Passer au contenu

PACP Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des comptes publics


NUMÉRO 049 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 février 2023

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Français]

     Bonjour à toutes et à tous.

[Traduction]

     Je signale aux membres du Comité que nous devons absolument nous arrêter à 17 h 30 pour les ressources de la Chambre. C'est un simple rappel. Nous ne pouvons pas dépasser 17 h 30.
    Je vais ouvrir la séance, madame Shanahan, puis je vous donnerai tout de suite la parole.

[Français]

    Bienvenue à la 49e réunion du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.
    Conformément à l'article 108(3) du Règlement, le Comité se réunit aujourd'hui dans le cadre de son étude sur le document intitulé « Rapport 4: Les obstacles systémiques — Service correctionnel Canada ».

[Traduction]

    Bienvenue à nos témoins.
    Accueillons, du Bureau du vérificateur général, Karen Hogan, vérificatrice générale, Carol McCalla, directrice principale, et Steven Mariani, directeur. Accueillons également, du Service correctionnel du Canada, Anne Kelly, commissaire, Alain Tousignant, sous-commissaire principal, et Larry Motiuk, commissaire adjoint, Politiques.
     Madame Shanahan, comment voulez-vous que je procède? Voulez-vous que je vous donne la parole ou voulez-vous d'abord entendre les témoins?
    Est‑ce un rappel au Règlement?
    C'est au sujet de l'ordre du jour.
    Allez‑y. Vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Nous avons tous reçu l'avis de convocation modifié qui demande de réserver 20 minutes à la fin de la réunion.
    Je dois dire qu'il y a eu des discussions — quoique pas avec tout le monde — sur l'importance de cette réunion. Nous voulons entendre les témoins et nous voulons avoir tout notre temps — ce à quoi vous avez bien veillé durant nos réunions précédentes — pour avoir des séries de questions complètes. Je ne veux pas m'étendre sur le sujet, mais je pense que d'autres députés seront d'accord avec moi.
    Si nous pouvions reporter les travaux du Comité à lundi, nous pourrions entendre tous les témoins aujourd'hui.
    Je vais vous répondre.
    Chacune de ces réunions est importante et, bien sûr, quand il se produit un imprévu, il y a toujours le risque d'avoir à basculer aux travaux du Comité. La semaine prochaine, évidemment, nous aborderons la question des eaux arctiques, puis celle de la cybersécurité.
    Je crois que nous devrions passer aux travaux du Comité aujourd'hui. Nous avons reçu une lettre de la vérificatrice générale qui, à mon avis, mérite d'être soulignée et qui porte sur les prochaines étapes.
    J'ai prévu 20 minutes à la fin, mais, s'il y a encore des questions, je ne m'arrêterai pas 20 minutes plus tôt. Si nous avons du temps, nous passerons aux travaux du Comité. Il y sera question de la lettre de la vérificatrice générale, qui est en fait une réitération d'une réponse que nous avons reçue la semaine dernière, et il y a une motion sur le point d'être présentée. Compte tenu de l'échéance obligatoire de 17 h 30 — et je sais que certains membres du Comité sont très doués pour dépasser les délais —, je n'ai pas l'intention d'accorder de temps à ce débat. Il s'agit simplement de discuter de cette lettre.
    Ce que vous demandez ne fait que repousser l'inévitable à lundi prochain. Je préférerais que nous en discutions aujourd'hui.
    Nous avons deux réunions sur la question des eaux arctiques, et j'estime donc qu'il y a plus de temps pour ce sujet que ce que nous avons aujourd'hui.
    Je me tourne vers les députés. Je demande s'ils sont d'accord. Nous aimerions garder cela...

[Français]

    Nous voulons toute la réunion aujourd'hui. J'en ai parlé avec Mme Sinclair‑Desgagné et elle est d'accord pour dire que la réunion d'aujourd'hui est très importante.

[Traduction]

    Y a‑t‑il consentement unanime pour reporter les travaux du Comité à la semaine prochaine?
    Je n'ai pas l'intention de le proposer de mon propre chef, mais, s'il y a consentement unanime, je le ferai. Sinon, continuons.
    Comme il n'y a pas d'opposition, je vais reporter les 20 minutes consacrées aux travaux du Comité à la fin de la réunion de lundi, qui sera également publique.
    Merci à tous de votre patience.
    Madame Hogan, vous avez la parole pour cinq minutes. Allez‑y, je vous en prie.
(1535)
    Monsieur le président, je vous remercie de nous donner l'occasion de discuter de notre rapport sur les obstacles systémiques, qui a été déposé à la Chambre des communes le 31 mai 2022. Je tiens à reconnaître que cette audience se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe. Je suis accompagnée aujourd'hui de Carol McCalla et de Steven Mariani, qui étaient responsables de l'audit.
    Dans cet audit, nous avons examiné si Service correctionnel Canada répondait aux besoins diversifiés de sa population carcérale. Nous avons constaté que Service correctionnel Canada n'avait pas réussi à cerner ni à éliminer les obstacles systémiques qui continuaient à défavoriser certains groupes de personnes détenues. La surreprésentation des détenus autochtones et noirs s'est aggravée en raison de la classification à un niveau de sécurité supérieur, du retard de la prestation des programmes correctionnels et de l'accès retardé à la libération conditionnelle.
    Nous avions soulevé des enjeux semblables en 2015, en 2016 et en 2017, et le présent audit a relevé que Service correctionnel Canada en avait peu fait pour remédier aux différences dans les résultats correctionnels, particulièrement en ce qui concerne les délinquantes et délinquants autochtones et noirs.
    Nous avons aussi constaté que les femmes autochtones étaient placées dans un établissement à sécurité maximale à un taux trois fois plus élevé par rapport aux femmes non autochtones, et qu'elles représentaient presque 70 % des placements à sécurité maximale.
    La fiabilité de l'Échelle de classement par niveau de sécurité qu'utilise Service correctionnel Canada pour déterminer la cote de sécurité initiale n'avait pas été validée depuis 2012, et elle n'avait jamais été validée pour évaluer les délinquantes et délinquants noirs. Nous avons constaté que le personnel correctionnel dérogeait souvent aux résultats de l'Échelle de classement en attribuant une cote de sécurité plus élevée aux délinquantes et délinquants autochtones sans vraiment tenir compte des particularités culturelles ou axées sur la justice réparatrice.
    Les programmes correctionnels visent à préparer les personnes détenues pour une mise en liberté conditionnelle en toute sécurité et à favoriser leur réinsertion sociale. Nous avons constaté une dégradation continue de l'accès en temps opportun aux programmes correctionnels pour tous les groupes de délinquants par rapport à nos audits antérieurs. Cette dégradation a empiré pendant la pandémie de COVID‑19. En date de décembre 2021, seulement 6 % des hommes détenus avaient achevé les programmes dont ils avaient besoin avant leur première date d'admissibilité à une libération conditionnelle.

[Français]

     Même si la majorité des personnes détenues avaient été remises en liberté conditionnelle avant la fin de leur peine, les délinquants autochtones étaient restés en détention plus longtemps que les autres et dans des établissements à sécurité plus élevée jusqu'à leur remise en liberté.
    Depuis le début de la pandémie, les personnes autochtones et les personnes noires détenues étaient plus susceptibles d'être remises en liberté à leur date de libération d'office. Les personnes autochtones et les personnes noires détenues étaient aussi plus susceptibles d'être libérées directement dans la collectivité à partir d'établissements à sécurité maximale.
    Les femmes autochtones représentaient les deux tiers des détenues libérées d'établissements à sécurité maximale pour les femmes et ne pouvaient donc pas profiter d'une réinsertion progressive dans la collectivité qui aurait favorisé la réussite de leur réinsertion sociale.
    En ce qui concerne son effectif, le Service correctionnel du Canada n'a pas déployé les efforts suffisants pour favoriser une plus grande équité, diversité et inclusion. Il s'était engagé à établir un effectif qui reflète la diversité de la population de délinquants, mais il n'avait pas encore établi de plan pour combler les écarts de représentation au sein de son effectif.
    Nous avons notamment constaté des écarts de représentation au sein de l'effectif des établissements en ce qui a trait aux délinquantes et délinquants autochtones et noirs, ainsi que des écarts de représentation des femmes au sein de l'effectif des établissements pour femmes.
    Il s'agit de notre quatrième audit depuis 2015. Il montre des résultats préoccupants et qui s'aggravent pour différents groupes de délinquants. Service correctionnel Canada a pris peu de mesures concrètes pour modifier les politiques, procédures et pratiques d'apparence neutre qui produisent des résultats.
    En novembre 2020, Service correctionnel Canada avait reconnu l'existence d'un racisme systémique dans le système correctionnel. Il est grand temps qu'il élimine les obstacles systémiques relevés dans notre rapport.
(1540)
     Ceci met fin à ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux de répondre aux questions du Comité.
    Merci beaucoup, madame Hogan.

[Traduction]

     Commissaire Kelly, vous avez la parole pour cinq minutes. Allez‑y, je vous en prie.

[Français]

    Bon après-midi, monsieur le président et membres du Comité.
    Je tiens aussi à souligner que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.
    Aujourd'hui, je suis accompagnée de MM. Alain Tousignant et Larry Motiuk. C'est avec plaisir que je comparais aujourd'hui avec mes collègues pour discuter des mesures que nous avons prises en réponse au rapport de la vérificatrice générale portant sur les obstacles systémiques. Je remercie la vérificatrice générale et son bureau de leurs recommandations, qui ont toutes été acceptées.
    Aujourd'hui, je vais me concentrer sur les points saillants des progrès que nous avons accomplis à ce jour. Ce rapport, ainsi que les incidents rapportés dans les nouvelles, nous rappellent l'existence du racisme et des obstacles systémiques dans le système de justice pénale et le fait que nous devons collectivement en faire plus.
    Depuis que je suis devenue commissaire, j'ai donné pour priorité au Service correctionnel du Canada de créer une organisation sécuritaire, respectueuse, diversifiée et inclusive. Le Service continue d'en faire une priorité tout en redoublant d'efforts pour atténuer les perturbations opérationnelles causées par la pandémie.

[Traduction]

    Cela comprend des mesures concernant la surreprésentation des délinquants autochtones et noirs dans le système correctionnel fédéral. Nous savons que le taux d'admission des Autochtones dans les établissements fédéraux continue d'augmenter, et cela dure depuis 10 ans. Par exemple, l'an dernier, les délinquants autochtones représentaient 35 % des admissions.
    Le SCC ne peut pas influencer les décisions qui amènent des délinquants sous notre garde, mais il nous incombe d'améliorer les résultats en leur offrant des possibilités de réadaptation efficace. Nous avons mis en œuvre un certain nombre d'initiatives à cet égard et nous sommes en train d'embaucher un sous-commissaire pour les Autochtones.
    Nous sommes également en train d'élaborer une stratégie nationale pour les délinquants noirs, pour circonscrire de nouvelles manières d'aborder ce que vivent les délinquants noirs et les obstacles auxquels ils se heurtent.
    Je trouve encourageant que nos efforts donnent des résultats positifs. Par exemple, en 2021‑2022, un pourcentage élevé de délinquants autochtones et noirs n'avaient pas été réincarcérés dans un établissement fédéral cinq ans après la fin de leur peine.
    Dans son rapport, la vérificatrice générale a soulevé des préoccupations au sujet de l'échelle de classement par niveau de sécurité du SCC. L'ECNS est l'un des éléments d'un processus systématique et complet d'attribution d'un premier niveau de sécurité aux délinquants sous responsabilité fédérale, mais il ne définit pas la décision de placement définitif. Outre les études en cours pour s'assurer que nos instruments actuariels sont fiables et légitimes, le SCC a signé un protocole d'entente avec l'Université de Regina, qui travaille de façon indépendante à l'élaboration d'un processus de classification de sécurité tenant compte de la situation des Autochtones et des différences entre les sexes.
    En collaboration avec quatre experts externes, le SCC est également en train d'entreprendre un vaste exercice visant à confirmer l'échelle de classement par niveau de sécurité appliquée aux délinquants noirs de sexe masculin et à la reconfirmer pour les femmes et pour les Autochtones.
    L'un des moyens de mieux répondre aux besoins des délinquants est d'offrir des programmes. Les résultats indiquent que les programmes du SCC sont tout aussi efficaces dans un large éventail de groupes ethniques. Les délinquants qui participent à des programmes sont moins susceptibles de récidiver que les non-participants, quelle que soit leur origine ethnique.
    Cependant, comme la vérificatrice générale l'a indiqué, l'accès en temps opportun est essentiel. La priorité est donnée aux délinquants qui purgent de courtes peines et dont les besoins sont définis. En fait, nous avons déjà constaté une augmentation du pourcentage de ceux qui terminent leur programme avant leur première mise en liberté. Nous avons également un programme correctionnel virtuel qui permettra de moderniser l'établissement du calendrier des programmes, l'aiguillage et les affectations et qui, en fin de compte, permettra aux délinquants d'avoir plus facilement accès en temps opportun aux programmes correctionnels et de les terminer.

[Français]

    En plus des mesures que je viens de mentionner, nous nous efforçons de mieux refléter la diversité de la population de délinquants parmi le personnel qui travaille auprès d'eux.
(1545)
     Le Service correctionnel du Canada s'est fixé des objectifs ambitieux de représentation des Autochtones et des minorités visibles au sein de son effectif, lesquels tiennent compte de la population de délinquants dans chacune de nos installations.
    Le Service officialise aussi ses objectifs en matière de représentation des sexes au sein des établissements pour femmes. À l'heure actuelle, dans les cinq établissements pour femmes et les pavillons de ressourcement pour femmes, tous les postes de direction sont occupés par des femmes, dont des Autochtones et des membres des minorités visibles. De plus, 75 % des intervenants de première ligne, dans nos établissements pour femmes, sont des femmes.
    Depuis la publication du rapport de la vérificatrice générale, nous avons mené un examen des systèmes d'emploi, dont les résultats ont orienté l'élaboration de notre plan exhaustif sur l'équité en matière d'emploi, la diversité et l'inclusion.

[Traduction]

     En conclusion, je dirais que les dernières années ont été difficiles. Je tiens à remercier tous nos employés pour leur travail acharné, leur dévouement et leur engagement à mesure que nous continuons à jongler avec de nombreuses priorités et à réaliser d'importants progrès sur de nombreux fronts.
    Comme commissaire, je reste déterminée à faciliter l'obtention de résultats positifs pour les Autochtones, les Noirs et les autres Canadiens racisés dans le système correctionnel. Il s'agit notamment de prendre des mesures concrètes pour donner suite aux recommandations formulées par la vérificatrice générale, l'enquêteur correctionnel et d'autres organismes consultatifs externes afin de favoriser une évolution positive durable.
     Merci.
    Merci beaucoup à tous.
    Nous allons maintenant passer à notre première série de questions. Les quatre premiers députés auront chacun six minutes.
    Monsieur Brock, merci de vous joindre à nous aujourd'hui. Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui et de tout le travail qu'ils ont mis dans ce rapport.
    Avant de poser mes questions, je tiens à informer les témoins et les autres membres du Comité que je me présente ici aujourd'hui avec 30 ans d'expérience comme procureur de la Couronne avant mon élection en 2021. J'étais dans les tranchées et je m'occupais du racisme systémique dans le système de justice pénale.
    Ma première question s'adresse à vous, madame Kelly. Votre exposé portait sur le système de justice pénale en général, mais cette étude porte sur le rapport de la vérificatrice générale concernant le Service correctionnel. Reconnaissez-vous par ailleurs que les tribunaux et les procureurs de tout le pays prennent activement des mesures pour réduire le taux de surincarcération des détenus autochtones — hommes, femmes et jeunes — et des détenus noirs — hommes, femmes et jeunes — par le biais de tribunaux spécialisés, comme les tribunaux autochtones, les tribunaux spécialisés en matière de gangs dans certains grands centres et autres initiatives de ce genre? Le reconnaissez-vous?
    Je crois que des mesures sont prises, mais je ne peux évidemment parler que de ce que nous constatons au sujet des délinquants qui sont mis sous notre garde. Ce que je peux dire, c'est que, malheureusement, le nombre d'Autochtones incarcérés augmente. Comme je l'ai dit, 35 % de nos admissions l'an dernier étaient de fait des délinquants autochtones. C'est tout ce que je peux dire.
    Très bien. Cela soulève la question de savoir pourquoi le nombre d'admissions de délinquants autochtones et de délinquants noirs augmente d'année en année. À la lecture du rapport de 29 pages de la vérificatrice générale — je suis peut-être naïf, parce que je n'avais pas toute la documentation nécessaire pour me préparer à ma comparution d'aujourd'hui —, je n'ai rien trouvé au sujet de l'infraction principale ayant justifié leur incarcération dans un établissement fédéral. Je n'ai rien trouvé non plus au sujet de l'âge de ces détenus.
    Avez-vous recueilli ce genre de données?
(1550)
    Au SCC, oui, effectivement.
    Je vois.
    Par exemple, les délinquants autochtones sont généralement plus jeunes que les autres délinquants. Malheureusement, la durée de leur peine s'est allongée au fil du temps. Ils sont plus nombreux à purger des peines d'une durée indéterminée. Malheureusement, les types d'infractions ont aussi changé considérablement, puisqu'on enregistre plus de peines pour meurtre ou pour une infraction de l'annexe 1. En tout, on est passé à 84 %. De plus, leurs besoins sont très élevés. L'évaluation des besoins élevés est passée de 86 à 90 %.
    Nous recueillons ces données, en effet.
     Des jeunes autochtones et noirs commettent donc des meurtres. Vous avez aussi parlé des infractions de niveau 1 ou de catégorie 1.
    C'était de l'annexe 1.
    Est‑ce que cela comprend des condamnations importantes pour usage d'une arme à feu?
    C'est plus violent, oui.
    C'est très violent. Je vois. Il va sans dire que la peine est plus longue, n'est‑ce pas?
    Oui. C'est ce que nous constatons.
    Quand il y a infraction avec violence, comme un homicide, une fusillade à l'aveugle et ce genre de chose, vous conviendrez avec moi que la peine retenue par le tribunal ne vise pas à réadapter le délinquant, mais à l'isoler de la société. Ne pensez-vous pas?
    Encore une fois, ils arrivent chez nous, au SCC. Notre travail consiste à leur offrir des programmes et des mesures d'intervention pour les aider à se réadapter et à devenir des citoyens respectueux des lois. C'est notre mandat. C'est la matière de notre travail.
    Très bien.
    J'aimerais soulever un autre point. Beaucoup de ces délinquants, malheureusement, viennent de groupes très défavorisés sur le plan social — très souvent sur les plans social et économique, avec ce que cela suppose de pauvreté, de manque d'éducation, d'absence de réseau de foyers d'accueil, etc. Très souvent, et cela ne devrait pas nous surprendre, ils sont entraînés dans le mode de vie des gangs.
    Est‑ce que vos données en témoignent également?
    Oui. Les données montrent que l'affiliation à un gang est dans ce cas plus fréquente.
    Voilà. En fait, je m'appuie sur les données de Statistique Canada de 2021. Sur les 297 homicides commis avec une arme à feu au Canada en 2021, près de 50 % ont été commis par des délinquants liés à des gangs. Quand on examine de plus près la composition des gangs, on constate que près de 50 % de tous les membres des gangs au Canada sont des Afro-Canadiens et des membres de Premières Nations.
    Vos données le confirment-elles également?
    Oui.
    Très bien, cela ne devrait donc pas...
    Monsieur Brock, je suis désolé de vous interrompre, mais votre temps est écoulé. Je pense que nous pourrons vous revenir plus tard.
    Madame Shanahan, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les témoins de leur présence aujourd'hui et du travail important qu'ils accomplissent.
    J'étais membre du comité des comptes publics en 2016 et en 2017. Nous avons probablement aussi examiné le rapport de 2015. Je me souviens d'avoir été très troublée par la surreprésentation des Autochtones et des personnes racisées dans le système carcéral. À l'époque, beaucoup de gens disaient que la réadaptation était le principal objectif de notre système carcéral. Nous avons échoué à cet égard.
    Qu'est‑ce qui est différent cette fois‑ci, madame Kelly?
    À l'heure actuelle, 32 % de la population carcérale est autochtone. Du côté des femmes, la proportion est de 47 %. Le nombre de détenus noirs a diminué. La proportion est passée de 9,2 à 8,7 %.
    Depuis 2017, nous avons pris un certain nombre d'initiatives. Par exemple, pour les délinquants autochtones, nous avons créé des centres d'intervention spécifiques dans certains de nos établissements. Cela leur permet d'accéder plus tôt à des programmes. Concernant les libérations en vertu de l'article 84, quand on fait participer la communauté autochtone, cela commence dès l'admission dans un établissement fédéral. Essentiellement, ils travaillent avec un agent de liaison communautaire autochtone s'ils veulent retourner dans leur communauté.
    Nous avons aussi les Sentiers autochtones dans nos établissements. Le programme peut être organisé dans l'établissement même pour permettre aux détenus de continuer à pratiquer leurs activités culturelles et leurs traditions. Nous avons des programmes pour les Autochtones qui sont adaptés à leur culture. De plus, lorsqu'ils ont terminé un programme adapté, on procède automatiquement à un examen de leur cote de sécurité. Nous avons aussi des cercles de guérison. Lorsque les détenus se présentent devant la Commission des libérations conditionnelles, au lieu d'une audience normale, ils ont un cercle de guérison.
    Nous avons fait beaucoup...
(1555)
     Je suis désolée de vous interrompre.
    Cela n'existait‑il pas en 2015, 2016 ou 2017?
    Je ne suis pas sûre. En fait, cela relève de la Commission des libérations conditionnelles. Mon rôle va de l'application de la peine à la libération.
    Par ailleurs, nous avons formé 1 500 employés. Nous avons fait l'exercice général. Tout le comité exécutif l'a fait aussi. En matière de représentation, 10 % de notre personnel est autochtone. Nous avons environ 140 aînés. Nous avons un groupe de travail national d'aînés ainsi qu'un comité consultatif autochtone national. En fait, nous les rencontrerons dans un mois. Nous parlons des obstacles. Nous parlons de ce qui se passe dans l'établissement. Ils me donnent des conseils.
    Nous sommes aussi, et c'est important, en train d'embaucher un sous-commissaire pour les Autochtones. Espérons que cela nous aidera à remplir notre mandat.
    Je vous assure que nous travaillons d'arrache-pied. Nous avons différentes initiatives qui s'adressent non seulement aux Autochtones, mais à tous les délinquants. Par exemple, nous avons des projets pilotes d'éducation numérique inspirés du programme d'études de la province. Nous avons reçu des commentaires très positifs de la part des délinquants. Nous offrons des programmes virtuels, qui nous permettront de réunir des délinquants de différents établissements. Ce sera une classe. Cela se fera virtuellement, mais avec un enseignant en classe.
    Cela nous aidera essentiellement à répondre à la demande de programmes, parce que les programmes sont essentiels au SCC.
    Au fait, madame la commissaire, mon collègue a parlé de l'origine sociale et économique de beaucoup de ces délinquants, des jeunes qui se retrouvent ensuite en prison pour des périodes prolongées. Existe‑t‑il des études attestant que ces programmes, même s'ils ne peuvent pas remplacer une éducation saine, peuvent changer ces vies?
    Oui. M. Motiuk pourra certainement vous en dire plus à ce sujet.
    Les programmes correctionnels destinés aux Autochtones ont été élaborés en collaboration avec des Autochtones. Dans leur cas, il faut évidemment aussi compter avec les traumatismes, et c'est inclus dans le programme. Des aînés participent également, pour aider les délinquants à parler de ce qu'ils ont vécu.
    En juin 2019, le projet de loi C‑83, qui tient compte des antécédents sociaux des Autochtones, a été enchâssé dans la loi. Nous avons donné beaucoup de formation sur les antécédents sociaux des Autochtones. J'admets cependant que nous avons encore un peu de travail à faire du côté de l'élaboration des recommandations et décisions qui devraient s'ensuivre. Nous savons très bien recueillir l'information et les données sur les antécédents sociaux des Autochtones, mais il y a place à l'amélioration quand il s'agit d'examiner tous ces facteurs et d'en tirer des recommandations et des décisions.
(1600)
    C'est tout le temps que nous avions. Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui pour discuter d'un sujet très important.
    Madame Kelly, il paraît que le tout premier rapport publié par le Bureau de l'enquêteur correctionnel en 1974 relevait déjà le traitement discriminatoire des Autochtones sous la garde du gouvernement fédéral. Au cours des décennies suivantes, le Bureau a formulé plus de 70 recommandations spécifiques aux services correctionnels pour Autochtones, dans le cadre de ses rapports annuels.
    Cinquante ans plus tard, avez-vous quelque chose de positif à présenter?
     Depuis 50 ans, nous avons fait beaucoup de travail.
    Cela fait presque 40 ans que je suis avec le Service correctionnel du Canada. Je crois profondément au mandat d'aider et d'encourager les délinquants à devenir des citoyens respectueux des lois. J'y crois. Ils vont devenir nos voisins, vos voisins, et il est clair que nous voulons qu'ils soient de meilleurs citoyens à leur remise en liberté qu'à leur entrée dans nos établissements. Cela me tient à cœur, ainsi qu'à MM. Tousignant et Motiuk.
    Il est clair qu'il y a eu des progrès en 50 ans et je voudrais raconter une histoire qui l'illustre bien. Toutes les semaines, j'envoie des messages au personnel et aux détenus, et plusieurs délinquants m'écrivent. Un jour, un détenu autochtone m'a écrit. Il m'a dit que depuis son arrivée en établissement, il était difficile. Or, sur son chemin, il a rencontré des gens, des éducateurs, des agents correctionnels et des agents de programmes, et il a décidé de changer sa vie. Ce délinquant va bientôt obtenir son baccalauréat en psychologie. Il m'a demandé s'il pouvait revenir à l'établissement pour aider d'autres délinquants autochtones après être retourné dans la collectivité et avoir fait ses preuves. Des histoires comme celle-là, il y en a plein.
    C'est assurément une très belle histoire et je vous en remercie. Comme vous, je crois énormément en la réhabilitation.
    Plus tôt, vous avez nommé une foule d'activités que vous avez tenues et de programmes, notamment en matière d'équité, de diversité et d'inclusion. Je suppose que les gens apprennent beaucoup de choses pendant les formations que vous leur offrez. Cependant, mesurez-vous leur compréhension, ou vous contentez-vous de leur offrir la formation?
    Parlez-vous des délinquants, des détenus?
    Je parle du personnel de Service correctionnel Canada.
    Nous donnons de la formation, bien sûr. Cependant, nous sommes en plein changement de culture à Service correctionnel Canada et nous avons entrepris un audit de notre culture.
    Nous constatons certainement plus de diversité. Nous étudions aussi les griefs des détenus contre le personnel, de même qu'une série d'éléments qui indiquent s'il y a eu des améliorations. Naturellement, la formation et les programmes correctionnels permettent d'obtenir des acquis.
    Merci beaucoup. J'espère que ce n'est pas McKinsey qui fait votre audit culturel, si je peux me permettre cette blague.
    Monsieur Motiuk, votre profil de recherche est impressionnant. J'aimerais vous poser la même question. Est-ce que vous mesurez la compréhension de vos employés relativement à la diversité, l'inclusion et autres?

[Traduction]

     Il y a différentes façons de répondre à cette question. D'abord et avant tout, nous faisons des sondages auprès du personnel. Nous l'avons fait dans le passé. Nous travaillons également en étroite collaboration avec nos fournisseurs de services de première ligne pour nous assurer qu'ils comprennent bien les composantes de base des programmes qu'ils offrent. Nous certifions aussi les outils d'évaluation qu'ils administrent.
    Oui, nous les évaluons et nous certifions leur compréhension de l'application de ces mesures et des programmes qu'ils offrent. Nous mesurons ensuite les résultats du point de vue de la réduction de la récidive. Nos évaluations indiquent clairement que le taux de récidive chez les Autochtones et chez tous les délinquants diminue considérablement quand ils terminent les programmes.
(1605)

[Français]

    La mesure de la compréhension m'intéresse beaucoup, parce qu'on peut avoir assisté à une formation et n'avoir rien compris ni appris. Or, la compréhension est essentielle.
    Madame Kelly, est-ce que vous considérez que vos faibles efforts en matière d'équité, de diversité et d'inclusion chez vos agents correctionnels sont liés à des problèmes de discrimination chez les détenus?
    Pouvez-vous répéter la question?
    Vos faibles efforts en matière d'équité, de diversité et d'inclusion chez les agents correctionnels sont-ils liés à de la discrimination chez les détenus?
     En ce qui concerne les efforts que nous avons fournis au chapitre de la diversité depuis 2021, nous nous sommes fixé des objectifs de représentation vraiment ambitieux. Notre méthode consiste à tenir compte de ce qu'on appelle la disponibilité au sein de la population active.
    Je vais prendre l'exemple du Pénitencier de la Saskatchewan, qui se trouve à Prince Albert. Supposons que 70 % des délinquants de ce pénitencier sont autochtones. Dans notre équation visant à fixer nos objectifs de représentation, 70 % de la main-d'œuvre provient de la population active disponible et 30 % correspond au pourcentage de délinquants autochtones que compte l'établissement.
    Cela veut donc dire que, dans nos établissements qui comptent plus de délinquants autochtones, nous allons nous assurer de représenter la diversité de notre personnel.
    À ce sujet, M. Tousignant et moi avons rencontré trois chefs...
    Pardonnez-moi de vous interrompre, madame Kelly, mais votre temps est écoulé.
    Monsieur Desjarlais, vous avez la parole pour six minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis perplexe. Je viens souvent à ce comité, et je trouve que la vérificatrice générale n'arrête pas de rappeler la situation des Autochtones et des Noirs au Canada et le fait que les systèmes ne changent pas.
     Comme député, je suis allé rencontrer des gens dans ces établissements. Je suis allé au pénitencier pour femmes d'Edmonton et je leur ai demandé de me parler de leurs besoins. Ces besoins sont importants.
     J'écoute mes collègues poser des questions. Le fait est qu'être procureur de la Couronne ne vous donne pas le genre d'éducation qui permettrait de comprendre la situation des Autochtones et comment ils en sont arrivés là. Le problème n'a rien à voir avec les Autochtones et les Noirs. Le problème, c'est la justice canadienne. Le problème, c'est notre système de justice, et non les personnes qui sont laissées pour compte. Le système des pensionnats, la rafle des années 1960, le génocide planifié et ciblé des femmes autochtones — c'est pourtant clair.
    Ce n'est pas moi qui le dis. Il n'y a même pas beaucoup d'Autochtones qui le disent. Je veux souligner les propos de la vérificatrice générale aujourd'hui même. J'espère que tous les députés y prêteront attention — je me tourne notamment vers mes collègues conservateurs — et qu'ils écouteront ce que cela dit. Je les entends souvent parler de « sévir contre la criminalité » sans comprendre à qui ils s'en prennent et pourquoi ces gens sont là.
    La vérificatrice générale a dit ceci: « Il s'agit de notre quatrième audit depuis 2015 qui montrent des résultats piètres et qui s'aggravent pour différents groupes de délinquants. Service correctionnel Canada a pris peu de mesures concrètes pour modifier les politiques, procédures et pratiques d'apparence neutres qui produisent ces résultats. En novembre 2020, Service correctionnel Canada avait reconnu l'existence de racisme systémique dans le système correctionnel. Il est grand temps qu'il élimine les obstacles systémiques relevés dans notre rapport. »
    On parle de personnes réelles. Pourquoi faut‑il tant de temps pour respecter les droits fondamentaux des gens? J'ai regardé ces femmes dans les yeux et je leur ai dit que j'allais essayer d'améliorer leur situation. C'est extrêmement difficile.
    Ma question s'adresse au député d'Edmonton-Ouest. Ce pénitencier, le pénitencier pour femmes d'Edmonton, se trouve dans votre coin. Je leur ai demandé...
     Une voix: [Inaudible]
    M. Blake Desjarlais: Peu m'importe si vous y êtes allé. Je me demande si vous les avez écoutées. Elles demandent de l'aide. Les conditions dans ces prisons sont terribles.
    J'ai parlé avec les aînées qui aident là‑bas. Elles sont dépassées — dépassées — parce qu'on demande à chaque aînée de prendre en charge des centaines de personnes.
    Madame la commissaire, je ne sais pas comment formuler les choses autrement, mais ces personnes ne sont pas toutes pareilles non plus. Nous avons un pénitencier fédéral pour femmes autochtones pour l'ensemble des Prairies. De Winnipeg à la Saskatchewan en passant par l'Alberta, elles sont entassées dans un même pénitencier, puis sont lâchées dans ma collectivité d'Edmonton Griesbach, où elles se retrouvent sans domicile. Elles se retrouvent sans soutien. Elles sont incitées de commettre des crimes par désespoir et parce qu'elles sont exploitées. C'est simple: nos systèmes, surtout le SCC, les laissent tomber.
    Les mots me manquent. Les rapports sont là. Les chiffres sont là. Tout ce que je peux faire, c'est demander que nous considérions ces personnes pour ce qu'elles sont et que nous tenions compte des conditions dans lesquelles elles se trouvent. Elles ne sont pas là parce qu'elles le veulent. Elles sont là parce que notre pays les y a forcées. Que ce soit parce qu'elles ont pris leurs enfants... J'ai parlé à des aînées qui sont dans la prison à sécurité maximale, des femmes âgées qui y sont depuis des décennies, parce qu'elles se sont battues en désespoir de cause pour retrouver leurs enfants et qu'elles n'ont pas réussi à le faire. La première question qu'on m'a posée là‑bas était: « Pouvez-vous m'aider à retrouver ma fille? »
    Ce sont des personnes en chair et en os, qui s'ennuient de leurs familles. Elles ne peuvent même pas leur rendre visite, parce qu'elles viennent de Winnipeg. Leurs filles sont portées disparues. Elles veulent parler à leurs familles. C'est l'un des rapports les plus terribles que j'aie eu à lire. Ces femmes ne peuvent plus attendre. Elles vont mourir ici sans jamais revoir leurs familles. Nous devons les aider. Elles ne sont pas là pour des raisons qui relèvent de leur contrôle.
    Je vais probablement manquer de temps pour poser des questions, mais j'espère que vous voyez à quel point tout cela est réel. Il a fallu que des gens comme moi se fassent élire pour que ce message se rende jusqu'ici, parce que je ne l'ai encore jamais entendu. J'espère que mes collègues comprennent la nécessité de repenser cet enjeu.
(1610)
     Nous avons besoin d'une politique fédérale qui permette de réformer ces systèmes au lieu de nous contenter de « sévir contre la criminalité », un slogan qui ne fait que contribuer au génocide dans notre pays. Oui, les gens qui enfreignent la loi doivent être punis, mais ceux qui se retrouvent dans cette situation à cause de ce que les Canadiens ont fait... Il faut y réfléchir. Comment les lois canadiennes ont-elles eu un effet disproportionné sur ces gens... ma parenté?
    Les rapports Gladue sont des éléments d'information importants. J'espère que les procureurs de la Couronne comprennent aussi la valeur de ces rapports lorsqu'ils cherchent si désespérément à mettre nos gens en prison. Il est important que nous fassions ce travail. Pour nos aînés décédés...
    Les appels à l'action de la CVR sont clairs. Plus tard, je vous poserai des questions sur la Commission de vérité et réconciliation et sur ce que vous avez fait...
    Monsieur Desjarlais, je vais vous arrêter ici. Votre temps est écoulé. Merci beaucoup.
    Passons à la prochaine série de questions. Monsieur Genuis, vous avez la parole pour cinq minutes.
    C'est au tour de M. Brock, puis nous passerons à la série suivante.
    D'accord.
    Monsieur Brock, vous avez de nouveau la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    J'apprécie vraiment les propos de mon collègue, M. Desjarlais. Ils sont tout à fait justes. Et sincères.
    Je vous en remercie, monsieur. Ce que vous avez dit me touche beaucoup. Mais J'aimerais y apporter une nuance. J'ai poursuivi des Autochtones devant les tribunaux pendant plus de 10 ans. J'ai changé la vie de centaines de délinquants autochtones. J'ai vu des réussites. J'ai connu plus de succès que d'échecs et de tragédies. Je veux simplement dire que les procureurs prennent les rapports Gladue très au sérieux, mais je vous remercie de votre intervention.
    Pour revenir à vous, madame Kelly, je venais de formuler une question quand j'ai manqué de temps au premier tour. Je parlais du fait que les gangs sont composés à près de 50 % de Noirs et d'Autochtones. Ces individus commettent des infractions très graves et violentes qui causent du tort aux gens, ils tuent des gens et ils mettent les collectivités en grand danger. Il n'est probablement pas étonnant — et j'espère que vous partagez mon point de vue — que, au moment de leur placement initial dans un établissement fédéral, compte tenu de la nature de la condamnation, qui souvent n'est pas une première, mais la suite d'une série de condamnations pour comportements dangereux... On ne se réveille pas un jour en se disant: « Tiens, je vais me joindre à un gang et je vais tuer quelqu'un. » C'est souvent une série d'erreurs tragiques qui vous font aboutir en prison.
     Ce que je veux dire, c'est que les vérificateurs et la vérificatrice générale ne devraient pas s'étonner du fait que le système lui-même classe au niveau maximal des personnes jugées à haut risque. Ne pensez-vous pas?
(1615)
    Je rappelle que nous avons un processus de classification de sécurité. Nous tenons compte de beaucoup de renseignements, comme les données de la police et la peine infligée par le juge. Nous avons aussi l'échelle de classement par niveau de sécurité, qui est un outil actuariel. L'agent de libération conditionnelle examine tout, y compris les antécédents sociaux des délinquants autochtones ou noirs. Ensuite, nous prenons une décision.
    C'est ainsi que nous classons les délinquants.
    Au troisième paragraphe de son exposé préliminaire, Mme Hogan donne l'exemple suivant: « Les hommes autochtones et noirs avaient été classés à niveau de sécurité maximale à un taux deux fois plus élevé que d’autres détenus, et représentaient la moitié de tous les placements à sécurité maximale. »
    J'ai examiné la pièce 4.4, à la page 8, et j'ai constaté que ce pourcentage semble exact, mais que, selon le tableau d'ensemble, qui ne figure pas dans l'exposé préliminaire de Mme Hogan, la plupart — presque les trois quarts, sinon 90 % — de tous les délinquants noirs et autochtones se retrouvent dans des établissements à sécurité minimale ou moyenne.
    Le voyez-vous dans la pièce 4.4? La proportion est de 89 % pour les délinquants autochtones et de 85 % pour les délinquants noirs incarcérés dans des établissements à sécurité minimale ou moyenne.
    Ce que je peux dire, c'est que le taux de concordance, donc notre outil actuariel... Le niveau de sécurité final est fixé dans 75 % des cas. L'outil actuariel sert ensuite à consolider votre jugement, mais, pour ce qui est des délinquants autochtones, cela signifie que, dans 25 % des cas, la cote de sécurité est sous-évaluée ou surévaluée. La plupart du temps, elle est surévaluée.
    C'est la même chose pour les Noirs...
     Il faut aussi tenir compte de la nature de la condamnation. Vos données font-elles une distinction entre les condamnations extrêmement graves comme celles‑ci et les infractions moins graves qui justifient encore une peine de plus de deux ans?
    Absolument. Notre échelle de classement par niveau de sécurité tient compte — et c'est l'un de ses éléments — de l'âge au moment de la première condamnation, des antécédents criminels, de la gravité de l'infraction, de la durée de la peine... de tous ces facteurs.
    Quand j'examine...
    Vous avez encore le temps de poser une très brève question, monsieur Brock.
    J'examine la pièce 4.4. S'agit‑il d'une combinaison de tous les délinquants, de tous les types de condamnations, ou s'agit‑il seulement des infractions vraiment graves dont j'ai parlé...les homicides et les infractions graves liées à l'usage d'armes à feu?
    Madame Kelly, veuillez, vous aussi, répondre assez rapidement, s'il vous plaît.
    Je suis en train d'examiner la pièce 4.4.
    S'agit‑il de données générales ou spécifiques?
    Je peux expliquer, monsieur le président. C'est l'ensemble. Nous n'avons pas subdivisé. Il s'agit de tous les délinquants de tous les établissements fédéraux.
    Merci, madame Hogan. S'il y a d'autres commentaires à ce sujet, nous devrons revenir à Mme Kelly.
    Monsieur Dong, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leur présence parmi nous.
    Monsieur Desjarlais, sachez que votre exposé préliminaire m'a vraiment touché. Ce n'est pas nouveau pour nous, mais j'admire vraiment le fait que vous ayez un objectif très précis en étant ici, non seulement à ce comité, mais aussi à la Chambre. Ce n'est pas la première fois qu'on en parle, et je vois la constance et la persistance de votre démarche. Je pense que tous les députés ont la même impression.
    Venons‑en aux détails.
    Commissaire Kelly, quand j'ai lu le rapport, j'ai été frappé par le fait que l'échelle de classement par niveau de sécurité n'a pas été mise à jour depuis 2012 et que celle qui s'applique aux délinquants n'a pas été mise à jour du tout. Pourquoi? Que fait‑on pour changer cela? C'est un outil important pour déterminer le niveau de sécurité.
(1620)
    C'est un outil extrêmement important.
    En fait, son élaboration a fait suite à une recommandation du vérificateur général en 1994. C'est la raison pour laquelle elle a été élaborée. Elle a été testée de façon empirique — M. Motiuk pourrait vous en parler — à de nombreuses reprises.
    Mais, pour les délinquants autochtones, nous avons un protocole d'entente avec l'Université de Regina, qui travaille de façon indépendante à l'élaboration d'un processus de classification de sécurité tenant compte de leur situation et de la différence des sexes, parce que certains facteurs sont non sexospécifiques, comme l'âge et les antécédents criminels...
    Oui, je comprends cela.
    Cette classification tiendra également compte de facteurs sexospécifiques et de facteurs culturels précis.
    Je comprends. Je suis désolé de devoir vous interrompre de temps à autre. Ce n'est pas par manque de respect.
    Y a‑t‑il un échéancier?
    Oui. C'est un protocole d'entente de cinq ans, et nous en sommes à la troisième année.
    Faudra-t‑il encore deux ans avant que le produit final ou l'échelle mise à jour puisse être utilisé?
    Monsieur Motiuk, il y a d'autres échéanciers.
    Oui. Les échéanciers de l'exercice de validation concernant les hommes noirs... Il n'y a pas assez de femmes noires en détention pour faire une étude de validation. Nous n'en avons que 19 dans tout le pays. Il y a, par contre, beaucoup d'hommes noirs. Nous avons téléchargé des données. Nous travaillons avec des experts externes. L'échéancier à cet égard est le mois de décembre de cette année, et nous sommes bien engagés dans cet exercice.
    C'est deux ans pour les délinquants autochtones...
    M. Larry Motiuk: C'est exact.
    M. Han Dong: ... et d'ici la fin de l'année pour...
    Nous n'examinons qu'un seul outil, l'échelle de classement par niveau de sécurité pour les hommes noirs, dans le cadre d'une étude de validation. Nous examinons l'ensemble du processus pour les femmes autochtones.
    Cela m'amène à ma deuxième question. J'ai remarqué que le rapport indique que 30 % des évaluations fondées sur l'ECNS ont été surévaluées et que la moitié de ces évaluations ont donné lieu à un niveau de sécurité plus élevé. Qu'est‑ce que cela nous dit? Est‑ce parce que l'outil n'est pas assez efficace?
     Pas nécessairement. Cela signifie qu'il pourrait y avoir d'autres raisons de l'écarter.
    Prenons l'exemple d'un placement initial. Il faut comprendre qu'à leur admission, ils n'ont peut-être pas beaucoup d'antécédents criminels, mais que certains facteurs pourraient justifier le relèvement du niveau de sécurité. Ce serait le cas, par exemple, de l'affiliation à un gang. L'outil n'est pas vraiment sensible à cet aspect, mais, si d'autres renseignements étaient portés à la connaissance d'un agent de libération conditionnelle, celui‑ci pourrait recommander un niveau de sécurité supérieur à ce que l'échelle de classement par niveau de sécurité indiquerait.
    C'est ce qui explique la proportion de 50 % de détenus ayant probablement reçu un niveau de sécurité plus élevé, mais est‑ce que tout cela ne devrait pas déjà être pris en compte dans l'ECNS?
    C'est faisable, mais ce n'est qu'un outil, et aucun outil n'est parfait. Nous avons un taux de concordance d'environ 75 %, ce qui est tout de même assez précis. C'est un bon point de repère, mais il faut arrimer les évaluations, qui sont hautement professionnelles, à quelque chose d'objectif et de personnalisé.
    Donc...
    Soyez très bref, monsieur Dong.
    D'accord.
    D'ici à ce que ces outils soient mis à jour, verrons-nous une baisse de 30 % du taux de cas écartés?
    Oui, c'est ce que nous avons constaté au cours de la dernière année. Il a beaucoup diminué. C'est plus près de 25 %.
    Quel est le pourcentage? C'est 25 %. D'accord.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président. Nous devons être brefs dans nos réponses.
    Madame Hogan, vous avez écrit à de nombreuses reprises sur le Service correctionnel du Canada. Les employés ont donc pu prendre connaissance de vos rapports et les lire. Ont-ils compris?
(1625)
    Je pense qu'il y a ici des représentants du Service correctionnel du Canada qui pourraient mieux répondre à cette question.
    Je vais la leur poser.
     J'avoue être très frustrée. Depuis 2015, cela fait au moins quatre fois qu'on communique des résultats préoccupants liés à la race et à l'ethnicité des délinquants. C'est ce processus systématique qui continue de générer des résultats négatifs pour certains délinquants. Il faut régler cette question.
    Merci beaucoup.
    Madame Kelly, je vous pose donc la même question.
    Comme vous l'avez indiqué tantôt, vous avez une bonne représentativité dans certains cas. Cependant, représentativité ne signifie pas compréhension non plus.
    L'automne dernier, Radio-Canada rapportait que 498 employés avaient participé à votre formation la plus populaire sur un effectif total de 18 000  personnes. Cela représente une participation de 2,8 %. Il s'agissait de la formation sur les biais culturels autochtones.
    Je ne sais pas si ces employés ont compris, mais ils n'étaient pas beaucoup à avoir participé à cette formation. Qu'avez-vous de nouveau à nous apporter à ce sujet?
    En matière de formation, j'ai des chiffres sur la diversité, qui sont meilleurs que ce que vous venez de mentionner.
     Au cours des cinq dernières années, les résultats se sont améliorés. Cela prend un peu de temps. Comme je l'ai mentionné, ce n'est pas nous qui décidons des personnes admises dans nos établissements. Par ailleurs, quand elles sont dans nos établissements, nous essayons de leur offrir des programmes et des interventions.
    Dans votre changement culturel, vous tentez de passer de très mauvais à mauvais. C'est bien cela?
    Changement culturel?
    Vous êtes en migration culturelle. C'était un audit culturel que vous avez mentionné tantôt. Donc, je suppose que vous espérez passer de très mauvais à mauvais.
    Non, je ne dirais pas que c'est très mauvais ou mauvais. Nous sommes quand même une organisation qui compte à peu près 18 000 employés. Nous avons des employés qui sont dévoués, engagés et qui comprennent la mission du Service correctionnel du Canada.
    Il y a 498 employés sur un total de 18 000 qui ont suivi la formation sur les biais culturels autochtones. Ce n'est pas un gros pourcentage.
    Non. Je n'ai pas les données plus récentes.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Je vous remercie tous les deux.
    Monsieur Desjarlais, vous avez la parole pour deux minutes et demie.

[Traduction]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je tiens à remercier mes collègues des deux côtés de leurs questions à mon avis très importantes et de leur patience à l'égard de cette étude très difficile pour moi.
    Cela fait longtemps que je suis de l'autre côté de la barrière, et la situation n'a fait qu'empirer. On peut dire ce qu'on veut. On peut dire qu'il y a des améliorations. En réalité, madame la commissaire, vous avez dit quelque chose d'important: le nombre augmente.
    Je ne crois pas nécessairement que le Service correctionnel soit à blâmer. Je crois, comme de nombreux Autochtones, qu'il s'agit d'un problème global qui exigera une solution globale. Vous en avez parlé dans votre exposé, et je vous en remercie. Je reconnais également que votre ministère a déjà accepté cela par le passé. En mon absence, votre prédécesseur a accepté ici à trois reprises les recommandations du vérificateur général pour améliorer la situation.
    La CVR existe depuis longtemps... depuis votre nomination, et sûrement depuis celle des messieurs qui vous accompagnent. Je ne sais même pas si vous en avez lu le rapport, et j'aimerais le savoir. Que savez-vous de la CVR? Savez-vous ce qu'est l'appel à l'action no 35 de la Commission de vérité et réconciliation?
    Monsieur Motiuk, je crois que c'est à vous que je vais poser la question.
    Pas précisément le numéro 35, mais je suis bien au courant de certaines des recommandations...
    Et vous, monsieur Tousignant?
     Savez-vous ce qu'est l'appel no 35?
     Oui. Pour nous, cela concerne les programmes correctionnels. Cela porte sur la guérison et l' approche holistique. Il s'agit de l'article 81 — les pavillons de ressourcement — parce que c'est considéré comme un obstacle... C'est le...
    Madame la commissaire, pourquoi vos collègues ne savent-ils pas de quoi il s'agit, alors que c'est le mandat principal de la Commission de vérité et réconciliation pour votre ministère? Comment se fait‑il que ce ne soit pas l'élément central de votre travail, alors que 70 % des Autochtones sont incarcérés et sous votre responsabilité? Comment se fait‑il que, à ce niveau, vous vous présentiez devant un comité chargé d'une étude sur l'incarcération des Autochtones et leur surreprésentation et que vos hauts fonctionnaires ne sachent pas de quoi je parle?
    Ne pouvez-vous pas admettre que c'est un échec dans la façon dont nous devons réellement considérer... Les Autochtones ont besoin d'avoir confiance et de voir que les responsables de ces systèmes s'occupent d'eux. Quand j'entends ce genre de choses, vous devez comprendre ma déception.
(1630)
    Monsieur Desjarlais, pouvez-vous donner quelques instants au témoin pour répondre, s'il vous plaît? Nous devons continuer.
    Commissaire Kelly, vous pouvez répondre rapidement.
    Je peux vous assurer... On dit souvent qu'on en parle, mais la plus grande responsabilité, c'est d'avoir la charge d'autres êtres humains. Ils ont commis des crimes, et cela comprend les délinquants autochtones, les délinquants noirs — tous les délinquants. Nous voulons travailler avec eux, essentiellement pour nous assurer qu'ils seront meilleurs à leur libération.
    La seule chose que je veux dire...
    Je dois vous interrompre ici. Merci beaucoup. Je comprends.
    Je suis désolé, mais je dois tenir compte du chronomètre dans toute la mesure du possible. Je suis sûr qu'il y aura une autre occasion.
    Monsieur Genuis, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Il existe une politique. Il existe des objectifs. Il y a la question des valeurs et il y a celle de la mise en œuvre. Nous avons entendu beaucoup de commentaires judicieux et émouvants au sujet de la politique, des idées et des valeurs. En général, notre comité s'intéresse à la mise en œuvre. J'aimerais vraiment approfondir cet aspect dans mes questions.
    Depuis huit ans, le gouvernement s'est donné comme objectif stratégique de s'attaquer au problème de la surreprésentation de certaines communautés dans notre système de justice. Il semble, d'après les données, qu'on ne s'en occupe pas. On en parle peut-être. On peut être sincère dans ses motivations. Mais, dans les faits, l'aiguille va dans la mauvaise direction en ce qui concerne les Autochtones. Il faut reconnaître qu'il y a échec de la mise en œuvre.
    J'aimerais d'abord poser la question suivante à la vérificatrice générale. Est‑il juste — ou exact — de dire que, malgré les bonnes intentions et même peut-être les déclarations vigoureuses du gouvernement, celui‑ci ne fait aucun progrès concernant la surreprésentation de certaines communautés dans le système de justice pénale?
    Malheureusement, cette vérification ne portait pas sur l'ensemble du système de justice pénale. Nous sommes partis de là où commencent les responsabilités du Service correctionnel du Canada, c'est-à-dire après que les délinquants ont été reconnus coupables et condamnés à une peine de deux ans ou plus et qu'ils ont été placés dans un établissement fédéral. À ce stade, comme vous pouvez le voir dans les statistiques de notre rapport, la représentation des Autochtones est en augmentation.
     Oui, donc la situation empire. Quelle que soit la stratégie tentée par le gouvernement, quelles que soient ses intentions, les résultats s'aggravent.
     Merci de cette précision. Vous examinez ce qui arrive aux gens une fois qu'ils sont déjà en prison, et non les facteurs qui peuvent contribuer à les y amener. Compte tenu des données que vous avez examinées, on constate donc que les problèmes de surreprésentation liés aux diverses façons dont les gens sont traités continuent de s'aggraver au fil du temps.
    Je vous renvoie à la pièce 4.1, qui propose une représentation linéaire sur 10 ans de l'évolution démographique dans les institutions fédérales.
     Nous nous sommes ensuite demandé si les résultats ou les objectifs du Service correctionnel en matière de réadaptation et de réinsertion sociale étaient concluants. C'est là que les résultats variaient encore en fonction de la race et de l'origine ethnique.
    Merci.
    Pour les gens du Service correctionnel du Canada, quand vous entendez cela et que vous examinez ces chiffres, est‑ce que vous pensez: « Eh bien, nous devons simplement faire plus de la même chose », ou plutôt: « Mon dieu, quelque chose de fondamental dans ce que nous faisons ne fonctionne pas et nous devons radicalement réorienter notre stratégie? »
    Je dirais que c'est un peu des deux: nous devons...
    Je ne vois pas bien comment ce serait possible, mais je vais vous laisser terminer. Je suis désolé.
    Non, c'est simplement que... Par exemple, quand nous avons créé des centres d'intervention pour les Autochtones, c'était pour nous assurer qu'ils puissent, dès leur admission, entamer un programme et travailler avec des aînés. S'ils veulent retourner dans leur communauté, ils travaillent avec un agent de liaison autochtone pour pouvoir communiquer avec elle. Nous avons pris un certain nombre de mesures.
     Comme je l'ai dit, nous examinons aussi...
(1635)
    Je suis désolé. Je voudrais en fait me concentrer sur... Je n'ai pas l'expertise nécessaire pour savoir si les mesures dont vous parlez sont bonnes ou mauvaises. Je peux simplement examiner les résultats. Est‑ce que certaines des nouvelles stratégies dont vous parlez sont des mesures auxquelles vous travaillez depuis un certain temps? Parce que, si vous y travaillez depuis un certain temps et qu'elles ne fonctionnent pas, peut-être qu'il faut voir le contexte ou quelque chose d'autre.
    Je suppose que la question que j'essaie d'approfondir est la suivante: est‑ce que vous constatez que cela ne fonctionne pas et qu'il faut essayer autre chose ou est‑ce que certaines des mesures dont vous parlez sont des stratégies tout à fait nouvelles que vous proposez pour essayer de régler ce qui n'a pas fonctionné jusqu'ici?
    Certains d'entre elles sont toutes nouvelles. Comme je l'ai dit au sujet de l'initiative des programmes virtuels, nous sommes très enthousiastes, parce que nous croyons que cela donnera plus rapidement accès aux programmes, et c'est essentiel. Il est essentiel que les délinquants terminent leurs programmes, car ils ont de meilleures chances de réussir à leur retour dans la collectivité.
    M. Tousignant et moi-même avons rencontré trois chefs — des Premières Nations de Nekaneet, de Beardy's et de File Hills Qu'Appelle — les conseils tribaux, et nous avons parlé de... En fait, je vais rencontrer le chef Ananas. Nous sommes en train de tendre la main à la communauté. Nous avons des agents de recrutement autochtones qui vont dans la communauté pour essayer de recruter des Autochtones.
    Je crois que mon temps est écoulé.
    Je dirai rapidement que nous sommes sensibles à votre sincérité, mais que, en huit ans, rien n'a changé.
    Nous avons largement dépassé le temps prévu.
    Merci, madame la commissaire.
    Madame Yip, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci d'être parmi nous et de répondre à des questions très difficiles.
    C'est à la fois déchirant et frustrant, parce que nous avons déjà entendu parler de ces mêmes problèmes.
    Madame Kelly, vous avez dit, dans votre exposé préliminaire, que le SCC travaillait à l'élaboration d'une stratégie nationale pour les délinquants noirs. Qu'a‑t‑on fait pour lancer cette stratégie?
     Tout d'abord, nous avons élaboré un cadre d'action ethnoculturel. On donne une certaine formation sur la diversité et sur la compétence culturelle. Les résultats sont bons du point de vue du nombre de participants.
    Nous procédons également à des études qualitatives en collaboration avec l'Université de Nipissing. Les chercheurs parlent à des délinquants noirs pour connaître leur vécu. Cela éclairera nos politiques et nos pratiques à venir.
    Nous avons aussi un comité consultatif ethnoculturel qui est très actif. Nous nous intéressons aux antécédents sociaux des délinquants noirs. À l'instar des antécédents sociaux des Autochtones, nous examinons les antécédents sociaux des délinquants noirs. C'est quelque chose qui les intéresse beaucoup.
    C'est le genre de choses... et la communication avec les communautés. J'ajoute que, du côté des délinquants autochtones comme du côté des délinquants noirs, c'est assez bien structuré dans l'établissement. Ils ont accès aux programmes et aux aînés. Mais, quand ils retournent dans leur communauté, ils peuvent manquer de mesures de soutien. Nous avons également pris des mesures pour faire venir des représentants des communautés dans l'établissement pour qu'ils puissent offrir du soutien au moment de la libération des délinquants.
    Vous avez parlé de l'aspect qualitatif, mais qu'en est‑il de la collecte de données désagrégées dans le cadre de cette stratégie?
    Nous recueillons des données sur les délinquants noirs. Nous avons cela. Nous tenons toujours compte de l'ensemble des Autochtones... et des Noirs également. Nous avons ces données.
    Comme je l'ai déjà dit, le pourcentage de détenus noirs a diminué. Il est passé de 9,2 à 8,7 %. À leur libération, les délinquants noirs s'en tirent mieux que l'ensemble de la population.
     Concernant les délinquants autochtones, je tiens à dire qu'ils se débrouillent bien, eux aussi. Nous avons constaté une amélioration. Le pourcentage est passé de plus de 75 % à 83,5 %.
(1640)
    Pourquoi pensez-vous qu'ils s'en tirent mieux? Y a‑t‑il des programmes mieux adaptés à leurs problèmes? J'essaie de comparer cela aux statistiques autochtones dont vous venez de parler.
    C'est ce que nous sommes en train d'examiner — le pourquoi. Nous constatons que les délinquants noirs, comme l'a dit la vérificatrice générale, ont tendance à être d'abord placés dans un établissement à sécurité maximale. C'est un peu plus que pour l'ensemble des délinquants. Ils terminent leurs programmes, mais, quand ils sont libérés, ils ont tendance à bien s'en sortir. C'est quelque chose que nous devons examiner de plus près.
    Monsieur Motiuk, je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.
    Nous avons ce que nous appelons notre modèle de programme correctionnel intégré et un certain nombre de volets. Certains sont destinés spécifiquement aux Autochtones. Dans un cas, il s'agit d'un programme à cibles multiples qui s'adresse aux délinquants sexuels. En général, nous avons un programme multicibles pour tous les délinquants et un autre pour les délinquants sexuels.
    Il y a aussi le suivi institutionnel. Nous avons le suivi communautaire. D'après nos évaluations, les taux de récidive et de réincarcération diminuent considérablement. Nous pensons que cela contribue à la réussite de la réinsertion sociale en ce moment.
    Cela dit, nous analysons ces données pour différents groupes — en particulier pour les délinquants noirs — pour savoir comment ils profitent de ces programmes.
    Madame Yip, une question très brève et une réponse très brève, s'il vous plaît.
    Pourriez-vous nous expliquer un peu plus le chiffre de 30 % de cotes surévaluées... Que peut‑on améliorer?
    Veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Le taux de concordance entre l'échelle de classement par niveau de sécurité et le niveau de sécurité global du délinquant est de 75 %. Pour les 25 % restants, les délinquants noirs sont évalués selon une cote de sécurité inférieure dans 16 % des cas et selon une cote supérieure dans 9 % des cas.
     Merci beaucoup.
    Nous entamons notre troisième série de questions. Il y en aura une quatrième, mais elle sera écourtée, avec probablement seulement trois minutes par député. Mais, pour l'instant, ce sera cinq minutes complètes pour les députés du gouvernement et de l'opposition officielle, et le temps normal pour les tiers partis.
    Écoutons maintenant M. McCauley.
    Vous avez la parole pour cinq minutes, monsieur. Allez‑y, je vous en prie.
    Merci, monsieur Williamson.
    Monsieur Desjarlais, je vous remercie de vos observations.
    L'un des problèmes relevés lors de mes quelques visites à l'établissement pénitentiaire pour femmes de notre circonscription est l'autorisation de la consommation libre de drogues. Il y a aussi l'autorisation de la présence d'hommes prédateurs. Un gros problème, comme M. Desjarlais l'a dit, est le manque d'établissements dans l'Ouest du Canada. Vous avez parlé du recrutement d'Autochtones. Dans l'Ouest, nous n'avons aucun établissement pour former les employées du SCC. Elles doivent aller dans l'Est.
    J'ai adressé une demande au gouvernement il y a deux ans. Aucune réponse. C'est évidemment une question vitale. Un établissement de formation ferait beaucoup pour résoudre certains problèmes systémiques. C'est un exemple parfait d'un problème systémique dont nous sommes au courant et que nous imposons tout de même au réseau.
    Le SCC envisage‑t‑il d'implanter un établissement pour recruter et former sur place des Autochtones des Prairies? Prévoit‑on un autre établissement dans l'Ouest du Canada pour éviter de rompre les liens avec la famille? Le soutien familial est très important. Il est impossible pour bon nombre de ces familles, fût‑ce de la Saskatchewan voisine, d'aller rendre visite à des proches et de leur apporter du soutien. Y a‑t‑il des plans en ce sens?
    Vous avez tout à fait raison.
    Lorsque je discute avec des Autochtones, ils me disent que c'est vraiment difficile pour eux. Nous avons une école à l'Île‑du‑Prince-Édouard et une autre à Kingston pour la formation, mais ils ne veulent pas s'éloigner de leur famille.
    Je suis au courant. Je viens de le dire.
(1645)
    Oui, exactement.
    Je vous remercie d'avoir répété ce que j'ai dit, mais, s'il vous plaît, la question est de savoir si l'implantation d'une école dans les Prairies est prévue.
    Pendant la pandémie de COVID‑19, parce que nous ne voulions pas que les personnes en formation se déplacent, nous avons commencé à offrir de la formation dans nos installations régionales. C'est évidemment utile.
    Y a‑t‑il un plan à long terme pour établir une école afin que vous puissiez recruter comme il se doit des femmes autochtones des Prairies et, surtout, d'Edmonton?
    Nous en avons discuté.
    La discussion est-elle terminée?
    Que faudra‑t‑il pour franchir le cap de la discussion?
    Comme je l'ai dit, nous sommes en train d'en discuter.
    Il n'y a donc pas de plan pour l'instant.
    Néanmoins, à cause de la COVID‑19, il y a de la formation dans la région des Prairies.
    J'ai quelques brèves questions à vous poser.
     Depuis 2017, les niveaux de dotation du SCC ont augmenté de 9 %. Dans l'ensemble, l'effectif de la fonction publique a connu une hausse de près de 30 %.
    Obtenez-vous les ressources dont vous avez besoin? Nous embauchons partout dans la fonction publique, mais le SCC a à peine bougé.
    Nous avons un effectif d'environ 18 000 personnes. De toute évidence, la COVID‑19 a été très difficile pour tout le monde.
    La COVID‑19 n'a pas empêché le gouvernement d'embaucher 30 % de fonctionnaires en plus.
    Avez-vous les ressources nécessaires? Le gouvernement vous a‑t‑il ordonné de régler des problèmes de dotation?
    Nous avons les ressources. En fait, grâce au projet de loi C‑83, nous avons obtenu des ressources pour des unités d'intervention structurée et pour des soins de santé améliorés.
    Combien d'unités d'intervention structurée ont été créées, donc?
    Pardon?
    Combien d'unités d'intervention structurée ont été créées, par exemple à l'Établissement d'Edmonton pour femmes?
    Nous en avons une dans tous les établissements pour femmes.
    Il y en a une. D'accord.
    Une dernière question très brève. Elle s'adresse peut-être aussi à la vérificatrice générale.
    M. Brock voulait savoir s'il y a une très forte proportion d'Autochtones et de membres d'autres communautés parmi les délinquants violents dans le système carcéral. Nous adaptons-nous à cette situation ou, comme M. Dong l'a dit, maintenons-nous le système qui consiste à répartir les prisonniers entre les établissements à sécurité maximum ou minimum?
    Il n'y a pas eu de mise à jour depuis des années. Sommes-nous engagés dans la mauvaise voie à un moment où nous devons accueillir des délinquants excessivement violents? Votre système se prépare‑t‑il à affronter le phénomène, ou vous préparez-vous à faire des changements en fonction des problèmes d'hier?
    Non. Chaque année, nous effectuons une analyse du contexte. Nous essayons de voir ce qui s'en vient. C'est M. Motiuk qui se charge de ce travail avec son équipe. Nous étudions le profil de la population et les prévisions. Évidemment, nous nous y préparons. Comme je l'ai dit, l'autre élément important, c'est qu'il y aura un processus de classification de sécurité des délinquants autochtones qui tient compte à la fois du caractère autochtone et du genre.
     Quand?
    Nous en sommes à la troisième année. Il s'agit d'un protocole d'entente de cinq ans avec l'Université de Regina.
    Merci. Votre temps de parole est écoulé.
    Madame Bradford, vous avez la parole pour cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Desjarlais, je comprends votre douleur et je partage vos préoccupations.
    Je viens de Kitchener-Sud—Hespeler. Nous avons l'Établissement pour femmes Grand Valley. J'ai eu l'occasion de le visiter en juin dernier. Je suis très préoccupée par le sort des femmes autochtones là‑bas. Les femmes autochtones de l'Ouest forment la grande majorité de cette population carcérale. Connaissez-vous les chiffres? Quel est le pourcentage...?
    Le pourcentage à Grand Valley...?
    Oui.
    Non. Je n'ai pas ces chiffres sous les yeux.
    C'est la seule prison fédérale pour femmes en Ontario. Bon nombre de ces délinquantes viennent de l'Ouest parce qu'il n'y a pas suffisamment d'établissements pour elles dans leur région. Elles sont coupées de leur communauté, dont elles pourraient recevoir un soutien. Bon nombre d'entre elles sont mères. Elles viennent en Ontario, à trois ou quatre provinces de distance, pour purger leur peine.
    Pouvez-vous nous parler du Programme mère-enfant et des efforts qui sont déployés pour permettre aux détenues de garder leurs enfants? Bien sûr, ce sont des détenues condamnées à une peine d'au moins deux ans.
    Nous avons un programme mère-enfant. Il existe depuis un certain temps. Nous travaillons avec les services à la famille, tout d'abord, et les enfants peuvent rester avec leur mère à l'établissement lorsqu'ils sont d'âge préscolaire. Une fois qu'ils ont l'âge d'aller à l'école, ils peuvent rester avec leur mère à temps partiel. C'est un programme que nous encourageons, évidemment. Il est bon pour les mères de pouvoir garder leur enfant jusqu'à l'âge scolaire.
(1650)
    Le programme est‑il offert à toutes les mères qui ont un enfant d'âge préscolaire? Est‑il offert à toutes les mères? A‑t‑on la capacité voulue pour leur offrir le programme?
    Tout d'abord, elles doivent répondre à certains critères. Cela dépend de l'infraction. S'il s'agit d'une infraction contre un enfant, elles ne satisfont pas aux critères. Encore une fois, nous travaillons en étroite collaboration avec les services à l'enfance.
    Ce qui me préoccupe, c'est la rafle des enfants et ce que le Canada a fait par le passé pour séparer les enfants autochtones de leur famille d'origine. C'est une préoccupation.
    Ce que j'ai appris, c'est que la communauté de Kitchener est très favorable aux détenues qui se trouvent là‑bas. Plusieurs employeurs leur offrent des emplois. Certaines femmes peuvent aller travailler dans la collectivité. En particulier, il y a un adorable restaurant qui les soutient, et la Société Elizabeth Fry aussi, mais il n'y a pas de maisons de transition dans notre région pour accueillir ces femmes lorsqu'elles sont libérées, si bien qu'elles sont de nouveau arrachées à leur milieu pour aller encore plus à l'est, à Kingston.
     On les éloigne encore plus de tous les services de soutien qui les ont aidées pendant quatre ans ou peu importe le nombre d'années. Elles sont une fois de plus éloignées de leur milieu. Pis encore, pour récupérer leurs enfants, elles doivent prouver qu'elles peuvent les loger. Or, nous savons que, par les temps qui courent, presque personne ne peut y arriver, et c'est encore pire lorsqu'on émerge à peine du système carcéral.
    C'est désolant. Bien sûr, ces femmes n'ont pas fait les bons choix, à un moment donné, mais elles risquent de perdre leurs enfants pour toujours à cause d'une erreur de jeunesse. Nous les éloignons de plus en plus de leurs soutiens, à la fois de leur soutien initial et de celui qu'elles ont trouvé chez nous. Il me semble que nous ne faisons qu'aggraver le problème.
    Les transfèrements sont parfois justifiés par une raison particulière. Il se peut qu'une femme ne soit plus en sécurité à Grand Valley, et c'est pourquoi elle est déplacée.
    À l'approche de la libération, nous examinons normalement le plan de libération conditionnelle de la détenue. Si le plan de la femme prévoit qu'elle se trouvera dans la région du Pacifique, en Colombie-Britannique, et dit c'est là qu'elle recevra un soutien de son milieu, normalement, nous la transférons le plus près possible de la région pour qu'elle puisse être libérée dans un milieu qui l'aidera.
     Madame Bradford, je crains que notre temps de parole ne soit écoulé. Nous avons un peu dépassé la période prévue.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous étiez le prochain intervenant, mais on me dit que vous voulez passer votre tour.

[Traduction]

    Monsieur Desjarlais, vous avez la parole pour cinq minutes. À vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier mon collègue du Bloc québécois et tous mes collègues de ce que je considère comme une série de questions très importantes, car il me semble...
    Ce que j'entends, c'est que nous nous soucions tous du problème. J'espère sincèrement que nous n'aurons pas à revenir à cet audit tel quel. C'est plus qu'un défi; c'est une exigence. C'est ce qu'exigent la moralité et une compréhension élémentaire du problème.
    Je ne suis toujours pas convaincu que le SCC possède les compétences culturelles nécessaires pour faire ce travail correctement. C'est pourquoi tant d'Autochtones se sentent négligés, non entendus. Quelles mesures avez-vous prises pour vous renseigner sur l'histoire de notre pays? Vous avez parlé longuement et évoqué six ou sept fois l'histoire sociale des Autochtones. J'ai précisé au tout début qu'il ne s'agit pas d'un problème autochtone ou noir, mais d'un problème canadien qui tient à la façon dont nous pensons à nos semblables.
    La Commission de vérité et réconciliation est claire au sujet de bon nombre de ces résultats, et je voudrais seulement... Prenez cinq minutes pour lire le texte. Prenez cinq minutes. Mémorisez‑le. Des gens sont morts à cause de ces problèmes. Prenez seulement cinq minutes. Il y a sept appels à l'action qui s'adressent à votre ministère. Ce n'est pas beaucoup. Sept appels à l'action. J'ai besoin de pouvoir croire aujourd'hui que, lorsque je quitterai cette salle, vous ferez quelque chose au sujet de votre propre apprentissage et que vous ferez des efforts pour rétablir cette confiance. Je ne serai peut-être pas ici pour toujours. Vous pourrez peut-être attendre mon départ, mais j'espère que vous vous souviendrez aussi longtemps que vous le pourrez, au service des Canadiens, que ce sont de vraies personnes et qu'elles ont le droit à une chance.
    Connaissez-vous assez bien l'histoire de notre pays pour comprendre pourquoi ces gens en sont là? Sinon, ça va. Nous pouvons vous aider — les banquettes ministérielles pourront proposer quelque chose et l'opposition donnera son appui. De quelles ressources avez-vous besoin pour changer cela?
    Connaissez-vous l'histoire de la colonisation au Canada?
(1655)
    Oui. Je dirais que oui. Je dirais aussi que nous nous soucions du problème. Nous voulons nous assurer d'offrir aux délinquants qui sont sous notre garde ce dont ils ont besoin pour ne pas être réincarcérés. S'ils retournent en prison, pour nous, c'est un échec. Nous voulons qu'ils restent dans la collectivité.
    C'est pourquoi nous avons constitué le Groupe de travail national des aînés. C'est pourquoi nous avons le Comité consultatif national de la commissaire sur les Autochtones qui me donne des conseils. C'est pourquoi je vous invite tous à venir dans nos établissements pour voir ce qui...
    Oui, et c'est là le problème, commissaire. Les services sont pires. Ils ne donnent rien. Je vous dis que les Autochtones sont laissés pour compte et que quelque chose doit changer. Il faut que cela change au sommet.
    Si vous ne croyez pas avoir les ressources nécessaires pour faire ce travail, nous devons le savoir. J'ai besoin de savoir que vous avez confiance et que vous comprenez bien la question. Je vous répète qu'il ne s'agit pas de blâmer qui que ce soit. C'est une question de compréhension. Il y a là un échec. Nous parlons de l'échec de votre ministère, pas de sa réussite. Nous parlons d'un échec qui, objectivement, est abject et flagrant.
    Ce n'est pas moi qui le dis. La vérificatrice générale, dont le bureau indépendant est le plus important au Canada, vous a dit à maintes reprises que vous aviez échoué. Il faut que nous puissions avoir confiance. J'en ai besoin — les Autochtones en ont besoin — pour savoir que ces systèmes ne sont pas une imposture, puisque vous pouvez faire appel à une université pour faire le travail qui devrait être fait par les membres des communautés autochtones. Je n'en parlerai pas aujourd'hui, mais j'espère que vous prendrez cela au sérieux. Ce sont les membres de la communauté qui connaissent le mieux la situation.
    C'est ce que dit la Commission de vérité et de conciliation, si vous avez lu le rapport. L'appel à l'action 38 est explicite. Il n'y est pas question de consulter les universités. Ni le gouvernement. Ni qui que ce soit d'autre. Il dit qu'il faut trouver des façons de consulter directement les membres de la communauté.
     Merci beaucoup, monsieur Desjarlais.
    Nous allons maintenant passer à M. Kram, qui a été très patient.
    Ce sera plutôt Garnett Genuis.
    Vous êtes encore plus patient que je ne croyais.
    Monsieur Genuis, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question à poser sur quelque chose qui ne figure pas dans le rapport, soit l'accompagnement spirituel ou les services d'aumônerie dans les prisons. Divers groupes nous ont parlé de l'accès aux services pour les confessions minoritaires. À mon avis, les services d'aumônerie ont toute leur importance. Il faut veiller à ce que les détenus de confessions et de cultures différentes aient accès à des services d'aumônerie qui leur fournissent un soutien spirituel.
    Je ne cite pas souvent Nietzsche en des termes élogieux, mais il a vu juste lorsqu'il a dit que celui qui a une raison de vivre peut supporter presque n'importe quoi. Le sentiment que la vie a un sens, que sa propre personne a une ultime signification joue un rôle très important dans la réadaptation.
    Nous pourrions peut-être commencer par la vérificatrice générale.
     Avez-vous été en mesure de relever des inégalités dans l'accès aux services spirituels ou des problèmes de représentation dans la prestation de ces services? Si votre travail n'a pas porté sur cette question, nous passerons ensuite aux représentants du Service correctionnel.
(1700)
    Nous ne nous sommes pas concentrés sur l'ensemble de la population carcérale, mais nous nous sommes demandé si des options de justice réparatrice et adaptées à la culture étaient envisagées pour les délinquants autochtones. Il s'agit d'options comme les pavillons de ressourcement ou le travail avec les aînés, et, en fait, tout le concept de la prise en compte des antécédents sociaux des Autochtones, qui figure dans la loi et qui devrait être appliqué.
     Nous avons examiné un groupe d'une vingtaine de dossiers où nous avons constaté qu'il n'était pas tenu compte de l'échelle de classement par niveau de sécurité et que le délinquant autochtone était placé dans un établissement à sécurité plus élevée. Ce qui est préoccupant, c'est que nous n'avons vu aucune preuve que leurs antécédents sociaux autochtones étaient pris en compte dans ces 20 dossiers. Il n'y avait aucune documentation à ce sujet. Cela ne veut pas dire qu'il n'en a pas été tenu compte, mais que nous n'en avons vu aucune preuve. C'est pourquoi nous avons recommandé qu'on en fasse davantage en ce qui concerne les dérogations, mais aussi qu'on codifie et qu'on raffermisse la prise en compte de l'histoire sociale des Autochtones comme on est censé le faire. Il ne s'agit pas de punir davantage, mais de favoriser un meilleur rétablissement.
    Oui. La discussion sur l'histoire sociale est distincte de celle qui porte sur les services spirituels, mais je vous remercie de nous avoir expliqué une partie du travail qui a été fait.
    Les représentants du Service correctionnel pourraient peut-être vous parler un peu de la relation entre l'aumônerie et l'accès à ces services pour tout le monde.
    Nous accordons une grande valeur aux aumôniers. Ils font beaucoup. Bridges of Canada est chargée de la question. Selon leur spiritualité, les détenus obtiennent les services du conseiller spirituel dont ils ont besoin. Nous avons donc les services de ces conseillers, qui jouent un rôle important.
    De votre point de vue, cet accès est‑il disponible si quelqu'un est baha'i et dit qu'il cherche ce genre de soutien spirituel? Si quelqu'un est chrétien d'une confession particulière et qu'il est plus à l'aise de recevoir un soutien inspiré de sa tradition, diriez-vous que vos dispositions fonctionnent et que les détenus de toute confession peuvent obtenir le soutien qui correspond à leurs préférences? Ou est‑il difficile d'assurer l'accès à ces services?
    Les choses vont mieux maintenant grâce à Bridges. Il s'agit vraiment de répondre aux besoins des délinquants, et je n'ai certainement pas reçu de plaintes de leur part.
    Monsieur Tousignant, peut-être voulez-vous ajouter quelque chose.
    À votre avis, tout fonctionne-t-il très bien pour assurer l'accès aux services?
    Des intervenants de l'extérieur font entendre un autre son de cloche. Ils écouteront les témoignages d'aujourd'hui et auront peut-être quelque chose à ajouter. Il est important pour nous d'entendre votre point de vue, qu'il aille dans un sens ou dans l'autre.
    Vous estimez donc qu'on réussit bien à donner aux détenus de confessions et d'origines ethnoculturelles différentes l'accès aux services qu'ils souhaitent.
    Effectivement.
    D'accord.
    Très bien. Mon temps de parole est probablement écoulé.
    Vous cédez les quelques secondes qu'il vous reste?
     Je suppose que oui.
    À vous, monsieur McCauley.
     Il vous reste environ 15 secondes.
    Quinze secondes? Pas la peine. Je croyais que vous aviez dit 50.
    Merci.
    Monsieur Fragiskatos, vous avez la parole pour cinq minutes.
    En fait, je vais céder ma place, monsieur le président. Je vais donner mon temps de parole à M  Desjarlais.
    Vous avez cinq minutes, monsieur.
    Merci beaucoup, monsieur Fragiskatos.
    Je voudrais continuer à expliquer à quel point il est important de tenir compte de l'avis de ceux que j'ai rencontrés, notamment au sujet de la crise des femmes autochtones assassinées ou disparues. Vous traitez souvent directement avec les femmes dans ces prisons. À propos de celle que j'ai visitée, celle dont M. McCauley a parlé et qu'il a visitée lui aussi, nous avons entendu les mêmes choses, j'en suis sûr.
    L'un des appels à l'action les plus importants, et je tiens vraiment à remercier Mme Bradford d'en avoir parlé, concerne la souffrance qu'éprouvent ces femmes — et j'aurai du mal à en parler — lorsqu'elles sont privées de leurs enfants. Beaucoup de détenues ont des enfants, et elles ne les ont jamais vus depuis qu'elles sont dans le système carcéral. La souffrance psychologique... J'ai demandé tout à l'heure si vous compreniez la colonisation et ses profondes répercussions. La perte de ses enfants... Voilà comment on détruit toute une nation.
    L'une des premières choses à faire pour favoriser la guérison est de mettre en place des pavillons traditionnels de ressourcement culturel. C'est incontournable. J'en ai parlé au ministre. Il est venu dans ma circonscription et a visité une autre prison, le Centre de guérison Stan Daniels, une prison à faible sécurité pour hommes. Les hommes en parlent souvent aussi, et je ne veux pas taire le fait que ces hommes souffrent aussi, mais ces femmes passent toute leur vie — c'est une obsession — dans ces établissements à se demander où se trouve leur fille, où se trouvent leurs enfants, à se demander s'ils sont toujours en vie. Certaines ont perdu leurs enfants à cause de la crise des femmes autochtones assassinées ou disparues, et elles ne peuvent même pas assister aux funérailles.
    Pourquoi cela ne peut‑il pas changer? Quel est l'obstacle? M. McCauley a demandé pourquoi ne pas mettre en place les ressources dont ces femmes ont besoin. Elles subissent ce genre de traitement depuis des années, voire des décennies. La réconciliation ne sera jamais possible chez nous tant que vous ne prendrez pas conscience de ces éléments de justice fondamentaux et n'y serez pas profondément sensibles. Imaginez que vous n'alliez plus jamais revoir vos enfants. Quelle douleur pour toute une nation à qui cette souffrance a été infligée. Après cela, à quoi bon vivre?
    C'est un système punitif qui fait du mal aux Autochtones. J'ai besoin de savoir ce que vous allez faire pour mettre en place des pavillons de ressourcement traditionnels, instaurer un modèle de justice réparatrice que des personnes meilleures, plus intelligentes et plus sages que moi ont réclamé, un modèle que des nations comme la mienne ont bâti... Les nations ont survécu pendant des milliers d'années jusqu'à la dernière centaine d'années, disons. Le système autochtone a été détruit et remplacé par un régime punitif comme celui‑ci. C'est catastrophique. Quelles mesures prenez-vous pour instaurer le modèle de justice réparatrice que réclament les femmes, les hommes, les personnes bispirituelles et les non binaires autochtones...? C'est ce qu'ils demandent.
     Il faut qu'ils sachent quel sera votre plan d'action pour la construction de ces pavillons de ressourcement traditionnels. S'il y a un problème de ressources, veuillez nous le dire, madame la commissaire.
(1705)
    Merci.
    Comme vous le savez, nous avons 10 pavillons de ressourcement. Il y a Okimaw Ohci, pour les femmes. Également la Maison de ressourcement Buffalo Sage et le Pavillon de ressourcement Eagle Women, qui a ouvert ses portes en 2010, si je ne m'abuse. Nous avons également rencontré certains chefs et nous avons discuté de la possibilité d'ouvrir d'autres pavillons de ressourcement. C'est bien. Je crois vraiment aux approches réparatrices.
    M. Tousignant a récemment rencontré les 10 directeurs des pavillons de ressourcement. Je lui cède donc la parole.
     Merci, madame la commissaire.
    Monsieur Desjarlais, je tiens pour commencer à vous assurer, à vous garantir que nous sommes conscients de cette question tous les jours. Chaque jour, nous allons au travail et discutons des enjeux abordés ici même. Chaque jour. Cette question nous interpelle autant que vous, à certains égards.
     Nous avons travaillé sur le terrain avec de nombreuses communautés autochtones. J'ai entendu et vu cette souffrance. Je la comprends.
(1710)
    Vous devez comprendre mon exaspération...
    Désolé, messieurs. Je comprends, mais votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Desjarlais, vous aurez un autre tour si vous me permettez de faire respecter l'horaire.
    Monsieur Tousignant, je suis sûr que le député vous réinterrogera.
    Nous passons maintenant à M. McCauley... Non, c'est M. Kram.
     J'ai failli vous oublier. Vous n'avez que trois minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être là.
    Peut-être pourrions-nous prendre un peu de recul et considérer la situation dans son ensemble.
    Le fait qu'on parle de Service correctionnel Canada suppose que quelque chose a mal tourné au départ. Autrement, il n'y aurait rien à corriger. Pourriez-vous prendre du recul et considérer la situation dans son ensemble, réfléchir à toutes vos années d'expérience dans ce secteur et dire au Comité ce qu'on pourrait faire pour que ceux qui ont maille à partir avec le système de justice soient moins nombreux, au départ?
     Il serait bien qu'il n'y ait pas de crimes au départ, que nous n'ayons pas 15 000 personnes incarcérées au Canada.
    Que pouvons-nous faire? Avons-nous besoin d'offrir une meilleure éducation, de faire reculer davantage la pauvreté? Que peut‑on faire?
    La question déborde largement mon champ d'action. Je suis commissaire du Service correctionnel du Canada. Comme je l'ai dit, nous croyons, tout d'abord, aux programmes d'éducation.
    Nous avons également un secteur de la justice réparatrice. C'est une démarche vraiment très efficace. Lorsque vient le moment où le délinquant et la victime peuvent discuter, c'est un point tournant pour le délinquant. Il a tendance à ne pas récidiver. C'est une démarche très fructueuse, mais elle ne convient pas à tout le monde.
    Il y a bien d'autres choses également qui... Je le répète, les délinquants nous sont confiés et nous nous en chargeons. Notre devise est la suivante: « Transformons des vies, protégeons les Canadiens ».
    C'est très juste. Je ne m'attendais pas à une réponse simple et facile.
    Jetons un coup d'œil aux tableaux. Les figures 4.5, à la page 14, et 4.7, à la page 19, portent sur l'admissibilité à la libération conditionnelle et la préparation des délinquants, avant leur admissibilité à la libération conditionnelle. Les femmes obtiennent constamment de meilleurs résultats que les hommes selon presque tous les paramètres évoqués dans le rapport.
    Pourquoi? Avez-vous des programmes particuliers qui fonctionnent mieux pour les femmes ou qui sont conçus expressément pour elles?
    Quelles leçons pourrait‑on en tirer pour aider les détenus de sexe masculin?
    Tout d'abord, elles sont moins nombreuses. Nous avons actuellement 654 détenues et cinq établissements pour elles, plus un pavillon de ressourcement. Il y a autre chose. J'ai moi-même travaillé dans des prisons pour femmes — la seule au Canada — et j'ai été sous-commissaire chargée des femmes. Lorsqu'on travaille dans une prison pour femmes, on remarque qu'elles ont tendance à parler beaucoup plus et à s'engager. C'est une dynamique différente de celle qui est observée dans les établissements pour hommes.
    Merci beaucoup. Votre temps de parole est écoulé.
    Madame Shanahan, vous avez maintenant la parole pour trois minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à dire à quel point je comprends les propos que notre collègue, M. Desjarlais, a tenu aujourd'hui, notamment lorsqu'il a expliqué que le problème ne se limite pas à la marginalisation des Autochtones; c'est aussi une question de justice. Selon moi, le système de justice réparatrice que nous avons eu la chance de connaître grâce au membres des Premières Nations peut transformer notre système de justice et il le fera.
    Cela dit, nous parlons aujourd'hui d'obstacles systémiques. Je voudrais donc poser une question à la vérificatrice générale.
    Voici l'une de vos recommandations, madame Hogan: « Service correctionnel Canada devrait améliorer sa méthode de collecte des données sur la diversité au sein de la population de détenus afin d’avoir l’assurance que les données recueillies sont exhaustives. Il devrait aussi harmoniser sa méthode de collecte avec celle de Statistique Canada. » Pourquoi?
(1715)
     Ce que nous avons constaté, et les témoignages d'aujourd'hui l'ont confirmé, c'est qu'il y a beaucoup de données disponibles au Service correctionnel du Canada. Bon nombre des données recueillies sur les minorités visibles n'étaient pas classées selon les 11 catégories définies par Statistique Canada. Il serait possible d'avoir beaucoup plus de données si le système de Statistique Canada était appliqué.
    Le Service correctionnel utilise une échelle d'évaluation de 30. D'après ce que nous avons appris, lorsqu'un délinquant doit s'auto-identifier et choisir la catégorie de minorité visible qui convient, il s'y perd et il ne sait pas trop quelle case cocher. Nous avons examiné les systèmes et relevé des lacunes de plus en plus importantes dans les données saisies. Nous avons estimé qu'il était important d'avoir ces données désagrégées, mais d'une manière qui soit significative et utile.
    Nous voulions faire cette recommandation au Service correctionnel pour qu'il s'aligne sur Statistique Canada, mais aussi pour qu'il fasse preuve de plus de diligence en s'assurant que les données sont saisies et que l'information est complète afin qu'il puisse prendre des décisions éclairées à l'avenir.
    C'est une recommandation très intéressante, madame la commissaire Kelly. Pouvez-vous nous dire où en est le SCC à cet égard, et êtes-vous d'accord?
    Oui. En fait, nous avons récemment fait des progrès dans la simplification et la définition des catégories de race. Comme l'a dit la vérificatrice générale, nous en avions beaucoup — j'en ai compté 25 — et maintenant, dans les rapports de notre organisation, nous en avons sept.
    Très bien. Merci.
    La vérificatrice générale a également recommandé que le SCC améliore la représentation des divers groupes dans l'effectif. On a parlé un peu de ce qui fait l'importance de l'enjeu et de l'attention particulière à accorder aux groupes surreprésentés. Pouvez-vous nous parler de cette recommandation et de ce que fait le SCC pour y donner suite?
    Je répète ce que j'ai dit tout à l'heure. Nous avons toujours dépassé le taux de disponibilité dans la population active pour les Autochtones et les minorités visibles, mais nous avons encore du travail à faire pour les personnes handicapées. Du côté des femmes, nous y sommes presque. Nous en sommes à 51 % et la disponibilité au sein de la population active est de 52,6 %. Par ailleurs, pour ce qui est d'avoir plus de représentants de la population que nous servons — et c'est ce que j'ai expliqué —, nous avons maintenant pour chaque établissement des objectifs de représentation qui tiennent compte de la population. Disons que 70 % des délinquants incarcérés dans un établissement donné sont des Autochtones. Cela fait partie de l'équation. Nous nous sommes fixé des objectifs de représentation ambitieux.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour trois minutes.
    Je vais encore laisser mon tour de parole à M. Desjarlais.
    Dans ce cas, monsieur Desjarlais, vous avez la parole.

[Traduction]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à mon collègue du Bloc de m'accorder plus de temps pour m'assurer que les Canadiens comprennent vraiment les conditions qui règnent dans ces établissements.
    Je serai direct: je souhaiterais plus de franchise de la part de la commissaire et, je dirais, plus de transparence, au sujet de l'état de ces établissements et des ressources qu'ils reçoivent. De toute ma vie, ayant travaillé avec des Autochtones et vécu avec eux, je n'ai jamais rencontré personne qui ait eu l'occasion de suivre le parcours de guérison qu'il souhaitait. Nous avons encore beaucoup à faire. Nous commençons à peine à acquérir une compréhension de l'histoire de notre pays qui nous permettrait d'instaurer la justice et l'égalité des chances en toute équité, étant donné les traumatismes de notre passé.
     L'appel à l'action 36 de la Commission de vérité et réconciliation porte sur les survivants des violences sexuelles. Entre violence sexuelle et colonialisme, l'intersectionnalité est frappante. Il suffit de demander à bon nombre des survivants des pensionnats de parler de leur expérience. Des enfants très vulnérables ont été exploités à cause des politiques du Canada. Cette forme d'injustice est encore omniprésente dans notre population aujourd'hui. Peu d'accusations ont été portées au pénal contre les auteurs de ces violences. Bon nombre d'entre eux sont encore vivants, libres de circuler au Canada, tandis que les femmes qui ont été leurs victimes doivent rester en prison.
    L'appel à l'action vous demande d'examiner les effets de ces sévices, d'offrir des ressources et des soutiens pour les survivants de violences sexuelles et d'en tenir compte dans votre compréhension des expériences qu'ils ont vécues.
    Notre système de justice est injuste. Inutile de vous le dire, madame la commissaire Kelly. Vous le savez. Vous devez composer avec les regrettables réalités d'un système de justice défaillant, et votre rôle est l'un des plus difficiles qui soient dans notre pays. Vous devez tenter de trouver le moyen de travailler à la guérison des êtres, après que le Canada a fait tant de mal. Si vous avez discuté avec les femmes en cause, vous savez probablement le sentiment de profonde injustice qu'elles ressentent. Elles ont été constamment agressées tout au long de leur vie, et elles se retrouvent là, alors que les agresseurs se promènent en toute liberté.
    Il est clair que les Autochtones et les Noirs sont surreprésentés dans le système carcéral, mais celui‑ci doit aussi trouver le moyen de montrer que ces personnes ont une vie marquée par des traumatismes et sont contraintes par nos politiques...
(1720)
    Merci, monsieur Desjarlais.
    Nous passons maintenant à M. McCauley. Trois minutes, s'il vous plaît.
    Merci.
    Madame Kelly, je voudrais revenir à la question de l'augmentation du nombre d'établissements pour femmes dans les Prairies. Qu'entrevoit‑on pour l'avenir? De toute évidence, l'Établissement d'Edmonton pour femmes n'est pas propice à une guérison adéquate. La majorité des détenues sont des Autochtones. Le système ne fonctionne pas.
    Quel est le plan pour l'avenir? Prévoit‑on un plus grand nombre de pavillons de ressourcement? Le placement en établissement ne donne rien. Qu'allons-nous faire pour régler ce problème?
    Nous avons l'Établissement d'Edmonton pour femmes et Okimaw Ohci. Alain Tousignant a rencontré tous les directeurs des pavillons de ressourcement. Lorsque c'est une solution sensée, les femmes sont transférées dans un pavillon de ressourcement. Comme je l'ai dit, nous avons aussi la Maison de ressourcement Buffalo Sage et le Pavillon de ressourcement Eagle Women.
    Vous dites: « Lorsque c'est une solution sensée... », que...
    Je veux dire, pour celles qui répondent aux critères pour aller dans un pavillon de ressourcement.
    Quels sont les critères? Je les ai passés en revue. Nous avons les niveaux de sécurité moyen, minimum et maximum dans un seul établissement. S'agit‑il de faire passer toutes les détenues dans des conditions de sécurité minimum et moyenne dans ces pavillons?
     Okimaw Ohci est à la fois à sécurité minimum...
    De quoi aurions-nous besoin? Les détenues sont placées en établissement, et cela ne fonctionnera pas.
    Il y a à la fois sécurité minimum et moyenne. Nous pouvons envisager de transférer des détenues de...
    Je trahis ici mon ignorance, comme il m'arrive souvent de le faire au Comité, mais de quoi aurions-nous besoin?
    Prenons l'établissement d'Edmonton, qui se trouve tout près de mon bureau. Disons que, à tout moment, 70 % des détenues sont des Autochtones. La proportion varie entre 60 à 80 %. Combien y en a‑t‑il qui sont là parce que nous n'avons rien fait pour construire des installations en plus grand nombre et de meilleure qualité... des installations mieux adaptées?
    Nous avons donc un pavillon de ressourcement. Je n'ai pas l'impression qu'on soit prêt à dire qu'il y a peut-être une cinquantaine de détenues de l'établissement d'Edmonton que nous devrions envoyer immédiatement... vers des installations mieux adaptées à leur culture ou plus propices à la guérison. De quoi aurons-nous besoin? Vous avez dit avoir toutes les ressources et tout le personnel nécessaires.
    Dans toutes nos installations, nous établissons le profil de la population. Il y a un calendrier à respecter. Les cotes de sécurité sont examinées. Si, à l'occasion de cet examen, nous remarquons qu'une détenue a une cote de sécurité moyenne, nous pouvons envisager de la transférer à Okimaw Ohci. C'est un examen qui se fait de façon continue.
    Avons-nous une capacité suffisante dans ces pavillons? Avons-nous besoin d'un plus grand nombre de pavillons? Nous en faut‑il plus dans les Prairies, plus près d'Edmonton, plus près de nos grands centres?
(1725)
    Vous me permettez? Pour implanter un pavillon de ressourcement, il faut que la collectivité soit disposée à l'accueillir et accepte qu'il soit implanté à un certain endroit...
    Il y a donc un travail préalable à faire dans les collectivités.
    Nous avons des gens...
    Dans ce cas, pourriez-vous dire au Comité avec quelles collectivités vous travaillez pour essayer de créer cette capacité accrue?
    Oui. Nous en avons discuté avec les chefs que nous avons rencontrés. Souvent, ils diront eux-mêmes...
    Madame la commissaire, je vais devoir vous interrompre.
    Je voudrais obtenir une réponse à la demande de documents de M. McCauley. Vous pouvez nous expliquer tout ce qui se trouve dans ce document que vous nous enverrez, si vous le voulez, mais je dois tenir compte des contraintes de temps.
    Le dernier député que nous allons entendre aujourd'hui est M. Dong.
    Vous avez la parole pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président. C'est un sujet très intéressant.
    Je suis désolé que beaucoup de questions déplaisantes aient été adressées à la commissaire Kelly.
    Les personnes dont vous avez la garde ont subi maints échecs à divers stades de leur vie.
    Les questions qui portent sur une meilleure éducation, de meilleurs programmes et les antécédents sociaux sont toutes excellentes, mais je doute que vous ayez beaucoup de contrôle sur les antécédents des détenus. Vous n'en avez pas moins la responsabilité lorsqu'ils vous sont confiés.
    J'ai regardé le passage portant sur la préparation à la libération. Il y est question de l'aspect correctionnel. Je relève des données étonnantes pour les populations autochtones. Les détenus autochtones tardent plus que d'autres à obtenir une libération conditionnelle ou une libération anticipée. Pourquoi? Est‑ce à cause d'un manque de ressources pour préparer leur libération? Je ne comprends pas.
    Il y a quelques éléments de réponse. Évidemment, à cause de la COVID‑19, qui ne doit pas servir d'excuse, il était plus difficile d'offrir des programmes. Les délinquants autochtones, comme je l'ai dit lorsque j'ai parlé du profil, ont des besoins assez importants. Il leur faut des programmes plus intensifs. Parmi ces délinquants, bien que les peines se fassent plus longues, il y en a qui purgent des peines plus courtes. Nous n'avons pas beaucoup de temps pour offrir ces programmes intensifs. C'est pourquoi il y a parfois des retards.
    Ce que nous avons mis en place, cependant, c'est un outil d'établissement des priorités, de sorte que les délinquants dont la libération est imminente aient la priorité pour participer aux programmes. Il y a aussi...
    Vous venez de me rappeler une autre question que j'allais poser. Des peines obligatoires ont été instaurées. Cela a‑t‑il contribué à l'augmentation du nombre de personnes incarcérées? Avez-vous des statistiques à ce sujet?
    Non, pas vraiment. Si les peines minimales obligatoires pour certains crimes sont bien ce à quoi vous songez, les détenus accueillis dans le système correctionnel fédéral purgent une peine d'au moins deux ans...
     Vous n'avez pas de données ciblées. D'accord.
     Pour revenir aux questions, y a‑t‑il quelque chose que les législateurs et...
    Soyez très bref, s'il vous plaît.
    ... le gouvernement peut faire pour vous aider à cette étape du processus correctionnel? Vous faut‑il peut-être plus de ressources pour préparer la libération anticipée des détenus autochtones?
    Évidemment, si nous avions plus de ressources, nous pourrions en faire plus, mais pour les délinquants autochtones, nous procédons à un examen automatique dès qu'ils terminent un programme correctionnel. Il s'agit d'un examen de leur niveau de sécurité pour voir s'ils pourraient être transférés à un niveau de sécurité inférieur...
    C'est pour les délinquants autochtones...? D'accord.
    C'est pour les délinquants autochtones parce qu'ils sont surreprésentés.
    Merci beaucoup.
    Je crains que ce ne soit tout pour aujourd'hui. Merci à tous de leur participation et de leurs propos très sentis. Merci encore de l'esprit de coopération dont les membres du Comité ont fait preuve en partageant leur temps de parole.
    Je tiens à remercier la commissaire et son équipe, ainsi que la vérificatrice générale et son équipe, d'avoir comparu.
    Je souligne également que nous accueillons une délégation de plusieurs pays — le Sénégal, le Rwanda et le Vietnam —, et j'invite les membres du Comité à patienter quelques minutes. Nous aimerions faire une photo avec ces vérificateurs et, je crois, ces législateurs, qui sont ici pour apprendre ce que j'appellerais les « pratiques exemplaires » en matière d'audit.
     Bienvenue dans l'hiver glacial du Canada. En fait, vous êtes arrivé à un moment où la température est clémente. La semaine dernière, il faisait ‑25 ° C. Aujourd'hui, il doit faire autour de zéro.
    Je lève la séance et je prie de nouveau les membres du Comité de rester quelques minutes encore. Merci.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU