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Chers collègues et amis, j'ouvre maintenant la séance.
Bienvenue à la 83e réunion du Comité permanent de l'industrie et de la technologie de la Chambre des communes.
Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 17 avril 2023, nous poursuivons notre étude du projet de loi , plus précisément l'étude article par article. La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022.
J'invite les députés à prendre connaissance des directives en ce qui concerne l'utilisation des oreillettes et du microphone pour s'assurer qu'il n'y a pas d'écho ou de son aigu qui pourraient incommoder nos interprètes, que nous remercions au passage et, même, que nous applaudissons. Je les remercie sincèrement de tout ce qu'ils font.
Nous avons de nouveau parmi nous, du ministère de l'Industrie, M. Mark Schaan, sous-ministre adjoint principal, Secteur des stratégies et politiques d'innovation; M. Jamieson McKay, directeur général, Stratégie, innovation et politique; M. James Burns, directeur principal, Direction générale de l'examen des investissements; et Mehmet Karman, analyste principal de politiques, Direction générale de l'examen des investissements. Ils sont avec nous pour répondre à nos questions.
Merci à vous tous de vous joindre à nous. Encore une fois, je vous offre mes excuses: c'est la saison des votes à la Chambre, et nous avons donc souvent un peu de retard.
(Article 16)
Le président: Chers collègues, commençons sans plus tarder. Vous vous souviendrez que nous étions rendus à l'article 16 du projet de loi et que M. Perkins avait proposé l'amendement rebaptisé CPC‑11.2 et portant le numéro 12525376.
Monsieur Perkins, vous avez la parole.
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À titre de précision, c'est l'amendement que j'ai distribué à la fin de la dernière réunion et dont le numéro de référence se termine par 376. Tout le monde devrait avoir ce document.
Comme nous le savons, cet amendement porte sur l'article 16. Il découle de la recommandation no 6 du rapport du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie sur la Loi sur Investissement Canada, publié en 2021. Voici le libellé de la recommandation no 6:
Que le gouvernement du Canada encourage les entités canadiennes à conserver la propriété des biens incorporels développés grâce à des fonds fédéraux, y compris la propriété intellectuelle, en leur demandant, lorsque c’est approprié de le faire, de rembourser les montants qui leur ont été versés dans le cadre de programmes fédéraux ou de subventions, en tout ou en partie.
L'amendement est proposé en réponse à cette recommandation. Le rapport précisait alors que la question n’est pas de savoir si un investissement étranger peut être préjudiciable à la sécurité nationale. Pratiquement tous les témoins entendus dans le cadre de ce rapport ont affirmé que c’était le cas. La question est plutôt de savoir si la Loi sur Investissement Canada est rédigée et exécutée d’une façon qui protège efficacement le Canada dans un contexte en constante évolution.
En ce qui concerne les biens incorporels, nous avons entendu beaucoup de témoignages sur la façon dont notre économie a évolué au cours des 20 dernières années, passant d'une économie fondée sur les biens corporels, comme l'a dit M. Balsillie, à une économie fondée sur les biens incorporels. En effet, plus de 90 % de la valeur du S&P 500 se trouve maintenant dans des biens incorporels.
Ces biens sont une source de préoccupations, notamment pour ceux qui ont été développés au Canada. Les fonctionnaires d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada ont probablement des chiffres plus précis que les miens, mais d'après mes calculs approximatifs, en incluant le crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, nous dépensons environ 16 milliards de dollars dans ce domaine. Avec les conseils subventionnaires, les grappes, tous les programmes d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada, en plus du crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, nous dépensons beaucoup en innovation, ou plutôt en innovation menant à de la propriété intellectuelle, comme j'aime le préciser.
Nous avons entendu parler de problèmes auxquels les fonctionnaires ont été confrontés dernièrement. Par exemple, il y a eu des problèmes concernant Medicago, à Québec, dans le contexte de la COVID. En effet, plus de 200 millions de dollars de fonds publics ont été investis dans la production d'un vaccin à base de plantes pour lutter contre la COVID. Ce vaccin, qui a apparemment reçu l'approbation de Santé Canada, n'a jamais été mis en production. Or, cette entreprise a maintenant été vendue, et nous n'avons plus accès au vaccin.
Certains se disent inquiets, car ils pensent que nous voulons freiner la libre circulation des capitaux sur les marchés financiers. Ce n'est pas notre intention, mais si la propriété intellectuelle a été développée dans un contexte semblable, avec plus de 200 millions de dollars de fonds publics, il faudrait tenir compte de cet état de fait dans l'examen des avantages nets. Il faudrait également exiger que, si cette propriété intellectuelle quitte le pays, une partie, voire la totalité des fonds investis seront remboursés. Cela devrait faire partie du prix à payer pour faire des affaires.
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Voici où je veux en venir, monsieur le président. Les Canadiens investissent de deux façons dans la recherche et dans la valeur inhérente à la propriété intellectuelle.
L'une des façons, c'est en éduquant nos enfants. Nous éduquons les Canadiens. Ce sont les ressources humaines qui font tourner notre économie, et nous sommes très fiers du fait que la population de notre pays est bien éduquée et que nous effectuons des investissements raisonnablement élevés dans notre système d'éducation. Nous pourrions probablement en faire plus, mais je pense qu'il est juste de dire que le Canada est l'un des pays les plus instruits au monde. Cela devrait se refléter dans ce que produit notre économie, surtout en matière de propriété intellectuelle et de valeur incorporelle.
En tant que contribuables, nous investissons donc dans l'éducation de la population, mais aussi, directement, dans les établissements de recherche mis sur pied au sein même du gouvernement fédéral. Malheureusement, au fil des ans, il est devenu évident qu'une partie importante de cette recherche — et de sa valeur — échappe aux Canadiens, soit parce que ces entreprises ne peuvent pas ou ne veulent pas commercialiser leurs produits au Canada, soit parce qu'elles se font racheter et deviennent la propriété d'une autre entreprise ailleurs dans le monde. Les entreprises qui font ces acquisitions sont situées principalement aux États‑Unis, mais les sociétés chinoises et japonaises s'intéressent également à nos entreprises. Or, dans ces cas, la valeur de la recherche effectuée grâce aux investissements des contribuables canadiens est essentiellement perdue.
Cette recherche aura peut-être permis de créer des emplois temporaires dans le domaine de la recherche, mais au bout du compte, nous perdons la valeur réelle de cette recherche, c'est‑à‑dire la valeur de la propriété intellectuelle qui en découle. Voilà pourquoi j'estime qu'il est raisonnable de proposer cet amendement à l'article 16. Je crois qu'il servirait bien les Canadiens et qu'il encouragerait indirectement les contribuables à accueillir favorablement ce genre d'investissements. L'idée est que si un tel investissement est perdu à la suite d'un rachat par une entreprise étrangère, nous récupérerons au moins l'investissement initial.
Nous ne récupérerons jamais l'argent que nous investissons dans l'éducation de nos enfants, surtout si ces enfants quittent notre pays. Cet amendement est toutefois une mesure très concrète que nous pouvons prendre dans le cadre de nos responsabilités à l'égard des fonds publics investis dans la recherche. J'encourage toutes les personnes ici présentes à appuyer cet amendement.
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Merci beaucoup, monsieur Perkins.
S'il n'y a pas d'autres questions ou commentaires sur l'amendement LIB‑1, proposé par M. Lemire, je vais le mettre aux voix.
[Français]
L'amendement LIB‑1 est-il adopté?
(L'amendement est adopté par 7 voix contre 4. [Voir le Procès-verbal])
Le président: Y a-t-il d'autres amendements à l'article 17? Je constate que non.
[Traduction]
(L'article 17 modifié est adopté.)
(L'article 18 est adopté.)
(Article 19)
Le président: Nous passons maintenant à l'article 19. Y a‑t‑il des amendements à l'article 19?
Je cède la parole à Mme Lapointe.
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Si vous regardez les articles 15 et 16 du projet de loi, ils ouvrent la porte pour modifier l'article 25.4. C'est ce que j'ai compris avec l'aide du greffier législatif.
J'ai rendu ma décision sur votre recours au Règlement, monsieur Perkins, alors il n'y a pas lieu d'en débattre à ce stade‑ci. Je vous remercie d'avoir soulevé la question, car les décisions doivent être cohérentes les unes par rapport aux autres. Je vous remercie.
Cela dit, y a‑t‑il d'autres observations sur l'amendement LIB‑3 proposé par Mme Lapointe?
S'il n'y en a pas, je vais mettre l'amendement aux voix.
[Français]
(L'amendement est adopté par 10 voix contre 0. [Voir le Procès-verbal])
[Traduction]
Le président: S'il n'y a pas d'autres amendements à l'article 19, l'article 19 modifié est‑il adopté?
Y a‑t‑il d'autres amendements?
Je suis désolé, madame Lapointe. Je n'avais pas vu votre main.
Madame Lapointe, si je ne m'abuse, c'est l'amendement LIB‑4 que vous voulez proposer?
[Français]
Il s'agit d'un nouvel article, qui suivrait l'article 19.
[Traduction]
(L'article 19 modifié est adopté.)
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Monsieur le président, la modification proposée dans le paragraphe 20(1) vise à préciser que, si l'investisseur étranger « fait défaut de déposer un avis conformément à l’article 12 ou une demande d’examen conformément à l’article 17 », le ministre peut envoyer une mise en demeure exigeant que l'investisseur en question mette fin à la contravention, se conforme à la présente loi, démontre que celle‑ci n'a pas été violée ou, s'il a pris un engagement à cet égard, justifie cette contravention.
Dans le paragraphe 20(2), la modification à l'alinéa 39(1)b) reflète les changements apportés à l'article 12 et prévoit qu'un manquement à l’exigence de dépôt préalable à la réalisation des investissements permettra au ministre d'envoyer une mise en demeure à l'investisseur étranger afin d'exiger qu'il mette fin à la contravention, se conforme à la Loi sur Investissement Canada ou démontre que celle‑ci n'a pas été violée. Nous tenons à souligner qu'une mise en demeure n'est pas nécessaire pour présenter une demande d'ordonnance judiciaire en cas de manquement à l'exigence de dépôt, comme le prévoit le paragraphe 40(1) et comme l'indique l'article 21.
Dans le paragraphe 20(3), la modification reflète les changements apportés à l'article 25.3 et prévoit que le ministre peut envoyer une mise en demeure à l'investisseur étranger qui ne se conforme pas à ses engagements écrits « visés aux alinéas 25.3(6)c) ou 25.31a) ou à l'arrêté du ministre pris en vertu de l'article 25.3. » La mise en demeure exigera que l'investisseur mette fin à la contravention, se conforme à la présente loi, démontre que celle‑ci n'a pas été violée ou, s'il a pris des engagements, justifie cette contravention.
Enfin, monsieur le président, dans le paragraphe 20(4), la modification à l'alinéa 39(2)a) reflète les changements apportés aux articles 25.12...
:
Nous en sommes à l'article 23.
Monsieur Vis, si vous n'avez pas de questions, nous allons passer au vote par appel nominal sur l'article 23.
(L'article 23 est adopté par 11 voix contre 0.)
(Article 7)
Le président: Nous passons à l'article 7 que nous avions réservé lors de notre dernière réunion.
Le député Gaheer a présenté un sous-amendement à l'amendement CPC‑2. Pour être sûr que nous sommes tous sur la même longueur d'onde, le sous-amendement présenté par M. Gaheer lorsque nous avons décidé de reporter l'étude de l'article 7 correspond au numéro 12540657, si je ne m'abuse.
Je laisse à M. Gaheer le soin de nous parler du sous-amendement qu'il présente à l'amendement CPC‑2.
Monsieur Gaheer, vous avez la parole.
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Je vous remercie, monsieur le président.
L'amendement que nous présentons aurait une incidence sur trois articles, soit les articles 4, 7 et 8. Nous pouvons le diviser en trois parties, car il s'agit de trois amendements.
Le problème que nous posait l'amendement CPC‑2 était qu'il risquait de déboucher sur des contestations judiciaires et des représailles contre des investisseurs canadiens, comme les fonds de pension canadiens, ce que les fonctionnaires ont corroboré la dernière fois qu'ils ont témoigné.
Le compromis est triple. Il faut d'abord modifier le délai prescrit dans les paragraphes de l'article 15 parce qu'il est insuffisant. Le sous-amendement ferait passer de 21 à 45 le nombre de jours, ce qui correspondrait aux autres délais prévus dans la loi. Ce changement aurait une incidence sur l'article 4. Il faudrait donc demander le consentement unanime pour modifier l'article 4 également.
Il a été communiqué au Comité, et son numéro de référence est le 12543001.
M. Brad Vis: J'ai le 12540657.
M. Iqwinder Gaheer: Ce sera le deuxième sous-amendement.
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Merci, monsieur le président.
Je suis heureux que nous ayons un peu de souplesse pour comprendre de quoi il en retourne. Nous voulons nous assurer de bien faire les choses.
Nous avons indiqué qu'il s'agissait d'un de nos principaux amendements et, comme vous le savez, M. Fillmore et les députés ministériels se sont montrés très coopératifs au sujet de celui‑ci. Si je comprends bien, d'après un bref échange avec M. Gaheer, ce sous-amendement, advenant que nous l'adoptions, exige l'amendement d'autres articles. Il faudrait donc obtenir le consentement unanime pour revoir ces articles. S'il est adopté, je n'y vois pas d'inconvénients. Je veux simplement être certain de comprendre de quoi il en retourne.
L'objectif premier de l'amendement CPC‑2, comme nous le savons, est de déterminer comment s'y prendre avec les entreprises d'État en ce qui a trait aux seuils dans la loi et à ce que le ministre peut choisir d'examiner ou non. Je vais expliquer brièvement ce qui motive cet amendement, car je trouve important de comprendre le sous-amendement dans son contexte.
Dans le cas du CPC‑2, ni la Loi sur Investissement Canada ni le projet de loi n'exigent de faire automatiquement une demande d'examen pour déterminer l'avantage net si l'entreprise d'État... C'est une formule, si j'ai bien compris. Cette année, je crois que c'est 512 millions de dollars.
Est‑ce bien cela?
Si la valeur des actifs lors de l'achat est au‑dessous de 512 millions de dollars... Est‑ce bien la valeur des actifs?
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Je crois que nous essayons de saisir l'esprit du sous-amendement formulé par le gouvernement pour tenter de déterminer à quel problème il répond.
Par exemple, dans ma circonscription, en Nouvelle-Écosse, il m'arrive de voir, monsieur Fillmore, des actifs bien au‑dessous de ce seuil être achetés sans faire l'objet d'aucun examen, notamment un examen pour déterminer l'avantage net. La politique est une affaire régionale. Je parle donc souvent des usines de transformation du homard. Les acheteurs sont acquis pour des sommes allant de 5 millions à 10 millions de dollars. Ils prennent progressivement le contrôle, comme cela s'est produit dans une certaine mesure avec les permis dans le secteur de la pêche en Colombie-Britannique ou des permis pour les crabiers, et rien de cela ne fait l'objet d'un examen pour déterminer l'avantage net.
À l'évidence, ce pourrait être le cas, si le Bureau de la concurrence choisissait de faire enquête. Il dispose de certains pouvoirs.
Je cherchais à bien rendre compte du problème des États qui sont aujourd'hui hostiles, alors qu'ils ne l'étaient pas nécessairement il y a quelques années, afin que ceux‑ci fassent automatiquement l'objet de ce genre d'examen. Selon moi, le sous-amendement de M. Gaheer est plus précis. Je présume que c'est pour éviter de violer certains types d'accords commerciaux.
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La définition d'un « investisseur — traité commercial— » dans la version actuelle de la Loi sur Investissement Canada, y compris au paragraphe 14.11(6), comprend un grand nombre des principaux partenaires commerciaux du Canada.
À titre d'exemple, une liste non exhaustive inclurait les États‑Unis, le Mexique, le Royaume‑Uni et tous les pays visés par l'accord commercial global avec l'Union européenne — désolé, je dois me rappeler les acronymes —, y compris la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et la Suède, tous les signataires de l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, notamment l'Australie, Singapour, la Malaisie, le Vietnam, la Nouvelle‑Zélande et le Japon, et des pays investisseurs au Canada comme le Chili, le Pérou, la Colombie et la Corée du Sud.
Le sous-amendement indique ou introduit un concept défini actuellement dans la Loi, qui inclut les ententes bilatérales et multilatérales avec d'autres pays. La liste comprend les pays signataires de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne, de l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, de l’Accord Canada—États‑Unis—Mexique, ainsi que d'autres ententes bilatérales. Si le Canada conclut une entente avec un autre pays, elle sera couverte par cette définition. Ce pays aura droit aux mêmes protections et au même traitement, définis dans la Loi, que les autres pays.
Cela n'inclut pas toutes les ententes que le Canada a conclues avec d'autres pays, notamment dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, dont le Canada est membre. Cela n'inclut pas non plus les autres types d'ententes moins officielles, comme les ententes sur l'investissement étranger ou la protection de cet investissement, parce qu'il y a beaucoup d'autres ententes qui sont définies dans la Loi.
Dans son témoignage, sans aller jusqu'à dire que le Canada était des années-lumière en retard, M. Balsillie a dit que le Canada était très en retard, particulièrement par rapport à l'Europe, dans sa façon de faire des affaires et d'aborder les développements technologiques, tellement rapides et tellement présents. Je sais que je m'éloigne un peu du sous-amendement, mais ce dernier fait partie d'un tout, de toute façon.
Je trouve intéressant que vous parliez d'ententes qu'on pourrait qualifier d'informelles dans le domaine technologique. Est-ce qu'on peut considérer que ce projet de loi dans sa forme actuelle, y compris les modifications proposées par nos amendements et nos sous-amendements, viendra couvrir l'ensemble des futures ententes qui pourraient survenir?
Je ne sais pas si vous comprenez ma question.
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Oui, je pense que je comprends votre question. Vous soulevez plusieurs aspects.
Premièrement, il est important de reconnaître que la version actuelle de la Loi sur Investissement Canada couvre des aspects intangibles et numériques, et comporte une grande section de lignes directrices concernant la propriété intellectuelle et son traitement.
Quant à la deuxième partie de votre question, qui porte sur les ententes en lien avec les aspects numériques et les nouvelles technologies, il faut savoir que les dernières ententes que le Canada a conclues, dont l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste et l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne, comportent des sections portant sur ces sujets, notamment un chapitre sur la propriété intellectuelle. Ce chapitre était d'ailleurs un point sensible lors des négociations de l'accord avec l'Union européenne.
Le Canada continue de tenir compte du développement des technologies lors de la négociation de ces ententes, et de s'assurer que leurs dispositions lui permettent de conserver un bon rang dans l'économie mondiale.
Premièrement, concernant le traitement de la propriété intellectuelle et des données, comme je l'ai dit, il existe déjà certains éléments, dont des directives pour la considération des aspects liés à la sécurité nationale. On y trouve une grande section qui concerne la propriété intellectuelle, ainsi que la capacité de la Loi sur Investissement Canada de couvrir ces aspects.
Deuxièmement, l'exigence de tenir compte de la liste des technologies sensibles et des aspects liés à la sécurité nationale est une des raisons pour lesquelles il est important de laisser au ministre toute la discrétion requise lorsque vient le temps d'examiner tous les aspects d'une situation. Comme M. Balsillie l'a indiqué, les données, la propriété intellectuelle et les considérations de sécurité nationale doivent être interreliées et cadrer avec l'investissement.
Il serait aussi important que le gouvernement tienne à jour la liste des technologies sensibles, de même que les lignes directrices concernant la propriété intellectuelle en lien avec la sécurité nationale.
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais prendre un peu de temps pour parler de ma principale préoccupation.
Je voudrais m'assurer que tous ceux qui nous regardent comprennent pourquoi nous consacrons autant de temps au CPC‑2 et à cet amendement. Personnellement, je suis préoccupé par l'influence croissante de la Chine. Cette influence dépasse le cadre militaire. La principale menace à laquelle nous assistons dans les pays occidentaux est une prise de contrôle économique. D'une certaine manière, il est plus efficace d'essayer de s'emparer d'actifs et de trouver des failles dans nos règles. Nous sommes un pays généreux et ouvert, comme la plupart des pays occidentaux. Nous aimons jouer franc jeu et respecter les règles.
Lors de notre 71e réunion, le 3 mai, M. Patrick Leblond, professeur agrégé à l'École supérieure d'affaires publiques et internationales de la Faculté des sciences sociales de l'Université d'Ottawa, a comparu à titre personnel. Il a dit: « Toute entreprise d'État, quelle que soit son origine, doit aviser le ministre d'une acquisition. Le ministre doit ensuite décider si cela passe ou non et, encore une fois, il doit être en mesure de justifier, en cas de décision, qu'il n'y ait pas d'enquête ou que l'acquisition soit autorisée. ».
Avec cet amendement et ce sous-amendement, nous précisons les choses. De nombreux pays — la plupart des pays, je suppose — possèdent des entreprises d'État sous une forme ou une autre, que ce soit au niveau national ou infranational. Certains de ces pays procèdent à des acquisitions extraterritoriales. Je ne pense pas que ce soit le cas de nos entreprises d'État au Canada.
Compte tenu de la manière dont ce projet de loi a été rédigé et des amendements proposés par le gouvernement, je suppose que ce dernier ne pense pas que nous devrions vérifier l'avantage net et les motivations de toutes les entreprises d'État, quel que soit l'endroit où elles se trouvent. Est‑ce exact?
:
D'accord. Cela fait donc un bon bout de temps. Je ne sais pas si certains d'entre nous siégeront encore au Parlement la prochaine fois que cela aura lieu. Certains sont plus jeunes. Monsieur Gaheer, probablement…
M. Brian Masse: J'étais là.
M. Rick Perkins: Ma barbe était d'une autre couleur à l'époque. Je ne sais pas si M. Masse et moi serons ici dans une quinzaine d'années, lorsque le prochain grand examen aura lieu, alors nous devons faire les choses correctement.
Je suis inquiet, car, comme je l'ai déjà dit, je ne crois pas que le gouvernement, malgré toute la flexibilité dont il dispose, nous permette de protéger nos actifs, car je ne crois pas que ces mesures répondent au problème.
Nous savons par exemple qu'en 2017, Norsat a été achetée par Hytera — et je parlerai dans quelques minutes d'Hytera — et que Norsat, qui est basée à Vancouver, a acheté Sinclair Technologies en 2011... Il s'agit d'importantes entreprises de télécommunications qui n'ont pas fait l'objet d'un examen des investissements relativement à la sécurité nationale ni, évidemment, d'un examen de l'avantage net.
On sait qu'il y a eu des contrats. Je sais que cela n'est pas directement lié à ce sujet, même si certains témoins se sont dits préoccupés par le fait que, par exemple, en 2020, le ministère des Affaires étrangères a attribué un contrat à la société chinoise Nuctech — fondée par le fils de l'ancien secrétaire général du Parti communiste chinois — pour fournir des appareils à rayons X à nos ambassades et à nos consulats.
Nous avons déjà parlé de Neo Lithium. Neo Lithium a été achetée par une entreprise publique sans avoir à se soumettre à un examen des investissements relativement à la sécurité nationale, et le ministre n'est pas habilité à revenir en arrière, bien que je lui aie demandé de le faire. Il m'a répondu qu'il ne pouvait pas le faire. Je ne reviendrai pas sur le fait que certains des amendements qui lui auraient permis de le faire n'ont pas été acceptés par le comité. Je persiste à croire qu'il s'agit d'un pouvoir que le ministre devrait avoir.
Toutefois, le ministre a pu faire d'autres choses plus récemment — je parle des trois aliénations — par le biais d'une politique récente. Nous savons également que la GRC a attribué des contrats, tout comme l'Agence des services frontaliers du Canada, à Hytera, ce qui a été approuvé par le gouvernement, le ministre Bains et le gouverneur en conseil pour aller de l'avant. Hytera, dont le siège social se trouve à Shenzhen, en Chine, appartient en partie à la République populaire de Chine.
J'aimerais parler de cette entreprise en particulier. Internet est une chose merveilleuse. Hytera est censée être une société cotée en bourse en Chine, donc elle publie ses données financières. En les examinant — ces données sont disponibles sur le site Web du Wall Street Journal —, je me suis rendu compte que cette entreprise ne gagne pas d'argent. Elle a un chiffre d'affaires important, mais elle ne gagne pas d'argent. Son chiffre d'affaires s'élève à 6 milliards de dollars et elle est passée d'un résultat net négatif la plupart des années à des bénéfices assez anémiques de, disons, 95 millions de dollars sur un chiffre d'affaires de 6 milliards de dollars.
Cela représente une perte de près de 800 % en termes de bénéfice par action, sur la base de son dernier exercice. On parle d'une entreprise qui est manifestement en mesure de poursuivre ses activités en Chine sans réaliser de bénéfices. On peut en déduire ce qu'on voudra. Il m'a fallu deux minutes pour trouver ces données, et je n'ai pas accès à tout l'appareil de sécurité nationale dont dispose le ministre. Les informations accessibles au public concernant cette entreprise indiquent que ses bénéfices avant intérêts et impôts ont baissé de 48 %, puis de 8 %, et que, l'année précédente, ils avaient baissé de 40 %.
Ses ventes sont stables, mais elle dépense de plus en plus d'argent pour obtenir des contrats et perd de plus en plus d'argent chaque année. Je pense que dans le cadre d'un examen de l'avantage net — ce qui est l'objet de ce sous-amendement et de cet amendement — nous devrions examiner les données financières des entreprises pour déterminer si, comme nous le supposons normalement, elles obtiennent des contrats et ont accès à des entreprises au Canada en soumissionnant moins cher pour un contrat gouvernemental ou en payant plus cher pour une acquisition pour une entreprise canadienne.
Leur motivation est manifestement différente de la nôtre, car toute acquisition d'un bien au Canada effectuée par une entreprise canadienne ou, devrais‑je dire, par une entreprise d'un pays du G7 s'effectue habituellement conformément à des principes commerciaux sains et un taux de rendement sur le capital investi.
Ce n'est pas ce qu'elles font. Elles perdent un peu plus d'argent chaque année, mais on dirait que le gouvernement, compte tenu des pouvoirs dont il dispose, ne voit pas les choses de la même façon que moi si j'avais la chance d'occuper le poste de ministre. Prenons Sinclair. Cette entreprise fabrique beaucoup d'équipement de haute technologie qui est installé au Canada. Norsat, l'entreprise basée à Vancouver, œuvre surtout dans le domaine des communications par satellite. Dans un monde où — il suffit de regarder autour de cette table — nous sommes tous connectés et que tout le monde consulte son téléphone, tentant de faire ceci et cela, d'accéder à des données, au matériel de notre pays, de nos industries et de notre propre système de sécurité, lorsqu'il s'agit de la GRC ou de l'Agence des services frontaliers du Canada, cela ne s'arrête pas simplement à l'accès technologique.
Le était ici à ce sujet et a déclaré — bonne nouvelle — que les filtres radiofréquences installés par Sinclair sur ses appareils Hytera détenus par la Chine n'étaient pas connectés à la base de données, mais voilà que la Chine peut maintenant savoir où sont situés tous les points de communications clés et le matériel informatique de la GRC au pays. À mon avis, il est évident qu'elle peut savoir où tout cela est situé et déterminer comment perturber les communications au besoin. Je n'ai pas accès à tout cela.
Sur le plan de la sécurité nationale, je ne m'arrête pas uniquement à ce que les organismes de renseignements nous disent. Je vérifie aussi si l'examen de l'avantage net détermine par exemple s'il s'agit d'un achat crédible, fondé sur des pratiques commerciales concurrentielles saines, de la part d'une entreprise motivée par le profit et les mêmes motivations que nos propres entreprises, dans quel cas nous dirions « oui, ça va marcher ». Même si on réduit les choses aux entreprises visées par un accord commercial, à des entreprises d'État faisant l'objet d'un examen sous le seuil des 512 millions de dollars, ces entreprises feraient aussi l'objet d'un examen sous l'angle de la motivation nationale et si celle‑ci est conforme à notre intérêt économique, c'est‑à‑dire avoir des entreprises de plus en plus concurrentielles et possédant une solide propriété intellectuelle.
J'aimerais que vous me disiez si, dans le cadre de l'examen de l'avantage net, on a tenu compte de ce genre de choses, ou que nous avons simplement dit « Vous savez quoi? Comme c'est une entreprise qui ne possède pas une grande part du marché et que nous ne dépendons pas trop d'elle, peu importe la motivation de l'acheteur. »
:
Monsieur le président, je peux peut-être fournir certains éléments en lien avec la question du député.
Premièrement, je dirais que, sur la base de leurs livres comptables, il est possible que certaines entreprises n'ayant pas encore réalisé de revenus et d'autres entreprises ne réalisent pas encore de bénéfices, mais qu'elles soient quand même très actives sur le marché. Je ne nommerai pas ces entreprises ici. De toute évidence, les données financières sont un facteur, mais la présence ou l'absence de profits n'est pas nécessairement pertinente aux yeux du marché.
Pour répondre plus précisément à la question du député concernant les facteurs dont nous tenons compte dans le cadre d'un examen de l'avantage net, je répondrai qu'ils sont indiqués à l'article 20 de la loi. Ils comprennent notamment:
a) l'effet de l’investissement sur le niveau et la nature de l'activité économique au Canada, notamment sur l'emploi, la transformation des ressources, l'utilisation de pièces et d'éléments produits et de services rendus au Canada et sur les exportations canadiennes;
b) L'étendue et l'importance de la participation de Canadiens dans l'entreprise canadienne ou la nouvelle entreprise canadienne en question et dans le secteur industriel canadien dont cette entreprise ou cette nouvelle entreprise fait ou ferait partie;
c) l'effet de l'investissement sur la productivité, le rendement industriel, le progrès technologique, la création de produits nouveaux et la diversité des produits au Canada;
d) l'effet de l'investissement sur la concurrence dans un ou plusieurs secteurs industriels au Canada;
e) la compatibilité de l'investissement avec les politiques nationales en matière industrielle, économique et culturelle, compte tenu des objectifs de politique industrielle, économique et culturelle qu'ont énoncés le gouvernement ou la législature d'une province sur laquelle l'investissement aura vraisemblablement des répercussions appréciables;
f) la contribution de l'investissement à la compétitivité canadienne sur les marchés mondiaux.
Il est aussi important de préciser que nous avons également des lignes directrices précises en ce qui concerne les entreprises d'État:
Le gouvernement du Canada a pour politique de s'assurer que la gouvernance et l'orientation commerciale des [sociétés d'État] sont prises en considération au moment de déterminer si leurs acquisitions de contrôle au Canada, pouvant faire l'objet d'un examen, procurent un avantage net pour le Canada. Ce faisant, il sera attendu que, dans leurs plans et engagements, les investisseurs abordent la question des caractéristiques inhérentes aux [sociétés d’État], spécifiquement qu'elles sont susceptibles d'être sujettes à l'influence d’États. Les investisseurs devront également démontrer un engagement fort envers des activités transparentes et de nature commerciale.
Merci, monsieur le président.
Oui, c'est dans l'esprit de ce comité collaboratif. Merci pour ces paroles.
Y a‑t‑il d'autres questions ou observations au sujet de l'amendement CPC‑2? Non.
Je vais demander un vote par appel nominal.
(L'amendement modifié est adopté par 11 voix contre 0. [Voir le Procès-verbal])
(L'article 7 modifié est adopté.)
Le président: Il est presque 18 h 50. Comme la séance a débuté à environ 16 h 50, j'aimerais...
Y a‑t‑il quelque chose, M. Perkins?
M. Rick Perkins: [Inaudible]
Le président: Nous venons de terminer l'article 7. Il faudra donc le consentement unanime lorsque nous reviendrons, à moins qu'il y ait consentement unanime maintenant. Je ne crois toutefois pas que nous aurons le consentement unanime pour revenir à l'article 7 à ce moment‑ci.