JURI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS
COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 4 novembre 1998
[Traduction]
La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.
Je vous rappelle, pour mémoire, que nous revenons aujourd'hui sur le projet de loi C-40, Loi concernant l'extradition, modifiant la Loi sur la preuve au Canada, le Code criminel, la Loi sur l'immigration et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, et modifiant ou abrogeant d'autres lois en conséquence.
Devant nous comparaît de nouveau la ministre, l'honorable Anne McLellan, accompagnée de MM. Piragoff et Lemire.
Je vous souhaite à tous la bienvenue.
Monsieur Piragoff, vous êtes vraiment devenu un habitué des comités.
L'honorable Anne McLellan (ministre de la Justice et procureure générale du Canada): Est-ce bon ou mauvais signe?
La présidente: Nous en sommes enchantés car il sait nous donner de bonnes réponses, mais il tient toujours à mettre les points sur les i, ce qui nous amuse beaucoup, la méticulosité n'étant pas la première de nos vertus.
Vous avez une déclaration à faire concernant ce projet de loi, madame la ministre; nous vous donnons la parole, et passerons ensuite aux questions.
[Français]
Mme Anne McLellan: Bon après-midi, madame la présidente et chers collègues.
[Traduction]
Je remercie le comité de m'avoir invitée à prendre la parole sur le projet de loi C-40, Loi concernant l'extradition, et d'avoir bien voulu étudier avec célérité cet important projet de loi.
Le Canada, vous ne l'ignorez pas, a fait l'objet de critiques émanant d'un grand nombre de ses alliés en raison du fait qu'avec la désuétude de ses lois sur l'extradition nous ne constituons pas un allié efficace dans la lutte contre la criminalité internationale.
Le crime organisé étend de plus en plus ses tentacules dans le monde et utilise des moyens de plus en plus sophistiqués. C'est pourquoi nous devons remédier à cette situation et nous pencher, en particulier, sur les questions de notre droit qui font obstacle à des pratiques d'extradition justes et efficaces.
Les problèmes sont particulièrement flagrants dans les domaines suivants: pays avec lesquels nous n'avons pas de traités ou de dispositions d'extradition; entités autres que les États, par exemple le Tribunal des Nations Unies pour les crimes de guerre ou la nouvelle Cour pénale internationale, dans l'instauration de laquelle le Canada a joué un rôle si important; les pays avec lesquels il existe bien un traité d'extradition, mais pour lesquels la liste des délits, désuète, ne prévoit pas les crimes de notre époque comme par exemple le trafic de drogues, le blanchissage de l'argent ou les crimes relatifs à l'informatique; les pays dont le système juridique diffère du nôtre, en particulier en ce qui concerne le droit de la preuve et, enfin, les pays qui, quel que soit leur système juridique et en raison de la complexité du comportement criminel en question, ne sont pas en mesure de satisfaire nos exigences juridiques, et qui nous opposent des obstacles superflus et nous causent des difficultés portant davantage sur la forme que sur le fond de la preuve.
Le projet de loi que je propose fournit des solutions rationnelles à chacun de ces problèmes. Cette réforme est non seulement importante, madame la présidente, mais il y a longtemps qu'elle se fait attendre. Grâce à elle nous pourrons moderniser et réviser nos lois portant sur l'extradition et mettre en place un système revitalisé et efficace pour l'extradition.
Les moyens modernes de communication et de transport font que les crimes transnationaux—et leurs auteurs—constituent à présent une réalité quotidienne, réalité que nos lois doivent prendre en compte. Or, il nous incombe de faire franchir le pas du prochain siècle à ces lois, conçues et rédigées au XIXe siècle, et de les moderniser pour ce qui nous reste de celui-ci.
Ce projet de loi nous permettra de créer une procédure uniforme d'extradition, une formule applicable à toutes les demandes dans ce sens; il assurera également une procédure juste et la sauvegarde des droits de la personne pour ceux contre lesquels l'extradition est demandée. Certes, certaines de ces procédures et sauvegardes existent d'ores et déjà, dans les pratiques actuelles d'extradition, mais ce projet de loi les couvrira de son autorité statutaire.
• 1640
Il créera également de nouvelles procédures aptes à résoudre
des problèmes de procédures existants dans le cadre de la loi et
des pratiques actuelles d'extradition. Il rend également ce
processus plus accessible aux pays pour lesquels les règles de la
preuve ne sont pas les mêmes, tout en rendant tant le Canada que
l'autre État responsable de cette preuve.
Avec ce projet de loi le Canada adopte une méthode mise au point par les ministres de la Justice du Commonwealth visant à assurer que les règles de preuve de la common law ne constituent pas une barrière à l'extradition entre les États de common law et de droit civil et ne constituent pas non plus un obstacle superflu à l'extradition entre pays de common law. Le projet de loi veille, ce faisant, à préserver le rôle important du système judiciaire dans l'évaluation du caractère satisfaisant de la preuve; il permet également de déterminer si le comportement pour lequel la personne est recherchée aux fins d'un procès ou d'une peine est considéré criminel selon la conception canadienne de la criminalité.
Comme vous le disaient hier mes collaborateurs, le projet de loi précise également, pour la première fois, les responsabilités et devoirs ministériels pour veiller à ce que soient sauvegardés, dans l'autre État, les droits de la personne, et que le fugitif, une fois livré pour y subir un procès et y purger une peine, y bénéficie d'un traitement juste.
Le projet de loi permettra également de supprimer toute démarche superflue entre le processus de détermination de réfugié et l'extradition, tout en maintenant les sauvegardes nécessaires.
[Français]
J'ai été informée des questions qui ont été soulevées lors du débat en deuxième lecture et devant ce comité, tant par les membres de l'opposition que par les membres du gouvernement, notamment: sur la manière dont le projet de loi accélère les procédures d'extradition; sur l'importance des rôles respectifs du ministre de la Justice et de la magistrature; sur la manière dont les nouvelles règles de preuve non seulement aident l'État étranger dans la présentation de sa requête mais fournissent à la personne recherchée davantage d'information lui permettant de se faire une idée plus juste de la preuve disponible contre elle dans le pays requérant; ainsi que sur les droits et garanties prévus dans le projet de loi et les relations avec la procédure de détermination du statut de réfugié.
[Traduction]
Mes collaborateurs m'ont rapporté avoir eu une franche discussion hier avec les membres de ce comité et leur avoir fourni des réponses détaillées. De mon côté, je m'empresserai de répondre à toutes vos questions ou commentaires et réitère aux membres du Comité mes remerciements pour m'avoir invité parmi vous cet après- midi. C'est toujours un plaisir pour moi de comparaître devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, et je suis sûre que cette discussion sera aussi enrichissante pour les uns que pour les autres.
La présidente: Qu'est-ce qui se trame ici?
Monsieur Reynolds, est-ce que vous demandez la parole?
M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Je vous remercie.
La présidente: Vous n'y êtes pas obligé.
M. John Reynolds: La présidente et moi n'avons pas encore déjeuné...
La présidente: ...et nos ventres crient famine...
M. John Reynolds: ...et n'ont donc pas d'oreilles.
J'écoutais toutefois ce que vous disiez, et ce que disaient, hier, vos collaborateurs, qui ont fort bien répondu à nos questions. Il reste cependant une inquiétude que tous, je crois, partagent, à propos de la Cour suprême: ce projet de loi est-il à l'épreuve des litiges? Qui l'a examiné à la lumière de cette question pour vous rassurer que tout se passera bien, que personne ne s'adressera à la Cour suprême, que nous ne risquons pas de nous retrouver perdants et de devoir nous adresser de nouveau au Parlement en lui demandant de changer cette loi?
Car c'est là un problème. Mon collègue va probablement vous interroger sur certaines causes pour savoir où elles en sont, et dans quelle mesure elles relèveraient de cette loi.
Qu'est-ce qui vous permet de conclure, d'après ce que vous disent vos collaborateurs et d'autres encore, que la Cour suprême approuverait ce que cette loi entreprend de faire?
Mme Anne McLellan: J'aimerais tout d'abord vous signaler que ce projet de loi est fondé, en grande partie, sur les précédents de la Cour suprême elle-même et des jugements qu'elle a portés sur les appels en extradition qui lui ont été soumis.
On ne peut jamais être certain—si tel est votre argument—que la Cour suprême, si elle était consultée, approuverait en toute circonstance chaque article de ce projet de loi, et il m'est donc impossible de vous donner une assurance sur ce point. Et pour autant que nous puissions l'affirmer, ce projet de loi nous paraît non seulement en conformité avec la jurisprudence de la Cour suprême, mais nous pensons également qu'il parvient à établir un juste équilibre entre les droits de celui qui fait l'objet d'une demande d'extradition, les droits de l'État extradant ainsi que les droits des Canadiens. Ce projet de loi, j'en suis convaincue, prend en compte nos relations, bilatérales et multilatérales, dans le monde; il nous permet de jouer notre rôle dans l'extradition de ceux qui sont accusés d'avoir commis, dans d'autres pays, des actes criminels, et ce en temps utile, afin qu'ils puissent être jugés où le crime est réputé avoir eu lieu.
• 1645
Avec ce projet de loi, nous tenons compte de l'avis de nos
critiques, tant chez nous qu'à l'étranger, et même des critiques
des tribunaux qui, à l'occasion, nous ont reproché la désuétude de
nos lois portant sur l'extradition.
C'est pourquoi je suis persuadée que nous avons là un outil moderne, et une procédure rapide, simplifiée et équilibrée qui va faire ses preuves.
Avez-vous quelque chose à ajouter, messieurs?
M. Don Piragoff (avocat général, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice): Bien répondu, madame la ministre!
Mme Anne McLellan: Vous me flattez.
M. John Reynolds: Expliquez-moi quand même si, dans l'élaboration d'un pareil projet de loi, il existe une procédure que vos collaborateurs doivent adopter, et si quelqu'un, en fait, est chargé de cette responsabilité. Si d'ici à un an il faut remettre l'ouvrage sur le métier, parce que la Cour suprême y a constaté une tare, cette personne pourra-t-elle dire: «Aïe, j'ai gaffé!»?
Mme Anne McLellan: Certainement: vous avez sans doute deux de ces responsables sous les yeux.
Des voix: Oh, oh!
Mme Anne McLellan: Souvenez-vous en bien, monsieur Reynolds, parce qu'en cas de bavure...
M. John Reynolds: Bon, c'est tout ce que je voulais vraiment savoir.
Mme Anne McLellan: Mais en réalité, rassurez-vous, je suis persuadé que c'est le ministre qui doit être tenu pour responsable. C'est toujours moi, monsieur Reynolds, que vous pourrez tenir pour responsable, que ce soit pendant la période des questions, devant ce comité ou ailleurs.
Mais pour revenir à ce projet de loi, il est fondé sur des années d'expérience avec une loi qui depuis longtemps n'était plus adaptée à la réalité. C'est pourquoi je pense qu'avec ce projet de loi nous avons trouvé la juste inspiration. Les procédures qui y sont adoptées sont efficaces, elles résisteront, je pense, à tous les arguments contre elles qui pourraient être invoqués au nom de la Charte; elles constituent une réponse aux critiques de nombre de nos alliés importants, dans le monde, qui considèrent que nos lois en matière d'extradition sont à la traîne des leurs.
Les changements que nous avons apportés à notre loi—et il y en a de très importants—tiennent compte, en fait, de la façon dont le reste du monde procède en matière de demandes d'extradition, tout en veillant à ce que les droits de la personne soient respectés.
M. John Reynolds: Compte tenu des délais nécessaires pour suivre cette procédure d'extradition, ne serait-il pas plus simple et plus pratique d'avoir un simple mandat de déportation contre une personne qui ne devrait pas être dans notre pays? Si elle ne devrait pas y être, c'est qu'il doit y avoir des raisons à cela, et un mandat de déportation suffirait peut-être.
Votre ministère a-t-il envisagé cette possibilité?
Mme Anne McLellan: Je vais demander à M. Piragoff ou à M. Lemire de répondre plus en détail à cette question, mais rappelez-vous qu'avec un mandat de déportation, c'est nous qui expulsons quelqu'un du Canada; il s'agit là d'un acte entrepris par nous, dont l'initiative a été prise par nous.
Dans le cas d'une extradition, nous répondons à la demande d'une puissance étrangère et souveraine qui nous adresse une demande d'extradition, et c'est dans un cas pareil que nous suivons les procédures dont il est question ici.
M. John Reynolds: Mais si vous avez déjà une ordonnance d'expulsion contre la personne dont l'extradition est requise? En ce moment même nous avons des cas de ce genre.
Mme Anne McLellan: Dans le cas où il existe déjà une ordonnance d'expulsion contre une personne?
M. John Reynolds: Effectivement.
Mme Anne McLellan: Comment procéderions-nous, messieurs, si un mandat d'arrestation avait déjà été prononcé contre une personne pour laquelle nous parvenait ensuite une demande d'extradition?
M. Don Piragoff: Je vous remercie, madame la ministre.
Comme le disait la ministre, il y a une différence entre l'extradition et l'expulsion en ce sens que, dans le cas de cette dernière, vous essayez d'expulser du pays quelqu'un qui veut y rester.
• 1650
À tout moment, cependant, cette personne peut se déclarer
disposée à partir, à prendre un avion de son propre gré, en disant
qu'elle sera dans un autre pays, un troisième ou un quatrième, mais
non le pays qui la réclame pour la passer en jugement.
Nous ne pouvons nous y opposer parce qu'à ce moment-là, si cette personne est disposée à partir, il lui est loisible de prendre un avion pour n'importe quelle destination.
M. John Reynolds: Cela nous ferait faire de grandes économies, n'est-ce pas?
M. Don Piragoff: Cela nous ferait peut-être réaliser des économies, mais cela n'arrangerait pas les choses pour le système de justice international ni pour nos alliés, qui peuvent avoir signé avec nous un traité, et qui nous demanderaient pourquoi nous avons laissé partir un criminel qui, dans un autre pays, risque de commettre d'autres crimes, ce qui pourrait avoir des répercussions pour nous-mêmes.
Ce qui nous empêche donc de suivre cette voie, c'est que nous faisons partie d'une communauté internationale et que nous ne nous intéressons pas uniquement aux crimes commis dans notre propre pays.
M. John Reynolds: Mais n'est-il pas un fait que très souvent, quand il s'agit d'expulser un criminel, celui-ci est accompagné de deux agents? La personne en question a des menottes aux poignets, elle doit aller où nous l'envoyons. Si le pays qui réclame l'extradition veut d'elle, et que nous avons une ordonnance d'expulsion, nous envoyons en avion le criminel, avec des menottes, accompagné de deux agents d'immigration. Voilà qui nous économise du temps et de l'argent.
M. Don Piragoff: L'expulsion coûte cher également, car il y a des procédures à suivre, et des appels.
Vous posez au ministre la question suivante: S'il existe déjà une ordonnance d'expulsion, que feriez-vous du mandat d'extradition? C'est à l'autre pays d'en décider. Si notre intention est de déporter la personne en question dans leur pays, il n'est guère de leur intérêt de demander un mandat d'extradition, puisque cette personne est déjà en route. Si l'autre pays demande un mandat d'extradition, nous devons honorer cette requête et consulter les représentants de ce pays pour savoir s'ils veulent vraiment procéder avec l'extradition, ou s'ils nous demandent d'exécuter l'ordonnance d'expulsion.
Quand il s'agit du même pays, l'une et l'autre procédure peuvent se chevaucher, mais très souvent le pays ne demande pas l'extradition si nous avons entamé une procédure d'expulsion. Parfois les deux situations coexistent parce que l'autre pays l'a demandé.
M. John Reynolds: Si une ordonnance d'expulsion a été émise et vous recevez une demande d'extradition, êtes-vous tout au moins disposé à consulter le pays en question en disant: «l'ordonnance d'expulsion est prête, nous pouvons embarquer demain l'individu en question, avec deux agents d'immigration.»?
Mme Anne McLellan: Oui, nous ferions certainement cela.
M. John Reynolds: Vous le feriez donc.
Mme Anne McLellan: Comme le disait mes collaborateurs, si nous sommes relativement certains ou si nous pouvons garantir que dans le cadre de l'ordonnance d'expulsion la personne est déportée vers l'État qui en fait la demande...
Par exemple, supposons qu'il existe une ordonnance d'expulsion contre la même personne pour laquelle les États-Unis ont demandé l'extradition. Si nous pouvons garantir que cette personne va être déportée aux États-Unis, nous en avertirions probablement les autorités américaines, et dans ce cas il n'y aurait pas de raison de donner suite à une demande d'extradition. L'État qui en fait la demande se dirait qu'il peut mettre la main sur cette personne sitôt qu'elle franchit la frontière ou descend d'avion.
Ne serait-ce pas là l'issue logique de ce problème?
M. Jacques Lemire (conseiller juridique, Groupe d'assistance internationale, ministère de la Justice): Oui, nous pouvons certainement consulter les autorités étrangères qui ont l'intention de demander l'extradition.
Prenons le cas d'une personne dont on a demandé la déportation dans l'État étranger; cette personne est mise sous écrou et l'État étranger voudrait qu'il soit procédé à une arrestation provisoire parce que la situation lui paraît urgente; dans ce cas nous pourrions considérer que nous n'avons pas intérêt à arrêter cette personne aux fins d'extradition, puisqu'elle est déjà sous écrou, et fait l'objet d'une demande d'expulsion. Si la situation devait toutefois changer, nous pourrions nous tenir prêts à intervenir pour honorer nos obligations internationales, toujours en consultation, bien entendu, avec l'autre État. Ce sont-là des choses qui arrivent couramment.
M. John Reynolds: Je vous remercie.
La présidente: Merci, John. Monsieur Ménard.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): J'espère que vous serez un peu indulgent car c'est la première fois que je me présente à ce comité et que je n'en connais pas toujours le fonctionnement.
Si je m'intéresse au projet de loi C-40, c'est parce que je suis le porte-parole de mon parti pour les questions d'immigration.
Je veux vous poser d'abord deux questions générales. Quels sont les mécanismes à votre disposition et comment comptez-vous vous acquitter de l'obligation que vous fait la loi de vous assurer que les personnes retournées ou extradées dans d'autres pays ne feront pas l'objet de violations des droits de la personne? C'est là ma première question.
[Traduction]
Mme Anne McLellan: Vous n'ignorez sans doute pas que j'ai la prérogative de refuser, et je vous renvoie sur ce point à l'article 44 du projet de loi.
En effet, il est dit à l'article 44, alinéa 1:
-
Le ministre refuse l'extradition s'il est convaincu que
-
a) soit l'extradition serait injuste ou tyrannique compte tenu de
toutes les circonstances;
-
b) soit la demande d'extradition est présentée dans le but de
poursuivre ou de punir l'intéressé pour des motifs.
Suit une liste des motifs.
Vous allez peut-être me dire, Monsieur Ménard, que cette liste n'est pas complète. C'est une question dont j'ai déjà parlé. Je demande l'avis du comité, et donc votre avis, entre autres, sur la façon dont nous pourrions élargir la liste figurant à l'alinéa 44(1)(b).
[Français]
M. Réal Ménard: Vous comprendrez que lorsque j'ai rencontré vos fonctionnaires, tous plus sympathiques les uns que les autres, je leur ai évidemment fait remarquer qu'il manquait un motif de discrimination, celui que vous connaissez et qui a fait l'objet d'un amendement au projet de loi C-33. Il est évident que le Bloc québécois déposera un amendement, et nous espérons fortement qu'il sera accepté par les députés de la majorité.
Voici une deuxième question. À ce que je comprends, selon le partage des responsabilités entre vous et la ministre de l'Immigration... Tout à l'heure, on a fait allusion à des ordonnances de renvoi selon un mécanisme très précis permis en vertu de la Loi sur l'immigration. Mais une décision prise dans un cas qui concerne ce projet de loi, en vertu de vos prérogatives à vous, comme ministre de la Justice, si elle renvoie à des ordonnances de déportation, de renvoi ou d'expulsion, sera considérée comme une décision exécutoire par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Est-ce que cette affirmation correspond à une interprétation juste et bien comprise?
Indiquez-nous, s'il vous plaît, ce qui est de la responsabilité de votre collègue de l'Immigration, en ce qui concerne toute la question des déportations, et surtout toutes les décisions qui pourraient éventuellement être prises par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
[Traduction]
Mme Anne McLellan: Vous constaterez, monsieur Ménard, que l'article 44 du projet de loi énonce les pouvoirs du ministre.
Il est dit à l'alinéa 40(2):
-
Si l'intéressé revendique le statut de réfugié au sens de la
Convention aux termes de l'article 44 de la Loi sur l'immigration,
le ministre consulte le ministre responsable de l'application de
cette loi avant de prendre l'arrêté.
Je suis donc tenue, selon la loi, de consulter le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, mais cette obligation ne s'étend qu'à la consultation et c'est donc à moi, ministre de la Justice, qu'il incombe de prendre la décision finale sur l'ordonnance d'incarcération.
C'est donc reconnaître le fait qu'il puisse y avoir une procédure de demande de statut de réfugié portant sur une personne contre laquelle je peux prononcer une ordonnance d'incarcération, et que je dois donc consulter mon collègue responsable du statut de réfugié avant de prendre une décision finale. Mais cette décision me revient.
[Français]
M. Réal Ménard: D'accord. Un argument qu'a beaucoup invoqué votre secrétaire parlementaire et que vous avez souvent invoqué vous-même pour adopter cette loi, c'est qu'il y a une mise à jour à faire et de nouvelles procédures à instaurer pour traiter avec différents pays qui ont des systèmes différents pour l'établissement de la preuve. J'aimerais que vous soyez plus explicite. Qu'est-ce qui sera changé dans l'appréciation de la preuve dans nos transactions avec d'autres pays au chapitre de l'extradition? J'aimerais que vous détailliez davantage votre affirmation.
[Traduction]
Mme Anne McLellan: Je ne pense pas que cela change l'évaluation des pièces justificatives. Ce que nous voulons, c'est reconnaître le fait qu'il existe, dans la common law, des règles de la preuve, par exemple des déclarations écrites sous serment qui sont étrangères au régime de droit civil. Permettez-moi de prendre comme point de comparaison ce vaste système judiciaire, car en fait, ce sont les pays de droit civil qui, à l'heure actuelle, sont le plus désavantagés par nos lois actuelles d'extradition.
• 1700
Il convient également d'ajouter que ce sont probablement les
Japonais, ainsi qu'un certain nombre d'autres pays, qui ont des
difficultés avec nos exigences en matière de preuve, et c'est la
raison pour laquelle nous voulons adopter ce que nous appelons le
«dossier de l'affaire», méthode adoptée par la plupart des autres
pays, ou en voie d'adoption, pour répondre aux exigences de la
preuve.
C'est là un changement qui me paraît important et un important pas en avant pour rajeunir nos lois et les mettre à l'heure. Nous devons reconnaître que nous ne vivons plus dans un pays isolé des autres, que nous faisons partie d'une communauté infiniment plus vaste, dans laquelle coexistent d'autres systèmes juridiques. De toutes les nations nous devrions être bien placés pour comprendre cela, car au sein de la nôtre sont représentés les deux principaux systèmes juridiques.
Il s'agit donc pour moi d'un changement important, d'un changement capital. C'est davantage qu'un pas en avant, c'est un bond en avant en ce sens que nous ne voulons plus imposer aux nations demandantes un fardeau de la preuve qui est, d'une part, étranger à leur système juridique et, de l'autre, contraire à la raison.
[Français]
M. Réal Ménard: J'avais l'impression d'assister à un des vibrants plaidoyers que vous faisiez quand vous étiez professeur de droit à l'université. Vous n'avez rien perdu de votre fougue et de vos convictions.
Voici ma dernière question. Il y a un problème très caractérisé, propre à la région des Caraïbes. Vous savez qu'il y a plusieurs prisonniers canadiens à Cuba ou dans d'autres pays des Caraïbes pour lesquels il est difficile d'obtenir le transfert.
Dans ma circonscription de Hochelaga—Maisonneuve, deux de mes concitoyens ont été reconnus coupables de trafic de stupéfiants. Ils sont actuellement emprisonnés à Cuba et il est difficile de les rapatrier. Est-ce que vous croyez qu'un projet de loi comme celui-là est de nature à les aider, de manière directe ou indirecte? Est-ce que cela concerne plutôt la question du transfert des prisonniers?
[Traduction]
Mme Anne McLellan: Il s'agit-là d'une autre question. Le transfert des prisonniers est une question importante, mais ce n'est pas dans la loi sur l'extradition qu'il est traité, il relève, en fait, de mon collègue, le solliciteur général.
Il est intéressant que vous souleviez la question du transfert, car c'est une question qui m'intéresse à l'heure actuelle. En tant que députée d'Edmonton-Ouest, je représente un mandant dont le fils est actuellement en prison sous une autre juridiction, et la famille voudrait faire procéder à son transfert.
Il existe donc une procédure à cet effet qui dépend, si je comprends bien, de la conclusion d'ententes. C'est ainsi qu'aux États-Unis ces ententes doivent être conclues avec chaque État, si j'ai bien compris, M. Piragoff.
M. Don Piragoff: Peut-être est-ce avec chaque État...
Mme Anne McLellan: Oui, car c'est la question dont je m'occupe actuellement.
Des voix: Oh, oh.
Mme Anne McLellan: Dans d'autres cas ce serait, je crois, avec la nation, par exemple dans le cas des Caraïbes, que vous avez cité.
Quand ces ententes sont conclues elles permettent, dans certaines circonstances, le transfert des détenus dans un établissement canadien, afin d'y purger le reste de leur peine. Mais j'ai pu constater que le simple fait d'avoir une entente n'autorise pas automatiquement le transfert. Tout dépend des politiques de l'État dans lequel la personne est incarcérée et dans lequel elle a commis le délit, et donc de la raison pour laquelle cette personne est incarcérée. C'est à l'État en question de décider s'il autorise ce transfert.
Vous êtes sans doute au courant de plusieurs cas notoires, dont il a été question dans les journaux et pour lesquels le transfert a été demandé. Là encore c'est généralement mon collègue, le ministre des Affaires étrangères, qui traite de ces dossiers et qui essaye, quand il le juge bon, d'intervenir pour un règlement plus rapide.
[Français]
M. Réal Ménard: Puis-je poser une dernière question? Je ne serais pas député du Bloc québécois si j'omettais de vous poser la question suivante. Même si vous êtes dans un domaine où vous êtes constitutionnellement responsable de la suite des événements, avez-vous le sentiment que vos vos homologues provinciaux vous donnent leur appui quant à ce projet de loi? Avez-vous eu des consultations avec les provinces, même si je sais que c'est une prérogative de votre gouvernement? Ne soyez pas surprise de ma question.
[Traduction]
Mme Anne McLellan: Je peux demander à M. Piragoff de vous parler plus longuement des consultations avec les provinces, qui ont lieu très régulièrement quand il s'agit d'une loi pareille. Voilà des années, en fait, que des provinces insistent auprès de nous pour que nous modernisions notre loi sur l'extradition, et pour que nous hâtions la procédure. Dans certains cas, en effet, c'est dans les établissements pénitentiaires provinciaux que sont détenus ces gens. Ils résident dans leurs «communautés», et dans certains cas, il est de l'intérêt des provinces que ces gens n'y résident plus et soient traités conformément aux lois de l'État requérant.
Monsieur Piragoff, vous pourriez peut-être nous parler des négociations qui ont eu lieu avec nos collègues des provinces et des territoires.
M. Don Piragoff: Les provinces et territoires, consultés à plusieurs reprises, se sont déclarés en faveur de moderniser les lois d'extradition.
Mme Anne McLellan: Nous n'avons pas rencontré d'objections majeures à ce que le gouvernement fédéral exerce son pouvoir constitutionnel sur l'extradition.
[Français]
M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.): Est-ce que les provinces consultent le fédéral?
La présidente: Pas le Québec en tout cas.
[Traduction]
Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Je vous remercie, madame la présidente.
Madame la ministre, merci d'être venue, ainsi que vos collaborateurs. Comme on l'a précédemment dit, les échanges que nous avons eus hier ont été très utiles.
J'ai été franchement impressionné parce ce projet de loi, et son double aspect. Il a été rationalisé d'une façon remarquable, en particulier en ce qui concerne des critères basés sur nos lois: nous reconnaissons en effet que nous ne pouvons exporter notre Charte, de toute évidence, mais qu'à bien des égards nous pouvons en faire bénéficier les réfugiés, tout au moins dans une certaine mesure, ce qui me paraît une attitude très magnanime. La façon dont le projet de loi a été rédigé me paraît particulièrement habile.
Avant de poser quelques questions à la ministre, je voudrais de nouveau affirmer pour le compte rendu, madame la présidente, que chaque fois sans exception qu'un ministre comparaît devant ce Comité c'est qu'il y a un projet de loi, dans le même ministère, qui est en train d'être étudié par la Chambre.
C'est une situation qui s'est présentée à de nombreuses reprises, et contre laquelle je voudrais m'élever, car il est excessivement difficile tant pour les NPD que pour les conservateurs, qui n'ont qu'un seul critique, de se trouver en deux endroits à la fois.
Quant au projet de loi même, je voulais poser une question hier, madame la ministre, sur la publication du projet de loi, son dépôt, autrement dit. M. Piragoff a mis cette question au point.
La question que je voudrais vous poser porte spécifiquement sur la période intérimaire où il pourrait y avoir appel—à savoir, où une décision ministérielle serait prise de ne pas accorder l'extradition, et où le pays étranger pourrait alors décider de faire appel de cette décision. Ma question porte alors sur la décision soit d'élargir le fugitif en attendant l'appel, ou de le maintenir en détention. J'attends un éclaircissement sur ce point.
M. Jacques Lemire: Si j'ai bien compris, votre question porte sur un refus d'extradition.
M. Peter MacKay: C'est exact.
M. Jacques Lemire: Est-ce que cette décision serait prise par le juge d'extradition ou par le ministre?
Mme Anne McLellan: Par moi, dans l'exercice de ma prérogative.
M. Jacques Lemire: Très bien.
Si le ministre devait refuser l'extradition, l'État requérant ne peut faire appel de cette décision. C'est une décision prise par le Canada, par un ministre de l'exécutif, et le Canada est un État souverain dans l'application de ses lois. L'État requérant ne peut faire appel de cette décision.
M. Peter MacKay: Il n'y a donc pas de processus d'appel.
Mme Anne McLellan: Non, pas de ma décision. Comme le disait bien Jacques, c'est un acte relevant de l'exécutif.
M. Peter MacKay: Oui, je comprends.
Mme Anne McLellan: Il n'y a donc pas d'appel.
M. Peter MacKay: Eh bien, je comprends que, pour d'excellentes raisons, la ministre serait plus consciente de la situation politique qui règne dans un pays demandeur d'extradition, et je ne conteste pas cela. Toutefois, pour ce qui est des questions de présentation de la preuve, je me demande un peu si un juge ne serait pas une personne plus appropriée pour participer à la prise de cette décision.
M. Jacques Lemire: Pour ce qui est du fait d'en appeler de la décision du juge d'extradition, le projet de loi actuel, ainsi d'ailleurs que la loi—après les amendements apportés à la loi sur l'extradition en 1992—prévoit tous deux la possibilité pour l'État requérant de loger un appel de la décision du juge d'extradition de relaxer une personne en tout ou en partie. En fait, ces appels se produisent.
M. Peter MacKay: Très bien.
Le projet de loi C-40, Loi sur l'extradition, vise à empêcher les gouvernements de prendre des décisions d'extradition fondées sur des preuves fallacieuses provenant d'instances internationales. Cela leur donne la possibilité de vérifier ces preuves.
Madame la ministre, je voudrais donc vous demander quelles dispositions—et cela dépasse cette mesure législative en particulier—existe-t-il dans votre ministère, le ministère de la Justice du Canada, pour l'empêcher de présenter à d'autres pays des demandes fondées sur des preuves bancales?
Prenons l'hypothèse suivante. Comment empêcher des fonctionnaires du ministère de la Justice d'écrire à une instance étrangère pour demander des preuves provenant de fouilles alors que ce type de preuves ne permettrait pas l'obtention d'un mandat dans notre propre pays? Comment empêcher cela de se produire?
Mme Anne McLellan: En fait, monsieur MacKay, je pense que la situation que vous présentez n'est pas du tout une situation hypothétique, n'est-ce pas?
M. Peter MacKay: Non, pas du tout.
L'hon. Anne McLellan: Permettez-moi d'affirmer que je ne vais rien dire au sujet de cette situation hypothétique ou de toute autre situation réelle ou hypothétique de ce type. Je peux toutefois vous décrire au meilleur de mes moyens le processus qui existe si, en fait, la GRC entreprend de faire enquête. Mes adjoints voudront peut-être ajouter ensuite des renseignements complémentaires.
Il s'agit-là d'une enquête où mon ministère n'intervient pas du tout, évidemment. Nous ne sommes pas parties prenantes aux décisions d'effectuer des enquêtes. Si, au cours d'une enquête menée par la GRC, la Gendarmerie estime qu'il existe des preuves relatives au prétendu acte criminel sur lequel elle fait enquête, elle peut demander que cette preuve lui soit communiquée en recourant à un processus qui existe depuis très longtemps. La GRC peut demander que nous rédigions une lettre qu'elle envoie alors au pays étranger concerné, lettre faisant état de l'objet de leur enquête, des allégations relatives à certaines personnes, et des raisons qui justifient qu'elle croit que quelqu'un, dans le pays en question, détient les preuves qui seraient utiles pour amener l'enquête à sa conclusion.
Il s'agit-là d'un procédé normal qu'a suivi la GRC depuis bien longtemps, si je comprends bien, dans le cadre des enquêtes portant sur des preuves provenant de l'étranger.
Ce qui nous tient le plus à coeur—et nous avons récemment pris des mesures pour modifier la procédure dans notre ministère—c'est de préciser à ce qui pourrait recevoir cette lettre que, si l'on ne dispose que d'allégations, ce ne sont donc que des allégations, dans le cadre d'une enquête en cours. Par conséquent, on ne saurait les traiter comme étant autre chose que des allégations. Je pense qu'il s'agit-là d'une question très importante à préciser.
• 1715
Il existe donc un processus. Nous l'avons d'ailleurs modifié.
En fait, j'ai envoyé un communiqué de presse il y a quelques
semaines, énonçant le nouveau processus, pour assurer le niveau de
protection dont vous vous souciez, si je comprends bien votre
question. Nous tenons à assurer que nos processus sont équitables
pour tous et, lorsque nous demandons à des instances ou des entités
étrangères de nous communiquer des preuves, nous voulons préciser
pourquoi nous les demandons, sur quelle base nous les demandons,
afin qu'elles comprennent notre demande et qu'il n'y ait pas de
malentendu.
M. Peter MacKay: Mais, madame la ministre, à ce sujet, votre ministère est étroitement mêlé à l'enquête à partir du moment où la GRC vous demande une lettre...
La présidente: Monsieur MacKay, je ne veux pas m'interposer, mais j'essaie de présider une réunion, et nous nous écartons beaucoup de l'objet de ce projet de loi.
M. Peter MacKay: Je voudrais seulement finir de poser ma question, madame la présidente.
Vous avez signalé que votre ministère a récemment modifié sa procédure relativement à cette question, pour empêcher que des demandes soient faites à l'extérieur de notre zone de compétence.
Mme Anne McLellan: Non, pas pour empêcher; je ne sais pas ce que vous voulez dire par cela.
Il est courant, dans le cadre d'une enquête en cours, que la GRC cherche à obtenir des preuves provenant de l'extérieur du pays. C'est la GRC qui prend cette décision dans le cadre d'une enquête. Il faut avoir un processus qui permette d'obtenir cette preuve. Voici le processus en question. Nous y jouons un rôle, et nous avons récemment modifié nos méthodes de travail afin que tout le monde comprenne sur quelle base nous nous acquittons de notre part des démarches. En fait, notre participation consiste à préparer la lettre qui demande l'information. Mais c'est tout ce que nous...
M. Peter MacKay: Madame la ministre, n'y a-t-il aucune assurance qu'il existe au Canada un niveau de base, un critère minimal qui doit être respecté quant au fardeau de la preuve avant qu'une demande de ce type ne soit effectuée? N'y a-t-il rien qui assure que nous ne devenions pas la risée du monde entier en demandant à un autre pays de faire des choses chez lui que nous ne pourrions pas faire au Canada?
C'est le revers de ce projet de loi, soit dit en passant. Si nous ne sommes pas prêts à respecter le fardeau de la preuve au Canada, pourquoi demanderions-nous à un autre pays de le faire?
La présidente: Ce sera la dernière question à ce sujet. Je veux en revenir au projet de loi.
M. Peter MacKay: Très bien.
Mme Anne McLellan: Mais je ne m'interpose pas, en fait, dans les enquêtes de la GRC ou, d'ailleurs, de toute autre force policière.
M. Peter MacKay: Mais votre ministère agit à la guise des forces policières.
La présidente: Laissez la ministre répondre et arrivons-en à d'autres questions.
M. Jacques Lemire: Je pourrais peut-être ajouter quelque chose.
Tout d'abord, je tiens à souligner que le processus qui nous permet de demander l'assistance d'un pays étranger existe depuis un certain temps. C'est un processus qui met en oeuvre des traités existant entre ces pays, ou qui intervient même lorsqu'il n'existe pas de traités.
Il ne s'agit donc pas d'un processus étranger aux pratiques normales. Il existe, et il est utilisé tant par le Canada que par d'autres pays.
Dans un certain nombre de cas, il est utilisé dans le contexte d'une enquête en cours. Il importe de se rappeler la nature investigatrice de la procédure suivie à ce moment. Les forces policières, les autorités compétentes au Canada pour mener des enquêtes examinent une situation pour voir si une infraction a été commise ou non. Il n'y a donc pas de procès en cours.
Dans certains cas, les activités criminelles se déroulent à l'échelle mondiale. Parfois, la preuve se trouve à l'étranger; il faut donc obtenir l'assistance d'autres pays. À cette fin, nous demandons à d'autres pays de fournir l'assistance voulue.
Les forces policières préparent l'information de base ou rédigent un projet de demande d'assistance. Ce projet est communiqué au ministère soit par une force policière, soit par la partie poursuivante. Le ministère l'examine. Il l'examine en regard des pratiques établies et des traités et exigences à respecter. Le ministère ne laisse planer aucune équivoque sur le fait que ce sont des allégations sur lesquelles on fait enquête, et que ce ne sont que des allégations, dans le contexte d'un processus d'enquête.
• 1720
Avant que la demande ne soit envoyée, on l'examine pour
s'assurer qu'elle est conforme aux exigences prévues dans les
traités. Elle est réexaminée en vue d'assurer sa conformité avec la
politique du ministère et afin d'assurer qu'elle est compréhensible
pour les États étrangers qui devront s'y intéresser et y répondre
en tenant compte de leurs propres lois. Pour accéder à la demande,
ces États devront appliquer leurs lois.
À l'intérieur du ministère, il y a un processus selon lequel des conseillers juridiques examinent très sérieusement les demandes. Ils doivent les examiner. Ensuite, le directeur du groupe d'entraide internationale les réexamine, avant qu'elles ne soient émises.
Évidemment, nous adoptons le principe de la bonne foi à l'endroit de ces demandes. Nous nous attendons que la police nous ait présenté les renseignements obtenus de bonne foi et nous n'avons normalement aucune raison de douter du fait que l'information qui nous est communiquée est fiable.
Si nous nous trouvons dans une situation où nous doutons de la fiabilité de l'information, ou dans un cas où nous voulons en savoir plus, nous retournons au service policier—rien ne nous en empêche—pour discuter de nos préoccupations.
Il existe donc un processus. Il est utilisé et il est très clair.
M. Peter MacKay: Merci.
La présidente: Merci. Derek Lee.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci.
Madame la ministre, vous avez dit que l'un des objectifs de ce projet de loi modifiant la Loi sur l'extradition est de faciliter les travaux policiers touchant la pègre. Si vous permettez, j'aimerais examiner certaines choses et mieux comprendre un élément du processus d'audience pour extradition en ce qui a trait au crime organisé.
Si je suis membre d'un groupe de la pègre à l'extérieur du Canada, et si mon pays demande à extrader du Canada un de mes acolytes, j'aimerais vraiment avoir l'occasion de permettre à un autre de mes acolytes de vérifier la preuve avant que mon acolyte au Canada soit extradé. Le processus d'audience pour extradition au Canada pourrait donc être un moyen qui permette à un gang de commencer à miner le procès d'un membre de la pègre que l'on veut extrader. La revue de la preuve prévue au processus d'extradition devient donc un élément qui intéresse les parties.
Si le projet de loi vise à lutter contre la pègre, je suis sûr que le ministère a consulté les procureurs qui poursuivent des membres de la pègre, puisque ce sont nos experts.
Pour être précis, l'article 26 du projet de loi permet à un juge de «rendre une ordonnance de non-publication des éléments de preuve» etc., mais ce juge ne peut agir ainsi que «s'il est convaincu que leur publication ou leur radiodiffusion risquerait de nuire à la tenue d'un procès juste par le partenaire».
Selon moi, cette expression «la tenue d'un procès juste», ne permet pas, à première vue, d'être convaincu, par exemple, que les témoins ou la preuve ne seraient pas à risque. Lorsque je lis «procès juste», je songe à un procès juste pour l'accusé. Je ne pense pas à un procès juste pour l'État ou pour la partie poursuivante.
Si j'ai correctement interprété cela, j'y vois une faiblesse relativement à la pègre. J'y vois une certaine vulnérabilité. Si j'ai tort, corrigez-moi.
Mme Anne McLellan: Vous soulevez une question très intéressante. Par exemple, nous passons des affidavits à la première personne aux documents du dossier. Par conséquent, si votre préoccupation porte sur l'identité des témoins...
M. Derek Lee: C'en est une.
L'hon. Anne McLellan: ...en fait, l'autorité qui demande l'extradition, dans les documents du dossier, n'identifie pas—c'est du moins ce que je présume, Don ou Jacques—n'identifie donc pas les cas où elle estime qu'il y a une menace réelle et sérieuse à la sécurité de toute personne appelée à témoigner au procès de la personne extradée, une fois l'extradition effectuée.
• 1725
Je pense donc que les documents du dossier permettent à l'État
qui fait l'extradition d'avoir plus de souplesse quant aux
renseignements précis qui sont révélés, surtout dans le cas de
l'identité de certaines personnes, alors que si l'on travaille au
moyen d'affidavits à la première personne, il est plutôt difficile
d'éviter de révéler l'identité de ces personnes ou des
caractéristiques qui permettent d'établir des distinctions d'un
genre ou d'un autre.
Par ailleurs, vous avez parlé de l'article 26 et de l'ordonnance de non-publication, mais l'article 27 permet également au juge qui préside à l'audition de la demande d'exclure de la salle de tribunal toute personne «s'il est d'avis que la moralité publique, le maintien de l'ordre ou la bonne administration de la justice l'exigent».
M. Derek Lee: Je comprends cela. Je comprends l'article 27. Pourquoi ne se sert-on pas des mêmes critères à l'article 26?
M. Don Piragoff: Si l'on regarde un peu plus haut que l'article 26, au paragraphe 24(2), on y lit:
-
Il (le juge) est pour ce faire investi... des mêmes pouvoirs qu'un
juge de paix en application de la partie XVIII du Code criminel.
Ce que cela signifie, pour l'essentiel, c'est que le juge d'extradition a tous les pouvoirs d'un juge qui effectue une enquête préliminaire dans le cas d'un procès intérieur.
Le problème dont vous avez parlé est, bien sûr, un problème qui existe toujours, même pour les procédures intérieures; au cours d'une enquête préliminaire, des preuves vont devoir être révélées pour convaincre le juge d'un tribunal provincial que le procès mérite d'être tenu. Bien sûr, à ce moment, il faut révéler certaines choses en public au sujet de la preuve présentée par la Couronne.
En outre, bien sûr, dans le cas d'une cause intérieure, nous avons des règles de divulgation qui prévoient des divulgations considérables à un accusé de la preuve accumulée par la Couronne. Néanmoins, au cours d'une enquête préliminaire, le juge d'une cour provinciale peut protéger l'identité des témoins pendant l'instruction de l'affaire, avant l'enquête préliminaire. De surcroît, les tribunaux ont reconnu qu'il peut y avoir exception à la divulgation lorsqu'il s'agit, bien sûr, de protéger l'identité de témoins si ces témoins peuvent être menacés ou mis en danger.
Le paragraphe 24(2) donne donc au juge d'extradition tous les pouvoirs qu'aurait un juge de cour préliminaire lors de l'instruction de l'affaire. Toute mesure intérieure mise à la disposition d'un juge de cour provinciale qui effectue une enquête préliminaire est également offerte au juge d'extradition, y compris le pouvoir de protéger des témoins.
À l'article 26, on reproduit un pouvoir existant dans le Code criminel—à l'article 539, je crois, ou 542—qui interdit aux médias—et, bien sûr, les médias ont un droit, un droit constitutionnel, à la liberté d'expression—de publier des comptes rendus d'audiences d'extradition, de la même façon qu'on leur interdit de publier des comptes rendus des enquêtes préliminaires, afin de ne pas compromettre le procès proprement dit, de ne pas influencer un jury, par exemple. Bien sûr, nos voisins, les États- Unis, ont beaucoup plus de procès par jury que nous.
Cette disposition vise donc à assurer, au cas où il y a une preuve préjudiciable, qu'elle ne porte pas préjudice au procès final, de la même façon que nous avons des ordonnances interdisant de porter préjudice à nos propres procès par la divulgation de la preuve lors de l'enquête préliminaire.
C'est pourquoi l'article 26 est ainsi formulé. Il vise à traiter d'un problème en particulier.
La question que vous avez soulevée est un problème qui existe également en procédure intérieure. La common law en traite, la Charte également; on en traite également dans les pouvoirs accordés à un juge de cour provinciale au cours d'une enquête préliminaire. Ces pouvoirs sont inclus au moyen du paragraphe 24(2).
Les mêmes préoccupations existent donc relativement à une audience d'extradition, mais les pouvoirs accordés à un juge dans la procédure intérieure s'appliquent à cette situation-ci.
• 1730
En outre, comme l'a dit la ministre, le recours au document du
dossier plutôt qu'aux affidavits à la première personne permet de
mieux protéger l'identité d'un témoin puisque, dans un affidavit,
il faut s'identifier.
M. Derek Lee: Si je comprends bien, donc, vous êtes préparé à m'assurer—le ministère nous assure ici, devant le comité—que le juge est parfaitement habilité à protéger la preuve dans la même mesure qu'il pourrait le faire pour une affaire intérieure et n'entraînant pas l'extradition. Il pourra protéger la preuve relativement à des situations qui se produisent lors de poursuites de membres de la pègre. Est-ce bien cela?
M. Don Piragoff: Oui. Si vous voulez des détails de ce qui se fait exactement dans le contexte d'une enquête préliminaire, M. Lemire a participé et à des audiences d'extradition et à des enquêtes préliminaires. Il voudra peut-être ajouter quelque chose à ce que j'ai dit.
M. Derek Lee: Il n'est pas nécessaire de dire aux méchants comment cela fonctionne. Laissons-les découvrir cela par eux-mêmes.
Je suis satisfait de constater qu'il existe une procédure. Vous m'avez donné l'assurance que je cherchais.
Merci.
La présidente: Merci. Monsieur Cadman.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Merci, madame la présidente.
Madame la ministre, je veux vous parler d'un cas qui a cours sur la côte Ouest à l'heure actuelle. Je suis sûr que vous connaissez bien cette affaire où deux jeunes gens étaient recherchés dans l'État de Washington pour un crime particulièrement odieux. Je pense que votre prédécesseur a approuvé leur extradition, qui a ensuite fait l'objet d'un appel.
Mon instinct me dit que l'État de Washington va faire de l'obstruction. Quelle voie s'offre à nous si cet appel est maintenu? Autrement dit, si la Cour suprême précise dans sa décision qu'il faut qu'on nous garantisse qu'ils ne seront pas exécutés, je pense que l'État de Washington va sans doute se braquer et refuser d'accorder une telle garantie. Que va-t-il se passer alors? Où sont ces deux individus maintenant?
Mme Anne McLellan: Je vais m'abstenir de tout commentaire au sujet de cette affaire. Je ne veux pas préjuger de son issue.
M. Chuck Cadman: Je comprends.
Mme Anne McLellan: Il est exact que l'affaire est devant la Cour suprême. Elle sera entendue la semaine prochaine.
C'est ce que vous m'avez dit, n'est-ce pas Don?
M. Don Piragoff: Possiblement la semaine prochaine.
Mme Anne McLellan: D'accord.
Par conséquent, il serait tout à fait malvenu de ma part de faire des commentaires au sujet de cette affaire et de préjugé de toute décision que je pourrais prendre à ce sujet.
M. Chuck Cadman: J'accepte votre réponse. Je n'évoquerai pas de situations hypothétiques.
Mme Anne McLellan: Je vous en remercie.
M. Chuck Cadman: Il y a une autre question que je voulais poser. Je crois savoir que si une demande d'extradition est en cours, parallèlement à une demande de statut de réfugié, l'article 96, si je ne m'abuse, précise que si l'infraction est passible de plus de dix mois d'emprisonnement au Canada la demande sera entendue rapidement par un seul juge.
Est-ce ainsi que les choses se passent? Et comment en sommes-nous arrivés à ce critère de dix ans?
M. Don Piragoff: La convention sur les réfugiés stipule qu'un réfugié ne doit pas être renvoyé dans un pays ou sa vie risque d'être en péril. L'une des exceptions prévues à la convention vise une personne qui serait recherchée pour une infraction grave de nature non politique. Autrement dit, il est possible de renvoyer un réfugié dans son pays s'il est accusé d'avoir commis une infraction grave de nature non politique.
La question se pose alors de savoir ce qui constitue une infraction grave. Dans le projet de loi, à la suite de la décision du gouvernement, nous avons décidé de conférer une certaine objectivité aux critères qui déterminent ce qui constitue une infraction non politique grave, au lieu de laisser cela entièrement à la discrétion d'un juge individuel.
Si l'on consulte le code criminel, on constatera qu'une peine de 10 ans est au Canada la peine imposée dans le cas d'une infraction très grave. Toute peine de moins de 10 ans, même si elle peut viser une infraction grave, ne s'appliquerait pas, selon moi, à une infraction très grave. Si l'on considère le type d'infraction passible de dix ans d'emprisonnement et plus, il s'agit de vols, d'agressions, d'agressions sexuelles, de voies de fait, de crimes économiques importants, etc.
M. Chuck Cadman: Si vous me permettez d'aller un petit peu plus loin, que pouvons-nous faire au sujet d'un jeune de moins de 18 ans qu'on veut extrader pour l'inculper de meurtre sans préméditation? Aux termes de la loi sur les jeunes contrevenants, une telle infraction est passible de sept ans d'emprisonnement.
M. Don Piragoff: La loi prévoit que le jeune contrevenant peut-être extradé, que le tribunal peut se prononcer et le ministre de la Justice se plier à sa décision. Cependant, la loi confère au ministre une certaine latitude pour examiner le système de justice pénal ou le système de justice applicable aux jeunes dans le pays étranger en question pour voir s'il se conforme plus ou moins aux principes fondamentaux énoncés dans la loi sur les jeunes contrevenants.
M. Chuck Cadman: Ce qui m'intéresse, cependant, c'est la question de la peine de sept ans car nous n'en sommes pas encore à 10 ans. Aux termes de l'actuelle loi sur les jeunes contrevenants, une telle infraction est passible de sept ans d'emprisonnement. Par conséquent, s'il y a une demande de statut de réfugié en parallèle, retournons-nous alors à l'ancien processus, qui exigeait que la Commission de détermination du statut de réfugié rende une décision, ou peut-il y avoir extradition de la même façon...? Manifestement, c'est impossible si l'infraction est uniquement passible de sept ans d'emprisonnement. Cela ne répond pas aux critères des 10 ans.
M. Don Piragoff: Il faudrait vérifier ce qu'il en est auprès des fonctionnaires de l'immigration pour savoir comment ils traitent les jeunes contrevenants qui sont réfugiés. Je ne peux répondre à cette question. Nous pouvons cependant vous fournir une réponse plus tard.
Mme Anne McLellan: Si je ne m'abuse, le comité doit entendre des fonctionnaires de l'immigration, n'est-ce pas?
La présidente: Oui.
Mme Anne McLellan: Il serait sans doute utile de leur demander ce qu'ils font s'ils sont saisis d'une demande de statut de réfugié présentée par une personne de moins de 18 ans.
M. Chuck Cadman: Ce qui m'intéressait, c'était les sept ans par rapport aux 10 ans, si tant est que cela est approuvé.
Mme Anne McLellan: Vous avez soulevé une question très intéressante.
La présidente: M. Ménard a une brève question. Si vous pouviez y répondre, nous lèverions la séance ensuite.
[Français]
M. Réal Ménard: En fait, c'est une demande de document. Vous savez que je me suis beaucoup intéressé au projet de loi C-95, et votre collègue, M. Lemire, rappelait qu'il y a des liens avec le crime organisé, avec le projet de loi C-95 et avec le projet de loi C-40. Le projet de loi C-95 était un projet majeur, qui a été adopté par votre prédécesseur, qui portait sur les gangs criminalisés et les produits de la criminalité.
Je sais qu'il existe à votre ministère un manuel de gestion qui fait une sorte de bilan de la loi et des règlements, qui indique comment il faut interpréter la loi. J'aimerais bien me procurer ce document et j'ai beaucoup de difficulté à l'obtenir. Vous seule pouvez m'aider. Je vous le demande vraiment par les voies les plus autorisées, parce qu'autrement cela ne donne rien.
Vous savez, ce projet de loi a été adopté en trois jours. Tous les partis de l'opposition y ont collaboré. Il est né à la suite d'une initiative du Bloc québécois, dans la mesure où, pour moi, cela était lié à l'assassinat du jeune Daniel Desrochers, qui avait fait l'objet d'un attentat à la voiture piégée. J'ai rencontré les différents corps policiers. C'est une question qui m'intéresse.
Je sais que vous avez un document de gestion et, pour des raisons que je peux respecter, vos fonctionnaires ont fait preuve d'une certaine prudence que vous seule pouvez faire lever. J'apprécierais que vous vous en préoccupiez.
[Traduction]
Mme Anne McLellan: Je vais vérifier pour vous. Avez-vous présenté une demande officielle pour obtenir le document?
[Français]
M. Réal Ménard: Oui.
[Traduction]
Mme Anne McLellan: À quelqu'un de mon ministère? C'est tout ce que j'ai besoin de savoir.
[Français]
M. Réal Ménard: Quelqu'un que je tiens en haute estime.
Mais je le comprends. On m'a dit que ce n'était pas un document final et d'autres chose encore. Mais je connais votre acharnement au travail. Vous allez me régler cela et je vais avoir ce document-là. Vous êtes l'espoir de ma vie.
[Traduction]
Mme Anne McLellan: Je vous remercie. Je ferai tout mon possible. Nous allons voir où en est cette demande.
La présidente: Merci, madame la Ministre. Nous vous remercions de votre présence et de votre collaboration.
Mme Anne McLellan: Ce fut un plaisir pour moi.
La présidente: Monsieur MacKay, je voulais revenir sur votre intervention. Vous avez dit que constamment, nous avions des séances de comité pendant que des projets de loi étaient à l'étude à la Chambre. Je me souviens d'une seule autre occasion où l'on a exprimé des objections.
M. Peter MacKay: Je n'ai pas dit que j'avais soulevé des objections chaque fois que cela s'est produit. J'affirme tout simplement que cela se produit...
La présidente: Je me souviens d'une seule autre occasion où c'est arrivé.
Je tiens à vous dire une chose. Notre comité est un peu comme un train qui file sur ses rails. Nous avons énormément de travail, et nous ne pouvons arrêter. Je ne sais pas quelle est la solution. Si vous voulez en discuter, nous pouvons le faire. En fait, je m'intéresse tout particulièrement au projet de loi qui est à l'étude à la Chambre aujourd'hui et j'aimerais y être aussi, mais je n'y suis pas.
Je ne sais pas quoi faire d'autre.
M. Peter MacKay: Je sais que vous n'établissez pas le calendrier législatif de la Chambre. Je comprends cela, madame la présidente. Peut-être suis-je paranoïaque, mais chaque fois qu'un ministre a comparu, la Chambre était saisie, à un stade ou à un autre du débat, d'un projet de loi du ministère de la Justice ou du solliciteur général. Cela s'est produit chaque fois qu'un ministre a comparu.
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Il n'y a pas de complot, Peter. Il n'y a pas de complot.
Peter Mancini a avancé le même argument à la Chambre. Personnellement, je pense que votre intervention était motivée par la présence des médias. C'est évident.
M. Peter MacKay: Un peu de sérieux.
Mme Eleni Bakopanos: Je pense que c'est injuste. C'est très injuste.
M. Peter MacKay: Revenez-en.
Mme Eleni Bakopanos: N'empêche que c'est vrai.
La présidente: Le fait est que je ne contrôle pas le calendrier de la Chambre. Nous accueillons la ministre quand elle est disponible.
Je suis désolée. J'essaierai d'être plus sensible...
M. Peter MacKay: J'ai apprécié la comparution de la ministre. C'est formidable. Je suis toujours heureux quand un ministre comparaît. J'ai choisi d'être ici plutôt qu'à la Chambre, mais il est extrêmement frustrant d'être écartelé sur les deux plans.
La présidente: D'accord. Je comprends. On va essayer d'aborder ce sujet, mais elle a un horaire chargé.
Merci.
À 4 heures demain, Lloyd Axworthy.