Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Je vous souhaite la bienvenue à la 71e réunion du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.
[Traduction]
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 24 avril 2023, le Comité reprend son étude sur la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau.
J'aimerais accueillir notre témoin.
Par vidéoconférence, nous recevons M. Mel Cappe, qui témoigne à titre de professeur.
Nous ne nous sommes jamais rencontrés, monsieur, mais je suis heureux de vous recevoir. Merci de vous joindre à nous aujourd'hui.
Monsieur Cappe, je crois que vous avez une déclaration liminaire. Vous avez la parole pour cinq minutes. Vous pouvez commencer.
Je pense que la phrase « vous êtes en mode sourdine » est celle que nous avons entendue le plus souvent depuis le début de la COVID.
[Français]
Merci, monsieur le président.
J'ai travaillé au sein de la fonction publique pendant plus de 30 ans.
[Traduction]
J'ai été nommé sous-ministre par le premier ministre Mulroney avant d'occuper les fonctions de greffier du Conseil privé sous le premier ministre Chrétien. J'ai ensuite été haut-commissaire du Canada au Royaume-Uni pendant le premier mandat du premier ministre Stephen Harper.
Je ne suis pas vraiment un professeur, même si mes étudiants me confèrent ce titre. Je suis un membre distingué de la Munk School of Global Affairs and Public Policy à l'Université de Toronto.
De 2016 à 2018, j'ai été mentor à la Fondation Pierre-Elliot-Trudeau, ce qui explique ma présence ici. J'ai d'abord décliné l'invitation à comparaître devant le Comité au sujet de la Fondation Pierre-Elliot-Trudeau, car j'estimais que je n'avais rien à apporter à l'étude en question. Lorsque le Comité me l'a demandé une deuxième fois, j'ai accepté. Toutefois, je ne veux pas vous laisser sur votre faim, mais je pense toujours ne rien avoir à dire qui permettrait au Comité d'avoir une meilleure compréhension du dossier.
[Français]
J'ai été le greffier du Conseil privé de janvier 1999 à juin 2002, pendant la période où la Fondation a été créée.
[Traduction]
Lorsque l'ancien premier ministre Pierre Elliott Trudeau est mort en septembre 2000, j'étais effectivement greffier du Conseil privé. Comme le gouvernement réfléchissait à la manière de commémorer l'ancien premier ministre Trudeau, j'ai reporté l'examen du Cabinet pour permettre la préparation de solutions de rechange et la tenue de délibérations plus structurées et plus disciplinées sur les moyens d'honorer l'ancien premier ministre décédé.
Ensuite, je pense que le ministère de l'Industrie, Patrimoine canadien et le Secrétariat du Conseil du Trésor ont travaillé sur des propositions. Si je me souviens bien, là s'est arrêtée ma participation à la mise sur pied de la fondation et aux relations du gouvernement avec cette dernière. J'étais préoccupé par les préparatifs de la transition de gouvernement, par l'annonce imminente des élections et par la mise en œuvre du programme du nouveau gouvernement. Ensuite, mon attention s'est portée, malheureusement, sur la fermeture de la frontière avec les États-Unis et le reste du monde, la fermeture de l'espace aérien après les attaques du 11 septembre et la décision d'envoyer des troupes en Afghanistan. Je participais aussi à la préparation du budget et au discours du Trône. Aussi loin que je me souvienne, je n'ai plus consacré de temps à la fondation Trudeau.
Le 20 février 2002, le ministre de l'Industrie à l'époque, M. Allan Rock, a annoncé à la Chambre la création du programme de bourses d'études sous l'égide de la Fondation Pierre-Elliot-Trudeau. J'ai quitté Ottawa au mois de juin cette année‑là, en 2002. Apparemment, le gouvernement aurait fini par signer un accord de contribution avec la fondation en mai 2004. J'étais alors à Londres pendant deux ans à titre de haut-commissaire du Canada au Royaume-Uni.
En outre, de 2016 à 2018, j'ai été mentor de deux boursiers de la fondation qui étudiaient au doctorat. Le premier, oncologue pédiatre à l'hôpital SickKids de Toronto, préparait un doctorat en santé publique à l'Université McMaster. Le deuxième était un étudiant d'Oshawa qui préparait un doctorat en santé publique à l'Université Oxford, en Afrique de l'Ouest. Ce dernier est aujourd'hui chargé de cours à l'Université Oxford. Il a obtenu son doctorat et espère trouver un poste dans une université au Canada d'ici un an ou deux. Ces deux jeunes gens prometteurs au talent extraordinaire sont des boursiers types de la fondation Trudeau. Ils suscitent en moi beaucoup d'espoir pour l'avenir du Canada.
Je vous ai dit à peu près tout ce que je sais sur la fondation Trudeau, mais je serai heureux de répondre à vos questions sur la fondation et de vous révéler tout ce que je sais qui pourrait faire avancer votre étude.
Je mentionne au passage que j'ai été membre — ou fellow — dans une université, mais sans le qualificatif « distingué ». Je vous remercie d'avoir demandé qu'une correction soit apportée à votre titre.
Je vous remercie de nous avoir transmis ces informations. Tout ce que nous vous demandons, c'est de répondre aux questions le plus directement possible. Nous travaillerons à partir de vos réponses.
Les cloches pourraient se mettre à sonner. Nous allons essayer de procéder au moins à la première série de questions avant d'aller voter. Nous devrons peut-être faire une pause, monsieur Cappe, puis nous reprendrons après les votes. Je pense que vous savez comment fonctionne le système. Il nous arrive parfois de devoir interrompre nos réunions, mais nous faisons les choses du mieux que nous pouvons.
Sans plus tarder, nous allons lancer la période de questions avec les conservateurs.
Monsieur Cappe, merci de vous joindre à nous aujourd'hui. Je vous suis reconnaissant de votre déclaration liminaire et de vos observations sur la difficulté éventuelle de répondre à des questions, mais je vous remercie de ce que vous pouvez nous offrir grâce à votre vaste expérience.
La fondation relève de la Loi sur la responsabilité. Je me demande si vous avez des idées sur ce qui aurait changé quant aux obligations qu'elle aurait pu avoir avant et après. En ce qui concerne la structure de gouvernance, avez-vous participé d'une manière quelconque, reçu des observations ou appris quelque chose sur le processus de gouvernance de la fondation?
Je vais parler de ce que je sais, mais je ne suis pas l'autorité en la matière. J'ai vu le témoignage de M. Knubley devant le Comité au début de la semaine, et je voudrais juste apporter une précision à la façon dont il a décrit le statut de la fondation.
Il a dit qu'elle faisait partie du portefeuille du ministère de l'Industrie. En fait, elle est constituée en vertu de la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif. Si j'ai bien compris, elle n'est pas assujettie à la Loi sur la responsabilité.
Elle est assujettie à un accord de contribution entre le ministère de l'Industrie et la fondation. Au‑delà de cela, je n'en sais pas beaucoup plus.
Quand j'étais à la fondation, j'ai participé à quelques événements, à des réunions avec des boursiers et des mentors, dont l'une s'est déroulée à St. John's et nous prenions ensuite l'avion pour Happy Valley-Goose Bay, puis pour Rigolet, dans une région éloignée du Labrador. À l'époque, j'ai cru comprendre que les membres de la société élisaient les membres extérieurs du conseil d'administration. C'est tout ce que je sais.
J'ai connu M. Kakfwi lorsqu'il était premier ministre des Territoires du Nord-Ouest. Je pense qu'il était présent à la réunion de St. John's que j'ai mentionnée.
Vous avez mentionné avoir été un mentor pour deux étudiants. Je pense que c'est extraordinaire.
Êtes-vous au courant des formalités administratives plutôt excessives, y compris les contrats? Je crois savoir qu'il s'agit d'un accord de 60 pages que les étudiants doivent signer en renonçant à une bonne partie de leurs droits.
Je ne sais pas. J'ai cherché en ligne l'accord de contribution entre le gouvernement et la fondation et j'ai plutôt trouvé l'accord entre la fondation et les étudiants, mais à part cela, je ne sais rien.
Il s'agit apparemment d'un accord de 60 pages qui limite une grande partie de leurs droits à la protection dans de tels cas, ainsi qu'à la possibilité de s'exprimer ou de tenir la fondation légalement responsable de toute action qu'elle entreprend.
Je suis curieux. Si l'on examine la fondation Trudeau telle qu'elle a été établie, en se fondant sur votre assez vaste expérience... Il y a une part importante de l'argent des contribuables, 125 millions de dollars, ce qui représente environ 206 millions de dollars en dollars d'aujourd'hui; cela commence à faire beaucoup. Comment proposeriez-vous que les parlementaires tiennent le conseil d'administration responsable de cet argent et de ses actions?
Si je pose cette question, c'est parce que je considère le scandale de Hockey Canada, qui n'est pas une organisation gouvernementale, mais qui reçoit de l'argent du gouvernement — il en va de même pour Gymnastique Canada —, et je vois des parallèles entre les actions de ces deux organisations, qui sont financées par les contribuables.
D'après votre expérience, comment les parlementaires devraient-ils exiger qu'elles rendent des comptes concernant cet argent?
Avec tout le respect que je vous dois, monsieur, je pense que vous devriez demander des comptes au gouvernement, dans un premier temps, mais l'accord de contribution qui a été signé entre le gouvernement et la fondation devrait être le moyen par lequel il est tenu de rendre des comptes. Il s'agit d'une subtilité et d'un petit point, mais il n'est pas négligeable.
Ma seule erreur est d'avoir passé une trop grande partie de ma carrière au Secrétariat du Conseil du Trésor et d'avoir consacré beaucoup de temps à me préoccuper de ces questions. Étant donné que le gouvernement fédéral accordait tant de subventions et de contributions, que ce soit dans le domaine du sport, comme vous l'avez signalé, ou dans le cas des bourses d'études, le gouvernement a besoin d'un moyen de demander des comptes, et le Parlement a besoin d'un moyen de demander des comptes au gouvernement.
Monsieur, vous avez ajouté aux fins du compte rendu des expériences de travail avec des étudiants diplômés par l'intermédiaire de la fondation Trudeau. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur les expériences que vous avez vécues et sur ce qu'elles vous ont apporté en termes d'interactions avec les étudiants, qui semblent s'en tirer très bien et réussir? Qu'est‑ce que cela signifie pour vous personnellement?
Franchement, je pense que la plupart des boursiers étaient des femmes. Le hasard a voulu que j'aie deux jeunes hommes comme mentorés, et ils vont révolutionner le monde. Ils ont un talent incroyable, que la fondation contribue à développer.
Le jeune homme que j'ai mentionné et qui enseigne à Oxford m'a envoyé récemment une note dans laquelle il a dit ceci: « Je n'aurais jamais terminé mon doctorat sans le soutien financier, le réseau professionnel et la camaraderie sociale et intellectuelle dont j'ai eu la chance de bénéficier en tant qu'universitaire. » Il a saisi l'occasion d'ajouter à mon égard que le volet de mentorat du programme était également bon.
Franchement, je serais ravi de travailler pour l'un ou l'autre de ces messieurs.
Comme le savent tous ceux qui ont fait des études supérieures, c'est un défi, et c'est certainement plus facile lorsqu'on a des mentors qui fournissent une aide comme celle que vous avez fournie. Je pense que c'est une grande contribution que vous avez pu apporter.
Pardonnez-moi de poser la question, mais elle doit être posée. Elle a été posée à d'autres personnes qui ont récemment comparu au Comité sur ce sujet, mais confirmons ce qu'il en est. Dans le cadre de vos interactions avec les étudiants et d'autres collègues de la fondation Trudeau, y a‑t‑il déjà eu un effort, une obligation de la part des étudiants de se conformer à une certaine prédisposition idéologique ou quoi que ce soit de ce genre? A‑t‑on adopté une attitude ouverte en ce qui concerne le choix des étudiants qui allaient être encadrés, ou fallait‑il qu'ils soient libéraux? Devaient-ils se situer au centre gauche de l'échiquier politique, ou quelque chose de ce genre?
Votre formulation me donne le goût de blaguer, mais je ne le ferai pas puisqu'il s'agit d'un sujet sérieux.
Non, l'objectif n'a jamais été de sélectionner les étudiants en fonction de leur parcours. Il n'y a jamais eu d'incitatif ou de pression en ce sens. J'ai rencontré plusieurs étudiants qui étaient, à mon avis, trop dans les extrêmes, d'un côté comme de l'autre. Il s'agissait d'un groupe diversifié, et je parle d'une diversité à tous les égards, que ce soit lié à l'orientation sexuelle, à l'identité de genre, aux origines ethniques ou aux opinions politiques.
Je peux vous donner un exemple. Je suis allé à un colloque sur l'aide médicale à mourir avec divers boursiers et quelques étudiants. D'ailleurs, le secrétaire parlementaire Rob Oliphant y a livré un discours, quoiqu'il était alors dans l'opposition. J'ai vraiment eu l'impression qu'il y avait des gens de toutes les opinions autour de la table, et il devrait en être ainsi.
Je comprends ce que vous dites. Comme vous l'avez dit, les étudiants aux cycles supérieurs sont connus pour avoir des opinions tranchées, peu importe où ils logent, mais il n'y a rien de mal à cela non plus...
M. Mel Cappe: En effet.
M. Peter Fragiskatos: ... en matière d'opinions politiques et autres.
Nous avons déjà vu ce genre de choses dans d'autres organisations. Dans certains cas, la politisation d'enjeux était telle qu'elle a mené à la fin des activités d'une organisation qui faisait du bon travail, ou presque. Craignez-vous que la Fondation Trudeau cesse ses activités, ou sinon qu'elle soit limitée dans sa capacité à mener à bien son travail à l'avenir? Les étudiants qu'elle a aidés doivent certainement suivre ce dossier avec beaucoup de regret et d'inquiétude.
Cela vous préoccupe‑t‑il? Les parlementaires devraient‑ils s'armer de prudence à cet égard? Il existe une responsabilité qui va bien au‑delà de la politique, et cela affecte la vie d'étudiants qui pourraient accomplir de grandes choses.
Ce n'est pas à moi de dire aux parlementaires comment faire leur travail, mais permettez-moi de le faire quand même.
Il s'agit d'un enjeu sérieux.
Je n'ai pas participé au processus d'admission aux bourses, bien que j'aie participé au processus d'admission d'Action Canada pendant quelques années. Ce qui me préoccupe, avec la réputation actuelle de la Fondation Trudeau, c'est qu'elle ne recevra pas les candidatures des meilleurs étudiants. Il a toujours été très difficile d'obtenir une bourse de la Fondation Trudeau, mais je crois que le seuil d'admission risque de baisser, parce que les meilleurs étudiants vont choisir d'autres organisations.
Monsieur Cappe, merci d'être des nôtres aujourd'hui.
Je commence par rectifier un point qui ne me semblait pas très clair lors de votre allocution. C'est madame Robillard, alors présidente du Conseil du Trésor, qui, appuyée par monsieur Goodale, avait déposé par l'intermédiaire des crédits budgétaires la dotation à la Fondation Trudeau, le 19 mars 2002. Donc, c'est à ce moment-là que cela a été voté à la Chambre.
Maintenant, je suis curieuse de savoir ce dont vous parliez pour l'année 2004. Dans votre allocution, vous avez mentionné un contrat signé en 2004. Pourtant, apparemment, c'est plutôt en 2002 que la Fondation a été officiellement créée avec cette dotation.
Je ne suis pas l'expert et je n'ai pas tous les documents devant moi. Si je comprends bien, cependant, en mars 2002, le gouvernement a pris un engagement pour transférer les fonds. Par contre, si je me souviens bien, l'entente actuelle a été signée en 2004, mais je n'en suis pas certain.
En très peu de mots puisque mon temps est limité, pourriez-vous me dire le rôle qu'a joué le Conseil privé lors de la création de la Fondation en 2001?
C'est un secret dont je ne serais pas libre de parler, mais j'ai de toute façon oublié et je ne sais donc pas. Cependant, je suis certain qu'il y a eu consultation auprès d'un comité du Cabinet avant que ce dernier confirme la décision.
Pourriez-vous m'en dire plus? Les pertes de mémoire sont malheureuses, mais ce serait très utile à ce comité si vous pouviez vous rappeler un peu qui était présent durant le processus de création de cette fondation.
Cela fait 21 ans, donc vous m'excuserez de ne pas me souvenir. De ce que je me rappelle, le processus a été mené par Patrimoine canadien, puis étudié par le gouvernement et le Cabinet avant d'être confirmé par un comité. Il se peut que je me mélange entre Patrimoine canadien et Innovation, Sciences et Développement économique Canada, parce qu'à la fin, c'est ce dernier ministère qui a transféré les fonds à la fondation.
Je n'ai pas participé à la création de ce type de fondation, mais, quand nous travaillions sur les budgets annuels, ils contenaient toujours des versements auprès de ce genre de fondation.
C'est parfait. À votre connaissance, il s'agit donc non seulement d'une fondation dont le nom est affilié à un parti politique, mais également de la seule fondation au nom affilié à un parti politique à avoir reçu une dotation du gouvernement.
Sans m'aventurer sur ce terrain, je dois vous confirmer que cette proposition du ministre Allan Rock avait reçu l'aval de l'Alliance canadienne, alors l'opposition officielle, qui avait également appuyé la dotation de 125 millions de dollars.
Je lis dans mes archives que, lors du vote sur les crédits supplémentaires du 19 mars 2002, le Bloc québécois, l'Alliance canadienne et le Parti progressiste-conservateur ont voté contre la mesure qui visait à doter ce fonds de 125 millions, ce qui contredit aussi les propos de ma collègue.
J'ai la citation de M. John Reynolds, qui était alors chef intérimaire de l'Alliance canadienne, et qui appuie l'implication de M. Sacha Trudeau et la création de ce genre de reconnaissance de l'ancien premier ministre.
Je vous remercie d'être des nôtres aujourd'hui, monsieur Cappe.
J'aimerais faire un suivi sur certaines questions que j'ai posées à d'autres témoins que vous connaissez assurément. On tente de trouver le problème unique dans lequel se trouvent le Parlement, les Canadiens et notre processus électoral. Certains ont l'impression que le processus électoral a été influencé par un don à la Fondation Pierre Elliott Trudeau, par son lien avec le premier ministre.
C'est l'impression qu'a le public, peu importe si c'est vrai ou non. Lorsque j'ai voté en faveur d'une enquête publique au Parlement aux côtés de mes collègues, c'était pour que les Canadiens aient la certitude que nous prenions cette question au sérieux et que la lumière soit faite. Je comprends ce que vous dites, à savoir qu'il est nécessaire d'interpeller le gouvernement et de lui poser des questions comme il se doit. Je comprends vos arguments.
Vous occupez un poste prestigieux, et j'estime qu'il est également important de profiter du temps que nous avons pour connaître votre opinion sur une possible enquête publique, pour laquelle je milite ardemment depuis un moment. Tout comme M. Rosenberg, j'estime que les partis politiques vont devoir prendre une décision à ce sujet. Vous étiez autrefois membre de la Fondation Pierre Elliott Trudeau et vous avez servi dans la haute fonction publique, alors je crois que vous prenez ces enjeux au sérieux également.
Compte tenu de tout cela, estimez-vous qu'il serait important d'avoir une enquête publique? Je fais ici surtout appel à votre opinion en tant qu'ancien haut-fonctionnaire. Pensez-vous qu'une telle enquête pourrait être bénéfique pour les Canadiens, qu'elle pourrait faire la lumière sur cet enjeu?
J'hésite vraiment à me prononcer là‑dessus, monsieur le président. Je suis ici pour parler de la Fondation Pierre Elliott Trudreau, et vous me parlez de votre travail. Vous me demandez s'il faudrait mener une enquête publique.
Permettez-moi de souligner deux choses.
Tout d'abord, j'estime que l'ingérence étrangère est un enjeu très important, et je félicite le Parlement de le prendre au sérieux.
Ensuite, je dirais que cela dépend de votre définition d'une enquête publique...
La partie I de la Loi sur les enquêtes crée des enquêtes, mais ne précise pas ce qu'elles doivent examiner. Doivent-elles être tournées vers l'avenir ou vers le passé? S'agit‑il de savoir ce qui s'est passé et ce qu'a fait le gouvernement, ou alors de chercher à éviter que cela ne se reproduise?
Je crois qu'une enquête publique est très importante pour le deuxième élément, pour l'avenir. Par contre, je ne crois pas qu'il convienne d'en mener une pour un événement passé, parce que j'estime que la source de la fuite — il ne s'agit pas d'un lanceur d'alertes, mais bien d'une source de fuite — a enfreint la loi et que le Parlement canadien ne devrait pas pouvoir examiner les documents qu'il a fait fuiter.
M. Johnston a dit que les membres du Conseil privé devraient y avoir accès. Le chef de l'opposition en est un. Cela dit, il a proposé que les chefs des autres partis y aient également accès. Je sais que M. Singh y réfléchit.
Je ne crois vraiment pas qu'il soit utile de mener une enquête publique pour un événement passé.
Votre réponse est très utile, monsieur Cappe. Je vous remercie de nous faire part de votre expertise à cet égard. Je crois que cela aide les Canadiens à comprendre ce qu'il est possible de faire avec une enquête publique. Vous avez parlé des différentes avenues.
Je crois qu'il serait important de mener une enquête publique tournée vers l'avenir. Cela nous permettrait notamment d'avoir des recommandations de processus ou même de lois pour contrer ou limiter l'ingérence étrangère de façon appropriée, surtout dans notre système démocratique, mais aussi lors des campagnes de financement. N'êtes-vous pas du même avis?
Ce qui me pose problème, c'est la définition du mot « publique ». Sauf votre plus grand respect, monsieur le président et monsieur Desjarlais, j'ai l'impression que notre définition diverge.
Pour moi, une enquête publique ne divulgue pas tous les secrets à la population. Il y a deux exemples plutôt concluants de recours à la partie I de la Loi sur les enquêtes. Le premier est celui de l'enquête du juge O'Connor sur Maher Arar, et le deuxième, celui de l'enquête du juge Iacobucci sur Abdullah Almalki et d'autres terroristes allégués. Elles n'ont rien divulgué de public ou qui aurait pu satisfaire le voyeurisme de la population.
Je crois que l'indépendance est un facteur important. On l'a d'ailleurs mise en doute dans le cas de M. Johnston, par exemple. Cela a été l'angle d'attaque de certains députés de l'opposition. J'estime que l'indépendance fait partie de l'affaire.
... et non pas pour nous dire ce qui relève de nos fonctions en premier lieu.
Sauf votre respect, je demande votre opinion sur la nature d'une bonne enquête publique, étant donné que vous êtes ici à titre de témoin aujourd'hui. Cela dit, vous avez également dit que vous ne voulez pas regarder en arrière. Or, vous faites partie de l'examen tourné vers l'arrière. Je peux donc percevoir vos propres intérêts. Vous tentez d'empêcher une telle enquête, et je comprends bien ce que vous dites. Je ne crois pas qu'il était nécessaire de soulever cet argument.
J'aimerais me concentrer sur l'importance d'une enquête publique lors du prochain tour de questions, mais aussi sur les divers éléments dont il faudrait tenir compte, dont l'indépendance...
J'aimerais revenir sur un point que vous avez soulevé, monsieur Cappe. Nous avons entendu à maintes reprises au cours de cette débâcle avec la Fondation Trudeau des promoteurs — des propagandistes, presque — faire de la désinformation flagrante à propos du soutien unanime à la Chambre dans ce dossier. Nous l'avons d'ailleurs entendu aujourd'hui.
J'aimerais citer un extrait du Hansard de 2002. Cette citation est celle du député John Williams, qui représentait l'Alternative unie à l'époque. Il a déclaré, et je cite:
Monsieur le président, la présidente du Conseil du Trésor pourrait-elle confirmer que le projet de loi est libellé comme doit l'être un projet de loi de crédits et que le don de 125 millions de dollars à la fondation Pierre Trudeau, auquel s'oppose l'opposition, est conforme à la loi?
De plus, les Journaux montrent que tous les députés non libéraux et non néo-démocrates, c'est‑à‑dire les prédécesseurs des conservateurs et des bloquistes, ont voté contre ce crédit. Aucun député de l'opposition ne l'a appuyé non plus au sein du comité de l'industrie lors de l'examen du budget des dépenses.
Je ne cherche pas à vous entendre à ce sujet, mais je tenais à rectifier le tir officiellement pour mettre fin à la désinformation et à la propagande propagées par de nombreuses personnes impliquées dans la Fondation. On nous a dit que les partis de l'opposition étaient en faveur de ce crédit, ce qui n'est manifestement pas le cas.
J'aimerais revenir à un autre commentaire que vous avez fait. Vous avez dit vous inquiéter que la Fondation ne reçoive pas les candidatures des meilleurs étudiants en raison de la politisation de cette affaire.
J'aimerais revenir à ce que vous avez dit plus tôt, à savoir que la Fondation pourrait ne pas recevoir les candidatures des meilleurs étudiants. Pensez-vous que la gestion désastreuse de la poursuite pour harcèlement sexuel dissuade les étudiants d'apposer leur candidature?
Si j'en parle, c'est parce que la dame qui a porté plainte contre la Fondation Trudeau est victime de harcèlement. John MacBain, qui est le donateur le plus important si je ne m'abuse, l'a prise à part, à la demande de la Fondation, pour tenter de la forcer à retirer sa plainte.
Pensez-vous que cela dissuade les meilleurs étudiants de s'impliquer dans la Fondation?
J'aimerais revenir au statut caritatif de la Fondation. Il y a eu l'enjeu des dons de la Chine communiste. Nous avons constaté qu'apparemment, la Fondation ne respecte pas ses obligations en vertu de la LCOBNL à titre d'organisation sollicitante. Je crois que la situation dure depuis huit ans. Nous avons constaté qu'elle ne respecte pas ses obligations en matière de décaissement.
Pensez-vous que la Fondation devrait faire l'objet d'un audit de l'ARC?
Je n'ai pas vraiment d'opinion à ce sujet. Je présume que la Fondation dispose d'auditeurs indépendants. Toute société constituée en vertu de la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif doit avoir des auditeurs indépendants, je présume.
Enron et nombre d'autres entreprises disposent d'auditeurs indépendants, mais je comprends ce que vous dites.
J'aimerais revenir à votre poste de mentor. Les mentors recevaient-ils de la formation sur les comportements à adopter avec les jeunes à l'époque? Recevaient-ils de la formation sur le harcèlement sexuel? Les ressources humaines offraient-elles de la formation ou des lignes directrices à cet égard?
Il n'y a aucune formation sur le harcèlement sexuel. Grand Dieu, on ne devrait pas avoir à faire des rappels là‑dessus, mais bon, non, nous n'avons pas reçu de formation à ce sujet. Cela dit, il y a une séance...
Il devrait y en avoir, mais il n'y en a pas eu, apparemment.
Avez-vous reçu quelconque formation? Si vous êtes un mentor, vous vous retrouvez en position d'autorité, vous avez un certain prestige. La Fondation oblige les jeunes à avoir un mentor, ce n'est pas facultatif. On pourrait donc penser que l'écart de pouvoir serait important.
Avez-vous reçu des conseils ou une formation ou signé une entente avant de devenir mentor?
Je n'ai pas eu à signer quoi que ce soit. Je ne me souviens pas avoir signé quelque chose, du moins. Nous avons participé à une séance d'information la veille de notre rencontre avec les jeunes. D'anciens mentors et de nouveaux mentors étaient présents, et nous avons discuté de ce qui fonctionnait et de ce qui ne fonctionnait pas. J'ai trouvé cela plutôt utile.
Je vous remercie d'être des nôtres aujourd'hui, monsieur Cappe. Nous respectons votre vaste expérience et vous sommes reconnaissants d'être parmi nous.
Pourriez-vous nous préciser la période pendant laquelle vous avez été greffier du Conseil privé?
Comme je l'ai dit dans mon discours préliminaire, lorsque Pierre Elliott Trudeau est décédé, certaines personnes souhaitaient honorer sa mémoire. Tout ce que j'ai fait, c'est de m'assurer qu'il y avait un processus structuré et discipliné pour évaluer les possibilités dans le but d'atteindre les objectifs du gouvernement.
Permettez-moi de mettre de côté votre question au sujet de la Fondation un instant. L'idée d'offrir des bourses d'études semblait être une bonne façon de commémorer la personne qu'était Pierre Elliott Trudeau, étant donné son expérience à titre de professeur de droit. Je crois que la Fondation est devenue un...
Je n'ai pas pris part à ce processus. Je suppose qu'il s'agissait d'un instrument approprié pour atteindre cet objectif.
J'ai été très impressionné par la qualité des candidats. Certains d'entre eux qui n'ont pas pu recevoir la bourse étaient excellents. Ceux qui ont obtenu une bourse étaient encore meilleurs.
M. Rosenberg nous a dit que la Fondation était entièrement autonome et que les règles avaient été changées en 2013 afin d'éliminer le rôle des ministres dans la nomination des directeurs du conseil. En fait, selon ce que je comprends, le gouvernement du Canada n'a affecté personne à la Fondation ou à son conseil depuis plus de 20 ans.
M. Rosenberg nous a aussi dit qu'en 2014 et 2015, alors que la Fondation recevait des dons, presque tout le monde au Canada, y compris les membres du précédent gouvernement conservateur, travaillait de façon à entretenir des relations optimistes avec la Chine.
Êtes-vous d'avis qu'il s'agissait du consensus à ce moment‑là au Canada?
Tout à fait. Lorsque j'étais greffier, le premier ministre Chrétien se rendait en Chine presque chaque année, avec d'autres premiers ministres et chefs d'entreprises. Ces mesures visaient à promouvoir les investissements en Chine et au Canada, et le commerce.
J'ai dit que j'avais supervisé deux boursiers. L'un d'eux venait d'entreprendre sa carrière universitaire et l'autre était un oncologue pédiatrique bien établi. Il était au début de la trentaine. Il faisait des travaux de recherche sur la santé publique au Canada. L'autre centrait sa recherche sur la santé publique en Afrique de l'Ouest.
Leurs besoins étaient différents. Mon rôle était de leur donner des conseils personnels et professionnels. L'un d'entre eux — je ne dirai pas lequel — avait des problèmes avec son superviseur de thèse. Nous avons discuté de ce qu'il pouvait faire. L'autre avait des préoccupations familiales. Nous en avons discuté. Tout dépendait de chaque personne.
Avez-vous des exemples de ce qu'a fait la Fondation pour améliorer la recherche postsecondaire du Canada ou pour aider les chercheurs canadiens à réaliser leur potentiel? Pouvez-vous nous donner quelques exemples en ce sens?
J'ai parlé du séminaire sur l'aide médicale à mourir auquel j'ai participé. Je crois qu'il y a eu d'autres événements du genre qui réunissaient les chercheurs qui travaillaient dans le même domaine.
La Fondation avait également pour but la sensibilisation. On tentait d'habituer les boursiers à communiquer avec les décideurs, et d'habituer les décideurs à miser sur les bourses.
Selon votre expérience, si vous avez participé à la création de fondations comme celle-ci, vous semble-t-il juste qu'une fondation qui va recevoir une dotation de fonds publics respecte certains critères et certains engagements?
En tant qu'ancien greffier du Conseil privé, n'avez-vous pas d'opinion sur le fait que des fondations qui reçoivent des dotations de fonds publics ne sont pas obligées d'avoir certains engagements à respecter?
Dans le cas de la fondation Trudeau, vous n'étiez plus greffier du Conseil privé quand l'accord de dotation a été signé. En revanche, avez-vous participé à d'autres accords de dotation pour d'autres fondations?
En revanche, considéreriez-vous qu'il est juste et approprié que, si les critères et les engagements énoncés dans l'accord de dotation ne sont pas respectés, la dotation initiale de la fondation puisse être révoquée?
S'il y avait un vol de cet argent ou quelque chose qui n'était aucunement compatible avec les objectifs, oui. Toutefois, tout ce que j'ai vu était franchement conforme aux objectifs de la Fondation.
Monsieur Cappe, j'aimerais revenir à une chose que vous avez dite et que je trouve intéressante. Vous avez fait une distinction, et j'aimerais savoir pourquoi vous croyez qu'elle existe. Vous avez dit qu'il y avait une différence entre un divulgateur et un dénonciateur lorsque vous avez parlé des allégations d'ingérence étrangère et de la participation de la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau en ce sens. Je trouve ces perceptions et perspectives très intéressantes.
Le dénonciateur est une personne qui est témoin d'activités illégales et qui veut que l'on s'y attarde. Le divulgateur publie des renseignements qui sont secrets.
À l'heure actuelle, aux États-Unis, un président a été inculpé pour avoir pris des documents dans des installations secrètes. Au moins, dans ce cas‑ci, le président gardait les documents dans sa salle de bain.
Le divulgateur, lui, a rendu ces renseignements publics. C'est illégal. Imaginez si...
Vous présumez toutefois que ce n'est pas illégal, puisque vous dites qu'il ne s'agissait pas d'un dénonciateur.
Ce que je dis, monsieur Cappe, c'est qu'il est étrange de prendre une telle position alors que la situation n'est pas suffisamment claire. C'est pourquoi je crois — tout comme vous, je suppose — que la vérité est plus importante et devrait prévaloir dans le cas présent.
M. Mel Cappe: Je suis du même avis.
M. Blake Desjarlais: C'est pourquoi je crois qu'une enquête publique est importante. Nous en avons parlé. Les membres de la Fondation ne sont pas d'accord. J'essaie de comprendre pourquoi. Vous avez dit qu'à votre avis, il n'y avait rien eu d'illégal parce que [inaudible] pas un dénonciateur, ce que je trouve intéressant.
Si c'était illégal, il faudrait révoquer le permis d'exercice des journalistes Bob Fife et Steve Chase, ce qu'ils n'ont pas de toute façon, mais s'ils avaient découvert des activités illégales, ils auraient dû écrire sur le sujet.
La seule chose qui était illégale, c'était la divulgation de certains secrets par cette personne. Imaginez si les journalistes avaient écrit: « Nous n'allons pas révéler l'identité de notre source parce que le pédophile pourrait faire l'objet de poursuites en vertu du Code criminel. » Personne n'accepterait cela.
Merci, monsieur Cappe, de vous joindre à nous aujourd'hui.
J'aimerais que nous revenions à l'année 2002. Ce qui est intéressant avec cette organisation en particulier, c'est que la subvention initiale ne visait pas un projet en particulier. Elle visait une dotation à perpétuité. Savez-vous si le gouvernement fédéral avait déjà créé une telle fondation auparavant? Vous avez parlé de la gouverneure générale plus tôt.
On avait créé une fondation pour l'Institut pour la citoyenneté canadienne, je crois, lorsque Adrienne Clarkson avait quitté son poste de gouverneure générale.
Il y a aussi eu plusieurs autres... Ma mémoire me fait défaut, mais il y a eu des différends au Parlement parce que la vérificatrice générale n'aimait pas que le gouvernement donne de l'argent à la fin de l'année. Vous vous souviendrez peut-être que lorsqu'il restait des fonds à la fin de l'année, le gouvernement tentait habituellement de rembourser des dettes, mais de temps à autre, il octroyait un montant forfaitaire à une organisation. Je n'ai pas d'exemple en tête. J'aurais dû faire des recherches avant de comparaître devant vous, mais il y avait eu des différends. La vérificatrice générale avait fait valoir que le gouvernement devait être en mesure d'octroyer les fonds à la fin de l'année.
Vous avez parlé d'Adrienne Clarkson et de son institut. À votre connaissance, est‑ce que les directeurs de cet institut étaient nommés par la famille de Mme Clarkson?
Lorsqu'on a créé l'Institut d'Adrienne Clarkson ou la fondation Trudeau, est‑ce qu'on a soulevé des préoccupations quant à leur structure de gouvernance et à la nomination des directeurs par une famille en particulier, à perpétuité?
Pas que je sache... J'étais membre du conseil du Partenariat canadien contre le cancer. J'en ai été le vice-président pendant cinq ou six ans. Ce partenariat a été créé par le gouvernement Harper. Un membre du conseil était nommé par le gouvernement et les autres étaient nommés par ses membres. Les membres du conseil enlevaient leur chapeau à ce titre, et revêtaient celui de membres de l'Institut.
Monsieur Kram, je vais vous arrêter ici. Nous avons convenu de prendre 15 minutes. Bien qu'il reste deux minutes à votre intervention, je crois que nous allons nous arrêter là. J'aurais dû dire que nous allions entendre trois autres intervenants, mais j'ai dit que nous allions continuer pendant 15 minutes, et ce temps est écoulé. Je dois vous interrompre. Il vous restera deux minutes lorsque nous reprendrons les travaux.
Monsieur Cappe, si vous nous le permettez, nous allons vous revenir dans une trentaine de minutes, je l'espère. Je crois qu'il n'y aura qu'un seul vote.
Je vais suspendre la séance.
Monsieur Desjarlais, voulez-vous dire quelque chose?
Oui. Avec le consentement unanime des membres du Comité, nous pourrions peut-être donner deux minutes à M. Kram afin qu'il puisse terminer son intervention.
Monsieur Cappe, je sais que vous avez des plans pour le souper. Je vais faire tout en mon possible pour vous libérer rapidement. D'autres membres ont aussi des activités sociales prévues; il se passe beaucoup de choses. Je sais aussi que vous m'avez demandé une minute. Je vais vous la donner sous peu.
J'aimerais premièrement revenir à Michael Kram, qui dispose d'un peu plus de deux minutes. Allez‑y.
Le comité des comptes publics examine souvent les rapports du vérificateur général. Il est très utile que les parlementaires puissent faire des recommandations en vue d'améliorer les fonctions du gouvernement.
Il semble y avoir un bris en matière de reddition de comptes lorsqu'une organisation comme la fondation Trudeau reçoit une subvention de 100 millions de dollars et qu'on lui dit ensuite: « Bonne chance. »
À votre avis, est‑ce qu'il serait dans l'intérêt du public que le vérificateur général puisse enquêter sur des entités comme la fondation Trudeau, afin d'accroître la reddition de comptes à l'égard du Parlement et du public?
C'est l'un des points que je voulais aborder, monsieur le président.
Pour répondre à la question de M. Kram, je dirais que non: je ne crois pas que l'on profiterait d'une telle mesure. Je vais vous expliquer pourquoi.
[Français]
En répondant à Mme Sinclair‑Desgagné, il y a quelque chose que j'aurais dû soulever.
[Traduction]
J'ai été président de l'Institut de recherche en politiques publiques à Montréal lorsque j'ai quitté le gouvernement. Cet institut avait été créé par le gouvernement de Pierre Elliott Trudeau. Il avait demandé une petite enquête, si l'on veut, mais il ne s'agissait pas d'une enquête publique. Un groupe de travail avait produit un rapport dans lequel on disait qu'il fallait établir un institut de recherche sur les politiques publiques, au même titre que la Brookings Institution, et l'IRPP a été créé.
Il avait reçu 10 millions de dollars du gouvernement de l'époque. J'ai dit à Mme Sinclair‑Desgagné qu'à mon souvenir, il n'y avait pas eu d'autre institution, alors que j'ai été le président de l'une d'entre elles; je suis mal à l'aise. Dans les faits, notre institution avait été créée par le gouvernement.
Il y en a une autre, à laquelle j'ai travaillé, mais elle ne recevait pas de financement de la part du gouvernement. Je bois dans une tasse de la Société canadienne du sang. J'ai été le président de son conseil pendant quatre ans. La Société a été créée à la suite du scandale du sang contaminé, dont nous nous souvenons tous. La Société n'a pas reçu de fonds du gouvernement fédéral, à part pour ses travaux de recherche, mais elle a reçu des fonds des gouvernements provinciaux. Elle devait être examinée par un vérificateur indépendant. M. Desjarlais insistait sur l'importance de l'indépendance... C'était un vérificateur indépendant, mais ce n'était pas le vérificateur général.
Je remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
Monsieur Cappe, vous avez dit que vous vouliez clarifier quelque chose ou reprendre une intervention qui avait été interrompue. Je vous laisse le faire, si vous le souhaitez.
Il y a eu un processus, au Conseil du Trésor, visant à approuver les critères inclus dans l'accord de dotation.
[Traduction]
Voilà un élément.
L'autre élément est une réponse à M. Desjarlais.
Curieusement, je suis ici celui qui défend le Parlement. Je vous dis que le Parlement a adopté une loi qui doit être respectée, la Loi sur la protection de l'information. Je veux m'assurer qu'aucun autre fonctionnaire ne prendra l'initiative de décider qu'il est mieux informé que le Parlement.
Vous avez parlé des fonctionnaires. Nous sommes dans la semaine nationale de la fonction publique, alors je prends un moment pour vous remercier pour votre service envers les Canadiens et pour remercier toute notre fonction publique.
Monsieur Cappe, j'aimerais savoir si, avec votre longue expérience de la fonction publique canadienne, vous avez des conseils à offrir aux parlementaires sur la manière optimale de protéger les élections et la population contre l'ingérence étrangère, en particulier relativement à vos fonctions précédentes.
Je suis tenté de vous dire que si je le savais, je ne vous le dirais pas. Je fonderais une entreprise pour le faire.
Il s'agit d'une grande question, et je n'ai pas vraiment de réponse simple. Je crois, en revanche, qu'il s'agit d'une question d'une importance fondamentale au sujet de l'avenir de la démocratie et, en particulier, la démocratie au Canada.
Voilà pourquoi s'il y a désaccord — et je ne crois pas que ce soit le cas — entre M. Desjarlais et moi, il concerne l'aspect prospectif. À mon avis, il importe que le Parlement... Je ne sais pas, il me semble que c'est le comité de la procédure, ou des comptes publics, ou de l'éthique qui a étudié la fondation Trudeau. J'espère que vous vous penchez sur la manière de protéger l'intégrité de nos élections. Cela est d'une importance fondamentale.
Monsieur Cappe, vous avez mentionné avec fierté que vous aviez offert du mentorat à deux détenteurs de doctorat. J'aimerais que vous en disiez davantage sur le travail de la Fondation et les raisons pour lesquelles elle est importante pour les chercheurs canadiens.
Lorsque la Fondation a été créée, M. Rock, le ministre responsable, l'a décrite comme étant analogue aux bourses Rhodes du Canada. Je ne crois pas qu'elle ait atteint ce niveau, mais, d'un autre côté, il s'agit d'une énorme somme d'argent. Cela permet à des candidats au doctorat de faire des recherches pour lesquelles ils n'obtiendraient pas de financement autrement.
Remettons le tout en contexte. Les conseils subventionnaires, comme le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, le Conseil de recherches en sciences humaines et les Instituts de recherche en santé du Canada offrent beaucoup de financement. Ils sont très bien dotés pour accorder beaucoup de financement, bien que cela ne soit pas suffisant — je dois le préciser, dans le cadre de mes fonctions actuelles.
J'ai croisé par hasard, hier, un de mes anciens assistants à l'enseignement qui a obtenu une bourse du Conseil de recherches en sciences humaines de 5 millions de dollars pour travailler sur la question de la polarisation et de l'intégrité des élections. Cela concerne vos questions, monsieur Sidhu.
Nous devons avoir ces fonds des conseils subventionnaires. L'obtention d'un financement indépendant provenant d'autres sources est incroyablement précieuse. Qu'il s'agisse de l'Ivey Foundation, de la Fondation McConnell ou de la Kahanoff Foundation, ces fondations — elles sont nombreuses — sont d'excellentes sources pour faire la promotion de la recherche indépendante menée par de très bons Canadiens.
Très rapidement, notre comité a entendu des témoins précédents au sujet de la Fondation et de son important travail. Ils sont nombreux à croire fermement qu'elle est totalement non partisane. Est‑ce là aussi votre conviction?
Monsieur Cappe, vous venez de nommer la Fondation McConnell, mais il y en a évidemment beaucoup d'autres, comme la Fondation Marcelle-et-Jean-Coutu et la Fondation Molson. Toutes ces fondations ont un rôle important et toutes portent des noms d'individus.
Par contre, à la grande différence de ces fondations, la fondation Trudeau, elle, n'a pas reçu un seul sou de la famille Trudeau et n'est pas une fondation. En effet, on a donné de l'argent public, c'est-à-dire l'argent des contribuables, à une fondation qui porte le nom d'un ancien premier ministre. Déjà là, il y a une différence majeure. Les objectifs peuvent être nobles, mais il y a néanmoins une différence majeure.
J'aimerais réagir à votre commentaire sur l'Institut de recherche en politiques publiques. Si cet institut fonctionne et qu'il a un rôle sur le plan de la promotion de la recherche au sein de la société, pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de faire transiter l'enveloppe de 125 millions de dollars vers une fondation privée qui porte le nom d'un ancien premier ministre plutôt que vers le Conseil de recherches en sciences humaines ou d'autres établissements qui existaient déjà?
Cela revient à la question de l'objectif de la fondation ou au but de sa création. Il s'agissait de rendre hommage à l'ancien premier ministre. Il aurait été un peu curieux qu'elle ne porte pas son nom.
Si la famille voulait reconnaître le travail de cette personne, pourquoi n'a-t-elle pas elle-même créé la fondation avec son propre argent, plutôt que de demander au public de financer une fondation privée?
La famille Trudeau est très impliquée dans la Fondation Pierre‑Elliott‑Trudeau. Vous avez nommé de ses membres, tout à l'heure, notamment Alexandre Trudeau. Il y a donc quand même des liens importants. Ces membres de la famille siègent d'ailleurs au conseil d'administration. Ils sont très impliqués, mais ils n'y ont pas investi un sou et ils ont demandé au gouvernement de fournir l'argent pour honorer leur père. Il y a quelque chose qui cloche là-dedans, c'est le moins qu'on puisse dire.
C'est M. Roy Heenan, le premier président du conseil d'administration, qui a été impliqué dans le processus. J'imagine qu'il a créé ce genre de gouvernance.
Au début, quand je vous ai demandé qui avait fait ces demandes, vous m'avez répondu qu'il s'agissait d'informations confidentielles. Ensuite, vous vous êtes ravisé en disant que, finalement, il s'agissait d'informations dont vous ne vous souveniez pas.
D'accord. La mémoire vous est donc revenue pendant la cuisson de vos aliments. C'est parfait.
Je ne sais pas si vous avez vu cela dans les journaux, mais on a appris que la fondation Trudeau n'avait pas respecté certaines lois, notamment quant aux exigences de l'Agence du revenu du Canada liées au pourcentage de dons qu'elle doit faire pour conserver son statut d'organisme caritatif. Pour quatre des cinq dernières années, la fondation Trudeau n'a pas respecté les exigences de la loi et de l'ARC à chapitre.
Quand on regarde ce genre d'éléments, l'origine de la fondation Trudeau et ses affiliations politiques, n'y a-t-il pas une apparence de traitement de faveur dans la manière dont agit la fondation?
Je n'ai aucune connaissance de ce qu'ils ont fait. Je dois dire que, quand j'étais PDG de l'Institut de recherche en politiques publiques ou président du conseil d'administration de la Société canadienne du sang, nous avions des obligations en vertu de la Loi canadienne sur les organismes à but non lucratif, et nous les avons remplies.
Vous dites que avez rempli ces obligations. Êtes-vous surpris que la fondation Trudeau n'ait pas rempli ses obligations au cours de quatre des cinq dernières années?
Merci beaucoup pour votre présence et pour le temps que vous accordez à ce sujet, d'autant plus qu'il ne semble pas que vous soyez très concerné.
D'après votre expérience des politiques publiques et de la gouvernance des affaires publiques — surtout pour ce dernier aspect —, avez-vous une opinion ou des recommandations desquelles nous faire part au sujet des prochaines étapes pour la Fondation?
Voilà une question difficile. Je répète que je ne participe plus à la Fondation depuis 2018.
Étant donné la controverse en cours... Je crois que la Fondation est un organisme valable. Elle fait du très bon travail. J'espère qu'elle traversera la controverse d'une manière qui lui permettra de rétablir son conseil d'administration et de retrouver les mentors et la prochaine cohorte de chercheurs. Je crois qu'elle fait du très bon travail. J'espère que les choses se passeront ainsi.
Je me souviens que, lorsque j'étais à l'Institut de recherche en politiques publiques, nos bureaux étaient à un coin de rue de ceux de la Fondation. À l'époque, le problème était, comme l'avait dit quelqu'un, que la Fondation ne portait pas le bon nom, car le gouvernement était conservateur et la Fondation portait le nom « Trudeau ». Après les élections en 2015, quelqu'un m'a dit que la fondation Trudeau ne portait pas le bon nom.
Il me semble que c'était comme s'il était impossible pour la fondation Trudeau d'avoir le bon nom. À mon avis, il faut qu'elle puisse surmonter le problème du mauvais nom, si on veut.
Puisqu'il est question du nom, imagineriez-vous la Fondation sans qu'elle soit nommée Trudeau? Croyez-vous qu'elle ferait l'objet d'une controverse relativement à des dons ou l'objet d'allégations d'ingérence étrangère?
Permettez-moi de ne pas répondre à la dernière question. En ce qui concerne la première, comme je l'ai dit à Mme Sinclair-Desgagné, l'objectif en était un de reconnaissance, de reconnaître l'importance de l'ancien premier ministre Trudeau, le père. Si l'objectif de la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau est de reconnaître sa contribution, je crois qu'elle doit porter son nom.
Dans votre allocution, vous avez mentionné qu'un groupe réfléchissait à une façon de rendre hommage au premier ministre. Vous souvenez-vous des idées dont il avait été question? Je sais que c'était il y a longtemps.
Il y avait toutes sortes d'idées. C'était il y a très longtemps. Je ne me souviens que de quelques-unes.
Mon objectif, à titre de secrétaire du Cabinet et de greffier du Conseil privé, était de ne pas permettre les rêveries spontanées, mais plutôt d'inciter les participants à tenir ce que je décrivais comme une discussion structurée et disciplinée, ainsi qu'à évaluer les options de rechange. Tout y est passé: de nommer une montagne « le mont Trudeau » à créer une autoroute. Il y avait toutes sortes d'idées.
Je crois que le Cabinet a choisi cette option — je divulgue probablement des secrets du Conseil des ministres, même si cela fait plus de 20 ans — et a pris cette décision parce qu'il a cru qu'il était pertinent de nommer une bourse d'après l'ancien premier ministre Trudeau.
Plusieurs experts de l'ingérence étrangère et membres de la Fondation ont affirmé qu'un don à la Fondation pouvait être considéré comme une opération calculée d'influence. Je me pose des questions à ce sujet et je me demande si vous êtes d'accord quant à cette analyse.
Je suis d'accord. Je trouve cela un peu étrange. Si j'avais 1 million de dollars à dépenser pour exercer de l'influence, un don de 800 000 $ à l'Université de Montréal et un don de 200 000 $ ou 140 000 $ à la fondation Trudeau auraient une incidence si indirecte qu'ils en seraient inefficaces. Il y a, nous le savons...
Monsieur Cappe, je vous suis reconnaissant pour votre franchise, aujourd'hui. Je suis certain qu'il y a eu quelque manquement à la confidentialité ministérielle d'il y a 20 ans. J'espère que vous pouvez nous aider à comprendre encore davantage que ce qui nous a été possible jusqu'à maintenant.
Je veux revenir à la question de la perception, qui est à mon avis le plus grand problème que j'ai abordé avec les membres du public. J'en discute régulièrement avec les Canadiens. J'essaie de trouver un équilibre entre ce que je crois être de l'hyperpartisanerie et la vérité. Je crois qu'il y a, au milieu, un point où les Canadiens peuvent trouver cet équilibre entre la critique partisane et la réalité, que vous avez vous-même admise, de l'ingérence étrangère — elle est réelle et elle a cours. Tous les témoins qui ont comparu au Comité ont confirmé ce fait.
Je viens de vous questionner sur le Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, au sujet du lanceur d'alerte, ou du responsable de la fuite, selon votre point de vue. Cela souligne à quel point ces enjeux dépendent de la perception. Votre perception de la question est différente de celle des Canadiens que j'ai entendus et du Canadien moyen. Ces gens ont tous une variété de problèmes.
Vous avez répondu à des questions vraiment incroyables au sujet du contenu d'une enquête publique visant à rétablir la confiance envers nos institutions démocratiques — c'est bien la nature d'une enquête publique, d'après ce que j'en sais du moins, et selon votre expertise de fonctionnaire si chevronné.
On peut mener une enquête publique rétrospective, une enquête publique prospective, et la question se pose quant à savoir s'il faut rendre publics certains détails. Vous avez donné deux très bons exemples de juges qui ont mené des enquêtes publiques qui ont amélioré les choses pour les Canadiens. On a aussi appris que ces enquêtes comportaient des documents secrets importants pour la sécurité nationale ou pour des raisons de confidentialité d'entités privées.
La fondation Trudeau devrait-elle faire l'objet d'une enquête publique qui, disons, maintiendrait confidentiels tous les documents privés pour protéger la vie privée? À votre avis, à cette fin, cette enquête aurait-elle une valeur pour les Canadiens, de manière à obtenir une recommandation relative à ce que vous venez d'affirmer, c'est-à-dire que les dons ont peu d'influence, voire aucune?
D'abord, je croyais que vous parliez d'une enquête d'ordre général sur l'influence étrangère à laquelle participerait la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau.
Oh, je suis désolé, monsieur Cappe. C'est le cas, en effet. Je crois que la fondation Trudeau et bien d'autres fondations ont leur importance, ne serait‑ce que parce qu'elles reçoivent des dons privés aux fins d'une certaine forme d'influence. Cela ne concerne pas uniquement la fondation Trudeau, je dois le mentionner.
Franchement, je crois qu'il s'agit d'une question intéressante, étant donné les allégations relatives à M. Han et à M. Chong en Ontario et les autres.
Je rendrais l'enquête prospective. Je crois que c'est possible. J'examinerais la Commission Rouleau sur les convois comme troisième exemple d'enquête qui a respecté la confidentialité.
Je crois que cet enjeu est devenu tellement tendu et émotif dans l'œil du public que je ne crois pas que si vous procédiez de la même manière que ces trois commissions l'ont fait, les gens trouveraient le processus suffisamment public. Voilà mon problème.
Mon dernier point est le suivant. Je me rappelle que Dick Fadden, quand il était directeur du SCRS, a accordé une entrevue remarquable de 35 minutes à Peter Mansbridge. Je l'ai cherchée. Si vous cherchez « Dick Fadden Peter Mansbridge » sur Google, vous la trouverez. À la fin, M. Mansbridge, l'ancien chef d'antenne de la CBC...
D'accord. Eh bien, c'est moi qui ai une barbe grise.
Enfin, Fadden a divulgué que plusieurs ministres provinciaux avaient fait l'objet, a‑t‑il cru et allégué, d'ingérence étrangère. Il ne s'agit pas d'un problème nouveau. Je croyais que c'était plus récent. J'ai été étonné de constater que cet entretien avait eu lieu il y a 13 ans.
Je suis d'avis que le Parlement, soit par l'entremise de ses propres comités ou par une enquête publique, doit se pencher sur ce que nous devons faire au sujet de ce problème. Je ne me soucie pas de savoir ce qui s'est passé. Je crois que c'est à cet égard que nous pouvons changer un peu les choses.
Non, bien sûr, monsieur Cappe. Je vous remercie pour cette distinction.
Je crois qu'il est aussi important de prendre en compte que cela ne concerne pas uniquement la Chine. Il est question de multiples pays, la Russie, en particulier. On observe une grave ingérence de sa part. Je crois que l'on parle relativement peu de ce pays dans la discussion sur l'ingérence étrangère.
Seriez-vous favorable, s'il devait y avoir une enquête publique, à ce qu'elle soit élargie pour examiner d'autres pays — peut-être même tous les pays — par rapport à l'ingérence étrangère au Canada?
J'ai dit que, si j'avais 140 000 $, 200 000 $ ou 1 million de dollars, je ne le dépenserais pas de cette façon si je tentais d'exercer de l'influence. Je crois que c'est une façon inefficace de le faire, et ces gens ne sont pas stupides.
Une manière plus traditionnelle de procéder est d'inviter des gens à souper ou à prendre le café, de leur offrir un réfrigérateur, une cuisinière et peut-être une voiture. Ne faites pas de moi un terroriste ou un espion, mais je crois qu'il y a des manières plus efficaces de procéder.
En guise de réponse à M. Desjarlais, si j'en avais eu le temps, j'aurais dit: « Ce n'est pas nouveau. Pensez à 1945 et à l'enquête Gouzenko. »
Est-il vraiment si difficile d'imaginer que, si un agent du régime communiste de Pékin voulait acheter de l'influence auprès d'un candidat politique et découvrait que les limites de contribution étaient de 1 700 $... Est-il vraiment si déraisonnable de penser que l'agent pourrait aller sur Google, chercher quelles autres entités au pays portent le même nom que le premier ministre actuel et essayer d'acheter de l'influence de cette façon?
Non, ce n'est pas déraisonnable, mais, si c'était mon objectif, je m'adresserais à la communauté des expatriés. Si je voulais mettre quelqu'un dans ma poche, je demanderais à un grand nombre d'expatriés de payer 1 700 $.
Vous avez dit plus tôt que la question de fond de l'ingérence étrangère est très importante, et vos préoccupations ont été reprises à la réunion de lundi par M. Rosenberg, qui a dit: « Toute personne dont la famille est restée dans un État autoritaire peut être vulnérable. »
Quelles options de politique publique les politiciens ont-ils à leur disposition pour limiter ou éliminer cette ingérence étrangère? C'est une préoccupation légitime — et grave, disons-le — si des gens qui vivent et travaillent ici au Canada et qui respectent toutes les lois du Canada ont des membres de leurs familles qui subissent de l'intimidation dans leur pays d'origine.
Quelles options de politique publique recommanderiez-vous pour régler ce problème?
Écoutez, je n'ai pas étudié la question assez attentivement pour recommander des options stratégiques, mais je pense qu'il y a un volet financier et des enjeux concernant la communauté des expatriés. Je conviens qu'il en va de même pour l'Iran et d'autres pays, comme la Russie. Je ne m'intéresserais pas seulement à la question des finances. J'examinerais toutes les autres façons d'exercer une influence. Nous reconnaissons les Instituts Confucius pour ce qu'ils sont. Nous avons vu des universités — y compris la mienne — se retirer de la recherche financée par la Chine.
Si quelqu'un enfreint les lois canadiennes au Canada, cette personne est punie en vertu des lois canadiennes, mais si des membres de la famille d'une personne sont intimidés dans son pays d'origine... Nous avons entendu des récits au sujet d'une personne qui a publié dans les médias sociaux, au Canada, un message critiquant un régime étranger. Le lendemain, on a cogné à la porte d'un des membres de sa famille pour transmettre cet avertissement: « Faites taire votre proche, sinon il y aura des problèmes. »
Quelles options de politique publique avons-nous à notre disposition en tant que décideurs canadiens?
Malheureusement, vous n'avez compétence qu'au Canada, ce qui est somme toute un pouvoir assez vaste. Il vous donne la capacité d'exercer de la pression sur des gens qui, autrement, se livreraient à des activités, même à l'étranger. Vous ne pouvez pas ériger en infraction ce qu'ils font à l'étranger, mais si leurs activités au Canada sont choquantes, vous pouvez vous en prendre à eux.
Je tiens moi aussi à remercier le témoin de comparaître devant nous aujourd'hui et d'être très généreux de son expérience et de son expertise dans ce dossier.
Monsieur Cappe, vous avez mentionné plusieurs autres organismes, instituts ou fondations qui ont été créés à votre époque, ou à peu près à votre époque, par le gouvernement fédéral. Pouvez-vous nous parler des pratiques de gouvernance habituelles entourant la création et la surveillance continue, par exemple, de l'Institut pour la citoyenneté canadienne qui était lié au travail d'Adrienne Clarkson, ainsi que de la Fondation Trudeau? Par exemple, pourquoi ne pas demander à la vérificatrice générale de mener un audit de ces organismes?
Eh bien, ici encore, la vérificatrice générale devrait-elle mener des audits sur une association de cinq quilles parce qu'elle reçoit elle aussi une subvention du gouvernement? Je crois que je répondrais par la négative, mais je souscris au principe voulant qu'il vous faille insister pour la présence d'un vérificateur indépendant. Il y en a d'ailleurs un parce que la loi l'exige.
Dans l'exemple que j'ai donné de l'Institut de recherche en politiques publiques, j'étais le président. Initialement, l'organisation a reçu une subvention de 10 millions de dollars. Lorsque je suis devenu président, elle se chiffrait à environ 42 millions de dollars, et l'organisation vivait des intérêts de cette subvention. Nous avions un comité de vérification. Le président du comité de vérification était membre du conseil d'administration, et il était également l'ancien gouverneur de la Banque du Canada. Nous avions également un vérificateur indépendant, qui se trouvait à être Grant Thornton. Je crois que, pendant mon mandat, nous avons changé de vérificateur et, afin d'avoir un vent de fraîcheur, nous nous sommes tournés vers un autre grand cabinet de vérification comptable. Je crois que c'est la formule gagnante.
Je crois que vous avez vu certains des témoignages passés de notre comité. Or, si je me trompe, je vous les récapitule: nous avons discuté de la réception et du dépôt du don d'une entité constituée en société enregistrée au Québec, qui était, ou pas, en devise étrangère. Je n'entrerai pas dans tous les détails, mais on a sans contredit posé des questions sur ce dépôt. Par la suite, bien entendu, étant donné toute la récente attention médiatique, nous nous sommes penchés sur la tentative par la fondation de retourner l'argent et sur les répercussions de cette décision.
En tant qu'ancienne banquière, je sais que ces situations ne sont jamais tranchées, et que certains ne sont pas doués d'une grande attention aux détails en comptabilité. Si vous aviez été impliqué dans ce scénario, auriez-vous eu des inquiétudes quant aux vérificateurs indépendants de la Fondation Trudeau qui auraient pu mal faire leur travail, ou quant au cabinet de comptabilité qui a préparé les états financiers?
Non, je n'aurais pas été inquiet si le vérificateur était agréé et s'il respectait les règles et les règlements du conseil sur la vérification dans le secteur public. Je crois qu'il faut revenir à ces principes.
J'ai vécu une situation curieuse. Je vais maintenant dévoiler quelque chose que je devrais taire, mais l'ancien gouverneur de la Banque du Canada que j'ai mentionné était Gordon Thiessen, et il était également le président du conseil sur la vérification dans le secteur public. Par conséquent, le vérificateur relevait de lui, et il devait s'assurer qu'il faisait bien son travail.
Des représentants de l'Agence du revenu du Canada, ou ARC, ont également été convoqués à comparaître devant nous, et les membres du Comité ont demandé avec insistance que les fonctionnaires révèlent s'ils menaient un audit lié à notre sujet d'étude. De nombreuses tentatives ont visé à obtenir les renseignements fiscaux confidentiels qui sont habituellement en la possession de l'ARC. Avez-vous des préoccupations à ce sujet? L'ARC ne devrait-elle pas fournir ce genre de documents?
Je crois que l'ARC devrait respecter les renseignements de la personne visée par un audit, la personne morale, c'est-à-dire la société. Il faut décider si on croit que l'ARC s'acquitte de son mandat ou non. Je crois qu'elle s'en acquitte. Je n'ai nul autre renseignement que la certitude qu'elle fait son travail. Si je me fie au traitement qu'elle me réserve, je sais qu'elle fait son travail.
Monsieur Cappe, membre émérite, je tiens à vous remercier de votre patience à notre égard aujourd'hui. J'espère que vous n'aurez pas fait attendre vos invités trop longtemps pour votre souper.
Je vais suspendre la séance afin que nous passions à huis clos.