Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bienvenue à la 102e réunion du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.
[Traduction]
Conformément au Règlement, la séance d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride. Les membres du Comité y assistent en personne dans la salle ou à distance au moyen de l'application Zoom.
Je vous rappelle que les membres du Comité et les témoins doivent adresser tous leurs commentaires à la présidence.
[Français]
Conformément à l'article 108(3)g) du Règlement, le Comité reprend l'examen du rapport no 1 de 2024 de la vérificatrice générale du Canada, intitulé « Pandémie de COVID‑19 - ArriveCAN », renvoyé au Comité le lundi 12 février 2024.
[Traduction]
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Nous recevons aujourd'hui Mme Karen Hogan, vérificatrice générale du Canada; M. Andrew Hayes, sous-vérificateur général; M. Sami Hannoush, directeur principal; et Mme Lucie Després, directrice.
Je commence à connaître vos noms par cœur, puisque vous avez été des nôtres au cours des dernières séances. Nous vous sommes très reconnaissants du temps que vous nous accordez.
Nous recevons également des représentants de Services publics et Approvisionnement Canada: M. Michael Mills, sous-ministre délégué; M. Dominic Laporte, sous-ministre adjoint, Direction générale des programmes de l'approvisionnement; Mme Catherine Poulin, sous-ministre adjointe, Direction générale de la surveillance; et M. Wojo Zielonka, sous-ministre adjoint et dirigeant principal des finances, Direction générale des finances.
Chaque groupe de témoins disposera d'un total de cinq minutes. Mme Hogan brisera la glace, puis ce sera au tour de M. Mills.
Sans plus tarder, je cède la parole à Mme Hogan pour les cinq prochaines minutes.
Monsieur le président, je vous remercie de nous avoir invités à nouveau pour discuter de notre rapport d'audit sur l'application ArriveCAN, qui a été déposé la semaine dernière, le 12 février. Je tiens à reconnaître que cette réunion se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple anishinabe algonquin.
Cet audit a vérifié si l'Agence des services frontaliers du Canada, l'Agence de la santé publique du Canada et Services publics et Approvisionnement Canada ont géré tous les aspects de l'application ArriveCAN en tenant compte de la valeur qui en résulterait. Je vais limiter mes remarques aujourd'hui au rôle joué par Services publics et Approvisionnement Canada.
Le ministère devait établir et administrer des contrats au nom de l'Agence des services frontaliers du Canada et de l'Agence de la santé publique du Canada lorsque la valeur d'un contrat dépassait le pouvoir d'acquisition qui leur avait été délégué. Nous avons constaté que Services publics et Approvisionnement Canada a remis en question la décision de l'Agence des services frontaliers du Canada de recourir à des processus non concurrentiels pour attribuer des travaux liés à ArriveCAN. Le ministère a proposé d'autres solutions, comme le recours à des processus non concurrentiels plus courts ou à des processus concurrentiels assortis d'une période d'appel d'offres écourtée. Malgré ces conseils, l'Agence des services frontaliers du Canada a décidé de procéder par voie non concurrentielle.
(1010)
[Traduction]
La semaine dernière, j'ai également signalé que la gestion générale des contrats par l'Agence des services frontaliers du Canada laissait grandement à désirer. Plusieurs renseignements essentiels ne figuraient pas dans les contrats et dans d'autres types de documents, notamment en ce qui a trait à certains produits livrables précis, et à la liste des qualifications exigées des travailleurs. Par ailleurs, nous avons constaté que, contrairement aux dispositions relatives au Guide des approvisionnements de SPAC, le ministère a cosigné plusieurs autorisations de tâches rédigées par l'ASFC, dans lesquelles ne figurait pas la description des tâches et des produits livrables. En l'absence de ce type de renseignements, il est difficile de déterminer si les tâches ont été exécutées conformément aux exigences, aux délais prévus, et au processus d'optimisation des ressources.
Nous avons également constaté que SPAC a cosigné un certain nombre de modifications relatives aux autorisations de tâches. Certaines modifications visaient à augmenter le niveau d'effort, et à prolonger les délais, sans toutefois ajouter des tâches ou des produits livrables. Ces modifications ont eu pour effet d'augmenter la valeur du contrat, mais sans garanties supplémentaires.
Afin d'assurer l'optimisation des ressources et d'accroître la responsabilité à l'égard de l'utilisation des fonds publics, l'ASFC et SPAC devraient toutes deux veiller à ce que les tâches et les produits livrables soient clairement définis au sein des contrats, des autorisations de tâches, et de tous documents connexes.
Monsieur le président, voilà qui conclut ma déclaration d'ouverture. Nous nous ferons maintenant un plaisir de répondre aux questions des députés.
J’aimerais commencer par souligner que nous sommes réunis ici sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Nous nous félicitons du dépôt du rapport de la vérificatrice générale sur le développement de l’application ArriveCAN, et nous avons hâte de discuter avec vous.
Je suis accompagné aujourd'hui par trois de mes collègues: Wojo Zielonka, sous-ministre adjoint et dirigeant principal des finances; Dominic Laporte, sous-ministre adjoint; et Catherine Poulin, sous-ministre adjointe.
En tant que l'un des principaux hauts fonctionnaires responsables des activités d'approvisionnement, je tiens à souligner la complexité du système d'approvisionnement fédéral. Par ailleurs, je reconnais qu'il est nécessaire d'améliorer dès maintenant notre façon de faire les choses, notamment en matière de services professionnels. Le rapport de la vérificatrice générale contient une recommandation qui concerne directement SPAC, à savoir que SPAC et l'ASFC devraient veiller à ce que les tâches et les produits livrables soient clairement définis dans les contrats et les autorisations de tâches. Cette recommandation est particulièrement importante pour nous, car elle concerne le partage des responsabilités entre SPAC et les ministères et organismes clients.
[Français]
Services publics et Approvisionnement Canada, ou SPAC, est l'acheteur central du gouvernement fédéral. En cette qualité, il s'assure que les ministères et les organismes fédéraux ont les biens et les services nécessaires pour s'acquitter de leurs différents mandats.
Ce rôle amène SPAC à mettre en place et à administrer des outils centraux d'approvisionnement, comme les offres à commandes et les arrangements en matière d'approvisionnement, auxquels les ministères et les organismes clients peuvent ensuite avoir directement recours.
Nous savons que la manière dont ces instruments d’approvisionnement ont été utilisés pour les besoins d'ArriveCan suscite des inquiétudes.
[Traduction]
Je peux confirmer au Comité que nous avons déjà mis en place plusieurs nouvelles mesures de contrôle en fonction des observations faites dans le rapport de la vérificatrice générale, ainsi que dans le rapport du Bureau de l'ombud de l'approvisionnement.
En novembre 2023, SPAC a communiqué avec tous les ministères, y compris à l'ASFC, pour suspendre tous les pouvoirs délégués d'autoriser des tâches fondées sur les services professionnels. Au début du mois de décembre 2023, SPAC a également donné des directives à ses agents de l'approvisionnement afin de veiller à ce que les autorisations de tâches priorisent les produits livrables. Les ministères fédéraux doivent désormais souscrire officiellement à de nouvelles modalités s'ils souhaitent obtenir des services professionnels.
Les principaux changements comprennent également l'utilisation de nouvelles dispositions contractuelles visant à accroître la transparence des coûts et des sous-traitants, et à fournir des clarifications importantes sur le rôle des ministères lors de l'utilisation de ces instruments. L'objectif est donc d'améliorer la cohérence des pratiques. Je peux également vous confirmer que SPAC travaille à la mise à jour de ses orientations afin d'aider les ministères à accroître leur efficacité et leur responsabilité lorsqu'ils utilisent des instruments d'approvisionnement qui relèvent de leur autorité.
[Français]
Le rapport de la vérificatrice générale, tout comme l'examen de l'ombudsman de l'approvisionnement, souligne la nécessité de renforcer des aspects précis de nos processus d'approvisionnement concernant les services professionnels.
Nous continuerons de miser sur les mesures que nous avons prises jusqu'ici et de nous concentrer sur ce que nous allons faire pour améliorer la formation, le processus d'approvisionnement et les pratiques dans l'intérêt de la population canadienne.
Je tiens d'abord à vous souhaiter la bienvenue à tous. J'interviens bien sûr à titre de ministre du cabinet fantôme en matière de services publics et d'approvisionnement.
J'aimerais passer directement au rapport de la vérificatrice générale, qui rappelle que l'ASFC a recouru aux services de SPAC pour établir des contrats liés à la conception de l'application ArriveCAN. Est‑ce exact?
Je pense que dès le début de l'année 2020, nos agents de l'approvisionnement ont commencé à avoir des interactions assez fréquentes avec leurs homologues de l'ASFC pour mettre en place la première série de contrats.
À titre personnel, je dirais que j'ai dû commencer à recevoir vers la fin de l'année 2020 des rapports d'ensemble concernant des contrats d'approvisionnement liés à la COVID‑19.
Madame Block, je me permets de vous interrompre un instant.
J'aimerais rappeler à tous les témoins qu'ils sont ici pour parler au nom de leur ministère. J'ai effectivement remarqué que nos invités ont tendance à personnaliser leurs réponses, alors que nous cherchons plutôt à obtenir des réponses des ministères qu'ils représentent. Je tenais à signaler cela dès le départ pour que vous puissiez en tenir compte, et nous fournir des réponses les plus complètes possible.
À ma connaissance, les préoccupations de SPAC portaient sur les raisons pour lesquelles l'ASFC souhaitait conclure un contrat à fournisseur unique avec GC Strategies. Il ne s'agissait donc pas d'une critique envers cette entreprise précise, mais des circonstances motivant l'adoption d'un processus contractuel non concurrentiel.
J'ai cru comprendre que SPAC n'était pas préoccupé par l'attribution d'un contrat de cette importance à une entreprise composée de deux individus seulement.
Monsieur le président, d'après ce que j'ai compris, GC Strategies n'a pas suscité d'inquiétude au sein de SPAC, étant donné que cette entreprise avait déjà fourni des services de TI, et qu'elle avait déjà conclu des arrangements en matière d'approvisionnement avec le gouvernement du Canada.
Est‑il courant que le gouvernement accorde des contrats de plusieurs millions de dollars à des entreprises composées de deux personnes qui travaillent dans un sous-sol?
Lorsque nous établissons des arrangements en matière d'approvisionnement et des offres permanentes, les entreprises doivent démontrer qu'elles ont déjà fourni des services. Elles doivent notamment prouver qu'elles ont déjà réussi à obtenir un certain nombre de contrats et un certain volume de services de TI. Pour accéder à ces instruments, l'entreprise GC Strategies et ses compétiteurs doivent donc démontrer qu'ils ont atteint ces capacités par le passé.
Je voudrais juste revenir un peu sur cette réponse. Je crois savoir que GC Strategies n'a justement pas d'expertise en matière de TI. Cette entreprise n'est pas en mesure de fournir ce type de services, et joue plutôt un rôle d'intermédiaire pour solliciter des professionnels qualifiés. Je m'en tiendrai là.
Votre ministère était‑il satisfait, et l'est‑il toujours, du choix de l'entreprise GC Strategies pour ce projet?
Monsieur le président, j'aimerais examiner la question du point de vue de l'entreprise engagée pour réaliser ce projet. Le travail a été accompli. Une application a bel et bien été créée. Je ne peux pas vraiment parler de la qualité de leur exécution des tâches et de ces éléments spécifiques, mais nous savons que GC Strategies a engagé des professionnels des TI. Ces professionnels ont été en mesure de créer une application, d'effectuer de nouvelles mises à jour, et de s'assurer que l'application demeure accessible sur plusieurs plateformes.
Ma dernière question est la suivante: Connaissez-vous la tactique de l'« appât-substitution »? C'est une question qui a été soulevée par le Bureau de l'ombud de l'approvisionnement, car cette tactique est très répandue dans les pratiques en matière d'approvisionnement. Connaissez-vous cette expression?
En règle générale, il s'agit d'une situation dans laquelle une entreprise identifie certaines ressources qui travailleront sur un projet, puis les remplace par d'autres ressources qui n'ont pas nécessairement le même niveau d'expertise ou de compétence.
Monsieur le président, ce que je peux dire, c'est qu'il n'est pas rare qu'il y ait un décalage entre le moment où les entreprises doivent faire leur soumission dans le cadre d'une procédure d'approvisionnement, et le moment où une autorisation de tâches est délivrée pour un travail, notamment en matière de projets de TI en plusieurs étapes. Dans ces cas‑là, il peut y avoir des ressources disponibles au moment de l'appel d'offres qui seraient prêtes à effectuer le travail. Il peut s'écouler un certain temps avant d'arriver à une étape ultérieure du projet où ces ressources doivent être engagées, mais qu'elles ne soient plus disponibles.
Brièvement, en ce qui concerne les formulaires d'autorisation de tâches, est‑il possible d'utiliser des ressources qui n'ont pas le même niveau d'expertise que celui initialement identifié?
Dans le cadre du processus d'approvisionnement, il est possible de remplacer une ressource, mais elle doit l'être par une personne ayant des compétences et des capacités techniques égales ou supérieures.
Je souhaite tout d'abord remercier nos invités de s'être de nouveau présentés ici.
Monsieur Mills, aux paragraphes 1,51 et 1,52, le rapport de la vérificatrice générale indique que SPAC a contesté l'ASFC lorsque l'agence a indiqué qu'elle souhaitait mettre en œuvre des processus non concurrentiels pour les contrats liés à l'application ArriveCAN, mais que cela n'a rien donné. L'ASFC a ignoré la recommandation de procéder à un concours.
Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Commençons par votre rôle dans le processus en question. Quelles sont les responsabilités de SPAC pour s'assurer que les autres ministères respectent les bonnes pratiques en matière d'approvisionnement?
Notre ministère collabore avec le client, le propriétaire de l'entreprise, afin de lui fournir le véhicule contractuel qui fonctionnera et qui permettra de répondre à ses besoins. Dans le cas présent, nous avions essentiellement un accord d'approvisionnement. Des autorisations de tâches ont été délivrées dans ce cadre.
C'est au client de définir ses besoins et ses exigences, et à nous de travailler avec lui pour nous assurer que nous trouvons le bon véhicule contractuel. Nous fournissons également des conseils à cet égard. Selon la situation, la concurrence est la norme. Nous devons également exercer ce rôle et cette fonction de défi.
Dans le contexte du contrat actuel, c'est le type de conseils que nos responsables des achats devraient fournir. Ils devraient jouer ce rôle d'analystes critique. C'est ce que nous attendons de notre personnel responsable de l'approvisionnement.
Monsieur le président, je dirais que, comme le souligne le rapport du vérificateur général, il n'y a pas de documentation sur les raisons pour lesquelles l'ASFC a finalement choisi de recourir à un véhicule non concurrentiel. À cet égard, nous allons veiller à ce qu'il y ait une justification bien documentée des raisons pour lesquelles le choix d'une approche particulière en matière de passation de marchés a été fait. Nous jouons un rôle de conseiller, mais d'autres facteurs ont probablement été pris en compte. Malheureusement, nous ne disposons pas de la documentation nécessaire pour comprendre pourquoi cette décision a été prise.
Il y a la disponibilité du marché, les contraintes potentielles au sein des systèmes d'un département qui font que vous ne pouvez utiliser que certaines entreprises pour avancer rapidement, la disponibilité des ressources, etc. Il peut y avoir un certain nombre de facteurs.
S'agit‑il d'un domaine dans lequel vous estimez que SPAC a besoin de plus de pouvoirs de contrôle ou d'autorité pour éviter aux autres départements de commettre des erreurs?
Je ne sais pas si le ministère doit se doter de plus de pouvoirs. Par contre, il m'apparaît évident que nous devons nous assurer de disposer de suffisamment de preuves et de documents attestant que les décisions sont prises au niveau approprié, et qu'elles sont documentées et justifiées.
Je pense que c'est un point sur lequel nous voulons travailler avec notre personnel pour nous assurer qu'il dispose des outils nécessaires pour relever ce défi.
Par ailleurs, l'une des initiatives que nous continuons à mettre en œuvre concerne les solutions d'approvisionnement en ligne. Auparavant, toutes sortes de documents étaient classés de différentes manières. Il pouvait s'agir de CD, de copies papier de documents ou de courriels. Ces dernières années, nous avons déployé une nouvelle solution d'approvisionnement en ligne qui permettra de documenter toutes les interactions que les contractants peuvent avoir avec les fournisseurs et les clients. Cela permettra de résoudre en grande partie les problèmes liés au manque de documents.
La documentation de toutes les questions posées dans le cadre d'une même plateforme électronique est une chose que nous encourageons. Nous nous sommes servis de cette plateforme pour conclure des contrats d'une valeur totale avoisinant 6 milliards de dollars. Nous avons accompli des progrès significatifs ces dernières années dans ce domaine.
Comme M. Mills l'a souligné, notre rôle consiste à donner des conseils. Nous avons confiance que le client prendra la bonne décision à la lumière des circonstances et des défis particuliers auxquels il fait face. Nous pouvons lui donner notre avis, mais au bout du compte, c'est le client qui décide s'il s'agit selon lui d'une urgence qui justifie un modèle non concurrentiel.
Madame la vérificatrice générale, vous indiquez dans votre rapport que des gens de SPAC sont intervenus auprès de l'ASFC pour l'encourager à mener un processus concurrentiel — ne serait‑ce qu'un processus court de 10 jours. Les responsables à l'ASFC n'ont pas suivi ce conseil, ce qui constitue un des pires problèmes ici. Toutefois, vous ne recommandez pas dans votre rapport que SPAC ait plus d'autorité pour exiger que les ministères et les organismes suivent ses conseils en matière de passation de contrats. Pourquoi ne l'avez-vous pas recommandé?
Je pense que c'est une question d'imputabilité de la partie qui conclut une obligation contractuelle. Dans ce cas‑ci, il s'agit de l'Agence des services frontaliers du Canada. C'est elle, en fin de compte, qui est redevable pour les décisions prises par ses dirigeants.
Je pense que plus on donne de responsabilités à un ministère, plus le processus sera lent. Le rôle de SPAC est de favoriser la concurrence et de suivre les nombreuses règles d'approvisionnement. La décision finale revient au ministère responsable, soit à l'ASFC dans le cas présent.
Merci. Je vais vous dire d'entrée de jeu que, durant ma carrière, j'ai fait des audits de systèmes d'approvisionnement de banques multilatérales et de gouvernements.
Si je devais résumer en une phrase — vous comprendrez que mon temps est limité — le rôle d'un ministère comme le vôtre, je dirais qu'il est d'abord d'avoir des processus et, ensuite, de s'assurer d'un certain suivi pour que ces processus soient au minimum respectés. S'il n'y a pas de suivi, la première partie du rôle, celle d'avoir des processus, ne sert absolument à rien.
Ce qu'on réalise dans le rapport de la vérificatrice générale, c'est que Services publics et Approvisionnement Canada a failli à son mandat à plusieurs égards, en ce qui concerne tant les conseils donnés que le fait d'avoir cosigné des contrats qui ne respectaient pas nécessairement les processus adéquats.
J'aimerais revenir sur une question très importante: la remise en question de la décision de l'Agence des services frontaliers du Canada d'octroyer des contrats non concurrentiels. J'aimerais avoir plus d'information à ce sujet. J'aimerais notamment savoir qui étaient les émetteurs de ces avertissements, ainsi que leur niveau hiérarchique. J'aimerais aussi savoir qui en étaient les destinataires, ainsi que leur niveau hiérarchique. J'aimerais enfin avoir de l'information sur le contenu des courriels.
Si vous n'êtes pas en mesure de me répondre précisément maintenant, j'aimerais pouvoir avoir accès à ces courriels.
Malheureusement, je n'ai pas cette information sous la main. Je comprends qu'un directeur général avait, par exemple, reçu les courriels en copie conforme, mais il faudrait qu'on fournisse l'information au Comité pour avoir…
Pour poursuivre dans la même veine, on apprend dans le rapport que SPAC a cosigné plusieurs des contrats. Comme la vérificatrice générale vient de le dire, la décision d'octroyer un contrat appartient ultimement au ministère client. Par contre, comme on le sait, le fait de signer impose des responsabilités. En cosignant, vous avez donc partagé la responsabilité d'octroyer des contrats de manière non concurrentielle à une entreprise dont, si on regarde deux minutes son site Web, on comprend que ce sont deux personnes qui prennent une part de marché ainsi qu'une commission et qui ne livrent aucun service. Trouvez-vous ça normal?
Comme on l'a mentionné, notre ministère a vraiment joué son rôle à l'égard de l'Agence des services frontaliers du Canada. Le ministère a prévenu l'Agence qu'il y avait des risques et préconisé une approche compétitive. Cependant, comme le mentionnait la vérificatrice générale, la décision appartient ultimement au client et je pense qu'il est important de remettre ça dans ce contexte.
Cela dit, en ce qui concerne les autorisations de tâches, des lacunes ont effectivement été observées dont nous prenons bonne note. Je pense qu'il faut toujours renforcer la formation de notre personnel et le tenir informé, mais il y a certainement des leçons à tirer des lacunes et de ce qui a été observé quant aux autorisations de tâches.
Sauf votre respect, c'est la même rengaine que nous entendons de la part de tous les ministères concernant ce rapport calamiteux.
Apprendre de ses erreurs, soit, sauf qu'il ne s'agit pas ici d'une petite erreur, mais d'une erreur qui s'est répétée pendant plusieurs années. On apprend même que GC Strategies a conclu des contrats avec beaucoup d'autres ministères et empoché près de 250 millions de dollars en contrats. On apprend que ces gens avaient auparavant obtenu des contrats pour une entreprise qui se nommait Coredal Systems Consulting et dont ils ont changé le nom en 2015.
Une erreur, soit, mais ce n'est pas une erreur dans ce cas-ci. Au sein de SPAC, une ou plusieurs personnes ont fermé les yeux et laissé des processus inadéquats avoir lieu. C'est l'un ou l'autre: soit on a fermé les yeux de manière négligente, soit on a fermé les yeux de manière malfaisante. Dans les deux cas, il y a eu fermeture des yeux. Laquelle des deux situations s'est produite?
Je dirais que le ministère administre quand même un volume très élevé de contrats par année: 26 milliards de dollars. Beaucoup d'autorisations de tâches sont signées. Ce n'est pas du tout une excuse,…
… mais devons-nous renforcer nos mécanismes ou nos procédures pour voir pourquoi ces autorisations de tâches ont été cosignées? Il y a des leçons à tirer.
Comme le sous-ministre le mentionnait, nous avons envoyé le 4 décembre des consignes très claires à nos employés et leur avons demandé de veiller à ce que ce soit clairement défini quand on parle d'autorisations de tâches. Je pense que les mesures mises en place vont nous permettre d'éviter qu'une telle situation se reproduise à l'avenir.
Vous me dites qu'à l'avenir, on n'enverra plus d'autorisations de tâches qui sont beaucoup trop flexibles et qui permettent de payer beaucoup trop pour ce que les contribuables reçoivent en retour. Vous êtes en train de me dire qu'il n'y aura plus de processus de sélection biaisés dans lesquels la proposition a très peu de valeur financière et les ressources, donc la capacité technique, ont plus de valeur. Or, comme l'a révélé le rapport de l'ombudsman, dans 76 % des contrats, ce ne sont même pas les ressources indiquées dans la proposition qui sont utilisées. Vous êtes en train de me dire que tout ça n'arrivera plus, soudainement, par miracle.
Les mesures qui ont été prises par notre ministère depuis le 28 novembre dernier sont quand même très sérieuses. Beaucoup d'améliorations ont été faites. Il y a eu de la sensibilisation auprès des clients. Nous travaillons avec nos clients et avec nos employés. Ça m'étonnerait beaucoup qu'on voie à l'avenir des autorisations de tâches qui sont mal définies et qui sont très vagues, même en ce qui concerne les critères d'évaluation et les procédures, auxquels le sous-ministre Mills faisait référence.
Nous allons mettre beaucoup moins l'accent sur l'évaluation des curriculum vitae. Nous allons nous assurer que la compagnie qui soumissionne a la capacité nécessaire. Il est sûr que nous tirons énormément de leçons du rapport de la vérificatrice générale et du bureau de l'ombudsman.
Je tiens à remercier les témoins de leur présence ici aujourd'hui.
Encore une fois, nous examinons le rapport de la vérificatrice générale sur ArriveCAN. Nous avons déjà entendu des représentants de l'ASFC et de l'Agence de la santé publique du Canada. Ils ont bien sûr soumis des informations au Comité sur la façon dont tout cela a pu avoir lieu. Nous avons entendu à répétition qu'à plusieurs reprises, le système de freins et contrepoids a échoué. Malgré une remise en question de SPAC, les gens de l'ASFC ont décidé de ne pas réaliser le travail eux‑mêmes. Par ailleurs, l'ASFC a tout de même participé au processus puisque le directeur général de la Direction des services relatifs aux applications opérationnelles a signé l'obligation contractuelle.
Même si je sens parfois que les gens de SPAC n'accordent pas toute l'attention qu'il mérite à cet enjeu, je pense que ce ministère est au cœur de la pourriture à la racine de ce problème.
Je veux d'abord énoncer mon point de vue. Dans l'examen des informations recueillies, j'ai été très clair qu'il s'agit avant tout d'un manque de bonne gestion. Le problème a été exposé de façon crédible dans le rapport. De plus, l'application n'en a pas donné pour leur argent aux contribuables. Nous le savons très clairement. Nous savons que les contribuables se sentent... Les preuves crédibles de la vérificatrice générale montrent notamment que ce n'est pas bon pour les contribuables que l'on ait pu recourir à des contrats externes très coûteux au lieu de donner plus de moyens à la fonction publique pour un temps. Cela aurait été tout à fait possible de le faire pour huit ans, et même avant cela.
Nous avons bien sûr connu un autre échec dans notre manque de soutien envers la fonction publique en général. Comme nous le savons, lorsque l'austérité sévit au Canada, les services publics en prennent pour leur rhume et deviennent plus vulnérables. Dans la réalité du 21e siècle, cette vulnérabilité se trouve en grande partie dans les contrats de TI, que le gouvernement du Canada a beaucoup de mal à obtenir. Les représentants de l'ASFC nous l'ont dit très clairement. Ils sentaient qu'ils devaient s'en remettre aux fournisseurs externes.
Je vais souligner les preuves soumises par la vérificatrice générale. À la page 7, à la rubrique « Constatations », il est dit aux paragraphes 1.28 et 1.29 que:
L'Agence des services frontaliers du Canada avait déterminé qu'elle devait s'appuyer sur des ressources externes pour mettre au point les versions Web et mobiles de l'application parce qu'elle n'avait pas une capacité interne suffisante dotée des compétences nécessaires.
Nous avons constaté qu'au fil du temps, l'Agence avait continué de recourir largement à des ressources externes (voir la pièce 1.2). La réduction du recours aux ressources externes aurait réduit le coût total de l'application et favorisé l'optimisation des ressources.
Monsieur Mills, nous savons que la fonction publique, surtout l'ASFC, ici, n'était pas en mesure de mobiliser le personnel nécessaire pour effectuer ce travail à l'interne... C'était bien connu et bien établi à Services publics et Approvisionnement Canada. Avant même cet audit, nous avons entendu plusieurs fois que la fonction publique était vulnérable. Pourquoi faut‑il se rendre à un tel affront envers les contribuables canadiens pour qu'on prenne cet enjeu au sérieux? À quel moment, monsieur Mills, faut‑il avertir le sous‑ministre et le ministre responsable que la fonction publique est vraiment vulnérable?
Cette vulnérabilité crédible mène à une situation où des fournisseurs privés non seulement abusent de leur capacité d'obtenir des contrats du gouvernement, mais comme un collègue l'a mentionné, en viennent parfois à leurrer le gouvernement pour gagner des tâches à effectuer. Ces fournisseurs se permettent ensuite non seulement d'absorber le contrat, mais même de changer les règles du contrat pour utiliser plus de ressources, parfois pour des compétences que la fonction publique aurait pu fournir elle-même.
On aurait dû réduire cette dépendance au privé. À la pièce 1.2, on voit que cette dépendance a augmenté à partir du début du projet. C'est très décevant pour les contribuables, monsieur Mills, de voir qu'on n'a pas cherché à faire des gains d'efficience.
Quand allez‑vous parler de l'urgence du grave sous‑financement de la fonction publique, de la création de la vulnérabilité qui gangrène nos services de TI internes et de la grande menace que présentent les ressources externes pour le gouvernement du Canada tant qu'il ne possède pas ces compétences? C'est selon moi dans cette position que la situation nous place.
L'automne dernier, le Secrétariat du Conseil du Trésor a publié un nouvel avis afin d'inviter tous les ministères à mieux analyser les exigences menant à la signature de contrats à l'externe, plutôt qu'à l'utilisation de ressources internes, et à mieux étayer leur recours à des fournisseurs externes.
Sachez que nous avons suivi l'avis envoyé aux ministères à la fin novembre. Nous avons demandé au personnel de nous montrer leur analyse avant de passer des marchés. Nous voulons voir une copie documentée de l'analyse pour comprendre pourquoi un ministère ne peut pas réaliser le travail au moyen de ses ressources internes.
Un autre argument très valable dont nous avons discuté concernant ce rapport, c'est que nous devons élaborer un mécanisme officiel pour la formation, le départ du personnel et le reste quand nous envisageons de conclure des contrats de transformation et de TI. Même si on engage des ressources externes pour bâtir de nouvelles plateformes et ce genre de choses, il faut renforcer les capacités internes pour entretenir ces systèmes et les adapter ensuite.
Pourquoi ne l'a‑t‑on pas fait pour ce contrat? Par exemple, les médias ont dit que plus de 250 millions de dollars en contrats ont été octroyés à GC Strategies. Dans le cas présent et dans les contrats passés dans les huit années précédentes, pour un montant faramineux de plus de 250 millions de dollars, pourquoi cette pratique n'a‑t‑elle pas été normalisée?
Je ne peux pas l'expliquer. Le gouvernement du Canada a admis qu'il ne l'avait pas fait pour un grand nombre de projets de TI, mais je peux vous assurer qu'à l'avenir, nous allons intégrer ces pratiques exemplaires à la gestion des projets de TI.
Aux représentants de SPAC, votre sous‑ministre Arianne Reza a été nommée le 2 novembre 2023. Avant cela, elle était sous‑ministre adjointe. À partir d'août 2021, elle était la principale responsable de l'approvisionnement fédéral. Elle supervisait 1 400 employés en réponse à la pandémie de COVID‑19. Elle a dirigé l'approvisionnement urgent de biens et services essentiels à la santé et à la sécurité des Canadiens, y compris de vaccins et d'équipement de protection. Elle a dirigé l'élaboration et la mise en place de la simplification des pratiques d'approvisionnement. Ces efforts visaient à bâtir un système d'approvisionnement accessible pour optimiser les ressources. Elle a touché à tous les dossiers que nous étudions aujourd'hui et depuis quelques mois.
Elle avait prévu de prendre congé cette semaine. Elle n'est pas libre cette semaine. Au départ, elle devait être ici la semaine dernière, mais puisque l'horaire de la réunion a changé, elle ne peut malheureusement pas y participer.
Monsieur le président, j'aimerais que nous invitions à nouveau Mme Reza à comparaître à ce comité pour qu'elle réponde à nos questions et à nos préoccupations dans cette affaire.
Monsieur Mills, vous avez donné votre interprétation de ce qu'est un leurre en réponse à ma collègue, Mme Block. Je vais insister un peu, car avant qu'elle ne soumette à votre attention l'entité réelle qui se cache derrière GC Strategies et le travail que réalise cette entreprise, vous avez dit à plus d'une reprise que GC Strategies avait remporté plusieurs contrats avec le gouvernement pour fournir des services de TI. C'est pourtant tout à fait inexact. Un des directeurs ou des responsables de cette entreprise, Kristian Firth lui‑même, a dit très clairement à plusieurs occasions que GC Strategies n'a pas d'expertise en TI. Il s'agit simplement de consultants externes qui concluent des marchés avec le gouvernement du Canada pour trouver des professionnels des TI. C'est vraiment une pratique choquante, surtout quand on voit que la fonction publique fédérale a crû de 40 % depuis 2015 sous Justin Trudeau.
La semaine dernière, au comité de l'éthique, nous avons reçu Jennifer Carr, présidente de l'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, qui supervise les fonctionnaires fédéraux professionnels en TI. Ces gens sont très en colère, à juste titre, contre le gouvernement du Canada, parce qu'il a simplement fait fi de leurs compétences et de leur expertise interne.
Vous êtes sans doute au courant, n'est‑ce pas, monsieur Mills?
Je sais qu'il y a tout un débat au sujet de ce que les professionnels des TI peuvent faire au sein du gouvernement. Encore une fois, en ce qui concerne le recours à des ressources externes, nous avons eu de nombreux dialogues avec des cadres de divers ministères, et ils nous ont indiqué que bien souvent, c'est qu'ils sont à la recherche de compétences très pointues qu'ils ne trouvent tout simplement pas au sein de la fonction publique.
GC Strategies n'a aucune compétence. Rien n'empêcherait le gouvernement du Canada et ses innombrables fonctionnaires fédéraux de faire eux-mêmes des recherches sur Google pour trouver des professionnels des TI. Comment se fait‑il qu'une entreprise de deux personnes travaillant à partir de leur sous-sol ait été autorisée à percevoir 20 millions de dollars sur trois ans pour ne faire absolument rien? Dans le secteur privé, on serait congédié pour cela. Ces gens devraient rendre des comptes pour une atteinte aussi grossière à la confiance du public.
Je pose la question, parce que je parie que personne à SPAC n'a été suspendu, avec ou sans solde. Est‑ce que je me trompe?
J'aimerais commencer par la première partie et le recours à des consultants externes. Le secteur privé en utilise aussi. Je reconnais que GC Strategies et ses deux directeurs principaux ont pour modèle d'affaires de trouver des professionnels des TI...
Maintenant, en ce qui concerne la question du leurre, nous y voyons des actes criminels. Nous y voyons des actes de fraude, de contrefaçon, d'entrave à la justice et d'abus de confiance de la part de fonctionnaires, par l'utilisation de GC Strategies et de certaines pratiques contractuelles.
Avez-vous signalé quoi que ce soit à la GRC jusqu'à maintenant, et si vous ne l'avez pas fait, pourquoi?
Je vous remercie de la question, monsieur le président.
Nous prenons très au sérieux tous les rapports que nous recevons. Nous avons eu accès aux rapports de l'ASFC, au rapport de la vérificatrice générale...
Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
J'aimerais poursuivre dans la même veine que Mme Yip et poser des questions à la vérificatrice générale, car elle n'avait pas tout à fait terminé. Elle parlait du problème lié au fait que le ministère n'avait pas suivi le conseil de SPAC de lancer un appel d'offres ouvert.
Vous avez dit que la raison en était que le ministère est l'ultime responsable des contrats ainsi signés, mais avez-vous quelque chose à ajouter sur la meilleure façon d'assurer la surveillance? Vous n'en parlez pas dans votre rapport. Comment pouvons-nous régler le problème pour qu'il ne se reproduise pas? Si les spécialistes de l'approvisionnement disent qu'il faudrait vraiment lancer un appel d'offres ouvert et que le ministère refuse, avez-vous une idée de la façon dont on pourrait contourner ce blocage?
Je pense qu'il y a déjà des pistes en ce sens qui sont décrites dans la politique d'approvisionnement et dans le manuel d'approvisionnement de Services publics et Approvisionnement Canada.
Je vous dirais que chaque ministère ou organisme devrait avoir son propre groupe ou sa propre direction chargée de surveiller les mesures d'approvisionnement et de poser des questions. De plus, pour certains types de contrats, Services publics et Approvisionnement Canada joue ce rôle, mais les manuels et politiques en matière d'approvisionnement expliquent qu'on pourrait constituer des comités, selon la taille ou l'ampleur des contrats, entre autres. Il y a toute une série de mécanismes déjà décrits.
C'est pourquoi nous recommandons simplement, dans bon nombre de cas, de suivre les politiques existantes. Il n'est pas nécessaire d'en créer d'autres. Il existe des mécanismes de surveillance. Il s'agit de les utiliser quand il se doit.
Cela m'amène à ma prochaine série de questions, qui s'adresseront aux représentants de SPAC.
Dans son rapport, la vérificatrice générale conclut que l'Agence des services frontaliers du Canada, l'Agence de la santé publique du Canada et Services publics et Approvisionnement Canada « n'avaient pas géré tous les aspects de l'application ArriveCAN dans un souci d'optimisation des ressources ».
Vous avez mentionné certaines des mesures que vous avez prises depuis novembre pour régler les problèmes, mais j'aimerais que vous nous expliquiez comment cela va régler le problème des coûts. Commençons par le fait que vous avez retiré à tous les ministères et organismes le pouvoir délégué d'accorder des autorisations de tâches le temps que de nouvelles règles, ententes et formations soient mises en place. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet, s'il vous plaît, et nous expliquer plus précisément ce que cela signifiera lorsque les nouvelles ententes seront en place?
Il y a quelques éléments qui, à mon avis, sont essentiels. Premièrement, nous essayons avant tout maintenant de simplifier l'approvisionnement pour favoriser une plus grande concurrence, ce qui exercera une pression à la baisse sur les prix en général. De même, nous cherchons à assurer une plus grande transparence quant aux prix.
Deuxièmement, on a débattu en long et en large du recours à des sous-traitants par des sous-traitants, et une partie des mesures prises consiste à éclaircir quand les équipes font appel à des sous-traitants de sous-traitants et à nous assurer de bien comprendre quelle est la valeur qui revient aux professionnels des TI qui font le travail, au bout du compte, par rapport aux profits et aux frais généraux. Nous voulons aussi affiner notre aptitude à utiliser la vérification de prix pour nous assurer de taux raisonnables, même en ce qui concerne les profits et les frais généraux, dans les processus concurrentiels.
Je pense que plus la concurrence sera grande, plus les prix baisseront et qu'une plus grande visibilité préviendra le recours à de multiples paliers de sous-traitance.
D'accord. Que se passerait‑il à l'heure actuelle si l'ASFC disait à SPAC qu'elle veut utiliser telle entreprise pour des services généraux de TI et donner ensuite des autorisations de tâches selon les projets?
En vertu des changements que nous venons d'apporter, il faudrait une justification beaucoup plus robuste pour respecter les critères du cadre établi par le Conseil du Trésor pour pouvoir utiliser un contrat non concurrentiel. Ce serait la première chose. Je pense qu'il y aura beaucoup plus de diligence dans les justifications et l'énoncé des raisons pour lesquelles il serait nécessaire de recourir à un contrat non concurrentiel.
En ce qui concerne les autorisations de tâches, nous devrons avoir une compréhension beaucoup plus claire des objectifs globaux du projet et des activités visées. Les autorisations de tâches devront s'accompagner d'une description très précise des activités visées.
L'autre chose que nous envisageons, c'est de limiter la durée du contrat. Une grande partie des faiblesses que nous avons relevées ici, c'est que les autorisations de tâches s'accompagnaient de descriptions générales qui donnaient trop de souplesse. Il faudrait plutôt essayer d'articuler clairement les autorisations de tâches et de réduire cette souplesse, de sorte qu'on saurait dès le départ quelles ressources seront affectées à quels types d'activités. Nous pourrions ensuite évaluer si ces activités ont bien été réalisées et, au bout du compte, évaluer le prix payé pour les mener à bien.
J'aimerais en entendre davantage sur les processus internes de Services publics et Approvisionnement Canada. En théorie, quand un agent remarque qu'il y a des procédures qui sont ignorées de manière répétée par le client, que se passe-t-il? Cet agent a-t-il le devoir d'en parler à son supérieur hiérarchique?
Quand ces conseils sont ignorés de manière répétée, ça soulève des questions qui finissent par monter aux échelons supérieurs de l'organisation, n'est-ce pas? Vous serez d'accord que, dans toute organisation, l'imputabilité augmente en fonction de l'échelon. Dans ce cas, qui, dans l'organisation, a été mis au courant de la remise en question qui a été soulevée dans le rapport de la vérificatrice générale? Jusqu'à quel échelon la question s'est-elle rendue?
D'après l'information que j'ai pu obtenir, c'est monté au niveau du directeur général dans l'organisation. On va vous remettre ces courriels, ou les noms des personnes, bien entendu.
Je n'ai pas son nom. Je n'étais pas avec ce groupe. Je n'ai pas cette information sous la main maintenant, mais je me ferai un plaisir de vous la fournir.
Dans ce cas, si on sait que la marche à suivre n'est pas suivie par le ministère client, pourquoi accepter de cosigner? Pourquoi accepter de prendre une part de la responsabilité?
Effectivement, les autorisations de tâches sont cosignées par la suite. Avant de m'aventurer plus loin, je dois dire que je ne saurais pas exactement ce qui a été cosigné par nous.
Dans ce cas-ci, les procédures ont été suivies en ce qui a trait aux avis qui ont été donnés par notre personnel. Ces avis ont été donnés de façon proactive, mais la décision ultime de choisir un processus d'approvisionnement non concurrentiel était celle du client. Les clients prennent de telles décisions en fonction de besoins opérationnels que nous ne connaissons pas toujours.
Madame la vérificatrice générale, y a-t-il eu des cas où Services publics et Approvisionnement Canada a souligné le caractère non concurrentiel d'un arrangement, mais où il a, malgré cela, signé l'arrangement par la suite?
En ce qui concerne les arrangements découlant d'un processus non concurrentiel, Services publics et Approvisionnement Canada a signé des contrats ou des descriptions de tâches qui n'étaient pas assez claires. À mon avis, ce n'est pas conforme aux politiques. La signature d'un document est effectivement une prise de responsabilité. C'est clair.
J'aimerais poursuivre dans la foulée de la question soulevée par Mme Sinclair-Desgagné, qui concernait la demande de contrat signée par le directeur général de la Direction des services relatifs aux applications opérationnelles.
Je crois comprendre qu'en dépit de cela, SPAC avait entrepris des démarches pour contester le processus non concurrentiel utilisé par l'ASFC pour attribuer le contrat à GC Strategies. À quel moment cette contestation a‑t‑elle été faite à l'ASFC? Était‑ce avant ou après la signature initiale du directeur général de la Direction des services relatifs aux applications opérationnelles?
Il faudrait confirmer la date. Je n'ai pas sous les yeux l'ordre chronologique dans lequel les problèmes et les questions ont été soulevés en ce qui concerne la décision de procéder par concurrence ou par non-concurrence.
Selon les preuves détenues au Bureau du vérificateur général, est‑ce que la personne portant le titre de directeur général de la Direction des services relatifs aux applications opérationnelles était au courant de la contestation qui a été formulée à ce moment‑là?
Comment cette personne a‑t‑elle pris connaissance de cette information? Est‑ce par courriel ou faisait-elle partie du processus de contestation de l'Agence des services frontaliers du Canada?
Cette personne a‑t-elle, à un moment quelconque, sonné l'alarme ou signalé quoi que ce soit en rapport avec les contrats qu'elle était sur le point de signer?
Madame Poulin, je voudrais revenir à la dernière question que je vous ai posée. Je l'ai formulée en proposant divers chefs d'accusation éventuels qui pourraient faire l'objet d'une enquête. Vous avez entendu le témoignage directement de la source, de M. Kristian Firth, qui a admis ouvertement aux membres du Comité qu'il avait modifié, changé des CV sans le consentement, sans permission de la part des détenteurs de ces CV. Il s'agit d'une forme de contrefaçon. Nous avons entendu des témoignages parlant de factures gonflées, encore de la part de GC Strategies. Nous avons entendu parler de sous-traitants qui ne faisaient aucun travail. Nous avons entendu l'ombudsman de l'approvisionnement nous dire que 76 % des sous-traitants n'avaient accompli aucun travail, mais qu'ils avaient tout de même reçu l'argent du gouvernement, de l'argent des contribuables. Comme l'a déterminé la vérificatrice générale, il y a probablement des centaines de pages de documents qui manquent.
En fait, ce qui lui avait paru vraiment inquiétant c'est ce que l'audit ne révélait pas, à mon avis, il s'agit de l'incompétence ou de la corruption. Étant donné tous les signaux d'alarme à propos d'acte criminel, de fraude, de contrefaçon, d'obstruction à la justice et d'abus de confiance de la part de fonctionnaires, avez-vous saisi la GRC sur la base de toutes les informations que vous avez entendues jusqu'à présent?
Comme vous l'avez dit, nous recueillons toutes les informations qui nous ont été fournies. Elles comprennent ce qui a été dit à ce comité. Elles comprennent également les conclusions du rapport de la vérificatrice générale. Elles comprennent encore ce que nous avez entendu par l'intermédiaire du Bureau de l'ombud de l'approvisionnement. Nous recueillons toutes ces informations et nous les analysons en ce moment même. Nous devons vérifier si ces allégations sont étayées par d'autres preuves.
Cependant, ce n'est pas à vous de le faire, madame. Avec tout le respect que je vous dois, ce n'est pas votre travail. C'est le travail de nos policiers professionnels. Si vous soupçonnez un délit criminel, vous devez le signaler aux autorités judiciaires, c'est ça votre travail. Manifestement vous devez avoir des soupçons d'infraction criminelle en ce qui concerne ce qui se passe ici avec ArriveCAN. Oui ou non?
Ce n'est pas votre travail. Vous n'êtes pas un agent de la GRC. Vous êtes une fonctionnaire.
Je répète ma question: après tout ce que j'ai énuméré et tout ce que vous avez lu dans le rapport de la vérificatrice générale, soupçonnez-vous un délit, oui ou non?
Monsieur Mills, j'ai posé la question hier aux représentants de l'Agence des services frontaliers du Canada. Vous parlez au nom de votre ministère. Au cours de la mise en œuvre des 177 versions différentes d'ArriveCAN, y a‑t‑il eu des communications régulières et soutenues entre le sous-ministre et le ministre responsable de ce portefeuille? Selon moi, il y a Mme Anita Anand, Mme Filomena Tassi et Mme Helena Jaczek, donc trois ministres concernées. Y a‑t‑il eu des communications régulières et soutenues entre le sous-ministre et ces ministres?
Pendant la première partie de la pandémie, les communications entre le sous-ministre, les hauts responsables et la ministre étaient tout à fait régulières en ce qui concerne la réponse générale du gouvernement du Canada à la COVID et aux acquisitions générales effectuées pour soutenir cette réponse.
Des réunions interministérielles ont eu lieu, dirigées par le BCP, pour parler de la réponse du gouvernement du Canada à la COVID en général et aux acquisitions…
Il me faudrait revenir sur le degré de participation de nos sous-ministres aux réunions interministérielles. Il est certain qu'un certain nombre de comités de sous-ministres étaient…
Pour les Canadiens qui regardent cette réunion en direct ou en différé et qui ne connaissent pas bien le Bureau du Conseil privé, quel est le ministre responsable du BCP?
L'un des thèmes communs aux rapports de la vérificatrice générale et de l'ombud de l'approvisionnement est le manque de documentation. Beaucoup de décisions n'avaient aucune justification écrite. Selon le paragraphe 1.69 du rapport de la vérificatrice générale, les autorisations de tâches manquaient de précision: « de nombreuses autorisations de tâches […] dont plusieurs ayant été cosignées par Services publics et Approvisionnement Canada, ne comprenaient pas de descriptions précises et détaillées des tâches à accomplir et des produits livrables ». Je crois que la vérificatrice générale a dit que c'était l'une des pires, sinon la pire comptabilité qu'elle n'avait jamais vue.
Que fait SPAC, en tant qu'autorité contractante, pour veiller à ce que cette documentation soit gérée de façon appropriée à l'avenir?
Comme je l'ai dit, nous avons donné des consignes à tous les ministères et à toutes les agences, à savoir que les autorisations de tâches ne seraient désormais plus délivrées sous leur autorité. Ces autorisations seront dorénavant délivrées sous l'autorité de SPAC. Lorsque SPAC délivrera ces autorisations de tâches, nous devrons veiller à ce qu'elles soient beaucoup plus détaillées quant aux activités et aux résultats précis que nous essayons d'atteindre par le travail qui y est indiqué.
Il existe une communauté de hauts fonctionnaires désignés dans tous les ministères. Ils sont responsables de la passation des marchés. Nous continuons d'être en relation avec cette communauté pour nous assurer qu'ils sont au fait des nouvelles exigences. Dans le même temps, nous envisageons également une formation à l'interne pour tous les agents d'approvisionnement afin de nous assurer qu'ils sont mieux informés.
Ce qui est ressorti en partie de cette activité c'est la répartition des responsabilités et la question de savoir qui est en charge du contenu technique de ces autorisations de tâches dans les ministères. Je pense que c'est organisé souvent différemment selon les ministères. Lorsque nous nous chargerons de cette question, il nous faudra l'examiner plus longuement et nous assurer qu'à l'avenir, même d'un point de vue non technique, il y aura ce que nous appelons une clarté et une cohérence raisonnables dans l'application de ces autorisations de tâches.
J'ai cru comprendre qu'il existait un système de passation de marchés en ligne qui pourrait s'avérer utile. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste précisément son utilité?
Dans le passé, notre agent d'approvisionnement recevait les documents sous différents formats. Il pouvait s'agir de CD, de télécopies, de copies papier ou de courriels. En fait, il y avait une myriade de moyens de communication. L'aspect positif, très positif de la solution d'approvisionnement en ligne, qui résoudra bon nombre de ces problèmes, est que toute la documentation, toutes les interactions entre une autorité contractante et les fournisseurs feront partie de la plateforme. Tout sera enregistré dans le nuage.
La probabilité que les problèmes qui se sont posés dans le passé se reproduisent dans les marchés gérés par SPAC est très faible. En outre, nous renforçons la formation du personnel. Le sous-ministre, M. Mills, y a fait allusion. Il y aura également des listes de contrôles obligatoires pour les autorisations de tâches.
Je dois dire qu'il existait déjà une exigence de clarté des tâches. Cela figurait déjà dans le manuel d'approvisionnement. Ce dont nous avons besoin, c'est d'une plus grande surveillance et veiller à ce que des procédures soient en place à cet effet.
Outre la nécessité d'une documentation plus étoffée, qui serait très utile, l'effet cumulatif de tous les problèmes signalés par la vérificatrice générale et l'ombud de l'approvisionnement a été qu'ArriveCAN a coûté trop cher.
Bien qu'il y ait eu un certain nombre de contrats non concurrentiels, il y a eu aussi un certain nombre de contrats concurrentiels de valeur élevée. Que fait SPAC pour veiller à ce que nous payions un prix équitable pour les services recherchés?
Comme je l'ai dit, nous travaillons sur plusieurs fronts. Notre objectif principal est de veiller à simplifier et à ouvrir les marchés publics à toutes les entreprises qui sont en mesure de respecter les exigences du gouvernement du Canada en matière de biens et de services. La concurrence accrue sera le facteur le plus important pour faire baisser les prix et garantir une certaine valeur pour les Canadiens.
En outre, comme je l'ai déjà dit, nous essayons de rendre plus transparente la manière dont le travail est tarifé dans le cadre de ces contrats. Nous élargissons également notre utilisation des outils de vérification des prix de sorte que si nous devons passer des marchés non concurrentiels — et il existe des cas légitimes définis dans notre politique pour cela — nous disposons d'une plus grande transparence et d'un plus grand recours à la vérification des prix pour garantir le caractère raisonnable des prix dans des marchés non concurrentiels.
Monsieur Mills, j'aimerais comprendre pourquoi le gouvernement du Canada fait affaire avec une compagnie comme GC Strategies à titre d'intermédiaire. On donne un contrat à cette compagnie qui, elle, trouve des sous-traitants et les paye, ce qui fait énormément augmenter le coût des contrats.
N'y a-t-il pas des fonctionnaires qui peuvent se charger de trouver des sous-traitants pour des projets? Cette façon de faire est-elle répandue au sein du gouvernement du Canada?
Je dirais pour commencer que, d’une manière générale, les ministères déterminent d’abord qu’ils n’ont pas les compétences internes dont ils ont besoin, puis ils cherchent à faire appel à des intervenants extérieurs.
Dans le cadre de ces instruments, ils recherchent des professionnels des TI avec certaines compétences et le mécanisme de concurrence est ouvert à des entreprises structurées comme GC Strategies, ainsi qu’à d’autres entreprises intégrées qui disposent de professionnels des TI dotés d’un éventail de compétences. Ces entreprises sont normalement en concurrence et celle qui présente l’équipe la plus compétente au meilleur prix remporte le marché.
L'histoire nous montre que, en fin de compte, ces gens n'avaient aucune compétence si ce n'est celle d'avoir obtenu des contrats avec le gouvernement du Canada à partir de 2015, contrats qui ont fini par atteindre une valeur de 250 millions de dollars.
Madame Poulin, à ce sujet, vous êtes sous-ministre adjointe à la direction générale de la surveillance, dont le rôle est de surveiller. À ce titre, considérez-vous que la situation présente en est une de corruption?
Comme je l'ai mentionné plus tôt en réponse à une autre question, nous prenons vraiment très au sérieux cette information. Nous la comparons avec d'autres renseignements que nous avons en main au sein même du ministère. Nous procédons actuellement à des analyses importantes. Nous avons un cadre…
Excusez-moi de vous interrompre, madame Poulin. Je comprends votre réponse, qui a été préparée, mais, comme votre direction est chargée de la surveillance, j'imagine que certaines personnes se cognent la tête contre les murs. C'est tout le système qui est mis en cause, ici. Pour nous, il y a clairement de la corruption. Est-ce une des possibilités que vous envisagez?
Nous l'envisageons et nous n'ignorons aucun scénario. Nous prenons vraiment très au sérieux cette information. Des analyses sont en cours. S'il y a des indices de criminalité dans les analyses que nous poursuivons actuellement, nous allons confier ces cas à la Gendarmerie royale du Canada.
Votre direction est-elle tenue d'établir des directives afin d'éviter que des documents ou des courriels disparaissent? On entend dire, en effet, que des gens effacent des courriels et que la déchiqueteuse va bon train. Avez-vous le pouvoir d'empêcher ou de contrôler ça?
Ça ne relève pas de mon autorité. Cependant, lorsque nous faisons des analyses dans des dossiers de ce genre, nous faisons parfois des recommandations visant à changer certaines pratiques, qui doivent relever de notre autorité. Ce que vous…
Dans la situation actuelle, on peut dire qu'il y a un éléphant dans la pièce. Vous parlez du futur. En fait, tout le monde en parle. On dit qu'on a eu des directives en décembre et qu'on va changer les façons de faire. Il reste que les règles, au gouvernement du Canada, existent depuis plusieurs années. Le Conseil du Trésor est là pour mettre des règles en place. Services publics et Approvisionnement Canada établit les contrats et les ministères font ensuite leurs achats.
Pendant la crise de la COVID‑19, c'était M. Jean-Yves Duclos qui était président du Conseil du Trésor. Compte tenu des suivis qui devaient être faits, beaucoup de questions étaient posées sur les divers contrats qui étaient octroyés. Pourtant, quand on le questionnait, M. Duclos semblait toujours dire que ça ne relevait pas vraiment de son organisme.
Madame Hogan, comme vérificatrice générale, quelles responsabilités considérez-vous que le Conseil du Trésor a dans une situation comme celle-ci?
Pendant la pandémie, le secrétaire du Secrétariat du Conseil du Trésor a envoyé une lettre à la fonction publique pour dire qu'on pouvait être un peu plus flexible avec les règles habituelles, à cause de la pandémie et du besoin de réagir rapidement. Cependant, cette lettre était aussi très claire sur la responsabilité de chaque ministère de bien documenter les décisions prises et les jugements pour assurer une bonne reddition de comptes aux Canadiens.
Dans le cas d'ArriveCAN, c'est là où le gros échec est arrivé. Cette documentation n'existe pas pour être en mesure d'assurer une bonne reddition de comptes aux Canadiens. À l'avenir, je m'attendrais à ce que le Secrétariat du Conseil du Trésor s'assure que, durant une autre urgence, des mesures sont en place pour garantir une bonne surveillance et le respect des lettres ou des directives.
Je remercie les témoins d’être venus aujourd’hui. Je suis navrée que vous n’ayez pas pu venir la semaine dernière en raison d’une annulation de dernière minute.
J’espère que vous pourrez m’aider à comprendre le fonctionnement des marchés publics. Avant toute chose, je tiens à dire à quel point j’ai été déçue que nous n’ayons pas mieux géré l’argent des contribuables, que nous ayons eu un système d’approvisionnement aussi peu reluisant et défectueux. Au bout du compte, ce sont les contribuables et l’argent des contribuables qui en ont souffert. J’aimerais comprendre un peu mieux en quoi consiste la procédure de passation de marchés, si vous le voulez bien.
La semaine dernière, nous avons constaté de grandes variations dans les montants d’argent reçus au fil des ans par GC Strategies dans le cadre de ses contrats et il y a une certaine confusion quant à la façon dont ces contrats ont été déclarés au gouvernement. La semaine dernière, des témoins nous ont également dit que pour obtenir un contrat, il fallait avoir une relation avec le ministère concerné.
Puis‑je demander à SPAC de nous aider très brièvement à comprendre les différences entre les arrangements en matière d’approvisionnement, les offres à commandes, les autorisations de tâches et autres et ce que ces relations ont à voir avec l’obtention ou non de contrats?
J’aimerais savoir de façon catégorique si les personnes qui ont repris le nom de GC Strategies ou qui ont changé leur nom en GC Strategies, étaient connues des services d’approvisionnement au cours de la dernière décennie.
Je vais commencer et je demanderai à M. Laporte de prendre la parole pour compléter mes propos.
Les arrangements en matière d’approvisionnement et les offres à commandes sont des méthodes d’approvisionnement qui permettent de présélectionner les entreprises en mesure de produire un bien ou un service dont le gouvernement du Canada a besoin. Je crois qu’il existe 11 catégories d’arrangements en matière d’approvisionnement. Comme je l’ai déjà dit, les sociétés doivent démontrer qu’elles ont réalisé des projets semblables ou des produits semblables dans le passé, avec un volume d’affaires suffisant pour qu’elles soient en mesure de répondre aux besoins du gouvernement. Elles peuvent alors être présélectionnées pour ces accords d’approvisionnement et ces offres à commandes.
Lorsqu’un ministère a un besoin précis et qu’il s’aligne sur un secteur préoccupant dans le cadre de ces arrangements d’approvisionnement, il s’adresse à SPAC qui organise alors une mini mise en concurrence. En fonction de la valeur du marché, 15 entreprises sont parfois présélectionnées dans une liste de fournisseurs pré-évalués. S’il s’agit d’un contrat de grande valeur, tous les fournisseurs présélectionnés sont alors mis en concurrence pour ce marché. En fin de compte, l’entreprise gagnante est choisie en fonction d’un calcul faisant intervenir l’évaluation technique et l’évaluation du prix.
Le point de référence dont il s’agit ici, selon moi, est qu’il y a eu beaucoup de questions autour de GC Strategies. GC Strategies a été pré-évaluée dans le cadre des accords d’approvisionnement. Elle avait déjà soumissionné pour un certain nombre de travaux auprès de différents ministères du gouvernement. Comme certains l’ont déjà mentionné, elle a réalisé un volume important de transactions. Elle avait participé à ces appels d’offres, constitué des équipes et fourni des services pour les différents ministères et agences. D’après tous les échanges avec les ministères et les agences, les professionnels des TI travaillant pour GC Strategies fournissaient des activités et des services qui convenaient aux différents ministères.
Dans le cas d’ArriveCAN, l’ASFC nous a informés qu’elle connaissait déjà GC Strategies en tant qu’entreprise et l’a proposée en quelque sorte comme une entreprise capable, selon elle, de mettre sur pied une équipe et qui pourrait réellement répondre à ses besoins. Le contrat non concurrentiel de GC Strategies n’était pas un contrat dans le cadre d’un arrangement en matière d’approvisionnement ou d’une offre à commandes, mais l’entreprise était connue pour ses travaux antérieurs effectués dans le cadre d’offres à commande et d’arrangements en matière d’approvisionnement.
Vous dites que GC Strategies, ou les gens qui sont actuellement désignés par ce nom ont eu une relation avec le gouvernement dans le passé, et que celle‑ci se poursuit en quelque sorte.
Ce que je dis, c'est que GC Strategies, comme on l'a déjà mentionné ici, regroupe deux personnes qui ont engagé des professionnels des TI venant d'une vaste gamme de domaines informatiques, et que ces professionnels ont fourni des services de consultation en TI pour le gouvernement du Canada. Les gens savaient que l'entreprise GC Strategies avait la capacité de réunir des équipes de professionnels des TI pour répondre aux besoins des ministères.
Non. Il y aura d'autres occasions. Je crains que nous ayons dépassé le temps imparti.
Je sais que les membres du Comité sont désireux de poser des questions, même après le temps qui leur est alloué. J'aime laisser les témoins donner des réponses complètes, mais je ne permets pas de question une fois le temps écoulé.
Je sais que vous aurez de nouveau la parole, madame Khalid. Vous pourriez aussi partager un peu de temps avec l'un de vos collègues pour avoir l'occasion de poursuivre.
[Français]
Madame Sinclair‑Desgagné, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
J'aimerais poursuivre dans la même veine que précédemment.
Le directeur général du ministère a été mentionné à plusieurs reprises. À qui cette personne se rapportait-elle au moment des faits, c'est-à-dire en 2020? À quel sous-ministre se rapportait-elle? J'ai l'organigramme devant moi, et je demande une réponse très précise.
Savez-vous si le prédécesseur — ou la prédécesseure — de M. Laporte était au courant du fait que le directeur général avait remis en question les décisions de l'Agence des services frontaliers du Canada en matière d'approvisionnement?
Un directeur général n'a-t-il pas le devoir de faire rapport au sous-ministre délégué? Y a-t-il quelque chose qui se perd dans l'air? La chaîne de commandement est pourtant bien établie.
Comme je l'ai déjà mentionné, le ministère fournit des conseils sur d'éventuelles stratégies d'approvisionnement. Il conseille le ministère client. C'est ce dernier qui décide s'il accepte ce conseil ou adopte une autre approche. Il n'est pas rare que les ministères ne suivent pas nos conseils et préfèrent en quelque sorte procéder différemment...
D'accord. Excusez-moi de vous interrompre, mais mon temps de parole est limité.
La vérificatrice générale a confirmé que les autorisations de tâches avaient été signées par le ministère responsable des processus d'approvisionnement. Pourtant, ces autorisations, cosignées par Services publics et Approvisionnement Canada, ne respectaient pas les normes prédéterminées. Pourquoi avoir accepté de cosigner des autorisations de tâches ou des contrats qui ne respectaient pas les processus en place?
Comme nous l'avons déjà dit, nous avons apporté des changements à notre système pour essayer de renforcer ce volet. Nous admettons qu'il n'était pas convenable d'avoir des autorisations de tâches trop générales ne précisant pas clairement les activités à réaliser.
Vous dites avoir fait des changements. Y a-t-il des personnes qui ont perdu leur emploi? Il s'agit quand même d'erreurs très graves. On n'avait qu'une tâche, mais elle n'a pas été accomplie.
Personne n'a perdu son emploi. Des consignes ont été envoyées le 4 décembre. Comme je le mentionnais, des listes de vérification ont été établies. Il faut garder en tête que nos agents d'approvisionnement ne travaillent pas que sur un contrat. Comme M. Mills l'a mentionné, ultimement, la décision de suivre ou de ne pas suivre nos conseils revient au client.
J'aimerais maintenant revenir sur le délai intéressant entre la remise en question de Services publics et Approvisionnement Canada et la date à laquelle le contrat a été signé. Nous avons entendu en réponse à mes questions précédentes que c'est en mai 2020 que la conclusion du paragraphe 1.51 aurait été tirée:
Nous avons constaté que Services publics et Approvisionnement Canada, en tant qu'autorité centrale de l'approvisionnement et de la passation de marchés du gouvernement, avait initialement remis en question la décision de l'Agence des services frontaliers du Canada de proposer et d'utiliser des processus non concurrentiels pour ArriveCAN et avait proposé d'autres solutions.
C'était en mai 2020. L'application a été lancée le 29 avril 2020. J'aimerais clarifier les choses à propos de cette période. Lequel de ces événements est survenu en premier, si l'on tient également compte de la date du contrat? Ma question s'adresse à la vérificatrice générale.
Le courriel dont nous parlons date de mai 2020. Le premier contrat a été attribué à GC Strategies à l'issue d'un processus non concurrentiel le 8 avril 2020. Ensuite, l'application a été lancée le 29 avril.
Je m'adresse aux représentants de SPAC. Vous avez contesté les processus non concurrentiels. Dans votre dernière réponse, vous avez dit que vous n'étiez au courant d'aucun signal d'alarme lancé au ministère par le directeur général de la Direction des services d'applications opérationnelles. Est‑ce exact?
Comme on l'a déjà dit, plusieurs contrats ont été accordés à GC Strategies, pas un seul. C'était peut-être à propos d'un des contrats ultérieurs, et non du contact initial en avril.
Il portait évidemment sur le deuxième contrat, qui a été conclu le 29 juin. Encore une fois, il s'agissait d'un processus non concurrentiel. Trois contrats non concurrentiels ont été attribués à GC Strategies avant que le processus concurrentiel ne suive son cours.
Vous avez dit que vous changez les processus de SPAC. Le faites-vous parce que les processus étaient très bons auparavant et que vous voulez les empirer, ou parce qu'ils n'étaient pas satisfaisants et que vous souhaitez les améliorer?
Évidemment, nous avons reçu deux rapports, l'un du Bureau de l'ombudsman de l'approvisionnement et l'autre du Bureau du vérificateur général, qui ont clairement fait état de nombreux aspects à améliorer.
Nous mettons en place des contrats. Nous ne faisions pas la gestion du projet. Nous ne connaissions pas le budget global du projet ni la totalité des contrats. Nous n'étions pas au courant.
Au ministère, nous nous sommes attardés aux biens et aux services dont les responsables avaient besoin, et ce sont les questions qui ont été posées. Nous nous efforcions de les fournir.
Le projet devait coûter 80 000 $. Il a atteint 1 million de dollars, puis 5 millions, 10 millions, 25 millions, 30 millions et enfin 45 millions de dollars. Il s'est ensuite probablement chiffré à au moins 60 millions de dollars, parce que les déchiqueteuses ont dû fonctionner puisqu'aucun document ne montre les coûts réels.
Il a été mentionné, bien sûr, que seulement deux personnes travaillaient pour GC Strategies et qu'elles empochaient ces sommes. Vous avez parlé de ce que vaut leur capacité à constituer une équipe. Pour le même prix que le coût de « ArnaqueCAN » qui a été versé à GC Strategies seulement, vous auriez pu embaucher 10 fonctionnaires pendant 25 ans. Nous avons plutôt eu ces génies qui ont pris 30 % de ce contrat de 20 millions de dollars, et possiblement 258 millions de plus. Vous avez déclaré ne pas être en mesure de dire si nous en avions eu pour notre argent. C'est ce que nous a révélé la vérificatrice générale. Or, ce n'est pas le cas ici.
Combien d'autres intermédiaires de deux personnes SPAC autorise‑t‑il à passer des marchés pour le gouvernement du Canada? Veuillez simplement me donner un chiffre. Combien y en a‑t‑il d'autres?
C'est une réponse acceptable. Nous allons considérer que c'est un oui.
Monsieur Mills, le ministre — votre ministre — peut‑il récupérer l'argent qui a été versé dans ce cas très clair d'abus contractuel? Pour être très précis, je parle de l'argent versé à GC Strategies pour son travail sur « ArnaqueCAN », qui a échoué.
Le ministre a‑t‑il le pouvoir de récupérer cet argent?
Normalement — je peux parler au nom de notre ministère —, dans une situation où notre ministère est partie à un contrat où nous n'avons pas obtenu ce qui était censé être fourni, nous aurions absolument le droit de chercher à récupérer les fonds.
Mon temps est très limité. Il me reste 15 secondes.
Ils ont contrefait les titres de compétences qu'ils ont utilisés pour remporter l'appel d'offres. Si ce n'est pas une condition d'inadmissibilité à ce qu'une personne continue à recevoir du travail, qu'est‑ce qui en serait une? De plus, si cela ne signifie pas que nous allons récupérer l'argent parce qu'ils l'ont obtenu par la tromperie, qu'est‑ce qui pourrait le permettre?
La falsification et la fraude sont-elles suffisantes pour que le ministre récupère l'argent des Canadiens? Oui ou non?
C'est l'une des questions qui sont étudiées. Lorsque la décision sera prise, les autorités compétentes interviendront, comme ma collègue Catherine Poulin l'a indiqué.
Je dois dire d'entrée de jeu que j'ai utilisé l'application ArriveCAN. Elle a très bien fonctionné pour mes allées et venues, du moins de l'autre côté de la frontière américaine.
Ma question s'adresse aux représentants de SPAC.
Vous êtes assis ici. Vous êtes sur la sellette. Il y a manifestement un déséquilibre entre le pouvoir et la reddition de comptes. Vous êtes tenus responsables de beaucoup de choses en ce moment. Avez-vous l'impression que, par le passé, il y a eu un déséquilibre entre votre pouvoir, d'une part, et les comptes que vous devez rendre à l'heure actuelle, d'autre part?
Je vais demander à M. Mills de répondre à cette question.
Je pense que cela en dit long sur le principe fondamental de la reddition de comptes. Dans le domaine de l'approvisionnement, de la gestion de projets et au sein du gouvernement en général, il y a une grande division des responsabilités, et énormément de personnes.
L'un des défis entourant la responsabilisation et les réponses aux questions est de pouvoir comprendre le rôle de chacun dans ce processus et ce qui s'est passé, et d'être en mesure de revenir et de rendre compte des activités qui se sont déroulées au sein des différents ministères et à différents échelons.
Il y a une différence entre donner des conseils et des directives. Vous avez mentionné que vous apportez des ajustements à la façon dont les choses se déroulent. Sommes-nous en train de nous orienter davantage vers des conseils et de nous éloigner des directives? En présence de conseils, le responsable peut les suivre ou non, mais les directives exigent qu'une chose soit faite d'une certaine façon. Dans quelle direction allez-vous en ce moment?
Je pense que nous souhaitons donner des conseils plus clairs. Cependant, en fin de compte, les décisions et le pouvoir décisionnel relèvent toujours des ministères qui sont tenus d'acheter des biens et des services pour s'acquitter de leur mandat.
Il s'agit d'un incident où les choses ne se sont manifestement pas déroulées comme elles auraient dû. Est‑ce un problème systémique? Lorsque vous examinez l'ensemble du secteur dont votre organisation est essentiellement tenue responsable à l'heure actuelle, constatez-vous d'autres signaux d'alarme? Y a‑t‑il d'autres choses que vous examinez de plus près à la suite de votre expérience dans ce dossier?
Nous réfléchissons certainement à la difficulté de l'approvisionnement en TI, à la difficulté des projets de TI et aux meilleurs mécanismes permettant d'obtenir une aide externe lorsque nous en avons besoin pour mener à bien les projets informatiques nécessaires au gouvernement.
Nous avons vu dans toute une gamme de projets de TI que ceux‑ci sont uniques, puisqu'ils sont souvent très transformateurs. Ils sont couramment à la fine pointe, de sorte que nous n'avons tout simplement pas assez de vision et d'expérience pour être en mesure d'imaginer les changements qui seront apportés une fois que nous aurons mis en place ces systèmes. Ces projets sont très difficiles à concevoir et à mettre en œuvre de façon à obtenir des résultats. Du point de vue de l'approvisionnement, il est plus difficile de s'assurer d'embaucher les meilleures équipes pour pouvoir travailler avec nos propres gens et obtenir ce résultat.
Je pense que c'est à cela que nous réfléchissons, en fin de compte. Comment pouvons-nous mener à bien ces projets complexes de TI? Trouvons-nous un équilibre entre les ressources internes et externes? Quelle est la meilleure façon de mobiliser les ressources externes à cette fin?
Monsieur Mills, êtes-vous convaincu de connaître la ventilation du coût réel de l'application par rapport à tous les autres ingrédients qui ont contribué à la mise en œuvre de ce programme? Il peut s'agir de formation. Il y a aussi d'autres ajustements à apporter à divers systèmes de TI — une mosaïque, en réalité — de la fonction publique à l'échelle du pays. Avez-vous été en mesure de déterminer ce que l'application elle-même a coûté précisément?
Je pense que la vérificatrice générale en a parlé — et elle peut compléter ma réponse. À mon avis, aucun d'entre nous ne sait avec certitude quel a été au bout du compte le coût du travail réalisé à l'égard d'ArriveCAN. Compte tenu du manque de clarté et de précision, il serait évidemment très difficile de dire quelle part exacte des dépenses a été consacrée uniquement à la création et au développement de l'application, par rapport à son intégration aux systèmes existants de l'ASFC, à la formation des gens, à l'adaptation des systèmes, au renforcement de l'accessibilité, à l'examen d'autres mesures de sécurité entourant les systèmes et à l'interconnexion avec l'application. Je n'ai pas cette donnée précise.
GC Strategies figurait sur la liste des fournisseurs présélectionnés. Je ne sais pas si quelqu'un accepterait de conclure un contrat à fournisseur unique avec une organisation qui n'est pas pré-évaluée. J'espère que vous pouvez simplement consentir par un signe de tête et dire qu'une telle chose ne se produira pas.
Lorsqu'une personne ne suit pas vos conseils — même vos conseils novateurs et améliorés à la suite de votre expérience —, est‑ce que la situation est signalée? Le dossier remonte‑t‑il aux échelons supérieurs de la hiérarchie? Les gens se disent-ils: « Un instant, il se passe une chose qui pourrait causer des problèmes plus tard »? Est‑ce que cela se produit?
Je pense qu'il y a un signalement si on a l'impression que les gens ne respectent pas les règles d'approvisionnement et qu'il y aura une violation.
Dans ce cas‑ci, il existe un mécanisme pour avoir recours à des contrats non concurrentiels. Il faut le justifier. Ces mécanismes ont été utilisés et respectés, de sorte que même si les décideurs n'ont pas suivi notre conseil d'emblée, rien ne permettait de croire qu'ils ne respectaient pas les règles d'approvisionnement.
Après huit ans, il me paraît évident que le système de passation de marchés du gouvernement du Canada est gravement défaillant. Nous avons devant nous aujourd'hui des fonctionnaires qui représentent le ministère qui supervise la passation de marchés. Avec « ArnaqueCAN », une petite entreprise, GC Strategies...
Un député: C'est ArriveCAN.
M. Garnet Genuis: ... qui ne peut faire quoi que ce soit, est en mesure d'obtenir des centaines de millions de dollars en contrats, pour ensuite recourir à la sous-traitance.
La vérificatrice générale a constaté que le processus était d'ailleurs truqué en faveur de cette entreprise, et nous avons entendu au Comité des opérations gouvernementales que cette entreprise avait enfreint la loi en modifiant systématiquement des curriculum vitae pour conclure des ententes. L'ombudsman de l'approvisionnement a également constaté que le système avait été conçu pour aider les initiés à obtenir des contrats et pour inciter ces entrepreneurs à facturer un montant plus élevé au gouvernement. Honnêtement, il ne s'agit pas seulement de problèmes qui touchent « ArnaqueCAN ». Ce sont des problèmes systémiques.
Votre ministère est chargé de la supervision des contrats. Compte tenu de cette incompétence systématique, de cette corruption systématique — peut-être les deux — que nous observons, que diriez-vous aux Canadiens qui regardent ce que fait votre ministère et se demandent si vous êtes devenus totalement inutiles étant donné que ces choses se sont produites? Vous êtes censés surveiller ce qui se passe, mais ces problèmes sont survenus de toute façon.
Ce que je dirais aux Canadiens, c'est que le système d'approvisionnement est très complexe. Il est devenu plus complexe au fil des ans, et ce, pour différentes raisons: les accords commerciaux internationaux, un certain nombre de règles...
Je suis désolé. Je vais quand même insister sur ce point. La question n'est pas de savoir si le système est complexe ou non. La question est de savoir si votre ministère fait quelque chose, s'il améliore la situation. Puisque vous avez pu donner libre cours à ce genre de corruption, d'incompétence, ou les deux, dans le processus d'approvisionnement, et puisque cela s'est seulement produit pendant que vous étiez là, votre ministère améliorait‑il les choses? Faisait‑il quelque chose dans le cadre de ce processus?
Ce que j'allais dire, c'est que, compte tenu de cette complexité, nous employons des processus d'approvisionnement complexes pour composer avec les règles, la réglementation et tout le reste. Nous nous efforçons de simplifier le processus d'approvisionnement afin qu'il soit plus accessible aux petites et moyennes entreprises de partout au pays, et en particulier aux fournisseurs de tous les horizons de partout au pays. Voilà ce que nous faisons. En simplifiant le processus et en le rendant plus accessible, les Canadiens en auront plus pour leur argent.
Vous ne répondez pas vraiment à la question, cependant.
Par ailleurs, le rapport de l'ombudsman de l'approvisionnement montre que le système a été conçu pour accorder la préférence aux initiés, car il faut déjà avoir fait affaire avec le gouvernement du Canada pour pouvoir obtenir un contrat.
Je n'obtiens pas de réponse claire sur ce que fait votre ministère.
Parlons du ministre. Que fait le ministre Duclos en tant que ministre de l'Approvisionnement? Est‑il responsable de ce qui s'est passé? Cherchait‑il à obtenir des séances d'information sur GC Strategies? Que fait‑il, ou que ne fait‑il pas, dans le cadre de ses fonctions?
Habituellement, le ministre délègue la responsabilité en matière d'approvisionnement aux fonctionnaires du ministère, et la grande majorité de nos activités d'approvisionnement sont autorisées, gérées et supervisées par les fonctionnaires du ministère.
Il y a une poignée de contrats qui relèvent du ministre et pour lesquels il doit accorder son approbation, et il y aurait un certain nombre...
Nous aimerions savoir quand le ministre Duclos et les ministres qui étaient là avant lui ont assisté à une séance d'information sur ArriveCAN et GC Strategies.
Vous engagez-vous à remettre au Comité une liste exhaustive de tous les entrepreneurs présélectionnés dans le même délai?
Dans le cadre de mes fonctions, je supervise divers processus, depuis les processus de diligence raisonnable jusqu'aux enquêtes administratives sur le ministère. Mon rôle consiste aussi à mettre en place un cadre de mesures de prévention, de détection et de réaction pour toute information portée à notre attention qui pourrait suggérer qu'il y a des problèmes avec les processus, ou même que des actes répréhensibles ont été commis.
Nous tenons compte de ces informations et les prenons au sérieux. Plusieurs équipes les examinent. Nous vérifions d'abord si l'allégation est étayée par d'autres preuves. Lorsque nous parvenons à cette première étape et que nous pensons qu'il y a suffisamment d'éléments pour déclencher une enquête administrative, nous le faisons.
Le ministère dispose d'une excellente équipe d'enquêteurs internes qui examinent tous les renseignements qu'ils reçoivent. Au terme de cet examen, ils publient un rapport pour confirmer ou annoncer si l'allégation s'est avérée juste ou si les renseignements n'ont rien révélé. Dès que nous cernons des éléments de criminalité, nous les transmettons à la GRC afin qu'elle décide s'il faut ouvrir une enquête criminelle sur l'affaire.
Comme nous l'avons déjà dit, à l'issue d'une analyse approfondie qui démontre que des travaux ont été surfacturés — que nous avons payé trop cher pour certaines choses —, nous sommes en mesure de récupérer les fonds auprès des fournisseurs, et c'est ce que nous faisons habituellement.
Il nous importe de prendre en compte tous ces renseignements — le résultat de ces rapports et les bonnes recommandations qui ont été formulées — pour nous assurer que nous comprenons, même après ces analyses, ce que nous pouvons changer et améliorer pour que ce cadre de prévention, de détection et de réaction soit encore plus efficace afin d'éviter que de tels événements se répètent.
Oui, j'assure plusieurs fonctions. Je suis également la directrice de la sécurité. Il s'agit de la sécurité des personnes, des informations et des biens au sein du gouvernement. Nous prenons au sérieux toutes les informations à ce sujet. Un autre domaine de responsabilité a trait à la sécurité des contrats pour le gouvernement du Canada.
Monsieur Mills, nous retrouvons le nom de certains entrepreneurs dans le processus concurrentiel, mais ce sont différentes personnes qui ont effectué le travail. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce qui s'est passé?
Comme j'y ai fait allusion plus tôt, parfois, dans le cadre d'un processus d'approvisionnement, nous exigeons certains niveaux de compétences en TI. Même dans les projets d'architecture et d'ingénierie, par exemple, une équipe sera proposée, puis, pour différentes raisons... Une fois le contrat octroyé, il faut parfois attendre un certain temps avant de commencer le travail et, au bout de cette période, certaines ressources ne sont peut-être plus disponibles. Dans certains cas, les gens ont quitté l'entreprise et celle‑ci doit les remplacer. Dans d'autres cas, l'entreprise n'est pas certaine d'avoir remporté le contrat, et elle décide d'affecter les ressources à un autre projet.
Dans ces cas‑là, l'entreprise est tenue d'obtenir l'approbation du gouvernement pour pouvoir donner le travail à d'autres ressources. Elle doit démontrer que ces gens possèdent les mêmes compétences ou bien dépassent celles de ceux qui avaient été nommés au départ.
L'autorisation de tâche permet habituellement de déterminer les ressources qui accompliront le travail, leur taux de rémunération et le travail qu'elles devront abattre. Ensuite, les entreprises devront soumettre des factures démontrant que le travail a été effectué par ces personnes en respectant ces taux.
Si on regarde juste ce qui s'est passé pendant la pandémie et qu'on regarde seulement l'application ArriveCAN, on pourrait être tenté de croire que le problème relève de l'Agence des services frontaliers du Canada et que, effectivement, la plus grande part de responsabilité lui revient dans ce dossier. Soit.
Par contre, dans le rapport de l'ombudsman et celui de la vérificatrice générale, on remarque que le même type de problème en approvisionnement a été détecté à Services partagés Canada, soit un manque de documentation à Amazon Web Services et à Microsoft, alors que c'était applicable à ArriveCAN. Le même problème a également été détecté à l'Agence de la santé publique du Canada, qui a octroyé un contrat non concurrentiel à KPMG en ne respectant pas les procédures. Ce problème semblait donc généralisé pendant la pandémie.
Si on examine de plus près la question, en consultant le site Gouvernement ouvert, on se rend compte que, pendant la pandémie, environ 3 000 contrats non concurrentiels ont été accordés. De plus, si on recule un peu plus dans le temps, on se rend compte qu'en 2017, donc bien avant la pandémie, le nombre de ce genre de contrat a explosé. On parle de plusieurs milliers de contrats octroyés de manière non concurrentielle, et ce, bien avant la pandémie.
Comment expliquez-vous une telle explosion de contrats non concurrentiels? Comment expliquez-vous, même durant une période supposément calme, qu'on puisse voir autant de contrats non concurrentiels pour des montants qui ne sont pas toujours inférieurs à 25 000 $ comme ils devraient l'être?
On parle de 3 000 contrats non concurrentiels pendant la pandémie, et de 1 600 contrats non concurrentiels en 2023, donc bien après la pandémie. Que vous me disiez que 80 % des contrats sont concurrentiels est, d'une part, une réponse absurde. D'autre part, ça ne répond pas du tout à ma question. Comment se fait-il qu'autant de contrats aient été octroyés de manière non concurrentielle? Cela ne démontre d'aucune manière que l'argent des contribuables est dépensé de manière saine et intelligente.
Je ne voudrais pas qu'on diabolise tous les contrats non concurrentiels. Il y a de très bonnes raisons parfois pour octroyer des contrats non concurrentiels. Ce peut être pour des questions de brevets ou quand il n'y a qu'un seul fournisseur en mesure de faire le travail. Dans ce 20 % qu'il reste, il y a aussi des justifications connues en vertu d'accords commerciaux…
Pourtant, ce qu'on apprend dans le rapport de l'ombudsman et dans celui de la vérificatrice générale, c'est que ces justifications manquent. Il y a peut-être de très bonnes raisons à ça, mais comment se fait-il que le contribuable ne les voie pas?
Excusez-moi. Je pensais qu'on parlait de l'ensemble des contrats qui avaient été accordés depuis plusieurs années. Je répondais à la question dans cette perspective.
Je crois que les Canadiens qui nous regardent, qui suivent les délibérations sur cette situation très troublante, éprouvent en partie de la peine et de la tristesse, mais aussi de la colère, comme moi, face à l'extrême absence de surveillance dans ce projet.
Dès le début, il n'y avait pas de système de gouvernance. L'Agence de la santé publique du Canada et l'ASFC s'accusent mutuellement. De plus, Services publics et Approvisionnement Canada émet des signaux d'alarme. Tout cela pour dire qu'en fin de compte, nous constatons que les contribuables canadiens n'en ont toujours pas pour leur argent, ce qui est un immense échec et une immense déception pour moi et pour les Canadiens de partout au pays. Alors que les coûts montent en flèche et que tout coûte cher, il est doublement difficile pour les Canadiens d'apprendre que notre fonction publique, en particulier le service d'approvisionnement, un organisme dont la mission est de protéger les Canadiens et d'assurer l'optimisation des ressources, ne nous a pas soutenus au moment où nous en avions le plus besoin. Je pense que tous les Canadiens s'entendront pour dire que c'est l'échec le plus monumental qui soit.
Cependant, je suis d'avis que c'est une situation qui, à certains égards, était prévisible. Nous savons, comme nous l'avons mentionné à maintes reprises, non seulement dans ce comité, mais aussi dans d'autres comités, que lorsque nous n'investissons pas dans les solutions du XXI e siècle dont les spécialistes des TI et de l'approvisionnement au sein du gouvernement ont besoin, nous nous retrouvons dans une situation de vulnérabilité. Cette importante vulnérabilité persiste. Que ce soit avec le système de paie Phénix du gouvernement précédent ou avec GC Strategies maintenant, nous sommes dans la même situation de vulnérabilité. Le gouvernement n'est pas en mesure de recruter les spécialistes des TI nécessaires au pays pour assurer un bon travail et optimiser les ressources.
À mon avis, cette situation de vulnérabilité est grave. C'est un problème systémique qui découle de cette tragédie qui perdure. Je veux l'examiner et y trouver une solution. Je veux mettre fin à cette situation une fois pour toutes. Nous devons devenir plus concurrentiels pour ce qui est du recrutement des spécialistes des TI au gouvernement. Nous disposons d'ailleurs de stratégies de rétention, comme celles dont l'Alliance de la fonction publique du Canada a souvent parlé. Nous avons la capacité d'obtenir ce talent, de le conserver et de le déployer de manière à en avoir pour notre argent, comme il en est question dans ce rapport.
Dans le temps qui m'est imparti, monsieur Mills, j'aimerais savoir si vous avez un dernier commentaire à formuler sur les mesures que vous avez prises pour vous assurer que ce problème, ce problème systémique extrêmement troublant qui perdure, sera réglé?
Alors que nous entrons de plus en plus dans une ère numérique axée sur les données, il est important que les fonctionnaires, toutes catégories confondues, disposent d'un bagage numérique beaucoup plus solide. Nous nous concentrons sur ce qui est nécessaire en matière de compétences numériques au sein de notre main-d'œuvre, et ciblons surtout ceux qui travaillent dans le domaine des technologies de l'information. Nous réfléchissons, avec nos services des TI, aux compétences de base et aux types de programmes de formation et de perfectionnement dont nous aurons besoin à l'avenir, de manière durable, pour veiller à ce que nos professionnels des TI poursuivent leur apprentissage.
Je ne fais qu'user de mon pouvoir discrétionnaire. Je reviens à la question posée par Mme Sinclair-Desgagné. Elle a été mal comprise. Il y avait l'interprétation.
[Français]
Madame Sinclair‑Desgagné, pouvez-vous poser votre question encore une fois à M. Laporte? Je vous prie de le faire brièvement.
Bien sûr. Je vous remercie de me donner cette occasion.
Monsieur Laporte, il y a eu des milliers de contrats octroyés de manière non concurrentielle. D'une part, il est difficile de croire que tous ces contrats ont été octroyés pour des raisons qui sont totalement légitimes. D'autre part, d'après le rapport de l'ombudsman et celui de la vérificatrice générale, tout porte à croire qu'il y a un solide manque de documentation. Par conséquent, aucune garantie n'est fournie aux Québécois et aux Canadiens que cet argent est bien dépensé.
Qu'est-ce qui explique cette explosion de contrats non concurrentiels depuis 2017?
Comme je le mentionnais, je ne peux pas me prononcer sur la validité des raisons invoquées relativement aux contrats non concurrentiels. Je mentionnais précédemment qu'il y a parfois de très bonnes raisons ou des raisons valides en fonction d'accords commerciaux qui vont permettre au gouvernement ou à une institution de procéder de façon non concurrentielle à l'octroi de contrats, notamment pour répondre à des besoins urgents.
Si je voulais statuer sur le bien-fondé des mesures qui ont été prises ou déterminer si un contrat a été accordé de façon non concurrentielle ou pas, j'aurais besoin de plus d'information. Je ne veux pas éluder la question, mais je ne peux pas commenter l'entièreté des contrats octroyés dans le passé par Services publics et Approvisionnement Canada.
Voici ce que la vérificatrice générale déclare dans son rapport: « dans le cadre de notre examen des autorisations de tâches accordées par l'Agence des services frontaliers du Canada et cosignées par Services publics et Approvisionnement Canada, nous avons constaté que deux ressources avaient été payées selon un taux nécessitant un minimum de dix ans d'expérience, et ce, même si les ressources n'avaient pas ce niveau d'expérience. »
En un mot ou une phrase, comment qualifieriez-vous cette situation, monsieur Mills? S'agit‑il d'un leurre ou d'une fraude? De quoi s'agit‑il?
Monsieur le président, les personnes qui gèrent ces contrats doivent certainement s'assurer que les personnes qui effectueront le travail répondent aux exigences minimales. Dans ce cas, ils auraient dû vérifier, si l'exigence était de 10 ans, que la personne avait cette expérience.
Êtes-vous en mesure de dire s'ils ont fait preuve d'honnêteté ou non? Ma question est la suivante: ont-ils menti? La vérificatrice générale n'a pas formulé d'opinion. Elle a analysé l'information et a déterminé que ce qui a été dit — ce qui a été approuvé — n'était pas vrai: les ressources n'avaient pas un minimum de 10 ans d'expérience. A‑t‑on agi de façon honnête ou malhonnête?
Si l'on n'arrive pas à s'entendre sur ce qui est honnête et ce qui ne l'est pas, il est peut-être en partie là le problème. Il faudrait peut-être qu'on se penche sur ce problème‑là séparément. L'ombusdman de l'approvisionnement a constaté que, dans 76 % des cas, les ressources nommées dans la soumission n'avaient pas effectué le travail prévu au contrat, au niveau de compétence requis. Vous avez dit que les compétences des travailleurs remplaçants devaient être équivalentes à celles des travailleurs approuvés initialement. Un audit ou un examen a‑t‑il été fait pour s'assurer de l'équivalence de leurs compétences? Des activités frauduleuses ont été commises dans le cas que j'ai cité, comme le décrit la vérificatrice générale, soit dit en passant.
Je crois effectivement que l'ombudsman a dit que 76 % des personnes proposées dans la soumission n'avaient pas effectué de travail par la suite ou n'avaient pas été l'objet d'une facture. Nous veillons à ce que les travailleurs proposés soient les plus susceptibles d'effectuer le travail et nous vérifions qu'ils l'ont fait. C'est quelque chose que nous suivons de près.
Ils font croire que les travailleurs auront telle ou telle compétence, puis ils les remplacent par d'autres. Ils obtiennent ainsi le plus gros montant possible, et les Canadiens, eux, un piètre rapport qualité-prix. Nous espérons que votre ministère a pris des mesures contre cette pratique.
Madame Hogan, cette pratique, que met en évidence l'ombudsman dans son rapport, est-elle courante chez ceux qui soumissionnent pour des contrats publics? Des consultants aux honoraires faramineux proposent des travailleurs d'expérience pour remporter les contrats et obtenir un prix élevé, pour ensuite les remplacer par des travailleurs moins expérimentés, qu'ils paient moins cher, puis ils empochent la différence.
Je ne pourrais vous dire s'il s'agit d'une pratique courante. Je peux toutefois vous dire que nous l'avons observée dans certains cas. Selon le contrat, le travailleur devait avoir 10 ans d'expérience ou plus, mais celui qui a effectué le travail ne remplissait pas ce critère. La fonction publique dispose déjà d'une marche à suivre pour remplacer un travailleur nommé dans un contrat ou une autorisation de tâche. Cette procédure aurait dû être suivie, mais ce n'est pas ce que nous avons observé.
Je crois savoir que quiconque peut renvoyer un dossier aux forces de l'ordre, mais en général, nous attendons qu'elles nous demandent une ordonnance de communication pour fournir des éléments de preuve.
C'est seulement sous la direction de Justin Trudeau que des fonctionnaires recevraient une prime pour avoir manqué aussi lamentablement à leurs devoirs. Nous avons appris que les fonctionnaires de l'ASPC ont reçu des primes s'élevant à 340 000 $. Combien de centaines de milliers de dollars ont été versés aux fonctionnaires de SPAC?
J'ignore à combien exactement se sont élevées les primes de rendement pour les cadres dirigeants. Ces primes font communément partie de la rémunération des cadres dans la fonction publique fédérale. Elles sont versées...
Pendant les années où le gouvernement luttait contre la COVID, des cadres dirigeants à SPAC ont effectivement reçu des primes de rendement. Ces primes ont été affichées sur le site Web pour qu'on puisse les voir...
Nous avons déjà communiqué les informations sur les primes au rendement versées par SPAC. Ces informations sont publiées sur le site Web du ministère. Nous allons vous fournir les liens.
Malheureusement, votre temps est écoulé, monsieur Brock.
Vous avez dit que les informations étaient accessibles au public. Je vous serais reconnaissant de nous transmettre sans délai les liens en question. Merci.
Madame Bradford, vous avez la parole pour cinq minutes.
Je vais revenir à Mme Poulin. Merci de nous avoir expliqué vos responsabilités et les mesures de surveillance en place dans votre ministère. Vous avez mentionné que vous pouviez prendre des mesures pour récupérer des fonds lorsque vous avez l'impression que des travaux ont été surfacturés. Allez-vous le faire dans ce cas‑ci?
Nous devrons communiquer avec l'ASFC pour voir s'ils ont besoin d'aide pour mener à bien leur travail, mais comme je l'ai mentionné, il faut auparavant terminer notre analyse pour voir si le gouvernement a été surfacturé. Il faut aussi établir le montant de la surfacturation. Ce sera important de prouver que ces événements ont eu lieu et d'attacher à ceux‑ci un montant.
En partant du fait que l'ASFC possède les factures et les feuilles de temps, nous devrons déterminer si les personnes concernées à l'Agence ont besoin d'aide pour terminer le travail. Une fois cette étape terminée, nous leur montrerons les pratiques exemplaires qui leur permettront de récupérer les fonds liés aux contrats.
Monsieur Mills, lorsque le gouvernement attribue des contrats au secteur privé, il doit évidemment prendre en compte les aspects liés à la sécurité. Que fait SPAC pour s'assurer que les entrepreneurs et les sous-traitants possèdent une cote de sécurité valide avant le début des travaux prévus au contrat? Comment fonctionne le processus?
Comme je le disais, le programme de sécurité des contrats fait partie de mes attributions. Nous faisons différentes choses pour nous assurer que les exigences sont remplies.
D'abord, nous travaillons avec les ministères clients pour déterminer leurs besoins en matière de sécurité pour les contrats à attribuer. Il est capital de déterminer cet élément d'entrée de jeu afin d'établir les exigences de sécurité se rapportant aux contrats en question.
Une fois ces exigences établies lors d'une discussion avec le client et le responsable des achats, nous commençons l'enquête de sécurité de l'entreprise au niveau de l'organisation. Pour conclure un contrat comportant des exigences de sécurité avec le gouvernement, les entreprises doivent obtenir une cote de sécurité. Nous examinons plusieurs aspects, dont les principaux cadres supérieurs, et nous demandons au fournisseur de désigner un dirigeant principal de la sécurité. Une fois cette cote de sécurité obtenue, nous amorçons l'enquête de sécurité pour les employés qui vont exécuter les travaux prévus au contrat. Les employés ne peuvent pas obtenir une cote supérieure à celle de l'entreprise. Par exemple, ils ne peuvent pas se voir accorder une cote « très secret » si l'entreprise détient une cote « secret ».
Ensuite, nous consultons les responsables des achats pour faire en sorte que soit incluse dans le contrat une clause qui permettra de surveiller les exigences de sécurité pendant toute la durée dudit contrat. Il est important de noter que les mêmes clauses de sécurité doivent figurer dans le contrat des sous-traitants. Si l'entrepreneur principal fait appel à un sous-traitant dans le cadre des travaux, le contrat du sous-traitant doit comporter les mêmes clauses que le contrat de l'entrepreneur principal.
Finalement, pendant l'exécution des travaux prévus à un contrat comportant des exigences de sécurité, il revient à l'entrepreneur de s'assurer que les ressources qui travaillent dans le cadre dudit contrat détiennent une cote de sécurité appropriée. Il en va de même si l'entrepreneur ajoute des ressources pendant la mise en œuvre du contrat. Voilà comment nous nous assurons que les exigences de sécurité sont respectées.
Les certificats de sécurité des sous-traitants qui ont exécuté le travail pour ArriveCAN n'ont pas été conservés correctement dans les dossiers. L'ASFC et SPAC sont tous deux frappés par ce problème. Cette lacune a‑t‑elle été réglée? Êtes-vous en mesure également de confirmer que chaque sous-traitant qui a travaillé sur le dossier détenait une cote de sécurité appropriée?
Comme la vérificatrice générale l'a indiqué dans son rapport, certains documents sont manquants. Nous travaillons en partenariat avec les clients et les responsables des achats pour que les contrats renfermant les clauses de sécurité en question nous soient communiqués. Nous pourrons alors vérifier si la version finale des contrats renfermait les bonnes cotes.
Quant à votre deuxième question, j'ai lu quelque part — je ne me souviens plus si c'était dans le rapport de la vérificatrice générale ou dans le rapport de l'ombudsman de l'approvisionnement — que le sous-traitant avait peut-être utilisé des ressources qui n'étaient pas dotées de la cote de sécurité voulue. Nous avons reçu des informations au début de janvier voulant que certaines ressources du sous-traitant n'avaient pas la cote de sécurité exigée. Nous prenons ce type d'allégation très au sérieux. Nous nous affairons en ce moment de vérifier la conformité aux exigences de sécurité de toutes les parties visées par les allégations.