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ENSU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 10 février 1999

• 1536

[Français]

Le président (l'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue à notre rencontre de cet après-midi.

L'objet de notre travail est toujours le même: le projet de loi C-32, Loi visant la prévention de la pollution et la protection de l'environnement et de la santé humaine en vue de contribuer au développement durable.

Avant de vous présenter nos témoins ainsi que le ministre, je dois faire quelques annonces.

[Traduction]

Le greffier est en train de distribuer la Stratégie fédérale de développement de l'aquaculture. Il distribue aussi le document sur le consentement éclairé préalable qu'a préparé John Moffet à l'intention des membres du comité. Ce document sera distribué demain à ceux qui ne sont pas ici aujourd'hui. Il est en train de distribuer le texte de l'intervention du ministre aujourd'hui, ce qui fait que je devrai donc le présenter.

[Français]

Je suis très heureux de vous souhaiter la bienvenue au nom du comité, monsieur le ministre. Vous êtes accompagné de fonctionnaire que vous voudrez peut-être présenter aux membres du comité. La parole est maintenant à vous. Nous sommes très heureux d'avoir l'occasion de vous écouter.

L'hon. Gilbert Normand (secrétaire d'État (Agriculture et Agroalimentaire)(Pêches et Océans) Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je voudrais d'abord vous présenter les gens qui m'accompagnent. Ce sont le Dr John Davis, qui est responsable des sciences au ministère des Pêches et des Océans; Mme Liseanne Forand, sous-ministre adjointe et responsable des politiques à Pêches et Océans; et notre nouveau commissaire à l'aquaculture, M. Yves Bastien.

Je voudrais vous remercier d'avoir accepté de nous recevoir et aussi vous dire que je ne suis pas venu dans l'intention d'essayer de contrer ou de démolir l'argumentation qui a pu être présentée à cette table au cours des derniers jours.

J'ai pris connaissance, durant la fin de semaine, des différentes présentations qui ont été faites ici la semaine dernière et j'ai jugé bon de venir vous présenter un aspect global et général et une vision politique de l'industrie de l'aquaculture telle que nous la voyons actuellement au Canada, en comparaison avec les autres pays, et telle que nous souhaiterions la voir se développer dans les années à venir.

Je n'ai malheureusement pas pu déposer de texte préparé d'avance à cause du temps. J'ai ici des notes sur lesquelles je vais tenter d'élaborer. Je ne sais pas quelle est exactement votre façon de procéder. Je ne sais pas si vous préférez m'arrêter pour me poser des questions ou me poser des questions à la suite de mon exposé.

Le président: Je préfère que vous fassiez un exposé de 15 minutes, si vous le voulez, et qu'on vous pose ensuite des questions. C'est la façon de procéder normale, si vous êtes d'accord.

• 1540

M. Gilbert Normand: Parfait.

Comme vous le savez, l'aquaculture est une industrie très jeune au Canada. Elle a démarré vers 1984. C'est une industrie dont la croissance a été très rapide depuis 1984. On avait un chiffre d'affaires d'environ 7 millions de dollars en 1984, et ce chiffre atteint aujourd'hui près de 400 millions de dollars. Il y a donc eu une croissance phénoménale au cours des 15 dernières années.

Toutefois, je pense que tout le monde sait que l'industrie de l'aquaculture a eu des hauts et des bas, et j'aimerais qu'on élargisse le débat afin qu'il ne porte pas uniquement sur l'élevage du saumon. L'aquaculture connaît actuellement une croissance dans plusieurs secteurs d'élevage, que ce soit au niveau des mollusques ou au niveau des poissons à chair fine, en eau douce et en eau salée. C'est une industrie dont les secteurs d'activité s'élargissent d'année en année. On a de nouvelles espèces, même au niveau des crustacés.

Comme vous le savez, l'aquaculture est peut-être l'industrie la plus gérée et réglementée actuellement. Au gouvernement du Canada et dans les provinces, il y a actuellement 17 ministères et agences qui réglementent l'industrie de l'aquaculture. Comme on dit, elle est bien entourée.

Ce qu'on veut essayer d'éviter, c'est un dédoublement de la réglementation, tant dans nos propres ministères qu'entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

Je sais que vous avez mis beaucoup l'accent sur la nourriture des poissons d'aquaculture. Au moment où on se parle, l'Agence canadienne d'inspection des aliments est en train de revoir elle-même toute sa réglementation à ce sujet, et cela inclut les aliments des poissons d'aquaculture et de tous les autres animaux d'élevage.

Je pense qu'on doit comparer l'aquaculture à l'agriculture telle qu'elle était il y a 100 ans. Il y a 100 ans, il y avait des centaines pour ne pas dire des millions de bisons qui couraient dans les prairies de l'Ouest américain et canadien. Aujourd'hui, des dizaines de millions de têtes de bétail ont pris leur place. C'est pour répondre aux besoins de la population.

Vous savez qu'on a eu un effondrement des stocks de poisson assez important, au Canada et dans plusieurs autres pays. Vous savez aussi que non seulement la population canadienne, mais toute la population terrestre nécessite de plus en plus de protéines pour se nourrir et que les fruits de la mer sont actuellement une source de protéines importante pour la race humaine. D'ailleurs, au cours des dernières années, plusieurs pays ont pris une double longueur d'avance sur le Canada dans le développement de l'industrie de l'aquaculture. Des pays comme le Chili, le Japon, le Portugal et la Grèce, pour ne nommer que ceux-là, ont mis les bouchées doubles pour développer l'aquaculture parce que les fruits de la pêche ont diminué un peu partout.

Il est évident qu'il faut absolument se soucier de la répercussion de cette industrie sur l'environnement, comme on le fait actuellement et comme on le fait de façon plus pointue depuis quelques années dans le secteur de l'agriculture.

Comme je l'ai déjà dit, l'industrie de l'aquaculture est jeune et est appelée à se développer. Elle devra le faire parce que c'est une question de survie pour la race humaine. Je ne pense pas dramatiser en disant cela.

Plusieurs choses entrent en jeu dans le développement de l'aquaculture. Il y a l'environnement par rapport au site et au mode de fonctionnement des aquaculteurs. Les problématiques sont très différentes d'un secteur à l'autre, selon que l'on parle des mollusques, des saumons, de l'élevage en cage, de l'élevage en bassin, de la mariculture ou de l'élevage en eau douce. On est conscient qu'il peut y avoir des retombées environnementales et qu'il y a des phénomènes de rejet, mais il ne faut pas dramatiser.

• 1545

Je sais que la nourriture a fait l'objet d'une discussion très intense ici, la semaine dernière. Vous avez entendu des représentations de plusieurs groupes de pression. Comme je l'ai dit au début, je n'ai pas l'intention de prendre les arguments de chaque groupe de pression un par un pour essayer de les démolir ou de les contrer, mais plutôt de voir quels sont les intérêts des groupes représentés.

Vous avez entendu des gens qui font des levées de fonds et qui, souvent, essaient de prouver le bien-fondé de leur levée de fonds. Vous avez entendu des présentations scientifiques, tant par le ministère que par des représentants de l'industrie, et vous avez aussi entendu des représentations de gens qui ont à coeur la sauvegarde de l'environnement. Je pense que votre rôle ne sera pas facile. Vous devrez faire la juste part des choses. Nous sommes conscients que les décisions que vous allez prendre vont nous orienter. Nous allons voir quelle marge de manoeuvre il nous reste pour permettre à cette nouvelle industrie de continuer à se développer en harmonie avec l'environnement.

Il y a aussi toute la question génétique, qui n'a pas beaucoup été soulevée. On parle de l'échange des oeufs ou des alevins.

Je voudrais aussi vous faire prendre conscience que dans ce secteur-là, le Canada est actuellement partie à une entente internationale. Malheureusement, plusieurs des pays qui ont signé cette entente ne la respectent pas, mais il faut aussi être conscient que tous les secteurs d'activité agricole, que ce soit au niveau des chevaux, des vaches, des chiens ou des cochons, ont toujours progressé par croisement d'espèces pour permettre le renforcement de races qui répondent aux besoins alimentaires de la population ou aux besoins génétiques. En effet, on cherche certaines particularités. Je dois vous dire d'emblée que cela ne sera pas différent au niveau des poissons.

Par exemple, au Chili, on a développé des saumons par croisement. On prend des oeufs d'Écosse et de la côte nord du Québec et on réussit à partir de là à produire des races qui sont plus résistantes aux changements de température et qui ont une croissance plus rapide.

Je sais que vous avez aussi parlé du rapport entre la nourriture et la production de viande. Dans le cas de la nourriture de boucherie, à peu près le seul animal qui ait un ratio de moins de 1:1 est l'autruche.

Au niveau des poissons, dans différentes cultures, selon la façon dont l'aquaculture se fait, on peut avoir des ratios de 3:1, c'est-à-dire trois kilos de nourriture pour un kilo de viande. Par contre, à plusieurs endroits, et c'est ce que cherchent à peu près tous les aquaculteurs, on se rapproche du niveau 1:1. J'ai même vu en France un élevage d'esturgeons où on avait atteint le rapport 0,9:1.

Il y a du progrès à faire. La recherche scientifique est très importante et deviendra de plus en plus importante. Pour les prochaines années, on veut miser sur une recherche de plus en plus approfondie et orientée.

Vous savez qu'il y a eu des maladies en aquaculture. Est-ce que ce sont les poissons sauvages qui ont donné la maladie aux poissons d'aquaculture? Je défie n'importe qui d'en faire la preuve. Il y a des maladies comme la tularémie, qui est transmise par les lièvres, et la rage, qui est transmise par les renards aux animaux domestiques. Le même phénomène se produit dans le secteur de l'aquaculture. Il y a des poissons malades dans la nature qui peuvent effectivement infester des poissons d'élevage. Cela existe même chez les humains. Le sida vient des chimpanzés; il ne vient pas de la communauté humaine.

Je pense qu'il faut avoir une vision assez globale et—excusez l'expression—ne pas trop fermer les choses hermétiquement à ce stade-ci.

Que puis-je vous dire pour terminer? Le Canada, il y a environ huit ans, était le plus grand exportateur de poisson au monde et, au moment où on se parle, il est quelque part entre la 17e et la 27e place.

• 1550

Il y a quelques semaines, je suis allé au marché de poissons de Londres à cinq heures le matin, et le préposé me disait qu'il y a huit ou dix ans, 50 p. 100 de tout le poisson qui se vendait là venait du Canada alors qu'actuellement, il y en a moins de 10 p. 100 qui vient du Canada, parce que des pays comme la Norvège, le Chili, la Grèce et l'Espagne envoient sur le marché leur production d'aquaculture.

Je suis entièrement d'accord avec vous qu'il faut être très prudent au niveau de l'environnement, et c'est ce qu'on fait. Le rôle du commissaire, au cours des prochains mois et des prochaines années, sera de travailler en étroite collaboration avec les provinces, l'industrie et le ministère pour voir où sont les problèmes et les solutions. On ne voudrait surtout pas, à ce moment-ci, se retrouver avec des réglementations hiérarchiques et dédoublées qui pourraient beaucoup plus nuire qu'aider. Quand les producteurs se retrouvent dans une anarchie réglementaire, ils ont plus de liberté que lorsqu'il y a une réglementation simple et bien encadrée.

Je m'arrête ici pour le moment. M. Bastien pourrait peut-être compléter.

M. Yves Bastien (commissaire à l'aquaculture, Pêches et Océans Canada): Non, je pense qu'on peut répondre à des questions.

M. Gilbert Normand: S'il y a des gens qui ont des questions, ça nous fera plaisir d'y répondre.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Comme d'habitude,

[Traduction]

nous allons commencer par notre honorable collègue du Parti réformiste.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Merci, monsieur le président.

Bienvenue, et merci pour votre exposé. Nous avons entendu des points de vue sur la question qui étaient tout à fait opposés les uns aux autres; alors c'est bien d'avoir d'autres commentaires à ce sujet.

Dans le document que vous nous avez fait distribuer, vous parlez d'études que vous êtes en train d'effectuer et de fonds qui sont consacrés à certains des problèmes dont on nous a parlé, notamment l'effet des médicaments et des pesticides qui sont utilisés en aquaculture. J'imagine qu'on parle davantage d'aquaculture dans les océans sur la côte.

Nous avons entendu des opinions divergentes quant au degré de gravité de la question, s'il y a effectivement un problème lié à cette question, et sur les conséquences de l'utilisation de ces produits pour la faune, particulièrement pour tout ce qui vit au fond de l'océan. S'agit-il d'études permanentes? Existe-t-il de bonnes données précises dont on ne nous a pas encore parlé concernant les conséquences de l'utilisation des pesticides pour les puces de mer?

[Français]

M. Gilbert Normand: Pour ce qui est de l'impact, on ne peut pas le connaître entièrement à l'avance. C'est impossible. Certaines choses ont été faites dont on connaît les impacts. Je peux vous donner un exemple. Des antibiotiques qui ont été utilisés à un moment donné ont été fatals pour un élevage d'homards à proximité. On l'a appris au moment où c'est arrivé. Il est toujours difficile de tout prévoir dans ce secteur-là, comme dans le secteur humain. Je n'ai qu'à vous donner l'exemple de la saga des transfusions sanguines. Si les gens avaient connu, il y a 15 ans, les conséquences de ce qui se passait, ils auraient... Scientifiquement, il est impossible de tout prévoir à l'avance. On ne peut pas prévoir l'imprévisible, mais on peut au moins essayer de prévoir le prévisible, et la recherche est indispensable dans ce secteur pour en connaître le plus possible.

Il y a des antibiotiques qui sont utilisés, mais je ne pense pas qu'ils soient utilisés à des dosages aussi élevés qu'on veut le laisser croire, premièrement. En mariculture, on utilise beaucoup plus des antiseptiques que des antibiotiques. Je sais qu'il y en a qui ont été utilisés, mais il existe déjà une réglementation très stricte là-dessus à l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Je ne vois pas ce qu'une réglementation supplémentaire pourrait ajouter à cela. Cependant, on pourrait demander à l'agence d'être plus vigilante à cet égard. Je ne sais pas si M. Bastien veut ajouter quelque chose là-dessus.

• 1555

M. Yves Bastien: Je peux ajouter un complément d'information.

Lors des débats auxquels j'ai assisté ici comme simple auditeur, on a parlé à un moment donné de l'application des lois existantes. On a demandé si les lois actuelles du Canada, et il y en a une série dont je pourrais vous parler, étaient mises en application. Cela a été un sujet de débat ici.

Je voudrais donner un complément d'information sur ce qui a été dit. On laissait entendre que ces lois et règlements n'étaient pas beaucoup mis en application. J'ai demandé des renseignements et je voudrais vous signaler que dans la dernière édition du Atlantic Fish Farming, le titre d'un article se lisait ainsi:

[Traduction]

«Ferme aquicole devant les tribunaux pour avoir utilisé des pesticides.»

[Français]

C'est un éleveur de saumon qui a utilisé un produit non légal. Il a été traîné en cour et il a été condamné à une amende.

J'ai aussi une lettre d'un senior project manager de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada, qui confirme que deux poursuites ont été intentées en vertu de la loi du Nouveau-Brunswick pour des actes illégaux.

Cela illustre le fait qu'il existe de la réglementation et que les moyens sont en place pour que cette réglementation soit appliquée dans les provinces et au Canada. Les agents qui travaillent dans les provinces ou qui relèvent de la Fonction publique canadienne peuvent appliquer des dispositions de la réglementation fédérale si l'administration leur en a été confiée. C'est très possible.

Je voulais simplement vous mentionner que cela existe et que les réglementations sont mises en application lorsque c'est nécessaire. Donc, je pense qu'il n'est pas nécessaire d'adopter de nouveaux règlements.

Cela ne veut pas dire que la situation est parfaite, mais s'il y a des problèmes de mise en application des réglementations qui existent actuellement quelque part au Canada, il faut s'appliquer à trouver les moyens de mettre en oeuvre correctement ce qui existe plutôt que de créer des nouvelles réglementations qui seraient, à mon point de vue, redondantes.

[Traduction]

M. Rick Casson: Quelques questions, je suppose. D'abord, au sujet de la quantité de poisson que l'on sort de l'océan pour l'utiliser comme nourriture en aquaculture. Vous avez parlé du rapport entre la nourriture et la production de viande, et je pense que le poisson a l'un des meilleurs ratios. Vous avez parlé du bison dans les Prairies et de tout ce genre de choses par le passé, mais si on a sorti le poisson naturel des océans dans une large mesure, pourquoi n'est-il pas possible d'utiliser la source de nourriture qu'ils avaient? Je suppose qu'en faisant cela, cela aurait un effet sur la reconstitution des stocks.

Par ailleurs, pour ce qui est de l'argent que l'on dépense pour la R-D de l'aquaculture, vous parlez d'un énorme potentiel d'expansion et de toutes les espèces différentes qui pourraient être utilisées. Je ne sais pas si vous voulez faire des observations à ce sujet, mais j'aimerais savoir quels sont les avantages que cela présente plutôt que de rétablir ce que nous avions à l'origine: le fait que la meilleure solution à cette pénurie de poisson est de remplacer les stocks naturels. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet? C'est une question qui m'intéresse personnellement.

[Français]

M. Gilbert Normand: À mon avis, il faut faire les deux. Je pense qu'il faut absolument faire les deux.

L'industrie de l'aquaculture, pour suffire à la demande canadienne, pourrait occuper environ 1 p. 100 du territoire des berges. Comme on a 6 400 kilomètres de berges, cela voudrait dire qu'environ 64 kilomètres de berges serviraient à la mariculture. Mais il y a d'autres façons de faire de l'aquaculture. On peut faire de l'aquaculture en bassin, complètement à l'intérieur des terres. À plusieurs endroits où on fait de l'aquaculture d'espèces d'eau salée, on produit soi-même son eau salée et on recycle continuellement cette eau. Et on n'est même pas au bord de la mer.

Pour ce qui est de reconstituer les stocks, je suis entièrement d'accord avec vous.

• 1600

J'ai lu entre autres, à un moment donné, qu'on avait fait certaines comparaisons et qu'on avait découvert que les élevages de saumon à Vancouver produisaient autant de fèces que 500 000 personnes.

Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais au cours des huit dernières années, le nombre de phoques dans l'océan Atlantique, principalement dans la partie du Labrador, est passé de 2 à 6,4 millions. Si on calcule qu'un phoque produit quatre fois plus de fèces qu'un humain, cela veut dire que le troupeau, à lui seul, est pire que toute la population canadienne. Donc, il faut faire attention quand on fait de telles comparaisons.

[Traduction]

M. Rick Casson: Merci.

Le président: Merci, monsieur Casson.

[Français]

Madame Girard-Bujold, s'il vous plaît.

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Bienvenue, monsieur le ministre. Vous savez que je représente le Bloc québécois. Je suis une députée du Québec, comme vous, je pense. Vous savez que le Québec s'est doté d'une politique en matière d'aquaculture et vous savez également qu'il y a des ententes fédérales-provinciales vraiment globales qui font en sorte que les gens ne se pilent pas sur les pieds.

Nous avons entendu des représentants de l'industrie et des gens qui contestent ce que les industriels nous ont dit. Il y a des environnementalistes qui sont venus nous voir. Ils nous ont fait part de choses aberrantes. Je ne suis pas une spécialiste de cela et je me fie à peu près aux gens qui semblent avoir du bon sens. Ils nous ont aussi parlé des médicaments ainsi que des déchets qui se retrouvent dans le fond marin. Ils nous ont parlé de plusieurs choses qui m'ont inquiétée.

L'industrie est actuellement en croissance phénoménale. Même les gens de l'industrie disent qu'il va falloir que les règlements changent. Ils ne sont plus adaptés à ce qu'ils vivent aujourd'hui. Ces règlements ont été faits en fonction des pêches, dans le cadre de la stratégie des pêches.

Il ne faut pas minimiser les choses, mais il serait peut-être temps de remettre de l'ordre dans nos règlements pour les rendre actuels et pour faire en sorte qu'autant les environnementalistes que l'industrie puissent progresser.

Je ne rejetterais pas du revers de la main ce qu'ils nous ont dit. Je pense que cela donne à M. le commissaire à l'aquaculture un bon champ qu'il va pouvoir exploiter avec les provinces. Je n'ai pas pu assister à tout votre exposé, mais je suis contente de constater que vous travaillez toujours de concert avec les provinces. C'est un moyen qu'on peut se donner pour faire avancer l'industrie.

Je ne voudrais pas que vous minimisiez la version des environnementalistes qui sont venus nous voir. J'ai toujours dit qu'il fallait donner la possibilité... Comme vous le dites, on pourra de moins en moins aller en mer pour s'approvisionner en poisson. Il va falloir que l'aquaculture prenne la place de cela, mais il va aussi falloir faire en sorte que ce soit fait dans un environnement sain et que cela permette l'exportation.

Je suis contente d'avoir entendu votre discours, mais je vais vous surveiller de près, ainsi que votre commissaire à l'aquaculture.

M. Gilbert Normand: Je vous remercie. Je pense que vous avez entièrement raison.

D'abord, je vais vous dire que je ne me présente pas comme un environnementaliste. Je suis médecin de formation. J'ai pratiqué la médecine durant 20 ans. J'ai aussi été maire durant huit ans. Avec M. Lincoln, du temps qu'il était ministre de l'Environnement, j'ai été le premier maire du Québec assigné avec son gouvernement aux travaux d'assainissement des eaux.

J'ai aussi été l'un des premiers maires au Québec à permettre la fluoration de l'eau, qui était très controversée à ce moment-là. Je peux vous dire qu'un rapport qui a été publié l'an passé, 10 ans plus tard, indique que 60 p. 100 des jeunes de la communauté où je vivais ont moins de caries que ceux des municipalités avoisinantes. C'est sûr et certain qu'il y a des pour et des contre.

En ce qui a trait au travail du commissaire, une des priorités de la prochaine année sera de travailler en étroite collaboration avec les provinces et avec l'industrie, et de faire une révision de la réglementation pour l'adapter aux lois environnementales et aux besoins de l'industrie. Il s'agit de faire un peu de déblayage et un peu de ménage, pas nécessairement pour assouplir les lois et être plus laxiste, mais pour qu'on ait une réglementation qui soit beaucoup plus facile à suivre et à appliquer.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Merci.

• 1605

Le président: Merci, madame Girard-Bujold.

[Traduction]

Monsieur Herron.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): J'ai une question au sujet de quelque chose que j'ai entendu l'autre jour. Les Israéliens font un peu d'aquaculture sur terre. Pouvez-vous nous parler davantage de cette technologie? Peut-elle être adaptée à la salmoniculture?

[Français]

M. Gilbert Normand: Écoutez, au cours de ma visite, je n'ai pas pris connaissance de tout ce qui se fait en Israël. Par contre, je puis vous parler de ce que j'ai vu lors d'une visite en Floride, il y a à peine deux semaines, à Fort Pierce plus précisément. On y pratique l'aquaculture en eau salée, et l'eau salée dont on se sert est complètement artificielle. Tout se fait dans des bassins grâce à un système de régénération. On fait même actuellement l'expérience de la culture hydroponique des légumes à partir des déchets de l'aquaculture.

C'est pourquoi je vous dis qu'il existe un potentiel extraordinaire et que je suis convaincu pour ma part que l'aquaculture va de plus en plus se démarquer des pêches comme telles pour prendre une orientation qui ressemble beaucoup plus à celle de l'agriculture.

M. Yves Bastien: Je peux donner un complément d'information, si vous le voulez.

M. Gilbert Normand: Oui.

Le président: Merci, monsieur Herron.

Monsieur Charbonneau.

M. Gilbert Normand: Je pense que M. Bastien voulait ajouter quelque chose.

Le président: Je m'excuse, monsieur Bastien.

M. Yves Bastien: Ce ne sera pas long. C'est seulement un complément d'information en réponse à la question de M. Herron. C'est que l'aquaculture sur terre, land-based aquaculture, est une possibilité qui a été énormément expérimentée partout dans le monde, que ce soit en Norvège, au Japon particulièrement ou même en Amérique du Nord, au cours des années 1980 à 1990. Il y a eu beaucoup de tentatives pour développer de très gros projets d'élevage de saumons sur terre avec de l'eau pompée, ce qui permettait évidemment un meilleur contrôle sur les paramètres d'élevage, sur les rejets dans l'environnement, etc.

Ces projets ont tous fait faillite, finalement, pour une simple raison: le déséquilibre entre le prix de vente du saumon et son coût de production a fait en sorte qu'il n'y avait pas de profit à faire avec cette technologie. Lorsque les projets avaient démarré, le prix du saumon était très élevé. Par la suite, à cause de l'explosion de la production mondiale de saumon, on a connu une baisse régulière du prix. À moins de 5 $ la livre pour le saumon de l'Atlantique, en dollars canadiens, ces projets-là n'étaient plus rentables et sont donc tombés à l'eau.

Actuellement, on voit renaître ce genre de projets parce que la technologie a évolué. Entre autres, le Japon est en train de démontrer qu'il y aurait peut-être moyen de produire grâce à ces nouvelles technologies tout en conservant une certaine rentabilité financière. Cependant, c'est toujours une question d'équilibre entre le coût de production et le prix auquel vous pouvez vendre votre poisson. Cela s'applique également à toute autre espèce, pas seulement au saumon.

Les aquaculteurs en général aimeraient s'éloigner du milieu marin et des risques qui y sont reliés. On pense aux tempêtes, par exemple. Idéalement, ils aimeraient mieux produire dans un environnement complètement contrôlé, c'est-à-dire avoir le contrôle de tous leurs intrants, de tous les produits requis par l'élevage, et de toutes les conditions d'élevage. Cela peut fonctionner en autant que l'équilibre soit maintenu, que le processus soit rentable financièrement et qu'il soit possible de faire des profits.

D'autres développements voient le jour actuellement. Il existe des élevages en cage en milieu naturel. Ce sont des enclos plus fermés encore que des cages. Cela se développe en ce moment au Canada. On fait beaucoup de recherche dans ce domaine. Il est possible que cela devienne la technologie de l'avenir. Pour l'instant, toutefois, on ne saurait dire si ce sera rentable financièrement. Donc, on continue de pratiquer l'élevage selon les techniques traditionnelles, qui seront toujours moins coûteuses.

Les gouvernements travaillent principalement sur des technologies ou sur des codes régissant les pratiques, sur des réglementations qui vont permettre de limiter les impacts sur l'environnement. Ce sont des choses qui s'en viennent et qui, possiblement, pourraient remplacer les technologies actuelles un jour.

Le président: Merci, monsieur Herron.

Monsieur Charbonneau.

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le président, ma première question s'adresse à M. le secrétaire d'État. Elle porte sur l'orientation de cette industrie et fait suite à ce que vient de soulever le commissaire.

• 1610

Nous avons entendu ici une fondation nous dire:

    En Colombie-Britannique, la salmoniculture relève d'un modèle industriel de production intensive, et se fait au détriment de l'environnement naturel des régions où elle se pratique. Ce type d'aquaculture diffère totalement de celui pratiqué dans la plupart des pays du monde. Quatre-vingt-quinze pour cent de l'aquaculture mondiale produit en étang des poissons non carnivores, pour les marchés locaux. La plupart des étangs s'intègrent de façon écologique au milieu agricole, industriel et communautaire; ainsi, les déchets deviennent des engrais plutôt que des polluants.

J'ai entendu l'exposé du commissaire, et je vois ici, dans la Stratégie fédérale de développement de l'aquaculture que le développement de cette industrie est, pour le gouvernement fédéral, une priorité qui ferait l'objet d'une attention particulière tant sur le plan politique que sur celui des activités de développement, et que le gouvernement devrait établir un climat où l'aquaculture pourra prospérer.

Le principe numéro 4 est qu'on doit satisfaire aux exigences de compétitivité de l'industrie sur le marché national et international.

Au principe numéro 5, on dit que le développement de l'aquaculture doit être compatible avec les responsabilités du gouvernement, notamment la santé et la sécurité publique, la navigation et l'environnement.

Donc, votre principe numéro 4 concerne la compétitivité et votre principe numéro 5, l'environnement et la santé. Compte tenu de l'orientation que prend l'aquaculture au Canada, qui semble plutôt se faire en cages, sur des cours d'eau ou dans des baies plutôt que dans des étangs, avez-vous l'intention d'orienter le développement vers ce qui se fait dans 95 p. 100 des pays, c'est-à-dire l'aquaculture dans des étangs?

Vous en avez l'occasion. Nous en sommes aux débuts. Enfin, il en existe, mais nous sommes au début de la mise en oeuvre d'une stratégie. Avez-vous vraiment l'intention de vous orienter vers des pratiques considérées plus respectueuses de l'environnement et possiblement compétitives, grâce aux nouvelles technologies?

Si nous avons à être compétitifs par rapport à des pays qui ne respectent pas l'environnement ou y sont moins attentifs que le nôtre, cela nous coûtera toujours un peu plus cher. Il faut se préoccuper de la compétitivité, mais il faut aussi tenir compte de la qualité de l'environnement.

M. Gilbert Normand: Vous avez soulevé plusieurs points, monsieur Charbonneau.

D'abord, la fondation dont vous avez parlé à propos de la Colombie-Britannique doit sûrement être la Fondation David-Suzuki. Personnellement, je leur ai écrit à trois reprises au cours de la dernière année pour leur demander de les rencontrer. On m'a toujours répondu qu'on n'était pas prêt. Ils se préparaient probablement à venir vous rencontrer, la semaine dernière.

Cela dit, ce qui se fait actuellement en Colombie-Britannique se fait dans plusieurs autres pays, notamment au Chili où le développement s'effectue à l'aide d'une technologie canadienne. D'ailleurs, pratiquement 90 p. 100 de l'équipement utilisé au Chili est de provenance canadienne.

Je peux vous dire que l'industrie chilienne a elle aussi ses normes. Quand on parle de compétitivité de l'industrie, cela va de pair avec une assurance de la qualité parce que les industries qui ne se soucient pas de la qualité de leurs animaux et de la salubrité de leurs produits ne peuvent pas être compétitives. Si on veut que les produits arrivent salubres sur le marché, et que les poissons soient en bonne santé...

Une industrie qui perdrait 15, 20 ou 30 p. 100 de sa production ne pourrait pas être rentable. Plus ça va, plus les gens raffinent leurs techniques pour justement avoir le moins de pertes possible, à partir des oeufs jusqu'à ce que l'animal soit prêt pour l'abattage.

En Colombie-Britannique, on a développé des technologies éprouvées. Je le sais pour avoir visité personnellement plusieurs sites, au moins à trois reprises, dont certains par avion sur des îles. On atteint un ratio de près de 1:1 dans plusieurs élevages en Colombie-Britannique. On a même des industries, en Colombie-Britannique, qui ont fait construire des bateaux où les poissons sont pris dans des cages et amenés vivants à l'usine. Entre le moment où le poisson est pris vivant et le moment où il sort dans la boîte à l'autre bout, il s'écoule neuf minutes. Il n'a donc pas beaucoup le temps d'être contaminé. Et le traitement des eaux est fait, etc.

• 1615

Je ne prétends pas qu'il n'existe pas d'endroits où les choses ne se passent pas correctement, mais actuellement, la mariculture est l'élevage le plus rentable.

Pour prévenir la dispersion des aliments, la plupart du temps ou plutôt dans presque tous les cas, les pêcheurs utilisent des filets munis de cônes à la base qui servent à récupérer la nourriture que les poissons n'ont pas ingurgitée, et cette nourriture est rapportée à la surface. Tout est contrôlé de façon électronique selon le poids, à l'once près. Tout est informatisé, et on est capable de connaître le ratio de la croissance des poissons dans un bassin par rapport à la nourriture qui leur est donnée.

Si vous ne l'avez jamais fait, je vous conseille d'aller visiter un jour ces endroits. Du simple point de vue de l'intérêt scientifique et technologique, c'est fantastique.

Cependant, il est sûr et certain qu'il faudra développer d'autres méthodes. Au Portugal, actuellement, on est en train de subventionner à 60 p. 100—45 p. 100 par la Communauté européenne et 15 p. 100 par le pays même—la transformation des anciens marais salants en sites d'aquaculture. Ce sont d'énormes marais où la marée vient changer l'eau deux fois par jour. On fait de l'aquaculture dans ces bassins. Une fois que les poissons ont atteint leur taille maximale et sont prêts pour l'abattage, on vide complètement l'eau des bassins, on nettoie les résidus dans le fond avec des tracteurs et on les envoie pour être traités.

Donc, tous les pays s'organisent actuellement en fonction de leur environnement. Le nôtre est spécial; ici, au Canada, on parle d'eau froide. Près de la Colombie-Britannique, l'eau est tempérée, mais ailleurs au pays, ce sont des poissons d'eau froide que nous pouvons élever.

Les conditions ne sont pas faciles, comme le signalait M. Bastien. Les éleveurs essaient d'avoir des conditions climatiques idéales, d'éviter les tempêtes et aussi d'avoir des conditions environnementales idéales. Un idéal est une chose qu'il faut toujours viser mais qu'on n'atteint pas nécessairement du premier coup. Cela peut prendre beaucoup de recherche.

C'est surtout là-dessus que le gouvernement canadien veut mettre l'accent. C'est principalement sur la recherche, comme on le fait d'ailleurs en agriculture, où on a des programmes à frais partagés avec l'industrie, par lesquels le gouvernement aide l'industrie. D'ailleurs, selon les traités comme celui de l'ALENA, c'est à peu près de cette seule façon qu'on peut aider l'industrie.

M. Yvon Charbonneau: J'ai une deuxième question, monsieur le président.

Je retiens de votre réponse que les perspectives de développement que vous entrevoyez vont vous permettre, selon vos hypothèses, de concilier les besoins de la compétitivité et le respect de l'environnement parce que c'est à la condition de bien respecter l'environnement et de produire des poissons de qualité que vous allez être compétitifs.

Dans la stratégie fédérale, il y a un volet qui s'appelle le Plan stratégique. À la section 6.5 de ce plan, vous dites:

    Par conséquent, pour que l'industrie se développe de manière viable, les aquaculteurs doivent observer des normes environnementales strictes.

Et vous ajoutez:

    Aquaculteurs et environnementalistes sont des alliés naturels dans leur lutte pour protéger l'environnement aquatique.

On dit que ce sont des «alliés naturels», mais dans la pratique, il y a encore quelques zones de brouillard à dissiper pour que ces alliances se concrétisent.

Plus loin, vous dites: «Le gouvernement fédéral s'engage à...». Suit une série de cinq ou six engagements, dont «un cadre réglementaire stratégique souple et efficace», «des codes de conduite», travailler dans le sens du développement durable et «élaborer un cadre systématique pour des évaluations des incidences environnementales, des modèles d'évaluation des risques et des évaluations de catégorie en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.»

J'ai une certaine expérience personnelle des relations qui ont eu cours ou qui ont encore cours entre environnementalistes et entreprises, par exemple dans la gestion des déchets domestiques, industriels ou dangereux.

• 1620

En principe, cela devrait concorder parce que vous êtes des alliés. En pratique, il y a beaucoup de frictions. Lorsqu'une entreprise en gestion de déchets dangereux, par exemple, veut implanter une technologie quelconque sur un site donné, on voit souvent une manifestation d'incompréhension, une levée de boucliers. Il y a beaucoup de discussions et de frictions, et beaucoup de projets technologiques très valables sont retirés parce que la communauté les rejette.

Je voudrais vous demander si vous croyez en la mise en place d'un processus d'évaluation de l'impact, avec audiences publiques, quand un promoteur veut choisir un site x, y ou z pour son entreprise. Ne croyez-vous pas que la mise en place d'une procédure d'évaluation d'impact, avec audiences publiques, serait la façon de résoudre cette opposition possible entre aquaculteurs et environnementalistes pour les amener à devenir de véritables alliés et pas seulement des alliés de principe?

Par quel moyen comptons-nous arriver à établir une telle alliance? Je vous en suggère un. Je ne sais pas s'il vous est acceptable ou si vous en avez d'autres à l'esprit.

M. Gilbert Normand: Je vais apporter une réponse partielle à votre question et je la laisserai compléter ensuite par M. Bastien.

Sur votre premier point, concernant le fait que les environnementalistes et les aquaculteurs soient des alliés, je réponds oui sans hésiter pour la simple et bonne raison qu'il est impossible de produire des poissons ou des mollusques dans une eau contaminée. Un des plus beaux exemples que j'en ai eu, c'est en France, dans le département de Charente-Maritime, où on produit à peu près 95 p. 100 des huîtres consommées en Europe. Il y a là un institut qui fait vérifier la qualité de l'eau quotidiennement. Ce même institut est capable de faire arrêter la vente ou la récolte des mollusques pendant une période de temps, quand l'eau n'est pas saine.

Nos éleveurs les plus avancés actuellement sont obligés de vérifier régulièrement la qualité de leur eau, tant pour la teneur en certains métaux lourds qu'au niveau de l'oxygène, etc.

Il est sûr et certain que les études d'impact seraient beaucoup plus profitables à l'éleveur qu'au reste des personnes parce que le gars qui va s'installer sur un site donné doit être certain que ce site n'est pas pollué. L'étude d'impact que vous souhaitez, de l'impact réel qui démontrerait si l'aquaculture est polluante ou pas, devra se faire après qu'il sera installé.

M. Yvon Charbonneau: C'est-à-dire qu'il y a quand même des règles qu'on peut prévoir. D'ailleurs, le gouvernement fédéral semble s'engager à en élaborer. Il dit qu'il s'engage à «élaborer un cadre systématique pour des évaluations». Il y aura donc des règles qui seront établies en se fondant sur l'expérience et les observations qui peuvent être faites de gauche à droite. Il y a quand même moyen de mettre en place une grille d'évaluation.

Bien sûr, il faut évaluer en continu une entreprise qui est déjà en exploitation. Toutefois, avant même qu'elle ne s'implante dans un milieu, il y a possibilité de frictions entre cette entreprise et le milieu d'accueil. C'est là, comme on dit, que «la chicane pogne».

En tout cas, dans d'autres domaines industriels ou de gestion environnementale, la résistance du milieu devient telle que le projet n'est même pas implanté. Une étude d'impact permet de rassurer les uns et les autres, de voir ce qu'il en est, de choisir le meilleur site et de rassurer la population, de rassurer tous les gens qui ont des interrogations. Ensuite, le succès de l'entreprise est possible. À ce moment-là, l'alliance naturelle dont vous parlez devient une alliance concrète.

La procédure généralement utilisée en environnement est de mettre les cartes sur table; on fait faire une étude et on scrute l'étude. Les parties viennent comparaître et faire leurs commentaires sur cette étude. Ensuite, le comité chargé de rendre compte se fait une idée et fait une recommandation. En général, cela apaise les craintes ou les confirme si le projet ne doit pas être implanté à tel endroit.

Ne croyez-vous pas qu'une telle approche pourrait être positive, même pour l'entreprise? Le but n'est pas d'empêcher les projets, mais de s'assurer qu'ils se fassent dans des conditions d'efficacité complète, et du point de vue environnemental et du point de vue économique.

M. Gilbert Normand: Écoutez, c'est fort possible. Maintenant, est-il possible d'établir une procédure qui ne prenne pas des années? Probablement.

• 1625

Je voudrais vous raconter une petite anecdote. L'an dernier, le ministère de l'Environnement a voulu cesser de faire lui-même les prélèvements d'eau dans les eaux des aquacultures. Actuellement, c'est lui qui les fait et qui les contrôle. Il voulait que ce soit les producteurs qui les fassent et paient les laboratoires. Remarquez qu'il y avait deux buts à cela; c'était un montant de 200 000 $.

J'ai personnellement demandé à la ministre de continuer à le faire à la demande des producteurs. S'ils n'avaient pas voulu de ce contrôle de l'environnement, il auraient été joliment contents de voir le ministère de l'Environnement se désister de cette fonction. Ce n'était pas seulement une question d'argent; je pense qu'eux-mêmes tenaient à ce que le ministère de l'Environnement continue à s'occuper du contrôle de la qualité des eaux dans lesquelles ils élèvent leurs poissons.

Je vais laisser M. Bastien répondre plus en détail.

M. Yvon Charbonneau: Je parle en particulier de l'implantation. En anglais, ils appellent ça le siting, le choix d'un emplacement. C'est là que le torchon brûle souvent. C'est là que se produisent les premières mésententes. Bien sûr, pour le monitoring en continu de l'exploitation, tout le monde s'entend assez facilement sur le choix des mécanismes. Mais le choix d'un site, au point de départ, est-ce qu'il y a moyen de mettre ça...

M. Gilbert Normand: Actuellement, cela relève des provinces.

M. Yves Bastien: Le problème est que c'est imprécis. C'est rattaché très spécifiquement au site en question. Donc, c'est souvent par des programmes de monitoring mis en place par le gouvernement fédéral et les provinces que vous pouvez assurer le suivi des paramètres environnementaux sous les cages et autour des cages. Cela existe. C'est déjà en place.

Si jamais la Colombie-Britannique levait son moratoire, ce qu'on ne sait pas encore, il y a déjà un projet pour assurer le monitoring de tous les nouveaux sites qui vont être autorisés pour s'assurer qu'il n'y aura aucune transgression des normes existantes, tant fédérales que provinciales. C'est en place au Nouveau-Brunswick et ce le sera en Colombie-Britannique.

De plus, le gouvernement fédéral assure des suivis. On a eu des témoignages de Pêches et Océans Canada ici, cette semaine, qui ont démontré que des recherches sérieuses avaient été faites sur ces impacts. Finalement, d'autres études ont également démontré que les impacts, de façon globale, étaient jusqu'à présent somme toute mineurs. Mais cela existe. On n'est pas dans une situation où il n'existe pas de réglementation; c'est présent.

Quant à l'étude d'impact qui précéderait un projet, elle a une valeur théorique, parce qu'on ne sait pas exactement quelle sera la réaction d'un site donné. Si vous avez un site bien drainé, où il y a beaucoup d'échanges, beaucoup de courants marins, le problème de la toxicité sera très différent. Certains témoignages entendus ici, entre autres celui de M. Doubleday, ont démontré que la charge biologique créée sur l'environnement par la nourriture et les fèces est inférieure à la charge naturelle produite par ces milieux. Mais cela dépend toujours de chaque site particulier.

En 1983, j'ai visité un site en Norvège qui était dans un fjord assez fermé. Ce site est en train de s'autopolluer. Ce n'est pas le gouvernement qui a changé la situation. Ce sont carrément les producteurs qui se sont rendu compte qu'ils étaient installés sur un site qui n'avait aucun échange avec l'océan. Le gouvernement n'avait émis aucune norme à ce moment-là. Ce sont les producteurs eux-mêmes qui ont fait découvrir que certains sites sont problématiques.

C'est donc souvent par un monitoring sérieux, effectué à partir du moment où l'entreprise s'installe, ce qui existe actuellement, que vous allez régler le problème plutôt que par une étude d'impact préliminaire.

M. Yvon Charbonneau: J'aimerais bien que vous examiniez la question que je pose au lieu de vous contenter de donner une réponse que vous avez déjà en tête par rapport à un autre aspect.

Je vous parle de l'implantation. Vous me dites que vous allez examiner les choses en continu et qu'il n'y aura pas de problème. Nous nous entendons bien; cela sera mis en place et il y aura sans doute un comité chargé de l'examen des résultats. Les parties et la communauté participeront au débat. Je parle de l'implantation. Je prends l'exemple de la gestion des déchets, de l'implantation d'un site d'enfouissement ou de l'utilisation d'un incinérateur ou d'autres formes de technologies, de cellules, etc. Les promoteurs disent comme vous qu'ils vont suivre les opérations à la trace et qu'ils feront des rapports, que le ministère de l'Environnement aura son mot à dire, ainsi qu'un comité représentant la municipalité, et qu'ils vont suivre cela de près. Ils garantissent avoir la meilleure technologie qui peut faire état d'une teneur de tant de parties par million, qu'il n'y a pas de problème. Mais avant que cela soit mis en place, qu'il s'agisse d'une cellule, d'une cheminée ou de quoi que ce soit d'autre, au moment du choix du site, il y a des gens autour de ce site. Comme vous le dites, chaque site est particulier. C'est cela qui justifie de l'étudier.

• 1630

Vous dites que c'est théorique. Les gens qui réagissent aux propositions d'implantation d'un équipement d'élimination de déchets pourraient dire la même chose. À quoi servirait-il de l'étudier? On verra après. On va assurer le suivi. Si vous voulez réconcilier l'environnement autour de vous—par environnement, j'entends les intervenants, les municipalités, les environnementalistes, tous ceux qui ont un mot à dire, les investisseurs possibles, etc.—, si vous voulez qu'ils acceptent votre projet, c'est avant qu'il faut leur parler. C'est au moment où vous faites votre proposition.

S'il se présente 10 sites dans la même région, sur une longueur d'un mille, il se pose peut-être un problème de plus. S'il y en a un seul, à une distance de 10 milles d'un autre, c'est une autre affaire. Et s'il y a des effluves, du lessivage, etc... Il faut étudier cela avant.

C'est la même chose dans le cas d'un incinérateur. On regarde comment se constituent les panaches, comment se distribuent les fumées, où elles s'en vont, dans quel circuit elles s'infiltrent, etc. Cela s'étudie avant. On n'attend pas d'installer l'incinérateur et sa cheminée pour commencer à calculer comment cela va aller. On le fait avant.

Je vous demande donc si vous êtes ouvert à l'idée d'une procédure qui vous permettrait d'examiner un projet conjointement avec le milieu, au moment du choix du site. Je vous le dis parce que je trouve que c'est un excellent moyen de faire réussir les projets, de leur donner un chance de ne pas échouer. Si vous en connaissez de meilleurs, je voudrais que vous nous en fassiez part. Ma question n'a pas pour but de fournir une recette de l'échec, mais de trouver une recette pour que cela marche.

M. Gilbert Normand: D'abord, je suis forcé de vous dire qu'actuellement, sauf dans le cas de l'Île-du-Prince-Édouard, cela relève des provinces.

En deuxième lieu, je pense que vous avez raison; effectivement, cela vaut la peine que les impacts soient étudiés. Il n'y a pas que l'impact sur les eaux. Il y a aussi l'occupation des lieux. Parfois, les baigneurs ou les amateurs de seadoo peuvent s'accrocher dans les cages. Actuellement, ce sont les provinces qui le font.

Maintenant, en Colombie-Britanniques, des recommandations allant à peu près dans le sens de ce que vous dites ont été faites. Je vois pas d'objection à cela. Actuellement, le seul endroit où le fédéral émet les permis est l'Île-du-Prince-Édouard. Partout ailleurs, ce sont les provinces qui émettent les permis.

M. Yves Bastien: Les provinces ont implanté parfois des procédures très complexes. Ce sont des procédures avec audiences publiques. Tous les partenaires ont leur mot à dire avant que l'opération s'implante. C'est en place au Canada, dans les provinces.

M. Yvon Charbonneau: Merci. Je pense que c'est une voie à suivre si on veut le succès de ce qui fait l'objet du point numéro 1 de votre politique. Cela devient une priorité du gouvernement, etc. On veut que ce soit un succès, mais il y a des moyens éprouvés à employer qui conditionnent l'échec ou le succès.

M. Yves Bastien: Vous avez absolument raison.

Le président: Merci, monsieur Charbonneau. Je vais entreprendre un deuxième tour en posant moi-même quelques questions.

Monsieur le ministre, dans votre discours d'ouverture, vous avez parlé de la collaboration entre l'industrie et les provinces. Vous n'avez pas mentionné les organismes non gouvernementaux. Y a-t-il des raisons pour lesquelles vous n'avez pas mentionné les ONG?

M. Gilbert Normand: Non. C'est simplement un oubli.

Le président: Mes questions porteront d'abord sur le plan stratégique dont il est question à la page 11 du texte anglais. Il comporte 12 composantes. Elles sont sans doute toutes très importantes. Cependant, on n'y mentionne pas la prévention de la pollution. Dans tout le texte de la stratégie, j'ai trouvé une seule référence au mot «pollution», à la page 13 du texte anglais, dans la section 5, où il est question de coastal pollution. Je me demande comment on peut se doter d'une stratégie sans y inclure le souci de la prévention de la pollution.

• 1635

M. Gilbert Normand: J'ai la réponse.

Le président: Je vous reporte au paragraphe 6.4, qui parle de regulatory framework. Je parlerai dans l'autre langue officielle afin de donner aux interprètes la possibilité de faire une petite pause.

[Traduction]

J'ai du mal à croire que le secteur soit visé par plusieurs règlements qui n'ont pas été conçus initialement pour l'industrie et qui ont introduit des coûts nécessaires aux exploitants. Au cours des dernières séances, notre comité a appris qu'il n'existait pratiquement aucun règlement. C'est ce qui rend notre comité très nerveux.

Tout à coup, on lit ici qu'il existe un cadre réglementaire, ce qui donne l'impression que cette industrie est sous le coup d'un très lourd fardeau réglementaire qui pourrait affecter sa compétitivité sur le marché international. Eh bien, voyons un peu en quoi consiste ce fardeau réglementaire. Nous aimerions beaucoup savoir en quoi il consiste. Jusqu'à présent, nous n'avons pas pu le trouver.

Plus tôt, M. Bastien a parlé d'un code de pratique, et nous étions très heureux d'en entendre parler. Un peu plus tard, il a parlé d'un règlement qu'on était en train d'élaborer. J'aimerais savoir ce qu'il veut dire. Est-ce un règlement qui est en place ou est-ce un code de pratique, et si c'est le cas, depuis quand?

Toute cette stratégie est peut-être axée sur le développement—oui, nul doute, mais il ne s'agit certainement pas de développement durable au sens où on l'entend habituellement, car les considérations environnementales n'émergent pas dans cette stratégie. Je n'ai réussi à n'en trouver aucune, sauf, comme l'a déjà dit M. Charbonneau, au paragraphe 6.5. Dans ce paragraphe,

[Français]

on parle de pollution costale.

[Traduction]

Bien sûr, la pollution côtière nuit à l'aquaculture. Que va-t-on faire alors pour y remédier? Nous avons appris que les aquiculteurs et les écologistes étaient des alliés naturels qui cherchaient à protéger l'environnement aquatique. Ce sont de bonnes nouvelles. Nous ne le savions peut-être pas auparavant et nous sommes très heureux de l'apprendre.

Mais où retrouve-t-on ces considérations environnementales? Quels sont les éléments qui pourraient nous assurer que dans 10, 20 ou 30 ans nous ne regretterons pas la façon dont fonctionne cette industrie? Il est important que vous nous l'appreniez, comme vous nous avez appris, monsieur le ministre, que des études sont effectuées.

[Français]

Le ministère a fait des études scientifiques et a conclu que les impacts étaient aménageables.

[Traduction]

Nous aimerions beaucoup voir cette étude. Nous aimerions également voir les études dont vous parlez

[Français]

à la page 3 de votre aide-mémoire. Vous avez parlé de fonds spéciaux pour appuyer des activités de recherche. On aimerait connaître les sommes prévues, la nature de ces activités de recherche, ainsi que les conclusions des deuxième, troisième, quatrième et cinquième études, c'est-à-dire l'étude sur l'impact environnemental des déchets chimiques et organiques, l'étude sur les mécanismes d'accumulation des déchets organiques, l'évaluation des protocoles pour faire le suivi des impacts environnementaux et l'évaluation de la toxicité aux organismes non visés. Ces documents pourraient s'avérer très importants et très utiles pour nous dans le cadre de notre étude.

En terminant, j'aimerais porter à votre attention le fait que les membres du comité ont été informés qu'on utilise illégalement, sans permis, une substance chimique très forte et très dangereuse qui s'appelle l'ivermectine. On nous a également dit que l'industrie avait demandé la permission d'utiliser dans l'eau une autre substance très dangereuse qui s'appelle le cypermethrin. Nous aimerions savoir où en sont rendues leurs démarches.

• 1640

Est-ce qu'à la suite du mémoire d'entente auquel en étaient venus en 1985 le ministre de l'Environnement de l'époque et le ministre des Pêches et des Océans, la ministre de l'Environnement actuelle aurait le pouvoir de modifier les règlements de l'article 36 de la Loi sur les pêches? Pourrait-elle invoquer ce mémoire d'entente et annoncer des modifications sans l'approbation du ministre des Pêches et des Océans si elle jugeait nécessaire de prendre cette initiative? Si le ministre des Pêches et des Océans s'opposait à cette initiative, pourrait-il exercer un droit de veto face à une initiative de cette envergure de la part de la ministre de l'Environnement?

M. Gilbert Normand: Les questions que vous me posez sont d'ordre juridique. Vous cherchez à savoir si notre ministre peut accepter des règlements émanant du ministre de l'Environnement. Je ne saurais donner une réponse à une question aussi globale. Je vous dirai que cela dépend des règlements auxquels vous faites allusion. Je ne crois pas qu'au plan juridique, le ministre des Pêches et des Océans ait un droit de veto. Nous souhaitons qu'il y ait harmonisation entre les différentes réglementations.

Comme je le soulignais tout à l'heure, dans plusieurs pays, l'aquaculture relève désormais de l'agriculture plutôt que des pêches. Je ne vous cacherai pas que des discussions en ce sens ont déjà été amorcées ici.

Je ne saurais vous dire si le ministre des Pêches accepterait les règlements que proposerait la ministre de l'Environnement. J'espère au moins que ces règlements nous seront soumis avant d'être déposés.

Le président: Votre sous-ministre adjoint pourrait préparer un note d'information afin de répondre à cette question.

Nous aimerions aussi avoir une réponse au sujet des deux substances chimiques dangereuses et entendre M. Bastien nous parler d'un code de pratiques.

M. Gilbert Normand: J'aimerais savoir quels sont les dangers que posent ces deux substances.

Le président: Ils sont nocifs pour l'environnement aquatique.

M. Gilbert Normand: Pour qui ou pour quoi représentent-ils un danger?

Le président: Pour les poissons.

M. Gilbert Normand: Est-ce que ces substances les étourdissent ou les assomment?

Le président: On parle de substances très toxiques et très dangereuses pour l'écologie aquatique comme le cypermethrin et l'ivermectine.

M. Gilbert Normand: Leur toxicité dépend toujours du dosage. C'est un peu comme le fluor qui est bénéfique s'il est utilisé à bon escient, mais qui pourrait aussi être un produit toxique.

• 1645

Le président: Monsieur Bastien, avez-vous des commentaires à ce sujet?

M. Yves Bastien: Je ne suis pas un spécialiste et je ne connais pas bien ces substances. Nous pouvons prendre en note le nom de ces substances, faire des recherches et vous faire part des données que nous avons sur ces deux substances.

Le président: D'accord. Monsieur Bastien, est-ce que vous pouvez nous parler du code de pratiques?

M. Yves Bastien: Les codes de pratiques peuvent être mis en oeuvre de deux façons: par voie réglementaire ou de façon volontaire par l'industrie.

Le président: Est-ce qu'il y a un code de pratiques volontaire?

M. Yves Bastien: Cette industrie est quand même jeune et elle est en plein développement. Par exemple, les éleveurs de mollusques on tenté de développer un code de bonnes pratiques, mais ce n'est pas une chose qui se fait du jour au lendemain, qui peut voir le jour immédiatement. Il y a beaucoup de travail à faire.

Le président: Non, on n'a pas commencé hier, mais plutôt il y a 10, 15 ou 20 ans. Qu'entendez-vous par un code de pratiques? Est-ce un code volontaire ou non?

M. Yves Bastien: Cela dépendra des participants et de la façon dont évolueront les choses au cours des prochaines années.

Le président: Non, non, quand on parle d'un code, on parle d'une chose sérieuse. Quand le commissaire à l'aquaculture vient comparaître devant le comité et qu'il nous dit qu'il y a un code de pratiques, il devrait être en mesure de nous expliquer de quoi il s'agit.

M. Yves Bastien: Je vous donnerai deux exemples de l'application d'un code de pratiques qui auront des résultats complètement différents.

Vous pouvez mettre en pratique, par réglementation, un code de pratiques obligatoires, mais vous n'aurez jamais les moyens de mettre un policier derrière chaque vague marine pour faire respecter votre code. Vous pouvez faire une autre démarche, comme le font une foule d'industries, et convaincre les producteurs qu'ils ont avantage à développer de bonnes pratiques parce qu'ils respecteront l'environnement, éviteront d'avoir des problèmes avec les lois et connaîtront les bonnes pratiques à adopter dans une industrie particulière.

Le président: Est-ce que ce code est écrit?

M. Yves Bastien: Non.

Le président: Il n'y a pas de code? C'est seulement une expression théorique?

M. Yves Bastien: Il existe des règles régissant la surveillance des opérations aquacoles.

Le président: Pouvez-vous nous donner cette documentation?

M. Yves Bastien: Le ministère des Pêches et des Océans et les provinces respectent certains protocoles, et on pourrait les sortir. Il y a de la documentation là-dessus. Lorsque je parlais de code de bonnes pratiques, je voulais davantage parler d'initiatives volontaires émanant de l'industrie. Par exemple, les producteurs sont légalement responsables de la qualité de leurs produits. Si une personne tombe malade après avoir consommé un produit d'un aquaculteur, ce dernier en est, jusqu'à une certaine limite, légalement responsable. Il est bien évident qu'un aquaculteur aura tout intérêt à développer des pratiques qui feront en sorte qu'il évitera de tels problèmes lors de la mise en marché de ses produits. Le respect d'un tel code est donc avantageux à la fois pour le producteur et pour la société puisqu'il les protège.

Le président: Merci, monsieur Bastien. Est-ce que vous pourriez préciser les sommes que le ministère a allouées aux fonds spéciaux dont vous traitez à la troisième page de votre mémoire? De plus, pourriez-vous nous faire parvenir les quatre études que j'ai mentionnées auparavant?

M. Gilbert Normand: Oui, nous vous les ferons parvenir. Je cède la parole à M. Davis, qui vous parlera des fonds spéciaux.

[Traduction]

M. John Davis (sous-ministre adjoint, Sciences, ministère des Pêches et des Océans): Oui, monsieur le président, nous pouvons nous engager à vous donner une description détaillée de chacun de ces projets. Je sais qu'on a dépensé ou qu'on est en train de dépenser plusieurs millions de dollars pour ces projets, et nous pouvons vous fournir ces détails. Nous préparerons volontiers cela pour votre comité.

Le président: Monsieur Davis, puisque vous êtes responsable des sciences, pouvez-vous nous parler de l'ivermectine et de la cyperméthrine?

• 1650

M. John Davis: Oui. Ce sont des substances que l'on a utilisées ou que l'on envisage d'utiliser pour contrôler les organismes.

Le président: Pouvez-vous nous parler de chacune de ces substances?

M. John Davis: En fait, je ne suis pas un spécialiste de ces substances. Je préférerais vous donner un résumé détaillé par écrit lorsque j'aurai eu l'occasion d'examiner la question de plus près. Je ne me sentirais vraiment pas à l'aise d'essayer de vous donner une réponse complète maintenant.

Le président: Avez-vous déjà entendu ces noms?

M. John Davis: Oui.

Le président: Dans quel contexte? Pouvez-vous nous en parler davantage?

M. John Davis: On a proposé d'utiliser ce type de produit chimique pour contrôler les animaux parasites, les puces de mer et ce genre d'organismes qui font partie du problème, qui s'attaquent au saumon dans les cages en filet.

Le président: Je suis surpris que vous ne connaissiez pas la cyperméthrine. Apparemment, une décision doit être rendue à la fin de janvier ou au début de février concernant la cyperméthrine, de sorte que cette question doit avoir atteint un certain niveau au sein de votre ministère. Est-ce que ce serait au-dessous de votre niveau?

M. John Davis: Nous en sommes certainement saisis, monsieur. Je suis cependant intérimaire, de sorte que je ne suis pas au courant de tout ce qui se passe dans tout le pays.

Le président: Où en est l'application de la cyperméthrine?

M. John Davis: Je n'en suis pas certain, mais je peux certainement m'engager à vous fournir tous ces détails plus tard.

Le président: Pouvez-vous jeter une certaine lumière au sujet de l'ivermectine?

M. John Davis: Ma réponse est la même pour les deux substances.

Le président: Est-ce la même réponse? Vous aimeriez répondre par écrit...

M. John Davis: Oui, c'est ce que nous aimerions faire, s'il vous plaît.

Le président: ... et aussi au sujet de son statut.

M. John Davis: Oui.

Le président: Apparemment, cette substance est beaucoup utilisée, non pas tellement par les agriculteurs, mais par les vétérinaires, en pisciculture.

M. John Davis: Oui, et si j'ai bien compris, c'est quelque chose qui doit être prescrit par les vétérinaires.

Le président: J'aimerais demander à Mme Forand, puisqu'elle est responsable de la politique, quel est le rôle de votre ministère en matière de prévention de la pollution et d'application de la Loi sur les pêches en aquaculture. Quelle est la position du ministère?

Mme Liseanne Forand (sous-ministre adjointe, Politique, ministère des Pêches et des Océans): Certains éléments de la Loi sur les pêches s'appliquent à l'aquaculture. De toute évidence, comme votre comité le sait, la Loi sur les pêches a été rédigée bien avant que l'on ne pratique l'aquaculture. Cependant, elle a une incidence sur l'aquaculture de plusieurs façons: en ce qui concerne la location à bail des sites, particulièrement à l'Île-du-Prince-Édouard où nous n'avons pas de protocole d'entente avec la province; le gouvernement fédéral est donc responsable de la location à bail des sites, et en ce qui a trait aux dispositions de la Loi sur les pêches concernant l'habitat qui stipulent que l'introduction d'une substance toxique dans l'eau constitue une infraction.

Ces deux dispositions de la Loi sur les pêches exigent d'obtenir un permis auprès du ministère des Pêches et des Océans lorsqu'on a l'intention d'introduire dans l'eau une substance toxique pour les poissons, et déclenchent l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

Autre aspect du fondement législatif du ministère, la Loi sur la protection des eaux navigables est également un élément déclencheur de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, et une proposition en vue d'introduire un nouveau site d'aquaculture peut faire en sorte qu'on exige une évaluation environnementale aux termes de la Loi sur la protection des eaux navigables.

Le président: Lorsqu'il s'agit de surveiller et d'appliquer les lois qui relèvent de votre compétence, sur combien de personnes pouvez-vous compter au Nouveau-Brunswick?

Mme Liseanne Forand: Comme on en a informé votre comité la semaine dernière, il y a au pays plus de 500 agents chargés d'exécuter la loi au ministère des Pêches et des Océans. Leurs tâches varient—exécution de la Loi sur les Pêches et d'autres aspects. Par ailleurs, une partie de la surveillance, comme M. Bastien ou M. Normand l'ont mentionné précédemment, est assurée par le ministère de l'Environnement. Par ailleurs, l'Agence canadienne d'inspection des aliments a des exigences réglementaires et des dispositions d'inspection relativement à la surveillance du poisson.

Le président: Le nombre d'agents est impressionnant. Combien sont affectés aux activités d'aquaculture?

Mme Liseanne Forand: Les agents des pêches remplissent des tâches variées. Ils ne sont pas exclusivement affectés à certaines tâches. Nous n'affectons pas exclusivement les inspecteurs du ministère des Pêches et des Océans ou les agents chargés d'exécuter la loi strictement aux activités d'aquaculture. Mais, encore une fois, le ministère de la Santé, le ministère de l'Environnement, l'Agence canadienne d'inspection des aliments et le ministère des Pêches et des Océans sont tous responsables des diverses exigences réglementaires qui s'appliquent aux aquaculteurs.

• 1655

Le président: C'est certainement très impressionnant. Et au cours des cinq dernières années pour lesquelles il existe des données, combien d'accusations ont été portées?

Mme Liseanne Forand: Il me faudra vérifier pour vous, monsieur. Encore une fois, les accusations ne seraient sans doute pas portées aux termes de la Loi sur les pêches, mais plutôt aux termes d'autres règlements qui s'appliquent aux aquaculteurs. C'est beaucoup plus probable.

Le président: Pourriez-vous fournir cette information aux membres du comité?

Mme Liseanne Forand: Nous ferons tous les efforts possibles pour vous obtenir les données les plus complètes concernant l'exécution de la loi. Les accusations qui ont été portées au cours des cinq dernières années—c'est ce que vous voulez savoir?

Le président: Les années pour lesquelles vous avez des statistiques. Merci beaucoup.

Madame Girard-Bujold.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Monsieur le président, j'ai bien aimé ses questions parce qu'elles étaient à point. J'ai hâte d'entendre les réponses.

M. le président vous a posé des questions au sujet des fonds spéciaux que vous avez alloués à des choses bien précises. À quelle époque avez-vous alloué ces fonds? La production de ces études comporte-t-elle une échéance? Cela touche beaucoup de domaines: l'océanographie côtière et le développement durable de l'aquaculture, les déchets chimiques et organiques, le protocole pour faire le suivi des impacts environnementaux et la toxicité aux organismes non visés. Avez-vous une date limite pour remettre ces rapports?

[Traduction]

M. John Davis: Madame, un certain nombre de projets sont énumérés ici. Certains sont des projets permanents. Certains sont terminés et d'autres se poursuivront certainement pendant quelques années.

Je crois comprendre que toute la série de programmes représente plusieurs millions de dollars. Certains d'entre eux sont fédéraux et certains autres sont provinciaux. Nous avons des fonds spéciaux à l'échelle nationale que nous utilisons pour des projets de recherche de grande priorité au pays, et il s'agit d'un fonds d'environ trois ou quatre millions de dollars par an, dont une partie est consacrée à ce type de recherche. Le ministère accorde donc une très grande priorité à ce genre de projet.

[Français]

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Monsieur le président, je voudrais répondre à ce que M. Charbonneau a dit tout à l'heure au sujet du développement des infrastructures.

Je vois qu'il y a des protocoles d'entente fédérale-provinciale et qu'à l'intérieur de ces protocoles, ce qui concerne les provinces touche le développement de l'infrastructure. C'est vraiment de la compétence exclusive des provinces. Je ne vois pas ce que le gouvernement fédéral viendrait faire dans l'aménagement des territoires des provinces. Le protocole existe déjà. S'il y a des aménagements à faire, il est important de respecter la juridiction des provinces, comme cela a été le cas lors de la signature des protocoles d'entente.

L'autre jour, lorsque les ONG sont venus, ils disaient qu'ils n'avaient pas été consultés ou très peu consultés. C'est ce que disaient les environnementalistes. Vous avez un comité consultatif sur la politique d'inspection des produits de la mer auquel siègent un représentant du secteur de l'aquaculture, des représentants de l'industrie et d'autres gens. Pourquoi ne permettriez-vous pas à un représentant de ces gens-là de siéger à ce comité-là à titre d'expert-conseil en matière de politique d'aquaculture?

M. Gilbert Normand: Madame, j'ai écrit à trois reprises à une importante fondation, la Fondation David-Suzuki, et on n'a jamais trouvé le temps de me recevoir. Est-ce que ces gens sont réellement intéressés à discuter ou s'ils veulent simplement faire valoir leur point de vue? C'est là qu'est toute la question.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Je suis bien contente que vous me disiez cela, parce que l'autre jour, lorsqu'ils sont venus, ils étaient très contents que je leur demande cela.

M. Gilbert Normand: J'ai envoyé des lettres au mois de... Je n'ai pas les dates ici.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Je ne mets pas en doute votre parole, mais ils étaient intéressés et ils voyaient la nécessité d'être là. Il serait peut-être bon de leur dire que vous avez fait ce que vous aviez à faire et qu'ils n'ont pas répondu à vos attentes.

M. Gilbert Normand: Je peux même vous dire que je me suis rendu à Campbell River, sur l'île de Vancouver, et que je leur ai offert de les rencontrer sur place, lors d'un congrès d'aquaculteurs.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Oui, mais si vous leur donniez un siège au comité consultatif, ce ne serait peut-être pas pareil. Vous vouliez seulement les rencontrer.

M. Gilbert Normand: Eh bien, il faudrait d'abord savoir s'ils sont intéressés. Normalement, quand on veut asseoir quelqu'un sur un chaise, à un comité, il faut d'abord discuter avec lui pour voir quels sont ses objectifs et s'il est intéressé à faire partie de ce comité.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Vous dites cela, monsieur le ministre, mais étant donné ce qu'ils nous ont dit lorsqu'ils sont venus ici, au comité, je pense qu'ils s'intéressent à tout ce qui touche l'aquaculture. J'ai pu constater leur intérêt. Ils sont venus nous dire des choses. Ils ont démontré un intérêt à venir. Je pense donc que vous devriez renouveler votre invitation. C'est comme ça que je vois les choses.

• 1700

M. Gilbert Normand: Personnellement, je ne vois pas d'objection à ce qu'il y ait une place réservée aux ONG. Maintenant, ce sera à eux de se réunir et de déléguer quelqu'un si cela se concrétise un jour.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Merci.

Le président: Merci, madame. Monsieur Charbonneau.

M. Yvon Charbonneau: La dernière réponse du ministre pourrait entraîner quelques retouches au texte que nous avons ici, parce que ce n'est pas vraiment prévu, en particulier au chapitre 7 sur la structure de mise en oeuvre.

Je voudrais profiter de votre passage devant nous pour situer le rôle de cette nouvelle institution qui s'appelle le commissaire à l'aquaculture en regard de cet organigramme. Quels sont ses principaux pouvoirs ou ses principales responsabilités à l'égard de cette stratégie et de sa mise en oeuvre?

M. Gilbert Normand: Le commissaire est l'équivalent d'un sous-ministre en titre et il rend compte directement au ministre, comme moi d'ailleurs. Nous allons travailler en étroite collaboration, au cours des prochains mois et des prochaines années, avec les provinces, l'industrie et le ministère, pour voir à l'agencement du développement de cette industrie. Le commissaire a une certaine autonomie face au ministère, mais il rend compte au ministre des Pêches et des Océans.

M. Yvon Charbonneau: Quel est son rôle par rapport à ce qui est envisagé ici, par rapport aux différents intervenants que nous voyons dans l'organigramme? On n'y voit pas la mention du commissaire.

M. Gilbert Normand: À quelle page?

M. Yvon Charbonneau: À la page 16 de la version française de votre stratégie. Il y a plusieurs intervenants dans cette structure qui, je le rappelle à ma collègue Mme Girard-Bujold, prévoit le travail concerté fédéral-provincial et le respect des compétences.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: C'est ce que je vous ai dit tout à l'heure.

M. Yvon Charbonneau: Cela dit, quel est le rôle du commissaire là-dedans?

M. Gilbert Normand: Ce sera d'abord de mettre cela en place.

M. Yvon Charbonneau: Il est responsable de la mise en place de l'ensemble de ce dispositif-ci.

M. Gilbert Normand: Le commissaire est responsable de la coordination entre tous les différents intervenants.

M. Yves Bastien: Il faut se rappeler que cette stratégie a été élaborée à un moment où il n'y avait pas de commissaire. Ce poste est nécessaire parce qu'il y a un besoin de coordination au niveau canadien et avec les provinces pour le développement de l'aquaculture. C'est une industrie qui n'existait pas au moment où la majorité des lois ont été écrites. Depuis ce temps, plusieurs provinces ont adopté des lois sur l'aquaculture et signé des ententes de coopération avec le gouvernement fédéral. Dans le secteur de la conchyliculture, que je connais un peu mieux, il y a trois processus qui relèvent de trois institutions différentes pour fermer ou ouvrir des zones à la cueillette ou à l'élevage de mollusques. Donc, il est absolument nécessaire d'élaborer une nouvelle coordination de l'ensemble.

Je ne suis pas dans la ligne de décision du ministère. Ce sont les sous-ministres adjoints et le sous-ministre en titre, qui relèvent de M. Anderson, qui continuent de prendre les décisions. Je suis un conseiller spécial du ministre. À mon point de vue, je vais lui fournir des avis pour l'élaboration d'un nouveau cadre. Je pense que le Canada ne pourra pas s'empêcher d'adopter une loi sur l'aquaculture un jour. Je ne vous dis pas que ce sera immédiat, mais, à mon point de vue, il s'agit de l'un des seuls moyens pour avoir une nouvelle coordination pancanadienne et une bonne coordination avec les provinces. Cela ne va pas nécessairement arriver tout de suite, mais je vois mon rôle comme en étant un de transition. Pendant cette période de transition, on va continuer de mettre en oeuvre les lois et les règlements et d'aider l'industrie, et on va créer en même temps un nouveau cadre. Je vais avoir un rôle très important à jouer là-dedans.

• 1705

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous nous avez dit que dans d'autres pays, l'aquaculture était sous l'égide de l'agriculture. Des gens qui sont venus témoigner ici nous ont dit qu'ils aimeraient que ce soit transféré de Pêches et Océans Canada à Environnement Canada. Vous dites qu'il y a déjà des pourparlers afin que ce soit régi par l'Agriculture.

Pourquoi pensez-vous... Pourquoi d'autres aimeraient-ils que ce soit...

M. Gilbert Normand: Écoutez, je ne sais pas qui est venu dire cela.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Les environnementalistes.

M. Gilbert Normand: Ah, les environnementalistes.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Il ne faut pas prendre ça négativement, monsieur le ministre.

M. Gilbert Normand: Je ne le prends pas négativement, mais je me demande ce que les environnementalistes pourraient faire de ça. L'aquaculture est très technique, très scientifique. D'ailleurs, les industries qui réussissent ont la plupart du temps à leur tête des biologistes ou des vétérinaires. Ce sont des gens qui ont besoin d'une formation très pointue. C'est beaucoup plus la connaissance scientifique qui fait qu'une industrie d'aquaculture réussit que sa capacité monétaire.

Deuxièmement, quand on parle de l'agriculture, c'est beaucoup plus technique. La formation d'un aquaculteur ressemble beaucoup plus à celle d'un agriculteur qu'à celle d'un pêcheur, par exemple. Un pêcheur a beaucoup plus une mentalité de coureur des bois—excusez l'expression—, tandis que l'aquaculteur, tout comme l'agriculteur, est beaucoup plus sédentaire. Il est habitué à soigner ses animaux, à les amener à maturité et à en tirer des revenus. Il doit prévoir pour l'avenir, contrairement au pêcheur qui prend ses prises, qui les ramène au quai et qui n'en est plus responsable. Il y a toute une philosophie qui est complètement différente.

Maintenant, si l'aquaculture allait sous l'égide du ministère de l'Environnement, il faudrait agrandir le ministère et—excusez l'expression—le gréer de plusieurs secteurs qu'il n'a pas actuellement.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Je suis bien heureuse de vous entendre dire ça. Merci.

[Traduction]

Le président: Merci, madame.

Avant de conclure, permettez-moi de vous poser une question générale que je poserai également aux hauts fonctionnaires du ministère. La stratégie a maintenant quatre ans; c'est un document qui date de 1995. Il est évident que les choses ont changé depuis. Il y a eu toutes sortes de changements. Si on regarde le plan stratégique, au quatrième point vignette, le cadre réglementaire tel qu'il est exposé à la page treize, on aimerait savoir exactement en quoi consiste ce cadre réglementaire, franchement. Vous pourriez peut-être nous donner une idée de ce en quoi il consiste, car au paragraphe 6.4 on donne une description générale, qui n'est vraiment pas précise. Cela nous permettrait, je crois, de mieux comprendre comment fonctionne ce secteur—s'il est visé par un régime réglementaire et quelle est la portée de ce régime, et les éléments d'un régime réglementaire—ce qui dissiperait peut-être certaines des préoccupations que pourraient avoir les membres de notre comité.

J'aimerais par ailleurs vous dire que l'un de ces jours le commissaire au développement durable lira ce rapport et aura sans doute des questions intéressantes à poser lors d'un de ses examens annuels de la performance du ministère relativement au développement durable. Je dis cela en passant. Je vous laisse le soin de décider s'il s'agit là ou non d'un conseil amical.

Quoi qu'il en soit, nous devons conclure maintenant la séance. C'est un bon moment pour vous remercier tous. Le soleil est en train de se coucher, et la Reine Victoria sourit; il y a donc de l'espoir pour l'humanité.

Monsieur le ministre, vous nous avez apporté une bouffée d'air frais en nous faisant part de votre point de vue de façon si spontanée et directe. Nous vous remercions beaucoup pour le style et le contenu. Merci beaucoup d'être venu nous rencontrer aujourd'hui et d'avoir pris l'initiative d'offrir vos services et vos connaissances. Nous sommes très heureux que vous nous ayez éclairés aujourd'hui. J'aimerais également remercier tous les gens qui vous accompagnent.

• 1710

Il y aura une séance demain matin dans la pièce 237-C de l'édifice du Centre. Merci.

[Français]

M. Gilbert Normand: [Note de la rédaction: Inaudible]. C'est qu'au point 6.4, vous avez les engagements du gouvernement. Dans le temps, on est rendu à l'arrivée du commissaire dans le décor. Au point 6.5, on lit ce qui suit:

    Par conséquent, pour que l'industrie se développe de manière viable, les aquaculteurs doivent observer des normes environnementales strictes.

C'est ce qu'on compte faire.

Le président: On aimerait beaucoup recevoir cela. Merci.

La séance est levée.