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PACP Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des comptes publics


NUMÉRO 128 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 4 juin 2024

[Enregistrement électronique]

  (1540)  

[Français]

    Je vous souhaite la bienvenue à la 128e réunion du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes.

[Traduction]

     La réunion d'aujourd'hui se déroule selon un format hybride, conformément au Règlement. Des membres sont présents en personne dans la salle et d'autres participent à distance grâce à l'application Zoom.
    Je demanderais à tous les députés et aux autres personnes présentes de consulter les fiches disposées sur la table pour connaître les consignes de prévention des incidents de rétroaction acoustique.

[Français]

    Veuillez garder à l'esprit les mesures préventives en place pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris les interprètes.

[Traduction]

    Je vous rappelle aussi de vous servir uniquement des écouteurs noirs approuvés que vous voyez branchés, ou qui se trouvent devant vous. N'oubliez pas qu'au début des réunions, les écouteurs ne sont pas branchés. Branchez le vôtre si vous en avez besoin, évidemment, et tenez‑le à distance de tout microphone en tout temps. Si vous ne vous en servez pas, mais qu'il est branché, déposez‑le face vers le bas sur l'autocollant qui se trouve sur la table à votre droite ou peut-être à votre gauche.
    Nous avons quelques questions d'ordre administratif à régler avant de commencer.
    Votre sous-comité s'est réuni le lundi 3 juin 2024 pour examiner les travaux du Comité et a convenu de faire les recommandations suivantes. Il se réunit de nouveau aujourd'hui à 18 h 30 en raison des rapports de vérification qui ont été déposés aujourd'hui. Il est convenu, pour l'instant, qu'en ce qui concerne l'étude par le Comité du Rapport 1, ArriveCAN parmi les rapports 2024 de la vérificatrice générale du Canada, le Parti conservateur et le Parti libéral choisissent chacun un témoin parmi ceux qui restent et en informent la greffière. Le courriel a été envoyé. La raison est que chacun avait proposé un témoin et que ce témoin a refusé ou n'était pas disponible. Il a aussi été décidé que la Gendarmerie royale du Canada serait invitée à comparaître le jeudi 13 juin 2024, de 15 h 30 à 17 h 30.
    Le Comité souhaite‑t‑il approuver le premier rapport du Sous-comité de la présente législature? Je m'attends à une réponse affirmative, s'il vous plaît.
    Des députés: D'accord.
    Le président: Très bien. Voilà qui fait plaisir à notre greffière.
    À titre de rappel, dorénavant, tous les propos doivent être adressés à la présidence.

[Français]

    Conformément à l'article 108(3)g) du Règlement, le Comité entreprend l'examen du deuxième rapport de 2024 de la vérificatrice générale du Canada. Tiré des rapports 2 à 4 de 2024 et intitulé « Le logement dans les collectivités des Premières Nations », ce rapport a été renvoyé au Comité le mardi 19 mars 2024.

[Traduction]

     J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
    Nous accueillons deux représentants de l'Assemblée des Premières Nations: le chef Lance Haymond et le chef Brendan Mitchell, qui est chef régional de l'APN à Terre-Neuve.
    Merci à vous deux d'être ici aujourd'hui.
    Le grand chef Cody Thomas, de la Confédération des Premières Nations du Traité no 6, se joint à nous par vidéoconférence.
     Est‑ce que vous nous entendez bien, chef Thomas?
    Très bien.
    Nous accueillons aussi le chef Sidney Peters, de la Première Nation de Glooscap.
     Chef, vous m'entendez bien jusqu'à présent?
     Oui, je vous entends bien.
    Excellent. Merci.
    Avant que chaque groupe prenne cinq minutes pour son exposé préliminaire, le chef Mitchell voudrait ouvrir la séance par une prière, et je suis tout disposé à acquiescer à sa demande.
    Chef Mitchell, je vous cède la parole. Nous passerons ensuite aux déclarations préliminaires.
    Veuillez vous lever, tout le monde.
    Créateur, nous rendons grâce pour cette belle journée à Ottawa et pour cette occasion de nous réunir dans un esprit d'amitié, de parenté, de communauté, de collaboration et de réconciliation.
     Créateur, nous vous demandons de nous éclairer dans nos délibérations d'aujourd'hui, dans les propos que nous tiendrons et dans l'écoute des questions qui seront posées.
     Créateur, il s'agit d'une conversation importante aujourd'hui, car un grand nombre de nos communautés luttent pour obtenir les conditions de vie élémentaires dont jouissent la plupart des gens au Canada.
     Créateur, nous vous demandons de nous aider dans cette cause, d'encourager tout le monde ici à faire de son mieux pour assurer un avenir meilleur aux gens de nos communautés autochtones.
     Créateur, nous demandons aussi que vous nous encouragiez à incarner nos sept enseignements sacrés et à toujours faire preuve d'humilité, d'honnêteté, de respect, de vérité, de courage, de sagesse et, surtout, d'amour les uns pour les autres.
    Msit no'kmaq.
     Merci.
     Merci.
    Nous en arrivons maintenant aux déclarations préliminaires.
    Nous commençons par le premier de la liste, le chef Haymond de l'Assemblée des Premières Nations.
    Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
     Bonjour. Je suis le chef Lance Haymond de la Première Nation de Kebaowek. Je détiens le portefeuille du logement et de l'infrastructure à l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador. Je copréside aussi le Comité des chefs sur le logement et l'infrastructure de l'APN. J'ai accepté récemment le poste de directeur général de Yänonhchia', une initiative novatrice de financement du logement qui offre des hypothèques dans la réserve sans garantie de la bande ou du gouvernement.
     J'aimerais souligner d'abord que nous nous trouvons sur le territoire ancestral de ma Première Nation...

  (1545)  

[Français]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président.

[Traduction]

    Chef Haymond, nous vous revenons tout de suite. Je m'excuse de vous interrompre.
     Je suppose que nous avons un problème avec l'interprétation. Je vais continuer à parler jusqu'à ce que notre collègue du Bloc entende la version française.
    Je suis désolé, chef. Nous voulons juste nous assurer que tout se déroule bien dans les deux langues officielles.
    Je vois un pouce en l'air.
    Madame Sinclair-Desgagné, est‑ce que vous m'entendez en français? Parfait.
    Veuillez poursuivre, chef Haymond.
     J'aimerais souligner que nous nous trouvons sur le territoire ancestral de la nation algonquine. Nous sommes toujours heureux de vous accueillir sur notre territoire pour la conduite de nos affaires.
    Merci de me donner l'occasion de vous faire part...
    Chef, excusez-moi un instant. Puis‑je vous demander de ralentir un peu, pour faciliter l'interprétation?
     Pas de problème.
     Merci beaucoup.
     Merci de cette occasion que vous m'offrez de faire connaître notre point de vue sur le rapport de la vérificatrice générale concernant le logement dans les communautés des Premières Nations.
     Nous ne sommes pas surpris de lire dans le rapport de la vérificatrice générale que le problème du logement persiste dans nos communautés, malgré tout ce qui a été relevé dans différents rapports depuis plus de 20 ans et même si le logement est un droit fondamental de la personne. Le premier message au tout début du rapport répète exactement ce que nous disons depuis longtemps, à savoir que l'amélioration du logement pour les Premières Nations est essentielle à leur bien-être physique, mental et économique. C'est parce que le logement tient une place fondamentale dans toute société. Je crois fermement qu'il est assez difficile pour moi, en ma qualité de chef, de m'attaquer aux problèmes sociaux des membres de ma communauté alors que tout le monde s'inquiète d'avoir un toit au‑dessus de sa tête.
    Le dossier de la crise du logement dans les communautés autochtones du Québec et du Labrador est bien étayé depuis près de 25 ans. Nous avons des données fiables qui indiquent, entre autres, qu'il faudrait d'ici 5 ans ajouter 10 000 logements à notre parc actuel de 15 000 pour combler l'arriéré accumulé, notamment en raison du surpeuplement, de la croissance démographique, de la migration de membres qui aimeraient peut-être vivre dans leur communauté et du remplacement de logements condamnés. Nos chiffres indiquent aussi que 8 000 logements ont besoin de rénovation ou de réparations.
    Les analyses, étalées sur une longue période, révèlent que lorsque le gouvernement fédéral investit dans le logement des Premières Nations au‑delà de ses budgets réguliers, l'effet est bénéfique pour nos communautés. Bien sûr, comme les besoins continuent de grandir, l'augmentation se fait à un rythme plus lent, ce qui m'amène à la recommandation 2.26 du rapport de la vérificatrice générale, qui se lit comme suit:
    Services aux Autochtones Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement, en collaboration avec les Premières Nations, devraient élaborer et mettre en œuvre une stratégie pour combler l'écart en matière de logement d'ici 2030. Cette stratégie devrait établir la façon dont ils coordonneront leurs efforts, détermineront les besoins et les fonds nécessaires, et définiront des cibles mesurables pour faire le suivi des progrès.
     Nous croyons que les Premières Nations peuvent jouer un rôle important pour combler l'écart en matière de logement, non seulement dans l'élaboration d'une stratégie, mais aussi dans le cadre financier qui en découle. Par exemple, nous savons qu'il y a une continuité de besoins dans la collectivité, depuis les refuges jusqu'aux logements sociaux et l'accession à la propriété privée. Le logement privé est justement un modèle qu'une plus grande proportion de nos membres adopterait si les occasions se présentaient. Il y a là un potentiel qui mérite d'être exploité davantage. Les Premières Nations et leurs institutions financières pourraient alors contribuer de façon importante à combler l'écart en matière de logement. Le Réseau de financement du logement autochtone de Yänonhchia' offre une de ces occasions et fait partie de la solution.
    Nous avons cependant besoin que nos partenaires s'engagent à renforcer les capacités, à prendre les rênes et à nous aider à obtenir des capitaux. Il existe de bonnes pratiques dans ce domaine. Nous avons mis à l'essai et pratiqué cette formule auprès des Premières Nations du Québec depuis des années. Nous savons qu'elle est nécessaire à l'échelle nationale. Le réseau de l'Association nationale des sociétés autochtones de financement et les institutions financières autochtones sont les outils à mettre à contribution pour régler ce problème.
    En ce qui concerne, précisément, la question des capacités, la recommandation 2.46 du rapport de la vérificatrice générale cadre parfaitement avec notre stratégie régionale. Le renforcement des compétences et des capacités est un aspect crucial de tout plan d'action visant à améliorer le logement dans nos communautés, parce qu'elles sont souvent aux prises avec des situations complexes de grand besoin, qui augmentent dans un contexte de sous-financement continu.
    La recommandation 2.60 porte sur le transfert des responsabilités de Services aux Autochtones Canada. Vous connaissez la situation du logement dans les communautés des Premières Nations. Le rapport en dit long sur ce sujet. Oui, nous voulons exercer plus de gouvernance en matière de logement, mais pas à n'importe quel prix.
    Les conditions actuelles — notamment l'arriéré accumulé et les programmes tels qu'ils ont été conçus — ne se prêtent pas à un transfert de responsabilités. Il y a des conditions à remplir au préalable pour que les Premières Nations s'ouvrent à un tel changement et prospèrent dans ce nouveau cadre. Toute initiative de réforme, de modernisation et de transfert doit être accompagnée d'un financement en amont suffisant, prévisible et récurrent, qui ne repose pas uniquement sur les enveloppes de financement actuelles.
    Je vous remercie de m'avoir invité et de m'avoir écouté. Je serai heureux de répondre à vos questions après les exposés des autres témoins.
    Meegwetch.

  (1550)  

     Merci, chef Haymond.
    Je cède maintenant la parole au chef Mitchell.
    Vous disposez de cinq minutes environ.
    Merci beaucoup.
    J'espère pouvoir m'en tenir à cinq minutes. Je ferai de mon mieux. En fait, je m'attendais à avoir une demi-heure, alors je n'étais pas très bien informé, mais voici.
    Chef Mitchell, je vais vous éclairer un peu. Essayez de vous en tenir à cinq minutes, et croyez-moi, il y a toutes sortes de gens dans cette salle qui vont vous poser des questions et vous occuper une bonne partie de cette demi-heure.
    Je vous cède la parole.
     C'est très bien. Merci, monsieur le président.
    Je m'appelle Brendan Mitchell. Je suis le chef régional de Terre-Neuve à l'Assemblée des Premières Nations.
     Dans le cadre de mes fonctions à l'Assemblée, je préside le comité de gestion, mais je suis aussi titulaire de portefeuille et président du Comité des chefs sur le logement et l'infrastructure, où nous discutons aussi de l'eau et de l'itinérance.
    Je suis honoré d'être ici avec vous aujourd'hui, et je reconnais que nous sommes réunis sur le territoire non cédé et non abandonné du peuple algonquin anishinabe.
     J'aime toujours venir à Ottawa. Le chef Lance et moi, avec ceux qui sont en ligne, avons l'occasion ici aujourd'hui de parler à des personnes de ce pays qui, je crois, ont le pouvoir de nous aider, espérons‑le, à remédier à la pauvreté des conditions de vie dans nos communautés.
    Un logement, de l'eau, des routes, des bâtiments communautaires, des services publics, une connexion Internet fiable, voilà autant de choses que de nombreux Canadiens tiennent pour acquises. J'étais l'un d'eux, vivant à Corner Brook, à Terre-Neuve, où nous avons toutes ces choses en abondance. Je peux encore aller pêcher dans une rivière à saumon et boire à même l'eau d'un ruisseau sans craindre de m'empoisonner ou de tomber malade. Nous sommes bénis, à bien des égards, de nous trouver dans cette région du monde, mais beaucoup de gens dans nos communautés n'ont pas accès aisément à ces choses‑là. Ils n'ont pas les conditions de vie dont jouissent la plupart des Canadiens.
    Pour les Premières Nations, éliminer les lacunes en matière d'infrastructure est un des engagements les plus ambitieux, les plus importants et les plus attendus que le gouvernement du Canada ait pris.
     Il est désolant de constater que le rapport de la vérificatrice générale met en lumière une tendance inquiétante et persistante à l'échec lorsqu'il s'agit pour le gouvernement fédéral de répondre aux besoins des Premières Nations en matière de logement. Je suis profondément troublé par ses conclusions, par l'absence de progrès et par l'inaptitude du gouvernement à s'attaquer efficacement à la crise actuelle des logements insalubres et inadéquats dans les Premières Nations du pays.
    Le rapport de la vérificatrice générale réaffirme ce que les Premières Nations disent depuis des décennies: le gouvernement fédéral ne respecte pas ses obligations de logement envers les Premières Nations. Comme le souligne la vérificatrice générale, Services aux Autochtones Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement, les deux organismes gouvernementaux responsables de ce dossier, n'ont pas amélioré de façon sensible les conditions de logement des Premières Nations depuis 2015.
    Le rapport indique clairement que le gouvernement du Canada ne respecte pas son propre délai pour combler l'écart d'ici 2030. Les Premières Nations méritent mieux que des promesses non tenues. Tout récemment, j'ai été interviewé par APTN, et on m'a posé des questions au sujet du budget fédéral et du rapport de la vérificatrice générale. « Chef Mitchell, m'a‑t‑on demandé, quelles sont les chances de combler l'écart d'ici 2030? » J'ai dit: « Cela n'arrivera pas. Cela ne peut pas arriver. » En fait, ce que j'ai dit — et je vous en fais part ici —, c'est que, à mon avis, l'écart va se creuser d'ici 2030.
     Nous avons beaucoup de travail à faire.
    Le rapport de la vérificatrice générale affirme que la solution commence par des investissements à long terme dans le logement des Premières Nations, ce que le budget de 2024 ne fait pas. J'ai réitéré mes préoccupations et mes opinions lors d'une conférence de presse qui a eu lieu ici, sur la Colline du Parlement, avec la cheffe nationale Cindy Woodhouse Nepinak et d'autres chefs, tout de suite après l'annonce du budget, bien sûr, et le commentaire de la vérificatrice générale.
     Nous faisons face à une dure situation.
     L'APN a travaillé avec des experts de l'industrie et plus de 400 Premières Nations pour élaborer, de concert avec Services aux Autochtones Canada, un rapport marquant qui évalue les investissements en capital et en exploitation que le gouvernement du Canada doit faire s'il veut honorer son engagement à combler les lacunes d'infrastructure chez les Premières Nations d'ici 2030. On a fait beaucoup de travail pour dresser le portrait de la situation actuelle.
     Comment faire pour combler l'écart d'ici 2030? J'estime quant à moi que nous n'y arriverons pas. Pour être précis, en matière de logement dans les communautés des Premières Nations, le rapport signale un écart de 135 milliards de dollars d'après les données de 2023. Et cet écart ne fera que se creuser davantage tant qu'on ne se résoudra pas à faire des investissements décisifs.
    Un meilleur logement permet d'accéder à l'emploi, à la richesse et à une bonne santé physique et mentale. Je crois fermement en l'éducation de nos jeunes dans nos communautés, non seulement à Terre-Neuve‑et‑Labrador, mais partout au pays. Un meilleur logement pourrait faire toute la différence. Les jeunes ont de meilleures chances de s'instruire et de créer des ouvertures pour eux-mêmes et, plus tard, pour leur famille.
     Bien sûr, c'est le contraire qui se produit aujourd'hui. Beaucoup de jeunes quittent leur localité et leur maison parce qu'ils n'aiment pas leurs perspectives de logement et la situation communautaire où ils sont pris. Où est‑ce qu'ils aboutissent? Ils aboutissent dans nos grands centres urbains, souvent dans la rue, sans abri, en difficulté et parfois incarcérés, et, oui, certains finissent par y trouver la mort.

  (1555)  

     Personnellement, je crois qu'un foyer d'appartenance solide, avec un soutien culturel, matériel et financier, est ce qui manque en ce pays pour renverser la situation des jeunes Autochtones d'aujourd'hui. La solution passe en partie par un meilleur logement.
    Le rapport de la vérificatrice générale demande un changement fondamental dans le mode d'élaboration des programmes et des politiques fédéraux. Ce changement s'impose de toute urgence pour favoriser des progrès importants, ce qui signifie que les politiques fédérales en matière de logement doivent être élaborées avec le plein concours de l'APN et des Premières Nations.
    Le budget fédéral de 2024 ne répond pas aux besoins immédiats et à long terme des Premières Nations du Canada.
    Je reconnais que des investissements ont été faits ces dernières années pour combler le fossé socioéconomique entre les Premières Nations et le reste du Canada. Mais des écarts persistent et se creusent davantage dans des secteurs critiques comme le logement et l'infrastructure.
     Chef Mitchell, je vais vous demander de conclure maintenant, s'il vous plaît.
     Merci beaucoup.
    Ces investissements ne sont pas seulement des engagements financiers; ils sont essentiels au respect des obligations fiduciaires du Canada envers les Premières Nations et à la correction des inégalités historiques pour assurer la santé, la sécurité et la prospérité des Autochtones.
    Hier, j'ai eu l'occasion de faire un exposé devant cinq ministres et trois secrétaires parlementaires au Centre Shaw, ici à Ottawa. Je leur ai présenté une analogie. J'ai leur ai dit qu'il fallait s'imaginer en train de manger une pomme. On dit qu'une pomme se mange une bouchée à la fois. Nous avons une grosse pomme devant nous en ce moment, une très grosse pomme, et nous n'allons pas la manger à petites bouchées. Nous avons besoin de gros investissements pour tenter d'améliorer la situation, surtout si nous parlons toujours de combler l'écart d'ici 2030.
     Chef Mitchell, c'est l'endroit idéal pour vous arrêter. Je suis certain que des gens vont vous revenir avec des questions.
     Merci, tout le monde.
     Merci de votre compréhension.
    Grand chef Thomas, vous avez la parole pendant environ cinq minutes.
     [Le témoin s'exprime en langue crie.]
    [Traduction]
    Bonjour, distingués membres du Comité permanent des comptes publics. Je m'appelle Cody Thomas. Je suis le grand chef de la Confédération des Premières Nations du Traité no 6 et le chef de la nation crie d'Enoch.
    Je m'adresse à vous aujourd'hui à partir de chez moi, dans la nation crie d'Enoch, sur le territoire visé par le Traité no 6.
    Tout d'abord, je m'excuse, mais je dois saluer la prière d'ouverture et remercier le Créateur pour le jour inaugural de notre vie, la vie qui nous est donnée aujourd'hui. Je remercie le Créateur et je salue la prière d'ouverture.
    Merci de l'occasion qui m'est donnée de vous parler aujourd'hui d'une question cruciale pour les communautés des Premières Nations: le droit fondamental au logement.
    J'espère parler sans détour aujourd'hui, en commençant par le fait que le logement est un droit fondamental de la personne et un droit issu des traités, mais pour de nombreuses communautés autochtones, ce n'est pas une réalité. Soixante pour cent des sans-abri qui vivent dans les rues d'Edmonton sont des Autochtones. Il y a un manque flagrant de logements disponibles pour les membres des Premières Nations dans les réserves et à l'extérieur des réserves. Nous sommes en crise et nous avons besoin de plus de soutien maintenant.
    Le cercle vicieux du logement inadéquat, du financement insuffisant, du surpeuplement et de l'itinérance continue d'affliger nos gens, aggravant les problèmes liés à la santé, à l'éducation et au bien-être général. Il est essentiel de comprendre que le logement ne se résume pas à avoir un toit au‑dessus de la tête. Il s'agit de créer une offre continue de possibilités de logement et d'établir des milieux sûrs et stables où les familles peuvent s'épanouir.
    La crise du logement chez les Premières Nations tient à plusieurs facteurs. De nombreuses maisons sont délabrées et privées des commodités de base, comme de l'eau potable et des installations sanitaires adéquates. Le surpeuplement omniprésent crée des conditions qui nuisent à la santé physique et mentale. Il y a de la moisissure dans nos maisons. Le manque de logements convenables pousse souvent nos membres vers les centres urbains, où les attendent les embûches supplémentaires de la discrimination, du chômage et du manque de services, sans parler de la hausse des loyers qui touche tout le monde dans nos villes aujourd'hui.
    Dire que nos nations n'ont pas le financement nécessaire pour régler ces problèmes est un grossier euphémisme. La nation crie d'Enoch, par exemple, reçoit 184 000 $ par année pour construire de nouveaux logements, mais nous avons 500 familles sur notre liste d'attente. Les autres chefs de notre confédération du Traité no 6 m'ont parlé de montants semblables offerts à leur nation, alors que les familles en quête de logement se comptent par milliers dans l'ensemble de la confédération. C'est carrément insuffisant pour nos besoins de logement. Comment sommes-nous censés assurer la sécurité de nos gens avec un financement aussi maigre?
    Le récent rapport de la vérificatrice générale confirme nos préoccupations. On peut y lire qu'il n'y a eu « aucune amélioration significative des conditions de logement » depuis que le gouvernement actuel est arrivé au pouvoir en 2015. Nous n'avons vu aucun progrès significatif pour combler l'écart entre la situation réelle et les besoins en matière de logement chez les Premières Nations. En 2021, l'APN estimait cet écart à 44 milliards de dollars, et nous savons qu'il est beaucoup plus important en 2024, peut-être de l'ordre de 60 milliards de dollars. Nous savons aussi que la SCHL se fonde sur les données du recensement de 2001, ce qui ampute de plus de 250 millions de dollars le financement auquel ont droit les Premières Nations de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba.
    Des organisations d'envergure nationale nous sont présentées comme porteuses de solutions pour nos gens, mais nous n'y voyons pourtant aucune représentation des Premières Nations de l'Alberta.
    En fait de santé et de bien-être, qu'est‑ce que tout cela représente pour nos gens? Il y a un lien direct entre le logement et la santé. Les logements insalubres contribuent à la prévalence des maladies respiratoires, des maladies infectieuses et des problèmes de santé mentale. Le stress et l'instabilité associés au logement inadéquat peuvent aussi faire grimper les taux de toxicomanie et de violence domestique. Régler la crise du logement n'est pas seulement une question d'infrastructure. C'est aussi une étape cruciale de l'amélioration de la santé et du bien-être général de nos communautés.
    Nous sommes rendus à un point critique, où il faudra faire front commun devant ces problèmes, où il faudra un engagement de tous les ordres de gouvernement aux côtés des Premières Nations. Les solutions temporaires ne suffisent plus. Nous avons besoin de transformations profondes et durables qui puissent éradiquer la précarité du logement. Il faudra pour y arriver une collaboration entre les Premières Nations et les gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral, ainsi qu'entre les secteurs privé et non privé.
    Quelles solutions proposons-nous?

  (1600)  

     Nous devons investir dans des projets de logement durable et dans la construction de maisons écoénergétiques qui répondent aux besoins culturels et environnementaux de nos collectivités. Ces projets devraient accorder la priorité aux possibilités locales d'emploi et de formation, ce qui permettrait à nos populations de faire partie de la solution. Ces projets devraient tenir compte de nos bases foncières limitées et appuyer la construction de logements à l'intérieur et à l'extérieur des réserves.
    Il faut rénover les infrastructures existantes. Beaucoup de maisons ont besoin de réparations et de rénovations de façon urgente. Les programmes qui fournissent du financement et des ressources pour les rénovations peuvent aider à améliorer les conditions de vie et à prolonger la durée de vie du parc immobilier actuel.
    Nous avons besoin de soutien pour les services de santé mentale et de traitement des dépendances. Les initiatives en matière de logement doivent être intégrées à des services de soutien complets, y compris des services de santé mentale et d'aide aux toxicomanes. La prestation de ces services au sein de la collectivité aide à assurer la stabilité dont les personnes ont besoin pour se rétablir et s'épanouir.
    Nous avons besoin d'un financement à long terme et d'engagements durables sur le plan politique. Pour faire face à la crise du logement, il faut un financement et des engagements politiques durables, à long terme. Il faut notamment veiller à ce que les mécanismes de financement soient souples et adaptés aux besoins particuliers des communautés de Premières Nations, et à ce que les organismes responsables de ce financement comprennent des représentants de notre peuple, et non des personnes qui prétendent parler en notre nom.
    Pour terminer, j'invite le Comité et l'ensemble du gouvernement à entamer un dialogue constructif avec les dirigeants des Premières Nations et nos techniciens. En travaillant ensemble, nous pourrons élaborer un plan d'action complet et concerté qui garantira à chaque membre de notre communauté l'accès à un logement sûr, adéquat et abordable. Il ne s'agit pas seulement d'une question de logement. Il s'agit d'une étape vers la réconciliation et un avenir plus égalitaire pour tous.
    Merci de votre temps et de votre attention. Je serai heureux de répondre aux questions des membres du Comité sur la réalité du logement des Premières Nations signataires du Traité no 6.
    Hay hay.

  (1605)  

     Merci beaucoup.
    Pour clore, nous allons passer au chef Peters.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je suis le chef Sidney Peters, de la Première Nation Glooscap. Je suis aussi coprésident de l'Assemblée des chefs micmacs de la Nouvelle-Écosse. Je siège également au comité des chefs sur le logement et l'infrastructure, et je représente la région de l'Atlantique par l'entremise de l'Atlantic Policy Congress.
    Je voulais simplement dire que je suis heureux d'être ici et d'écouter mes collègues. Certaines des choses que j'ai à dire peuvent être identiques à ce que tout le monde a dit, mais je pense qu'il est important que nous comprenions cela.
    Comme nous le savons, le 19 mars 2024, la vérificatrice générale du Canada a publié un deuxième rapport à l'intention du Parlement du Canada sur le logement dans les communautés de Premières Nations. De nombreuses personnes vivant dans nos communautés de Premières Nations n'ont pas accès à un logement sécuritaire en bon état, ce qui est un droit fondamental. L'amélioration du logement pour les Premières Nations est essentielle au bien-être physique, mental et économique de tous les membres des Premières Nations du Canada.
     C'est la quatrième fois depuis 2003 que le Bureau du vérificateur général soulève des préoccupations au sujet du logement dans les communautés de Premières Nations. Cependant, malgré les conclusions de chacune de ces vérifications et les recommandations formulées, Services aux Autochtones Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement n'ont pas réussi à faire des progrès significatifs pour aider les Premières Nations à améliorer les conditions de logement dans leurs collectivités.
    Le gouvernement du Canada a pris d'importants engagements envers les communautés de Premières Nations afin de financer des infrastructures essentielles pour améliorer les conditions de vie. Dans la lettre de mandat du premier ministre à la ministre des Services aux Autochtones, Patty Hajdu, le gouvernement s'est engagé à effectuer « des investissements immédiats et à long terme pour appuyer les travaux en cours visant à combler les lacunes en matière d'infrastructure d'ici 2030 ».
     L'Assemblée des Premières Nations, en partenariat avec Services aux Autochtones Canada, a élaboré un rapport exhaustif qui quantifie les coûts d'immobilisations et d'exploitation nécessaires pour combler l'écart en matière d'infrastructures dans les communautés de Premières Nations d'ici 2030. L'investissement nécessaire pour combler cet écart d'ici 2030 est de 349,2 milliards de dollars. En raison des décennies de sous-financement, d'un manquement aux obligations fiduciaires et de la répartition inéquitable de la richesse au Canada, ce montant comprend 135,1 milliards de dollars pour le logement, 59,5 milliards de dollars pour les infrastructures et 55,4 milliards de dollars en demandes directes de la part des Premières Nations.
    Compte tenu de l'ampleur, de la portée géographique, des contraintes nationales en matière de construction et du manque d'investissements récents et significatifs du gouvernement, le mandat visant à combler l'écart en matière d'infrastructures d'ici 2030 pourrait ne pas être réalisable avant 2040, ce qui porte l'investissement total estimé à 527,9 milliards de dollars.
     L'investissement total en immobilisations nécessaire pour combler l'écart dans le Canada atlantique est de 12,4 milliards de dollars, avec un investissement total de 2,6 milliards de dollars dans le fonctionnement et l'entretien, pour un investissement total de 15 milliards de dollars requis pour combler l'écart d'ici 2030 pour les Premières Nations de l'Atlantique. Si aucune mesure n'est prise, l'investissement total pour combler l'écart en matière d'infrastructures d'ici 2040 dans le Canada atlantique passera à 24,9 milliards de dollars.
     L'étude sur les besoins en matière de logement a été envoyée au personnel chargé du logement dans le Canada atlantique, et 16 des 34 Premières Nations du Canada atlantique y ont répondu. La population totale déclarée des 16 Premières Nations qui ont répondu à l'enquête représente 75 % de la population totale enregistrée de nos Premières Nations membres dans le Canada atlantique. Cela indique donc que les données recueillies dans le cadre de l'étude reflètent ce qui se passe dans l'ensemble de la région.
    Les Premières Nations de l'Atlantique ont besoin d'environ 12 799 logements pour répondre aux besoins immédiats dans les collectivités. Ce nombre de logements nécessitera un investissement de 3,4 milliards de dollars. Un montant supplémentaire de 158 millions de dollars est nécessaire pour effectuer les réparations et les rénovations à apporter aux logements existants.
    À la lumière de ces informations, les Premières Nations du Canada atlantique sont d'accord avec le rapport de la vérificatrice générale. En l'absence d'investissements notoires dans le logement et les infrastructures, surtout en ce qui concerne le renforcement de la capacité des Premières Nations à l'échelle locale, les lacunes en matière d'infrastructures ne feront que s'aggraver. Le mode de fonctionnement actuel du gouvernement fédéral ne profite qu'à ceux qui ont leurs propres sources de revenus ou qui peuvent faire des demandes dans le cadre de programmes.

  (1610)  

     La façon dont le gouvernement fonctionne ne fait que perpétuer le cycle d'inégalité qui continue à creuser le fossé au lieu de le réduire. La seule façon d'avancer est de collaborer, de se responsabiliser les uns les autres et de trouver des solutions novatrices. Le statu quo n'est plus une option politique viable.
    Je vous dis: wela'lin.
     Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant commencer notre première série de questions. Les quatre premiers députés auront six minutes chacun.
    Monsieur Melillo, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence dans le cadre de cette importante étude.
    Nous parlons bien sûr du rapport de la vérificatrice générale sur le logement des Premières Nations. Nous sommes sûrement tous d'accord pour dire que c'est un rapport plutôt accablant. Il souligne un certain nombre d'échecs du gouvernement. On a mentionné plus tôt que la vérificatrice générale a constaté qu'il n'y avait aucun plan pour combler le déficit de logements d'ici 2030. Il n'y a pas eu d'amélioration significative des conditions de logement depuis 2015, ce qui préoccupe de nombreux Canadiens, Autochtones et non-Autochtones partout au pays. En fait, le nombre de maisons qui ont dû être remplacées ou dont l'état s'est détérioré a augmenté depuis 2015.
     Je vais commencer par les messieurs ici présents. Si quelqu'un a des commentaires, essayez d'attirer mon attention. Levez la main ou faites ce que vous devez faire.
    Je vais commencer par vous, chef Haymond.
    Pourriez-vous nous donner des précisions quant à ce que vous avez dit dans votre déclaration préliminaire. Comment cela se passe‑t‑il sur le terrain pour les Premières Nations, et qu'est‑ce que cela signifie? C'est une chose d'examiner le rapport et de voir ces chiffres. Ils sont renversants. Pouvez-vous nous donner des exemples plus précis dont vous avez entendu parler et nous dire en quoi cela a une incidence sur la vie des Premières Nations?
    Je peux vous donner des exemples concrets.
    Nous parlons des montants disponibles pour construire des logements dans nos communautés. Je crois avoir entendu l'un des chefs dire qu'il ne reçoit pas beaucoup de financement. Au cours du présent exercice, en ce qui concerne le financement de la SCHL, le Québec reçoit 7 % du budget national. Historiquement, nous recevions 12 %. Cependant, en 2001‑2002, avec l'adoption du modèle d'affectation provisoire, le Québec a vu sa part proportionnelle du budget national chuter à 7 %. Au cours du présent exercice, le programme de la SCHL en application de l'article 95 — l'un de ses programmes hérités — prévoit la construction de 30 logements dans 43 collectivités au Québec. D'entrée de jeu, 10 de ces logements iront directement aux Cris, parce que ces derniers ont un traité et obtiennent 38 % du budget régional. Il reste donc 20 logements pour les 33 communautés que je représente.
    C'est un exemple concret de sous-financement chronique et de ce que cela signifie pour les Premières Nations du Québec. La réalité étant ce qu'elle est, nous avons dû chercher des moyens novateurs de répondre à nos besoins en matière de logement. Un certain nombre de communautés ont mis sur pied un Yänonhchia', un modèle financier qui nous permet d'accorder des prêts hypothécaires dans les réserves sans garantie de prêt ministérielle ou sans que la bande n'ait à se porter garante. À l'heure actuelle, les Premières Nations sont les seules administrations au pays qui doivent garantir tous les prêts ou toutes les hypothèques que nos membres contractent pour le logement, et nous devons également garantir ces hypothèques pour le logement social. Chacune de ces hypothèques que nous garantissons vient s'ajouter à notre passif éventuel. Bon nombre de nos collectivités sont endettées en raison de prêts hypothécaires pour le logement, parce que le logement social ne répond pas aux besoins. Encore une fois, le Yänonhchia' offre une occasion pour les membres de notre communauté qui sont pris entre le marteau et l'enclume. La plus grande partie du financement gouvernemental est destinée au logement social.
    Certains membres de notre communauté ont la capacité et le désir de payer et la solvabilité pour le faire. Malheureusement, ils n'ont pas accès à l'aide gouvernementale, si bien qu'ils sont coincés et laissés dans l'incertitude.

  (1615)  

    J'aimerais revenir rapidement sur le programme.
    Pouvez-vous expliquer au Comité à quel point il est courant, ou peut-être inhabituel que les Premières Nations aient la possibilité d'avoir une hypothèque et de posséder une propriété?
     C'est très difficile, car l'article 89 de la Loi sur les Indiens ne permet pas la saisie de biens dans les réserves. Grâce au processus novateur d'un accord tripartite entre les institutions financières autochtones, le conseil de bande et les propriétaires de maison, nous avons pu injecter 28 millions de dollars en prêts hypothécaires dans le système. Cela a permis de construire ou de rénover plus de 300 logements dans des collectivités des Premières Nations au Canada.
    Nous recherchons maintenant les capitaux nécessaires pour étendre le programme au Québec et à l'ensemble du pays. L'accession à la propriété ne convient pas à toutes les Premières Nations, mais elle doit absolument faire partie de l'équation à l'avenir. Nous avons des personnes solvables qui veulent pouvoir payer leur logement, et il est injuste que la dépendance à l'égard des programmes de logement social nous ait laissés dans cette situation particulière.
     Je vous en remercie.
    Le temps dont je dispose est limité, et je vais passer au chef Peters.
    Dans votre déclaration préliminaire, je crois que vous avez parlé des contraintes liées à la construction. J'aimerais approfondir la question. Je sais que, dans ma région, nous sommes des régions rurales, éloignées et nordiques, de sorte que les coûts de construction sont souvent très élevés. Le transport et les choses de ce genre, qu'il s'agisse de la taxe carbone ou d'autres taxes, font grimper les coûts de construction. Je me demande si vous pouvez préciser ce que vous entendez par contraintes liées à la construction.
     Bien sûr, l'Atlantique n'est pas une très grande région, mais depuis que nous savons sait combien d'argent est consacré au logement hors réserve et à d'autres choses, nous avons de plus en plus de mal à trouver des fournisseurs pour obtenir des matériaux, parce que tout le monde semble en tirer parti. Nous constatons la même chose quant à la main d'œuvre, nous essayons de trouver suffisamment d'ouvriers pour faire les travaux.
    Cela dit, les coûts ont considérablement augmenté ces dernières années. Par conséquent, bien sûr, nous ne construisons pas autant de maisons. Comme l'a dit le chef Lance, c'est très difficile quand on n'a pas assez d'argent pour construire les logements. C'est tellement cher que les communautés les plus pauvres n'ont pas cet argent supplémentaire. Certaines s'en tirent bien — elles ont leurs propres sources de revenus pour le faire —, mais bon nombre d'entre elles n'ont pas cet argent supplémentaire, et pour ce qui est des ressources, il est très difficile d'obtenir le matériel et tout le reste.
    Il faut également tenir compte des délais pour obtenir les autorisations. Encore une fois, nous semblons toujours être confrontés à la construction hivernale. Si nous pouvions obtenir les fonds plus tôt dans l'année, s'ils pouvaient même être engagés un an à l'avance, cela nous permettrait de dire: « D'accord, soyez ici le 1er avril, vous pourrez commencer »... Il semble que nous soyons toujours en retard dans le démarrage des travaux.
     Merci, chef.
    Nous passons maintenant à Mme Khalid.
    Vous avez la parole pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous nos témoins de leur présence aujourd'hui.
    J'ai beaucoup réfléchi à ce rapport, à son impact et aux préoccupations très légitimes que les collectivités ont soulevées. Je me demande quel est le lien avec les changements climatiques. Je pose la question en songeant aux plus de 420 incendies de forêt qui ont eu lieu cette dernière année. Quelle incidence ont-ils eue sur le logement et sur l'espace vital des collectivités dans les régions où, vous savez...? Comme je viens d'une région urbaine, je ne peux même pas m'imaginer ce que ça doit être.
    Monsieur Mitchell, nous pourrions peut-être commencer par vous, mais j'aimerais entendre tout le monde à ce sujet.

  (1620)  

    Nous avons beaucoup parlé des changements climatiques ces dernières années, et nous voyons bien que la météo fait des siennes un peu partout. Les catastrophes naturelles ne font qu'augmenter, tout comme la gravité de ces incidents. Ainsi, par exemple, un incendie de forêt pourrait décimer toute une collectivité autochtone. Que faire alors quand le logement vient à manquer?
    D'autres chefs nous ont parlé aujourd'hui de la situation dans leur province et, de façon générale, de ce qui se passe au pays. Je pense que les changements climatiques continueront d'avoir des répercussions énormes sur les collectivités autochtones, surtout sur les plus nordiques ou éloignées, où, une fois qu'un feu de forêt se déclare, il est très probable que toutes les maisons y passent. Par conséquent, oui, ce serait certainement un facteur important, comme l'a dit le chef Peters, en ce qui a trait au coût du logement.
    L'éloignement des collectivités rend la construction de logements encore plus difficile que dans ma ville ou la vôtre, par exemple. Nous voyons les coûts des logements et des matériaux de construction grimper de 40 % depuis la COVID‑19. Ce sont les chiffres qu'on me donne. Bien sûr, le chef Peters a également parlé de la pénurie de gens de métier ou d'une main-d'œuvre adéquate. Dans une petite collectivité, la situation est encore pire.
    Oui, nous faisons face à un problème au Canada en ce qui concerne les changements climatiques. Sachez qu'à mon avis, les feux de forêt nous réservent un été vraiment infernal au Canada. Nous les voyons déjà dans toutes les provinces; nous les verrons à Terre-Neuve-et-Labrador et, bien sûr, en Colombie-Britannique et dans d'autres régions du pays.
    Lorsque ces collectivités sont perdues, il est très difficile de remettre les choses en état ou de les améliorer dans un délai raisonnable. Les changements climatiques demeureront un facteur déterminant pour la subsistance et le bien-être de certaines de nos collectivités.
    Merci.
     Je vous remercie.
     Monsieur Haymond, vouliez-vous ajouter quelque chose?
     Je suis plutôt d'accord avec tout ce que le chef Mitchell a dit, parce que nos collectivités sont vulnérables. Nous sommes isolés des agglomérations. Il y en a beaucoup qui n'ont pas d'accès routier. Soyons justes et honnêtes, et avouons sans ambages que lorsque le gouvernement du Canada a créé des réserves, il ne nous a pas donné les meilleures terres. Plusieurs de nos collectivités subissent déjà les conséquences des changements climatiques.
    Je songe aux nombreuses collectivités qui, chaque printemps, doivent composer avec les inondations qui se produisent régulièrement dans la rue et leurs maisons. Les personnes touchées quittent leur maison et doivent se trouver des logements temporaires, qu'il s'agisse d'hôtels ou d'autres solutions. Certaines attendent de nombreuses années avant de revenir, en admettant qu'elles finissent par y retourner. Le problème, c'est qu'il n'y a pas de fonds supplémentaires pour répondre à ces besoins. Nous ne pouvons même pas compter sur les compagnies d'assurances qui hésitent à nous protéger à mesure que se multiplient les sinistres attribuables aux répercussions directes des changements climatiques.
     Merci.
     Chef Peters, comment pouvons-nous, comme gouvernement, fournir ce soutien en fonction de ce que nous avons devant nous aujourd'hui?
     Je me souviens d'avoir discuté avec des constructeurs et d'autres pour savoir à quel point les changements climatiques font une grande différence. Comme je l'ai souvent dit, il n'est pas très difficile de construire une nouvelle maison ou des lotissements; c'est un processus assez facile.
    Cela dit, en tenant compte de l'environnement, des changements climatiques et de ce qui se passe, comme en Nouvelle-Écosse, où il y a eu des inondations massives — sans parler des incendies de forêt que nous avons eus aussi, bien sûr —, je pense qu'il faut comprendre la situation et faire les recherches nécessaires. La plupart de nos collectivités ici, dans l'Atlantique, sont situées sur des voies navigables, qui étaient pour ainsi dire nos routes dans le temps. Comme le chef Haymond l'a dit, certaines des terres qui constituent nos réserves n'ont rien de mirobolant.
     Je pense qu'il est important que nous fassions les recherches qu'il faut pour comprendre comment les changements climatiques fonctionnent vraiment. Nous devons aussi nous rendre compte que l'enveloppe du bâtiment doit également changer. Elle change, mais je ne sais pas si elle le fait assez rapidement. Toute la recherche et l'éducation liées au fonctionnement d'une maison doivent également changer. Je ne crois pas que nous soyons équipés pour faire comprendre aux gens qui vivent dans les logements comment les changements climatiques modifient la structure des maisons et comment les codes nationaux du bâtiment doivent être actualisés en conséquence.

  (1625)  

    Je vois.
    Chef, si vous le pouvez, pourriez-vous nous dire si le gouvernement du Canada ou Services aux Autochtones Canada ont communiqué avec vous ou travaillé avec vous en vue de dresser un bilan de la situation du logement qui tient compte de l'incidence des changements climatiques sur le mode de vie des gens?
    Pour vous dire franchement, je travaille dans le domaine du bâtiment depuis 38 ans. Il y a des années, par l'entremise de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la SCHL, il y avait une certaine formation pour le renforcement des capacités au sein des collectivités. Je sais que le chef Haymond en est au courant, lui aussi. Il y avait autrefois un programme d'inspection dans le cadre duquel les inspecteurs autochtones étaient parrainés par la Société canadienne d'hypothèques et de logement. On nous a en fait retiré ce programme, ce qui est malheureux, car nous renforcions la capacité des inspections et des services dans toutes nos collectivités de sorte que les maisons étaient construites conformément au Code national du bâtiment et en tenant compte des répercussions des changements climatiques.
     En fait, ce qui est arrivé, en supprimant tout ce service d'inspection et le renforcement des capacités... et la SCHL n'en a même pas la capacité. Pour vous dire franchement, la Société canadienne d'hypothèques et de logement était censée être l'expert en matière de logement au Canada. Comme le chef Haymond l'a mentionné, avec le budget qui s'en vient, vous n'arriverez jamais à répondre aux besoins. Par conséquent, il y a de graves problèmes dans les collectivités.
    Cela dit, pour une raison quelconque, le gouvernement ne nous écoute pas. C'est très frustrant. Nous construisons des maisons dans certaines régions — peut-être pas nécessairement conformes au code du bâtiment —, mais nous avons perdu beaucoup d'expertise chez les Premières Nations. C'est seulement parce que le gouvernement fédéral ou la Société canadienne d'hypothèques et de logement ont voulu éviter leur part de responsabilité à l'égard de la formation des inspecteurs et des inspections qui s'ensuivraient. Honnêtement, je pense que nous avons fait un pas en arrière.
    À l'heure actuelle, nous dépendons des inspecteurs municipaux dans bon nombre de nos régions...
     Excusez-moi, chef Peters. Je dois mettre fin à votre intervention. Je vous remercie de cette réponse détaillée, et je suis certain que nos députés vous reviendront là‑dessus.
    Pour nos témoins, c'est un bon moment de mettre vos écouteurs pour la traduction. Si vous êtes en ligne, il y a un globe à l'écran. Vous n'avez qu'à appuyer sur « Français », et la traduction suivra. Si vous êtes dans la salle, veuillez brancher vos écouteurs.

[Français]

    La parole est maintenant à M. Lemire pour six minutes.
    Merci, monsieur le président. Je vous remercie de cette attention particulière.
    Kwe, chef Haymond. Meegwetch d'être ici. Je suis particulièrement honoré de pouvoir avoir cette discussion avec vous.
    Je vais lire le début du paragraphe 2.18, qui se trouve dans la section du rapport faisant état des constatations et des recommandations:
Nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement avaient accepté l'estimation de l'écart en matière de logement établie en 2021 par l'Assemblée des Premières Nations. Toutefois, le Ministère et la Société n'avaient aucune stratégie pour aider les Premières Nations à combler l'écart en matière de logement d'ici 2030.
    Selon vous, chef Haymond, n'y a-t-il pas là une occasion essentielle à saisir pour cocréer une stratégie et miser sur l'expertise autochtone et sur la connaissance que les Autochtones ont de leur territoire afin de combler l'écart qui existe en ce moment en matière de construction de logements?
    Monsieur le président, on m'indique que la diffusion vidéo ne fonctionne pas, alors ce sera un peu plus difficile pour les gens de suivre nos délibérations en ligne. Pourriez-vous vous assurer que tout fonctionne bien sur le plan technique?

  (1630)  

    D'accord. Je vais arrêter la minuterie pendant que nous vérifions cela.
    Quel est le problème exactement, monsieur Lemire?
    C'est comme si la caméra n'avait pas capté mon intervention, alors il n'y aura pas de diffusion vidéo en ligne de mon intervention.
    Même si votre intervention n'est pas projetée à l'écran ici, dans la salle, je ne pense pas que cela veut dire que la vidéo ne sera pas diffusée en ligne.
     D'accord. Vous me dites donc que la diffusion en ligne fonctionne correctement.
    Je n'en ai aucune idée.

[Traduction]

    Oui, je vous entends.
     Oui, je vous entends.

[Français]

    Nous pourrons vérifier cela plus tard. Pour l'instant, nous allons continuer.
    Il vous reste environ cinq minutes de temps de parole, monsieur Lemire.
    Merci, monsieur le président.
    Chef Haymond, comment peut-on s'assurer d'avoir une stratégie en matière de logement qui se fait en cocréation, en tenant compte de l'expertise autochtone?

[Traduction]

     Je pense que la solution et la réponse résident dans le fait que l'Assemblée des Premières Nations a fait énormément de travail au cours des dernières années pour cerner les besoins dans l'ensemble du pays. Ce que nous n'avons pas encore eu l'occasion de faire, c'est de nous asseoir avec le gouvernement pour discuter de la façon dont nous pouvons répondre à ces besoins, parce qu'il est certainement nécessaire de continuer à investir dans le logement social et abordable. Cependant, comme je l'ai dit tantôt, nous devons également tenir compte du fait qu'il y a d'autres aspects du logement qui, selon nous, nécessitent des investissements, et que l'accession à la propriété est un élément absolument essentiel de la discussion.
    Il est essentiel que le gouvernement du Canada s'assoie avec les Premières Nations, que ce soit par l'entremise de l'Assemblée des Premières Nations ou qu'il invite les chefs, comme le chef du Traité no 6, à venir représenter ses électeurs et à travailler avec nous pour trouver une solution. De toute évidence, le gouvernement ne sera pas en mesure de fournir 135 milliards de dollars pour répondre à nos besoins en matière de logement. Nous avons donc besoin d'un mélange d'investissements publics et privés et, à un moment donné, il faudra absolument que les banques veuillent bien investir dans nos collectivités malgré leur aversion au risque que cela peut supposer. Les institutions financières autochtones sont prêtes à faire ce travail si les banques ne le font pas, mais nous devons avoir ce dialogue pour trouver une solution aux besoins globaux en matière de logement qui existent dans notre collectivité, des refuges à l'accession à la propriété, en passant par l'importance de la rénovation.
    Je dois dire aussi qu'il ne s'agit pas seulement de logement. Si vous vous contentez de nous donner 135 milliards de dollars pour construire des logements, il y a quelque chose qui vous échappe dans notre dialogue, car il faut beaucoup d'infrastructures. L'aménagement de terrains, les usines de traitement de l'eau et d'épuration des eaux usées font tous partie de l'équation, alors nous avons besoin d'une approche exhaustive, et nous ne pouvons y arriver que par un dialogue direct et des discussions avec les ayants droit et les parties prenantes, comme les Premières Nations que nous sommes.

[Français]

    Je comprends que l'initiative Yänonhchia' permet aussi de développer une approche par et pour les Autochtones qui mise sur leur savoir en matière de construction de logements, car c'est souvent ce qui fait défaut quand vient le temps de construire de nouvelles habitations, particulièrement dans les communautés plus éloignées.
    Vous serez donc capables d'offrir ce service. On peut penser à des choses très concrètes, comme des services d'architecture, des services de plans et devis, ainsi que des services pour la construction elle-même de logements. Vous pourrez offrir, en quelque sorte, un projet clé en main pour accompagner les communautés, les aider à atteindre un résultat très concret et ainsi réduire l’écart en matière de construction de logements dans les communautés.

  (1635)  

[Traduction]

     Oui.

[Français]

    J'aime votre réponse. Elle a le mérite d'être claire.
    Étant donné qu'il s'agit d'un fonds d'investissement, l'initiative Yänonhchia' comporte une prise de risques. Or, on sait que notre société tolère de moins en moins le risque. Un des éléments qui posent problème dans les communautés autochtones, c'est que peu de compagnies d'assurances financent ou soutiennent des initiatives de construction de logements.
    Quelles solutions pourraient être mises en œuvre pour s'assurer non seulement qu'on pourra investir dans la construction de logements, mais aussi qu'il pourra y avoir des assurances?
    En outre, puisque c'est sur la base des profits que fonctionne notre société capitaliste en ce moment, les profits qui seraient générés pourraient-ils être réinvestis dans des projets autochtones? Est-ce que cela fait partie de la philosophie des services financiers par et pour les Autochtones comme ceux offerts par Yänonhchia'?

[Traduction]

     Yänonhchia' offre la possibilité de diversifier l'offre de logements aux Autochtones. À l'heure actuelle, la plupart des Premières Nations attendent notre allocation de financement de la Société canadienne d'hypothèques et de logement et de Services aux Autochtones Canada. Nous allons de l'avant et nous élaborons des plans de logement. Yänonhchia' allège le conseil de bande du fardeau de devoir garantir et gérer chaque prêt.
    Vous savez, dans le monde non autochtone, les gens obtiennent des prêts hypothécaires en fonction de leur solvabilité. Cela n'existe pas dans les collectivités des Premières Nations. Nous avons de nombreux membres parfaitement solvables qui ont de la difficulté à obtenir une hypothèque dans une réserve. C'est peut-être parce que la bande n'a pas la capacité financière de garantir le niveau de prêt requis. Les options sont limitées, et nous avons besoin d'un éventail complet d'options.
    Yänonhchia' permet à la personne d'être reconnue en fonction de sa solvabilité. Cette relation existe entre l'institution financière et le particulier. Le conseil de la bande joue un rôle mineur qui consiste simplement à voir à ce qu'il y ait un recours en place en cas de défaut de paiement — au Québec, il n'y en a pas eu un seul depuis toutes les années où nous gérons le programme.
     Donc, oui, je suis d'accord pour dire que le monde est peu enclin à prendre des risques, mais je pense que le plus grand risque auquel nous sommes confrontés, c'est que nous continuons de faire la même chose sans arrêt. D'ici 5, 10 ou 15 ans, le vérificateur général reviendra signaler des résultats identiques.
    Le plus grand risque, c'est de rester les bras croisés.

[Français]

    Meegwetch.
    Merci beaucoup.
    Le prochain à prendre la parole est M. Desjarlais.

[Traduction]

    Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Tansi au grand chef du Traité no 6. Je suis heureux de vous voir, grand chef Thomas. J'espère que vous allez bien. Je suis vraiment jaloux que vous soyez dans le pays des Oilers en ce moment. Moi je dois me contenter de les encourager de loin, puisque je me trouve à Ottawa.
    Cependant, je sais que nous avons d'importantes questions à régler, alors je vais m'adresser directement à vous, grand chef, simplement pour clarifier certains des renseignements accablants qui ont été présentés par la vérificatrice générale.
    Je vais d'ailleurs citer son discours:
Il s'agit de la quatrième fois depuis 2003 que nous soulevons des problèmes liés au logement dans les collectivités des Premières Nations et, 20 ans plus tard, bon nombre de ces problèmes persistent. En dépit de ces audits, nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement avaient fait peu de progrès pour aider les Premières Nations à améliorer les conditions de logement dans leurs collectivités.
    Nous entendons aussi très souvent à la Chambre, grand chef, qu'il y a une crise du logement, même si cette crise dure dans les collectivités des Premières Nations depuis longtemps. Pouvez-vous nous dire depuis combien de temps et de générations?
     Eh bien, je vous dis bravo!
     Je suis heureux de vous voir, monsieur Desjarlais. Du pays des Oilers, je souhaite que tout aille bien.
    Oui, cela dure depuis des décennies. Je dirais honnêtement que c'est depuis la conception — ou dois‑je dire la déception — de notre traité. Je pense que les données recueillies par la SCHL et Services aux Autochtones Canada sont désuètes. Il me semble tout simplement que le système ne fonctionne pas du tout en ce qui concerne la responsabilité fiduciaire de la Couronne.
     Je pense que la vraie solution consiste à trouver un financement durable et à améliorer le niveau de vie des gens quand il s'agit de bâtir des maisons, sans se contenter de reprendre le même modèle un peu partout. J'entends les autres ogemas — les autres chefs — qui ont comparu. Il y a aussi l'aspect des matériaux qui conviennent compte tenu des changements climatiques et de l'efficacité énergétique. Il y a tant à dire.
    Je sais que nous ne réglerons pas tout cela aujourd'hui, mais je tiens à souligner que nous ne demandons pas la charité. Nous cherchons un moyen de collaborer et de donner des conseils d'un point de vue autochtone sur nos réalités, dont la construction de maisons de trois ou quatre chambres à coucher. En ce moment, il y a 14 personnes qui vivent là‑dedans. Ces maisons n'ont qu'une seule citerne, une fosse septique qui déborde et elles sont faites des matériaux les plus minables.
     Même avec l'Initiative pour la création rapide de logements, je pense que beaucoup d'Autochtones se voient refuser ce financement. Pour moi, le fait que nous soyons à la table, que nous trouvions ensemble des solutions et que nous vous donnions un point de vue plus large au sujet du manque d'infrastructure... Même avec le financement des hypothèques dans les réserves, nous travaillons actuellement sur un modèle de location avec option d'achat au sein de notre nation. Pour régler la crise du logement dans ma nation, il faudrait un peu moins de 300 millions de dollars. Cela comprend 56 millions pour l'infrastructure. C'est à peine si ça faisait quelque chose pour atténuer notre crise du logement. Nous n'avons pas assez de terres. Il nous manque environ 486 maisons. La moitié du coût serait donc couvert.
    Je ne songe pas exclusivement à ma nation comme grand chef du Traité no 6. De nombreuses nations sont isolées et n'ont ni la capacité ni les normes appropriées pour bâtir des maisons. Nous voulons contribuer. Oui, il y a peut-être une pénurie de gens de métier, mais comment allons-nous apprendre si nous n'avons pas la possibilité d'investir dans nos gens et d'apprendre ces métiers spécialisés? Nous voulons contribuer.
    Il s'agit aussi de certaines maisons. Je vais simplement en parler, et je le ferai sans ambages. Certains modèles que la SCHL a mis en place — des maisons sur dalles accessibles aux personnes handicapées; des maisons qui ont des fondations en bois — sont tout simplement inacceptables. J'apprécie vraiment la conversation sur l'introduction d'un catalogue différent, mais je ne suis pas de ceux qui sont satisfaits du statu quo. Je veux vraiment être un catalyseur du changement et améliorer le niveau de vie des nôtres, parce que nous le méritons. Nous ne devrions pas vivre de la sorte.
     On tourne en rond invariablement, ce qui ne mène nulle part. Au départ, je pense que si nous devions trouver un meilleur processus ou faire entendre notre voix, ce serait une contribution où... Nous devons nous y mettre nous aussi. Nous devons en payer une partie, dans une certaine mesure, et il y a une responsabilité fiduciaire de diversifier et de ne pas se laisser guider par des données périmées.
    Le système est défectueux. Si on veut régler le problème, il s'agit de se retrousser les manches.

  (1640)  

    Je comprends.
    Nous aurons peut-être un modèle qui s'en vient pour vous, là‑bas aussi, à Ottawa.
    Je pense que vous avez raison. Nous avons besoin d'un changement fondamental dans la façon dont ce travail fonctionne.
    Le traité — un document important — engage la Couronne à travailler directement avec le Traité no 6. Or, à bien des égards, il n'en est rien. J'en veux pour preuve les problèmes que nous constatons et qui persistent dans les collectivités.
    J'aimerais passer à un autre sujet. Nous avons fait venir des représentants de la SCHL et, comme vous le savez peut-être, je les ai vraiment critiqués au sujet de l'utilisation de données de recensement périmées. Ils m'ont fait une promesse à ce moment‑là. Ils m'ont dit: « Ne vous inquiétez pas, monsieur Desjarlais, nous allons rencontrer les partenaires de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, et nous allons actualiser la formule. »
    Je veux vous poser la question directement. La SCHL a‑t‑elle communiqué avec vous pour vous parler de l'argent qu'elle a négligé de vous donner?
    En ce qui concerne la preuve que la SCHL ne l'a pas fait, vous avez mentionné que vous-même... Votre communauté d'Enoch ne reçoit que 184 000 $ par année?
     Oui. C'est bien ça.
     C'est pas mal en deçà du pourcentage requis.
     Nous devons utiliser notre propre financement pour créer notre modèle de logement. La situation ne s'améliore pas, et nous hypothéquons notre maison comme tous les autres Canadiens, par l'entremise de la SCHL. C'est là que nous devons obtenir le financement. C'est très difficile.
    À votre avis, est‑ce là l'esprit et l'intention du traité?
    L'esprit et l'intention de notre traité y étaient à parts égales. Nous devions partager, en collaboration avec les colons, les abondantes richesses que notre île de la Tortue transportait au sein de la Terre mère.
    Je ne vois pas cela se produire. C'est frustrant, mes amis. C'est la demande la plus récurrente que je reçois de nos membres. Nous avons la deuxième population autochtone en importance dans ma cour. Je suis à la frontière de la ville d'Edmonton, et les choses ne font que se compliquer.

  (1645)  

    Je comprends.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Au cours des deux prochaines séries de questions, pour respecter le temps imparti, je vais réduire les interventions du gouvernement et de l'opposition officielle à quatre minutes et celles des deux autres partis à deux minutes. J'ai laissé des réponses dépasser le temps. Tout le monde a eu une minute de plus au dernier tour, mais je tiens à ce que nous ayons deux tours complets.
    Monsieur Stewart, vous avez la parole pour quatre minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Comme je viens de Miramichi—Grand Lake, au Nouveau-Brunswick, et que je vis dans la région ancestrale micmaque, je préférerais que le chef Mitchell ou le chef Peters répondent aux questions, mais je suis également ouvert à ce que quelqu'un d'autre réponde à la même question.
    Il est malheureux que le sujet d'aujourd'hui soit la façon dont Services aux Autochtones Canada et la SCHL ont mal géré les conditions de logement dans les collectivités des Premières Nations.
    En ma qualité d'ancien ministre des Affaires autochtones du Nouveau-Brunswick, comme vous pouvez l'imaginer, j'ai vu cela de près pendant environ deux ans lorsque j'étais ministre.
    Je vais répéter ce que j'ai dit à la vérificatrice générale lorsqu'elle a présenté ses premiers rapports sur le logement dans les collectivités des Premières Nations, et je vais commenter le travail de la première vérificatrice générale du Canada, Sheila Fraser.
    Dans son discours d'adieu, Mme Fraser a également critiqué l'absence vraiment choquante d'améliorations dans les réserves autochtones et a déclaré: « Il est assez tragique de constater qu'il y a une population dans ce pays qui n'a pas le genre de services de base que les Canadiens tiennent pour acquis. »
     Le récent rapport du Bureau du vérificateur général, intitulé Le logement dans les collectivités des Premières Nations, présente beaucoup de similitudes avec les observations de l'ancienne vérificatrice, Mme Fraser. Il est très malheureux de constater l'absence totale de progrès au cours des neuf dernières années.
     Selon le Bureau du vérificateur général, Services aux Autochtones Canada et la SCHL n'ont pas de stratégie pour aider les Premières Nations à combler l'écart en matière de logement d'ici 2030. Pire encore, selon le Bureau, l'écart en matière de logement ne cessera de se creuser.
    Je pense à quelque chose ici aujourd'hui, et je vais le mentionner, parce que je crois que c'est important. Avec tout ce qui vient d'être dit, nous parlons beaucoup du logement et de l'accession à la propriété et du fait qu'à l'avenir, les jeunes Canadiens, en général, auront beaucoup de mal à devenir propriétaires de leur première maison. Même si nous ne sommes pas ici pour débattre de la Loi sur les Indiens et qu'il pourrait y avoir des aspects positifs et négatifs de cette loi, je tiens à dire ceci. Nous oublions parfois que les Premières Nations et les peuples autochtones sont essentiellement privés d'un sentiment de fierté et d'accomplissement qui accompagne l'accession à la propriété, et ce, en raison de certains articles de cette loi. Même si cela ne s'applique pas à tous les Autochtones aujourd'hui, ils demeurent nombreux, comme j'ai pu déduire des délibérations antérieures.
    J'aimerais connaître votre opinion. Je peux imaginer comment nous en sommes arrivés là. Nous parlons toujours de renforcer les capacités. Je me souviens d'une situation dans une communauté micmaque du Nouveau-Brunswick que j'ai visitée à la demande de son chef. J'ai trouvé une maison pleine de moisissures, et il y avait 16 ou 17 personnes qui y vivaient. Tout d'abord, il n'y aurait jamais dû avoir autant de gens. La maison était mal ventilée. C'était de la moisissure noire. Comme je suis asthmatique, je m'en suis tout de suite aperçu, car je pouvais à peine respirer.
    Le chef de la collectivité et la bande de l'époque n'avaient pas les moyens de régler le problème de la moisissure. D'après ce que j'ai compris, il y avait beaucoup plus de problèmes que ceux que j'avais constatés de première main. La famille qui vivait dans ce logement n'avait pas non plus de quoi régler le problème. Il y avait un sous-sol en bois sous cette maison, comme quelqu'un l'a dit plus tôt. La maison n'avait probablement que 30 ans, mais elle était littéralement en train de s'écrouler.
    Monsieur Stewart, il vous reste environ 30 secondes.
    D'accord.
    Je me demande si le problème de la moisissure s'est amélioré. D'après le rapport, il ne semble pas y avoir eu d'amélioration.
    Merci.
    Si vous me permettez de commencer, la vérificatrice générale a indiqué dans son rapport que la moisissure était l'un des principaux problèmes, selon elle, mais nous savons que dans nos collectivités partout au pays, particulièrement dans le Nord et dans les collectivités éloignées, la moisissure est toujours un problème avec lequel les gens doivent composer chaque jour. Cela a une incidence sur leur vie et leur système respiratoire. Comme vous l'avez mentionné, vous êtes asthmatique et vous l'avez ressenti dès que vous êtes entré dans cette maison.
    C'est un problème fondamental qui doit être réglé. Je n'ai pas l'impression qu'on s'en est occupé autant qu'il l'aurait fallu.
    Que faudra‑t‑il pour régler ce problème? Eh bien, il faudra d'abord que les dirigeants communautaires prennent la parole. Il faudra un plan de collaboration entre la collectivité et les autres — gouvernement provincial, fédéral ou autre — pour essayer de corriger la situation.
    C'est un problème, comme vous l'avez mentionné, et il ne va pas disparaître. La situation ne s'est pas améliorée. Au contraire, elle a peut-être empiré. La situation s'est détériorée au cours de la dernière décennie, disons, au lieu de s'améliorer dans l'ensemble.
    Encore une fois, cela fait partie du problème global de logement que nous avons dans les collectivités autochtones du pays. Il y a beaucoup de travail à faire dans ce domaine.

  (1650)  

    Merci beaucoup.
     La parole est maintenant à Mme Shanahan.
    Vous avez la parole pour environ quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie également les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Cela donne à réfléchir. En fait, c'est en quelque sorte un bilan de l'état de la nation pour les Premières Nations.
    Comme je viens du Québec, j'aimerais demander au chef Haymond de nous donner plus d'information sur l'organisation Yänonhchia'. J'avoue que c'est la première fois que j'en entends parler, alors j'aimerais en savoir plus sur la façon dont cette organisation change essentiellement l'écosystème du logement pour les clients des Premières Nations.
     Je peux intervenir. J'ai quelques points importants à soulever.
    Yänonhchia' est le résultat d'une réflexion des membres de la communauté de Wendake qui, il y a de nombreuses années, ont constaté que le financement du logement social ne répondait pas à leurs besoins. Ils ont commencé à chercher une nouvelle solution et en ont créé une. En raison des restrictions de la Loi sur les Indiens, ils ont dû utiliser des ressources internes. Ils ont choisi d'avoir recours à l'institution financière autochtone, le réseau de l'Association nationale des sociétés autochtones de financement, ou l'ANSAF, comme mécanisme pour offrir des logements au Québec.
     Le financement du logement assuré par Yänonhchia' s'appuie sur un réseau d'institutions financières autochtones expérimentées. Le logement à l'extérieur des réserves est l'un des plus importants moteurs économiques du Canada, et Yänonhchia' propose d'en faire une réalité dans les réserves également. L'augmentation des activités de construction et de rénovation liées à l'accession à la propriété procurera d'importants avantages économiques aux Premières Nations.
    Comme je l'ai déjà mentionné, en raison des restrictions de la Loi sur les Indiens, Yänonhchia' est différent des autres programmes de prêts. Il s'appuie sur la solidité financière et la situation de crédit des particuliers pour financer le logement, sans que la Première Nation ou le gouvernement, par l'entremise du Programme de garanties d'emprunt ministérielles de Services aux Autochtones Canada, doive garantir ces prêts.
    Ce n'est pas la solution à tout. Comme je l'ai mentionné plus tôt, compte tenu du niveau actuel de financement, probablement 60 % de nos besoins en matière de logement ne sont actuellement pas comblés au moyen d'un financement gouvernemental. Nous croyons que, grâce à la collaboration avec Yänonhchia' et à l'accession à la propriété, plus de 20 % de nos besoins en matière de logement peuvent être satisfaits.
    Le succès que nous avons obtenu au Québec l'a été sans financement gouvernemental. Il est le résultat de la vente d'obligations et de l'épargne personnelle des gens, en plus de l'aide de fondations privées comme McConnell, qui ont investi de l'argent — 28 millions de dollars au total — avec les Premières Nations, afin que nous puissions offrir ce programme à nos membres dans les réserves.
    Merci beaucoup.
    Pensez-vous que si les Premières Nations avaient accès à d'autres options de financement, y compris le secteur privé...? Yänonhchia' est‑il le début de quelque chose de vraiment innovant qui pourrait se développer?
     Absolument. C'est la démarche que nous suivons depuis des années. Nous faisons activement pression sur le gouvernement fédéral pour qu'il débloque les capitaux nécessaires pour en faire une initiative nationale. Il y a un intérêt à cet égard, et le réseau des institutions financières autochtones est prêt à le faire et a les capacités nécessaires pour le faire. Nous avons simplement besoin d'un investissement en capital pour pouvoir lancer ce programme à l'échelle nationale.

  (1655)  

    Merci. Je pense que le gouvernement fédéral doit être là pour vous accompagner dans cette démarche.
    Merci, madame Shanahan.

[Français]

    Monsieur Lemire, vous avez la parole pour deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    On parle souvent de vérité et réconciliation.
    Pour ce qui est de l'aspect lié à la vérité, ce que je vois quand je lis le rapport de la vérificatrice générale, c'est que Services aux Autochtones Canada reconnaît les besoins en matière de logement des Premières Nations et que, selon les chiffres de l'Assemblée des Premières Nations, il y a un manque à gagner de 44 milliards de dollars. C'est la somme qu'il faudrait pour construire 55 320 nouveaux logements afin de répondre à la surpopulation, pour construire 78 000 nouveaux logements destinés aux personnes qui retournent dans les collectivités, pour réparer plus de 80 000 logements existants et pour viabiliser 112 000 nouveaux terrains. Voilà ce qui en est pour la vérité.
    Ensuite, pour qu'il y ait réconciliation, il faut au minimum qu'il y ait un dialogue, évidemment.
    Chef Haymond, quel est l'état du dialogue avec le gouvernement fédéral, en ce moment, sur les questions relatives au logement?

[Traduction]

    Les Premières Nations ne sont pas satisfaites de la situation actuelle. La Société canadienne d'hypothèques et de logement et Services aux Autochtones Canada déterminent le niveau de financement et le modèle de répartition entre les régions et les collectivités. Étant donné qu'ils détiennent la grande majorité des pouvoirs sur les programmes de logement, au bout du compte, on nous demande de faire tout ce que nous pouvons avec le financement que nous recevons.
    Comme tous les témoins, y compris moi-même, vous le disent, le financement est chroniquement bas et insuffisant depuis des années, alors il faudra un investissement massif. Cependant, je pense que l'époque où SAC et la SCHL disaient aux Premières Nations comment, quand et dans quelles circonstances répondre à leurs besoins est révolue. Je pense que ce que nous souhaitons vraiment, surtout grâce au travail qui a été fait par l'Assemblée des Premières Nations, c'est que le gouvernement s'assoie avec nous pour trouver des solutions. Le financement gouvernemental en fait certainement partie, mais il faut également des compromis de la part des institutions financières traditionnelles. Je pense que le secteur privé a aussi un rôle à jouer.
    Il n'est pas possible de trouver de solutions à moins de s'asseoir et de discuter. L'époque où les gens de la SCHL, dans leurs bureaux du 700, chemin de Montréal, décidaient de ce qui était dans notre intérêt est terminée. Ils doivent discuter avec nous.

[Français]

    Meegwetch.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
     C'est maintenant au tour de M. Desjarlais, pour deux minutes. Je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je reviens au grand chef Cody Thomas.
    En ce qui concerne votre plus récente discussion avec la ministre des Services aux Autochtones Canada, Mme Patty Hajdu, quelle en a été la teneur et quelles sont vos priorités?
     La discussion a porté sur l'eau potable, mais je pense que même en ce qui concerne la dernière question qui a été posée au sujet de la SCHL, le système de points en place est assez injuste. Lorsque nous avons demandé s'il y avait un mécanisme d'appel, on nous a répondu qu'il n'y avait rien de tel.
    Je ne parle que de l'Initiative pour la création rapide de logements. Je suis d'accord avec les autres chefs pour dire que le système en place ne connaît pas nos besoins en tant qu'Autochtones et ne sait pas comment y répondre. Nous ne sommes pas des enfants. Je pense que l'approche adoptée après des décennies de difficultés doit être revue. Je crois qu'il y a de bonnes choses sur lesquelles nous pouvons travailler, mais être à la table pour trouver ces solutions est certainement une bonne voie pour y parvenir.
    Avec Mme Hajdu, la discussion a davantage été liée à l'eau potable. Rien n'a vraiment été présenté. Les chefs sont très réticents à l'égard de certains de ces dialogues. Malheureusement, il nous faut trouver une solution au bout du compte.
     Je comprends cela. Je sais que mon équipe travaille avec la vôtre à cet égard. C'est demain qu'aura lieu le dépôt en deuxième lecture, je crois, et je vais intervenir à ce sujet. Je sais que votre équipe a communiqué avec nous. Nous ferons un suivi à ce sujet demain.
     Pour revenir à certaines des questions de logement, avez-vous présenté une demande de financement pour le logement, pas seulement pour la nation crie d'Enoch, mais pour d'autres organisations du Traité no 6? De plus, que pouvons-nous préconiser ici, à Ottawa, pour nous assurer que la relation paternaliste qui existe entre les Premières Nations et le gouvernement prenne fin?
     Je pense qu'il s'agit de trouver une meilleure formule en ce qui concerne la construction au niveau municipal pour nous tous qui sommes visés par le Traité no 6. Il ne s'agit pas seulement d'immeubles d'habitation. Nos enfants ne veulent pas grandir dans ce genre d'immeubles.
    Il y a des initiatives uniques sur lesquelles nous travaillons avec notre province et la ville d'Edmonton, mais nous constatons un manque à gagner financier pour envisager la construction d'un projet de logement polyvalent pour les peuples autochtones de nos territoires traditionnels, dans le cadre du Traité no 6.

  (1700)  

     Merci, monsieur Desjarlais. Je vais essayer de vous donner une autre chance d'intervenir.
    Je cède la parole à M. Nater.
    Vous avez la parole pour quatre minutes. Je vous en prie.
     Merci, monsieur le président.
    Par votre entremise, monsieur le président, je remercie les témoins de s'être joints à nous aujourd'hui pour cette conversation.
    J'aimerais parler d'une partie du rapport de la vérificatrice générale qui me préoccupe. Il en a été question à quelques reprises.
    On peut y lire ce qui suit:
Les petites collectivités ayant les pires conditions de logement avaient reçu moins de financement ciblé, de 2018‑2019 à 2022‑2023, que les petites collectivités ayant de meilleures conditions de logement.
     Cela est évidemment le contraire de ce à quoi on s'attendrait, c'est‑à‑dire que les collectivités ayant les plus grands besoins soient ciblées au chapitre du financement. De toute évidence, c'est préoccupant, et je pense que la plupart des gens seront d'accord avec moi.
    Ce que j'ai trouvé tout aussi préoccupant, c'est que la SCHL et Services aux Autochtones Canada n'ont reconnu que partiellement cette préoccupation.
    À l'époque, la vérificatrice générale avait dit:
Nous sommes préoccupés par le fait que Services aux Autochtones Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement n'ont accepté qu'en partie notre recommandation de collaborer avec les collectivités ayant les pires conditions de logement pour s'assurer qu'elles reçoivent l'aide dont elles ont besoin afin d'améliorer leurs conditions de logement.
     La sous-ministre de l'époque avait mentionné que la recommandation de la vérificatrice générale n'était acceptée que partiellement en raison d'un désaccord concernant la méthodologie utilisée par cette dernière pour en arriver à cette conclusion. Nous pouvons ergoter sur la méthodologie tant que nous voulons, mais la réalité est que c'est ce qui se passe sur le terrain.
    Je veux poser la question à tous les témoins, mais je vais commencer par le chef Mitchell et le chef Haymond, qui sont dans la salle.
    Tout d'abord, pouvez-vous confirmer que ce que vous constatez sur le terrain, c'est que le financement dont nous parlons pour les collectivités autochtones qui en ont le plus besoin ne se rend pas à elles? Que devrions-nous faire? Ne devrions-nous pas insister pour que la SCHL et Services aux Autochtones Canada remédient à la situation, plutôt que de discuter de la méthodologie de la vérificatrice générale?
    Je pose la question aux quatre témoins.
     Tout d'abord, je vous remercie de votre question et de votre commentaire.
    Sur le terrain, je ne suis pas certain de pouvoir confirmer ce que dit la vérificatrice générale. Je ne sais vraiment pas si c'est le cas. Dans bien des situations, que ce soit dans les collectivités ou dans les relations gouvernementales, la politique entre en jeu. Je ne peux pas confirmer que ce que propose la vérificatrice générale est vrai.
    J'aimerais maintenant céder la parole au chef Haymond, qui a peut-être une connaissance ou une expérience particulière de la situation.
     J'ai tendance à être d'accord. Le plus grand défi, très franchement, c'est que la plupart de ces initiatives sont axées sur des propositions, sauf pour le financement régulier et récurrent par l'entremise de programmes existants, où ce n'est pas nécessaire. La création rapide de logements ou l'une ou l'autre de ces nouvelles initiatives sont fondées sur des propositions, de sorte que toutes les Premières Nations du pays sont admissibles.
    Vous avez parlé d'un des défis les plus importants: ceux qui ont les plus grands besoins ont la capacité la plus faible. Ceux qui ont les moins grands besoins ont la plus grande capacité, y compris celle de présenter des propositions complètes dans les délais prescrits et de respecter toutes les conditions et tous les critères d'évaluation. Au bout du compte, il semble que les Premières Nations qui ont une capacité moindre obtiennent une part moins grande du budget national. Cela fait partie de la réalité. Si vous êtes une petite collectivité, vous n'avez pas une bonne capacité et de bonnes ressources humaines, ni la capacité d'embaucher et de garder ces gens. Ce sont les collectivités urbaines, plus sophistiquées, qui ont accès à des consultants, à des avocats et à une foule d'autres services de soutien qui peuvent présenter des propositions.
    Cela fait partie du défi pour toutes les Premières Nations.
     Merci beaucoup, monsieur Nater. Votre temps est malheureusement écoulé.
    Madame Yip, vous avez la parole pour quatre minutes. Je vous en prie.
     Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse au chef Haymond.
    Comment peut‑on aborder différemment l'atténuation des risques dans le cas des projets de logement des Premières Nations?

  (1705)  

     C'est une très bonne question.
    Je pense qu'il faut le faire d'une façon qui reconnaît qu'il n'y a pas de solution ou de situation parfaite. À l'heure actuelle, nous n'avons pas accès au financement conventionnel par l'entremise des banques, à moins d'être en mesure de garantir les prêts obtenus. Nous avons besoin de nouvelles possibilités et de nouvelles initiatives qui éliminent certaines des préoccupations et certains des risques.
    Franchement, j'ai du mal à répondre à cette question, parce que je connais beaucoup de gens qui, toutes choses étant égales par ailleurs, obtiendraient une hypothèque s'ils en faisaient la demande hors réserve, en fonction de leur situation de crédit, de leurs antécédents de crédit et de leur capacité de rembourser. La même personne qui demande une hypothèque dans une réserve peut ne pas être admissible à cette hypothèque en raison du risque que la banque ou l'institution financière ne puisse pas venir saisir la propriété. Grâce à des initiatives comme Yänonhchia' et à des ententes partites, nous trouvons des façons pour que le terrain et l'unité soient toujours détenus en garantie, la relation demeurant entre l'institution financière et la personne qui a la solvabilité nécessaire pour obtenir l'hypothèque.
    Il s'agit d'être prêt à prendre les risques que les institutions financières ne prendront pas. C'est pourquoi je dis que le réseau de l'ANSAF et les institutions financières autochtones jouent un rôle essentiel. Elles vont faire des affaires et elles vont prendre les risques que les banques conventionnelles ne prennent pas. Au bout du compte, nous croyons en notre peuple. Tous les profits générés par des initiatives comme Yänonhchia' seront immédiatement réinvestis dans de nouveaux prêts et de nouvelles hypothèques, afin que plus de membres de notre collectivité puissent en profiter.
    Oui, le risque est un gros problème. J'espère que grâce au travail que nous faisons et à l'éducation des institutions financières et du gouvernement, le risque lié aux prêts hypothécaires consentis dans les réserves ne sera pas plus grand que celui des prêts hypothécaires consentis à des Canadiens non autochtones hors réserve.
    Nous méritons, et nous devrions avoir, les mêmes outils et accès au logement que les Canadiens non autochtones hors réserve.
     Est‑ce que ce sont principalement les entreprises dirigées par les Premières Nations qui sont prêtes à assumer le risque?
    Ce ne sont pas des entreprises, mais plutôt des institutions dirigées par des Premières Nations. Pour le cas où vous ne le sauriez pas, les institutions financières du réseau de l'ANSAF sont reconnues pour l'aide financière qu'elles offrent pour appuyer le développement économique.
    Constatez-vous un intérêt de la part d'institutions ou d'organisations non autochtones?
     Nous n'avons pas vraiment approché d'institutions et d'organisations non autochtones. Nous nous sommes concentrés principalement sur la résolution de nos problèmes avec le gouvernement du Canada, tout en utilisant et en examinant le développement de nos propres capacités et institutions à l'échelle nationale.
    Merci beaucoup.
     J'aimerais avoir l'avis du Comité. Le temps file, quelle que soit la façon dont nous procédons. Je propose que nous fassions quatre tours de deux minutes et demie chacun. Je demande le consentement du parti gouvernemental et de l'opposition officielle. Cela n'a pas vraiment d'incidence sur les deux autres partis.
    Cela vous convient‑il? Nous allons faire quatre tours, faire une pause, puis passer au témoin suivant.
    Monsieur Nater, cela vous convient‑il également? Très bien. Qui sera votre intervenant?
    Monsieur Melillo, vous avez la parole pour deux minutes et demie. Je vous en prie.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Comme pour mes premières questions, je vais commencer par les participants dans la salle, et j'inviterais les gens en ligne qui ont quelque chose à dire à ne pas hésiter à intervenir.
    Le rapport mentionnait que le gouvernement n'avait pas reçu l'assurance que tous les logements construits sur les terres des Premières Nations ou réparés avec des fonds fédéraux respectaient les normes de construction pertinentes. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que cela ne serait acceptable nulle part ailleurs au pays, et que cela ne devrait pas l'être non plus pour les Premières Nations, mais c'est ce que la vérificatrice générale a constaté.
    Par simple curiosité, est‑ce que cela pourrait être attribuable à la difficulté pour un inspecteur ou quelqu'un d'autre de se rendre dans les Premières Nations pour faire ce travail, ou est‑ce simplement de la négligence de la part du gouvernement?
    Chef Haymond, si je peux commencer par vous, avez-vous des commentaires à ce sujet?

  (1710)  

     Les services d'inspection et l'assurance que les logements sont construits conformément au Code national du bâtiment sont des principes de base pour nous, les Premières Nations.
    Cela dépend de la région d'où vous venez et des capacités que vous avez. Je viens du Québec où, heureusement, nous avons des conseils tribaux forts. Les collectivités comme la mienne, qui sont petites et qui n'auraient pas nécessairement les ressources financières nécessaires pour embaucher toute l'expertise dont nous avons besoin en matière de logement, sont en mesure de mettre en commun leurs ressources et de les faire administrer par un conseil tribal. Nous avons des ingénieurs, des architectes et des inspecteurs de la construction qui travaillent avec nos collectivités et qui les soutiennent pour veiller à ce que nos unités soient construites conformément au Code national du bâtiment.
     C'est essentiel, car, au bout du compte, les besoins en matière de logement sont si grands dans nos collectivités que nous devons construire des logements de qualité qui dureront 25 ans. Autrement, 10 ou 15 ans plus tard, lorsque sa maison sera condamnée, une famille viendra soudainement s'ajouter à la liste des gens ayant des besoins, ces derniers étant constamment en augmentation.
    Je pense que cela dépend vraiment de la province, de la région et du secteur de compétence. L'un des éléments clés dont nous devons nous assurer, pour être en mesure de respecter le Code national du bâtiment, c'est d'avoir les ressources financières nécessaires pour construire ces unités et, qui plus est, pour offrir les services de soutien technique.
     Merci beaucoup. Votre temps est malheureusement écoulé.
    La prochaine intervenante est Mme Bradford. Vous avez deux minutes et demie. Je vous en prie.
     Merci, monsieur le président.
    J'aimerais adresser mes questions au chef Peters.
    En octobre dernier, la Confédération des Mi'kmaq continentaux a signé une entente-cadre historique, élaborée conjointement avec le gouvernement du Canada, dans le but de collaborer au transfert, au contrôle, à la prestation et à la gestion des services de logement et d'infrastructures des Premières Nations aux Premières Nations micmaques participantes.
    Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendez par « élaborée conjointement » et ce à quoi ressemblait le processus de collaboration avec le gouvernement du Canada à l'égard de ce cadre?
     Lorsqu'il est question d'élaboration conjointe, je pense que cela signifie que tout le monde travaille ensemble. J'ai participé à cette discussion dès le départ.
     L'une des premières choses dont j'ai parlé, c'est de l'engagement véritable des deux parties, le conseil tribal et SAC. La SCHL a également participé à certaines des discussions.
    Les choses semblent bien aller, mais prendre plus de temps. Nous avons l'impression que les parties changent constamment de l'autre côté de la table à mesure que nous avançons. La situation progresse, mais lentement. Je suis toujours très préoccupé par les délais et le non-respect des échéanciers.
    Essentiellement, nous accusons toujours du retard. Je veux m'assurer que l'engagement est maintenu et que les choses continuent de progresser.
    Comme vous le savez, la Confédération des Mi'kmaq continentaux représente huit collectivités ici en Nouvelle-Écosse. Il faut aussi s'assurer que les dirigeants sont bien au courant de la façon dont tout cela fonctionne et des personnes qui participent au processus.
    Cela fonctionne, mais c'est très lent. La confiance est-elle là? Eh bien, quand les choses vont si lentement, les dirigeants essaient de comprendre ce qui se passe et pourquoi les choses ne vont pas plus vite.
    Il y a un engagement. Je continuerai toujours d'essayer d'obtenir un engagement. Les choses avancent, mais pas aussi vite que nous le voudrions.
    Merci.
    Dans quelle mesure les catégories de financement en vertu de ce cadre sont-elles spécifiques? Comment avez-vous déterminé les catégories?
    J'ai veillé à ce que les responsables techniques comprennent vraiment comment le système fonctionne. Je voulais m'assurer que nous ayons un aperçu complet du fonctionnement actuel du système et de la façon dont nous voulons le modifier. Dans ce contexte, nous discutons avec chacune des collectivités pour vraiment comprendre cela.
    Ce qui se passe, c'est que le gouvernement fédéral semble dire: « Voici un accord, et voici ce que nous voulons faire. » Est‑ce que cela permet vraiment d'obtenir des détails sur la façon dont les choses fonctionnent?
    Ceci étant dit, le gouvernement a la responsabilité de veiller à ce que l'argent soit disponible. Nous trouvons difficile que les collectivités n'en reçoivent pas assez pour que cela fonctionne. Il est important pour le niveau de risque à la Confédération des Mi'kmaq continentaux que nous soyons assurés d'avoir suffisamment de fonds pour prendre les rênes et assurer le fonctionnement. Nous savons ce qui est déjà arrivé dans le passé, et je ne veux pas que la CMC se retrouve dans la même situation que le gouvernement fédéral.

  (1715)  

     Merci beaucoup.

[Français]

    Je donne maintenant la parole à Mme Sinclair‑Desgagné pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    J'en profite pour remercier tous les témoins d'être venus nous parler aujourd'hui d'une situation très importante. Je rappelle que le logement n'est pas un privilège, mais bien un droit. C'est notre devoir à nous, en tant que parlementaires, de nous assurer que le problème du logement pour les Autochtones sera réglé le plus rapidement possible.
    Nous avons eu l'occasion d'entendre beaucoup parler du programme Yänonhchia'. C'est un très bel exemple de programme qu'il faut pousser.
    Je rappelle un autre élément qui est très problématique et dont nous parlons aujourd'hui. Malgré les milliards de dollars qui ont été investis, aucune amélioration n'a été constatée en neuf ans. La situation est toujours aussi lamentable.
    Fondamentalement, la question que je veux vous poser, monsieur Haymond, a trait à l'approche.
    L'une des raisons pour lesquelles Yänonhchia' fonctionne et est un modèle, selon moi, c'est justement qu'on donne aux Autochtones une certaine autonomie, une autodétermination qui leur permet de construire et de financer leurs propres maisons sans passer par des institutions financières qui ne comprennent pas les réalités des réserves autochtones. Ce genre d'exemple devrait servir en particulier au gouvernement fédéral, qui continue à utiliser une méthode que je considère comme néocoloniale et qui se traduit par la construction de logements par le fédéral, comme si les Autochtones n'étaient pas capables de le faire eux-mêmes.
    Pouvez-vous nous dire comment Yänonhchia' s'inscrit dans ce paradigme où les Autochtones peuvent s'organiser eux-mêmes, non seulement sur le plan du financement et du capital, comme vous l'avez bien dit, mais aussi en matière de ressources humaines, notamment?

[Traduction]

     Je pense que nous aurions toute la capacité nécessaire pour gérer toutes nos affaires du début à la fin si nous en avions l'occasion. Nous avons passé beaucoup de temps au cours des dernières années à renforcer nos capacités à différents niveaux. Comme je l'ai mentionné, nous travaillons à l'extérieur de nos collectivités pour que nos membres comprennent l'importance d'une cote de crédit et que leur accès au crédit constitue une option viable pour l'avenir.
    Nous les renseignons également au sujet de la propriété et des responsabilités qui accompagnent le fait d'être propriétaire. Nous travaillons avec les institutions. Nous travaillons avec nos conseils tribaux de différentes façons pour renforcer les capacités dont nos collectivités ont besoin. Nous pouvons avoir des conversations sur la prise en charge, la responsabilité et le contrôle. Au Québec, nous travaillons à une stratégie qui porte vraiment là‑dessus. Il faut d'abord renforcer les capacités à tous les niveaux.
     Nous examinons aussi les différentes options de financement de façon innovatrice, ce qui correspond exactement au travail que nous faisons à Yänonhchia'.
    Enfin, nous savons que le gouvernement veut cesser d'offrir des programmes et des services à nos collectivités. Ils appellent cela le transfert des responsabilités. C'est un mot tabou pour nous. Ce que nous aimerions vraiment, c'est prendre en charge un programme, en assumer la responsabilité et en assurer le contrôle, plutôt que de nous le faire imposer.
    Le président: Merci. Je soupçonne...
    Le chef Lance Haymond: Je pense que nous avons la capacité de faire cela nous-mêmes.
     Merci. Je m'excuse de devoir vous interrompre. Je suppose que le prochain intervenant poursuivra dans la même veine.
    Monsieur Desjarlais, nous allons conclure avec vous. Vous avez la parole pour environ deux minutes et demie. Allez‑y. Je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie encore une fois tous les témoins. J'espère que vous pourrez également nous fournir des mémoires écrits liés à notre rapport avant que nous le déposions.
    Grand chef Cody Thomas, je veux vous donner l'occasion de parler directement de ce que vous entendez de la part des chefs que vous représentez sur le territoire du Traité no 6 et du message que vous avez à transmettre au gouvernement en ce qui concerne les priorités en matière de logement, ainsi que toute autre priorité dont le gouvernement doit tenir compte.

  (1720)  

    Grand chef, votre micro n'est pas allumé.
    C'est bien. Comme je l'ai dit, quand vous voulez que quelque chose soit fait, faites‑le vous-même.
     La parole est à vous, grand chef. Je vous en prie.
     Exactement. Je ne paie pas ces gens le gros prix pour rien. Je plaisante, évidemment.
    J'aimerais insister sur le fait que, en ce qui concerne l'avoir des propriétaires dans les réserves, il y a beaucoup de banques qui ne nous permettent pas d'être financés par l'intermédiaire des prêts hypothécaires conventionnels. Nos membres ont la possibilité de construire des maisons en vertu de l'article 10, mais au bout du compte, nous ne pouvons pas obtenir de valeur nette de ces maisons non plus. Je pense que l'une des choses qui seraient vraiment utiles serait un mécanisme de rapport à l'agence d'évaluation du crédit pour nos membres qui vivent dans les réserves, afin qu'ils puissent se qualifier pour pouvoir éventuellement se payer une maison à l'extérieur des réserves.
    Je pense que le fardeau nous incombe dans un domaine également, soit celui du code du bâtiment. C'est prévu dans le Traité no 6. Beaucoup de constructeurs d'habitations qui viennent chez nous n'offrent même pas de garanties, et c'est quelque chose que nous devons améliorer. Nous avons besoin d'une meilleure norme. C'est un élément clé.
     Je pense que nous devons envisager un mécanisme de financement quelconque pour travailler avec toutes les banques au Canada, afin que nos générations actuelles et futures puissent avoir une maison. C'est un droit issu des traités et un droit de la personne. J'apprécie vraiment que la ministre parle du fond du cœur, parce que c'était l'intention de notre traité. Si nous ne faisons rien maintenant, jusqu'à quand faudra‑t‑il attendre?
    Nous rédigerons un mémoire. Nous allons peut-être établir une sorte de modèle pour le Traité no 6 et peut-être pour l'île de la Tortue. Je félicite également les chefs pour le travail qu'ils ont fait. Au bout du compte, c'est pour cela que nous sommes ici: pour travailler.
    Merci beaucoup, grand chef.
    Si vous pouviez être bref, je vous permettrai une autre petite question, monsieur Desjarlais.
     Oh, bien sûr.
    Je n'ai pas d'autres questions, mais je tiens à remercier tous les témoins pour le travail important qu'ils font. Il a été difficile de convoquer cette réunion, et je suis reconnaissant à tous mes collègues, y compris notre président, de m'avoir donné l'occasion de mener cette importante étude.
    Je remercie tout particulièrement le grand chef du territoire visé par le traité que j'occupe en Alberta. Pour moi, le fait que vous étiez disponible pour cela signifie beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Je vous en prie.
    J'aimerais remercier le grand chef Thomas, le chef Haymond, le chef Mitchell et le chef Peters de leur témoignage et de leur participation aujourd'hui à l'étude du Rapport 2, Le logement dans les collectivités des Premières Nations. Si vous avez d'autres commentaires à faire au Comité, veuillez vous adresser à la greffière. Nous allons bien sûr en tenir compte, tout comme de vos témoignages d'aujourd'hui.
    Je vais maintenant suspendre la séance pendant environ cinq minutes pour permettre à tout le monde de s'étirer les jambes. Ensuite, nous reviendrons avec notre prochain témoin.
    La séance est suspendue pour cinq minutes.

  (1720)  


  (1725)  

    Bienvenue à nouveau.

[Français]

    Conformément à l'article 108(3)g) du Règlement, le Comité reprend l'examen du deuxième rapport de 2024 de la vérificatrice générale du Canada. Tiré des rapports 2 à 4 de 2024 et intitulé « Le logement dans les collectivités des Premières Nations », ce rapport a été renvoyé au Comité le mardi 19 mars 2024.

[Traduction]

    J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre témoin, qui se joint à nous virtuellement. M. Michael Wernick est titulaire de la chaire Jarislowsky sur la gestion du secteur public à l'Université d'Ottawa.
    M. Wernick a indiqué qu'il n'avait pas de déclaration préliminaire. Nous allons donc passer aux questions.
    Je souligne, bien sûr, que M. Wernick est un ancien sous-ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord canadien et qu'il a également été greffier du Conseil privé.
    Monsieur Wernick, nous pensions que vous seriez un témoin idéal pour venir nous parler de cette question. Je suis certain que vous savez très bien, d'après les rapports de la vérificatrice générale, que c'est une question qui a miné plusieurs gouvernements pendant de très nombreuses années. Nous aimerions que vous nous expliquiez pourquoi il en est ainsi et que vous nous fassiez des suggestions ou nous donniez des indices sur les réformes qui pourraient fournir des solutions et offrir un éclairage.

  (1730)  

     Je vous remercie de l'invitation et je vous dirai que la seule raison pour laquelle je n'ai pas préparé de déclaration, c'est que je voulais maximiser le temps de dialogue avec le Comité. C'est la sixième fois que je comparais devant un comité de la Chambre des communes depuis que j'ai pris ma retraite de la fonction publique. Je suis toujours heureux d'aider un comité parlementaire dans son important travail.
    Et nous vous en sommes reconnaissants. Merci beaucoup.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Nater.
    Vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur le président, par votre entremise, je remercie M. Wernick de s'être joint à nous de façon virtuelle cet après-midi pour discuter du rapport de la vérificatrice générale.
     De toute évidence, si je me fie à votre expérience, vous avez œuvré au Bureau du Conseil privé et au ministère qui s'appelait à l'époque Affaires Autochtones et Développement du Nord Canada, où vous étiez sous-ministre, pendant à peu près une quinzaine d'années. J'aimerais commencer par parler de votre expérience à titre de greffier du Conseil privé et d'une expression qui est devenue populaire au gouvernement, « résultologie ».
    À l'époque, je crois que bon nombre d'entre nous considéraient la résultologie comme un slogan qui ne signifiait pas grand-chose. Avec le recul, il y a eu un article dans le Globe and Mail de mars 2020 où on pouvait lire que pour quiconque a travaillé au gouvernement, tout le concept de la « résultologie » a été associé à la théorie de l'administration réchauffée reformulée par d'anciens bureaucrates devenus consultants qui cherchaient à monétiser leurs connaissances internes de la fonction publique.
    Je suppose que cela peut décrire M. Matthew Mendelsohn, qui a pris l'initiative à cet égard au sein du gouvernement.
    De toute évidence, c'est M. Mendelsohn qui a rédigé le programme du Parti libéral en 2015, puis qui a été transféré au Bureau du Conseil privé. Personnellement, je pense qu'il est préoccupant, du point de vue de la partisanerie, de faire venir une personne qui a des liens clairs avec le parti au pouvoir, mais je vais en rester là et me concentrer précisément sur le concept de la résultologie pour l'instant.
    À un moment donné, il y a eu un suivi de la lettre de mandat concernant l'engagement à l'égard des peuples autochtones. Lorsque le système de suivi a été abandonné, environ la moitié des données étaient incomplètes, mais vous étiez un ardent défenseur de cette idée de résultologie. J'ai vu une citation dans un article de la CBC, selon laquelle vous avez dit: « Vous devriez essayer de trouver des façons de mesurer si vous réussissez ou non. C'est une très bonne discipline, je pense, et cela mènera à un meilleur gouvernement ».
    De plus, dans un discours que vous avez prononcé en octobre 2018, vous avez dit: « L'enjeu est de taille pour bien faire les choses. La confiance sera également mise à l'épreuve au cours d'une année électorale où nous aurons amplement l'occasion de communiquer avec les Canadiens au sujet des politiques, des lois, des programmes et des services. Les principes fondamentaux de la résultologie y sont au cœur. »
     Je sais que c'est un long préambule, mais j'y arrive.
    J'aimerais parler plus précisément de la résultologie en ce qui concerne Affaires autochtones et du Nord Canada. Dans un rapport de vérification interne d'Affaires autochtones et du Nord Canada de 2017, on lit: « Reconnaissant que la transition représente une occasion unique pour AANC d'améliorer l'efficacité de sa mesure du rendement et renforcer une culture de la mesure du rendement au sein du ministère, la haute direction a pris certaines mesures pour appuyer la transition vers la Politique sur les résultats et de l'adoption de la “résultologie”. »
    Tout ce long préambule pour vous demander si vous êtes d'accord pour dire que la résultologie n'a pas donné de résultats dans ce cas‑ci, surtout en ce qui concerne le logement des Premières Nations. Toute cette insistance sur la résultologie, toute cette insistance sur la recherche de résultats, semble avoir été de beaux discours, alors qu'en réalité, rien n'a été réalisé. Quand nous nous concentrons sur un commentaire comme celui‑ci de la part d'Affaires autochtones et du Nord Canada, sur cette transition, mais que nous voyons résultats après résultats après résultats en 20 ans — nous parlons de 20 ans et de l'absence de résultats pour le logement des Premières Nations —, ne diriez-vous pas que c'était, dans un sens, trois ou quatre années perdues, au cours desquelles nous nous sommes concentrés sur la résultologie, mais n'avons rien accompli?
    Je vais vous demander de répondre à mon long préambule.

  (1735)  

     Je maintiens ce que j'ai dit. Pour ce qui est de la reddition de comptes au Parlement, il est très important de définir les objectifs que vous essayez d'atteindre, puis d'essayer de déterminer comment les mesurer, puis enfin d'organiser votre collecte de données et vos mécanismes de reddition de comptes en conséquence. Si cette méthodologie n'était pas la bonne, vous devriez quand même chercher ce genre de logiciel d'apprentissage dans la façon dont l'État fonctionne.
     Je dirais que la leçon des 20 dernières années, c'est que le fait d'injecter de l'argent dans des problèmes sans réforme structurelle ne changera pas vraiment les trajectoires fondamentales. Je me suis joint au ministère des Affaires indiennes en 2006, et après neuf ans du gouvernement Harper et neuf ans du gouvernement Trudeau, ma plus grande déception est que la Loi sur les Indiens existe toujours. J'espère que vous prendrez tous l'engagement que la prochaine législature, la 45e législature, sera celle qui abrogera la Loi sur les Indiens. C'est l'un des problèmes fondamentaux qui entravent le progrès des communautés des Premières Nations.
    J'entrerais bien volontiers dans les détails des obstacles au logement des Premières Nations dans les réserves, si vous préférez, mais je pense que le message que je veux vous transmettre, c'est que vous ne pouvez pas obtenir les résultats que vous recherchez avec la loi et les structures de gouvernement que nous avons actuellement. Le moment est venu de procéder à une réforme structurelle en profondeur.
     Je reviendrai au concept de la réforme structurelle lors d'une prochaine série de questions.
    Dans les 30 secondes qu'il me reste, j'aimerais savoir si vous vous souvenez de la stratégie de lutte contre les moisissures qui a été présentée à l'origine en 2008. Par la suite, on a cessé de l'utiliser. Quand nous avons interrogé les représentants du ministère, ils ne semblaient pas se rappeler quand, pourquoi ou par quels moyens on a cessé de l'utiliser.
    Vous souvenez-vous de la raison pour laquelle la stratégie de lutte contre les moisissures de 2008 est tombée en désuétude après 2013?
    Vous en souvenez-vous?
     Non, je crains de ne pas savoir pourquoi cela s'est produit. Je pense que cela nous amène à la question des codes du bâtiment applicables, sur laquelle nous pourrons peut-être revenir.
    Merci.
    Votre temps est écoulé, monsieur Nater.
     Après M. Nater, nous entendrons Mme Khalid, pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur Wernick. Nous nous rencontrons de nouveau après de nombreuses années et dans des circonstances tout aussi chaudes, je dirais.
     Je suis très intriguée par vos antécédents de collaboration avec différents gouvernements, etc. Je veux vraiment parler de logement et de l'incidence des changements climatiques sur les communautés autochtones, en particulier en ce qui concerne le logement.
    Vous pouvez peut-être nous guider, compte tenu de votre vaste expérience en la matière.
     Quels étaient les plus grands défis à relever pour combler l'écart en matière de logement chez les Premières Nations quand vous étiez le sous-ministre chargé du dossier?
    Pensez-vous que ces problèmes sont encore bien présents aujourd'hui? Que pouvons-nous faire pour les éradiquer?
     Je pense que les principes fondamentaux qui sous-tendent cette question sont les mêmes que ceux de mes prédécesseurs. Ce sont les mêmes que ceux de mes successeurs. Les principes fondamentaux sont brisés. Tant que le Parlement n'aura pas modifié les lois et les structures, le ministère pédale dans le vide, essayant d'obtenir des résultats avec une très mauvaise trousse d'outils.
     Si vous en passez quelques-uns en revue, je veux dire, pour la population vivant dans les réserves, qui représente environ la moitié des Autochtones canadiens, la configuration est le régime foncier communal et le logement social. C'est ce que certains ont appelé l'économie socialiste et les résultats socialistes, mais je ne veux pas faire de politique.
    À cause de la Loi sur les Indiens, tout est une solution de rechange. C'est une solution de rechange au régime foncier. C'est une solution de rechange pour les hypothèques, dont vous avez entendu parler, parce que vous ne pouvez pas offrir le même genre de garantie hypothécaire. C'est une solution de rechange pour l'occupation assurée, qu'on appelle les certificats de possession. Il n'y a presque pas de marché de l'assurance privée. Il n'y a presque pas de secteur privé qui construit et gère des propriétés. Il y a très peu d'habitations à logements multiples. Ce sont presque tous des logements unifamiliaux. Il n'y a presque pas d'accès aux marchés financiers.
    Vous savez, le message que je vous lance, à vous et à la vérificatrice générale, c'est qu'il n'y aura jamais assez d'argent des contribuables pour arriver là où vous voulez aller. Il faut puiser dans les marchés financiers, comme le reste des Canadiens.
    Monsieur Wernick, croyez-vous que nous avons fait des progrès dans ce dossier au cours des huit dernières années?

  (1740)  

     J'ai lu le rapport de la vérificatrice générale. Je pense qu'elle mélange un peu les choses. Les graphiques qu'elle a choisi de présenter sont accrocheurs, mais ce sont des pourcentages.
    Si je comprends bien, et vous me corrigerez si je me trompe, il s'agit de pourcentages d'un stock en croissance. C'est ce que je veux dire quand je parle de pédaler dans le vide. Vous êtes à la poursuite d'une population croissante et de coûts croissants.
    Le coût unitaire de chaque logement augmente. C'est un marché qui fait face exactement aux mêmes problèmes que vous dans votre circonscription. Il y a une pénurie de travailleurs spécialisés. Le coût des intrants augmente. Vous obtenez moins de logements pour les dollars qui sont alloués par la ministre des Finances, et c'est pourquoi vous allez devoir mettre à profit l'argent des contribuables pour avoir accès aux marchés financiers.
     Merci d'avoir dit cela.
     Pensez-vous que les changements climatiques ont eu une incidence sur le coût du logement? Si oui, comment?
     Ils ont eu une incidence sur le coût du logement pour tout le monde, certainement en ce qui concerne les intrants énergétiques, le coût des matériaux de construction et ce genre de choses. Je pense que ce serait comme pour les autres Canadiens.
     Cela dépend un peu de l'endroit où vous vivez. On suppose en quelque sorte que toutes les communautés des Premières Nations sont éloignées et situées dans le Nord, mais les plus grandes communautés sont des endroits comme les Six Nations, Akwesasne et Kahnawake, près de Montréal, etc. Il y a des problèmes liés aux inondations et aux incendies qui touchent les communautés des Premières Nations, tout comme il y en a dans d'autres collectivités.
     L'une des grandes lacunes législatives auxquelles vous pourriez remédier, c'est qu'il n'y a pas de codes de prévention des incendies applicables dans les réserves. Cela pourrait être corrigé.
     C'est un très bon point.
    Je vous demande donc s'il y a des projets novateurs dirigés par les Premières Nations que le gouvernement devrait examiner pour s'assurer que nous relevons tous ces défis?
     Je pense que cela concerne davantage les comités stratégiques, les comités des affaires autochtones de la Chambre et du Sénat. J'ai quitté la fonction publique il y a 10 ans, alors je ne suis pas tout à fait au courant, mais je sais que de nombreuses communautés ont des chefs et des conseils qui ont vraiment le sens de l'entrepreneuriat. Je crois que vous avez entendu certains d'entre eux plus tôt aujourd'hui, si j'ai bien compris. Ils font de leur mieux avec les solutions de rechange. Ils essaient de trouver des façons d'avoir des procurations pour les hypothèques et des procurations pour les régimes de location et des procurations pour les frais d'utilisation, etc. Ce sont toutes des solutions de rechange, parce que les principes fondamentaux ne sont pas solides.
    Les trois plus grandes solutions de rechange que le Parlement a données aux Premières Nations sont le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations, que vous devriez examiner, je crois; l'Autorité financière des Premières Nations, qui est un petit organisme qui commence à émettre des obligations et des débentures; et la Loi sur la gestion des terres des premières nations, qui est une façon de se soustraire à la Loi sur les Indiens et de prendre le contrôle du zonage et de l'utilisation locale des terres.
    Aucune de ces solutions n'est utilisée par la majorité des Premières Nations. Elles sont « facultatives », et non obligatoires. Il s'agit d'une voie de sortie de la Loi sur les Indiens, mais près de 30 ans plus tard, le taux de participation est décevant.
     Merci beaucoup, monsieur Wernick, pour le dévouement dont vous avez fait preuve durant une grande partie de votre vie et pour votre présence ici aujourd'hui. J'apprécie vraiment votre contribution.
    Merci.
    Merci, madame Khalid.

[Français]

    Madame Sinclair‑Desgagnés, vous avez la parole pour six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Wernick, vous avez été sous-ministre d'Affaires autochtones et du Nord Canada de mai 2006 à juillet 2014. Ce rapport de la vérificatrice générale ainsi que des rapports précédents ont démontré qu'il y avait eu très peu d'amélioration, sinon aucune, en matière de logement dans les communautés autochtones à l'époque où vous étiez sous-ministre.
    Vous avez ensuite été greffier du Conseil privé de 2016 à 2019. Le rapport de la vérificatrice générale qui vient de paraître et qui est à l'étude aujourd'hui indique qu'il n'y a eu que très peu d'amélioration, voire une détérioration de la situation en matière de logements. Pensons notamment à ceux qui nécessitaient des réparations majeures.
    Pourtant, des milliards de dollars ont été investis.
    Vous avez été greffier du Conseil privé. Ne pensez-vous pas qu'il y aurait des leçons importantes à tirer, entre autres à ce comité, quant aux démarches à entreprendre aujourd'hui pour résoudre ce problème? Celui-ci découle probablement, encore une fois, d'une erreur dans la démarche du gouvernement fédéral ou dans sa vision des Autochtones.
     À l'époque où j'étais le sous-ministre de ce ministère, il était organisé différemment. Maintenant, il s'agit de deux ministères distincts. Jim Flaherty était alors ministre des Finances et les budgets dont je disposais représentaient environ le tiers de leur montant actuel.
    Je crois qu'une des leçons à retenir de la dernière décennie, c'est que ce gouvernement a presque triplé les dépenses relatives aux services destinés aux communautés autochtones. Or, les améliorations sont très lentes à se manifester. Cela donne à penser que quelque chose manque et qu'il faut une réforme structurelle en profondeur.

  (1745)  

     Pourtant, vous avez fait partie des gens qui ne croyaient pas que la Loi sur les Indiens — le simple fait d'utiliser ce nom m'horripile — devait être modifiée.
    Ne croyez-vous pas qu'il faudrait tout simplement se débarrasser de cette loi et qu'elle ne devrait plus exister?
    Que préconisez-vous pour qu'on voie des changements?
    À l'époque, les conditions n'étaient pas en place. Elles ne l'étaient toujours pas lorsque s'est tenue l'importante rencontre de la Couronne et des Premières Nations en janvier 2012. Les politiciens autochtones n'étaient pas favorables à l'idée d'entreprendre cette démarche.
    Nous sommes maintenant en 2024, et je suis absolument en faveur d'une telle démarche. Le moment est venu. Je crois qu'après les prochaines élections, le gouvernement élu pourra adopter un projet de loi stipulant simplement qu'au cours des 10 prochaines années, la Loi sur les Indiens sera retirée.

[Traduction]

     Je veux que ce soit très clair. Il n'y a aucune raison pour que la prochaine législature, après les prochaines élections, ne puisse pas adopter un projet de loi — vous êtes les seuls à pouvoir légiférer — disant que 10 ans après l'entrée en vigueur de celui‑ci, la Loi sur les Indiens sera abrogée. Cela forcerait tout le monde à travailler fort pendant une décennie sur la stratégie de sortie.

[Français]

    C'est intéressant.
    D'ailleurs, précédemment, nous avons entendu une chose intéressante, notamment de la part du chef Lance Haymond, qu'il est très important de répéter: les Autochtones ont la capacité, surtout si on leur en donne l'occasion, de construire et de financer eux-mêmes leurs logements, grâce à des programmes et des projets comme Yänonhchia'. Cela fonctionne très bien. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles le Québec se démarque du reste du Canada. Au Québec, on avait aussi du mal à accéder au capital. C'est pourquoi on a créé des fonds comme ceux de Desjardins, avec l'argent des citoyens ordinaires, par exemple les petits fermiers. De la même manière, des projets comme Yänonhchia' voient le jour.
    Ne croyez-vous pas que le gouvernement fédéral devrait tout simplement s'inspirer de ce genre de projet et arrêter d'investir beaucoup d'argent dans des projets où il s'occupe lui-même de la construction de logements sans produire aucun résultat au bout du compte? Ne faudrait-il pas un changement total de paradigme?
    D'où viendra le capital, si ce n'est pas du Parlement du Canada?
    Il viendra des Autochtones eux-mêmes. Pensons à l'exemple de Desjardins, au Québec, qui récolte de l'argent des particuliers pour financer les projets. C'est la même chose pour Yänonhchia'. Cette initiative permet aux Autochtones de financer eux-mêmes leurs projets.
    Il y a aussi des partenariats. D'ailleurs, ce qui est intéressant, c'est que des entités comme le Fonds de solidarité FTQ et Desjardins ont pu contribuer à de tels projets et de tels programmes parce qu'elles ont une vision différente de celle des grandes banques traditionnelles, qui n'est pas applicable.
    Je suis entièrement d'accord. Si on peut abolir ou réduire les barrières qui empêchent les communautés et leur gouvernement d'accéder au capital privé et aux marchés financiers, on pourra atteindre de très bons résultats.
    Toutefois, il y a des barrières. Par exemple, la Loi sur les Indiens est l'une des barrières qui posent problème pour l'obtention de garanties, d'hypothèques et d'assurances, notamment.
    Tout ce qui se fait au Québec est une sorte de solution de contournement.
     Merci beaucoup.

[Traduction]

     C'est maintenant au tour de M. Desjarlais, pour six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Wernick, de votre présence aujourd'hui.
     Vous avez eu une longue carrière. Je suis certain que vous avez subi des attaques de la part de tous les partis, surtout que vous êtes un ancien membre du Conseil privé.
     Vous avez la réputation, en territoire autochtone, d'être quelqu'un qui a largement contribué à maintenir les problèmes persistants qui affligent les collectivités autochtones aujourd'hui. Dans sa déclaration préliminaire sur ce rapport, la vérificatrice générale a dit que c'était la quatrième fois depuis 2003 que nous soulevions des préoccupations au sujet du logement dans les collectivités des Premières Nations, et 20 ans plus tard, bon nombre de ces préoccupations persistent. Malgré ces vérifications, nous constatons que Services aux Autochtones Canada et la Société canadienne d'hypothèques et de logement ont fait « peu de progrès » pour aider les Premières Nations à améliorer les conditions de logement dans leurs communautés.
    Quelle est votre responsabilité à cet égard?

  (1750)  

     Sheila Fraser a écrit un excellent article sur la politique et les services destinés aux Autochtones dans la préface de six pages de son rapport du printemps 2011. J'en recommande la lecture au Comité et à tous ceux qui nous regardent. Elle a parlé de quatre obstacles structurels à l'avancement des services aux Premières Nations.
     Le premier est l'absence de base législative. Le deuxième est le manque de clarté au sujet des niveaux de service. Le troisième est l'absence d'un mécanisme de financement approprié. Le quatrième est le manque d'organisations pour appuyer la prestation de services locaux.
    C'est aussi vrai aujourd'hui qu'en 2011.
     Je vous recommande également le rapport de février 2012 du Comité en réponse à ce rapport. Il a demandé une réforme structurelle...
    Quelle a été votre réponse à cette première partie? Durant les nombreuses années où vous étiez responsable de ce travail, comment avez-vous réagi à ces revendications?
    Je pense que les gens qui occupent ces postes travailleront avec leurs ministres pour faire de leur mieux avec les outils que le Parlement leur a donnés.
     Si vous voulez passer en revue toutes les choses que mes quatre ministres et moi avons pu accomplir entre 2006 et 2014, je serais heureux de le faire. Si le président veut bien m'en donner le temps, bien entendu.
     De toute évidence, vous vous attribuez le mérite de certaines de ces actions. Vous parlez d'une excellente liste. Je parle de l'autre liste, la liste remise par les collectivités des Premières Nations qui recense les immenses échecs. Par conséquent, je ne pense pas que vous allez nous fournir aujourd'hui une réponse qui nous permettra de répondre à l'insatisfaction des Autochtones à l'égard d'Affaires autochtones et du Nord Canada et de ses anciennes entités, ainsi que les entités actuelles. Néanmoins, il est important pour moi de souligner cette attitude paternaliste qui continue à apaiser les collectivités autochtones d'aujourd'hui. L'un des messieurs qui étaient ici aujourd'hui a dit qu'il a participé à ce travail pendant 36 ans et qu'il n'a pas vu de changement de cap remarquable dans l'attitude des fonctionnaires, en particulier des sous-ministres — et vous avez été en poste pendant plus du tiers de cette durée — visant à apporter des changements substantiels à leur propre perspective.
    Pour être très franc, monsieur Wernick, vous n'êtes pas un expert des expériences vécues par les Autochtones. Vous êtes un expert qui conseille le gouvernement sur les cadres législatifs qui sont demandés aux sous-ministres, et la Loi sur les Indiens en est un exemple. Vous savez, nous voyons souvent des cas où — en ce qui concerne la politique de résiliation, par exemple — vous auriez été soumis à ces idées. Harold Cardinal, philosophe célèbre et Autochtone de ma collectivité... La dernière fois qu'un Trudeau a essayé de dire aux Premières Nations de l'Alberta: « Nous allons supprimer la Loi sur les Indiens », il a répondu en publiant le « livre rouge ». Avez-vous déjà lu le livre rouge?
     Je suppose que c'est une question de pure forme.
    Eh bien, compte tenu de votre bilan, je ne sais pas si vous l'avez lu. C'est une vraie question: avez-vous lu le livre rouge...
     Bien sûr que oui.
    ... et avez-vous écouté les préoccupations des peuples autochtones? Quand vous dites des choses aussi cavalières que: « Éliminons simplement la Loi sur les Indiens et donnons-nous 10 ans, comme une arme grossière, pour établir un échéancier pour l'avenir des peuples autochtones », pourquoi répondez-vous de cette façon si vous avez lu le livre rouge?
    Vous êtes le Parlement du Canada. Il y a 41 millions de Canadiens, mais vous n'êtes que 338 — bientôt 343 — à pouvoir modifier la loi.
     Ce n'est pas moi qui recommande qu'on abolisse la Loi sur les Indiens dans 10 ans et qu'on fixe un échéancier.
     Vous n'êtes pas obligé de suivre mon conseil, mais c'est l'expression de la vérité: si vous voulez obtenir les résultats, vous devez vous débarrasser de...
    Je veux savoir pourquoi vous conseillez quelque chose d'aussi ridicule que de fixer un délai comme celui‑là.
    Est‑ce la position de votre parti?
    Que se passerait‑il si je vous fixais un délai et que je vous disais: « Vos droits seront abolis dans 10 ans, et il vous revient de vous en occuper, monsieur Wernick. »?
    Il y aurait une stratégie de sortie, des ententes d'autonomie gouvernementale et d'autres types de lois. Cela fait 30 ans que nous essayons des stratégies de sortie, et c'est vous qui soulignez l'absence de...

  (1755)  

    Quelle est la perspective d'une stratégie de sortie... Pourquoi cette perspective existe-t-elle?
     En négociant des ententes avec des gouvernements autonomes particuliers. Vous savez qu'il y a plus de 630 Premières Nations distinctes, plus de 70 conseils tribaux, environ 50 organisations régionales et provinciales et 3 organisations nationales.
     À mon avis, la raison pour laquelle cela ne fonctionne pas est claire. Votre attitude aujourd'hui, même... Vous n'avez rien appris depuis que vous étiez au Conseil privé et depuis l'époque où vous étiez sous-ministre, et les résultats sont clairs. Vous avez été en poste pendant 20 ans, monsieur Wernick, et vous ne revendiquez aucune responsabilité... Et aujourd'hui, vous avez l'audace de venir devant ce comité et de fixer un délai pour l'abolition des droits des Autochtones, en prétendant qu'il y a une stratégie de sortie à l'avenir, bien que vous ayez lu le livre rouge.
    Je n'ai pas de questions, sauf pour dire...
    Je n'ai pas dit qu'il y avait une stratégie de sortie...
    ... monsieur Wernick, c'est mon temps de parole. Vous êtes probablement le plus grand agent des Indiens que nous ayons vu depuis 100 ans.
     Merci.
     Je n'ai pas dit qu'il y avait une stratégie de sortie. J'ai dit que les gouvernements et les Premières Nations auraient 10 ans pour dialoguer en vue de construire de meilleures portes de sortie des structures de la Loi sur les Indiens.
     Merci beaucoup.
    Pour le prochain tour, je cède la parole à M. Melillo. Vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Wernick, en réponse à des questions précédentes, vous avez dit quelque chose que je trouve intéressant. Vous avez déclaré qu'il n'y aurait jamais assez d'argent des contribuables pour répondre aux besoins existants.
    Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet et nous dire comment, à votre avis, le secteur privé pourrait être mieux mis à contribution et mieux utilisé pour combler les lacunes en matière de logement.
     Eh bien, je pense que le logement et l'infrastructure vont de pair. Vous avez besoin de terres. Il faut avoir des terrains viabilisés, donc il faut de l'eau, des réseaux d'eaux usées, de l'électricité, Internet et tout ce qui convertit des terres en terrains viabilisés. Il faut ensuite construire des logements, qu'il s'agisse de logements unifamiliaux ou de logements collectifs. Il s'agit des terres, de l'infrastructure et du logement.
    Si vous faites cela sur une base entièrement monétaire, au départ — ce que doit faire le ministère des Services aux Autochtones avec ce qu'il reçoit du ministre des Finances —, votre action est limitée. Il faut un algorithme ou une formule de financement pour répartir les ressources limitées entre un grand nombre de postes. L'infrastructure du logement n'est qu'un poste parmi d'autres.
    Lorsque j'y travaillais, il y avait un plafond — le fameux plafonnement de 2 % du prix et l'indexation du volume qui couvraient tout. Les services à l'enfance et à la famille, l'aide au revenu, l'éducation, l'éducation postsecondaire, le logement et l'infrastructure ont tous été plafonnés par une indexation du programme de 2 % instaurée par Paul Martin et maintenue pendant 15 ans par les ministres des Finances. Elle a été levée par le gouvernement actuel, et les dépenses pour ces services ont presque triplé.
    Cependant, si les résultats ne s'améliorent pas assez rapidement, force est de penser qu'il manque autre chose. Je dirais — et cela ne va pas vous plaire non plus — que vous n'obtiendrez pas ce que vous voulez avec le modèle du ministère, qui promeut des accords de contribution auprès des Premières Nations. Ce n'est pas la trousse d'outils adéquate pour créer des logements et des infrastructures.
     Merci.
    Je vais vous interrompre. Vous avez parlé des dépenses, qui ont, je crois, triplé. J'aimerais aborder cette question, car le directeur parlementaire du budget a publié il y a quelques années un rapport intitulé RCAANC et SAC — Recherche et analyse comparative, qui mentionne cette augmentation spectaculaire du financement sous le gouvernement actuel, mais qui souligne que cela n'a pas permis au ministère d'atteindre les objectifs souhaités dans les mêmes proportions. Il y a beaucoup de dépenses, mais pas nécessairement les résultats équivalents auxquels on pourrait s'attendre.
     En vous fondant sur votre expérience, pouvez-vous nous expliquer cette situation? Pourquoi les dépenses vont-elles à la bureaucratie plutôt qu'aux Premières Nations et aux collectivités autochtones qui en dépendent?
     En fait, très peu de ces fonds restent au ministère. La somme colossale d'argent que vous allouez aux ministères est versée sous forme de paiements de transfert aux collectivités des Premières Nations, aux conseils tribaux et à d'autres entités et organismes de service. Vous trouverez ces renseignements dans l'InfoBase du GC, sous Subventions et contributions.
    Un accord de contribution consiste à dire: « Voici de l'argent — faites un rapport pour expliquer ce que vous en avez fait. » Les vérificateurs généraux et les comités des comptes publics précédents ont fait des observations et des critiques sur la confiance excessive à l'égard des accords de contribution. La seule véritable façon d'obtenir des données et de changer les résultats est d'inclure beaucoup de conditions dans les accords de contribution. C'est notamment ce que veut dire Sheila Fraser quand elle souligne qu'il n'y a pas de base législative.
    Vous connaissez d'autres programmes, comme la pension de vieillesse, l'assurance-chômage, les prêts aux étudiants, etc., où l'admissibilité et la formule sont définies dans la loi et le libellé législatif. Il n'y en a presque pas lorsqu'il s'agit des Premières Nations. J'ai passé beaucoup de temps à travailler à la législation sur l'éducation des Premières Nations. Malheureusement, nous n'en avons toujours pas. Nous avons maintenant une loi sur les services à l'enfance et à la famille des Premières Nations, mais des mesures législatives sont nécessaires dans d'autres domaines.
    Comme je l'ai dit, je pense que vous êtes aux prises avec une augmentation de la population et des coûts. Le coût des salaires des enseignants et ce qu'il faut verser aux commissions scolaires locales pour payer les frais de scolarité des enfants des Premières Nations qui vont à l'école à l'extérieur des réserves... Tous les coûts augmentent, de même que la population, de sorte qu'il faudra toujours plus d'argent pour obtenir des résultats.

  (1800)  

     Je vais m'arrêter ici, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Weiler.
    Vous avez la parole pour cinq minutes. Allez‑y monsieur.
    Je tiens également à remercier M. Wernick d'être ici aujourd'hui pour contribuer à l'étude que nous faisons sur le rapport de la vérificatrice générale sur le logement.
    J'aimerais revenir au sujet que vous avez évoqué dans votre déclaration préliminaire et que quelques-uns de mes collègues ont soulevé, à savoir la Loi sur les Indiens et la nécessité de s'en écarter.
     Je suis tout à fait d'accord pour dire que si nous pouvions le faire, les collectivités autochtones en profiteraient grandement. Je dirais aussi que j'ai été un peu alarmé lorsque mon collègue, M. Stewart, a parlé des aspects positifs de cette loi, alors que nous savons qu'il s'agit d'une loi qui, de par sa nature même, est raciste et traite les Autochtones comme des pupilles de l'État. Elle comporte de nombreux obstacles à la construction de logements et au développement économique, entre autres.
    Fixer un délai de 10 ans est un énorme défi. Comme vous l'avez mentionné, il y a 630 collectivités autochtones au pays. Bien que des progrès aient été réalisés dans le cadre des traités modernes, des ententes d'autonomie gouvernementale et d'autres ententes, il est extrêmement difficile d'aller de l'avant, parce que chaque collectivité autochtone est distincte.
    Comment recommanderiez-vous au gouvernement ou aux gouvernements futurs d'aller de l'avant pour accélérer l'autodétermination et l'autonomie gouvernementale des nations?
     Évidemment, cela doit se faire en partenariat, en cheminant ensemble. Je ne veux pas donner l'impression que cela devrait être fait unilatéralement par le Parlement du Canada, quel que soit son bord. La prochaine législature commencera en 2026, je pense, et après tout ce temps, nous ne pouvons pas continuer à blâmer la Loi sur les Indiens, la contourner et ne pas se rendre à l'évidence que ce logiciel a fait son temps et que nous devons passer à autre chose.
    Apparemment, le prochain gouvernement va abolir la Banque de l'infrastructure du Canada et abandonner son portefeuille de prêts, alors je pense qu'il y a là une occasion de réunir le logement et l'infrastructure. Je conseille à tous vos comités électoraux d'inscrire dans leur plateforme un remaniement complet des rouages du gouvernement fédéral dans ce domaine. Il faut fusionner tous les programmes de logement et d'infrastructure. Retirez le logement des Services aux Autochtones. Retirez le logement de la SCHL. Ajoutez-les au portefeuille autochtone de la Banque de l'infrastructure du Canada et créez une société d'État qui s'occupera du logement et de l'infrastructure des Premières Nations de façon très professionnelle, en accord avec notre époque et avec l'année 2026, en quelque sorte.
    Vous pourriez lui donner tous les outils dont dispose une entreprise du secteur privé comme Brookfield. Vous pourriez y nommer un conseil de gestion, un véritable conseil d'administration chargé de demander des comptes au personnel et aux cadres. Vous pourriez vous assurer que la majorité des membres de ce conseil sont nommés par les Premières Nations. Vous pourriez confier à cette société une fonction d'inspection.
    L'un des problèmes, c'est qu'il n'y a tout simplement pas assez de gens, et si vous adoptez des codes du bâtiment et des codes de prévention des incendies applicables, vous avez besoin d'un service d'inspection. Si vous réunissiez tous ces éléments et qu'il pouvait y avoir des partenariats avec les marchés financiers et les entreprises du secteur privé, je pense que vous pourriez faire quelque chose. Si nous continuons d'investir dans les mêmes outils, ne vous attendez pas à ce que les résultats changent fondamentalement.
    Merci.
    Je suis d'accord. C'est vraiment alarmant quand on visite des collectivités autochtones et qu'on voit l'état de certains logements. Même si nous constatons les effets du financement supplémentaire, du triplement du financement, il y a une collectivité dans ma circonscription qui jusqu'à l'an dernier n'avait pas vu un seul dollar investi dans le logement en 30 ans.
    Voilà ce qu'il faut absolument changer. Pourriez-vous simplement dire au Comité ce que vous considérez comme le plus grand défi à relever pour combler les lacunes en matière de logement et nous dire si ce défi est le même aujourd'hui que lorsque vous êtes devenu sous-ministre adjoint en 2006?

  (1805)  

     Eh bien, des logements ont été construits. Je pense que la vérificatrice générale a présenté des données en pourcentage qui donnent l'impression qu'il n'y a pas eu de progrès. Bien sûr, des logements ont été construits.
    Pour revenir à une question précédente, il y a beaucoup de collectivités qui innovent, qui ont construit des logements de grande qualité et qui font toutes sortes de choses intéressantes. Le leadership communautaire joue un rôle énorme à cet égard.
    Je pense que cela soulève la question de l'algorithme de financement. Il s'agit d'un programme, comme il en existe beaucoup d'autres, où il y aura toujours plus de demandes et d'utilisations possibles que de fonds disponibles. Même si vous continuez d'augmenter le financement, il sera limité et vous aurez besoin d'un algorithme pour l'allouer.
    Lorsque j'étais en poste, il y avait pour ainsi dire des fonds régionaux, et donc la Colombie-Britannique avait un fonds, l'Alberta avait un fonds, l'Ontario avait un fonds et ainsi de suite. Ensuite, il y a eu beaucoup de négociations avec les chefs dans chaque région au sujet des formules de répartition pour des ressources très limitées, et le ministère a dû dire non très souvent.
    Aujourd'hui, la vérificatrice générale a une vision très précise de ce qu'est l'équité, mais il s'agit pour l'essentiel d'une décision stratégique et même politique, sur la façon la plus équitable d'allouer des ressources limitées. Elle met beaucoup l'accent sur le fait de canaliser l'argent là où les besoins sont les plus criants.
    De plus, il vous faudra peut-être saisir les occasions qui se présentent. Par exemple, construire un lotissement complet parce que des terres deviennent disponibles ou parce qu'il est possible pour une collectivité de conclure un règlement de revendication ou un règlement de litige. De ce fait, cette collectivité a soudain la possibilité de construire un lotissement complet de nouveaux logements. Il peut y avoir une collectivité qui a puisé dans les marchés financiers et qui peut verser 50 % de l'argent...
    Monsieur Wernick, je dois passer à quelqu'un d'autre. Le temps est écoulé, mais je suis certain que les députés reviendront sur ce sujet.

[Français]

    Madame Sinclair‑Desgagné, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Wernick, en répondant à la question de mon collègue M. Weiler, vous avez dit qu'une solution potentielle serait la création d'une société d'État, car cela permettrait, d'après vous, de construire de nouveaux logements de manière productive et efficace. Or, c'est précisément à l'opposé de ce que nous venons d'entendre de la part des grands chefs, notamment du chef Lance Haymond. Je vous invite fortement à vous pencher sur ce qu'il présente comme étant une solution qui fonctionne, soit le programme Yänonhchia'.
    Des ressources autochtones, du capital autochtone et de l'autodétermination: voilà quels sont les ingrédients nécessaires à la construction de logements. Il faut que le gouvernement fédéral arrête de penser qu'il doit s'ingérer dans les affaires autochtones et tout gérer, comme si les Autochtones n'étaient pas capables de se gérer par eux-mêmes. C'est fondamental.
    L'approche voulant qu'une société d'État construise les logements est la pire approche possible. Premièrement, au Comité permanent des comptes publics, nous n'arrêtons pas d'entendre dire que les sociétés d'État ne sont pas efficaces et qu'elles n'arrivent pas à faire le travail nécessaire. Les audits de performance nous le démontrent jour après jour. Donner plus de responsabilités au gouvernement fédéral, c'est exactement à l'opposé de ce qu'on souhaite, peu importe le domaine. De plus, dans ce contexte précis et très délicat, il est faux de penser que donner du pouvoir à une société d'État va permettre à celle-ci de miraculeusement régler la pénurie de logements dans les réserves.
    Encore une fois, je vous invite fortement à écouter ce que M. Haymond nous a dit précédemment et à vous pencher sur le modèle que propose Yänonhchia'. C'est dommage que M. Haymond et vous n'ayez pas témoigné en même temps, car je pense que les discussions auraient été très intéressantes.
    Dans la Loi sur les Indiens, il y a effectivement des barrières importantes. Vous l'avez mentionné et tout le monde ici est d'accord sur cela. Il existe toutefois des solutions. Je parle ici de solutions proposées par des Autochtones pour régler des problèmes autochtones. Voilà ce qu'on doit faire.
    En tant que membre du Bloc québécois, je dois dire que l'autodétermination est un principe que j'aime beaucoup pour la société québécoise. L'autodétermination est également une très bonne idée pour les Autochtones.
    C'est sur ces paroles que mon temps de parole se termine. Je vous invite fortement à regarder les programmes comme Yänonhchia'.

  (1810)  

[Traduction]

     Merci beaucoup. Cela ne laisse pas de temps pour une réponse, même s'il n'y a pas vraiment eu de question.

[Français]

    Je cède maintenant la parole à M. Desjarlais.

[Traduction]

     Vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais revenir à vous, monsieur Wernick, je trouve vos points de vue problématiques et désuets en ce qui concerne les efforts des peuples autochtones pour ramener notre pays à une posture qui lui permette de comprendre les liens profonds entre notre État colonial et les droits territoriaux qu'il a usurpés et définis dans les traités.
    Quel est votre point de vue sur les traités, particulièrement les traités historiques?
    Je suis désolé. Quelle est votre question?
    Quel est votre point de vue sur les traités historiques par rapport au fait que le Canada a en grande partie usurpé ses droits de propriété par l'entremise de ces traités historiques?
    Je pense qu'il faut trouver des façons de se soustraire à la Loi sur les Indiens, qui s'ajoute aux traités numérotés — de 1 à 11 — dans la majeure partie du centre et de l'ouest du Canada. D'autres régions du Canada, comme vous le savez, ont des traités modernes. Dans l'ensemble du Nord, il existe près de 24 ententes modernes sur les revendications territoriales relatives à l'autonomie gouvernementale, et dans la plupart de ces ententes, le titre autochtone et la propriété de l'assise territoriale sont beaucoup plus clairs.
     Vous savez, nous avons une entente, peut-être pas nécessairement une relation de confiance, au sujet de la nécessité de réduire les obstacles entre le traité et... Vous laissez entendre que le Parlement a assumé la souveraineté. Il ne s'agit pas seulement de l'ensemble de ses responsabilités dans le cadre du traité, mais il représente maintenant la seule voie de sortie, selon vous, de cette relation paternaliste. Est‑ce exact?
    Non, c'est inexact. C'est une relation de nation à nation. Il s'agit d'une relation entre la Couronne et les Autochtones.
    Monsieur Wernick, ce sont vos propos. Vous avez dit que la Loi sur les Indiens, qui est une loi fédérale... En dehors du Parlement, que se passerait‑il si nous présumions le contraire, monsieur Wernick? Supposons qu'un gouvernement autochtone, comme celui du Traité no 8, légifère ses propres lois et règlements administratifs sans tenir compte des pouvoirs du Parlement. Est‑ce que cela serait acceptable?
     Non. Tout accord d'autonomie gouvernementale fait l'objet d'une loi fédérale. Il y a une loi de mise en œuvre des traités qui accompagne tout accord moderne d'autonomie gouvernementale.
     C'est là où nous sommes fondamentalement en désaccord. C'est une hypothèse, monsieur Wernick. C'est l'hypothèse de sir John A. Macdonald et des grands esprits avec lesquels vous semblez partager votre point de vue selon lequel le Parlement est suprême dans ces décisions, alors qu'en fait, s'il s'agit d'un partenariat de nation à nation, pourquoi le Parlement aurait‑il ce genre de pouvoirs ridicules?
     Voulez-vous dire que le Parlement céderait tous ses pouvoirs législatifs et son contrôle des cordons de la bourse pour approuver la répartition...
     Je dis qu'il n'a jamais eu ces pouvoirs.
    J'ai bien peur que le temps soit écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Stewart. Vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
     Monsieur Wernick, vous avez évoqué l'idée d'un regroupement de la plupart des programmes de logement. Vous avez dit, me semble‑t‑il, que vous pensiez que la mise en place d'une unique société d'État pourrait régler bon nombre des problèmes auxquels font face les peuples autochtones aujourd'hui.
    Évidemment, vous avez été sous-ministre pendant longtemps, et cela n'a pas été fait, alors j'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi cela n'a pas été fait lorsque vous étiez en poste et pourquoi, si c'était fait aujourd'hui, cela changerait quoi que ce soit.
    Merci.
     Les sous-ministres ne peuvent pas modifier les structures du gouvernement; seul le Parlement peut le faire; il faudrait donc une loi pour créer cette société d'État. Ce n'est pas une question de contrôle gouvernemental. Comme je l'ai dit, cela pourrait se faire avec une gouvernance importante des Premières Nations. Vous pourriez avoir un conseil d'administration nommé par les peuples des Premières Nations.
    Je pense simplement que c'est un meilleur modèle que celui dans lequel le ministère préconise des accords de contribution, ce que nous faisons depuis 50 ans, avec des résultats limités.
    Est‑il vrai que lorsque vous étiez sous-ministre, vous avez fait part de cette idée au gouvernement actuel, qui est en place depuis neuf ans?
     Je n'ai eu aucun contact avec ce gouvernement depuis mon départ il y a cinq ans.
     Il y a cinq ans que vous êtes parti, mais ce n'est pas ma question. Avec tout le respect que je vous dois, vous avez été sous-ministre, et en tant qu'ancien ministre au Nouveau-Brunswick, je peux vous dire que les sous-ministres ont une liste de souhaits, qui s'étale parfois sur 20 ou 30 ans. Ils se présentent à votre bureau dès que vous y arrivez, sachant que vous êtes peut-être un peu vert et naïf et que vous pourriez adhérer à quelque chose qu'ils essaient de faire depuis des décennies.
    Au cours des quatre premières années de votre fonction de sous-ministre alors que le gouvernement actuel était au pouvoir, qu'a‑t‑il pensé de votre idée de société d'État? À qui l'avez-vous présentée? Qui a refusé? Qui était contre? Pourquoi?

  (1815)  

     Je suis désolé. J'étais sous-ministre sous le gouvernement Harper. J'ai passé toutes mes années en poste sous le gouvernement de Stephen Harper. Mes ministres étaient Jim Prentice, Chuck Strahl, John Duncan et Bernard Valcourt. Nous étions occupés à autre chose.
    D'accord, je vais vous interrompre. J'ai demandé si c'était le gouvernement Trudeau, parce que vous avez dit ne pas avoir parlé à ce gouvernement depuis cinq ans, alors vous me dites que vous n'avez jamais présenté cette idée de société d'État à l'administration actuelle? C'était en fait ma question.
     Non. En 2017, le gouvernement avait déjà conclu une entente politique avec l'Assemblée des Premières Nations qui a mené à la scission du ministère. L'Assemblée des Premières Nations préconisait depuis un certain temps de scinder en deux le ministère, avec Services aux Autochtones d'un côté et Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada de l'autre. La décision politique en vue de faire ce changement a été prise en 2017.
    Je comprends, alors croyez-vous que l'idée de l'Assemblée des Premières Nations était mauvaise?
     Nous sommes maintenant en 2024, et il vaut la peine d'y jeter un coup d'œil, six ou sept ans plus tard, après la scission du ministère. Je suis certain que cela a permis d'accomplir des choses positives. Je pense que l'intégration de la santé aux Services aux Autochtones était une bonne idée, mais elle a ses limites, parce que cela reste un ministère qui fait la promotion du modèle des accords de contribution et...
     D'accord, merci. C'est mon tour de parole.
    ... les mesures proposées par Sheila Fraser n'ont pas été respectées.
    Merci encore.
    J'ai quitté la salle un instant et, à mon retour, j'ai entendu un député me reprocher d'avoir dit que la Loi sur les Indiens apportait des éléments positifs et négatifs. Si ce député libéral représentait les Premières Nations depuis aussi longtemps que moi, il saurait de quoi il retourne. Malgré les imperfections de la Loi sur les Indiens — elle a été créée en 1876 par Alexander MacKenzie, un premier ministre libéral —, il saurait pertinemment que les Premières Nations ont peur que ce dossier soit ouvert, parce qu'elles craignent toujours que le gouvernement leur retire quelque chose.
    Ce n'est pas parfait, et ne me critiquez pas si vous ne connaissez pas le dossier. Il vaut mieux se taire quand on ne sait pas.
    Voici ce que je vais vous dire, monsieur Weiler — écoutez bien. Vous êtes le gouvernement. Si vous voulez vous débarrasser de la Loi sur les Indiens, vous ouvrez le dossier et vous la supprimez. Voyons voir ce que vous allez faire. Vous avez le pouvoir. Vous êtes le parti au pouvoir. Voyons si vous changez enfin de nom.
    Regardez le titre même: « Loi sur les Indiens ». Nous sommes en 2024, et nous avons toujours ce nom, et vous restez là à critiquer? Si vous parlez à des membres des Premières Nations, vous vous rendrez compte qu'ils ont très peur de ce qui se passera lorsque ce dossier sera ouvert dans notre pays.
    Combien de temps me reste‑t‑il, monsieur le président?
     Quinze secondes.
     Je n'ai plus rien à dire. J'espère qu'il se renseignera en conséquence. Merci.
     Merci beaucoup.
     Nous passons maintenant à Mme Shanahan. Vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Cette réunion prend une tournure intéressante, mais c'est un bon exercice que de revenir sur le passé proche, les 20 dernières années et sur ce qui aurait pu être fait et ce qui aurait dû être fait, mais qui ne l'a finalement pas été.
    Monsieur Wernick, compte tenu de votre expérience avec les deux gouvernements au cours de cette période, pouvez-vous nous parler d'un moment ou d'une décision qui aurait changé les résultats en matière de logement pour les Premières Nations par rapport à la façon dont le gouvernement fédéral a abordé ce problème?
    Pour revenir en arrière, la seule chose importante dans le domaine du logement était le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations, qui a été créé par l'ancien ministre Flaherty dans le budget de 2008, je crois. C'était peut-être en 2009, vous pourrez vérifier. Il a été conçu avec les conseils et les commentaires des Premières Nations précisément pour essayer d'accéder aux marchés financiers et de créer à titre expérimental quelque chose de plus proche des conditions du marché du logement.
     Il existe toujours. Vous pouvez chercher dans Google le Fonds pour les logements du marché destinés aux Premières Nations. Il a permis de faire des progrès dans certaines collectivités.
    Comme je l'ai dit, la Loi sur la gestion des terres des premières nations est très importante, car elle donne aux collectivités le plein contrôle de l'utilisation des terres, du zonage et de la façon dont les terres de leurs collectivités seront utilisées. La participation a été très importante. Nous avons essayé d'éliminer les obstacles pour rendre cela plus accessible.
    À l'époque, le Parlement avait adopté une loi autorisant la mise en valeur de propriétés dans la nation Squamish, en Colombie-Britannique, en utilisant ce qu'on appelle la LDCIPN, qui est l'acronyme de la Loi sur le développement commercial et industriel des premières nations. Au moins, cela a rendu possible la construction de logements à Squamish, qui est encore en cours.
    Au cours des 40 dernières années, tous les gouvernements ont mis en place des solutions de contournement et ont tenté de créer des voies de sortie de la Loi sur les Indiens et de créer de meilleurs modèles.

  (1820)  

    Merci.
    C'est ce que plusieurs membres du Comité ont trouvé intéressant dans le témoignage du chef Haymond, dans le dernier groupe de témoins.
    Le chef Haymond a déclaré qu'il avait été possible d'obtenir une bonne partie du capital pour financer l'institution sur les marchés obligataires. Cela vaut la peine d'être exploré, car, comme nous le savons tous, le logement et les terres sont des actifs, et les actifs ont une valeur qui peut être financée.
    Connaissez-vous ces modèles en matière de finance sociale et de réinvestissement dans les communautés?
    Ces solutions ont-elles été évoquées lorsque vous étiez au pouvoir?
     Absolument.
    Encore une fois, ce sont des solutions de rechange qui permettent de contourner la loi. Certaines communautés ont tenté de s'en prévaloir. C'est le rôle de l'Autorité financière des Premières Nations. On tire parti des garanties ministérielles pour endosser un prêt consenti à une Première Nation par la Couronne.
    La Première Nation s'occupe de la construction, de l'octroi de contrats, de l'embauche des architectes, des entrepreneurs et des entreprises. C'est une véritable lutte — la vérité est détenue par ceux qui détiennent le pouvoir —, car il s'agit souvent de petites collectivités, de petits gouvernements avec un personnel limité. Si c'est difficile pour la Ville de Montréal ou la Ville de Lethbridge, c'est extrêmement difficile pour une communauté de Premières Nations.
    La plupart d'entre elles auront toujours besoin d'un partenaire quelconque et, à moins de cesser d'utiliser l'argent des contribuables, quelqu'un doit gérer les deniers publics que le Parlement débloque pour ces communautés. C'est pourquoi je pense qu'il faut essayer. Si le modèle que l'on utilise ne donne pas les résultats escomptés, il faut en changer.
    La différence, c'est qu'il y a un débat politique animé sur le coût des hypothèques pour les jeunes familles au Canada. Ce débat se fonde sur le principe que, partout dans le monde et partout ailleurs au Canada, le logement et les infrastructures sont majoritairement financés par le biais d'emprunts. Les achats ne se font pas en argent liquide. Les seuls à payer en amont sont les Affaires autochtones, les Services aux Autochtones et peut-être les Saoudiens. Tous les autres ont recours à une forme quelconque de financement par emprunt pour constituer des actifs à long terme. Les infrastructures et le logement figurent dans cette catégorie, tout comme les réseaux électriques, l'eau, les eaux usées, les connexions Internet et ainsi de suite.
    Nous avons réalisé beaucoup de projets en payant en liquide. Nous avons conclu une entente très novatrice de financement sur le marché dans le Nord de l'Ontario, l'entente Watay Power, que vous connaissez probablement. Elle a permis d'approvisionner en électricité une vingtaine de collectivités du Nord-Ouest de l'Ontario. La centrale sera en fonction cet automne, ce dont je suis ravi.
    C'est la voie à suivre. Il ne faut pas simplement injecter plus d'argent dans un modèle défaillant de logement social: il faut trouver des façons d'accéder aux marchés financiers privés et d'obtenir un effet de levier de deux pour un, de trois pour un ou de quatre pour un — peu importe ce que peut fournir le Parlement.
     Merci, monsieur Wernick.
    Nous allons maintenant entamer notre troisième tour. Je vais devoir réduire le temps de parole à quatre minutes et deux minutes.
    Monsieur Melillo, vous avez la parole pour quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Monsieur Wernick, j'aimerais vous poser une question au sujet des données du recensement du gouvernement.
     Dans son rapport, la vérificatrice générale signale que les données utilisées proviennent du recensement de 2001. Aux yeux des parlementaires et des Canadiens du pays, il n'apparaît pas très logique de se fonder sur des données aussi désuètes pour prendre une telle décision.
    Pouvez-vous expliquer cela? Y a‑t‑il une raison acceptable de ne pas utiliser des données plus récentes?
    Je n'en ai pas la moindre idée. Je ne ferais que spéculer.
    Je signale au Comité que les données du recensement de 2021 seront publiées en juillet dans le cadre de l'Enquête auprès des peuples autochtones et qu'un riche éventail de données seront mises à la disposition de tous les Canadiens et parlementaires cet été.

  (1825)  

    Merci beaucoup.
    Vous avez offert certains détails, mais vous avez répondu dès le départ aux questions initiales de M. Nater sur les réformes structurelles profondes qui s'imposent.
    Je sais que vous y avez fait référence dans l'ensemble de vos commentaires. Y a‑t‑il des sujets en particulier que vous auriez laissés de côté et auxquels vous aimeriez revenir?
    Certes, je mets quiconque au défi de trouver une façon de contourner la Loi sur les Indiens. Plutôt que de continuer à se concentrer sur un modèle où le ministère impose des accords de contribution, il faudrait revoir la formule après chaque élection.
    Il y aura des élections l'an prochain. N'importe lequel des cinq ou six partis pourrait, dans son programme, prendre l'engagement à remanier les structures du gouvernement et à créer une société d'habitation des Premières Nations, qui travaillerait en étroite collaboration avec les communautés et accorderait un important leadership aux Premières Nations.
     Ce serait un pas vers la cession complète dont parlait l'autre député.
     Je recommande l'adoption d'un code du bâtiment et d'un code de prévention des incendies qu'il soit possible de faire appliquer. C'est vraiment important.
    À l'heure actuelle, la loi demeure ambiguë quant à la propriété des biens matériels dans les réserves, ce qui les rend difficilement assurables. Il serait possible de mettre à contribution des juristes pour modifier la loi de façon à préciser que les Premières Nations sont propriétaires des actifs dans leurs communautés.
     Merci beaucoup.
    Je crois qu'il me reste environ une minute et demie. J'aimerais en faire bénéficier mon collègue du NPD.
     Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Puis‑je permettre que cette minute et demie s'ajoute à mon temps habituel, avec le consentement du Bloc?
    Voulez-vous parler de fusionner vos temps de parole?
    Exactement.
    Voulez-vous commencer maintenant ou entamer votre tour normal?
    L'un ou l'autre. Ça me va.
    Que préférez-vous, madame Sinclair-Desgagné?
    Vous pouvez commencer.
    C'est donc ce que je vais faire.
    Il vous reste un peu plus de trois minutes.
     Monsieur Wernick, nous nous entendons au moins sur un certain nombre de choses. Nous convenons qu'il est essentiel de modifier la relation entre le Canada et les peuples autochtones — les Premières Nations, les Métis et les Inuits. Nous sommes d'accord là‑dessus.
    Je fais appel à votre bienveillance par rapport à ce que je vais dire. Vous avez amplement exposé vos idées au sujet d'une société utopique rendue possible par la grâce des processus parlementaires et des pouvoirs législatifs du Canada, que le Parlement s'est arrogé.
    Nous convenons que cette différence fondamentale doit exister. Ce changement est nécessaire. La question que vous venez desoulever, quant à la nécessité de... Même les tribunaux ne savent pas à qui appartiennent les terres... ou quoi que ce soit d'autre.
    Dans un passé récent, on en a fait une question de compétence. Dans la cause Daniels c. Canada, en 2016, on a enfin réglé la question de savoir qui a compétence pour légiférer au nom des Métis. Nous avons une conversation en direct sur le pouvoir de prise en charge ou le pouvoir suprême de légiférer dans ce pays colonial qu'est le Canada. Cette question fait encore l'objet de débat, mais vous avez supposé qu'elle était réglée.
    N'êtes-vous pas d'accord pour dire que cette question, dans votre esprit, est réglée? Que le Canada a le pouvoir suprême de légiférer. Vous avez mentionné que la Loi sur les Indiens devrait être abrogée par le Parlement et être remplacée par le Parlement. Celui‑ci a créé une société d'État. Le Parlement, une assemblée de non-Autochtones, devrait, en somme, continuer à exercer un paternalisme qui afflige principalement les Premières Nations.
    Je veux vous donner l'occasion de vous exprimer sur la question de savoir qui est censé assumer la souveraineté du Canada.
     L'une des raisons pour lesquelles plus de 25 décisions de la Cour suprême ont été rendues depuis la rédaction des articles 25 et 35, tient à ce que le Parlement n'a pas été en mesure de régler nombre de problèmes par la voie législative, de sorte que les tribunaux ont dû se substituer à cette institution.
    Le cadre établi par la Constitution permet au Parlement du Canada de clarifier toute une gamme de questions.
    À mon avis, et ce n'est qu'une opinion, la Charte vaut pour tous les Canadiens. La Constitution régit tous les Canadiens, et le Parlement ne peut renoncer à son autorité en matière législative au nom de 41 millions de Canadiens. Tous les Canadiens sont...
     Arrêtez-vous là. J'en ai assez entendu.
    Je crois, monsieur Wernick, que nous contestons ce point.
    Je ne crois pas que le Canada, comme vous l'avez mentionné, détienne le pouvoir législatif suprême sur tous les Canadiens. Vous allez supposer que tous les Autochtones sont des Canadiens. Bien sûr, il s'en trouve pour dire qu'ils le sont, mais pas tous, surtout en territoire non cédé.
    N'êtes-vous pas d'accord?

  (1830)  

     Les lois élaborées par les communautés des Premières Nations ont un impact sur leurs voisins et sur les autres Canadiens. Il doit s'agir d'une relation de réciprocité, de nation à nation.

[Français]

    C'est le principe de non-ingérence et non-indifférence.

[Traduction]

    Les Premières Nations détiennent des titres.
    Je pense que vous avez répondu à ma question en faisant diversion et en affichant votre incapacité à affirmer clairement votre avis que tous les peuples autochtones ont été émancipés.
    C'est ce que vous estimez, n'est‑ce pas?
     À mon avis, le Parlement constitue l'autorité législative de tous les Canadiens.
    Cette vérité existe parce que vous croyez que tous les peuples autochtones sont émancipés. Est‑ce exact?
    Je ne sais pas ce que vous entendez par émancipation.
    Mon Dieu. Ce n'est même plus la peine d'en parler, monsieur Wernick.
    Pourquoi ne pas vous arrêter ici, monsieur Desjarlais?
    Depuis environ 150 ans, les agents des Affaires indiennes estiment que les peuples autochtones devraient être assimilés, émancipés ou conquis.
    Vous avez confirmé de bien des façons aujourd'hui que c'est aussi votre point de vue. Je comprends très bien pourquoi les questions qui affligent la société autochtone d'aujourd'hui se posent à nous.
    Non. C'est une déformation grossière de la réalité. C'est même diffamatoire. C'est une déformation de ce que j'ai dit...
     Non, c'est la vérité, monsieur Wernick.
     Messieurs.
    Monsieur Wernick, veuillez vous arrêter un instant.
    Monsieur Wernick, je vais vous donner un moment pour répondre. Nous avons des problèmes avec l'interprétation et les interprètes.
    Monsieur Desjarlais, vous aviez le dernier mot. Je vais permettre à M. Wernick de répondre brièvement, puis nous passerons au prochain intervenant.
    Je vous ai donné plus que le temps auquel vous aviez droit.
    Répondra‑t‑il à la question?
    Suppose‑t‑il que tous les Autochtones sont des Canadiens en ce qui a trait à la préservation de la souveraineté et de la compétence du Canada?
    Voilà la question.
     Je crois qu'il a répondu.
    Monsieur Wernick, je ne vous accorderai pas beaucoup de temps, mais je vais vous permettre de répondre pour le compte rendu, s'il vous plaît.
     Le cadre constitutionnel, y compris les articles 25 et 35, inclut le droit inhérent des peuples autochtones à l'autonomie gouvernementale, qui a été interprété de diverses façons par les tribunaux. Ce droit est exprimé dans des ententes, des traités et des lois précises.
    Merci.

[Français]

    Madame Sinclair‑Desgagné, vous avez la parole pour deux minutes.
    Ensuite, j'aurai une ou deux questions à poser aux analystes, avant de terminer la réunion.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Wernick, j'ai bien aimé vous entendre citer la position de la France de non-ingérence et non-indifférence en ce qui a trait à la souveraineté du Québec. Je prends donc en note que vous appuyez la souveraineté du Québec et ça me fait grandement plaisir.
     Pas du tout.
    Il reste donc à vous en convaincre.
    Si le Canada est divisible, le Québec l'est aussi.
    D'accord, vous êtes donc un partisan de la partition. C'est incroyable. Cependant, ça reflète bien ce qu'est le Canada. Le partitionnisme, c'est ce qui a déclenché des guerres civiles partout dans le monde. Je prends bien acte de ce que vous venez de dire. C'est un propos qui est hautement dangereux. Je le note devant tout le monde. J'espère qu'il sera bien consigné dans le compte rendu que c'est comme ça que réfléchissent et pensent les anciens greffiers du Conseil privé du gouvernement fédéral. C'est honteux.
    Je vais poser une dernière question.
    Au Québec, la Société d'épargne des Autochtones du Canada a investi 28 millions de dollars en prêts en puisant dans les capitaux recueillis par l'entremise d'obligations d'épargne des Premières Nations. Vous avez demandé tout à l'heure d'où provient cet argent. Il provient d'épargnes recueillies par les Premières Nations chez les Premières Nations, aux sources de leurs marchés privés et de marchés particuliers. Ces initiatives ont eu pour résultat la construction de centaines de maisons, et des investissements additionnels sont nécessaires. Ce genre d'information provient du programme Yänonhchia'.
    Bien sûr, le Québec a toute la capacité nécessaire pour son autodétermination. Dans son rapport, la vérificatrice générale constate que les choses se portent beaucoup mieux au Québec, pour ce qui est de la situation du logement autochtone, par exemple. C'est un fait.
    En ce sens, ne croyez-vous pas que le Canada devrait s'inspirer du modèle québécois et de la manière dont nous traitons les Autochtones, c'est-à-dire de gré à gré, entre nations sœurs?
    C'est une piste de solution. Est-ce que cela va fonctionner dans toutes les autres provinces ou régions du Canada? Il reviendra aux Premières Nations d'en décider.
     Merci beaucoup.

[Traduction]

    J'ai une question du président.
    Monsieur Wernick, je pense que vous nous avez donné beaucoup de matière à réflexion aujourd'hui. Ce n'est pas un témoignage auquel je m'attendais comme président. En fait, vos commentaires me rappellent l'époque, il y a 15 ans, où je suis allé étudier à la London School of Economics, qui était considérée comme un bastion de la pensée de gauche, du moins c'est ce qu'on m'en avait dit. En arrivant sur le campus, j'ai découvert que l'établissement valorisait plutôt la propriété privée comme élément essentiel à la construction. Je pense que vous avez mentionné cela aujourd'hui.
    Voici une question à laquelle j'aimerais que vous répondiez. Lorsque vous étiez sous-ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien, le gouvernement accordait la priorité à la création de débouchés économiques dans le secteur des ressources et à la responsabilité des Premières Nations en matière d'autonomie gouvernementale. On a fait valoir que ces priorités ont entraîné un sous-financement systémique des services publics de base, comme le logement, la santé et l'éducation, en particulier dans les collectivités éloignées où le coût de la prestation de ces services peut être beaucoup plus élevé et où la capacité administrative et l'activité économique sont limitées.
    Quelle est votre réaction à cette critique? Veuillez nous faire part de vos réflexions à ce sujet.

  (1835)  

     Il y a là plusieurs éléments. Je me suis déjà exprimé sur les principes fondamentaux du régime foncier et du logement social. Il faudra toujours contourner la loi, d'une certaine façon. Certaines initiatives existent, comme l'initiative de Manny Jules sur la propriété foncière. Je sais que les Nisga'as ont décidé de créer une forme de régime privé sur leurs terres. Différentes formules sont mises à l'essai.
    Ces initiatives doivent être dirigées par la communauté, disons‑le clairement, et non imposées par le gouvernement, mais le gouvernement a la capacité d'éliminer les obstacles. Je pense qu'il faut étudier tous les obstacles à l'autonomisation communautaire et au développement économique. Le dynamisme dela vie économique et la présence de revenus sont essentiels à la réussite sur le plan social et sur le plan de la santé. Cela vaut pour tous les Canadiens.
    Vous n'allez pas aimer cela, mais à mon avis, avec le recul, le gouvernement Harper a été assez ambitieux en matière de réforme structurelle, mais très avare en matière de financement, tandis que le gouvernement Trudeau a été très généreux du côté du financement, mais il a peu offert en matière de réformes structurelles. Un jour viendra où nous aurons un gouvernement prêt à procéder à une réforme structurelle en profondeur et qui la financera adéquatement.
     Merci beaucoup. Nous vous sommes tous reconnaissants du temps que vous nous avez consacré aujourd'hui.
    La séance est levée. Le sous-comité va se réunir dans quelques minutes.
    Merci encore à tous. Nous avons des votes à 19 h 30, pour ceux qui ne vérifient pas leurs courriels.
    La séance est levée.
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