ENSU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT
COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le lundi 1er février 1999
[Français]
Le président (l'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Je dois faire quelques annonces avant que nous commencions notre travail.
[Traduction]
Avec l'aide du greffier, j'ai réussi à organiser un déjeuner pour lundi prochain afin d'informer ceux que cela intéresse en prévision d'une réunion sur le protocole en matière de biosécurité qui aura lieu en Colombie à la fin du mois. Le protocole fait l'objet de négociations entre les gouvernements en vue de réglementer la circulation transfrontière de substances génétiquement modifiées.
Nous avons été très chanceux d'obtenir à la dernière minute John Herity, directeur du Bureau de la Convention sur la biodiversité d'Environnement Canada. Seront également présents Richard Ballhorn, directeur général du Bureau environnemental international des Affaires étrangères, ainsi que Tim Hodges, autre négociateur canadien.
Je vous lance l'invitation parce que certains d'entre vous s'intéressent vivement à cette question des substances génétiquement modifiées. Le déjeuner aura lieu à la salle à manger du Parlement, lundi prochain. Je suis désolé, mais il était impossible de faire autrement. Je sais que c'est très peu de préavis. Ceux qui peuvent venir, qu'ils le fassent sans autre forme d'invitation. Quant aux autres, croyez-bien que j'en suis navré.
J'espère que vous applaudirez les efforts déployés par votre président à cet égard.
Une voix: Beau travail!
Le président: Merci.
Vous voudrez peut-être vous documenter avant cette réunion. L'information se trouve, je crois, sur Internet. Nous l'avons trouvée par hasard. Le sujet est incroyablement complexe, mais cela ne lui enlève pas de son importance. Il a des répercussions sur les exportations canadiennes en Europe, entre autres choses. Quiconque connaît le canola sait probablement déjà que les ventes de ce produit sont en chute libre en Europe, actuellement, à cause de cette question.
Comme point suivant à l'ordre du jour, le greffier a rédigé une motion prolongeant le contrat de John Moffet, qui nous conseille au sujet du projet de loi C-32. Je vais lui demander de vous lire la motion, après quoi nous verrons si nous sommes d'accord pour l'adopter.
Le greffier du comité: Voici la motion.
-
Que le comité, pour l'étude article par article du projet de loi
C-32, prolonge à nouveau le contrat passé le 1er octobre 1998 avec
Ressources Futures Internationale, pour la période allant du
1er février 1999 au 31 mars 1999, au plus tard, et que le montant
n'excède pas 15 600 $ durant cette période de prolongation.
Le mandat est inclus, monsieur le président.
Le président: Avez-vous des commentaires ou des questions? Quelqu'un peut-il présenter la motion?
M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Je fais une proposition à cet effet.
(La motion est adoptée)
Le président: Aujourd'hui, nous avons le grand bonheur d'accueillir des représentants de l'industrie de l'aquaculture. Mesdames et messieurs, je vous souhaite la bienvenue. Nous aimerions connaître vos vues et profiter de vos commentaires sur le projet de loi ou, si ce n'est au sujet du projet de loi, du moins au sujet de certaines modifications proposées.
De l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture, nous accueillons Pierre Stang, du New Brunswick Salmon Grower's Association, Bill Thompson, et de la British Columbia Salmon Farmers Association, Anne McMullin. Nous entendrons ensuite M. Cross, de la British Columbia Salmon Grower's Association.
M. Stephen F. Cross (président, Aquametrix Research Limited): C'est inexact.
Le président: Pourriez-vous nous aider à nous y retrouver?
M. Stephen F. Cross: Je suis d'Aquametrix Research Limited. Je travaille comme consultant dans l'industrie privée.
Le président: Où se trouvent vos bureaux?
M. Stephen F. Cross: Nos bureaux sont situés à Sidney, en Colombie-Britannique.
Le président: Je vous remercie.
Nous accueillons aussi M. Smith, qui semble-t-il sera des nôtres plus tard.
Monsieur Gravel, aimeriez-vous vous présenter et présenter vos collègues de l'Agence canadienne d'inspection des aliments?
M. André Gravel (vice-président intérimaire, Programmes, Agence canadienne d'inspection des aliments): Merci, monsieur le président. C'est un plaisir de me trouver ici cet après-midi. Je m'appelle André Gravel et je suis vice-président des programmes à l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Je suis accompagné aujourd'hui de Linda Morrison. C'est elle qui, à l'Agence, s'occupe du dossier des aliments du bétail. Assis à l'arrière, se trouve M. Stephen qui est la personne-ressource à l'Agence en matière d'agriculture. Voilà pour les présentations.
Le président: Fort bien. Mesdames et messieurs, la parole est à vous. Je vous demanderais de vous partager le temps alloué de manière à ce que nous ayons un bon échange de questions et de réponses.
Puisque vous hochez de la tête, j'en déduis que vous êtes le premier à prendre la parole, monsieur Stang. La parole est à vous. Je vous souhaite la bienvenue.
M. Pierre Stang (directeur exécutif intérimaire, Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture): Merci, monsieur le président.
Je tiens tout d'abord à remercier les membres du comité de l'occasion qui est donnée à l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture de témoigner ici aujourd'hui. L'Alliance est un organe national qui regroupe les associations régionales et sectorielles de producteurs de poissons et de coquillages du Canada.
Les modifications projetées à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement dans le projet de loi C-32 en ce qui concerne les aliments sont d'une importance névralgique pour les aquaculteurs. Afin de bien cerner les questions et de fournir au comité des renseignements scientifiques et techniques solides, nous avons réuni une équipe de praticiens chevronnés qui vous présenteront les arguments de l'industrie. J'ai donc l'immense plaisir de vous présenter, en commençant par la côte Ouest, Mme Anne McMullin, directrice exécutive de la British Columbia Salmon Farmers Association, et M. Stephen Cross, président d'Aquametrix Research Limited; de la côte Est, M. Bill Thompson, directeur général de la New Brunswick Salmon Grower's Association, M. James Smith, de Washburn & Gillis Associates Ltd, ainsi que M. Myron Roth, directeur exécutif intérimaire du Salmon Health Consortium.
Sans plus tarder, monsieur le président, je cède la parole à Mme McMullin.
Le président: Je vous remercie.
Mme Anne McMullin (directrice exécutive, British Columbia Salmon Farmers Association): Merci beaucoup de nous avoir invités.
Notre délégation est ici aujourd'hui en raison des modifications qui sont envisagées dans le projet de loi C-32, modifications qui imposeraient un fardeau indu et inutile à l'aquaculture et en limiteraient l'exploitation au Canada. Elles pourraient mettre en faillite des douzaines d'entreprises canadiennes et décourager des centaines de millions de dollars d'investissements futurs au pays.
Comme vous le savez, les gouvernements fédéral et provinciaux ont repéré l'aquaculture comme l'une des industries les plus prometteuses sur le plan économique au Canada. En cela, ils ont l'appui de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture qui, dans son récent examen de l'état de l'aquaculture mondiale, constate que:
-
[...] on admet couramment que les approvisionnements en poisson
provenant de la pêche de capture en mer et en eaux intérieures
n'augmenteront probablement pas de façon sensible et que
l'expansion du secteur de l'aquaculture sera probablement la
réponse aux pénuries projetées.
• 1545
En fait, plus du quart des approvisionnements mondiaux en
poisson pour consommation humaine est satisfait actuellement par
l'aquaculture, et ce ratio ne fera qu'augmenter avec le temps.
Quant à la croissance future de l'aquaculture et de sa production, le monde entier envie à notre pays ses richesses naturelles. Je parle entre autres de milieux marins sains et d'un cadre de réglementation en règle générale stable, ce qui crée un excellent climat d'investissement au Canada.
C'est ce que nous cherchons à obtenir, en tant que Canadiens. Les modifications proposées pourraient compromettre ces nouveaux horizons économiques. Le gouvernement reconnaît certes les immenses possibilités que présente l'aquaculture. Récemment, lorsqu'il a annoncé la nomination du nouveau commissaire au développement de l'aquaculture, le ministre des Pêches David Anderson a déclaré:
-
La création de ce poste reconnaît clairement l'importance
grandissante de ce secteur au Canada [...]
Voici donc certaines données économiques sur cette industrie croissante et dynamique. Actuellement, l'industrie de l'aquaculture est la source de 2 700 emplois à temps plein à l'année en Colombie- Britannique, de 1 200 au Nouveau-Brunswick et de 500 dans d'autres agglomérations côtières du Canada. La grande majorité de ces emplois se trouvent dans des collectivités rurales.
L'industrie rapporte aussi 270 millions de dollars en recettes annuelles à la Colombie-Britannique et 120 millions de dollars au Nouveau-Brunswick. En Colombie-Britannique, le saumon frais d'élevage est la plus importante exportation agricole alors qu'au Nouveau-Brunswick, le saumon d'élevage représente le plus important produit agroalimentaire. Dans les deux provinces, il fait vivre un secteur d'approvisionnements et de services indispensable dans les industries marines et représente une éventuelle source d'investissement et de croissance énorme.
Je pense qu'il faudrait savoir clairement quelles sont les conséquences des amendements que le comité envisage d'apporter au projet de loi C-32. En fait, une étude récente de la diversification économique de l'Ouest révèle qu'une expansion modeste de la salmoniculture en Colombie-Britannique pourrait susciter des investissements de capitaux fort nécessaires de l'ordre de 890 millions de dollars, porter à un milliard de dollars par année les revenus annuels du secteur, soit une hausse de 400 p. 100, et créer 20 000 nouveaux emplois. Tout cela pourrait se réaliser si l'on portait à quatre kilomètres carrés la superficie aquatique disponible pour cette activité. Il s'agit de quatre kilomètres carrés sur les 13 millions de kilomètres de terres aquatiques à proximité des côtes disponibles en Colombie-Britannique.
Dans le Canada atlantique, toutes les provinces cherchent d'autres débouchés d'emploi pour les habitants des communautés côtières rurales durement touchées par l'effondrement de la pêche traditionnelle. L'aquaculture a été identifiée comme l'une des meilleures possibilités à cet égard.
Mes collègues vous parleront dans un instant de l'aquaculture et de l'environnement. Ils vous expliqueront également les rôles et responsabilités des divers paliers de gouvernement en ce qui a trait à la réglementation de l'industrie. Mais avant de leur céder la parole, j'aimerais faire quelques observations supplémentaires.
Il ne faudrait pas que le comité croie, à tort, que notre industrie s'est développée en l'absence de toute surveillance gouvernementale. En fait, nous sommes le secteur agricole le plus fortement réglementé au Canada. Qui plus est, notre feuille de route environnementale a été scrutée à la loupe par les autorités politiques et par la population depuis près de 20 ans.
En Colombie-Britannique, cette surveillance a culminé en 1997 avec le parachèvement de l'examen environnemental par secteur le plus exhaustif de l'histoire de la Colombie-Britannique. L'examen relatif à la salmoniculture a été lancé en 1995 dans le but de cerner toutes les questions environnementales entourant l'élevage des salmonidés en Colombie-Britannique, y compris la santé du poisson, les fuites de poissons, le rejet de déchets, l'interaction entre le saumon d'élevage et le saumon sauvage, l'interaction entre les élevages de saumon et les mammifères marins et les autres espèces, ainsi que la sélection des sites des piscicultures.
Après 18 mois d'étude, des centaines d'exposés, 1 800 pages de documentation, au coût de plus d'un million de dollars pour les contribuables, un panel composé de six scientifiques indépendants a conclu que la salmoniculture était une industrie écologique et durable.,
Nous déposerons aujourd'hui auprès du comité un exemplaire du rapport final de cet examen de la culture des salmonidés en Colombie-Britannique.
Si je précise cela, c'est pour vous faire comprendre que les organismes gouvernementaux fédéraux et provinciaux chargés de réglementer notre industrie n'ont pas abandonné leurs responsabilités, comme on l'a allégué. Vous allez entendre plus tard cette semaine un exposé d'un porte-parole de la David Suzuki Foundation, fondé sur son rapport intitulé «Net Loss». Je tiens à signaler que le Bureau d'évaluation environnementale de la Colombie-Britannique a relevé les allégations de l'auteur dans l'examen sur l'aquaculture en Colombie-Britannique et que celles-ci ont été réfutées par des scientifiques indépendants.
Pour ce qui est des amendements proposés, l'AICA estime que ce n'est pas le rôle de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement de faire double emploi avec le pouvoir de réglementation dûment constitué du gouvernement fédéral et exercé par l'intermédiaire du MPO et des autres agences gouvernementales pertinentes, en vue de réglementer l'industrie de la salmoniculture.
• 1550
À notre avis, le projet de loi C-32 n'est pas le véhicule
approprié pour réglementer les pratiques qui ont cours dans des
secteurs particuliers. Nous espérons que votre comité rejettera les
amendements proposés qui visent l'aquaculture. L'enjeu est tout
simplement trop important pour les entreprises et les travailleurs
canadiens pour que vous fassiez autrement.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de faire cet exposé. Je cède maintenant la parole à M. Stephen Cross, de la société Aquametrix, qui parlera de l'aquaculture et de l'environnement.
M. Stephen F. Cross: Merci, Anne.
Monsieur le président, membres du Comité permanent de l'environnement et du développement durable, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant vous cette après- midi. J'ai préparé mon exposé sur l'aquaculture et l'environnement en me fondant sur des données, c'est-à-dire sur des mesures directes obtenues auprès de 76 élevages de salmonidés au Canada.
Au cours des 12 dernières années, j'ai mené des enquêtes scientifiques sur l'incidence de la pisciculture en cage sur l'environnement pour le compte du ministère de l'Environnement, des Terres et des Parcs de la Colombie-Britannique, du ministère des Pêches de la Colombie-Britannique, de la Direction de la gestion de l'habitat du MPO, ici à Ottawa, de la Direction de la région Yukon- Pacifique du MPO, du département d'État d'écologie de Washington et de diverses piscicultures de salmonidés de la Colombie-Britannique, de l'État de Washington et du Chili. Nos archives de données environnementales internes renferment des renseignements sur la qualité de l'eau et des sédiments, l'incidence écologique des entreprises piscicoles, la période de restauration benthique, les propriétés océanographiques physiques jugées optimales pour le site d'une pisciculture, la dynamique du phytoplancton dans le voisinage des structures des piscicultures ainsi que de nombreux aspects de l'interaction des élevages avec l'environnement.
Les aliments du poisson peuvent être considérés comme la matière première de l'aquaculture. Cette nourriture comprend des ingrédients naturels avec des proportions variables de protéines, de glucides et d'acides gras. Les déchets libérés par un élevage englobent diverses espèces de poisson, ainsi que de la nourriture accessoire qui passe au travers du filet de la cage et qui est libérée sans être mangée, sous forme de granules. La décharge de déchets provenant des élevages en cage se traduit par un enrichissement organique localisé de l'environnement benthique. Cet effet se limite surtout à l'aire directement au-dessous des structures piscicoles, comme l'illustre la zone rouge sur cet acétate. L'ampleur des répercussions environnementales sur cette aire est influencée par la profondeur, la dynamique de la circulation à cet endroit, par exemple par le courant de marées et, bien sûr, par la décharge ou la quantité de déchets libérés dans l'environnement.
Le périmètre de la pisciculture est susceptible de recevoir des matières-déchets dans certaines conditions océanographiques, mais les effets qui sont associés à ce phénomène sont beaucoup moins importants que ceux observés sous les cages elles-mêmes. Quoi qu'il en soit, on détecte des effets sur l'écosystème benthique uniquement dans un périmètre de 10 à 30 mètres de la pisciculture. Comme l'ont conclu les auteurs de l'examen de la salmoniculture sur la côte Ouest, ces répercussions représentent un faible risque global pour l'environnement, ce qui vient étayer les conclusions que j'ai tirées des données que nous avons recueillies pendant douze ans.
Une fois qu'une pisciculture disparaît d'un site ou interrompt sa production, lorsque le site fait partie d'une stratégie de gestion piscicole, l'écosystème benthique retrouve son état original. Le rythme et le processus de restauration environnementale ont fait l'objet d'études et on a constaté qu'il survient entre 0 et 18 mois. Évidemment, le rythme de la restauration est lié à l'ampleur de l'impact initial, mais il est également influencé par la profondeur et les propriétés océanographiques physiques du site. Il importe de noter qu'en raison de la composition des matières-déchets elles-mêmes, cette restauration environnementale survient à la suite d'un processus d'assimilation naturelle et n'exige aucune mesure de compensation. Elle survient également à un rythme beaucoup plus rapide que celui qui a été mesuré pour d'autres activités de culture, ce qui résulte en des dépôts de déchets organiques similaires.
Les piscicultures sont uniques. Elles diffèrent des autres sources municipales, industrielles et commerciales de pollution aquatique en ce sens que la pérennité et, en fait, la rentabilité d'une pisciculture, comme c'est le cas pour toute autre culture, qu'elle soit terrestre ou aquatique, sont directement liées à l'intégrité de l'environnement. Étant donné que les principaux effets environnementaux associés à la pisciculture visent l'aire directement située sous les cages, l'exploitant a manifestement tout intérêt à faire en sorte que son entreprise provoque un effet minime ou inexistant. La santé et la survie de la récolte en dépendent.
L'industrie piscicole s'étant développée sur les deux côtes du Canada, de nombreux changements ont été apportés, et continuent de l'être, pour appuyer l'objectif du maintien de l'intégrité environnementale. Dans l'exemple que vous voyez à l'écran, les déversements de matières-déchets dans l'environnement ont décliné sensiblement depuis 10 ans, comme le prouvent les mesures directes prises dans le cadre de 4 études parrainées par le gouvernement en Colombie-Britannique.
Ces données montrent qu'à l'heure actuelle l'industrie libère dans l'environnement le tiers des matières-déchets qu'elle libérait à la fin des années 80. Cette tendance est évidente en dépit du fait que les niveaux de production ont presque triplé au cours de la même période.
• 1555
Les réductions sensibles enregistrées dans les fuites de
matières-déchets au cours des 10 dernières années ne reflètent pas
les changements liés à la réglementation gouvernementale, mais
plutôt les efforts continus des intervenants du secteur pour
diminuer ces déchets en sélectionnant un meilleur site pour la
pisciculture, en appliquant les meilleures pratiques et les
nouvelles technologies et en apportant des changements constants à
la qualité de la nourriture. Les exploitants déploient tous les
efforts possibles pour protéger l'intégrité de l'environnement. Au
cours des dernières années, ils ont acquis et continuent d'acquérir
une meilleure compréhension du principe selon lequel ce qui est bon
pour l'environnement est bon pour le poisson.
M. James A. Smith (directeur principal de projet et scientifique, Wahburn & Gillis Associates Ltd.): Merci, Steven.
Monsieur le président, membres du comité, mes commentaires porteront sur le régime réglementaire qui régit actuellement l'aquaculture marine en cage au Canada et sur les liens avec les amendements proposés au projet de loi C-32.
Je commencerai par Pêches et Océans Canada. Pour administrer l'aquaculture, le MPO peut compter sur trois mesures législatives—la Loi sur les pêches, la Loi sur les océans et la Loi sur la protection des eaux navigables—et quatre directions gouvernementales. Les lignes de démarcation entre la responsabilité de réglementation et la R-D sont clairement délimitées.
La direction de la gestion de l'habitat de Pêches et Océans, est responsable au premier chef de ce que nous appelons le volet coercitif de la Loi sur les pêches en se fondant sur les articles 35 et 36 qui portent sur la dégradation de l'habitat du poisson et le dépôt de substances nocives. Ce groupe dispose du pouvoir d'engager une action en protection de l'environnement. La définition de substances nocives dans la Loi sur les pêches est vaste et pourrait, au besoin, englober les aliments du poisson. Jusqu'à maintenant, cela n'a pas été nécessaire.
La direction des sciences du MPO soutient l'habitat grâce à un effort de R-D de premier ordre. On s'assure ainsi que lorsqu'il est nécessaire d'engager des poursuites, celles-ci sont défendables sur le plan scientifique.
La direction de la coordination de l'aquaculture de P & O est le seul service qui s'occupe exclusivement d'assurer des services de soutien au secteur. À cet égard, la question des rôles et responsabilités ne se pose pas.
Enfin, la garde côtière est l'instrument d'exécution de la législation qui régit l'industrie, par l'entremise de la Loi sur la protection des eaux navigables. Cette mesure de premier plan fait en sorte que les élevages piscicoles sont situés à des endroits qui permettent à tous les Canadiens un accès sécuritaire aux eaux navigables.
L'Agence canadienne d'inspection des aliments est récemment devenue un intervenant dans notre secteur. À la suite de l'inclusion dans son mandat de la Loi relative aux aliments du bétail et de la Loi sur les engrais, c'est maintenant l'Agence qui est responsable des produits aquicoles. C'est de l'Agence et de cette mesure législative que relèvent essentiellement les amendements que vous envisagez maintenant. Je crois savoir que vous entendrez des témoins de cet organisme plus tard cet après-midi.
Environnement Canada et Santé Canada interviennent également dans le champ fédéral de la réglementation de l'aquaculture. Environnement Canada, par l'entremise de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, est chargé d'appliquer l'un des régimes d'assurance emploi les plus exhaustifs du monde. En raison de leurs responsabilités, Pêches et Océans et la Garde côtière peuvent déclencher l'application de la loi, et l'ont déjà fait. Santé Canada est habilitée à approuver des additifs aux aliments du poisson.
J'aimerais parler quelque peu de la coopération fédérale- provinciale dans le domaine de la réglementation de l'aquaculture. Les deux principales provinces où il se fait de l'aquaculture, la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick, ont conclu des protocoles d'ententes avec les autres ordres de gouvernement. Ces ententes visent surtout à rationaliser le processus de délivrance de permis. Chaque entente renferme une clause dérogatoire. Cette dernière précise explicitement que les parties signataires conservent leurs responsabilités législatives respectives. L'information que nous avons présentée aujourd'hui montre clairement que tel a été le cas. Pourquoi? Parce qu'il existe une législation qui fait en sorte qu'il en soit ainsi. Il existe une loi fédérale qui régit l'utilisation de la nourriture pour poissons et une autre qui régit les répercussions environnementales potentielles de l'aquaculture marine, et ces lois sont appliquées.
Les amendements proposés ne correspondent ni à l'intention ni à la structure du projet de loi C-32. À mon avis, cette mesure législative est de nature connexe et n'a pas été conçue pour compliquer l'application d'autres lois. Il est évident qu'il doit en être ainsi.
Les amendements proposés ne s'harmonisent pas non plus avec ce que j'estime être les deux pierres angulaires du projet de loi: la prévention de la pollution et le contrôle des substances toxiques. La prévention de la pollution relève d'une approche anticipatrice visant à favoriser un développement non préjudiciable à l'environnement, ce qu'appuient et préconisent les intervenants du secteur. Aucune substance employée dans l'industrie—et certainement pas la nourriture pour poissons—ne devrait être incluse dans la partie du projet de loi portant sur les substances toxiques.
Sur une note technique, je voudrais mentionner que la définition d'«éléments nutritifs» dans les amendements proposés est incorrecte. La définition provisoire décrit un élément nutritif comme étant «toute substance susceptible de causer du tort aux milieux aquatiques». Cela n'est pas exact. Les éléments nutritifs sont nécessaires pour soutenir le fonctionnement des milieux aquatiques. J'invite le comité à réviser la version actuelle de la LCPE en vue d'y intégrer une définition exacte d'«éléments nutritifs».
• 1600
Enfin, j'aimerais conclure avec certains commentaires
concernant la législation visant des industries particulières. À
l'heure actuelle, cela ne se fait pas, que ce soit sous le régime
de la LCPE actuelle ou du projet de loi C-32. Il n'y a pas de
précédent justifiant qu'on englobe maintenant l'aquaculture. En
fait, la Loi sur les pêches est assortie de règlements qui visent
des industries particulières. Il convient de noter que chacune
d'elles—pâte et papier, exploitation minière, viande et volaille
et transformation de la pomme de terre—sont arrivées à maturité
pour ce qui est d'absorber des changements d'envergure au processus
de production. En outre, la législation qui vise ces industries
fait droit à des préoccupations environnementales précises bien
connues, bien fouillées et bien documentées.
L'aquaculture est une industrie alimentaire. C'est une agro-entreprise propre et respectueuse de l'environnement. Des recherches sérieuses et des programmes de surveillance visent à relever l'incidence environnementale de l'aquaculture, mais jusqu'à maintenant, les instances de réglementation ont conclu que ces effets sont amortissables. Il n'est pas nécessaire d'adopter une mesure législative particulière pour l'aquaculture.
Merci.
M. Bill Thompson (directeur exécutif, New Brunswick Salmon Grower's Association): Merci, Jamie.
Monsieur le président, membres du comité, je suis ravi d'être ici aujourd'hui. Tout d'abord, je m'excuse car j'ai un mauvais rhume et je devrai peut-être m'interrompre à quelques reprises. Mes collègues et moi-même sommes heureux de comparaître pour vous fournir des renseignements et vous expliquer comment fonctionne notre industrie et comment elle a été réglementée et surveillée dans le passé.
Tout d'abord, je tiens à remercier M. Steven Cross, d'Aquametrix, et M. Jamie Smith, de la firme Washburn & Gillis, pour leurs exposés éclairés. Ce sont deux hommes très compétents qui suivent l'évolution du secteur aquacole depuis des années. De nombreux ministères et agences gouvernementaux chargés de surveiller l'environnement, non seulement dans le contexte de l'aquaculture mais d'autres secteurs industriels également, ont fait appel à leur expertise.
Ils nous accompagnent aujourd'hui pour que les membres du comité puissent leur poser des questions techniques, puisque le gouvernement a recours à leurs services pour assurer la surveillance de notre secteur, entre autres. Nous voulions vous donner le sentiment que vous avez accès à un groupe indépendant.
Je tiens à réitérer ce qu'a dit M. Cross: la nourriture pour poissons se compose d'ingrédients naturels, les matières-déchets donnent lieu à un enrichissement organique localisé de l'écosystème benthique, une restauration complète se produit après la jachère, le secteur aquacole dépend directement de l'écosystème marin et l'industrie de la pisciculture améliore constamment ses pratiques.
Je signale qu'au Nouveau-Brunswick, l'industrie de la pisciculture n'a pas encore 20 ans, et je pense qu'en Colombie-Britannique, elle est encore plus jeune. C'est un secteur à croissance rapide qui existe depuis très peu de temps dans le domaine agro-alimentaire.
Je vous invite à prendre les observations de M. Cross et à les combiner à l'examen qu'a fait M. Smith de la structure de réglementation. Il a expliqué que P & O assume un rôle crucial et actif dans la réglementation de l'aquaculture; que les responsabilités législatives de P & O englobent la Loi sur les pêches, la Loi sur les océans et la Loi sur la protection des eaux navigables; que la présence du gouvernement fédéral englobe l'Agence canadienne d'inspection des aliments, dont relèvent les aliments du poisson; que le système actuel de coopération entre les gouvernements fédéral et provincial maintient la responsabilité législative des deux parties; et que le fait d'assujettir au projet de loi C-32 la nourriture pour poissons va à l'encontre de l'intention et de la structure de cette mesure législative importante. Ces constations nous faisons comprendre que les amendements ne représentent pas un pas dans la bonne direction.
À la suite de ces exposés, je suis confiant que le comité sera convaincu que l'industrie de l'aquaculture est un utilisateur responsable de l'écosystème marin et qu'elle est étroitement surveillée par de nombreux ministères et agences tant au niveau fédéral que provincial.
Vous trouverez le détail de nos arguments dans un mémoire qui a été soumis au comité par l'entremise du greffier. Je pense qu'il a été distribué à tous les participants.
D'autres groupes et organismes, comme le Conseil de la conservation du Nouveau-Brunswick, ont exprimé des opinions dont il faut tenir compte. Depuis toujours, dans le système canadien, il est d'usage de tenir compte de l'opinion d'autres membres de notre société. Cependant, c'est à votre comité qu'il incombe d'examiner les faits et la situation avant de prendre une décision. Notre mémoire renferme également divers rapports et études portant sur la salmoniculture et l'environnement. Toute cette documentation a été remise au greffier.
Il y a, notamment, un exposé de la situation au Nouveau-Brunswick qui a été rédigé par la firme Washburn & Gillis afin de faire contrepoids au mémoire intitulé «After the Gold Rush». Ce rapport s'intitule «Governance et the Environment: Status of Marine Cage-Based Aquaculture in Southwest New Brunswick». J'espère que vous aurez tous l'occasion d'en prendre connaissance, de même que du rapport intitulé «Net Gain», qui trace un portrait fidèle de l'aquaculture en Colombie-Britannique. Il s'agit d'une réplique au rapport «Net Loss» de la David Suzuki Foundation.
• 1605
Je veux également attirer votre attention sur l'examen de la
salmoniculture qui a été effectué par le Bureau de l'évaluation
environnementale de la Colombie-Britannique. Mme McMullin en a fait
mention tout à l'heure. C'est l'un des examens les plus exhaustifs
mené auprès d'un secteur industriel au Canada et il présente une
évaluation sérieuse de la salmoniculture.
Nous sommes confiants que les membres du comité prendront en compte toute l'information technique que nous avons mise à leur disposition afin qu'ils puissent prendre une décision éclairée et fondée au sujet des amendements dont ils sont saisis.
J'attire votre attention sur un certain nombre d'autres questions.
La première chose qu'il faut comprendre, c'est que les pisciculteurs sont les premiers touchés par l'incidence de leur exploitation sur l'écosystème marin. Ils dépendent d'un environnement sain pour être compétitifs.
Le dédoublement des règlements sème la confusion et rend les exploitations piscicoles coûteuses. La population canadienne ne veut pas de mesures législatives qui font double emploi car cela impose un fardeau indu aux contribuables.
En outre, toute réglementation inutile rend moins intéressant le contexte d'investissement au Canada. Les producteurs canadiens doivent livrer concurrence sur des marchés internationaux difficiles, où l'argent des investissements ne connaît pas de frontière et est placé là où les conditions sont les meilleures. Notre secteur est en quête d'investissements de la part d'intervenants canadiens et internationaux. Ces investisseurs déplacent constamment leur argent dans différentes régions du monde et le Canada doit être concurrentiel.
En outre—je suis de la côte Est—l'aquaculture est une solution de rechange viable pour les régions côtières rurales du Canada sur le plan de l'emploi. Nous traversons une période difficile. Or, 1 200 personnes travaillent dans le domaine de l'aquaculture dans un comté de la province du Nouveau-Brunswick, où le taux de chômage demeure supérieur à 15 p. 100. Sans cette industrie qui emploie une personne sur quatre dans le comté, la situation serait extrêmement pénible.
En conclusion, nous demandons au comité d'examiner soigneusement la preuve scientifique disponible et le régime de réglementation qui régit actuellement l'aquaculture marine. Dans la foulée de cet examen, nous souhaitons que vous n'acceptiez pas d'intégrer à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement les amendements proposés qui visent l'aquaculture et les aliments du poisson.
Je vous remercie beaucoup. Nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.
[Français]
Le président: Monsieur Gravel, s'il vous plaît.
M. André Gravel: Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je suis heureux d'être parmi vous afin de clarifier le rôle que joue l'Agence canadienne d'inspection des aliments dans la réglementation des aliments du poisson utilisé en aquaculture.
L'Agence canadienne d'inspection des aliments réglemente les aliments du poisson au Canada grâce à l'exécution de la Loi relative aux aliments du bétail et de son règlement d'application. Cette mesure législative prescrit les pouvoirs de réglementation de la fabrication, de la vente et de l'importation d'aliments des animaux, lesquels englobent les aliments du poisson. Elle fournit également à l'Agence le cadre requis pour gérer le programme national des aliments du bétail.
Le programme des aliments du bétail comporte l'évaluation et l'enregistrement du produit préalablement à la vente, ainsi que l'inspection et la surveillance après la mise en marché, qui sont exécutés par le personnel régional de l'Agence dans toutes les provinces du Canada.
Permettez-moi de vous en dire plus long sur les deux volets principaux de notre programme. Premièrement, en ce qui a trait aux activités propres au programme préalable à la vente, la première activité est l'évaluation et l'approbation des ingrédients qui seront utilisés dans les aliments du bétail, y compris ceux du poisson. Chaque nouvel ingrédient est assujetti à une évaluation complète de l'innocuité afin de veiller à la salubrité du produit pour le bétail, dont le poisson, les humains, (par exposition professionnelle ou par ingestion d'aliments) et l'environnement. L'utilisation d'ingrédients approuvés dans les aliments du poisson peut être assortie de restrictions, portant en autres sur l'étape de croissance à laquelle l'ingrédient est ajouté, la dose et les normes relatives aux contaminants comme les métaux lourds.
Lorsque les données fournies au sujet des aspects sécuritaires ne sont pas complètes ou ne garantissent pas l'innocuité, l'ingrédient n'est pas approuvé. En fait, l'approbation d'un certain nombre d'ingrédients a été refusée en l'absence de données adéquates sur leur incidence et leur sort dans l'environnement marin.
• 1610
Par exemple, deux demandes d'utilisation d'agents
agglomérants—c'est-à-dire des produits chimiques servant à durcir
des aliments mélangés en granules pour que l'aliment puisse flotter
sur l'eau sans s'y détériorer—n'ont pas été approuvées. Les
produits, un polymère et une substance minérale, n'étaient pas
accompagnés de données sur le risque de dégradation et
d'accumulation dans l'environnement. Un troisième produit, issu de
semences de végétaux, n'avait pas été soumis à des épreuves de
toxicité à long terme chez les poissons. Ce ne sont là que quelques
exemples d'ingrédients que l'Agence n'a pas approuvés.
Le deuxième volet du programme préalable à la vente est l'établissement de normes et de directives sur les exigences d'enregistrement du produit et les critères nutritionnels des aliments des animaux, y compris ceux du poisson. En 1990, un groupe de travail mixte, auquel siégeaient des représentants de l'Association canadienne des industries de l'alimentation animale et du Comité d'experts de la nutrition animale, a établi des fourchettes acceptables en éléments nutritifs des aliments complets pour salmonidés; celles-ci s'inspirent des pratiques standard. Les aliments des animaux qui contiennent des teneurs en éléments nutritifs (calcium, phosphore, sélénium, etc.) respectant les fourchettes établies n'ont pas besoin d'être enregistrés. Toutefois, ils restent assujettis à toutes les autres exigences du Règlement sur les aliments du bétail, y compris celles concernant l'étiquetage, les concentrations de contaminants, la salubrité et l'efficacité. Les aliments des animaux contenant des éléments nutritifs qui ne respectent pas les fourchettes acceptables doivent être enregistrés et évalués individuellement.
La sensibilisation de l'industrie des aliments des animaux à l'incidence des teneurs en éléments nutritifs de leurs produits sur l'environnement va croissante. Par exemple, la Section des aliments du bétail a récemment enregistré un certain nombre de produits qui augmentent l'assimilabilité du phosphore de source végétale. Ces produits enzymatiques contiennent de la phitase qui brise les liens du complexe de l'acide phytique qui se trouve dans de nombreuses sources de protéines végétales, en libérant le phosphore qui y était lié, ce qui réduit le besoin d'ajouter du phosphore inorganique aux aliments et la concentration totale de phosphore requise pour favoriser la productivité.
Le troisième volet de notre programme préalable à la vente est l'évaluation et l'enregistrement des aliments des animaux, y compris ceux du poisson, pour garantir la conformité aux exigences du Règlement sur les aliments du bétail. Tous les produits doivent satisfaire aux exigences en matière d'étiquetage du Règlement sur les aliments du bétail. Pour ce faire, il faut que l'énoncé sur l'analyse garantie et le mode d'emploi soient exacts et assez précis pour permettre d'utiliser les aliments des animaux sans risque et de manière efficace aux fins prévues.
Passons maintenant aux activités qui interviennent après la mise en marché. Une fois les produits approuvés, ce programme comprend quatre éléments. Le premier est une surveillance aléatoire des aliments du poisson pour dépister la présence de résidus de produits chimiques, de pesticides, de contamination par des métaux lourds, de microtoxines et de salmonelles, et veiller au respect des garanties des médicaments ajoutés à des aliments des animaux. En plus du programme de surveillance régulière des contaminants, un projet spécial a été mis en oeuvre au cours de la présente année financière afin d'analyser des huiles et farines de poisson pour y détecter la présence de BPC, de dioxine, de furanne, de DTT et de mercure. Le projet permettra d'évaluer s'il faut restreindre l'utilisation de ces ingrédients dans les aliments des animaux. Le deuxième volet est la réalisation d'enquêtes de suivi à la suite de la détection de contaminants de tissus comestibles comme du poisson ou de la viande, du lait ou des oeufs, et de plaintes de producteurs portant sur des aliments des animaux.
Les enquêtes, menées à des fabriques commerciales d'aliments du bétail et à des exploitations agricoles, aident à déterminer la cause de la présence de résidus et à recommander des modifications des systèmes de fabrication qui contribueraient à empêcher une récurrence.
Le troisième élément de notre programme postérieur à la mise en marché est la vérification de l'exactitude des étiquettes des aliments médicamentés, afin de faire en sorte que la dose du médicament soit adéquate et que soient inscrits tous les modes d'emploi, mises en garde et avertissements appropriés pour l'utilisation sécuritaire des aliments des animaux tel que demandé par le Bureau des médicaments vétérinaires de Santé Canada.
Le quatrième élément est l'examen des étiquettes des aliments non médicamentés des animaux afin de vérifier la conformité aux exigences d'étiquetage du Règlement sur les aliments du bétail, et entre autres l'inscription d'un énoncé exact en ce qui concerne l'analyse garantie et le mode d'emploi afin d'assurer l'utilisation sans risque et de manière efficace.
• 1615
Afin de parachever ces activités associées aux produits, les
préposés à l'inspection régionaux réalisent également des
inspections complètes à des fabriques commerciales d'aliments des
animaux qui produisent des aliments et du poisson et à des
piscicultures qui produisent des aliments médicamentés des animaux.
Les aliments des animaux ne sont pas réglementés de manière aussi complète au niveau provincial. Au niveau fédéral, les aliments médicamentés sont régis conjointement par l'Agence canadienne d'inspection des aliments et Santé Canada. D'une part, c'est à ce dernier ministère qu'il incombe d'évaluer et d'approuver les ingrédients médicamentés qui sont ajoutés à des aliments des animaux, notamment les doses et fréquences d'utilisation. D'autre part, c'est l'Agence canadienne d'inspection des aliments qui est chargée de réglementer la fabrication et l'utilisation d'aliments médicamentés des animaux. Au niveau provincial, le Québec et la Colombie-Britannique appliquent également des exigences réglementaires quant à l'ajout de médicaments dans les aliments des animaux.
En plus de son rôle dans le domaine de la réglementation des aliments du poisson, l'Agence canadienne d'inspection des aliments est également responsable de la surveillance des contaminants des produits du poisson destinés à la consommation humaine. La section des produits biologiques vétérinaires et de la biotechnologie de l'Agence réglemente les vaccins du poisson à titre de produits biologiques vétérinaires, en vertu de la Loi sur la santé des animaux et de son règlement d'application. Nous collaborons avec les scientifiques du ministère des Pêches et Océans pour obtenir des conseils au sujet des questions de santé du poisson associées à l'octroi de permis pour les vaccins. Les deux organisations ont également signé un protocole d'entente qui définit les responsabilités de chacun.
D'autres organismes participent également à la réglementation de l'agriculture en réalisant des activités qui leur sont propres. Dans ce contexte, mentionnons entre autres le ministère des Pêches et Océans et les ministères provinciaux de l'Environnement qui participent à la surveillance et à l'octroi de licences d'utilisation sur site. Je crois savoir que M. Doubleday, du ministère des Pêches et Océans, doit vous faire part jeudi des activités de son ministère en ce qui concerne la réglementation de l'aquaculture.
Encore une fois, je vous remercie de m'offrir l'occasion d'examiner le rôle que joue l'Agence canadienne d'inspection des aliments dans le domaine de la réglementation des aliments des animaux utilisés par l'industrie aquacole. Je répondrai maintenant volontiers aux questions, monsieur le président.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Gravel.
[Traduction]
Nous allons commencer par le tour de table habituel. Monsieur Gilmour, suivi de M. Lincoln.
M. Bill Gilmour (Nanaimo—Alberni, Réf.): Merci, monsieur le président.
Je vous souhaite la bienvenue en ce premier jour de la nouvelle session.
Je représente la circonscription de Nanaimo—Alberni, sur l'Île de Vancouver. Il y a plusieurs piscicultures dans le canal Alberni, sur la côte Ouest et j'en ai visité un certain nombre. J'ai aussi visité des opérations de l'autre volet de l'industrie, la conchyliculture.
Je suis au courant de l'examen mené en Colombie-Britannique. Comme vous l'avez dit, c'est un examen extrêmement exhaustif qui découle des préoccupations que la population avait exprimées il y a une dizaine d'années au sujet de l'industrie. Je conviens avec vous que la LCPE n'est pas le véhicule idéal pour s'attaquer à certains dossiers préoccupants.
Nous sommes en présence d'un marché international. Nous livrons concurrence à la Norvège, au Chili et aux États-Unis. Que l'on parle d'Environnement Canada, du MPO, d'Agriculture Canada ou des organismes fédéraux et provinciaux, comment se compare le régime réglementaire canadien à celui en vigueur dans d'autres pays du monde? Sommes-nous à la remorque? Sommes-nous à l'avant-garde? Sommes-nous sur un pied d'égalité avec eux? Étant donné qu'il s'agit d'un marché international, je voudrais savoir où nous nous situons. Je pense que c'est la meilleure façon de voir à quel niveau se trouve le Canada.
M. James Smith: Je peux répondre à cette question, monsieur Gilmour.
Dans le cadre d'un projet auquel nous participons avec le ministère des Pêches et de l'Aquaculture du Nouveau-Brunswick, nous contribuons à élaborer des lignes directrices concernant la production sur site. Nous avons effectué une étude fouillée de ce qui se fait ailleurs dans le monde. Nous avons examiné comment les autres pays abordent la réglementation de l'aquaculture pour ce qui est de la sélection des sites et de la protection de l'environnement. Dans l'ensemble, le Nouveau-Brunswick et la Colombie-Britannique adhèrent à des processus très similaires étant donné l'âge de leur secteur, comparativement à la Norvège et à l'Écosse par exemple. Leur approche dynamique en matière d'évaluation environnementale de l'aquaculture et de sélection des sites les place à égalité, si non à l'avant-garde des autres pays. L'industrie chilienne est encore plus jeune que la nôtre. Le gouvernement chilien a adopté une loi qui exige que les intervenants fassent des évaluations sur les répercussions environnementales, mais la portée de ces évaluations et leur caractère technique sont mal définis et ces exigences ne sont pas rigoureusement respectées.
M. Bill Gilmour: Merci.
Le président: Monsieur Gilmour, je ne peux parler du Chili, mais je connais très bien le système de la Norvège. Pour résumer, on peut dire que son système de réglementation est très sévère, sûrement plus que le nôtre. C'est une autre question de savoir si on peut comparer nos deux systèmes, parce qu'il n'y a pas de régime fédéral en Norvège comme ici. Mais il est certain que leur système est très, très rigoureux.
Monsieur Cross.
M. Stephen F. Cross: Pour répondre à la question de M. Gilmour, j'aimerais dire que, sur la côte Ouest, l'industrie a pris d'elle-même l'initiative de recueillir beaucoup d'informations environnementales. Notre société a collaboré avec probablement les deux tiers des fermes d'élevage de la Colombie-Britannique à l'élaboration de plans de gestion environnementale en aquaculture. Cette structure de gestion d'entreprise est actuellement prise en considération pour son application dans un cadre plus international, la norme ISO 14000. Les entreprises essaient d'être proactives en s'attaquant aux questions environnementales et en voulant être concurrentielles sur les marchés internationaux.
De plus, l'industrie et le gouvernement provincial discutent de la possibilité d'établir sur la côte Ouest des règlements fondés sur le rendement, d'après le modèle de l'État de Washington et pourraient adopter ce mode de réglementation dans un proche avenir.
M. James Smith: Pour revenir à ce que le président a dit au sujet de la Norvège et du Canada, il est vrai que le système de la Norvège est sévère. L'industrie de ce pays a connu une période assez difficile il y a un certain nombre d'années, surtout sur le plan de la commercialisation de son produit. La Norvège a alors réglementé très sévèrement les quantités de poisson et de nourriture permises. C'était plutôt une question de marché que de planification environnementale en Norvège. La réglementation visait à contrôler l'industrie sur le plan de la production et de la commercialisation au sein de la CEE, et non sur le plan environnemental.
La Norvège n'est pas en train d'établir des niveaux de production écologiquement viables. À ce sujet, elle en est à peu près au même point que le Nouveau-Brunswick et la Colombie- Britannique.
M. Bill Gilmour: J'entrevois ici de grandes possibilités. J'imagine que le gouvernement de la Colombie-Britannique va décider ce mois-ci où et comment va s'organiser l'expansion de l'industrie, le cas échéant.
Je vais m'arrêter ici pour l'instant, monsieur le président. Merci.
Le président: Très bien, comme vous voulez.
C'est maintenant le tour de M. Lincoln, qui sera suivi de M. Herron.
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): J'imagine que le dilemme est toujours le même pour nous, à savoir jusqu'où peut aller la production industrielle sans mesures de protection environnementale. C'est tout le problème du développement durable. Je dois dire, d'après ce que j'ai entendu et lu jusqu'ici, qu'il faut encore me convaincre que l'environnement est vraiment aussi bien protégé qu'il devrait l'être.
L'an dernier, dans le cadre de notre examen de l'application de la réglementation environnementale au Canada, on nous a présenté un mémoire qui citait une étude effectuée en 1992-1993 pour le compte du ministère de l'Environnement du Nouveau-Brunswick, par J.P. Thonney et E. Garnier. D'après l'étude, près du quart de la zone où se trouvent des cages marines est fortement dégradée. Dans ces zones fortement polluées, on a retrouvé des quantités modérées à importantes de gaz en trop, sulfure d'hydrogène, ammoniaque, méthane et dioxyde de carbone; on a aussi constaté la disparition de poissons, d'invertébrés et d'organismes vivant dans les sédiments; l'accumulation de déchets de poisson et de nourriture pour poissons due au cycle des marées; la présence d'épaisses couches de bactéries et, dans les cas graves, d'anoxie, ou absence d'oxygène. Selon le rapport, dans les autres zones, on a constaté un léger enrichissement de l'eau ou encore un fond marin où seules les espèces tolérantes à un faible taux d'oxygène peuvent survivre.
• 1625
On apprend également dans le même mémoire qu'une étude de
suivi plus récente a été effectuée sur deux ans, en 1995 et en
1996, dans la baie Lime Kiln; cette étude fait état d'un
enrichissement de l'eau dans toute la baie et de l'augmentation des
espèces tolérantes à un faible taux d'oxygène. Cela semble être la
tendance, parce que je constate que le gouvernement de la Colombie-
Britannique est extrêmement inquiet de savoir que de la nourriture
pour poissons et du saumon d'élevage, le saumon de l'Atlantique,
s'échappent dans la mer, ce qui nuit à la truite arc-en-ciel dont
les stocks diminuent graduellement.
J'ai lu aussi dans l'un de ces mémoires qu'il existe un risque d'infection qui, selon les statistiques, touche 25 p. 100 du saumon d'élevage au Nouveau-Brunswick. En février 1998, 202 000 poissons atteints ont dû être éliminés. La quantité de poissons tués pour faire de la nourriture pour poissons d'élevage semble très importante.
Quelqu'un dans votre groupe a dit que la Loi sur les pêches offre la protection voulue; pourtant, j'ai ici une lettre de la ministre de l'Environnement qui dit ceci—et cela vous réjouira peut-être:
-
Il est impossible actuellement d'intenter des poursuites aux termes
du paragraphe 36(3) de la Loi sur les pêches concernant la présence
de substances nocives, sous forme de matières alimentaires et
fécales, entraînant l'enrichissement de l'eau des baies. Il en est
ainsi parce qu'on ne peut attribuer la situation à un organisme
unique.
Donc, tant qu'on ne pourra pas identifier l'individu qui en est vraiment la cause, il est impossible d'agir parce que la source de l'enrichissement de la baie est collective.
Je remarque que vous dites dans votre mémoire que la Loi sur l'environnement est connexe, ce qui sera contesté, je pense, par presque tout le monde ici, sinon tout le monde. Ce n'est pas une loi connexe. Vous avez donné des exemples liés à la prévention de la pollution et aux substances toxiques. Voilà la preuve que la loi n'est pas connexe parce qu'elle traite très précisément de la prévention de la pollution et des substances toxiques.
J'aimerais savoir pourquoi vous trouvez que la Loi sur l'environnement nuit à ce que vous faites. Comment entre-t-elle en conflit avec la conception que votre industrie a de la protection environnementale, en admettant qu'il y ait un problème comme il semble y en avoir un?
M. James Smith: Monsieur Lincoln, vous avez abordé différents sujets et je vais demander à mes collègues de la côte Ouest de répondre en particulier au problème de l'échappée du saumon en Colombie-Britannique.
Je vais revenir à ce que vous avez dit au sujet de l'étude de Thonney et Garnier, de 1991-1992, et à l'étude de la baie Lime Kiln, de 1995-1996, travaux que je connais très bien et que j'ai étudiés à fond. J'aimerais surtout les replacer dans leur contexte. On y présente des descriptions d'emplacements très localisés, mais qui donnent l'impression qu'il s'agit d'une situation généralisée et qui, si je reprends les termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, peut causer des effets environnementaux négatifs importants.
Je pense en fait que ce n'est pas le cas. Il y a eu des effets, et je pense qu'on peut dire que ces effets continuent à se produire à très petite échelle. Sur quelle superficie sont-ils observés? Quelle est la superficie de la zone évaluée? Sur quelle période de temps l'évaluation a-t-elle été faite? La situation est- elle permanente? Existe-t-elle durant une petite partie de l'année? Y a-t-il des moyens de corriger la situation? Si on étudie les informations dans un contexte plus large, celui de l'écosystème, on arrivera à la même conclusion que les responsables de la réglementation, à savoir que le problème n'est pas grave. Je ne nie pas qu'il existe, mais il faut le replacer dans son contexte.
• 1630
Pour ce qui est de l'avis d'Environnement Canada au sujet des
articles 35 et 36 de la loi et du fait qu'il est impossible
d'attribuer la responsabilité à un organisme unique, je ne le
conteste pas. En fait, je suis d'accord avec le ministère. Notre
industrie au Nouveau-Brunswick envisage à ce sujet d'adopter des
mesures de gestion environnementale des baies, en reconnaissant
qu'un certain nombre de fermes d'élevage dans une baie donnée
doivent collaborer pour assurer le développement durable. C'est une
attitude très proactive que l'industrie adopte en ce moment.
Enfin, vous avez demandé pourquoi nous trouvons la loi nuisible et pourquoi nous la considérons connexe. Je dois peut-être m'excuser d'avoir employé le mot «connexe». Ce mot n'est peut-être pas celui qui convient pour décrire cette loi. Je suis biologiste, et non pas législateur ou avocat. Je la considère connexe parce qu'il existe d'autres mesures législatives qui traitent des questions que vous touchez dans vos modifications. Elle vient s'ajouter à ce qui existe déjà et peut entraîner des conflits inutilement.
M. Bill Thompson: Monsieur le président, j'aimerais donner le point de vue de l'industrie à ce que M. Lincoln a dit au sujet de l'étude Thonney. Cette étude a été effectuée par le ministère de l'Environnement pour le compte de la province du Nouveau-Brunswick en 1990, 1991 et 1992. À la fin de cette étude de trois ans, le ministère a décidé que les impacts environnementaux n'étaient pas suffisants pour établir un programme gouvernemental de suivi permanent. L'industrie a alors décidé de créer son propre programme de suivi, qui est mis en oeuvre tous les ans, sur tous les sites, et ses résultats sont communiqués au ministère des Pêches et de l'Aquaculture de la province.
D'après cette étude effectuée en 1990, 1991 et 1992, qui était indiscutablement axée sur les pratiques d'élevage, les éleveurs ne les comprenaient pas. Mais à la suite de cette étude et de la mise en oeuvre du programme de contrôle permanent de l'industrie, on a amélioré la situation des faibles effets qui avaient été constatés à l'époque. Nous appliquons encore ce programme et continuerons de le faire.
Pour ce qui est de l'étude de 1995 et de 1996 sur les effets dans la baie, l'industrie y a réagi en établissant des zones de gestion de la baie où les éleveurs vont gérer et surveiller la baie en collaboration.
Notre industrie existe seulement depuis 20 ans. Chaque fois que nous apprenons quelque chose, nous avançons. Nous aimerions pouvoir travailler avec la loi existante que nous trouvons suffisamment exigeante. Nous sommes évidemment toujours prêts à améliorer nos méthodes parce que, encore une fois, les aquiculteurs sont les premiers à ressentir les effets de leurs activités.
Le président: Merci, monsieur Lincoln.
Je cède maintenant la parole à M. Herron, qui sera suivi par M. Jordan.
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Merci, monsieur le président.
Avant de poser mes questions, j'aimerais replacer la discussion d'aujourd'hui dans son contexte. L'an dernier, nous avons entendu le témoignage de Julie Abouchar et du Conseil de la conservation dans le cadre des audiences que nous avons tenues dans tout le pays sur l'application des mesures environnementales. Je pense que l'apport du Conseil de la conservation est important étant donné que c'est une ONG très respectée.
Cela dit, l'exemple donné dans ce témoignage mettait l'accent sur une industrie en particulier. C'est ce qui est à l'origine, principalement, des modifications dont nous parlons maintenant. Il est utile que les ONG et l'industrie nous présentent leur point de vue dans le cadre de notre étude de la LCPE, et c'est pourquoi ces modifications ont été ajoutées à la loi et non ailleurs.
Actuellement, l'aquaculture est gérée en vertu de protocoles d'entente que la province du Nouveau-Brunswick et la province de la Colombie-Britannique ont conclus avec le gouvernement fédéral. Monsieur le président, après avoir entendu les témoignages sur la façon dont le gouvernement fait appliquer ses propres règlements environnementaux, je dois dire que je serais un peu cynique quant à notre intention de resserrer la réglementation fédérale dans l'industrie.
• 1635
Cela dit, sur le plan des responsabilités, je pense que les
provinces, et surtout le Nouveau-Brunswick et la Colombie-
Britannique, devraient pouvoir réglementer leur industrie étant
donné que ce sont elles qui seront les plus touchées.
Ensuite, la LCPE est une loi portant sur le contrôle et l'usage des matières toxiques. Je pense que nous aurions tort de l'utiliser pour réglementer une industrie en particulier. Je pense qu'il serait plus prudent, si le gouvernement fédéral doit légiférer à ce sujet, d'adopter un seul document pour réglementer l'industrie au lieu d'essayer d'agir d'une façon que je suis désolé de qualifier de désordonnée, du moins d'une façon qui n'est pas très heureuse.
Il n'y a pas de fermes d'élevage de poisson dans ma circonscription, bien que j'habite très près de certaines d'entre elles et que j'aie eu le privilège d'en visiter dans le passé. Ce que j'ai dit en réalité, c'est qu'étant donné que l'industrie a besoin d'un environnement propre pour élever un poisson non pollué et que ce sont les provinces qui sont les plus touchées, l'industrie ne se sentirait-elle plus à l'aise d'être assujettie à une réglementation provinciale plutôt que fédérale? Le gouvernement fédéral n'a pas d'enjeu direct dans l'industrie comme les provinces.
M. Bill Thompson: C'est une excellente question. Actuellement, nous sommes soumis à pas mal de règlements fédéraux, comme l'ont fait remarquer l'Agence canadienne d'inspection des aliments—qui s'occupe de la nourriture des animaux—et le ministère des Pêches et des Océans. Nous avons passé en revue toutes les différentes lois auxquelles nous sommes soumis au niveau fédéral.
Nous sommes également soumis à toute une autre série de lois provinciales. Nous estimons être soumis à suffisamment de lois pour couvrir tous les aspects de notre industrie actuellement et nous espérons qu'à mesure que l'industrie prendra de la maturité, qu'elle comprendra mieux ce qui se passe et que le gouvernement aura une meilleure connaissance de ce qui se passe en aquiculture en milieu marin, nous aurons aussi une meilleure idée des lois requises.
M. John Herron: Quand il est question d'administrer et—à nouveau, à défaut d'un autre mot—de microgérer peut-être une industrie particulière, l'enjeu n'est pas tant l'industrie que les substances nutritives. Il serait probablement plus sage d'examiner ces questions de concert avec les fabricants de matières nutritives, d'aliments pour poissons, qu'avec l'industrie en général. C'est un peu comme si l'on interrogeait les agriculteurs sur la composition des pesticides plutôt que de leur poser des questions au sujet de la composition des aliments et des éléments nutritifs qu'ils utilisent dans leur exploitation agricole.
J'ai deux questions. Tout d'abord, ne serait-il pas plus prudent de dialoguer avec les producteurs d'éléments nutritifs? Ensuite, vue sous un angle tout à fait personnel, l'aquaculture serait probablement plus avantagée s'il existait une division de l'aquaculture au ministère de l'Agriculture, plutôt qu'au ministère des Pêches et des Océans.
M. Bill Thompson: Le comité aurait avantage à entendre des porte-parole de l'Association canadienne des industries de l'alimentation animale. C'est elle qui travaille essentiellement avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments en ce qui concerne les ingrédients des substances nutritives et leurs différentes utilisations. Voilà qui serait utile!
Je n'aborderai pas le second point parce que nous en parlons maintenant depuis des années déjà et qu'il appartient manifestement au gouvernement fédéral de décider de quel ministère nous relevons. Nous serions ravis de relever du ministère de l'Agriculture, puisque nous sommes des agriculteurs, mais nous devons aussi travailler avec le ministère des Pêches et des Océans puisque l'exploitation se fait en milieu marin. Nous relevons des deux à la fois. Nous aimerions bien que l'on se branche.
M. John Herron: Je n'ai plus de questions, monsieur le président.
Le président: Nous cédons maintenant la parole à M. Jordan, suivi de Mme Girard-Bujold et de M. Stoffer.
Monsieur Jordan.
M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Je vous remercie beaucoup. J'ai quelques brèves questions à poser. La première s'adresse à M. Gravel.
Dans votre mémoire, vous mentionnez, je crois, trois exemples d'utilisations de la nourriture pour poissons qui n'ont pas été approuvées parce qu'elles allaient clairement à l'encontre de nos objectifs en termes de protection de l'environnement. Ces utilisations étaient-elles internes ou étaient-elles le fait d'entreprises qui produisent et utilisent les produits dans d'autres pays? Est-ce une idée canadienne pour laquelle on a demandé une approbation?
M. André Gravel: Il est très difficile de savoir si la nourriture est de source canadienne locale ou une importation parce que, le plus souvent, ces entreprises sont multinationales.
M. Joe Jordan: Les renseignements qu'elles fourniraient ne préciseraient pas si la nourriture est utilisée ailleurs.
S'agissait-il de trois exemples parmi tant d'autres ou était- ce les seuls?
M. André Gravel: Ce sont les trois exemples que nous avons choisis d'insérer dans le mémoire d'aujourd'hui pour illustrer qu'en fait, l'agence est alors en mesure d'agir pour limiter le rejet dans le milieu d'ingrédients qui, selon nous, sont non conformes.
M. Joe Jordan: Certainement. Ces exemples illustrent aussi, cependant, qu'il existe dans l'industrie certaines forces qui ne se préoccupent pas du tout de l'environnement puisqu'elles soumettent ce genre de produit pour approbation.
Ma seconde question en est une de nature générale. J'essaie simplement de cerner le problème, car je me rends compte que l'objectif est en constante mutation, que l'industrie prend les mesures sur plusieurs fronts et que, lorsque certaines de ces études sont rendues publiques, elle a peut-être déjà fait l'ajustement. C'est une nouvelle industrie en plein essor.
En termes très généraux, êtes-vous d'avis que les modifications envisagées sont trop strictes ou qu'elles sont redondantes, parce qu'elles font double emploi avec des règlements existants? Pourriez-vous me donner des cas précis? Cette question me donne du fil à retordre.
M. Bill Thompson: Nous avons pour principe essentiellement qu'il y a dédoublement.
Tout d'abord, j'aimerais clarifier ce que vous avez dit à M. Gravel au sujet de membres de notre industrie qui ne se préoccupent pas de l'environnement parce qu'ils ont demandé l'autorisation de vendre des aliments qui contenaient des ingrédients... Ceux qui essaient de nous vendre des aliments ne sont pas membres de notre industrie.
M. Joe Jordan: D'accord.
M. Bill Thompson: Nous sommes aux prises avec tout plein de gens qui ont toutes sortes d'idées au sujet de ce que nous devrions faire. Je tenais à le préciser au départ.
M. John Jordan: Parfait!
M. Bill Thompson: Nous sommes ici aujourd'hui pour parler de lois qui exigeraient la délivrance d'un permis pour l'utilisation de nourriture pour poissons. Selon nous, cette question est déjà visée par d'autres lois. Le dédoublement des lois au Canada est un problème d'envergure. Nous sommes en train de faire un test de l'impact sur les entreprises de concert avec Industrie Canada parce que nous avons constaté que le foisonnement de lois traitant d'aquaculture nous coûte cher.
Nous sommes une nouvelle industrie. Nous nous trouvons assujettis à des lois existantes. Nous estimons qu'il existe suffisamment de lois pour protéger l'environnement. Il existe suffisamment de lois pour traiter de la nourriture pour poissons, et les modifications envisagées seraient redondantes.
Mme Anne McMullin: J'aurais autre chose à ajouter, monsieur le président.
Comme vient de le faire remarquer Bill, le projet de loi à l'étude nous prend aussi à partie en temps qu'industrie, comme si d'une certaine façon nous étions les pires pollueurs. Je crois que Steve Cross a démontré—certes, l'examen de l'aquaculture du saumon l'a révélé—qu'après tant d'études et d'examens de toutes les questions, l'industrie représente un faible risque pour l'environnement et qu'entre zéro et dix-huit mois après la mise en jachère ou l'élimination du site d'élevage, l'impact est nul.
Je ne souhaite pas faire de distinctions à propos d'autres industries, mais je ne crois pas que les autres puissent faire ce genre d'affirmation. Certes, nous avons tous un impact, qu'il s'agisse d'écotourisme ou d'autre chose, et je crois que ce à quoi nous sommes le plus opposés, c'est le fait que l'industrie de l'aquaculture soit prise à partie.
• 1645
L'industrie a été étudiée sous toutes ses coutures. Certes,
M. Lincoln a soulevé plusieurs questions que nous n'aurons peut-
être pas la possibilité de cerner, parce ce que ce dont il est
question ici, devant ce comité, c'est de nourriture pour poissons.
Toutefois, il existe des normes fondées sur le rendement, certes en
Colombie-Britannique et partout au pays, et nous avons un impact
minimal; tout est dans la façon dont nous gérons ces impacts. Comme
je l'ai dit, dix-huit mois au plus tard après la mise en jachère ou
la cessation d'utilisation d'un site d'élevage, l'impact est nul.
Dire que nous sommes la pire source de pollution n'est pas bien.
M. Joe Jordan: Ce n'est toutefois pas l'impression que j'en ai. Si vous vous reportez à l'article de la loi traitant des produits de nettoyage, des substances nutritives, des filtres d'eau et au fait que votre industrie ajoute quelque chose directement à l'eau... Cela relève de ces règlements. Vous pourriez peut-être arguer qu'en termes de biodiversité, c'est le cas également de l'agriculture, mais l'argument n'a pas sa place ici. Je ne crois pas que quelqu'un ici ait décidé de mettre des bâtons dans les roues de l'industrie de l'aquaculture. De par sa nature, votre industrie apporte des modifications fondamentales ou d'éventuelles modifications fondamentales aux écosystèmes. C'est la raison d'être de tout cela, je crois.
Mme Anne McMullin: Bien. Et comme je l'ai dit, il y a beaucoup d'industries qui rejettent des matières dans le milieu marin et qui ne sont pas prises à partie dans cette loi. C'est aussi une préoccupation.
M. Joe Jordan: D'accord.
Le président: Monsieur Jordan, je vous remercie.
Madame Girard-Bujold, suivie de M. Stoffer, de Mme Kraft Sloan, de M. Pratt et de la présidence.
[Français]
Madame Girard-Bujold, s'il vous plaît.
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Merci, monsieur le président. Vous m'excuserez, mais je n'ai pas beaucoup de voix.
Je viens du Lac Saint-Jean, au Québec, où l'industrie de l'aquaculture est bien présente. Comme vous le savez, le Québec s'est déjà doté de sa propre réglementation en vue de la conservation et de la mise en valeur de la faune, laquelle fait suite à des ententes-cadres fédérales-provinciales. Puisque chaque palier gouvernemental avait déjà bien défini son champ de responsabilité, ne croyez-vous pas qu'on devrait aujourd'hui tenir des négociations semblables?
Monsieur, vous disiez que l'industrie de l'aquaculture était en pleine expansion. J'aimerais savoir si vous partagez mon point de vue, à savoir que les règlements actuels sont désuets. Croyez-vous qu'on devrait négocier un protocole d'entente fédéral-provincial plutôt que de régler cette question en adoptant les dispositions du projet de loi C-32, qu'on étudie actuellement?
[Traduction]
M. Bill Thompson: Il existe effectivement un protocole d'entente entre le gouvernement fédéral et les gouvernements du Québec, du Nouveau-Brunswick et de la Colombie-Britannique qui départage les responsabilités en matière d'aquaculture. À mesure que l'industrie évolue, les gouvernements repèrent différentes mesures à prendre. Je continue de croire qu'une entente négociée entre deux parties vaut bien mieux que l'action en parallèle.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Tout comme Mme McMullin, je crois que le projet de loi n'est pas le véhicule approprié. Les responsabilités fédérales et provinciales sont bien précises. Le Québec, tout comme le fédéral, assume six responsabilités; il a six devoirs à faire.
J'ai également constaté que le Québec et la Colombie-Britannique appliquaient leurs propres règlements sur l'ajout de médicaments dans les aliments des animaux, ce qui me semble correspondre au protocole d'entente auquel ils en sont venus avec le gouvernement fédéral. Ne craignez-vous pas qu'en agissant de façon détournée et en adoptant un projet de loi qui n'est pas adapté à la situation, on risque de créer des chicanes dans ce domaine de l'aquaculture qui, comme vous le souligniez, est en pleine expansion?
Madame, vous disiez tout à l'heure que sept études d'expansion modeste avaient été réalisées et qu'on pouvait prévoir un investissement de 850 millions de dollars, ce qui représenterait une augmentation de 400 p. 100 pour l'industrie. Croyez-vous que ces études sont concluantes et qu'en raison de l'expansion si phénoménale que connaît l'aquaculture, on devrait mettre à jour les règlements?
[Traduction]
Mme Anne McMullin: Êtes-vous en train de dire qu'il faudrait prendre ces règlements?
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Devraient-ils être mis à jour et modernisés?
[Traduction]
Mme Anne McMullin: Oui.
M. Bill Thompson: Mme McMullin vient de mentionner qu'elle n'a saisi qu'une partie de votre question. Essentiellement, ces règlements ralentiraient effectivement l'investissement en Colombie-Britannique, au Nouveau-Brunswick, au Québec, à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse. C'est une industrie nouvelle qui n'a pas la vie facile. Nous cherchons à attirer des investissements qui se déplacent facilement. Il faut que nous puissions montrer que nous sommes une industrie capable de s'adapter aux règlements aussi vite qu'elle s'adapte aux technologies.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Merci.
Le président: Merci, madame Girard-Bujold.
[Traduction]
Monsieur Stoffer, suivi de Mme Kraft Sloan, de M. Pratt, de Mme Carroll et de la présidence.
Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Merci, monsieur le président.
Madame McMullin, la lettre du 27 novembre adressée au greffier du comité décrit vos préoccupations au sujet des modifications proposées par notre présidence à la Loi canadienne de la protection de l'environnement. J'aurais des questions à vous poser. Quand vous dites que votre industrie est l'une des plus lourdement réglementées... Je suppose qu'un groupe d'exploitants forestiers, d'exploitants miniers ou d'exploitants de camions nous servirait la même rengaine.
Ma préoccupation a toujours été la protection de l'environnement, et vous avez avoué vous-même que vous êtes une industrie plutôt nouvelle. J'ai toujours cru que, si le gouvernement pouvait agir avec prudence sur la base de conseils scientifiques à long terme, c'était la meilleure voie à suivre.
Vous mentionniez particulièrement dans votre lettre les 2 700 emplois que les agglomérations côtières... Étant moi-même originaire de la Nouvelle-Écosse, je connais très bien la ruine des agglomérations côtières et ce qui est arrivé à nos stocks de poisson sauvage—à la morue, au saumon de la côte Ouest et, naturellement, les préoccupations du Nord.
Quand vous rédigez une lettre au sujet d'une préoccupation et que vous faites un lien avec les agglomérations côtières—je sais que beaucoup de ces villages côtiers préféreraient pêcher le saumon sauvage que de faire de l'aquaculture.
Mme Anne McMullin: Je ne crois pas qu'une telle remarque soit juste.
M. Peter Stoffer: Je le dis simplement parce que je me suis beaucoup entretenu avec de nombreux éleveurs de moules et d'huîtres et qu'ils aiment vraiment ce qu'ils font. L'industrie compte beaucoup de nouveaux membres. Ce ne sont pas d'anciens pêcheurs. C'est pourquoi j'ai dit cela.
À quoi vous opposeriez-vous? Quelle est la plus grande source d'opposition à l'élevage en enclos?
Mme Anne McMullin: Je ne crois pas forcément que ce soit vraiment de l'opposition. L'élevage en enclos n'a pas encore dépassé le stade de la R-D.
Une entreprise appelée Future Sea, dont les bureaux se trouvent à Nanaimo, est en train d'étudier cette méthode. Elle est membre de notre association. Nous avons mené des coentreprises avec Future Sea. Actuellement, la méthode n'a pas fait ses preuves en milieu marin. Elle a essuyé plusieurs échecs. On est en train de faire l'essai, et nous avons appuyé l'idée. Actuellement, l'élevage en enclos ne fonctionne pas, et il ne peut fonctionner en milieu marin.
On ne s'oppose pas à la recherche ni à l'étude de la technologie. Cependant, chercher à l'imposer à l'industrie actuellement, c'est comme dire que l'industrie de l'automobile ne peut pas construire de nouvelles autos jusqu'à ce qu'elle ait mis au point l'automobile à piles. C'est quelque chose que nous favorisons. Notre industrie a toujours été à la recherche de moyens nouveaux et innovateurs. C'est un des moyens envisagés.
Malheureusement, au cours des quelques dernières années, la méthode n'a pas été très fructueuse. Cela ne veut pas dire qu'elle ne le sera pas plus tard. Nous avons certes appuyé le concept en y contribuant argent, sciences et personnel.
M. Peter Stoffer: Je vous remercie.
Récemment, le ministre des Pêches et des Océans a annoncé que la pêche de krill dans la baie de Fundy serait interdite pour une certaine période, pour un an, je crois. Il y a beaucoup d'opposition à la pêche du krill, point final. Nous avions cru comprendre que l'idée d'autoriser les aquiculteurs du Nouveau- Brunswick à pêcher le krill avait recueilli beaucoup d'appuis et que de nombreuses démarches en ce sens étaient faites.
Je dis simplement que, d'après les renseignements dont je dispose, le ministre fait beaucoup de démarches en vue de permettre la pêche du krill. Bien des membres de collectivités côtières et des écologistes aimeraient que l'interdiction de la pêche de krill soit plus permanente, qu'elle ne soit pas renouvelée chaque année. J'aimerais avoir votre opinion à ce sujet, si vous le voulez bien.
M. Bill Thompson: Si vous le permettez, je connais assez bien la question. Un pêcheur traditionnel a demandé dans son plan à pouvoir pêcher le krill afin de le vendre comme agent colorant aux entreprises d'aquaculture. Toutefois, sa demande n'a pas l'appui des grands fabricants de nourriture. Si vous vérifiez auprès du ministre des Pêches et des Océans, il vous confirmera que cette demande est venue d'un pêcheur traditionnel qui en avait discuté avec l'exploitant d'une petite usine locale d'aliments de Grand Manan qui a depuis lors fermé ses portes. Ce choix ne correspond à aucun plan de l'industrie d'aquaculture du saumon.
M. Peter Stoffer: Vous êtes en train de dire, monsieur Thompson, que l'industrie de l'aquaculture n'a exercé aucune pression et n'a posé aucune question au sujet de la pêche du krill?
M. Bill Thompson: Pas celle que je représente, monsieur.
M. Peter Stoffer: Je vous remercie.
Le président: C'est moi qui vous remercie.
C'est maintenant au tour de Mme Kraft Sloan, suivie de M. Pratt.
Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Je vous remercie beaucoup.
Tout à l'heure, un autre membre du comité vous a demandé si vous craigniez que les modifications soient trop rigoureuses ou qu'elles dédoublent d'autres lois ou règlements. Vous avez parlé de dédoublement.
Je suis en train d'examiner le mémoire présenté par André Gravel selon lequel c'est à l'Agence canadienne d'inspection des aliments qu'il revient de réglementer les aliments pour poissons au Canada puisqu'elle applique la Loi relative aux aliments du bétail et ses règlements d'application. Je me demande simplement si je pourrais avoir des éclaircissements au sujet de la façon dont est réglementé et surveillé l'aliment pour poissons dans le cadre de l'application de cette loi. Vous pouvez peut-être m'aider.
M. André Gravel: Je vous remercie, monsieur le président.
Pour répondre à votre question, les aliments pour poissons sont réglementés tout comme nous réglementons les autres genres de produits alimentaires, en ce sens, comme je l'ai mentionné, que nous effectuons des inspections avant la mise en marché concernant, par exemple, l'enregistrement des aliments, qu'ils soient destinés au poisson ou au bétail, si le produit ne respecte pas les seuils établis dans le règlement pour la teneur en éléments nutritifs.
Il y a aussi toute la question des aliments médicamentés. Qu'ils soient destinés aux poissons ou au bétail, nous faisons de la surveillance à l'usine même pour faire en sorte que la quantité de médicaments qui est censée se trouver dans l'aliment est bel et bien là et que l'aliment qui n'est pas censé être médicamenté ne l'est pas.
L'intervention nous permet de surveiller l'aliment comme tel et de prendre des mesures correctives si nous relevons des lacunes dans les aliments, qu'ils soient médicamentés ou pas.
Mme Karen Kraft Sloan: Qui fixe la teneur en éléments nutritifs ainsi que le genre de médicaments ou la teneur en médicaments de l'aliment?
M. André Gravel: En ce qui concerne la teneur en éléments nutritifs, essentiellement, l'agence juge qu'à l'intérieur d'une certaine fourchette, c'est le vendeur et l'acheteur qui s'entendront sur la majorité des éléments nutritifs. Au-delà, il faut l'enregistrer.
Mme Karen Kraft Sloan: Qui fixe les nombres comme tels?
M. André Gravel: C'est nous. C'est l'agence qui le fait.
Mme Karen Kraft Sloan: Comment vous y prenez-vous?
M. André Gravel: Je pourrais peut-être y revenir après avoir répondu à la seconde partie de votre question, soit qui décide de quel médicament est ajouté à l'aliment. Cette décision relève du Bureau des médicaments vétérinaires de Santé Canada qui contrôle l'administration de tout antibiotique aux animaux ou aux poissons, que ce soit dans des aliments ou par d'autres moyens.
Mme Karen Kraft Sloan: Les normes sont-elles les mêmes que pour les vaches et d'autres types d'animaux terrestres?
M. André Gravel: Désolé, mais je ne suis pas un expert de la question. Tout ce que je sais, c'est qu'on autorise beaucoup moins d'antibiotiques dans les aliments pour poissons que dans les aliments pour bétail ordinaire.
Mme Karen Kraft Sloan: Qu'en est-il des pesticides et des autres produits du genre?
M. André Gravel: Parlez-vous de résidus de pesticides?
Mme Karen Kraft Sloan: Oui.
M. André Gravel: À nouveau, l'enregistrement des pesticides incombe à l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire qui relève du ministère de la Santé.
Mme Karen Kraft Sloan: Qu'en est-il des traitements contre les poux de poisson, entre autres? Comment les traite-t-on?
M. André Gravel: À nouveau, c'est l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire qui approuve ces produits.
Mme Karen Kraft Sloan: Vous étiez sur le point de nous dire comment on fixe la teneur en éléments nutritifs.
M. André Gravel: Oui. J'aimerais, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, que Linda Morrison réponde à cette question plus technique.
Mme Karen Kraft Sloan: Faites, je vous en prie.
Mme Linda Morrison (directrice associée, Section des aliments du bétail, Division de la santé animale et de l'élevage, Direction des produits animaux, Agence canadienne d'inspection des aliments): Nous fixons les normes relatives aux éléments nutritifs en fonction de l'état des connaissances, de concert avec le Comité d'experts de la nutrition animale et l'Association canadienne des industries de l'alimentation animale, ainsi que de toute entreprise qui souhaite faire changer la teneur en éléments nutritifs.
Mme Karen Kraft Sloan: Comment se comparent ces normes avec celles, par exemple, de la Norvège?
Mme Linda Morrison: Nous nous fondons sur les exigences du Conseil national de recherches qui sont reconnues mondialement.
Mme Karen Kraft Sloan: Votre agence joue un rôle très important dans l'élaboration de la politique et l'établissement des niveaux autorisés dans les aliments pour poissons. Vous effectuez aussi beaucoup de surveillance et d'enquêtes, et je me demande simplement combien d'inspecteurs ou d'enquêteurs vous avez, par exemple, pour les élevages de poisson de la côte Est, pour les élevages de poisson de la côte Ouest, ainsi que pour tout ce qui se passe dans les eaux intérieures du pays. Combien d'inspecteurs avez-vous dans chaque région, ainsi qu'au total?
M. André Gravel: Monsieur le président, je n'ai pas ces renseignements, mais je pourrais peut-être faire un commentaire sur le sujet. Les inspecteurs qu'utilise l'agence pour appliquer la Loi relative aux aliments du bétail ne sont pas forcément affectés uniquement à l'inspection des aliments pour poissons. Nos inspecteurs ne font pas que cela. Nous n'avons donc pas, en réalité, d'inspecteurs des aliments pour poissons en tant que tels. Si nous menons une enquête à une ferme d'élevage de poissons, de toute évidence, le travail est un peu plus pointu. Par contre, si nous faisons une enquête générale sur les fabricants industriels de nourriture pour animaux, ces inspecteurs se rendront non seulement dans les usines d'aliments pour poissons, mais aussi dans les usines d'aliments pour bétail.
Mme Karen Kraft Sloan: Qui donc assure le contrôle des enclos? Est-ce votre agence qui s'en charge afin de voir comment les aliments pour poissons arrivent au fond et comment ils se dispersent dans l'écosystème?
On a dit ici que le temps pendant lequel ils se trouvent dans l'environnement n'est pas important ni non plus l'espace, mais il reste qu'une baie est une baie. Quelle est la taille d'une baie et de quelle autre façon... Nous parlons d'écosystèmes aquatiques. Je ne suis pas biologiste, loin de là, mais il me semble que les écosystèmes aquatiques ne sont pas entourés de frontières concrètes empêchant l'entrée de toutes sortes de substances différentes.
Vous dites que vos fonctionnaires inspectent les fabriques d'aliments. Inspectent-ils également les enclos marins, etc.?
M. André Gravel: Monsieur le président, les inspecteurs employés par l'agence pour inspecter les aliments ne font pas de travail environnemental lié à la pisciculture uniquement. C'est un dossier dont s'occupent conjointement le ministère des Pêches et Océans au palier fédéral et les ministères de l'Environnement des provinces. Notre agence n'assure pas le contrôle de la distribution des aliments. Nous allons dans les exploitations piscicoles si les éleveurs utilisent des aliments médicamentés. C'est dans cette condition que nous allons sur les lieux.
Mme Karen Kraft Sloan: Comment savez-vous qu'ils mélangent des médicaments aux aliments pour poissons? Vous téléphonent-ils pour vous en informer et pour que vous puissiez envoyer un inspecteur, ou procédez-vous par intermittence pour voir s'ils le font? Comment cela se passe-t-il?
M. André Gravel: Il s'agit d'un programme de contrôle. En ce qui concerne les grandes fabriques d'aliments, nous ciblons les inspections. Nous savons que les fabriques font des mélanges de médicaments et d'aliments, etc. Les pisciculteurs qui ont un équipement de mélange dans leur exploitation font l'objet de contrôles.
Mme Karen Kraft Sloan: Il est toujours possible pour un pisciculteur de mélanger des médicaments aux aliments sans que votre agence ne le sache.
M. Bill Thompson: Non. Madame, j'aimerais corriger...
Mme Karen Kraft Sloan: Pourrais-je, pour commencer, obtenir une réponse de M. Gravel, s'il vous plaît?
M. André Gravel: Oui. Les médicaments mélangés aux aliments proviennent normalement des grandes fabriques d'aliments et ces médicaments concentrés sont soumis à des mesures de contrôle. L'agence peut être informée du transfert de ces médicaments aux pisciculteurs.
Mme Karen Kraft Sloan: Les médicaments sont donc mélangés aux aliments à la fabrique d'aliments; ils ne sont pas mélangés par le pisciculteur.
M. André Gravel: Par les deux.
Mme Karen Kraft Sloan: Ils peuvent être mélangés à l'exploitation piscicole ou à la fabrique d'aliments.
M. André Gravel: C'est exact.
Mme Karen Kraft Sloan: Il n'y a pas donc véritablement de moyen de connaître la quantité de médicaments mélangée aux aliments pour poissons.
M. André Gravel: Il y a deux possibilités. La première consiste à acheter des aliments médicamentés à une fabrique d'aliments, auquel cas, le contrôle se fait à ce niveau-là. La deuxième, c'est que si un pisciculteur souhaite utiliser des aliments médicamentés, il peut demander une ordonnance à un vétérinaire, auquel cas il s'agit d'une mesure de contrôle supplémentaire, puisque nous parlons ici d'ordonnances.
Mme Karen Kraft Sloan: Ces dossiers sont-ils tenus par votre agence?
M. André Gravel: Non.
Mme Karen Kraft Sloan: Y a-t-il un centre où se retrouvent ces données?
M. André Gravel: Les dossiers sont tenus au niveau de l'exploitation et nous pouvons y avoir accès lorsque nous nous y rendons pour effectuer les contrôles.
Mme Karen Kraft Sloan: À quelle fréquence vous rendez-vous dans chaque exploitation pour effectuer ces contrôles?
M. André Gravel: Cela se fait au hasard en fonction du niveau de risque.
Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur Thompson...
Le président: Merci. Concluons maintenant, s'il vous plaît. Monsieur Thompson, brièvement.
M. Bill Thompson: J'aimerais simplement apporter un éclaircissement au sujet de la question du membre du comité. Tous les médicaments utilisés dans notre industrie ne sont émis que sous contrôle vétérinaire sévère. Nous ne pouvons pas obtenir d'aliments médicamentés ou de médicaments à mélanger aux aliments sans passer par un vétérinaire.
Sur la côte Est, tous les aliments sont mélangés dans les fabriques en raison de l'emplacement de notre industrie, proche de la côte. Sur la côte Ouest, le peu de mélange qui se fait sur les lieux se fait toujours sous la surveillance et le contrôle d'un vétérinaire.
Le président: Merci, madame Kraft Sloan.
Monsieur Pratt, madame Carroll, le président.
M. David Pratt: Merci, monsieur le président.
Ma question fait suite à celles posées par M. Herron et par Mme Girard-Bujold et porte sur l'efficacité des protocoles d'entente sur l'aquaculture signés avec les diverses provinces.
Dans la région d'Ottawa, nous avons connu un problème en matière d'aquaculture et il en a été question dans la presse il y a un ou deux ans. Il s'agissait d'une exploitation piscicole vers le lac Heney, proche de Mont-Sainte-Marie. Pour stimuler l'activité industrielle dans cette région, en état de crise économique, le gouvernement du Québec a offert des subventions importantes, de l'ordre de millions de dollars, je crois, si je me souviens bien, même si les détails de ce qui s'est passé ne sont pas très clairs, car tout cela date de quelques années.
Au bout de deux années d'exploitation, les propriétaires de chalets du lac—il s'agit d'un lac de peut-être 10 kilomètres de long et de 1,5 kilomètre de large—ont commencé à se plaindre de la qualité de l'eau qui était devenue repoussante à cause de la vase qui s'y développait. Les propriétaires se sont adressés aux autorités provinciales, me semble-t-il, sans obtenir beaucoup de satisfaction de la part des fonctionnaires du ministère de l'Environnement du Québec. Cela est arrivé au point où, en fait, les propriétaires de chalets ont dû demander réparation en vertu de la common law pour défendre leurs droits de propriété du lac et la qualité de vie sur le lac qui se dégradait. Il me semble qu'ils ont finalement réussi à faire fermer cette exploitation.
• 1710
Compte tenu de ce genre d'expérience au Québec, que pouvez-
vous nous dire au sujet de l'efficacité de ces protocoles
d'entente? Ma circonscription, soit Nepean—Carleton, est assez
éloignée des côtes de l'Atlantique et du Pacifique, mais il semble
qu'il y ait eu une attitude de laisser-faire dans ce cas
particulier.
M. Bill Thompson: Je ne peux pas faire de commentaire sur ce cas particulier. J'en ai entendu parler, mais je n'en connais pas tous les détails. A mon avis, ce qui ressort le plus de tout ceci, c'est qu'il s'agit d'un lac d'eau douce et que le gouvernement fédéral n'a aucune compétence en matière de lacs d'eau douce au Canada, si bien qu'aucun protocole d'entente ne viserait ce cas particulier.
Dans le cas du Nouveau-Brunswick et de la Colombie- Britannique, le protocole d'entente—et je sais qu'il en existe aussi en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve—il n'y en a pas pour l'Île-du-Prince-Édouard, car le gouvernement fédéral contrôle tous les aspects—le protocole d'entente donc, vise, comme l'a fait remarquer M. Smith, le partage des responsabilités, tout en renfermant une disposition d'exemption. Au Nouveau-Brunswick, le partage des responsabilités vise essentiellement l'octroi de licences; il n'y a pas abandon d'une compétence de nature législative ou réglementaire.
M. James Smith: Si je peux compléter les propos de M. Thompson, avec tout le respect que je lui dois, j'aimerais corriger ce qu'il vient de dire. La Loi sur les pêches vise l'eau douce en ce qui concerne l'habitat du poisson et l'utilisation du poisson par l'homme.
Le président: Y compris les lacs, monsieur Smith?
M. James Smith: Y compris les lacs—y compris les lacs d'eau douce, c'est exact.
Le président: Je me suis juste demandé à un moment donné si l'on était en train de récrire la Constitution cet après-midi.
M. James Smith: Je vais mettre cette observation en contexte, toutefois, par rapport au milieu marin. Pour ce qui est de l'eau douce, le gouvernement fédéral et les provinces se battent parfois pour savoir qui a le plus de pouvoir. Ce n'est pas le cas en ce qui concerne les eaux marines.
Le président: Madame Carroll, suivie du président, avant de passer à un deuxième tour rapide.
Madame Carroll, s'il vous plaît.
Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Merci, monsieur le président.
Monsieur Smith, comme tout le monde ici, j'écoute très attentivement l'information qui nous est transmise aujourd'hui et ce que vous avez dit au sujet de la Norvège, après les propos du président, m'a beaucoup intéressée.
Je remarque que vous avez un doctorat. Pouvez-vous me dire dans quelle spécialité? Est-ce l'océanographie?
M. James Smith: Non. J'ai fait mon doctorat à l'Université de Sterling, en Écosse, à l'Institut d'aquaculture. Mon domaine de spécialité—j'aimerais pouvoir vous citer le titre de ma thèse, mais elle remonte si loin que je ne peux le faire maintenant. J'ai étudié les interactions environnementales entre saumons d'élevage dans des enclos d'eau douce. J'ai étudié les rapports entre l'alimentation, les éléments nutritifs, le zooplancton et la croissance et la survie des poissons. Je suis donc très spécialisé dans ce domaine.
Mme Aileen Carroll: Certainement, sans compter les dimensions environnementales de votre travail de doctorat.
Si je comprends bien, vous êtes consultant au Nouveau-Brunswick, pour l'industrie.
M. James Smith: C'est exact. Mon entreprise, la Washburn & Gillis Associates Ltd., regroupe des ingénieurs, des scientifiques, des biologistes, des archéologues, des techniciens. Nous nous spécialisons dans les services d'évaluation d'impacts environnementaux pour l'industrie et le gouvernement. Notre travail porte sur les mines, les pâtes et papiers, la transformation des aliments, les aménagements portuaires, l'aquaculture—et ainsi de suite. Nous sommes un groupe de près de 60 employés à plein temps.
Mme Aileen Carroll: Une dernière question, monsieur Smith.
De toute évidence, vous avez lu les amendements proposés.
M. James Smith: Oui.
Mme Aileen Carroll: Compte tenu de vos antécédents, les trouvez-vous trop restreignants? Pour l'instant, l'incursion fédérale-provinciale ne m'intéresse pas trop.
M. James Smith: Ce n'est pas l'aspect restreignant qui m'inquiète, mais plutôt celui de la redondance. À mon avis, en ce qui concerne la protection de l'environnement en particulier, je crois qu'il existe suffisamment de lois en vigueur à l'heure actuelle pour répondre à l'objectif de ces amendements. La question qui se pose est la suivante: où vont les aliments pour poissons et quel est leur effet sur l'environnement? C'est la question essentielle. Je crois qu'il existe des lois qui répondent adéquatement à cette question.
Mme Aileen Carroll: À ce moment-là, s'il s'agit, comme je le pense aussi, d'une question de redondance plutôt que de réglementation excessive et si d'après vous, compte tenu de vos antécédents universitaires et professionnels en matière d'environnement et des questions qui vous intéressent à ce sujet, un palier de gouvernement n'assure pas la protection voulue, quel rôle devons-nous jouer, selon vous? Nous avons des exemples où c'est effectivement le cas.
M. James Smith: D'accord. Je vais répondre à votre question, mais peut-être pas directement; veuillez m'en excuser.
Mme Aileen Carroll: C'est ce que l'on nous dit de faire.
M. James Smith: Ce que je peux dire, c'est que pour l'instant les effets environnementaux de l'aquaculture sont fortement surveillés et contrôlés sur les deux côtes par le ministère des Pêches et Océans en vertu de la Loi sur les pêches; pour l'instant, on n'a pas pu prouver que ces effets exigent l'application de la Loi sur les pêches ou des poursuites en vertu de cette loi. Par conséquent, jusqu'à présent, cela n'a pas posé de problème au plan législatif. Cela ne veut pas dire que la situation n'est pas surveillée ou qu'elle ne nécessite pas de surveillance plus poussée, mais jusqu'à présent tout va bien.
Mme Aileen Carroll: Pour beaucoup des raisons que vous avez citées et étant moi-même originaire des provinces maritimes, je suis parfaitement d'accord avec l'observation qui a été faite, monsieur Thompson, à savoir que nous nous tournions vers ces nouvelles industries, toutes récentes et novatrices, créatrices d'emplois. Je suis allée à Terre-Neuve l'été dernier, et c'est l'expérience que l'on vit à Trinity, à Terre-Neuve. Ce qui m'inquiète, c'est qu'il n'y a pas de protocole d'entente avec le gouvernement de Terre-Neuve. Il s'agit d'une industrie nouvelle qui est peut-être l'expérience la plus novatrice de toutes celles décrites ici. À qui donc s'adresser pour protéger l'une des plus baies du Canada, c'est-à-dire, Trinity Harbour?
M. James Smith: Si le protocole d'entente avec le Nouveau- Brunswick, dont je peux parler en connaissance de cause, a été mis au point, c'est en raison d'un chevauchement de compétences, étant donné que cette province s'occupait de la gestion des pêches, l'encourageait et aussi, je suppose, la réglementait, jusqu'à un certain point. Le gouvernement fédéral et la province se sont donc entendus pour délimiter les champs de compétence, mais le protocole renferme une disposition d'exemption prévoyant que les signataires conservent leurs pouvoirs législatifs. C'est ainsi que l'on est arrivé à un tel protocole.
Jusqu'à présent, cela ne s'est pas encore produit à Terre- Neuve, sans doute parce que l'industrie ne s'est pas encore développée au point où de telles questions se posent. J'imagine qu'au fur et à mesure que se développera l'industrie, comme elle l'espère d'ailleurs, on arrivera à de tels protocoles d'entente. Ce sont des outils fort précieux.
Mme Aileen Carroll: Merci, monsieur.
Le président: Merci, madame Carroll.
J'aimerais maintenant poser quelques questions, si vous permettez.
Monsieur Gravel, pouvez-vous donner au comité des chiffres précis sur le budget dont vous disposez pour l'inspection, le contrôle et l'exécution de cette activité particulière? Si le contrôle n'est pas inclus dans vos activités, pouvez-vous le dire maintenant afin que je pose la question du contrôle aux autres témoins? Je ne m'attends pas à ce que vous nous donniez une réponse immédiatement, mais nous devons connaître le budget dont vous disposez pour jouer le rôle que vous avec décrit plus tôt. Pouvez- vous le faire?
M. André Gravel: Oui, monsieur le président. C'est avec plaisir que je transmettrai cette information au comité.
Le président: Vise-t-elle le contrôle également?
M. André Gravel: Oui, certainement.
Le président: Etes-vous en train de dire que l'industrie est contrôlée par votre agence?
M. André Gravel: C'est exact.
Le président: Etes-vous également en train de dire qu'en plus, l'industrie se contrôle elle-même?
M. André Gravel: C'est aussi exact.
Le président: Pouvez-vous nous dire combien vous employez de personnes sur le terrain?
M. André Gravel: L'agence compte près de 4,500 employés d'un bout à l'autre du pays.
Le président: Non, je veux parler plus précisément du contrôle, de l'inspection, et de l'exécution dans le secteur de l'aquaculture.
M. André Gravel: Je vais vous fournir ces renseignements également, monsieur le président. Je ne les ai pas ici pour l'instant.
Le président: Vous ne les avez pas ici.
M. André Gravel: Non.
Le président: D'accord, merci.
Ma question peut s'adresser à M. Smith, à M. Thompson, à Mme McMullin, ou à M. Cross—je ne sais pas exactement à qui—nous pourrions peut-être aborder la question sous l'angle de l'infestation. Vous avez ici un nombre assez important d'unités qui vivent dans des espaces restreints, voire même, d'après certains, des espaces surpeuplés. Par conséquent, il est possible—et cela s'est produit en quelques occasions—qu'il y ait infestation. En pareil cas, quelles substances utilisez-vous pour lutter contre cette infestation?
M. Bill Thompson: Monsieur le président, voulez-vous parler de l'infestation par les poux de poisson?
Le président: Par exemple.
M. Bill Thompson: Chaque problème est réglé par un produit approprié approuvé par le gouvernement du Canada. Dans le cas des poux de poisson, nous utilisons un produit appelé Salmosan, approuvé par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire.
Le président: S'agit-il d'une substance chimique?
M. Bill Thompson: Oui.
Le président: Ce projet de loi vise les substances chimiques; le savez-vous?
M. Bill Thompson: Il vise quoi?
Le président: Le projet de loi C-32 vise les substances chimiques. Le savez-vous?
M. Bill Thompson: Pas directement, non.
Le président: Je vous informe donc que ce projet de loi porte sur l'utilisation et l'approbation des substances chimiques. Par conséquent, en cas d'infestation et si l'industrie utilise des substances chimiques, il est parfaitement légitime que ce projet de loi vise les substances chimiques utilisées par votre industrie en cas d'infestation. N'êtes-vous pas de cet avis?
M. Bill Thompson: Je ne peux pas faire de commentaire sur le projet de loi, monsieur le président. Je sais que lorsque nous luttons contre l'infestation...
Le président: Vous ne pouvez pas faire de commentaire sur le projet de loi, mais un peu plus tôt, vous avez dit que ce projet de loi ne devait pas viser cette industrie; pourtant, cette industrie utilise des substances chimiques en cas d'infestation.
M. Bill Thompson: Monsieur le président, en ce qui concerne la question de l'infestation, nous observons les règlements de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire et du ministère des Pêches et Océans relatifs à l'utilisation des substances délétères. Nous devons passer par toutes ces étapes avant d'obtenir l'approbation d'un produit.
Le président: Le comité a eu connaissance de la demande faite par certains membres de votre industrie en vue d'obtenir l'approbation de la cyperméthrine. Connaissez-vous cette substance, et que pouvez-vous nous en dire?
M. Bill Thompson: C'est un produit utilisé dans le monde entier pour lutter contre les poux de poisson, en particulier, dans l'État du Maine, qui est à notre frontière. Une demande d'approbation a été présentée à l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire il y a maintenant plus de deux ans; cette demande passe par tout le processus d'approbation exigé par les ministères de la Santé, de Pêches et Océans et de l'Environnement.
Le président: On attend une décision d'ici la fin de février, apparemment. Savez-vous que des scientifiques qualifient la cyperméthrine de fortement toxique pour les insectes et les poissons et d'extrêmement toxique pour certains organismes de la faune et de la flore aquatiques?
M. Bill Thompson: J'ai entendu et lu toutes sortes de commentaires de divers scientifiques. Je sais que la cyperméthrine est utilisée en Norvège, en Écosse, dans l'État du Maine aux États-Unis, et au Chili. Je compte sur leurs agences de réglementation, comme je compte sur la nôtre, pour examiner toute l'information disponible avant d'arriver à la meilleure recommandation possible. C'est pourquoi, d'après moi, le système canadien qui existe aujourd'hui suffit amplement pour répondre aux questions qui se posent à notre industrie.
Le président: Quelle est la substance que vous avez citée plus tôt dans le cas des poux de poisson?
M. Bill Thompson: C'est un produit appelé Salmosan, un produit azaméthiphos.
Le président: Quand a-t-il été approuvé?
M. Bill Thompson: Il est approuvé une année à la fois depuis—je ne m'en souviens pas exactement—1996 ou 1997. L'approbation a été renouvelée deux fois. Un programme de recherche est en cours et nous y participons.
Le président: Il s'agit donc d'une substance au sujet de laquelle on se demande s'il est souhaitable de l'utiliser, ou pourquoi serait-elle est approuvée une année à la fois? Est-ce en raison de la réaction des poissons?
M. Bill Thompson: D'après moi, monsieur le président, c'est tout simplement parce que le système canadien ne se précipite pas, mais examine de très près la question; nous savons donc que toute la recherche est faite, que toutes les données sont réunies et présentées et que l'examen est constant avant l'approbation finale.
Le président: Nous devrons certainement faire plus de recherches sur la cyperméthrine, cela ne fait aucun doute.
Certains membres de ce comité ont lu dans le numéro d'octobre de Science un article de quatre auteurs, dont je ne vais pas vous citer le nom; je dois dire toutefois qu'ils sont rattachés à l'Université Stanford, l'Université de Stirling en Écosse, l'Université de Stockholm, l'Université de l'Oregon et l'International Center for Living Aquatic Resources Management.
• 1725
Dans cet article, daté d'octobre 1998, les auteurs, soit
Naylor, Goldburg, Mooney, Beveridge, Clay, Folke, Kautsky,
Lubchenco, Primvera et Williams prétendent—et je me demande si
vous avez vu et lu cet article et si vous avez des commentaires à
faire—que la dégradation des eaux côtières par suite du
diversement d'éléments nutritifs et de produits chimiques est
causée par l'aquaculture aquatique; que les écosystèmes côtiers
sont perturbés par l'introduction d'espèces exotiques, ce dont il
a également été question récemment dans des articles de journaux,
comme le Globe and Mail; que la capacité de l'océan d'assimiler les
déchets et de maintenir une population piscicole viable est
attaquée; que dans le cas de la salmoniculture, on a recours à la
dilution pour lutter contre la pollution de l'eau; que l'industrie
de la salmoniculture déverse d'importantes quantités d'azote et de
phosphore; il est question d'une formule à ce sujet, sur laquelle
je ne vais pas m'étendre. Pour finir, ils se penchent aussi sur les
croisements et prétendent que depuis décembre 1994, plus de 9 000
saumons de l'Atlantique se retrouvent dans les eaux côtières entre
l'État de Washington et l'Alaska, ce qui les amène à conclure que
la conservation des propriétés de résistance de l'espèce sauvage
est gravement atteinte.
Avez-vous des commentaires à faire au sujet de ce rapport?
M. Bill Thompson: Allez-y, Anne.
Mme Anne McMullin: Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de lire tout le rapport.
M. Bill Thompson: Monsieur le président, c'est la première fois que je vois ce rapport. C'est aussi la première fois que ma collègue, Mme McMullin, le voit.
Mme Anne McMullin: Nous pouvons certainement discuter de la question du croisement du saumon de l'Atlantique, entre autres. Steve Cross peut également vous parler de l'impact de certains des problèmes que nous avons soulevés.
Je ne sais pas vraiment... Ils disent qu'ils ont trouvé 9 000 cas de croisement? C'est bien ce que vous dites?
M. Bill Thompson: Non, il s'agit de poissons sauvages, des poissons qui se sont échappés des fermes d'élevage.
Le président: Puisque vous ne connaissez pas bien le sujet, il serait peut-être préférable, si vous êtes d'accord, que vous nous soumettiez vos commentaires par écrit.
Madame Torsney.
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): J'espère que ce document, qu'on vient tout juste de nous présenter, sera également remis aux témoins qui vont comparaître devant nous, jeudi, pour qu'ils puissent l'examiner. Quand on distribue un document à quelqu'un, il est juste qu'on lui donne le temps de l'analyser.
Le président: C'est une très bonne suggestion. Merci.
Mme Anne McMullin: Monsieur le président, vous avez parlé de croisement. Cette question m'intéresse parce que je n'ai jamais... Il n'y a pas eu de cas de croisement de saumons de l'Atlantique avec des saumons du Pacifique sur la côte Ouest. Je ne sais pas trop ce à quoi vous faites allusion.
Le président: C'est sans doute Paul Willcocks qui a rapporté cela de Victoria, le 29 janvier dernier. Je pense qu'on a distribué l'article, n'est-ce pas?
Le greffier: Oui, monsieur le président.
Mme Anne McMullin: Mais est-ce qu'on peut parler de croisement dans ce cas-ci?
Le président: Oui.
Mme Anne McMullin: Pour ce qui est de la Colombie-Britannique, si j'ai bien compris, on a mené plusieurs études dans diverses rivières de la province, dont la rivière Tsitika, afin de dénombrer les truites arc-en-ciel et autres espèces de poissons qui s'y trouvent. On a recensé huit saumons de l'Atlantique qui provenaient de deux installations d'élevage. On ne peut parler de croisement dans ce cas-ci.
Le président: Si vous jetiez un coup d'oeil sur l'article, les choses seraient plus claires.
Mme Anne McMullin: Je suppose que nous devrions parler...
Le président: Il est question de l'année 1994 dans l'article. C'est à la page deux de l'article, au haut de la colonne du milieu. Si vous voulez le lire et nous dire ce que vous en pensez, cela nous serait très utile.
Mme Paddy Torsney: Je ne sais pas si les témoins ont reçu une copie des articles qui ont été distribués au début de la réunion.
Le président: Ils l'ont reçue.
Mme Paddy Torsney: Eh bien, ils ne semblent pas l'avoir. Les témoins n'ont pas reçu les deux autres articles de journaux.
Le président: Très bien. Nous allons les distribuer à nouveau. Ils n'en ont peut-être pas tous reçu une copie, même si notre intention, au début, était de leur en distribuer une.
M. Bill Thompson: Si je puis me permettre, monsieur le président, j'aimerais attirer votre attention sur la dernière phrase de l'article que vous avez distribuez, et où l'on dit qu'il est à la fois possible et nécessaire de réorienter les politiques nationales afin d'adopter à l'égard de l'aquaculture une approche écologiquement, socialement et économiquement viable. Je pense qu'on va toujours se poser des questions au sujet des industries en général, et surtout des industries naissantes. Toutefois, ces gens- ci donnent l'impression que, peu importe les défis, l'aquaculture est une activité qui mérite notre attention.
Pour revenir au projet de loi C-32 et à la question du croisement des poissons d'élevage avec les poissons sauvages, je suppose que nous sommes un peu perdus. Nous n'étions pas prêts, en fait, à nous pencher sur cette question. Nous sommes ici pour examiner les amendements qui sont proposés.
Le président: Vous avez raison, monsieur Thompson.
Pour ce qui est du mot «naissante», que vous avez souvent utilisé cet après-midi, je ne sais pas si vous avez des filles ou des garçons de 20 ans, mais je me demande comment ils réagiraient si vous disiez qu'ils sont toujours à l'état naissant.
M. Bill Thompson: Naissant?
Le président: Oui. On qualifie de naissante l'industrie qui existe depuis 20 ans. Je me demande comment vos enfants réagiraient si vous disiez qu'ils sont toujours, dans leur vingtaine, à l'état naissant.
Monsieur Thompson, ma dernière question porte sur la substance que vous avez mentionnée plus tôt et qu'on utilise pour traiter les poux de poisson. Est-ce que cette substance est ajoutée à la nourriture pour poisson, ou est-elle utilisée séparément?
M. Bill Thompson: Il s'agit d'une solution qu'on place dans une toile à bâche et ensuite dans les enclos.
Le président: Donc, elle n'est pas ajoutée à la nourriture.
M. Bill Thompson: Non.
Monsieur le président, si nous nous qualifions d'industrie naissante, c'est parce que nous n'existons que depuis 20 ans, alors que les industries avicole ou bovine, elles, existent depuis plus d'une centaine d'années. C'est comme ça que nous le voyons.
Le président: Ce sont déjà de vieilles industries.
M. Bill Thompson: Oui.
Le président: Nous allons maintenant céder la parole à MM. Herron, Lincoln et Laliberte. Monsieur Herron.
M. John Herron: Je voulais poser une question au sujet des pesticides, qu'on a mentionnés plus tôt. De manière générale, les pesticides sont approuvés par Santé Canada, n'est-ce pas, et non pas en vertu de la LCPE?
Le président: L'organisme principal est Santé Canada.
M. John Herron: Je trouve inquiétants les commentaires qui ont été formulés au sujet des amendements proposés. Les témoins ont dit, entre autres, que ces amendements sont redondants.
J'ai dit aussi plus tôt que les provinces, et non les industries, se sont davantage illustrées par leur leadership. Cela dit, la province du Nouveau-Brunswick a lancé récemment un projet- pilote de 145 000 $ pour répondre aux préoccupations environnementales potentielles associées à la modernisation des industries. Quand il est question de l'environnement, est-ce que le gouvernement fédéral vous apporte une aide quelconque à ce chapitre?
M. Bill Thompson: Sur ce point, les projets que vous mentionnez figurent sur la liste des priorités du Comité de coordination de l'aquaculture, qui est visé par le protocole d'entente. Ce comité est composé de représentants des ministères fédéraux de l'Environnement et des Pêches et Océans, plus précisément des directions des sciences et de la protection de l'habitat, de représentants des ministères provinciaux de l'Environnement, des Pêches et de l'Aquaculture, et de certains intervenants de l'industrie.
Nous nous rencontrons essentiellement tous les deux mois. Nous avons fixé des priorités, et nous disposons de fonds pour atteindre ces objectifs. Voilà pour la contribution provinciale. Le gouvernement fédéral, lui, fournit essentiellement de la main- d'oeuvre, soit des scientifiques, des fondés provenant du budget des services votés du ministère des Pêches et Océans, des fonds provenant du programme de financement des projets à haute priorité du ministère des Pêches et Océans, et de fonds fournis par le ministère de l'Environnement. George, lui, s'occupe de l'application de la loi.
M. James Smith: Il s'occupe de conservation et de protection.
M. Bill Thompson: La division de conservation et de protection du ministère fédéral de l'Environnement.
Nous collaborons ensemble sur ces questions. L'industrie nous fournit la main-d'oeuvre, des fonds et beaucoup de collaboration pour atteindre les objectifs fixés par le comité.
Le président: Merci.
Monsieur Lincoln.
M. Clifford Lincoln: J'aimerais savoir à quel moment on a confié le mandat de surveillance à l'industrie, et non au gouvernement, au Nouveau-Brunswick. L'industrie de l'aquaculture soumet tous les ans des rapports de surveillance au ministère des Pêches du Nouveau-Brunswick. Est-ce que ces rapports sont publics? D'après les renseignements qu'on nous a fournis l'année dernière, ces rapports sont confidentiels. Autrement dit, personne n'en connaît la teneur, et personne ne peut y avoir accès en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Est-ce bien cela?
M. Bill Thompson: Voici ce qui s'est passé, monsieur Lincoln. Le gouvernement provincial, après avoir effectué une étude sur la question au début des années 90, a décidé qu'il n'y avait pas de préoccupations ou conséquences environnementales à long terme à considérer. L'industrie a donc rencontré le ministère des Pêches et de l'Aquaculture, et ils ont, ensemble, établi un programme de surveillance et défini les modalités de celui-ci.
Le programme prévoyait, entre autres, l'embauche d'un entrepreneur qui fournirait un rapport au gouvernement, aux pisciculteurs et à l'industrie. Ce dernier rapport est public.
Je présume que, quand l'entente relative au programme a été négociée en 1995, personne n'avait songé à ce moment là à rendre les rapports publics. Toutefois, comme cet aspect de l'entente a posé problème au cours de la dernière année, l'industrie est retournée voir le gouvernement et a renégocié les modalités du programme afin que l'information soit rendue publique. Encore une fois, la question n'avait pas été soulevée à l'époque. Un rapport public est déposé tous les ans, et nous cherchons à créer un programme plus transparent et facilement disponible.
M. Clifford Lincoln: Donc, vous dites que les rapports de surveillance seront dorénavant rendus publics?
M. Bill Thompson: Nous sommes en train de mettre au point un programme de surveillance tout à fait nouveau à partir des travaux qu'effectuent M. Smith et le ministère des Pêches et de l'Aquaculture, qui tentent d'établir une méthode pour calculer le nombre de poissons ou évaluer la quantité de biomasse qu'il devrait y avoir sur le site. Ces travaux permettront de créer un nouveau programme de surveillance, qui sera rendu public.
M. Clifford Lincoln: Lors du premier tour de table, j'ai abordé la question de l'anémie. On nous a dit que plus de 200 000 poissons ont été détruits parce qu'ils souffraient d'anémie, que près du quart de la population piscicole pouvait être atteinte de ce virus, qu'il faudrait peut-être détruire un million de poissons. On faisait allusion ici à l'industrie du Nouveau-Brunswick.
Pouvez-vous me dire si ce virus est très répandu? A-t-on réussi à le maîtriser? Est-ce un virus qui évolue? Comment peut-on savoir si le virus s'est attaqué aux poissons destinés au marché de détail, aux restaurants, ainsi de suite, Est-ce que ce virus peut- être transmis?
M. Bill Thompson: Vous faites allusion ici à une maladie que l'on appelle anémie infectieuse du saumon, maladie qui a été identifiée pour la première fois en Europe en 1984 et par la suite en Norvège, en Écosse, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, et peut-être même au Chili.
Elle n'a pas d'effets sur la santé. Nous avons demandé à l'entreprise CanTox d'évaluer la situation. Elle a effectué des analyses exhaustives et n'a trouvé aucun indice permettant de démontrer que le virus, et il s'agit bien d'un virus, peut être transmis du poisson à l'homme... elle nous a dit qu'il n'avait aucun effet sur la santé.
• 1740
C'est un problème nouveau pour nous au Canada, pour
l'industrie de la salmoniculture. Comme je l'ai dit, ce virus a été
découvert en Norvège en 1984, et sa présence n'a été décelée dans
le reste du monde qu'au cours des deux dernières années. Nous avons
subi de lourdes pertes. Nous avons maintenant un vaccin, qui a été
mis au point par une entreprise canadienne et approuvé par le
Bureau des médicaments vétérinaires. On commencera à s'en servir
dès ce printemps. Nous avons perdu plus d'un million de poissons.
M. Clifford Lincoln: Pour traiter l'anémie, il faut détruire les poissons qui en sont atteints. Comme on ne peut rien faire, vous les détruisez.
M. Bill Thompson: Il s'agit d'un virus, tout comme le rhume ou la grippe, et nous n'avons pas d'antibiotiques pour l'enrayer. Donc, la façon la plus efficace de régler le problème, d'après l'industrie, c'est de détruire les poissons. D'après le programme en vigueur au Nouveau-Brunswick, si le virus est décelé dans un enclos, celui-ci est immédiatement retiré pour éviter que le virus ne se propage aux autres enclos, à d'autres secteurs de la ferme d'élevage ou à d'autres fermes.
La mise sur pied de ce programme—il a été créé de concert avec les gouvernements fédéral et provincial—a grandement contribué à freiner la propagation de la maladie. Nos pertes économiques ont été... j'aimerais dire qu'elles ont été réduites ou presque éliminées, mais nous avons subi des pertes très lourdes l'année dernière. La maladie n'est pas aussi répandue cette année. Nous sommes convaincus de pouvoir maîtriser la situation.
Le président: Monsieur Cross, vous vouliez dire quelque chose.
M. Stephen F. Cross: Je m'écarte un peu du sujet ici, monsieur le président, puisque je veux revenir aux commentaires de M. Lincoln concernant les programmes de surveillance.
Je voudrais tout simplement apporter une précision pour ce qui est de la côte Ouest. Notre industrie vient de faire l'objet d'une évaluation environnementale, et on a recommandé qu'un programme de réglementation soit mis en place pour résoudre les problèmes que posent les déchets.
Je me suis entretenu avec le ministère de l'Environnement, des Terres et des Parcs de la Colombie-Britannique, qui est responsable, en vertu de la Loi sur la gestion des déchets, du contrôle des déchets, de la nourriture perdue et des matières fécales trouvées dans l'environnement. Nous avons analysé diverses formules en vue d'établir un programme de surveillance de l'environnement pour l'industrie. Il est un peu prématuré de faire une annonce au nom de la province à ce stade-ci, mais elle s'est penchée sur bon nombre des questions techniques qui intéressent le comité et j'espère qu'elle va bientôt s'attaquer à ces problèmes par le biais d'un programme de surveillance. Ce programme exigera la participation de tiers, en fera l'objet de rapports qui seront remis au gouvernement.
M. Clifford Lincoln: Est-ce que ces rapports seront publics?
M. Stephen F. Cross: Je ne peux parler au nom de la province. Je ne le sais pas.
Le président: Merci.
Madame Kraft Sloan.
Mme Karen Kraft Sloan: Je voudrais seulement poser quelques questions au sujet des commentaires de M. Lincoln.
En 1997, on a pêché 1,8 million de tonnes de poisson sauvage pour produire 644 000 tonnes de saumon d'élevage. Cette source de production est de 40 000 à 50 000 fois plus importante que celle des installations d'élevage. L'article publié dans la revue Science laisse entendre que ce chiffre correspond à environ 90 p. 100 de la source principale de production de la zone de pêche dans la mer du Nord.
Donc, lorsque vous dites que l'impact de la pisciculture est minime, vous faites allusion aux enclos marins. Toutefois, si vous êtes en présence d'un virus comme celui qu'a mentionné M. Lincoln, vous êtes obligé de détruire tous ces poissons. Or, ces mêmes poissons que vous ne pouvez utiliser pour la consommation humaine constituent toutefois une source incroyable de poisson sauvage.
• 1745
Quoi qu'il en soit, je voulais tout simplement mentionner cela
aux fins du compte-rendu. Quand on parle de conséquences, surtout
lorsqu'il est question de maladies et de l'impact qu'elles peuvent
avoir sur l'écosystème, on n'a qu'une très vague idée de ce qui se
passe.
Je voulais vous poser une question au sujet des médicaments qui sont ajoutés à la nourriture. Je voudrais savoir de quels médicaments il s'agit.
M. Bill Thompson: Nous allons, madame, demander à M. Myron Roth, qui travaille pour le Salmon Health Consortium, de nous donner des précisions à ce sujet. J'aimerais toutefois vous signaler une chose en ce qui concerne la nourriture pour poissons, et c'est de cela dont vous parliez, les tonnes de poisson sauvage qui sont utilisées pour fabriquer la nourriture destinée aux saumons.
L'industrie de l'élevage du saumon joue un très petit rôle dans la consommation de farine de poisson. La farine de poisson est une composante de la nourriture des bovins de boucherie, des porcs, de la volaille et de toutes sortes d'autres animaux, même les chiens et les chats. Notre rôle est infime. Diverses espèces qui n'ont aucune utilité sur la marché de l'alimentation humaine entrent dans la fabrication de la farine de poisson. Elles viennent pour la plupart de l'Amérique du Sud—c'est-à-dire les anchois.
Cependant, l'industrie de l'élevage du saumon en est très consciente et cherche d'autres ingrédients pour sa base de protéines. On essaie actuellement d'utiliser le colza canola et diverses céréales comme base de notre farine de poisson.
Mme Karen Kraft Sloan: Tout d'abord, ceci date de 1997, donc de deux ans seulement. Il s'agit ici de l'industrie de la salmoniculture en Europe, donc de l'élevage du saumon. Même si, à votre avis, une grande partie de ces poissons n'ont aucune utilité pour les humains, ils ont sûrement de l'importance pour l'ensemble de l'écosystème.
M. Bill Thompson: Madame, je dis seulement que notre pays n'est pas un gros consommateur de poudre de poisson. La poudre de poisson que nous achetons vient en grande partie de l'Amérique du Sud, et ces pays ont déterminé que l'espèce utilisée n'a pas de grande utilité dans la chaîne alimentaire. Nous cherchons aussi d'autres sources de protéines pour la fabrication de nourriture pour poissons. Je ne peux donner aucune autre justification.
Aussi, cette question est très importante et nous essayons de la régler. Les compagnies de production de nourriture pour poissons s'efforcent de la régler en essayant de trouver d'autres solutions.
Je laisse maintenant la parole à M. Roth, du Salmon Health Consortium, qui parlera du côté thérapeutique de la question.
M. Myron Roth (directeur exécutif intérimaire, Salmon Health Consortium): Bonjour, je m'appelle Myron Roth.
Pour revenir aux commentaires sur les médicaments, parliez- vous des médicaments utilisés dans la nourriture?
Mme Karen Kraft Sloan: Oui.
M. Myron Roth: Actuellement, seulement quatre médicaments ont été approuvés par Santé Canada et le Bureau des médicaments vétérinaires, et peuvent entrer dans la composition de la nourriture en aquaculture. Tous ces composés font l'objet d'évaluations approfondies, sur le plan de la santé et de la sécurité, par Santé Canada. Ils sont utilisés sur ordonnance vétérinaire, ou encore leur mode d'utilisation est prescrit par Santé Canada, conformément au guide sur les ingrédients médicamenteux.
Cela signifie que pour tous les médicaments utilisés, les quantités qui se trouvent dans la nourriture sont déterminées par des scientifiques et par Santé Canada—les doses, dans quelles circonstances, et combien de temps le poisson doit être conservé avant d'être tué afin qu'il ne reste pas de résidus dangereux dépassant les limites sûres, et tout cela est déterminé par Santé Canada. Il y en a donc très, très peu.
Mme Karen Kraft Sloan: Je demandais quels genres de médicaments sont utilisés.
M. Myron Roth: D'accord. Il y a quatre antibiotiques. Voulez-vous savoir leur nom?
Mme Karen Kraft Sloan: Oui, j'aimerais connaître leurs noms exacts.
M. Myron Roth: Les antibiotiques dont l'utilisation est actuellement permise en aquaculture sont notamment un composé qui s'appelle florfenicol et un autre, appelé oxytétracycline. Ce sont leurs noms chimiques. Il y a deux composés de sulfamide potentialisé. Leurs noms commerciaux sont Romet et Tribrissen, leurs noms chimiques sont très longs, si vous voulez les entendre aussi.
Mme Karen Kraft Sloan: Veuillez les lire aux fins d'inscription au compte rendu, s'il vous plaît.
M. Myron Roth: Des quatre composés, le premier est fondamentalement de l'oxytétracycline. Le deuxième est le florfenicol. Le troisième composé est un mélange de sulfadimetoxine et d'ormetoprime, qui est du sulfamide potentialisé, un antimicrobien. Le quatrième composé est fait de sulfadiazine et de trimethoprime, une combinaison de sulfonamide potentialisé. Ces quatre composés ont d'autres applications vétérinaires dans l'élevage d'animaux destinés à l'alimentation.
Pour tous ces produits, des limites maximales de résidus ont été fixées tant pour le poisson que pour tous les autres animaux d'élevage.
Mme Karen Kraft Sloan: Je crois qu'il ne m'est jamais arrivé, lorsque j'achète du poisson, de voir une liste des médicaments et des antibiotiques qui ont été utilisés.
M. Myron Roth: Ce n'est pas exigé pour les poissons, ni d'ailleurs pour aucun autre animal d'élevage destiné à l'alimentation. La liste serait longue, pour certains animaux.
Mme Karen Kraft Sloan: Je ne mange pas d'autres animaux, merci beaucoup.
Le président: Y a-t-il d'autres questions? Monsieur Laliberte.
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Au début, vous avez dit que l'industrie, qui est nouvelle, est très contrôlée. Est-ce que c'est une manière de définir l'aquaculture? Je constate que vous avez un tas d'experts ici; il n'y en a pas autant, là d'où je viens, pour nous dire ce qui ne va pas avec la pêche traditionnelle, celle du poisson d'eau douce, nous n'avons pas tant d'experts pour nous dire ce qui ne va pas. Nous essayons de contrôler les canards qui mangent trop de poissons et des choses du genre. Nous n'avons pas d'experts résidents.
Le genre de contrôle exercé sur cette industrie semble être un contrôle sur le prix de la nourriture—je suppose que c'est une préoccupation importante—les intrants et les extrants, et puis il faut essayer d'avoir une marge bénéficiaire. Cependant, sur la question de la nourriture, vous semblez très déterminés à ne pas les laisser régir par la LCPE. Si vous lisez bien cette loi, elle vise la protection de l'environnement. Elle couvre tout le Canada. Ce n'est pas régional, ça ne concerne pas une communauté ou une rivière. C'est vise l'intégralité de l'écosystème et l'avenir du pays.
C'est donc avec ces intérêts à l'esprit que nous sommes réunis ici. Cela préoccupe de nombreuses régions.
Vous dites que vous êtes surveillés de très près. Je suppose qu'il y a de bonnes raisons pour cela. Vous ne les avez pas mentionnées. Vous nous avez parlé de ce qui est bon pour votre industrie, mais je suis convaincu que la surveillance dont vous faites l'objet est justifiée, et d'autres témoins nous en diront peut-être les raisons, mais j'aimerais bien que vous nous le disiez aussi.
Les effets cumulatifs de la culture dans les régions, des rivières et des lacs, peuvent entrer en ligne de compte, mais il y a aussi des espèces non indigènes qui sont introduites dans certaines rivières. Vous pourriez bien y introduire des espèces exotiques qui ne viennent pas de notre pays. Vous pourriez cultiver des espèces biotechnologiques, dont l'alimentation particulière pourrait nuire aux espèces naturelles et indigènes de l'environnement dans lequel vous faites votre commerce ou votre culture.
Je suppose qu'il y a aussi une certaine concurrence entre les éleveurs traditionnels et les aquaculteurs, parce que vous traitez sur les mêmes marchés, et cela suscite des préoccupations.
J'aimerais savoir pourquoi vous vous opposez si vigoureusement à ce que la nourriture pour poisson soit régie par la Loi sur la protection de l'environnement, parce que c'est nouveau pour moi. Je suis nouveau venu dans l'industrie aussi, mais je n'avais jamais pensé qu'il y avait des médicaments dans la nourriture pour poissons. Cela me fait dresser les cheveux sur la tête. Je croyais que nous n'avions affaire qu'à des matières nutritives. Nous parlons maintenant de drogues, de produits chimiques et de toutes sortes de produits qui semblent entrer dans la composition des aliments granulés. Tout ceci m'ouvre les yeux.
Si vous voulez bien être franc avec nous, dites-nous seulement ce qui préoccupe les personnes qui vous surveillent.
Mme Anne McMullin: Je crois que je l'ai dit au tout début, il est normal que toute industrie fasse l'objet d'un examen minutieux du public, et nous n'échappons pas à la règle, comme bon nombre d'autres industries de la Colombie-Britannique, que ce soit les centres de ski ou les exploitants d'entreprises touristiques et bien d'autres. Il est normal que le public s'y intéresse. Je crois qu'il incombe à l'industrie de répondre à la critique du public ou de faire face à la controverse, et je crois que notre industrie peut tirer orgueil du fait que pas mal de gens l'observent de près et qu'il existe beaucoup de données scientifiques sur elle.
• 1755
Comme je le disais au début, notre industrie a fait l'objet de
l'examen des effets environnementaux le plus exhaustif qu'il y ait
eu. Ces sujets ont été examinés et il existe des règlements en la
matière. Pour ce qui est de la nourriture pour poissons, je crois
que nous avons réglé le problème de redondance, et il me semble que
les gouvernements peuvent instaurer autant de règles qu'ils le
veulent, mais il faudra bien arrêter d'en inventer. Je crois que
notre industrie est lourdement réglementée, pour l'obliger à être
écologiquement saine et viable, et c'est le cas en Colombie-
Britannique et dans d'autres régions du pays.
Dire pourquoi nous sommes sous la loupe du public... comme je le disais, toutes les industries devraient l'être, et nous le sommes, comme toute autre industrie du pays.
M. Bill Thompson: Je voudrais ajouter à cela que, comme le disait Mme McMullin, nous sommes une toute nouvelle industrie, située en un endroit nouveau, et il y a une nouvelle vague d'intérêt au Canada en faveur de ce que tout le monde fasse les choses comme il faut. Ça ne me pose pas de problème. Notre industrie a, disons, passé le test de l'examen minutieux dont elle faisait l'objet. Nous sommes régis par un certain nombre de lois et de contrôles, comme nous l'avons déjà souligné.
Vous avez parlé d'introduction d'espèces exotiques. Cela ne pourrait pas se faire sans l'approbation du gouvernement canadien. Il y a une loi qui régit l'introduction et les transferts, qui limite l'utilisation ou le déplacement de quelque espèce que ce soit dans le milieu marin. Vous devez faire une demande et subir un examen approfondi. Ça n'arrivera pas. C'est la même chose avec la biotechnologie. Il y a déjà une politique fédérale en vigueur à ce sujet-là. C'est déjà réglé.
Pour ce qui est de la concurrence avec les pêcheries traditionnelles, de la perspective de l'élevage du saumon, ce n'est pas vraiment un grand problème aujourd'hui. Nous fonctionnons tout au long de l'année. Il y a certaines périodes, pendant la saison de la pêche du poisson sauvage, par exemple, où notre marché ralentit et nous nous retirons.
Nous sommes des agriculteurs. Lorsque nous parlons de nourriture, c'est la même chose que pour tout autre animal. Vous parlez d'aliments granulés. C'est ce que nous fabriquons. Nous faisons des aliments secs qu'on pourrait décrire comme de la nourriture pour chats, pour la comparer à ce qui vous est familier—c'est à peu près de la même taille, avec la même composition de base. Il y a aussi de la nourriture mouillée, qui est beaucoup plus molle, plus comme la nourriture en conserve pour chats. Elle contient beaucoup d'eau.
Nous ne sommes que des gens qui élèvent un animal. Il se trouve que nous l'élevons en milieu marin, ce qui est différent. C'est pourquoi les gens nous posent des questions. C'est pourquoi nous avons nos experts. Nous suivons la situation.
Vous demandez pourquoi nous tenons tant à éviter que la Loi touche à la réglementation de la nourriture pour poissons. Eh bien il se trouve que c'est notre tâche, à Mme McMullin et à moi, de veiller à ce que la compétitivité économique de l'industrie canadienne ne soit pas menacée. Nous craignons que de nouveaux règlements incitent d'éventuels investisseurs dans notre industrie à aller voir ailleurs, où la réglementation n'est pas aussi lourde. C'est particulièrement le cas lorsque deux ou trois niveaux différents de réglementation fédérale s'appliquent au même sujet.
En ce moment, en ce qui concerne la nourriture des poissons et l'environnement, nous sommes sous le contrôle et la direction de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, du ministère des Pêches et des Océans et du ministère fédéral de l'Environnement, de même que de nos organismes provinciaux. L'ajout d'une nouvelle loi ou d'un nouveau projet de loi qu'il nous faudra observer, pour laquelle nous devrons obtenir un permis, amènera l'investisseur à se demander: «Est-ce que j'ai plus avantage à investir à 30 kilomètres d'ici ou de l'autre côté du continent?» C'est de cela qu'il s'agit. C'est la raison de notre présence ici.
Nous ne craignons pas d'être observés. Nous n'avons pas peur d'être réglementés. Ce qui nous préoccupe, c'est d'être trop réglementés et d'être forcés à perdre notre compétitivité.
Le ministère de l'Industrie, pour faire le test d'impact sur les entreprises, examine tous les règlements qui nous régissent.
Je vais vous donner un très bon exemple de ce que c'est que d'être pris au milieu de tout cela. L'industrie ostréicole du Canada était en pleine évolution. Elle avait un bon produit. Et puis est arrivé un nouveau produit, appelé l'huître pour cocktail. C'était une petite huître, plus sucrée et plus lisse. Il y avait un problème. Le cultivateur a semé ses graines, a fait pousser sa récolte, mais il n'a pas pu récolter ses huîtres pour cocktail parce que la Loi sur les pêches imposait des restrictions sur la récolte d'huîtres inférieure à une certaine taille. Cela avait plein de bon sens pour la protection des animaux sauvages, etc., mais pour un cultivateur qui sème des graines régulièrement, cela l'a privé d'un débouché économique. Il nous a fallu des années pour faire changer la réglementation et permettre au cultivateur de récolter ses huîtres pour cocktail. C'est pourquoi nous craignons de nous faire prendre dans un tissu de règlements qui, même avec les meilleures intentions, peuvent créer une situation de contrôle de notre industrie.
Le président: Y a-t-il d'autres questions? Laissons M. Laliberte poser une dernière question.
M. Rick Laliberte: C'est plutôt une déclaration. Je crois que les règlements sont aussi un moyen de protéger votre industrie, votre réputation et la réputation du Canada. Non seulement ils protègent les poissons de culture, mais aussi les poissons sauvages. Il y a toujours eu des règlements, principalement pour des raisons de sécurité, la sécurité de notre environnement. À une époque, les gardiens de but, au hockey, ne portaient pas de masque protecteur, et maintenant tous les gardiens en portent un. Il y a une époque où il y avait des buffles sauvages dans notre pays. Maintenant, ils vivent en élevage. Nous devons protéger notre habitat naturel. Je crois que c'est un cycle naturel, mais en tant qu'industrie, vous devez comprendre que notre rôle est de protéger votre industrie, et aussi la santé et la sécurité de millions de gens et des espèces qui vivent avec nous.
M. Bill Thompson: Cela ne nous pose absolument pas de problème. C'est pourquoi nous pensons que l'environnement est protégé par le ministère des Pêches et des Océans et ses lois particulières qui sont en vigueur. C'est ainsi que le gouvernement canadien a choisi de protéger le milieu marin contre certaines industries et des actions particulières. Nous sommes réglementés, nous sommes surveillés et l'environnement est protégé.
Le président: Il est peut-être bon de terminer avec la dernière question de M. Laliberte.
En tant que comité, nous sommes impatients de recevoir les réponses de M. Gravel sur la capacité de l'organisme de faire les choses comme il le faut avec le budget et le personnel dont il dispose. Il est certain que nous avons maintenant une meilleure idée qu'auparavant de la manière dont fonctionne l'organisme.
Nous sommes impatients d'entendre vos commentaires sur cet article dans la revue Science. N'hésitez pas, s'il le faut, à le réfuter.
J'espère, monsieur Thompson, que vous ne tenez pas à ce qu'on pense que vous placez la compétition au-devant de la protection de l'environnement, mais que vous voudriez que l'environnement soit protégé et qu'il y ait de la compétition, sans conflit entre les deux. Je ne voudrais pas que quiconque interprète mal votre intervention. Je vous défendrai, au besoin, mais j'aimerais pouvoir rentrer chez moi avec l'assurance que vous ne donnez pas la priorité à l'un aux dépens de l'autre.
J'aimerais aussi ajouter qu'à la lumière de ce que nous avons entendu aujourd'hui à propos de l'infestation et des substances conçues pour la combattre, nous devrons peut-être élargir la portée de l'amendement à l'étude, L-15.6.1, pour y inclure les adjuvants, les médicaments ou les substances chimiques, au lieu qu'il ne concerne que la nourriture.
J'espère que les témoins pourront comprendre que notre comité examine le projet de loi qui réglemente l'industrie chimique, qu'il traite d'un projet de loi qui vise à prévenir la pollution et que, par conséquent, il a toutes les raisons d'exercer une certaine autorité en la matière. Si nous sommes convaincus que l'organisme s'acquitte correctement de sa tâche tant sur le plan de la science que du budget, nous examinerons alors cet aspect de l'amendement sous ce jour. Bien entendu, nous serons guidés par les renseignements que nous recevrons d'ici une dizaine de jours, avant de devoir traiter de cette clause particulière, un peu plus tard.
Au nom des membres du comité, monsieur Smith, monsieur Thompson, madame McMullin, monsieur Cross, monsieur Gravel et madame Morrison, je vous remercie infiniment de votre présence ici cet après-midi.
La séance est levée et reprendra demain matin dans l'édifice du Centre. À demain.