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ENSU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 22 octobre 1998

• 0905

[Traduction]

Le président (M. Charles Caccia, Davenport, Lib.)): À l'ordre.

Ce matin, nous abordons un sujet d'actualité, soit les travaux préparatoires pour la rencontre de Buenos Aires sur le changement climatique. Je me demandais si M. Emmett, commissaire à l'environnement et au développement durable, son groupe et d'autres collèges installés à la table principale aimeraient se présenter. Vous pourriez ensuite nous laisser savoir dans quel ordre vous souhaitez témoigner.

Soyez les bienvenus.

M. Brian Emmett (commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada): Monsieur le président, je suis accompagné de Mme Ellen Shillabeer, de M. Wayne Cluskey et d'autres membres du Bureau du vérificateur général.

• 0910

M. David Oulton (directeur, Secrétariat fédéral du changement climatique): Monsieur le président, si vous n'y voyez pas d'inconvénients, nous pourrions peut-être tout simplement procéder. Je m'appelle David Oulton, et je représente le Secrétariat fédéral du changement climatique. Je laisserai les représentants des autres ministères se présenter. Toutefois, je tiens à signaler que je suis accompagné de Mme Anne-Marie Smart, directrice générale du Bureau des changements climatiques à Environnement Canada.

M. Jim Wall (directeur général, Relations internationales, Environnement Canada): Bonjour, monsieur le président. Mon nom est Jim Wall. Je suis directeur général des relations internationales à Environnement Canada. D'autres experts de notre ministère se joindront à nous sous peu. Merci.

Mme Sue Kirby (directrice générale, Direction de la politique énergétique, Secteur de l'énergie, Ressources naturelles Canada): Je m'appelle Sue Kirby. Je suis directrice générale de la politique énergétique à Ressources naturelles Canada, et je suis accompagnée de M. Nick Marty, de l'Office de l'efficacité énergétique.

M. John Sargent (conseiller principal du sous-ministre, ministère des Finances): Je m'appelle John Sargent, ministère des Finances, Cabinet du sous-ministre.

M. Robert Hornung (directeur, changement climatique, Pembina Institute for Appropriate Development): Bonjour, monsieur le président. Je m'appelle Robert Hornung, et je suis directeur du programme du Pembina Institute sur le changement climatique.

M. Richard D. Ballhorn (directeur général, Direction générale des affaires environnementales internationales, Affaires étrangères et Commerce international): Je m'appelle Richard Ballhorn, et je suis directeur général des affaires environnementales au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Je suis accompagné de mes experts, Sushma Geram et David Drake, nouveau directeur de notre Direction des changements climatiques.

Le président: Parfait, merci.

Aimeriez-vous commencer? Allez-y, monsieur Emmett.

M. Brian Emmett: Tout d'abord, je tiens à vous remercier, monsieur le président, de cette occasion de revenir sur la question du changement climatique, l'un des principaux chapitres du rapport que j'ai déposé au mois de mai de cette année.

Je ne parlerai que brièvement du contenu de ce rapport. Nous avions pris comme point de départ l'évaluation du gouvernement fédéral selon laquelle le changement climatique pourrait entraîner des répercussions graves pour le Canada. Selon les prévisions du gouvernement, chaque région du pays et chaque secteur économique sera touché, surtout l'agriculture, la foresterie et les pêches.

Le changement climatique pourrait affecter grandement l'environnement et la santé des Canadiens. Par conséquent, le gouvernement conclut que le problème est réel et grave, et qu'on doit immédiatement prendre des mesures de précaution.

[Français]

L'objet de notre chapitre de mai était l'engagement pris par le Canada de réduire ses émissions de gaz à effet de serre aux niveaux de 1990 d'ici l'an 2000. Nous avons constaté que le Canada n'allait pas respecter ses engagements. Nous avons voulu savoir pourquoi.

[Traduction]

Nos travaux nous ont permis de conclure que le gouvernement fédéral n'avait pas appliqué de bons principes de gestion en tentant de réaliser ses engagements. Des 19 éléments que nous avons décrits comme essentiels à l'efficacité de la gestion, notre examen a conclu que seulement trois avaient été respectés. À titre de référence j'ai fourni au greffier un tableau avec la déclaration préliminaire.

Il est peu étonnant que le gouvernement lui-même estimait, en mai dernier, que le Canada raterait son objectif pour l'an 2000 d'environ 11 p. 100.

Dans le cadre de l'examen des principes de gestion, nous n'avons trouvé ni description claire des rôles et responsabilités, ni plan de communication national, ni plan de mise en oeuvre; de plus, les dispositions touchant le contrôle régulier des résultats étaient limitées, et on ne prévoyait pas la présentation de rapport sommaire au Parlement.

Le gouvernement n'a conclu aucune entente écrite avec d'autres ordres de gouvernement ou avec d'autres partenaires quant à leur contribution. Essentiellement, aucun partenariat réel n'a été créé en vue de respecter les promesses faites aux Canadiens et à la communauté internationale.

Le gouvernement fédéral a omis d'élaborer un mécanisme acceptable grâce auquel on pourrait le tenir responsable d'assurer le leadership en matière de changement climatique. Il était d'autant plus difficile d'établir la responsabilité qu'aucune partie n'a été clairement désignée pour assumer ce rôle à l'échelon fédéral.

[Français]

Le problème du Canada ne semble pas être l'absence d'idées sur ce qui devrait être fait, mais l'absence d'ententes au sujet d'une vaste gamme de mesures pratiques, à l'échelle nationale, conçues pour atteindre des objectifs précis.

Nos recommandations exigent que le gouvernement fédéral repense totalement son approche actuelle face aux changements climatiques, en mettant l'accent autant sur la mise en oeuvre et la gestion saine que sur une politique novatrice et visionnaire. Le fait de ne pas atteindre son objectif de stabilisation des émissions en l'an 2000 met le Canada dans une position difficile s'il veut atteindre l'objectif plus ambitieux convenu à Kyoto. Il s'impose de mettre en place une structure de gestion efficace.

• 0915

[Traduction]

Il y a de très gros défis à relever, et je suis au courant des efforts que déploie le gouvernement et ses agents à l'égard de ces questions. Je suis troublé par le fait que les ministères n'aient pas réagi de façon spécifique à chacune des 11 recommandations que nous avons formulées. Par conséquent, il n'y a toujours pas d'engagement clair à corriger les lacunes que nous avons cernées. Cela laisse croire que l'environnement ne mérite pas qu'on prête la même attention aux éléments fondamentaux de gestion et de diligence raisonnable que pour tout autre partenariat.

Le changement climatique continue de faire l'objet de nombreuses activités, tant au Canada qu'à l'étranger. Il y a eu de nombreux faits nouveaux que mes collègues connaissent mieux que moi. Par exemple, le Canada a signé le protocole de Kyoto, s'engageant à réduire ses émissions à 6 p. 100 sous les niveaux enregistrés en 1990 pour la période s'étendant de 2008 à 2012. Cette semaine, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de l'Environnement et de l'Énergie se sont rencontrés afin de coordonner leurs efforts.

Néanmoins, les réalités sous-jacentes demeurent inchangées. Les émissions de gaz à effet de serre du Canada continuent d'augmenter. En l'an 2000, les Canadiens feront face à un défi énorme lorsqu'ils tenteront d'atteindre leurs nouveaux buts. À moins qu'on réalise des progrès considérables en ce qui concerne les problèmes que nous avons cernés en mai, le Canada ne sera pas doté des outils dont il a besoin pour respecter ses engagements.

[Français]

Face aux changements climatiques, on a fait de nombreuses promesses. Les promesses ne suffisent pas, cependant, à faire avancer les choses. Le temps est maintenant venu d'agir de façon concrète et significative pour combler l'écart entre les objectifs et la réalité. Le gouvernement fédéral a la responsabilité de protéger les intérêts de tous les Canadiens.

[Traduction]

Notre travail touchant le changement climatique est un effort continuel. Nous avons commencé avec le chapitre sur les initiatives d'efficacité énergétique à Ressources naturelles Canada, publié en avril 1997. Les travaux qui seront présentés dans mon rapport en mai 2000, dans le cadre desquels nous examinons la mesure dans laquelle les sources d'énergie au Canada ne sont pas désavantagées, sont déjà bien avancés. Nous préparons aussi un rapport important sur la pollution de l'air et le smog. En l'an 2000, nous commencerons à revoir régulièrement la question du changement climatique, et nous examinerons la stratégie de mise en oeuvre nationale proposée lorsqu'elle sera prête.

Merci, monsieur le président. Nous serons heureux de répondre à vos questions ou à celles du comité.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Emmett.

Il est important que les membres du Comité de l'environnement et du développement durable comprennent bien les difficultés que présente l'atteinte du but que s'est fixé le gouvernement du Canada en matière de réduction des gaz à effet de serre. J'espère que lors de son intervention, M. Oulton pourra nous donner des précisions sur le travail qu'il a l'intention d'entreprendre afin d'atteindre ce but.

Monsieur Oulton, s'il vous plaît.

[Traduction]

M. David Oulton: Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, je demanderais à tout le monde de bien vouloir prendre le document d'information. Il s'intitule: «Le processus national: un effort collectif pour définir une stratégie nationale de mise en oeuvre». J'aimerais passer brièvement en revue ce document. J'attends que tout le monde reçoivent sa copie.

Monsieur le président, j'aimerais aussi signaler que, tel que mentionné dans le document d'information, les ministres de l'Énergie et de l'Environnement se sont rencontrés à Halifax, lundi et mardi derniers. On a remis au comité un ensemble de documents faisant état des résultats de ces rencontres et de l'annonce concernant le Fonds d'action pour le changement climatique, à Halifax, lundi.

Je vous demanderais maintenant d'ouvrir le document d'information à la page 1 et de regarder la diapositive qui s'intitule «Qu'est-ce que le Secrétariat du changement climatique?» On y décrit très brièvement le mandat qu'on nous a attribué à titre de Secrétariat national du changement climatique, c'est-à-dire d'élaborer une stratégie nationale de mise en oeuvre en collaboration avec les provinces et les territoires et en consultation avec les intervenants d'ici l'automne 1999.

Le travail du secrétariat ne chevauche pas celui des ministères fédéraux. Nous servons de point central pour l'élaboration de la stratégie nationale de mise en oeuvre, et, de fait, nous tenterons de veiller à ce que le gouvernement fédéral soit en mesure d'uniformiser et de coordonner son approche en matière de changement climatique dans le cadre de sa contribution à la stratégie nationale de mise en oeuvre.

Par conséquent, le secrétariat relève des sous-ministres des deux ministères qui sont les principaux responsables de la question, c'est-à-dire Ressources naturelles Canada et Environnement Canada. Nous mettons surtout l'accent sur la stratégie nationale de mise en oeuvre, mais nous veillons aussi à ce que nos négociateurs internationaux soient bien informés des progrès que nous réalisons à l'égard de notre stratégie nationale.

• 0920

Passons maintenant à la diapositive numéro deux. Le commissaire a fait allusion au défi auquel nous faisons face après que le Canada a négocié un objectif de moins six pendant les discussions tenues à Kyoto en décembre dernier. Cela ne fait que caractériser la nature de ce défi. En 1990, l'année de référence, on a émis 599 mégatonnes de gaz à effet de serre, c'est-à-dire d'équivalent CO2.

Si vous regardez l'objectif, c'est-à-dire moins six, cela correspondrait à 563 mégatonnes. Rappelez-vous, plus ou moins récemment, il y a deux mois, un rapport répertoriait nos émissions de gaz à effet de serre pour 1996 et les situait à 671 mégatonnes, soit une augmentation d'environ 12 p. 100 par rapport à l'année de référence, 1990.

Et si on envisage les prévisions quant au maintien du statu quo—autrement dit, sans autre changement au chapitre de la politique—, on se retrouverait en 2010, soit au milieu de la période d'engagement, avec des émissions se situant entre 700 et 750 mégatonnes, et les prévisions actuelles se situent davantage dans la partie supérieure de cette fourchette. En d'autres mots, la stratégie nationale de mise en oeuvre devra rassembler des options qui nous permettront de réduire nos émissions potentielles de jusqu'à 185 mégatonnes, soit plus ou moins 25 p. 100. C'est là toute l'ampleur du défi lié à l'établissement d'une stratégie.

Passons maintenant à la troisième diapositive. Quand le protocole de Kyoto a été négocié, vous vous souviendrez que certaines provinces ont soulevé des préoccupations à l'égard des négociations. Il s'est trouvé que les ministres devaient se rencontrer pendant cette période, et il en a résulté une discussion sur le changement climatique où l'on a établi une orientation claire qui constitue vraiment la base du travail du Secrétariat national.

Essentiellement, cela a permis au gouvernement fédéral et aux provinces de s'engager à collaborer en vue d'établir une stratégie nationale de mise en oeuvre. On en a aussi profité pour établir des balises à l'égard de la qualité ou des caractéristiques de cette stratégie. On a déterminé que la stratégie ne doit pas placer un fardeau important ou déraisonnable sur une région particulière du pays.

La stratégie doit se fonder sur une compréhension complète des options qui s'offrent au Canada et des coûts et des avantages dont ils s'assortissent, et nous devons faire cela pendant le processus d'évaluation pour la ratification du protocole; de plus, le processus doit assurer la participation pleine et entière des gouvernements provinciaux/territoriaux à la gestion du processus.

On a chargé les ministres de l'Énergie et de l'Environnement de gérer ce processus et de faire état des progrès réalisés aux premiers ministres vers la fin de 1999.

Si vous passez à la page 4, qui décrit brièvement le processus national sur le changement climatique, vous constaterez qu'il s'agit d'une entreprise commune entre le gouvernement fédéral et les provinces. On l'a établi en avril 1998, quand les ministres de l'Énergie et de l'Environnement se sont réunis pour donner suite aux demandes des premiers ministres.

Ils ont essentiellement établi un processus global dans le cadre duquel les deux ordres de gouvernement et les intervenants allaient, à partir du mois d'avril, pendant un an et demi, examiner conjointement les coûts et les avantages des options qui pourraient nous permettre de respecter nos obligations en matière de changement climatique à la suite de la ratification du protocole de Kyoto.

Le principal instrument que les ministres ont décidé d'utiliser est le mécanisme des «tables de concertation» dont je préciserai la nature plus tard. Ils ont aussi indiqué qu'ils veulent suivre le processus de près et se rencontrer périodiquement en vue d'évaluer les progrès réalisés. D'ailleurs, ils ont tenu une rencontre à Halifax, en octobre, en vue d'examiner la situation. Je reviendrai à cette question dans un instant.

La cinquième page du document d'information explique pourquoi on a adopté un processus inclusif. On y explique essentiellement que toute démarche visant à faire face à un enjeu aussi complexe que le changement climatique exige qu'on recoure à des outils provenant de tous les ordres de gouvernement, soit fédéral, provincial et municipal-régional. Autrement dit, on doit engager toutes les administrations et leurs pouvoirs.

Il est clair que ce problème touchera tous les Canadiens, et que pour respecter nos obligations, chaque citoyen canadien devra y mettre du sien. Il ne suffit pas que les gouvernements et le secteur privé prennent des mesures. Par conséquent, nous nous sommes fondés sur la prémisse selon laquelle toute stratégie de mise en oeuvre devrait faire l'objet d'un examen approfondi par les provinces, les territoires, les autres ordres de gouvernement et les Canadiens avant qu'on la présente aux ministres.

• 0925

Passons maintenant à la page six. J'ai mentionné que le principal instrument du processus est le mécanisme des «tables de concertation». C'est un mécanisme qui se fonde sur la création de groupes d'experts.

[Français]

Ce sont en général des groupes qui regroupent de 25 à 35 experts dans un domaine horizontal ou sectoriel. Les participants apportent différents éclairages aux travaux de chacune de ces tables.

Les tables sont chargées de conseiller les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Leurs principales responsabilités consistent à faire le tour du domaine et à analyser les options d'atténuation des émissions de gaz à effet de serre. On leur a aussi demandé de préciser, presque comme produit secondaire de leurs études, des mesures rapides et de bonnes idées en vue de la sensibilisation du public.

Enfin, les tables ont aussi la responsabilité de mettre les résultats de leurs travaux à la disposition d'autres experts et d'autres Canadiens et Canadiennes.

[Traduction]

La diapositive numéro sept présente les tables de concertation que nous avons établies, en fonction de deux concepts de base. L'un est de nature verticale—ou sectorielle—, c'est-à-dire qu'on divise l'économie en secteurs clés et qu'on place un accent particulier sur ces domaines où l'on doit trouver des solutions en ce qui concerne le changement climatique. Comme vous pouvez le constater, les tables couvrent toute la gamme des domaines, de l'agriculture et de l'agroalimentaire jusqu'aux transports, en passant par le secteur de l'électricité; on a aussi créé un secteur général de l'industrie, qui couvre tous les autres domaines de l'économie. Parallèlement, nous avons envisagé des mécanismes horizontaux qui pourraient créer des outils qui transcenderaient ces secteurs industriels. Les tables de concertation touchent des sujets aussi variés que l'éducation et la sensibilisation du public, l'analyse et la modélisation, la technologie et les mécanismes internationaux de flexibilité. On dénombre quinze tables de concertation, et on envisage actuellement la création d'une seizième table qui pourrait examiner l'échange de droits d'émission à titre de solution possible.

Passons maintenant à la huitième diapositive. Certains avanceraient que les gouvernements s'attardent au changement climatique depuis au moins 1988. Nous avons tenté, dans le cadre de nos activités, de déterminer ce qu'il y a de nouveau dans ce processus et ce qu'on doit faire pour qu'il réussisse. Comme vous l'aurez peut-être constaté en lisant le rapport du commissaire, les processus précédents ont échoué.

Tout d'abord, nous avons établi un mandat clair pour chaque table de concertation. De plus, on a créé des échéanciers précis s'assortissant de produits livrables spécifiques. Autrement dit, nous avons clairement attribué la responsabilité à ces tables de concertation en ce qui concerne la préparation d'analyse des options, et ces échéances seront respectées.

Deuxièmement, nous avons tenté de constituer les tables de concertation non seulement de représentants, mais aussi d'experts, de sorte qu'elles peuvent tenir des discussions et jouir du point de vue pour la préparation de l'analyse.

Nous avons aussi fait savoir que même si nous voulons connaître quelles options font l'objet d'un consensus, nous voulons aussi prendre connaissance de toutes les autres options examinées. Nous avons tenu à le préciser, car nous avons constaté, dans le cadre d'initiatives antérieures, que le consensus donne souvent des résultats dilués. Nous voulions voir l'ensemble du travail effectué.

Enfin, nous avons aussi fait comprendre que nous voulions prendre connaissance de tous les avantages et de tous les coûts. Les gens sont conscients du fait qu'on a critiqué des analyses antérieures qui s'attachaient aux coûts, car on avait consacré relativement peu d'efforts en vue de déterminer les avantages liés à la prise de mesures. Nous avons donc demandé aux participants des tables de concertation d'envisager les avantages. Nous avons aussi signalé que l'analyse doit mettre l'accent non seulement sur les aspects économiques—chose qui, par le passé, était courante—, mais aussi sur les avantages en matière d'environnement, de société et de santé et sur les coûts des options mises de l'avant.

Nous avons aussi averti les tables de concertation que le travail ne devrait pas se limiter uniquement aux 25 à 35 personnes qui en font partie. On devrait faire appel à la participation de groupes de pairs et les consulter afin que les analyses présentées soient examinées non seulement par les membres de la table de concertation, mais aussi par des représentants du public.

Enfin, on a fourni des ressources aux tables de concertation afin qu'elles puissent retenir les services d'experts et obtenir le soutien dont elles ont besoin pour s'acquitter de leurs tâches d'ici mai prochain.

J'ai mentionné tout à l'heure que le processus découle essentiellement d'une collaboration entre le gouvernement fédéral et les provinces. Nous avons établi un secrétariat national, dont la gestion et le financement sont assurés par le gouvernement fédéral et les provinces. Les employés des provinces et du fédéral travaillent côte à côte dans le cadre de cette initiative. Dans l'ensemble, environ 450 personnes participent directement à la préparation de l'analyse aux tables de concertation.

• 0930

La page 10 décrit brièvement ce que les tables de concertation doivent produire. Le premier produit, attendu pour la fin du mois, est ce qu'on appelle un document de base. C'est vraiment un outil qui aide les tables de concertation à rassembler les analyses clés dans leur domaine et qui permet de veiller à ce que les participants des tables travaillent en équipe avant qu'on passe au chef-d'oeuvre des tables de concertation, c'est-à-dire l'élaboration d'un document sur les options proposées.

Pour ce document, les tables de concertation ont de novembre jusqu'à la fin de mai pour préparer des options, après avoir examiné les avantages et les coûts et envisagé la gamme complète d'options du point de vue de l'environnement, de la santé et de l'économie. Nous leur avons aussi demandé de fournir une évaluation valide des émissions possibles pour toutes les options envisagées, et d'examiner la compétitivité globale et d'autres aspects économiques qui pourraient être touchés, positivement ou négativement, par une option donnée. Elles devront aussi indiquer quelles options doivent faire l'objet d'un examen approfondi. Nous leur avons demandé d'assurer une préparation complète du dossier, et de prendre le temps, vers la fin de l'hiver, de faire examiner les options par des pairs, et, peut-être, de tenir des consultations à l'égard des options qu'elles comptent présenter.

Enfin, j'aimerais revenir à ce que j'ai mentionné tout à l'heure, c'est-à-dire la rencontre des ministres à Halifax. Nous vous avons fourni de la documentation concernant les résultats de cette rencontre, qui visait essentiellement à faire le point. Elle a permis aux ministres, tout d'abord, d'évaluer la mise en place du processus qu'ils ont conçu et approuvé en avril. Ensuite, ils ont eu la possibilité de mettre en oeuvre des mesures rapides. Par conséquent, le gouvernement fédéral a annoncé la prise de certaines mesures rapides, notamment au chapitre de la recherche sur le climat, de l'adaptation ainsi que de l'éducation et de la sensibilisation du public. La rencontre a aussi permis aux ministres d'orienter le travail à faire pour la prochaine année.

Enfin, sur la diapositive numéro 12, intitulée «Étape suivante?», on prévoit que les ministres se rassembleront de nouveau au début du printemps prochain en vue d'examiner une fois de plus le processus, s'attachant particulièrement à la notion d'incitatif à la prise de mesures rapides, car il est clair qu'on doit commencer à regarder quels secteurs du Canada prennent des mesures dès maintenant. On veut examiner des moyens de veiller à ce que la prise de mesures ne soit pas inhibée par d'autres facteurs et à ce qu'on récompense les projets de mesures. L'une des tables de concertation s'attache particulièrement à cette question et présentera ses recommandations en janvier. Nous espérons les présenter aux ministres dès mars ou avril.

Nous voulons aussi présenter aux ministres ce que nous considérons comme l'étape finale du processus. L'étape finale consiste à prendre les travaux des tables de concertation, à les utiliser pour façonner une stratégie sensée et à permettre aux provinces et aux territoires de prendre des décisions réfléchies à l'égard de cette stratégie. Nous commençons dès maintenant à travailler sur ce modèle, et nous le présenterons aux ministres au début de la nouvelle année.

Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Oulton. Monsieur Wall, à vous la parole.

[Traduction]

M. Jim Wall: Merci, monsieur le président. Je suis reconnaissant de l'occasion qui m'est accordée de m'adresser au comité permanent.

Les positions énoncées ici sont en voie d'élaboration par les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international, de l'Environnement, des Ressources naturelles, des Finances, de l'Industrie et de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire, ainsi que par l'Agence canadienne de développement international. Pour la présentation de mon exposé, je serai assisté de Dick Ballhorn, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

À Kyoto, les pays développés ainsi que l'Europe de l'Est, la Russie et l'Ukraine ont convenu de fixer des objectifs de réductions nettes des émissions, ayant force obligatoire, qui leur permettront de diminuer leurs émissions globales de gaz à effet de serre de 5,2 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990, pour la période de 2008 à 2012. Le Canada et le Japon se sont engagés à réduire leurs émissions de 6 p. 100, les États-Unis, de 7 p. 100, et l'Union européenne, de 8 p. 100. La Russie et l'Ukraine ont accepté de stabiliser les émissions aux niveaux de 1990.

À ce jour, quelque 50 pays ont signé le Protocole. Les États-Unis ne l'ont pas encore signé, mais prévoient le faire d'ici mars 1999. Toutefois, les îles Fidji sont le seul pays à l'avoir ratifié. Le Protocole n'entrera en vigueur que lorsque 55 pays représentant 55 p. 100, en 1990, des émissions de dioxyde de carbone des pays développés et des pays avant une économie en transition l'auront ratifié. Il ne faut pas oublier que les objectifs ont été négociés de sorte qu'ils forment un tout avec les autres éléments du Protocole, et particulièrement ceux qui portent sur la façon dont les pays peuvent respecter leurs obligations en ce qui a trait à la réduction des émissions; il y avait un lien étroit entre les objectifs que les pays pouvaient accepter et les dispositions de dérogation du Protocole.

L'une des dispositions de dérogation porte sur le fait que les objectifs de réduction des émissions doivent être atteints, en moyenne, au cours de la période de 2008 à 2012, de sorte que les pays jouissent d'une certaine marge de manoeuvre quant au moment d'opérer les réductions et à l'adoption graduelle de mesures.

Deuxièmement, les objectifs de réduction des émissions couvrent six gaz à effet de serre—le dioxyde de carbone, le méthane, l'oxyde nitreux, les hydrofluorocarbones, les hydrocarbures perfluorés et l'hexafluorure de soufre—les sources de ces gaz ainsi que certaines activités reliées aux puits. Cela signifie que les pays jouissent d'une certaine souplesse quant aux gaz qui feront l'objet de réductions et à l'ampleur de ces réductions.

• 0935

Troisièmement, en plus d'agir sur le plan national, les pays peuvent atteindre leurs objectifs de réduction des émissions grâce au recours à des mécanismes de mise en oeuvre coopératifs et de dérogation, y compris des échanges de droits d'émissions dans d'autres pays développés (mise en oeuvre conjointe) ou dans les pays en développement (le Mécanisme pour un développement propre).

Bien que les trois mécanismes de dérogation et les puits soient clairement reconnus et inscrits dans le Protocole, les détails et les règles de leur mise en oeuvre devront faire l'objet de négociations. C'est le principal défi lié à la CdP4.

Enfin, le Protocole de Kyoto n'impose aux pays en développement aucune obligation bien définie en matière de limitation des émissions, ce qui n'était d'ailleurs pas prévu. Puisque les émissions des pays en développement s'accroissent et qu'elles pourraient représenter la majorité des émissions mondiales durant la première partie du prochain siècle, l'engagement de ces pays sera décisif si l'on espère atteindre les objectifs ultimes de la convention-cadre sur le changement climatique et du Protocole de Kyoto.

Le Canada défend deux intérêts prédominants dans les discussions et les négociations qui se déroulent actuellement dans la foulée de Kyoto. Tout d'abord, nous voulons mettre au point les mécanismes de dérogation de façon à assurer leur crédibilité et leur efficacité, et à optimiser les possibilités de réduction rentable des émissions pour l'entreprise et l'industrie canadiennes. Deuxièmement, nous voulons que le plus grand nombre possible de pays développés participent à la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, et nous tenons à ce que les principaux pays en développement s'engagent dans les efforts déployés à l'échelle mondiale pour régler le problème des changements climatiques.

Nous chercherons à rentabiliser au maximum nos possibilités de réduction des émissions en continuant d'insister pour que l'on précise le plus rapidement possible les mécanismes de dérogation et que l'on prenne des décisions à point nommé sur les puits.

Kyoto a permis de mettre en place un cadre grâce auquel nous pourrons entreprendre la longue route qui nous mènera vers des réductions des émissions de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale. À Buenos Aires, où se tiendra la prochaine rencontre des parties, nous pourrons commencer à entrer dans les détails. Il faudra peut-être plusieurs années pour achever tous les travaux prescrits par le Protocole. Nous travaillerons d'arrache-pied pour que la réunion de Buenos Aires produise un plan de travail assorti d'un calendrier ferme. Cette approche devrait permettre de préparer le terrain bien avant que ne débute la période cible de Kyoto, à compter de 2008.

Il peut paraître modeste de vouloir élaborer un plan pour faire avancer ces dossiers, mais cela est tout à fait réaliste. Les négociations intersessions tenues à Bonn en juin de cette année n'ont pas permis de réaliser beaucoup de progrès. Les activités intersessions informelles, telles que le Forum ministériel sur le MDP à Ottawa, en septembre, une réunion ministérielle restreinte au Japon, en septembre, les réunions des hauts fonctionnaires du G8, en juillet et octobre, et la réunion du bureau élargi de la conférence, à Buenos Aires en octobre, ont vraiment permis de mieux comprendre ces questions complexes sur le plan international.

La rencontre sur le MDP dont la ministre Christine Stewart a été l'hôtesse à Ottawa, il y a quelques semaines, s'est avérée particulièrement utile en ce qu'elle a permis de réunir des hauts responsables de certains pays développés et en développement dans une séance exploratoire, libre de négociations, pour se pencher sur un mécanisme conçu expressément pour répondre aux besoins des deux groupes.

Le Canada s'attend qu'on mette l'accent, à Buenos Aires, sur l'élaboration d'un plan de travail, assorti d'un calendrier, visant à régler, au cours des deux à trois prochaines années, les questions en suspens concernant les mécanismes de dérogation. Nous tenterons de faire porter les discussions sur l'élaboration des dossiers et avant tout sur les questions d'ordre pratique telles que la surveillance et la vérification. Nous ferons pression pour en arriver sans tarder à un accord sur les mécanismes de dérogation, puisqu'ils nous permettront de remplir nos obligations de façon rentable. Pour que ces mécanismes atteignent leurs objectifs, ils doivent être souples, axés sur le marché et attrayants pour le secteur privé.

Je cède maintenant la parole à Dick Ballhorn, qui présentera la deuxième partie de notre exposé. Merci, monsieur le président.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Wall. M. Ballhorn sera probablement notre prochain intervenant.

[Traduction]

M. Richard Ballhorn: Oui. Je m'attacherai essentiellement aux aspects touchant les négociations internationales.

J'aimerais commencer par signaler que les négociations à Kyoto faisaient intervenir trois grands blocs qui se retrouveront à Buenos Aires le mois prochain. Premièrement, il y a les pays en développement qu'on qualifie de G-77 et la Chine. Deuxièmement, il y a l'Union européenne, c'est-à-dire 15 pays d'Europe de l'Ouest, qui sont, dans certains cas, de nouvelles républiques. Ce sont les États qui veulent se joindre au processus. Il nous arrivera parfois de faire front commun avec eux. Troisièmement, on retrouve le Groupe dit «de coordination», c'est-à-dire le Canada, les États-Unis, le Japon, la Nouvelle-Zélande, l'Australie, la Russie et, je crois, la Norvège et l'Islande. J'en ai peut-être oublié un ou deux.

Ce sont essentiellement les trois blocs de négociation, et chacun d'eux a sa propre optique et ses propres visées.

• 0940

Les pays en développement craignent—je simplifie peut-être un peu—qu'en mettant trop l'accent sur l'élaboration du Protocole de Kyoto, on mette de côté leurs préoccupations traditionnelles. Ils veulent que des mesures soient prises, en matière de changement technologique, pour atténuer les répercussions des actions menées par les pays développés dans leur lutte contre les changements climatiques et pour minimiser les effets des changements climatiques sur les pays en développement, tels que la désertification et l'augmentation du niveau des océans. Ils font preuve de prudence, voire de méfiance, à l'égard des échanges internationaux de droits d'émission parce que des instruments de ce genre, axés sur le marché, sont relativement nouveaux et qu'ils n'ont jamais été mis en oeuvre à une échelle semblable à celle qu'on envisage dans le cadre des actuelles négociations sur les changements climatiques.

Cela dit, certains pays en développement, particulièrement de l'Amérique latine, voient le MDP d'un oeil très favorable.

L'Union européenne entretient également certaines préoccupations au sujet des échanges de droits d'émission internationaux. Elle s'inquiète que les États-Unis ne s'en tirent grâce à l'argent et préférerait plutôt qu'on entreprenne des actions qui cibleraient au premier chef des politiques et des mesures nationales, afin d'assurer des règles du jeu plus équitables.

L'UE craint tout particulièrement que les échanges internationaux de droits d'émission et d'autres mécanismes dits «de dérogation» ne soient utilisés par les États-Unis et par d'autres pour obtenir un avantage concurrentiel. Le Canada ferait partie de ce groupe, car notre position se rapproche beaucoup de celle des États-Unis.

Certaines questions de portée générale touchent tous les mécanismes de dérogation.

En premier lieu—j'estime que c'est un élément très important pour la réponse du Canada—l'UE a proposé un plafond quantitatif, déterminé à l'échelle internationale, à l'utilisation des mécanismes de dérogation, qui limiterait de façon officielle l'ampleur du recours à ces mécanismes par les Parties.

Pour l'instant, le Canada a l'intention d'opérer la majorité de ses réductions au pays même, pour des raisons tant économiques qu'environnementales. Toutefois, notre pays ne peut accepter un plafond fixé à l'échelle internationale puisqu'on s'attend que toute limite imposée au recours aux instruments de dérogation engendrera une augmentation du coût de la mise en oeuvre du Protocole et limitera les options d'atténuation du Canada et d'autres pays. De plus, l'Administration et le Congrès des États-Unis ont affirmé clairement qu'une telle limite compromettrait les perspectives d'une ratification par les États-Unis.

Lors de la CdP4, la Conférence des parties, qui aura lieu à Buenos Aires au début de novembre, le Canada, afin de faire avancer les négociations, insistera sur le besoin d'user de pragmatisme et de mettre l'accent sur ce qu'il est possible de réaliser dans les domaines plus pratiques et techniques. Nous accepterions de discuter avec l'UE et le G-77 des solutions de rechange qualitatives à un plafond quantitatif, telles que des comptes rendus périodiques sur les actions internes, qui ne limiteraient pas la souplesse globale du Canada.

Deuxièmement, l'UE et certains pays du G-77 ont affirmé que certaines réductions ne devraient pas être comptabilisées dans les mécanismes. Ils soutiennent que puisque les réductions en Russie et en Europe de l'Est sont survenues avant tout en raison de l'effondrement économique plutôt qu'à la suite d'actions distinctes visant à régler le problème du changement climatique, elles ne sont pas «authentiques».

Le Canada a rejeté cette position et soutenu que cela revient à remettre en question les objectifs de Kyoto, ce qui réduirait l'accord en lambeaux. Ce qui importe, c'est l'objectif global convenu à Kyoto, et non les modalités de sa poursuite.

Une autre question générale est de savoir si les éléments d'imputabilité des trois mécanismes de dérogation devraient être liés à l'élaboration du régime de conformité plus général du Protocole. L'UE suggère de tels liens, ce qui, à notre avis, pourrait retarder la mise en place des mécanismes.

Les Canadiens ont un intérêt particulier pour la question des puits de carbone. Le Canada continue de souscrire à une approche qui favorise l'amélioration des puits anthropiques (ou fabriqués par l'homme) et la réduction des sources. Il importe également que tout protocole ayant force obligatoire traite les sources et les puits de façon uniforme.

Ainsi, nous sommes d'avis qu'il ne devrait y avoir aucune limite aux activités inscrites dans le Protocole à titre de puits anthropiques, et que les pays devraient se voir reconnaître les améliorations apportées à leur capacité à ce chapitre, conformément aux intentions du Protocole et aux règles déjà établies concernant les puits limités.

• 0945

Le Canada continuera à faire des démarches en faveur de l'inclusion de tous les puits anthropiques, particulièrement les sols agricoles, dans les efforts mondiaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Parallèlement aux négociations internationales, nous continuerons de faire valoir la nécessité d'améliorer les méthodologies et les procédés de vérification des puits forestiers, sous réserve d'un traitement approprié des perturbations naturelles, et de prôner des lignes directrices reflétant les préoccupations du Canada au sujet du traitement des produits forestiers.

Nous continuerons de favoriser la participation des pays en développement à la lutte contre les menaces posées par les changements climatiques. La participation de ces pays est nécessaire tant pour assurer la ratification que pour reconnaître le problème des industries des pays développés mis en situation de désavantage comparatif par rapport à leurs concurrents des pays en développement.

Nous continuerons à favoriser la participation des pays en développement en empruntant trois voies simultanées, qui se renforcent mutuellement. Premièrement, nous exercerons des pressions à propos des questions qui nous préoccupent, négocierons avec les pays en développement et conclurons des partenariats. Ce faisant, nous avons pour objectif de susciter, durant la deuxième période d'engagement, c'est-à-dire la période suivant l'année 2008 et l'année 2012, l'engagement de tous les pays qui ont à la fois des responsabilités à l'égard des émissions et la capacité économique correspondante.

Il faut toutefois faire preuve de réalisme quant aux perspectives de réaliser des progrès immédiats concernant l'engagement des pays en développement. Les perspectives d'engagement sont pour l'instant peu reluisantes, puisqu'il s'agit d'engagements officiels, comparativement à d'autres sortes d'activités réelles. Et le recours à des mesures énergiques risque d'être improductif.

Nous n'arriverons, avec le temps, à réaliser notre objectif qu'en tenant compte, avec sensibilité, des préoccupations des pays en développement et, particulièrement, de l'accent qu'ils mettent sur le développement durable et leurs besoins en technologie propre. Le Canada cherchera des occasions de répondre à ces préoccupations en gagnant la confiance des pays en développement et en collaborant avec eux à des projets de changements climatiques qui permettront en même temps de réduire les émissions de gaz à effet de serre à l'échelle mondiale.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Ballhorn.

Monsieur Hornung, je vous en prie.

M. Robert Hornung: Je vous remercie, monsieur le président.

Lorsque le commissaire à l'environnement et au développement durable a publié son rapport plus tôt cette année, j'ai trouvé qu'il s'agissait d'un excellent document. J'étais entièrement d'accord avec sa conclusion, selon laquelle une mauvaise planification et une gestion inefficace sont les principales raisons pour lesquelles le Canada n'a pu respecter ses engagements concernant les changements climatiques. Je crois toutefois que le commissaire a omis de mentionner une question également importante: l'absence de volonté politique et de leadership sur cette question.

Maintenant que nous avons abandonné l'idée de respecter l'engagement pris à Rio de stabiliser les émissions de gaz à effet de serre, nous devons maintenant envisager ce que nous ferons en ce qui concerne Kyoto. Il vaut la peine d'examiner comment ce que nous avons fait depuis Kyoto répond à certaines des préoccupations qui ont été soulevées par le commissaire dans son rapport.

Il ne fait aucun doute que le gouvernement fédéral a pris des mesures pour mettre de l'ordre dans son dossier des changements climatiques. Je crois que la création du Secrétariat des changements climatiques, dirigé par David Oulton, constitue un pas dans la bonne direction à cet égard. Cependant, je ne crois pas que le gouvernement fédéral ait réellement démontré un leadership dans ce dossier. Il n'a pas encore mis en oeuvre un ensemble initial de mesures spécifiques et significatives visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Franchement, le leadership du gouvernement fédéral est crucial, parce que si le gouvernement ne réussit pas à prouver qu'il veut prendre des mesures sur cette question, il est peu probable que les provinces donnent l'exemple ou que l'industrie prenne l'initiative. Écoutez, même les citoyens canadiens ne réagiront pas sans un signal clair du gouvernement fédéral.

Il est vrai qu'à la récente réunion conjointe des ministres, le gouvernement fédéral a annoncé ce qu'il planifiait de faire avec les 150 millions de dollars destinés au fonds de mesures relatives aux changements climatiques du dernier budget. Une partie importante de ce montant servira à soutenir le processus et les travaux analytiques présentement en cours. J'en reparlerai plus tard. Une autre partie de ce montant permettra de soutenir l'éducation sur les changements climatiques. Bien entendu, il est impossible de nier l'importance d'une meilleure compréhension du public des changements climatiques et d'une plus grande sensibilisation à cet égard—on doit au contraire appuyer fortement ces principes—, et cela ne contribuera pas directement à la réduction des émissions. Nous devons reconnaître que les personnes qui seront ciblées par cette campagne d'information ne sont directement responsables que d'environ le quart des émissions à effet de serre.

Les gens commencent rapidement à se heurter à des obstacles lorsqu'ils tentent de prendre des mesures pour réduire les émissions. Par exemple, on peut dire aux gens de délaisser leurs autos et de prendre l'autobus, mais à condition seulement qu'il y ait en place un réseau de transport en commun efficace. On peut également les inciter à recourir à des moyens écologiques pour s'approvisionner en électricité, mais cela ne fonctionnera que si on offre ces produits sur le marché.

Donc, si vous voulez lancer une initiative d'information, celle-ci doit, pour être efficace, être mise en oeuvre conjointement avec des politiques complémentaires qui permettront vraiment d'éliminer les obstacles et d'aider les gens à prendre des mesures pour réduire les émissions.

• 0950

La science des changements climatiques bénéficie d'un certain financement, ce qui est excellent. C'est important. Nous devons continuer à atténuer certaines incertitudes. Mais où se trouvait le financement des initiatives qui réduiront les émissions? Une partie du fonds a été mis de côté pour soutenir des initiatives relatives aux nouvelles technologies. Aucune précision n'a été fournie à ce jour, mais j'aimerais souligner qu'il s'agit d'un montant d'environ 17 millions de dollars par année pour les trois prochaines années. Cet engagement n'est pas insignifiant, mais on peut difficilement affirmer qu'il s'agit d'une première étape majeure dans le domaine des changements climatiques.

Le sommaire des décisions prises au cours de la réunion conjointe des ministres révèle que ces derniers ont réaffirmé une approche à deux volets à l'égard des changements climatiques, qui consiste à prendre des mesures préliminaires qui auront des répercussions claires et nettes à court terme, tout en évaluant de façon systématique des mesures de réduction durables. Je soutiens que nous n'avons abordé qu'un seul des deux volets de cette approche. Nous avons établi un processus et nous nous efforçons d'effectuer des analyses, mais nous n'avons pas encore pris ces mesures préliminaires.

Dans le compte rendu des décisions de la réunion conjointe des ministres, on mentionne certaines mesures préliminaires liées principalement à l'information du public. On a discuté du défi volontaire et du programme de registre—de l'amélioration de ce programme afin de le rendre plus efficace. Franchement, ce programme existe depuis 1995. Depuis, à chaque réunion conjointe des ministres, on a affirmé que nous devons renforcer et améliorer le défi volontaire, mais je crois que cela ne se produira pas, à moins que nous ne mettions en oeuvre certaines mesures complémentaires qui inciteront les gens à prendre volontairement des mesures.

Nous, du Pembina Institute, avons effectué un examen annuel de la participation des entreprises au programme, et je peux vous dire avec certitude que seulement une très petite minorité de sociétés—qu'on peut probablement compter sur les doigts d'une main—prennent sérieusement de nouvelles mesures graduelles pour réduire les émissions de gaz à effet de serre à la suite d'un défi volontaire. On doit lancer des initiatives complémentaires. Les gens ne le feront pas simplement par générosité.

L'autre initiative annoncée durant la réunion conjointe des ministres est un engagement à mettre en oeuvre des systèmes permettant de reconnaître les mesures préliminaires qui seront prises au printemps de l'année prochaine. La reconnaissance des mesures préliminaires est une importante initiative et pourrait constituer la première incitation significative que nous offrons aux sociétés pour les encourager à prendre des mesures. Malheureusement, pour que ce soit une incitation réelle, les sociétés doivent savoir comment elles pourront l'utiliser. Si elles prennent immédiatement une mesure visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et qu'elles reçoivent un crédit qu'elles peuvent appliquer à quelque engagement futur non précisé, cela ne constitue pas vraiment une incitation très importante.

Nous disposons déjà de quelques programmes pilotes au Canada, notamment le programme d'échange de droits d'émission de gaz à effet de serre de la Colombie-Britannique et le programme pilote d'échange de droits d'émissions de l'Ontario. Ils font clairement la preuve que les sociétés ne s'avanceront pas à prendre volontairement des mesures à moins qu'elles ne sachent précisément ce que le crédit leur apportera. Elles ne le feront pas pour obtenir un papier si elles ne savent pas ce qu'il vaut vraiment.

À ce jour, les ministres n'ont donné aucun signal; en fait, ils ont déclaré plutôt clairement que d'ici au printemps prochain, ils n'auront pas pris de décision en ce qui concerne la valeur du crédit. Ils ne sauront pas à quel règlement futur ou à quelle autre mesure qu'ils prendront on pourra appliquer le crédit. Par conséquent, cette incitation, qu'on présente comme la mesure qui déclenchera tout le processus, sera reçue avec froideur. Les ministres doivent reconnaître qu'il ne suffit pas de parler de crédit; ils doivent en fait le définir quelque peu en mentionnant ce qu'il vaut et les raisons pour lesquelles il s'agit d'une véritable incitation.

Ayant travaillé, comme nombre des personnes autour de cette table, sur cette question pendant un certain nombre d'années, je trouve que cette situation est plutôt frustrante. Nous avons commencé cette approche à deux volets en mettant l'accent sur un volet—le processus. Nous devons songer sérieusement à la valeur que nous obtiendrons du processus.

Ce n'est pas comme si nous ne savions pas comment réduire les émissions de gaz à effet de serre. Un processus de 18 mois a été établi en 1993-1994 pour examiner ce que nous pouvions faire pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ce processus a donné lieu à plus de 80 mesures destinées aux gouvernements aux fins d'examen. On a effectué de nombreuses études et analyses concernant les mesures qui peuvent être prises. En fait, votre comité a produit dans le passé des rapports soulignant des mesures qu'on pourrait prendre pour réduire les émissions de gaz à effet de serre au Canada.

Le processus établi, je le crains, n'apportera rien de nouveau. Au bout du compte, nous nous retrouverons avec une autre belle grande collection d'études et de nouveaux renseignements qui nous révéleront essentiellement des choses que nous savons déjà.

• 0955

Encore une fois, ce qui nous manque, et c'était le cas la première fois à Rio, c'est la volonté politique. Et rien ne garantit, à mon avis, que, d'ici à ce que nous en venions à ce processus, on constatera une volonté de la part des gouvernements, fédéral ou provinciaux, d'aller de l'avant et de mettre en oeuvre ces initiatives.

Des mesures préliminaires et la prise de mesures immédiate sont importantes et ce, pour plusieurs raisons. Plus nous retardons l'échéance, plus nous attendons avant de commencer, plus ce sera coûteux pour les Canadiens. Si nous affirmons que nous respecterons l'engagement de Kyoto et que nous prendrons toutes les mesures pour le faire d'ici les cinq prochaines années, plutôt que durant une période de dix ans, cela signifiera des coûts considérables pour le Canada. Nous pouvons commencer maintenant. Il existe des occasions rentables de réduire les émissions dès maintenant.

Il est important d'agir maintenant aussi parce que la réaction aux changements climatiques ne règle pas seulement ce problème. En prenant des mesures pour utiliser de façon plus efficiente les combustibles fossiles afin d'augmenter l'utilisation des sources d'énergie renouvelables, nous serons mieux en mesure de nous attaquer à une diversité d'autres problèmes environnementaux, dont certains sont particulièrement importants du point de vue politique dans certaines régions du pays, comme la qualité atmosphérique urbaine et le smog urbain.

Nous constatons déjà que ces autres polluants engendrent des coûts considérables au chapitre de la santé et de l'économie, et nous pouvons nous attaquer à ce problème à peu près gratuitement en prenant des mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. De telles mesures visant à réduire ces émissions maintenant, grâce à des initiatives dans le domaine de l'efficience énergétique, par exemple, créent également des emplois. Toutes les études révèlent que lorsqu'on investit un million de dollars en efficience énergétique, on crée plus d'emplois que si on investit un million de dollars dans un nouveau type d'approvisionnement énergétique. L'efficience énergétique fait économiser de l'argent aux gens, aux propriétaires de maisons et aux petites entreprises, et contribue également à améliorer la compétitivité de l'industrie canadienne.

De plus, des mesures s'imposent dès maintenant, parce que nous tous ici présents autour de cette table reconnaissons que nous finirons un jour par devoir nous attaquer à cette question des changements climatiques et que tous les pays du monde devront y prendre part. Je peux vous affirmer que les pays en développement ne se bousculeront pas pour s'engager fermement à réduire les émissions de gaz à effet de serre tant que les pays industrialisés comme le Canada n'auront pas prouvé clairement qu'ils ont fait un premier pas. Regardez ce qui est arrivé avec les engagements de Rio. La plupart des pays industrialisés du monde rateront l'objectif de la stabilisation. La plupart d'entre eux feront meilleure figure que le Canada, mais ils ne réussiront pas à respecter leur engagement. Par le fait même, ils n'envoient pas un très bon signal aux pays en développement. Le type de mesures que nous avons observées au Canada depuis Kyoto—c.-à-d. des mesures qui consistent à amorcer un processus et non à mettre en oeuvre de véritables initiatives qui auront un impact direct sur les émissions—envoient également le mauvais signal.

Je crois qu'un processus à deux volets doit jouer un rôle. Si nous décidons d'aller de l'avant et que nous prenons certaines mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, je crois que ce ne serait pas une mauvaise idée—en fait, cela pourrait se révéler utile—d'effectuer certaines analyses et certains travaux supplémentaires sur les changements climatiques. Malheureusement, le processus, tel qu'il a été établi, risque fortement d'être voué à l'échec.

On constate des points de vue très différents à propos de ce que le processus est censé accomplir. Lorsqu'on discute avec des fonctionnaires du gouvernement fédéral, ils nous indiquent que le processus vise à trouver le moyen le plus rentable de mettre en oeuvre le Protocole de Kyoto. Par contre, les fonctionnaires de certains gouvernements provinciaux nous affirment que ce processus nous permettra de savoir si nous devons ou non mettre en oeuvre le Protocole de Kyoto.

Cette différence est importante lorsqu'on tente véritablement de faire fonctionner le processus. Par exemple, le processus devrait-il examiner une suite de mesures qui permettront au Canada de réduire ses émissions de 6 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990? Mais cela ne sera peut-être pas nécessaire si on tente simplement de déterminer si le Protocole de Kyoto est réalisable. On pourrait simplement dire «pas question, cela semble trop coûteux, ne nous préoccupons pas de cette question»—et il y a certainement des gens qui auront ce point de vue durant le processus.

Les tables de concertation dont M. Oulton a parlé sont très vastes et difficiles à gérer, et je crois qu'elles ne permettent pas de formuler efficacement des propositions de mesures. Il n'existe pas encore de mécanisme précis permettant de se servir des travaux de chacune des tables de concertation pour les intégrer dans ce qui pourrait être un plan d'action. De nombreux intervenants, environnementalistes et membres de l'industrie confondus, attendent et se demandent ce qui se produira et s'ils devront apporter leur contribution.

En conclusion, il n'est pas certain que le processus permettra d'examiner toutes les options. Par exemple, des discussions sont présentement en cours—et M. Oulton a soulevé cette possibilité—pour déterminer si le processus permettra d'examiner l'échange de droits d'émissions. C'est fantastique, mais franchement, cela aurait dû faire partie de l'ordre du jour dès le début. De nombreuses personnes et études affirmeront que l'échange de droits d'émissions est l'un des moyens les plus rentables d'aborder ce problème. Pourquoi cette question n'a-t-elle pas été mise sur la table dès le début?

• 1000

Je crois que ce processus devra surmonter un grand nombre de difficultés. Comme je l'ai déjà mentionné, je ne suis pas certain qu'au bout du compte, nous aurons réellement fait un pas en avant. Nous nous retrouverons avec un nouveau tas de chiffres. Franchement, ces chiffres sont tous fondés sur des modèles économiques. Ils seront tous remis en question. Ils sont fondés sur une série d'hypothèses que les gens pourront remettre en question. Arriverons-nous à un consensus avec lequel tout le monde finira par se sentir à l'aise? J'en doute.

Les chiffres que nous obtiendrons refléteront-ils de façon plus précise les coûts et avantages de la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto? Probablement pas, parce que les analyses passées avaient tendance à faire fi d'une chose ou deux. Elles avaient tendance à ne pas tenir compte des multiples avantages que peuvent engendrer des mesures. Alors, qu'arrive-t-il lorsqu'on réduit les émissions d'autres polluants urbains? Quel est l'impact sur les coûts de santé de ce genre de chose? Il ne me semble pas évident du tout que tout ce processus permettra d'examiner tout cela. Et je dirais qu'il est à peu près certain que le processus ne visera pas à examiner les coûts de l'inaction. Si on ne prend aucune mesure pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, quel en sera le coût pour le Canada?

Les autres éléments d'analyse sont des questions dont nous discutons depuis environ dix ans. Nous affirmons que nous devons arriver à comprendre ces chiffres. Franchement, il n'y a jamais eu aucun effort sérieux pour tenter d'obtenir ces chiffres, et nous ne serons pas en mesure de le faire durant le processus. Ainsi, encore une fois, au bout du compte, lorsque nous demanderons quels sont les coûts et avantages véritables de la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto, nous n'obtiendrons qu'une partie de la réponse.

J'aimerais également formuler quelques brefs commentaires sur la préparation du Canada à la rencontre de Buenos Aires et sur les éléments internationaux.

Je crois que les témoins précédents ont bien décrit les questions clés dont discutera à Buenos Aires. Il est clair que, parmi ces questions clés, on retrouve les mécanismes de dérogation au Protocole de Kyoto, des initiatives comme l'échange de droits d'émissions, la mise en oeuvre conjointe et le mécanisme pour un développement propre. Pour l'instant, ces mécanismes ne sont pas bien définis. On ne sait pas comment ils fonctionneront, et des négociations sont en cours à ce sujet.

J'aimerais soulever le point suivant. Si ces mécanismes ne sont pas bien définis, ils pourraient servir d'échappatoire de taille aux pays qui n'ont pas réussi à respecter leurs engagements en vertu du Protocole de Kyoto. L'un des exemples mentionnés est la question de ce qu'on appelle l'«air chaud» et le fait que certains pays comme la Russie, à qui le Protocole de Kyoto accorde un objectif très généreux, un objectif qu'il est pratiquement impossible de ne pas réaliser—ce qui signifie qu'ils obtiendront un grand nombre de quotas d'émissions ou de droits d'émissions qu'ils pourront vendre dans le monde sans avoir fait quoi que ce soit pour réduire les émissions.

Je crois que le Canada devrait être à l'avant-plan des efforts visant à s'assurer que toute initiative lancée grâce à l'échange de droits d'émissions, que tout transfert de quotas d'émission soit accompagné d'une preuve confirmant que des mesures spécifiques ont été prises pour réduire les émissions. Nous devons veiller à ce que cette réduction d'émissions ne se résume pas à un bout de papier faisant l'objet de multiples échanges.

Nous devons également nous assurer que les réductions d'émissions effectuées grâce à des initiatives comme le mécanisme pour un développement propre dans les pays en développement sont le résultat de mesures précises. En d'autres mots, nous devons nous assurer qu'elles n'auraient pas été effectuées de toute façon. Cela est important, parce que les pays en développement n'ont pas encore d'engagement à respecter en vertu du protocole, ce qui signifie que, si le Canada investit dans un projet par l'entremise d'un mécanisme pour un développement propre dans un pays en développement et qu'il réduit les émissions de 100 tonnes, il sera autorisé à augmenter ses propres émissions de 100 tonnes.

Si cette réduction dans le pays en développement n'est pas réelle, qu'elle aurait été effectuée de toute façon, non seulement l'environnement n'a rien gagné, mais il a subi une perte. Le Canada est autorisé à augmenter ses émissions, et le pays en développement n'a rien fait pour réduire les siennes. Voilà un vrai problème auquel nous devons nous attaquer.

M. Ballhorn a également parlé brièvement de la question des puits précisée dans le Protocole de Kyoto, et de l'intérêt du Canada à s'assurer que les puits constituent un élément essentiel du protocole et qu'ils font partie de la stratégie de mise en branle du processus. Actuellement, on mentionne les puits dans le Protocole de Kyoto, mais les définitions ne sont pas claires. Certains puits, comme les puits de sol, les puits de sol agricoles, ne sont pas visés par le protocole.

• 1005

Le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat prépare un rapport spécifique visant à cerner ces questions relatives aux définitions et à la méthodologie. Jusqu'à ce que ces questions soient réglées, le Canada devrait s'opposer à toute tentative d'obtenir des crédits pour des activités liées aux puits en vertu du Protocole de Kyoto. Une fois que ces questions seront réglées et que nous aurons un consensus international sur la façon de commencer le processus, eh bien, nous pourrons le mettre en branle.

Enfin, en ce qui concerne les engagements des pays en développement, je terminerai en affirmant, encore une fois, que si nous voulons que les pays en développement prennent des mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, la seule chose importante que nous devons faire est de démontrer que nous prenons nous-mêmes des mesures, ce que nous n'avons pas encore fait.

Merci.

Le président: Merci, M. Hornung.

J'aimerais signaler la présence parmi nous aujourd'hui de l'un de nos distingués collègues, le président du Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales, M. Brent St. Denis, qui a gentiment accepté notre invitation de se présenter ici afin d'entendre les témoins.

Mesdames et Messieurs les membres du comité, le portrait qu'on vous a dépeint est à la fois positif et négatif. M. Hornung nous a certainement rendu un grand service en nous rappelant que cette question n'est pas nouvelle. En fait, comme vous vous le rappelez certainement, le processus a débuté à Toronto en 1988, lorsqu'a eu lieu la première conférence sur les changements climatiques. Le processus s'est ensuite déplacé à l'échelle internationale pour se retrouver à Genève en 1991, puis à Berlin en 1995, et, bien entendu, à Kyoto. Par conséquent, le cerveau humain a appliqué de façon assez intensive ses aptitudes à une diversité de questions liées aux changements climatiques. Il ne s'agit donc pas d'une nouvelle question, et cette dernière ne peut être traitée comme si elle exigeait davantage de réflexion.

Cela dit, il me semble que nous devrions passer à une liste complète de questions et réponses. Comme d'habitude, nous commencerons par M. Gilmour, si cela lui convient, qui sera suivi de M. Godin, de Mme Kraft Sloan, de M. Lincoln, de M. Herron, de Mme Girard-Bujold et de M. Charbonneau. Il n'y aura aucun autre exposé.

Monsieur Gilmour.

M. Bill Gilmour (Nanaimo—Alberni, Réf.): Merci, monsieur le président.

J'aimerais commencer par féliciter M. Emmett de son excellent rapport, qui révèle de façon candide à quel point le gouvernement était mal préparé lorsqu'il s'est présenté à Kyoto. Nous n'avions pas de plan. Nous n'avions aucune idée de la façon dont nous allions respecter les objectifs que nous avions approuvés. En fait, M. Oulton a affirmé aujourd'hui que nous ne le savons toujours pas, et que nous ne le saurons pas avant le milieu de l'année prochaine.

À mon avis, d'autres pays qui avaient fait leur devoir, l'Australie par exemple, qui peut se comparer au Canada—un grand pays peu peuplé—se sont retrouvés avec des objectifs considérablement différents de ceux du Canada. Je crois que c'est en grande partie parce que nous étions mal préparés et que nous nous sommes présentés à Kyoto sans plan représentant le Canada.

Dans trois semaines, nous serons à Buenos Aires. Je suis préoccupé par le fait que nous serons dans une position semblable à celle dans laquelle nous étions lorsque nous sommes allés à Kyoto: nous étions mal préparés.

J'aimerais poser une question à M. Ballhorn: à Kyoto—j'y étais—le cabinet avait donné des directives aux négociateurs, directives qu'ils ne pouvaient pas transgresser. Un changement de position est de nature politique, et c'est ce qui a été fait. Vous qui assisterez aux discussions de Buenos Aires, avez-vous des directives du cabinet ou une orientation des ministres en ce qui concerne la position que prendra le Canada, particulièrement sur la question des puits, qui influence grandement le Canada dans les secteurs de la foresterie et de l'agriculture? Sommes-nous préparés? Avez-vous des directives et des restrictions en ce qui concerne les négociations de Buenos Aires?

• 1010

M. Richard Ballhorn: En fait, nous sommes en train de faire confirmer notre mandat de négociation. Nous devrions l'obtenir d'ici à ce que nous nous rendions à Buenos Aires. On doit adopter, comme d'habitude, une position interministérielles et la présenter au Cabinet pour la faire approuver. Puis, nous partirons munis des ordres du Cabinet.

M. Bill Gilmour: Cela me met très mal à l'aise. De la façon dont vous présentez les choses, il semble que vous prendrez connaissance de vos ordres dans l'avion.

M. Richard Ballhorn: À moins d'un événement fâcheux, nous avons une assez bonne idée de la nature de ces ordres. Mais ils seront officiellement confirmés avant le début de la réunion.

M. Bill Gilmour: En ce qui concerne les puits, avec quelle fermeté défendrez-vous la position du Canada afin que nous ne soyons pas encore plus désavantagés qu'à Kyoto?

M. Richard Ballhorn: Je crois que je dois préciser ce qui se passera à Buenos Aires. Cette réunion visera essentiellement à examiner les questions qui doivent être davantage élaborées et à commencer un processus de discussion. En d'autres mots, ne vous en déplaise, il s'agit d'un autre processus qui consistera à discuter de ces questions et à obtenir un échéancier qui prévoira la fin de ce processus et qui nous permettra de résoudre les points en litige.

M. Hornung a mentionné qu'il existe déjà une étude de ce groupe interministériel portant sur les changements climatiques et la question des puits, qui sera un élément clé. Cette question est essentiellement entre les mains des scientifiques, qui sont en train de l'examiner et qui nous en feront un compte rendu. Mais je crois qu'il est sage d'affirmer qu'à Buenos Aires, nous déterminerons principalement les programmes de travail visant essentiellement à régler la question des puits au cours des deux prochaines années, les règlements relatifs aux mécanismes pour un développement propre, la mise en oeuvre conjointe et l'échange de droits d'émissions.

Si nous faisons des progrès, nous en serons très heureux, mais si on se fonde actuellement sur le genre de réunions que nous avons tenues à ce jour, il ne semble pas que nous en ferons beaucoup plus, à moins qu'il y ait quelques percées surprenantes.

Ainsi, nous ne négocions pas vraiment à propos des puits en tant que tels au chapitre des pourcentages; nous devons essentiellement nous asseoir et convenir que nous devons nous rencontrer pour structurer un programme de discussion, qu'on devrait terminer avant une certaine date, si possible avant l'an 2000, à la CdP6, la réunion qui aura lieu après la prochaine rencontre.

M. Bill Gilmour: Monsieur Oulton, vous devez être extrêmement mal à l'aise lorsque vous tentez d'ébaucher un plan visant à nous révéler la direction que nous allons prendre. Pour mettre les choses en perspective, une réduction de 25 p. 100 des émissions suppose, par exemple, qu'on devrait interdire à toutes les voitures et tous les petits camions l'accès aux routes du Canada. Il s'agit là d'un changement considérable pour les Canadiens, et comme l'a dit M. Hornung, dans de nombreux cas, on n'a pas d'autres choix que d'effectuer certains de ces changements.

M. Ballhorn affirme que les puits et l'échange de droits d'émissions seront négociés au cours des quelques prochaines années. Pourtant, vous avez le mandat d'établir la façon dont nous réaliserons cet objectif. Encore une fois, il semble qu'il y ait beaucoup de discussions et peu de mesures concrètes... Nous disposons de onze ans pour atteindre ce but, et si je comprends bien, nous disposons de deux ans pour négocier des questions clés qui forment le cadre de travail de notre plan.

J'aimerais encore une fois me faire l'écho de M. Hornung: la volonté politique ou la volonté des ministères d'obtenir une réponse semble faire défaut. Nous en discutons beaucoup, mais finirons-nous par prendre de vraies mesures concrètes, et quand?

M. David Oulton: Monsieur le président, je crois que cela ne fait aucun doute, et un certain nombre de personnes ont formulé des commentaires à propos de l'objectif en jeu. Franchement, l'une des raisons pour lesquelles nous avons entrepris ce processus est la suivante: nous avons eu l'occasion d'examiner ce qui n'a pas fonctionné dans le passé et de déterminer si c'était à cause du rapport du commissaire ou d'autres travaux, et il est très clair que nous disposons des outils qui nous permettront d'établir une bonne politique sensée au Canada—une politique du gouvernement fédéral, certes, mais qui doit susciter l'engagement d'autres ordres de gouvernement pour être fructueuse. Voilà tout un projet.

Sincèrement, si nous avons besoin d'un délai d'un an et demi, c'est parce que, même si on a effectué certains travaux analytiques de base, la question des changements climatiques ne peut être réglée en une année, ni même en une décennie. Si nous établissons une stratégie fructueuse qui nous mènera à l'an 2010, elle se prolongera certainement, parce qu'il y aura un processus international permanent. Et comme l'a mentionné Dick, le changement climatique n'est pas une question statique.

• 1015

Lorsque je parle de mettre en place une stratégie—et je conviens qu'elle comprend deux volets—je veux dire que nous devrions prendre des mesures immédiates, non pas des mesures qui faussent le résultat de nos discussions, mais des mesures sensées. Notre intention est d'inciter tant le gouvernement fédéral que, je l'espère, les gouvernements provinciaux à adopter des mesures au cours de la prochaine année, maintenant que notre fonds de mesures est en place, ainsi qu'à établir les bases d'une stratégie qui nous permettra de prendre la bonne direction en 1999-2000 et de continuer à prendre des mesures. Il ne s'agit pas d'une intervention ponctuelle. À mon avis, nous prendrons chaque année, de façon permanente, des mesures à propos des changements climatiques dans le cadre d'un processus de plan ministériel.

On a établi le processus international afin de reconnaître la nature de cette question. Il s'agit donc non pas d'une intervention ponctuelle, mais bien d'une entreprise permanente. Nous tentons désespérément de rattraper le temps perdu, si vous voulez. Depuis 1988, il s'est passé beaucoup de choses. Mais nous avons l'intention de rattraper notre retard, d'établir un bon point de départ pour l'adoption d'une stratégie qui nous permettra de continuer à travailler sur cette question de façon permanente, et non pendant une seule année.

M. Bill Gilmour: Si je comprends bien, les ministres fédéraux-provinciaux ont commandé ou sont en train d'effectuer une analyse économique de l'impact de diverses options. Ces travaux sont-ils effectués indépendamment des autres ou conjointement avec eux? Voici où je veux en venir: on a affirmé qu'aucune région du Canada ne serait touchée plus qu'une autre, et j'aimerais bien savoir où en est cette analyse de rentabilité, et si, en fait, il s'agit d'une étude qui est indépendante de vos travaux.

M. David Oulton: Monsieur le président, je vais répondre à la première partie de la question: cette analyse fait partie de notre processus; elle est donc très liée à nos travaux. Mais si vous me le permettez, Sue Kirby, est ici présente en tant que témoin, participe à ces travaux d'analyse et de conception. Elle pourrait donc vous fournir une réponse plus complète, monsieur le président, si vous êtes d'accord.

Le président: Pourrions-nous avoir une réponse brève, s'il vous plaît? Répondez par oui ou non.

Mme Sue Kirby: Oui, ces travaux font entièrement partie du processus. Ils sont effectués en plusieurs étapes. Comme M. Oulton l'a mentionné, nous nous attendons à ce que la première étape constitue les travaux de base, qui consistent à nous assurer que nous comprenons tous les choses de la même façon. À partir de là, nous franchirons un certain nombre d'étapes analytiques durant lesquelles chaque table devra s'assurer qu'elle examine toute la gamme d'options qui nous permettra d'atteindre l'objectif de moins six et plus, option que nous intégrerons dans un ensemble complet d'analyses économiques qui feront partie intégrante de tout le processus fédéral-provincial. Ces travaux sont effectués par les fonctionnaires du gouvernement, avec la pleine participation des intervenants. Ils font donc partie du processus. Ils seront caractérisés par l'ouverture et la transparence, grâce à un véhicule que nous voulons créer et que nous appelons le forum d'analyse économique des changements climatiques, durant lequel nous veillerons à nous munir d'une diversité d'outils économiques et de modélisations qui nous permettront d'aborder ces questions. Oui, ces travaux font partie intégrante du processus.

Le président: Merci, monsieur Gilmour.

[Français]

Monsieur Godin, suivi de Mme Kraft Sloan.

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): J'ai le plaisir de participer aujourd'hui aux délibérations de ce comité. Je ne suis pas un des membres permanents de ce comité; je siège plutôt aux comités des ressources naturelles et des opérations gouvernementales. Il est intéressant de voir comment se concilient les questions relatives à l'environnement et aux ressources naturelles. Mais le plus important, c'est ce que nous léguerons à nos enfants. Nous devons savoir préserver notre environnement et nos ressources naturelles.

[Traduction]

Ma question s'adresse à M. David Oulton. Vous avez mentionné que l'analyse de la continuité et la consultation permettront de déterminer les mesures de changements climatiques et que nous obtiendrons une réponse en 1999. On a tenu des consultations au cours des dix dernières années, et les émissions de gaz à effet de serre continuent d'augmenter, et non de diminuer au Canada. D'autres pays du globe sont passés à l'action. En raison de la toiture solaire de 1 million des États-Unis, par exemple, on craint que le secrétariat ne limite les mesures immédiates au Canada afin de respecter l'engagement de Kyoto.

J'aimerais soulever immédiatement deux questions auxquelles vous pourrez répondre. Ma première question est la suivante: la province insiste pour que le secrétariat serve à des fins d'analyse, plutôt que d'être un programme de mise en oeuvre, avant que les options officielles ne soient terminées l'année prochaine. Le secrétariat ne sert-il pas à la consultation et à l'analyse plutôt qu'à la mise en oeuvre immédiate d'initiatives actuelles en matière de technologie?

• 1020

Ma deuxième question...

Le président: Pourrions-nous obtenir une réponse à la première question?

M. David Oulton: Le secrétariat, tant national que fédéral, examine également des mesures préliminaires.

Vous avez mentionné la technologie, l'un des secteurs dans lesquels nous prendrons des mesures. En effet, sur les 150 millions de dollars, 56 millions de dollars seront consacrés au développement et au déploiement des technologies. Dans l'optique du gouvernement fédéral, nous encourageons également les provinces à s'engager elles-mêmes dans ce processus. Par conséquent, chaque fois que les ministres se rencontrent, nous nous demandons qui prend d'autres mesures préliminaires. Franchement, nous ne faisons que commencer, et, comme on l'a mentionné plus tôt, cela fait partie de l'entreprise à laquelle nous devrons consacrer plus d'attention.

M. Yvon Godin: Ma deuxième question est très brève. Dans ce secteur, les provinces peuvent-elles participer au financement fédéral du plan d'action immédiat d'ici 1999 et le prochain budget fédéral?

M. David Oulton: Si je comprends bien, les provinces participent au financement. En fait, elles financent conjointement les coûts du secrétariat national selon la formule que le Conseil canadien des ministres de l'Environnement a utilisée pour le partage fédéral-provincial. Elles partagent également les coûts, si vous voulez, des travaux analytiques relatifs aux tables de concertation. Il s'agit donc d'une entreprise conjointe, même si le gouvernement fédéral fournit la plus grande partie des fonds qui soutiennent cette analyse.

En ce qui concerne les mesures préliminaires dans le secteur des technologies, de l'enseignement public ou des sciences, il s'agit d'initiatives individuelles. Ainsi, les initiatives que nous avons annoncées à Halifax sont propres au gouvernement fédéral, mais nous avons souvent collaboré avec tant les provinces que le secteur privé. Les provinces et le gouvernement fédéral, ainsi que, souvent, le secteur privé ou un organisme non gouvernemental, collaborent donc ensemble et financent conjointement une initiative. Mais chacune de ces initiatives sera différente: certaines peuvent être uniquement fédérales, d'autres uniquement provinciales, et d'autres encore obtiendront un financement conjoint.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Godin.

[Traduction]

Laissez-moi maintenant souhaiter la bienvenue encore une fois à M. Brent St. Denis, président du Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales, et le remercier d'avoir pris le temps de se joindre à nous aujourd'hui pour participer à cet exercice relativement important.

M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, monsieur le président. Je suis désolé, j'ai été retenu de force pendant quelques minutes.

Le président: Au tour de Mme Kraft Sloan, qui sera suivie de M. Lincoln.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Je vous remercie beaucoup.

J'ai examiné la page 3 du mémoire présenté par le ministère des Affaires étrangères, et l'on y dit que l'UE a proposé un plafond quantitatif déterminé à l'échelle internationale à propos de l'utilisation des mécanismes de dérogation. Ma préoccupation est la suivante: présentement, le Canada n'appuie pas beaucoup cette proposition de l'UE, et l'une des raisons qui ont été citées est l'augmentation du coût de la mise en oeuvre du protocole. Mais je ne suis pas certaine que tous les coûts ont été inclus.

Si nous nous trouvons dans une situation où, à mon avis, beaucoup des choses dont nous parlons ont plus à voir avec la comptabilité et la réduction du papier qu'avec de réelles réductions mesurables à l'échelle de l'équilibre de la nature—par exemple, la question de l'air chaud à régler avec la Russie, entre autres—et si les mécanismes de dérogation ne sont pas clairement en place, comme on l'a laissé croire, il peut y avoir des échappatoires.

Si nous ne mesurons pas les réductions à l'échelle de l'équilibre naturel, nous continuerons d'augmenter l'émission de gaz à effet de serre et de sentir les répercussions des changements climatiques sur notre santé.

J'ai parlé à un de mes amis qui est médecin. Il a fait, ici à Ottawa, un exposé sur cette question. Il a parlé des 600 morts causées par la chaleur, des problèmes que vivent certains de nos citoyens, des questions relatives à la dengue, des questions économiques, de la perte de propriétés et d'une foule de choses, qui ont été clairement démontrées par des études canadiennes.

Quand nous parlons des coûts, nous ne parlons pas seulement d'une certaine catégorie de coûts, nous devons tenir compte de tous les coûts et penser de façon plus large. J'aimerais donc avoir quelques réponses sur le fait que le Canada refuse de soutenir le plafond suggéré par l'Union européenne dans le cadre des mécanismes de dérogation.

• 1025

M. Jim Wall: Monsieur le président, nous ne croyons pas qu'il soit utile de consacrer du temps, à Buenos Aires ou ici dans les minutes qui suivent, à un débat sur les principes qui sous-tendent ce plafond. Il y a déjà tant à faire pour étoffer les mécanismes de dérogation et pour nous assurer qu'ils peuvent fonctionner. Et je crois que beaucoup de personnes reconnaissent ce fait, même à l'intérieur de l'Union européenne. Donc, comme nous ne disposerons pas de beaucoup de temps, à Buenos Aires, il ne faudra pas utiliser notre énergie et un temps précieux à discuter de plafonds, de leurs avantages et inconvénients, de leur mise en place éventuelle, etc. Nous croyons tout simplement que nous devrions utiliser notre temps de façon plus productive.

Mme Karen Kraft Sloan: Et bien, je crois qu'un plafond permettrait de clarifier l'utilité des mécanismes de dérogation, et que ce n'est donc pas une perte de temps. Le fonctionnement de quelques-uns de ces mécanismes manque de clarté. Selon divers points de vue, et selon diverses personnes à qui j'ai parlé des programmes d'échange de droits d'émission et de ces sortes de choses, cela est utile pour une période de transition. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut continuer à faire, parce que nous avons de réelles réductions à faire.

Dans le processus de clarification, je crois qu'il faudrait discuter d'un plafond général et de la mesure dans laquelle les mécanismes de dérogation seront utilisés pour répondre aux exigences de Kyoto. Donc, je ne crois pas que ce soit une perte de temps. Je crois qu'il faut discuter ici même de toute la question de l'utilité des mécanismes de dérogation.

M. Jim Wall: Dois-je répondre, monsieur le président?

Le président: C'est la raison de votre présence ici.

M. Jim Wall: Je parlais des résultats à court terme de la conférence de Buenos Aires. Il ne fait pas de doute qu'elle servira à clarifier les mécanismes de dérogation et le programme de travail que nous espérons élaborer. La mesure dans laquelle vous pouvez ou devriez utiliser les mécanismes de dérogation est une question qui fera partie d'un plan de travail.

Quand on parle, par exemple, du mécanisme pour un développement propre, c'est à la conférence, qui réunit les parties, que revient la définition de ce que veut dire «partie de». Et quand on parle des deux autres mécanismes, l'échange de droits d'émission et la mise en oeuvre conjointe, le protocole de Kyoto dit qu'ils doivent être complémentaires.

L'Union européenne et les pays en développement discuteront sans aucun doute de cette question, des façons de l'aborder et de son importance relative.

Mme Karen Kraft Sloan: Quelqu'un peut-il expliquer comment les puits seront utilisés, ou préciser la position que vous prendrez à ce sujet?

Le président: Monsieur Oulton, vous pourriez peut-être répondre.

M. David Oulton: M. Wall m'a dit qu'il avait un expert, ici, qui pourrait probablement répondre mieux que moi.

Le président: Pourriez-vous nous donner votre nom?

M. Art Jaques (chef, Émissions de gaz provoquant de l'effet de serre, Environnement Canada): Oui, je m'appelle Art Jaques. Je travaille à Environnement Canada.

Si je comprends bien, on me demande comment nous utiliserons les puits. Présentement, le protocole limite leur utilisation à trois activités: la reforestation, l'afforestation et la déforestation entreprise après 1990. Voici comment on devrait procéder: le changement de volume provoqué par ces activités, pendant la période à laquelle nous nous sommes engagés, c'est-à-dire de 2008 à 2012, devra être ajouté ou soustrait du volume désigné, selon qu'il s'agit d'un puits ou d'une source—la déforestation est de toute évidence une source.

Nous y travaillons encore, pour le Canada... Comme la reforestation est une expression qui n'est pas encore bien comprise, il en existe plusieurs définitions. Certains limitent la reforestation à un changement d'utilisation du sol, ce qui, en fait, signifierait reconstitution forestière et ne constituerait pas une activité forestière et, en conséquence, limiterait les puits au Canada. Il n'y aurait aucun crédit pour la reforestation effectuée dans les forêts actuelles. L'autre définition de la reforestation est un peu plus large et inclut ces deux activités.

• 1030

En fait, les avantages réels pour le Canada seraient une réduction de la déforestation, et les chiffres qui s'y rapportent sont très flous. Ils dépendent de l'estimation qu'on a faite de sa superficie et des espèces d'arbres qu'on y trouve, exprimés en quantité de carbone qu'ils contiennent.

Actuellement, nous estimons que la déforestation se situe entre deux et 19 mégatonnes. La table de concertation sur les puits se penchera, entre autres, sur cette question et ajustera ces estimations en collaboration avec la table de concertation sur les forêts.

Quant à l'afforestation éventuelle, les efforts sont, à ce jour, plutôt faibles. Ils se situent entre une et deux mégatonnes. Ce sont les chiffres que nous avons en main aujourd'hui.

Mme Karen Kraft Sloan: Qu'est-ce que l'afforestation?

M. Art Jaques: L'afforestation consiste à planter des arbres sur des terrains où il n'y en avait pas auparavant, c'est un changement d'utilisation du sol.

Les chiffres estimatifs nous sont fournis par Tree Canada, qui a depuis quelques années un programme de plantation d'arbres dans les centres urbains. Le reste de l'afforestation se fait surtout selon un processus naturel—par exemple, dans les sols agricoles stériles.

Aujourd'hui, selon la définition, nous pourrions être une source plutôt qu'un puits. Mais, si nous entreprenons une afforestation importante...

Le président: Pourriez-vous expliquer comment nous pourrions être une source plutôt qu'un puits?

M. Art Jaques: S'il s'agit vraiment de 19 mégatonnes lorsqu'on parle de déforestation, par exemple, et que l'estimation de la reforestation est de seulement deux mégatonnes—et encore, l'afforestation nous donne un puits de seulement deux mégatonnes—faites le calcul et vous verrez bien que nous sommes une source, 19 mégatonnes moins environ quatre mégatonnes.

Si nous prenons la reforestation au sens plus large, les deux estimations reliées à la regénération naturelle et à la reforestation par la plantation et l'ensemencement après la récolte, les estimations sont d'environ 12 mégatonnes au total.

Étant donné l'échelle, nous ne savons pas trop bien quel rôle nous jouons, mais c'est ce que nous essayons de faire, de mieux contrôler la situation. Toutefois, si nous mettons sur pied un programme d'afforestation important, nous avons une superficie potentielle d'à peu près huit millions d'hectares, ce qui équivaut à peu près à la superficie du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard. C'est actuellement l'estimation de la superficie disponible pour l'afforestation. Les terres disponibles se trouvent surtout dans les Prairies, où il y a des sols qui ne sont pas présentement utilisés pour l'agriculture.

Mais c'est une hypothèse. Si vous mettez sur pied un programme qui vise à faire des plantations sur 10 p. 100 de cette superficie chaque année, pendant 10 ans, vous pourriez aboutir à un puits de 30 mégatonnes pendant la période d'engagement. Ce puits grandirait, tout simplement parce que les arbres grandissent. Vous auriez un puits plus grand dans les autres périodes d'engagement, à l'avenir.

Nous devons encore travailler à l'établissement des coûts. Cela pourrait être plus coûteux que la réduction de l'émission des gaz à effet de serre.

Le président: Merci.

Nous donnons maintenant la parole à M. Lincoln, qui sera suivi par Mme Girard-Bujold.

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le président, ce qui me frappe lorsque j'écoute les présentations d'aujourd'hui, c'est la différence de points de vue entre M. Emmett et M. Hornung, d'un côté, et les fonctionnaires, de l'autre. Je crois que MM. Emmett et Hornung ont clairement indiqué que nous aurions peut-être besoin de leadership et de vision pour enfin nous mettre à agir. Il me semble que, selon les fonctionnaires, toutes les présentations demandent plus d'analyses, plus d'étude, plus de documentation et plus de conclusions.

Certaines choses m'ont vraiment frappé dans la présentation de M. Oulton, qui parlait d'examiner les conséquences de Kyoto avant de ratifier le protocole, comme si nous n'avions pas l'intention de le ratifier. J'espère que nous allons tout de même le ratifier, parce que je crois que nous nous sommes engagés envers le monde entier. Qu'est-ce qui se passera si les conséquences sont vraiment importantes pour notre pays? Nous ne ratifierons pas?

J'espère que nous ne perdrons pas trop de temps à analyser des phénomènes qui, on l'a indiqué, sont bien connus.

• 1035

Ce qui me frappe, quand on pense à la lutte contre les pluies acides, dans les années 80, c'est que nous avons joué un rôle de leader et que le Canada a mis sur pied son propre programme. En fait, nous avons obligé les États-Unis à agir. Nous avons établi un leadership qui a permis aux sénateurs Mitchell et Stafford et au député au Congrès Waxman, entre autres, de légiférer au Congrès, et ils ont même amené l'administration républicaine, elle-même, à produire la Clean Air Act. Je crois que le fait que nous ayons établi des critères élevés, clairs et précis pour chacune de nos actions, leur a été très utile.

Aujourd'hui, je crois que nous sommes tellement préoccupés de ce que les États-Unis pourraient faire que nous nous disons, eh bien, si nous nous rapprochons trop des Européens sur la question des plafonds, les États-Unis seront très fâchés; ils pourraient ne pas vouloir ratifier. J'aimerais souligner qu'ils n'ont pas ratifié la convention sur la biodiversité, et nous pourrions attendre jusqu'au jugement dernier avant qu'ils le fassent, si jamais ils le font, à cause de leur politique intérieure.

Je crois que je suis très content de la création du secrétariat. À tout le moins, c'est un organe de coordination. Mais je me demande, et j'aimerais poser la question à M. Emmett, si nous n'avons pas créé une hydre de Lerne là où nous avons déjà trois ministères...

Le ministère de l'Environnement est aujourd'hui le numéro deux ou trois du groupe. On dit qu'il est responsable du leadership à l'échelle internationale, et que le ministère des Ressources naturelles est responsable du leadership intérieur. Ne me demandez pas si cela tient debout; à mon sens, les deux sont intimement reliés. Mais, de plus en plus, le ministère de l'Environnement sert de faire-valoir pour le tandem, et le leadership s'est déplacé; en fait, il n'y a plus de leadership.

C'est peut-être là que se situe notre problème. Tout en écoutant les présentations, je me disais qu'on pourrait peut-être tout simplement confier tout le programme à Robert Hornung et au Pembina Institute, et je suis sûr que nous verrions des résultats instantanément. J'en suis convaincu. Au lieu de cela, nous allons gaspiller notre salive pendant je ne sais combien de temps encore, à parler de souplesse.

M. Wall a parlé des mécanismes de dérogation et suggéré que nous regardions du côté des marchés et des dérogations, pour atermoyer et obtenir des crédits, et nous pouvons alors le démontrer. Si nous persistons à regarder les échappatoires et les mécanismes de dérogation et les puits de carbone—et notre expert vient de nous dire qu'il est difficile de savoir exactement de quoi on parle, parce que les estimations sur la déforestation varient de deux à 19 mégatonnes—je me demande comment nous trouverons à temps une échappatoire qui nous permette de prouver que nous avons 25 p. 100 à rattraper, et 25 p. 100 dans les puits et les dérogations proposées, et les échanges de droits d'émission, de façon à ne pas perdre la face devant le monde.

Monsieur Emmett, j'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec M. Hornung lorsqu'il dit que nous avons assez de données et assez d'information entre les mains pour mettre sur pied quelques programmes avec les 150 millions de dollars qui doivent servir à établir des exemples, de façon à encourager les Canadiens. Cela nous permettra de comprendre le processus et aussi de prouver au monde entier que nous voulons vraiment réduire ces émissions en réalité, non seulement au chapitre des crédits.

M. Brian Emmett: Merci, monsieur Lincoln. Je vais essayer de répondre de mon mieux. Votre façon d'amener la question était très intéressante et vraiment très large.

Le travail que David Oulton et ses collègues abattent, selon moi, est un effort fait en toute bonne foi pour atteindre les objectifs que le Canada a accepté de partager.

Ensuite, je crois que le partenariat est la meilleure approche à utiliser dans des questions de ce type—partenariats internationaux, partenariats nationaux.

• 1040

Enfin, en tant que commissaire, je crois qu'il est beaucoup trop tôt pour savoir si nous aurons des résultats. Au bout du compte, selon moi, c'est une question très terre-à-terre—savoir si cette façon de procéder donnera des résultats.

Une des choses qui me perturbent un peu, c'est qu'on n'a pas discuté beaucoup des questions dont j'ai parlé dans mon rapport du mois de mai. Nous disposons d'un partenariat pour réagir au problème environnemental, qui est probablement le plus complexe dont nous ayons eu à nous occuper, et je pourrais comparer ce partenariat à celui que je mettrais sur pied si je voulais ouvrir un petit magasin avec mon voisin, au chapitre du volume de documents, des détails sur les attentes des partenaires, de l'existence d'échéances ou de plans de rechange. Nous n'avons pas toutes ces données. Il n'y a à ce jour, dans le plan de travail du secrétariat, aucun indice qui ressorte. Je crois vraiment qu'il faut documenter ce sujet. Nous devrions prendre des dispositions de type commercial pour nous assurer que les partenaires sont responsables de leurs résultats et que nous n'avons pas à payer les pots cassés, si vous me passez l'expression, pour tous ceux qui travaillent au processus.

Nous avons donc décidé de suivre le conseil du comité et d'étudier le plan que le secrétariat produira d'ici deux ans, et pendant ce temps, nous essayerons de produire une étude qui fasse autorité. Mais, pour le moment, je crois qu'il est un peu prématuré de porter un jugement. Plusieurs choses sont encourageantes, mais plusieurs me semblent présenter des lacunes.

M. Clifford Lincoln: J'aimerais poser une question à M. Hornung avant de conclure. Monsieur Hornung, vous dites que nous avons assez d'informations en main depuis dix ans et que nous pourrions passer rapidement à l'action. Si vous aviez en poche 17 millions de dollars, ou encore mieux, 150 millions pour les trois prochaines années, par quoi commenceriez-vous? Quelles seraient vos priorités?

M. Robert Hornung: C'est une excellente question. Je vous remercie.

Je dois d'abord dire—et la plupart des membres du comité le savent déjà—que vendredi dernier nous avons déposé un rapport intitulé Canadian Solutions, fait en collaboration avec la Fondation David Suzuki, qui expose une série de mesures qui permettraient au Canada de répondre aux engagements pris à Kyoto, en utilisant des technologies qui existent déjà ou encore en mettant en place des initiatives spécifiques qu'ont déjà prises d'autres pays. Ce que nous voulons prouver avec ce rapport, c'est qu'aborder le changement climatique en prenant comme point de départ les engagements pris à Kyoto ne cause aucun problème au chapitre de la technologie. Nous possédons la technologie nécessaire.

Il s'agit plutôt d'une question de volonté politique et de barrières à faire tomber. Par exemple, je dirais que si nous voulons prendre des initiatives de premier niveau, nous chercherions des moyens de capter le potentiel d'efficience énergétique des édifices. Il y a un nombre d'occasions incroyable, à la fois dans le secteur résidentiel et le secteur commercial. Par le passé, nous avons tenté d'encourager ce genre d'initiatives par des programmes d'information ou des programmes semblables.

Si j'avais un certain montant d'argent, j'en accorderais à ces initiatives, mais un peu seulement. Je préférerais inciter les gens à prendre les moyens de réduire leur utilisation d'énergie et d'améliorer leur efficience énergétique, ou, par exemple, les encourager à passer par-dessus les premières barrières. Plusieurs personnes qui veulent investir dans l'amélioration écoénergétique de leur maison hésitent à le faire parce que le prix à payer pour évaluer les possibilités leur semble trop élevé. Mais, une fois qu'ils ont analysé les occasions qui s'offrent à eux, vous les trouvez prêts à faire toutes sortes d'investissements. En Ontario, il existe un programme appelé Green Communities Initiative. L'évaluation de l'efficience énergétique d'une résidence coûte 150 $. Cela rebute plusieurs propriétaires, mais ceux qui ont investi ces 150 $, pour savoir quelles possibilités s'offrent à eux investiront en moyenne 1 300 $ en améliorations écoénergétiques parce qu'ils trouvent que c'est plein de bon sens et qu'ils pourront économiser beaucoup d'argent.

On parle de faire tomber les barrières et de prendre des initiatives pour inciter les gens à cerner les occasions qui s'offrent à eux, et à aller de l'avant pour les réaliser. Si quelqu'un peut démontrer que ces initiatives, en plus d'être utiles, représentent un investissement dans l'efficience énergétique qui se reflétera dans leur facture, pourquoi ne pas leur accorder un crédit d'impôt pour couvrir ces frais ou pour compenser une partie de l'investissement?

• 1045

Jusqu'ici, nous nous sommes occupés exclusivement des approches volontaires et éducationnelles. Je crois qu'elles auront un rôle à jouer au chapitre de la mise en place du Protocole de Kyoto, mais ce n'est qu'un aspect d'une solution plus large. Vous devez établir des normes minimales qui vous permettront d'aller plus loin, et vous devez offrir des incitatifs fiscaux.

Alors, je le répète, si j'avais à choisir un projet dans chacun des secteurs, je dirais, quant à la demande d'énergie, qu'il faut trouver des incitatifs à l'investissement dans l'efficience énergétique. Dans le domaine du transport, il faudra subventionner le transport public et les modes de transport écologiques. Il faut que certains règlements aillent plus loin. Il faut exiger qu'on retire le méthane des sites d'enfouissement. Pour la construction résidentielle, il faut imposer des normes, comme celles de la maison R-2000, qui existent depuis environ 20 ans.

Il existe toute une gamme d'initiatives. Je ne peux pas m'asseoir ici, établir les coûts et dire voilà ce que ce sera. Mais, une fois de plus, il n'y a pas de pénurie, et je crois que nous devrions nous pencher sur l'ensemble des programmes réglementaires, budgétaires et informatifs pour aller de l'avant.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Lincoln. Madame Girard-Bujold, suivie de M. Charbonneau.

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur Emmett, dans votre rapport, vous dites qu'il faut repenser en grande partie les mesures prises par le Canada en vue de la réalisation de l'orientation stratégique du programme d'action nationale concernant les changements climatiques.

Selon vous, quel coup de barre majeur le gouvernement doit-il donner aujourd'hui pour faire face aux enjeux reliés aux changements climatiques, sachant que les objectifs que le Canada s'était fixés à Kyoto semblent hors d'atteinte? Pensez-vous que l'injection de 150 millions de dollars est suffisante pour gérer ces enjeux?

M. Brian Emmett: Vous avez posé une question à laquelle il est très difficile de répondre. Lorsque nous avons traité du sujet du changement global dans notre rapport, nous avons mis l'accent sur les questions de saine gestion. À mon avis, une des choses les plus efficaces que nous puissions faire ici est d'avoir recours à des principes de gestion saine et de les appliquer au dossier des changements climatiques.

Quant à l'atteinte de l'objectif que le Canada s'était fixé et l'engagement qu'il avait pris, c'est un résultat que je dois accepter. Je dois examiner l'approche que le Canada prendra pour atteindre son objectif.

Vous avez parlé d'une somme de 150 millions de dollars. Dans mon rapport de mai dernier, je n'ai pas parlé de sommes d'argent, mais plutôt mis l'accent sur des questions de gestion et sur la nécessité d'agir à certains égards.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Je voudrais maintenant poser cette même question aux témoins du ministère de l'Environnement. Est-ce que vous pensez qu'une somme de 150 millions de dollars est suffisante pour vous permettre d'atteindre le but que vous décrivez à la page 2 de votre mémoire? Vous dites qu'en 2010, afin de pouvoir respecter les engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto, le Canada devra avoir réduit de 25 p. 100 ses émissions de gaz à effet de serre. Est-ce que 150 millions de dollars représentent une somme suffisante, sachant qu'une importante partie de cette somme serait destinée à des études?

Qu'allez-vous faire de plus concret, et est-ce que c'est assez? On sait qu'on a déjà investi des milliards de dollars dans de grands dossiers, tandis qu'on n'investirait que 150 millions de dollars pendant trois ans dans celui-ci. Je crois qu'on avait déjà prévu cette somme de 150 millions de dollars dans le budget de 1997-1998.

• 1050

On semble donc s'être pas mal engagé dans des projets, bien que vous nous ayez dit que ces projets étaient sur la table. Si on veut atteindre notre objectif de réduction de 25 p. 100, pensez-vous que ce soit suffisant? Ça n'a pas de bon sens.

M. David Oulton: Lorsque le gouvernement a annoncé qu'il accordait une somme de 150 millions dollars, il a dit que c'était simplement pour réaliser la première étape, soit faire l'analyse et entamer les premières actions. Dans deux ans, quand notre stratégie aura été mise sur pied, nous devrons préciser si nous avons besoin d'autres sommes d'argent, d'autres règlements ou d'autres mesures. Nous devrons certainement préciser les mesures dont nous aurons besoin.

Le président: Merci, madame.

[Traduction]

Nous allons maintenant écouter M. Charbonneau, puis M. Herron, M. Jordan, M. Casson, Mme Tornsey et, enfin, le président.

[Français]

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais poser une question au commissaire à l'environnement et au développement durable.

Dans les notes qu'il nous a remises aujourd'hui, le commissaire nous dit que ses travaux avaient montré que le gouvernement fédéral n'avait pas appliqué des principes de saine gestion face à ses engagements. Il nous dit avoir constaté que le rôle et les responsabilités n'étaient pas clairement attribués face au problème des changements climatiques. Il n'y avait pas de programme de communication, pas de plan de mise en oeuvre, pas de partenariat désigné, ni de réponse de la part des ministères.

Monsieur le commissaire, est-ce qu'il s'agit là du portrait de la situation actuelle ou si c'est le résumé du rapport que vous nous avez présenté au mois de mai, lequel était basé sur des observations remontant à plusieurs mois? Ceci est important au point de vue de la perception que peuvent avoir de votre message ceux et celles qui nous écoutent. Est-ce là une photo de ce qui se passe maintenant ou si c'est une photo qui remonte à huit ou dix mois?

M. Brian Emmett: Merci, monsieur Charbonneau.

Monsieur le président, c'est le résultat de l'examen que nous avons entrepris il y a un an et quelques mois. Rien ne nous indique que les choses ont changé. Cela dit, je n'ai pas une idée très claire des activités du secrétariat aujourd'hui même.

M. Yvon Charbonneau: J'aimerais demander au commissaire s'il a pris note du partage des responsabilités qui a été établi entre Ressources naturelles Canada et le ministère de l'Environnement, des domaines respectifs attribués à l'un et l'autre ministère. Est-ce que la définition des responsabilités lui semble plus claire qu'elle ne l'était il y a 10 mois? Est-ce que la mise sur pied d'un Secrétariat du changement climatique n'est pas un dispositif qui fait en sorte que les études, les travaux, les consultations, la concertation et les partenariats sont en train de se développer et de se mettre en place? N'y a-t-il pas là des progrès dont aurait pu prendre connaissance le commissaire juste avant sa comparution devant le comité aujourd'hui, au mois d'octobre?

[Traduction]

M. Brian Emmett: Monsieur le président, en conclusion, j'ai l'impression qu'il est trop tôt pour me prononcer et apporter mes commentaires sur quelque chose que je n'ai pas étudié en détail. Nous avons demandé, il y a plusieurs mois, quelles ententes avaient prises les ministères et où elles étaient inscrites, et nous n'avons pas eu de réponse satisfaisante. Il n'y a aucune entente écrite.

• 1055

Existe-t-il un dossier aujourd'hui? Je ne sais pas. Nous n'avons pas vérifié. Nous le ferons au cours des deux prochaines années. Nous reviendrons faire un rapport au comité, comme le comité nous l'a demandé.

L'une des choses que j'aimerais dire c'est que, quand on regarde les prévisions établies par le secrétariat, on trouve des détails sur les relations, mais j'aimerais qu'elles soient plus détaillées. J'aimerais qu'elles soient transparentes. J'aimerais qu'on en fasse régulièrement un rapport à l'intention du Parlement et des Canadiens.

À la base de tout ceci, l'enjeu principal est la réalité physique du monde qui nous entoure. Cela me rappelle une citation de Mark Twain: «La première chose à faire, lorsqu'on se retrouve dans un trou, c'est d'arrêter de creuser.» Si vous jetez un coup d'oeil aux prévisions, à la page 2 du rapport du secrétariat, vous devez conclure que nous sommes encore en train de creuser. Voilà, selon moi, le principal résultat.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Monsieur le président, j'ai une deuxième question. La réponse du commissaire nous permet de voir que les problèmes qui ont été soulevés il y a huit ou dix mois ont quand même trouvé des réponses partielles; il reste à voir si elles seront satisfaisantes, et c'est le jugement que le commissaire portera sur ces mesures qui nous le dira dans quelque temps.

Je voudrais revenir sur cette question d'échange de droits d'émission. Il me semble qu'on accorde beaucoup d'importance à ce concept et qu'on fait beaucoup d'efforts pour trouver des mécanismes d'application. Je comprends qu'on se préoccupe des mécanismes d'application de ce concept étant donné qu'il est nouveau et assez vague et qu'il pourrait prendre une ampleur sans précédent s'il devait s'appliquer à l'échelle internationale. C'est sûr qu'il faut étudier ces questions.

Maintenant, j'aimerais que vous m'assuriez qu'on n'est pas en train de se cultiver des échappatoires à nos responsabilités intérieures au moyen de cette recherche de mécanisme d'échange de permis à l'échelle internationale. Les Canadiens et les Canadiennes, bien sûr, sont sensibles à l'état international de la question, mais ils ne se contenteront pas de savoir qu'il y a moins de pollution au Nigeria ou en Chine; ils veulent être assurés qu'il y aura moins de pollution ici, au Canada, dans leur ville, dans leur région.

J'aimerais que vous nous assuriez que vous mettez autant d'énergie à trouver des mesures d'action applicables au Canada maintenant que vous en mettez à inventer un système international d'échange de permis.

[Traduction]

Le président: Monsieur Oulton.

M. David Oulton: Merci, monsieur le président.

Je parle maintenant de la stratégie de mise en place à l'échelle du Canada. Nous travaillons avec des directives vraiment très claires des ministres, selon qui le Canada prévoit réaliser la majorité des réductions par ses propres moyens. En conséquence, le plan qui sera mis en place devra tenir compte de cette volonté.

En fait, les mécanismes internationaux de dérogation auront leur place une fois qu'ils auront été négociés et que nous saurons mieux comment ils seront appliqués. Ils ont un rôle à jouer dans notre plan, dans le plan de l'Australie et dans celui des autres pays.

Les deux ministres dont je relève m'ont donné une directive claire: nous devrions avoir un plan qui permettra au Canada de réaliser la majorité de ses réductions avec les moyens dont il dispose. On en a donné plus tôt toute une série de raisons. M. Hornung a donné quelques-unes de ces raisons lorsqu'il a parlé d'amener les pays en développement à participer, en expliquant que les pays qui possèdent les technologies et les ressources nécessaires ont aussi la volonté de les utiliser pour faire face au problème. De plus, il ne faut pas oublier que nous espérons récolter beaucoup de bénéfices connexes qui seront générés par les mesures prises pour répondre aux changements climatiques au Canada, ce qui a été souligné dans certains rapports sur la santé ou d'autres domaines.

Voilà donc les directives claires que je dois suivre pour mettre en oeuvre une stratégie nationale. J'aimerais demander à M. Jim Wall de parler de l'aspect international des négociations.

• 1100

M. Jim Wall: Oui, d'accord.

En fait, on trouve dans le cadre du Protocole de Kyoto des mécanismes de dérogation, mais ils n'ont pas été élaborés en détail à Kyoto même; des discussions et des négociations ultérieures devraient leur donner plus de corps.

Les principes que nous mettons de l'avant par rapport à ces discussions sont que ces mécanismes de dérogation doivent être crédibles du point de vue de l'environnement et économiquement efficients. Pour en arriver à un bon résultat, il faut que les coûts des transactions soient faibles, mais il faudra bien peser la décision, car il ne faut pas que cela soit considéré comme une échappatoire face aux responsabilités nationales.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Une dernière question, monsieur le président.

Le président: Oui, je vous en prie.

M. Yvon Charbonneau: À trois reprises ce matin, lorsqu'on a abordé la question de la place à accorder aux échanges de permis par rapport aux efforts à faire sur le plan interne, au Canada, on a dit que les directives ministérielles étaient qu'on devait faire en sorte que la majorité de la réduction soit faite au Canada. Vous savez qu'il y a des gens qui prétendent que la majorité s'établit à 50 p. 100 plus un. Je voudrais être assuré qu'on parle d'une très forte majorité. Au cours des derniers mois, j'ai entendu certains exposés disant que de 15 à 20 p. 100 des émissions pourraient faire l'objet d'un échange de permis, tandis qu'un bon 80 p. 100 serait destiné à l'effort à l'interne; ça aussi, c'est une majorité. Ce matin, est-ce qu'on emploie l'expression «majorité» pour décrire une proportion d'à peine plus de 50 p. 100 ou une proportion de l'ordre de 80 ou 85 p. 100? Ça pourrait nous rassurer d'entendre un son de cloche confirmant que la directive est de l'ordre de 80 p. 100 plutôt que d'à peine plus de 50 p. 100.

[Traduction]

M. David Oulton: En tant que fonctionnaires, voici ce que nous voudrions présenter à nos ministres. Comme je l'ai déjà dit, il ne faut pas oublier que le mécanisme de prise de décisions est le suivant: les ministres de l'Énergie et les ministres de l'Environnement fournissent des conseils aux premiers ministres au sujet du plan que devrait adopter le Canada. J'aimerais pouvoir leur donner un menu d'options dans lequel ils trouveraient des choix allant de 50 p. 100 à 100 p. 100. Nous devrions accomplir notre travail de telle sorte que, si l'on choisit 100 p. 100 au Canada, voilà les mesures qu'il faudra prendre et voilà quelles seront les répercussions au chapitre des coûts et des bénéfices. Si l'on choisit 75 p. 100 ou 50 p. 100, voici quelles seront les répercussions.

Mon intention est donc de mettre en oeuvre une stratégie qui permettra aux ministres d'avoir une idée générale de la courbe des coûts et de l'étendue des choix. Au bout du compte, les ministres devront décider quelle sera la meilleure combinaison de mesures à prendre, parmi lesquelles se retrouveront les mécanismes de dérogation.

Je peux vous assurer que mon rôle consiste à garantir que les ministres ont tous les choix devant eux. Ce sont les ministres qui décideront, en dernière instance, de la meilleure combinaison d'options et des proportions les plus équilibrées. Je ne peux pas m'engager à cela en tant que fonctionnaire, pour l'instant; je ne peux que vous dire que nous ferons tout le nécessaire pour que les ministres puissent faire leurs choix.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Monsieur Ballhorn, quelle est l'orientation qu'on vous a donnée, en tant que négociateur, en vue de la conférence qui aura lieu en novembre en Argentine? Est-ce qu'on s'en va vers à peine 50 p. 100 à l'interne et peut-être 50 p. 100 à l'international ou si on s'en va vers au moins 80 p. 100 à l'interne?

[Traduction]

M. Richard Ballhorn: J'attends de voir quelles instructions on va me donner. J'ai l'impression que cette question n'est probablement pas la plus importante pour l'instant. Comme je l'ai déjà dit, il s'agirait plutôt de questions techniques, de mise en oeuvre, et d'amener les pays en développement à participer. Je crois que des rencontres ultérieures insisteront davantage là-dessus.

Le président: Nous donnons maintenant la parole à M. Charbonneau, puis ce sera le tour de M. Herron et de M. Jordon.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Merci, monsieur le président.

Monsieur le président, pensez-vous que nous aurons le temps pour un deuxième tour de table?

Le président: C'est possible, si votre présentation et les suivantes sont courtes.

M. John Herron: Il a été dit plusieurs fois que l'objectif était d'entreprendre la majorité des réductions par nos propres moyens. Mais il est dit bien clairement, à la page 3 du document du MAECI, que le Canada ne peut donner son accord à un plafond établi par les autres pays.

• 1105

J'ai l'impression qu'il en a été question la semaine dernière à Halifax. Les provinces auraient été avisées de la position que nous allions prendre à Buenos Aires, et il est clair que les provinces n'entérineraient pas les changements.

Je pose la question à M. Oulton ou à M. Wall.

M. Richard Ballhorn: Laissez-moi vous dire pour commencer que le mémoire que M. Wall et moi-même vous avons distribué est un mémoire conjoint. Vous avez dit qu'il émanait des Affaires extérieures; j'aimerais bien, mais ce n'est malheureusement pas le cas. Comme il est dit dans l'introduction, c'est un mémoire conjoint.

Je n'ai pas été présent pendant toute la durée de la RCM. Mais je serais surpris d'apprendre qu'on n'a pas abordé ce sujet. Au point où nous en sommes, comme M. Wall l'a déjà mentionné, nous ne croyons pas qu'il serait utile de soulever cette question à Buenos Aires. D'abord, nous avons déjà eu des rencontres informelles au niveau ministériel, et nous avons perdu presque tout notre temps à discuter de cette question, et quelques personnes ont même dit: «Soyons d'accord pour être en désaccord, mais s'il vous plaît, passons à quelque chose où nous pourrons réaliser des progrès.» Nous espérons tous qu'à Buenos Aires, les rencontres ne consisteront pas en deux semaines de discussions entre l'Union européenne et le Groupe de coordination à propos des mérites ou des désavantages du plafond. Nous espérons tout simplement pouvoir aller de l'avant et abattre du vrai travail.

M. John Herron: Voilà d'où vient ma question. L'an passé à Regina, les provinces ont donné leur accord à un objectif spécifique proposé par le gouvernement fédéral, et je crois que un jour ou deux jours plus tard des changements ont été annoncés. Je crois que quelques-uns de nos partenaires provinciaux sont préoccupés par ce fait. Je ne veux pas qu'il y ait à Halifax la même débâcle qu'à Regina l'an passé.

M. Hornung a souligné que nous passons beaucoup trop de temps à discuter de démarche, plutôt que des façons d'entreprendre le travail, et que nous devrions plutôt établir des mesures incitatives pour les citoyens sous forme d'incitatifs fiscaux importants, et utiliser une approche fondée sur l'encouragement et axée sur le marché. Ce sont des choses que nous pourrions, je crois, accélérer et mettre sur pied très rapidement.

Il y a aussi eu un commentaire sur le fait que nous avons dégagé 17 millions de dollars pour obtenir des résultats tangibles, et on a dit que c'était un montant important, mais pas tant que ça. Je dirais que c'est peu en comparaison de ce que font les Américains. Si on parle d'encouragements, je crois que c'est quelque chose que nous devrions entreprendre tout de suite.

J'ai pour M. Emmett une question au sujet des mesures hâtives. Nous avons consacré beaucoup de temps à la présentation de M. Oulton, et je crois que le gouvernement est sincère lorsqu'il dit qu'il veut faire quelque chose au sujet des mesures hâtives. Mais il faut vraiment que l'industrie et le public puissent voir un résultat tangible. Pourquoi devrions-nous attendre, peut-être jusqu'à l'automne 1999, pour voir certaines réalisations?

M. Brian Emmett: Je ne crois pas que vous aurez à attendre jusqu'à l'automne 1999 pour voir quelques réalisations. Selon moi, c'est à l'automne 1999 ou au printemps 2000 que j'aurai à étudier les plans qu'aura faits David, comme l'a demandé le comité, et pour donner mon avis sur ces plans en me fondant sur notre expérience des réalisations du Canada dans le cadre des engagements pris à Rio. Je ne vois pas pourquoi nous n'aurions accompli aucun progrès d'ici l'automne 1999. C'est simplement qu'il nous faut un peu de temps pour étudier les choses et faire notre rapport au comité. Mais je ne vois pas pourquoi vous ne pourriez obtenir des renseignements directement du ministère et du secrétariat.

M. David Oulton: Monsieur le président, je peux aussi fournir une réponse à cette question.

Quand il est question des mesures hâtives, y compris de celles que permettront les 17 millions de dollars par année, ou de ce que j'appelle les 56 millions de dollars sur trois ans, il devrait y en avoir constamment de nouvelles pour les trois prochaines années. Dans ces domaines, les mesures ne devraient souffrir aucun délai. En d'autres termes, toutes les mesures devant être subventionnées par les 150 millions de dollars devraient pouvoir donner lieu dès maintenant à des mesures permanentes.

• 1110

En effet, dans la documentation que nous avons distribuée au comité, on retrouve des plans d'activités qui sont accessibles par le public et qui décrivent la façon dont les fonds seront utilisés, les critères qui seront utilisés pour l'évaluation, et les façons dont les gens pourront présenter au gouvernement leurs idées dans le domaine technologique et pour l'éducation du public, ou de la science et de l'adaptation. Ces documents sont disponibles et accessibles au grand public dans un site Web. Il est donc possible d'établir dès maintenant des mesures hâtives ou permanentes.

M. John Herron: J'aimerais faire un commentaire; il y a quelques semaines, on a célébré un véhicule hybride, une voiture qui fonctionne en partie grâce à l'essence traditionnelle et en partie grâce à l'électricité. En fait, si nous voulons vraiment prouver que nous sommes sincères au sujet des mesures hâtives... je crois que M. Hornung a fait un commentaire au sujet du besoin de faire tomber les barrières existantes, et M. Oulton, un commentaire sur le fait que nous voulons nous assurer que les mesures dissuasives sont éliminées.

Nous avons, en Bombardier, une entreprise qui, à l'heure actuelle, est prête à mettre sur le marché un véhicule électrique—qui n'est pas un hybride—que les banlieusards pourraient utiliser. Il pourrait falloir jusqu'à deux ans à Bombardier pour faire approuver son véhicule au Canada, essentiellement à cause de notre réglementation. Alors, si nous voulons vraiment mettre en place des incitatifs aux mesures hâtives, voici un cas classique d'un produit canadien, dont nous pourrions célébrer l'existence ici, à la Chambre des communes, plutôt que de célébrer un produit fait à l'extérieur. Ce véhicule est approuvé aux États-Unis.

Je crois que c'est le genre de signal qu'il faut donner si nous sommes sérieux au sujet de l'élimination des barrières existantes et des mesures dissuasives. Pourquoi devrions-nous attendre deux ans, à cause d'une question de règlement, alors que nous pourrions encourager une technologie qui est en fait une initiative canadienne de lutte aux changements climatiques? Et, je dis ceci à l'intention des ministres Collenette, Goodale et Stewart, je crois qu'il vaudrait la peine de nous pencher sur ce cas pour ne pas avoir à attendre pendant deux ans la mise en marché d'un produit fait au Canada.

Le président: Pourrions-nous avoir une réponse concise s'il vous plaît?

M. David Oulton: Je n'étais pas au courant de ce cas particulier. Le public s'attend à ce que tout véhicule réponde aux normes ordinaires de sécurité, entre autres, mais je suis d'accord avec l'idée que nous devrions nous efforcer de mettre des réalisations comme celles-là sur le marché lorsque cela est possible. Je retiens votre conseil.

Le président: Merci, monsieur Herron; vous reprendrez la parole au second tour.

M. Jordan, M. Casson, Mme Torsney, M. St. Denis, et le président.

M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Merci, monsieur le président. J'ai trois commentaires et une courte question.

Le premier commentaire s'adresse à mes honorables collègues du Parti réformiste. Je le dis avec beaucoup de respect, parce que je les respecte tous deux. Je trouve plutôt ironique qu'ils aient jugé nécessaire de critiquer la stratégie du gouvernement à Kyoto, pendant que je me trouvais moi-même dans un débat marathon sur le changement climatique, très bien préparé à parler de crédits d'impôt, de gouvernance permanente des produits, de l'énergie solaire et de l'énergie éolienne, mais où j'ai fini par discuter du fait que le changement climatique constituait, ou non, un problème.

Je ne porterai pas de jugement sur la stratégie du gouvernement, mais je crois que tout le monde s'entend pour dire qu'une stratégie s'impose. Je pense aussi que si l'on s'entend sur la gravité du problème, on fait un pas vers la solution ou l'élaboration de quelques stratégies de solution. Mais si je dois passer mon temps à débattre du fait que le changement climatique est vraiment un problème, je crois que j'ai perdu un temps qui aurait mieux servi à l'élaboration de stratégies.

M. Herron, je partage vos préoccupations au sujet des interventions immédiates et quant au fait qu'elles sont nécessaires, et, en passant, joyeux anniversaire en retard. Je crois que si nous parlons de barrières, si l'histoire ne nous a rien enseigné, je crois que nous pouvons apprendre que si nous commençons à parler de questions de compétences dans les relations entre les gouvernements fédéral et provincial, nous mettons en place une barrière que nous ne pourrons plus éliminer. Si vous pouvez me prouver que, dans les différentes provinces, les gens ont des exigences diverses quant à l'oxygène et à l'eau, je crois que nous pouvons accepter d'en discuter dans le cadre du débat. Mais je ne crois pas qu'on ait vraiment besoin d'en parler, parce que cela amène des gens à retarder le processus.

Mon dernier commentaire porte sur les échanges. Quand nous parlons d'échange de droits d'émission, je crois que c'est une stratégie à très court terme parce que, ce que nous proposons, c'est de substituer nos pratiques non durables à encore plus de pratiques non durables dans d'autres pays. Je crois que le problème, c'est que nous ne faisons que retarder l'inévitable.

• 1115

Il est rentable, à l'échelle nationale, d'investir dans l'énergie solaire et l'énergie éolienne, et dans des mesures de bien-être qui comprennent des facteurs non économiques, parce que je crois que si nous pouvons prouver, par la méthode du coût de revient complet, entre autres principes, que notre économie, notre société et notre environnement en sortiront améliorés, nous pourrons alors montrer à d'autres pays la façon de procéder, et nous ne faisons pas que repousser tout simplement l'inévitable en transférant nos technologies non durables vers d'autres pays.

Alors, quand nous parlons de choses comme l'échange de droits d'émission, il faudrait peut-être les mettre un peu en contexte.

Ma question, qui s'adresse à M. Hornung, porte sur les enjeux qui ont été cernés ici. Je deviens un peu nerveux quand on se met à parler d'analyse de rentabilité. Je ne veux pas donner l'impression que je suis assez naïf pour croire que les facteurs économiques n'entrent pas en ligne de compte, mais je crois qu'attendre deux ans avant de passer à l'action laisse croire que notre stratégie s'appuie sur l'idée que nous voulons en faire le moins possible et en perdre le moins possible au chapitre de l'économie.

Je suis tout à fait contre cette idée. Je crois que nous allons dans un sens qui n'est pas durable, que le rafistolage n'est pas une approche à utiliser pour cette question et que nous nous mettrons dans une situation ridicule, où il est peut-être possible de gagner à la table de négociation mais où nous pourrions perdre sur le terrain, dans les airs et dans l'eau.

Alors, quand je regarde ces tables de concertation,—et je vous accorde que ce sont des choses pleines de bon sens, mais je dirais qu'au mieux, elles ne représentent que la moitié de l'équation. Si c'est cela toute l'équation, je serai très mal à l'aise parce que je sais comment tout cela finira: l'environnement et les générations à venir seront les grands perdants.

Voici donc ma question pour M. Hornung: Que trouvez-vous qu'il manque à tout ceci? Ce qui me saute aux yeux, c'est qu'il n'y a tout simplement pas de profit à tirer de l'inaction, qu'on ne peut faire la comptabilité d'actions qui n'ont pas été entreprises et qu'on ne reconnaît pas la valeur intrinsèque d'un bien comme un arbre, et de ce qu'il représente pour l'écosystème. Il offre un nid pour les oiseaux et il empêche le ruissellement des pluies vers les cours d'eau. Pourriez-vous prendre peut-être quelques minutes pour nous dire ce que vous reprochez à cette approche et ce qu'il lui manque pour que vous lui donniez votre accord?

M. Robert Hornung: Merci.

Il me semble que ce processus s'appuie sur une confiance énorme envers l'analyse et les chiffres que nous en tirerons. La seule chose dont nous pouvons être sûrs, c'est que les chiffres que nous tirerons du processus seront erronés. Ils seront erronés pour plusieurs raisons. Premièrement, comme vous l'avez justement souligné, on ne tient pas compte des coûts reliés à l'inaction. Je devrais souligner que ces coûts n'expriment pas seulement l'impact des changements climatiques sur les écosystèmes, entre autres choses, mais qu'ils représentent aussi le coût de l'adaptation à ces changements pour l'avenir. Tout le monde pense peut-être que l'adaptation n'entraîne pas de coûts, mais en fait ceux-ci seront très élevés.

J'ai aussi dit, plus tôt dans ma présentation, que nous n'avons pas réussi à inclure les multiples avantages de l'action dans notre analyse. En fait, quand nous réduisons les émissions de gaz à effet de serre, nous réduisons aussi l'émission d'autres substances polluantes, ce qui a des répercussions sur l'économie et sur le système de santé et sur d'autres systèmes dont nous tirons avantage, et nous devons en tenir compte.

L'autre problème, c'est que nous n'avons pas à l'heure actuelle de très bons outils pour réaliser cela. Nous faisons de notre mieux avec les modèles économiques, mais, franchement, on ne peut pas dire que leur modèle, pour ce qui touche l'innovation technologique, soit réussi. Vous n'avez qu'à vérifier: chaque fois qu'on utilise ces modèles pour traiter de questions environnementales, les coûts ont toujours l'air faramineux. Mais, en réalité, lorsque les gens se mettent à concevoir des solutions, ils trouvent des moyens d'y arriver plus efficacement et à moindre coût.

Nous trouvons aussi des exemples en ce qui concerne la couche d'ozone—le Protocole de Montréal. Cela devait mettre à terre l'industrie chimique. Aujourd'hui, ils se sont aperçus qu'ils pouvaient concevoir de nouvelles options, les vendre plus cher et, en réalité, bénéficier de tout cela.

C'est pourquoi je crois que s'appuyer sur les chiffres représente un problème réel. En fait, ce qui pourrait être plus utile—et il en a été question plus tôt—c'est qu'au moins, en même temps, on se penche sur des initiatives spécifiques et des programmes pilotes qui fourniront des chiffres réels, de façon à voir ce qui se passe vraiment et non ce qui est proposé par un modèle.

• 1120

En fin de compte, le processus nous aura fourni des chiffres. Je pourrais dire que cet aspect ne m'inspire pas confiance, et quelqu'un d'autre ne fera pas confiance à cet autre aspect, mais en fait, nous savons tous que c'est erroné. Si nous voulons vraiment savoir quels seront les coûts, nous devons passer à l'action, mettre sur pied, par exemple, des projets pilotes de petite envergure afin d'un peu mieux comprendre les coûts et les avantages et de trouver des façons d'aller de l'avant, de la manière la plus rentable possible.

M. Joe Jordan: Merci.

Le président: M. Casson, vous avez maintenant la chance de prouver qu'il existe des progressistes au sein du Parti réformiste.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Eh bien, vous voyez!

J'ai apprécié l'introduction de M. Jordan. Nous aurons de nombreuses occasions de discuter du bien-fondé des mesures relatives aux changements climatiques, monsieur Jordan, tout au long de ce processus.

Nous avons beaucoup parlé de stratégies et d'échange de droits d'émission, de puits, de cibles, de processus, de la situation en général, et, pour en revenir là où veut en arriver, M. Hornung, il y a eu beaucoup de paroles et peu d'actions.

Il y a un domaine dans lequel nous pouvons mettre sur pied, et rapidement, des réalisations concrètes—et j'aimerais savoir où on en est rendu dans ce dossier—et c'est dans l'élaboration de nouvelles sources d'énergie. Le domaine qui m'intéresse plus particulièrement est l'énergie éolienne. Qu'avons-nous entrepris par rapport à l'énergie solaire et à l'énergie éolienne? Qu'est-ce que nous faisons, à l'heure où on se parle, pour aider cette industrie?

Ma deuxième question concerne les pays en développement. Nous entretenons présentement des relations directes avec le Mexique, puisqu'il est un partenaire commercial. Est-ce que nous avons entrepris des discussions directes avec lui? Que faisons-nous pour l'amener à partager notre point de vue? Mettons de côté le fait que nous parlons des pays en développement, plus spécifiquement: avons-nous entrepris quelque chose directement avec le Mexique pour l'aider à avancer dans ce dossier?

M. Richard Ballhorn: Le Mexique, même s'il est membre de l'OCDE, est arrivé trop tard pour être sur la liste des pays de l'annexe 1, sur laquelle figure le Canada. Cela veut dire que le Mexique n'a pris, jusqu'ici, aucun engagement relativement à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Néanmoins, les trois pays de l'ALENA sont présentement en discussion au sujet des actions collectives à prendre au sujet des changements climatiques. On en parle à l'heure actuelle et on essaie de trouver quelque chose qui représente vraiment une augmentation et un ajout.

Le Mexique est un peu réticent parce qu'il a un important secteur pétrolier et gazier et qu'il ignore quelles seront les répercussions, s'il s'engage à quoi que ce soit qui ressemble même à des mesures volontaires. Il attend bien sûr des projets, lorsque nous aurons réglé certains de ces mécanismes. Mais, oui, il y a présentement des discussions entre les ministres des Affaires étrangères du Canada et du Mexique, qui recherchent ce qui est faisable.

M. Rick Casson: Et l'autre question, au sujet de l'énergie de remplacement?

M. David Oulton: Je vais commencer, et je crois qu'ensuite Sue Kirby pourra parler des programmes actuels.

Rassurez-vous, l'énergie de remplacement est un sujet de discussion et d'analyse dans les diverses tables de concertation, que ce soit au chapitre du transport, et de la table de concertation sur les transports ou que ce soit au chapitre de l'électricité, et du travail accompli par la table de concertation sur l'électricité. Les analyses et l'élaboration de politiques relatives aux nouvelles mesures à prendre à ce sujet font partie du travail permanent.

Pour ce qui est de ce qui existe aujourd'hui, de ce qui se fait en ce moment, je m'en remettrai à Mme Sue Kirby, du ministère des Ressources naturelles.

Mme Sue Kirby: Pour ce qui est de l'énergie éolienne et solaire, le ministère des Ressources naturelles s'est donné une nouvelle stratégie touchant les énergies renouvelables, aussi bien qu'un programme d'incitation à la conception d'énergies renouvelables qui est nouveau, depuis quelques années. C'est vraiment axé sur la question qui a été soulevée autour de la table aujourd'hui, c'est-à-dire d'éliminer les obstacles. Il s'agit de vraiment permettre à l'énergie éolienne renouvelable et aux autres énergies de substitution de faire une percée sur le marché, et c'est en place maintenant.

Nous avons eu droit à quelques questions concernant certaines des mesures que nous aimerions voir prendre dès les premiers stades. J'aimerais préciser un peu en quoi nous avons déjà traité quelque peu des premières mesures en question. Dans la caisse du fonds d'actions, les 56 millions de dollars devant être consacrés sur trois ans aux premières interventions technologiques se rapportent aussi à certains des éléments dont il a été question ici aujourd'hui.

• 1125

Nous avons bel et bien des centaines de projets qui, en ce moment, sont négociés ou envisagés commercialement. Dans de nombreux cas, il s'agit de projets pilotes comme nous en avons parlé, et ces projets-là visent tout autant à éliminer les obstacles qu'à concevoir une technologie.

Merci.

M. Rick Casson: Monsieur le président, j'aimerais poser une petite question.

Les municipalités participent-elles aux travaux des tables? Ont-elles leur mot à dire dans les solutions qui sont adoptées?

M. David Oulton: Oui, tout à fait. Comme les membres du comité le savent probablement, les municipalités représentent un des cas où il se déroule des travaux relativement actifs en ce qui concerne le changement climatique.

Nous avons donc une table des municipalités qui étudie les mesures que peuvent prendre les municipalités. De même, il y a des liens entre cette table et les autres tables traitant de questions pertinentes, par exemple celle des transports. On s'y attache à plusieurs questions, notamment celles des gaz d'enfouissement et des projets particuliers à cet égard. C'est donc une zone d'intervention qui est prévue.

M. Rick Casson: Merci, monsieur le président.

Le président: La parole est à Mme Torsney. Ensuite, ce sera M. St. Denis, puis le président.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci.

Comme j'ai étudié en administration, monsieur Emmett, je me sens obligée de faire une petite remarque: je suis certainement consciente du fait que les pouvoirs publics doivent se donner de meilleurs objectifs et mesurer leur progrès en rapport avec ces objectifs; je ne voudrais certainement pas que quelqu'un ait l'impression que l'État pourrait devenir en tous points comme une entreprise, puisque la réalité est telle que nous ne pouvons jamais choisir notre marché. Nous ne nous installons pas dans des créneaux. Nous devons traiter avec les provinces, les territoires, les administrations municipales ou les particuliers qui ne sont pas convaincus de nos stratégies et de nos objectifs nationaux. Nous devons négocier avec toutes sortes d'intervenants, et, parfois, cela n'est pas très facile.

Une entreprise n'a jamais cette obligation. Elle l'a peut-être parfois au sens où elle doit s'établir sur un nouveau marché, mais c'est elle-même qui définit ses propres objectifs.

Il y a donc des choses que nous devons faire en tant que fédération, ici, au pays, qui ralentissent parfois la marche des choses, mais rallier les gens à notre cause devrait toujours être un de nos buts.

On a beaucoup discuté des choses que nous devrions faire et des dossiers où nous devrions être plus actifs, et j'aimerais que les gens du ministère des Ressources naturelles nous en disent plus sur ce qui se fait.

Certes, M. Hornung a exposé dans ses documents, notamment celui qui porte le titre Canadian Solutions, plusieurs des mesures qui pourraient être prises. Certaines d'entre elles, bien sûr, par exemple les gaz d'enfouissement et ainsi de suite, seraient du ressort des provinces et des municipalités. Pour répondre à la question de M. Caccia, vous avez nommé quatre ou cinq mesures qui nous permettraient d'en arriver à une réduction d'environ 19 p. 100. Je me demande en quoi le ministère des Ressources naturelles s'emploie à cet égard.

Mme Sue Kirby: Merci beaucoup. Je peux répondre brièvement. Si nous avons le temps, je suis accompagnée d'un collègue qui pourrait en dire plus long.

Pour vous donner un très bref aperçu de la question, disons que les dépenses consacrées à l'énergie, c'est-à-dire la majeure partie de nos dépenses, outre le dossier de l'énergie nucléaire, concernent en ce moment l'efficacité énergétique—c'est 60 millions de dollars de notre budget annuel, et le volet le plus important en est l'efficacité énergétique. Il s'agit de programmes d'information, comme nous en avons déjà parlé.

Je crois que nous n'avons pas assez souligné la part que représente la réglementation dans cet ensemble. Pour une grande part, il s'agit d'élaborer des normes qui sont viables du point de vue technique et scientifique, de réglementer l'efficacité énergétique des appareils, des produits, de l'éclairage. Nous avons d'ailleurs instauré récemment des normes nouvelles touchant l'éclairage.

Parlons du secteur automobile. Nous avons en place plusieurs programmes qui visent à éduquer les conducteurs quant à leur comportement sur la route

En rapport avec les énergies de substitution, nous avons plusieurs programmes qui sont consacrés, pour une bonne part, à la R-D. De cette façon, nous voulons nous assurer de disposer des technologies nécessaires au chapitre des ressources nouvelles et renouvelables.

Nous comptons plusieurs programmes technologiques qui sont liés à nos programmes d'efficacité énergétique à titre de renforcement.

Nous avons donc une gamme de programmes réglementaires, une gamme de programmes d'information et une gamme de programmes technologiques, tous intégrés au sein du ministère de manière à produire un effort concerté à la fois pour remplacer les mauvais produits et pour permettre aux consommateurs de faire des choix mieux éclairés.

J'ai aussi signalé que ce n'est que récemment que nous nous sommes attachés aux énergies renouvelables. Nous consacrons actuellement environ 14,5 millions de dollars par année à ce dossier—pour une bonne part, nous visons ainsi à nous assurer de disposer des technologies nécessaires et de veiller à ce que les obstacles à l'entrée sur le marché n'empêchent pas les technologies en question de se tailler une plus grande place.

• 1130

Nous consacrons environ 10 millions de dollars par année aux carburants de substitution, pour nous assurer que, dans le secteur des transports, un des secteurs particulièrement délicats, nous nous affairons à la fois à concevoir des carburants nouveaux et à prévoir les mesures incitatives nécessaires pour que ceux-ci percent le marché.

Je suis d'accord avec nombre des points qu'a soulevés M. Hornung à propos des secteurs où nous pourrions progresser davantage, si nous avions d'autres ressources à notre disposition. Tout de même, voilà, en bref, les nombreuses choses que nous faisons actuellement. Si le comité a le temps, je suis accompagnée d'un collègue de l'Office de l'efficacité énergétique qui pourrait vous donner quelques précisions sur les dossiers auxquels nous travaillons actuellement.

Le président: Je ne sais pas si c'est une bonne idée. Peut-être au cours d'un deuxième tour de table. Ça ne vous dérange pas, madame Torsney?

Mme Paddy Torsney: J'ai une deuxième question à poser, et je la poserais à M. Hornung:

Je comprends certainement ce que vous dites à propos de l'analyse qu'il faut faire des autres avantages que procureraient les choix que nous faisons. N'y aurait-il pas une part de cette analyse qui serait faite si nous nous retrouvions devant des choix, que ce soit dans cette direction ou dans l'autre?

Pour l'instant, j'imagine que la tâche qui consiste à faire les choix en question est peut-être aussi une tâche importante, tout rassembler, puis choisir parmi tout ce qui est là, ce qu'il faut faire pour réduire le plus possible les émissions de gaz à effet de serre, ce qu'il faut faire pour obtenir des retombées avantageuses, qu'il soit question d'arbres ou de changements touchant les carburants, ou encore de conséquences pour la santé de certaines de ces choses. À vos yeux, ne serait-ce pas là davantage l'analyse qu'il y aurait lieu de faire durant la deuxième partie?

M. Robert Hornung: Pour répondre à votre question—et je vous remercie de la poser—, je dirais que quelle que soit la question ici, il y aura toujours un certain compromis. Tout de même, il me semble, comme David Oulton l'a d'ailleurs dit plus tôt, qu'on n'arrivera pas à mettre en place du jour au lendemain les mesures qui permettront de respecter le Protocole de Kyoto. C'est une démarche qui prendra du temps.

Ce dont je vous parlais, c'est que nous n'avons pas, à mes yeux, vraiment adopté les premières mesures, c'est-à-dire mis en place la première série d'actions qui permettront de lancer les choses. Il me semble aussi qu'il y a plusieurs mesures et plusieurs secteurs, des occasions d'agir, où il nous faudra manifestement agir pour nous conformer au Protocole de Kyoto.

Il nous faut améliorer la consommation de carburant des véhicules. La situation n'est pas aussi sombre que l'a donné à penser M. Gilmour, selon qui il faudrait enlever 25 p. 100 des voitures des routes. Une autre façon d'y arriver consisterait à améliorer de 25 p. 100 le rendement énergétique des voitures.

Il y a donc plusieurs dossiers—les codes du bâtiment, l'exploitation du méthane dans les sites d'enfouissement, l'amélioration générale de l'efficacité énergétique—où il est tout à fait évident qu'il faudra agir, et nous pouvons adopter d'ores et déjà des mesures initiales. Je crois qu'il y aura nombre de mesures où tout le monde sera gagnant, où la question des compromis ne se présentera pas, d'une certaine façon: nous constaterons qu'il y a à la fois des retombées économiques et de multiples avantages pour l'environnement qui découlent de l'adoption de ces premières mesures.

Mme Paddy Torsney: D'accord, mais je sens qu'il y a une certaine frustration dans votre discours, et je ne sais pas exactement qui est visé. En tant que représentante du gouvernement fédéral, je crois que c'est nous qui sommes visés, et j'imagine, même pour certains des dossiers que vous avez mentionnés, qu'il y a des questions qui relèvent d'autres instances—de sorte que j'espère que votre frustration est bien répartie pour ainsi dire.

Je ne sais pas très bien... encore une fois, avec les choses que vous avez établies avec M. Caccia, j'ai examiné votre tableau et j'ai fait un calcul, et je suis arrivée à 19 p. 100, et le cas de l'échange des droits d'émission vaut 18 p. 100, selon votre tableau.

Ensuite, pour ce qui est du crédit d'impôt pour efficacité énergétique qui se traduirait par des économies sur votre facture d'énergie, pour le coût de l'administration du programme—et je siège au comité des finances, où certaines de ces choses mécontentent le Vérificateur général—je ne sais pas très bien si l'analyse a été faite de ce côté-là, et cela m'intéresserait de les voir faire une analyse préalable, comme tâche publique, de certaines des idées que vous avez, pour que nous connaissions les avantages avant qu'ils nous attaquent, car ils ont un peu l'habitude de faire cela, de temps en temps.

M. Robert Hornung: Pour répondre brièvement, je dirais que vous avez tout à fait raison: dans la série de mesures que nous proposons dans Canadian Solutions, il y a des mesures qui relèvent du gouvernement fédéral et des mesures qui relèvent du gouvernement provincial, et sur ce point, il faudra que tout le monde apporte sa contribution. Quant à moi, je crois que le gouvernement fédéral doit faire preuve de leadership pour que les provinces se rallient à la cause.

• 1135

Je crois qu'il y a plusieurs initiatives où il faut travailler davantage à définir ce à quoi ressemblerait exactement le crédit d'impôt et comment il fonctionnerait. Je crois qu'il y a aussi d'autres initiatives qui méritent d'être examinées. Par exemple, nous avons parlé des systèmes d'énergie de quartier et de la possibilité d'instaurer un fonds fédéral visant à soutenir les projets pilotes à cet égard. Un fonds fédéral pour soutenir l'infrastructure publique de transports en est un autre exemple. Le gouvernement canadien est le seul gouvernement national parmi les pays membres de l'OCDE qui ne contribue rien au transport en commun.

Il y a aussi un ensemble d'initiatives sur lesquelles on pourrait d'ores et déjà progresser, et pour lesquelles ce degré d'analyse ne me paraît pas nécessaire. Il existe des mesures préliminaires que nous pouvons adopter, mais je conviens du fait qu'il y a aussi des initiatives qui devront être analysées davantage. J'espère que la publication de ce document contribuera à ce genre d'analyse, qu'il encouragera le genre d'analyse qui doit être faite.

Le président: Merci.

Monsieur St. Denis, vous avez la parole. Je la prendrai moi-même par la suite. Ensuite, il y a quatre députés qui auraient des questions à poser au cours d'un deuxième volet.

M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président. Je n'ai qu'une courte question à poser. Je tiens à vous remercier encore une fois de me permettre de participer à l'audience, et j'aimerais aussi remercier tous nos participants qui se trouvent ici aujourd'hui.

À titre de président du Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales, je peux vous signaler que nous avons tenu certaines réunions sur la question du changement climatique et que nous avons l'intention d'en tenir d'autres. Tout ce qui se passe ici nous est donc très utile.

Je pourrais peut-être poser à M. Oulton ma question concernant l'échange de droits d'émission. Je sais qu'on a discuté un peu de la question de l'échange international de droits d'émission, sujet que notre comité pourrait approfondir. Au Canada même, si je ne m'abuse, vous dites que l'idée d'ajouter une table sur l'échange de droits d'émission est envisagée. Je vous demanderais donc, entre autres, quelle est la probabilité que cela arrive. Quels sont les principaux enjeux, selon vous?

M. Hornung a signalé que, à son avis et selon l'institut, il y a beaucoup de potentiel du côté de l'échange de droits d'émission. Il me semble que si c'était vrai, mieux les pays individuels élaborent leur propre régime d'échange de droits, meilleures seraient leurs chances que cela donne un régime international. Je ne saurais imaginer un régime international qui fonctionnerait sans qu'il n'y ait d'abord un régime national viable, de sorte que les régimes nationaux me paraissent être la première étape logique. Je me demande ce que vous en pensez, car cela représenterait à mes yeux une sorte de tremplin pour les travaux de notre comité à nous.

Merci.

M. David Oulton: Merci beaucoup de me poser cette question.

J'espère que nous nous entendrons avec les provinces d'ici deux semaines et que nous aurons une table qui discute de l'échange de droits d'émission au Canada même. Je ne crois pas que quiconque appelle ça autre chose qu'une table: nous espérons disposer d'un groupe mieux focalisé pour peut-être réduire les nombres et accroître l'expertise. Du moins, c'est cela l'idée. De toute façon, je crois bien que nous allons y parvenir. Cela devrait certainement fonctionner d'ici un mois, ou encore plus tôt si nous nous pressons. La seule question véritable à mes yeux, c'est celle du mandat du groupe en question, et je crois que nous sommes assez près de nous entendre là-dessus aussi.

Pour ce qui est des défis que poserait un programme national d'échange de droits d'émission, la table ronde nationale a déjà réalisé des travaux à ce sujet. Elle a fait réaliser une série d'études portant sur la question depuis le printemps dernier et s'est réunie quelques fois à l'automne à ce sujet. Nous espérons tirer parti des travaux techniques qu'elle a réalisés. De fait, nous allons nous en servir amplement.

Il se trouve justement que John Sargent est ici parmi nous ce matin. Il travaille au ministère des Finances et fait partie d'un des groupes qui étudient la possibilité de mettre sur pied cet autre groupe et en envisage le mandat, et qui regarde quelles questions pourraient lui être confiées. Pour répondre donc brièvement à votre dernière question à propos des dossiers que cette table pourrait étudier une fois constituée, je m'en remettrais peut-être à John Sargent.

M. John Sargent: Monsieur le président, comme M. Oulton l'a indiqué, les travaux déjà accomplis par la table ronde nationale nous procurent un important avantage dès le départ. Dans bien des cas, il s'agit d'étendre le champ d'application d'un dossier donné.

Évidemment, je crois que la plupart des gens conviendront du fait qu'il y a encore beaucoup de travail à faire à ce chapitre pour bien expliciter les options et comprendre comment celles-ci s'appliqueraient. Sous la rubrique générale de l'échange des droits d'émission, il y a toute une panoplie d'options, selon les émissions qui feraient l'objet de la formule d'échange elle-même—et je parle ici d'une formule nationale. Bien sûr, il y a toutes sortes de préparatifs qu'il faut faire pour mieux situer l'analyse de la contribution éventuelle de cela à une intervention générale pour la réduction des gaz à effet de serre.

• 1140

Il y a un dernier sujet que j'aimerais aborder. Je crois que le lien avec ce qui se passerait présumément sur la scène internationale a une très grande importance pour qui veut en comprendre les effets sur l'économie nationale.

M. Brent St. Denis: Voilà qui me suffit, monsieur le président. Merci. Je vous laisserai beaucoup de temps.

Le président: Monsieur St. Denis, nous vous sommes reconnaissants de votre présence et de votre participation—et vous êtes toujours le bienvenu ici. Nos comités sont des alliés.

Permettez-moi de comprimer les choses autant que possible. Nous manquons de temps, mais j'aimerais m'assurer qu'il y aura un deuxième tour de table.

Je commencerai par jeter un coup d'oeil à la page 7, sur les questions qui figurent dans l'exposé du secrétariat. Permettez-moi d'abord de dire que, quelles que soient les observations que je formule, je ne vous vise pas vous, Mesdames et Messieurs, je vise plutôt les personnes qui se trouvent dans une autre pièce et qui prennent des décisions politiques à propos de ce que vous devez mettre en oeuvre. Je vous absous donc urbi et orbi.

Les dossiers dont il est question, et c'est regrettable, pêchent par quelque chose qui est extrêmement important. Sous la rubrique des secteurs, il n'y a pas un élément qui touche les politiques financières ni le rôle du ministère des Finances. Cet aspect particulier de la question a été mis en relief dans le rapport Beyond Kyoto produit par le comité ici présent, en décembre dernier. Il en a aussi été question dans une annexe, et je trouve qu'il est des plus regrettable que les questions en jeu ou les secteurs exposés ici n'en traitent pas.

Où va-t-on traiter des subventions insensées qui sont actuellement versées à l'industrie des sables bitumineux? Où va-t-on traiter des subventions insensées qui favorisent actuellement le banlieusard qui utilise sa voiture, plutôt que le banlieusard qui ne s'en sert pas? Où va-t-on parler de conservation de l'énergie et d'innovations énergétiques ou peut-être des mesures incitatives qu'il nous faut désespérément et qui passeraient probablement par le régime fiscal? La question des sites d'enfouissement a déjà été soulevée. J'ose croire qu'elle est peut-être noyée sous le tas, ou qu'elle se retrouve dans la rubrique municipalités.

Il manque un autre secteur dont le cas n'a pas été soulevé par le passé. Il s'agit des points de vente de services de détail. Au Canada, l'industrie du détail, particulièrement l'industrie alimentaire, consomme beaucoup d'énergie. On peut sûrement en solliciter les membres pour déterminer le rôle qu'ils veulent jouer dans la réduction des émissions de CO2.

Pour conclure ici, je dirais que la question des secteurs fait gravement défaut. Il manque un intervenant de taille, sinon l'intervenant le plus important de tous, c'est-à-dire le ministère des Finances, malgré les appels répétés en faveur de son intervention dans le dossier.

En deuxième lieu, j'aimerais souligner que nous avons l'avantage de tenir cette réunion après la réunion de Halifax des ministres responsables des dossiers de l'énergie et de l'environnement. Le compte rendu de la réunion en question a circulé, et j'incite vivement les membres à trouver le temps d'en faire une lecture attentive. On y apprend que

    les ministres ont réaffirmé l'approche en deux volets que les gouvernements adoptaient en rapport avec la question du changement climatique—prendre des mesures qui produisent dès maintenant des avantages nets et indéniables, tout en évaluant systématiquement les options permettant des réductions durables.

Autrement dit, faisons ce qui est facile dès maintenant et remettons à plus tard ce qui est difficile.

• 1145

Quelle percée! Les ministres se sont entendus pour dire que les formes d'énergie qui ne font pas appel au carbone, notamment l'hydroélectricité, représentent de bonnes sources d'énergie renouvelable. Bravo! Nous sommes très impressionnés.

Nous apprenons, à la page 2, que «[l]es ministres ont reconnu la nécessité d'aider les Canadiens à comprendre le changement climatique et les mesures à prendre pour y faire face...». Remarquable.

Passons maintenant au sommaire des décisions. Le relevé des décisions prises révèle, entre autres, une autre découverte: l'hydroélectricité est une importante source d'énergie renouvelable. On y apprend aussi que les ministres «... préconisent un examen plus approfondi des outils proposés pour des secteurs particuliers...» et encore: «Les ministres s'entendent pour agir de manière à déterminer les meilleures pratiques et à diffuser cette information de manière efficace...».

Nous découvrons aussi:

    Les ministres s'entendent pour encourager vigoureusement les fournisseurs du gouvernement et les participants aux programmes gouvernementaux à prendre des mesures...

    Les ministres s'engagent à explorer les occasions d'investir dans les techniques de réduction des gaz à effet de serre...

    Les ministres reconnaissent l'importance de fournir des incitatifs novateurs et efficaces pour susciter des changements de comportement dans le secteur du transport, et encouragent une multiplication des analyses à ce sujet.

Quelle audace. Félicitations aux ministres.

Ils ont réaffirmé l'importance d'éduquer le public. Encore une fois.

Ils ont approuvé l'idée d'éduquer le public et l'approche provisoire de sensibilisation. Merveilleux.

Ils ont convenu «qu'une première série de mesures hâtives en matière d'éducation du public [est] un début...» Eh bien, n'est-ce pas là une chose merveilleuse?

Ils disent: «Les ministres ont pris note de l'avancement des travaux de la Table des crédits pour mesures hâtives». Oui, et c'est ce que nous constatons nous aussi aujourd'hui, avec un certain désarroi.

Et encore:

    Les ministres ont fait remarquer que tout système de crédits pour mesures hâtives doit être assez souple pour pouvoir s'adapter à une vaste gamme de politiques possibles.

Eh bien, voilà un langage qui masque quelque chose d'inquiétant.

Ou encore: les ministres ont demandé à la Table «d'envisager... l'allocation d'un budget réaliste aux fins des crédits pour mesures hâtives». Voilà qui est tout à fait audacieux. Ou: «Les ministres ont exigé que la Table complète ses travaux à la fin de 1998». Voilà qui est courageux.

Nous voici donc à la rubrique Mesures volontaires et registre, où l'initiative a l'appui des ministres et est censée devenir un répertoire des mesures hâtives prises:

    Les ministres ont entériné l'orientation adoptée par le comité consultatif technique pour ce qui est de la définition et de la standardisation des exigences régissant la participation au registre.

Ciel, il a sûrement fallu un long débat politique autour de la table—je l'imagine ainsi—qui s'est éternisé jusqu'aux petites heures du matin.

    Les ministres ont entériné les plans de MRV Inc. qui veut lancer un programme de reconnaissance des «champions» et remettre des prix à l'occasion d'une cérémonie prévue pour février 1999.

Qu'en dites-vous? N'est-ce pas remarquable?

Enfin, je ne sais pas... espérons que le prochain rapport, le prochain avis aux médias aura un peu plus de substance.

Il me semble que jusqu'à maintenant, si je me fie à ce que j'ai appris ce matin, nous avons droit ici à un remarquable jeu du chat et de la souris. Du point de vue international, nous attendons que les États-Unis agissent avant de décider nous-mêmes. Nous attendons que les États-Unis prennent les décisions difficiles. Nous bougerons s'ils bougent. Comme M. Lincoln nous l'a rappelé plus tôt, à propos de la biodiversité, toutes les fois où on permet que cela se produise sur la scène internationale, cela donne une régression, une absence de progrès.

J'aimerais refaire pour vous la petite histoire des pluies acides, où le Canada a dû faire cavalier seul parce que Reagan, alors le président américain, n'était pas prêt à agir. Et nous avons agi en 1984-1985 et durant les années suivantes. Les Américains ont fini par comprendre et ont signé une entente en 1991.

• 1150

En plus, nous semblons attendre un geste des provinces. On peut voir en quoi il serait judicieux de rallier tout le monde à la cause pour agir collectivement, mais cela comporte un risque, et il faut que quelqu'un prenne les choses en main.

Ensuite, nous semblons attendre que les échappatoires apparaissent, pour savoir quelle serait notre meilleure stratégie. J'ose espérer qu'à Buenos Aires, le gouvernement du Canada ne se rangera pas avec les pays membres de l'OPEP dans les négociations. J'ose espérer que le gouvernement du Canada, à Buenos Aires, se tiendra debout parmi ceux qui montrent la voie et cherchent à faire progresser les choses, et non pas à les retarder ou à chercher des raisons pour justifier d'autres études. Je demanderais à M. Ballhorn s'il peut nous en donner l'assurance.

M. Richard Ballhorn: S'il est une assurance que je peux vous donner, c'est que nous ne nous retrouverons pas avec les pays membres de l'OPEP.

Le président: Merci. C'est une journée à marquer d'une pierre blanche. Nous étions avec les pays membres de l'OPEP à Kyoto, et c'est la raison pour laquelle je pose la question.

M. Richard Ballhorn: Non, nous n'étions pas avec les pays membres de l'OPEP à Kyoto.

Le président: Vous en êtes sûr. Merci.

Au deuxième tour, nous entendrons Mme Kraft Sloan, puis M. Charbonneau, M. Herron et Mme Torsney.

Mme Kraft Sloan: Je veux simplement revenir à la question des puits. S'il est possible que nos forêts et tout le reste soit envisagé comme des sources, plutôt que des puits, allons-nous toujours chercher à faire des puits un mécanisme de flexibilité?

M. Richard Ballhorn: Je vais faire une observation générale là-dessus, puis si vous avez besoin de précisions, nous allons nous en remettre à notre spécialiste.

Nous cherchons évidemment, si nous sommes des êtres rationnels, à adopter des mesures qui nous apportent un quelconque avantage. Il y a toutes sortes de mesures que prennent d'autres pays pour les raisons qui sont les leurs. Si les puits n'étaient pas considérés comme un élément favorable de notre stratégie à nous, je doute que nous nous y attacherions.

Mme Karen Kraft Sloan: Est-ce que les sources feraient donc partie de votre total des émissions?

M. Richard Ballhorn: Vous abordez là une question plus technique. Permettez-moi de faire appel à quelqu'un. Ce sera utile.

Mme Karen Kraft Sloan: Merci.

M. Art Jaques: C'est probablement là un des aspects vraiment controversés en ce qui concerne les puits. Nous ne nous sommes pas entendus sur une définition d'un seul des termes dont j'ai parlé plus tôt. La forestation et la déforestation ne sont pas définies—et notre approche générale découle de la convention-cadre, selon laquelle les pays doivent réduire les sources ainsi qu'améliorer et protéger les puits. Comme notre pays comporte 10 p. 100 des forêts, il nous incombe de faire cela et d'y inclure les puits.

On dirait que nous essayons de nous soustraire à l'engagement que nous confèrent d'autres conventions, par exemple celle sur la biodiversité, si nous disons ne pas vouloir inclure les puits. Nous avons donc toujours dit que nous voulions inclure les puits. Maintenant, nous procédons de la façon qui a été prévue à Kyoto, et je crois que tout le monde s'entend pour dire que la question des puits n'a pas été traitée adéquatement à ce moment-là.

Il y avait deux points de vue. Les puits, tous les puits—c'était là notre point de vue et celui des États-Unis, et de plusieurs pays signataires de l'annexe 1. L'autre point de vue, c'était qu'il ne fallait pas inclure du tout les puits, et plusieurs raisons étaient invoquées en ce sens. Selon un raisonnement donné, la science là-dessus est trop incertaine pour qu'on puisse faire des estimations. On postulait aussi qu'ils représentent un gain fortuit—tout le monde est d'avis qu'étant donné que nous avons une vaste forêt, nous allons en tirer un important avantage, cela nous aidera à respecter nos engagements, et nous serons avantagés.

En clair, comme je l'ai déjà dit à propos de l'incertitude et de la variation possible de ces chiffres, nous n'avons peut-être pas ce gros avantage. Tout de même, il y a encore des raisons de faire inclure les puits, d'agir pour réduire la déforestation et de prendre des mesures pour améliorer les puits. Voilà notre position.

Mme Karen Kraft Sloan: Je comprends cela, mais si nos puits sont en fait des sources, allons-nous les inclure dans nos totaux nationaux.

M. Art Jaques: De la façon dont le protocole est actuellement formulé, nous n'avons pas le choix si nous le ratifions. Nous les incluons, suivant l'interprétation qui est faite du Protocole de Kyoto. Nous voulons donc des interprétations qui sont dans notre intérêt et dans l'intérêt de la convention-cadre, si on peut mettre les deux ensemble.

• 1155

Mme Karen Kraft Sloan: Et j'espère que ce sera dans l'intérêt de la nature aussi.

Les méthodes agricoles et les terres agricoles seront-elles incluses parmi les puits? Si c'est le cas, de quelle façon?

M. Art Jaques: La question commence à se complexifier un peu, et je crois que je n'aborderai pas ici la façon dont le protocole est formulé. Notre interprétation, c'est que les terres agricoles du Canada sont actuellement considérées comme une source, mais une source qui va s'amenuisant. Notre interprétation, pour l'établissement de la base, c'est que la source est incluse et qu'on nous donnerait un crédit pour avoir réduit cette source. Ce n'est pas l'interprétation que tout le monde en fait, de sorte qu'il y a encore matière à discussion. Néanmoins, pour ce qui est d'inclure les soldes parmi les puits, cela ne se fait pas à l'heure actuelle. Cela fait partie des possibilités dont nous voulons continuer à discuter.

En même temps, le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat, l'organisme scientifique chargé du dossier, à la demande du SBSTA, rédigera un rapport spécial sur la grande question de l'utilisation des sols—les modifications à cet égard et la foresterie, l'agriculture, la foresterie—en rapport avec le libellé actuel du protocole et la façon dont les lignes directrices établies exigent des pays qu'ils fassent rapport—traitera de ces questions et produira un rapport qui permet de discuter des conséquences de cela. Le Groupe ne formulera pas de recommandation.

Nous craignons qu'il faille attendre deux ans pour que ce rapport spécial soit publié avant de poursuivre les discussions et ils recommenceront peut-être au point même où ils en étaient dans le passé. Ceux qui s'opposent à l'inclusion des puits diront: «Cessons d'en discuter, cela a déjà été réglé dans le protocole», et que pourrons-nous faire alors? En même temps, nous voulons une espèce de voie parallèle pour orienter les travaux du GIEC.

Nous voulons continuer. Il y a eu un atelier du SBSTA où nous avons pu discuter de la partie du protocole qui porte sur la foresterie. Nous espérons faire adopter à Buenos Aires l'idée de tenir un deuxième atelier pour discuter des activités complémentaires visant à élargir le champ d'action et de traiter de certaines des définitions et de la façon dont elles sont mises en relation avec la mesure.

La raison pour laquelle nous semblons éprouver des difficultés, pour ce qui est de vouloir inclure ou ne pas inclure—c'est vraiment le coeur du sujet—touche la déforestation. La déforestation est illustrée par un nombre absolu dans votre période d'engagement, et l'élimination de tout ce carbone sera évidemment beaucoup plus grande durant une période d'engagement que la faible croissance attribuable aux longues périodes de croissance des forêts au Canada. Le rapport en témoignera peut-être. Il nous faut situer cette question dans le contexte des mesures.

La «variation vérifiable des stocks» est une autre expression qui n'a pas été définie dans le protocole. Faut-il entendre par là les stocks en surface? Faut-il y inclure aussi ce qui est souterrain? Qu'entend-on par «vérifiable»? Ce sont là des questions qui restent à régler. On croirait que le terme «forêt», par exemple, y serait défini, mais il ne l'est pas non plus. Tout cela dépend donc des définitions.

Mme Karen Kraft Sloan: Aussi, si on regarde les forêts, si on parle de forestation, la forêt qui pousse n'est pas la même que la forêt d'origine. Est-ce que cette forêt utilise autant de dioxydes de carbone que la forêt d'origine? C'est moins complexe, en règle générale, surtout si c'est l'homme qui a reboisé le terrain, et l'écosystème a tendance à être plus simple. Je ne suis pas spécialiste des forêts, de sorte que la science à ce sujet m'échappe, mais il me semble que si cela a été reboisé, ce n'est pas la même chose qu'une forêt d'origine.

M. Art Jaques: Cela dépend de ce que vous plantez et du genre de régime que vous avez adopté en ce qui concerne la récolte. Vous avez raison de croire que, dans certains cas, la biodiversité ne sera pas la même. C'est une autre question qu'il faut étudier à la lumière du Protocole de Kyoto—la viabilité des forêts à long terme et les procédés courants d'aménagement forestier. Le GIEC en discutera aussi.

Nous sommes donc d'accord, en partie, avec M. Hornung: nous devrions attendre de voir le rapport spécial avant de décider, mais nous croyons en même temps qu'il y a des questions que nous pouvons régler. La question a déjà été abordée en ce qui concerne les puits et d'autres éléments au niveau politique, au niveau de la politique gouvernementale, dans le Protocole de Kyoto. À nos yeux, il n'est pas clair que le seul fait d'attendre que le GIEC produise son rapport réglera cette question.

• 1200

Le président: Nous allons entendre une courte question de la part de M. Charbonneau, puis Mme Torsney et le président.

Monsieur Charbonneau.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Monsieur le président, j'aimerais poser une question à M. Oulton. Dans sa présentation, il soulignait que le principal mandat du Secrétariat du changement climatique était d'élaborer une stratégie nationale de mise en oeuvre du plan d'action, etc., en collaboration avec les provinces. M. Oulton nous a dit que le principal instrument du processus qui a été conçu est le mécanisme des tables de concertation.

Étant donné que les renseignements sont disponibles sur le site Internet, j'ai regardé les mandats, la composition et le plan de travail de chacune des 15 tables de concertation. À l'heure qu'il est, je ne pourrai pas approfondir beaucoup cette question, mais sur environ 400 personnes qui composent les 15 tables que nous avons ici, j'en ai retracé à peine une quarantaine provenant du Québec, c'est-à-dire environ 10 p. 100.

J'aimerais savoir si cette sous-représentation est due à des difficultés particulières de sensibilisation ou de recrutement. Est-ce que cette sous-représentation d'environ 10 p. 100 est liée à des stratégies de refus en certains milieux ou est-ce qu'il y a d'autres raisons qui l'expliquent?

[Traduction]

M. David Oulton: Je dois dire que le Québec s'applique résolument à régler cette question. Ses représentants assistent à toutes nos réunions avec les autres provinces et ont un rôle des plus constructifs à jouer. De fait, nous avons travaillé avec lui pour essayer d'obtenir une représentation du Québec aux tables, et nous avons été très ouverts à toute autre proposition de représentation.

Pour être franc, une des choses que nous avons constatées—et la façon dont cela est ressorti d'une province à l'autre est en quelque sorte un heureux hasard—c'est simplement que les tables chargées d'étudier les questions techniques exigent énormément de temps et de dévouement de la part des gens qui y travaillent. Ce que nous avons donc essayé de faire pour mieux équilibrer la participation, c'est de créer un deuxième volet, si vous me permettez l'expression, où ceux qui sont branchés électroniquement à la table puissent participer, ceux qui peuvent voir tout ce qui se passe, qui peuvent donner leur avis, mais qui ne sont pas présents aux réunions simplement parce qu'ils n'ont pas les moyens de s'y rendre.

Nous essayons donc d'équilibrer par d'autres moyens la discussion qui a lieu à la table technique, où nous avons, si vous me permettez l'expression, une représentation déformée. Si la représentation n'y est pas idéale, c'est simplement l'effet du hasard, plus précisément de la volonté de participer des gens, car les gens ont été invités, mais nous croyons qu'il y a d'autres façons d'équilibrer les choses.

[Français]

M. Yvon Charbonneau: Monsieur le président, étant donné que, d'après les informations disponibles, il y avait encore, le 13 octobre, 12 listes qui étaient à l'état d'ébauche, est-ce que je pourrais suggérer qu'on poursuive les recherches pour trouver des personnes issues du milieu environnemental? Les centres de recherche en environnement sont nombreux au Québec. L'industrie environnementale est vigoureuse et elle est regroupée au sein de ce qu'on appelle la Grappe de développement des industries de l'environnement. Les organismes non gouvernementaux sont nombreux et très actifs. Il me semble qu'on pourrait approfondir davantage la stratégie de recrutement et, plutôt que de penser à trouver une deuxième manière de les associer à cela par l'Internet,

[Traduction]

le deuxième volet, comme vous le dites,—j'aimerais qu'il y ait plus de gens du Québec qui participent au premier volet. Je crois qu'il y a des efforts à faire, plus qu'auparavant, si nous voulons rejoindre les gens.

M. David Oulton: Je vous remercie beaucoup des observations que vous avez faites.

Comme je l'ai dit, nous essayons d'établir la pleine représentation dans les tables sans en faire des instruments trop lourds. Nous sommes certainement ouverts aux autres façons de procéder; nous acceptons donc la proposition.

• 1205

Le président: Merci, monsieur Charbonneau. Monsieur Herron.

M. John Herron: Merci, monsieur le président. J'ai deux questions rapides à poser—assez rapides, en fait.

Visiblement, vous avez étudié les nombreuses façons de procéder pour atteindre les objectifs que nous nous sommes donnés en ce qui concerne la réduction des gaz à effet de serre. Le président a dit plus tôt que nous allions nous concentrer sur certaines des choses que nous pouvons faire dès maintenant. «Maintenant», c'est plutôt dans l'immédiat.

Pourriez-vous parler un peu de ces mesures dites «sans regret» qu'on pourrait appliquer, celles dont le secrétaire dit que nous allons les appliquer tout de go—ceci, cela, ceci, cela, nous en sommes sûrs. Pouvez-vous m'en dresser une courte liste?

M. David Oulton: Je ne peux pas... Comme l'a dit m'a collègue Sue Kirby, il y a environ 100 projets de nature technologique qui font actuellement l'objet de négociations commerciales, et ils...

M. John Herron: Quelques fleurons...

M. David Oulton: Ce serait probablement injuste de ma part de les annoncer avant le temps, car tout n'est pas encore négocié. Mais cela est très variable, depuis le recours à des sources nouvelles d'énergie de remplacement pour les transports jusqu'à la mise au point d'un procédé efficient de récupération du gaz dans les sites d'enfouissement. Il y en a toute une panoplie. Je ne serais pas prudent si j'annonçais quelque chose qui n'a pas encore été négocié commercialement. Mais on a certainement l'intention de faire en sorte que ces projets se concrétisent, je crois que vous aurez droit à des annonces durant le mois à venir et tout au long des 12 ou 24 prochains mois.

M. John Herron: Sans vouloir trop contourner la règle de la prudence, je vous demanderais de nous dire si, en ce qui concerne l'énergie hydroélectrique, comment le dossier a avancé. Le gouvernement a-t-il adopté une attitude très énergique pour ce qui est du développement du cours inférieur du fleuve Churchill?

M. David Oulton: Cela ne relève pas du mandat du Secrétariat sur les changements climatiques, mais je peux m'en remettre à Sue Kirby. C'est une question plus large qui concerne les discussions entre le gouvernement et les promoteurs du projet.

M. John Herron: Bien sûr.

Mme Sue Kirby: Je soupçonne que vous le savez déjà: nous sommes en pourparlers avec le gouvernement de Terre-Neuve. Je ne peux vraiment vous dire, pour l'instant, le stade exact où nous en sommes. Le mieux que je peux faire, c'est dire qu'il y a des discussions actives.

M. John Herron: J'ai une autre question, monsieur le président.

Les beaux souvenirs que nous nous remémorons à propos du ministère de l'Environnement me procurent du plaisir. Entre 1984 et 1993, nous sommes passés d'un ministère qui avait environ un septième de la taille d'un ministère normal à un ministère qui en a essentiellement le vingt et unième.

Il y a beaucoup de gens qui se demandent si ce sera l'apocalypse économique si nous relevons vraiment les défis qui nous sont posés, par exemple en ce qui concerne le Protocole de Kyoto, ou si nous réglons des choses comme la question des pluies acides. Mais, à l'époque, nous avions un premier ministre qui était engagé pleinement dans le dossier de l'environnement.

Avec toute l'énergie que j'ai vu déployer dans un si grand nombre de ministères différents, je poserais la question suivante à M. Hornung: pour que nous puissions vraiment faire converger les travaux de ces ministères, dont les intentions sont certainement honorables, et avec la somme d'énergie qui est appliquée à cela, cela vous choque-t-il un peu de constater que le premier ministre d'aujourd'hui n'est pas plus engagé que cela dans ce dossier et d'une façon plus «publique»?

Le président: Pour ce qui est des petites questions anodines, ce sera votre dernière.

Monsieur Hornung, je vous invite à être concis.

M. Robert Hornung: Oui. Pour répondre à cette question, je crois que le milieu écologique a continuellement appelé le premier ministre a jouer un rôle plus actif dans le dossier. Il faut ce degré de leadership non seulement pour démontrer au sein de la grande famille fédérale qu'il faut que le dossier progresse, mais encore pour signaler clairement aux autres intervenants et aux provinces que le gouvernement est résolu. Et je crois que, de notre point de vue, le contraste entre le visage public de Jean Chrétien dans le dossier, le premier ministre, et le visage public, par exemple, du président Clinton dans ce dossier, est tout à fait marqué.

Le président: Merci. Nous entendrons Mme Torsney, puis le président, et nous allons clore ensuite la séance.

Mme Paddy Tornsey: Merci. D'après la conversation que nous avons eue, j'imagine qu'on peut s'attendre à ce que les partis de l'opposition traitent de l'environnement au cours de la période de questions.

M. John Herron: J'en avais une. Si vous êtes là durant la période de questions, vous pourriez peut-être vous lever et la poser, à titre de secrétaire parlementaire.

Mme Paddy Torsney: Je crois que je vais poser ma deuxième question du deuxième tour au spécialiste de Mme Kirby et pendant que la personne en question s'en vient, je peux peut-être demander que nous adoptions la proposition de M. Jordan et que nous obtenions une liste des activités qui se déroulent au ministère des Ressources naturelles. Comme titres pour les listes en question, nous pourrions utiliser ceux que proposent le rapport de M. Hornung et de M. Suzuki.

• 1210

M. Nick Marty (directeur, Division de l'élaboration de la politique et de l'analyse, Direction générale de l'efficacité énergétique, ministère des Ressources naturelles): Je m'appelle Nick Marty et je travaille à l'Office de l'efficacité énergétique.

Nous avons plusieurs programmes pour promouvoir l'efficacité énergétique et le recours à l'énergie renouvelable. Nous faisons rapport à leur sujet tous les ans dans le rapport annuel à l'intention du Parlement, sous la rubrique de la Loi sur l'efficacité énergétique. Notre prochain rapport sera prêt dans un mois ou deux. Étant donné certaines des préoccupations soulevées par le Bureau du Vérificateur général, nous allons traiter d'environ 50 indicateurs des progrès que nous faisons sous l'égide de ces programmes.

Comme notre temps est limité, je vais seulement parler de quelques aspects des programmes en question. Par exemple, on croit souvent que nous avons un ensemble de programmes d'adhésions volontaires, mais c'est en fait un ensemble important de programmes réglementaires.

Prenons le cas des réfrigérateurs. En 1996, l'efficacité énergétique du réfrigérateur moyen vendu était inférieure de 36 p. 100 à celle du réfrigérateur moyen vendu en 1990. Cela est une conséquence directe du règlement que nous appliquons.

Ou encore, en 1990, 60 p. 100 des générateurs d'air chaud à gaz naturel qui étaient vendus n'étaient pas très efficaces, plutôt qu'être moyennement ou très efficaces. En 1996, plus aucun des appareils inefficaces n'était vendu au Canada, car notre règlement interdisait la vente de tout générateur dont le degré d'efficacité est inférieur à 78 p. 100. Dans le cas des appareils consommant de l'énergie, le Canada a donc un des programmes réglementaires les plus rigoureux qui soient dans le monde.

Pour parler de logement, disons que la réhabilitation thermique des bâtiments est certainement un secteur clé, comme M. Hornung en a fait mention. Parmi les nouveaux programmes que nous avons instaurés cette année, conséquence directe d'une augmentation de 20 millions de dollars par année du financement provenant du budget fédéral, nous établirons un programme d'ÉnerGuides pour maisons auquel nous consacrerons deux millions de dollars par année. Nous appuierons donc la vérification des maisons de tout le Canada, essentiellement selon le procédé qu'a exposé M. Hornung. Nous allons soutenir financièrement les vérifications en question, car nous croyons que le programme et quelques renseignements bien choisis encourageront les propriétaires à se prévaloir des avantages économiques de la réhabilitation thermique de leur maison.

Le code énergétique type en est un autre exemple. C'est un code que nous avons élaboré de concert avec les provinces et le Conseil national de recherches. Il s'agit d'un code type régissant la consommation d'énergie pour les habitations et les bâtiments commerciaux et dont l'application produirait des améliorations de l'ordre de 15 à 30 p. 100 dans les nouveaux bâtiments.

D'après ce que j'en sais, jusqu'à maintenant, exception faite de la ville de Vancouver, aucune instance ne s'est engagée à inscrire un tel code dans sa réglementation. C'est une question qui relève des provinces.

Nous avons commencé l'année par un nouveau programme incitatif auquel nous consacrerons 10 millions de dollars par année. Il s'agit de financer les coûts de conception préalables à la construction de bâtiments commerciaux dont l'efficacité énergétique est supérieure de 25 p. 100 à ce qui est établi dans le code type des bâtiments commerciaux. Nous sommes convaincus qu'une efficacité supérieure de 25 p. 100 à ce qui est prévu dans le code est une proposition économique, même si la seule application des normes du code représente une proposition économique.

J'en aurais encore énormément à dire, mais je crois que nous n'avons pas le temps. Je dirai seulement que tandis que le Canada améliore son efficacité énergétique—nous avons fait des analyses qui démontrent que notre efficacité énergétique s'améliore depuis 1990—le fait est que l'économie et le nombre de maisons, de voitures et de passagers continue de croître, de sorte que l'augmentation de l'efficacité est en quelque sorte effacée par une économie et une population qui ne cesse de croître. En fait, pour réaliser les objectifs que nous nous donnons, nous devrons en faire plus qu'à l'heure actuelle.

• 1215

Mme Sue Kirby: Monsieur le président, pas pour nos programmes existants... mais une des questions que vous avez soulevées vous-même touche le rôle des points de vente par rapport aux travaux des tables techniques. Je crois qu'il vaut la peine de préciser que cela se fait. La table chargée des bâtiments s'occupe des points de vente.

Le président: Le terme fait penser à un lieu non public, d'une manière limitée. De toute façon, le terme n'évoque pas particulièrement les congélateurs, la façon dont on assure la fraîcheur des aliments pour le consommateur et ainsi de suite. Cela semble désigner la «coquille» que constitue le bâtiment et non pas l'activité très dynamique que représente le commerce de détail, où la consommation d'énergie est élevée.

Pour conclure, j'adresse ma question à M. Oulton. Je voudrais savoir simplement si la question des subventions fiscales insensées, c'est-à-dire les subventions qui encouragent une plus grande production de dioxydes de carbone, sera prise en considération et figurera sous la rubrique des secteurs dans le graphique 7 à la page 7? De même, sera-t-il question de l'innovation énergétique sous la rubrique des secteurs?

Je comprends pourquoi l'électricité y figure, mais l'électricité ne transmet pas la notion d'innovation. Pour que les choses progressent, il nous faudra investir énormément dans l'innovation—je parle de réflexion et de ressources ici—ce qui, bien sûr, nous amène à parler de la conservation de l'énergie et de l'efficacité énergétique, dont il a déjà été question ici. Je vous demande donc si vous avez l'intention d'élargir la portée des secteurs pour inclure les subventions fiscales insensées et l'innovation énergétique.

M. David Oulton: Monsieur le président, je vous remercie de poser cette question.

Avec les tables chargées d'étudier les secteurs, que les responsables étudient des options faisant intervenir des mesures financières, ou des subventions insensées, ou des obstacles réglementaires ou autres, l'intention actuellement n'est pas de se pencher sur une mesure particulière pour l'étudier; il s'agit plutôt d'envisager l'ensemble du secteur et, devant les options qui se présentent, d'étudier toutes les possibilités qui permettraient d'améliorer notre capacité de réduire nos émissions. Nous n'avons donc pas établi ces champs d'intervention précis; plutôt, nous avons demandé à toutes les tables d'en faire un élément de leurs travaux courants, puis nous avons demandé au groupe chargé de la modélisation et de l'analyse d'intégrer les mesures en question et d'en tenir compte dans leur analyse.

Nous croyons que la question de l'innovation, la question de la conservation de l'énergie, la question des règles du jeu équitables devraient être soulevées dans un contexte plus global et que les subventions, aussi bien que les autres questions financières, devraient être soulevées au sein des tables elles-mêmes. En fait, nous essayons d'être toujours là pour conseiller les tables dans leur travail, et nous allons pouvoir commencer, dès qu'elles présentent les documents sur les options possibles, à voir si elles étudient toutes les possibilités. Notre intention est donc d'étudier cela, mais non pas d'en faire une question distincte, mais plutôt d'en faire une partie intégrante des travaux des tables en question.

Le président: Avez-vous présenté une référence à ces tables au comité ce matin? Les champs d'intervention dont vous parliez, ceux qui n'ont pas encore été créés ou que vous êtes sur le point de créer, ne sont-ils pas importants dans le contexte d'un débat public? Si c'est le cas, ne souhaiteriez-vous pas les inclure dans votre exposé?

M. David Oulton: La raison pour laquelle j'ai mentionné cela, c'est qu'ils font déjà partie du mandat établi pour chacune des tables, à nos yeux. Lorsque nous leur demandons d'étudier toute la gamme des options possibles, cela comprend les options financières, les options réglementaires et les subventions. C'est donc inscrit, pour ainsi dire, dans le mandat de chacune des tables auxquelles vous faites allusion.

Le président: Je m'excuse de vous interrompre, mais ne croyez-vous pas qu'ils sont suffisamment importants, dans la mesure où ils sont inclus dans votre mandat, pour être inclus dans votre plan stratégique?

• 1220

M. David Oulton: Je crois bien, monsieur le président, qu'ils figureront dans le plan stratégique.

Le président: Et pourquoi pas ce matin?

M. David Oulton: Essentiellement, c'est qu'il s'agit d'une option sur le nombre qui pourrait être retenu. Nous n'avons pas énuméré toutes les options qui ont été étudiées. Plutôt, nous avons énuméré les organes qui permettent de faire le travail. Nous n'entendions pas par là qu'il ne fallait pas étudier cela. Nous croyons que cela fait partie du mandat de toutes les tables dont il est question.

Le président: Et quand se penchera-t-on là-dessus?

M. David Oulton: On se penchera là-dessus au moment où les tables présenteront leurs conclusions quant aux options qui s'offrent, entre novembre et mai.

Le président: Mais si elles ne figurent pas dans la liste des tables, comment peut-on en discuter?

M. David Oulton: Elles sont incluses dans le mandat de chacune des tables, auxquelles nous avons demandé d'étudier toutes les options possibles.

Le président: Je m'excuse, mais je ne vois pas à la page 6 de mention concernant la teneur des travaux des tables. C'est orienté simplement sur la démarche, comme l'est d'ailleurs la stratégie en entier; ce n'est pas orienté vers le fond.

M. David Oulton: La teneur des travaux des tables, monsieur le président, est précisée dans les mandats qui se trouvent sur le site Web auquel il a été fait allusion plus tôt.

Le président: Je vois.

M. Emmett, je vous invite à conclure.

M. Brian Emmett: Merci, monsieur le président.

À certains égards, j'ai l'impression d'avoir déclenché tout cela avec mon rapport de mai. J'ai fait un rapport sur la situation en mai et j'ai formulé certaines observations. Le comité nous a demandé de revenir et de permettre à M. Oulton de bénéficier de notre sagesse en examinant son plan, pour le cas où son plan serait prêt en l'an 2000 ou à la fin de 1999—je ne suis pas très sûr des dates. Quand je ferai cela, je crois que je vais prendre en considération le fait qu'il y a, il me semble, un consensus général en faveur de mesures touchant le changement climatique, et je crois qu'il y a de nombreux éléments qui permettraient d'agir dans les plans et les consultations et la bonne façon de faire les choses et ainsi de suite. Tout de même, à un moment donné, quelqu'un quelque part devra agir autrement, et j'aurai cela à l'oeil.

Je suis très pragmatique. J'essaierai de voir même les plus petits pas faits dans la bonne direction. Je sais qu'on a déjà dit ici que les petits pas ne seront peut-être pas suffisants, qu'il nous faudra peut-être de grands pas. J'essaie d'être très pragmatique et de voir s'il y a des petits pas de faits dans la bonne direction.

Ce que je recherche, c'est très simple. Avons-nous cessé de creuser le fossé où nous nous trouvions?

Par ailleurs, j'aimerais souligner ce qui m'apparaît comme une condition nécessaire d'une action soutenue, condition que les gens d'action recherchent: une saine gestion. Je n'entends pas par là que l'État peut être une entreprise. C'est beaucoup plus compliqué et beaucoup plus difficile que cela. Je crois tout de même que les fonctionnaires ont tendance à sous-évaluer systématiquement le processus de mise en oeuvre. On se penche beaucoup sur la politique et la négociation, et il y a souvent des difficultés systémiques touchant la mise en oeuvre, et c'est le genre de choses que je vais chercher à détecter quand je reviendrai ici pour vous parler de la même question.

Pour résumer en quelque sorte, dans quelle mesure les futurs plans tiendront-ils compte des recommandations que nous avons formulées pour améliorer la transparence et les pratiques?

Pour terminer, je soulignerais qu'il est particulièrement important d'insister sur la transparence et les comptes à rendre. À titre de commissaire, je crois pouvoir apporter une contribution utile aux travaux du comité, mais il nous faudra, pour procéder à une étude détaillée d'une question majeure, de 12 à 18 mois, du début à la fin, avant de pouvoir présenter nos conclusions au comité ou au Parlement. C'est beaucoup de temps. Et je crois que l'aspect clé, pour les parlementaires, c'est qu'il n'est pas nécessaire d'attendre si longtemps avant de se renseigner sur l'état d'avancement du dossier. On devrait produire périodiquement des rapports consolidés auxquels vous avez accès, pour que vous puissiez comprendre et suivre la progression des choses.

Je crois que M. Hornung a soulevé la question de la volonté politique. Il est terriblement difficile d'avoir de la volonté politique si on a pas l'information nécessaire pour s'engager dans un dossier. J'insiste donc beaucoup là-dessus, et c'est la chose que je vais chercher à voir d'ici le temps où je reviendrai vous parler à nouveau de cette question dans quelques années.

Le président: Je vous remercie d'avoir souligné les trois points en question, monsieur Emmett. J'en ajouterai un quatrième: nous avons appris ce matin, mes collègues et moi, que nous sommes censés lire le site Web avant de tenir une réunion de cette nature. Comme cela grève considérablement l'horaire déjà chargé des parlementaires, puis-je proposer, dans le cas où nous aurions une réunion à l'avenir, de faire mettre sur papier les éléments du site Web qui sont pertinents, pour que nous puissions avoir toute la documentation devant les yeux. Il me semble qu'il s'agit là d'une demande relativement raisonnable.

• 1225

Cela étant dit, je tiens à remercier tous les responsables ici présents, à la table et dans la salle, les interprètes et les autres, du temps et de l'effort qu'ils ont consacré à l'audience et des réponses que nous avons reçues. La séance a été à la fois très complète et très enrichissante. Nous allons certainement nous réunir après la rencontre de Buenos Aires.

La séance est levée.