:
Je déclare la séance ouverte.
Bonjour à toutes et à tous.
[Traduction]
Je signale aux membres du Comité que nous devons absolument nous arrêter à 17 h 30 pour les ressources de la Chambre. C'est un simple rappel. Nous ne pouvons pas dépasser 17 h 30.
Je vais ouvrir la séance, madame Shanahan, puis je vous donnerai tout de suite la parole.
[Français]
Bienvenue à la 49e réunion du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(3) du Règlement, le Comité se réunit aujourd'hui dans le cadre de son étude sur le document intitulé « Rapport 4: Les obstacles systémiques — Service correctionnel Canada ».
[Traduction]
Bienvenue à nos témoins.
Accueillons, du Bureau du vérificateur général, Karen Hogan, vérificatrice générale, Carol McCalla, directrice principale, et Steven Mariani, directeur. Accueillons également, du Service correctionnel du Canada, Anne Kelly, commissaire, Alain Tousignant, sous-commissaire principal, et Larry Motiuk, commissaire adjoint, Politiques.
Chacune de ces réunions est importante et, bien sûr, quand il se produit un imprévu, il y a toujours le risque d'avoir à basculer aux travaux du Comité. La semaine prochaine, évidemment, nous aborderons la question des eaux arctiques, puis celle de la cybersécurité.
Je crois que nous devrions passer aux travaux du Comité aujourd'hui. Nous avons reçu une lettre de la vérificatrice générale qui, à mon avis, mérite d'être soulignée et qui porte sur les prochaines étapes.
J'ai prévu 20 minutes à la fin, mais, s'il y a encore des questions, je ne m'arrêterai pas 20 minutes plus tôt. Si nous avons du temps, nous passerons aux travaux du Comité. Il y sera question de la lettre de la vérificatrice générale, qui est en fait une réitération d'une réponse que nous avons reçue la semaine dernière, et il y a une motion sur le point d'être présentée. Compte tenu de l'échéance obligatoire de 17 h 30 — et je sais que certains membres du Comité sont très doués pour dépasser les délais —, je n'ai pas l'intention d'accorder de temps à ce débat. Il s'agit simplement de discuter de cette lettre.
Ce que vous demandez ne fait que repousser l'inévitable à lundi prochain. Je préférerais que nous en discutions aujourd'hui.
:
Y a‑t‑il consentement unanime pour reporter les travaux du Comité à la semaine prochaine?
Je n'ai pas l'intention de le proposer de mon propre chef, mais, s'il y a consentement unanime, je le ferai. Sinon, continuons.
Comme il n'y a pas d'opposition, je vais reporter les 20 minutes consacrées aux travaux du Comité à la fin de la réunion de lundi, qui sera également publique.
Merci à tous de votre patience.
Madame Hogan, vous avez la parole pour cinq minutes. Allez‑y, je vous en prie.
:
Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de discuter de notre rapport sur les obstacles systémiques, qui a été déposé à la Chambre des communes le 31 mai 2022. Je tiens à reconnaître que cette audience se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe. Je suis accompagnée aujourd'hui de Carol McCalla et de Steven Mariani, qui étaient responsables de l'audit.
Dans cet audit, nous avons examiné si Service correctionnel Canada répondait aux besoins diversifiés de sa population carcérale. Nous avons constaté que Service correctionnel Canada n'avait pas réussi à cerner ni à éliminer les obstacles systémiques qui continuaient à défavoriser certains groupes de personnes détenues. La surreprésentation des détenus autochtones et noirs s'est aggravée en raison de la classification à un niveau de sécurité supérieur, du retard de la prestation des programmes correctionnels et de l'accès retardé à la libération conditionnelle.
Nous avions soulevé des enjeux semblables en 2015, en 2016 et en 2017, et le présent audit a relevé que Service correctionnel Canada en avait peu fait pour remédier aux différences dans les résultats correctionnels, particulièrement en ce qui concerne les délinquantes et délinquants autochtones et noirs.
Nous avons aussi constaté que les femmes autochtones étaient placées dans un établissement à sécurité maximale à un taux trois fois plus élevé par rapport aux femmes non autochtones, et qu'elles représentaient presque 70 % des placements à sécurité maximale.
La fiabilité de l'Échelle de classement par niveau de sécurité qu'utilise Service correctionnel Canada pour déterminer la cote de sécurité initiale n'avait pas été validée depuis 2012, et elle n'avait jamais été validée pour évaluer les délinquantes et délinquants noirs. Nous avons constaté que le personnel correctionnel dérogeait souvent aux résultats de l'Échelle de classement en attribuant une cote de sécurité plus élevée aux délinquantes et délinquants autochtones sans vraiment tenir compte des particularités culturelles ou axées sur la justice réparatrice.
Les programmes correctionnels visent à préparer les personnes détenues pour une mise en liberté conditionnelle en toute sécurité et à favoriser leur réinsertion sociale. Nous avons constaté une dégradation continue de l'accès en temps opportun aux programmes correctionnels pour tous les groupes de délinquants par rapport à nos audits antérieurs. Cette dégradation a empiré pendant la pandémie de COVID‑19. En date de décembre 2021, seulement 6 % des hommes détenus avaient achevé les programmes dont ils avaient besoin avant leur première date d'admissibilité à une libération conditionnelle.
[Français]
Même si la majorité des personnes détenues avaient été remises en liberté conditionnelle avant la fin de leur peine, les délinquants autochtones étaient restés en détention plus longtemps que les autres et dans des établissements à sécurité plus élevée jusqu'à leur remise en liberté.
Depuis le début de la pandémie, les personnes autochtones et les personnes noires détenues étaient plus susceptibles d'être remises en liberté à leur date de libération d'office. Les personnes autochtones et les personnes noires détenues étaient aussi plus susceptibles d'être libérées directement dans la collectivité à partir d'établissements à sécurité maximale.
Les femmes autochtones représentaient les deux tiers des détenues libérées d'établissements à sécurité maximale pour les femmes et ne pouvaient donc pas profiter d'une réinsertion progressive dans la collectivité qui aurait favorisé la réussite de leur réinsertion sociale.
En ce qui concerne son effectif, le Service correctionnel du Canada n'a pas déployé les efforts suffisants pour favoriser une plus grande équité, diversité et inclusion. Il s'était engagé à établir un effectif qui reflète la diversité de la population de délinquants, mais il n'avait pas encore établi de plan pour combler les écarts de représentation au sein de son effectif.
Nous avons notamment constaté des écarts de représentation au sein de l'effectif des établissements en ce qui a trait aux délinquantes et délinquants autochtones et noirs, ainsi que des écarts de représentation des femmes au sein de l'effectif des établissements pour femmes.
Il s'agit de notre quatrième audit depuis 2015. Il montre des résultats préoccupants et qui s'aggravent pour différents groupes de délinquants. Service correctionnel Canada a pris peu de mesures concrètes pour modifier les politiques, procédures et pratiques d'apparence neutre qui produisent des résultats.
En novembre 2020, Service correctionnel Canada avait reconnu l'existence d'un racisme systémique dans le système correctionnel. Il est grand temps qu'il élimine les obstacles systémiques relevés dans notre rapport.
Ceci met fin à ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux de répondre aux questions du Comité.
Bon après-midi, monsieur le président et membres du Comité.
Je tiens aussi à souligner que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
Aujourd'hui, je suis accompagnée de MM. Alain Tousignant et Larry Motiuk. C'est avec plaisir que je comparais aujourd'hui avec mes collègues pour discuter des mesures que nous avons prises en réponse au rapport de la vérificatrice générale portant sur les obstacles systémiques. Je remercie la vérificatrice générale et son bureau de leurs recommandations, qui ont toutes été acceptées.
Aujourd'hui, je vais me concentrer sur les points saillants des progrès que nous avons accomplis à ce jour. Ce rapport, ainsi que les incidents rapportés dans les nouvelles, nous rappellent l'existence du racisme et des obstacles systémiques dans le système de justice pénale et le fait que nous devons collectivement en faire plus.
Depuis que je suis devenue commissaire, j'ai donné pour priorité au Service correctionnel du Canada de créer une organisation sécuritaire, respectueuse, diversifiée et inclusive. Le Service continue d'en faire une priorité tout en redoublant d'efforts pour atténuer les perturbations opérationnelles causées par la pandémie.
[Traduction]
Cela comprend des mesures concernant la surreprésentation des délinquants autochtones et noirs dans le système correctionnel fédéral. Nous savons que le taux d'admission des Autochtones dans les établissements fédéraux continue d'augmenter, et cela dure depuis 10 ans. Par exemple, l'an dernier, les délinquants autochtones représentaient 35 % des admissions.
Le SCC ne peut pas influencer les décisions qui amènent des délinquants sous notre garde, mais il nous incombe d'améliorer les résultats en leur offrant des possibilités de réadaptation efficace. Nous avons mis en œuvre un certain nombre d'initiatives à cet égard et nous sommes en train d'embaucher un sous-commissaire pour les Autochtones.
Nous sommes également en train d'élaborer une stratégie nationale pour les délinquants noirs, pour circonscrire de nouvelles manières d'aborder ce que vivent les délinquants noirs et les obstacles auxquels ils se heurtent.
Je trouve encourageant que nos efforts donnent des résultats positifs. Par exemple, en 2021‑2022, un pourcentage élevé de délinquants autochtones et noirs n'avaient pas été réincarcérés dans un établissement fédéral cinq ans après la fin de leur peine.
Dans son rapport, la vérificatrice générale a soulevé des préoccupations au sujet de l'échelle de classement par niveau de sécurité du SCC. L'ECNS est l'un des éléments d'un processus systématique et complet d'attribution d'un premier niveau de sécurité aux délinquants sous responsabilité fédérale, mais il ne définit pas la décision de placement définitif. Outre les études en cours pour s'assurer que nos instruments actuariels sont fiables et légitimes, le SCC a signé un protocole d'entente avec l'Université de Regina, qui travaille de façon indépendante à l'élaboration d'un processus de classification de sécurité tenant compte de la situation des Autochtones et des différences entre les sexes.
En collaboration avec quatre experts externes, le SCC est également en train d'entreprendre un vaste exercice visant à confirmer l'échelle de classement par niveau de sécurité appliquée aux délinquants noirs de sexe masculin et à la reconfirmer pour les femmes et pour les Autochtones.
L'un des moyens de mieux répondre aux besoins des délinquants est d'offrir des programmes. Les résultats indiquent que les programmes du SCC sont tout aussi efficaces dans un large éventail de groupes ethniques. Les délinquants qui participent à des programmes sont moins susceptibles de récidiver que les non-participants, quelle que soit leur origine ethnique.
Cependant, comme la vérificatrice générale l'a indiqué, l'accès en temps opportun est essentiel. La priorité est donnée aux délinquants qui purgent de courtes peines et dont les besoins sont définis. En fait, nous avons déjà constaté une augmentation du pourcentage de ceux qui terminent leur programme avant leur première mise en liberté. Nous avons également un programme correctionnel virtuel qui permettra de moderniser l'établissement du calendrier des programmes, l'aiguillage et les affectations et qui, en fin de compte, permettra aux délinquants d'avoir plus facilement accès en temps opportun aux programmes correctionnels et de les terminer.
[Français]
En plus des mesures que je viens de mentionner, nous nous efforçons de mieux refléter la diversité de la population de délinquants parmi le personnel qui travaille auprès d'eux.
Le Service correctionnel du Canada s'est fixé des objectifs ambitieux de représentation des Autochtones et des minorités visibles au sein de son effectif, lesquels tiennent compte de la population de délinquants dans chacune de nos installations.
Le Service officialise aussi ses objectifs en matière de représentation des sexes au sein des établissements pour femmes. À l'heure actuelle, dans les cinq établissements pour femmes et les pavillons de ressourcement pour femmes, tous les postes de direction sont occupés par des femmes, dont des Autochtones et des membres des minorités visibles. De plus, 75 % des intervenants de première ligne, dans nos établissements pour femmes, sont des femmes.
Depuis la publication du rapport de la vérificatrice générale, nous avons mené un examen des systèmes d'emploi, dont les résultats ont orienté l'élaboration de notre plan exhaustif sur l'équité en matière d'emploi, la diversité et l'inclusion.
[Traduction]
En conclusion, je dirais que les dernières années ont été difficiles. Je tiens à remercier tous nos employés pour leur travail acharné, leur dévouement et leur engagement à mesure que nous continuons à jongler avec de nombreuses priorités et à réaliser d'importants progrès sur de nombreux fronts.
Comme commissaire, je reste déterminée à faciliter l'obtention de résultats positifs pour les Autochtones, les Noirs et les autres Canadiens racisés dans le système correctionnel. Il s'agit notamment de prendre des mesures concrètes pour donner suite aux recommandations formulées par la vérificatrice générale, l'enquêteur correctionnel et d'autres organismes consultatifs externes afin de favoriser une évolution positive durable.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui et de tout le travail qu'ils ont mis dans ce rapport.
Avant de poser mes questions, je tiens à informer les témoins et les autres membres du Comité que je me présente ici aujourd'hui avec 30 ans d'expérience comme procureur de la Couronne avant mon élection en 2021. J'étais dans les tranchées et je m'occupais du racisme systémique dans le système de justice pénale.
Ma première question s'adresse à vous, madame Kelly. Votre exposé portait sur le système de justice pénale en général, mais cette étude porte sur le rapport de la vérificatrice générale concernant le Service correctionnel. Reconnaissez-vous par ailleurs que les tribunaux et les procureurs de tout le pays prennent activement des mesures pour réduire le taux de surincarcération des détenus autochtones — hommes, femmes et jeunes — et des détenus noirs — hommes, femmes et jeunes — par le biais de tribunaux spécialisés, comme les tribunaux autochtones, les tribunaux spécialisés en matière de gangs dans certains grands centres et autres initiatives de ce genre? Le reconnaissez-vous?
:
À l'heure actuelle, 32 % de la population carcérale est autochtone. Du côté des femmes, la proportion est de 47 %. Le nombre de détenus noirs a diminué. La proportion est passée de 9,2 à 8,7 %.
Depuis 2017, nous avons pris un certain nombre d'initiatives. Par exemple, pour les délinquants autochtones, nous avons créé des centres d'intervention spécifiques dans certains de nos établissements. Cela leur permet d'accéder plus tôt à des programmes. Concernant les libérations en vertu de l'article 84, quand on fait participer la communauté autochtone, cela commence dès l'admission dans un établissement fédéral. Essentiellement, ils travaillent avec un agent de liaison communautaire autochtone s'ils veulent retourner dans leur communauté.
Nous avons aussi les Sentiers autochtones dans nos établissements. Le programme peut être organisé dans l'établissement même pour permettre aux détenus de continuer à pratiquer leurs activités culturelles et leurs traditions. Nous avons des programmes pour les Autochtones qui sont adaptés à leur culture. De plus, lorsqu'ils ont terminé un programme adapté, on procède automatiquement à un examen de leur cote de sécurité. Nous avons aussi des cercles de guérison. Lorsque les détenus se présentent devant la Commission des libérations conditionnelles, au lieu d'une audience normale, ils ont un cercle de guérison.
Nous avons fait beaucoup...
:
Je ne suis pas sûre. En fait, cela relève de la Commission des libérations conditionnelles. Mon rôle va de l'application de la peine à la libération.
Par ailleurs, nous avons formé 1 500 employés. Nous avons fait l'exercice général. Tout le comité exécutif l'a fait aussi. En matière de représentation, 10 % de notre personnel est autochtone. Nous avons environ 140 aînés. Nous avons un groupe de travail national d'aînés ainsi qu'un comité consultatif autochtone national. En fait, nous les rencontrerons dans un mois. Nous parlons des obstacles. Nous parlons de ce qui se passe dans l'établissement. Ils me donnent des conseils.
Nous sommes aussi, et c'est important, en train d'embaucher un sous-commissaire pour les Autochtones. Espérons que cela nous aidera à remplir notre mandat.
Je vous assure que nous travaillons d'arrache-pied. Nous avons différentes initiatives qui s'adressent non seulement aux Autochtones, mais à tous les délinquants. Par exemple, nous avons des projets pilotes d'éducation numérique inspirés du programme d'études de la province. Nous avons reçu des commentaires très positifs de la part des délinquants. Nous offrons des programmes virtuels, qui nous permettront de réunir des délinquants de différents établissements. Ce sera une classe. Cela se fera virtuellement, mais avec un enseignant en classe.
Cela nous aidera essentiellement à répondre à la demande de programmes, parce que les programmes sont essentiels au SCC.
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Depuis 50 ans, nous avons fait beaucoup de travail.
Cela fait presque 40 ans que je suis avec le Service correctionnel du Canada. Je crois profondément au mandat d'aider et d'encourager les délinquants à devenir des citoyens respectueux des lois. J'y crois. Ils vont devenir nos voisins, vos voisins, et il est clair que nous voulons qu'ils soient de meilleurs citoyens à leur remise en liberté qu'à leur entrée dans nos établissements. Cela me tient à cœur, ainsi qu'à MM. Tousignant et Motiuk.
Il est clair qu'il y a eu des progrès en 50 ans et je voudrais raconter une histoire qui l'illustre bien. Toutes les semaines, j'envoie des messages au personnel et aux détenus, et plusieurs délinquants m'écrivent. Un jour, un détenu autochtone m'a écrit. Il m'a dit que depuis son arrivée en établissement, il était difficile. Or, sur son chemin, il a rencontré des gens, des éducateurs, des agents correctionnels et des agents de programmes, et il a décidé de changer sa vie. Ce délinquant va bientôt obtenir son baccalauréat en psychologie. Il m'a demandé s'il pouvait revenir à l'établissement pour aider d'autres délinquants autochtones après être retourné dans la collectivité et avoir fait ses preuves. Des histoires comme celle-là, il y en a plein.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis perplexe. Je viens souvent à ce comité, et je trouve que la vérificatrice générale n'arrête pas de rappeler la situation des Autochtones et des Noirs au Canada et le fait que les systèmes ne changent pas.
Comme député, je suis allé rencontrer des gens dans ces établissements. Je suis allé au pénitencier pour femmes d'Edmonton et je leur ai demandé de me parler de leurs besoins. Ces besoins sont importants.
J'écoute mes collègues poser des questions. Le fait est qu'être procureur de la Couronne ne vous donne pas le genre d'éducation qui permettrait de comprendre la situation des Autochtones et comment ils en sont arrivés là. Le problème n'a rien à voir avec les Autochtones et les Noirs. Le problème, c'est la justice canadienne. Le problème, c'est notre système de justice, et non les personnes qui sont laissées pour compte. Le système des pensionnats, la rafle des années 1960, le génocide planifié et ciblé des femmes autochtones — c'est pourtant clair.
Ce n'est pas moi qui le dis. Il n'y a même pas beaucoup d'Autochtones qui le disent. Je veux souligner les propos de la vérificatrice générale aujourd'hui même. J'espère que tous les députés y prêteront attention — je me tourne notamment vers mes collègues conservateurs — et qu'ils écouteront ce que cela dit. Je les entends souvent parler de « sévir contre la criminalité » sans comprendre à qui ils s'en prennent et pourquoi ces gens sont là.
La vérificatrice générale a dit ceci: « Il s'agit de notre quatrième audit depuis 2015 qui montrent des résultats piètres et qui s'aggravent pour différents groupes de délinquants. Service correctionnel Canada a pris peu de mesures concrètes pour modifier les politiques, procédures et pratiques d'apparence neutres qui produisent ces résultats. En novembre 2020, Service correctionnel Canada avait reconnu l'existence de racisme systémique dans le système correctionnel. Il est grand temps qu'il élimine les obstacles systémiques relevés dans notre rapport. »
On parle de personnes réelles. Pourquoi faut‑il tant de temps pour respecter les droits fondamentaux des gens? J'ai regardé ces femmes dans les yeux et je leur ai dit que j'allais essayer d'améliorer leur situation. C'est extrêmement difficile.
Ma question s'adresse au député d'Edmonton-Ouest. Ce pénitencier, le pénitencier pour femmes d'Edmonton, se trouve dans votre coin. Je leur ai demandé...
Une voix: [Inaudible]
M. Blake Desjarlais: Peu m'importe si vous y êtes allé. Je me demande si vous les avez écoutées. Elles demandent de l'aide. Les conditions dans ces prisons sont terribles.
J'ai parlé avec les aînées qui aident là‑bas. Elles sont dépassées — dépassées — parce qu'on demande à chaque aînée de prendre en charge des centaines de personnes.
Madame la commissaire, je ne sais pas comment formuler les choses autrement, mais ces personnes ne sont pas toutes pareilles non plus. Nous avons un pénitencier fédéral pour femmes autochtones pour l'ensemble des Prairies. De Winnipeg à la Saskatchewan en passant par l'Alberta, elles sont entassées dans un même pénitencier, puis sont lâchées dans ma collectivité d'Edmonton Griesbach, où elles se retrouvent sans domicile. Elles se retrouvent sans soutien. Elles sont incitées de commettre des crimes par désespoir et parce qu'elles sont exploitées. C'est simple: nos systèmes, surtout le SCC, les laissent tomber.
Les mots me manquent. Les rapports sont là. Les chiffres sont là. Tout ce que je peux faire, c'est demander que nous considérions ces personnes pour ce qu'elles sont et que nous tenions compte des conditions dans lesquelles elles se trouvent. Elles ne sont pas là parce qu'elles le veulent. Elles sont là parce que notre pays les y a forcées. Que ce soit parce qu'elles ont pris leurs enfants... J'ai parlé à des aînées qui sont dans la prison à sécurité maximale, des femmes âgées qui y sont depuis des décennies, parce qu'elles se sont battues en désespoir de cause pour retrouver leurs enfants et qu'elles n'ont pas réussi à le faire. La première question qu'on m'a posée là‑bas était: « Pouvez-vous m'aider à retrouver ma fille? »
Ce sont des personnes en chair et en os, qui s'ennuient de leurs familles. Elles ne peuvent même pas leur rendre visite, parce qu'elles viennent de Winnipeg. Leurs filles sont portées disparues. Elles veulent parler à leurs familles. C'est l'un des rapports les plus terribles que j'aie eu à lire. Ces femmes ne peuvent plus attendre. Elles vont mourir ici sans jamais revoir leurs familles. Nous devons les aider. Elles ne sont pas là pour des raisons qui relèvent de leur contrôle.
Je vais probablement manquer de temps pour poser des questions, mais j'espère que vous voyez à quel point tout cela est réel. Il a fallu que des gens comme moi se fassent élire pour que ce message se rende jusqu'ici, parce que je ne l'ai encore jamais entendu. J'espère que mes collègues comprennent la nécessité de repenser cet enjeu.
Nous avons besoin d'une politique fédérale qui permette de réformer ces systèmes au lieu de nous contenter de « sévir contre la criminalité », un slogan qui ne fait que contribuer au génocide dans notre pays. Oui, les gens qui enfreignent la loi doivent être punis, mais ceux qui se retrouvent dans cette situation à cause de ce que les Canadiens ont fait... Il faut y réfléchir. Comment les lois canadiennes ont-elles eu un effet disproportionné sur ces gens... ma parenté?
Les rapports Gladue sont des éléments d'information importants. J'espère que les procureurs de la Couronne comprennent aussi la valeur de ces rapports lorsqu'ils cherchent si désespérément à mettre nos gens en prison. Il est important que nous fassions ce travail. Pour nos aînés décédés...
Les appels à l'action de la CVR sont clairs. Plus tard, je vous poserai des questions sur la Commission de vérité et réconciliation et sur ce que vous avez fait...
:
Merci, monsieur le président.
J'apprécie vraiment les propos de mon collègue, M. Desjarlais. Ils sont tout à fait justes. Et sincères.
Je vous en remercie, monsieur. Ce que vous avez dit me touche beaucoup. Mais J'aimerais y apporter une nuance. J'ai poursuivi des Autochtones devant les tribunaux pendant plus de 10 ans. J'ai changé la vie de centaines de délinquants autochtones. J'ai vu des réussites. J'ai connu plus de succès que d'échecs et de tragédies. Je veux simplement dire que les procureurs prennent les rapports Gladue très au sérieux, mais je vous remercie de votre intervention.
Pour revenir à vous, madame Kelly, je venais de formuler une question quand j'ai manqué de temps au premier tour. Je parlais du fait que les gangs sont composés à près de 50 % de Noirs et d'Autochtones. Ces individus commettent des infractions très graves et violentes qui causent du tort aux gens, ils tuent des gens et ils mettent les collectivités en grand danger. Il n'est probablement pas étonnant — et j'espère que vous partagez mon point de vue — que, au moment de leur placement initial dans un établissement fédéral, compte tenu de la nature de la condamnation, qui souvent n'est pas une première, mais la suite d'une série de condamnations pour comportements dangereux... On ne se réveille pas un jour en se disant: « Tiens, je vais me joindre à un gang et je vais tuer quelqu'un. » C'est souvent une série d'erreurs tragiques qui vous font aboutir en prison.
Ce que je veux dire, c'est que les vérificateurs et la vérificatrice générale ne devraient pas s'étonner du fait que le système lui-même classe au niveau maximal des personnes jugées à haut risque. Ne pensez-vous pas?
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de leur présence parmi nous.
Monsieur Desjarlais, sachez que votre exposé préliminaire m'a vraiment touché. Ce n'est pas nouveau pour nous, mais j'admire vraiment le fait que vous ayez un objectif très précis en étant ici, non seulement à ce comité, mais aussi à la Chambre. Ce n'est pas la première fois qu'on en parle, et je vois la constance et la persistance de votre démarche. Je pense que tous les députés ont la même impression.
Venons‑en aux détails.
Commissaire Kelly, quand j'ai lu le rapport, j'ai été frappé par le fait que l'échelle de classement par niveau de sécurité n'a pas été mise à jour depuis 2012 et que celle qui s'applique aux délinquants n'a pas été mise à jour du tout. Pourquoi? Que fait‑on pour changer cela? C'est un outil important pour déterminer le niveau de sécurité.
Madame Kelly, je vous pose donc la même question.
Comme vous l'avez indiqué tantôt, vous avez une bonne représentativité dans certains cas. Cependant, représentativité ne signifie pas compréhension non plus.
L'automne dernier, Radio-Canada rapportait que 498 employés avaient participé à votre formation la plus populaire sur un effectif total de 18 000 personnes. Cela représente une participation de 2,8 %. Il s'agissait de la formation sur les biais culturels autochtones.
Je ne sais pas si ces employés ont compris, mais ils n'étaient pas beaucoup à avoir participé à cette formation. Qu'avez-vous de nouveau à nous apporter à ce sujet?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à remercier mes collègues des deux côtés de leurs questions à mon avis très importantes et de leur patience à l'égard de cette étude très difficile pour moi.
Cela fait longtemps que je suis de l'autre côté de la barrière, et la situation n'a fait qu'empirer. On peut dire ce qu'on veut. On peut dire qu'il y a des améliorations. En réalité, madame la commissaire, vous avez dit quelque chose d'important: le nombre augmente.
Je ne crois pas nécessairement que le Service correctionnel soit à blâmer. Je crois, comme de nombreux Autochtones, qu'il s'agit d'un problème global qui exigera une solution globale. Vous en avez parlé dans votre exposé, et je vous en remercie. Je reconnais également que votre ministère a déjà accepté cela par le passé. En mon absence, votre prédécesseur a accepté ici à trois reprises les recommandations du vérificateur général pour améliorer la situation.
La CVR existe depuis longtemps... depuis votre nomination, et sûrement depuis celle des messieurs qui vous accompagnent. Je ne sais même pas si vous en avez lu le rapport, et j'aimerais le savoir. Que savez-vous de la CVR? Savez-vous ce qu'est l'appel à l'action no 35 de la Commission de vérité et réconciliation?
Monsieur Motiuk, je crois que c'est à vous que je vais poser la question.
:
Merci, monsieur le président.
Il existe une politique. Il existe des objectifs. Il y a la question des valeurs et il y a celle de la mise en œuvre. Nous avons entendu beaucoup de commentaires judicieux et émouvants au sujet de la politique, des idées et des valeurs. En général, notre comité s'intéresse à la mise en œuvre. J'aimerais vraiment approfondir cet aspect dans mes questions.
Depuis huit ans, le gouvernement s'est donné comme objectif stratégique de s'attaquer au problème de la surreprésentation de certaines communautés dans notre système de justice. Il semble, d'après les données, qu'on ne s'en occupe pas. On en parle peut-être. On peut être sincère dans ses motivations. Mais, dans les faits, l'aiguille va dans la mauvaise direction en ce qui concerne les Autochtones. Il faut reconnaître qu'il y a échec de la mise en œuvre.
J'aimerais d'abord poser la question suivante à la vérificatrice générale. Est‑il juste — ou exact — de dire que, malgré les bonnes intentions et même peut-être les déclarations vigoureuses du gouvernement, celui‑ci ne fait aucun progrès concernant la surreprésentation de certaines communautés dans le système de justice pénale?
:
Tout d'abord, nous avons élaboré un cadre d'action ethnoculturel. On donne une certaine formation sur la diversité et sur la compétence culturelle. Les résultats sont bons du point de vue du nombre de participants.
Nous procédons également à des études qualitatives en collaboration avec l'Université de Nipissing. Les chercheurs parlent à des délinquants noirs pour connaître leur vécu. Cela éclairera nos politiques et nos pratiques à venir.
Nous avons aussi un comité consultatif ethnoculturel qui est très actif. Nous nous intéressons aux antécédents sociaux des délinquants noirs. À l'instar des antécédents sociaux des Autochtones, nous examinons les antécédents sociaux des délinquants noirs. C'est quelque chose qui les intéresse beaucoup.
C'est le genre de choses... et la communication avec les communautés. J'ajoute que, du côté des délinquants autochtones comme du côté des délinquants noirs, c'est assez bien structuré dans l'établissement. Ils ont accès aux programmes et aux aînés. Mais, quand ils retournent dans leur communauté, ils peuvent manquer de mesures de soutien. Nous avons également pris des mesures pour faire venir des représentants des communautés dans l'établissement pour qu'ils puissent offrir du soutien au moment de la libération des délinquants.
:
Merci, monsieur Williamson.
Monsieur Desjarlais, je vous remercie de vos observations.
L'un des problèmes relevés lors de mes quelques visites à l'établissement pénitentiaire pour femmes de notre circonscription est l'autorisation de la consommation libre de drogues. Il y a aussi l'autorisation de la présence d'hommes prédateurs. Un gros problème, comme M. Desjarlais l'a dit, est le manque d'établissements dans l'Ouest du Canada. Vous avez parlé du recrutement d'Autochtones. Dans l'Ouest, nous n'avons aucun établissement pour former les employées du SCC. Elles doivent aller dans l'Est.
J'ai adressé une demande au gouvernement il y a deux ans. Aucune réponse. C'est évidemment une question vitale. Un établissement de formation ferait beaucoup pour résoudre certains problèmes systémiques. C'est un exemple parfait d'un problème systémique dont nous sommes au courant et que nous imposons tout de même au réseau.
Le SCC envisage‑t‑il d'implanter un établissement pour recruter et former sur place des Autochtones des Prairies? Prévoit‑on un autre établissement dans l'Ouest du Canada pour éviter de rompre les liens avec la famille? Le soutien familial est très important. Il est impossible pour bon nombre de ces familles, fût‑ce de la Saskatchewan voisine, d'aller rendre visite à des proches et de leur apporter du soutien. Y a‑t‑il des plans en ce sens?
:
Ce qui me préoccupe, c'est la rafle des enfants et ce que le Canada a fait par le passé pour séparer les enfants autochtones de leur famille d'origine. C'est une préoccupation.
Ce que j'ai appris, c'est que la communauté de Kitchener est très favorable aux détenues qui se trouvent là‑bas. Plusieurs employeurs leur offrent des emplois. Certaines femmes peuvent aller travailler dans la collectivité. En particulier, il y a un adorable restaurant qui les soutient, et la Société Elizabeth Fry aussi, mais il n'y a pas de maisons de transition dans notre région pour accueillir ces femmes lorsqu'elles sont libérées, si bien qu'elles sont de nouveau arrachées à leur milieu pour aller encore plus à l'est, à Kingston.
On les éloigne encore plus de tous les services de soutien qui les ont aidées pendant quatre ans ou peu importe le nombre d'années. Elles sont une fois de plus éloignées de leur milieu. Pis encore, pour récupérer leurs enfants, elles doivent prouver qu'elles peuvent les loger. Or, nous savons que, par les temps qui courent, presque personne ne peut y arriver, et c'est encore pire lorsqu'on émerge à peine du système carcéral.
C'est désolant. Bien sûr, ces femmes n'ont pas fait les bons choix, à un moment donné, mais elles risquent de perdre leurs enfants pour toujours à cause d'une erreur de jeunesse. Nous les éloignons de plus en plus de leurs soutiens, à la fois de leur soutien initial et de celui qu'elles ont trouvé chez nous. Il me semble que nous ne faisons qu'aggraver le problème.
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Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier mon collègue du Bloc québécois et tous mes collègues de ce que je considère comme une série de questions très importantes, car il me semble...
Ce que j'entends, c'est que nous nous soucions tous du problème. J'espère sincèrement que nous n'aurons pas à revenir à cet audit tel quel. C'est plus qu'un défi; c'est une exigence. C'est ce qu'exigent la moralité et une compréhension élémentaire du problème.
Je ne suis toujours pas convaincu que le SCC possède les compétences culturelles nécessaires pour faire ce travail correctement. C'est pourquoi tant d'Autochtones se sentent négligés, non entendus. Quelles mesures avez-vous prises pour vous renseigner sur l'histoire de notre pays? Vous avez parlé longuement et évoqué six ou sept fois l'histoire sociale des Autochtones. J'ai précisé au tout début qu'il ne s'agit pas d'un problème autochtone ou noir, mais d'un problème canadien qui tient à la façon dont nous pensons à nos semblables.
La Commission de vérité et réconciliation est claire au sujet de bon nombre de ces résultats, et je voudrais seulement... Prenez cinq minutes pour lire le texte. Prenez cinq minutes. Mémorisez‑le. Des gens sont morts à cause de ces problèmes. Prenez seulement cinq minutes. Il y a sept appels à l'action qui s'adressent à votre ministère. Ce n'est pas beaucoup. Sept appels à l'action. J'ai besoin de pouvoir croire aujourd'hui que, lorsque je quitterai cette salle, vous ferez quelque chose au sujet de votre propre apprentissage et que vous ferez des efforts pour rétablir cette confiance. Je ne serai peut-être pas ici pour toujours. Vous pourrez peut-être attendre mon départ, mais j'espère que vous vous souviendrez aussi longtemps que vous le pourrez, au service des Canadiens, que ce sont de vraies personnes et qu'elles ont le droit à une chance.
Connaissez-vous assez bien l'histoire de notre pays pour comprendre pourquoi ces gens en sont là? Sinon, ça va. Nous pouvons vous aider — les banquettes ministérielles pourront proposer quelque chose et l'opposition donnera son appui. De quelles ressources avez-vous besoin pour changer cela?
Connaissez-vous l'histoire de la colonisation au Canada?
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Oui, et c'est là le problème, commissaire. Les services sont pires. Ils ne donnent rien. Je vous dis que les Autochtones sont laissés pour compte et que quelque chose doit changer. Il faut que cela change au sommet.
Si vous ne croyez pas avoir les ressources nécessaires pour faire ce travail, nous devons le savoir. J'ai besoin de savoir que vous avez confiance et que vous comprenez bien la question. Je vous répète qu'il ne s'agit pas de blâmer qui que ce soit. C'est une question de compréhension. Il y a là un échec. Nous parlons de l'échec de votre ministère, pas de sa réussite. Nous parlons d'un échec qui, objectivement, est abject et flagrant.
Ce n'est pas moi qui le dis. La vérificatrice générale, dont le bureau indépendant est le plus important au Canada, vous a dit à maintes reprises que vous aviez échoué. Il faut que nous puissions avoir confiance. J'en ai besoin — les Autochtones en ont besoin — pour savoir que ces systèmes ne sont pas une imposture, puisque vous pouvez faire appel à une université pour faire le travail qui devrait être fait par les membres des communautés autochtones. Je n'en parlerai pas aujourd'hui, mais j'espère que vous prendrez cela au sérieux. Ce sont les membres de la communauté qui connaissent le mieux la situation.
C'est ce que dit la Commission de vérité et de conciliation, si vous avez lu le rapport. L'appel à l'action 38 est explicite. Il n'y est pas question de consulter les universités. Ni le gouvernement. Ni qui que ce soit d'autre. Il dit qu'il faut trouver des façons de consulter directement les membres de la communauté.
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Merci, monsieur le président.
J'ai une question à poser sur quelque chose qui ne figure pas dans le rapport, soit l'accompagnement spirituel ou les services d'aumônerie dans les prisons. Divers groupes nous ont parlé de l'accès aux services pour les confessions minoritaires. À mon avis, les services d'aumônerie ont toute leur importance. Il faut veiller à ce que les détenus de confessions et de cultures différentes aient accès à des services d'aumônerie qui leur fournissent un soutien spirituel.
Je ne cite pas souvent Nietzsche en des termes élogieux, mais il a vu juste lorsqu'il a dit que celui qui a une raison de vivre peut supporter presque n'importe quoi. Le sentiment que la vie a un sens, que sa propre personne a une ultime signification joue un rôle très important dans la réadaptation.
Nous pourrions peut-être commencer par la vérificatrice générale.
Avez-vous été en mesure de relever des inégalités dans l'accès aux services spirituels ou des problèmes de représentation dans la prestation de ces services? Si votre travail n'a pas porté sur cette question, nous passerons ensuite aux représentants du Service correctionnel.
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Merci beaucoup, monsieur Fragiskatos.
Je voudrais continuer à expliquer à quel point il est important de tenir compte de l'avis de ceux que j'ai rencontrés, notamment au sujet de la crise des femmes autochtones assassinées ou disparues. Vous traitez souvent directement avec les femmes dans ces prisons. À propos de celle que j'ai visitée, celle dont M. McCauley a parlé et qu'il a visitée lui aussi, nous avons entendu les mêmes choses, j'en suis sûr.
L'un des appels à l'action les plus importants, et je tiens vraiment à remercier Mme Bradford d'en avoir parlé, concerne la souffrance qu'éprouvent ces femmes — et j'aurai du mal à en parler — lorsqu'elles sont privées de leurs enfants. Beaucoup de détenues ont des enfants, et elles ne les ont jamais vus depuis qu'elles sont dans le système carcéral. La souffrance psychologique... J'ai demandé tout à l'heure si vous compreniez la colonisation et ses profondes répercussions. La perte de ses enfants... Voilà comment on détruit toute une nation.
L'une des premières choses à faire pour favoriser la guérison est de mettre en place des pavillons traditionnels de ressourcement culturel. C'est incontournable. J'en ai parlé au . Il est venu dans ma circonscription et a visité une autre prison, le Centre de guérison Stan Daniels, une prison à faible sécurité pour hommes. Les hommes en parlent souvent aussi, et je ne veux pas taire le fait que ces hommes souffrent aussi, mais ces femmes passent toute leur vie — c'est une obsession — dans ces établissements à se demander où se trouve leur fille, où se trouvent leurs enfants, à se demander s'ils sont toujours en vie. Certaines ont perdu leurs enfants à cause de la crise des femmes autochtones assassinées ou disparues, et elles ne peuvent même pas assister aux funérailles.
Pourquoi cela ne peut‑il pas changer? Quel est l'obstacle? M. McCauley a demandé pourquoi ne pas mettre en place les ressources dont ces femmes ont besoin. Elles subissent ce genre de traitement depuis des années, voire des décennies. La réconciliation ne sera jamais possible chez nous tant que vous ne prendrez pas conscience de ces éléments de justice fondamentaux et n'y serez pas profondément sensibles. Imaginez que vous n'alliez plus jamais revoir vos enfants. Quelle douleur pour toute une nation à qui cette souffrance a été infligée. Après cela, à quoi bon vivre?
C'est un système punitif qui fait du mal aux Autochtones. J'ai besoin de savoir ce que vous allez faire pour mettre en place des pavillons de ressourcement traditionnels, instaurer un modèle de justice réparatrice que des personnes meilleures, plus intelligentes et plus sages que moi ont réclamé, un modèle que des nations comme la mienne ont bâti... Les nations ont survécu pendant des milliers d'années jusqu'à la dernière centaine d'années, disons. Le système autochtone a été détruit et remplacé par un régime punitif comme celui‑ci. C'est catastrophique. Quelles mesures prenez-vous pour instaurer le modèle de justice réparatrice que réclament les femmes, les hommes, les personnes bispirituelles et les non binaires autochtones...? C'est ce qu'ils demandent.
Il faut qu'ils sachent quel sera votre plan d'action pour la construction de ces pavillons de ressourcement traditionnels. S'il y a un problème de ressources, veuillez nous le dire, madame la commissaire.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à tous les témoins d'être là.
Peut-être pourrions-nous prendre un peu de recul et considérer la situation dans son ensemble.
Le fait qu'on parle de Service correctionnel Canada suppose que quelque chose a mal tourné au départ. Autrement, il n'y aurait rien à corriger. Pourriez-vous prendre du recul et considérer la situation dans son ensemble, réfléchir à toutes vos années d'expérience dans ce secteur et dire au Comité ce qu'on pourrait faire pour que ceux qui ont maille à partir avec le système de justice soient moins nombreux, au départ?
Il serait bien qu'il n'y ait pas de crimes au départ, que nous n'ayons pas 15 000 personnes incarcérées au Canada.
Que pouvons-nous faire? Avons-nous besoin d'offrir une meilleure éducation, de faire reculer davantage la pauvreté? Que peut‑on faire?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à dire à quel point je comprends les propos que notre collègue, M. Desjarlais, a tenu aujourd'hui, notamment lorsqu'il a expliqué que le problème ne se limite pas à la marginalisation des Autochtones; c'est aussi une question de justice. Selon moi, le système de justice réparatrice que nous avons eu la chance de connaître grâce au membres des Premières Nations peut transformer notre système de justice et il le fera.
Cela dit, nous parlons aujourd'hui d'obstacles systémiques. Je voudrais donc poser une question à la vérificatrice générale.
Voici l'une de vos recommandations, madame Hogan: « Service correctionnel Canada devrait améliorer sa méthode de collecte des données sur la diversité au sein de la population de détenus afin d’avoir l’assurance que les données recueillies sont exhaustives. Il devrait aussi harmoniser sa méthode de collecte avec celle de Statistique Canada. » Pourquoi?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à mon collègue du Bloc de m'accorder plus de temps pour m'assurer que les Canadiens comprennent vraiment les conditions qui règnent dans ces établissements.
Je serai direct: je souhaiterais plus de franchise de la part de la commissaire et, je dirais, plus de transparence, au sujet de l'état de ces établissements et des ressources qu'ils reçoivent. De toute ma vie, ayant travaillé avec des Autochtones et vécu avec eux, je n'ai jamais rencontré personne qui ait eu l'occasion de suivre le parcours de guérison qu'il souhaitait. Nous avons encore beaucoup à faire. Nous commençons à peine à acquérir une compréhension de l'histoire de notre pays qui nous permettrait d'instaurer la justice et l'égalité des chances en toute équité, étant donné les traumatismes de notre passé.
L'appel à l'action 36 de la Commission de vérité et réconciliation porte sur les survivants des violences sexuelles. Entre violence sexuelle et colonialisme, l'intersectionnalité est frappante. Il suffit de demander à bon nombre des survivants des pensionnats de parler de leur expérience. Des enfants très vulnérables ont été exploités à cause des politiques du Canada. Cette forme d'injustice est encore omniprésente dans notre population aujourd'hui. Peu d'accusations ont été portées au pénal contre les auteurs de ces violences. Bon nombre d'entre eux sont encore vivants, libres de circuler au Canada, tandis que les femmes qui ont été leurs victimes doivent rester en prison.
L'appel à l'action vous demande d'examiner les effets de ces sévices, d'offrir des ressources et des soutiens pour les survivants de violences sexuelles et d'en tenir compte dans votre compréhension des expériences qu'ils ont vécues.
Notre système de justice est injuste. Inutile de vous le dire, madame la commissaire Kelly. Vous le savez. Vous devez composer avec les regrettables réalités d'un système de justice défaillant, et votre rôle est l'un des plus difficiles qui soient dans notre pays. Vous devez tenter de trouver le moyen de travailler à la guérison des êtres, après que le Canada a fait tant de mal. Si vous avez discuté avec les femmes en cause, vous savez probablement le sentiment de profonde injustice qu'elles ressentent. Elles ont été constamment agressées tout au long de leur vie, et elles se retrouvent là, alors que les agresseurs se promènent en toute liberté.
Il est clair que les Autochtones et les Noirs sont surreprésentés dans le système carcéral, mais celui‑ci doit aussi trouver le moyen de montrer que ces personnes ont une vie marquée par des traumatismes et sont contraintes par nos politiques...
Je crains que ce ne soit tout pour aujourd'hui. Merci à tous de leur participation et de leurs propos très sentis. Merci encore de l'esprit de coopération dont les membres du Comité ont fait preuve en partageant leur temps de parole.
Je tiens à remercier la commissaire et son équipe, ainsi que la vérificatrice générale et son équipe, d'avoir comparu.
Je souligne également que nous accueillons une délégation de plusieurs pays — le Sénégal, le Rwanda et le Vietnam —, et j'invite les membres du Comité à patienter quelques minutes. Nous aimerions faire une photo avec ces vérificateurs et, je crois, ces législateurs, qui sont ici pour apprendre ce que j'appellerais les « pratiques exemplaires » en matière d'audit.
Bienvenue dans l'hiver glacial du Canada. En fait, vous êtes arrivé à un moment où la température est clémente. La semaine dernière, il faisait ‑25 ° C. Aujourd'hui, il doit faire autour de zéro.
Je lève la séance et je prie de nouveau les membres du Comité de rester quelques minutes encore. Merci.