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JURI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS

COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 26 mai 1999

• 1536

[Traduction]

Le président (M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.)): La séance est ouverte. Notre premier témoin cet après-midi nous vient du Service canadien du renseignement de sécurité.

Bienvenue à nouveau, monsieur Elcock. Nous examinons aujourd'hui le budget principal des dépenses du SCRS. Avez-vous un exposé, pour ajouter à celui que nous avons entendu il y a quelques semaines?

M. Ward P.D. Elcock (directeur, Service canadien du renseignement de sécurité): Non, monsieur le président.

Le président: Bien. On peut donc passer tout de suite aux questions.

Monsieur Abbott, vous avez sept minutes.

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Merci beaucoup.

Merci d'être là, monsieur Elcock. Je suis vraiment content de pouvoir vous poser quelques questions, puisqu'il est évident que le rôle de votre service est très important pour les Canadiens, et particulièrement pour les gens d'affaires. Je pense particulièrement à un exemple actuel, soit ce qui se passe aux États-Unis, ce petit différend entre les États-Unis et la Chine. Je suis au courant du fait que certaines entreprises canadiennes du secteur de la défense et des filiales d'entreprises américaines au Canada sont présentement dans la mire de tous à cause de cette situation, puisque les États-Unis envisagent sérieusement d'exiger que ces entreprises fassent l'objet d'une exemption particulière, si elles veulent avoir des contrats dans le secteur militaire.

Est-ce que le SCRS s'occupe de ce genre de chose? Autrement dit, là où je veux en venir, c'est que les États-Unis semblent croire qu'il y a un problème de sécurité. J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.

M. Ward Elcock: Bien entendu, monsieur le président, chez nous comme chez les services de sécurité d'autres pays, il y a un programme dynamique de contre-espionnage, si c'est ce que vous me demandez. Je tairai toutefois le nom des pays cibles, dans ce contexte. J'ai déjà dit que je ne nommerai pas de cible, mais cela étant dit, ce programme est très dynamique, et nous agirions en fonction de toutes préoccupations que nous pourrions avoir au sujet de pays étrangers voulant prendre le Canada où des entreprises canadiennes pour cible.

M. Jim Abbott: Une chose me semble bien mystérieuse: Quand je pense au SCRS, au CST et au SCRC, je vois des tas de chevauchements. J'aimerais savoir quelles sont les distinctions. Comme vous ne voulez pas, même de loin, formuler des commentaires sur des dossiers particuliers, je vais vous présenter un exemple. Prenons celui de Future Electronics, et toute cette enquête de la GRC: on présume qu'il doit y voir des rapports entre son service SCRC ou avec le SCRS. Où établit-on les distinctions?

M. Ward Elcock: Nous avons tous des responsabilités assez différentes. Le SCRC est essentiellement un service de renseignements de police, qui s'intéresse aux renseignements dans le domaine criminel. Parfois, il y a des chevauchements. Après tout, au bout du compte, s'il faut arrêter un terroriste, c'est la GRC ou un autre corps policier qui procédera à l'arrestation. Il y a bien un chevauchement, mais au bout du compte, le SCRC est un organisme de renseignements criminels. Il nous arrive bien sûr de leur parler, à l'occasion, mais nous ne travaillons pas dans le même domaine, en fait.

M. Jim Abbott: Vous devez toutefois avoir des plates-bandes communes, dont il faut établir régulièrement les limites.

M. Ward Elcock: Non, je ne dirais pas qu'il y a autant en commun, à départager régulièrement. Il y a bien sûr des cas où il faut nous assurer de parler aux services policiers, mais c'est moins au SCRC qu'à une autre organisation comme la GRC ou un autre corps policier canadien qui entreprend une enquête sur certaines de nos cibles. Dans ces cas, évidemment, nous devons communiquer.

• 1540

M. Jim Abbott: C'est une question d'intérêt public, je crois, particulièrement à la lumière des révélations qui ont été faites hier aux États-Unis. Comment une personne pourrait-elle en savoir plus sur le lien entre ce genre de révélations et la situation actuelle dans une organisation ou dans une entreprise comme Future Electronics? Qui fait quoi à qui, et quand? En résumé, voilà la question. Êtes-vous en mesure de formuler des commentaires à ce sujet?

M. Ward Elcock: Je ne peux pas faire de commentaires sur les enquêtes qui pourraient être en cours dans d'autres services. Quant à nous, il est certain que nous ne pouvons pas discuter d'objectifs précis. Nous fournissons des informations au gouvernement, des informations sur la base desquelles le gouvernement peut prendre des mesures. Lorsqu'il s'agit d'une enquête de police, évidemment, on établit l'existence ou l'absence d'un problème, soit dans le mandat, soit dans les conclusions de l'enquête.

M. Jim Abbott: J'aimerais que vous m'aidiez à comprendre. Vous fournissez des informations au gouvernement; à qui fournissez-vous ces informations? J'aimerais savoir quelle est la hiérarchie, comment cela fonctionne.

M. Ward Elcock: Nous fournissons des informations à toutes sortes de gens au gouvernement. Cela dépend des dossiers. Lorsqu'il s'agit d'information relative à un problème d'immigration, évidemment, c'est destiné au ministère de l'Immigration. S'il s'agit de renseignements étrangers, évidemment, c'est un autre client. Toutes sortes de personnes peuvent, à l'occasion, recevoir des informations du SCRS.

M. Jim Abbott: Peut-on dire qu'il existe un bon niveau de coopération entre le SCRS et les organismes américains qui s'intéressent à cette filière chinoise au Canada?

M. Ward Elcock: Nous avons des relations très étroites avec les organismes américains, y compris le Bureau. Je ne veux pas citer des cas particuliers, mais nous avons des relations très étroites avec le Bureau.

M. Jim Abbott: De quelles façons pourrions-nous aider le SCRS? Je pense à la filière chinoise uniquement à titre d'exemple, mais c'est un exemple bien choisi puisque voilà des compagnies canadiennes de défense et des filiales américaines au Canada qui risquent des sanctions des États-Unis parce que ce pays craint un certain relâchement au Canada. Qu'est-ce que nous devrions savoir? Que pouvons-nous faire d'utile? De quoi avez-vous besoin pour faire votre travail plus efficacement? Je ne doute pas de votre efficacité, je me demande comment nous pouvons vous aider à être plus efficace encore.

M. Ward Elcock: Il est certain que nos opérations de contre- espionnage sont très efficaces. Comme je l'ai dit, nous communiquons ces informations au gouvernement, évidemment, et non à votre comité ou à ses membres. Les informations sont fournies au gouvernement pour lui permettre de prendre des décisions et, le cas échéant, de les communiquer à d'autres intéressés. C'est au gouvernement de décider comment les informations sont utilisées. Aux termes de notre loi, les rapports sont destinés uniquement au gouvernement.

M. Jim Abbott: Nous ne comprenons pas toujours les termes de la même manière. Quand je pense au mot «gouvernement», je pense au premier ministre et à son Cabinet. Quand vous dites que vous fournissez des informations au «gouvernement», est-ce que vous pensez à la même chose?

M. Ward Elcock: D'une certaine façon, cela englobe tous les éléments exécutifs du gouvernement, c'est-à-dire le premier ministre, le Cabinet, les hauts fonctionnaires, mais non pas, pour l'instant, le Parlement ou les membres du Parlement. Aux États-Unis, le terme coïncide mieux avec le système que nous avons.

M. Jim Abbott: Donc, supposons que certaines personnes de notre Cabinet—aux fins de la discussion, je les appellerai «le gouvernement»—s'inquiètent des allégations qui ont été faites hier aux États-Unis, on leur ferait savoir que vous pouvez leur fournir des renseignements, exclusivement à eux, pour les aider à faire face à cette situation.

M. Ward Elcock: S'il s'agit d'un problème sur lequel nous travaillons et si quelqu'un au sein du gouvernement canadien, qu'il s'agisse d'un représentant officiel, d'un membre du gouvernement ou d'un ministre, demande des informations, j'espère que nous pourrons les fournir. Cela dit, nous travaillons en étroite collaboration avec des organismes étrangers et, le cas échéant, nous partageons les informations que nous possédons.

M. Jim Abbott: Je me dis que cela pourrait avoir un impact direct sur les entreprises canadiennes de la défense—j'ai lu quelque part que les contrats gouvernementaux américains pourraient atteindre des milliards de dollars canadiens—et il me semble que... fournissez-vous ces informations régulièrement, ou bien le faites-vous seulement quand on vous le demande? Ce sont des échanges commerciaux qui s'élèvent à des milliards de dollars qui sont en cause.

• 1545

M. Ward Elcock: En fin de compte, monsieur le président, je n'ai absolument rien à voir avec les questions de commerce ou les règles relatives au commerce, en particulier lorsqu'il s'agit de contrats de défense, lorsque le gouvernement achète des produits de défense. Nous sommes là uniquement pour recueillir des informations.

En ce qui concerne le contre-espionnage, nous nous intéressons uniquement aux gens qui pourraient chercher à recueillir des informations au Canada. En fin de compte, nous nous assurons que ces informations parviennent à ceux qui en ont besoin, qu'ils travaillent au gouvernement ou bien... Dans certains cas, nous partageons nos renseignements avec des organismes étrangers. Nous sommes là pour ça. Nous considérons que nous faisons très bien ce travail. Nous le faisons avec beaucoup de dynamisme, et personne, que je sache, n'a l'impression que nous ne faisons pas notre travail.

Le président: Merci, monsieur Abbott. Nous reviendrons à vous tout à l'heure.

[Français]

Monsieur Marceau.

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur Elcock, je vous remercie d'être venu nous voir aujourd'hui.

Combien de temps ai-je, monsieur le président?

[Traduction]

Le président: Sept minutes.

[Français]

M. Richard Marceau: Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a environ une semaine, une histoire assez troublante a fait surface dans la région de Québec. Il s'agit de l'implication d'une agente d'immeuble, Mme Mona Naess, dans une affaire menée par sa conjointe, Mme Chantal-Annick Tremblay, une agente du SCRS, qui visait à relocaliser et à protéger une terroriste au Canada. Ce fait est sorti dans les journaux et est maintenant public.

Comment expliquez-vous que le SCRS ait eu recours aux services d'une personne extérieure pour participer à une mission qui non seulement compromettait la sécurité personnelle de Mme Naess, mais qui liait aussi personnellement cette personne à l'agente en charge du dossier, Mme Tremblay?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Monsieur le président, c'est une affaire dont on a parlé dans la presse, et je n'ai pas de commentaire à faire. Je ne peux ni confirmer ni infirmer les affirmations qui ont été faites.

Cela dit, je peux faire une ou deux observations; premièrement, évidemment, lorsque les gens sont légitimement mécontents de la façon dont ils ont été traités, ils ont toujours des recours. Ils peuvent faire part de leurs préoccupations à certaines autorités qui sont là pour remplir cette fonction. À part cela, je n'ai rien à ajouter.

[Français]

M. Richard Marceau: Monsieur Elcock, est-il de pratique courante ou occasionnelle, sans nommer qui que ce soit, que le SCRS, pour protéger des agents informateurs, fasse affaire avec des gens qui ne sont pas ses employés? Est-ce que cela se fait?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Monsieur le président, je l'ai déjà dit, je l'ai dit à d'autres occasions également: dans tous les pays, les services de sécurité fonctionnent grâce à la collaboration des gens, de personnes qui acceptent de travailler dans ce domaine de la sécurité et qui sont disposées à collaborer dans certaines circonstances. Par conséquent, il arrive effectivement qu'on fasse appel à l'aide des gens.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-il de pratique courante que le SCRS protège des informateurs ou des sources de services de renseignement étrangers?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Monsieur le président, nous faisons toujours très attention de protéger nos sources. En fait, la loi qui régit le SCRS l'exige.

[Français]

M. Richard Marceau: Y compris quand ce sont des sources de services secrets étrangers?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je n'ai pas d'observation à faire au sujet des sources étrangères.

[Français]

M. Richard Marceau: Un instant. J'espère que vous avez des commentaires à faire.

Est-ce que votre service a la responsabilité de protéger des sources du pays Y, Z, B ou W dans le cadre d'ententes entre un pays étranger et le Canada?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Monsieur le président, lorsque le SCRS exécute une opération, c'est conformément à la loi canadienne. C'est toujours en observant strictement la loi. Après tout, nos opérations sont rigoureusement examinées chaque année par le SCARS. Nous procédons toujours avec la plus grande prudence et conformément à la loi. À part cela, je ne saurais vous parler des méthodes particulières que nous pourrions employer ou ne pas employer.

[Français]

M. Richard Marceau: Monsieur Elcock, que je vous pose une question précise ou une question générale, vous n'êtes pas la personne la plus volubile. Je trouve cela un peu dommage, surtout que vous êtes devant des élus et que vous êtes contrôlé non seulement par un organisme indépendant, mais aussi par le Parlement du Canada. Votre organisme doit aussi rendre des comptes au Parlement du Canada.

• 1550

Dans le cas de la source allemande qui a été relocalisée et protégée par le SCRS au Canada, il est dans le domaine public qu'elle aurait bénéficié d'une somme forfaitaire de 300 000 $ de la part des services secrets allemands lors de son transfert au Canada. À combien s'élèvent les dépenses du SCRS pour assurer sa protection, ou combien en coûte-t-il aux contribuables canadiens pour assumer les responsabilités des services secrets allemands?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Monsieur le président, comme je l'ai dit il y a un instant, je n'ai pas d'observation à faire à ce sujet. Les faits qui ont été mentionnés dans cet article de journal ont beau être publics, je ne peux pas, pour ma part les confirmer ou les infirmer.

[Français]

M. Richard Marceau: Sans nommer qui que ce soit, est-ce que vous en avez une idée? Si oui, pourriez-vous nous communiquer ce qu'il en coûte aux contribuables canadiens pour protéger des sources de pays étrangers qui viennent s'établir au Canada?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Non, monsieur le président. Cela irait à l'encontre de la sécurité nationale, et pour cette raison, je ne peux pas le faire.

[Français]

M. Richard Marceau: De répondre à cette question?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Monsieur le président, je ne peux pas fournir cette information.

[Français]

M. Richard Marceau: Nous donner un chiffre serait contraire à la sécurité nationale canadienne?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Monsieur le président, je me permets de rappeler au comité qu'il y a seulement deux chiffres dans le budget du SCRS qui sont publiés. Nous ne fournissons pas d'autres détails sur le budget du SCRS, et je n'ai absolument pas l'intention de fournir ces informations.

[Français]

M. Richard Marceau: Monsieur le président, il ne répond pas. Je trouve cela complètement ridicule. À quoi sert-il de faire venir quelqu'un s'il ne répond pas aux questions d'un comité parlementaire? C'est complètement ridicule.

[Traduction]

Le président: Monsieur Marceau, il faut tenir compte des impératifs de la sécurité nationale.

[Français]

M. Richard Marceau: C'est peut-être à nous de le faire. C'est peut-être aux parlementaires de le faire.

Je pose des questions assez générales. Je demande combien il en coûte à M. et Mme Tout-le-Monde, qui paient des taxes et des impôts, pour protéger des sources de pays étrangers. Après tout, les gens du SCRS sont payés par les contribuables canadiens. Il me semble qu'en répondant à cette question, on ne révélerait ni l'endroit, ni les noms, ni où sont ces sources, ni comment elles sont protégées.

[Traduction]

Le président: Monsieur Elcock, avez-vous une observation?

M. Ward Elcock: Je suis désolé, monsieur le président; je comprends bien la question de l'honorable député, mais malheureusement, je suis dans l'impossibilité de lui fournir cette information.

Le président: D'accord.

Monsieur Lee.

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le président, nous aurions peut-être intérêt à savoir pourquoi notre témoin ne peut pas communiquer ces informations au comité. Il serait bon d'établir cela.

Le président: Monsieur Elcock.

M. Ward Elcock: Je crois avoir déjà répondu à cette question, monsieur le président. Je ne peux vous fournir ces renseignements pour des raisons de sécurité nationale.

Le président: Avez-vous terminé, monsieur Marceau?

M. Richard Marceau: C'est de la foutaise.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Comment a-t-on traduit cela?

Le président: Monsieur MacKay.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Merci, monsieur le président.

Merci, monsieur Elcock, d'être venu nous rencontrer.

Ces chiffres et les sources relatifs aux finances qui intéressent mon collègue M. Marceau seraient-ils inclus dans l'examen que fait le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, cet examen annuel et rigoureux que vous avez mentionné?

M. Ward Elcock: Le comité de surveillance possède ces renseignements et ces chiffres, et je suis certain qu'il les a tous examinés à un moment donné.

M. Peter MacKay: Vous dites qu'il s'agit de l'examen annuel. Il y a une vérification financière. Est-ce que cela fait partie de...?

M. Ward Elcock: Le vérificateur général fait également des vérifications chez nous, monsieur le président—s'il s'agit d'une préoccupation purement d'ordre financier. Cela dit, je suppose que les observations du député ne visaient pas uniquement les vérifications financières. Une fois par année, le comité de surveillance entreprend un certain nombre d'examens au sein du service—vous pourrez demander aux membres du comité de surveillance des précisions sur leur programme de vérification annuel.

M. Peter MacKay: D'accord. Passons à autre chose pour un instant. J'aimerais savoir ce qu'il en est de la présence des Kosovars et de l'arrivée récente au Canada de ces réfugiés. Le SCRS s'est-il préoccupé de la présence de ces réfugiés au Canada ou a-t-il entrepris de prendre certaines mesures de sécurité à leur égard?

• 1555

M. Ward Elcock: Monsieur le président, nous avons collaboré étroitement avec Immigration Canada dans la mise en oeuvre du programme pour amener au Canada des réfugiés kosovars. Évidemment, si certains de ces réfugiés demandent le statut de résident permanent au Canada, leur situation sera différente de celle d'autres réfugiés à qui on fournit le logement en supposant qu'ils finiront par retourner au Kosovo. Nous avons discuté de cette question avec Immigration Canada pour nous assurer qu'il n'y a pas de problème. Si d'autres réfugiés demandent le statut de résident permanent, nous tiendrons les enquêtes normales qui nous sont réclamées. Si c'est un centre d'Immigration Canada qui nous transmet les renseignements, nous les examinerons et nous donnerons des conseils à ce centre.

M. Peter MacKay: Je suis d'accord avec vous sur le fait qu'il y a une différence selon que ces personnes demeurent ici à court terme ou à long terme—si cela pose en fait un problème. C'était bien ma question. Jusqu'à présent, a-t-on eu des raisons de s'inquiéter, surtout en ce qui a trait aux activités terroristes que pourrait provoquer leur présence au Canada, activités venant de ces réfugiés eux-mêmes ou exercées envers eux?

M. Ward Elcock: Je ne veux pas faire d'observation sur des cas précis, monsieur le président, mais répondre d'une façon générale à la préoccupation du député. Il est certain que nous tiendrions une enquête sur tout groupe qui essaie de faire valoir ses intérêts politiques au moyen de la violence—ce qui est une assez bonne définition du terrorisme.

M. Peter MacKay: Monsieur Elcock, vous ne semblez pas avoir le mandat de répondre à des questions précises ou vous sentir à l'aise pour le faire. Je vais donc vous poser une question générale qui découle de certains éléments du budget principal des dépenses.

Je signale toutefois que quelqu'un que vous connaissez peut-être, David Harris, un ancien chef de la planification stratégique du SCRS, a récemment comparu devant un comité américain et critiqué vertement la capacité du Canada de lutter contre le terrorisme sur son territoire. Il a évoqué entre autres nos piètres lois sur la sécurité et la politique fédérale de multiculturalisme, ce que j'ai trouvé intéressant.

Il a déclaré qu'il existe au Service canadien du renseignement de sécurité une attitude de laissez-faire à l'égard des terroristes qui s'établissent au Canada pour obtenir de l'argent et exercer leurs activités sur la scène internationale. Il a fait remarquer que le SCRS a le devoir de lutter contre le terrorisme, mais que le budget du SCRS a subi des compressions constantes depuis 1993—année qui coïncide avec l'élection du gouvernement libéral—et que le personnel du service est passé de 2 700, juste avant cette période, à moins de 2 000 maintenant.

Compte tenu de ce qu'a révélé M. Harris au comité américain, ma question est la suivante: Comment le SCRS prévoit-il continuer à lutter contre le terrorisme au Canada alors que son financement est insuffisant, d'après un ancien membre haut placé de votre organisation?

M. Ward Elcock: Monsieur le président, je ne connais pas M. Harris. Je ne l'ai jamais rencontré. M. Harris a fait partie de notre organisation pendant quelque neuf mois, et le poste de chef, dans notre organisation, n'est pas particulièrement élevé dans la hiérarchie. Ce n'est pas un poste de subalterne, mais ce n'est pas non plus un poste de cadre supérieur.

Je ne partage pas son opinion quant à notre capacité de faire notre travail. J'ai même déclaré carrément le contraire—je l'ai clairement dit au ministre. Je ne sais pas sur quoi M. Harris se fondait pour faire de telles déclarations. Il a tout simplement tort.

M. Peter MacKay: Je suppose que, au sujet...

M. Ward Elcock: Cela ne signifie pas, monsieur le président, que je n'accepterais pas davantage de financement, comme n'importe qui d'autre. Mais néanmoins, nous estimons qu'à l'heure actuelle, nous sommes en mesure de gérer les menaces à la sécurité nationale du Canada, y compris celles venant du terrorisme.

M. Peter MacKay: Votre réponse ne m'étonne pas, mais qu'avez- vous à dire au sujet de ces compressions budgétaires? D'après ces chiffres, vous avez perdu plus de 750 employés et, du point de vue du financement, les rapports du vérificateur général et les rapports présentés à la Chambre révèlent que votre service a connu des compressions budgétaires importantes. Si j'ai bien compris vos propos, vous seriez fort heureux de recevoir davantage d'argent, mais croyez-vous que la situation nuit à la capacité de vos agents d'exercer leurs fonctions?

M. Ward Elcock: Non, monsieur le président, je ne le crois pas.

M. Peter MacKay: Ah bon.

Vous avez dit que vous ne partagez pas les opinions de M. Harris, mais que pensez-vous de son observation lorsqu'il dit que la politique de multiculturalisme du gouvernement est l'une des causes de l'augmentation du terrorisme au Canada? Il dit que la majorité des immigrants qui arrivent au Canada sont des citoyens pacifiques et productifs mais qu'un petit nombre d'entre eux amènent avec eux de leur pays d'origine un esprit hostile et des ressentiments; il a parlé plus précisément de régions comme l'Afrique, le Moyen-Orient, l'Asie et d'autres régions où existent des conflits et du terrorisme.

• 1600

Dans ce contexte, et compte tenu des déclarations de M. Harris—que vous soyez d'accord ou non—, que croyez-vous de cette proposition voulant que le SCRS devrait lutter plus vigoureusement contre le terrorisme sans donner l'impression de se livrer au racisme?

M. Ward Elcock: J'ai deux réponses à cela, monsieur le président. Tout d'abord, en tant qu'organisation, nous luttons vigoureusement contre le terrorisme. Durant la guerre froide, notre organisation s'est surtout concentrée sur le contre-espionnage plutôt que sur la lutte au terrorisme. Nous consacrons jusqu'à 60 p. 100 de notre budget à des activités de contre-terrorisme. Je ne crois pas que nous soyons mal préparés pour lutter contre les problèmes de terrorisme qui se posent de temps à autre au Canada, problèmes que j'ai déjà commentés.

Cela dit, quel était le but de M. Harris? Je n'en sais rien. Il a peut-être cru qu'il nous aidait, mais il avait tort. Nous estimons avoir les outils dont nous avons besoin pour faire notre travail.

M. Peter MacKay: Vous êtes en communication constante avec les forces américaines qui sont chargées de faire un travail semblable aux États-Unis—le FBI et la CIA. Existe-t-il aux États-Unis un sentiment croissant de ce que le pays est vulnérable en raison du manque de rigueur de la lutte que livre le Canada au terrorisme et au crime organisé? Vous a-t-on déjà parlé de cela?

M. Ward Elcock: Monsieur le président, pour ce qui est de la relation que nous entretenons avec les agences américaines, je dirais que celles-ci ne m'ont jamais fait part d'inquiétudes, et je ne crois pas non plus qu'elles aient de motifs de s'inquiéter de notre capacité d'accomplir nos fonctions.

M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur MacKay.

Madame Carroll.

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Elcock, je me rends compte que vous êtes dans une situation délicate. Délicate n'est peut-être pas le terme approprié, vous êtes dans une situation qui ne vous permet pas de dévoiler les trucs du métier.

J'ai pris quelques notes hier soir en prévision du long article qui a été publié aujourd'hui dans le National Post sur le rapport Cox, mais je m'étais déjà intéressée à la question parce que notre secteur des marchés de service est en grave difficulté à la suite du retrait par les Américains dans le domaine de la défense de l'expression «nation la plus favorisée». Je suis persuadée que vous savez fort bien combien il en coûtera maintenant que nous avons perdu cette qualité spéciale.

À partir de là et à la lumière du rapport Cox qui révèle une infiltration massive des Chinois dans certains des secteurs américains et tout particulièrement le secteur nucléaire, et compte tenu du fait que d'après ce que j'ai lu dans le rapport Cox—très rapidement—, il me semble que ce rapport révèle une infiltration encore plus grande de leurs propres industries... Pourtant les mesures de rétorsion visent le secteur canadien et, avant le rapport Cox, je pense que du point de vue des Américains, c'était nous qui étions le panier percé... Pensez-vous que les Américains tentent de se disculper en ayant recours à une mesure de diversion, attaquant l'industrie canadienne alors que la sécurité est encore pire dans leurs propres industries?

M. Ward Elcock: Incontestablement, monsieur le président, les problèmes de contre-espionnage ont tendance à toucher plus d'un pays. Nous avons tous des problèmes de cette nature de temps à autre. Je ne saurais vous dire quels sont les motifs du gouvernement américain et en fait, comme je l'ai dit en réponse à une question précédente, je fournis simplement l'information, je ne fais «qu'exécuter» les enquêtes sur des services étrangers qui ciblent le Canada. Je ne joue aucun rôle au niveau de la politique qui permet aux entreprises canadiennes de participer aux marchés américains de la défense.

Mme Aileen Carroll: Mais toutefois, monsieur Elcock, vous faites partie du milieu de la collecte de renseignements, renseignements qui jouent un rôle très important dans l'art de gouverner... Vous faites rapport au gouvernement et, comme on l'a souligné, au Cabinet, comme il se doit. Vous ne faites pas que recueillir l'information. Vous devez l'évaluer, car les renseignements purs sont inutiles, sauf pour le professionnel de formation, comme vous.

• 1605

En fait, ce que vous remettez au gouvernement, c'est l'analyse des renseignements que vous avez recueillis de façon à permettre à ce dernier de s'en servir dans l'art de gouverner. Je dirais que le rôle du gouvernement—ou notre rôle puisque nous faisons partie de ce gouvernement—c'est de pouvoir prendre les renseignements que vous avez analysés et que vous nous avez donnés et, en l'occurrence, prévenir le milieu des affaires canadien qui sera très durement touché par ce que vous avez appris.

Si vous n'êtes pas en mesure de prévenir le secteur canadien pour qu'il puisse parer aux coups qui se préparent, comme vous l'avez souligné, parce que vous ne pouvez que vous adresser au gouvernement... Il me semble toutefois que c'est ce que vous devez faire, c'est-à-dire ajouter à vos rapports, à vos analyses des renseignements que vous avez recueillis pour le gouvernement, la suggestion que c'est ce qu'il doit faire.

M. Ward Elcock: Je pense que nous disons la même chose, monsieur le président. C'est essentiellement ce que nous fournissons au gouvernement. J'essayais simplement de dire qu'en plus de fournir des conseils au gouvernement sur ce qui est ciblé ou ne l'est pas et sur ceux qui ciblent ou ne ciblent pas les industries canadiennes, les entreprises canadiennes, la technologie canadienne, selon le cas, nous ne jouons aucun rôle dans les décisions prises par le gouvernement canadien sur la façon d'appliquer cette politique et donc, je ne peux vraiment pas faire de commentaires, dans un sens ou dans l'autre.

Manifestement, notre tâche consiste, comme vous l'avez dit, à recueillir des renseignements sur ceux qui s'intéressent à la technologie canadienne, à l'industrie canadienne, et sur ceux qui veulent cibler, dans le but de mettre fin à ces activités ou d'arrêter quiconque s'y livre et de l'expulser du pays, le cas échéant.

Mme Aileen Carroll: Merci. Vous n'êtes donc pas en mesure de nous dire jusqu'à quel point les Chinois se sont infiltrés dans des intérêts canadiens, particulièrement dans notre communauté scientifique. C'est le genre de renseignements que vous recueilleriez, que vous analyseriez et que vous transmettriez au gouvernement.

M. Ward Elcock: Si je recueillais de tels renseignements, monsieur le président, je les transmettrais certainement au gouvernement canadien.

Mme Aileen Carroll: Je voulais également vous interrogez sur ce que vous avez dit au sujet de la fin de la guerre froide et votre virage du contre-espionnage à l'antiterrorisme, de ce partage soixante, quarante ou...

M. Ward Elcock: C'est environ soixante, quarante.

Mme Aileen Carroll: Puisque nous sommes maintenant dans un monde très différent—la situation au Kosovo en est peut-être un bon exemple—depuis la fin de l'affrontement des blocs, nous ne sommes pas dans un monde bipolaire mais bien dans un monde multipolaire qui, pour de nombreux analystes, est comme intrinsèquement instable. Est-ce que cela aura une incidence sur le service que vous fournissez? De quelle façon, à votre avis, le changement dans le profil international influencera-t-il vos services?

M. Ward Elcock: Tout ce qui se passe dans le monde a tendance à avoir une incidence sur ce que nous faisons. Comme je l'ai déjà dit, je pense, la source principale de nos problèmes du point de vue du terrorisme provient des conflits locaux qui sévissent dans divers pays—je ne veux pas dire que tous les immigrants de ces pays sont par définition un problème. Il s'agit d'une infime fraction d'une population, mais dans de nombreux cas, il y a des personnes qui cherchent à venir au Canada et d'y amener leur conflit, sous une forme ou une autre.

En ce qui concerne le service de contre-espionnage, il est clair qu'il existe encore un grand nombre de tels services qui sont toujours en activité et qui continuent à croire qu'ils peuvent faire avancer les intérêts de leur pays en cherchant à obtenir de nouvelles technologies ou un accès à de nouveaux processus ou en tentant d'obtenir des renseignements dignes d'intérêt pour leur gouvernement sur le plan économique ou politique. Notre travail continue; personne ne s'est arrêté. À la fin de la guerre froide, on avait espéré un nouvel ordre mondial qui rendrait inutile des organisations comme la mienne, ou tout au moins que nous aurions moins de travail. En fait, je pense que la réalité est tout autre. Nous sommes toujours très occupés, très.

Mme Aileen Carroll: Je partage votre avis à ce sujet. En fait, on pourrait même dire que c'était peut-être plus simple de fonctionner dans le contexte de la guerre froide qu'aujourd'hui.

M. Ward Elcock: Les règles étaient certainement plus claires pendant la guerre froide qu'aujourd'hui.

Le président: Merci, madame Carroll.

Un tour de trois minutes, monsieur Abbott.

M. Jim Abbott: Vous avez répété à deux ou trois reprises—pardonnez-moi si ce n'est pas plus précis—que ce n'est pas directement votre responsabilité d'assurer la participation du Canada aux marchés de services dans le secteur de la défense aux États-Unis; évidemment, vous avez une contribution à apporter, mais ce n'est pas votre responsabilité.

• 1610

Je dirais que lorsque je lis: «Incontestablement, les Chinois se sont servis du Canada pour créer des entreprises qui font toutes sortes de choses», comme l'a dit Joel Johnson, vice-président de l'Association des industries aérospatiales... Je dirais que vu ce rapport que vous avez mentionné plusieurs fois, ma question précédente sur ce que nous, parlementaires, pouvons recommander au gouvernement pour vous aider à mieux faire votre travail est un geste amical, certainement venant de moi, et venant aussi des autres membres du comité qui partagent mon avis, car il me semble que cette révélation et d'autres indiquent des lacunes. Lorsque vous affirmez: «Nous pensons pouvoir faire ce qu'il y a à faire», peut-être y a-t-il... Peut-être pouvez-vous le faire de façon générale, mais pas avec autant de précision.

M. Ward Elcock: Monsieur le président, je n'ai pas pris pour une menace ce que disait votre collègue, mais plutôt pour un geste amical. Lorsque je disais que nous pouvions faire le travail... Le principal secteur d'intervention d'un organisme de renseignements est la gestion du risque, de sorte que par définition, on est toujours appelé à gérer le niveau de risque que l'on constate. Aucun service de renseignements n'a suffisamment de ressources pour faire le travail, pour en assumer toutes les facettes possibles. Tous les services veulent invariablement de plus gros budgets. Je suis persuadé que la Stasi avait le sentiment de n'avoir pas suffisamment de ressources même si, à l'époque, une moitié de la population s'employait à surveiller l'autre moitié.

La réalité est qu'il faut des ressources et qu'on aime en avoir. La réalité est que, peu importe, nous avons les ressources nécessaires pour faire le travail et nous pensons faire du bon travail. Il ne fait aucun doute qu'il arrive, même dans les organismes les mieux administrés, même dans les pays les mieux dirigés, ceux qui sont dotés d'organismes de renseignements de très haut niveau, qu'il y ait des problèmes. Il y a de par le monde de nombreux pays qui ont eu des problèmes de d'infiltration de leurs services de renseignements. Cela arrive.

Par contre, ce que nous faisons, nous le faisons très bien, et nous avons à mon avis parfaitement réussi à renseigner le gouvernement sur des questions comme celle qui vous préoccupe.

M. Jim Abbott: J'ai le plus grand respect pour vous et pour votre organisme, et je ne veux donc pas ouvrir une controverse, mais il n'empêche...

M. Ward Elcock: Moi non plus.

M. Jim Abbott: ...qu'avec tout ce qu'on dit actuellement au sujet de la Chine et de la filière canadienne par rapport aux Chinois et aux États-Unis, étant donné que nous risquons une réduction d'un milliard de dollars du chiffre d'affaires des industries canadienne à vocation militaire, je vous préconiserais d'y consacrer peut-être un peu plus de ressources.

M. Ward Elcock: Monsieur le président, j'ai déclaré—je pense l'avoir fait publiquement et je crois que cela a également paru dans le rapport du comité du Sénat—que nous aimerions pouvoir disposer de ressources supplémentaires pour pouvoir traiter des questions technologiques. Ces dossiers sont peut-être en rapport avec ce dont vous parlez, je l'ignore, mais il s'agit de toute une série de questions très différentes. Cela étant dit, nous avons affirmé que nous aimerions davantage de ressources, nous l'avons fait très clairement entendre au gouvernement. Au bout du compte, il appartiendra au gouvernement d'en décider.

Avons-nous suffisamment de ressources pour faire face à ce que nous croyons être ce genre de risque d'activités d'espionnage au Canada? En effet, c'est le cas pour l'instant. Nous pensons que nous parvenons à gérer ces menaces et à bien le faire. Il n'est jamais impossible, même dans l'environnement le mieux dirigé, de trouver des choses qui auraient pu vous échapper, mais dans notre cas il n'y en a guère, et si vous nous comparez à d'autres pays, vous constaterez qu'ils en ont peut-être laissé échapper plus que nous.

Le président: Merci, monsieur Abbott.

Monsieur Derek Lee.

M. Derek Lee: Je vous remercie.

Monsieur Elcock, je prends acte de votre reconduction dans vos fonctions pour un nouveau mandat de cinq ans, ce qui appelle à la fois des félicitations et des condoléances.

M. Ward Elcock: Je remercie le député pour ses félicitations, monsieur le président.

M. Derek Lee: Dans le cadre de ses activités et aux termes de la loi, votre service doit travailler de concert avec l'inspecteur général du SCRS, ou du moins sous sa supervision. Est-ce que l'inspecteur général du SCRS a des bureaux dans vos locaux?

M. Ward Elcock: Lorsqu'il vient y travailler, monsieur le président, il utilise effectivement des locaux situés dans notre bâtiment, mais en réalité, le principal organe de supervision est manifestement le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité plutôt que l'inspecteur général.

M. Derek Lee: Mais pour revenir à l'inspecteur général, j'étais sous l'impression que c'est lui qui était le bras droit du solliciteur général pour ce qui est de votre service. De qui s'agit-il actuellement?

• 1615

M. Ward Elcock: Le poste n'est pas doté pour l'instant, monsieur le président.

M. Derek Lee: Depuis combien de temps est-il vacant, le savez-vous?

M. Ward Elcock: Comme ça, de but en blanc, non.

M. Derek Lee: À votre souvenance, à quand remonte le dernier mandat d'un inspecteur général?

M. Ward Elcock: Le dernier inspecteur général était M. Peel, mais j'ignore à quelle date il a quitté ses fonctions.

M. Derek Lee: Cela fait donc un certain temps j'imagine, puisque vous ne vous en souvenez même pas.

M. Ward Elcock: Je me souviens de M. Peel, mais je ne me souviens pas de la date à laquelle il a quitté ses fonctions.

M. Derek Lee: Quand avez-vous vu M. Peel pour la dernière fois?

M. Ward Elcock: Je ne pense pas l'avoir vu depuis trois ou quatre ans.

M. Derek Lee: Ainsi donc, la loi dit que l'inspecteur général doit remettre au solliciteur général un certificat attestant que le SCRS fait ce qu'il doit faire.

M. Ward Elcock: Non, monsieur le président...

M. Derek Lee: A-t-il été porté à votre attention qu'il n'y a peut-être pas de certificat parce que précisément il n'y a pas d'inspecteur général?

M. Ward Elcock: Monsieur le président, l'inspecteur général ne signe pas un certificat attestant que le service n'a rien fait d'incorrect. Si je me souviens bien de ce que dit la loi, l'inspecteur général donne simplement l'assurance au ministre que le rapport que nous lui avons remis est bien exact. Ce serait plutôt le comité de surveillance qui a surtout pour responsabilité de contrôler nos activités.

M. Derek Lee: Le certificat dont je vous ai parlé et dont vous avez parlé va donc demeurer en suspens aussi longtemps qu'il n'y aura pas d'inspecteur général. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Ward Elcock: C'est parfaitement exact, monsieur le président. Tant qu'il n'y a pas d'inspecteur général en poste, il n'y a pas de certificat.

M. Derek Lee: Vous ignorez quand M. Peel est parti et vous n'avez aucune idée du moment où il sera remplacé...?

M. Ward Elcock: J'ai dit que je ne me souvenais pas à quelle date il avait quitté ses fonctions. C'était il y a quelques semaines ou il y a quelques mois. Je ne l'ai pas vu depuis un certain temps.

M. Derek Lee: En avez-vous déjà discuté avec le solliciteur général?

M. Ward Elcock: Au bout du compte, monsieur le président, on ne s'intéresse guère à ce que nous pensons des inspecteurs généraux ou du comité de surveillance étant donné que ce sont eux qui nous contrôlent, et les rapports qui nous lient à eux comportent donc intrinsèquement...

M. Derek Lee: Ils sont pour vous un genre d'irritant.

M. Ward Elcock: S'ils font bien leur travail, c'est exact.

M. Derek Lee: Le fait que ce poste soit vacant ne vous chagrine donc pas beaucoup.

M. Ward Elcock: En effet, monsieur le président.

M. Derek Lee: Cela me rend un peu nerveux étant donné que la charge d'inspecteur général était l'un des principaux éléments de contrôle imposés par le Parlement en 1984.

M. Ward Elcock: Je pense que le principal élément était le comité de surveillance, monsieur le président, quoiqu'il y ait aussi, assurément, un rôle pour l'inspecteur général. Nous escomptons d'ailleurs qu'un inspecteur général soit nommé très prochainement.

M. Derek Lee: Il se fait qu'à mon avis la charge d'inspecteur général est elle aussi assez fondamentale. Nous ne sommes peut-être pas d'accord à ce sujet vous et moi, mais quoi qu'il en soit, je vous remercie pour cette réponse.

Pour mémoire, je voudrais demander un éclaircissement au témoin car il s'agit d'une question qui risque de surgir une autre fois. Il arrive que vous ayez le sentiment de ne pas vouloir ou de ne pas pouvoir répondre à des questions qui vous sont posées. Un peu plus tôt, vous nous avez dit à la suite d'une question qu'à votre avis, une réponse de votre part ne serait pas dans l'intérêt de la sécurité nationale. Pourriez-vous me justifier ce genre d'attitude. Pourriez-vous me dire où, dans la loi ou dans les usages parlementaires, vous pouvez justifier de ne pas répondre? Où avez-vous appris cela?

M. Ward Elcock: C'est assurément l'usage parlementaire, monsieur le président. J'ai bien compris la question de monsieur le député, et nous avons déjà lui et moi eu ce genre de discussion auparavant. J'imagine d'ailleurs que ce n'est pas le genre de discussion le plus profitable.

M. Derek Lee: Tout dépend du point de vue, monsieur Elcock, et je serais curieux de savoir où ce genre de réponse pourrait se trouver dans la législation ou la procédure parlementaire. Si vous ne le savez pas, il n'y a pas de mal à le reconnaître, parce qu'effectivement vous ne le savez peut-être pas. Mais savez-vous où cela se justifierait dans la législation ou la procédure parlementaire?

M. Ward Elcock: Pour ce qui est de la procédure parlementaire, je sais où cela se situe, monsieur le président, mais je ne pense pas que cette discussion... À mon avis, au bout du compte, cela ne sert pas à grand-chose.

M. Derek Lee: Pourriez-vous préciser votre pensée?

M. Ward Elcock: Au bout du compte...

M. Derek Lee: Pourriez-vous nous préciser où cela se trouve dans la procédure parlementaire?

M. Ward Elcock: Non, monsieur le président, je ne suis pas disposé à me lancer dans ce genre de discussion. Au bout du compte, je suis ici en qualité de représentant du ministre et c'est la sécurité nationale qui fixe les paramètres de ce dont je peux parler.

M. Derek Lee: Si vous permettez, monsieur le président...

Vous dites que ces paramètres sont fixés par la sécurité nationale. Pourriez-vous étoffer un peu cela et nous dire ce que vous entendez par là? Lorsqu'en tant que député, je consulte notre règlement, je ne vois ce terme nulle part dans mon glossaire, de sorte que je vous demande de m'aider à comprendre de quoi il s'agit. Vous parlez de «sécurité nationale», mais qu'est-ce que cela veut dire au juste dans le contexte parlementaire? Vous me dites que vous le savez, mais vous ne voulez pas me l'expliquer. J'aimerais que vous me donniez un petit coup de main.

• 1620

M. Ward Elcock: Comme je le disais, monsieur le président, il se fait malheureusement que dans la situation que j'occupe, je ne suis pas en mesure de fournir le renseignement demandé précédemment par un autre député pour des raisons de sécurité nationale. Je ne peux pas vraiment aller plus loin que cela, mais j'ajouterai que depuis très, très longtemps, la pratique parlementaire dans le cas des comités va dans le même sens, c'est-à-dire l'exclusion de ce genre de renseignement. Au bout du compte, si, dans sa sagesse, le Parlement décidait de changer d'attitude, il a parfaitement le pouvoir de le faire, mais je ne peux pas m'étendre davantage sur la question.

M. Derek Lee: Voilà un bon départ. Merci monsieur le président.

Le président: Monsieur Peter MacKay.

M. Peter MacKay: Cette décision vous appartient-elle en propre ou existe-t-il quelque chose que vous pourriez nous préciser qui vous donne la latitude nécessaire pour ne pas répondre à une question? Je pense que c'est un peu cela que vous demande M. Lee.

M. Ward Elcock: Monsieur le président, je pense que nous parlons ici d'un usage parlementaire, d'un usage propre au comité, qui remonte déjà à très longtemps. Il ne m'appartient pas de faire changer cet usage. Au bout du compte, si le Parlement souhaite le faire, il en a la possibilité mais, dans l'état actuel des choses, et dans la situation que j'occupe, je ne suis pas en mesure de vous fournir le renseignement qui m'a été demandé.

M. Peter MacKay: Ce ne sont pas les réponses aux questions posées par le député du Bloc québécois qui me préoccupent, je pense plutôt à ce que voulait entendre M. Lee... Je ne fais partie du comité que depuis peu de temps. Vous comparaissez régulièrement devant le comité depuis plusieurs années, et M. Lee fait également partie du comité depuis plusieurs années. Jusqu'à présent, je n'ai rien entendu d'autre que: «c'est l'usage». Les années précédentes, j'ai entendu des témoins dire qu'ils ne se réclamaient pas du secret et répondre à des questions très précises. Je me demande simplement ce sur quoi vous pouvez vous fonder, qu'il s'agisse d'une loi, d'une politique, d'un règlement ou d'une ligne directrice de votre service ou d'ailleurs, pour refuser ce genre de renseignement.

M. Ward Elcock: Monsieur le président, la procédure parlementaire n'est pas ma spécialité. Je ne tiens nullement à me lancer dans une discussion sur la procédure parlementaire, je ne pense pas que les députés trouvent ce genre de discussion particulièrement utile, puisque je ne suis pas expert en la matière. Si les membres du comité souhaitent tenir ce genre de discussion, ils devraient peut-être inviter quelqu'un d'autre.

J'occupe le poste de directeur du SCRS et, soyons francs, il y a des limites à ce que je peux communiquer. Pour l'instant, à moins que quelqu'un me prouve le contraire, je dois mettre dans la balance la sécurité nationale, c'est-à-dire l'intérêt qu'il y a de la protéger, et je ne suis donc pas en mesure de fournir une réponse détaillée à certaines questions qui m'ont été posées. Dans les cas où je peux répondre, je réponds aux questions qui me sont posées, mais si je ne puis pas, je ne répondrai pas, sauf si les règles changent.

M. Peter MacKay: C'est donc simplement, de votre part, un jugement de valeur sur l'éventualité que la sécurité nationale serait compromise si vous divulguiez les renseignements que nous vous demandons.

M. Ward Elcock: Au bout du compte, monsieur le président, c'est moi qui suis en quelque sorte le gardien de ce genre de renseignements, et je ne sais trop qui d'autre pourrait décider si oui ou non la sécurité nationale est en jeu.

M. Peter MacKay: D'accord.

Vous avez nié que les Américains ou quiconque vous auraient laissé entendre que leurs services de renseignements risquaient de devenir plus vulnérables en raison des compressions budgétaires ou des réductions imposées à votre service.

Nous savons qu'au mois de juin, notre solliciteur général, M. MacAulay—qui est notre patron—va rencontrer à Washington la procureure générale des États-Unis, Janet Reno, pour discuter avec elle de certaines de ces questions comme le terrorisme et les membres de certaines bandes criminalisées qui pénètrent aux États-Unis en passant par le Canada. Je suis sûr qu'ils vont tous deux parler également des financements publics accordés par le Canada et les États-Unis pour combattre le trafic de drogues et les autres types de contrebande, le crime organisé, le terrorisme, le télémarketing frauduleux, ainsi que le trafic des armes à feu, ce qui semble préoccuper beaucoup notre gouvernement.

À votre avis, que va-t-il se passer lors de ces entretiens? Le Canada va-t-il encore une fois se faire rappeler à l'ordre parce qu'il ne fait pas sa part? Vous avez dit dans votre intervention que si vous coûtez plus cher, c'est en partie parce que vous avez besoin de matériel technique. J'imagine que cela comprend le matériel de surveillance, ce qui vous donnerait les moyens de contrôler le trafic par Internet et toute cette sorte de choses. Quelle va être la position du Canada devant la procureure générale des États-Unis?

M. Ward Elcock: Monsieur le président, je ne veux pas donner l'impression de ne pas vouloir vous aider, mais je pense que je n'ai rien dit de la sorte. Ce que j'ai dit je crois, monsieur le président, c'est que personne ne m'a jamais fait valoir que notre service était incapable de faire son travail ou ne m'a dit avoir l'impression que nous n'avions pas les moyens de le faire. Au contraire, la plupart des tâches décrites par le député ne sont pas de ma compétence. Ce n'est pas moi qui suis responsable des enquêtes sur la fraude et les officines douteuses, entre autres.

• 1625

Cela étant, je crois que notre service a le devoir, et c'est ce qu'il fait, d'intervenir dans un certain nombre de domaines, et nous assumons ce mandat. J'ai également la conviction que les organismes avec lesquels nous travaillons ont également la conviction que nous assumons ce mandat. Cela étant, j'ai également dit que nous avions bien précisé que nous allions avoir besoin d'un complément de ressources financières pour pouvoir rester aussi efficaces qu'aujourd'hui.

Nous allons avoir besoin de toutes sortes de choses pour pouvoir affronter les problèmes technologiques qui s'annoncent. Que ces problèmes technologiques aient trait au codage ou à de nouvelles méthodes de communication, nous allons devoir relever le défi au niveau national, et lorsque je dis nous, il ne s'agit pas simplement de notre service, mais également de tous les corps policiers. Nous allons devoir investir. Mais à part cela, je pense que nous avons déjà les outils nécessaires pour faire le travail, et nous en avons d'ailleurs les moyens.

Le président: Merci, monsieur MacKay.

Monsieur John McKay.

M. John McKay: Monsieur Elcock, la dernière fois que vous avez comparu devant le comité, nous avons eu vous et moi un échange concernant certains Kurdes turcs, et je vous avais même remis une lettre, que vous avez prétendu à l'époque n'avoir jamais reçue, signée par dix Kurdes turques qui portaient des accusations assez graves contre le SCRS pour la façon dont il procède à ses vérifications de sécurité dans le cas des Kurdes d'origine turque. Je sais que vous avez cette lettre et je sais que vous l'avez lue, étant donné que je vous l'ai moi-même remise et que vous l'aviez lue sur place lorsque vous aviez comparu la dernière fois.

Permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire en vous citant le troisième paragraphe de cette lettre:

    Pendant nos entrevues de vérification, on nous a demandé à chacun de donner des renseignements sur nos compatriotes kurdes, et on nous a dit que notre entrée serait grandement facilitée si nous accédions à cette demande. Nous n'avons rien à cacher à notre propre sujet, mais nous ne voulons pas qu'on se serve de nous contre quelqu'un d'autre. Nous savons également que certains Kurdes qui sont citoyens canadiens ou immigrants reçus continuent à se faire harceler et intimider de la même façon.

Voilà des accusations fort graves, monsieur Elcock, contre le SCRS et les pouvoirs dont il dispose.

J'ai relu le mandat du SCRS, et j'y ai trouvé ceci: l'espionnage ou le sabotage qui porte préjudice au Canada ou à ses intérêts; les activités sous influence étrangère conduites au Canada, concernant notre pays ou portant préjudice aux intérêts de celui-ci; activités conduites au Canada ou concernant notre pays qui sont directement liées au recours à des actes de violence grave, et ainsi de suite; et activités visant à affaiblir le gouvernement du Canada dûment établi par la Constitution ou actes illicites clandestins destinés à le renverser.

Je vous pose donc la question suivante, monsieur Elcock: Comment faites-vous la transition entre le mandat fort clair du SCRS, qui vise à protéger les intérêts du Canada du point de vue de la sécurité, à ce genre d'enquête que vous conduisez en réalité en sous-traitance pour le ministère de l'Immigration afin de lui permettre d'accepter ou non certaines personnes? Je ne vois pas en quoi cela s'inscrit dans votre mandat. Pourriez-vous m'aider à faire le lien?

M. Ward Elcock: Monsieur le président, j'aurais plusieurs choses à dire à ce sujet. Tout d'abord, la question dont parle le député est actuellement sous enquête au comité de surveillance. Nous attendons une décision dans ce dossier. Nous avons effectivement présenté nos arguments au comité de surveillance et il y aura très prochainement, je l'espère, une décision qui permettra de clore ce dossier.

Le député a laissé entendre que je n'aurais peut-être pas reçu cette lettre. Effectivement—s'il en doute—, je n'avais pas reçu la lettre au moment où nous en avions discuté lui et moi, c'est-à-dire lors d'une de ces réunions.

S'agissant de notre mandat, le député voudra peut-être prendre connaissance des articles 14 et 15 de la loi.

M. John McKay: Quand a lieu cet examen conduit par le comité de surveillance? Est-il déjà terminé?

M. Ward Elcock: Je crois savoir qu'il est terminé. Nous attendons simplement la rédaction du rapport ou son dépôt mais, pour l'instant...

M. John MacKay: Nous pourrions donc raisonnablement nous attendre, d'ici un délai raisonnable, à une réponse du comité de surveillance concernant les activités du SCRS et les accusations portées dans cette lettre.

M. Ward Elcock: Il faudrait que vous demandiez au comité de surveillance quand au juste il entend déposer son rapport.

M. John McKay: Il n'empêche que c'est là une hypothèse vraisemblable que je formule, n'est-ce pas?

M. Ward Elcock: Ce ne serait pas une hypothèse déraisonnable, je vous le concède.

M. John MacKay: Je vous remercie.

Le président: Nous en sommes maintenant arrivés à la fin de la période prévue. Je sais qu'il y en a parmi vous qui souhaiteraient poser d'autres questions, mais nous avions réservé une heure. Certains d'entre vous m'ont dit, je le sais, qu'ils voulaient intervenir, et ils n'ont pu le faire, mais je pense que nous allons devoir conclure cette partie de notre réunion.

Monsieur Elcock, nous vous remercions d'être venu.

• 1630

Pour revenir à ce qui a été dit au sujet du fait que M. Elcock ne pouvait pas ou ne voulait pas répondre aux questions, vous pourriez peut-être prendre la chose en délibéré et revenir sur cette question si c'est là le voeu du comité. Je pense personnellement que le comité se sentirait plus à l'aise s'il avait les précisions nécessaires. M. Elcock est sans doute dans son droit, mais au moins cela permettrait de savoir au juste ce qu'il en est. J'ignore par contre si nous devons en saisir le comité de surveillance ou nos propres instances parlementaires, mais si vous le souhaitez, nous allons pousser le dossier.

Monsieur Elcock, je vous remercie encore une fois d'être venu.

M. Ward Elcock: Merci à vous.

Le président: Nous allons suspendre nos travaux pour cinq minutes pour passer ensuite à l'examen de diverses propositions de loi.

• 1631




• 1642

Le président: Nous reprenons l'étude de la Loi corrective.

Nous avons pour témoins, du ministère de la Justice, M. Kooiman, M. Macpherson et M. La Fontaine.

Messieurs, avez-vous un exposé ou des observations à nous faire au sujet de ce qui nous occupe?

M. Don Macpherson (conseiller législatif, Section de la législation, ministère de la Justice): Si vous le permettez, monsieur le président, je vous ferai une introduction...

Le président: Je vous en prie.

M. Don Macpherson: ...qui sera suivie par quelques observations de la part de mon collègue, Vincent Kooiman, qui parlera plus particulièrement de la partie II de la Loi corrective. Lorsque nous aurons terminé, nous pourrons faire appel à plusieurs autres témoins qui sont assis dans la salle et qui pourront vous exposer certaines dispositions et lois spécifiques.

Le président: Nous aimons beaucoup ceux qui sont assis sur les banquettes du fond.

M. Don Macpherson: Il vous suffit, monsieur le président, de me le faire savoir n'importe quand, et nous pourrons leur demander de s'asseoir à la table pour répondre à vos questions, peut-être après les introductions d'usage, en le faisant soit collectivement soit individuellement s'il s'agit d'une question concernant une loi qui est de leur ressort.

C'est avec plaisir que mes collègues et moi prenons part avec vous à cet examen de la Loi corrective. Même si cette question n'est pas aussi chargée d'intrigues au niveau international que le sujet qui vous a occupés jusqu'à présent, il n'empêche qu'il s'agit d'une collaboration extrêmement importante entre les rédacteurs parlementaires et les parlementaires eux-mêmes, collaboration qui nous permet d'actualiser la législation et de faire en sorte que le texte codifié soit bien exact.

Le Programme de correction des lois a été créé en 1975 dans le cadre d'une initiative de réforme des lois visant à accélérer l'adoption des modifications de forme à apporter aux lois du Canada. De fait, la réforme en question avait notamment pour objectif de faire participer les députés au remaniement législatif extrêmement important que certains de ces amendements de forme exigeaient.

Depuis le lancement du programme, huit projets de loi de cette nature ont ainsi été adoptés, et nous en sommes donc au neuvième. Le programme offre une procédure impartiale permettant d'apporter aux diverses lois des changements de forme mineurs, mais également d'en rectifier certaines erreurs sans trop mobiliser le temps des deux Chambres.

Il s'agit essentiellement d'une étude préalable conduite par les Comités des deux Chambres, et toute proposition qui fait l'objet d'une opposition de la part de l'un ou l'autre comité est automatiquement abandonnée. Seules les propositions approuvées sont réimprimées sous forme de projet de loi, lequel est déposé au Parlement, passe par les trois lectures habituelles et est adopté sans débat ou autre renvoi en comité.

• 1645

Nous en sommes ainsi à l'étape du comité, même s'il s'agit d'une étude préalable. Nous sommes ici pour vous aider à former la conviction que ces propositions sont conformes aux critères du programme et méritent d'être intégrées dans la loi.

La majorité des propositions de 1998 que vous avez sous les yeux ont été soumises par les ministères et organismes du gouvernement fédéral, mais certaines émanent également de particuliers. En effet, n'importe qui peut présenter une proposition visant à rectifier une erreur ou à apporter une modification mineure à une loi du Canada. Pour l'essentiel, les ministères et organismes du gouvernement fédéral ont soumis leurs propositions par l'entremise de leurs services du contentieux qui les ont alors transmises à la Section de la législation pour rédaction d'un texte approprié. Pendant le courant de l'été 1997 et de l'été 1998, notre période de mortes eaux puisque le Parlement était alors ajourné, nous avons réparti ces propositions entre nos rédacteurs et les propositions ont ainsi été rédigées selon un processus collectif.

Après la rédaction proprement dite, ma collègue francophone et moi-même avons vérifié si elles étaient bien conformes aux critères établis par le programme. Je pourrais d'ailleurs vous signaler que ces propositions ont ainsi été vérifiées trois fois à ce niveau: la première par les avocats du contentieux au moment de leur dépôt à la Section de la législation, une deuxième fois par les rédacteurs législatifs qui en ont rédigé le texte et une troisième fois, comme je vous le disais, par ma collègue francophone et moi-même lorsque nous avons assemblé les différentes propositions.

L'examen effectué par le Parlement est la clé de voûte du processus et l'examen conduit par votre comité doit vous permettre de vous convaincre du fait que tous les critères établis au titre du programme ont bien été respectés.

Je pourrais également vous mentionner que le comité sénatorial a fait rapport sans amendement de ces propositions au Sénat le 13 mai 1999 après une longue étude.

S'agissant des critères, si vous passez à la page 1a) des propositions, vous verrez à la rubrique «notes explicatives»...

M. Derek Lee: Monsieur le président, notre témoin nous cite un document, mais le seul dont j'ai copie est celui qui a été préparé par la Bibliothèque du Parlement. Je n'ai pas le texte de la proposition de Loi corrective en tant que telle.

Le président: Ces textes ont été envoyés à vos bureaux avant la relâche.

M. Derek Lee: Mes collaborateurs m'ont signalé qu'ils ne l'avaient pas reçus, mais je suis heureux de constater qu'on a au moins essayé de nous les faire parvenir.

M. Peter MacKay: Si cela peut vous consoler, Derek, l'opposition a reçu ces documents.

M. Derek Lee: À oui?

J'ai maintenant toutes les munitions dont j'ai besoin. Je vous remercie. Je suis prêt à poursuivre.

Le président: Je vous remercie.

Excusez-moi, monsieur Macpherson, veuillez poursuivre.

M. Don Macpherson: Les critères du programme figurent à la page 1a). Pour qu'un amendement puisse être intégré au titre du programme de correction des lois, il ne doit pas être controversable, il ne doit pas comporter de dépenses de fonds publics, ni porter atteinte aux droits de la personne, créer d'infraction nouvelle, ni assujettir une nouvelle catégorie de justiciables à une infraction existante.

Le principal critère du programme est que pour pouvoir suivre cette procédure accélérée sans faire l'objet d'un débat complet au Parlement, il faut que la proposition ne soit «pas controversable». Ce terme peut vous sembler flou. Pour vous aider, je vais faire référence à ce qu'avait dit le ministre de la Justice Otto Lang à ce sujet lors de son discours en deuxième lecture lorsqu'il avait annoncé le programme en 1975. Il avait dit ceci:

    Il ne sera pas difficile de prendre une décision à l'égard de ce critère: une proposition devient controversable dès lors que l'un ou l'autre des partis expriment une opposition.

Je pense que c'est là l'essence même d'un processus impartial et, dès lors qu'il y a désaccord sur le fond concernant l'une ou l'autre des propositions, celle-ci est automatiquement retirée.

Juste avant de commencer notre examen, je pourrais vous signaler l'existence d'un document qui a été envoyé par lettre au greffier de la Chambre des communes en date du 11 mai. J'ignore si vous l'avez reçu, monsieur Lee. Ce document comprend les 21 propositions qui ont été ainsi retirées—et que vous n'avez donc pas reçues—depuis le dépôt au Parlement le 5 novembre 1998.

• 1650

La plupart de ces propositions ont été retirées parce qu'elles faisaient partie de projets de loi déposés au Parlement après le mois de novembre 1998, et le document comprenait également la liste des propositions qui ont une fois encore été modifiées en raison de projets de loi déposés après le mois de novembre de l'an dernier. Aucun de ces changements ne contenait de nouvelles politiques ou de nouvelles propositions. Il y en a toutefois quelques-unes qui, après la lecture d'un rapport de la Bibliothèque du Parlement qui qualifiait certaines de ces propositions de controversables, ont été retirées volontairement par les ministères qui en étaient les auteurs.

Voilà donc l'introduction que je voulais vous faire mais, avant de céder la parole à M. Kooiman, je pourrais peut-être vous signaler, monsieur le président, quels sont nos autres témoins qui pourront répondre à des questions plus précises sur chacune des propositions.

Il y a Michael Richard qui répondra aux questions concernant la Loi sur les immeubles fédéraux, Jeff Richstone, qui répondra aux questions concernant les amendements à la Loi sur le droit d'auteur, Alain Prévost qui répondra à celles qui concernent les institutions financières, la Loi sur les banques et les autres lois fédérales sur les fiducies, les prêts, les compagnies d'assurance et autres institutions financières, et qu'on retrouve un peu partout dans la liste des propositions. Jim Buchanan répondra à vos questions concernant la Loi sur la faillite, Elizabeth Britt à celles concernant la Loi sur les marques de commerce, Anne Murphy, aux questions concernant la Loi sur les télécommunications et Luc Leduc, aux questions concernant la Loi sur l'assurance-emploi.

Une fois que vous serez prêts à poser des questions, ils pourraient venir prendre place à la table, monsieur le président, pour y répondre.

M. Kooiman a quelques remarques pour expliquer la partie II de la Loi corrective, qui corrige des renvois à la Loi de l'impôt sur le revenu.

Le président: Monsieur Kooiman.

M. Vincent Kooiman (conseiller législatif, Section de la réglementation, ministère de la Justice): Mesdames et messieurs, je tiens tout simplement à vous expliquer que dans la deuxième partie, les modifications proposées, même si elles se trouvent dans une loi corrective, ne sont pas vraiment des modifications car elles n'apportent pas vraiment de changement à la loi. En effet, c'est la dernière étape du processus de révision des lois, qui a commencé il y a si longtemps que certains oublient depuis quand dure cette révision.

Quand les Lois du Canada ont été révisées, on n'a pas inclus la Loi de l'impôt sur le revenu dans le texte principal des huit volumes principaux pour des raisons techniques et également en raison de la quantité de travail énorme que la Loi de l'impôt sur le revenu a représentée. Une fois terminée la révision du texte entier des autres lois quatre premiers suppléments, nous avons révisé la Loi de l'impôt sur le revenu, plus ou moins avec l'accord des fiscalistes. Donc, nous avons terminé les huit volumes et les quatre suppléments, et nous avons entrepris la révision de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Par conséquent, tous les renvois à la Loi de l'impôt sur le revenu dans les autres volumes des lois révisées sont les renvois à la loi telle qu'elle existait avant la révision. Après la révision de la Loi de l'impôt sur le revenu et l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi de l'impôt sur le revenu le 1er mars 1994, beaucoup d'années se sont écoulées entre temps, bien sûr, et nous avons commencé à passer toutes les lois en revue, une tâche qui est un peu plus facile maintenant grâce à l'informatique.

Toutefois, nous avons commencé à passer les lois en revue et nous avons vérifié tous les renvois à la Loi de l'impôt sur le revenu. Nous avons suggéré des changements au numérotage, au besoin, et dans un certain nombre de cas, des changements terminologiques également. C'était important, surtout pour la version française, parce que je pense que tout le monde le sait, un des buts principaux de la dernière révision des lois était d'améliorer la version française des lois. Dans bien des cas, les traducteurs ont dû rédiger la version française à la hâte, surtout dans le cas de lois plus anciennes, souvent après l'entrée en vigueur de la loi elle-même. Donc, il existe quelques différences au niveau de la terminologie.

• 1655

Il s'agit des articles 245 à 267, c'est-à-dire seulement 20 articles. Je pense que c'est à peu près tout ce que l'on peut dire sur le sujet: en fait, la terminologie change mais la loi ne change pas.

Le président: Merci, monsieur Kooiman. Les documents ont été envoyés aux membres du comité pendant la semaine qui a précédé la semaine de relâche. Monsieur Lee, je comprends que vous vous trouvez désavantagé parce que vous n'avez pas reçu ces documents.

Le Parti réformiste m'a fait savoir qu'il n'a pas pu envoyer un député pour assister à cette réunion, mais les réformistes sont satisfaits des documents qui nous ont été présentés.

Est-ce que les autres membres du comité ont des questions à poser aux fonctionnaires ou des préoccupations à exprimer? Les experts sont au fond, ils sont ici pour nous aider.

Monsieur Lee.

M. Derek Lee: Je ne voulais pas donner l'impression que je ne me suis pas préparé pour la réunion, monsieur le président. Heureusement, j'ai reçu l'excellent document préparé par notre propre personnel, donc je suis préparé, je suis armé et...

Le président: Nous en sommes très content, monsieur Lee. Allez-y.

M. Derek Lee: ...et peut-être dangereux. Je vais débuter en posant une question un peu bizarre, mais j'ai l'occasion de poser une telle question seulement tous les 10 ou 20 ans.

Puis-je demander à M. Kooiman quand les Canadiens peuvent s'attendre à une nouvelle version des Lois révisées du Canada, étant donné que la dernière version a été publiée en 1985?

M. Vincent Kooiman: Je ne saurais répondre à cette question, pour la simple raison que personne dans mon ministère ne semble en être au courant. Je pense parfois qu'il y a deux écoles de pensée. Certains estiment que nous devrions nous passer carrément des révisions, mais aussi longtemps que nous continuerons à travailler avec des textes imprimés, même si ce n'est plus moi qui m'en occupe... J'espère que la nouvelle version sera préparée d'ici 10 ans, ou quelle que soit la période convenue.

Des voix: Oh, oh!

Une voix: C'était quand la dernière fois?

M. Derek Lee: Que l'on indique que la réaction exprimait l'exaspération et l'incrédulité.

Bon, dans ce cas expliquez-moi quel est le problème. Le manque d'argent et de ressources?

M. Vincent Kooiman: Normalement...

M. Derek Lee: Les lois révisées qui ont 15 ou 20 ans de retard sont tout à fait inutiles; soyons francs.

M. Vincent Kooiman: Jusqu'ici il se passe entre 20 et 25 ans d'intervalle entre les révisions.

M. Derek Lee: Sauf en Ontario, où elles se faisaient tous les 10 ans. J'ai été gâté.

M. Vincent Kooiman: Oui, je parle de la révision des lois fédérales. De nos jours il y a tellement de lois qu'il serait peut-être préférable de le faire plus souvent...

M. Derek Lee: Très bien.

M. Vincent Kooiman: ...mais je ne pense pas être la personne...

M. Derek Lee: Merci.

J'ai une précision à vous demander, monsieur le président. Pensiez-vous que les membres du comité pouvaient soulever les questions qu'ils voulaient, ou prévoyez-vous une certaine séquence dans notre examen?

Le président: Non, je n'avais pas prévu une méthode particulière. Les membres du comité ont eu la possibilité d'examiner la documentation. Si les membres ont certaines préoccupations... C'est une question assez détaillée et assez complexe.

M. Derek Lee: Très bien.

Le président: Nous pourrions rester ici très longtemps si vous vouliez faire l'examen de chaque article.

M. Derek Lee: Oui, effectivement. Cela pourrait durer des journées entières.

Le président: Je pense qu'on peut se concentrer sur les questions qui intéressent particulièrement les membres du comité.

M. Derek Lee: J'ai pris un certain nombre de notes.

Le président: Allez-y.

• 1700

M. Derek Lee: Commençons par la Loi sur les chambres de commerce, c'est-à-dire l'article 29 de la loi.

Le président: Quelle page, monsieur Lee?

M. Derek Lee: Excusez-moi, c'est l'article 29 de la loi corrective. J'ai fait mon travail de préparation avec le document du comité, pas avec le document sur la loi corrective que nous venons de recevoir.

Le président: On m'informe que l'article 29 de la Loi sur les chambres de commerce a été retiré.

Est-ce bien cela, monsieur Macpherson?

M. Derek Lee: Il a été retiré? Alors tout mon travail...

Le président: Cela montre bien que...

M. Derek Lee: J'ai bien vu qu'il y avait quelque chose qui clochait.

Le président: Vous avez été très efficace.

M. Derek Lee: Passons maintenant à l'article 46 de la loi corrective, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

Le président: Apparemment cet article a également été retiré.

Il serait peut-être utile d'indiquer quels articles ont été retirés; cela pourrait nous épargner beaucoup de travail.

M. Don Macpherson: Voulez-vous que je les énumère, monsieur le président?

Le président: D'accord.

M. Derek Lee: Cela me plairait bien.

M. Don Macpherson: Les propositions qui ont été retirées sont les articles 15, 17, 29 à 32...

Le président: Voulez-vous ralentir un peu, monsieur?

M. Don Macpherson: Je les énumère: article 15, article 17, articles 29 à 32, article 34, articles 46 à 49—il s'agit des modifications apportées à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale—article 69, article 114, article 123, article 158, article 192, article 236, articles 262 et 263, articles 268 et 269, et articles 270 et 271. Certaines modifications ont été apportées au paragraphe 4(1), aux articles 56 à 58, et à l'article 267, et une nouvelle modification conditionnelle a été ajoutée au paragraphe 272(1). Voilà donc la liste exhaustive des changements effectués depuis novembre, lorsque les propositions ont été déposées.

M. Derek Lee: Cela réduit donc considérablement nos devoirs.

Ai-je bien compris? Est-ce qu'on a gardé l'article 50 de la loi corrective portant sur la Loi canadienne sur la protection de l'environnement?

M. Don Macpherson: Oui.

M. Derek Lee: J'étais donc handicapé lors de mon examen parce que je n'avais pas le document original. Je ne pouvais pas vérifier la formulation proposée; alors je ne vais pas traiter de cette question.

Au sujet de l'article 56, la Loi sur la concurrence, pourriez- vous nous expliquer encore sa raison d'être? Je n'ai pas vraiment bien compris.

M. François La Fontaine (avocat général, Section de la législation, ministère de la Justice): Il s'agit de rétablir la formulation qui se trouvait dans les Lois révisées, car le changement de libellé change quelque peu le critère. Puisqu'il ne s'agit pas d'un processus permettant de faire de nouvelles lois, la refonte ne peut qu'effectuer des changements au libellé, aux références, etc. La loi reste la même, comme l'indique l'article 4 de la Loi sur les Lois révisées du Canada (1985); alors nous rétablissons le texte original pour nous assurer que le critère reste le même.

• 1705

M. Derek Lee: Si je comprends bien, dans la formulation antérieure on parlait de «motifs raisonnables», et c'est l'expression que l'on veut rétablir.

M. François La Fontaine: Oui. Vous voyez le texte actuel à la page 20a) dans la note explicative. Vous voyez qu'au b) on parle de «motifs raisonnables».

M. Derek Lee: C'est la formulation actuelle. À mon avis, le fait de remplacer ces mots par «raisons» n'est pas simplement un changement de forme, et je vous demande donc de m'expliquer pourquoi vous pensez qu'une nouvelle formulation se justifie.

M. François La Fontaine: Encore une fois, c'est l'expression qu'on utilisait dans le texte antérieur à la refonte.

M. Derek Lee: Comment se fait-il que l'on ait changé le libellé dans la refonte?

M. François La Fontaine: Plaît-il?

M. Derek Lee: Comment se fait-il que l'expression ait été changée dans la refonte?

M. François La Fontaine: Il y a beaucoup de changements rédactionnels qui surviennent au moment de la refonte. Parfois cela fait partie de l'exercice: l'amélioration d'une disposition qui est peut-être trop peu claire ou trop longue. Au moment de la refonte, les rédacteurs peuvent par exemple diviser certains paragraphes et faire certains changements terminologiques.

Dans ce cas-ci, même si ce n'était pas l'intention, le remplacement de «motifs raisonnables» par «raisons» pourrait éventuellement modifier le critère, ce qui n'est pas autorisé dans les circonstances. Le critère doit rester le même. Alors, afin de supprimer toute ambiguïté, nous reprenons la formulation originale.

M. Derek Lee: Il s'agit donc de corriger une erreur commise lors de la refonte.

M. François La Fontaine: Effectivement.

M. Derek Lee: Cela m'apparaît relativement sérieux comme erreur dans les circonstances, mais ce n'est pas votre responsabilité, et, comme on l'a fait remarquer, cela s'est passé il y a au moins 15 ans. Savez-vous dans quelle refonte?

M. François La Fontaine: La dernière, celle de 1985.

M. Derek Lee: Très bien.

M. François La Fontaine: Comme M. Kooiman pourrait vous l'expliquer, c'est une procédure extrêmement longue et compliquée, avec des milliers de pages à réviser. Donc cela ne me surprend pas beaucoup que des erreurs se produisent.

M. Derek Lee: Oui. Je peux accepter cela. Je suis prêt à passer à une autre question, merci.

Je veux passer à l'article 73, qui porte sur la Loi sur le droit d'auteur. Dans cet article, on supprime le passage «les personnes ayant des déficiences perceptuelles». Selon l'explication qui est donnée dans les documents, la présence de ces mots est sans effet, car les frais supplémentaires ou l'exemption ne s'appliquent pas de toute façon à des personnes ayant des déficiences perceptuelles.

Je pense que c'est ça l'explication, mais puisqu'il s'agit d'une catégorie de Canadiens qui parfois ont une reconnaissance spéciale dans les lois et règlements, je voulais avoir la confirmation officielle qu'on ne retire absolument rien à cette catégorie de personnes.

• 1710

M. Don Macpherson: Monsieur le président, peut-on demander à l'avocat de Patrimoine Canada, M. Jeff Richstone, d'aider M. Lee?

Le président: Allez-y. Vous n'avez pas besoin de demander la permission de faire appel aux personnes-ressources assises au fond de la salle.

M. Jeff Richstone (avocat-conseil, ministère de la Justice): Je peux confirmer que cette modification est tout à fait sans objet. Je peux vous donner une longue explication, ou bien une courte et rapide. Si vous préférez la longue, je vais vous la donner.

M. Derek Lee: La courte, s'il vous plaît, mais je vous demanderais d'utiliser vos propres termes, pas les miens.

M. Jeff Richstone: Certainement.

Dans la première version du projet de loi C-32, à la première lecture, on a prévu dans la Loi sur le droit d'auteur une exception pour les personnes ayant des déficiences perceptuelles, selon laquelle la licence ne serait pas sans redevances, que ces personnes ou leurs représentants seraient obligés de payer des redevances.

À cause de cela, on a inclus la disposition à laquelle vous faites allusion, qui prévoyait que, puisque ces personnes devaient payer des redevances, il y aurait une structure tarifaire et des audiences sur les tarifs, et ces personnes ou leurs représentants pourraient déposer des oppositions. À la deuxième lecture à la Chambre, on a supprimé la disposition concernant les redevances. La licence est maintenant sans redevances. Les personnes ayant des déficiences perceptuelles ou leurs représentants peuvent bénéficier de l'exception sans payer de redevances.

Puisqu'on a supprimé les redevances, l'allusion aux oppositions au tarif est devenue sans objet, car le tarif n'existe plus. Étant donné qu'aucun tarif ne s'applique à cette exception, par conséquent il n'est pas nécessaire que les personnes ayant des déficiences perceptuelles ou leurs représentants déposent des oppositions à un tarif qui n'existe pas.

M. Derek Lee: Êtes-vous également d'avis que les personnes ayant des déficiences perceptuelles n'ont pas d'autres intérêts résiduaires qui doivent être considérés lors d'un examen du tarif?

M. Jeff Richstone: Oui, je pense qu'il n'y a pas d'autres intérêts, puisque les personnes ayant des déficiences perceptuelles ou leurs représentants ne paient pas de tarif.

M. Derek Lee: Merci.

Ensuite, il y a l'article 82, qui concerne la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif. J'ai été un peu tiraillé quand j'ai regardé cet amendement. Il supprime un délai d'avis qui existe depuis longtemps et qui a été prévu pour donner un délai d'avis très court, de sept jours, quand un particulier voulait intenter une poursuite contre la Couronne. J'imagine que la Couronne a invoqué cet article de temps en temps, mais le délai d'avis me semble extrêmement court. Je crois comprendre que l'amendement supprime tout simplement ce délai d'avis de sept jours. Est-ce que cela signifie qu'il n'y aura plus de délai d'avis?

M. Don Macpherson: C'est exact. Il s'agit d'un privilège spécial de la Couronne dans le cas de poursuites concernant la responsabilité de l'occupant contre la Couronne. Ce sont des cas de chute où la personne poursuit le gouvernement fédéral. La Couronne jouit d'un privilège résiduel par rapport à d'autres parties à un litige. Il y a un délai d'avis d'une semaine après la chute. Autrement, il sera peut-être impossible d'intenter une action en justice. Plus loin, l'article 12(2) dit que le défaut d'avis dans les sept jours peut être abandonné par le tribunal. Donc même la loi actuelle prévoit que le tribunal peut renoncer à cette exigence, mais normalement il faut donner avis dans les sept jours si on doit poursuivre la Couronne dans un cas de ce genre.

La modification découle d'une étude effectuée au sein du ministère de la Justice concernant les immunités de la Couronne en matière de preuve et de procédure. Le but de l'étude était d'éliminer les immunités qui ne sont plus justifiées. J'ai une citation de cette étude à vous lire:

    Si nous nous sommes engagés à éliminer ces immunités, c'est parce que nous reconnaissons qu'il est injuste que la Couronne bénéficie d'avantages juridiques à cause de certaines immunités ou de certains privilèges qui lui incombent simplement à cause de son statut, surtout compte tenu des attentes d'égalité qui découlent de la Charte des droits.

• 1715

Le rapport a donc recommandé que la Couronne soit mise sur un pied d'égalité avec d'autres parties à un litige. Il a recommandé aussi la suppression d'immunités concernant la preuve et la procédure qui ne sont pas nécessaires. Il s'agit d'un point mineur, car il n'y a pas beaucoup de poursuites contre la Couronne fondées sur la responsabilité de l'occupant. Les fonctionnaires qui poursuivent la Couronne sont couverts par la Loi sur l'indemnisation des agents de l'État. La modification vise essentiellement à mettre la Couronne sur un pied d'égalité avec d'autres parties à un litige.

M. Derek Lee: Est-ce qu'il y a un délai d'avis quelconque?

M. Don Macpherson: Non... le délai d'avis serait le même que celui qui s'applique au délai de prescription habituel pour d'autres parties à un litige.

M. Derek Lee: Donc il y a des délais de prescription.

M. Don Macpherson: Je pense qu'il y a des délais de prescription qui s'appliquent aux parties à ce genre de litiges.

M. Derek Lee: Ce qui m'inquiète, c'est que la Couronne n'a pas vraiment d'assurances—mais elle possède beaucoup de terres partout. Elle n'a pas forcément d'occupants sur ces terres; elle possède tout simplement les terres, soit depuis toujours, soit en fief simple ou autrement. Je n'ai pas pensé qu'un avis serait déraisonnable, simplement à cause de l'étendue si vaste des terres de la Couronne. Je ne pense pas uniquement aux édifices à bureaux, mais également aux 2,5 millions d'acres dans le coin sud-ouest de l'île de Baffin, par exemple, où il pourrait y avoir des chutes à toutes les deux heures.

Quoi qu'il en soit, vous estimez que la disposition proposée accorde une protection suffisante à la Couronne, et à la population—car il s'agit de l'intérêt public, et non pas seulement de celui de Sa Majesté—même sans avis.

M. Don Macpherson: Je pense que les mêmes délais de prescription qui s'appliquent à d'autres parties à un litige s'appliqueraient dans ce cas. Pour ce qui est de donner avis dans les sept jours qui suivent l'accident, aucune autre partie à un litige, à part la Couronne, ne bénéficierait d'un tel délai d'avis.

Vous serez peut-être rassuré d'apprendre qu'environ la moitié des provinces, je pense, ont également éliminé ces délais d'avis. Je pense que la moitié des provinces ont gardé le privilège de la Couronne, mais vous constaterez qu'à cet égard, même au paragraphe 12(2), le tribunal peut y renoncer; le tribunal peut déclarer qu'il est injuste d'exiger un délai d'avis de sept jours.

M. Derek Lee: Oui. Donc si on élimine le délai d'avis, tout ce qui reste, ce sont les délais de prescription...

M. Don Macpherson: C'est ça.

M. Derek Lee: ...pour intenter une poursuite, et vous jugez que cela constitue une protection suffisante de l'intérêt public. Quelqu'un a dû décider que l'avis n'était plus nécessaire—qu'il s'agisse d'un délai de sept jours, de 100 jours ou de 300 jours—qu'il n'était plus nécessaire de donner avis lorsqu'on intentait une poursuite contre la Couronne; on n'aurait que le délai de prescription. Est-ce bien la décision à laquelle on est arrivé?

M. Don Macpherson: Je crois que pour déposer une action il faudra en aviser la Couronne dès que l'exposé de la demande aura été déposé. Normalement, les plaideurs devraient recevoir un tel préavis. Si l'on abroge cette disposition, la Couronne n'aura pas de traitement préférentiel.

M. Derek Lee: Alors si je tombe à la suite d'un faux pas sur l'île de Baffin et si je décide cinq ans plus tard d'intenter des poursuites, croyez-vous que la Couronne sera suffisamment protégée? Parce que, sans préavis...

M. Don Macpherson: On appliquera le délai de prescription normalement prévu pour les cas où la Couronne est poursuivie en fonction de sa responsabilité civile. Qu'il s'agisse de poursuites intentées contre une société privée ou contre la Couronne, les mêmes dispositions seront appliquées en ce qui concerne le délai de prescription et le préavis. Nous sommes effectivement en train d'abandonner un privilège résiduel du Roi et de la Couronne, dans les cas où la Couronne fédérale recevait un traitement meilleur que celui accordé aux autres plaideurs. C'était une prérogative ou un privilège détenu par la Couronne, et nous pensons qu'il n'est plus nécessaire maintenant. Actuellement, on cherche à éliminer ces privilèges spéciaux. On abandonne les privilèges royaux, spécialement en raison de la Charte et du principe d'égalité. Il nous semblait que cette disposition n'avait pas d'importance en particulier.

• 1720

M. Derek Lee: Puis-je vous demander si cela va coûter quelque chose? Quelqu'un a-t-il étudié la question pour voir si la suppression d'une période de préavis serait coûteuse ou non?

M. Don Macpherson: Je crois que cette période de préavis de sept jours n'était pas rigoureusement appliquée par les tribunaux et que si un plaideur revenait un an plus tard, avant l'expiration du délai de prescription, pour déposer un exposé de la demande et si la Couronne s'y opposait parce qu'elle n'avait pas reçu un préavis de sept jours, le tribunal avait tendance à décider en faveur de la poursuite.

M. Derek Lee: Très bien. Nous savons bien qu'il n'y a pas de société d'assurance pour faire la gestion du risque dans ce secteur. Il y a seulement la Couronne, qui est aussi le propriétaire de tous ces biens immobiliers, et qui n'est pas prête à faire la gestion du risque. Nous avons notre propre police d'assurance, mais qui veille aux deniers publics? On vient d'abandonner une responsabilité... quoi qu'il en soit, j'accepte cette explication, qui me semble raisonnable, monsieur le président.

Le président: J'ai moi-même une question à poser à ce sujet. Les sept jours de préavis n'auraient-ils pas leur raison d'être dans un cas où il y aurait un problème évident sur une propriété de la Couronne parce que cela permettrait de corriger le problème très promptement afin d'éviter que d'autres personnes ne subissent les mêmes blessures?

M. Don Macpherson: Je regrette, monsieur le président, mais je n'ai pas...

Le président: Eh bien, je cherche encore à comprendre la raison d'être des sept jours. J'avais compris que dans la Loi sur l'immunité des personnes publiques, et dans d'autres lois de ce genre, l'une des raisons d'être du préavis était le fait que la municipalité ou la Couronne pourrait être avisée d'un problème existant sur sa propriété afin de pouvoir corriger la situation pour éviter que d'autres personnes ne tombent dans le même piège et ne subissent des blessures.

Ou est-ce que je rêve? Est-ce que c'est quelque chose qui sort des facultés de droit?

M. Don Macpherson: Je pense plutôt qu'il s'agissait d'accorder un privilège à la Couronne et de mettre un terme aux actions.

Peut-être que Michael Richard pourrait nous aider.

Michael, avez-vous quelque chose à ajouter au sujet des cas de responsabilité délictuelle?

Michael Richard travaille au sein du groupe qui traite des biens immeubles au ministère de la Justice.

M. Michael Richard (avocat général, Droit immobilier, ministère de la Justice): Monsieur le président, je pense que c'était peut-être là l'une de ses raisons d'être, mais il est clair que cela découle d'une prérogative de la Couronne et du droit de la Couronne à un traitement différent lorsqu'elle est poursuivie en raison de blessures subies par des personnes qui se trouvaient sur des terres de la Couronne.

Le président: Je ne m'oppose pas à la suppression des sept jours, parce que c'est tout à fait équitable. Mais j'ai une question: si c'était là l'une des raisons d'être de cette disposition, on la perd également. On pourrait annuler votre demande si vous n'avez pas donné un préavis de sept jours. C'est le premier délai de prescription... les sept jours n'ont aucun sens à mon avis. En tout cas, je ne veux pas vraiment m'y opposer, parce que je crois qu'il serait parfaitement équitable de supprimer le préavis. Mais je voudrais savoir si l'on ne perd pas également d'autres intentions que cette loi aurait envisagées. La Couronne est-elle souvent poursuivie en raison de sa responsabilité d'occupant?

M. Don Macpherson: Je crois que cela arrive de moins en moins souvent. On assiste à la privatisation d'un bon nombre d'organismes de la Couronne. Si la personne en cause est fonctionnaire, elle peut prendre des mesures en vertu de la Loi sur l'indemnisation des agents de l'État. Il me semble que le contexte a évolué depuis l'entrée en vigueur de la première Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif. On vise ici la modernisation de la loi par l'élimination des privilèges jugés archaïques. Je suis désolé de ne pas pouvoir vous expliquer l'origine de ce privilège-ci. Il se peut que les raisons que vous avez invoquées, monsieur le président, soient les bonnes.

Le président: Nous pourrions peut-être continuer, à moins qu'il n'y ait d'autres questions. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

M. Derek Lee: J'en avais un au sujet de l'article 109. J'ai l'impression qu'il s'agit de la même loi, n'est-ce pas? J'aimerais avoir une explication plus claire de la raison d'être de cet article. Il concerne les signatures des ministres.

• 1725

M. Michael Richard: Oui. L'article 18 de la Loi sur les immeubles fédéraux comporte une série de dispositions qui stipulent que, bien que la Couronne soit propriétaire des immeubles fédéraux, les ministres eux-mêmes sont réputés en avoir la gestion. Ils en ont la garde, et par conséquent ils sont habilités à administrer ces immeubles, à accorder des baux et des permis ou à céder un immeuble. Le ministre qui a les pouvoirs administratifs visent un immeuble fédéral est celui qui est habilité à signer les documents de transfert donnant effet aux transactions. En règle générale, bien sûr, les ministres ont délégué ces pouvoirs aux fonctionnaires.

Certaines difficultés se sont présentées, surtout dans les cas où la Couronne s'est portée acquéreur d'un immeuble il y a bien des décennies. Dans le cas d'une acquisition récente, il est très clair que tel ministère ou que tel ministre bénéficie de l'utilisation de l'immeuble, en a la garde, et donc est responsable de son administration.

Dans certains cas, l'acquisition d'un immeuble remonte à il y a des décennies, parfois à il y a cent ans. Les documents ministériels portant sur les biens immobiliers n'étaient pas tenus d'une façon aussi rigoureuse qu'aujourd'hui au gouvernement fédéral. Il y a des lacunes dans les documents, et il devient difficile de déterminer avec certitude, d'un point de vue juridique, quel est le ministre qui est responsable de l'administration ou du contrôle d'un immeuble. C'est un élément clé du régime établi par la Loi sur les immeubles fédéraux, parce que ce sont les ministres qui ont les pouvoirs administratifs qui sont autorisés à effectuer des transactions concernant l'immeuble.

Alors cette disposition est incluse ici pour deux grandes raisons. La première, et la plus importante à mon avis, c'est de protéger les parties qui acquièrent des immeubles du gouvernement fédéral, et d'assurer les parties que, lorsqu'un ministre ou un agent du ministre signe un document qui essentiellement lui attribue l'administration de l'immeuble, tout problème éventuel sera réglé à l'intérieur du gouvernement et ne pourrait nullement porter préjudice aux droits d'une tierce partie qui acquiert le droit de propriété de la Couronne.

Deuxièmement, dans les cas où il y a incertitude quant à savoir quel ministre est responsable de l'administration, cette disposition prévoit un processus qui permet à un ministre d'obtenir des assurances raisonnables en matière de responsabilité afin de signer un document.

M. Derek Lee: Merci.

J'ai une dernière observation à faire qui est liée à l'article 182, qui concerne la Loi sur l'Office national de l'énergie. On lit ici que l'article vise la création d'un nouveau pouvoir réglementaire afin d'interdire les travaux d'excavation autour d'un pipeline.

Je n'avais pas le libellé devant moi tantôt, mais il me semble qu'on pourrait soutenir que cet article a créé une nouvelle infraction, ce qui irait assez clairement à l'encontre d'une des exigences de la loi corrective. Je ne dis pas que c'est le cas. J'aimerais simplement poser la question. Il me semble que c'est le cas. Sans répondre à cette question—je ne vous demande pas de dire: oui, c'est vrai, ou non, ce n'est pas vrai—peut-être que celui d'entre vous qui est responsable pour cette partie des notes pourrait expliquer la raison d'être de cet amendement.

M. Don Macpherson: À mon avis, vous avez parfaitement raison de souligner la préoccupation à laquelle devrait s'attaquer ce comité avec cette proposition. Est-ce que cela crée une nouvelle infraction, ou une nouvelle catégorie de gens sera-t-elle passible d'une infraction qui existe déjà? Cela affecte-t-il les droits? Il y a un équilibre à rechercher.

Cette proposition côtoie de très près le programme de la loi corrective en ce qu'il pourrait y avoir des répercussions sur les droits de propriétaires privés même si aucune infraction n'est créée. Les contraventions aux règlements créés en vertu de ce nouveau pouvoir ne constitueraient pas une infraction au sens de la Loi sur l'Office national de l'énergie. Il n'y a aucune disposition dans la loi stipulant qu'une contravention aux règlements constitue une infraction.

• 1730

Néanmoins, les compagnies de pipeline doivent garder des dossiers et faire rapport des contraventions aux règlements à l'Office national de l'énergie, qui pourrait ensuite mener une enquête sur une contravention donnée à un règlement édicté en vertu de ce nouveau pouvoir et émettre une ordonnance d'observation. Il se pourrait alors qu'une personne qui creuse dans la zone où il est interdit de creuser—la nouvelle zone—pendant la construction d'un pipeline pourrait être poursuivie pour non-observation d'une ordonnance si l'office émettait une telle ordonnance.

Votre crainte est justifiée. Les gens seraient-ils dorénavant soumis à une loi à laquelle ils ne sont pas soumis à l'heure actuelle, et pourrait-on les punir s'ils se moquaient de cette loi?

Cette question a aussi été soulevée par M. Peter Noonan, de l'Office national de l'énergie, lorsqu'il est venu témoigner devant le comité du Sénat. La raison pour laquelle cette proposition a été approuvée et mise de l'avant, malgré certaines préoccupations à propos des droits des personnes, avait à voir avec la sécurité publique. Je vous cite la déclaration de M. Noonan. Il disait:

    Il y a un danger inhérent aux pipelines, et ils peuvent causer des événements tragiques. Pas plus tard que le 1er avril de cette année, un homme creusait près d'un pipeline à Savamna, en Alberta, et il a été tué lorsque son bulldozer a troué un gazoduc appartenant à la Nova Gas Transmission Limited. Et l'explosion qui en a résulté a créé une boule de feu de 30 mètres de haut, d'après des témoins de l'explosion.

La sécurité publique est le but premier recherché; il s'agit de régulariser les règlements qui ont déjà été édictés en vertu de la Loi sur l'Office national de l'énergie concernant les zones sujettes à des restrictions temporaires. À l'heure actuelle, d'après l'article 112 de la Loi sur l'Office national de l'énergie, creuser à moins de 30 mètres d'un pipeline constitue une infraction.

Le pouvoir de réglementation que nous cherchons maintenant à obtenir vise à interdire tout creusage à proximité d'un pipeline, c'est-à-dire que cela s'applique au-delà des 30 mètres de distance d'un pipeline, pendant une période de trois jours, à partir du moment où l'autorisation d'installer un pipeline est demandée jusqu'à ce que l'on ait piqueté le pipeline. Nous demandons au gouverneur en conseil l'autorisation d'interdire toute excavation à proximité du pipeline, et ce, pour une distance pouvant excéder les 30 mètres. La zone de 30 mètres ne peut être définie avant que le pipeline ne soit posé; alors, à partir du moment où il y a une demande pour poser un pipeline, on demande à l'autorité réglementaire de décréter une zone de restriction temporaire qui serait plus large que la zone de sécurité de 30 mètres de chaque côté du pipeline.

Cet amendement vient d'un avis exprimé par le Comité mixte permanent de l'examen de la réglementation, selon qui les règlements actuels sur les pipelines autorisant ces zones à restriction temporaire outrepassent le pouvoir législatif accordé par la loi. Ces règlements sur les pipelines autorisent des zones de restriction temporaire dépassant la zone de sécurité de 30 mètres pendant la période de trois jours qu'il faut pour poser les tuyaux.

Les dispositions n'ont jamais été contestées devant les tribunaux, mais le Comité mixte permanent de l'examen de la réglementation propose que la Loi sur l'Office national de l'énergie soit modifiée afin d'assurer que ces règlements soient bien intra vires, et c'est pour cela que la loi corrective contient cette modification.

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Il reviendra au comité de décider si la modification répond aux critères de la loi corrective. Empiète-t-on inutilement sur les droits des propriétaires fonciers afin de les protéger, d'une certaine façon, contre tout accident qui pourrait survenir pendant la période de trois jours pendant laquelle une compagnie de pipeline décide où exactement elle posera ses tuyaux? Cette préoccupation concernant l'élément sécurité est-elle plus importante que toute sanction éventuelle que quelqu'un pourrait subir en refusant de respecter les règlements sur l'installation d'un pipeline?

Je crois que l'avocat de l'Office national de l'énergie a dit, lors de ses remarques liminaires devant le comité sénatorial, que cette proposition était à peine acceptable en vertu d'une loi corrective. C'est le comité qui doit décider du juste équilibre. Cette proposition est-elle acceptable, c'est-à-dire, devrait-elle se trouver dans une loi corrective?

Je vous signale que le nom de la loi fournit quelques éclaircissements; son but n'est pas seulement de corriger des erreurs et certaines anomalies, mais aussi d'octroyer le pouvoir nécessaire pour régler des questions simples et non controversables afin de modifier les politiques par le truchement d'une loi corrective.

Donc, le comité doit trancher: est-ce que l'octroi d'un pouvoir réglementaire supplémentaire à l'Office national de l'énergie pour restreindre temporairement l'accès à une zone pendant les trois jours où l'on pose un pipeline constitue une modification non controversable?

M. Derek Lee: On pourrait également se demander si la modification proposée soumettrait une nouvelle catégorie de personnes à une infraction existante? Je me rends compte que la modification proposée ne crée pas une nouvelle infraction, mais elle élargit la zone à accès restreint, et donc elle élargit la zone où une infraction pourrait avoir lieu.

Compte tenu de l'origine du problème et de l'encouragement du comité mixte permanent, je ne vais pas pousser la question plus avant. La réponse me satisfait, monsieur le président, et ma liste se termine là.

Le président: Merci, monsieur Lee.

Madame Carroll, avez-vous des inquiétudes ou des observations?

Mme Aileen Carroll: Non, monsieur le président.

Le président: Donc, il semble que les membres du comité n'ont pas d'autres inquiétudes ou observations.

Nous vous remercions de votre présence ici aujourd'hui ainsi que des informations que vous avez pu nous fournir. Vous connaissez certainement très bien vos dossiers et vous avez pu répondre à nos questions. Merci.

Monsieur Lee.

M. Derek Lee: Allons-nous expédier le projet de loi maintenant ou plus tard?

Le président: Nous allons nous en informer, monsieur Lee. Nous ne savons pas exactement comment procéder à ce moment-ci. S'il nous faut une motion, nous n'avons pas le quorum pour en adopter une.

M. Derek Lee: Ah, bon. Nous en ferions rapport à la Chambre. Merci.

Le président: Merci d'avoir soulevé la question. Nous sommes déjà en train de nous en informer. Cela ne se produit pas très souvent. Une fois tous les 15 ans, n'est-ce pas?

La séance est levée.