:
Bonjour à tous et à toutes.
Je vous souhaite la bienvenue à la 133e réunion du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes.
Je suis heureux de vous revoir après la pause estivale. J'espère que vous avez tous passé un bon été et que vous êtes en forme pour reprendre les importants travaux du Comité.
Pour commencer, j'invite les participants à prendre connaissance des instructions concernant l'utilisation des oreillettes, afin de s'assurer de respecter la santé et la sécurité de tous, particulièrement celles des interprètes, et d'éviter les incidents acoustiques.
[Traduction]
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 7 novembre 2023, ainsi qu'à la motion adoptée le mercredi 31 juillet 2024, le Comité se réunit aujourd'hui pour reprendre son étude sur l'enquête et les révélations récentes sur Technologies du développement durable Canada, ou TDDC.
[Français]
J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins qui vont être avec nous au cours de la première heure de la réunion. Du Bureau du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, nous recevons M. Konrad von Finckenstein, commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, qui est accompagné de M. Michael Aquilino, conseiller juridique. Je vous remercie de votre présence.
Sans plus tarder, je cède la parole à M. von Finckenstein.
Vous avez la parole pour cinq minutes, monsieur.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie le Comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui.
Je suis accompagné de M. Michael Aquilino, conseiller juridique au Commissariat.
À titre de commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, mon rôle est d'aider les représentantes et représentants publics élus et nommés à gérer les conflits d'intérêts et à mener des enquêtes sur des cas possibles de contraventions.
Nous assurons l'application de la Loi sur les conflits d'intérêts aux représentants nommés, tels que les ministres, leur personnel, les dirigeants de sociétés d'État, les sous-ministres et les membres des divers conseils et tribunaux. Nous appliquons également le Code régissant les conflits d'intérêts des députés.
[Traduction]
Notre travail a deux principaux objectifs. Premièrement, aider les représentants publics élus et nommés à reconnaître et à gérer les conflits d'intérêts. Deuxièmement, faciliter le passage de personnes qualifiées du secteur privé au public, et vice versa, sans problème.
Le Comité m'a invité à discuter du rapport Verschuren, que le Commissariat a publié en juillet dernier. En fait, nous avons mené des enquêtes sur deux administrateurs de Technologies du développement durable Canada, à la demande du député Michael Barrett. Pour l'une, il s'agissait d'Annette Verschuren, ex‑présidente du conseil d'administration de TDDC, et pour l'autre, de Guy Ouimet, ex‑membre de ce même conseil.
[Français]
Mme Verschuren et M. Ouimet étaient assujettis à la Loi en tant que titulaires de charge publique sans obligations de déclaration. Ils étaient visés par les règles générales sur les conflits d'intérêts, mais ils n'étaient pas tenus de communiquer au Commissariat le genre de renseignements que vous pouvez voir résumés dans notre registre public.
[Traduction]
Les titulaires de charge publique principaux, qui ont des obligations de déclaration, sont confiés à un conseiller du Commissariat lorsqu'ils sont nommés. Ce conseiller peut répondre à leurs besoins individuels, et ce dialogue dure jusqu'à la fin de leur mandat. Au contraire, les simples titulaires de charge publique comme Mme Verschuren et M. Ouimet n'ont pas de conseiller attitré. Toutefois, ils peuvent toujours contacter le Commissariat pour obtenir des conseils au besoin.
Dans mon rapport, j'ai conclu que Mme Verschuren ne s'est pas conformée à deux dispositions de la Loi, soit le paragraphe 6(1), qui concerne la prise de décisions, et l'article 21, qui vise le devoir de récusation.
[Français]
Mme Verschuren avait déclaré un conflit d'intérêts potentiel au conseil d'administration de Technologies du développement durable Canada, TDDC, à l'égard d'entreprises nommées par deux organisations avec lesquelles elle avait des liens étroits. Elle s'est abstenue de voter sur plusieurs des décisions qui profitaient à ces compagnies, mais, dans aucun de ces cas, elle ne s'est récusée, alors que c'est ce que la Loi exigeait.
[Traduction]
La différence entre l'abstention et la récusation n'est pas toujours bien comprise. Pour se récuser, il ne suffit pas d'assister en silence à la discussion ou de s'abstenir de voter. Il faut se retirer complètement du lieu. Ainsi, on évite d'influencer la décision des autres par sa simple présence. En d'autres termes, il faut sortir de la salle. Pour renforcer cette distinction, le Commissariat a publié la semaine dernière un avis d'information actualisé sur les récusations.
Mme Verschuren a également contrevenu à la Loi lorsqu'elle a participé à deux décisions de verser une aide financière d'urgence dans le contexte de la COVID‑19 à toutes les entreprises financées par TDDC, y compris à une entreprise dans laquelle elle avait un intérêt personnel. Ce faisant, elle suivait un avis juridique inexact selon lequel son conflit n'avait pas à être soulevé puisque toutes les entreprises seraient traitées de la même manière.
Je n'ai trouvé aucun élément de preuve indiquant qu'elle s'est prévalue de sa fonction de présidente du conseil d'administration de TDDC pour tenter d'influencer d'autres membres du conseil dans ces deux décisions lorsqu'elle a présenté les motions proposant de verser l'aide financière. Après tout, cela faisait partie de son rôle de présidente.
Dans l'autre rapport d'étude concernant TDDC, j'ai rejeté les allégations voulant que M. Ouimet aurait contrevenu à la Loi en participant aux décisions de verser une aide financière dans le contexte de la COVID‑19 aux entreprises financées, y compris une entreprise dans laquelle il avait un intérêt personnel.
[Français]
J'ai conclu que son intérêt était négligeable, à tel point qu'il ne créait pas de conflit d'intérêts. J'ai donc appliqué le principe De minimis non curat praetor.
[Traduction]
Sur ce, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Bienvenue de nouveau parmi nous, monsieur le commissaire.
J'aimerais parler un peu du rapport de la vérificatrice générale, que vous avez dit avoir examiné dans le cadre de cette affaire.
La vérificatrice générale a constaté non seulement que Mme Verschuren avait les conflits d'intérêts que vous avez mentionnés dans votre déclaration préliminaire, mais aussi qu'elle avait mal géré la situation et qu'elle avait un conflit d'intérêts dans un certain nombre d'autres transactions.
Votre rapport couvre‑t‑il la mauvaise gestion du conflit dont a fait preuve Mme Verschuren lorsqu'elle a accordé à Universal Matter Inc. un paiement de 225 000 $ le 9 mars 2021?
Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le commissaire, c'est à vous qu'il incombe de révéler les situations de conflit d'intérêts que la vérificatrice générale a constatées dans 82 % des cas. Dans le cas de M. Ouimet vous avez rejeté les allégations en disant que vous aviez tenu compte du principe de minimis. Il n'est pas normal qu'un titulaire de charge publique en tire un avantage personnel. Dans le cas que vous avez décrit, il en a tiré un avantage personnel parce que la subvention accordée par le conseil d'administration auquel il siégeait, et au sujet de laquelle il a voté, a profité à cette société. Non seulement M. Ouimet a fait cela, mais la vérificatrice générale a mis au jour de nombreux autres conflits d'intérêts dans son cas.
Je pose à nouveau la question. Puisque votre rapport ne traite pas de l'ensemble des gens nommés par le gouverneur en conseil et de la culture du conflit d'intérêts, allez-vous vous pencher sur tous ces autres cas, y compris celui de M. Ouimet?
:
Oui, la Loi prévoit la récusation. Elle ne contient aucune disposition relative à l'abstention.
Toutefois, dans deux ou trois cas, elle a signalé qu'elle se trouvait dans une situation de conflit d'intérêts, puis il y a eu ce qu'on appelle — je ne sais plus comment on appelle cela — la motion qui ne prête pas à controverse du début, le contenu de l'ordre du jour. Elle a voté sur ces questions. Elle avait déjà déclaré qu'elle ne pouvait pas. Elle aurait dû s'abstenir. Elle aurait dû, en fait, quitter la salle. Dès qu'elle a dit « conflit d'intérêts », elle aurait dû quitter la salle et ne pas participer. C'est ce qu'exige la Loi. Elle ne l'a pas fait. Elle s'est abstenue.
Elle a d'abord dit « je ne l'ai pas fait », puis elle a voté dans certains cas. Dans d'autres cas, elle ne l'a pas fait. Ce qu'elle aurait dû faire, c'est quitter la salle.
Pour l'aide d'urgence, c'était la même chose. On lui a dit, sur la base d'un avis juridique inexact, qu'il n'y avait pas de conflit d'intérêts, et elle a donc participé au vote.
:
Merci, monsieur le président.
Messieurs les témoins, monsieur le commissaire, bonjour. Je vous remercie d'être présents.
Je pense que le travail que nous faisons à ce comité, indépendamment de notre affiliation partisane, est important. Je le prends au sérieux, et l'ensemble des parlementaires ici semblent le prendre au sérieux. Ce qui me désole et m'enrage, c'est de recevoir des témoins qui ne prennent pas notre travail au sérieux. Je ne parle pas de vous, si cela peut vous soulager.
J'ai lu votre rapport et j'ai entendu votre témoignage. J'aimerais maintenant vous citer deux choses que Mme Verschuren a dites textuellement ici, à ce comité, où les témoins sont censés dire la vérité:
Dans tous les cas où j'ai déclaré un conflit d'intérêts perçu, je me suis retirée de la réunion du conseil d'administration, et je suis revenue après que la décision a été prise et que des recommandations ont été soumises au conseil. C'était la même chose pour tous les membres du conseil d'administration.
Ensuite, elle a dit ceci:
Lorsque le conseil d'administration a recommandé d'accepter ces projets, les membres... Dans mon cas, je quittais la salle et j'attendais qu'on me rappelle une fois que la recommandation était faite. Je ne savais pas ce qu'il en était [...]
Vous voyez où je veux en venir.
Quand je reviens sur le témoignage qui a été livré ici par cette personne, que je lis votre rapport et que j'entends votre témoignage, j'en conclus que quelqu'un a menti au Comité.
Est-ce vous ou Mme Verschuren?
:
Je vais me permettre de vous interrompre. Vous connaissez la valeur du temps dans un comité comme celui-ci.
Dans votre rapport, vous établissez qu'il y a eu 24 violations de la Loi sur les conflits d'intérêts. Mme Verschuren est venue témoigner devant le Comité et, dans sa tête, il n'y avait eu aucune violation de la Loi. Parfois, on perd la mémoire et on ne se souvient pas de certaines choses. Cependant, ne trouvez-vous pas que, 24 fois, c'est beaucoup, en comité parlementaire, où on a l'obligation de dire la vérité?
Je vous demande votre opinion sur quelque chose de normatif. Peut-on se tromper 24 fois ainsi, devant un comité parlementaire?
J'aimerais revenir au rôle du ministère. Le discours du ministre actuel et du ministre précédent consiste à dire que c'étaient des fonds fédéraux, que cet organisme n'était pas géré directement par le ministère, qu'ils ne nomment que la moitié du conseil d'administration et qu'ils ne sont donc pas responsables des autres nominations, et que, dès qu'ils ont su qu'il se passait quelque chose par l'entremise de la vérificatrice générale, ils ont fait ce qu'il fallait, ils ont gelé les fonds, et ainsi de suite.
Or il m'apparaît qu'en vertu de la Loi sur les conflits d'intérêts, le ministre précédent et donc le gouvernement actuel auraient pu déclencher des audits, faire des vérifications et s'assurer que cet argent public était géré en toute conformité avec la Loi.
Ne trouvez-vous pas que ces enquêtes de la part de l'État, que ce soit celle de la vérificatrice générale, la vôtre — ce n'est pas une critique à votre égard — et surtout celle du ministère sont arrivées tardivement? Ne pensez-vous pas aussi qu'il y a eu une lacune de la part du ministère de l'Industrie lui-même, qui aurait dû faire certaines de ces vérifications à un moment donné?
Cela m'amène à poser une question encore plus simple: est-il possible qu'il y ait de la fumée sans feu, là-dedans?
:
Non, et ce n'est pas ce que je demande.
Je n'ai jamais vu une réaction aussi rapide à une situation de ce genre auparavant. Je me trompe peut-être. J'imagine que nous pourrions le vérifier facilement en examinant les renseignements détaillés relatifs à d'autres dossiers.
Ce qui me préoccupe entre autres, c'est qu'elle n'a pas... Passons en revue ce qu'elle a fait. Elle n'a pas suivi les conseils en matière de conflit d'intérêts. Elle n'a pas quitté la salle. Toute une série de choses différentes se sont produites.
Compte tenu de ce qui s'est passé dans la salle de réunion de TDDC à ce moment‑là, y a‑t‑il eu des conséquences pour elle ou pour ses collègues qui ont été témoins de ce comportement et qui n'ont rien dit? Y a‑t‑il, en fait, des conséquences pour les membres du conseil d'administration, ou pour elle, parce qu'ils ne l'ont pas signalé?
Il peut y avoir consentement de la part de personnes qui ne disent rien. À de nombreuses reprises, je me suis retrouvé dans une salle où les gens savaient que d'autres personnes avaient dit des choses, fait des choses ou agi de manière incorrecte et où ils ont simplement laissé cela passer. Il peut s'agir de sexisme, de racisme ou de comportement inapproprié. Il peut s'agir, comme dans le cas qui nous occupe, d'un vote.
Quelles ont été les conséquences pour les membres du conseil d'administration dans le cadre du système mis en place?
:
C'est là que réside une partie de mes préoccupations en matière de reddition de comptes, car il a été créé il y a plus de 20 ans et un certain nombre de ministres ont quitté leur poste dans la honte depuis, notamment le ministre Bernier, M. Clement et d'autres. Le système en place permet toujours potentiellement ce type de comportement et il y a là une ouverture.
Je suis aussi d'avis que nous voulons toujours faire toute la lumière sur les faits. Pour revenir à la question de M. Perkins, si je crois qu'il faut aller jusqu'au bout, c'est parce que sinon, comment pouvons-nous montrer au public tous les dommages réels qui sont causés par les fautes que commettent, souvent à dessein, ces conseils d'administration et ces organismes indépendants?
De plus, je tiens à souligner que le personnel est financé entièrement par les contribuables canadiens, mais qu'il ne bénéficie pas des mêmes privilèges en matière de protection des dénonciateurs ou des avantages d'un syndicat, notamment, sur le lieu de travail.
Comment pouvons-nous nous abstenir par rapport à tout ce qui s'est passé si nous ne connaissons pas tous les dommages qui ont résulté des actions du conseil d'administration?
:
Merci, monsieur Turnbull.
J'accepte votre rappel au Règlement, car nous avons tenu une réunion en vertu de l'article 106(4) du Règlement pour convoquer cette réunion spéciale de trois heures, dans le but de discuter du rapport du commissaire sur TDDC.
Monsieur Barrett, je vous demanderais, même si je tends à être généreux pour ce qui est des questions, d'essayer de vous en tenir au sujet. Vous avez déployé beaucoup d'efforts cet été pour la tenue de cette séance sur cette question précise. Veuillez garder ces règles à l'esprit.
Vous connaissez les règles relatives à la pertinence. Je vous redonne la parole; il vous reste une minute et demie.
:
Vous avez des pouvoirs que je n'ai pas, monsieur Barrett. Vous pouvez prédire l'avenir et affirmer que M. Turnbull s'engagera dans cette voie. Je n'en suis pas tout à fait certain.
De plus, vous avez mal interprété ma décision. Je vous ai dit que je suis plutôt généreux quant à la latitude que j'offre. Vous êtes nouveau à ce comité, mais les députés autour de la table — je regarde autour de la table — savent que je suis plutôt généreux dans mon interprétation des questions et quant à la latitude que je donne aux députés pour poser des questions qui s'éloignent parfois de la motion.
Étant donné que les membres du Comité sont revenus au milieu de l'été pour discuter de cette question précise, en vertu de l'article 106(4) du Règlement, je leur demanderais quand même d'essayer de se concentrer sur TDDC, qui est la raison pour laquelle nous sommes ici.
Comme vous l'aurez remarqué, monsieur Barrett, je vous ai donné beaucoup de latitude pour vos questions. Je vais demander à M. Turnbull de garder à l'esprit le jugement que j'ai rendu il y a quelques minutes.
:
Merci, monsieur le président. Je n'y manquerai pas.
Cette lettre concerne TDDC en particulier. Il s'agit d'une lettre du commissaire de la GRC, Mike Duheme, qui traite du rapport de la vérificatrice générale.
Je veux citer un extrait de cette lettre. Il indique ce qui suit: « Il existe un risque important que la motion » — c'est-à-dire la motion des conservateurs — « soit interprétée comme un contournement des processus d'enquête normaux et des protections de la Charte. »
Dans le dernier paragraphe, il ajoute ce qui suit:
Je voudrais également souligner que la GRC est indépendante sur le plan opérationnel et qu'elle adhère strictement au principe de l'indépendance de la police. Dans une société libre et démocratique, ce principe garantit que le gouvernement ne peut pas diriger ou influencer l'application de la loi et que les décisions en matière d'application de la loi restent fondées sur les informations et les preuves dont dispose la police.
Je voulais avoir votre point de vue à ce sujet, mais j'ajouterai que la vérificatrice générale a envoyé une lettre semblable avec une réaction semblable. Le problème, c'est que des agents du Parlement — les conservateurs, dans ce cas‑ci, dans leur motion — minent essentiellement l'indépendance d'importants agents du Parlement et d'institutions indépendantes.
Monsieur von Finckenstein, j'aimerais avoir votre point de vue à ce sujet.
:
Le commissaire de la GRC, évidemment, est très soucieux de s'assurer que toute preuve qu'il présente pourra être utilisée devant les tribunaux et ne sera pas rejetée pour quelque raison que ce soit, à savoir, principalement, une violation de la Charte ou le fait qu'une preuve n'a pas été obtenue selon les règles, etc.
D'un autre côté, bien sûr, il y a le principe du Parlement. Le Parlement est l'autorité suprême et peut examiner toute question qu'il souhaite examiner.
Je pense que ce qu'il fait valoir dans cette lettre, c'est que ce que le Comité a demandé pourrait entraîner des problèmes par la suite. En fait, il veut vous le signaler.
Il a tout à fait raison. Ce sont deux principes difficiles à concilier. C'est possible, mais cela exige une grande prudence. Il veut s'assurer que rien n'entrave ses fonctions en tant qu'organisme indépendant d'application de la loi. D'autre part, bien sûr, il prend garde de ne pas empiéter sur votre privilège, en tant que comité parlementaire, de demander ce que vous voulez. Si les deux parties sont conscientes du problème et agissent prudemment, ces actions peuvent être conciliées.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur le commissaire, je sais que votre rôle consiste à regarder l'ensemble de la situation et à vérifier s'il y a eu des violations à la Loi sur les conflits d'intérêts. Je comprends très bien ce rôle, mais il s'agit ici d'une situation plus complexe. Le gouvernement, comme il l'a fait à plusieurs reprises, notamment dans le cas de Technologies de développement durable Canada, TDDC, crée ce genre de compagnies ou d'entreprises sans toutefois nommer l'entièreté du conseil d'administration. Comme vous l'avez dit, c'est une décision du gouvernement. Ainsi, les gens qui gèrent ces entreprises ne sont pas des titulaires de charge publique. Or, selon votre mandat, vous devriez investiguer systématiquement à leur sujet, comme cela se fait pour les députés, les ministres, et ainsi de suite.
Cela dit, j'aimerais connaître votre avis sur ce qui suit. Selon vous, est-ce qu'Innovation, Sciences et Développement économique Canada, ISDE, ou le avait les moyens, au sein du ministère, de prévenir ces pratiques avant qu'on en entende parler par les lanceurs d'alerte?
:
Merci, monsieur le président.
J'essaie de comprendre un peu la responsabilité et la culture du conseil d'administration. Les conseils d'administration et les structures d'entreprise me sont peu familiers. Je suis néo-démocrate, et on ne nous nomme pas à de tels postes. Nous devons donc composer avec les récits anecdotiques que l'on entend.
J'ai de la difficulté à me faire à l'idée que des gens ne soient pas tenus d'être au courant de ce qui devrait être en place. À votre avis, les membres du conseil d'administration devraient-ils tous comprendre les règles et les obligations entourant leur présence ou non, ou est‑ce que tout le monde abusait de la situation? Certains l'ont-ils fait, ou tous faisaient-ils à leur tête, pour ainsi dire?
Je trouve cela difficile à accepter, car ce sont souvent des nominations politiques, et on serait porté à penser qu'il y aurait, en fin de compte, une certaine compréhension de la responsabilité publique.
Pouvez-vous m'expliquer ce qui s'est passé dans la salle du conseil d'administration? Que s'est‑il passé, selon vous? Pensez-vous que ces gens se sont abstenus de faire consciencieusement leur travail de veiller à l'utilisation judicieuse de l'argent des contribuables?
:
Je ne peux pas vous dire ce qui s'est passé dans la salle du conseil d'administration. Je peux simplement dire que dans l'état actuel des choses, c'est une entreprise. Elle a son propre code de conduite et ses propres règles en matière de conflits d'intérêts. Il s'agit d'un excellent code qui, dit en passant, inclut la loi et indique que l'entreprise est tenue de s'y conformer. Il y a un secrétaire général qui informe tous les membres, au moment de leur nomination, de l'existence d'un code régissant les conflits d'intérêts qu'ils doivent respecter, qu'ils doivent signer, etc. S'ils le veulent, ils peuvent nous demander de faire une présentation sur la loi, ce que nous ferons avec plaisir.
N'oubliez pas que ce sont des gens d'affaires. Ils siègent à d'autres conseils d'administration, et cela n'a rien de nouveau pour eux. Ils savent qu'ils sont tenus de déclarer tout conflit d'intérêts. S'ils ont reçu les directives appropriées, ils doivent non seulement le déclarer, mais ils doivent aussi sortir de la salle. Ils ont possiblement supposé, comme cela se fait dans d'autres entreprises, qu'ils pouvaient rester tant qu'ils s'abstenaient. Cela dépend des règles internes.
Je ne sais vraiment pas dans quelle mesure ils ont été informés des règles ou dans quelle mesure on leur a rafraîchi la mémoire. Curieusement, ce conseil n'avait pas de secrétaire général, mais seulement un secrétaire de séance. J'ignore comment on peut gérer une entreprise sans secrétaire général, car c'est habituellement lui qui convoque les réunions, rassemble les documents et informe tout le monde, mais c'est ainsi qu'ils fonctionnaient. Je ne sais pas à quel point on a mis l'accent sur les conflits d'intérêts.
Monsieur Aquilino, vous avez examiné tous les procès-verbaux. Veuillez m'aider à compléter la réponse.
:
Monsieur Cooper, vous n'avez pas la parole.
J'ai écouté le rappel au Règlement qui a été fait, et c'est encore la même chose: c'est une question de pertinence. Mon interprétation des sujets qui peuvent être abordés est très libérale. Je suis généreux. Cependant, je n'arrive pas à faire le lien avec le sujet qui nous occupe.
M. Perkins et ses collègues nous ont convoqués au cours de l'été en invoquant l'article 106(4) du Règlement afin de consacrer trois heures du temps du Comité pour discuter de TDDC. J'aimerais que nous parlions de TDDC.
S'il vous plaît, monsieur Cooper, pouvez-vous...
:
Monsieur Cooper, je veux seulement...
[Français]
Peu importe comment vous l'expliquez, monsieur Cooper, et les sujets sur lesquels vous voulez poursuivre. Les comités sont souverains. Si vous voulez poursuivre sur ce sujet, cela m'est égal, mais il faudrait qu'une motion votée par le Comité détermine que c'est ce dont nous voulons parler.
[Traduction]
Si vous voulez mener une étude sur les questions que vous avez posées au commissaire, eh bien soit, mais le Comité doit adopter une motion en ce sens. Les points que vous soulevez ne se rattachent tout simplement pas à l'ordre du jour de la séance d'aujourd'hui.
Madame Jones, je vous cède la parole sur votre rappel au Règlement.
:
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, bonjour et merci.
C'est avec plaisir que j'ai accepté votre invitation en vue de discuter des constatations, de l'analyse et des conclusions contenues dans le rapport du commissaire.
Je tiens à souligner aux membres du Comité et aux Canadiens que, le jour de la publication du rapport, j'ai immédiatement accepté les conclusions du commissaire, tout comme il a accepté que j'avais agi de bonne foi et que j'avais dûment demandé des conseils juridiques pour assurer le respect de toutes les lignes directrices établies.
Je vais le répéter. J'accepte toutes ses conclusions, tout comme il accepte que j'ai, en tout temps, agi de bonne foi et avec les meilleures intentions.
Puisque nous sommes ici pour discuter du rapport du commissaire, je vais aller directement à la source.
Dans son rapport, le commissaire a conclu, et je cite: « À mon avis, Mme Verschuren a pris ce qu'elle estimait à l'époque être des mesures adéquates pour s'assurer que ses intérêts n'interféraient pas avec l'exercice de ses fonctions officielles à titre de présidente du conseil d'administration de TDDC. Elle pensait à ce moment‑là avoir agi sans outrepasser les limites de la Loi. »
Plus tard, il a conclu, et je cite encore une fois: « Aucun élément de preuve n'indique que Mme Verschuren a tenté d'influencer la décision de ses collègues du conseil d'administration de TDDC. »
Il a également conclu, et je cite une fois de plus: « Il est regrettable qu'un manque d'uniformité dans les processus décisionnels de TDDC, en plus d'un avis juridique inexact, ait conduit Mme Verschuren à s'écarter de cette pratique habituelle et donc à contrevenir à la Loi. »
Je tiens à dire aux membres du Comité et aux Canadiens que j'ai fait confiance aux conseils juridiques professionnels et expérimentés qui m'ont été donnés. J'ai suivi les pratiques du conseil d'administration de TDDC qui avaient été établies avant mon entrée en fonction. J'ai toujours pris ce que je croyais être les mesures qui s'imposaient.
Aux yeux du commissaire, ces pratiques établies étaient déficientes. Cet avis juridique n'allait pas assez loin. Je me suis abstenue de voter alors que, selon lui, j'aurais dû prendre la mesure supplémentaire de me récuser. J'accepte ses conclusions, tout comme il accepte que j'ai agi de bonne foi et que j'ai respecté ce que je croyais être le bon ensemble de mesures.
Merci, monsieur le président.
Je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions.
:
En ce qui concerne les conflits d'intérêts, la vérificatrice générale a eu recours à un échantillon de 226 projets sur 5 ans, sur un total de plus de 400 approuvés par le conseil d'administration. De ces 226 projets, 186 votes ont été associés à un conflit d'intérêts au sein du conseil. Autrement dit, dans 82 % des échantillons recueillis par la vérificatrice générale, les membres du conseil étaient en situation de conflit d'intérêts.
Il me semble que les membres du conseil étaient surreprésentés dans l'attribution des quelque 800 millions de dollars — 836 millions de dollars — que représentaient ces votes. Dans 82 % des cas, les fonds ont été octroyés à des membres du conseil qui se trouvaient en situation de conflit d'intérêts.
Des témoins qui ont comparu devant le Comité nous ont dit que lorsque vous avez été nommée alors que vous étiez en situation de conflit géré — et vous êtes la première présidente de l'histoire de TDDC à être nommée alors qu'elle était dans une telle situation —, la culture a changé. En fait, des collègues du conseil d'administration et l'ancienne présidente ont fait valoir, dans le cadre de leurs témoignages, qu'un des membres du conseil d'administration avait dit: « Oh, nous pouvons gérer les conflits, alors je vais ramener certains projets sur la table. »
N'est‑il pas vrai que votre leadership a créé une culture qui a fait en sorte que 82 % des membres du conseil d'administration ont reçu la grande majorité des fonds, soit plus de 330 millions de dollars, pour des entreprises avec lesquelles ils se trouvaient en situation de conflit d'intérêts? Ce n'était pas le cas auparavant.
Même si vous dites que cela a été fait en toute innocence, lorsque 82 % des membres du conseil d'administration — y compris vous-même — prennent des décisions qui donnent lieu à un conflit d'intérêts, cela n'a pas l'air innocent; cela ressemble plutôt à un plan.
Je suis un immigrant. Je suis arrivé dans ce merveilleux pays il y a 20 ans. Chaque fois que je voyage à l'étranger et que je vois ma famille, mes parents et mes amis, je dis toujours avec fierté que le Canada est un pays exempt de corruption. Je sais pertinemment, d'après mon expérience à la Chambre des communes, que mes collègues ne sont pas corrompus. Malheureusement, je ne peux pas défendre les gestes que vous avez posés dernièrement.
On pourrait dire que la première fois, c'était une erreur. On pourrait dire que la deuxième fois était aussi une erreur; mais si la situation se reproduit 24 fois, nous sommes face à un problème systémique. Puisque 82 % de vos collègues siégeant au conseil d'administration sont impliqués dans cette affaire, on peut dire qu'il s'agit d'un club d'initiés.
Lorsque TDDC a été créé, les Canadiens croyaient que l'organisme serait indépendant du gouvernement du Canada. Le gouvernement a fait en sorte qu'il soit indépendant pour que des professionnels puissent gérer les fonds des contribuables de façon éthique et productive, en gardant le processus décisionnel à l'écart des politiciens. Cependant, vous et votre conseil d'administration avez tout gâché.
Je me suis lancé en politique avec trois objectifs. Mon troisième objectif était de veiller à ce que le Canada demeure à l'avant-garde de l'économie du savoir, qui est en croissance dans le monde. J'ai siégé au conseil d'administration d'Investir Ottawa, dont l'un des principaux objectifs était de promouvoir les industries du savoir dans la ville d'Ottawa. Lorsque TDDC a été créé, j'étais très heureux. Beaucoup d'entre nous se réjouissaient à l'idée que les technologies propres reçoivent l'aide dont elles ont besoin. Cependant, en quelques coups, vous et vos collègues du conseil d'administration avez détruit l'organisation. Je suis vraiment désolé de le dire.
Comme je l'ai dit plus tôt, si la situation se produit une fois, ce peut être une erreur, mais pas 24 fois. Encore aujourd'hui, après avoir lu le rapport du commissaire, pensez-vous qu'il s'agissait d'une erreur technique?
Permettez-moi de revenir en arrière. J'ai voulu savoir quelle était la différence entre un conflit d'intérêts et la corruption. La ligne est très mince. Il y a beaucoup de zones grises, mais quand plusieurs cas de conflits d'intérêts se produisent en peu de temps et qu'ils se produisent entre très peu de membres, on passe du côté de la corruption.
Êtes-vous d'accord avec cela?
:
Ce que vous dites, c'est que vous étiez en situation de conflit d'intérêts, mais que vous n'aviez pas investi directement.
J'ai travaillé dans le secteur privé avant d'être élu. Je comprends comment les choses fonctionnent: un service en attire un autre. S'il n'y avait eu qu'une seule erreur à propos de la définition relative à la déclaration des conflits d'intérêts ou à la récusation, et que la situation se limitait à cela, j'aurais compris. Toutefois, les chiffres ne sont pas rassurants. La situation s'est produite à 24 reprises, avec 82 % des membres du conseil. Comment a‑t-elle pu ainsi se reproduire?
Je suis vraiment désolé. À mon avis, cela a mené à la destruction d'une grande institution, qui avait été fondée dans l'objectif louable de promouvoir les technologies propres au Canada.
Êtes-vous satisfaite de ce qui est advenu du fonds, et de ce qui arrive aujourd'hui? Comment réagissez-vous?
:
M. Généreux, ici présent, me suggérait de parler en anglais, mais nous, au Bloc, nous ne faisons pas cela. À Ottawa, nous parlons français, évidemment. Nous ne sommes pas des conservateurs.
Madame Verschuren, je vais vous dire très franchement que j'ai été choqué par vos remarques d'ouverture. En fait, quand une personne normale et intelligente lit le rapport du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, elle ne peut l'interpréter d'aucune autre façon que comme un blâme sévère à votre endroit, à votre gestion et à votre jugement. Finalement, cela ne fait qu'éroder la confiance du public dans la gestion gouvernementale, ce qui est très grave.
Quand vous dites que vous acceptez les recommandations et le rapport, vous nous présentez cela comme si vous aviez eu une motion de félicitations, comme si vous aviez été de bonne foi, entre autres. Vous avez trouvé les quelque trois lignes du rapport où il y avait quelque chose de positif. Vous aviez violé la loi 24 fois. Le Canadien de Montréal a gagné 24 Coupes Stanley. Est-ce qu'on vous fait un trophée?
Je vais vous expliquer pourquoi je vous pose cette question. Vous commencez la conversation en nous disant que vous acceptez les conclusions et que, finalement, c'est positif et que vous étiez de bonne foi dans tout cela. Vous semblez ne pas être encline à accepter quelque erreur que ce soit.
Je vous pose donc de nouveau la question de mes collègues. Avez-vous violé la Loi sur les conflits d'intérêts à au moins 24 reprises?
Je ne vous demande pas quelle était votre intention parce que, de toute évidence, votre jugement est discutable.
Avez-vous violé la Loi sur les conflits d'intérêts à au moins 24 reprises?
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Ainsi, malgré toutes vos années d'expérience, vous avez décidé de simplement vous abstenir de voter.
Il m'est déjà arrivé d'être absent pour un vote à la Chambre des communes après avoir participé au débat. Comme contribuable, comme électeur, comme membre du public et comme personne qui paie des impôts à partir desquels on a perçu des sommes pour financer Technologies du développement durable Canada, ou TDDC, qu'est-ce qui m'assure que, même si vous n'avez pas voté, vous n'avez pas tenté d'influencer le vote des autres?
Moi, qui possède trois ans d'expérience en politique, j'ai déjà compris cela. Comment se fait-il que vous, vous ne compreniez pas cette logique?
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Je me permets de vous interrompre poliment, parce qu'il me reste une seule minute. Je pense que la question est importante. Ne le prenez pas comme un manque de respect.
Je comprends que, dans la preuve tangible qui était vérifiable par le commissaire, on n'a pas pu démontrer cela.
Je reprends le préambule de ma question.
Pour ma part, comme électeur, comme citoyen et comme personne qui paie des impôts, qui constate qu'un tiers de milliard de dollars a servi à financer des entreprises de membres du conseil d'administration, puis-je avoir confiance en vous, madame Verschuren?
Comment mes électeurs peuvent-ils ainsi croire que vous n'auriez pas tenté d'influencer les décisions, même si le procès-verbal indique que vous n'avez pas voté?
Comment peut-on vous faire confiance, madame Verschuren?
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Merci, monsieur le président.
J'essaie aussi de me faire une idée de ce qui s'est passé là‑bas, dans la salle du conseil.
Madame Verschuren, vous avez dit avoir assumé votre responsabilité en acceptant le rapport du commissaire. Pourtant, vous répétez dans vos réponses ce que le commissaire a dit dans le rapport — et je suis sûr que vous pouvez le faire de nouveau —, mais vous avez également affirmé avoir suivi les pratiques établies par TDDC avant votre arrivée.
Pourriez-vous nous en dire plus à ce propos? Est‑ce la pratique qui était mise en application? Le problème de conflit d'intérêts dont vous avez assumé la responsabilité est‑il le fruit d'un comportement acquis au sein du conseil d'administration lorsque vous y siégiez?
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Pouvez-vous expliquer les différences entre votre vote et celui de quelqu'un d'autre? Dans la salle du conseil, vous passez suffisamment de temps ensemble pour connaître la vie des uns et des autres. Je crois comprendre, d'après les témoignages précédents que j'ai demandé, que des comportements sociaux avaient cours au sein du conseil d'administration. Je suppose donc que vous vous connaissiez tous assez bien.
Vous avez dit que vous suiviez des pratiques datant d'avant votre arrivée. Que saviez-vous au sujet du conseil d'administration précédent, de ses membres et de ses pratiques de vote? Où avez-vous obtenu ces informations? Est‑ce que d'autres collègues du conseil d'administration en ont parlé, ou est‑ce quelque chose qui a été porté à votre attention?
De toute évidence, vous êtes ici pour une raison, et le commissaire à l'éthique a clairement remis un rapport faisant état de sa conclusion, mais ce qui n'est pas clair, c'est la pratique générale au sein du conseil.
Je pense une fois encore que certaines personnes qui, comme moi, ne connaissent pas ces postes privés et privilégiés, peinent à comprendre que les règles de base n'ont pas été appliquées, que ce soit par vous à titre individuel ou par l'ensemble du conseil. Ce qui me tracasse, c'est jusqu'à quand cette pratique remonte. Vous avez déjà indiqué qu'elle datait d'avant votre arrivée là‑bas.
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Madame Verschuren, le bureau du commissaire vient de dire, pour que ce soit clair, qu'il y avait 24 conflits d'intérêts, et non pas deux.
Cependant, je veux revenir à ma question sur la façon dont vous avez été nommée.
Vous avez dit que vous n'avez pas posé votre candidature, que le vous a approchée et que vous avez eu deux conversations avec lui pour que vous vous présentiez.
Cependant, nous avons également le témoignage du ministre libéral de l'Industrie, qui a dit avoir reçu une liste du Bureau du Conseil privé, et que c'est avec ce dernier qu'il avait communiqué. La responsable des nominations au Bureau du Conseil privé, qui était en poste lorsque vous avez été nommée, a dit qu'elle avait proposé six noms au ministre Bains. Quand on lui a demandé si quelqu'un qui ne figurait pas sur cette liste avait déjà été nommé, elle a répondu que non, pas à sa connaissance. Cependant, vous n'avez pas posé votre candidature. Je ne vois donc pas comment vous auriez pu figurer sur la liste que le ministre Bains a ensuite examinée.
Qui, alors, a induit le Comité en erreur: le ministre Bains et le ministère du , le BCP, au sujet des nominations, en disant que vous aviez postulé, ou vous en affirmant ne jamais avoir posé votre candidature?
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Dans ce cas, je passerai à autre chose.
Il est important que nous continuions à investir dans ces industries et que le gouvernement continue à les soutenir, mais les problèmes, les préoccupations et les défis que l'industrie a rencontrés se sont vraiment révélés difficiles.
Vous n'êtes pas la seule à mériter le blâme ici. Je jette une partie du blâme sur les conservateurs, qui continuent à critiquer le financement des technologies propres et à essayer de déprécier un fonds qui fait partie d'un écosystème plus vaste qui soutient une industrie hautement novatrice et concurrentielle au Canada. Le secteur propre est un moteur clé de l'innovation dans notre pays. Les conservateurs adorent déplorer qu'il y a une crise de productivité au Canada, mais ils dénigrent effrontément certaines de nos industries les plus concurrentielles. Nous savons que les conservateurs ne cherchent pas à trouver des solutions. Ils mettent en péril l'avenir de toute cette industrie.
Je m'arrêterai ici.
Je vous remercie, monsieur le président.
Écoutez, comme la motion n'a pas été envoyée dans les deux langues, mais qu'elle le sera incessamment, je vous propose, en attendant, de suspendre la séance pendant quelques minutes, le temps que tous les députés puissent la recevoir, la lire, se forger une opinion, et que nous reprenions la séance ensuite.
Monsieur Masse, vous avez la parole.
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Je vous remercie, monsieur Masse, de cet avis de motion.
Des collègues viennent de m'informer que j'aurais eu besoin du consentement unanime pour que cette motion soit retirée.
[Français]
Monsieur Garon, le consentement unanime du Comité était nécessaire pour retirer votre motion jusqu'à ce que vous puissiez la faire traduire. J'ai tenu pour acquis qu'il y avait consentement unanime, mais je veux juste en être sûr.
Est-ce qu'il y a consentement unanime pour retirer la motion? Elle sera présentée à nouveau d'ici la fin de la rencontre.
Puisque personne ne s'y oppose, je cède la parole à M. Généreux.
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Merci, monsieur le président.
Madame Verschuren, le commissaire au conflit d'intérêts et à l'éthique a déterminé que vous aviez été coupable de conflit d'intérêts dans votre rôle de présidente du fonds Technologies du développement durable Canada à 24 reprises.
Madame, j'ai un diplôme d'études secondaires et en débosselage. J'ai toujours su que si je m'accordais des avantages avec l'argent des autres, j'étais dans l'erreur. Comment se fait-il que vous ne l'ayez pas su, malgré toute l'expérience que vous aviez, lorsque le gouvernement libéral vous a mis à ce poste? D'ailleurs, vous avez affirmé, tout à l'heure, que vous aviez dû parler au commissaire au conflit d'intérêts et à l'éthique avant votre entrée en fonction, puisque vos entreprises avaient déjà reçu de l'argent.
Pourquoi avez-vous accepté ce poste?
Je sais que mon collègue a déjà mentionné que vous avez fait des dons au Parti conservateur à plusieurs reprises. Ce qui me pose problème, c'est que je pense que vous avez reconnu, du moins dans une certaine mesure, les erreurs que vous avez commises et que vous avez dit regretter de ne pas vous être récusée alors que vous auriez dû le faire. Je dirais que vous auriez dû savoir qu'il fallait vous récuser, car cela figure dans le Code régissant les conflits d'intérêts que vous étiez censée respecter. Essentiellement, vous étiez responsable, en tant que présidente du conseil d'administration, et je pense que vous avez exprimé des regrets.
Cependant, ce qui me pose problème, c'est que les conservateurs vous qualifient de proche du parti libéral, ce qui, à mon avis, n'est pas la vérité. Je crois que vous avez fait des dons au Parti conservateur, que vous avez accepté maintes nominations au fil des ans et que vous avez servi sous un certain nombre de chefs conservateurs au pays. Vous avez donné 1 675 $ à la campagne à la direction de Jean Charest, comme l'a fait M. Perkins qui est membre de ce comité, et je voulais vous demander si vous étiez aussi conservatrice que M. Perkins peut l'être, ou aussi libérale que lui.
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Si vous me le permettez, je vais juste commenter la motion rapidement. Je sais que le temps est précieux et que chacun et chacune l'a reçue par voie écrite. Je vous présente mes excuses en ce qui concerne la procédure et, la prochaine fois, s'il y en a une, je tâcherai d'envoyer ma motion dans les deux langues officielles.
Il s'agit tout simplement d'une motion demandant que la vérificatrice générale nous fournisse une liste des entreprises qui auraient reçu des sommes de la part de TDDC en violation de la loi et des règles d'éthique. Une motion ayant un contenu similaire a été adoptée au Comité permanent des comptes publics, et il m'apparaît important que le Comité permanent de l'industrie et de la technologie en adopte une également, puisque, évidemment, le ministre de l'Industrie se rapporte directement au Comité.
J'ajouterai un seul élément qui, je crois, est important. Dans le cadre de tous les événements qui sont survenus autour de TDDC, il convient de rappeler que la transition verte est importante, qu'il faut des investissements gouvernementaux et que la transition verte est un bien public.
Comme je l'ai déjà dit à certains témoins que nous avons reçus, je pense qu'une partie de la tragédie liée à TDDC, mis à part le fait qu'on a peut-être miné de façon importante la confiance du public quant à l'utilisation des deniers des contribuables, est qu'on a dû geler les fonds d'entreprises qui avaient un impact positif sur nos communautés et notre économie, et qu'on a nui à la transition verte. Je pense que certaines entreprises devront faire des remboursements selon des critères objectifs. À mon avis, il est normal de suggérer à la vérificatrice générale de nous fournir une liste des entreprises visées. Par ailleurs, il faut souligner que les entreprises qui n'ont rien à se reprocher sont protégées de cette démarche.
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Merci, monsieur le président, et je remercie mon collègue d'avoir présenté cette motion.
Il n'a pas à nous offrir ses excuses. Nous menons une enquête longue et difficile, et d'autres comités du Parlement se penchent maintenant sur la question. Je lui suis en fait reconnaissant pour cette motion, car il a raison.
Malheureusement, la situation fait toujours des victimes, et il y a deux ou trois choses que j'aimerais encore que l'on puisse régler, à savoir le rétablissement complet de l'indemnisation des employés et des dénonciateurs. Les ententes de confidentialité et de non-divulgation qu'ils ont été forcés de conclure devraient éventuellement être déchirées. Nous cherchons simplement le bon moyen de le faire. Ce ne serait pas le cas avec cette motion, car elle porte expressément sur la vérificatrice générale.
Je pense que c'est une motion très judicieuse, car elle fait appel à cette tierce partie qu'est la vérificatrice générale, et non pas au Comité ou au Parlement. Il est important de passer en revue les différentes entreprises pouvant être concernées, car nous voulons que le processus soit objectif et indépendant. Beaucoup de parlementaires et de Canadiens ont pleinement confiance dans le processus en place au Bureau du vérificateur général. Je pense que le recours à la vérificatrice générale par le motionnaire est en fait très pertinent.
Je conclurai simplement en disant que nous ne voulons pas laisser passer l'occasion pour les bonnes entreprises d'obtenir le soutien qu'elles méritent pour l'écologisation de l'économie. Nous avons besoin d'innovation et nous devrions mettre de côté les entités qui n'ont pas vraiment utilisé cette aide de façon responsable, afin de pouvoir récupérer cet argent pour qu'il soit mieux investi.
Sur ce, je peux vous dire que les néo-démocrates appuieront cette motion, et je remercie mon collègue de l'avoir présentée. C'est simple et direct, et on sauvegarde l'objectivité du Parlement en confiant cette tâche liée à la reddition de comptes à la vérificatrice générale, une tierce partie, pour que nous puissions savoir exactement comment procéder à la prochaine étape. Je pense que c'est une façon très sage d'aborder la question.
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J'aurais quelques réserves concernant cette motion. Je vais en citer un extrait, puis je vous dirai ce que j'en pense.
Il y a notamment le passage « le Comité manifeste qu'il est d'avis que les entreprises fautives ».
Tout d'abord, je me pose la question: est‑ce que ce sont les entreprises ou les membres du conseil d'administration qui ont été fautifs? Ce sont ces derniers qui auraient contrevenu au code de conduite. Ce ne sont pas nécessairement les entreprises. Il y a peut-être de nombreuses entreprises qui ont obtenu de TDDC un financement qui était justifié et pour lequel on a fait preuve de diligence raisonnable, ou il pourrait y en avoir, de mon point de vue, en tout cas. Je me souviens d'avoir pris connaissance dans de nombreux rapports d'une foule de renseignements détaillés sur la diligence raisonnable dont on a fait preuve au niveau organisationnel pour que le conseil d'administration approuve les décisions de financement.
À qui demandons-nous de déterminer qui a agi de mauvaise foi et qui a agi de bonne foi? Comment pouvons-nous le savoir? Nous demandons à la vérificatrice générale de faire ce travail. Nous lui demandons de le déterminer. La vérificatrice générale a déjà mené une enquête et n'a pas été en mesure de tirer cela au clair. Son bureau a conclu qu'il y avait apparence de conflit d'intérêts, et le commissaire — j'utilise ses propres termes — a parlé d'« une violation de forme ». Nous pourrions ne pas être d'accord à ce sujet; peut-être que certaines personnes estiment qu'il y a eu plus qu'une violation de forme. Je conviens tout à fait que Mme Verschuren et certains autres membres du conseil auraient dû savoir qu'ils auraient dû se récuser et qu'il était de leur responsabilité de connaître la teneur du Code régissant les conflits d'intérêts, mais ils ont aussi tous perdu leur poste. Est‑ce suffisant? Je ne sais pas si vous estimez que c'est suffisant.
Quand je considère tout cela, je me demande qui va déterminer qui a agi de mauvaise foi. Sommes-nous en train de dire que la vérificatrice générale doit faire enquête sur chaque entreprise pour déterminer qui a agi de mauvaise foi? Je ne suis pas certain que la vérificatrice générale serait en mesure d'en arriver à une telle conclusion. Je ne sais pas ce que mes collègues en pensent, mais il me semble que ce serait beaucoup demander à la vérificatrice générale. Vous lui demandez ensuite de déclarer qui a agi de mauvaise foi pour que l'on puisse récupérer des fonds, n'est‑ce pas? C'est ce que prévoit essentiellement cette motion.
Je ne sais pas si la vérificatrice générale... Cela impose beaucoup d'exigences à la vérificatrice générale, qui est censée fonctionner de façon indépendante. Nous ne sommes pas censés donner des directives à la GRC ni au commissaire à l'éthique. Nous pouvons déposer des plaintes, et ils enquêtent s'ils jugent bon de le faire. La GRC, la vérificatrice générale et le commissaire à l'éthique sont des agents indépendants qui sont censés faire leur travail indépendamment de nous, alors si nous disons maintenant à la vérificatrice générale qu'elle doit en arriver à une conclusion, je pense que nous outrepassons notre rôle au Parlement. Convainquez-moi du contraire.
L'autre partie qui me pose problème, c'est celle où l'on dit « le laxisme du gouvernement dans la mise en œuvre du programme Technologies du développement durable Canada ».
Je ne suis pas d'accord, monsieur Garon. Je ne crois pas du tout que le gouvernement fasse preuve de laxisme. TDDC est un organisme autonome qui fonctionne en toute indépendance depuis de nombreuses années. Alors, dans quelle mesure le gouvernement en place devrait‑il être tenu responsable de la surveillance de ses activités? Vous et moi pourrions en discuter pendant le reste de la réunion, alors allons‑y. Très bien; discutons‑en pendant 10 réunions, si vous voulez. Cela ne me dérange pas.
Je ne suis pas d'accord, et je vais présenter des arguments qui vont dans le sens contraire de ce que vous allez dire. Je ne crois pas du tout que le gouvernement ait fait preuve de laxisme à l'égard de TDDC, et je vais défendre cette position.
Merci.
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Entendre M. Turnbull faire de l'obstruction sur une motion de l'opposition alors que nous sommes habitués à l'entendre sur son propre projet de loi, cela nous change un peu.
Blague à part, le Comité et le Parlement n'ont pas à dire à la vérificatrice générale ce qu'elle doit faire, on le sait. C'est exactement dans cet esprit que la motion a été rédigée.
Nous suggérons à la vérificatrice générale de nous fournir une liste. Est-elle obligée de se conformer à la motion? La réponse est non, mais elle saura qu'il y a une volonté de la part du Parlement et du Comité d'en apprendre davantage sur cette situation. Cela devient difficile, à un moment donné, de rédiger une motion comme celle-là. En fait, c'est la façon la plus consensuelle de le faire.
En ce qui concerne l'ensemble de ce qui a été énoncé par notre collègue M. Turnbull, je dirais que, d'entrée de jeu, le Comité permanent des comptes publics a adopté une motion à l'unanimité, si je ne m'abuse, réclamant que certaines sommes soient obligatoirement remboursées par le ministre dans un délai de 100 jours. Il existe donc une présomption voulant que certaines entreprises aient pu recevoir certaines de ces sommes. Les libéraux sont d'accord sur cette présomption, tout comme les conservateurs et les néo-démocrates, si je ne m'abuse.
Tout à l'heure, le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique a mentionné qu'à l'époque, le ministre Bains disposait de certains outils qui lui permettaient d'éviter ce genre de situation et que ces outils existaient bel et bien. Le ministre avait-il cette information? Avait-il des raisons d'utiliser ces outils? Ce sera à vérifier.
Cela étant dit, absolument rien dans cette motion ne contraint la vérificatrice générale ni ne condamne le gouvernement à l'avance. S'il arrivait que la vérificatrice générale décide de considérer la motion, qui est non contraignante, et s'il arrivait que M. Turnbull ait raison et que le gouvernement ait été absolument diligent dans sa façon d'opérer avec TDDC, je ne vois pas pourquoi le parti au pouvoir aurait quelque réticence que ce soit à appuyer une telle motion. Ce serait difficile à comprendre. En effet, quand on n'a rien à cacher, on ouvre les livres.
Merci, monsieur le président.
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Je dirais que c'est ce que nous avons fait dès le premier jour. J'ai ici une liste — il y en a pour une page et demie — de toutes les interventions et du travail que notre gouvernement a accompli pour aller au fond des choses et exposer tous les faits dans ce cas particulier. On y fait état de tous nos efforts de collaboration avec des agents indépendants. Il n'y a rien à cacher.
Je ne peux pas, en toute bonne foi, appuyer une motion qui inclut le point suivant: « le laxisme du gouvernement dans la mise en oeuvre du programme Technologies du développement durable Canada ». Il faudrait que je souscrive à cette affirmation, et ce n'est pas le cas. Je ne crois pas que le gouvernement ait fait preuve de laxisme. Je pense que dès que nous avons été mis au courant des allégations de mauvaise gestion et d'inconduite, nous avons pris les mesures nécessaires, et je le maintiens. Si je croyais le contraire, je le dirais. J'estime vraiment que nous avons agi rapidement et que nous avons collaboré volontiers avec tous les experts et les groupes indépendants.
Si vous retiriez cette mention, je pense que nous pourrions appuyer la motion.
Il est effectivement bon de souligner que cela est simplement proposé à la vérificatrice générale, ce qui me rassure quelque peu.
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Nous avons entendu l'amendement proposé par M. Turnbull. Je ne sais pas en fait s'il s'agit de l'amendement proposé par M. Masse ou par M. Turnbull, mais disons que c'est celui de M. Turnbull, par souci de clarté.
Y a‑t‑il consensus autour de la table, ou devrions-nous mettre la motion aux voix?
Vous avez tous entendu l'amendement proposé par M. Turnbull à la motion.
(L'amendement est adopté par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
Le président: L'amendement est adopté, ce qui nous ramène à la motion modifiée.
[Français]
Y a-t-il d'autres commentaires sur la motion telle qu'elle est modifiée? D'accord.
Nous passons au vote sur la motion modifiée.
(La motion est adoptée par 11 voix contre 0.)