Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Bonjour, tout le monde. J'ouvre maintenant la séance.
Bienvenue à la 83e réunion du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(3)g) du Règlement, le Comité se réunit aujourd'hui dans le cadre de son étude de suivi portant sur le rapport no 3, intitulé « Audit de suivi de l’analyse comparative entre les sexes plus », qui se trouve parmi les rapports 1 à 4 de la vérificatrice générale du Canada publiés en 2022.
[Traduction]
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à tous nos témoins.
Du Bureau du vérificateur général, nous avons Andrew Hayes, sous-vérificateur général, et Carey Agnew, directrice principale.
Du ministère des Femmes et de l'Égalité des genres, nous avons Frances McRae, sous-ministre, et Leïla Boussaïd, directrice générale, Recherche, données et l'intersectionnalité. Du Bureau du Conseil privé, nous avons Kaili Levesque, sous-secrétaire du Cabinet, Opérations; et Jennifer Miller, secrétaire adjointe du Cabinet, Politique de développement social.
Le quatrième groupe est celui du Secrétariat du Conseil du Trésor. Nous recevons Graham Flack, secrétaire du Conseil du Trésor du Canada, et Annie Boudreau, secrétaire adjointe, Secteur de la gestion des dépenses.
Bonjour à tous.
J'ai entendu quelqu'un dire que cela faisait longtemps qu'il ne s'était pas retrouvé dans une salle de réunion, alors je suis ravi de vous voir tous ici. Je vous remercie d'être venus aujourd'hui. Nous préférons que les témoins de la région de la capitale nationale participent en personne, alors je vous remercie tous.
Chaque groupe dispose de cinq minutes au plus pour présenter ses observations liminaires, et je vais commencer avec M. Hayes.
Monsieur le président, merci de nous donner l'occasion de discuter de notre rapport intitulé « Audit de suivi de l'analyse comparative entre les sexes plus », qui a été déposé au Parlement le 31 mai 2022.
Je tiens à reconnaître que cette séance se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple anishinabe algonquin.
Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Carey Agnew, qui était responsable de cet audit.
Comme vous le savez, l'Analyse comparative entre les sexes Plus, ou l'ACS Plus, est l'outil principal qu'utilise le gouvernement pour examiner comment le genre et d'autres facteurs identitaires peuvent influer sur la façon dont les Canadiennes et les Canadiens vivent l'accès aux services et aux programmes.
De nombreux facteurs démographiques autres que notre genre peuvent influencer notre expérience de la vie et la façon dont nous accédons aux programmes et aux services gouvernementaux. Par exemple, une personne peut être membre d'une minorité visible, être Autochtone, être âgée ou jeune, être en situation de handicap, vivre dans une communauté rurale ou être nouvellement arrivée au Canada. Au moyen de l'ACS Plus, le gouvernement devrait tenir compte des facteurs identitaires lorsqu'il élabore ou met en œuvre des programmes et des services ou lorsqu'il apporte des ajustements à des programmes et à des services existants.
Nous avons constaté que certains obstacles de longue date, que nous avions déjà relevés, continuaient de nuire à la pleine mise en œuvre de l'ACS Plus dans l'ensemble du gouvernement. Pour cet audit, nous avons encore une fois examiné les activités du Bureau du Conseil privé, du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada ainsi que de Femmes et Égalité des genres Canada. Même si les organisations responsables ont donné suite à certaines des recommandations formulées dans notre audit de 2015, de nombreuses autres recommandations remontent à notre premier audit de l'analyse comparative entre les sexes, effectué en 2009.
[Traduction]
Malgré nos travaux antérieurs et nos recommandations précédentes, il est encore difficile de déterminer si les mesures prises permettent d'atteindre de meilleurs résultats en matière d'égalité des genres, de diversité et d'inclusion. Nous avons constaté que la portée des mesures prises pour recenser et supprimer les obstacles à la réalisation de l'ACS+ n'était pas suffisante.
Le Bureau du Conseil privé et le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada ne se sont pas pleinement servis de leurs connaissances et des résultats de leur fonction d'examen critique pour faire avancer la mise en oeuvre de l'ACS+ dans l'ensemble du gouvernement.
Nous avons aussi constaté l'absence d'une approche de l'échange de renseignements entre les organismes centraux et Femmes et Égalité des genres Canada pour surveiller l'avancée de la mise en oeuvre de l'ACS+ dans l'ensemble du gouvernement au fil du temps. Femmes et Égalité des genres Canada a pris des mesures en élaborant des outils et en offrant de la formation, afin de renforcer la capacité du gouvernement à mener cette analyse.
Malgré cela, les ministères et les organismes ont continué de se heurter à des difficultés qui ont limité l'application significative de l'ACS+, notamment grâce à des ressources et à des formations visant l'élaboration d'analyses ACS+, mais surtout la disponibilité de données désagrégées. Sans données désagrégées, il est impossible de comprendre comment les différents groupes vivent les inégalités.
Les trois organisations que nous avons auditées ont toutes indiqué qu'il s'agissait là d'une difficulté importante. Le Bureau du Conseil privé, le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et Femmes et Égalité des genres Canada doivent mieux collaborer et veiller à ce que tous les ministères et organismes intègrent pleinement l'ACS+ d'une façon qui produit des résultats réels pour toute la population canadienne.
Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du Comité. Merci.
Avant de commencer, j'aimerais souligner que je m'adresse à vous depuis les territoires traditionnels et non cédés du peuple algonquin Aninashinaabe. C'est là que je vis et que je travaille.
Je veux remercier le président et les membres du Comité de nous avoir invitées à discuter du travail que nous avons entrepris en réponse au rapport de la vérificatrice générale de 2022 sur la mise en oeuvre de l'analyse comparative entre les sexes plus.
[Français]
Je suis accompagnée aujourd'hui de ma collègue Leïla Boussaïd, qui est directrice générale de la recherche, des données et de l'intersectionnalité à Femmes et Égalité des genres Canada.
Je voudrais remercier la vérificatrice générale et le personnel de son bureau du travail qu'ils ont fait en ce qui concerne l'ACS Plus. Le Canada est l'un des rares pays au monde à avoir bénéficié de vérifications régulières de son approche quant à l'intégration de l'égalité des genres.
[Traduction]
Créé en tant que ministère à part entière en 2018, le rôle de Femmes et Égalité des genres Canada dans le domaine de l'ACS+ est double: nous agissons en tant que rassembleur, courtier en connaissances et développeur de capacités en ce qui concerne l'égalité des femmes et l'égalité pour les personnes de diverses identités de genre; l'application de l'ACS+, et son évolution vers des approches intersectionnelles qui prennent en compte les différentes expériences et interactions des divers groupes de femmes, d'hommes et de personnes de diverses identités de genre avec les systèmes, les structures et les institutions.
Comme l'ont noté nos collègues du Bureau de la vérificatrice générale, l'intérêt pour l'ACS+ et la capacité de mise en oeuvre de l'ACS+ n'ont cessé de croître au fil du temps. Le Canada devient de plus en plus diversifié, comme nous le savons, ce qui signifie que nous devons continuer à faire évoluer nos approches pour nous assurer que nous restons pertinents pour les personnes que nous servons. Statistique Canada estime qu'environ 25 % des Canadiennes et Canadiens sont racisés et que dans 18 ans, ils représenteront environ 40 % de la population, soit environ deux personnes sur cinq. D'après l'Enquête canadienne sur l'incapacité de 2017, au Canada, environ une personne sur cinq âgée de 15 ans et plus, soit 24 % des femmes et 20 % des hommes, déclare avoir un handicap.
[Français]
Compte tenu de notre responsabilité d'évoluer pour répondre aux besoins du Canada, des Canadiennes et des Canadiens, et compte tenu des commentaires reçus à la suite des vérifications du Bureau du vérificateur général ainsi que du rapport de mars 2022 du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur le rôle de l'ACS Plus dans le processus d'élaboration des politiques, FEGC a mis en œuvre des recommandations visant à garantir que les retombées de l'ACS Plus améliorée se maintiennent.
(1110)
[Traduction]
Femmes et Égalité des genres Canada a pris des mesures pour promouvoir une meilleure compréhension de l'intersectionnalité, en clarifiant la méthodologie, en mettant à jour la formation et en créant une nouvelle série d'outils pour les fonctionnaires fédéraux. En outre, Femmes et Égalité des genres Canada a tiré parti de la semaine de sensibilisation au sujet de l'ACS+ pour promouvoir une meilleure compréhension de l'intersectionnalité. L'édition 2023 de la semaine de sensibilisation a été choisie pour renforcer la conception intersectionnelle de l'ACS+. Dans le cadre de ces événements, deux tables rondes sur les approches intersectionnelles ont été organisées, en présence de sous-ministres. Ensemble, ces deux événements ont attiré plus de 2 000 participants.
[Français]
Nous continuons à offrir des possibilités de collaboration et d'apprentissage entre pairs, ce qui permet aux praticiens et praticiennes de l'ACS Plus d'échanger au sujet des pratiques exemplaires, de devenir des leaders au sein de leurs communautés de pratique et de continuer à renforcer les compétences dans l'ensemble du gouvernement fédéral. Cela comprend la collaboration avec d'autres personnes à l'intérieur et à l'extérieur du gouvernement pour accroître la sensibilisation à l'égard de l'analyse culturellement pertinente et l'utilisation des outils mis au point par les communautés ayant une expérience en la matière.
Nous avons mis en place des structures de gouvernance plus solides. Par exemple, nous avons des collègues clés qui occupent des postes de sous-ministre dont le mandat organisationnel exige de faire preuve de leadership pangouvernemental dans des domaines comme la lutte contre le racisme, l'inclusion des personnes handicapées et les relations avec les peuples autochtones, pour faciliter la coordination stratégique.
[Traduction]
Femmes et Égalité des genres Canada est également en train de réviser l'Enquête sur la mise en oeuvre de l'analyse comparative entre les sexes plus, afin de remédier aux limites méthodologiques — dont certaines ont été soulevées par le Bureau de la vérificatrice générale, le comité sénatorial et d'autres experts — et d'améliorer notre suivi et nos rapports publics sur l'application et l'impact de l'ACS+.
Le Canada apprend des autres pays qui font évoluer leurs approches, et de nombreux autres pays qui en sont à des stades plus précoces de la réflexion apprennent également du Canada.
[Français]
Nous avançons dans la bonne direction et nous nous engageons à poursuivre ce travail, car il s'agit de mieux servir les Canadiennes et les Canadiens, aujourd'hui et demain.
Je suis heureuse d'avoir l'occasion de vous présenter une mise à jour sur les mesures que nous avons prises en réponse au rapport de suivi de la vérificatrice générale sur l'analyse comparative entre les sexes plus. Je suis accompagnée de ma collègue, Jennifer Miller, secrétaire adjointe du Cabinet, Politique du développement social.
[Français]
Le Bureau du Conseil privé appuie le ministère des Femmes et de l'Égalité des genres, qui dirige l'orientation stratégique de l'ACS Plus, comme vient d'en parler Mme McRae.
Les rôles principaux du Bureau du Conseil privé sont de s'assurer que le premier ministre, les ministres se rattachant à son portefeuille ainsi que tous les autres membres du Cabinet reçoivent un appui efficace de la fonction publique, et de veiller au bon fonctionnement du gouvernement du Canada.
Dans le cadre de notre appui au Cabinet, nous conseillons les ministères et les organismes sur les propositions de politiques que leurs ministres recommandent au Cabinet.
De plus, dans l'exercice de nos rôles principaux, nous travaillons au renforcement de la réalisation de l'ACS Plus afin de contribuer à l'amélioration des résultats pour la population canadienne.
[Traduction]
Les efforts visant à renforcer la réalisation de l'ACS+ ont été entrepris conformément aux recommandations du rapport de 2022 du Bureau du vérificateur général sur la question. Nos efforts à cet égard sont résumés dans le document Réponses de la direction et plan d'action de Femmes et Égalité des genres, du Secrétariat du Conseil du Trésor et du Bureau du Conseil privé.
Par exemple, pour mettre en œuvre les recommandations du rapport, le Bureau du Conseil privé a élaboré de nouveaux outils et systèmes afin de mieux documenter la fonction d'examen critique. On entend par « fonction d'examen critique » le rôle du Bureau du Conseil privé en matière de prestation de conseils et d'amélioration des produits destinés au Cabinet, y compris les mémoires au Cabinet. Comme il est décrit dans le document Réponses de la direction et plan d'action, le Bureau du Conseil privé a conçu un nouveau processus de soutien à la réalisation de l'ACS+ dans le cadre des mémoires au Cabinet. Ce nouveau processus encourage l'intégration précoce de l'ACS+ dans l'élaboration des politiques, ce qui aidera à répondre aux préoccupations de longue date sur le fait que l'ACS+ est réalisée trop tard pour avoir une incidence.
[Français]
Le BCP a également élaboré de nouveaux outils pour orienter l'intégration des considérations relatives à l'ACS Plus et de données désagrégées dans les mémoires au Cabinet. Ces outils ont été finalisés conformément au calendrier prévu et seront mis à jour régulièrement pour en assurer l'amélioration continue.
En outre, pour améliorer la qualité et l'utilisation des données désagrégées dans l'ACS Plus, le BCP continue de coprésider, avec Statistique Canada, un comité consultatif pangouvernemental de sous-ministres adjoints sur les données désagrégées, afin de soutenir l'utilisation des données désagrégées dans l'ensemble du gouvernement.
De plus, nous tirons parti du rôle central que nous jouons, au Bureau du Conseil privé, pour encourager l'adoption de cadres sur l'ACS Plus par tous les ministères fédéraux.
(1115)
[Traduction]
Le Bureau du Conseil privé donne l'exemple en publiant son propre cadre d'ACS+ ce mois‑ci.
L'une des principales observations du Bureau du vérificateur général concernait le manque de coordination officielle entre Femmes et Égalité des genres, le Secrétariat du Conseil du Trésor et le Bureau du Conseil privé. Je suis heureuse d'annoncer que d'importants progrès ont été accomplis concernant l'officialisation de la collaboration et de la coordination entre les trois organisations sur l'ACS+. Nous avons également établi une approche normalisée de l'échange d'information concernant la mise en oeuvre de l'ACS+ dans les mémoires au Cabinet avec Femmes et Égalité des genres. Nous prenons régulièrement part aux activités des organes de gouvernance dirigés par Femmes et Égalité des genres pour soutenir la mise en oeuvre et l'amélioration de l'ACS+. En partenariat avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et Femmes et Égalité des genres, nous continuerons à renforcer nos pratiques et systèmes d'échange d'information.
[Français]
Malgré les progrès considérables accomplis, nous reconnaissons qu'il reste du chemin à faire. Nous sommes déterminés à garantir la réalisation rigoureuse de l'ACS Plus pour soutenir la prise de décision éclairée.
Je conclus mon intervention sur cela. Je répondrai avec plaisir à toutes vos questions.
Je remercie M. Hayes et son équipe de leur travail.
Nous sommes d'accord sur les recommandations de la vérificatrice générale, bien sûr, et nous les mettons en œuvre au moyen d'un certain nombre de mesures clés, dont je vais vous parler.
Plus tôt cet automne, nous avons fait part de nos observations à Femmes et Égalité des genres Canada, avec le Bureau du Conseil privé, au sujet des progrès réalisés dans l'intégration de l'ACS Plus dans les processus décisionnels et des éléments qu'il nous reste à améliorer. Même s'il y avait des échanges entre les ministères depuis longtemps, ce processus a rendu plus officiels ces échanges, notamment du fait de les mettre par écrit.
Nous avons indiqué que de plus en plus de présentations au Conseil du Trésor étayent leurs propositions grâce à des données désagrégées, mais que certaines ne sont toujours pas accompagnées d'un plan permettant de suivre ou d'atténuer les répercussions de l'ACS Plus. Cet échange d'information deviendra une pratique annuelle et permettra de cerner les obstacles systémiques à la réalisation de l'ACS Plus ou à la qualité de celle-ci.
[Traduction]
Les données désagrégées sont essentielles pour planifier et comprendre l'incidence de l'ACS+. C'est pourquoi le Secrétariat du Conseil du Trésor continue de renforcer les outils et les orientations, afin d'encourager l'utilisation de données désagrégées lorsque cela est possible et pertinent.
Par exemple, en juillet dernier, nous avons publié une note d'information sur la protection de la vie privée, afin d'aider les ministères à planifier la collecte de données pour le suivi et l'évaluation des programmes et l'établissement de rapports à leur sujet. Cette mesure permet de répondre aux préoccupations soulevées par un autre membre du Parlement, le commissaire à la protection de la vie privée, concernant la protection de la vie privée et des renseignements personnels.
Le Secrétariat du Conseil du Trésor continuera également d'examiner et d'affiner les orientations relatives aux rapports ministériels sur les résultats, afin de garantir que des renseignements utiles sont mis à la disposition des décideurs et du public.
En outre, le Secrétariat du Conseil du Trésor publie des pratiques exemplaires sur les répercussions du programme de l'ACS+ en se fondant sur un examen des tableaux d'information supplémentaires du rapport ministériel sur les résultats. Nous l'avons fait en 2021 et 2022, et le mois prochain, nous avons l'intention de publier une mise à jour beaucoup plus complète sur les pratiques exemplaires. Dans le cadre de cette mise à jour, nous fournirons également une nouvelle analyse de l'impact des programmes pangouvernementaux sur le genre et la diversité, et nous nous appuierons sur ces renseignements dans les prochaines mises à jour.
[Français]
Cela permettra d'établir une référence pour les autres ministères en ce qui concerne leurs exigences en matière de rapport décrites dans la Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes, en plus de tenir le gouvernement responsable des répercussions de ses programmes.
L'ensemble de la fonction publique doit veiller à ce que l'ACS Plus soit un facteur important à prendre en considération à toutes les étapes du processus relatif aux lois, aux politiques et aux programmes, et non un simple ajout.
Des progrès importants ont été réalisés grâce à l'application de l'ACS Plus. Cependant, le renforcement des capacités nécessaires à la collecte de données et au travail analytique est toujours en cours et prendra du temps.
(1120)
[Traduction]
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci beaucoup de m'avoir invitée aujourd'hui et d'avoir présenté ce rapport. Je pense qu'il est très important que nous l'examinions pour voir ce qui s'est passé au cours des huit dernières années.
J'aimerais me pencher sur cette question parce que j'ai fait partie du comité de la condition féminine et que j'ai eu la chance de travailler avec beaucoup d'entre vous. Je sais que nous essayons de faire du bon travail au sein du comité de la condition féminine lorsque nous parlons de l'ACS+.
En 2016, on a exigé « d'intégrer l'analyse comparative entre les sexes plus dans les mémoires au Cabinet et les présentations au Conseil du Trésor ».
En 2018, Condition féminine est devenue un ministère à part entière. En 2019, les ministres ont reçu le mandat de « tenir compte de l'analyse comparative entre les sexes dans la prise de décisions ». Il semble que nous disions aux gens de faire des choses, mais nous constatons que des problèmes de longue date que nous avons identifiés précédemment continuent d'entraver la pleine mise en œuvre. Malgré nos travaux et recommandations antérieurs, on ne sait toujours pas si les mesures prises permettent d'obtenir de meilleurs résultats en matière d'égalité des sexes, de diversité et d'inclusion.
Madame Agnew, j'aimerais vous poser une question à ce sujet parce que vous avez eu l'occasion d'examiner tout cela. Où avez-vous repéré les principales lacunes? Était‑ce au sein des ministères?
Nous avons cerné des domaines ou des thèmes principaux et nous en avons rendu compte.
Nous avons notamment parlé du renforcement des capacités, ainsi que de la formation et des outils. Malgré le travail accompli, des lacunes subsistent et il reste du travail à faire.
Nous avons beaucoup entendu parler aujourd'hui de la disponibilité de données désagrégées, de leur collecte et de leur utilisation. Nous avons constaté qu'il y avait encore beaucoup de travail à faire sur ce front.
Je pourrais peut-être m'adresser à Mme McRae, car nous parlons sans cesse de données désagrégées. Un grand nombre des politiques que nous mettons en œuvre, que vous viviez dans une zone rurale de l'Alberta... Pas plus tard qu'hier, nous avons eu une excellente conversation à ce sujet. Nous avons parlé de la taxe sur le carbone et du fait que les politiques ont des répercussions sur différentes personnes dans différentes parties du pays, et qu'il est très important de reconnaître ces différences régionales
Madame Agnew, pouvez-vous me faire part de certaines des difficultés auxquelles vous êtes confrontée lorsque vous vous adressez à ces ministères et que vous leur dites: « Nous disposons d'outils formidables, alors commencez à les utiliser »?
Je vais revenir sur les deux points soulevés par Mme Agnew. Le premier concerne la capacité.
Nous constatons que nous mettons en place des capacités assez solides dans l'ensemble du système. Nous observons cependant que nous ne pouvons pas nous contenter de recourir à un petit groupe d'experts. Je pense que, dans le passé, on considérait qu'il suffisait d'avoir quelques experts en matière d'ACS au sein d'un organisme pour faire ce travail. Je pense qu'au rythme où évoluent le gouvernement et les travaux, il est très clair que toutes les personnes qui travaillent sur les politiques et les programmes doivent comprendre cette question, en particulier, comme je l'ai mentionné, compte tenu de la nature changeante du Canada.
En ce qui concerne l'intersectionnalité, il y a les chiffres, mais je pense qu'il s'agit surtout d'une question de compétence. Il s'agit de cette compétence intersectionnelle, qui est un autre point soulevé par la vérificatrice générale dans ses commentaires; nous ne nous concentrons pas suffisamment sur l'intersectionnalité.
En ce qui concerne les données désagrégées, je vous recommande de prendre connaissance du travail accompli par Statistique Canada dans ce domaine. Depuis la réalisation de l'audit, ils ont accompli un travail considérable et ils ont publié l'année dernière un rapport annuel public sur les données désagrégées.
Tout à fait, et je sais que les données désagrégées sont très importantes, mais je regarde cela et, étant donné que nous venons de terminer le projet de loi C‑22, Loi sur la prestation canadienne pour les personnes handicapées, je me demande pourquoi il n'y a pas eu d'examen. On y lit: « Il manquait des éléments clés au Cadre des résultats relatifs aux genres pour améliorer les résultats en matière d'égalité des genres ».
Nous venons d'adopter un énorme projet de loi, mais il n'y a pas de cadre pour le handicap. Je me dis « Quel décalage! » C'est extrêmement important pour ces personnes très vulnérables.
En ce qui concerne le Conseil privé, je pense qu'il est très important, lorsque nous examinons la législation et les politiques, d'effectuer une ACS, en particulier en ce qui concerne la sécurité des femmes, qui sont des populations vulnérables.
Pouvez-vous me dire ce que nous faisons pour nous assurer, lorsque nous examinons des textes législatifs, en particulier dans le domaine de la sécurité publique, que l'on effectue une ACS?
Je suis tout à fait d'accord avec vous. C'est exactement ce que notre équipe fait ici au Bureau du Conseil privé, tant pour la politique de développement social que pour la législation et dans la planification parlementaire. Nous nous concentrons ici sur l'ACS+, mais nous commençons également très tôt avec le ministère. S'il y a un engagement d'une lettre de mandat ou si un projet de loi est en cours d'examen, nous réfléchissons à des façons d'agir immédiatement, en nous concentrant sur l'ACS+, et nous travaillons avec Femmes et Égalité des genres et avec d'autres intervenants pour fournir des renseignements dès le départ.
En tant que personne qui travaille sur les femmes et l'égalité des genres, nous constatons une violence inouïe au sein de nos collectivités. Qu'il s'agisse de la violence entre partenaires intimes ou de la violence domestique — nous nous y intéressons — ou d'actes de violence commis au hasard à l'encontre de populations vulnérables, nous continuons de constater une escalade.
Pouvez-vous me dire si l'ACS+ a été appliquée à des projets de loi importants, comme le projet de loi C‑75, qui a été présenté au cours de la 42e législature, ou à un texte comme notre réforme de la mise en liberté sous caution? A‑t‑on réellement examiné ces textes sous l'angle de l'analyse comparative entre les sexes?
Il faudrait que je vérifie pour ces projets de loi particuliers, mais je peux vous dire avec certitude que lorsqu'ils sont présentés, à partir du moment où nous effectuons cette analyse ici, tout à fait... Si le projet n'est pas accompagné d'une ACS+, il est renvoyé au ministère. C'est un élément obligatoire.
Je suis désolée, mais certains des projets qui sont adoptés nuisent à la sécurité des femmes. Comment ces textes peuvent‑ils être adoptés, alors que nous savons qu'au bout du compte, ils ont une incidence négative? Pourquoi l'ACS+ ne permet-elle pas d'assurer la sécurité des femmes?
C'est une excellente question, et je n'essaie pas de l'éluder parce que cela dépend également de l'origine des projets de loi, de l'endroit où ils sont rédigés et de la façon dont le processus se déroule. Vraiment, lorsque nous voyons des propositions de ministères, si elles ne sont pas adéquates de ce point de vue... Mme McRae et moi avons aussi travaillé ensemble sur la violence fondée sur le sexe, mis à part l'ACS+. C'est l'une de nos propositions — élaborer une réponse à la Commission des pertes massives —, et ce travail est en cours. Cela s'inscrit dans le droit fil de nos efforts. L'intersectionnalité est essentielle à cet égard, car, comme vous le dites, la question de la violence n'est pas le seul facteur; il y a aussi la cohabitation, la ruralité, l'accès aux ressources, les services de police locaux, etc. Tous ces éléments entrent en ligne de compte.
L'analyse comparative entre les sexes plus est un outil important pour promouvoir l'égalité au Canada. Certains d'entre vous savent que nous avons commencé avec l'acronyme ACS et que le « plus » s'y est ajouté au fil des ans. C'est, en partie, parce que nous demandons aux gens de réfléchir à toute une gamme de questions dans le cadre de cette analyse; il ne s'agit pas seulement de l'égalité des genres.
Le concept a beaucoup évolué au fil des ans pour englober une évaluation des divers facteurs dont nous devons tenir compte pour concevoir des politiques, des programmes et des lois — bref, des initiatives de toutes sortes — qui reflètent les expériences vécues et la vie réelle des Canadiens.
Cette responsabilité incombe en dernier ressort aux ministères, mais nous leur donnons des conseils sur la façon de s'y prendre, et nous avons mis à jour les lignes directrices au fil du temps en fonction des faiblesses que nous avons relevées. Au bout du compte, ce sont les ministères qui produiront les rapports, mais à l'intérieur du cadre que nous leur fournissons.
Bien sûr. Nous avons la chance d'avoir ici Mme Boudreau, qui gère l'équipe chargée de ce travail. Elle pourra donc vous parler de l'application concrète de ces lignes directrices.
Merci beaucoup. C'est une question très importante.
Nous fournissons régulièrement des conseils aux ministères et organismes. Nous publions des lignes directrices concernant les plans ministériels, ainsi que les rapports sur les résultats ministériels. Ils doivent les produire chaque année. Dans l'intervalle, nous rencontrons également tous les gens qui participent à ce processus pour nous assurer qu'ils comprennent nos exigences.
Depuis 2017, nous avons inclus dans ces deux documents des spécifications entourant l'ACS+. Nous envoyons cette mise à jour depuis six ans. C'est très important pour qu'ils comprennent ce qui est inclus. Encore une fois, nous les rencontrons tout le temps, et ils ont l'occasion de nous poser des questions et de discuter avec nous. C'est une grande communauté, et nous apprenons tous les uns des autres.
Ce sont là nos deux principaux types de lignes directrices. Tous les ministères et organismes y ont accès.
Les lignes directrices font partie d'un document d'orientation qui est constamment mis à jour. Son contenu change chaque année. Chaque fois que nous apprenons quelque chose de nouveau du Bureau du Conseil privé ou de Femmes et Égalité des genres Canada, nous intégrons le tout dans les lignes directrices. C'est un document qui évolue sans cesse. Comme je le disais, depuis 2017, nous avons des spécifications dans l'ACS+.
De plus, avant la fin de l'année civile, nous allons publier un rapport qui mettra en évidence les pratiques exemplaires que nous avons cernées dans les rapports sur les résultats ministériels. Il s'agit du Tableau de renseignements supplémentaires, dans lequel seront présentés tous les bons exemples d'ACS+. Nous allons mettre en valeur ces exemples pour nous assurer que tout le monde est au courant de ce que les gens font, et nous pourrons toujours avoir des échanges entre nous.
C'est formidable que vous puissiez donner des exemples et les présenter dans un tableau, mais comment pouvons-nous faire en sorte que ces efforts se poursuivent?
J'aime beaucoup cette question parce que mon groupe est chargé d'examiner et de contester les présentations au Conseil du Trésor. Nous en examinons environ 15 par semaine. Ainsi, chaque semaine, il y a une interaction avec les ministères et les organismes pour discuter de ce qui manque dans leurs plans, qu'il s'agisse des données recueillies, des résultats ou de l'information axée sur les résultats.
Au Conseil du Trésor, nous avons le privilège de pouvoir travailler avec tous les ministères et, encore une fois, de faire en sorte que les présentations au Conseil du Trésor — les plans de mise en oeuvre et la politique sur les résultats — nous permettent d'avoir quelque chose de concret à montrer aux Canadiens.
Peut-être avant de parler de certains chiffres concernant la participation, j'aimerais donner quelques exemples très précis en réponse à votre question de savoir si nous constatons une prise en compte de l'intersectionnalité.
Mme Vecchio a mentionné, par exemple, la ruralité. Pour intégrer la voix des personnes vivant en milieu rural dans les activités du gouvernement fédéral, nous collaborons avec le Centre de développement économique rural. Nous essayons de nous assurer que nos conseillers qui vivent et travaillent dans les collectivités recueillent des données, des preuves, des témoignages à l'échelle locale afin de les mettre à contribution dans la fonction publique fédérale pour veiller à ce que la ruralité soit prise en considération.
La participation à notre formation a été phénoménale. Nous avons mentionné la semaine de sensibilisation à l'ACS, au cours de laquelle plus de 2 000 fonctionnaires ont pris part à des activités en ligne. Je pense que plus de 250 000 à 300 000 fonctionnaires, parlementaires et membres du personnel des ministres ont suivi les cours d'ACS+ que nous offrons en collaboration avec l'École de la fonction publique du Canada. Nous avons préparé une gamme de nouveaux produits sur l'intersectionnalité. Nous avons travaillé avec des gens dans le dossier de la COVID pour nous assurer que les programmes élaborés pendant la pandémie appliquaient également l'optique de l'ACS+.
Notre travail suscite énormément d'intérêt dans l'ensemble de l'appareil gouvernemental. Nous collaborons avec une foule de gens qui nous sont recommandés par le Conseil du Trésor et le Bureau du Conseil privé ou qui viennent nous demander des conseils et de l'aide pour bâtir leur base de connaissances.
Je remercie tous les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Merci à vous, du Bureau du vérificateur général, d'avoir conduit plusieurs audits sur ce sujet. Si je ne me trompe pas, l'audit de 2022 est le troisième, après celui de 2009 et celui de 2015. L'égalité des genres est évidemment un sujet très important. Il est question ici de ce que le gouvernement peut faire pour réparer les écarts qui existent, qu'on le souhaite ou pas, dans la société.
Dans votre dernier rapport, monsieur Hayes, vous indiquez que l'audit a permis de cerner des lacunes importantes dans plusieurs ministères, surtout en ce qui concerne les données qu'ils collectent pour assurer un suivi et s'améliorer.
Le rapport d'audit traite d'un autre élément sur lequel j'aimerais vous demander des éclaircissements. Si je comprends bien, vous avez révélé que certains ministères n'étaient pas assez concentrés sur les résultats et sur l'amélioration de l'égalité entre les sexes au sein des ministères et, par voie de rayonnement, dans toute la société.
Selon vous, quelles étaient les causes de ces problèmes?
Je dirais qu'une des causes primordiales est la sous-utilisation des données désagrégées. Dans beaucoup de cas, ces données existent, mais elles ne sont pas suffisamment utilisées lors des analyses qui sont tant importantes en vue d'élaborer et de mettre en œuvre des mesures et des politiques.
Nous avons aussi fait remarquer, dans notre rapport, l'importance de la formation. Les actions intentionnelles seraient un moyen par lequel plusieurs problèmes pourraient être réglés.
Oui. Quand on examine les constatations de ce rapport d'audit à la lumière des deux rapports précédents, on se rend compte que certaines lacunes sont similaires et persistantes. J'ajouterais que le rapport d'audit déposé par la vérificatrice générale il y a un mois cite aussi des exemples des conséquences de ces lacunes.
Auparavant, j'aimerais savoir pourquoi, selon vous, la question de l'inclusion de données désagrégées n'a pas été réglée, en huit ans. Qu'est-ce qui se passe au sein des ministères?
Selon notre observation de la situation, l'information devrait être incluse dans les analyses pour que les personnes qui doivent prendre des décisions aient les meilleures informations possible pour ce faire.
Je ne sais pas pourquoi la situation est ainsi. Mme Agnew a peut-être une réponse à cette question.
J'ajouterais que, sept ans plus tard, il y a encore des ministères et des agences qui n'ont toujours pas mis en œuvre un cadre d'ACS Plus. Cela consiste en six éléments essentiels...
Est-ce que vous pouvez nommer les ministères qui n'ont pas encore mis en place un cadre d'ASC Plus? Vous venez de dire qu'il y a plusieurs ministères qui ne l'ont pas encore fait.
Je pense que c'est une question au sujet de laquelle FEGC pourrait vous donner plus d'information.
Je dirais qu'en général, compte tenu de toutes les constatations énumérées dans notre rapport, les ministères peuvent encore améliorer leur processus concernant la préparation et l'utilisation de l'ACS Plus.
Revenons au problème principal, qui est la question des données désagrégées. Nous savons que plusieurs ministères n'ont pas mis en œuvre de solutions pratiques.
Premièrement, quelles solutions pratiques les ministères auraient-ils pu mettre en œuvre? Ensuite, combien de temps est-ce que cela aurait dû prendre? Enfin, pourquoi ne l'ont-ils pas fait?
Est-ce que vous pouvez répondre rapidement à ces questions?
Je dirais que c'est aussi une question de compétences au sein des ministères. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous avons soulevé le besoin de formation.
Comme la sous-ministre l'a dit, il y a quelques experts au sein des ministères, mais peut-être que c'est trop peu. On aurait besoin d'avoir d'autres personnes compétentes pour faire l'ACS Plus.
Le ministère des Femmes et de l'Égalité des genres ne peut-il pas, lui, former les gens des autres ministères et aller dans les autres ministères pour s'assurer qu'ils ont les compétences requises pour mettre en place le cadre de l'ACS Plus?
Nous avons discuté tantôt des formations que nous donnons. À cet égard, nous travaillons très étroitement avec l'École de la fonction publique du Canada. Comme vous le savez, certains ministères sont très grands et très éparpillés partout au pays. Au ministère des Femmes et de l'Égalité des genres, nous jouons vraiment un rôle pour renforcer leurs capacités.
Je vais demander à Mme Leïla Boussaïd de vous donner des données précises au sujet des formations.
Je suis désolé, mais il ne reste pas assez de temps au tour de Mme Sinclair‑Desgagné pour une autre réponse. Cependant, c'est fort probable qu'on vous demande de nous donner ces précisions dans quelques minutes.
[Traduction]
Monsieur Desjarlais, vous avez la parole pour six minutes. Allez‑y.
Je remercie les témoins de leur présence. Je comprends à quel point ce travail est difficile.
Ce n'est pas tous les jours que nous avons l'occasion, au Comité, de parler de politiques au champ d'application très vaste. Du point de vue du Canada, cette question est vraiment importante, compte tenu de notre histoire, de l'état dans lequel se trouve notre pays et du fait que nous essayons encore d'instaurer une démocratie qui inclut tout le monde, qui crée des systèmes inclusifs et qui se dote de politiques inclusives.
C'est un travail extrêmement difficile et exigeant. Je tiens à vous en remercier, puisque nous avons l'occasion d'en vérifier les résultats. Bien entendu, nous avons beaucoup parlé de lacunes aujourd'hui, mais n'oublions pas les pas de géant qui ont été faits pour les Canadiens, depuis des générations, en vue d'améliorer cette compréhension. Vous prenez ainsi la relève, alors merci pour cela. Je vous remercie des services que vous avez rendus pour faire en sorte que l'audit et les constatations d'aujourd'hui soient possibles.
C'est une question très importante lorsque nous nous interrogeons sur l'ACS+. Pour de nombreux Canadiens, cette notion soulève parfois une question: pourquoi est‑ce important? C'est important parce que nous devons trouver des moyens de montrer aux Canadiens que c'est une affaire d'inclusivité. Il s'agit de savoir comment on dépense l'argent des contribuables et de déterminer les personnes qui sont prises en compte dans ces dépenses et qui bénéficient, en dernier ressort, des retombées prévues d'un programme, en particulier s'il s'agit d'un programme national de la fonction publique.
C'est une question extrêmement importante, surtout pour les députés qui sont assis dans cette salle. J'ai l'occasion de rencontrer des représentants de nombreux partis, y compris dans la Chambre des communes et les assemblées législatives de tout le pays. Après tout, si les gens ne se sentent pas inclus dans les dépenses en matière de politiques, pourquoi voudront-ils voter? Il s'agit d'un problème concret qui est directement lié à l'apathie qui règne dans notre pays, à l'état de la démocratie canadienne et à la question de savoir si ces gens se sentiront un jour vraiment inclus.
Permettez-moi de vous raconter rapidement une histoire personnelle. Ma mère est née à une époque où les Autochtones ne pouvaient pas voter. Elle est née sans voir personne voter de sa vie. Ses grands-parents n'avaient pas le droit de voter. L'Acte pourvoyant à l'émancipation graduelle n’avait pas encore été adopté au Canada. Les Autochtones ont été les derniers au pays à obtenir le droit de vote. C'était en 1960.
Il est inconcevable qu'une démocratie puisse exclure une telle voix — la voix fondatrice de notre pays — pendant tant d'années. Voilà les conséquences de ne pas intégrer l'ACS+ dans nos politiques. C'est un résultat dévastateur qui a encore des répercussions attribuables à l'apathie et au manque de confiance. C'est pourquoi les gens ont encore du mal à considérer le Canada comme un endroit où il fait bon vivre, un endroit accueillant et diversifié.
J'aimerais fonder mes questions sur cette expérience concrète, car c'est quelque chose que nous ressentons encore et que les membres des communautés de tout le pays — ceux qui sont représentés dans l'ACS+ — continuent de subir. Ces gens ont le cœur brisé — et moi aussi, d'ailleurs — de savoir que cet audit a révélé, à bien des égards, une tendance persistante de ce que je qualifierais peut-être de négligence face à certains de ces problèmes.
Ce pourrait être attribuable au manque de ressources. Il pourrait y avoir toutes sortes de raisons. C'est ce que je cherche à savoir. Comment se fait‑il, par exemple, que les trois organisations représentées ici aient répondu aux recommandations du Bureau du vérificateur général en affirmant qu'elles allaient « continuer » de prendre les mesures recommandées? Cela laisse entendre que, lors de l'audit précédent, vous appliquiez déjà ces mesures. Or, elles ne semblent pas nécessairement avoir été prouvées dans le cadre de cet audit.
Je suppose que ma question est directe. J'aimerais savoir — et une réponse des trois ministères serait utile — si vous n'êtes pas entièrement d'accord avec les constatations du Bureau du vérificateur général.
Nous sommes, en fait, d'accord avec les constatations de la vérificatrice générale.
J'aimerais parler un peu de l'évolution de l'ACS+. Ce n'est pas quelque chose de statique. Nous devons continuer à faire évoluer nos approches à l’égard de l’ACS+. Ce que vous avez peut-être vu — et nous pourrions certainement faire parvenir au Comité le rapport de la vérificatrice générale —, c'est une chronologie des mesures concertées prises sur une période de 30 ans.
J'aimerais toutefois dire un mot sur la question du leadership du Canada dans ce domaine. Je regardais le rapport publié par l'OCDE, à la demande du Canada, sur notre travail en matière d'ACS. J'aimerais me reporter au communiqué de presse que l'OCDE a publié à la fin du rapport, qui a été achevé en 2018.
La première phrase se lit comme suit:
Ces dernières années, le Canada a progressé de manière importante sur le sujet de l’égalité entre les femmes et les hommes, en mettant en place des institutions, des politiques et des outils ainsi que des dispositifs de contrôle qui font de ce pays un chef de file de la poursuite d’un objectif de plus en plus considéré comme l’une des pierres angulaires de la croissance inclusive, selon une nouvelle étude de l’OCDE.
Je crois sincèrement que nous continuons de nous améliorer. Les choses s'améliorent. Songeons à la Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes, qui a exigé beaucoup de rigueur.
Je suis désolé, mais je dois vous interrompre, car le temps file.
Je vous remercie de vos observations, mais je veux laisser aux autres témoins le temps de répondre à la question de savoir s'ils sont d'accord ou non avec les constatations du Bureau du vérificateur général.
En guise de préambule à ma question, je ne veux pas insinuer que vous ne faites pas du bon travail — et je comprends l'argument qui vient d'être présenté —, mais c'est parce que la réunion d'aujourd'hui vise à faire en sorte que les députés comprennent les lacunes...
Je vais donner un exemple précis pour montrer à quel point nous sommes d'accord et en quoi c'est conforme à l'idée de continuer de... et cela concerne les données désagrégées.
Au moment de la publication du premier rapport, nous disposions de quelques données désagrégées, mais il n'y avait pas d'investissements majeurs dans beaucoup de domaines. C'est nécessaire pour établir des liens supplémentaires entre les données — par exemple, entre les résultats de chaque programme et les bases de données de Statistique Canada. Des progrès ont été réalisés à ce chapitre.
Lorsque nous disons que nous allons « continuer » de prendre de telles mesures, comme Mme McRae l'a expliqué, Statistique Canada a fait d'importants investissements pour améliorer la capacité des ministères d'utiliser son site. Nous n'en sommes pas encore au stade où cent pour cent des programmes sont assortis de données désagrégées. Ce sera là une tâche difficile, et ce, pour plusieurs raisons. Il y a des préoccupations en matière de...
Je vais vous interrompre ici. Je suis sûr qu'on y reviendra.
Je cède maintenant la parole aux représentantes du Bureau du Conseil privé. Veuillez répondre brièvement à M. Desjarlais, si vous le voulez bien. Merci.
En un mot, oui, je suis d'accord, mais le travail se poursuit en ce qui concerne précisément l'application rigoureuse — le développement. Lorsque je parle de « continuer », j'entends par là qu'il faut poursuivre l'évolution rigoureuse et tenir compte, comme l'a dit Mme McRae, des changements démographiques du Canada.
Monsieur Hayes, pensez-vous que le gouvernement a réussi dans ce processus, à la lumière de l'audit de 2015 et des autres rapports, compte tenu de la situation huit ans plus tard?
Je dirais que le gouvernement a pris quelques mesures depuis la publication de notre rapport de 2016. Je peux souligner le fait que l'analyse comparative entre les sexes plus est une exigence pour les mémoires au Cabinet et les présentations au Conseil du Trésor, mais je dirais...
Vous avez dit qu'il s'agissait d'une exigence, mais le gouvernement ne semble pas la respecter. Voilà pourquoi je veux vous demander si vous pensez que cette approche est une réussite. S'il y a une exigence, celle‑ci est-elle respectée?
Je dirais que les analyses sont en cours. La question de la solidité de ces analyses reste ouverte. Ce qui importe, c'est que les ministres et les décideurs obtiennent les meilleurs renseignements possible pour évaluer les facteurs d'intersectionnalité qui devraient entrer en jeu dans leurs décisions.
Nous avons décelé des possibilités d'amélioration, en particulier en ce qui concerne les données, au cours de l'audit sur l'inclusion dans la fonction publique dont nous avons présenté les résultats il y a environ un mois.
Madame Boudreau, je vais vous poser la même question.
Pensez-vous que le cadre des résultats est respecté avec succès? Qui est responsable de son respect en dernier ressort? Je pense qu'ils se disent que si tout le monde est responsable, personne n'est responsable. On dirait que le Conseil du Trésor, comme tout le reste, établit un cadre, puis s'en lave les mains, et que le cadre n'est pas respecté par la suite. Le Conseil du Trésor soutient que cette responsabilité incombe aux ministères.
Qui doit en être responsable? Tout le monde ne peut pas être responsable. Quelqu'un doit être chargé de suivre ce qui se passe.
Vous avez tout à fait raison. Le Conseil du Trésor assure une fonction de remise en question, et il le fait dans le cadre des présentations au Conseil du Trésor, par exemple.
Pour revenir à votre question, nous échangeons beaucoup d'information avec les ministères et les organismes lorsque nous ne sommes pas satisfaits de ce que nous recevons du point de vue de la mise en œuvre.
Le cadre n'a donc pas été mis en œuvre correctement pendant huit ans.
Combien d'échanges le Conseil du Trésor a‑t‑il eus pendant ces huit années? Je peux imaginer qu'un peu de temps soit nécessaire lorsqu'un nouveau programme est mis en place, mais cette situation dure depuis huit ans.
Le cadre évolue, et les programmes deviennent de plus en plus compliqués. Nous n'avons pas de solution universelle à cet égard. C'est pourquoi nous devons vraiment travailler en collaboration avec les ministères pour nous assurer que nous procédons à la bonne analyse au bon niveau.
Je voudrais revenir sur une question importante que Mme Vecchio a posée. Cette question a été oubliée dans le rapport, je crois. Il s'agit de la manière dont nous examinons les mesures législatives sous l'angle de l'ACS+ en ce qui concerne les personnes vulnérables.
Je voudrais évoquer une affaire douloureuse qui s'est produite à Edmonton, en avril. Une mère et son enfant ont été assassinés par une personne libérée sous caution après avoir agressé quelqu'un d'autre, agressé un enfant et poignardé quelqu'un à un arrêt d'autobus.
Le projet de loi C‑75 a‑t‑il été soumis à une analyse comparative entre les sexes plus?
Comment les parlementaires sont-ils censés juger de l'efficacité de cette analyse? Ce n'est pas de votre faute, évidemment.
Une mère et son enfant ont été sauvagement assassinés. Ce type est arrivé en voiture, les a poignardés à mort, puis s'est enfui en voiture, après avoir été libéré une demi-douzaine de fois pour des agressions semblables. Et on nous dit qu'il s'agit d'un document confidentiel du Cabinet.
Non, je sais. C'est un exemple extrême, mais c'est un exemple réel qui s'est déroulé dans ma collectivité, et nous ne sommes pas en mesure de vérifier si l'ACS a été réalisée.
Une partie importante du processus du Comité consiste à prendre en compte l'analyse comparative entre les sexes, à mesure que la mesure législative franchit les étapes à la Chambre. Nous réalisons...
Je tiens à donner suite à un certain nombre de questions que M. McCauley a soulevées.
Je sais que le projet de loi C‑75 prévoyait un renversement du fardeau de la preuve en ce qui concerne la violence entre partenaires intimes. Selon moi, c'est le résultat d'une analyse comparative entre les sexes et d'une application de la manière dont la mesure législative est touchée par l'analyse.
Je voudrais parler un peu des données et de leur incidence sur les différents ministères et leur objectif en matière d'ACS.
Avant tout, je crois que M. Hayes serait peut-être le mieux placé pour répondre à cette question.
La même analyse est-elle appliquée dans tous les ministères?
Je suis désolé. Je suggérerais peut-être que d'autres témoins complètent cette réponse.
Un formulaire est fourni comme outil d'orientation, mais il appartient à chaque ministère d'analyser la façon dont ses programmes, ses politiques et ses mesures vont interagir avec les caractéristiques intersectionnelles qui entrent en jeu dans une ACS+.
Je ne dirais pas qu'il s'agit d'une solution universelle, mais peut-être que certains de mes collègues voudront répondre à la question ou ajouter quelque chose.
Je suis heureux d'intervenir et de donner suite à cette réponse.
J'ai dirigé trois grands ministères avant le Conseil du Trésor, et je dirais que les programmes qu'ils mettent en œuvre et les mesures qu'ils prennent sont très diversifiés.
Le Conseil du Trésor, par exemple, s'occuperait d'un approvisionnement en ciment. L'analyse des données et l'ACS+ effectuée dans le cadre d'un tel approvisionnement seront d'une intensité et d'une nature totalement différentes de celles liées au lancement d'un nouveau programme social important, par exemple.
Les données sont essentielles pour toutes ces mesures, mais j'ai constaté dans tous les ministères qu'il n'y a pas de solution unique pour toutes ces mesures. Dans de nombreux cas, vous ne disposez pas de données au départ. Vous devez affecter des ressources à leur collecte. Des investissements importants ont été réalisés à cet effet, mais il n'est pas possible de le faire en engageant une seule dépense. Il faut adapter les données à chaque programme. Dans le cas de certains programmes, on peut vouloir se concentrer particulièrement sur certains aspects de l'ACS+ dont on sait qu'ils jouent un rôle beaucoup plus important dans le programme.
Lorsque vous demandez si nous pouvons collecter les données, je mentionne qu'un autre obstacle de taille qui entre en jeu a toujours été la protection des renseignements personnels. Je me souviens de l'époque où les parlementaires ont critiqué EDSC pour avoir créé ce que l'on appelait alors une base de données « Big Brother » pour tenter de relier des ensembles de données — même si elles étaient anonymisées — en vue d'obtenir de meilleures données désagrégées. C'est la raison pour laquelle nous avons publié des directives sur la manière d'agir dans le domaine de la protection des renseignements personnels.
Enfin, il peut y avoir des cas où les communautés et les secteurs de l'ACS+ eux-mêmes ne seraient pas du tout à l'aise avec la collecte de données. Je vais vous donner un exemple concret.
Parcs Canada dispose d'un service de réservation pour permettre aux gens de réserver un emplacement dans un parc. Du point de vue des données désagrégées, il serait probablement très utile pour nous de connaître le statut racial et l'orientation sexuelle de chaque personne qui présente une demande, afin de comprendre si le service est vécu de la même façon par tout le monde. Mais vous pouvez imaginer que certaines de ces communautés pourraient s'opposer à la nécessité de fournir toutes ces informations pour réserver un emplacement dans un parc.
Il s'agirait de cas où il n'est pas approprié, en fin de compte, de collecter ces données, mais cela créera des lacunes dans les données.
Je pense qu'une partie du défi que représentent les progrès à cet égard, c'est que, pour être cohérente, la collecte doit être réalisée un programme à la fois d'une manière tout à fait personnalisée. C'est ce qui exige beaucoup de temps.
C'est pourquoi, comme l'a dit M. Hayes, il n'y a pas de solution universelle.
C'est tout à fait exact. Je vous remercie de l'avoir souligné. J'utilise l'Agence de santé publique du Canada comme autre exemple qui montre que la santé des femmes peut être très différente de celle des hommes blancs cisgenres.
Comment pouvons-nous surmonter ces difficultés? Il est évident que plus les données sont bonnes, plus le gouvernement peut élaborer de bonnes politiques. Quelles sont certaines de ces difficultés? Je sais que vous en avez souligné quelques-unes. Quelles sont aussi certaines des solutions aux problèmes?
Je commencerai par dire que les données sont l'un des principaux éléments que nous examinons dans le cadre de presque tous les audits, car nous espérons pouvoir apporter une certaine valeur ajoutée à la conception des programmes des ministères et des organismes. Très franchement, si vous pensez aux données dont vous aurez besoin pour rendre des comptes et servir les Canadiens, vous pourrez vous faciliter la tâche en adaptant le mécanisme de collecte dès le départ. Cela orientera la façon dont vous envisagez l'élaboration de votre politique.
Je sais que M. Flack a une grande expérience dans ce domaine.
Je vais vous donner un exemple tiré d'un audit réalisé par le vérificateur général précédent.
Il s'agissait d'un programme de développement des compétences des Autochtones, dans le cadre duquel des services étaient fournis aux communautés autochtones. La question était de savoir ce qu'il advenait de ces personnes cinq ans plus tard. Nous ne disposions pas de données à ce sujet, car les communautés elles-mêmes n'étaient pas nécessairement en mesure de suivre l'évolution de ces personnes, puisqu'elles avaient quitté la communauté. La solution a consisté à utiliser d'une façon très complexe des données fiscales anonymisées liées à ces personnes, dans le cadre d'une transaction très délicate visant à protéger leurs renseignements personnels. Cela nous a permis de suivre l'évolution de ces personnes et de leurs résultats sur cinq ans, à un niveau agrégé. Le processus n'a pas été simple, et nous devions nous conformer à la Loi de l'impôt sur le revenu.
Voilà un exemple de programme particulier pour lequel on ne peut pas simplement demander à la communauté de collecter les données, car si les personnes ont déménagé, elles ne pourront pas le faire. Je pense que nous devons procéder transaction par transaction, et c'est la raison pour laquelle l'équipe de M. Hayes pousse toujours les ministères à améliorer chacun de leur programme et leur montre comment y arriver. Je comprends pourquoi cela prend du temps.
Est-ce qu'on pourrait expliquer brièvement pourquoi on n'a pas réussi, en huit ans, à mettre en place un plan? En fait, je suis généreuse lorsque je parle de huit ans, puisque cela fait presque 30 ans que le gouvernement s'est engagé à utiliser l'ACS Plus. Évidemment, les choses ont évolué depuis.
Nous avons entendu vos réponses précédentes, mais j'aimerais savoir ce qui explique que, plusieurs années plus tard, on n'ait toujours pas réussi à implanter cela au sein de tous les ministères.
Premièrement, je dirais qu'il y a plusieurs choses qui doivent être faites. Il n'existe pas de solution unique pour répondre à ce défi. Dans son rapport précédent, la vérificatrice générale a mentionné notamment la capacité, les compétences, le fait de miser sur l'intersectionnalité, ainsi que les données désagrégées, un élément dont nous avons beaucoup parlé.
Il y a eu des plans pour remédier à ces lacunes. Je vais cependant insister sur le fait que le problème continue d'évoluer. Même selon les Nations unies, l'intersectionnalité n'est certainement pas une solution qui peut durer pendant de nombreuses années. C'est toujours en évolution.
Les plans qui ont été mis en place au fil des ans ont permis de remédier aux lacunes dans une certaine mesure. Cependant, d'autres lacunes continuent d'être cernées en fonction de la réalité du moment.
Plusieurs d'entre vous savent déjà que je suis une économiste spécialisée en intégration des questions environnementales et sociales dans l'analyse économique. À cet égard, je vais vous donner un exemple. L'Union européenne, qui est une structure beaucoup plus complexe que le Canada, a été capable de mettre au point, pour procéder aux analyses coûts-bénéfices de toutes les politiques publiques, une méthodologie qui intègre une pondération des différents scénarios pour les projets d'infrastructure. C'est ce qui est appliqué pour tous les projets d'un pays quand celui-ci demande des subventions à la Commission européenne.
Comment se fait-il que l'Union européenne soit capable de mettre cela en place en à peu près cinq ans, alors que le Canada est pas mal en retard sur des choses qui auraient dû être mises en place et qui sont franchement plus simples?
Nous en apprenons beaucoup de l'Union européenne. C'est sûr qu'elle représente un standard très élevé.
Cela dit, comme l'OCDE l'a mentionné, le Canada continue de progresser dans ce domaine. Nous sommes effectivement l'un des chefs de file dans le monde.
La dernière question que je poserai sera liée à ce dont j'ai parlé précédemment, à savoir les recommandations que le Bureau du vérificateur général adresse à chacun d'entre vous. Dans de nombreux cas, vous avez répondu à ces recommandations en disant que vous alliez « continuer de ». J'essaie d'arriver à l'intersection, si l'on peut dire, entre la compréhension de notre fonction, qui est de rendre des comptes, la compréhension de l'origine de ces déficiences, et l'assurance que ces déficiences seront correctement éliminées.
Je ne peux pas dire avec certitude si le fait de répondre aux recommandations en indiquant que vous allez « continuer de » constitue effectivement une action. J'aimerais donc savoir précisément si vous prenez déjà les mesures que la vérificatrice générale a décrites, des mesures que, selon vos dires, vous prenez déjà et que vous continuerez de prendre. Pourquoi le Bureau du vérificateur général a‑t‑il constaté les lacunes décrites dans l'audit?
Nous allons peut-être consacrer 20 secondes à chacune de vos réponses à cette question.
Je peux commencer à y répondre, si vous le souhaitez.
Du point de vue de Femmes et Égalité des genres Canada, nous sommes sur la bonne voie en ce qui concerne les mesures prises à la suite de l'audit. Nous ne contestons pas qu'il nous reste du travail à faire, mais nous avons certainement lancé de nouvelles initiatives à la suite de l'audit, lesquelles sont décrites dans notre plan d'action.
Je reviendrai sur l'exemple des données désagrégées. Des progrès ont été réalisés à cet égard. Même depuis la publication du rapport de la vérificatrice générale, des progrès ont été accomplis, et nous reconnaissons qu'elle a raison et que nous avons besoin d'un plus grand nombre de données désagrégées.
Nous avons pris des mesures concrètes pour faire avancer les choses, par exemple en utilisant l'avis de confidentialité, mais il faudra beaucoup de temps pour que tous les programmes soient soumis à ce processus. L'expression « continuer » signifie que des mesures ont été prises en ce sens, mais nous acceptons le point de vue de la vérificatrice générale selon laquelle nous devons poursuivre notre cheminement pour arriver là où nous voulons aller.
J'ai mentionné que nous continuions d'approfondir notre rigueur, et c'est un point sur lequel je voulais revenir. Il s'agit vraiment de la maturité du processus même et de l'approfondissement de la rigueur.
Il s'agit en particulier de mieux documenter la manière dont, au ministère des Femmes et de l'Égalité des genres, nous étudions à fond les commentaires que chaque personne fournit à propos de propositions politiques particulières, et de mieux documenter les types d'analyses qui les sous-tendent. Il s'agit également de renforcer les capacités des programmes et des politiques envisagés en matière de données désagrégées, en particulier s'il s'agit d'un tout nouveau programme, par opposition à un programme en cours qui dispose d'une base de données importante sur laquelle il est possible de s'appuyer.
Enfin, je pense que c'est cette amélioration continue que nous mettons de l'avant.
Je voudrais vraiment revenir sur l'ACS+ et sur la manière dont elle est appliquée aux mesures législatives, parce que je suis vraiment préoccupée par les échecs auxquels nous pourrions aboutir, lorsque l'on voit les résultats actuels.
Je voudrais revenir à vous, madame Levesque. Vous avez dit qu'il s'agissait de mémoires au Cabinet. En ce qui concerne toutes les mesures qui font l'objet d'une ACS+, tout ce travail est effectué et détenu par le Cabinet à titre confidentiel en ce moment. En tant que législateurs, nous essayons de prendre les meilleures décisions possible, mais il y a un petit groupe qui semble posséder toutes les connaissances nécessaires.
Ne serait-il pas bénéfique pour nous, les législateurs, de connaître les tenants, les aboutissants et les bizarreries des mesures législatives, au lieu de limiter leur connaissance à un petit groupe?
En ce qui concerne les spécificités de l'ACS+, nous exerçons notre fonction de remise en question et nous renvoyons le résultat de ce travail au ministre qui parraine le projet de loi dans chaque ministère, à mesure que le projet de loi avance dans le processus. Le ministre soumet ensuite sa proposition à l'ensemble du Cabinet pour qu'il l'examine, de manière à ce qu'une fois que la mesure législative a été adoptée, elle relève en fin de compte de la compétence du Cabinet.
Je respecte entièrement ce processus, mais, en tant que législateurs, comment pouvons-nous élaborer des lois si nous ne disposons pas de toutes les informations? Comment pouvons-nous débattre des dispositions d'une mesure législative si les connaissances sont conservées au sein du Cabinet au lieu de nous être communiquées?
Je vous fais remarquer en ce moment qu'en vertu de l'article 5 de la loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes, le Conseil privé et le Conseil du Trésor du Canada sont censés établir un rapport chaque année. Dans ce rapport, je vois une partie de l'information, mais elle semble plutôt générale. Vous penchez-vous sur les bizarreries de ce processus, sur les choses qui ne fonctionnent pas lorsque vous effectuez une analyse, ou vous contentez-vous de fournir des renseignements, et non des solutions? Pouvez-vous me donner des informations à ce sujet?
Vous avez tout à fait raison. Nous avons déjà publié deux rapports, et un troisième rapport sera publié sur notre site Web d'ici la fin de l'année civile. Ce prochain rapport sera beaucoup plus détaillé, car nous avons constaté récemment que les ministères ont réalisé des progrès considérables en matière de collecte de données et de renforcement des capacités. Nous souhaitons rendre compte des pratiques exemplaires, mais nous sommes également conscients qu'il y a encore des choses à améliorer.
Je comprends. En parcourant le document, j'ai remarqué quelques exemples, mais est‑il possible que certains ministères et agences n'aient toujours pas effectué d'ACS+ à ce sujet, notamment le Secrétariat du Conseil du Trésor?
En ce qui concerne le fameux terme « obligatoire », s'agit‑il simplement d'un exercice de case à cocher, ou d'un véritable travail de fond? Pour ma part, je fais des listes d'épicerie chez moi, mais est‑ce que le processus d'ACS+ n'est finalement lui aussi qu'une simple liste? Dans quelle mesure l'analyse est-elle effectuée de manière approfondie?
Le processus d'ACS+ comprend une annexe volumineuse que les ministères sont tenus d'examiner selon une approche fondée sur les résultats, et doit être conforme à la Politique sur les résultats du SCT.
Les nouveaux programmes sont soumis à une analyse particulièrement détaillée, tandis que les programmes renouvelés font l'objet d'une analyse un peu moins avancée.
Qu'il s'agisse de programmes nouveaux ou renouvelés, je peux vous assurer que nous sommes loin d'une simple liste de cases à cocher.
Je tiens à ajouter que dans les cas où nous ne sommes pas entièrement satisfaits d'un rapport qui nous est présenté, nous pouvons exiger d'un ministère qu'il nous fasse parvenir un rapport plus détaillé d'ici six mois ou un an.
Je vais maintenant remettre mon chapeau de ministre du cabinet fantôme responsable des Femmes et de l'Égalité des genres, car je suis préoccupée par la violence faite aux femmes qui afflige le pays et qui ne cesse de s'aggraver. Que fait concrètement le gouvernement en matière d'ACS+? Je remarque que dans l'ensemble, les mesures mises en place par le gouvernement ne sont pas toujours efficaces. Je pense notamment à l'échec que représente la réforme du système de mise en liberté sous caution, alors que l'on constate que des délinquants violents sont remis en liberté peu de temps après leur arrestation. Pourriez-vous m'indiquer ce que le gouvernement libéral a accompli en matière de justice pour assurer la sécurité des femmes?
Il s'agit de se référer au mémoire dès qu'il sera présenté au Cabinet.
Pour répondre à votre question sur l'étape de l'étude en comité, je dirais que certains des amendements proposés dépassent la portée du projet de loi. Ces amendements devront donc être renvoyés devant le cabinet du Conseil du Trésor pour examen.
Je comprends votre point de vue, mais je peux vous assurer que certaines lois adoptées par le gouvernement n'ont pas été des succès. M. McCauley a parlé du projet de loi C‑75... Il est devenu courant de voir des délinquants être relâchés et se jouer du système de libération conditionnelle. Pouvez-vous m'expliquer en quoi cette situation est bénéfique pour les personnes victimes d'un acteur criminel, y compris de nombreux enfants? Je me demande simplement si les enjeux liés à la criminalité sont pris suffisamment au sérieux par le gouvernement.
Je tiens à dire que Mme McRae prend ses responsabilités très au sérieux et fait de l'excellent travail. En revanche, je suis préoccupée par ce qui se fait dans les autres ministères, qu'il s'agisse du matériel militaire inadéquat fourni aux femmes qui servent dans nos forces armées, des inégalités liées à la mise en place de la PCU, ou de l'échec de la taxe carbone.
La Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes oblige le ministre des Finances et le président du Conseil du Trésor à rendre publics les plans de mise en œuvre de l’ACS+. Pouvez-vous expliquer l'importance de rendre ce genre de renseignements publics?
Il s'agit avant tout d'une question de transparence et de communication. Le gouvernement cherche à mettre en commun les pratiques exemplaires afin d'aider les ministères qui éprouvent des problèmes liés à la capacité ou à la collecte des données. Une autre piste de solution est d'organiser des réunions avec les personnes impliquées dans ce domaine afin de favoriser les échanges.
Notre objectif est de produire des analyses ACS+ robustes et détaillées. Pour ce faire, nous devons continuer de recueillir et de diffuser les renseignements pertinents, et tenir des discussions ouvertes et éclairées.
Comme je l'ai dit il y a un instant, nous avons déjà publié deux rapports, et nous serons en mesure d'en publier un troisième avant la fin de l'année civile. Ce dernier rapport sera plus complet et contiendra davantage d'exemples, car nous avons constaté des améliorations dans le système.
Madame McRae, de quelle manière l'ACS+ est-elle mieux appliquée au niveau ministériel que par l'entremise des méthodes d'examen parlementaire proposées dans des projets de loi tels que le projet de loi S‑218?
En ce qui concerne l'application de l'ACS+, je crois que M. Flack a mentionné plusieurs exemples de cas où il est essentiel que les experts du secteur des politiques publiques se penchent sur les enjeux d'accès aux divers programmes, services et lois mis en place par le gouvernement. Après tout, ce sont ces mêmes experts qui sont souvent responsables de la conception et du développement de ce genre d'initiatives. Le rapport du comité sénatorial permanent indique qu'il est préférable de confier certaines tâches aux experts qui travaillent dans les différents ministères.
Par ailleurs, les personnes qui gravitent dans le milieu universitaire dans ce domaine le disent très clairement: les experts sont les mieux placés pour conseiller les dirigeants politiques sur la manière d'appliquer l'ACS+.
Monsieur Flack, vous avez mentionné lors de vos remarques préliminaires que le renforcement des capacités pour la collecte des données est toujours en cours et reste un défi. Est‑ce dû à des enjeux liés à la dotation?
Nous avons entendu dire qu'il était essentiel pour le gouvernement de disposer de données désagrégées. Pourriez-vous nous mettre à jour par rapport à ce dossier?
Comme je l'ai indiqué dans mes réponses précédentes, il faut étudier cette question programme par programme, car les données pertinentes varient souvent d'un programme à l'autre. Il faut éviter de se contenter d'une poignée de données générales qui ne nous permettent pas nécessairement d'obtenir les renseignements dont nous avons besoin pour analyser chaque programme. Nous devons préparer une stratégie pour chaque programme, ce qui implique souvent de débloquer des fonds.
L'un des principaux obstacles demeure la capacité de lier les données propres à un programme aux données plus générales colligées par Statistique Canada, qui se rapportent à la population dans son ensemble. Comme l'a indiqué Mme McRae, nous avons observé de réels progrès chez Statistique Canada, qui a réalisé des investissements considérables dans ce dossier.
En effet, des progrès constants ont été réalisés en ce qui concerne les données désagrégées, mais, comme l'indique le Bureau du vérificateur général, nous ne sommes pas encore au bout de nos peines. Il y a encore beaucoup de chemin à faire. À titre d'ancien gestionnaire de programmes ministériels, je suis bien placé pour dire que des obstacles systémiques demeurent, outre le manque de ressources.
Prenons par exemple l'enjeu de la protection de la vie privée. Les avocats s'empressent en général d'avertir leurs clients que la collecte de données constitue une violation de la vie privée. C'est ce qui nous a motivés à présenter des lignes directrices visant à aider les ministères à composer avec ces enjeux épineux.
Comme je l'ai indiqué dans une réponse précédente, je suis d'avis qu'il faut vérifier auprès des communautés concernées si elles sont d'accord avec la collecte des données. Il arrive parfois que certaines communautés s'opposent à la collecte des données, et qu'il faille se plier à leur demande, même si cela risque de limiter notre pleine compréhension des répercussions du programme. Dans certains cas, les personnes concernées estiment que le gouvernement s'intéresse indûment à certaines de leurs caractéristiques.
Ce sont là quelques-uns des obstacles les plus fréquents. Je dirais que les choses s'améliorent chaque année, mais je suis d'avis que nous ne parviendrons jamais à faire en sorte que chaque programme dispose de données entièrement fiables et désagrégées. Je pense qu'il y aura toujours certains domaines où, pour la troisième raison que j'ai résumée, nous ne serons pas en mesure d'obtenir toutes les données désagrégées que nous souhaitons.
Je suis ravie que nous revenions à l'objectif de l'ACS+. Comme je l'ai dit, l'ACS+ est un outil dont se sert le gouvernement pour améliorer sa compréhension de divers enjeux, et adapter ses programmes et ses services aux besoins de la population canadienne dans toute sa diversité.
La population canadienne et ses besoins évoluent constamment, et notre travail doit donc évoluer lui aussi. Nos programmes et nos services doivent être conçus et mis en place pour répondre aux besoins spécifiques des Canadiens d'aujourd'hui et de demain. Au‑delà des différences rudimentaires entre les femmes et les hommes, nous devons mieux comprendre les spécificités de chaque groupe de femmes, ainsi que la nature des différents systèmes qui les entourent.
J'aimerais attirer votre attention sur les systèmes qui façonnent notre société. La notion d'intersectionnalité est souvent comprise comme un ensemble d'identités différentes. Je suis d'avis qu'il est fondamental d'étudier les structures, les institutions et les systèmes avec lesquels les gens interagissent. M. Flack a introduit un excellent exemple, à savoir que de nombreuses personnes 2ELGBTQI ont manifesté un malaise par rapport à la collecte de leurs renseignements personnels. Pourquoi est‑ce le cas? Ces personnes ont peut-être déjà vécu de mauvaises expériences lors d'interactions avec le gouvernement et d'autres institutions, et peuvent être sur leur garde.
En résumé, je pense qu'il faut éviter de porter notre attention uniquement sur l'identité de chaque personne, et nous pencher également sur l'influence considérable des systèmes, des institutions et des structures à travers lesquels les gens évoluent. Nous serons ainsi à même de constater différentes variations en fonction des diverses communautés qui composent la population dans son ensemble.
Je tiens à remercier tous nos témoins d'être venus aujourd'hui. Ce fut grandement apprécié. Nous avons un peu dépassé le temps qui nous était imparti, mais je voulais m'assurer d'avoir assez de marge de manœuvre pour mener une discussion approfondie.
Je vais maintenant permettre aux témoins de quitter la réunion.
Pour les autres personnes présentes dans la salle, nous allons suspendre la séance pour poursuivre à huis clos. Je demanderais également aux personnes qui n'ont pas d'affaires à présenter au Comité de quitter la réunion.