JURI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS
COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 21 avril 1999
Le président (M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.)): La séance est ouverte.
Je vous remercie d'être venus cet après-midi, à si bref délai. Jusqu'à 17 h 30 hier, nous ne savions pas encore que nous recevrions ce projet de loi. En fait, il a été adopté avec dissidence, tout juste à la fin du débat, et nous en sommes maintenant saisis.
Le projet de loi C-68 doit également nous parvenir, de même que le C-69. Compte tenu du fait que notre ordre du jour n'était pas très chargé la semaine dernière et cette semaine, nous avons jugé, maintenant que nous avons du travail, qu'il fallait s'y atteler, surtout s'il s'agit d'un projet de loi qui ne fait pas trop de vagues. Je crois que nous n'aurons probablement à apporter que quelques modifications mineures à certains aspects de cette mesure.
Nous avons le plaisir aujourd'hui d'accueillir des représentants du ministère de la Justice, Mme Catherine Kane et M. Yvon Roy.
Je vous remercie d'être venus. Comme nous, vous n'avez pas eu un très long préavis.
Avez-vous une déclaration à faire?
Mme Catherine Kane (avocate, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice): Je vous remercie.
J'ai pensé que je pourrais me limiter à un très bref aperçu du projet de loi puisque la plupart des députés doivent déjà le connaître. Il reflète assez bien toutes les recommandations qui figuraient dans le rapport de votre comité permanent publié en octobre.
Après cet aperçu, je serai prête à répondre à vos questions parce que je crois que la plupart des membres du comité connaissent déjà en ce moment les dispositions détaillées du projet de loi.
Comme vous le savez, les articles se présentent dans l'ordre dans lequel les modifications apparaîtront dans le Code criminel. Ce n'est vraiment pas le meilleur ordre pour en parler. C'est pour cette raison que je vais concentrer mon exposé sur les quatre éléments clés du projet de loi. Si vous avez des questions, je vous mentionnerai les dispositions précises du projet de loi car je sais que vous procéderez plus tard à une étude article par article.
Après que vous aurez entendu d'autres témoins, si vous avez d'autres questions ou si vous souhaitez que je comparaisse à nouveau, je n'y verrai aucun inconvénient. Je pourrais alors répondre aux questions que vous pourriez vous poser plus tard, au fur et à mesure de votre examen du projet de loi.
La première partie du C-79 est le préambule, qui a été recommandé dans votre rapport Les droits des victimes—Participer sans entraver. Nous nous sommes efforcés de tenir compte de tous les principes que votre comité souhaitait voir dans le préambule.
Certaines des dispositions de ce préambule se retrouvent également dans d'autres textes de loi, par exemple, la mesure adoptée il y a deux ans au sujet de la production de documents concernant les victimes d'infractions sexuelles. Les mots ne sont pas les mêmes, mais le thème est commun: c'est la nécessité de réaliser l'équilibre entre les droits des accusés, des victimes et des témoins dans le système de justice pénale.
• 1540
Le préambule souligne également la nécessité pour les victimes de
recevoir de l'information et la nécessité de tenir compte de leur
point de vue et de leurs préoccupations, surtout au sujet des
décisions qui auront des répercussions sur eux.
Je suppose que vous voudrez examiner de près le préambule parce qu'il s'agit de vos propres mots, comme membres du comité et comme députés. J'espère bien que le libellé reflète vos intentions d'une manière satisfaisante.
Je voudrais en premier aborder la question des changements apportés à la suramende compensatoire aux délinquants.
Il y a eu des plaintes au fil des ans au sujet de l'insuffisance du régime actuel de suramende compensatoire. Le régime impose au juge d'ordonner que la suramende soit payée. Les montants sont fixés dans les règlements d'application du Code criminel, sous forme de maximums.
En pratique, les juges ont fait abstraction de la suramende. Ils l'ont oubliée et personne n'a attiré leur attention sur le fait. C'est ainsi que, dans beaucoup de cas où il aurait été approprié de l'appliquer, la suramende n'a pas été imposée. Dans d'autres cas, quand la suramende a été imposée, le montant était parfois inférieur au maximum prescrit de 15 p. 100 ou 35 $.
Par suite de tous ces facteurs et du manque de vigueur des efforts de recouvrement—souvent, il n'est pas rentable d'aller chercher de petits montants, parce que les frais de perception peuvent être supérieurs à la suramende—, les recettes n'ont pas atteint les sommes qui avaient été prévues.
Nous avons donc révisé le régime de suramende pour rendre celle-ci plus automatique. Une fois le projet de loi adopté, il ne sera plus nécessaire que le juge rende une ordonnance. Le libellé est tel que l'auteur de l'infraction aura l'obligation de payer aussitôt qu'il est déclaré coupable. Par conséquent, peu importe que le juge y pense ou non, le délinquant paiera la suramende. Comme celle-ci figurera dans le Code criminel, il n'y aura pas à se reporter à des règlements. Le montant est fixé à 15 p. 100 de l'amende. Cela veut dire que si l'amende s'élève à 100 $, il faudra payer une suramende de 15 $. Si aucune amende n'a été infligée, la suramende s'élève à 50 $ en cas de déclaration de culpabilité par procédure sommaire et à 100 $ sur déclaration de culpabilité par mise en accusation.
Les modifications apportées à cet égard maintiennent la disposition relative au préjudice injustifié. Si le contrevenant soulève la question avant le prononcé de la sentence, le juge peut annuler la suramende compensatoire. Nous espérons que cette dispense ne sera accordée que s'il y a vraiment préjudice injustifié et non quand cela est simplement malcommode pour le contrevenant ou risque de lui causer des difficultés mineures.
De plus, le juge est habilité à ordonner le versement d'une suramende supérieure s'il l'estime nécessaire dans les circonstances. Par exemple, le procureur de la Couronne peut signaler que le contrevenant a la capacité de payer et que l'infraction est telle qu'un montant supérieur est justifié. Cette modification sera utile dans les cas où, à l'heure actuelle, les juges se sentent limités par le fait que le montant de la suramende prescrit dans le Code est trop bas.
D'autres modifications également comprises dans l'article 737 proposé, ainsi que les modifications corrélatives nécessaires pour s'assurer que le Code se reporte aux dispositions appropriées relatives à la suramende, établiront clairement que toutes les dispositions prévues pour percevoir les amendes s'appliquent aussi à la suramende et que le contrevenant recevra un avis précisant le montant de la suramende à verser, l'échéance du paiement et la procédure à suivre pour présenter une demande visant à modifier, non le montant, mais les conditions du versement.
Ainsi, si on a ordonné au contrevenant de payer la suramende dans les 30 jours et qu'il ne peut pas le faire dans ce délai, il aura la possibilité de s'adresser au tribunal pour expliquer qu'il a besoin de plus de temps. Toutefois, il n'y aura pas de mécanisme permettant de modifier le montant de la suramende.
Nous avons également confirmé la disposition en vertu de laquelle le mode facultatif de paiement d'une amende n'est pas applicable à la suramende compensatoire.
Les autres groupes d'amendements portent sur la déclaration de la victime. Ils renforcent les dispositions qui se trouvent déjà dans le Code criminel et qui imposent aux juges de tenir compte de la déclaration de la victime au moment de prononcer la sentence. Il s'agira d'une déclaration écrite déposée auprès du tribunal selon les conditions de tout programme provincial régissant les déclarations de victimes.
Le premier amendement de la série établit clairement que si la victime le souhaite, elle peut présenter sa déclaration de vive voix, le juge n'étant pas habilité à refuser une telle demande.
• 1545
De même, la présentation d'une déclaration d'une autre manière
pourrait également être permise. Je pense en particulier à une vidéo
dans le cas d'une personne qui ne serait pas en mesure d'être présente
à l'audience de détermination de la peine parce qu'elle vit dans une
autre ville. Une personne pourrait également demander que quelqu'un
d'autre lise la déclaration en son nom ou pourrait demander à recourir
aux services d'un interprète.
Dans ces situations, le juge aura la discrétion de permettre ou non ce genre de présentation. Toutefois, si la victime veut personnellement donner lecture de sa déclaration, elle sera toujours autorisée à le faire.
Il y a en outre une nouvelle disposition qui imposera au juge, après détermination de la culpabilité et avant le prononcé de la sentence, de demander si la victime a été informée de la possibilité pour elle de rédiger et de présenter une déclaration. Le procureur de la Couronne sera probablement celui qui répondra à cette question, mais ce pourrait être aussi la victime elle-même ou un représentant des services d'aide aux victimes.
Si le juge n'a pas une déclaration et n'a pas réussi à déterminer si les victimes sont en général informées des dispositions pertinentes dans la juridiction considérée ou si la victime elle-même en a été informée, il peut, sur demande du procureur de la Couronne, de la victime ou d'un représentant des services d'aide aux victimes, ajourner les procédures pour permettre à la victime de rédiger sa déclaration ou permettre la collecte de toute autre information pour présentation à l'audience de détermination de la peine, autrement que sous forme d'une déclaration de la victime.
Il s'agirait là d'une disposition discrétionnaire qui ne devrait pas nuire à la bonne administration de la justice. Cette disposition reflète une recommandation du comité.
Nous avons également étendu les dispositions relatives à la déclaration de la victime pour permettre qu'elles soient présentées à des procédures concernant des accusés atteints de troubles mentaux. À l'heure actuelle, en cas de verdict de non- responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux, la victime n'a pas la possibilité de présenter une déclaration puisqu'aucune sentence ne sera prononcée contre l'accusé. Pourtant, la personne est quand même victime d'un acte criminel. L'amendement établit clairement qu'elle pourra rédiger et présenter une déclaration.
De même, à l'audience tenue par un tribunal ou une commission d'examen pour rendre une décision initiale concernant un accusé atteint de troubles mentaux—dans certains cas, le tribunal laisse la commission d'examen prendre la décision initiale—, la déclaration de la victime sera prise en compte dans la mesure où elle satisfait aux critères qui s'appliquent lors de la détermination de la décision à prendre dans le cas des accusés atteints de troubles mentaux.
Il y a également un amendement destiné à établir clairement qu'il est possible de présenter oralement ou par écrit les renseignements fournis par la victime, lors des audiences tenues en vertu de l'article 745.6, qui détermine s'il convient de réduire la période d'incarcération d'un contrevenant avant qu'il ne devienne admissible à la libération conditionnelle.
Nous avons aussi apporté un certain nombre d'autres modifications aux dispositions relatives à la déclaration de la victime. Par exemple, la version anglaise de la définition actuelle de «victime» contient, devant le mot «victime», un article défini qui pourrait être interprété comme voulant dire qu'une infraction ne peut faire qu'une seule victime. L'article défini est donc remplacé par l'article indéfini pour établir clairement que l'infraction peut faire plusieurs victimes et peut donc donner lieu à plusieurs déclarations au cours d'une audience donnée de détermination de la peine.
Nous avons également éclairci une disposition du Code criminel qui existait depuis l'introduction des dispositions relatives à la déclaration de la victime. Selon le libellé actuel, la déclaration déposée auprès du tribunal n'empêche pas celui-ci de prendre en considération d'autres éléments de preuve concernant la victime.
L'amendement précise que cela s'applique qu'il y ait ou non rédaction et dépôt d'une déclaration. On avait parfois interprété la disposition comme signifiant que d'autres éléments de preuve ne peuvent être pris en considération que si la victime a déjà déposé une déclaration. Comme la décision de déposer une déclaration devrait être laissée à la victime, il y aura des cas où, même en l'absence d'une déclaration, le tribunal sera quand même autorisé à prendre en considération n'importe quelle information relative à la victime, à l'audience de détermination de la peine.
C'est bien sûr là un amendement d'ordre administratif, mais il pourrait être avantageux pour les victimes qui ne souhaitent pas présenter une déclaration, mais veulent que d'autres renseignements les concernant ou concernant les effets sur eux de l'infraction soient pris en compte.
• 1550
Les modifications apportées portent en outre sur un autre
domaine, celui de la libération sous caution. Nous avons examiné de
près toutes les dispositions régissant la libération de l'accusé en
attendant son jugement, que la libération soit décidée par un agent
de police, un fonctionnaire responsable, un juge de paix ou un
juge.
Ces amendements se trouvent aux articles 8 à 11 du projet de loi. Il y en a plusieurs, mais leur objet est essentiellement le même. Ils exigent que la personne responsable de la libération tienne compte, lorsqu'elle considère la sécurité publique, du besoin particulier d'assurer la sécurité de la victime.
De même, si l'accusé est libéré sur présentation d'un engagement ou d'une promesse, les conditions de l'engagement ou de la promesse refléteront deux changements. La disposition de non- communication, qui est une condition assez courante, est élargie de façon à interdire toute communication directe ou indirecte. Nous avons également inclus le mot «victime» dans cette condition parce qu'il n'y figurait pas jusqu'ici. Le libellé actuel mentionne les témoins et autres. De plus, une condition spéciale peut être jointe à l'engagement afin de prévoir tout ce qui peut être nécessaire pour assurer la sécurité de la victime.
D'autres modifications prévoient que si un juge libère une personne sous caution dans l'attente d'un appel, il impose les mêmes conditions et considérations qui se seraient appliquées à un engagement.
Voilà qui complète le processus. Quiconque prend la décision de libérer une personne doit tenir compte de la nécessité d'assurer la sécurité de la victime et de prévoir des conditions appropriées de libération.
L'autre amendement proposé sous le même thème général impose qu'à une audience de libération sous caution, le juge prenne en considération toute preuve relative au besoin d'assurer la sécurité des victimes. Il y a donc deux exigences. En l'absence de renseignements précis sur les besoins de sécurité de la victime, le juge est tenu de prendre en considération ces besoins, mais si des renseignements précis sont présentés, il doit également en tenir compte.
Nous ne voulons pas qu'on puisse supposer qu'en l'absence d'éléments de preuve particuliers, on peut faire abstraction de la sécurité des victimes. Le fonctionnaire responsable a l'obligation d'en tenir compte, qu'il ait ou non reçu des renseignements particuliers à ce sujet.
Un autre groupe d'amendements a pour objet de faciliter la participation des victimes au processus criminel. Nous avons recommandé des modifications relativement au contre-interrogatoire des jeunes victimes. L'âge de référence a été porté à 18 ans.
La disposition complémentaire, qui facilite l'interprétation de ces articles et d'autres, est également modifiée de façon à faire passer l'âge requis de 14 à 18 ans.
Il y a en outre un amendement qui permet à une victime ou à un témoin qui a une déficience physique ou mentale d'être accompagné d'une personne de confiance. À l'heure actuelle cette possibilité n'existe que pour les jeunes victimes et les témoins de moins de 14 ans.
Nous avons apporté deux modifications aux dispositions relatives à la limitation de la publication. La plus importante a pour objet de codifier la disposition discrétionnaire de la common law qui permet à un juge de protéger l'identité d'une victime ou d'un témoin s'il est convaincu que la bonne administration de la justice l'exige. Il incombera à la personne qui demande l'interdiction d'établir pourquoi elle est nécessaire et la disposition du Code précisera les facteurs que le juge devrait prendre en considération lorsqu'il détermine s'il convient de prendre une ordonnance.
Nous nous sommes également occupés de la procédure. Il s'agit essentiellement d'une codification d'un principe de la common law établi par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Radio Canada et Dagenais, bien qu'il soit impossible d'adopter simplement les mots employés par la Cour et de les incorporer tels quels dans le Code criminel. Nous avons pris beaucoup de soin à rédiger cet amendement pour nous assurer d'énoncer tous les facteurs que le juge doit prendre en considération.
L'autre amendement concernant la limitation de la publication traite de la disposition qui figure déjà dans le Code criminel au sujet des plaignants dans les causes d'infractions sexuelles. Nous avons clairement établi le fait que si une personne est victime à la fois d'une infraction sexuelle et d'autres infractions, son identité doit être protégée pour toute la gamme des infractions perpétrées contre elle par le même contrevenant.
• 1555
Par exemple, si une personne s'introduit par effraction dans
votre maison, vous attaque, et vous agresse sexuellement, et que
votre identité soit protégée en tant que victime d'une agression
sexuelle, il sera interdit de dire que vous avez été victime d'une
agression et d'un vol avec effraction. Votre identité sera
complètement protégée.
Avant de proposer cette modification, nous étions convaincus que la disposition d'origine assurait la même protection. Toutefois, dans une affaire récente, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a accepté une interprétation selon laquelle l'identité de la personne n'était protégée qu'à titre de victime d'une infraction sexuelle et non comme victime des autres infractions.
La dernière question que j'aborderai porte sur les changements apportés à l'information concernant les condamnations à l'emprisonnement à perpétuité. J'ai déjà mentionné le changement qui précise que les renseignements sur la victime soumis à une audience tenue en vertu de l'article 745.6 peuvent être présentés oralement ou par écrit. De plus, il y a un autre amendement qui impose au juge, s'il prononce une sentence d'emprisonnement à perpétuité, de faire une déclaration, pour la gouverne des victimes survivantes qui pourraient être présentes, au sujet de l'application future de l'article 745. Cette déclaration informera d'avance les intéressés de la possibilité que, 15 ans plus tard, une demande soit présentée en vue de demander la réduction du délai préalable à la libération conditionnelle.
Voilà donc l'aperçu général des dispositions du projet de loi. Si vous avez des questions ou souhaitez avoir des détails sur un aspect quelconque, je me ferai un plaisir de vous répondre.
Le président: Merci, Catherine.
Nous commencerons les périodes de questions de sept minutes avec M. Cadman.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Merci, monsieur le président.
Merci, madame Kane, pour votre exposé et merci à vous deux pour avoir accepté de comparaître aujourd'hui.
Je n'ai pas trop de préoccupations en ce moment, mais j'ai une question à poser au sujet de la définition du mot «victime». Je sais que, dans la version anglaise, «la victime» a été remplacée par «une victime». Est-il possible qu'une personne soit exclue de cette définition?
Mme Catherine Kane: Non.
M. Chuck Cadman: Je me demande si, à l'autre extrême, une personne qui lit un article de journal au sujet d'une infraction particulière et se sent émotivement troublée aurait alors le droit de présenter une déclaration.
Vous comprenez sûrement où je veux en venir. Je n'aimerais pas que cela aille jusque là.
Mme Catherine Kane: Vous avez raison.
Je crois que la question que vous venez de soulever m'aide à répondre à la question que je pensais que vous alliez poser, au sujet de l'autre définition de victime dans le Code criminel. Il est très difficile de rédiger une définition qui englobe toutes les victimes, telles que nous les connaissons, ainsi que les membres de la collectivité qui pourraient être victimes du crime, mais seulement d'une façon très indirecte.
M. Chuck Cadman: J'ai abordé cette question parce que j'ai eu affaire à une personne qui se trouvait près d'une victime au moment de l'infraction et qui a souffert des conséquences... Je ne voudrais pas que cela aille...
Mme Catherine Kane: Trop loin.
M. Chuck Cadman: C'est cela, jusqu'à la limite du ridicule.
Mme Catherine Kane: Si vous assistez à l'agression, vous pourriez bien être considéré vous-même comme une victime de l'infraction si vous en souffrez psychologiquement ou émotionnellement. Toutefois, nous comptons sur les juges pour qu'ils usent de leur bon sens. Si on a 100 déclarations de victimes venant de voisins, etc., il y aurait peut-être lieu d'exercer une certaine discrétion pour essayer de limiter le nombre.
Par ailleurs, nous voulons éviter la situation dans laquelle l'interprétation serait trop rigide. Il ne faudrait pas, par exemple, en arriver à considérer comme victime la femme de la personne qui a peut-être été tuée, mais pas ses enfants. Nous voulons donc nous assurer d'englober toutes les personnes qui peuvent être considérées comme des victimes.
M. Chuck Cadman: Peut-être pourrais-je mentionner un cas—en fait, j'en ai parlé à la Chambre l'autre jour—mettant en cause une femme que je connais, la mère de la victime d'un homicide. On lui a dit qu'elle n'était pas admissible à une indemnité de victime d'acte criminel puisqu'elle n'avait pas personnellement assisté au meurtre.
De toute évidence nous devons inclure ces gens, à titre de membres de la famille, de parents par le sang.
Mme Catherine Kane: C'est exact.
M. Chuck Cadman: Très bien.
Je ne sais pas si vous pouvez répondre à cette question, mais c'est au sujet du nouveau Centre stratégique pour les victimes. Pourriez-vous nous dire où le projet en est en ce moment? Le mandat a-t-il été établi? A-t-on nommé du personnel? Où en est-on maintenant?
Mme Catherine Kane: Nous progressons certainement. Je m'attends à ce que la ministre en parle lorsqu'elle comparaîtra demain. Un certain nombre des membres du personnel ont travaillé ensemble à la préparation de ce projet de loi. C'était notre première priorité au ministère.
La ministre a dit très clairement que le Centre stratégique sera un service du ministère de la Justice. Elle veut qu'il soit pleinement opérationnel dans les quelques prochains mois.
• 1600
Entre-temps, mes collègues et moi-même avons travaillé à la
mise en oeuvre de recommandations formulées dans le rapport du
comité permanent. C'est la ministre qui nous a donné instruction de
le faire parce que c'était sa première priorité.
M. Chuck Cadman: Très bien.
Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Monsieur Bellehumeur, vous avez sept minutes.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Dans le projet de loi, concernant la protection des témoins de moins de 18 ans, le Bloc avait proposé deux projets de loi privés, dont l'un touchait aux 18 ans et moins, et l'autre, de façon générale, à toute agression d'ordre sexuel.
Je vois que vous avez limité la protection aux personnes de moins de 18 ans, comme le proposait l'un des deux projets de loi. Est-ce que le motif de cette limitation—cette question n'est pas un piège—est tout simplement la Charte?
Mme Catherine Kane: Yes.
M. Michel Bellehumeur: Peut-on dire que le test de la Charte n'aurait pas été passé si l'on avait permis cette protection pour toute personne? Poser la question, c'est y répondre.
M. Yvan Roy (avocat général principal, Section de la politique en matière de droit pénal, ministère de la Justice): C'est effectivement la crainte que nous avons. Vous aurez noté que deux caractéristiques sont visées par ces dispositions: l'âge et le type d'infraction pour laquelle la personne doit témoigner, parce qu'on est confrontés à l'obligation de respecter le droit constitutionnel de la personne de se défendre comme elle le veut et de la façon la plus complète possible. On tente de restreindre ce droit dans des limites qui soient raisonnables et on pense que les critères de l'âge et du type d'infraction permettront de défendre une telle disposition devant les tribunaux. Si on allait plus loin, les risques deviendraient sensiblement plus grands, à notre avis.
M. Michel Bellehumeur: Jusqu'à maintenant, la protection s'étendait jusqu'à 14 ans. Y a-t-il déjà eu une contestation au niveau constitutionnel, devant les tribunaux, du fait qu'on n'était pas en mesure d'interroger directement les témoins de moins de 14 ans?
M. Yvan Roy: Je ne pense pas qu'il y ait eu à ce jour de contestations à cet égard. S'il y en a eu, elles ne sont pas venues à ma connaissance.
[Traduction]
Je ne crois pas que Catherine ait connaissance d'une affaire de ce genre non plus. Est-ce que je me trompe?
Mme Catherine Kane: La jurisprudence ne fait absolument pas état d'affaires portant sur l'application de cette disposition. Nous avons demandé à nos collègues provinciaux de nous dire comment elle s'applique actuellement. Je crois qu'on ne s'en sert pas beaucoup en ce moment, mais nous nous attendons à ce qu'on y ait recours parce qu'il y a de plus en plus d'accusés qui veulent assumer eux-mêmes leur propre défense.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Ma dernière question touche au point que vous abordé tout à l'heure et qui relève de la ministre. D'après ce que je comprends, pour tout ce qui concerne le bureau national, il n'y a rien de défini ou de planifié à l'heure actuelle, et c'est la ministre qui fera la déclaration demain. Est-ce bien le cas?
M. Yvan Roy: Il y a sûrement une chose qui est déterminée. Je peux voir la direction dans laquelle vous allez.
M. Michel Bellehumeur: Quelle sera la loi, entre autres?
M. Yvan Roy: La tâche de ce bureau ne sera pas de fournir des services aux victimes, par respect pour les juridictions provinciales en ces matières. Ce bureau s'occupera des politiques relativement aux victimes.
M. Michel Bellehumeur: Mais où voit-on ça?
M. Yvan Roy: Au sein du ministère de la Justice.
M. Michel Bellehumeur: On en fait mention dans le communiqué, mais y a-t-il, à l'heure actuelle, d'autres écrits sur les intentions de la ministre concernant ce bureau?
M. Yvan Roy: Lorsque la ministre a déposé le projet de loi, la semaine passée, il y a eu des questions à cet égard et elle y a répondu dans le sens que je vous indique. On n'a pas encore écrit le mandat de la section.
M. Michel Bellehumeur: Merci.
Le président: Merci, monsieur Bellehumeur.
Monsieur Peter MacKay.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur Roy et madame Kane, merci beaucoup de votre présentation.
[Traduction]
Pour faire suite à ce qui vient d'être dit—mais je ne veux pas trop insister sur ce point—, je crois comprendre que, pour vous, ce ne serait pas un bureau chargé de fournir des renseignements aux victimes. Il n'assumera pas un rôle d'ombudsman. Il ne disposera pas d'un budget particulier.
Mme Catherine Kane: La question d'un ombudsman a été examinée en détail par le comité.
M. Peter MacKay: C'est exact.
Mme Catherine Kane: Si je me souviens bien, le rapport du comité mentionnait qu'il conviendrait peut-être de considérer les besoins d'information des victimes au sujet de détenus incarcérés dans des établissements fédéraux, que cela constituerait un rôle approprié pour les pouvoirs fédéraux et qu'il serait utile que la question soit examinée par le sous-comité qui s'occupe de la loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
Dans la réponse du gouvernement aux recommandations du comité relatives à l'établissement d'un bureau pour les victimes, la ministre avait clairement dit qu'elle envisageait quelque chose de différent, qu'il s'agirait plutôt d'un centre stratégique faisant partie du ministère de la justice et qui respecterait pleinement les compétences respectives du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux.
• 1605
Comme vous le savez, la communication à une victime de
renseignements concernant le cas dans lequel elle a été impliquée
ne peut être faite que par la personne responsable de l'enquête ou
de la poursuite. Autrement dit, c'est une question qui relève
toujours de la compétence provinciale. Le gouvernement fédéral
n'est pas habilité à fournir des renseignements à ce sujet. Nous ne
disposons d'ailleurs pas de ces renseignements. Le centre
stratégique ne fournirait de l'information que sur l'ensemble du
système de justice pénal.
La réponse du gouvernement précisait que le centre stratégique aurait trois grands objectifs: coordonner toutes les initiatives fédérales, veiller à ce que le point de vue des victimes soit pris en considération lors de l'élaboration des politiques et des projets de loi et améliorer davantage le réseau fédéral-provincial- territorial que nous avons établi pour savoir ce qui se passe ailleurs. Nous serons peut-être en mesure de renvoyer des gens à d'autres organismes, mais nous ne leur fournirons pas directement de l'information. Nous pourrions les mettre en contact avec les responsables de leur province ou, si possible, des responsables locaux.
Un réseau fédéral-provincial pourrait également explorer les questions d'intérêt commun. La justice réparatrice est un bon exemple: qu'est-ce qui se passe dans chaque juridiction, quels sont les problèmes et quels sont les nouveaux développements.
Un troisième objectif du centre stratégique serait de faire la liaison avec tous les éléments du système de justice pénale à l'extérieur du gouvernement, de veiller à ce que nous soyons bien au courant des préoccupations des défenseurs des victimes, des fournisseurs de services d'aide aux victimes, de la police, des avocats de la défense, etc. Nous aurions ainsi une capacité permanente de consultation ou de liaison nous permettant de nous familiariser avec les difficultés avant qu'elles ne deviennent trop graves et d'essayer de trouver de bonnes solutions aux problèmes qui se posent.
M. Peter MacKay: Je ne voudrais pas vous mettre des mots dans la bouche, mais vous nous dites que les informations après coup que les victimes rechercheraient après un procès, lorsque le délinquant est incarcéré, ces renseignements de compétence fédérale pourraient être fournis par le Service correctionnel du ministère du Solliciteur général.
Mme Catherine Kane: S'il s'agit d'un délinquant détenu dans un établissement fédéral, ce serait effectivement le meilleur endroit pour le faire.
M. Peter MacKay: Très bien.
J'ai à vous poser une question plus précise, madame Kane. Je ne sais pas si vous pouvez y répondre ou nous dire si la chose est envisagée. Je ne crois pas que cette question ait été soulevée au cours des délibérations du comité.
Le paragraphe 486(1.1) proposé mentionne expressément l'agression sexuelle et les crimes de violence, mais je me demande si on a envisagé d'inclure dans l'article 486 le «harcèlement criminel», qui ne s'inscrit pas dans la définition classique de la violence, bien que ses effets soient souvent les mêmes.
Mme Catherine Kane: Le paragraphe 486(1.1) proposé comprend les infractions sexuelles et les infractions dans lesquelles «est alléguée l'utilisation, la tentative ou la menace de violence» contre une personne. Dans beaucoup d'infractions de harcèlement criminel, la menace de violence existe. Ces cas s'inscriraient donc dans le paragraphe 486(1.1) proposé, à titre de disposition interprétative.
M. Peter MacKay: Oui, le harcèlement comprend parfois des menaces de violence, mais il arrive que ce ne soit rien que cela, du harcèlement: on suit une personne, on lui téléphone, on se poste devant sa maison, on circule en voiture dans les rues voisines, on la suit jusqu'au travail, etc., comme vous le savez. Ainsi, s'il n'y a aucun élément de violence, le harcèlement criminel ne s'inscrit pas dans cette définition.
Mme Catherine Kane: Mais quelle protection particulière recherchez-vous qui ne soit pas déjà disponible à l'article 486? Le paragraphe 486(1.1) proposé vise l'exclusion de membres du public de la salle du tribunal, mais pas de l'accusé—il sera là—ainsi que la restriction du contre-interrogatoire personnel. Dans des cas extrêmes, je dirai que ce que vous décrivez pourrait être interprété comme un crime de violence.
M. Peter MacKay: D'après votre réponse, donc, je comprends qu'il appartiendra encore au juge de décider si le harcèlement criminel s'inscrit ou non dans la disposition.
Mme Catherine Kane: Oui.
M. Peter MacKay: Très bien.
En ce qui concerne le paragraphe 486(1.2) proposé, les dispositions semblent correspondre à ce que demandait mon collègue, M. Bellehumeur.
Je crois que c'est Pierrette Venne qui a déposé un projet de loi d'initiative parlementaire proposant d'éliminer toute limite d'âge au paragraphe 486(2.3).
Mme Catherine Kane: C'est exact.
M. Peter MacKay: S'agit-il d'un oubli de notre part et de la part du ministère, si l'âge inscrit au paragraphe 486(1.2) n'a pas été porté à 18 ans aussi? Je vois que l'âge prévu est encore de 14 ans.
Mme Catherine Kane: C'est une très bonne question. Vous aurez probablement remarqué que le Code criminel comprend toute une série d'âges différents auxquels certaines protections et certaines infractions s'appliquent. Il n'y a pas beaucoup de cohérence dans les âges, que ce soit 14 ou 18 ans.
Un projet est actuellement en cours en vue de rationaliser tous les âges figurant dans le Code criminel, y compris, par exemple, l'âge de consentement aux relations sexuelles. Il y a un grand débat sur ce qui constitue l'âge approprié. Toutefois, il n'y a pas d'âge magique. Les enfants se développent à des rythmes différents. Il est donc difficile de déterminer l'âge exact qui devrait figurer dans le Code criminel.
Je conviens avec vous qu'il semble incohérent d'avoir 18 ans au paragraphe 486(2.3) proposé et 14 ans au paragraphe 486(1.2) proposé. C'est peut-être un point que les membres du comité voudront examiner plutôt que d'attendre une autre série d'amendements qui viendraient plus tard pour essayer d'harmoniser tous ces âges.
M. Peter MacKay: Je vais peut-être demander à M. Roy d'intervenir à ce sujet, mais je voudrais que vous me disiez d'abord si vous ne voyez pas là une incohérence, surtout si on accorde l'appui d'une personne de confiance à un témoin de 15 ans par opposition à un autre de 14 ans? Je trouve que c'est une sérieuse anomalie. Il y a beaucoup de jeunes de 17 et 18 ans qui ont probablement moins de maturité et sont plus timides qu'un garçon de 12 ans lorsqu'ils se présentent devant un tribunal et qui ont besoin alors de l'appui d'une autre personne.
Mme Catherine Kane: C'est très vrai. Il s'agit d'une disposition discrétionnaire qui s'appliquerait si un témoin demande cette protection. On peut donc imaginer des situations où un jeune de 18 ans demande l'appui d'une personne de confiance tandis qu'un garçon ou une fille de 12 ans n'en veut pas ou n'en a pas besoin. Il appartiendra au juge de décider.
Mais je crois que la disposition prévoyant l'âge de 14 ans figure dans le Code criminel depuis 1994.
M. Yvan Roy: Je ne crois pas qu'il y ait nécessairement une contradiction entre des dispositions qui prévoient 18 ans ou 14 ans, parce qu'à mon avis le Code vise des objectifs différents dans les deux circonstances.
Si on considère le paragraphe 486(1.1) proposé, quel est l'objectif recherché? On veut éviter que le témoin ne soit intimidé. Nous voyons souvent des cas où l'intimidation est utilisée de propos délibéré. Certaines personnes tirent du plaisir de la torture qu'elles infligent aux témoins au cours d'un contre- interrogatoire. Et je n'utilise pas ce mot de torture à la légère.
Je crois qu'il conviendrait peut-être de proposer un amendement afin de porter cet âge à 18 ans, compte tenu du genre de comportement dont je viens de parler. Il appartiendra en fait au juge de peser les intérêts de l'accusé, d'une part, et de la victime, de l'autre.
Comme je l'ai dit en réponse à la question de M. Bellehumeur, les deux facteurs en cause sont le type d'infraction et l'âge de la personne.
Le paragraphe 486(1.2) proposé vise un autre objectif, comme on peut s'en rendre compte en le lisant. Il a pour but d'autoriser la présence d'une personne de confiance. L'objet de l'amendement, en ce moment, est de prendre en compte dans l'équation le fait que les gens qui ont un handicap devraient bénéficier de certains avantages.
Je ne suis pas sûr d'avoir tout de suite les données, les renseignements ou les connaissances nécessaires pour assurer la protection des témoins de 18, 16, 14 ou 15 ans. Comme Catherine l'a dit, je dois reconnaître en toute franchise que la façon dont l'âge est déterminé est un peu arbitraire à l'heure actuelle. Nous avons des dispositions qui parlent de 14, de 16 et de 18 ans. À 14 ans, nous croyons être en mesure de défendre une disposition de ce genre devant les tribunaux. En assurant la protection à des personnes qui ont un handicap, nous avons encore la conviction de pouvoir défendre ce point de vue.
Si vous dites qu'il faut remonter la limite d'âge, nous ne sommes plus aussi sûrs. Voilà pourquoi nous n'avons pas changé le chiffre. Si, au cours des prochains jours, vous entendez des témoins qui mettent ce point en évidence et qui vous présentent certains éléments de preuve, alors nous pourrions certainement songer à un amendement. En ce moment, cependant, nous aurions des hésitations à le faire.
M. Peter MacKay: Très bien.
J'ai une dernière petite question.
Le président: Il faudrait qu'elle soit très courte, monsieur MacKay.
M. Peter MacKay: Il n'y a aucune mention de dédommagement à l'article concernant les suramendes compensatoires. Je veux dire que le dédommagement demeure une option que peut choisir le juge qui détermine la peine.
Je note également que la Loi sur le système de justice pénal pour les adolescents ne prévoit pas de suramende compensatoire. Autrement dit, les dispositions que nous examinons ne se rattachent pas à cette nouvelle loi.
Je suppose que nous aurons l'occasion d'en discuter lorsque nous serons saisis du projet de loi C—68, mais est-ce que cela a été envisagé par le ministère?
Mme Catherine Kane: Il y a une disposition dans la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents concernant les suramendes compensatoires. La disposition n'est pas exactement la même. Elle est discrétionnaire. Le juge qui détermine la peine peut infliger une suramende pouvant atteindre 15 p. 100 de l'amende. Elle ne peut être imposée que s'il y a une amende. Cela correspond au besoin de tenir compte de la capacité de payer l'amende et la suramende.
Il y a en outre une disposition complémentaire qui permet à une province d'affecter un pourcentage de toutes les amendes imposées au Fonds d'aide aux victimes d'actes criminels. Par conséquent, la question a été réglée de deux façons légèrement différentes de celles que nous avons adoptées dans le Code criminel. L'imposition d'une suramende obligatoire automatique ne concordait pas avec les principes sur lesquels se fonde la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Les responsables étaient tout à fait conscients des recommandations du comité et ils en ont tenu compte, mais ce n'est pas l'amendement qui a abouti à l'article 52 de cette loi.
Le président: Merci, monsieur MacKay.
Monsieur Lee.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Madame Kane, j'ai encore relu le préambule, qui est très complet. La plupart des membres du comité sont heureux de voir un préambule qui permet à une mesure législative de résister à un examen en vertu de la Charte. Je suis sûr que le ministère de la Justice a ses propres raisons de vouloir garantir le projet de loi contre un examen en vertu de la Charte. À la Chambre, nous, qui représentons l'électorat et le gouvernement élu, avons également nos propres raisons.
Dans le préambule et dans le projet de loi, nous avons réétalonné un certain nombre de contrôles très fins établis en vertu de la Charte et de nos lois générales. Ce sont les contrôles qui assurent l'équilibre entre la victime et l'accusé, entre le témoin et le délinquant, entre la victime et le public, entre l'État et le contrevenant et entre le témoin et le public.
Quand je dis «public», ce terme comprend souvent les médias qui, agissant au nom de leurs lecteurs, sont des observateurs avides et voraces des poursuites au criminel.
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): En êtes-vous sûr?
M. Derek Lee: Il faut bien qu'ils produisent de la copie.
Pouvez-vous nous expliquer, de votre point de vue, où ont été faits les rééquilibrages les plus importants dans ce projet de loi? Je suppose que c'est dans les secteurs où il nous faut considérer le plus étroitement les dispositions de la Charte. C'est mon hypothèse.
Pouvez-vous nous dire où vous croyez que les rééquilibrages les plus significatifs ont été réalisés?
Mme Catherine Kane: À mon avis, nous n'avons rien changé qui réduise le moins du monde les droits de l'accusé. Nous avons introduit dans le processus la nécessité de tenir compte des intérêts et des préoccupations des victimes. Les énoncés qui figurent dans le préambule sont essentiellement tirés de la common law, telle qu'elle a été exprimée par la Cour suprême du Canada: il n'y a pas de hiérarchie dans les droits prévus dans la Charte et ces droits doivent être conciliés et équilibrés dans toute la mesure du possible.
Les secteurs dans lesquels cette disposition du préambule sera probablement invoquée le plus souvent concernent peut-être la limitation de la publication, parce que nous nous attendons à être accusés de limiter le principe de la transparence. Toutefois, il y a une jurisprudence abondante provenant de la Cour suprême du Canada, qui établit clairement que la transparence constitue le principe—ce qui se reflète évidemment dans le projet de loi—, mais qu'il y a des circonstances dans lesquelles le secret sera dans une certaine mesure essentiel à la bonne administration de la justice et où les limites peuvent se justifier si elles sont soigneusement établies.
Par conséquent, la disposition concernant la limitation de la publication est un secteur où il faudra réaliser cet équilibre. Les facteurs énoncés dans le projet de loi couvrent pratiquement tous les intérêts variés ou contraires dont il faut tenir compte: liberté de la presse, droits de l'accusé, droit du public à un procès équitable et transparent et droit des témoins ou des victimes à la protection de la vie privée, à la sécurité, etc.
M. Derek Lee: Croyez-vous que, pour nous, législateurs, le projet de loi exprime la conviction que les rééquilibrages effectués doivent favoriser la victime? S'il y a ici un ordre de préséance, nous avons décidé de prendre la part de la victime plutôt que de défendre le droit du public à la transparence. C'est peut-être un droit ou c'est peut-être autre chose, mais...
Mme Catherine Kane: Je crois que les amendements et le préambule établissent clairement que nous ne prenons parti pour personne, ni pour la victime ni pour le délinquant. Nous voulons seulement montrer clairement qu'il y a plus de deux parties en présence, plus que la Couronne et l'accusé. Il y a également la victime et tous les droits en cause doivent être examinés et pris en compte.
Dans un cas particulier, l'application de ces dispositions pourrait donner l'impression qu'une partie ou l'autre a remporté la victoire, mais dans le projet de loi lui-même, s'il est appliqué d'une manière conforme à la Charte, comme les juges doivent le faire lorsqu'ils usent de discrétion, les décisions se prendront au cas par cas.
M. Derek Lee: Oui, mais notre travail, madame Kane, c'est de frapper juste. Je sais que je ne veux pas renvoyer la balle à une centaine de tribunaux d'un bout à l'autre du pays pour que des juges décident qui sera premier et qui sera second.
J'espérais que vous seriez en mesure de nous montrer les dispositions du projet de loi qui établissent que le Parlement a voulu exprimer fermement son point de vue sur les priorités à respecter. Je n'ai pas envie d'entendre que nous n'avons pas vraiment tranché l'affaire, que la décision appartient à un juge du Manitoba ou de la Nouvelle-Écosse et qu'à son tour, cette décision sera à la merci d'une cour d'appel ailleurs, pour finir par aboutir à côté, rue Wellington, à la Cour suprême.
Mme Catherine Kane: Si nous avions un projet de loi comportant dans tous les cas un parti pris en faveur des victimes, il serait jugé par un seul tribunal, la Cour suprême du Canada. Et, en moins de deux, nous serions de retour ici pour le modifier.
M. Derek Lee: Non, non. Madame Kane, le Parlement est tout à fait capable de prendre ses décisions. Je vous demande de nous dire si nous l'avons clairement exprimé dans le préambule.
J'ai l'impression que votre ministère a rédigé le texte de façon à éviter de trancher, que vous avez mentionné tous ces équilibres à réaliser sans les atteindre vous-même.
Mme Catherine Kane: Si nous devions tout trancher nous-mêmes, nous ne serions pas en mesure de vous dire que le projet de loi est conforme à la Charte. Si le préambule ne reflète pas le point de vue du Parlement, il appartiendra aux députés de le dire et d'apporter les modifications appropriées. Dans sa forme actuelle, le projet de loi peut résister à un examen en vertu de la Charte. Pour nous et pour la ministre de la Justice, il imposera de tenir compte des intérêts des victimes parmi toute la gamme des intérêts qu'il faut prendre en compte avant de rendre une décision.
M. Derek Lee: Voulez-vous dire que la Charte empêche le Parlement de parler net et de dire que les dispositions du projet de loi sont là pour profiter aux victimes?
Mme Catherine Kane: Si vous pouviez être un peu plus précis au sujet de ce que vous voudriez voir dans un article particulier du Code criminel, je pourrais sans doute mieux vous répondre.
M. Derek Lee: Très bien. J'ai peut-être un peu trop parlé dans l'abstrait.
M. Peter MacKay: Non, pas vous!
M. Chuck Cadman: Jamais de la vie!
M. Derek Lee: Oh, oh!
Je vais peut-être partir à la recherche de quelques bons exemples pendant que d'autres collègues poursuivent.
Le président: M. Roy a un commentaire.
M. Yvan Roy: J'allais moi-même proposer un exemple de ce que vous voudrez peut-être discuter plus en détail. Le problème, c'est que nous avons un certain nombre d'intérêts en jeu. Si je vous comprends bien, vous dites qu'il y a certaines choses pour lesquelles il est clair que la victime devrait avoir le dessus. Je ne suis pas sûr qu'il soit possible de réaliser une chose de ce genre dans ce projet de loi à cause des intérêts concurrents et de tous les différents facteurs dont il faut tenir compte.
• 1625
Si vous avez beaucoup de facteurs à prendre en considération,
vous et moi savons bien que quelqu'un devra décider qui obtient
quoi et dans quelles circonstances. Il serait difficile pour moi de
proposer une meilleure solution qu'un arbitre qui aurait à se
prononcer à un moment donné et qui, dans notre système, est
représenté par les tribunaux.
Bien sûr, cela causera des problèmes. Je n'ai cependant pas l'impression qu'un juge de la Nouvelle-Écosse prendra une décision allant dans une certaine direction et qu'un juge du Manitoba ira dans la direction contraire. Il faudra bien concilier les points de vue à un moment donné, à un niveau supérieur.
M. Derek Lee: Très bien.
M. Yvan Roy: Je crains bien que ce ne soit là le système...
M. Derek Lee: Vous n'avez rien à craindre.
M. Yvan Roy: ... dans lequel nous devons vivre, mais cela vous aura donné l'occasion de proposer quelque chose de plus précis.
M. Derek Lee: Examinons le paragraphe 3 du préambule. Pour moi, c'est ce qu'on appelle tourner autour du pot. Ce paragraphe pourrait tout simplement disparaître.
Voici le texte:
-
Attendu [...] qu'il reconnaît [...] la protection des droits
garantis [...] et qu'en cas de conflit entre les droits des accusés
et ceux des victimes et des témoins d'infractions, l'équilibre
entre ces droits doit être assuré dans la mesure du possible;
Est-ce que cela ne revient pas à répéter les dispositions de la Charte?
Mme Catherine Kane: Oui, dans une certaine mesure.
M. Derek Lee: Je pensais que nous aurions profité du préambule pour dire que ce projet de loi représente un virage, que le Parlement veut accorder une plus grande place à la position des victimes. Nous comprenons que les autres ont des droits, qu'il faut réaliser l'équilibre des droits, mais nous voulons laisser plus de place au point de vue des victimes. Je ne crois pas que cette partie du projet de loi va très loin dans ce sens.
M. Yvan Roy: À mon avis, ce paragraphe va aussi loin que nous puissions aller et je vais vous dire pourquoi.
Nous avons la possibilité d'exposer la situation qui a traditionnellement régné dans le pays, à savoir que les droits des accusés avaient toujours la priorité. Comme certains de ces droits ont été énoncés et figurent maintenant dans la Charte des droits et liberté, les droits des autres, qu'il s'agisse des victimes, de la presse, etc., sont secondaires. Chaque fois qu'il y a conflit, un juge dira: «Toutes mes excuses, mais les droits de l'accusé ont la priorité.»
Dans l'affaire Dagenais, que Catherine vient de mentionner en parlant de l'interdiction de publier, la Cour suprême du Canada a dit une chose extrêmement importante: les droits constitutionnels n'ont pas priorité les uns sur les autres. Les juges doivent considérer les droits de l'un et les comparer aux droits de l'autre et tenter de réaliser l'équilibre. C'est cela que dit essentiellement le paragraphe en question du préambule.
En d'autres termes, au lieu de dire que les droits de l'accusé viennent toujours en premier, nous demandons à suivre la voie ouverte par la Cour suprême du Canada: nous disons donc que ces droits—et le Parlement ferait alors une déclaration très énergique—doivent être équilibrés. Un juge ne pourra plus dire: «Je regrette, mais les droits de l'accusé doivent primer dans ces circonstances.» C'est ce que nous avons essayé d'exprimer dans ce paragraphe. Il ne dit pas cependant que les droits de la victime doivent primer sur ceux de l'accusé parce que, dans la décision que nous venons de mentionner, la Cour suprême n'a pas dit cela non plus.
J'ai l'impression, par conséquent, que nous aurions beaucoup de difficultés si nous essayions de dire quelque chose de ce genre.
M. Derek Lee: Le Parlement pourrait le faire.
M. Yvan Roy: Vous pouvez essayer, si vous voulez.
M. Derek Lee: Nous avons sûrement le droit de le faire.
M. Yvan Roy: Bien sûr. Mais je ne crois pas que vous puissiez gagner devant un tribunal quelconque du pays ou devant la Cour suprême du Canada.
M. Derek Lee: Le Parlement gagne toujours. Nous ne perdons jamais. C'est nous qui écrivons les lois.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur Lee, nous devons poursuivre. Votre temps est déjà expiré.
Nous passons maintenant à des périodes de trois minutes, en commençant par M. Cadman.
M. Chuck Cadman: Je ne voulais pas aborder cette question, mais je vais le faire maintenant parce que je crois que c'est le moment.
Nous avons eu un cas chez nous, à Surrey, où une personne a été accusée d'avoir violé trois femmes enceintes. Au cours d'une perquisition dans l'appartement ou la maison de cet homme, la police a découvert dans l'armoire à pharmacie un médicament pour le SIDA. C'est ainsi que les victimes ont appris que l'homme était séropositif.
La plupart des gens, je crois, diraient que la loi devrait permettre d'imposer des tests de séropositivité aux personnes accusées d'agression sexuelle afin d'accorder au moins ce soulagement aux victimes.
Mais si on dit qu'il faut attendre que l'affaire passe par toutes les étapes judiciaires, combien de temps cela va-t-il prendre? Pendant combien de temps la victime doit-elle rester dans l'incertitude, se demandant si elle est elle-même séropositive?
Où en sommes-nous sur les questions de ce genre?
Mme Catherine Kane: Beaucoup de gens sont aux prises avec cette question: faut-il imposer des tests? Il est très difficile de dire oui dans la perspective de la Charte. En ce qui concerne l'accusé, il y a la présomption d'innocence, mais d'un point de vue plus pratique et dans l'intérêt de la personne victime de l'agression sexuelle, la documentation médicale établit très clairement que les tests effectués sur l'agresseur ne sont pas la solution. Les victimes doivent elles-mêmes subir des tests. La profession médicale prend toutes les mesures nécessaires pour que les tests appropriés soient effectués dans les délais voulus pour déceler le virus. Il y a des situations dans lesquelles même si l'accusé était soumis à des tests, on pourrait obtenir de faux positifs ou de faux négatifs, ce qui n'est d'aucun réconfort pour les victimes. Il faut qu'elles soient elles-mêmes testées.
Par conséquent, les tests effectués sur l'agresseur, qu'ils soient obligatoires ou non, ne permettent pas de rassurer les victimes.
M. Chuck Cadman: Non, je comprends tous les arguments médicaux. Je considérais les choses du point de vue d'une victime d'agression sexuelle qui cherche au moins le soulagement de savoir que son agresseur n'était pas séropositif.
Bien sûr, elle devra elle-même se soumettre à des tests, mais il serait beaucoup plus pratique si elle pouvait savoir d'avance que l'accusé a été testé et qu'il n'était pas positif.
Mme Catherine Kane: Toutefois, cela ne résoudrait pas le problème parce qu'un test négatif pourrait tout simplement signifier que le virus ne s'est pas encore manifesté ou n'est pas encore décelable à ce stade, parce que la personne a pu être infectée très récemment, avant l'agression commise sur la victime.
Il est donc courant maintenant, que le VIH soit en cause ou non, que les femmes victimes d'agression sexuelle subissent toute la batterie de tests jusqu'à ce qu'on puisse les assurer qu'elles n'ont pas été infectées.
C'est une malheureuse réalité des temps que nous vivons, mais c'est dans leur propre intérêt que nous devons agir ainsi.
M. Chuck Cadman: Je crois que c'est une question avec laquelle nous serons aux prises pendant longtemps, je n'en doute pas.
Le président: Merci, monsieur Cadman.
Monsieur Bellehumeur.
M. Michel Bellehumeur: Non.
Le président: Monsieur Peter MacKay.
M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président.
J'ai une autre question à poser au sujet des suramendes compensatoires et de leur application en vertu du projet de loi. Je sais, par expérience et pour avoir travaillé avec la Couronne, qu'il est très difficile de percevoir ces suramendes, tout autant qu'il est difficile de percevoir les pensions alimentaires dans le contexte du droit familial.
J'aimerais donc savoir si, en même temps que le projet de loi, le ministère prend d'autres mesures pour aider les provinces, d'un point de vue administratif, à mettre en oeuvre ce nouveau régime très ferme de suramendes compensatoires.
Mme Catherine Kane: Comme vous le savez, la perception a toujours été un problème. La perception relève des provinces, parce que ce sont elles qui conservent les recettes. Les mêmes mécanismes servent à percevoir les amendes et les suramendes.
Les modifications apportées dans le projet de loi C-51 établissent clairement que les dispositions qui permettent de suspendre ou de révoquer un permis ou une licence s'appliquent également aux suramendes. Nos collègues provinciaux nous disent que le moyen le plus efficace de percevoir ces petits montants est de les réclamer lorsque les gens renouvellent leur permis de conduire, par exemple, ou essaient d'obtenir un permis de pêche, etc. S'il y a une amende impayée, ils accepteront à ce moment de débourser les 50 $ ou les 100 $ qu'ils doivent.
Nous avons pris l'engagement, dans le cadre de notre groupe de travail, d'examiner ensemble les stratégies de mise en oeuvre afin de trouver des pratiques optimales, pour ainsi dire, que chaque juridiction pourrait adapter à ses propres conditions afin de percevoir les suramendes.
Nous aimerions également déterminer combien d'argent est perçu et à quoi il sert. Si nous pouvons donner des exemples d'utilisation des recettes des suramendes, cela pourrait encourager plus de gens à acquitter ce qu'ils doivent.
M. Peter MacKay: A-t-on envisagé—et je tremble rien qu'à y penser—de faire intervenir le ministère du Revenu national? Le ministère est passé maître dans l'art de trouver jusqu'au dernier cent dans la poche des gens, alors comme nous parlons ici de criminels qui...
Mme Catherine Kane: Pas en ce moment, parce que ces processus coûtent extrêmement cher à mettre en place. Une analyse coûts- avantages montrerait que, pour permettre au gouvernement fédéral de percevoir ces montants au nom des provinces puis de les leur transmettre, il faudrait établir une énorme bureaucratie.
M. Peter MacKay: Nous ne voudrions sûrement pas de cela.
Mme Catherine Kane: Cela ne profiterait vraiment pas aux victimes à long terme.
• 1635
Il y a parfois des compromis. Les agences de perception provinciales
peuvent se dire que le jeu n'en vaut pas la chandelle, mais nous
espérons que, dans l'ensemble, il y aura une augmentation sensible des
recettes.
M. Peter MacKay: Très bien.
Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur John McKay.
M. John McKay: Pour revenir à votre définition de «victime», est-ce qu'une victime, c'est une personne dont le juge dit que c'est une victime?
Mme Catherine Kane: Il y a une définition précise qui s'applique dans le cas de la déclaration de la victime. Dans les autres dispositions où nous avons utilisé le mot «victime», il s'agit presque d'un nouveau terme dans le Code criminel. Dans le passé, nous avions «plaignant» ou simplement «témoin». Nous n'avons pas vraiment établi «victime». Par conséquent, la définition à l'article 2 n'en est pas vraiment une. C'est simplement un éclaircissement.
Elle dit:
-
«victime» S'entend notamment de la victime d'une infraction
présumée.
Cela permet d'éviter l'argument selon lequel il ne peut pas y avoir une victime tant qu'il n'y a pas déclaration de culpabilité, mais nous comptons sur le sens couramment donné à ce mot.
Nous pourrions donc avoir une situation dans laquelle le juge dit: «Oui, je pense que vous êtes une victime.» Je m'attends cependant à ce que la plupart des juges adopteront la définition que nous avons donnée aux fins de la déclaration de la victime. Il semble y avoir une compréhension commune de ce qu'est une victime.
M. John McKay: Ainsi, la définition donnée aux fins de la déclaration de la victime servira en pratique partout.
Mme Catherine Kane: Oui, parce que cette définition est généralement acceptée.
M. John McKay: Vous avez entendu ma collègue de Parkdale—High Park à la Chambre hier. Elle essayait de prouver qu'une collectivité pouvait et devait être considérée comme une victime.
Je ne connais pas suffisamment la mesure législative pour avoir une opinion, mais que dites-vous de ce point de vue?
Mme Catherine Kane: Nous sommes au courant de l'utilisation des déclarations communautaires. La plupart du temps, elles ne sont pas présentées aux tribunaux, mais servent dans un contexte de justice réparatrice dans lequel la collectivité a affaire à des délinquants dont les infractions—je ne veux pas dire ne font pas de victimes, mais pour lesquelles il n'y a pas de victime directe, comme dans le cas de la prostitution ou de certaines infractions relatives à de petites quantités de drogue, et où la collectivité essaie de trouver une sentence appropriée. Il y a un mouvement croissant en direction des comités de justice pour adultes. Dans ces situations, les déclarations communautaires sont utilisées.
M. John McKay: Cela voudrait dire que, dans certaines circonstances, elle aurait raison.
Mme Catherine Kane: Oui, cela arrive.
M. John McKay: Cela peut donc arriver et il n'y a rien qui s'y oppose.
Mme Catherine Kane: Cela pourrait arriver et un projet de loi n'est pas nécessaire pour cela.
M. John McKay: Très bien.
Ma seconde question porte sur les suramendes dont M. MacKay a parlé. Sommes-nous en train de créer ici quelque chose qui va susciter des attentes parmi les victimes, même si l'on sait qu'il n'y a pas de dédommagement et que même si on dit que le montant représente une suramende compensatoire pour les victimes, il n'ira pas vraiment à la victime, mais sera versé dans une caisse quelconque où il sera perdu à jamais?
Je crains donc dans une certaine mesure que cela ne suscite des attentes. Une amende de 10 000 $ donne lieu à une suramende compensatoire de 1 500 $. Dans ce cas, certaines personnes vont demander: «Où est mon chèque?» Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Catherine Kane: Les dispositions concernant les suramendes compensatoires n'empêchent pas un juge de rendre une ordonnance de dédommagement, s'il croit que cela est approprié. Si un délinquant doit verser un dédommagement à une victime, cela aurait priorité même sur le paiement d'une suramende compensatoire. Le Code définit les priorités relatives de paiement et le dédommagement est toujours en tête de liste.
Les victimes connaissent assez bien maintenant les dispositions relatives à la suramende compensatoire. Il a toujours été clair que les recettes vont à l'ensemble des victimes. Certaines provinces annoncent publiquement ce qu'elles font de ces recettes.
L'argent ne va pas dans un trou quelconque. Il est versé dans une caisse réservée à cette fin. Les provinces dépensent dix fois plus en services d'aide aux victimes, dont elles peuvent faire une énumération détaillée.
Je crois donc que la plupart des victimes croient que les recettes tirées de la suramende sont bien utilisées, même si elles ne vont pas directement dans leurs poches. Il en est de même des dédommagements. Autrement, certaines victimes recevraient de l'argent et d'autres n'en recevraient pas parce que certains contrevenants ont la capacité de payer et d'autres pas. L'avantage des recettes tirées de la suramende compensatoire est qu'elles profitent à l'ensemble des victimes, qui peuvent se prévaloir des services assurés à l'aide de cet argent.
M. John McKay: J'aimerais soulever un dernier point au sujet de la question de M. Lee sur le préambule. Je dois avouer avoir trouvé que le troisième paragraphe reflétait bien les passages du rapport Les droits des victimes - Participer sans entraver relatifs à la preuve. Avec tout le respect que je dois à mon cher collègue, je dois dire qu'en écoutant le témoignage, je n'ai pas eu l'impression qu'on s'attaquait au droit fondamental de l'accusé à la présomption d'innocence et ainsi de suite.
Je ne suis donc pas disposé à critiquer ce paragraphe.
Mme Catherine Kane: Merci.
Le président: Merci, monsieur McKay.
Madame Bakopanos.
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): J'espère que cette question n'a pas déjà été posée. J'ai dû sortir un moment pour une émission sur le câble.
J'aimerais en savoir davantage sur la façon dont vous assurez la sécurité de la victime dans les décisions concernant la mise en libération sous caution. Je sais que nous essayons de modifier le Code criminel pour assurer la participation de la victime à tout le processus. L'une des préoccupations exprimées lorsque nous avons organisé la table ronde portait sur la sécurité des victimes qui craignaient de tomber face à face avec un contrevenant qui aurait été libéré sous caution ou sous condition.
J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus à ce sujet. Assurer la sécurité de la victime est très bien. En d'autres termes, s'assurer que le juge ou le juge de paix prend ce facteur en considération est une bonne chose, mais, pour être honnête, j'ai toujours pensé que c'était le cas. J'ai toujours pensé que le juge en tenait compte.
De quelle façon améliorons-nous la situation? Je ne veux pas me servir du mot «garantie», mais de quelle façon le faisons-nous? Ce n'est pas entièrement une responsabilité fédérale, cela relève certainement des provinces. Il est également évident que la police joue un rôle en veillant au respect des conditions de libération établies par le tribunal. Mais nous savons qu'il y a toujours des gens qui passent à travers les mailles du filet et qu'un jour ou l'autre, la victime se trouvera face à face dans la rue avec le contrevenant.
Que devons-nous faire pour renforcer les dispositions qui existent déjà et pour nous assurer que cela n'arrivera pas?
Mme Catherine Kane: Vous avez tout à fait raison de dire qu'il n'y aura jamais de garanties, mais nous espérons qu'il y aura des améliorations sensibles. Je crois que, dans beaucoup de cas ou dans la plupart, la personne qui prend une décision au sujet de la libération sous caution prend en considération la sécurité de la victime. Ces dispositions mettront en évidence le fait qu'en assurant la protection du public, il faut également assurer la sécurité de la victime qui est un membre du public.
Nous avons entendu parler de diverses situations, et vous aussi, surtout dans les cas de violence familiale, quand la personne responsable de la libération sous caution se dit que le contrevenant ne pose pas de danger pour le public. Cela est peut- être vrai, mais il pose certainement un danger pour la personne à laquelle il s'est déjà présumément attaqué.
Par conséquent, avec ces amendements, nous espérons que les personnes qui prennent ces décisions extrêmement importantes vont penser aux victimes et que cela influera sur leur décision. Dans le contexte de la protection du public, il y a des membres de ce public qu'il faut également protéger.
Les conditions de la libération, s'il y a libération, doivent être adaptées aux circonstances particulières. Je peux envisager certaines de ces conditions, mais elles varieront d'un cas à l'autre, selon les besoins. Il y aura des situations où la victime pourra dicter ce qu'elle croit nécessaire et où la personne qui prend la décision en tiendra compte.
Mme Eleni Bakopanos: C'était une partie de la question que je voulais poser: la victime aura-t-elle la possibilité d'agir? Je vous remercie d'attirer notre attention sur le fait que cela se produit habituellement dans les situations de violence familiale. Enfin, je crois que c'est là l'une des principales préoccupations de beaucoup de femmes qui ont vécu ces relations violentes et qui craignent que le juge ne prenne leur situation à la légère.
Encore une fois, il n'y a pas de garantie, mais la victime pourra-t-elle se faire entendre?
Mme Catherine Kane: Le projet de loi n'impose pas à la victime de présenter des arguments ou d'être présente parce que cela pourrait être trop lourd pour elle et que ces décisions doivent souvent être prises très rapidement. Nous avons donc clairement chargé la personne qui prend la décision de la responsabilité de penser à la sécurité de la victime, que celle-ci présente ou non des arguments, en personne ou par l'intermédiaire du procureur de la Couronne.
Il devrait y avoir suffisamment de renseignements dans le mémoire de la police, dans les notes prises par l'agent et simplement dans la description de l'infraction pour attirer l'attention de la personne qui doit prendre la décision sur les considérations de sécurité à prendre en compte. Ce serait une question de bon sens.
• 1645
Au cas où l'agent de police, si c'est la première personne à
envisager la libération, a des réserves à ce sujet, il peut laisser
la décision au fonctionnaire responsable, au juge de paix, etc. Ils
sont tous obligés de tenir compte de ces facteurs lorsqu'ils
prennent une décision.
J'espère que cela persuadera les victimes que leur sécurité constituera l'une des premières considérations et qu'on fera respecter les conditions de libération. Nos collègues provinciaux nous ont dit qu'ils s'efforceront de transmettre aux victimes une copie de l'engagement de façon que si elles ont à appeler le 911, parce que le contrevenant est à leur porte, contrairement aux conditions de sa libération, elles n'auront pas à convaincre leurs interlocuteurs du fait qu'elles agissent sur la base d'une ordonnance. Le document serait là et les victimes pourraient demander qu'il soit mis en vigueur sur-le-champ.
Mme Eleni Bakopanos: Merci.
Le président: Merci, madame Bakopanos.
M. Cadman a une autre question à poser.
M. Chuck Cadman: C'est juste un bref commentaire, pas une question, au sujet de ce que M. MacKay disait concernant les déclarations communautaires.
Je crois que ma propre collectivité de Surrey envisage sérieusement d'en présenter une au sujet des graffitis. Une telle déclaration donne à la municipalité l'occasion de comparaître pour expliquer essentiellement ce que coûtent les graffitis aux contribuables de la collectivité.
À première vue, je me suis demandé jusqu'où cela pourrait nous mener. Ma crainte—et je ne tiens pas du tout à me mettre mes propres politiciens municipaux à dos—est de voir ces politiciens faire de grands discours devant les tribunaux quand vient le moment des élections.
M. John McKay: Mais non, allons donc!
M. Chuck Cadman: J'avais donc des réserves, mais je peux certainement comprendre le principe. Tant qu'on peut maintenir cela dans certaines limites et respecter certains paramètres, je n'y vois pas d'inconvénient. Les contribuables d'une collectivité sont certainement des victimes lorsqu'on doit faire face à des problèmes de ce genre.
J'ai pensé qu'il serait utile que je fasse cette observation.
Le président: Y a-t-il d'autres intéressés? Sinon, je vais moi-même poser une courte question.
Le projet de loi traite des préoccupations concernant les infractions graves. Au cours de nos discussions, certains ont dit que les victimes d'infractions mineures ne sont jamais tenues au courant de ce qui se passe. Il arrive même qu'elles ne sachent pas si l'accusé a plaidé coupable ou s'il a été condamné. Parfois elles reçoivent un coup de téléphone deux ou trois jours avant le procès, ou même la veille, leur demandant d'être présentes. Une fois là, un procureur de la Couronne leur présente un exposé très sommaire de la situation.
A-t-on envisagé ce facteur lors de l'élaboration du projet de loi et l'a-t-on peut-être écarté? S'agit-il d'un problème administratif que devraient régler les provinces ou est-ce qu'il est trop complexe de fixer des normes concernant le traitement des victimes de toutes les infractions, de façon qu'elles soient mises au courant des progrès d'une affaire au fur et à mesure qu'elle avance dans le système?
Mme Catherine Kane: L'information concernant l'état d'avancement d'une affaire dans le système doit ordinairement venir de la province. Les services provinciaux d'aide aux victimes doivent en principe assister toutes les victimes, mais ils doivent parfois établir un ordre de priorité basé sur les ressources dont ils disposent. Lorsqu'ils le font, ils concentrent leurs efforts sur les victimes de crimes de violence, de violence familiale et d'abus sexuel. Ce sont en général leurs trois priorités.
Il peut donc arriver dans certains cas que des victimes de vol, de cambriolage, etc., se sentent mises à l'écart. Ce n'est pas délibéré, la charge de travail est parfois lourde. Je sais que toutes les personnes avec qui je suis en contact dans les provinces souhaitent améliorer cette situation et travaillent à l'établissement d'un système d'information plus cohérent pouvant servir toutes les victimes d'infractions.
En ce qui concerne le projet de loi, nous n'avons pas essayé de le limiter aux victimes de crimes violents. Les dispositions, à l'exception de quelques-unes qui modifient les dispositions s'appliquant déjà aux infractions sexuelles et aux crimes de violence—je pense en particulier au contre-interrogatoire des jeunes victimes, par exemple—s'appliquent à toutes les victimes, sans distinction basée sur le niveau de l'infraction.
Bien sûr, lorsque nous parlons de la sécurité des victimes en cas de libération sous caution, lorsque le contrevenant est détenu, il s'agit en général de crimes violents. Dans le cas des infractions mineures, le contrevenant est relâché plus ou moins automatiquement, sur promesse de comparaître, parce qu'on ne craint pas la violence dans ces situations.
Autrement, cet ensemble d'amendements ainsi que les dispositions que nous avons actuellement dans le Code criminel s'appliquent aux victimes de n'importe quelle infraction, indépendamment de sa gravité ou de sa nature personnelle.
Le président: Je vous remercie.
D'autres questions?
M. John McKay: J'ai une question bizarre.
Le président: Écoutons votre question bizarre. C'est toujours intéressant.
M. John McKay: Oui, c'est toujours bizarre.
• 1650
J'ai une électrice qui est venue à mon bureau il y a quelques
mois. Son fils avait été assassiné en Caroline du Nord. Le retour
du corps, l'enterrement, etc., ont donné lieu à des factures qui
totalisaient près de 15 000 $. Finalement, l'accusé a été déclaré
coupable. Je ne connais pas la sentence, mais une partie de la
peine à laquelle il a été condamné consistait à prélever un certain
pourcentage du montant quotidien qui lui est versé en prison, ce
qui bien sûr représentait une somme dérisoire.
Ainsi, mon électrice reçoit par la poste, tous les trimestres, ce chèque ridiculement petit. C'est comme si, chaque fois, elle était victime d'une nouvelle agression, parce qu'on lui rappelle tous les trois mois que le meurtrier de son fils est en prison et qu'on lui envoie ce montant ridicule.
J'ai écrit au procureur de l'État, mais en vain.
Je suis curieux. Est-il possible qu'une situation de ce genre se produise chez nous?
Mme Catherine Kane: Le fait que le salaire d'un prisonnier soit saisi? Je crois que oui.
C'est peut-être une question que vous voudrez soulever auprès des fonctionnaires lorsque vous étudierez la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Votre électrice pourrait également essayer de s'adresser au Programme d'indemnisation des victimes d'actes criminels de la Caroline du Nord. Ce que je vous dis se fonde sur des renseignements qui pourraient être désuets, mais nous avons participé dans le passé à l'activité d'une Association internationale de comités d'indemnisation de victimes d'actes criminels, et je crois qu'il y a des lois qui s'appliquent aux non-résidents...
M. John McKay: Ah, vraiment?
Mme Catherine Kane: ... si le crime a été commis sur leur territoire. Par conséquent, il vaudrait peut-être la peine de poursuivre cette affaire.
Si elle a obtenu une indemnisation du conseil de l'État, le chèque insignifiant du contrevenant servirait à rembourser ce conseil plutôt que votre électrice.
M. John McKay: J'aurais voulu que le procureur de l'État m'écrive pour me dire cela. Je pense en fait que vous me donnez là un excellent conseil.
Mme Catherine Kane: Il serait également possible de s'adresser au Bureau américain des victimes d'actes criminels qui pourrait, probablement en quelques minutes, vous dire à quoi votre électrice aurait droit en vertu des lois de la Caroline du Nord.
M. John McKay: Merci.
Le président: M. Cadman a un bref commentaire.
M. Chuck Cadman: Oui, merci.
En considérant les choses sous un autre angle, je peux vous dire que beaucoup des victimes comprendraient... Il y a beaucoup de choses dans la vie de tous les jours qui vous rappellent ce que vous avez perdu. Recevoir un chèque d'un montant très minime tous les mois ne serait pas vraiment insultant pour la plupart des victimes. Cela témoignerait plutôt du fait que le contrevenant est, jusqu'au bout, tenu responsable de ses actes.
M. John McKay: Je suppose que vous avez raison. Cela peut aller dans les deux sens.
M. Chuck Cadman: Oui, mais je dirais que cela va plutôt dans ce sens dans la plupart des cas que je connais. Si les gens reçoivent régulièrement un chèque de quelques cents, c'est un rappel constant du fait que le contrevenant est tenu responsable et qu'on ne lui permet pas d'oublier.
Je crois que beaucoup de victimes y trouveraient un certain réconfort. Ce n'est pas une punition ou une sanction. C'est simplement que la personne est tenue responsable. Et il y a ce rappel constant, ce chèque de quelques cents qui arrive tous les mois.
Le président: Merci, monsieur Cadman.
Madame Kane, monsieur Roy, j'ai beaucoup apprécié votre participation à la discussion aussi franche que complète que nous avons eue aujourd'hui. Votre contribution, surtout avec si peu de préavis, a été précieuse.
Mme Catherine Kane: Je vous remercie.
Le président: Mes collègues me permettront peut-être de poursuivre quelques instants. Nous devons examiner une liste de témoins en vue d'en convoquer un certain nombre dans le cadre de l'examen du projet de loi C-79.
Des commentaires? Autrement, nous allons poursuivre.
M. John McKay: Où est notre liste de témoins?
Le président: Elle est en train d'être distribuée en ce moment.
Nous avons eu beaucoup de consultations sur ce sujet l'année dernière. La question est de savoir quelle étendue vous souhaitez donner aux consultations. Elles peuvent être aussi étendues que vous le désirez, mais nous n'avons pas à nous répéter non plus. Cela étant dit...
M. Chuck Cadman: C'est l'une des premières choses à laquelle je penserais avant de me lancer dans un grand débat. De combien de témoins avons-nous en fait besoin?
Le président: Je vous demande conseil à ce sujet. Nous ne voulons pas raccourcir les délibérations du comité, mais nous ne voulons pas non plus les prolonger sans nécessité et faire double emploi.
M. John McKay: Nous avons ici sept catégories. Y aurait-il moyen que les groupes décident entre eux de choisir un organisme qui parlera en leur nom au sujet du projet de loi lui-même, au lieu d'inviter cinq personnes à venir exposer le point de vue des victimes? Nous pouvons considérer l'un des organismes d'avocats. Il y a en a sept.
Le président: Ma première observation est qu'il s'agit de témoins suggérés. Ces gens ne sont pas tous et ne peuvent pas tous être témoins. Ils ne figurent pas sur la liste pour être convoqués. C'est simplement une possibilité. Il est également possible qu'ils n'acceptent pas tous de venir.
Peut-être Marilyn pourrait-elle nous dire s'il serait bon de choisir une personne dans chaque catégorie ou s'il y a un meilleur équilibre à réaliser.
Mme Marilyn Pilon (attachée de recherche du comité): Je crois que le comité pourrait certainement choisir dans la liste. À mon avis, ce serait peut-être en demander trop que d'imposer aux groupes de faire eux-mêmes ce choix.
M. John McKay: D'accord.
Le président: Madame Bakopanos.
Mme Eleni Bakopanos: On m'a dit qu'il y avait un certain nombre de procureurs généraux qui souhaitaient comparaître.
Le président: Nous avons une politique à cet égard, madame Bakopanos.
Mme Eleni Bakopanos: Oui, je sais. Nous pourrions dire qu'il s'agit des fonctionnaires des différentes provinces. Peut-être l'expression «procureur général» est-elle trop politique.
M. Chuck Cadman: Proposez-vous de convoquer des membres de leur personnel?
Mme Eleni Bakopanos: Oui, des différentes provinces.
Je propose tout simplement cela pour lancer la discussion.
M. John McKay: Je crois que ce n'est pas une mauvaise idée pour la simple raison que ce projet de loi réussira ou échouera selon la façon dont les provinces vont l'administrer.
Mme Eleni Bakopanos: Oui.
Le président: Vous voudrez peut-être dire à la greffière lesquels vous voudriez choisir, puis nous prendrons de nouveau des renseignements. Je propose que nous nous en tenions à notre politique en convoquant du personnel administratif plutôt que des représentants politiques.
Mme Eleni Bakopanos: Oui, du personnel non politique. Je suis tout à fait d'accord.
D'accord, j'en reparlerai à la greffière.
Le président: Sommes-nous d'accord donc pour essayer d'en choisir un ou deux dans chaque catégorie?
M. John McKay: Je suis en train de parcourir la liste. Je peux dire tout de suite que, dans la liste des victimes, je choisirai sans hésitation le groupe CAVEAT, ou Canadiens contre la violence partout recommandant sa révocation. Je ne connais pas assez les autres pour me prononcer.
Dans le groupe de la police, je pense que je choisirais les chefs ou... mais je ne sais pas lequel serait meilleur...
Le président: Nous pourrions avoir des problèmes politiques.
M. John McKay: Vous avez peut-être raison, je ne sais pas.
J'opterais pour l'Association du Barreau canadien parmi ceux-ci. Je crois également que nous devrions entendre des représentants des avocats de la défense.
Mme Eleni Bakopanos: Le Barreau du Québec.
Puis-je formuler une recommandation? Je ne pense pas que nous ayons procédé ainsi dans le passé, mais ce serait peut-être un moyen pour nous de donner l'occasion de comparaître à ceux qui tiennent absolument à le faire. Toutefois, il n'est peut-être pas indispensable d'inviter ceux qui croient que ce qu'ils nous ont dit à la table ronde se trouve déjà dans le projet de loi.
Je ne sais pas comment exprimer cela, mais nous pourrions peut-être écrire ou envoyer une télécopie à ces gens, ou communiquer avec eux par tout autre moyen que nous utilisons dans le cas des témoins, pour nous assurer qu'ils ont pris le temps de lire les changements envisagés. Nous pourrions ensuite choisir ceux qui ont quelque chose de nouveau qu'ils veulent porter à l'attention du comité, qui ont de nouveaux éléments, enfin, qui ont vraiment quelque chose à dire au sujet du projet de loi déposé à la Chambre.
Je sais, monsieur Cadman, que vous avez soulevé quelques questions à la Chambre. Peut-être les groupes qui ont le même point de vue ou d'autres membres de votre parti voudront-ils comparaître devant le comité. Bref, plutôt que de réexaminer le tout, je propose de considérer les domaines qu'il est vraiment nécessaire de discuter.
M. Chuck Cadman: Je suis en train de regarder la liste des groupes représentant les victimes. Je me rends compte que CAVEAT est l'un des groupes les plus importants, qui existe depuis 1991. Le groupe Victimes de violence existe depuis deux fois plus longtemps encore. Le Resource Centre for Victims of Crime a été constitué il y a un certain temps déjà et, contrairement aux autres, il a fait beaucoup de travail législatif.
J'examine donc la liste des groupes représentant les victimes. Peut-être serait-il préférable de les convoquer tous en même temps et de leur demander de présenter une sorte de mémoire combiné...
M. John McKay: Ou les inviter à présenter un mémoire conjoint.
M. Chuck Cadman: ... au lieu de faire durer le témoignage pendant des jours et des jours.
Mme Eleni Bakopanos: Je propose cependant de limiter la discussion à ces secteurs.
M. Chuck Cadman: Oui, en leur permettant aussi d'exprimer leurs préoccupations.
Mme Eleni Bakopanos: Je ne vois vraiment pas pourquoi nous devrions tout recommencer à zéro. Je crois que les membres du comité s'entendent sur beaucoup des points qui se trouvent dans le projet de loi.
M. Chuck Cadman: Nous pourrions leur demander de réfléchir, puis de nous dire dans quels secteurs ils voient des problèmes. Ils pourraient ensuite venir tous ensemble et nous exposer les détails.
Mme Eleni Bakopanos: Oui, c'est cela. Ils pourraient venir nous parler des amendements qu'ils auraient à proposer s'ils ont de la difficulté à accepter certaines dispositions. Nous pourrions limiter la discussion à cela.
Je ne sais pas si c'est possible. Je sais que nous ne l'avons jamais fait auparavant, du moins depuis que je suis membre du comité, mais cela faciliterait certainement notre travail. Nous nous entendons sur le contenu de ce projet de loi et nous voulons tous qu'il soit adopté.
Le président: Est-ce que notre attachée de recherche a des commentaires?
Mme Marilyn Pilon: Il n'est pas rare d'écrire à des témoins possibles pour leur demander de se limiter au contenu du projet de loi. Je ne crois pas que cela soit à déconseiller dans ce cas.
Mme Eleni Bakopanos: Je limiterais encore plus les discussions.
Mme Marilyn Pilon: Vous voulez les limiter aux suggestions.
M. John McKay: Ne pourrions-nous pas dire à tous ces gens, dans la lettre, que nous avons une très longue liste de témoins depuis mai et juin de l'année dernière...
Mme Eleni Bakopanos: C'est exact.
M. John McKay: ... et que nous voudrions dans la mesure du possible recevoir des mémoires conjoints?
Beaucoup de ces gens n'ont pas des budgets illimités et s'ils doivent aller faire des recherches...
Mme Marilyn Pilon: Si le comité s'attend à entendre ces témoins dans les deux ou trois prochaines semaines—je ne sais pas à quelle vitesse vous voulez procéder—, beaucoup d'entre eux ne pourront pas répondre tout simplement à cause du délai. Nous pourrions nous exposer à des protestations à cause de cela.
Je voudrais tout simplement vous en avertir.
M. John McKay: Et bien, une grande partie de ce que nous faisons ici est thérapeutique.
Le président: D'accord.
Avez-vous suffisamment d'instructions pour être en mesure de rédiger votre lettre? Dieu vous bénisse.
M. John McKay: Et bonne chance.
Le président: Un dernier point. Nous nous attendons à recevoir d'ici vendredi, je l'espère, le rapport sur la conduite en état d'ébriété. Nous le ferons circuler, puis nous entreprendrons une discussion de ce rapport à un moment donné de la semaine prochaine, j'espère.
M. John McKay: Derek est de retour au comité. Ma parole, il nous faudra tout recommencer de nouveau.
Le président: Comme il n'y a pas d'autres observations ou intervenants, la séance est levée.