soit provinciale-territoriale ou fédérale, a vraiment joué un rôle essentiel pour leur permettre de surmonter l'épreuve.
J'espère vous avoir donné une idée de la situation, monsieur Louis, mais je serai heureux de fournir davantage de détails.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Ripley, n'allez pas trop loin, car je pense que nous aurons encore besoin de vous.
Lorsque M. Waugh vous a posé des questions tout à l'heure, vous avez répondu que le ministère du Patrimoine canadien n'avait pas de plan présentement en vue de modifier la Loi sur le statut de l'artiste, mais que vous étiez ouverts aux recommandations du Comité. C'est quand même agréable à entendre.
Une version précédente de la Loi contenait une disposition recommandant que la Loi soit révisée conjointement par le ministre du Patrimoine canadien et le ministre du Travail tous les sept ans. Or, ce détail a été abrogé en 2012.
Était-ce une bonne idée d'abroger cela?
:
Merci de la question, monsieur Champoux.
Je suis toujours à la disposition du Comité.
Comme je l'ai mentionné en réponse à une question précédente, nous n'avons pas de plan présentement en vue d'une révision de la Loi.
C'est certainement une bonne idée de s'assurer qu'une loi reste conforme aux tendances courantes. Nous allons assurément prêter attention aux recommandations du Comité, si vous pensez que certains concepts ou éléments de la Loi ne sont plus à jour. Cela dit, l'ensemble des principes fondamentaux de la Loi sont toujours pertinents, selon nous.
:
Merci beaucoup, messieurs Ripley et Champoux.
Comme vous le savez, en 2010, si je ne m'abuse, le gouvernement a décidé de faire une révision de toutes les activités afin que le système gagne en efficacité. Il a alors décidé d'abolir certains organismes, dont le conseil que vous avez mentionné.
Depuis ce temps, le ministère mène activement des consultations et des discussions, et fait un survol des questions et des enjeux propres au milieu artistique.
Par exemple, grâce aux discussions qui ont eu lieu cette semaine et au cours des dernières semaines devant le Comité permanent du patrimoine canadien ainsi que devant d'autres comités, nous avons maintenant une compréhension plus profonde des enjeux.
Comme M. Ripley l'a mentionné, une partie de notre travail quotidien consiste à établir des contacts avec les intervenants, avec les clients, avec les artistes et, surtout, avec nos collègues du Conseil des arts du Canada. S'il y a des enjeux, nous sommes à leur disposition pour en discuter. Évidemment, nous sommes ici aujourd'hui pour écouter les interventions et voir ce que nous pourrions améliorer.
:
Je vous remercie de la question, monsieur Champoux.
L'obligation d'avoir un accord-cadre n'est pas contraignante. Les témoins ont donc raison là-dessus.
Ma collègue Mme Brazeau aura peut-être certaines observations à transmettre au Comité. Bien sûr, la responsabilité de la partie II relève davantage de nos collègues d'Emploi et Développement social Canada. Ce serait donc à eux de déterminer si des changements doivent être apportés au cadre de travail.
Cela dit, j'aimerais souligner deux éléments, monsieur Champoux.
Il y a certains engagements en cours. Par exemple, dans la lettre de mandat du , on demande à celui-ci d'évaluer le cadre de travail des travailleurs autonomes. De plus, la lettre de mandat de la demande à cette dernière d'évaluer s'il y a un appui suffisant pour les travailleurs autonomes, qui ne peuvent bénéficier de l'assurance-emploi.
Nous allons assurément travailler de concert avec nos collègues de ces ministères pour nous assurer que les intérêts des travailleurs culturels et des artistes sont reflétés dans ces travaux.
Je ne sais pas si Mme Brazeau souhaite ajouter quelque chose.
:
Nous surveillons effectivement ce qui est fait dans les autres pays. À titre d'exemple, l'équipe de Mme Beaton, ma collègue, fait régulièrement un survol de ce qui se passe à l'échelle internationale dans ce domaine.
Vous avez raison de dire qu'un certain nombre d'administrations ont mis des mesures en place, principalement des projets pilotes axés sur l'aide aux artistes et aux créateurs. Vous avez mentionné l'Irlande. Il y a aussi plusieurs villes aux États‑Unis qui ont centré leur attention sur des projets pilotes, par exemple, la ville de San Francisco; la ville de St. Paul, au Minnesota; et la ville de New York, dans l'État de New York. En ce qui concerne l'échelle internationale, nous constatons que la France, la Nouvelle‑Zélande et la Finlande se penchent aussi sur la question.
Nous nous occupons de faire cette surveillance. Je le répète, le cœur de la question porte sur un cadre de travail et c'est le message que j'essaie de transmettre à M. Champoux.
Nous sommes tout à fait disponibles pour aider nos collègues d'Emploi et Développement social Canada dans leur examen de ces enjeux, mais ce n'est pas l'une des principales responsabilités de notre ministre. Cependant, nous allons évidemment veiller à promouvoir les intérêts des artistes et des créateurs dans le cadre de cette réflexion, maintenant et dans les années qui suivront la pandémie.
Vous avez très bien répondu à la première partie de ma question. Toutefois, la seconde partie de ma question portait sur votre travail d'analyse et vos recommandations subséquentes.
Quand nous voyons ce que les autres pays font pour mettre en œuvre ces mesures d'aide pour les artistes... Comme vous l'avez mentionné dans votre allocution d'ouverture, les artistes n'ont jamais été aussi nécessaires dans notre société et il faut leur offrir du soutien dès aujourd'hui.
Dans quelle mesure votre ministère fait‑il un travail d'analyse pour formuler des recommandations à l'intention du afin de l'informer sur les avantages de certains des programmes qui ont déjà fait leurs preuves?
:
Nous menons cet exercice de réflexion. Certaines des statistiques et des informations dont j'ai fait part à M. Louis vont dans ce sens. Nous déployons des efforts pour comprendre les nouvelles réalités pour les artistes et les créateurs. Comme M. Brault l'a souligné dans son allocution d'ouverture, ils demeurent dans une situation précaire.
Nous avons collaboré étroitement avec le pour contribuer à la mise en œuvre des mesures d'aide d'urgence relatives à la pandémie. Nous jouons un rôle particulier dans l'environnement des arts et de la culture et il consiste surtout à offrir du soutien aux organisations de ce secteur. Par ailleurs, le rôle d'autres institutions, comme le Conseil des arts du Canada, est beaucoup plus élargi que l'aide directe aux artistes.
Pour répondre à votre question, serait‑il nécessaire d'apporter des modifications au Code canadien du travail? Au programme de l'assurance-emploi? Ces décisions ne relèvent pas du mandat de notre . Ces recommandations doivent venir du ou de la . Cependant, nous entretenons des communications étroites avec leur ministère respectif.
Pour ce qui est du mandat de votre comité et les enjeux sur lesquels vos travaux prennent appui, je peux vous assurer que les artistes et les créateurs partagent vos préoccupations. En effet, c'est tout le secteur qui s'intéresse à améliorer les choses dans le contexte de l'après-pandémie.
:
Merci, monsieur Ripley.
Je vais maintenant m'adresser à Mme Brazeau.
Vous avez dit ne pas pouvoir commenter des politiques. En ce qui concerne le cadre réglementaire entourant la Loi sur le statut de l'artiste, cependant, plusieurs intervenants et témoins ont avancé l'idée qu'il y ait un arbitrage obligatoire, afin que les artistes puissent négocier de façon plus équilibrée avec les institutions artistiques régies par le fédéral ainsi qu'avec le secteur privé.
Préconisez-vous la mise en place d'un arbitrage obligatoire en vertu de cette loi, comme certains le recommandent?
Il s'agit d'un outil qui existe dans le Code canadien du travail et, comme on le sait, la Loi sur le statut de l'artiste a été inspirée du Code canadien du travail. Pour de multiples raisons, à l'époque, le ministère a décidé de ne pas inclure cette disposition dans la Loi.
Il y a maintenant 25 ans que la Loi existe. Est-ce qu'il y a lieu de la revoir pour y établir des dispositions en parallèle avec celles du Code canadien du travail, en ce qui concerne l'arbitrage obligatoire lors d'un premier accord-cadre? C'est une très bonne question, qui devra être étudiée attentivement. C'est un outil qui est prévu dans le Code canadien du travail et qui pourrait être intégré à la Loi sur le statut de l'artiste si, au terme de cette étude, votre comité ou le ministère concluent que ce serait une bonne approche pour obtenir les résultats escomptés.
:
Je dois interrompre cette ronde de questions ici.
Je vous remercie, monsieur Julian. Vous aurez peut-être l'occasion de revenir sur ce point dans une future ronde de questions.
Notre première ronde de questions se termine ici. Je propose une seconde ronde de questions brèves de quatre minutes, quatre minutes, puis deux minutes, deux minutes, si vous le voulez bien.
Je cède maintenant la parole à M. Uppal. Vous disposez de quatre minutes.
Je vais reprendre là où mon collègue, M. Uppal, était intervenu.
Premièrement, monsieur Ripley, vous faites abondamment référence à ce sondage mené par votre ministère. J'aimerais savoir si vous pouvez nous fournir un sommaire ou un rapport des résultats de ce sondage. Vous pourriez peut-être le fournir aux membres du Comité dans le cadre de notre étude.
J'aimerais aussi que vous me parliez des créateurs de contenu numérique. Cette question dépend peut‑être de la probabilité que le projet de loi obtienne la sanction royale. Je me demande si les producteurs d'œuvres numériques pourraient être considérés comme des producteurs en vertu de la Loi sur le statut de l'artiste. Est‑ce que la Loi sur le statut de l'artiste pourrait servir de modèle pour les négociations de la convention collective des créateurs d'œuvres numériques?
:
Merci, monsieur le président.
Je félicite Mme Hepfner d'avoir posé une question à M. Ripley alors qu'il lui restait seulement 20 secondes. Elle a été très habile pour utiliser le maximum de son temps de parole.
Je vais m'adresser à M. Ripley ou à sa collègue du ministère du Patrimoine canadien.
Présentement, un producteur peut recevoir du financement du gouvernement sans pour autant devoir garantir des conditions de travail minimales pour les artistes.
Pensez-vous que c'est quelque chose qui devrait rester en place?
Est-ce une mesure que le ministère du Patrimoine canadien pourrait corriger sans même attendre les recommandations du Comité au terme de la présente étude?
:
Merci, monsieur Ripley.
Je veux juste confirmer quelque chose, à propos de ce que vous avez mentionné, monsieur Champoux. La Loi sur le statut de l'artiste s'applique seulement aux institutions fédérales. Quand on parle des producteurs, il peut donc s'agir de ministères, d'organismes comme le Conseil des arts du Canada ou de radiodiffuseurs qui sont réglementés par le CRTC.
Pour ce qui est des façons d'apporter des améliorations, c'est sûr qu'il faut respecter toutes les lois afin d'assurer des conditions de travail adéquates aux artistes. C'est pourquoi nous avons des mécanismes en place pour résoudre les conflits ou les situations difficiles. Mme Brazeau pourra me corriger si je me trompe, mais nous avons 26 associations qui peuvent agir comme agents négociateurs, et je crois que...
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En toute honnêteté, je pense que la situation est extrêmement complexe. Pour le financement des arts au Canada, il y a le système des lois fédérales et il y a le système des lois provinciales.
En ce moment, au Conseil des arts du Canada, quand nous soutenons un organisme, nous nous assurons qu'il s'engage par écrit à respecter les lois fédérales, les lois provinciales et celles de toutes les autres autorités et à offrir aux artistes des conditions optimales en matière de santé et de sécurité, entre autres. Quand nous réalisons que ce n'est pas le cas, nous pouvons intervenir en donnant un avertissement à l'organisme ou, finalement, en arrêtant de lui verser des fonds. C'est le genre de moyens que nous pouvons utiliser à l'heure actuelle.
C'est très difficile pour moi de prétendre qu'une disposition ou une autre de la Loi réglerait l'ensemble de la situation. Nous sommes dans une situation extrêmement complexe où interviennent des gens dans toutes sortes de secteurs.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais maintenant poser à M. Brault, du Conseil des arts du Canada, deux questions que j'ai posées tout à l'heure aux représentants du ministère du Patrimoine canadien.
La première question concernait le revenu de base pour les artistes, une mesure qui existe dans d'autres pays. On sait que les besoins sont criants. Plusieurs témoins ont attesté ce problème que vivent les artistes. Croyez-vous qu'il serait utile de suivre les pratiques exemplaires qui existent dans d'autres pays et de fournir un revenu de base à nos artistes?
Deuxièmement, croyez-vous qu'il serait utile que la Loi sur le statut des artistes prévoie un arbitrage obligatoire afin de rééquilibrer les relations entre les artistes et les organismes?
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Merci beaucoup de vos questions.
Je ne répondrai pas à la deuxième question, car elle est vraiment hors de mon champ d'expertise et de compétence.
En ce qui concerne les revenus des artistes, comme mon collègue M. Ripley l'a expliqué tantôt, nous suivons très attentivement ce qui se passe à l'heure actuelle sur la scène internationale et nous nous tenons au courant des approches employées pour assurer des revenus plus stables aux artistes. Présentement, beaucoup de projets pilotes découlent des apprentissages de la pandémie.
Par ailleurs, d'autres systèmes sont en place depuis très longtemps. Par exemple, en France, il existe depuis 1936 une loi sur les intermittents du spectacle. Ce n'est donc pas du tout une nouveauté. C'est un système qui est vraiment basé sur la reconnaissance de l'intermittence dans les arts du spectacle. En fait, il s'agit d'un système d'assurance-emploi basé sur un certain nombre d'heures travaillées. Je trouve que ce système est intéressant.
Je sais que cette responsabilité précise n'incombe pas du tout au ministère du Patrimoine canadien ni à la Loi sur le statut de l'artiste, mais, en tant que dirigeant du Conseil des arts du Canada, je pense que nous devons plaider pour l'amélioration des systèmes de financement des artistes. Comme on le sait, c'est un des très rares secteurs dans la société où il y a plus de travailleurs que d'emplois. Il n'y a pas de pénurie de main-d'œuvre dans le secteur des arts. Au contraire, ce secteur est créé et entretenu selon l'idée qu'il faut plus d'artistes que d'emplois disponibles. Si nous sommes prêts à accepter qu'il s'agisse de la condition nécessaire pour que notre secteur des arts soit intéressant et captivant, il faut trouver une façon juste de rémunérer les artistes, plutôt que de les obliger à courir d'un contrat à l'autre en sachant très bien qu'ils passeront de longues périodes sans travailler.
:
Bonjour, je souhaite la bienvenue à tous à ce deuxième segment de la réunion du Comité permanent du patrimoine canadien.
À nos témoins, soyez les bienvenus. C'est un plaisir de vous avoir avec nous aujourd'hui.
En guise de bienvenue, je vous signale rapidement que des services d'interprétation sont disponibles pour vous deux. Au bas de votre écran, vous pouvez choisir « parquet », « anglais » ou « français ». Si l'interprétation est perdue à un moment donné, veuillez nous le faire savoir le plus rapidement possible afin que nous puissions y remédier.
Lorsque vous parlez, veuillez parler lentement et distinctement. Lorsque vous ne parlez pas, veuillez mettre votre microphone en sourdine.
Nous allons poursuivre nos travaux avec ce deuxième groupe d'experts. Les deux témoins disposent de cinq minutes chacun pour leur déclaration liminaire. Viendront ensuite les questions de nos membres.
Nous allons commencer par M. Philippe Beaulieu.
[Français]
Vous avez la parole pour cinq minutes.
:
Merci, monsieur le président.
La Loi sur le statut de l'artiste devrait reconnaître la légitimité des entreprises exploitées par les artistes professionnels. L'espérance de profit de ces entreprises n'est pas la même que celle de toutes les autres entreprises. Trop souvent, leur statut d'entreprise est remis en doute par l'Agence du revenu du Canada parce que leurs revenus sont nettement inférieurs aux dépenses et que les pertes d'exploitation sont récurrentes.
Les revenus des artistes professionnels sont essentiellement composés de subventions, souvent sous la forme de bourses, de redevances sur leurs œuvres et de la vente d'œuvres. Ils reposent principalement sur des subventions pour la réalisation d'œuvres ou de projets artistiques, subventions accordées par des comités de pairs mis sur pied par des organismes tels que le Conseil des arts du Canada. Cette source de revenus est donc très variable d'une année à l'autre, selon les projets soumis à ces organismes. Par conséquent, les revenus des artistes dépendent de l'aide gouvernementale. C'est ce qui leur permet bien souvent de survivre et de créer, parfois dans des conditions financières très difficiles.
L'ARC devrait se familiariser davantage avec l'exploitation de ce type d'entreprises afin de mieux connaître la nature de leurs revenus. Il devrait y avoir un feuillet de renseignements fiscaux distinct ou une case distincte dans le feuillet T4A pour les projets artistiques, afin d'éviter toute confusion dans le traitement et la déclaration de ce type de revenus, tant chez les artistes professionnels et les gens qui préparent des déclarations de revenus qu'au sein de l'ARC. Présentement, les subventions et les bourses d'études sont déclarées dans la même case du feuillet T4A. Ces subventions devraient être déclarées dans le formulaire T2125, et non à la ligne 13010, laquelle inclut également le montant des bourses d'études.
Une déduction particulière devrait être permise pour les subventions qui ont été encaissées, mais pour lesquelles il reste des dépenses à engager. En ce moment, les artistes professionnels se trouvent à payer de l'impôt sur tout solde de subventions encaissées pour lesquelles il reste des dépenses à engager au cours de l'année suivante. La pandémie a accentué ce phénomène en raison de la fermeture des centres de création, qui retarde la réalisation des projets subventionnés.
La refonte de la Loi devrait être accompagnée de nouvelles mesures fiscales pour soutenir les artistes professionnels dans leur pratique et encourager la population à consommer des produits culturels canadiens, car cela contribue directement à la santé de ce domaine d'activité. Certaines de ces mesures sont d'ailleurs déjà en place à Revenu Québec.
Une déduction fiscale pour droits d'auteur pourrait être offerte sur les redevances générées par les œuvres des artistes professionnels, et ce, afin de diminuer une partie de l'imposition de ce type de revenus.
Puisque les revenus d'un artiste professionnel varient considérablement selon les projets réalisés, l'achat d'une rente d'étalement devrait être offert pour diminuer l'imposition de tout revenu exceptionnel en étalant ce revenu sur plusieurs années financières.
Pour encourager la consommation de produits culturels, l'ARC devrait accorder une déduction pour amortissement accéléré pour l'achat d'œuvres d'art d'artistes canadiens par les entreprises qui souhaitent soutenir les artistes professionnels. Présentement, la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit un taux d'amortissement de 20 % pour ce type de biens.
L'achat d'abonnements saisonniers comportant au moins trois représentations devrait être déductible à 100 % comme frais de représentation pour les entreprises.
Un crédit d'impôt pour l'achat de biens culturels devrait être offert à tous les contribuables, afin d'encourager la consommation de notre culture au pays.
Enfin, la construction d'immeubles gouvernementaux et municipaux devrait exiger par décret que 1 % du budget total soit alloué à l'achat d'œuvres d'art créées par des artistes professionnels, qui pourraient présenter leur candidature à des concours d'art public à l'échelle du pays.
Voilà quelques-unes de mes observations découlant de ma pratique comme comptable professionnel agréé auprès des artistes professionnels du Canada.
:
Bonjour, monsieur le président. Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui.
Je m'appelle Costa Dimitrakopoulos.
[Français]
Je suis le directeur général de la Direction des décisions en impôt de la Direction générale de la politique législative et des affaires réglementaires, à l'Agence du revenu du Canada.
[Traduction]
Je suis heureux de répondre à toutes les questions que vous pourriez avoir concernant l'imposition générale des artistes. Mon exposé d'aujourd'hui brosse un portrait général de cela. Afin deplacer la discussion d’aujourd’hui dans son contexte, j'aimerais vous décrire brièvement le rôle de l'ARC.
Comme vous le savez peut-être, le ministère des Finances est responsable d’élaborer et d’évaluer la politique fiscale fédérale et d’apporter des modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu. L’ARC, à titre d’administratrice, est chargée des fonctions liées à la mise en œuvre de la Loi de l’impôt sur le revenu, dont les suivantes: informer le public et les parties prenantes; établir les mécanismes au moyen desquels les particuliers et les entreprises peuvent s’acquitter de leurs obligations fiscales et recevoir leurs prestations; mener des activités d’observation afin de nous assurer que tous respectent les lois telles qu’elles ont été édictées.
En ce qui a trait au traitement fiscal des artistes, les sommes qu’ils reçoivent sont généralement considérées comme du revenu tiré d’une entreprise, d’un bien ou d’un emploi, ou comme un autre revenu. Le traitement fiscal d’une somme qu’un artiste reçoit dépend de la nature de cette somme, des circonstances selon lesquelles elle a été reçue, et de la question à savoir si l’artiste est un employé ou un travailleur indépendant.
Plusieurs facteurs doivent être pris en considération pour établir si un particulier est un employé ou un travailleur indépendant. En gros, il s'agit de déterminer si le contrat conclu entre les parties consiste en un contrat de louage de services entre un employeur et un employé, ou en un contrat de prestation de services qui prévoit l’engagement d’un travailleur indépendant.
Un contrat de louage de services existe généralement si la personne pour laquelle les services sont fournis a le droit de contrôler la quantité, la nature et la gestion du travail à effectuer, ainsi que la façon de l'exécuter. Il y a contrat de prestation de services si une personne est engagée afin de réaliser un objectif précis et qu’on lui donne l’entière liberté pour obtenir les résultats recherchés.
S'il est déterminé que l'artiste est un employé, les sommes qu'il reçoit sont généralement traitées comme un revenu d'emploi. Les artistes qui sont des employés ne peuvent déduire de leur revenu d’emploi que certaines dépenses, dont les frais de déplacement, les frais afférents à un véhicule à moteur et les dépenses relatives à des instruments de musique.
Lorsqu'un artiste est considéré comme un travailleur indépendant, il est généralement considéré comme exploitant une entreprise. Un artiste qui reçoit de l’aide financière dans ce cadre‑là doit inclure ce montant dans le calcul de son revenu d’entreprise. En général, les dépenses engagées pour gagner un revenu d'entreprise sont déductibles, à condition qu'elles soient raisonnables, qu'elles ne soient pas des frais personnels ou de subsistance, qu'elles ne soient pas liées au capital et qu'elles ne soient pas faites dans le but de gagner ou de produire un revenu exonéré d'impôt. Les dépenses déductibles comprennent, par exemple, les commissions versées à un imprésario.
Les subventions pour la production d'œuvres d'art qui ne sont ni un revenu d'entreprise ni un revenu d'emploi sont incluses dans le revenu de l'artiste comme autres revenus. Toutefois, l'exemption pour subventions à la production artistique peut permettre à l'artiste d'exclure du revenu à inclure un montant égal aux dépenses raisonnables engagées pour satisfaire aux exigences de chacune des subventions, comme le coût des matériaux. L'exemption ne peut toutefois pas dépasser le montant des subventions. Dans les cas où l'exemption serait inférieure au montant des subventions, l'artiste peut avoir le droit de réduire le montant des subventions inclus dans le revenu d'un montant additionnel ne dépassant pas 500 $.
Grâce à son service d'agents de liaison, l'ARC offre gratuitement du soutien et des conseils de façon virtuelle, par vidéoconférence ou par téléphone, aux petites entreprises et aux travailleurs indépendants. Pour s'aligner sur l'approche « les gens d'abord » de l'ARC, le service d'agents de liaison aide les propriétaires de petites entreprises et les travailleurs indépendants à comprendre leurs obligations fiscales et à éviter les erreurs courantes qui pourraient finir par leur coûter du temps et de l'argent.
Au cours des deux dernières années, durant la période de production des déclarations, les agents de liaison ont offert des séances d’information aux membres du Front des artistes canadiens. L'information fournie était adaptée aux artistes et aux écrivains, et traitait, entre autres, des dépenses déductibles, de la façon pour un travailleur indépendant de déclarer son revenu correctement, des programmes de prestations liées à la COVID‑19 et des services en ligne de l’ARC, ainsi que des renseignements clés sur la période de production des déclarations. Ces séances ont été bien accueillies et l’ARC entend bien les répéter dans le futur.
Sur ce, je serai heureux de répondre à toute question que le Comité pourrait encore avoir sur le traitement fiscal réservé aux artistes.
Bienvenue aux deux témoins qui sont ici avec nous aujourd'hui.
Comme vous le savez, le sujet dont nous sommes saisis est le bien-être des artistes canadiens et, plus précisément, leur bien-être financier.
Je suis vraiment fière de la diversité qui existe au sein des artistes canadiens d'un bout à l'autre du pays. Il est certain qu'ils produisent d'excellentes œuvres et, comme d'autres témoins l'ont dit, nous en sommes très heureux. Ils ont joué un rôle clé dans...
:
Super. Merci beaucoup, monsieur le président. Mes excuses au Comité.
Plus tôt, j'ai souhaité la bienvenue aux témoins et les ai bien sûr remerciés pour leur bon travail.
Merci de nous accorder de votre temps aujourd'hui. Je tiens également à souligner le bon travail qu'ont fait les artistes, non seulement pour nous divertir durant la pandémie, mais aussi bien avant cela, de même que leur contribution aux arts et à la culture au Canada.
Il y a un grand éventail d'artistes, et je crois que ces voix méritent d'être célébrées partout au pays, peu importe leur plateforme ou forme d'expression artistique.
Ce comité a reçu divers artistes, mais je ne veux pas présumer que l'un de vous a écouté les discussions qui ont eu cours avec eux.
Darcy Michael est comédien et créateur de contenu numérique. Il a exposé des arguments fort intéressants qui ont suscité chez moi quelques interrogations.
Sachant, comme je l'ai dit, que vous n'avez probablement pas entendu tous les témoignages devant ce comité, j'aimerais vous citer un extrait du sien, puis poser une question à M. Beaulieu.
M. Michael a déclaré ce qui suit:
Certains d'entre vous ne le savent peut-être pas, mais pour une raison que personne n'a jamais pu m'expliquer, l'humour n'est pas une forme d'art reconnue au Canada. Comme l'humour n'est pas reconnu comme une forme d'art, contrairement aux musiciens, aux acteurs, aux danseurs et aux écrivains, les humoristes ne sont pas admissibles à des subventions au Canada, ce qui signifie que la pandémie n'a laissé aucune option pour nous aider, moi ou ma famille.
J'ai donc fait un virage. J'ai décidé d'adapter le concept de ma comédie de situation à des plateformes numériques, comme TikTok et Instagram, en partie pour me divertir pendant les premiers jours sombres de la pandémie, mais aussi parce que je voulais prouver que le concept de la série était bon — non pas dans l'espoir que les réseaux changent d'avis, mais parce que je suis amer et que je voulais leur prouver qu'ils avaient tort. C'est ce que j'ai fait.
Revenons au présent. Dix-huit mois après mon arrivée sur TikTok, j'ai trois millions d'abonnés sur toutes les plateformes de médias sociaux. Notre chaîne TikTok enregistre à elle seule une moyenne de 40 à 60 millions de visionnements par mois. Pour la première fois de ma carrière, un nombre incroyable de foyers canadiens auquel je n'aurais pu que rêver auparavant regarde ce que je fais. De plus, mon contenu m'appartient complètement. J'ai le contrôle total de la création et je garde tous mes profits.
Grâce à des plateformes comme YouTube, TikTok et Instagram, les artistes peuvent avoir le contrôle de leurs créations, de leur contenu et de leur entreprise. Bien sûr, les réseaux et les maisons de disques crient à l'injustice, car ils ne peuvent plus profiter de l'artiste affamé. Être un créateur de contenu en ligne a été en soi la meilleure décision que je n'ai jamais prise.
[...] Avant de devenir un créateur de contenu numérique, j'arrivais à joindre les deux bouts en tant qu'artiste, mais à peine.
Il poursuit:
Non seulement notre succès a été avantageux pour nous financièrement, mais en travaillant directement avec des marques canadiennes sur nos plateformes de médias sociaux, nous avons contribué, au cours des 12 derniers mois seulement, à réinjecter plus de 500 000 $ de ventes dans l'économie canadienne. Et c'est pour une seule chaîne sur TikTok.
Enfin, il ajoute:
Le projet de loi C‑11 aura une incidence directe sur ma capacité de gagner un revenu.
[...] Je pense qu'il faut apporter un amendement à cette partie du projet de loi. Je ne veux pas être visé par cette disposition. Je ne veux pas payer 30 % pour quelque chose dont je ne profite pas à titre de créateur numérique. Je pense que c'est un deuxième impôt. Je pense qu'au bout du compte, je paierai 80 % d'impôt sur mon revenu. Ce n'est pas juste.
Monsieur Beaulieu, vous vous êtes prononcé sur le régime fiscal canadien et la façon dont de plus grands avantages pourraient être accordés aux artistes. Je n'ai rien entendu de précis pour les artistes du secteur des arts numériques. Je crois qu'il faut en tenir compte, car ils font partie de la grande mosaïque de l'art canadien.
Nous avons entendu le témoignage de beaucoup d'artistes qui ont connu du succès en passant à ces plateformes de création. Ils paient déjà l'impôt sur le revenu des particuliers. Maintenant, ils craignent qu'on ajoute 30 % d'impôt à ce qu'ils paient déjà si le projet de loi est adopté, ce qui les place sous l'autorité du CRTC et les oblige à contribuer au fonds pour les arts.
La question que j'ai pour vous est la suivante: est‑ce que d'exiger aux créateurs de contenu numérique un impôt supplémentaire de 30 %, alors qu'ils paient déjà l'impôt sur le revenu, les aide à mieux gagner leur vie?
:
Je vous remercie de la précision, madame Thomas.
Effectivement, la somme que les artistes doivent remettre dans ce fonds représente une dépense qui est déductible d'impôt au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu, parce que cela leur permet de gagner ce revenu. C'est sûr que c'est un pourcentage quand même assez élevé de leurs revenus qui sert directement à soutenir ce fonds, mais, comme il s'agit d'une dépense déductible d'impôt, cela réduit leurs revenus imposables.
Je ne savais pas que ce pourcentage était aussi important. C'est une dépense inévitable, mais il s'agit quand même d'une dépense qui est déductible d'impôt et qui permet donc aux artistes de réduire leurs revenus imposables.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vais vous donner mon avis: des Canadiens sont membres des organisations qui sont agréées pour négocier au nom des artistes, comme l'Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de la radio, ou ACTRA, et l'Union des artistes. Les 30 % imposés aux créateurs de contenu numérique sont simplement une hypothèse de ma collègue, et je ne crois pas qu'elle soit fondée, du moins de ce que je comprends du libellé du projet de loi.
Maintenant, permettez-moi de passer au sujet de notre discussion.
[Français]
D'abord, je vous remercie énormément d'être parmi nous aujourd'hui, messieurs Beaulieu et Dimitrakopoulos.
[Traduction]
Ma question s'adresse à M. Dimitrakopoulos. Pourriez-vous me parler des déductions fiscales fédérales offertes aux artistes et peut-être m'en dresser la liste?
:
Merci, monsieur le président.
Messieurs Dimitrakopoulos et Beaulieu, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui pour nous éclairer.
Monsieur Beaulieu, au début de votre allocution d'ouverture, vous avez dit que le statut de l'artiste était remis en doute par l'ARC, et cela m'a un peu renversé. Par la suite, M. Dimitrakopoulos a précisé que les artistes étaient considérés comme des petites entreprises aux yeux de l'impôt fédéral.
Par déduction, j'en comprends que l'Agence du revenu du Canada n'est pas particulièrement sensible aux artistes. Est-ce exact?
:
Je m'excuse de vous interrompre, mais deux questions me viennent en tête.
D'abord, vous avez beaucoup parlé de l'étalement du revenu. Je pense que l'achat d'une rente d'étalement est une mesure qui rend grandement service aux artistes québécois. Les représentants de l'ACTRA que notre comité a reçus récemment considéraient que l'étalement du revenu sur une période de quatre ans était une option très intéressante. Il s'agit d'une mesure qui était en vigueur jusqu'en 1989 pour les artistes.
Est-ce que c'est une bonne idée à considérer, plutôt que la rente d'étalement?
Si on mettait en place cette mesure au fédéral et qu'on maintenait la rente d'étalement au Québec dans sa forme actuelle, est-ce que ce serait compatible, du point de vue d'un comptable comme vous?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leurs témoignages d'aujourd'hui. Nous espérons qu'ils sont sains et saufs malgré cette sixième vague de la pandémie qui frappe présentement la partie est du Canada.
[Traduction]
J'aimerais commencer par vous, monsieur Dimitrakopoulos. Merci pour votre déclaration liminaire.
Pourriez-vous fournir au Comité, soit maintenant ou plus tard, la valeur totale des subventions déclarées par les artistes et la valeur totale des exemptions pour subventions accordées à tous les artistes pour le dernier exercice financier complet, soit 2020?
:
D'accord. Ce serait utile, cela aussi, tout comme les autres questions sont utiles pour notre rapport, puisque nous aurons ainsi une idée du fonctionnement actuel du régime fiscal.
Je vais maintenant aborder un sujet plus sensible, soit les activités d'observation. Comme vous le savez probablement, le NPD critique vertement le manque d'activités d'observation visant les ultrariches du pays. Le directeur parlementaire du budget évalue la perte annuelle due au refus des ultrariches de se conformer aux règles fiscales à 25 milliards de dollars, somme qui est plutôt placée dans des paradis fiscaux, par exemple.
Vous avez précisément parlé des activités d'observation visant les artistes. J'aimerais en savoir plus sur les moyens employés par l'ARC pour assurer la conformité des artistes, même si, bien franchement, beaucoup sont critiques du refus de l'ARC de pousser les ultrariches du pays à se conformer au même régime fiscal.
Pouvez-vous nous donner une idée de ce que cela signifie du point de vue de la conformité? Combien d'artistes font l'objet d'un audit? Quelles sanctions ont été imposées aux artistes depuis quelques années ou au cours de la dernière année d'imposition?
:
Je n'ai pas les données quant au nombre d'audits menés et à leur valeur. Ce que je peux vous dire, c'est que nous essayons, en tant qu'administrateur, de mener nos activités d'observation de sorte à veiller à ce que tout le monde, y compris les artistes, respecte les lois telles qu'adoptées par le Parlement.
En tant qu'administrateur, nous essayons d'aider les artistes. Par exemple, ces deux dernières années, pendant la période de production des déclarations de revenus, nous avons offert un service d'agents de liaison qui fournissent gratuitement du soutien et de l'encadrement, soit par visioconférence, par téléphone ou par webinaire, aux petites entreprises et aux travailleurs autonomes, y compris les artistes, afin de les aider à comprendre leurs obligations fiscales et les aider à ne pas commettre d'erreurs qui pourraient être coûteuses, que ce soit en temps ou en argent.
Au cours de ces deux années, pendant la période de production des déclarations de revenus, les agents de liaison ont donné des séminaires aux membres du Front des artistes canadiens. Les renseignements visaient expressément les artistes et les écrivains et traitaient entre autres des dépenses déductibles, de la façon de bien déclarer ses revenus quand on est travailleur autonome, des programmes de prestations liées à la COVID‑19, des services en ligne de l'ARC et des points clés dans la production des déclarations de revenus.
:
Merci, monsieur le président.
J'ai une question pour l'ARC, car notre bureau est inondé chaque année à la période de production des déclarations de revenus. Du point de vue de l'interprétation, certains représentants de l'ARC, quand vous discutez avec eux, ont une interprétation différente des autres. Je sais que vous faites des webinaires et ainsi de suite, mais est‑ce un problème quand vous parlez d'un secteur spécialisé tel que celui des artistes? M. Beaulieu est là et semble être bien au fait de la réalité du secteur artistique, mais je peux vous dire que beaucoup d'autres n'en ont pas cette compréhension et, donc, sur le plan des déductions, tout est fondé sur l'interprétation.
Monsieur Dimitrakopoulos, j'aimerais que vous répondiez à cela, si vous le voulez bien, pour le Comité.
:
Je vous remercie de la question.
Le domaine artistique est méconnu de la plupart des comptables. En effet, notre clientèle se compose habituellement de grandes et de moyennes entreprises, qui ont des besoins complètement différents de ceux des artistes professionnels.
Les revenus des artistes professionnels sont particuliers. Comme l'a soulevé M. Dimitrakopoulos, de l'ARC, il existe un folio qui explique les différentes déductions pouvant s'appliquer aux artistes. C'est un document très important. Je dirige d'ailleurs les agents de liaison de l'ARC vers celui-ci lorsqu'ils m'appellent pour me poser des questions sur les comptes de mes clients. Il y a une méconnaissance quand même assez importante de la réalité des artistes et des déductions d'impôt auxquelles ils ont droit.
J'ai la chance de donner des formations dans différents centres d'artistes partout au Québec afin d'aider les artistes à mieux connaître les déductions qui s'appliquent de manière très ciblée à leur domaine.
Il y a donc une méconnaissance quand même assez importante. C'est sûr que de mettre une petite brochure...
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de s'être joints à nous. Je vous suis reconnaissant de votre participation à la séance et de vos compétences dans ce domaine.
Monsieur Dimitrakopoulos, je vais peut-être commencer par vous interroger. Nous avons entendu dire aujourd'hui et dans le passé qu'il est courant pour les artistes de passer des années à travailler sur des projets et de n'être payés qu'une fois l'œuvre publiée. Nous en avons parlé aujourd'hui. Étant donné que les artistes et les interprètes voient leurs activités fluctuer d'une année à l'autre, ils ont droit de reporter les dépenses admissibles, ce qui leur permet de déduire plus tard les frais de déplacement et de promotion afin de réduire l'impôt qu'ils doivent payer.
J'aimerais savoir si l'on peut faire davantage pour les aider. Le fardeau fiscal reste plus lourd pour les personnes dont les revenus sont irréguliers et fluctuent d'une année sur l'autre que pour les personnes dont les revenus sont plus stables.
Pouvez-vous dire au Comité si cette idée d'étalement du revenu est une mesure sur laquelle vous avez fait des recherches?
:
Merci, monsieur le président.
Nous achevons aujourd'hui cette étude sur la Loi sur le statut de l'artiste du gouvernement fédéral.
Depuis des décennies, les artistes et le milieu culturel exercent des pressions pour améliorer la condition des artistes.
En 1971, le fédéral a rendu public le rapport Disney, le premier portrait complet des difficultés économiques vécues par les artistes canadiens. Il n'y a pas eu de suite.
Au début des années 1980, on a créé le Comité d'étude de la politique culturelle fédérale, soit le comité Applebaum-Hébert. Ce comité devait examiner le statut de l'artiste, mais aussi effectuer un examen complet des institutions et des politiques culturelles du Canada. Dans leur rapport, présenté en 1982, les commissaires ont noté que, malgré les pressions de la part de la communauté artistique et la contribution extraordinaire des artistes à la vie canadienne, les conditions de vie des artistes n'avaient pratiquement pas changé.
Un autre groupe de travail a été créé un peu plus tard et, en 1986, a rendu public le résultat de ses travaux, dans le rapport Siren‑Gélinas. On parle ici de Paul Siren et de Gratien Gélinas. M. Gélinas est une légende au Québec. Le rapport proposait plusieurs modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu et proposait d'offrir une meilleure sécurité financière aux artistes, notamment par l'étalement du revenu, dont M. Beaulieu nous a parlé aujourd'hui.
En 1989, le Comité permanent des communications et de la culture créait le Sous-comité sur le statut de l'artiste et lui donnait le mandat de passer en revue les nombreux rapports précédents sur les questions relatives au statut de l'artiste. En 1990, le rapport a été déposé. Par la suite, le fédéral s'est engagé à adopter une loi sur le statut de l'artiste. Il y avait eu une panoplie de recommandations auxquelles le gouvernement s'était engagé à donner suite. Finalement, en 1992, on a vu naître la Loi sur le statut de l'artiste, une loi qui n'a même pas assez de mordant pour manger une soupe.
Bref, notre comité termine cette étude aujourd'hui et, bien franchement, cela m'inquiète un peu de voir que nous allons encore proposer au gouvernement des recommandations qui ne verront peut-être pas le jour ou qui seront appliquées à la pièce, sans mordant.
Je veux terminer en citant le rapport Applebaum-Hébert de 1982: « Beaucoup, sinon la plupart de ces professionnels, peuvent, en raison de leur revenu, être considérés comme des travailleurs pauvres hautement spécialisés. »
Si on ne fait rien, cela va rester ainsi. Nos artistes méritent mieux.
Merci.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Nous avons entrepris cette étude justement pour faire avancer la situation des artistes au pays. Au cours de nos séances, nous avons vu que nos artistes ne recevaient pas une aide suffisante pour changer leur situation. D'autres pays sont beaucoup plus avancés que le Canada dans ce dossier.
[Traduction]
Monsieur le président, il est tout à fait vrai qu'après cette étude, après que de nombreux témoins nous ont dit à quel point il est difficile de nos jours d'être un artiste au Canada et après que de nombreuses institutions ont également admis à quel point la vie des artistes est difficile, le gouvernement doit prendre la situation au sérieux et commencer à apporter les changements que d'autres pays ont apportés, afin de fournir une base solide aux artistes canadiens, étant donné que cela revêt une grande importance pour l'avenir culturel de notre pays. J'espère vraiment que nous observerons cette approche différente, ce changement dans la façon dont le gouvernement envisage le soutien de nos artistes. Il est absolument fondamental que cela se produise.
[Français]
Maintenant, je vais prendre quelques secondes pour poser des questions à M. Beaulieu.
Nous avons entendu beaucoup de choses de l'Agence du revenu du Canada concernant l'appui donné aux artistes. Selon vous, le cadre en place à l'ARC est-il suffisant pour appuyer notre milieu artistique?