Passer au contenu

INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie et de la technologie


NUMÉRO 117 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 10 avril 2024

[Enregistrement électronique]

(1640)

[Français]

     Bon après-midi à tous et à toutes.
    Je déclare la réunion ouverte.
    Je vous souhaite la bienvenue à la 117e réunion du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes.
     La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément au Règlement. De plus, conformément à l'ordre de renvoi du lundi 24 avril 2023, le Comité reprend l'étude du projet de loi C‑27, Loi édictant la Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs, la Loi sur le Tribunal de la protection des renseignements personnels et des données et la Loi sur l'intelligence artificielle et les données et apportant des modifications corrélatives et connexes à d'autres lois.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins d'aujourd'hui et les remercier de leur présence.
    Du ministère de l'Industrie, nous recevons M. Mark Schaan, sous-ministre adjoint principal, Secteur des stratégies et politiques d'innovation; M. Samir Chhabra, directeur général, Direction générale de la politique d'encadrement du marché; et Mme Runa Angus, directrice principale, Secteur des stratégies et politiques d'innovation. Je vous remercie tous les trois de vous joindre à nous de nouveau.
    Si ma mémoire est bonne, à la fin de la dernière réunion, c'est M. Turnbull qui avait la parole. Sauf erreur de ma part, il s'apprêtait à proposer un sous-amendement.
    Monsieur Turnbull, la parole est à vous.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Je suis heureux d'être de retour, chers collègues.
    Je remercie les fonctionnaires de leur présence. Je sais que vous passerez du temps avec nous au cours des prochains mois. Nous avons hâte de travailler avec vous et d'apprendre à mieux vous connaître.
    J'avais posé de nombreuses questions aux fonctionnaires pour paver la voie à la présentation d'un sous-amendement qui, du moins à notre avis, constitue un compromis sur le libellé et apporte plus de clarté. Il s'agit de supprimer certains termes, en nous fondant sur certains arguments qui ont été présentés la dernière fois. J'espère que ces précisions ont été utiles aux membres du Comité.
    Ce sous-amendement a été rédigé par mon collègue Iqwinder, qui est ici. Je le présente aujourd'hui parce qu'il était absent la dernière fois et que j'avais l'intention de le faire à ce moment‑là. Je tiens à remercier mon collègue, M. Gaheer, de son travail dans ce dossier.
    Le sous-amendement précise que la motion CPC‑1, proposant la modification de l'article 2 du projet de loi C‑27 par adjonction, après la ligne 7, à la page 3, d'un préambule, soit modifiée:
a) par substitution, à « que le Parlement reconnaît l'importance des principes de protection de la vie privée et des données qui sont exprimés dans divers instruments internationaux; » de ce qui suit:
« que le Parlement reconnaît l'importance de la protection de la vie privée et des données; »
b) par substitution, à « que le traitement des renseignements personnels et des données devrait se faire dans le respect de la vie privée des mineurs et au mieux de leurs intérêts; » de ce qui suit:
« que les mineurs prennent activement part à l'économie axée sur le numérique et les données et que la protection de leurs renseignements personnels mérite d'être renforcée étant donné que la capacité à comprendre comment les organisations utilisent ces renseignements et les implications potentielles à long terme de cette utilisation varie d'un mineur à l'autre; »
c) par suppression de ce qui suit:
« que la conception, l'élaboration et le déploiement de systèmes d'intelligence artificielle de part et d'autre des frontières provinciales et internationales devraient se faire en cohérence avec les normes nationales et internationales pour protéger les individus des préjudices potentiels; »
d) par substitution, à « que le Parlement reconnaît que les systèmes d'intelligence artificielle et autres technologies émergen tes devraient maintenir les normes et les valeurs canadiennes conformes aux principes du droit international en matière de droits de la personne; », de ce qui suit:
« que le Parlement reconnaît que les technologies émergentes devraient maintenir les normes et les valeurs canadiennes conformes aux principes du droit international en matière de droits de la personne; »
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Turnbull.
    Je crois que mes collègues ont tous une copie écrite du sous-amendement, numéro de référence 12991258, de M. Turnbull, proposé par M. Gaheer.
    Nous allons maintenant entamer le débat sur le sous-amendement.
    Monsieur Vis, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les fonctionnaires d'être ici aujourd'hui.
    Je vais commencer par mes notes. À la dernière réunion, j'ai présenté la motion conservatrice CPC‑1, qui visait à modifier le préambule pour inclure « le droit fondamental à la vie privée » et à préciser dans le libellé que « le traitement des renseignements personnels et des données devrait se faire dans le respect de la vie privée des mineurs et au mieux de leurs intérêts ».
    Ce sous-amendement supprime clairement l'article sur les intérêts des mineurs. Je souligne de bonne foi que, plus tard dans le processus d'amendement, le droit fondamental à la vie privée est reconnu à l'unanimité. Ce qui me préoccupe vraiment, c'est la suppression de la deuxième phrase, soit « dans le respect de la vie privée des mineurs et au mieux de leurs intérêts ».
    J'ai proposé cet amendement parce que c'était l'une des principales recommandations du Commissariat à la protection de la vie privée. Dans son mémoire, le Commissariat à la protection de la vie privée a recommandé, en plus d'inclure le « droit fondamental à la vie privée », qui est reconnu à l'unanimité au Comité selon moi, ce qui suit:
Le préambule devrait également refléter l'importance de protéger les enfants et les mineurs. Des États partout dans le monde ont reconnu que les enfants et les mineurs peuvent être affectés par les technologies différemment des adultes, qu'ils sont plus à risque d'être touchés par des enjeux de vie privée et qu'ils doivent donc bénéficier de mesures de protection spéciales.
    Le Commissariat à la protection de la vie privée a également ajouté:
Mettre le préambule à jour d'une telle manière encouragerait les organisations à intégrer la protection des renseignements personnels des enfants dans leurs produits et services, et ce, dès la conception. Puisque les lois canadiennes régissant la protection des renseignements personnels ont été conçues pour être neutres sur le plan technologique, le nouveau préambule veillerait à ce que l'intérêt supérieur de l'enfant soit considéré dans la conception de technologies nouvelles ou émergentes et dans le contexte d'utilisations futures des données.
    Avant de poursuivre comme suit:
[...] ajouter le libellé proposé à la disposition qui énonce l'intention de la loi garantirait que l'intérêt supérieur des enfants et des mineurs est la priorité et que celui‑ci est pris en compte de façon systématique dans tous les [projets de loi] connexes.
    Je crois que la loi devrait reconnaître les droits de l'enfant et le droit d'être un enfant. Compte tenu de la résistance du gouvernement à l'égard de ce libellé — et de certains des commentaires que vous avez faits, Monsieur Schaan, à la dernière réunion de notre comité — j'ai organisé une réunion avec le commissaire à la protection de la vie privée hier pour lui demander de souligner davantage l'importance d'inclure ce libellé dans le projet de loi C‑27. Je souligne que M. Masse s'est joint à moi à cette réunion. Dans le cadre de cette importante réunion, le commissaire a expliqué pourquoi il est essentiel de conserver l'expression « au mieux [des] intérêts [des mineurs] » dans le préambule.
    Monsieur Schaan, à la dernière réunion du Comité, nous avons entendu dire que l'expression « au mieux [des] intérêts [des mineurs] » était un concept subjectif. Après avoir parlé avec les grands experts dans ce domaine, je dois dire que je ne suis pas d'accord avec votre interprétation et la façon dont vous avez formulé cette expression.
    Pouvez-vous nous fournir l'avis juridique qui vous a amené à faire cette déclaration au nom du Ministère à la réunion?
(1645)
    Le processus de rédaction des amendements tient compte de considérations politiques et juridiques. Notre recommandation selon laquelle l'expression « les intérêts » pourrait être moins interprétable, en particulier, que les critères de capacité que nous avons inclus dans l'amendement du gouvernement constituent un amalgame de ces considérations. Je ne suis pas en mesure de vous fournir un avis juridique.
    Dans ma discussion d'hier avec le commissaire à la protection de la vie privée, il a parlé de quelques cas qui existent au Canada et qui, selon lui, concernent l'intérêt supérieur de l'enfant. En fait, il m'a donné quelques exemples où l'intérêt supérieur de l'enfant était inclus.
    Le premier exemple est l'affaire K.M.N. c. S.Z.M., 2024 BCCA 70. La Cour d'appel de la Colombie-Britannique a accueilli un appel interjeté par une mère parce que le juge au procès n'a pas effectué l'analyse qui s'imposait des allégations de violence familiale par le père. Dans cette affaire, la Cour a reconnu que l'intérêt supérieur de l'enfant est d'une importance primordiale en droit de la famille. Ce nouveau jugement a précisé qu'il ne suffit pas de limiter l'analyse de l'intérêt supérieur de l'enfant « à la preuve de violence dirigée spécifiquement vers l'enfant ».
    Nous pouvons également nous pencher sur l'affaire Kanthasamy c. Canada, entendue par la Cour suprême du Canada en 2015. Dans cette affaire, la Cour suprême du Canada a examiné l'intérêt supérieur de l'enfant et a rendu une décision dans le contexte d'une demande de résidence permanente pour des motifs d'ordre humanitaire. Elle a conclu que les décideurs, en l'occurrence le ministère de l'Immigration, doivent déterminer, définir et examiner l'intérêt supérieur de l'enfant et en tenir compte à la lumière des autres facteurs pertinents.
    À mon avis, l'intérêt supérieur de l'enfant ne constitue pas un concept subjectif. Il en est question dans de nombreuses lois provinciales et en droit de la famille au Manitoba, en Colombie-Britannique, en Alberta, en Nouvelle-Écosse, en Ontario, dans les Territoires du Nord-Ouest, à l'Île‑du‑Prince-Édouard, à Terre-Neuve‑et‑Labrador et au Nunavut.
    Un député: Au Québec...
    M. Brad Vis: J'y arrive. Pourquoi diriez-vous qu'il s'agit d'un concept subjectif alors que c'est un terme clairement défini qui est déjà utilisé dans le système juridique canadien?
(1650)
    Je vous remercie de tous ces exemples. Je tiens à souligner qu'ils relèvent tous du droit de la famille. Ce qui est en cause ici, c'est le concept de l'intérêt supérieur de l'enfant dans un contexte commercial, étant donné que nous parlons de l'application commerciale des renseignements personnels dans une transaction entre un consommateur et une entreprise. Ces concepts du droit de la famille sont bien compris dans le contexte de la garde des enfants et dans divers autres contextes du droit de la famille, mais ils ne sont pas établis par la jurisprudence dans un contexte de droit commercial.
    Je signale également que l'intérêt supérieur de l'enfant est bien expliqué dans un document de l'Association du Barreau canadien.
    Le premier point soulevé par l'Association du Barreau canadien — et je ne crois pas qu'il relève seulement du droit de la famille —, c'est que l'intérêt supérieur de l'enfant constitue un « droit de fond » et qu'il s'agit « d'une considération primordiale dans les instances concernant l'enfant en raison de sa dépendance, de son degré de maturité, de son statut juridique et, souvent, de l'impossibilité de faire entendre sa voix [dans la société] ».
    Deuxièmement, l'Association du Barreau canadien précise qu'en ce qui concerne l'intérêt supérieur de l'enfant, il s'agit en fait d'un « principe interprétatif », et elle ajoute que « si une disposition juridique se prête à plusieurs interprétations, on doit choisir celle qui sert le plus efficacement l'intérêt supérieur de l'enfant ».
    Troisièmement, l'Association du Barreau canadien souligne que l'intérêt supérieur de l'enfant renvoie à une « règle de procédure », qui « s'applique à la représentation juridique, à la célérité des décisions, aux motifs des décisions, à la pondération des divers facteurs et à la prise en considération de l'opinion de l'enfant ».
    Quatrièmement, l'intérêt supérieur de l'enfant, selon l'Association du Barreau canadien, est « un droit de fond ainsi qu'un principe directeur qui s'étend à la Convention relative aux droits de l'enfant, qui vise un développement holistique de l'enfant et qui nécessite l'adoption d'une approche fondée sur les droits favorisant la dignité humaine de l'enfant: le jugement des adultes ne doit pas primer l'obligation de respecter les droits de l'enfant. » Je ne crois pas que cela relève uniquement du droit de la famille.
    Je signale également que j'ai une analyse obtenue rapidement de la Bibliothèque du Parlement. Celle‑ci renferme un certain nombre d'exemples de situations où l'intérêt supérieur d'un enfant est en jeu, et ils vont au‑delà du droit de la famille. Ils concernent également la question du traitement des enfants autochtones, par exemple, dans la Loi concernant les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Il y a de nombreux autres cas dont je serais heureux de faire part au Comité. Cette analyse a été faite très rapidement, mais je l'ai obtenue de la Bibliothèque du Parlement. On m'a donné 50 exemples différents où l'intérêt supérieur de l'enfant est inscrit dans les lois canadiennes, aux échelons provincial et fédéral.
    Je vais limiter ma réponse à cela.
    Pour ce qui est de ma prochaine question, l'an dernier, les commissaires à la protection de la vie privée de l'ensemble du pays ont tous signé une résolution spéciale des commissaires à la protection de la vie privée et des ombudsmans fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la surveillance de la protection de la vie privée, qui met en particulier l'intérêt supérieur des jeunes à l'avant-plan en matière de protection de la vie privée et d'accès aux renseignements personnels.
    Monsieur Schaan, êtes-vous d'accord avec l'utilisation de l'expression « intérêt supérieur de l'enfant » dans la déclaration conjointe des commissaires à la protection de la vie privée, y compris le commissaire à la protection de la vie privée du Canada, qui a été publiée en octobre 2023?
(1655)

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je suis d'accord sur le sentiment exprimé par les commissaires à la protection de la vie privée. À mon avis, protéger l'intérêt des enfants est au cœur de notre projet de loi.

[Traduction]

    Dans cet esprit, je ne suis pas du tout en désaccord avec la volonté des commissaires à la protection de la vie privée de veiller à ce que les mesures de protection qui s'imposent soient mises en place pour les enfants.
     Le commissaire à la protection de la vie privée du Canada, de même que tous les commissaires à la protection de la vie privée des provinces et des territoires, ont vu la nécessité de placer l'intérêt supérieur des jeunes au premier plan de cette loi. Je ne comprends pas pourquoi le ministère ne veut pas inclure le libellé auquel ont adhéré nos commissaires à la protection de la vie privée des gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral et qu'ils ont demandé que nous ajoutions, comme en font foi les textes qu'ils ont acceptés à l'unanimité.
    Le document intitulé « Mettre l'intérêt supérieur des jeunes à l'avant-plan en matière de vie privée et d'accès aux renseignements personnels » vise à intégrer le droit des enfants à la vie privée « dès la conception ». On y mentionne aussi la nécessité d'« d'être transparent », ainsi que de « définir des paramètres qui protègent la vie privée par défaut » et de « désactiver le suivi et le profilage ». Il y est aussi question de « rejeter les pratiques trompeuses », de « limiter la communication de renseignements personnels à des tiers », de « permettre la suppression ou la désindexation et limiter la conservation », ainsi que de « faciliter l'accès aux renseignements personnels et à la rectification de ceux‑ci ».
    Vous pouvez tous consulter ce document sur le site Web du commissaire à la protection de la vie privée. Tous ces énoncés y figurent noir sur blanc.
    Je ne comprends donc pas pourquoi, d'après ce que j'ai entendu aujourd'hui, les fonctionnaires du ministère disent que c'est un concept subjectif.
    Par suite de mes interventions de la dernière réunion, Mme Denham m'a écrit. Elle a déjà été commissaire à la protection de la vie privée en Colombie-Britannique, de même que commissaire à l'information au Royaume-Uni. Il convient d'ailleurs de souligner que l'intérêt supérieur de l'enfant est enchâssé dans la loi britannique. Mme Denham m'a écrit ceci:
J'appuie toujours l'amendement des conservateurs dans le préambule. L'« intérêt supérieur de l'enfant » est un critère juridique, et non un concept, et il est utilisé pour déterminer ce qui protégerait le mieux la sécurité et le bien-être physiques, psychologiques et émotionnels d'un enfant. Cette notion est définie dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, dont le Canada est signataire. Toutefois, dans le droit provincial canadien...
    Et je suis d'accord avec cela.
... cela correspond généralement à des décisions sur des questions touchant les enfants qui sont liées à la tutelle, aux responsabilités parentales, au temps parental, au moment où l'enfant peut décider de quelque chose par lui-même, au niveau ou au stade de maturité, etc.
    Elle poursuit en disant:
Je pense qu'il est extrêmement important que le préambule fasse mention de la protection de la vie privée en tant que droit fondamental, ainsi que d'une protection spéciale des droits des enfants et des mineurs. Le projet de loi prévoit en outre que les données sur les enfants soient considérées comme étant de nature sensible, ce qui est très important et a de nombreuses répercussions.
    Le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a recommandé d'inclure l'intérêt supérieur de l'enfant dans le préambule, de même que dans le corps du projet de loi. L'ancienne commissaire à la protection de la vie privée de la Colombie-Britannique, qui figure également parmi les plus grands experts mondiaux de la question, recommande la même chose.
    Ces avis ne sont pas sans fondement. En fait, l'OCDE, dont le Canada est membre, a fait une recommandation concernant les enfants dans l'environnement numérique. Le Canada est signataire de ce document. J'en ai fait lecture aujourd'hui pendant la période des questions. Le document s'intitule « Recommandation de l'OCDE sur les enfants dans l'environnement numérique ». Il s'agit d'un document juridique de l'OCDE.
    Dans le document, on parle de l'intérêt supérieur de l'enfant. Il s'agit d'un document juridique international que le Canada a signé. L'OCDE, dont le Canada est membre, reconnaît que:
... l'environnement numérique fait partie intégrante du quotidien des enfants et de leurs interactions dans un certain nombre de situations, de l'enseignement structuré et non structuré, aux services de santé formels et informels, en passant par les loisirs, les divertissements, l'accès à la culture, la socialisation, l'expression personnelle et l'affirmation de l'identité par la création de contenus numériques, l'engagement sur des questions politiques, ou encore la consommation...
    Elle reconnaît aussi que:
... les capacités des enfants varient selon l'âge, la maturité et les circonstances, et que les mesures et les politiques relatives à leur protection dans l'environnement numérique devraient être adaptées à l'âge et aux divers stades de développement, et tenir compte du fait que l'accès des enfants aux technologies numériques peut différer selon le milieu socio-culturel et socio-économique dont ils sont issus et l'engagement dont font preuve leurs parents, leurs tuteurs et les personnes qui en assument la garde...
    Elle reconnaît également que « la protection de la vie privée et des données à caractère personnel des enfants est essentielle à leur bien-être et leur autonomie, ainsi qu'à la satisfaction de leurs besoins dans l'environnement numérique ».
(1700)
    Ce document fait aussi référence à l'observation de l'ONU concernant les droits de l'enfant en relation avec « l'environnement numérique », à savoir que: « L'intérêt supérieur de l'enfant est une notion dynamique qui nécessite une évaluation adaptée au contexte particulier ».
    Ce que le sous-amendement ne fait pas, c'est qu'il ne permet pas ce libellé très précis, qui est bien défini dans les documents dont le Canada est signataire, y compris ceux de l'OCDE et du G7, dont je vais parler, ainsi que dans les diverses lois des États américains, que je vais aussi aborder.
    Les Nations unies affirment que: « Les États parties doivent veiller à ce que, dans toutes les décisions concernant la fourniture, la réglementation, la conception, la gestion et l'utilisation de l'environnement numérique, l'intérêt supérieur de chaque enfant soit une considération primordiale ». Le Canada est signataire du document dans lequel cela est énoncé.
    Je vais revenir un instant à l'OCDE, plus particulièrement en ce qui a trait à ses lignes directrices à l'intention des prestataires de services numériques.
Les lignes directrices ont pour objet « d'aider les prestataires de services numériques, lorsqu'ils prennent des mesures susceptibles d'affecter directement ou indirectement les enfants dans l'environnement numérique, à déterminer comment protéger et respecter au mieux leurs droits, leur sécurité et leurs intérêts, en reconnaissant que les filles, les enfants appartenant aux minorités raciales, ethniques et religieuses, les enfants en situation de handicap, et ceux issus de groupes défavorisés pourraient nécessiter un soutien et une protection supplémentaires. »
    Ce document dit également qu'il faut: « Limiter la collecte de données à caractère personnel, ainsi que leur utilisation ou leur divulgation à des tiers aux seules fins de la prestation du service concerné, dans l'intérêt supérieur des enfants. » Il s'agit encore une fois d'un document dont le Canada est signataire.
    À l'échelle internationale, les autorités mondiales de protection des données ont adopté une résolution sur les droits numériques des enfants, résolution que le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a également signée. Cette résolution comprend notamment cet énoncé: « Affirmant que dans la mise en œuvre des politiques relatives à leurs droits dans l'environnement numérique, la prise en compte de l'évolution des capacités des enfants et de leur intérêt supérieur doit être une considération primordiale. »
    Je poursuis.
     En France, un partenaire commercial du Canada, la commission chargée de cette question déclare ce qui suit:
Afin d'accompagner les jeunes, les parents et les professionnels dans la mise en place d’un environnement numérique plus respectueux de l'intérêt de l’enfant, la CNIL publie 8 recommandations issues d’une réflexion menée avec l'ensemble des acteurs concernés.
    La France reconnaît l'intérêt supérieur de l'enfant dans ses lois. De plus, un message fondamental du commissaire aux données de l'Irlande est que l'intérêt supérieur de l'enfant doit toujours être une considération primordiale.
    Il y a aussi l'appel très important lancé par les ministres du G20 chargés du numérique aux acteurs de l'environnement numérique pour qu'ils défendent les intérêts supérieurs de l'enfant. Le Canada est membre du G20, qui affirme que l'intérêt supérieur de l'enfant dans l'environnement numérique doit être pris en compte dans l'élaboration de nos politiques et de nos règles juridiques.
    Voilà ce que j'avais à dire en réponse à ce que vous venez de mentionner.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Schaan ou à tout autre fonctionnaire du ministère. La Californie est-elle un partenaire commercial important pour le Canada?
    D'après les données statistiques sur les flux commerciaux, je pense que vous constaterez que c'est effectivement le cas.
    Quelle importance la Californie a‑t‑elle dans le développement de technologies qui pourraient s'appliquer dans le contexte du projet de loi C‑27?
    Je ne suis pas certain d'être en mesure de parler de toutes les façons dont la Californie participe au développement de technologies, mais il s'agit évidemment d'un centre technologique.
    D'après ce que je comprends — et je pense que vous serez probablement d'accord —, de nombreuses entreprises canadiennes du secteur de la technologie font affaire avec des entreprises de ce secteur en Californie. Est‑ce une hypothèse juste?
    Encore une fois, je dirais que la Californie est un centre d'activité lié au secteur de la technologie. Pour ce qui est des affaires qui mènent les entreprises canadiennes, je pense que les situations sont variées.
    En Californie, monsieur Schaan, il y a la California Age-Appropriate Design Code Act. Cette loi dit très clairement ceci:
En cas de conflit entre les intérêts commerciaux et l'intérêt supérieur des enfants, les entreprises devraient accorder la priorité à la vie privée, à la sécurité et au bien-être des enfants plutôt qu'aux intérêts commerciaux.
    C'est dans la loi qui régit la plus grande économie des États-Unis, où il se fait plus de développement technologique que n'importe où ailleurs dans le monde. Je ne comprends toujours pas pourquoi le ministère affirme que l'intérêt supérieur de l'enfant est un concept subjectif. Pouvez-vous répondre à cela?
(1705)
    J'espère avoir été clair. Nous avons officiellement dit que, dans un contexte commercial, l'intelligibilité de ce terme peut poser des défis au chapitre de la mise en œuvre par des entités morales en ce qui concerne la compréhension qu'elles en ont.
    Je pense que nous avons parlé du fait que des critères ont été établis pour que les tribunaux ou les parents comprennent qu'il s'agit de considérations importantes, mais qu'en ce qui concerne le contexte commercial, il y a peut-être de meilleures façons d'exprimer les mêmes préoccupations au sujet des protections plus rigoureuses requises.
    Nous n'avons entendu aucun témoin dire qu'il ne croyait pas que l'intérêt supérieur de l'enfant est un concept qui mérite d'être inclus dans ce projet de loi ou qu'il n'était pas d'accord avec cela.
    Tout au long du débat parlementaire initial et selon toutes les personnes que nous avons entendues jusqu'à présent, il est ressorti très clairement que dans cet environnement numérique changeant et dangereux, nous devons protéger les enfants. Lors de ma rencontre avec le commissaire à la protection de la vie privée hier, celui‑ci a dit très clairement que l'adoption de ce sous-amendement réduirait sa capacité de faire son travail et de faire respecter efficacement le droit à la vie privée des enfants.
    J'aimerais également mentionner que j'ai communiqué avec un autre témoin, M. Michael Beauvais. Concernant le sous-amendement proposé, lui et la professeure Leslie Regan Shade ont dit ceci:
Le principal problème du sous-amendement proposé est son caractère étroit. Les enfants sont des citoyens et ne sont pas seulement des acteurs économiques. Le fait de ne pas mentionner leur intérêt supérieur enlève un outil important dans la boîte à outils de l'organisme de réglementation pour élaborer des lignes directrices ou des règlements concernant les mineurs. Selon le sous-amendement proposé, la protection des renseignements personnels des mineurs mérite d'être renforcée uniquement parce que « la capacité à comprendre comment les organisations utilisent ces renseignements et les implications potentielles à long terme de cette utilisation varie d'un mineur à l'autre. » Cela pourrait mener à une interprétation selon laquelle les mineurs qui ont cette « capacité » méritent des protections moins robustes. Même les adultes instruits ont de la difficulté à comprendre comment les organisations utilisent leurs renseignements personnels, surtout dans le contexte des mégadonnées.
En outre, le fait de mettre l'accent sur les enfants en tant que participants à l'économie numérique...
    Et cela correspond au point de vue du ministère.
... est trop limité. Par exemple, le projet de loi s'appliquerait aux bandes autochtones régies par la Loi sur les Indiens, ce qui est actuellement le cas avec la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Bien que cela s'inscrive dans un contexte plus large, le libellé du projet de loi exacerbe la notion limitant les particuliers à leur rôle de consommateurs et d'acteurs économiques.
    Permettez-moi d'énoncer très clairement la position des conservateurs. Mon travail consiste à protéger les enfants. Je pense que mon objectif est le même que celui de tous les membres de ce comité. J'ai examiné de très près le sous-amendement, et je ne peux pas, de bonne foi, l'appuyer dans sa forme actuelle. Nous devons tenir compte de l'intérêt supérieur des enfants. Il y a trop d'éléments en jeu qui nous échappent.
    Je sais que cela fait un certain temps que je parle. Je tiens à souligner et à réaffirmer que, dans sa première recommandation, le Commissariat à la protection de la vie privée a demandé que le libellé du préambule fasse aussi partie du corps du projet de loi. Des préoccupations ont également été soulevées au sujet de la référence à l'intelligence artificielle.
    Lundi, nous avons eu des discussions sémantiques au sujet de l'annexe 1 et de l'annexe 2. Nous n'allons pas y revenir. Cependant, l'élaboration de ce projet de loi m'a rappelé mon cours de catéchisme, lorsque j'étais enfant, dans lequel on nous enseignait la notion de Sainte Trinité, trois personnes distinctes n'en faisant qu'une, le Père et le Fils se confondant. M. Sorbara a probablement suivi les mêmes cours que moi.
    Vous avez bien appris vos leçons, mais pas moi.
    Des députés: Oh, oh!
    On dirait la Sainte Trinité des projets de loi numériques. Trois en un seul et même. Les trois sont différents, pas identiques, mais tous font un.
    C'est déroutant. Je suis vraiment perplexe. Certains éléments des titres renvoient à des lois, mais il s'agit, en fait, de trois projets de loi — un en trois, trois en un, mais le même.
    M. Schaan a bien ri, lui aussi.
    Je vais m'arrêter ici pour l'instant. Je m'en tiendrai de bonne foi aux recommandations du commissaire à la protection de la vie privée et je me ferai un plaisir de poursuivre le débat sur le sous-amendement.
(1710)
    Merci beaucoup, monsieur Vis.
    C'est à vous, monsieur Perkins.
    Merci, monsieur le président.
    J'en suis bouche bée.
    Des députés: Oh, oh!
    D'après vous, comment se sentent les interprètes?
     Justement, puisqu'on parle d'eux, monsieur Vis, pourriez-vous parler un peu plus lentement, surtout lorsque vous lisez?
    J'essayais de faire pour le mieux pour tout le monde. J'avais plus de 10 pages de notes.
    Je comprends, mais c'est pour les interprètes.
    D'accord, monsieur le président.
    Monsieur Perkins, allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Permettez-moi de revenir en arrière pour prendre acte de la proposition du député Turnbull, qui cherche un moyen de regrouper les amendements CPC‑1 et NDP‑1.
    Je tiens à prendre acte de votre exposé préliminaire, où vous avez dit appuyer l'idée que le préambule soit inséré dans le projet de loi proprement dit. Je remercie le gouvernement d'avoir fait un effort, sincère je crois, pour essayer de présenter l'énoncé général.
    Au sujet du sous-amendement proposé, si du moins c'est le terme qui convient — il est au nom de M. Gaheer, mais je crois qu'il est désormais à votre nom, monsieur Turnbull —, notre discussion ne porte pas sur les parties c) et d), et c'est, à mon avis, ce qui révèle le problème que posent les renvois à la Loi sur l'intelligence artificielle et qui introduit un élément de l'amendement du député Masse. Je n'ai pas de problème avec cela et je pense que nous sommes tout à fait d'accord.
    Comme le député Vis vient de le souligner, nous sommes aux prises avec la perte de ce que nous considérons comme une notion très importante: l'intérêt supérieur de l'enfant. J'aimerais poser des questions sur quelques aspects de cet enjeu et m'assurer d'un autre.
    Monsieur Schaan ou madame Angus — je ne sais pas qui est le mieux placé pour répondre —, pour revenir un peu en arrière, l'idée est en l'occurrence que l'intérêt supérieur de l'enfant serait, comme cela a été dit dans le cours de notre discussion sur ces amendements la dernière fois, une notion subjective. Mais n'est‑ce pas une expression juridique? Pourriez-vous expliquer à tous ceux qui nous regardent — pour qu'ils comprennent pourquoi nous avons cette discussion — ce qu'est une notion subjective quand on examine une loi?
    Je dois préciser que la plupart des réponses que nous fournirons probablement aux questions au cours de l'étude de ce projet de loi portent sur l'interprétabilité de sa mise en œuvre. Autrement dit, nous désirons ardemment que ce projet de loi soit compris par toutes les entreprises qui utilisent des renseignements personnels dans le contexte canadien, afin qu'elles puissent être à la hauteur et soient en mesure de rendre des comptes.
    Nos réflexions et nos commentaires portaient sur le fait que, pour l'entreprise qui appliquera la loi — c'est‑à‑dire l'entité qui doit décider comment utiliser des renseignements personnels et qui ne bénéficie pas nécessairement des moyens d'un tribunal de la famille ou qui n'a pas siégé et présidé un nombre important de causes mettant en jeu leur gagne-pain — soit consciente de la consolidation de la protection des renseignements concernant les mineurs, qui est jugée essentielle.
    Autrement dit, l'interprétation de l'expression « intérêt supérieur de l'enfant », si elle était insérée dans ce projet de loi sans être définie, dépendrait de la façon dont les tribunaux et les entreprises comprendraient l'intention du législateur, parce qu'il n'y a pas suffisamment de jurisprudence pour définir cette notion au regard de la protection de la vie privée.
(1715)
    Ce serait probablement là que le Commissariat à la protection de la vie privée serait enclin à donner des directives. Il y faudrait effectivement davantage de directives, soit par l'entremise de la jurisprudence, soit par l'entremise du Commissariat à la protection de la vie privée, pour aider les entités commerciales à interpréter la notion d'intérêt supérieur de l'enfant dans le cadre de l'utilisation commerciale de renseignements personnels. Cela s'appliquerait, conformément au projet de loi, à toutes les entités commerciales qui utilisent des renseignements personnels au Canada. Elles devront toutes être en mesure de savoir quoi faire des renseignements de mineurs et de comprendre leurs obligations. C'est là notre cadre d'interprétation.
    Pour répondre à votre question, il faudra donc un peu étoffer tout cela et probablement puiser largement dans la jurisprudence citée par le député et, sinon, essayer de traduire cette notion en termes concrets dans les transactions des entités commerciales liées aux renseignements personnels de mineurs.
    Quelques avocats, quoique pas beaucoup, heureusement — désolé, monsieur Gaheer — ont comparu devant le Comité et abordé certaines de ces questions.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Rick Perkins: Des avocats sont venus nous parler du projet de loi en général. Par ailleurs, quand nous avons discuté des termes « intérêts légitimes » et de ces choses‑là, ils nous ont dit qu'il existait une jurisprudence à propos de cette définition, non pas au Canada, mais dans d'autres pays, et que les tribunaux s'en inspireraient également.
    Le député Vis a passé en revue les lois et probablement la jurisprudence d'autres pays concernant l'intérêt supérieur de l'enfant. Cela n'aide‑t‑il pas déjà à guider les conseillers juridiques d'entreprise, comme je l'ai fait dans le domaine de la commercialisation pour les grandes sociétés, pour savoir ce qu'il faut faire et ne pas faire, qu'il y ait ou non un service interne chargé de la protection de la vie privée au sein de l'entreprise? Il n'est pas nécessaire de s'en tenir à la jurisprudence canadienne, n'est‑ce pas, pour définir la notion de « l'intérêt supérieur de l'enfant »?
    Je pense que quelques directives du CPVP sur les pratiques exemplaires internationales permettraient à ces entreprises de savoir comment et quand interpréter leurs obligations. Je crois que la jurisprudence internationale pourrait être utile, mais il convient évidemment de toujours revenir à l'essentiel. Quel est leur régime juridique? Quel est leur système global? Dans quelle mesure est‑il semblable au nôtre ou pas? Quelles sont les obligations imposées par leurs lois?
     Les questions sont nombreuses, mais, si j'étais une entité à la recherche d'inspiration pour commencer à interpréter cette notion, ce serait certainement un bon point de départ.
    Je ne vais pas revenir sur les annexes 1 et 2, mais, si vous le permettez, je vais renvoyer à une autre disposition. Je veux parler en l'occurrence de l'alinéa 122(1)e) proposé, qui traite du pouvoir de réglementation du gouverneur en conseil. Cette disposition lui donne le pouvoir de prendre des règlements concernant le remplacement de la Loi sur la protection des renseignements personnels à l'égard de certains éléments très précis des alinéas 122(1)a), b), c) et d) du projet de loi. Mais ledit alinéa 122(1)e) dispose également de « prendre toute mesure d'ordre réglementaire prévue par la présente loi ».
    Si le préambule fait maintenant partie de l'introduction du projet de loi et qu'il a donc un certain poids législatif et juridique au regard de son interprétation, cela ne permet‑il pas au gouverneur d'utiliser la réglementation pour baliser, dès le départ, ce que le gouvernement considère comme l'intérêt supérieur de l'enfant?
    J'invoque rapidement le Règlement, monsieur le président.
    Peut‑on avoir le numéro de page?
    C'est la page 61.
    Merci.
    J'ai suffisamment communiqué avec le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation pour ne pas me permettre de fournir une réponse définitive à M. Perkins quant à savoir si le pouvoir de réglementation prévu au paragraphe 122(1) offrirait une marge de manœuvre suffisante pour prendre des règlements fondés sur le préambule, mais je répondrais probablement par la négative. En principe, une loi doit indiquer que les règlements doivent être prescrits; elle peut aussi utiliser des termes comme « entité visée » et s'appuyer sur le pouvoir conféré par l'alinéa e) pour désigner ces entités.
    Comme je l'ai dit, je ne serai pas catégorique, mais, si cette notion se trouve dans le préambule, c'est probablement à partir de là que le CPVP formulera des recommandations.
(1720)
    Dans un certain nombre des domaines que le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie supervise dans le cadre de ses responsabilités, celui‑ci a donné des orientations générales. Je pense notamment à la Loi sur Investissement Canada. Je pense aussi à l'intelligence artificielle et aux codes volontaires.
    Si cet amendement est adopté et prend force de loi avec l'expression « intérêt supérieur de l'enfant », et si vous et les avocats estimez qu'on ne peut pas utiliser l'article 122 pour la définir en vertu d'un règlement, ne pourriez-vous pas fournir des orientations générales semblables à l'intention des entreprises et de quiconque voudrait comprendre comment le gouvernement circonscrit cette définition? Je sais que cela n'aurait peut-être pas la même valeur juridique devant les tribunaux, mais cela donnerait une idée de l'orientation du projet de loi et de l'intention du législateur, ne croyez-vous pas?
    L'autorité chargée d'interpréter la Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs, ou LPVPC, sera la même que celle de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, ou LPRPDE. C'est le Commissariat à la protection de la vie privée. C'est lui qui est apte à interpréter la loi promulguée. Le ministre est habilité, en vertu de la LPVPC, à demander au commissaire de donner des directives et de s'occuper des questions liées à l'interprétation de la loi.
    Intéressant. Autrement dit, vous pouvez aussi donner des directives; ce n'est pas nécessairement réservé au gouvernement. C'est le commissaire à la protection de la vie privée.
    Cela m'amène au document dont a parlé le député Vis, diffusé les 4 et 5 octobre 2023 à l'occasion d'une conférence et signé par les commissaires à la protection de la vie privée fédéral et provinciaux. Il se trouve sur le site Web du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada.
    Je sais que beaucoup de gens nous regardent, parce que nous recevons des courriels, des textos et des appels téléphoniques après chaque réunion au sujet de ce que nous avons bien ou mal compris. Il semble y avoir beaucoup d'avocats parmi nos correspondants. Je salue tous les avocats qui nous regardent.
    Je vais commencer.
    L'introduction s'intitule « Contexte ». « Le Canada a ratifié la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant [...] en 1991. » Une longue adresse URL y est associée. Il s'agissait probablement du gouvernement Mulroney. Voici la suite:
La [Convention] affirme les droits de l'enfant, y compris le droit à la vie privée, et introduit le concept de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Ce concept signifie que le bien-être et les droits des jeunes soient des considérations primordiales dans les décisions et actions qui les concernent directement ou indirectement. Dans divers contextes, ce principe directeur peut s'appliquer et permettre d'évaluer et de concilier les intérêts des jeunes par rapport à d'autres.
En plus de 30 ans, la CNURDE a eu une influence considérable sur les droits des jeunes dans le monde entier, incluant le droit à la vie privée. De nombreuses juridictions ont ainsi reconnu que les jeunes peuvent être affectés par les technologies différemment des adultes, qu'ils sont plus exposés aux problèmes liés à la protection de la vie privée et qu'ils ont donc besoin de protections spéciales.
Parmi les instruments politiques et juridiques les plus importants qui se concentrent sur le droit à la vie privée des jeunes ou qui l'abordent, on retrouve les suivants.
    Il y a ensuite une liste. Je vous épargne les URL, mais voici les instruments cités:
L'Observation générale no 25 de l'ONU sur les droits de l'enfant dans l'environnement numérique, qui complète la CNURDE;
La recommandation de l'OCDE
    Je crois que mon collègue a parlé de l'Organisation de coopération et de développement économiques, dont le Canada est membre.
sur les enfants dans l'environnement numérique;
    Il y a un lien URL. Je continue:
Les lignes directrices de l'OCDE à l'intention des fournisseurs de services numériques;
Le Age Appropriate Design Code, ou Children's Code, du commissaire à l'information du Royaume-Uni;
La résolution des autorités de protection des données du monde entier sur les droits numériques des enfants;
Les recommandations de la Commission nationale de l'informatique et des libertés de France
     Excusez mon français. J'y travaille.
pour renforcer la protection des mineurs en ligne;
Les principes de la Commission de la protection des données d'Irlande pour une approche du traitement des données orientée sur l'enfant;
    Mon collègue M. Vis a parlé des instruments suivants:
La déclaration des ministres du numérique du G20 invitant les acteurs de l'environnement numérique à défendre l'intérêt supérieur de l'enfant;
Le California Age-Appropriate Design Code Act; et
Le Règlement sur les services numériques de l'Union européenne.
    Je lis la suite:
Ces initiatives et plusieurs autres reconnaissent les nombreuses occasions pour les jeunes dans l'environnement numérique, mais elles constituent également une réponse nécessaire aux préjudices bien connus auxquels sont exposés les jeunes, comme les préjudices en matière de santé mentale.
Ces initiatives sont prometteuses, mais les signataires estiment qu'il y a encore du travail à faire au Canada pour faire en sorte que les jeunes soient protégés de ces préjudices grâce à des mesures législatives faisant de leur intérêt supérieur une considération primordiale dans le développement de produits et services qui les concernent ou les affectent.
Par conséquent:
Les commissaires fédéral, provinciaux et territoriaux à la protection de la vie privée et les ombuds responsables de la protection de la vie privée du Canada demandent aux gouvernements de mettre de l'avant l'intérêt supérieur des jeunes en prenant des mesures immédiates, au besoin, en vue:
    Suit une énumération que voici:
de protéger les jeunes contre l'exploitation commerciale et contre l'utilisation de leurs renseignements personnels dans le but d'influencer leurs comportements de manière négative ou de leur causer préjudice;
de promouvoir le droit à la vie privée des jeunes;
de revoir et de modifier les lois pertinentes sur la protection des renseignements personnels, ou d'en adopter de nouvelles, afin qu'elles concordent avec les politiques et les instruments juridiques reconnus à l'échelle internationale, le tout afin d'assurer une protection adéquate du droit à la vie privée des jeunes;
(1725)
d'exiger des organisations du secteur privé qui recueillent, utilisent et communiquent les renseignements personnels des jeunes qu'elles:
mettent en œuvre des mesures de protection solides;
fassent preuve de transparence quant à leurs pratiques;
améliorent l'accès des jeunes à des recours efficaces.
Les signataires reconnaissent que les droits des jeunes liés à la protection de leurs renseignements personnels sont leurs propres droits. Toute limite imposée à leur exercice (par exemple vis‑à‑vis de leurs parents ou tuteurs, ou d'organismes publics) doit partir de ce principe, être précise et limitée aux particularités du contexte et respecter l'intérêt supérieur du jeune.
Les signataires reconnaissent aussi que ces droits s'appliquent tant dans l'environnement numérique qu'à l'extérieur de celui‑ci. Bien que cette résolution soit principalement axée sur l'environnement numérique, ses principes devraient être appliqués de manière large.
Les signataires soulignent que les renseignements personnels des jeunes sont particulièrement sensibles.
    Le projet de loi aborde cette question dans la définition.
Toute collecte, utilisation ou communication de ces renseignements devrait être faite en considération de ce fait.
Les signataires recommandent aux organisations des secteurs public et privé [...] d'adopter les pratiques suivantes, qui reflètent également des principes qui devraient guider les réformes législatives:
1. Intégrer la protection des renseignements personnels des jeunes et leur intérêt supérieur dès la conception
Les risques pour la vie privée numérique des jeunes devraient être ciblés et minimisés dès le début d'un projet. Les organisations devraient veiller à ce que la protection de la vie privée et l'intérêt supérieur des jeunes soient intégrés dans le produit ou le service dès la conception.
Les organisations devraient:
réaliser des évaluations des facteurs relatifs à la vie privée [...] pour les projets impliquant des renseignements concernant les jeunes ou pour examiner les effets potentiels précis de ces projets sur les jeunes;
adapter leur processus d'EFVP régulier pour réfléchir spécifiquement à la perspective et aux expériences des jeunes (comme individus, mais aussi en tant que groupe) avant de recueillir, d'utiliser ou de communiquer leurs renseignements;
    Je sais que les fonctionnaires connaissent très bien ce dossier, mais je ne pense pas que ce soit le cas de tous les gens qui nous regardent, alors passons à ce que les organismes devraient faire:
faire participer activement les jeunes, leurs parents ou tuteurs, les enseignants ou les défenseurs des enfants à ce processus d'évaluation;
réaliser une analyse intersectionnelle afin d'examiner les risques spécifiques pour la vie privée des groupes de jeunes particulièrement vulnérables (p. ex. les jeunes handicapés, des Premières Nations, 2ELGBTQI+).
    Cela comprend les personnes bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers, intersexuées et autres.
2. Être transparent
La transparence est nécessaire pour une prise de décision et un consentement éclairés.
Les organisations doivent:
fournir l'information sur la protection des renseignements personnels aux jeunes (et à leurs parents ou tuteurs, s'il y a lieu) d'une manière concise, évidente et claire, adaptée à la maturité du jeune concerné;
informer les jeunes de la personne à contacter s'ils ont des questions à propos de ces informations;
être transparentes quant aux risques pour la vie privée liés à l'utilisation de leur produit ou service. Il pourrait s'agir de diffuser de l'information à propos des efforts qu'elles déploient pour protéger les jeunes contre ces risques...
3. Définir des paramètres qui protègent la vie privée par défaut et désactiver le suivi et le profilage
    Et nous avons ensuite toute une liste de directives.
4. Rejeter les pratiques trompeuses
Les jeunes ne devraient pas être forcés ou incités à prendre des décisions concernant leur vie privée qui soient contraires à leurs intérêts.
Les organisations ne doivent pas:
intégrer à leurs produits et services des interfaces trompeuses ou des incitatifs comportementaux qui influencent négativement les décisions des jeunes en matière de vie privée ou les poussent à adopter des comportements préjudiciables;
encourager les jeunes à fournir plus de renseignements que nécessaire afin d'utiliser le produit ou le service ni à désactiver les paramètres de confidentialité qui les protègent.
Les organisations devraient:
concevoir des produits et des services visant à donner aux jeunes les moyens de faire des choix éclairés en matière de protection de la vie privée et de prendre des mesures vigoureuses afin de faire valoir leur droit à la vie privée et leur droit à la transparence.
5. Limiter la communication de renseignements personnels...
    Et nous avons ensuite d'autres directives pour les organisations.
6. Permettre la suppression ou la désindexation et limiter la conservation
7. Faciliter l'accès aux renseignements personnels et à la rectification de ceux‑ci
(1730)
Les jeunes ont le droit d'accéder à leurs renseignements personnels. Ce droit est fondamental pour garantir que les renseignements détenus sont exacts, à jour et conservés à des fins appropriées. Il permet aussi de tenir les organisations responsables.
Toute organisation a la responsabilité légale générale de fournir un accès rapide et complet aux renseignements personnels d'un jeune à la demande de celui‑ci, et dans la plupart des cas, à la demande de son parent ou tuteur. Il est reconnu que l'accès par un parent ou un tuteur à ces renseignements peut être limité par le droit à la vie privée du jeune, dans le respect de son intérêt supérieur et en fonction des particularités de chaque situation.
    Il décrit ensuite d'autres responsabilités pour les organismes, qu'il accompagne d'un certain nombre de notes de bas de page et de références. Les logos des différents commissaires à la protection de la vie privée y sont aussi affichés.
    Vous avez dit que vous vous attendiez à ce que le commissaire à la protection de la vie privée émette des directives, qu'il a le pouvoir de le faire en vertu de la loi et qu'il devrait probablement le faire. Toutefois, il l'a déjà fait. Ces directives me semblent assez précises. Son pouvoir lui permettrait d'en émettre de nouvelles une fois que le projet de loi sera adopté, je suppose, mais les directives actuelles sont déjà très précises.
     Je ne vois pas pourquoi un organisme au Canada ne comprendrait pas ces directives. Elles sont claires et très détaillées. Le commissaire à la protection de la vie privée pourrait peut-être ajouter des détails si la disposition sur l'intérêt supérieur de l'enfant était adoptée, mais comme mon collègue, le député Vis, l'a souligné, je n'y vois aucune subjectivité. Cette disposition ne me semble pas subjective. Elle semble très précise. Les spécialistes de la protection de la vie privée ont très bien défini ce terme. Nous avons donc du mal à accepter que le gouvernement veuille le supprimer au lieu de l'inscrire dans la loi. Il faut que les tribunaux puissent l'interpréter et, comme vous l'avez souligné, il faut que le commissaire à la protection de la vie privée puisse émettre des directives très précises s'il désire que ces notions soient définies avec plus de précision dans la loi.
    Si l'expression « intérêt supérieur de l'enfant » ne figure pas dans la loi, le commissaire à la protection de la vie privée ne pourra pas fournir une orientation juridique avec cette expression alors que, comme vous l'avez souligné, il a le pouvoir de faire, n'est‑ce pas?
(1735)
    Je pense que le commissaire à la protection de la vie privée voudra recommander des mesures de protection plus rigoureuses.
    Comment le commissaire à la protection de la vie privée pourra‑t‑il fixer des directives sur l'intérêt supérieur de l'enfant si cette expression ne figure pas dans la loi? On ne peut pas émettre des directives sur un concept qui ne figure pas dans la loi.
    Nous soulignons en fait que l'idée générale de mieux protéger les mineurs serait élucidée par les obligations prévues dans la LPVPC ainsi que par les directives aux organismes sur la capacité de les appliquer. L'expression « intérêt supérieur de l'enfant » ne servirait pas uniquement de cadre d'interprétation, mais elle indiquerait les bases sur lesquelles les organismes devraient agir — par exemple la divulgation de renseignements personnels ou l'utilisation précise de certains renseignements personnels.
    Le ministère ou le ministre a‑t‑il parlé au commissaire à la protection de la vie privée de ce changement proposé à notre amendement avant de déposer ce sous-amendement?
    Nous discutons continuellement avec le Commissariat à la protection de la vie privée de ce projet de loi et surtout des amendements que le gouvernement pourrait y apporter.
    Hier, lors de notre discussion sur le libellé de ce projet de loi, le commissaire a exprimé un point de vue différent de celui que vous venez de nous présenter. Il a souligné que ce libellé limite la capacité du commissaire à la protection de la vie privée d'établir des lignes directrices dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Le fait de ne pas ajouter cette expression au libellé de la loi limite sa capacité de fournir des conseils aux organismes à ce sujet.
    Je suppose que le ministère affirme qu'il n'est pas d'accord et que le libellé ne limite pas les actions du commissaire.
    Notre perspective se fonde sur les capacités qu'auront les organismes de renforcer la protection des mineurs. Je ne me prononce aucunement sur le fait que le présent libellé y réussirait ou non.
    J'avais presque terminé jusqu'à ce que vous disiez cela. Je suis désolé.
    De toute évidence, il ne s'agit pas d'un débat politique. C'est un concept très précis que certains d'entre nous qui font de la commercialisation essaient de... Notre interprétation des termes est différente de celle des avocats.
    Lorsque le ministère et ses nombreux avocats — je présume que le ministère de la Justice participe à l'examen de ces concepts — ont décidé de supprimer les mots « intérêt supérieur de l'enfant » pour les remplacer par un autre libellé, ils l'ont fait avec une intention précise et, de l'avis du Commissariat à la protection de la vie privée, cette intention était précisément d'en restreindre la portée.
    Si vous n'êtes pas d'accord avec moi, alors avec quelle intention exactement a‑t‑on supprimé l'expression « intérêt supérieur de l'enfant » pour la remplacer par un libellé qui, de l'avis d'autres avocats, en restreint la portée?
    L'objectif précis du sous-amendement était — en l'absence des directives actuelles et futures — de fournir une capacité d'interprétation aux acteurs commerciaux qui devront respecter cette loi dès sa promulgation. L'intention était de leur indiquer clairement comment la respecter en soulignant, comme nous l'avons fait, que l'inclusion de cette expression exigerait des directives supplémentaires.
    Par conséquent, comme les termes que le gouvernement propose ici ne sont pas suffisants pour donner une orientation, il faudra faire autre chose.
    Le libellé que nous avons choisi, « la protection de leurs renseignements personnels mérite d'être renforcée », est conforme aux obligations énoncées dans la LPVPC, notamment à la définition délicate de « renseignements » qui s'applique aux mineurs.
    Ce libellé ne reflète pas celui des nombreux documents que M. Vis et moi-même avons mentionnés et que le gouvernement du Canada a signés. Ces documents indiquent que nos cadres législatifs reflètent la terminologie qui a été négociée à l'échelle internationale, que ce soit par l'OCDE, par le G7 ou dans la convention des Nations unies, qui utilise l'expression « intérêt supérieur de l'enfant ».
(1740)
    Je pense que les déclarations internationales énoncent l'intention de mieux protéger les mineurs, et à notre avis, ce libellé est conforme à ces déclarations.
    Cette terminologie devrait alors figurer dans le projet de loi. S'il vaut la peine d'être signé par le Canada, alors pourquoi ne peut‑on pas l'inclure dans ce projet de loi?
    Je n'en sais rien.
    Très bien.
    Très bien.
    Merci, monsieur Perkins.
    M. Masse est le prochain sur ma liste.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d'abord, monsieur Schaan, étant un ancien vice-président du comité d'examen de la réglementation, j'ai compris votre blague, comme peut-être trois autres personnes ici. C'est l'un des comités les plus obscurs du Parlement.
    Je remercie le gouvernement d'avoir présenté cet amendement. Il s'efforce très évidemment de réagir aux amendements des conservateurs et des néo-démocrates, qui sont très semblables. Toutefois, je crains que ce libellé ne serve plutôt de compromis politique, ce qui risque, malheureusement, d'affaiblir les protections prévues dans la loi.
    Connaissez-vous la loi du Royaume-Uni? Je voudrais savoir si vous êtes au courant de la protection qu'elle prévoit pour les enfants.
    Si vous parlez du code de conception pour les enfants, alors oui.
    La Data Protection Act du Royaume-Uni contient un article très solide. Je ne le lirai pas ici. On y mentionne aussi la façon dont les enfants changent au fil du temps ainsi que d'autres anomalies.
    Diriez-vous que le libellé de l'amendement au projet de loi que nous avons devant nous, ou même ce que nous avons proposé auparavant, est plus fort ou plus faible que la protection que le Royaume-Uni assure aux enfants? Qu'en pensez-vous?
    Je pense que l'amendement dont nous sommes saisis est un préambule au projet de loi. Si votre question porte sur le projet de loi même et sur les obligations qu'il impose aux entités pour le traitement des renseignements personnels, nous dirions que le projet de loi proposé, avec les amendements qui pourraient y être apportés, assurerait une protection semblable aux enfants. On pourrait éventuellement y ajouter un code de conception que le commissaire à la protection de la vie privée pourrait certifier.
    Comment cela se compare-t-il à ce qu'on trouve au Royaume-Uni? Il a aussi là‑bas un code pour les enfants. Nous n'avons sans doute pas à copier servilement ce qui se fait au Royaume-Uni, mais je me demande si nous nous apprêtons à faire mieux que lui ou moins bien. Il a un système juridique et un régime parlementaire identiques à ceux du Canada. Il est donc possible de faire une comparaison convenable entre les deux pays. Les États-Unis n'ont pas les mêmes paramètres pour ces deux aspects.
    Comme je l'ai dit en substance, j'estime que, avec des amendements, la Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs offrira aux enfants une protection comparable à celle qui est assurée au Royaume-Uni.
    D'accord.
    À votre avis, quel serait l'inconvénient si nous ne retenions pas le sous-amendement et si les autres amendements étaient adoptés? Quel serait l'inconvénient pour les industries qui seraient alors visées par cette mesure? Quelle est l'importance d'un risque, en réalité? Nous avons déjà un problème dans notre monde avec les lois sur le travail des enfants. Nous avons aussi des problèmes liés à l'intelligence artificielle. Nous avons même un problème important dans nos civilisations concernant le traitement bienveillant des enfants, et ce, malgré les déclarations officielles. Le problème a surgi même aux États-Unis l'an dernier, car certaines des chaînes d'approvisionnement de grandes marques font appel au travail des enfants.
    Voici ce qui me préoccupe. À notre époque, pourquoi risquerions-nous...? D'après mes informations du moins, l'amendement à l'étude affaiblirait la protection des enfants. Pourquoi prendre un risque, compte tenu des avantages que cela donnerait?
    Nous avons présenté au Comité deux points, deux facteurs à prendre en considération. Premièrement, nous souhaitons que la mesure soit plus facile à interpréter et à appliquer dès que le projet de loi sera adopté. C'est ce que nous avions à dire de la partie b) du sous-amendement. Ensuite, à propos des parties c) et d), il faut veiller à ce que le préambule soit propre à la loi qu'il éclaire.
(1745)
    Vous voulez que ce soit clair pour les entreprises, mais je ne peux pas imaginer... Où se situe le grand risque pour elles? Y a‑t‑il un risque juridique pour les entreprises? Est‑ce un risque pour les investissements au Canada parce qu'elles ne comprendront pas et qu'ensuite, avec toutes leurs ressources, tous leurs avocats, tout leur argent et tout ce qu'elles ont à leur disposition, elles ne seront pas en mesure de savoir en quoi elles subiront un préjudice?
    Le député est au courant, mais dans l'économie canadienne, le projet de loi vise toutes les organisations du secteur privé qui transmettent, recueillent ou communiquent des renseignements personnels. Les PME représentent 99 % de l'économie canadienne. Elles seront elles aussi obligées de comprendre, d'interpréter et de respecter la loi.
    Il nous semble important que les dispositions soient faciles à interpréter et à appliquer pour toutes ces entités commerciales. S'il y a une ambiguïté ou de l'incertitude, elles risquent de prendre des mesures mal avisées ou erronées ou alors de ne rien faire, préférant ne pas offrir un service commercial parce que c'est tout bonnement trop risqué ou ambigu.
    Ce que vous faites valoir à propos des PME se défend. Ces difficultés se présentent aussi à propos d'autres politiques liées à la fiscalité. J'en prends note.
    Voici ma dernière question: si nous ne retenons pas cette disposition dans le projet de loi, quelle serait, selon vous, la meilleure solution? En modifiant... ou les amendements proposés qui découleraient de ce choix? Je veux dire sans que des modifications soient apportées.
    Je ne peux pas parler au nom du gouvernement. Si le sous-amendement est rejeté, nous devrions simplement faire valoir nos considérations au sujet de la facilité d'interprétation et aussi au sujet des deux autres parties du sous-amendement. Elles portent sur les problèmes qui risquent à notre avis d'apporter un libellé qui ne vaudrait pas également pour toutes les technologies ou qui s'appliquerait à des actes qui ne sont pas visés par le projet de loi.
    D'accord. Nous verrons en temps et lieu. Nous avons beaucoup de pain sur la planche dans l'immédiat.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur Masse.
    Les prochains intervenants sur ma liste sont M. Généreux, M. Turnbull et M. Garon.
    Monsieur le président, si vous me le permettez, je vais céder mon tour de parole à M. Garon, par souci d'équité, étant donné que nous avons pris pas mal de temps. Je veux m'assurer que nous pourrons tous faire un tour de table. Je prendrai ensuite la parole.
     J'apprécie votre générosité, monsieur Généreux, mais je dois suivre la liste établie. Si vous passez votre tour, je peux vous donner la parole après M. Garon. Cependant, M. Turnbull figure lui aussi sur la liste.
    Je pourrai intervenir après M. Turnbull. Il n'y a pas de problème.
    C'est parfait.
    Nous passons à M. Turnbull, qui sera suivi de M. Garon.
    Monsieur Turnbull, vous avez la parole.

[Traduction]

    Dans un esprit de coopération, je vais céder la parole à M. Garon si vous me réinscrivez sur la liste.

[Français]

    C'est le meilleur comité.
    Monsieur Garon, vous avez la parole.
    Monsieur le président, j'en arrive à penser que plusieurs personnes m'ont pris en pitié et qu'elles désirent que j'aie mes points de participation, alors je les remercie.
    J'essaie de comprendre une chose concernant l'intérêt supérieur de l'enfant. Au Québec, cela existe. On a mentionné la jurisprudence en matière de droit de la famille. Cela existe aussi dans le droit civil, chez nous. C'est très bien compris et très bien défini.
    Dois-je comprendre que, si on utilise les mots « intérêt supérieur de l'enfant » dans la loi, le fait que 10 provinces interprètent différemment cette notion fera partie des difficultés?
    Monsieur le président, je remercie le député de sa question.
     C'est l'un des aspects. À notre sens, la différence est la suivante. L'entité, l'organisme à qui revient la responsabilité d'interpréter la notion d'intérêt supérieur de l'enfant est une entreprise. Quels principes directeurs influenceront l'interprétation de ce concept dans une organisation commerciale en ce qui a trait à l'utilisation des données personnelles d'un enfant? C'est la raison pour laquelle nous avons soulevé ces aspects.
    Il y a un autre facteur. Si une organisation commerciale observe l'interprétation de sa province, il y aura peut-être des différences à cause des différences entre les lois provinciales.
(1750)
    Certaines lois fédérales sont interprétées différemment d'une province à l'autre. J'ai en tête, par exemple, la Loi sur les jeunes contrevenants, dont l'application au Québec tient compte du fait que les institutions provinciales prenant en compte la réhabilitation sont différentes. Ce n'est pas vraiment un problème.
    Je ne veux pas passer une heure à en parler, comme certains le font.
    Des voix: Ha! Ha!
    En passant, je veux remercier M. Généreux du fond du cœur de m'avoir cédé son tour de parole. Je veux m'assurer qu'il ne le regrette pas trop. Ha, ha!
    D'abord, le commissaire à la protection de la vie privée du Canada peut émettre des avis sur ce qu'il veut. Y a-t-il des restrictions à cet égard? Si on inclut la notion d'intérêt supérieur de l'enfant, le commissaire à la protection de la vie privée du Canada peut-il décider d'émettre un avis sur ce que cela signifie?
    C'est une question à laquelle on peut répondre par oui ou par non.
    À mon avis, oui.
    Par le passé, le commissaire a utilisé sa capacité d'interprétation de manière assez large en ce qui concerne la Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs. Un ancien commissaire a utilisé son pouvoir d'interprétation de manière plus large.
    Je comprends, mais ce pouvoir d'interprétation existe. Le commissaire peut interpréter cela et émettre des avis. Les tribunaux également vont être appelés à interpréter cela, à émettre des avis et des lignes directrices. Les tribunaux vont donc pouvoir aussi aider les entreprises canadiennes ou les entreprises étrangères à appliquer la loi et la notion d'intérêt supérieur de l'enfant.
    Je vais aborder deux points relativement à ces questions.
    Premièrement, le ministère et moi croyons que les cours ont le pouvoir de le faire. Si un cas se rend à la Cour d'appel ou la Cour suprême, par exemple, la Cour aura vraiment le pouvoir d'interpréter ce concept. Ce n'est pas là que se situe le problème. En effet, ce seront d'abord les organisations commerciales qui devront interpréter cela et mettre en œuvre la loi. Au bout du compte, il y a la possibilité…
    Je comprends cela. Cependant, en quoi cela diffère-t-il de n'importe quelle autre loi?
    Nous rédigeons une loi, nous la votons, ici, au Parlement; nous nous disons qu'elles contiendront des notions interprétatives et que les tribunaux seront appelés à faire ce travail. Si on s'empêche de légiférer chaque fois que les tribunaux n'ont pas déjà interprété une notion, alors nous devrions tous rentrer chez nous.
    Il y a deux aspects importants. Premièrement, un des buts de ce projet de loi est d'assurer la mise en œuvre la plus efficace possible par les entreprises. À cet égard, il faut utiliser les termes, les concepts ou les règles les plus simples et les plus clairs.
    Deuxièmement, je veux dire une petite chose concernant les tribunaux, puisque vous en avez parlé. L'administration de la sentence fait tout à fait partie de leurs pouvoirs. Or, si des faits sont établis par le commissaire, les tribunaux n'auront pas le pouvoir de les reconsidérer.
     Cela confirme ce que je pensais. Je ne veux pas seulement poser des questions aux fonctionnaires, je veux aussi m'adresser à mes collègues.
    L'impression que cela risque de donner aux Québécois ou aux gens de l'extérieur qui nous regardent — il doit y en avoir trois ou quatre —, c'est que la loi est faite pour faciliter le travail des entreprises étrangères. Cela donne l'impression qu'on trouve le droit civil québécois et la jurisprudence canadienne trop compliqués et qu'il vaut mieux se plier aux impératifs de la démocratie et des tribunaux. Ces entreprises californiennes veulent vendre des produits à nos enfants, mais c'est tellement compliqué pour elles de le faire que nous devons tout faire pour leur faciliter la vie. C'est ainsi que ça va être compris. On donne l'impression que le ministre a décidé de jouer le jeu de ces entreprises et de tout faire pour leur faciliter la vie.
    En fait, il ne s'agit pas du seul endroit dans le projet de loi où on sent cette intention de faciliter les choses. Il y a les questions d'autoréglementation, dans la partie 3, mais j'y reviendrai — je ne veux pas que le président me rappelle à l'ordre. Je ne veux pas faire une critique tous azimuts de l'ensemble de l'œuvre, mais, à la lecture du projet de loi, qui contient beaucoup d'éléments positifs, j'ai l'impression qu'on essaie de plaire aux grandes entreprises.
     Dans ce cas-ci, j'ai l'impression qu'en n'adoptant pas l'amendement des conservateurs, on met de côté l'intérêt supérieur de l'enfant pour plaire à des entreprises, ce que je trouve hautement déplaisant.
(1755)
    Merci, monsieur Garon.
    Monsieur Généreux, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Si je n'étais pas ici de façon continue depuis le début de notre étude sur ce projet de loi, j'aurais l'impression que vous êtes des témoins de l'industrie, que vous essayez de vous assurer que le projet de loi a le moins de mordant possible et que vous essayez de vous faciliter la tâche le plus possible. Si j'ai laissé M. Garon parler avant moi, c'est parce que j'étais certain que ses commentaires iraient dans le même sens que les miens.
    En tant que parlementaires, nous sommes ici pour faire des lois, et non pour plaire à l'industrie. Nous sommes ici pour protéger les Canadiens. C'est ma perception, mais je peux me tromper. Les libéraux ont décidé de présenter un sous-amendement visant à éliminer une terminologie reconnue mondialement. L'intérêt supérieur de l'enfant n'est pas un concept que nous avons inventé, ce n'est pas quelque chose qui prête aux jeux politiques. C'est reconnu partout au monde, même en Californie et dans plusieurs États américains.
    J'essaie de comprendre la logique de tout cela, et j'espère que M. Turnbull va nous l'expliquer. Plus de 50 amendements, proposés par les libéraux, ont été présentés en lien avec le projet de loi, qui, je le rappelle, a lui aussi été présenté par les libéraux. Le projet de loi édicte trois nouvelles lois.
    Personnellement, j'ai 62 ans; Internet est arrivé dans nos vies il y a 30 ans, soit à l'ère des télécopieurs. Aujourd'hui, nous sommes à l'ère de l'intelligence artificielle, et les risques que vont courir les enfants vont être décuplés. Nous avons l'obligation de nous assurer que les enfants seront protégés.
    Je vais poser une question relativement simple. Si nous adoptons ce sous-amendement et que nous n'incluons pas cette ligne, croyez-vous sincèrement que les enfants seront moins protégés?
    Monsieur le président, je remercie le député de sa question.
    Je vais faire un commentaire en français, mais je vais apporter des précisions en anglais.
    À mon avis, si le sous-amendement est adopté, l'intérêt supérieur de l'enfant aura la même protection. Cette protection va être établie dans le projet de loi.

[Traduction]

    Les propos au sujet de la facilité de mise en œuvre devraient être bien compris par rapport aux obligations croissantes imposées aux acteurs commerciaux, qui sont nombreuses dans le projet de loi. La Loi sur la protection de la vie privée des consommateurs accroît nettement les obligations, les sanctions et les responsabilités pour les acteurs commerciaux à l'égard de l'utilisation de renseignements personnels.
    Je donne mon opinion là‑dessus uniquement parce qu'on a demandé si ceux qui comparaissent sont là pour défendre d'autres intérêts. Je tiens à ce qu'il soit absolument clair que la participation du ministère à l'établissement de la loi devait principalement viser à assurer une protection efficace de la vie privée des Canadiens.

[Français]

     Merci, monsieur Schaan.
    Je ne veux pas que vous vous sentiez accusé de quoi que ce soit. Comme mon collègue M. Garon le disait tantôt, je me soucie de la perception que les gens pourraient avoir en nous écoutant. Nous avons 250 amendements à étudier et, après deux réunions, nous en sommes seulement au deuxième. Nous devons traiter cela extrêmement sérieusement.
     Depuis le début de l'étude, que nous avons commencée l'automne dernier, nous nous sommes fait dire par la majorité des témoins que, premièrement, on aurait dû déposer trois projets de loi plutôt qu'un, ou au moins deux, pour séparer certains éléments. À compter du moment où tous les éléments sont dans le même projet de loi, on doit les prendre en considération.
    Ce que je dis, c'est que l'intérêt supérieur de l'enfant, un terme qui est reconnu mondialement, doit être dans le projet de loi, compte tenu de ce que l'avenir va nous apporter.
    Encore une fois, j'espère que M. Turnbull va nous expliquer pour quelle raison les libéraux veulent absolument l'enlever.
(1800)
    Merci, monsieur Généreux.
    Monsieur Turnbull, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci.
    Merci à tous mes collègues de ce solide débat et de ces échanges très approfondis. Je vous suis reconnaissant de tout ce que vous avez dit. Des arguments et des questions mûrement réfléchis ont été présentés aux fonctionnaires.
    Je dirai d'abord que nous avons préconisé un objectif de politique très semblable: la protection des mineurs à l'ère numérique, à un moment où leurs renseignements personnels risquent d'être captés et utilisés d'une façon qui ne sert pas forcément leurs intérêts supérieurs. Voilà qui cadre bien avec les objectifs généraux du projet de loi.
     Vous l'avez du reste reconnu dans une certaine mesure en admettant que les renseignements personnels de tous les mineurs sont des données sensibles.
    Nous sommes sur la même longueur d'onde. Comme les fonctionnaires l'ont dit à maintes reprises, le sous-amendement vise à assurer une interprétation claire en droit commercial. Il est vrai que la notion d'intérêt supérieur n'est pas toujours familière aux entreprises. M. Schaan a été très clair.
    En même temps, nous débattons ici du libellé du préambule du projet de loi. En exprimant l'intention que nous avons tous et qui semble faire consensus, nous devrions pouvoir parvenir à un compromis.
    J'ai une question à poser à M. Schaan. Pourquoi mettre un préambule dans un projet de loi? À quoi sert‑il, au fond? C'est une question très simple, mais elle est fondamentale dans notre débat.
    Le préambule annonce les obligations fondamentales définies dans une loi. Le texte qui vient ensuite énonce et précise ces obligations de manières diverses, mais le préambule définit l'objectif global et l'esprit de la loi pour ceux qui cherchent à comprendre ces obligations.
    Le préambule décrit l'intention du législateur et donne une idée claire de la capacité de faire respecter les obligations énumérées par la suite.
    D'une certaine façon, il ne fait qu'exprimer l'intention du législateur. Le sous-amendement vise à assurer une approche et un libellé cohérents dans le projet de loi, mais peut-être en insistant sur l'interprétation du texte législatif plutôt que sur l'orientation fondamentale.
    Monsieur Schaan, qu'en pensez-vous? L'insertion de l'expression « au mieux de leurs intérêts » dans le préambule n'a pas nécessairement... À certains égards, il s'agit de l'intention du législateur, et c'est une intention que nous avons en commun. Tous en ont parlé. Il s'agit aussi d'une expression juridique qui existe en droit de la famille, mais non en droit commercial.
    Je comprends comment le caractère légal de ce terme pourrait avoir une incidence sur ce que nous voulons dans le préambule si nous mettons l'accent sur la cohérence de l'interprétation et de l'expression. Si nous prenons un peu de recul, toutefois, nous reconnaissons que l'objectif du projet de loi, sur lequel tous les parlementaires s'entendent, est de protéger les mineurs, à mon avis.
    Qu'en pensez-vous? Si le but visé, si l'objet du projet de loi était précisé dans le préambule, avec la notion d'intérêt supérieur, cela ne changerait pas forcément la nature du projet de loi, si ce n'est qu'il serait interprété comme visant à protéger les meilleurs intérêts des enfants.
(1805)
    Ce que nous avons tenté de faire valoir, c'est que l'utilisation d'un libellé cohérent assurerait le respect des obligations fondamentales que nous considérons comme importantes et que le texte énonce. Ainsi, les obligations seraient comprises et pourraient être honorées.
    Quant à la possibilité que l'aspiration traduite dans le projet de loi soit exposée d'une façon qui ne correspond pas tout à fait à ce qui est compris dans les obligations concrètes, il faut s'interroger sur la facilité d'interprétation et la lisibilité, mais, au fond, l'aspiration est la même.
    Voilà qui éclaire la question.
    Enfin, revenons sur les points soulevés par M. Généreux et d'autres points qui ont été abordés et auxquels vous, monsieur Schaan, avez réagi un peu dans vos propos. Selon M. Généreux, on dirait que vous êtes là pour représenter les sociétés, en quelque sorte. J'ai entendu d'autres réflexions semblables. À mon avis, si nous sommes là et accomplissons ce travail vraiment important, c'est très clairement pour protéger les Canadiens et les enfants. Il s'agit également d'assurer la clarté de l'interprétation nécessaire pour que chacun puisse honorer ces obligations. C'est en fait dans l'intérêt supérieur des enfants. Si les PME ne peuvent pas interpréter le projet de loi de façon à le respecter, et s'il y a dans le texte des ambiguïtés inhérentes qui les empêchent d'honorer leurs obligations, elles devront s'adresser aux tribunaux ou exercer d'autres recours.
    Je cherche simplement à rappeler l'intention sur laquelle, je pense, nous sommes d'accord. La facilité d'interprétation et le resserrement des obligations dont vous avez parlé se rattachent au même objectif sous-jacent et au même engagement. Je vais en rester là.
    Je demande le consentement unanime. Pour avoir siégé au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, je connais la procédure. Je ne peux pas modifier mon propre sous-amendement à moins d'obtenir le consentement unanime, mais écoutez-moi jusqu'au bout. Dans un esprit de compromis et de collégialité et dans un souci de collaboration constructive, si vous me le permettez, avec le consentement unanime, je voudrais revenir au libellé original qui figure à la partie b): « Attendu que le traitement de l'information personnalisée et des données doit respecter la vie privée des mineurs et leurs intérêts ».
    Si nous pouvons nous entendre sur ce changement, je me ferai un plaisir de le proposer avec le consentement unanime, si les membres du Comité sont d'accord.
    Pouvons-nous prendre un moment pour en discuter brièvement?
    Oui, bien sûr. Je vais suspendre brièvement la séance.
(1805)

(1810)
    D'accord, chers collègues, nous sommes arrivés à un consensus. Tout le monde a entendu ce que M. Turnbull cherche à accomplir avec le consentement unanime, c'est-à-dire retirer la partie b) de son sous-amendement.
(1815)
     Je peux m'assurer que tout le monde a bien compris.
    Vous avez raison. Il s'agit de retirer le changement apporté par notre sous-amendement — qui figurait à la partie b) — et de revenir exactement au libellé proposé par le Parti conservateur. Je vais le lire pour m'assurer que tout est parfaitement clair: « Attendu que le traitement de l'information personnalisée et des données doit respecter la vie privée des mineurs et leurs intérêts ».
    Y a‑t‑il consentement unanime?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Nous poursuivons le débat sur le sous-amendement modifié. J'ai sur ma liste — si vous avez terminé, monsieur Turnbull — M. Perkins, M. Généreux et M. Vis.
    Nous pouvons voter sur le sous-amendement s'il n'y a pas d'autres interventions.
    Ai‑je le consentement unanime au sujet du sous-amendement?
    (Le sous-amendement est adopté. [Voir le Procès-verbal])

[Français]

    Cela nous ramène à l'amendement CPC‑1 tel qu'amendé.

[Traduction]

    Y a‑t‑il des interventions?
    L'amendement CPC‑1 modifié est‑il adopté?
    (L'amendement modifié est adopté. [Voir le Procès-verbal])
    Le président: Le prochain amendement sur ma liste est le NDP‑1.
    M. Masse veut‑il le proposer maintenant?
    Oui.
    D'accord, nous allons passer à M. Masse, qui parlera de l'amendement NDP‑1.
    Je croyais que nous en avions déjà discuté.
    Oui, monsieur Turnbull.
    J'ai vérifié tout à l'heure si les deux motions dépendaient l'une de l'autre ou se chevauchaient. Le greffier législatif nous a dit très clairement que ce n'était pas le cas. Nous venons cependant d'adopter un sous-amendement, et l'amendement CPC‑1 a déjà réglé le cas de l'amendement NDP‑1. Pourrions-nous prendre un moment pour vérifier afin d'éviter de nous enliser dans un débat dont nous pouvons nous passer?
    Il est vrai qu'il y a beaucoup de choses en commun avec le CPC‑1, mais la fin n'est pas exactement la même. Si M. Masse veut le proposer, l'amendement est recevable.
    Attendez une seconde. Je vais simplement consulter les greffiers législatifs.
(1815)

(1820)
    Le président: Chers collègues, nous avons jusqu'à 18 h 40.
    Je crois comprendre que l'amendement NDP‑1 ne sera pas proposé parce que la question a été essentiellement réglée par le sous-amendement du député Turnbull.
    Nous en sommes donc rendus à l'amendement NDP‑2.
    Avant de le proposer, je souligne que si l'amendement NDP‑2 est adopté, l'amendement G‑2 ne pourra pas être proposé à cause d'un conflit de lignes.
(1825)
    J'invite M. Masse à parler de l'amendement NDP‑2.
    Je vais lire le texte pour ceux qui, de leur foyer, suivent attentivement les délibérations.
    Je propose que le projet de loi C‑27, à l'article 2, soit modifié par substitution, aux lignes 18 et 19, page 3, de ce qui suit: « ment des renseignements personnels afin ».
    Je vais en dire un mot, après quoi les autres députés pourront poser des questions.
    L'idée vient du commissaire à la protection de la vie privée. Il s'agit de renforcer le cadre de la dépersonnalisation et de l'anonymisation de l'information. Il faut essentiellement protéger et dépersonnaliser les données anonymisées, et cela découle des recommandations du commissaire à la protection de la vie privée.

[Français]

     Merci, monsieur Masse.
    Monsieur Turnbull, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, monsieur Masse, d'avoir présenté la motion.
    Monsieur Schaan, je m'adresse d'abord à vous.
    D'après ce que je comprends, l'amendement a une incidence sur la définition des renseignements anonymisés, et je crois qu'il supprime en fait la notion de « meilleures pratiques généralement reconnues » dans la définition du verbe « anonymiser ».
     Pourriez-vous m'éclairer à ce sujet?
(1830)
    C'est exact. Pour l'heure, la disposition d'interprétation se lit ainsi:
anonymiser modifier définitivement et irréversiblement, conformément aux meilleures pratiques généralement reconnues, des renseignements personnels afin qu’ils ne permettent pas d’identifier un individu, directement ou indirectement, par quelque moyen que ce soit.
    Le texte proposé par le NPD ferait disparaître le passage « conformément aux meilleures pratiques généralement reconnues ».
    La notion de « meilleures pratiques généralement reconnues » me semble importante, car elle rend possible l'évolution des meilleures pratiques évoquées dans le projet de loi.
     Avant de me lancer en politique, je travaillais dans un milieu où il était souvent question de pratiques prometteuses et de meilleures pratiques. Il en était plus précisément question dans des domaines marqués par la technologie ou l'innovation. Il semblait assez courant que, dans les industries en rapide mutation, les choses évoluent rapidement et que les pratiques prometteuses soient les précurseurs des meilleures pratiques.
    Quel est l'impact de cette suppression? Quelle incidence aurait-elle sur le projet de loi et sur sa solidité?
    J'ai deux points à faire valoir.
    Premièrement, cela ne serait pas conforme à la définition qui figure actuellement dans la Loi sur la protection des renseignements personnels du Québec, qui exige que les renseignements soient anonymisés conformément aux pratiques exemplaires généralement reconnues. Il y aurait un écart entre les deux, ce qui n'est pas en soi nécessairement... Ce sont des lois distinctes, mais il serait très utile qu'elles concordent si nous voulons que les sociétés puissent honorer leurs obligations et respecter les deux lois.
    Deuxièmement, les « meilleures pratiques généralement reconnues » sont une notion bien établie qui permet l'évolution des normes et des certifications au gré des avancées de la technologie et de la notion elle-même. L'absence de cette exigence donnerait à penser que l'entreprise est assujettie à une norme, mais en faisant abstraction de l'idée qu'elle doit appliquer les solutions les plus modernes pour se plier à son obligation.
    Merci.
    À votre connaissance, vous qui avez mené de vastes consultations au sujet du projet de loi, les experts en matière de protection de la vie privée veulent-ils généralement que cette notion soit conservée dans le projet de loi? Qu'en pensez-vous? Ont-ils préconisé ou souhaité l'insertion dans le projet de loi de la notion de « meilleures pratiques généralement reconnues »?
    Tout d'abord, ils souhaitent des exigences élevées à propos de l'idée d'anonymisation et des « meilleures pratiques généralement reconnues », et l'obligation d'anonymisation est considérée par beaucoup comme une exigence élevée.
    Deuxièmement, les experts souhaitent de la cohérence dans l'application de la notion, et c'est pourquoi les « meilleures pratiques généralement reconnues » garantissent la normalisation des approches, par opposition à un ensemble de mesures disparates ou à des tentatives très diversifiées d'anonymisation de l'information qui pourraient faire apparaître d'autres vulnérabilités parce que les pratiques divergent grandement.
    Comme vous l'avez dit, notre projet de loi s'écarterait de ce qu'on trouve dans la loi québécoise sur la protection des renseignements personnels.
    La Loi sur la protection des renseignements personnels du Québec exige expressément que les renseignements soient anonymisés conformément aux meilleures pratiques généralement reconnues.
    Une autre précision: qui décide que telle façon de faire est une meilleure pratique généralement reconnue? Ces pratiques sont-elles également assujetties aux lignes directrices du Commissariat à la protection de la vie privée? Comment en arrivera-t-on à une décision qui sera ensuite communiquée?
(1835)
    Le Commissariat publie des lignes directrices. Bien des gens ont travaillé à la question de l'anonymisation, mais il se fait aussi des efforts considérables chez les responsables de la normalisation, notamment, pour mettre en place les mécanismes qui conviennent à cet égard. Ce sont entre autres des acteurs de la société civile, des universitaires et ceux qui appliquent cette notion en temps réel.
    Je vous remercie de toutes ces précisions.
    Monsieur Masse, du moins de notre point de vue, M. Schaan a fourni beaucoup de précisions et de justifications qui confortent notre position, qui consiste à nous opposer à l'amendement. Nous estimons que le passage « meilleures pratiques généralement reconnues » du libellé de cet article particulier sera très utile pour suivre le rythme des pratiques qui vont clairement évoluer et émerger avec le temps en matière d'anonymisation.
    Voilà ce qui explique notre position. J'ignore ce que les autres pensent de l'amendement, mais c'est certainement notre position.

[Français]

     Merci.
    Monsieur Williams, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    C'est une discussion importante. Je suis certain qu'elle débordera sur notre prochaine séance.
    Je remercie le NPD d'avoir présenté un amendement important.
    Il est très important que la définition du terme « anonymiser » soit judicieuse. Beaucoup de témoins ont fait une distinction entre anonymisation et dépersonnalisation.
    Je m'écarte de ce dont nous discutions tout à l'heure. La conversation portait sur l'équilibre entre ce dont les entreprises ont besoin pour interpréter le risque et ce dont l'organisme responsable de l'application de la Loi sur la protection des renseignements personnels a besoin, c'est-à-dire le commissaire à la protection de la vie privée et son commissariat. Ils doivent savoir à quoi s'en tenir au lieu de rester dans le flou lorsqu'ils interprètent les dispositions sur la protection de la vie privée. Compte tenu de notre dernier amendement, nous nous en remettons au commissaire à la protection de la vie privée pour nous donner les meilleures définitions afin qu'il puisse faire respecter la Loi sur la protection des renseignements personnels. Le commissaire et le tribunal auront besoin de définitions exactes.
    Voici un exemple. Lorsqu'il a comparu devant le Comité, le 19 octobre 2023, le commissaire à la protection de la vie privée, Philippe Dufresne, a exposé son point de vue: « Le projet de loi dit qu'on peut en faire davantage avec une information dépersonnalisée et que, si elle est anonymisée, la loi ne s'applique pas du tout. Il y a donc une grande responsabilité qui vient avec cela. Il faut que ces définitions soient strictes. » L'enjeu, c'est l'interprétation des définitions du projet de loi. C'est pourquoi nous étudions longuement la question. Même s'il s'agit d'un préambule et d'une définition, cela donne le ton au reste du projet de loi et aux autres échanges que nous aurons.
     Le paragraphe 6(5) du projet de loi exempte les renseignements anonymisés de toutes les protections qu'il met en place. Étant donné que notre argument de ce côté-ci — que vous entendrez plus d'une fois — est que la protection de la vie privée est un droit fondamental, nous voulons nous assurer d'avoir les bonnes définitions.
    Dans son mémoire de mai 2023, le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada a parlé de cet article en ces termes:
Il convient de soulever un dernier point en ce qui concerne la nouvelle définition de renseignements anonymisés proposée. Selon le libellé actuel, les organisations peuvent anonymiser des renseignements personnels conformément aux « meilleures pratiques généralement reconnues ». Or, la LPVPC ne donne aucune explication sur la nature de ces pratiques ni sur ce qui serait considéré comme des pratiques « généralement reconnues ». Ce libellé fait en sorte que certaines organisations pourraient se servir de techniques d’anonymisation promues par certains experts ou groupes, mais qui sont insuffisantes pour un ensemble de données en particulier.
    Cela pourrait ne pas suffire comme critère de ce que nous essayons de définir et d'appliquer en vertu de cette loi sur la protection des renseignements personnels. C'est pourquoi la question est très importante. Tout comme le commissaire à la protection de la vie privée, nous avons du mal à accepter l'insertion de cette idée de « meilleures pratiques généralement reconnues ».
    Monsieur Schaan, M. Turnbull vient de poser des questions à ce sujet, mais avons-nous une définition législative des « meilleures pratiques généralement reconnues » ou une liste très précise pour le Commissariat?
    Il s'agit d'une technologie en évolution. Si la notion de meilleure pratique généralement reconnue figure dans le projet de loi, le Commissariat à la protection de la vie privée pourra continuer à se prononcer sur la conformité des pratiques qui ont émergé. Nous estimons que c'est un moyen de favoriser l'uniformisation des approches et de veiller à ce que chacun sache profiter de toutes les occasions d'anonymiser l'information.
(1840)
    En étudiant les possibilités offertes, il faut se soucier des entreprises. Nous allons examiner le fardeau que le projet de loi leur impose, à leur point de vue. Elles ont comparu devant le Comité. Elles doivent assumer les coûts d'application de la loi, le fardeau réglementaire et les conséquences pour l'innovation et la compétitivité. Pour sa part, le Commissariat a besoin de savoir à quoi s'en tenir. Il a besoin de définitions claires. Il doit être en mesure de faire respecter la loi. La différence est grande avec la Loi sur la concurrence, si on considère les définitions et les moyens envisagés de les interpréter pour appliquer la loi.
    Nous avons dit très clairement que nous voulons que la protection des enfants et de la vie privée soit un droit fondamental. L'enjeu est de taille, car le projet de loi n'est pas conçu pour le temps présent, mais pour l'avenir. En ce qui concerne la dépersonnalisation — il en sera encore question dans l'argumentaire que nous présenterons —, il est toujours indiqué, même dans la définition, que « le risque [...] qu’un individu puisse être identifié » demeure. C'est dans la définition du terme « dépersonnaliser ». L'anonymisation supprime ce risque, mais pour supprimer davantage cette nuance afin que les « meilleures pratiques généralement reconnues » ne définissent pas ce que sont ces pratiques...
    Monsieur Williams, si passionnantes soient vos observations, nous arrivons à la fin de l'heure. Vous aurez le temps d'y réfléchir pendant le week-end. Nous entendrons d'autres points de vue lundi, lorsque nous reprendrons l'étude du projet de loi.
    Merci aux témoins.
    À lundi.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU