:
Bonjour, tout le monde.
J'ouvre maintenant la séance.
Bienvenue à la 103e réunion du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.
[Traduction]
La réunion d'aujourd'hui se tient suivant une formule hybride, conformément au Règlement. Certains membres assistent à la réunion en personne et d'autres y participent à distance au moyen de l'application Zoom.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
[Français]
Conformément à l'article 108(3)g) du Règlement, le Comité reprend l'examen du rapport no 1 de 2024 de la vérificatrice générale, intitulé « ArriveCAN », renvoyé au Comité le lundi 12 février 2024.
[Traduction]
Je souhaite la bienvenue à nos témoins.
Du Bureau du vérificateur général, nous accueillons Andrew Hayes, sous-vérificateur général, et Lucie Després, directrice. Je suis heureux de vous revoir tous les deux.
Du Bureau de l'ombudsman de l'approvisionnement, nous accueillons Alexander Jeglic, ombudsman de l'approvisionnement, et Derek Mersereau, directeur intérimaire, Demandes de renseignements, d'assurance de la qualité et de gestion des risques.
Monsieur Hayes et monsieur Jeglic, vous disposerez chacun d'un maximum de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions.
Monsieur Hayes, comme le veut la coutume, vous pouvez commencer.
:
Monsieur le président, je vous remercie de nous inviter de nouveau pour discuter de notre rapport d'audit sur l'application ArriveCAN.
Je tiens à reconnaître que cette réunion se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple anishinabe algonquin.
Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Lucie Després, qui était la directrice de cet audit.
L'audit a examiné si l'Agence des services frontaliers du Canada, l'Agence de la santé publique du Canada ainsi que Services publics et Approvisionnement Canada avaient géré tous les aspects de l'application ArriveCAN en tenant compte de la valeur qui en résulterait. Aujourd'hui, je vais limiter mes commentaires à nos constatations portant sur les pratiques suivies pour passer les marchés.
Nous avons relevé de nombreuses lacunes dans la gestion des contrats par l'Agence des services frontaliers du Canada. Des renseignements essentiels manquaient dans les contrats, comme un énoncé clair des livrables attendus et des compétences exigées de la main-d'œuvre. En examinant les factures approuvées par l'ASFC, nous avons constaté qu'il manquait souvent de l'information sur la nature des travaux effectués et sur qui les avait faits. C'est en partie pourquoi nous avons conclu que peu de considération avait été accordée à la valeur qui serait retirée de l'argent dépensé.
[Traduction]
Dans notre examen des pratiques suivies pour passer les marchés, nous avons recensé peu de documents pour montrer comment et pourquoi l'Agence des services frontaliers avait eu recours à un processus non concurrentiel et attribué à l'entreprise GC Strategies le premier contrat en lien avec l'application ArriveCAN. Un seul entrepreneur potentiel avait soumis une proposition, mais il ne s'agissait pas de GC Strategies.
Autre fait préoccupant: des éléments probants nous ont indiqué que GC Strategies avait participé à l'élaboration des exigences que l'Agence a utilisées lorsqu'elle a eu recours à un processus concurrentiel pour attribuer un contrat de 25 millions de dollars visant des travaux relatifs à l'application ArriveCAN. Ces exigences étaient très précises et restrictives, et GC Strategies s'est retrouvé en position avantageuse par rapport à d'éventuels autres soumissionnaires.
Bien que l'examen de l'ombudsman de l'approvisionnement et notre audit n'aient pas eu la même portée, nous avons formulé des conclusions et des recommandations similaires en ce qui concerne la documentation des évaluations et des décisions prises lors de l'attribution des marchés. Nous avons tous deux constaté que les règles de base en matière de passation de marchés n'étaient tout simplement pas respectées.
Je termine ainsi ma déclaration liminaire. Nous serions heureux de répondre aux questions des membres du Comité.
Merci.
Je souhaite commencer en soulignant que le territoire sur lequel je me trouve aujourd'hui fait partie du territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishnaabe.
[Français]
Monsieur le président, membres du Comité, merci de m'avoir invité aujourd'hui.
Je m'appelle Alexander Jeglic et je suis reconnaissant de cette occasion de comparaître devant le Comité pour parler des conclusions du récent rapport de mon bureau sur les pratiques d'approvisionnement des ministères fédéraux en ce qui concerne les contrats liés à ArriveCAN.
[Traduction]
Je suis accompagné aujourd'hui de Derek Mersereau, directeur intérimaire des demandes de renseignements, d'assurance de la qualité et de gestion des risques.
J'aimerais également remercier mes estimés collègues du Bureau du vérificateur général, qui ont entrepris un examen de ce sujet et qui ont fait part des résultats de leurs constatations au cours des dernières semaines.
[Français]
Mon bureau est indépendant des autres organisations fédérales, y compris Services publics et Approvisionnement Canada.
[Traduction]
Je dépose mon rapport annuel au ministre des Services publics et de l'Approvisionnement du Canada — ou SPAC —, mais le ministre n'a aucune influence sur mes rapports ou mes examens, et toutes mes activités sont menées indépendamment de SPAC et des autres organisations fédérales.
[Français]
Plus précisément, notre mandat législatif comporte trois volets.
Premièrement, nous examinons les plaintes des fournisseurs canadiens à propos de l'attribution de contrats fédéraux d'une valeur inférieure à 33 400 $ pour les biens et à 133 800 $ pour les services.
Le deuxième volet de notre mandat consiste à examiner les plaintes relatives à l'administration des contrats, peu importe leur valeur en argent.
[Traduction]
Troisièmement, il y a le service de règlement extrajudiciaire des différends, auquel les entreprises et les ministères canadiens peuvent recourir afin de régler les différends contractuels. La participation à ce processus est volontaire, et les médiateurs agréés de mon bureau aident les parties à régler les différends de façon rentable et en temps opportun, sans avoir à recourir à des procédures judiciaires. Les montants associés à nos services de médiation ne sont pas assujettis à des seuils.
Quatrièmement, nous examinons les pratiques d'approvisionnement des ministères fédéraux pour en évaluer l'équité, l'ouverture et la transparence, ainsi que la conformité aux lois, aux politiques et aux lignes directrices, d'où mon examen des contrats liés à ArriveCAN.
Le 14 novembre 2022, le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires — le Comité — a adopté une motion recommandant à mon bureau d'évaluer si les marchés attribués par les ministères en lien avec l'application ArriveCAN l'ont été de façon équitable, ouverte et transparente, et si les marchés attribués sur une base non concurrentielle l'ont été en conformité avec la Loi sur la gestion des finances publiques, ses règlements et les politiques et procédures applicables.
Une fois que mon bureau a pu établir des motifs raisonnables, conformément à nos exigences réglementaires, l'examen a été lancé en janvier 2023. Conformément au délai fixé par la loi, mon bureau a terminé l'examen des contrats liés à l'application ArriveCAN le 12 janvier 2024.
[Français]
Le rapport a été publié sur le site Web du Bureau de l'ombudsman de l'approvisionnement le 29 janvier 2024.
[Traduction]
Mon bureau a effectué l'examen de 41 processus d'approvisionnement concurrentiels et non concurrentiels et des contrats qui en ont résulté, de modifications de contrats et autorisations de tâches ou contrats de services en vertu desquels des travaux ont été effectués pour la création, la mise en œuvre et la maintenance d'ArriveCAN. Les contrats de sous-traitance n'étaient pas inclus dans cet examen, car ceux‑ci dépassent mes pouvoirs légaux.
L'Agence des services frontaliers du Canada — l'ASFC — était le ministère client pour les 41 contrats. Ces contrats ont été établis pour l'ASFC par SPAC, par Services Partagés Canada et par l'ASFC en vertu de sa propre autorité contractante.
En ce qui concerne les pratiques d'approvisionnement concurrentiel menant à l'attribution de contrats, les 23 appels d'offres examinés ont été publiés dans le cadre d'un arrangement en matière d'approvisionnement de SPAC. Dans l'ensemble, les documents d'appel d'offres étaient clairs et contenaient les renseignements que les soumissionnaires potentiels devaient fournir pour préparer une soumission recevable. Dans la plupart des cas, les demandes de soumissions, les modifications à la demande de soumissions et les réponses aux questions des soumissionnaires potentiels ont été communiquées de façon appropriée, et les soumissions ont été évaluées et les contrats attribués conformément aux documents de demande de soumissions. Toutefois, les critères obligatoires utilisés dans une demande de soumissions menant à l'attribution d'un contrat de 25 millions de dollars étaient trop restrictifs et favorisaient un fournisseur existant de l'ASFC.
Mon bureau a relevé des problèmes liés à l'atteinte du meilleur rapport qualité-prix dans de nombreux approvisionnements. Pour 10 des 23 marchés concurrentiels examinés, l'utilisation de bandes médianes trop restrictives dans l'évaluation financière des soumissions a freiné la concurrence des prix et a entraîné le rejet de certaines soumissions de haute qualité.
Dans environ 76 % des contrats applicables, les ressources proposées dans la soumission retenue n'ont effectué aucun travail dans le cadre du contrat. C'est ce qu'on appelle une tactique d'appât et substitution. Lorsque des AT, ou autorisations de tâches, ont été émises au titre de ces contrats, le fournisseur a proposé d'autres ressources, mais pas les personnes qui avaient été proposées pour remporter le contrat.
Les dossiers de contrats non concurrentiels comprenaient une justification écrite de l'attribution du marché par un processus à fournisseur unique fondé sur les exceptions à la concurrence prévues par le Règlement sur les marchés de l'État. Les raisons invoquées pour ces contrats non concurrentiels étaient qu'ils étaient nécessaires parce que le besoin était urgent ou qu'un seul fournisseur était capable d'effectuer les travaux.
L'insuffisance des dossiers tenus par Services partagés Canada a soulevé des questions quant à savoir si certaines commandes de service en vertu de l'accord-cadre infonuagique du GC respectaient les pratiques d'approvisionnement appropriées. Il n'y avait pas de stratégie d'approvisionnement documentée pour le travail associé à ArriveCAN et les nombreuses commandes de services émises à un fournisseur ont été traitées comme des exigences distinctes et séparées, malgré le fait que toutes étaient associées à ArriveCAN.
La majorité des dossiers examinés concernaient des contrats de services professionnels dans le cadre desquels des travaux ont été autorisés pour ArriveCAN en vertu d'une autorisation de tâches, ou AT. Dans l'ensemble, la documentation relative aux AT utilisées pour ArriveCAN était complète et, pour la plupart, correctement autorisée. Toutefois, 20 sur les 143 AT examinées n'incluaient pas de tâches spécifiques, y compris la description des activités à réaliser.
Les ressources autorisées à travailler sur un contrat avec des AT doivent être évaluées par le propriétaire de l'entreprise avant qu'une AT ne soit issue, afin de s'assurer que la personne répond aux critères d'évaluation de la catégorie de ressources, comme indiqué dans le contrat. Aucune évaluation n'a été effectuée pour plus de 30 ressources nommées sur des AT liées à ArriveCAN.
Dans l'ensemble, les modifications apportées aux contrats examinés étaient appropriées et conformes à la Politique sur les marchés.
En tant que ministère client, l'ASFC était responsable de la publication proactive, ou de la divulgation publique, des renseignements sur les contrats sur le site Web du gouvernement ouvert pour les contrats examinés. L'information n'a pas été publiée de façon proactive pour 17 des 41 contrats examinés, ou 41 %. Dans ces 17 cas, le contrat initial ou une ou plusieurs modifications au contrat n'étaient pas disponibles sur le site Web du gouvernement ouvert. Ce résultat va à l'encontre des engagements plus généraux du gouvernement en matière de transparence et de responsabilisation renforcée dans le secteur public.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie nos témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Je ne suis pas un membre régulier du comité des comptes publics. Je siège plutôt au comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires, et j'ai eu l'occasion de vous entendre tous les deux très récemment.
Après votre comparution devant le comité des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires, monsieur Jeglic, la vérificatrice générale a déposé son rapport. Elle a constaté que GC Strategies avait participé à l'élaboration des critères propres au contrat, dont vous avez dit dans votre rapport — et encore aujourd'hui — qu'ils étaient « trop restrictifs et favorisaient un fournisseur existant de l'ASFC ».
Il y a deux semaines, j'ai envoyé à votre bureau une lettre concernant cette nouvelle information révélée dans le rapport de la vérificatrice générale concernant le contrat de 25,3 millions de dollars attribué à GC Strategies en mai 2022. Comme je le mentionne dans ma lettre, je voulais que votre bureau et vous-même fassiez enquête au sujet de ces constatations et que vous déterminiez qui a permis à cet entrepreneur privé de s'asseoir à la table et d'élaborer les critères d'un contrat qu'il allait manifestement remporter.
Vous engagez-vous à mener une enquête sur ces constatations et à en déposer les résultats auprès du Comité?
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Merci beaucoup. Je suis heureuse de participer à la réunion du Comité aujourd'hui et de remplacer mon bon collègue .
Ma question s'adresse au Bureau de l'ombudsman de l'approvisionnement.
En effet, c'est préoccupant. Le rapport de votre ministère sur l'approvisionnement d'urgence a mis en évidence les défis courants que posent l'approvisionnement et les services dans une situation d'urgence comme celle de la COVID‑19, comme nous pouvons actuellement le constater.
En passant, avant de poursuivre, je tiens à souligner le bon travail de mon collègue néo-démocrate, , qui a présenté la motion visant à commander le rapport. Comme nous le savons, cela a permis de faire la lumière sur bon nombre des questions dont nous discutons aujourd'hui et dont on parle assurément dans tous les médias. Nous savons qu'il s'agissait d'une étape extrêmement importante en vue de ce que nous faisons aujourd'hui, à savoir tirer au clair ce qui s'est passé avec ArriveCAN.
Revenons en arrière. Lorsqu'elle a présenté ce rapport, la vérificatrice générale a déclaré: « une situation d'urgence ne veut pas dire qu'on peut soudainement ignorer toutes les règles établies ou que les ministères et organismes ne sont plus tenus de documenter leurs décisions ou de tenir des dossiers complets et exacts. » C'est vraiment troublant et très préoccupant.
Dans le rapport de votre ministère, vous mentionnez certaines mesures que le gouvernement doit prendre en cas d'urgence nationale. On a besoin de souplesse, de centralisation et, en fin de compte, de marchés non concurrentiels pour économiser du temps et des ressources. Cependant, la vérificatrice générale a tout à fait raison. Une urgence ne signifie pas qu'on puisse faire fi des règles et de la reddition de comptes. C'est inquiétant.
Le processus non concurrentiel était‑il justifié dans cette situation, alors qu'il a été si mal exécuté qu'il s'est traduit par un recul de la transparence et un gaspillage de ressources?
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais maintenant aborder un autre aspect, soit la nature de certains contrats accordés dans un processus non concurrentiel. Dans votre rapport, vous notez effectivement que plusieurs contrats ont été octroyés de manière non concurrentielle.
Pouvez-vous m'expliquer ce qui, en théorie, peut justifier qu'on octroie des contrats de façon non concurrentielle? Je sais qu'il existe des normes à suivre en fonction des montants des contrats. Je crois qu'un contrat de moins de 25 000 $ peut normalement être octroyé de manière non concurrentielle. Par contre, à partir de 25 000 $, il faut inviter plusieurs entreprises à soumissionner. Au-delà de 100 000 $, d'autres règles s'appliquent. J'y vais de mémoire. Ayant déjà été consultante, je me rappelle les règles. Pour ma part, je les ai bien suivies.
En somme, quand est-il normal d'octroyer un contrat de manière non concurrentielle?
D'après vous, quelle proportion de ses contrats un État devrait-il accorder de manière non concurrentielle, idéalement?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'avais peur d'avoir manqué d'importants éléments de nos audiences puisque je n'étais pas présente la semaine dernière. Je présente mes excuses à tous mes collègues.
Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui, et j'aime beaucoup ce que nous entendons de la part non seulement du sous-vérificateur général, M. Hayes, mais aussi de l'ombud de l'approvisionnement, M. Jeglic.
Il est très important pour le comité des comptes publics de bien comprendre le processus d'approvisionnement et le fait qu'il est libre de toute ingérence politique. De fait, c'est ce que vous avez constaté jusqu'ici, bien qu'il y ait eu d'autres problèmes très préoccupants.
La semaine dernière, j'étais en Tanzanie avec l'Association parlementaire Canada-Afrique. Les parlementaires de ce pays s'intéressent beaucoup à notre comité des comptes publics, à notre collaboration avec les hauts fonctionnaires indépendants du Parlement et à notre façon de travailler.
Je suis ravie de voir que SPAC a suspendu le pouvoir relatif aux autorisations de tâches dont jouissaient les 87 ministères et organismes pour lesquels il conclut des marchés relatifs à des services professionnels de TI. Je pense que nous sommes d'accord pour dire que la TI est certainement un secteur très problématique de l'approvisionnement, non seulement pour l'ASFC et les entreprises mêlées à ArriveCAN, mais pour tout le monde. Cette suspension demeurera en vigueur jusqu'à ce que SPAC conclue de nouvelles ententes intégrant les changements de règles que vous avez proposés.
Tout d'abord, j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Cela semble assez radical, mais croyez-vous que c'est justifié?
:
Nous n'avons pas pu examiner le nouveau système. Nous avons eu des séances d'information sur ce système et sur certaines de ses capacités, au début et tout au long de sa mise en œuvre.
Est‑ce que je pense qu'il facilitera la documentation? Tout à fait. Puis‑je formuler un commentaire sur son efficacité? Je ne le peux pas.
La seule chose que je dirais, c'est qu'il y a eu un changement. Auparavant, la règle qui s'appliquait à la plupart des marchés du gouvernement fédéral s'appelait la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor. On a cessé de l'appliquer progressivement. En mai 2022, il y a eu une période de mise en œuvre progressive de un an.
La nouvelle directive explique clairement, en fonction des rôles et des responsabilités, qui a les obligations associées à la documentation. Elle précise que l'obligation en matière de documentation incombe à l'autorité contractante. Comme je l'ai mentionné, dans 30 de ces cas, l'autorité contractante était SPAC. Dans sept cas, il s'agissait de Services partagés et dans quatre cas, de l'ASFC même.
J'ai vu M. Mersereau faire signe qu'il voulait ajouter quelque chose, et j'ai l'impression d'avoir dominé la conversation.
:
Oui. Il a été fixé à moins 10 %.
Un problème se pose en ce sens que la clause qui était censée régler cette question visait le montant précédent. Par conséquent, si un soumissionnaire offrait un prix concurrentiel, il n'avait pas la possibilité de valider son prix et de dire qu'il pourrait effectivement fournir les services à ce prix. Essentiellement, cette mesure a eu pour effet de décourager les gens de soumissionner à bas prix. Ils étaient plus enclins à soumissionner à un prix élevé parce que c'était moins risqué. Si le prix se situait à l'extérieur de ces fourchettes, on recevait une note financière de zéro.
Vous avez fait allusion à la raison pour laquelle cette méthode a été mise en œuvre. L'une était que l'on voulait empêcher les offres sous-estimées. Les situations qu'entraînaient de telles offres étaient celles où quelqu'un présentait une soumission à un prix si bas que, lorsque l'autorisation de tâches était demandée, aucune ressource n'était fournie par ce fournisseur parce qu'il n'était pas en mesure de le faire à ce prix. Elles faisaient perdre du temps et occasionnaient de la frustration au ministère ou à l'organisme.
Je dirais que la question des fourchettes médianes visait à régler ce problème d'estimations faussées. C'était une tentative valable, selon moi. À l'exécution, les choses ne se sont certainement pas déroulées comme prévu. Ainsi, cette mesure a eu des conséquences imprévues, et nous avons remarqué que dans quatre cas, on avait attribué zéro point à des soumissions à prix concurrentiel et ne leur avait donné aucune possibilité de rectifier ou d'expliquer le prix, et ces soumissions n'ont donc pas été prises en compte, même si, sur le plan technique, elles étaient très solides.
:
Merci, monsieur le président.
Je vais tout de suite reprendre ma question précédente.
Nous avons entendu les critères que vous avez énoncés pour conclure des contrats de manière non concurrentielle. Nous connaissons bien ces critères, là n'est pas la question. Ma question portait plutôt sur la proportion de ces contrats au sein du gouvernement.
En 2023, la pandémie étant terminée, on ne pouvait plus invoquer une exception pour une situation d'urgence. Des raisons financières ne sont pas en cause non plus, puisque nous voyons des contrats de plus de 100 000 $ être accordés de manière non concurrentielle.
D'après vous, est-il normal qu'en ces circonstances, certains ministères, dont Services publics et Approvisionnement Canada, aient conclu 27 % de leurs contrats, soit plus du quart de ceux-ci, par la voie d'un processus non concurrentiel?
Autrement dit, est-il normal qu'au sein du gouvernement, on ait octroyé 7 600 contrats de manière non concurrentielle, et ce, pour la seule année 2023?
:
C'est un genre de situation frustrante en ce sens qu'on aurait dû la repérer. Je pense qu'il s'agit d'une situation où toutes les personnes impliquées avaient probablement plus d'obligations que celles dont elles se sont acquittées.
Ce que nous avons trouvé inhabituel, cependant, et dont nous discutons depuis le parachèvement du rapport, c'est l'idée que, même lorsque le processus a été rendu concurrentiel — et qu'il a été rendu concurrentiel pour 40 fournisseurs, dont 10 ont manifesté leur intérêt à participer —, aucun des fournisseurs n'a contesté la nature restrictive des exigences. Je trouve cela surprenant, d'autant plus que 10 d'entre eux ont exprimé un intérêt. Soit la communauté des fournisseurs a accepté le fait que ce processus était destiné à un fournisseur en particulier, soit il s'est passé quelque chose d'autre au sujet de quoi je ne peux même pas émettre d'hypothèses.
Toutefois, je dirai que ces exigences ont été rédigées de telle façon que, en ayant l'avantage de toute l'information, elles semblent maintenant encore plus restrictives qu'elles ne le semblaient si on participait au processus, parce qu'on n'était peut-être pas au courant des trois contrats précédents qui avaient été exécutés par ce fournisseur si on travaillait à SPAC. On n'était peut-être pas au courant des circonstances exactes de ces contrats.
Comme je l'ai dit, cependant, lorsqu'elles sont aussi restrictives qu'elles l'étaient à première vue — on n'a pas besoin d'expertise technique pour déterminer que ce sont des critères très restrictifs —, je m'attends à ce que SPAC détecte ces types de critères et s'y oppose dans l'avenir.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup à nos témoins d'être présents aujourd'hui.
Je tiens à vous remercier tous du travail que vous avez fait pour mettre au jour une grande partie de la mauvaise gestion du gouvernement libéral dans le scandale d'ArnaqueCAN. Je parlais de cette question à la Chambre aujourd'hui, et il est évident, d'après les évaluations de vos deux bureaux, qu'il n'y a pratiquement rien de positif à dire au sujet de l'application ArriveCAN. Encore une fois, je vous remercie de votre travail.
Monsieur Jeglic, en novembre 2021, vous aviez un rapport sur l'ASFC. Vous avez déclaré dans le rapport que votre bureau, le BOA, « a observé des cas où l'ASFC a omis de disqualifier des soumissions non conformes et a attribué au moins un marché à un soumissionnaire non conforme. La documentation du dossier a également été jugée incomplète et très préoccupante dans plusieurs dossiers. » Vous avez recommandé qu'elle « document[e] chaque décision ayant une valeur opérationnelle », et l'ASFC a accepté de le faire d'ici juin 2022.
Il est certain que beaucoup d'eau a coulé sous le pont depuis. À la lumière de votre dernier rapport, estimez-vous que ces recommandations ont été suivies?