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JURI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS

COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 28 octobre 1998

• 1640

[Traduction]

La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): Bonjour.

Nous poursuivons nos audiences sur le projet de loi C-51, Loi modifiant le Code criminel, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous conditions.

Nous accueillons l'honorable Anne McLellan, ministre de la Justice. Bienvenue, madame.

Notre invitée est accompagnée de Richard Mosley, sous-ministre adjoint, Politique en matière de droit pénal et justice applicable aux communautés, de Chris Ram, avocat général principal, Section de la politique en matière de droit pénal et de Jodie Van Dieen, conseillère juridique, également auprès de la Section de la politique en matière de droit criminel.

Je constate que nous avons perdu M. Roy en cours de route. On me dit qu'il est souffrant. Nous apprécions d'autant plus tout le temps qu'il a passé avec nous hier.

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): C'est nous qui l'avons rendu malade.

La présidente: C'est l'effet que nous faisons.

Madame la ministre, je sais que vous devez partir pour aller présenter notre rapport à vos collègues des provinces et des territoires. Nous sommes encore tout emballés par ce rapport et je suis certaine que vous l'avez déjà mémorisé depuis que je vous ai vue à 15 heures.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): La ministre dit qu'elle ne l'a pas encore lu.

La présidente: Sachez que nous sommes très reconnaissants envers votre ministère pour l'aide qu'il nous a apporté dans la préparation de notre rapport. Par ailleurs, il nous a fait bénéficier d'un document d'information qui nous a permis de réaliser des économies, car nous avons pu respecter le programme de notre comité et débloquer notre personnel pour lui permettre de continuer la rédaction de notre rapport Les droits des victimes: Une voix et non un veto. Donc, merci beaucoup. Je vous en prie, commencez.

L'honorable Anne McLellan (ministre de la Justice et procureure générale du Canada, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

Permettez-moi, avant toute chose, au nom de mon ministère mais surtout en mon nom propre, de vous dire à quel point nous avons été ravis de recevoir votre rapport sur les droits des victimes. Comme vous le savez, il s'agit là d'une question qui me préoccupe beaucoup. Je tenais donc à vous remercier tous et à vous féliciter pour l'excellent travail que vous avez accompli à ce sujet, de même que pour la belle unanimité dont vous avez fait preuve sur la quasi-totalité des recommandations formulées. Ce degré d'unanimité prouve l'importance des droits des victimes et démontre le sérieux avec lequel vous-mêmes et de nombreux Canadiens et Canadiennes tiennent respectueusement compte du droit des victimes dans notre appareil de justice criminelle.

Au nom de tout le personnel de mon ministère, je vous remercie pour cet excellent travail. Je n'ai pas encore eu l'occasion de prendre connaissance de ce rapport, mais je prévois de le lire ce soir dans l'avion, en route vers Regina. Comme vous l'avez dit, j'en parlerai avec mes collègues des provinces et des territoires, demain, quand je les rencontrerai à l'occasion de notre réunion des ministres de la Justice.

Je suis très heureuse de me trouver ici aujourd'hui pour vous faire part de ma position sur le projet de loi C-51. Je tiens à préciser d'emblée qu'il n'est qu'un ensemble relativement modeste de modifications que nous nous proposons d'apporter au droit criminel. Je ne m'en excuse pas pour autant. Nous avons effectué plusieurs changements importants sur des aspects comme le crime organisé, mais il faut, de temps en temps, apporter d'autres changements, moins flamboyants.

La formule des projets de loi composites permet d'utiliser de façon très efficace le temps de la Chambre et des comités, mais elle ne fonctionne que lorsqu'on est certain de bénéficier d'un appui relativement large pour les changements proposés. Dès qu'il est question de modifier les politiques en profondeur, les députés peuvent se trouver dans une position difficile, qu'ils soient pour ou contre les changements. En outre, les changements envisagés ne peuvent pas alors faire l'objet du débat sérieux qu'ils pourraient mériter.

Dans le cas qui nous intéresse, j'avais isolé plusieurs aspects sur lesquels nous voulions agir rapidement, mais aucun d'eux ne nécessitait de changements suffisamment importants pour justifier un projet de loi distinct. En outre, les gens de mon ministère prennent régulièrement note des problèmes techniques liés au Code criminel et ils dressent la liste d'autres amendements, ils consignent les oublis législatifs et les autres problèmes mineurs pour constituer un dossier complet.

La plupart de ces changements présentent un point commun: ils visent à régler les préoccupations soulevées par les provinces ou par les criminalistes, que ce soit dans le cadre de consultations régulières ou à la suite de causes ou d'incidents particuliers.

Les modifications relatives aux dispositions sur les jeux, par exemple, ont surtout été apportées à la demande du Québec et de l'Ontario et les changements concernant les dispositions sur la prostitution enfantine nous ont été soufflés par la Colombie- Britannique et l'Alberta. La suppression de la règle d'un an et un jour fait suite à des préoccupations exprimées par plusieurs provinces, la plus récente en date étant le Manitoba.

• 1645

Plusieurs provinces ont également demandé l'emploi plus fréquent des ordonnances de non-communication afin d'empêcher que les personnes accusées de violence familiale ne contactent leurs victimes ou les témoins, avant et après l'enquête sur cautionnement. L'un des changements relatifs aux appels dans les causes au criminel a été demandé par la Cour suprême du Canada.

Comme je l'ai déclaré à l'étape de la deuxième lecture, nous admettons que les provinces ont un important rôle à jouer dans l'application de la loi et dans la judiciarisation, et nous sommes disposés à agir dans la mesure de nos moyens pour calmer leurs préoccupations. Le tourisme et le développement économique ne nous touchent pas de près, mais par les deux amendements relatifs aux jeux, nous avons donné suite aux demandes de certaines provinces sans soulever de problèmes importants sur le plan de la sécurité ou de la sûreté du public.

L'un des principaux éléments du projet de loi est la suppression de la période d'un an et un jour prévue à l'article 227 du Code criminel. Il est relativement rare d'avoir recours à cette disposition, mais cela s'est produit de plus en plus souvent au cours des dernières années, car grâce aux progrès médicaux il est plus probable de maintenir en vie les victimes d'agression pendant une telle période. En outre, les progrès réalisés en médecine légiste permettent maintenant d'établir la cause du décès dans des cas de maladie ou de pollution environnementale, ce qui n'était pas possible il n'y a que quelques années.

En outre, certains ont proposé de modifier l'article 227 pour codifier le principe de causalité. Nous avons songé à le faire mais nous avons finalement décidé de laisser cela de côté. À cause des modalités inhérentes aux cas difficiles, la formulation d'une règle aurait énormément compliqué le droit et sans doute limité le nombre de causes admissibles à ce titre.

En 1985, dans la cause R. c. Smithers, la Cour suprême du Canada a statué que l'auteur de tout acte contribuant un tant soit peu au décès d'une personne doit être tenu pour responsable de ce décès. Si le Parlement voulait codifier ou étayer cette disposition, il courrait le risque d'aboutir à une norme moins exigeante. En outre, il pourrait limiter la capacité des tribunaux de tenir compte des réalités complexes de certaines causes.

Nous nous sommes également demandés si l'on pouvait appliquer rétroactivement la suppression de la règle d'un an et un jour à certaines causes déjà engagées. Or, nous en sommes empêchés par le paragraphe 11.(g) de la Charte, qui interdit de déclarer une personne coupable de crimes de façon rétroactive, de même que par l'article 7, qui garantit la justice fondamentale.

La prolongation de la période de limitation en vertu de la Charte, quand cette période a commencé, est plus déterminante encore. Nous nous étions fixé pour politique de supprimer la période en question dans le plus grand nombre de cas possibles.

L'autre changement que j'ai jugé prioritaire concerne les infractions relatives au télémarketing trompeur, infractions qui font l'objet de dispositions proposées par mon collègue de l'Industrie dans le projet de loi C-20, l'aspect criminel étant visé par le Code.

À l'époque de la rédaction et du dépôt du projet de loi C-20, on n'avait pas établi ce lien important entre nos deux projets de loi. Les infractions à la Loi sur la concurrence relèvent de la loi criminelle réglementaire et le Bureau de la concurrence n'est généralement pas contraint de cibler les poursuites entreprises pour d'autres infractions relevant de sa compétence, comme la publicité trompeuse.

Nous avons constaté, à l'occasion de notre examen du problème et de la récente couverture médiatique dont celui-ci a fait l'objet, que la fraude en télémarketing et le télémarketing trompeur représentent un tout autre problème. Les téléphonistes sont confinés dans des salles où on leur demande de contacter un grand nombre de victimes potentielles. Les pertes ne sont pas forcément très grandes, mais comme en général les revenus de ce genre d'opérations sont très importants, la confiscation est un puissant agent de dissuasion ainsi qu'un moyen non négligeable de compenser les victimes. Il est arrivé que les revenus soient tellement importants que ce genre de crimes a attiré l'attention du crime organisé au Canada, dans le sens traditionnel du terme. C'est pour cette raison qu'il est d'autant plus important de cibler ce genre de revenus.

Je prends tout cela très au sérieux et le ministre de l'Industrie est d'accord avec moi. Dès que nous avons constaté l'existence de ce lien, nous l'avons mentionné dans ce projet de loi.

L'autre priorité en matière de crime organisé, pour le Québec et pour le solliciteur général, a été l'exclusion du processus d'examen accéléré des demandes de libération conditionnelle des personnes accusées d'avoir commis des infractions associées au crime organisé. Il s'agit d'un amendement relativement simple, que nous avons apporté, mais je sais que certains estiment que nous ne sommes pas allés suffisamment loin. Nous y reviendrons peut-être plus tard.

• 1650

Nous avons par ailleurs proposé d'exclure les délinquants appartenant au crime organisé, dans la mesure où la dimension «crime organisé» est établie dans la déclaration de culpabilité ou dans la condamnation. Pour aller plus loin et intervenir dès le stade de la déclaration de culpabilité, il nous faudrait restructurer la notion d'infraction pour blanchiment d'argent. Je suis ouverte à toute suggestion à cet égard, mais de tels changements vont au-delà de ce qui est raisonnable dans le cadre d'un projet de loi omnibus.

Il y a moins de deux ans, nous avons ajouté au Code criminel les infractions commises par des délinquants associés au crime organisé, car nous voulions agir assez rapidement à ce propos avant que le nombre de cas n'augmentent vraiment.

Un autre aspect important touchant au crime organisé est celui de l'utilisation potentielle, en tant que monnaie d'échange, de diamants bruts produits au Canada. Le problème est d'autant plus d'actualité que la première mine de diamant vient d'être mise en exploitation il y a deux semaines dans les Territoires du Nord- Ouest. Il est encore trop tôt pour dire si nous aurons affaire à un problème sur ce plan, mais si tel devait être le cas, il est fort probable que les Territoires du Nord-Ouest seraient concernés, puisque c'est de là que viennent les diamants, ainsi que d'autres provinces et éventuellement d'autres pays où les pierres précieuses seraient passées en contrebande et vendues.

Nous avions proposé de donner au fédéral le pouvoir de poursuivre ce genre de crime, mais comme vous l'a précisé mon secrétaire parlementaire, nous sommes disposés à retirer cet article du projet de loi, parce qu'il a provoqué des réactions chez certaines provinces. Si un tel problème devait se produire, nous en parlerions dans une tribune appropriée avec les provinces, pour déterminer la meilleure façon de nous y prendre.

Je tiens ici à insister sur le fait que nous n'avons pour objectif que de trouver le meilleur moyen de travailler ensemble afin de lutter contre le crime organisé, lequel déborde de plus en plus des frontières provinciales et nationales.

L'autre importante composante de ce projet de loi est la série de réformes sur la détermination de la peine. Comme pour les autres éléments de C-51, notre intention n'était pas d'apporter des changements fondamentaux à la politique sur l'établissement de la peine, mais plutôt de donner suite aux préoccupations exprimées dans le sillage de la Loi sur la détermination de la peine qui est entrée en vigueur à la fin de 1996. Celle-ci a donné lieu à un ensemble de règles générales déterminant les amendes, les condamnations avec sursis et les autres mesures; par ailleurs, dans certains cas, il a fallu réconcilier ou ajuster l'application des nouvelles règles générales en fonction des dispositions spécifiques du Code criminel et des autres lois.

Nous proposons, par exemple, de spécifier que l'application générale des amendes n'exempte pas les délinquants de peines de prison prescrites par les tribunaux. Ainsi, même si une peine minimale d'emprisonnement est fixée, le délinquant pourra, en plus, être condamné à verser une amende.

Les changements les plus importants relatifs à la détermination de la peine concernent l'application des condamnations avec sursis. Il est question de s'assurer que les ordonnances de condamnation avec sursis sont effectivement respectées et que les délinquants subissent les conséquences de leurs actes en cas de transgression de ces ordonnances. Il n'est pas, ici non plus, question de modifier en profondeur la politique fondamentale régissant les condamnations avec sursis.

Madame la présidente, je crois savoir que votre comité va se pencher sur cette question des condamnations avec sursis. Je vous ai adressé une lettre à cet égard et je vous ai fait parvenir des renseignements ainsi que des statistiques qui étaient en possession du ministère de la Justice sur ce que donnent les nouvelles dispositions relatives aux condamnations avec sursis, deux ans après leur adoption. Vous avez certainement examiné tout cela et je suis maintenant disposée à prendre en compte toute recommandation que vous voudrez bien me faire pour modifier davantage ces dispositions, advenant que vous jugiez une telle réforme nécessaire.

Je suis consciente que les dispositions relatives aux condamnations avec sursis sont controversées. Comme je vous le disais, elles n'ont été mises en oeuvre qu'il y a peu de temps et il est donc important de leur donner la chance de fonctionner correctement avant de les modifier de façon importante. Pour l'instant, la cour d'appel a été saisie de plusieurs cas et d'autres causes sont en instance devant la Cour suprême du Canada. Notre appareil de justice criminelle s'en est toujours remis aux tribunaux d'appel pour déterminer la sévérité des peines et les mesures appropriées, au cas par cas, et nous devrions attendre de voir la façon dont la Cour suprême du Canada statuera à leur égard avant de juger de l'efficacité de ces nouvelles dispositions.

En matière de condamnation avec sursis, la politique consiste à réserver les espaces de prison à ceux et celles qu'il faut absolument incarcérer pour protéger la société et à imposer des peines qui soient efficaces à la fois en tant que châtiment et en tant qu'instrument de réadaptation. D'après les informations dont nous disposons jusqu'ici, les condamnations avec sursis sont effectivement appliquées à ces fins. De septembre 1996 à avril 1998, plus de 22 000 condamnations avec sursis ont été prononcées. La vaste majorité d'entre elles avait trait à des infractions commises contre la propriété, à des infractions avec violence ou sans violence, mais généralement à des agressions mineures. On ne s'étonnera pas que les causes de ce type portées en appel devant la Cour suprême font exception, mais nous avons hâte de savoir ce qu'il en découlera.

• 1655

Entre-temps, nous avons cerné un problème qui, quant à moi, pouvait être rapidement et efficacement, raison pour laquelle nous avons adopté les amendements nécessaires dans ce projet de loi. Dans certains cas, les procédures découlant des dispositions originelles en matière de condamnation avec sursis—dans les causes de transgression, par les contrevenants, des conditions établies—ne se sont pas avérées efficaces. Quand on ne parvenait pas à mettre la main sur les contrevenants ou que les procédures étaient retardées, les tribunaux perdaient leur compétence en la matière dès que la durée correspondant à la peine était épuisée, sans même que le contrevenant l'ait purgée.

Les amendements proposés permettront de suspendre les délais inhérents à la peine, pour s'assurer que les tribunaux retrouvent leur pleine compétence en matière d'inobservation des ordonnances, dès que les contrevenants seront repris. Cela permettra en outre d'éviter que les contrevenants soient crédités pour une peine qu'ils n'auront pas purgée.

Nous avons veillé à garantir l'équité du système et à effectivement créditer aux contrevenants le temps d'emprisonnement qu'ils auraient dû purger, à condition qu'ils aient une excuse valable pour avoir dérogé à l'ordonnance de condamnation avec sursis ou qu'ils fassent la preuve d'autres circonstances exceptionnelles. Quoi qu'il en soit, les contrevenants ne bénéficieront d'aucune remise dès que les conditions de la peine seront imposées.

Nous avons pensé qu'il fallait rapidement apporter ce genre de changements et que nous devions agir le plus vite possible, raison pour laquelle nous avions proposé ce projet de loi omnibus à l'époque.

Je crois savoir que mes collaborateurs, qui ont comparu devant vous hier, ont répondu à la plupart de vos questions d'ordre technique. Je suppose que nous allons aujourd'hui conclure cette partie et voir si les membres du comité ont d'autres questions à me poser. Mes fonctionnaires seront heureux de répondre à toute autre question que vous voudrez bien leur poser.

Pour terminer, je veux revenir sur votre allusion au sujet de la participation de notre collègue, Yvan Roy, hier. Malheureusement, M. Roy est soudainement tombé malade, ce qui explique son absence. Je suis sûre que le comité tient à ce que je lui fasse part de vos voeux de prompt rétablissement, d'autant plus qu'à entendre les membres du comité de tous les partis, M. Roy est perçu comme étant direct et toujours prêt à élucider la plupart des aspects techniques pointus de la loi. Je suis certaine que nous voulons tous lui souhaiter un prompt rétablissement.

Je m'arrête ici et je serai très heureuse de répondre à vos questions.

La présidente: Merci, madame la ministre.

Monsieur Reynolds.

M. John Reynolds: Je veux aborder trois choses; je pourrais peut-être le faire en bloc et vous me répondrez de la même façon.

Je veux que nous parlions un peu de la condamnation avec sursis. Je conviens avec vous qu'il faut se donner la chance de voir si les choses fonctionnent correctement, mais certains ont formulé des critiques dans les cas de crimes violents. Le meilleur exemple est peut-être celui de Montréal où deux hommes condamnés pour viol et actes violents s'en sont sortis avec une condamnation avec sursis, ce qui a provoqué un tollé.

Je me demande si la ministre accepterait d'apporter un amendement à ce projet de loi—je sais que vous nous avez invités à examiner toute la situation—pour signifier aux juges que le Parlement du Canada n'est pas d'accord avec le fait que des gens commettant ce genre de crimes violents obtiennent des condamnations avec sursis. Ce sera ma première demande.

L'hon. Anne McLellan: Très bien.

M. John Reynolds: Bon, je vais enchaîner avec mes deux autres questions et vous pourrez me répondre par la suite; peut-être que votre personnel voudra aussi intervenir.

L'hon. Anne McLellan: Très bien.

M. John Reynolds: Je tiens à vous féliciter d'avoir augmenté la durée des peines d'emprisonnement prévues pour les membres du crime organisé, mais je me demande si c'est suffisant.

Quand on voit ce qu'englobe la définition de crime organisé, nous sommes tous conscients que c'est l'un des plus graves problèmes auxquels nous soyons confrontés au Canada, problèmes qui s'aggravent dans le cas des drogues et du blanchiment d'argent. Vous avez parlé des diamants, qui risquent de devenir un autre problème.

Je me demande s'il n'est pas temps de décréter que toute personne condamnée pour un crime et appartenant à une organisation criminelle devra purger au moins les deux tiers de sa peine d'emprisonnement avant de pouvoir prétendre à être libérée. J'aimerais que vous envisagiez d'accepter cet amendement.

• 1700

Enfin, je veux parler de la question des proxénètes d'enfants et d'adolescents de moins de 18 ans. Je souhaiterais qu'on fixe pour eux une peine d'emprisonnement minimale obligatoire. Quand il s'agit d'adultes, c'est différent, les peines peuvent varier. Mais quand il s'agit de proxénètes qui contraignent des enfants à se prostituer, j'estime que leur crime est aussi grave que s'ils faisaient de trafic de stupéfiants. J'aimerais que les juges au Canada sachent que, même si elles en sont à leur première infraction, les personnes condamnées pour ce genre de chose doivent purger une peine d'emprisonnement minimale.

Voilà donc quels étaient les trois principaux aspects me préoccupant. Je conviens par ailleurs avec vous que le projet de loi renferme un grand nombre de dispositions qu'il faut effectivement mettre en oeuvre.

L'hon. Anne McLellan: Merci beaucoup. Permettez-moi de répondre à ces points-là. Rick, Chris et Jodie voudront peut-être ajouter quelque chose ensuite.

Tout d'abord, j'estime que ces trois aspects sont très importants. J'ai l'impression que votre comité et moi-même, en ma qualité de ministre, pourrions y revenir dans les prochains mois, dans un contexte différent, et peut-être aller un peu plus dans le détail.

Comme je le disais, à cause des préoccupations soulevées à la Chambre et ailleurs, j'ai demandé à votre comité d'examiner la question relativement nouvelle de la condamnation avec sursis. Je vous ai demandé d'analyser ce qui s'est passé jusqu'ici et de voir si l'on peut envisager des réformes.

Vous avez fait allusion à des situations extrêmes où les tribunaux inférieurs ont accordé des condamnations avec sursis dans des situations où, nous sommes sans doute tous d'accord là dessus, c'était tout à fait inapproprié—par exemple, dans le cas de certaines agressions sexuelles graves. Les tribunaux d'appel ont été saisis de ces causes-là. En fait, les tribunaux d'appel dans des provinces comme la mienne, l'Alberta, mais aussi en Ontario, en Colombie-Britannique et je crois au Québec, ont été saisis de ce genre de dossiers—vous avez sans doute raison de parler de cas extrêmes—et ils profitent de l'occasion pour préciser les choses et mieux orienter les tribunaux inférieurs. Ils précisent dans quels cas on doit recourir aux condamnations avec sursis et quand il faut l'éviter, et ils indiquent les conditions à imposer et d'autres choses du genre.

Je pense qu'une des meilleures décisions à cet égard a été rendue par la Cour d'appel de l'Alberta, qui a produit un exposé très détaillé. En fait, c'est le juge en chef Fraser qui a précisé quand, selon la cour d'appel, il convenait d'accorder une condamnation avec sursis et quand il fallait l'éviter.

Je vois où vous voulez en venir. Cela nous préoccupe, nous aussi. Je préférais, dans ce projet de loi omnibus, traiter de changements plus spécifiques, mais je suis certaine qu'après votre examen et après que nous aurons pris connaissance des décisions de la Cour suprême, nous serons en meilleure posture pour prendre une décision et déterminer quelles mesures il conviendra d'adopter par la suite.

Par exemple, nous avons suggéré de joindre en annexe une liste des infractions ne devant pas faire l'objet d'une condamnation avec sursis. Je serai honnête avec vous: à ce stade, ce n'est pas l'option que je préfère, mais je pense que vous devriez l'examiner en comité et nous faire des recommandations à cet égard plus tard.

Le crime organisé représente pour nous tous un problème très grave. Je vous ai entendu nous recommander ou suggérer que les gens du crime organisé soient obligés de purger les deux tiers de leur peine d'emprisonnement.

Rick, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Richard G. Mosley (sous-ministre adjoint, Politique en matière de droit pénal et justice applicable aux communautés, ministère de la Justice): Madame la ministre, madame la présidente, il y a eu des échanges réguliers avec les corps policiers et les provinces; ils ont porté sur l'examen général du problème que constitue le crime organisé. En fait, dans les prochaines semaines, nous aurons une autre rencontre avec les participants habituels à ce genre de discussions. À cette occasion, nous examinerons certaines des propositions formulées par le solliciteur général pour adopter un plan d'action national sur le crime organisé.

Il est notamment proposé de revoir les peines imposées aux gens du crime organisé. Nous devrions le faire l'année prochaine. Il y a plusieurs considérations qu'il faut prendre en compte.

• 1705

Par exemple, je crois que la question de l'admissibilité à la libération conditionnelle sera abordée à l'occasion de l'examen de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous conditions, que le solliciteur général vient d'entreprendre.

Pour ce qui est du troisième point que vous avez mentionné, c'est-à-dire le commerce des services sexuels de personnes de moins de 18 ans, sachez que le Parlement s'est récemment penché sur cette question quand il a modifié l'article 212 du Code criminel. Le nouveau paragraphe (2.1) prévoit une peine exemplaire pour ceux et celles vivant du commerce sexuel de personnes de moins de 18 ans. Il est prévu que la peine d'emprisonnement varie de cinq ans au minimum à quatorze ans au maximum.

Le ministère continue de se pencher sur le problème des mauvais traitements infligés aux enfants, notamment des effets sur les jeunes prostitués. En fait, lors de la conférence ministérielle de Regina, cette semaine, nous serons appelés à nous pencher sur un rapport rédigé par des fonctionnaires fédéraux, provinciaux et territoriaux sur ce même problème. En outre, nous examinerons d'autres questions relatives à l'enfance maltraitée.

L'hon. Anne McLellan: Je crois que ce vient de dire M. Mosley est très important. Il parle d'enfance maltraitée. C'est en fait ainsi que nous devons catégoriser le problème dans le cas des jeunes de moins de 18 ans.

Je tiens à féliciter les provinces qui ont été nombreuses à adopter cette approche. Nous collaborons avec elles non seulement sur le dossier de la prostitution des enfants, mais aussi sur toute la question des enfants victimes de violence dans notre société. Cela est certainement très important dans ce cadre.

Je tiens à souligner que nous prenons cette question très au sérieux, ce qui explique les récents amendements apportés au Code dont M. Mosley vient juste de vous parler. Il est important de préciser qu'on parle effectivement de violence faite aux enfants. Il peut arriver que nous poursuivions avec moins d'ardeur que nous le devrions les cas de prostitution. Pourtant, il est important que notre société condamne avec force tous ceux qui cherchent à obtenir les services sexuels d'un enfant de moins de 18 ans.

J'estime que nous-mêmes, les provinces et les territoires collaborent de façon assez efficace, d'abord pour préciser cela dans nos lois respectives et, deuxièmement, pour poursuivre le travail sur cette question. Personne ne détient la solution globale, nous n'en avons tous qu'une partie et nous essayons de collaborer entre nous pour être plus efficaces et régler ce problème.

La présidente: Chuck Cadman.

M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): J'attendrai la prochaine série.

La présidente: Très bien. Je ne chronomètre personne, je vais être raisonnable aujourd'hui.

Peter MacKay.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Merci, madame la présidente.

La présidente: Mon maillet, vite mon maillet... M. MacKay va parler.

Des voix: Ah! Ah!

M. Peter MacKay: Madame la ministre, mesdames et messieurs les fonctionnaires, je vous remercie de votre présence. Je suis très heureux de vous voir ici. Je voulais, moi aussi, vous féliciter sur le même ton que celui de la présidente. J'estime qu'il s'agit là d'une loi tout à fait positive. J'y vois un grand nombre de changements d'ordre pratique que j'aurais apprécié dans les tribunaux. Je songe en particulier aux ordonnances de non- communication et à la suspension des délais pour les condamnations avec sursis. Ce sont là deux problèmes qui ont sans doute été presque immédiatement mentionnés dans les tribunaux du Canada.

J'ai une suggestion qui fait suite à un commentaire de mon collègue du Parti réformiste. Il est possible qu'on inclue la violence découlant d'activités de gang dans les dispositions du Code criminel qui traitent actuellement des circonstances aggravantes. Je pense plus particulièrement aux dispositions sur les crimes motivés par le racisme ou le sexisme; on pourrait éventuellement inclure dans cet article du Code les crimes commis dans le cadre d'activité de bandes organisées. C'est une suggestion, en passant. Je sais que nous allons y revenir en comité.

Dans la même veine, pour ce qui est des condamnations avec sursis—encore une fois, je sais que nous en parlerons davantage plus tard—j'aimerais savoir ce que vous penseriez d'un durcissement des peines dans le cas des crimes violents, surtout des crimes à caractère sexuel, qui ne pourraient pas faire l'objet d'une condamnation avec sursis, parce qu'on retirerait ce genre de discrétion aux juges. Je dis cela avec beaucoup de gravité, parce que je trouve que certains juges accordent parfois à tort ce genre de condamnation. Nous devrions peut-être agir sur le plan législatif plutôt que de nous en remettre aux tribunaux d'appel et d'attendre qu'ils statuent que ce genre de peine est effectivement inadaptée.

• 1710

Pour ce qui est de ce projet de loi, et surtout de l'article 6, a-t-on invité la GRC et d'autres corps policiers à déterminer quelles conséquences peut avoir un assouplissement des dispositions relatives aux jeux?

L'hon. Anne McLellan: Nous n'avons pas invité la GRC parce l'application de la loi dans ce cas est de compétence provinciale. Je crois savoir, toutefois, que le ministre Palladini, qui a demandé l'inclusion de cet article sur le pouvoir facultatif, a contacté la Police provinciale de l'Ontario. Il est d'ailleurs en contact avec ce corps policier pour recueillir ses éventuelles préoccupations.

Peut-être que Chris ou Rick pourraient vous donner davantage de renseignements à ce sujet, mais j'ai cru comprendre que la GRC n'a pas à appliquer cette loi, contrairement à la Police provinciale de l'Ontario.

M. Richard Mosley: Quand cette proposition a été formulée, nous avons consulté chaque province pour savoir si l'assouplissement de la loi relativement aux jeux pouvait leur poser problème sur le plan de l'action policière. Leur réponse a été largement négative.

Certes, elles craignent que les jeux de dés et autres jeux de chance donnent lieu à de la triche, mais c'est là un problème qu'elles peuvent juguler par le biais des règlements qu'elles administrent relativement à l'exploitation des casinos. C'est ce qu'elles nous ont déclarés. Il est surtout question de surveiller de près les activités du jeu. Il s'agit d'un aspect qu'elles estiment être en mesure de contrôler. En soi, cela ne devrait donc pas faire obstacle à la modification de la loi.

La présidente: Excusez-moi, monsieur Ram.

M. Chris Ram (conseiller juridique, Section de la politique en matière de droit criminel, ministère de la Justice): J'ai quelque chose à ajouter. Pour ce qui est de la dimension sociale de votre question, il faut distinguer deux choses. D'abord, il y a les préoccupations relatives à la sécurité des personnes, puis il y a les conséquences de nature sociale.

Les consultations que nous avons tenues—je n'y ai personnellement pas participé—nous ont permis de constater que l'inclusion de jeux de dés et de hasard dans les casinos n'attirerait pas de nouveaux clients, mais influerait sur le genre d'activités choisies par les joueurs habituels. Il est donc beaucoup plus question d'activités concurrentes que de nouvelles activités de jeu.

La présidente: Poursuivez.

M. Peter MacKay: S'agissant de ces consultations, je me demande si la ministre accepterait de déposer les interventions dont elle a été destinataire ou la correspondance que lui ont adressée les gouvernements provinciaux, les sociétés ou les groupes de lobby, en faveur ou contre ce changement à la loi.

Je voudrais savoir comment a réagi la Nouvelle-Écosse. Même si, dans vos remarques liminaires, vous avez dit que ce dossier intéresse surtout l'Ontario et le Québec, la Nouvelle-Écosse et votre actuelle province de résidence, l'Alberta—parce que ce n'est pas là où vous habitiez avant—vont sans doute tenir des débats animés sur le dossier des casinos et du jeu en général.

L'hon. Anne McLellan: Je n'ai aucune objection à vous communiquer la lettre du ministre de la Justice de l'Ontario, M. Palladini, dont je vous parlais tout à l'heure, mais comme il s'agit d'un courrier qu'un ministre provincial m'a adressé, je pense qu'il conviendrait que je lui demande, par courtoisie...

M. Peter MacKay: Tout à fait, je comprends fort bien.

L'hon. Anne McLellan: ...s'il s'objecte à ce que cette lettre soit déposée auprès de votre comité. C'est ce que je vais faire.

Rick, pour ce qui est des autres correspondances que nous avons reçues, avons-nous quelque chose de la Nouvelle-Écosse?

M. Richard Mosley: Je ne me rappelle pas.

L'hon. Anne McLellan: Je ne le pense pas.

M. Richard Mosley: Je ne me souviens pas d'avoir vu quelque chose.

L'hon. Anne McLellan: Moi non plus.

M. Richard Mosley: Toutes les provinces ont participé aux rencontres régulières de fonctionnaires et de ministres et il a été plusieurs fois question de cela. Je suis certain que la Nouvelle- Écosse a pu communiquer son point de vue. En revanche, je ne puis vous dire aujourd'hui si elle nous a directement écrit à ce sujet.

• 1715

Je me dois d'insister sur le fait qu'il appartient aux provinces de décider d'étendre ou non les permis aux jeux de dés. Ce sont elles qui doivent décider d'autoriser ou non les jeux de dés.

M. Peter MacKay: Je me rends bien compte qu'elles ont un droit de retrait.

Merci. C'est tout ce que je voulais savoir.

La présidente: Avez-vous besoin des copies des 432 lettres que j'ai reçues?

M. Peter MacKay: Je parie qu'elles viennent toutes de Windsor.

Mme Eleni Bakopanos: Sa question a été consignée au procès- verbal.

La présidente: Monsieur Bellehumeur.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Madame la ministre, j'ai manqué le début de votre exposé, mais vous m'avez semblé être ouverte sur un point de la loi que je trouve très important, soit l'article 51. Si je me fie au compte rendu de notre rencontre, je pense que M. Roy a bien fait les messages. Notre rencontre a porté essentiellement, pour ce qui est du Bloc québécois, sur l'article 51, et vous me semblez prête à une entente ou, tout au moins, à des propositions.

J'ai regardé ça après la rencontre et je pense qu'on n'est pas très loin l'un de l'autre par rapport à l'objectif qu'on vise.

Madame la ministre, est-ce que vous avez pris connaissance du projet de loi du député de Charlesbourg, le projet de loi C-416?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Non.

[Français]

M. Michel Bellehumeur: Le projet de loi C-416 se voulait un peu une réponse à l'affaire Lagana. C'est exactement le même article que le Bloc québécois veut modifier dans le projet de loi C-51, mais de façon différente, entre autres le sous-alinéa 125(1)a)(iv). Dans votre projet de loi, vous indiquez:

      (iv) une infraction mentionnée à l'annexe II et sanctionnée par une peine ayant fait l'objet d'une ordonnance rendue en vertu de l'article 743.6 du Code criminel,

Verriez-vous des objections, madame la ministre, à rayer de l'article tout ce qui a trait à l'ordonnance qui pourrait être rendue en vertu de l'article 743.6?

Autrement dit, toute personne trouvée coupable des infractions qu'on retrouve à l'annexe II de la Loi sur le système correctionnel, par exemple le trafic des stupéfiants à l'article 4, l'importation et l'exportation à l'article 5 et tout le reste, peu importe que le juge dise ou non que c'est en vertu de l'article 743.6, ne serait pas admissible à la libération expéditive.

Est-ce que vous seriez d'accord sur cela? Cela répondrait en grande partie au projet de loi qu'on propose, dont le but est d'enlever tout ce qui est prévu à ce sous-alinéa à propos de l'article 743.6?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Voulez-vous répondre, monsieur Mosley ou monsieur Ram?

[Français]

M. Michel Bellehumeur: Comprenez-vous la question?

L'hon. Anne McLellan: Oui.

M. Chris Ram: Partiellement.

[Traduction]

Je vais essayer de répondre. Tout d'abord, pour ce qui est—si je vous ai bien compris—du sous-alinéa proposé 125(1)(a)iv) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous conditions, sachez que la seule modification apportée à cette disposition porte sur la correction d'un renvoi. Nous avons fait cela à la demande du solliciteur général et nous devrions le consulter avant d'y changer quoi que ce soit. Malheureusement, ses représentants ne sont pas présents ici.

Pour ce qui est du sous-alinéa proposé 125(1)(a)v), le problème se ramène essentiellement au fait que...

La présidente: Continuez.

[Français]

M. Chris Ram: Je n'ai pas compris.

M. Michel Bellehumeur: Je ne suis pas encore allé au sous-alinéa 125(1)a)(v).

Je comprends que ce soit juste une question de concordance. J'aimerais cependant dire à la ministre et à ses adjoints que cela doit être cumulatif en vertu du sous-alinéa (iv). Il faut que ce soit une infraction mentionnée à l'annexe II et sanctionnée par une peine ayant fait l'objet d'une ordonnance rendue en vertu de l'article 743.6. Il faut que le juge ait mentionné ça dans son jugement. Pourquoi ne pas faire sauter l'article 743.6 pour les infractions de l'annexe II?

• 1720

Finalement, pourquoi ne pas enlever une condition? Pourquoi ne parle-t-on pas simplement d'une infraction mentionnée à l'annexe II, indépendamment de ce que les juges vont dire?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Ce sont des infractions prévues à l'annexe II.

[Français]

M. Michel Bellehumeur: Ce sont des infractions extrêmement importantes, et je pense qu'on toucherait à des cas comme l'affaire Lagana.

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Si je vous comprends bien, monsieur Bellehumeur, vous suggérez que nous modifiions le sous-alinéa 125(1)(a)iv) de l'article 51, de sorte qu'il se termine à la fin de la phrase «Annexe II».

[Français]

M. Michel Bellehumeur: Oui.

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Sauf si M. Ram ou M. Mosley sont en mesure de vous répondre tout de suite, je crois que nous aimerions réfléchir à cela avant de vous fournir une réponse définitive.

Rick, voulez-vous...

M. Richard Mosley: Eh bien, je suggérerais que nous y jetions un coup d'oeil ce soir et que nous revenions là dessus demain.

[Français]

M. Michel Bellehumeur: L'autre chose...

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Je note cependant au passage votre remarque à propos de la nature cumulative de cet article.

[Français]

M. Michel Bellehumeur: J'ai une autre chose à dire, madame la ministre, relativement au sous-alinéa 125(1)a)(v). Je n'ai rien contre le fait qu'on fasse allusion à l'acte de gangstérisme, mais j'aimerais que vous fassiez votre étude de la question que je viens de soulever en regard du projet de loi C-416. Je pense qu'on pourrait ajouter un autre sous-alinéa dans lequel on pourrait alors parler de complot, de tentative et de complicité pour des éléments très précis de l'annexe II qui touchent le recyclage des produits de la criminalité.

Je pense que ce serait très constructif.

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Nous y jetterons un coup d'oeil ce soir et les fonctionnaires reviendront ici demain.

[Français]

M. Michel Bellehumeur: Une dernière petite question.

L'hon. Anne McLellan: Oui.

M. Michel Bellehumeur: Je ne sais pas si ça se fait. Je ne sais pas si vous êtes au courant de l'article qui a paru aujourd'hui dans Le Journal de Montréal. C'est très important. Il semble qu'il y a une nouvelle plante hallucinogène qui est sortie dans les rues de Montréal. Elle se nomme la datura stramonium. C'est une plante ornementale qui pousse dans les plates-bandes à Montréal, à travers le Québec et à travers le Canada. Cette plante produit à l'automne des fruits dont les graines sont hallucinogènes et même, en quantité importante, mortelles. Présentement, sur les coins des rues de Montréal, on vend cette drogue et on la dilue même avec d'autres drogues pour amplifier l'effet de celles-ci.

Le hic de cette histoire, c'est qu'elle ne compte pas parmi les produits dangereux au Canada.

J'ai regardé dans le dictionnaire Larousse. À ma grande surprise, le dictionnaire Larousse sait que c'est une plante hallucinogène qui peut même causer des arrêts cardiaques, etc. C'est une plante extrêmement importante.

Je vois qu'on modifie, dans le projet de loi omnibus, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Je pense qu'on aurait le consentement unanime de tous les partis si on pouvait inclure la datura stramonium dans ce projet de loi omnibus à cette étape-ci. Je ne suis pas un expert, mais pourrait-on ajouter cette plante si tous les partis sont d'accord?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Par respect envers mon collègue, le ministre de la Santé, qui est responsable de ce genre de listes, je me dois de lui parler d'abord pour déterminer si ses fonctionnaires ont fait les recherches nécessaires avant d'ajouter des substances à cette liste ou d'en retirer.

Je sais que d'ailleurs que vous vous êtes entretenu avec mon collègue cet après-midi, après la période des questions.

[Français]

M. Michel Bellehumeur: Oui.

• 1725

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan: Je suppose que c'était à ce sujet. Je ne sais pas quelle réponse il vous a donnée, mais vous pourriez peut- être me faire part de cette discussion, si vous le voulez bien... Je ne sais pas exactement ce que mon collègue a déclaré à ce sujet et je ne peux, personnellement, vous répondre ni par l'affirmative ni par la négative parce que c'est le ministre de la Santé qui est chargé de ce dossier. Je suis cependant tout à fait disposée à en discuter avec lui, mais si vous étiez prêt à nous dire comment il a réagi à vos préoccupations, nous aurions une idée de l'urgence qu'il accorde à cette question.

[Français]

M. Michel Bellehumeur: Eh bien, il m'a dit qu'il n'était pas au courant et qu'il ignorait que ce n'était pas illégal au Canada. Cependant, il a réagi assez vivement et je pense qu'il était sincère quand il a dit qu'il allait examiner le cas rapidement et décider ce qu'il pouvait faire.

Seulement pour vous donner une idée de ce qui se passe, une cocotte qui contient suffisamment de graines pour rendre paranoïaque toute une classe pendant deux jours se vend 5 $ au coin d'une rue, à Montréal.

Le Centre anti-poison du Québec, au cours du dernier mois, étant donné que nous sommes en plein dans la saison des récoltes, a été saisi de 40 cas d'empoisonnement. Je pense que c'est extrêmement grave et qu'on pourrait réagir rapidement à la situation, étant donné qu'il existe déjà sur cette plante des études démontrant qu'elle est très hallucinogène.

Voilà encore une remarque très constructive du Bloc québécois.

L'hon. Anne McLellan: Oui. Merci beaucoup.

[Traduction]

J'assurerai un suivi de cette question avec Allan et mes collaborateurs s'entretiendront ce soir avec les fonctionnaires de son ministère... S'il est d'accord pour agir rapidement à ce sujet, je n'ai rien contre.

Une voix: Il serait difficile de faire quelque chose dans ce projet de loi, parce que cela va nécessiter la réouverture de l'annexe.

L'hon. Anne McLellan: Effectivement. Nous devrons peut-être adopter un autre mécanisme que celui-ci, pour des raisons techniques. Cela ne veut toutefois pas dire que nous ne pourrons pas très rapidement recenser les modifications législatives à apporter ni ouvrir l'annexe des substances contrôlées.

Merci de cette remarque, je prends note qu'il s'agit d'une question importante.

La présidente: Merci.

Avez-vous une autre question ou... Eh bien, allez-y, je passerai ensuite à l'autre côté.

M. Chuck Cadman: Très bien.

Madame la ministre, nous ne pouvons qu'être d'accord avec le rapprochement que vous avez fait entre la prostitution enfantine et la violence faite aux enfants. Vous avez sans doute entendu parler des préoccupations de M. Dosanjh et du nombre croissant de personnes, en Colombie-Britannique, qui sont favorables à l'augmentation de l'âge du consentement légal de 14 à 16 ans. Je sais bien que nous ne pouvons pas faire cela dans ce projet de loi, mais j'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet. Comme les enfants prostitués vivent sous le même toit que leurs souteneurs, nous ne pouvons pas accuser ceux-ci de proxénétisme. Si l'on pouvait faire passer l'âge du consentement légal à 16 ans, nous pourrions alors les inculper. Mais je suis sûr que M. Dosanjh vous en parlera plus longuement.

L'hon. Anne McLellan: Effectivement. D'ailleurs, j'ai entendu ce que M. Dosanjh a dit lors de la dernière réunion. Et je n'ai pas été la seule à l'entendre, car ses collègues aussi l'ont entendu. Il semble d'ailleurs exister des différences d'opinion chez mes collègues des provinces et des territoires. C'est pour cela que nous avons préparé un document de consultation sur ce sujet qui, d'après ce que je crois savoir, a été soumis aux provinces pour recueillir leurs commentaires.

Or, il y est précisément question de l'âge légal de consentement. Après avoir recueilli les réactions des provinces, nous comptons faire circuler ce document de consultation auprès du grand public, des défenseurs du droit des enfants et de tous ceux et celles désireux de faire part de leur opinion sur la question, sur les problèmes qu'elle soulève et sur les solutions éventuelles proposées dans le document.

Vous avez cependant tout à fait raison, il s'agit d'un problème important, surtout pour le solliciteur général de la Colombie-Britannique. Nous en avons profité pour préparer un document de consultation que nous avons remis à nos collègues provinciaux. J'ai hâte d'entendre leurs réactions lors de notre prochaine réunion. C'est donc un dossier dont nous sommes parfaitement au fait.

La présidente: Allons! J'ai l'impression d'être voyante aujourd'hui et je crois deviner que M. Lee veut poser une question ou deux.

L'hon. Anne McLellan: Non, regardez!

Mme Eleni Bakopanos: Bien sûr qu'il veut vous en poser une.

L'hon. Anne McLellan: Je tremble toujours à l'idée de me présenter ici et d'affronter cette troupe de comédiens.

Des voix: Ah! Ah!

La présidente: Ça va?

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Oui, oui, ça va!

• 1730

La présidente: Eh bien, c'est le contraire pour Derek.

Apparemment, c'est M. McKay qui a les notes de M. Lee. Sinon, il faut mettre cela sur le compte de l'attitude «Scarborough».

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): S'agissant de la décision rendue par le juge Laforme dans la cause Wakeford, il faut s'avoir que M. Wakeford avait demandé à pouvoir consommer de la marijuana pour des raisons médicales et qu'il a invoqué la Charte à cette fin. Le juge Laforme a, pour l'essentiel, déclaré que tout dépend de l'article 56 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, prenant ainsi, semble-t-il, tous les avocats par surprise.

Vous-même et le ministre de la Santé avez publiquement indiqué votre désir de changer les choses en matière d'utilisation médicale de la marijuana. Je constate que les ministères de la Justice et de la Santé se renvoient le dossier et je juge que les tribunaux ne sont pas le lieu idoine pour faire de la politique sociale.

La vraie question est la suivante: où va la justice à cet égard? Avez-vous été saisis de demandes? Avez-vous pris des dispositions pour en recevoir? Comment allez-vous vous y prendre pour éviter de dévaler une pente glissante et d'ouvrir ce dossier à un débat absurde? J'aimerais savoir ce qu'on pense au ministère?

L'hon. Anne McLellan: Je commencerai par vous dire—non pas pour éviter la question—que cela relève d'abord et avant tout du ministre de la Santé et que c'est son ministère qui pilote ce dossier. Cela étant posé, mon collègue Allan Rock et moi-même avons publiquement déclaré qu'il est très important de se pencher sur la question de l'utilisation de la marijuana à des fins médicales, ainsi que certaines autres drogues douces.

Les collaborateurs du ministre Rock sont en train de se pencher sur le dossier et nous collaborons avec eux dans la mesure du possible pour terminer cet examen. Mon collègue et moi-même espérons prochainement pouvoir présenter à nos homologues du Comité de l'union sociale le travail du ministère de la Santé. À ce stade, il serait inapproprié que je vous en dise davantage, car le maître d'oeuvre dans ce dossier est le ministre de la Santé. Mais je me rappelle avoir déclaré que ce dossier ne s'effacera pas de lui- même.

M. John McKay: Précisément.

L'hon. Anne McLellan: Et nous nous bercerions d'illusion si nous pensions cela. Nous entendrons parler d'autres causes que celle de M. Wakeford; d'ailleurs, plusieurs causes de ce genre ont déjà été lancées. On verra de plus en plus de demandes en ce sens. J'estime qu'il nous appartient de prendre les rênes de ce dossier et d'examiner ce que dit la science relativement à l'utilisation médicale de drogues douces, avant de formuler des recommandations à ce sujet à la Chambre. Voilà où l'on s'en va. Ce travail est bien engagé et il est presque terminé.

M. John McKay: Vous êtes-vous fixés une échéance? Serait-il possible de rassurer un peu les activistes afin qu'ils n'engagent pas des séries interminables de contestations judiciaires en vertu de la Charte, contestations qui seront inévitablement abandonnées, mais qui forceront la main au gouvernement pour qu'il s'ouvre à des sensibilités sociales extrêmes?

L'hon. Anne McLellan: Nous ne nous sommes pas fixé d'échéance précise. Cependant, je puis vous dire que le ministre de la Santé est conscient que ce dossier est déjà vieux. À l'automne 1997, si je me souviens bien, nous avons déclaré en coeur qu'il fallait effectuer un travail de fond pour prendre une décision éclairée en matière d'utilisation médicale des drogues douces. J'espère donc que nous serons, lui et moi, prochainement en mesure de formuler des recommandations.

Je ne peux parler pour lui, sans compter que c'est son ministère qui s'occupe de l'aspect scientifique. Nous sommes tout à fait conscients que le temps passe. C'est un sujet très important. Des gens souffrent. Certains se retrouvent sans doute dans des situations très pénibles à cause de l'incertitude qui plane au sujet de notre décision.

• 1735

Tout ce que je puis dire, c'est que nous avons été saisis de cette question et que nous ne voulons pas retarder plus que nécessaire la prise de décision à ce sujet. Le ministre de la Santé et moi-même ferons des recommandations à cet égard dès que possible.

La présidente: Il nous reste une dizaine de minutes. Y a-t-il d'autres questions?

M. Derek Lee: Donc, les fonctionnaires vont revenir demain?

L'hon. Anne McLellan: Oui, ils reviendront demain matin avec les réponses pour M. Bellehumeur.

M. Derek Lee: Allons-nous entendre d'autres témoins ou peut-on espérer passer à l'étude article par article?

La présidente: Demain, nous accueillerons l'Association canadienne des policiers. Telles que les choses se présentent pour l'instant, nous avions l'intention de passer ensuite à l'étude article par article.

M. Derek Lee: Très bien, je vous remercie.

L'hon. Anne McLellan: Merci beaucoup à tous.

La présidente: Merci, madame la ministre.

L'hon. Anne McLellan: J'ai été heureuse de me retrouver ici, comme toujours.

La présidente: Jusqu'ici.

L'hon. Anne McLellan: Non, non, c'est toujours très intéressant.

La présidente: Merci.

La séance est levée.